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I Hull. SOC. Chim. Belg., 66, pp. 169-191, 6 fig., 1957 ~ CONTRIBUTION A L’ETUDE DES COMPOSES SESQUITERPENlQUES I. - Etude structurale du tricyclovktivhe de l’essence de v6tiver du Congo Belge Par G. CHIURDOGLU et P. TULLEN (Bruxelles) Le tricyclov6tiv8ne est is016 pour la premiere fois a l’ktat pur par distillation et par chromatographie. Ses const antes physiques et ses spectres Raman et infra-rouge sont dkcrits. La structure du tricyclov6tivkne est determink conjointement par des mkthodes chimiques et spectroscopiques, dont on trouvera un compte-rendu schematique succint dans le tableau, en fin de ce memoire. Le tricycloyktivkne (I) est le 2-mkthylkne9-isopropyl-3,6-endomkthyl8ne- (0,3,5)-bicyclodt5cane Ce sesquiterpene (C% = 88,39; H% = 11,76) accuse les constantes ci-apr8s : 20 20 Ebo,, = 81-82’; dm/, = 0,9340; % = 1,5040; [& = + 13011 RMD obs. = 64,67; calc. = 64,4Q. INTRODUCTION Les mkthodes fondamentales de la chimie sesquiterpknique sont dues a RUZICKA (l) qui les a introduites dans le domaine en 1920. L’kvolution tardive de cette chiniie rCsulte de la nature et de l’insuffisance de ces methodes v i s - h i s de la grande diversit6 des composCs sesquiterpiniques rencontrks dam la nature. Pour r6soudre le probleme de leur structure, il a fallu attendre le dkveloppement de techniques nouvelles qui ont permis d’aniender et de complkter les mkthodes de Ruzicka. La connaissance d’un coniposC nature1 comporte trois phases : l’isolement et la purification du compose etudik, 1’Ctude structurale proprement dite et, enfin, la synthbse qui permet de confirmel- la validit6 de la structure proposCe. (l) L. RUZICKA, Bull. Soc. Chim., 4, 1304 (1937).

Contribution à l'Étude des Composes Sesquiterpeniques I.—Ètude structurale du tricyclovétivène de l'essence de vétiver du Congo Belge

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I Hull. SOC. Chim. Belg., 66, pp. 169-191, 6 fig., 1957 ~

CONTRIBUTION A L’ETUDE DES COMPOSES SESQUITERPENlQUES

I. - Etude structurale du tricyclovktivhe de l’essence de v6tiver du Congo Belge

Par

G. CHIURDOGLU et P. TULLEN (Bruxelles)

Le tricyclov6tiv8ne est is016 pour la premiere fois a l’ktat pur par distillation et par chromatographie. Ses const antes physiques et ses spectres Raman et infra-rouge sont dkcrits.

La structure du tricyclov6tivkne est determink conjointement par des mkthodes chimiques et spectroscopiques, dont on trouvera un compte-rendu schematique succint dans le tableau, en fin de ce memoire.

Le tricycloyktivkne (I) est le 2-mkthylkne9-isopropyl-3,6-endomkthyl8ne- (0,3,5)-bicyclodt5cane Ce sesquiterpene (C% = 88,39; H% = 11,76) accuse les constantes ci-apr8s :

20 20 Ebo,, = 81-82’; dm/, = 0,9340; % = 1,5040; [& = + 13011 RMD obs. = 64,67; calc. = 64,4Q.

INTRODUCTION

Les mkthodes fondamentales de la chimie sesquiterpknique sont dues a RUZICKA (l) qui les a introduites dans le domaine en 1920. L’kvolution tardive de cette chiniie rCsulte de la nature et de l’insuffisance de ces methodes v is -h is de la grande diversit6 des composCs sesquiterpiniques rencontrks dam la nature.

Pour r6soudre le probleme de leur structure, il a fallu attendre le dkveloppement de techniques nouvelles qui ont permis d’aniender et de complkter les mkthodes de Ruzicka.

La connaissance d’un coniposC nature1 comporte trois phases : l’isolement et la purification du compose etudik, 1’Ctude structurale proprement dite et, enfin, la synthbse qui permet de confirmel- la validit6 de la structure proposCe.

(l) L. RUZICKA, Bull. Soc. Chim., 4, 1304 (1937).

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On s’est trop longtenips contente d’ktudier des produits de puret6 douteuse, obtenus par simple distillation suivie d’un ti aite- ment chimique approprie, en l’occurence la formation des chlorhydrates (*).

Dans la plupart des cas, ces mkthodes sont insuffisantes et dangereuses et ne peuvent conduire qu’h des melanges.

Ce manque d’efficacite des moyens de separation utilisks est certainement l’un des principaux CIerxents ayant freink l’evolution de la chimie sesquiterphique.

Ce n’est que depuis une dizaine d’annees, grcice au perfec- tionnement des techniques distillatoires et a l’utilisation gCneralide des methodes chromatographiques, qu’on est parvenu B separer des derives sesquiterpeniques purs.

Toutefois, ces methodes sont longues et l’obtention d’une quantite suffisante de produit pur, indispensable pour 1’Ctude structurale, est souvent laborieuse.

La seconde phase est 1’Ctude structurale proprenient dite. Les moyens d’investigation structurale proposes par RUZICKA

sont la dkshydroghation et la dkgradation oxydante, la rkgle iso- prenique etant l’hypothbse de travail.

La deshydrogknation permet de passer des structures sesquiter- pkniques de types decalanique et hydroazulenique aux structures aromatiques correspondantes. Celles-ci sont facilement identi- fiables, par l’interniediaire des picrates ou des trinitrobenzenates, par exemple.

La dkgradation oxydante a pour but de scinder, au nioyen d’un oxydant adkquat, la molecule etudiee en fragments plus simples, plus facilement identifiables.

La regle isoprinique constitue l’hypothese de travail. Elle veut que les squelettes sesquiterpeniques soient formCs de restes isopreniques about&, le plus frequemment, t$te a queue (p-men- thane, caniphre), parfois d’une faqon quelconque (fenchone, artemisiacktone).

Rkcemment, Ruzicka ( z ) a precise l’applicabilite de la rkgle isoprenique en enonqant la r2gle furnksoliqur. Celle-ci signifie que tous les sesquiterpenes peuvent 2tre obtenus au depart du

(*) Nous nous attacherons plus particulierement dans cette introduction

(2) L. RUZICKA, Experientia, 9, 357 (1953). A l’etude des hydrocarbures sequiterpeniques.

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TRICYCLOVETIVENE 171

furnksol, par differents modes de cyclisation de l’ion carboniuni intermediaire correspondant :

L’utilisation de ces mkthodes a permis de rCsoudre un certain nombre de cas relativement simples. Cependant, il en est d’autres, ou elles se sont montrees tout B fait insuffisantes.

La dkshydrogenation, avons-nous dit, ne s’applique qu’aux derives sesquiterpeniques bicycliques, B structure hydronaphta- lenique ou hydroazulknique.

Certains autres sequiterpenes mono- ou tricycliques se lais- sent, cependant, tgalenient deshydrogener; mais dans ce cas, il y a soit cyclisation soit dicyclisation. En general, ces derives ne se laissent pas deshydrogener.

C’est le cas de quelques sesquiterpenes importants, dont la structure a etC dCterminCe recemment : caryophyllene (1950) (3)

humulene (1952) (4), ctdrene (1953) (5), longifolene ( I 954) (6) (’). De toute f q o n , n i h e lorsque la deshydrogbnation donne des

rksultats, ceux-ci doivent Stre interprktks avec prudence. De nom- breuses reactions secondaires peuvent avoir lieu, par exemple des transpositions ou du cracking.

Le grand inconvenient de la dkgrudutiori oxydunte est la com- plexitk du melange rkactionnel. Elle conduit, en general, a plusieurs derives de coupure qu’il est difficile, d’une part, de separer et, d’autre part, de caracteriser dans le melange.

(3) F. Som, L. DOLEJS et J. PLIVA, Coll. Czech. Chem. Comm., 15, 186 (1950); 19, 559 (1951); D. H. R. BARTON et A. S. LINDSEY, J. Chem. Soc., 2988 (1951); 4659 et 4665 (1954); G. R. RAMAGE et coll., ibid., 4336, 4341 et 4345 (1954).

(4) G. R. CLEMO et J. 0. HARRIS, ibid., 665 (1952), 184 (1953); F. SORM et coll., Coll. Czech. Chem. Comm., 19, 570 (1954).

(5) G. STORCK, J . Am. Chem. SOC., 75, 329 (1953); 77, 1072 (1955). P. A. PLATTNER et coll., H K ~ v . Chim. Acta, 36, 1845 (1953).

(6) G. DUPONT, R. DULOU, P. NAFFA et G. OURISSON, Bull. SOC. Chim., 1075 (1954); P. NAFFA et G. OURISSON, ibid., 1115 (1954), 1410 (1954); P. OURISSON et G. OURISSON, ibid., 1415 (1954); G. OURISSON, ibid., 895 (1955).

(7) R. H. MOFFET et D. ROGERS, Chem. and Znd., 916 (1953).

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De plus, lorsqu’on arrive a caractkriser un ou plusieurs pro- duits d’oxydation, il n’est pas toujours possible de faire la synthese des rksultats obtenus et de remonter ainsi au squelette de depart.

I1 fallait, pour complkter ces niethodes fondamentales, une technique nouvelle, non destructive, permettant de suivre chacun des stades de l’etude structurale, et de caractkriser, dans les mClan- ges, les produits de degradation et de transformation.

C’est SORM (8) qui introduit et g6nCralise l’emploi de cette technique nouvelle, la spectroscopie injiarouge, dans le domaine sesquiterpenique. Plus est, il propose un nouveau moyen d’iden- tification des sesquiterpenes, bas6 sur la comparaison des spectres d’absorption infrarouges des hydrocarbures satures obtenus par hydrogination complete des differents sesquiterpenes. I1 obtient ainsi une nouvelle classification des sesquiterpknes comportant quatorze types de perhydrosesquiterpenes (”.

L’intCrEt de ce procCde est Cvident. Toutefois, a notre avis, il conviendrait de ne manipuler, pour &re compares, que des hydroghats d ’kquilibre dont l’obtention pourrait se faire par traitenient sur Ni de Zelinsky, vers 180”.

Par ailleurs, la spectroscopie est devenue d’un einploi courant et fournit souvent, a elle seule, des renseignements precieux. Ses possibilitks ont ete dCcuplCes ces dernieres annees, gr2ce ii l’eta- blissement de toute une skrie de tables de correlation.

UtilisCe dans la caractirisation de tous les produits de trans- formation obtenus au cours de l’etude structurale, elle permet, au depart de tres petites quantitks de substance (*), d’obtenir rapidement des indications, difficiles a atteindre par les mkthodes chimiques seules.

Ainsi, les nikthodes de la chimie sesquiterpenique se sont orientees vers une utilisation conjointe des procedes chimiques et spectroscopiques, intimenient lies.

(8) J. PLIVA et F. SORM, Coll. Czech. Chem. Comm., 14, 274 (1949);

(*) Une vingtaine de milligrammes suffisent. Avec les solides, on peut F. SORM, V. HEROUT et J. PLIVA, Uspekhi Khimii, 22, 564 (1953).

optrer au depart d’un milligramme.

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TRICYCLOV~TIV~NE 173

ETUDE STRUCTURALE DU TRICYCLOVETlVENE, SESQUITERPENE DE L’ESSENCE DE VETTVER

I -- TRICYCLOVETIVEWE

1 - Separation et fractionnernent des hydrocarbiires sesquiter- pkn iques

L’essence de vktiver, utilisCe en parfumerie, s’obtient par entrainement A la vapeur d’eau du contenu des racines de Veti- veria zizanioides Stapf, plante graminCe du genre Andropogon Muricatus Retz, commune aux nombreuses regions tropicales et subtropicales. Notre Cchantillon d’essence est de provenance congolaise.

L’essence de vCtiver a suscitC quelques travaux prkliminaires. Signalte pour la premikre fois vers 1900 P), son ttude est reprise successivement, en 1912 par Semmler(lO), en 1928, par Ru- zicka (l9, et, en 1939, par Pfau et ‘Plattner (lZ). Ces recherches montrent la presence dam I’huile d’une fraction hydrocarbonee, d’une fraction alcoolique, d’un ester et d’une fraction cttonique composee des cc- et p-vttivones.

Une Ctude ultCrieure (13) conduit & la structure de ces dernikres. L’essence de vttiver brute de dkpart accusait les constantes

suivantes : cJZol4 =; 1,001 H:’ == 1,525 [a]:’ = f24030.

Apres neutralisation, elle subit deux tours de distillation sous vide. Quatre kilogrammes permettent la skparation de 800 granimes ( m 20%) d’une fraction enrichie en hydrocarbures sesquiterphiques, Eb,,, = 750-950. La fraction est alors traitee par percolation sur silicagel d’activiti I (*), afin de sCparer les restes des produits

(*) Nous avom applique au silicagel la methode de standardisation

(9) E. THEULIER, Bull. SOC. Chim., 25, 454 (1901); P. GENVRESSE et G. LAN-

(lo) F. W. SEMMLER, F. RISE et H. SCHR~TER, Ber., 45, 2347 (1912). (I1) L. RUZICKA, E. CAPATO et H. HUYSER, Rec. Trav. Chim. P. B. 47,

(12) A. S. PFAU et P. A. PLATTNER, Hel. Chim. Acta, 22, 640 (1939). (13) A. S. PFAU et P. A. PLATTNER, Helv. Chim. Acta, 23, 768 (1940). (I4) H. BROCKMANN et H. SCHRODDER, Ber., 74, 7 3 (1941).

proposk par BROCKMANN pour l’alumine (14).

GLOIS, Compt. Rend., 135, 1059 (1902).

370 (1928).

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oxyginis. Elle bout, alors, sous 0,4 nim de 700 A 80°, et son spectre ne renferme aucune des bandes caractkristiques des groupes hydroxyle, carbonyle ou ithoxycarbonyle. Telle quelle (600 gr), elle reprksente 15% de l’essence brute.

La skparation des constituants de cette fraction a CtC efTectuee, d’une part, par chromatographie (*) et, d’autre part, par distillation.

a) Fructionnement par chromatographie Trois tours de chromatographie (rapports 1/20; 1/30 et 1/40)

suivis de deux autres, sur un grand exctts de silicagel, permettent la separation de deux constituants aux spectres et aux constantes diffirents. L’hydrocarbure de t&te est le tricyclove‘tivbze. 11 s’est avCr6, par la suite, que le constituant de queue provient de la dkshydratation de la fraction alcoolique tertiaire (* *) presente dans l’huile de vitiwer.

b) Fructionnernrnt par distillation La separation par chromatographie conduit 21 un produit

trks pur, mais en petite quantiti. Pour obtenir des quantitks plus importantes, nous avons eu recours B la distillation fractionlike, sous vide, au moyen d’une colonne Todd de 20 plateaux thioriques.

Au dipart de la fraction 70”-800/0,4 mm. nous avons obtenu, aprtts trois tours de distillation, une fraction de tCte dont le spectre et les constantes sont ceux de I’Cchantillon isolC par chromato- graphie.

Ajoutons que ces deux modes de &paration nous ont niis en possession de quarante grammes de tricyclovetivene pur.

2 -- Tr icyclo vdtivhne. Constantes el spectres

Cet hydrocarbure sesquiterpinique C,,H,, represente, en

(*) Pour ce qui est de la chromatographie, nous avons auparavant refait le travail de Arbousov et Issaeva (l5). Contrairement aux conclusions de ces derniers, nous avons constate que les terptnes ne sont pas isomCris6s par passage sur colonne de silicagel. Nos rhultats rejoignent d’ailleurs ceux d’autres auteurs (l6) (17).

-

(**) L’etude de cette fraction fait I’objet d’un autre travail. (I5) B. A. ARBOUSOV et S. G. ISSAEVA, Zsv. Ak. Nauk, Otd. Khim. Nartk,

(I6) V. E. TICHTCHENKO et G. A. RADOUKOV, J. Prikl. Khim. S. S. S. R. , 6,

(17) H. H. TENNEY et F. E. STURGES, Ann. Chem., 26, 946 (1954).

5,843 (1953).

691 (1951).

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TRICYCLOV~~TIV~NE 175

poids, 5 a 6% de I’huile essentielle congolaise. C’est u n corps incolore, assez fltiide, possidant une odeur fine.

Constantes EbO,, = 81-82’ Eb,o == 120-122’ 4 0 ,a = 0,9340 n :’ == 1,5040 “1:O = +13011 RM,obs = 64,67 RM, calc = 64,40 (*).

An a1 yse e‘l&nzen taire 4,452 mgr donnent 14’42 mgr de CO, et 4,68 mgr de H,O. Calculi : 88,25% C et 11’75% H. TrouvC : 88,39”/, C et 11,760/, H. Ci-aprtts, nous indiquons les spectres Raman et infra-rouge.

Nous avons CtudiC la dispersion du pouvoir rotatoire du tricyclo- vitivttne. I1 en risulte que celui-ci est exempt d’impuretis actives.

Fig. 1 - Spectre Raman du tricyclovetivbne.

J iSp0 1100 %LOO W O %roo i300 i a w t i 0 0 1000 900 800 )DO cl.)-a

Fig. 2 - Spectre infrarouge du tricyclovetivbne.

(*) Calcule d’aprks le tableau des rkfractions atomiques et des increments de Eisenlohr.

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3 - Etude du tricyclove‘tivPne rt du tricyclove‘tivane. Evaluation du nombre de groupes mithyles a) TricyclovPtivPne L’exanien du spectre infrarouge du tricyclovPtivPne (Fig. 2)

Le tricyclovitivkne renferme une double liaison du type rCvkle plusieurs details structuraux importants :

R,R,C == CH,, semicyclique : 6 (-C-H) : 890 cm-’; 28 (=C-H) : 1780 cm-’;

v (C=C) : 1639 cm-’. Cette double liaison est unique : l’indice d’hydrogkne (0,98 H,)

et l’ozonolyse quantitative (1,03 C==C) en fournissent la confir- mation. Le tricyclovitivkne est donc un hyd1 ocarbure tricyclique, suivant la classification de Semniler (18).

Aucun des trois anneaux du tricyclovktivkne ne possede trois OM quatre atomes de carbone. Ceci decode de I’absence, dans le spectre, de bandes situkes respectivement a 910-920 cm-’ et 1010-1020 cm-’.

Enfin, l’etude structurale spectroscopjque conduit ii l’hypothkse de la presence d’un groupe isopropyle dans la molecule du tricqclo- vetivkne,du fait de la presence, dans son spectre, du doublet en 1387 - 1364 cm-’ en mCme temps que de la bande en I 167 cm-l (fig. 2).

Nous avons, ensuite, Pvalue‘ le nombre de groupes me‘thyles prksents dans la molecule, par la mithode spectroscopique proposee ricemment par Henry et Ourisson (Ig). Celle-ci est basee sur la determination de l’intensite d’absorption. dans l’infrarouge, due aux groupes mtthyles dam la region des vibrations de dCformation symetrique des liaisons C-H de ces groupes. La frequence de ces vibrations se situe a 1370 cm-l. La presence du groupe isopropyle provoque le dtdoublement de cette bande : 1387 et 1364 cm-’, dans le cas d u tricyclovetivbne. Dans certains cas favorables, on voit le maximum d’absorption dfi aux groupes CH, apparaitre entre les maxima dus au groupe isopropyle ou gCminC.

Mais il arrive que les groupes CH, absorbent a une frtquence legerement digerente de 1370cm-’ et, dans ce cas, on observe un doublet au lieu d’un triplet.

(I8) F. W. SEMMLER, Ber., 36, 1033 (1903). (I9) D. H. R. BARTON, J.E. PAGE et E. W. WARNHOFF, Chem. and In-

dustry, 1950, 220; id. J. Chem. Soc. 1954, 2715. L. HENRY et G. OURISSON, Bull. SOC. Chim., 99, (1955).

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C’est le cas du tricyclovitivkne. Du point de vue quantitatif, dans un tel systkme de bandes

rapprochkes, l’intensitk d’absorption ne peut plus Ctre mesurCe par la valeur du log Io/I, au maximum d’absorption. 11 faut procCder par intigration graphique.

Le tricyclovktivkne renferme une double liaison semicyclique. Si nous hydroginons cette double liaison, le produit obtenu, le tricyclovitivane, comportera un groupe mtthyle de plus que le tricyclovktivbne.

La mkthode d’evaluation par ktulonnuge interne est basCe sur cette observation. Les coefficients d’absorption intigrke moli- culaire de deux substances de ce type doivent &re approximative- ment dans le rapport n/n + I .

L ’application de ce prockdi au systkme tricyclovCtivkne- tricyclovitivane indique la presence de deux groupes mkthyles dans la molicule du tricyclovktivkne. Ces groupes sont Cvidemment ceux de l’isopropyle et on en conclut que le tricyclovktivkne ne renferme pas de liaison C-CH, isolke.

b) Tr ic yclo vet ivane L’hydrogtnation du tricyclovitivbne donne le tricyclovkfivune.

Eb.0J = 640 d20,* = 0,9220 n, 20 = 1,4915

= +7078 RM, obs. = 64’80 RM, calc. = 64,87.

Analyse ClCmentaire : Calculi : 87,30% C et 12’70% H. TrouvC : 87’51% C et 12,52% H. Le spectre infrarouge de celui-ci (Fig. 3) cornpark aux spectres

Fig. 3 - Spectre infra-rouge du tricyclovktivane. 8

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des perhydrosesquiterpttnes du catalogue de Sorm, montre que le tricyclovCtivtne constitue un type sesquiterpiniyue nouveau.

Cet ensemble de risultats, permet, dts 6 prisent, une hypothese structurale :

Le tricyclovktivene est un hydrocurbure sesquiterpknique tri- cyclique, dont aucun des anneaux ne comporte trois ou quntre atomes de carbone. I1 possPde une double liaison semicyclique, un group isopropyle, mais pas de liaison C-CH, isolke.

L'hydrogknation du tricyclovktivene conduit au tricyclovktivane. Le squelette de celui-ci ne correspond h aucun des quatorze types suturPs dPcrits par Sorm.

4 - Dkshydrogknution du tricyclovitivPne

Le tricyclovetivtne trait6 par du sClCnium durant deux heures, 6 2800-3000, fournit un dCshydrogCnat fortement color6 en bteu. Au moyen de l'acide phosphorique concentri, on en sipare I'azulC- nique. Ce derive forme un trinitrobenzknate fondant ?t 1480 et ne donnant pas de depression avec un Cchantillon (*) du trinitro- benzknate de ~Ctivazulttne. Notre azulinique presente, en outre, des spectres visible et ultraviolet identiques B ceux dCcrits pour le vCtivazul&ne (") ("). Nous ne les indiquerons pas dans ce travail; seul est donnC ici le spectre infrarouge, inCdit B notre connaissance (Fig. 4).

Notons le rendement relativement ClevC ( I 4%) en vCtivazulkne

I

10

Fig. 4 - Spectre infrarouge du vetivazulene. I_.~

(*) Nous le devons au Docteur Y.-R. NAVES, Directeur Scientifique

(m) B. Susz, A. S. PFAU et P. A. PLATTNER, Helv. Chim. Acta, 20, 469

(21) M. GORDON, Chem. Rev., 50, 127 (1952).

des Etablissements L. Givaudan et Cie, (Vernier-Geneve).

(1 937).

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TRICYCLOV~TIV~NE 179

obtenu ici eu Cgard a ceux de Naves (2,3%) et de Pfau et PIattner (3%) rCalisCs au dCpart des 01- et p-vCtivones.

La fraction non azulinique du dkshydroginat, distillie sous vide puis chromatographike, fournit un dCrivC naphtalinique (d2,,,4 ==- 0,9700, nEo = 1,5836; 21 % de rendement) et I'on rCcu- pitre, en outre, 20% du tricyclovitivkne mis en ceuvre.

Le spectre infrarouge du naphtalinique est identique a celui de l'eudalitne publiC par Sorm (*". Fig. 5. De plus, son picrate fond a 920-930 (rCfCrence : 92,5930).

Fig. 5 - Spectre infrarouge de I'eudalkne, d'aprks Sorm et collaborateurs (22) (haut). Spectre infrarouge du naphtalknique de dkshydrogenation du tricyclo- vbtivkne (bas).

Remarquons que l'eudalkne est le produit normal de la trans- position du vCtivazul6ne ("). Sa formation a CtC en particulier observCe lors de la dtshydrogination des vttivones et de leurs dCrivCs (13) (23).

En rCsumC:

Le rricyclove'tivtne pre'sente donc un contour azule'nique. I1 renferme un groupe isopropyle et un pont endome'thylknique. En e f e t , le ve'tivazultke possPde quatre groupes rne'fhyles dont deux

(22) J. PLIVA, V. HEROUT, B. SNEIDER et F. SORM, Coll. Czech. Chem.

(23) Y . R. NAVES, Helv. Chim. Actu, 24, 1 (1941).

-

Comm., 18, 500 (1953).

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de l’isopropyle et deux libres. L’un de ces derniers dkrive du mPthyl2ne de la double liaison semicyclique, l’autre ne peut provenir que d’un pont endome‘thyIPnique.

5 - DPgradation du tricyclovPtivbne

a) Oxydation de la double liaison mkthylr‘nique du tricyclo- ve‘tiv2ne. TricyclovPtivanone. Nature du cycle porteur de la double liaison.

Afin de dkterminer la taille du cycle porteur de la double liaison semicyclique, nous avons oxydC le tricyclovCtivkne (1) :

CiZHaz (> C=CHz --+ C13Haa {> CIO I IV

Cette coupure a CtC rCalisCe par ozonolyse (24), par oxydation perrnanganique mCnagCe (25), par I’action des oxydes d’azote (“6)’ et par l’acide perbenzotque (”).

Ce dernier s’avkre &re 1e meilleur rCactif et les oxydes d’azote les moins bons (20% de rendement).

Tr icy clo vr‘tivanone Ebo,r = 1320- 1330 d20,4 = 1,0175 n2: = 1,5088 RM, obs. = 60,41 RM, calc. = 60’26.

DCrivCs caractiristiques : nCant. Spectre infrarouge : figure 6.

0

bb

1.e 5 180) 1180 +OD 1500 i C W 130) UW i i 0 0 i O O O 900 BOO 100 em-1

Fig. 6 - Spectre infrarouge de la tricyclovktivanone.

(%) F. Sow, J. MLEZIVA, G. ARNOLD et J. PLIVA, Coll. Czech. Chem.

(%) W. TREIBS, Ber., 80, 56 (1947). (26) P. SNITTER, Bull. Inst. Pin, 46, 4 (1933).

Comm., 14, 699 (1949).

P. NAFFA et G . OURISSON, Bull. Soc. Chim., 1115 (1954).

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TRICYCLOV~TIV~NE 181

La friquence du carbonyle se situe vers I718 cm-’. La tri- cyclovetivanone est donc une cyclohexanone. De plus, l’absence d’une bande en 1410cm-1 dans ce spectre indiquerait qu’aucun groupe mkthylene n’y est adjacent au carbonyle ( z 8 ) .

En bref, la double liaison methylenique du tricyclovetivkne est fixke sur un cycle hexanique. L’oxydation de cette double liaison conduit A la tricyclovktivanone (IV).

b) Transposition de la double liaison du tricycfove‘tivPne Dans ce paragraphe, on se propose d’etudier la nature des

atomes de carbone adjacents a la double liaison : C=CH,, dont aucun n’appartiendrait a un groupe mkthylene. La transposition de la double liaison semicyclique va permettre de verifier cette hypothkse. Contrairement a ce qui est admis, cette transposition s’est avCree difficile. Le traitement sulfurique a dG &re assez drasti- que pour provoquer ce deplacement. Par contre, nous avons observe en milieu basique, au cours de l’oxydation pernianganique, une isomerisation beaucoup plus marquee.

Le rksultat de cette isomerisation est ]’apparition, dans le spectre infrarouge, d’une bande faible en 1675 cm-’ sans qu’il se produise un changement quelconque dans I’intervalle 790-8 10 cm-I. Cela signifie que la double liaison semicyclique du tricyclovetivkne se transpose uniquement en double liaison biqua- ternaire. Comme I’indiquait la spectroscopie, il n’y a donc pas de methylhe en ct de C=CH,.

Pretni2re hypatlr2sc. structurufe On peut ecrire, pour le tricyclovetivene,

la formule partielle I****. Or, le tricyclovetivkne ne renfernie pas

de liaison C-CH, isolee. En outre, les re- sultats de la dkshydrogknation montrent que le groupe isopropyle n’est pas fix6 sur un des carbones adjacents A la double liaison, ce qui est, par ailleurs, en accord avec la rkgle isoprhique. 11 en resulte que les atomes adjacents a la double liaison sont les points de depart de deux chaines formant

C co I lcrnX‘

-. ____

Y. R. NAVES, Bull. Sac. Chim., D 99 (1950).

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182 G . CHIURDOGLU ET P. IULLEN

les deux autres cycles de la moltcule A, B, C. Le cycle porteur de la double liaison apparait central (B). De plus, le tricyclov6tivkne posside un mtthylkne pontt. L’un des carbones adjacents a la double liaison constitue donc une t&te de pont et la double liaison ne peut s’isomiriser que dans une seule direction (rigle de Bredt), vers le cycle A, par exeniple.

11 en risulte, pour les cycles A et B, une condensation en ortho. Nous pouvons maintenant priciser la formule I****, et tcrire I***.

La formule partielle I * * * renferme onze atomes de carbone. Si on ajoute les trois atomes de l’isopropyle, un a placer pour fernier les cycles A et C esquissis

seul carbone resle plus haut.

L-..

c) Oxydation dzl tricyclovCtiv4ne. Nrrtitre du cycle A L’oxydation permanganique du tricyclovetivtne, au cours de

laquelle il y a isomirisation de la double liaison, h e la nature du cycle A. En effet, on a

La rCaction conduit a un niilange de produits neutres. Le spectre I. R. de ce mtlange rtvile la prisence d’une cyclopentanone :

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TRICYCLOV~TTIV~NE 183

vcz0 = 1749 cm-l, B c6ti de la tricyclovetivanone v r z 0 = 1718 cm-’ et de la niCthylcycloalcnvlcetone d’ouverture correspondante : vcs0 =? 1704 cm-l.

Le cycle A du vCtivkne est donc pentacarbonk et on peut Ccrire la structure suivante 1 ** pour le tricyclovetivkne.

I“* Nous avons, a present, tous les atomes de carbone du tricy-

clovttiv&ne. I1 reste A fixer le second point d’attache du cycle C et la position du groupe isopropyle. Etant donne les risultats acquis pric&demrnent, la soudure du cycle C ne peut se faire qu’en posi- tion d t a . La structure de l’anneau C apparait, dks lors, penta- carbonie et celle du tricyclovetivkne : I*.

d) Dt!monstrntion de la nature tlu cycle C Le but est d’isoler, par oxydation appropriie, le cycle C SOLIS

la forme de biacide correspondant, en l’occurence de l’acide cis-l,3-cyclopentane-dicarboxylique (XII) si la structure provisoire I* Ctait exacte, et, par-lh m h e , caractkriser sans equivoque la nature de cet anneau, ainsi que le mode de fusion des cycles B et C.

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184 G . CHIURDOGLU ET P. TULLEN

A cette fin, trois voies ont Cte suivies. Seule la dernikre a permis d’atteindre le but.

1) Tentative d’obtention cle l’acide X I I pnr oxydation per- mangan ique pousse‘e .

Cette oxydation, menee a chaud, nous a conduit a un melange complexe de produits de degradation, huile visqueuse, dont il nous a PtC impossible de tirer l’acide XTI, cristallisable.

Ce mklange d’acides a ite transform6 en un mClange d’anhydrides correspondants. Par chromatographie, on obtient une frac- tion de tete dont le spectre infrarouge ren- ferme des bandes en 1751 cm-I et en 1802 cm-’. Nous avons donc isole un anhydride du type glutarique, ce qui corres- pond en particulier a I’acide X11.

La quantite trop faible de produit a empCchC sa sCparation

2) Tentutive d’obtention du biucidu XI1 par oxydation du

(‘J c;o

0

et, partant, son identification.

tric yclove‘tivaditke X V

m . ( & = O . \

xv XI1 I ‘ a ( R 8 4

La tentative d’obtention du composC XI1 par autoxydation (O,/U. V.) nous a conduit a un hydroperoxyde qui a CtC isole. Son traitement par NaS0,H nous a fourni un mtlange d’alcools CthylCniques. Le tricyclovCtivbne, rCcuperC, a par ailleurs subi une transposition marquee.

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TKICYCLOV&TIV&NE 185

L’oxydation du tricyclovCtivkne par SeO,, en milieu adtique, ne nous a pas don& non plus satisfaction et la bromuration, par la brornosuccinimide, nous a livri un produit se polyniirisant au cours de la dCshydrohalogCnation (dim6thylaniline ou potasse).

3) Pussuge de la tricq1clove‘tii)unoiie ci I’acide XII Le schima suivant a Cte finalenlent ClaborC et realise: l’ozo-

nolyse du tricyclovCtivkne (I) fournit la tricyclovitivanoiie (1V). Celle-ci (10 gr), traitCe par le brome en solution CthCrCe (29),

conduit au derive cr-brome VIII que I’on transforme ensuite en l’acetate correspondant 1X (10 gr) et, ce dernier (*), en l’cr-hydroxy- cetone X. La deshydratation de cet alcool (6 gr). par HCOOH, donne la citone cr,p-non saturCe XI. A ce stade, le produit a i te chromatographi6 et la cCtone sCparCe (+=, = 1678 cm-l et uc,c = 1600 cm-’)-(4 gr.). Celle-ci a 6ti finalenient soumise

une oxydation permanganique A chaud.

IJC

Le produit brut d’oxydation permet d’isoler un solide blanc (0,8 gr). Aprks trois recristallisations, on sipare une substance fondant nettement a 120, (0,4 gr). Les eaux de cristallisation, aprks Cvaporation, Iaissent un rCsidu (0,2 gr) fondant de 89 a 940. L’acide XI1 (F = 120°), titrC, accuse un poids moliculaire de 160.

(*) Nous nous sommes interdit la pyrolyse de cet acetate, craignant de former surtout i’ethyl6nique ci-contre. On sait, en effet, que dans cette cisdlimination les ato- mes d’hydroghne’ se placent gknkralement dans l’ordre de reactivitk suivant : primaire > secondaire > tertiaire. db

(29) A. L. WILDS, J. Am. Chem. SOC., 64, 1421 (1942).

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186 G. CHIURDOGLU ET P. TULLEN

L’acide XI1 est I’acide cis-I ’3 cyclopentane-dicarboxylique, comme le montre une kpreuve de melange (1190) avec un Cchantillon de synthise (*) ( 1 2 0 O ) .

Le residu fondant de 89 ii 940 s’avkre Ctre un melange des acides cis et trans correspondants, comme le montre I’analyse dans I’infrarouge.

6 - Conclusions

L’anneau C du tricyclovitivkne est cyclopentanique et les cycles B et C sont soudCs en mCta. Le groupe isopropyle appartient bien au cycle A. En accord avec la structure du vktivazuline, et conformdment aux rkgles isoprenique et farnbolique, nous fixerons sa position en 9.

La structure du tricyclovitivkne est donc 1.

I

7 - StkrrPochimie du tricyclove‘tiv2ne

Du point de vue stCrCochimique, le tricyclovetivkne peut exister sous des formes stCrCoisomkres parmi lesquelles I,, I,, et I, ci-aprks sont les plus probables :

8 - Re‘sumk

Dans le tableau ci-apres, nous avons risunie I’ensemble des

(*) Nous le devons au Docteur S. F. BIRCH de la British Petroleum Co. - .-

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188 G . CHIURDOGLU ET P. TULLEN

investigations structurales, chimiques et spectroscopiques, nous ayant conduit A la structure du tricyclovktivkne.

PARTIE EXPERIMENTALE

1 ) Preparation du gel de dice Cette preparation a ete effectuk d’aprts Verzele ( *).

2) Sbparation de la fraction hydrocarbonk de l’essence de vbtiver Quatre kilogrammes d’essence brute, en solution etheree, sont laves

avec une solution de bicarbonate de soude. Aprts elimination de l’ether, l’huile est soumise a deux tours de distillation sous vide sur colonne Vigreux. La fraction distillant de 75 a 95O/0,4 mm (800 gr) est alors chromatographike par portions, sur 6,4 kilogrammes de silice. On obtient 600 gr de fraction hydrocarbonee, qui bout de 70 a 800 sous 0,4mm.

3) Isolement du tricyclovktivbe par chromatographie Douze grammes de cette fraction sont chromatographies sur 250 gr

de silice. On isole une fraction de 8 gr qui est repassee sur 250 gr de silice et qui fournit ainsi une fraction de t&te de 6gr. Elle subit un troisitme tour de chromatographie sur 250 gr de silice. La fraction obtenue en t&te est encore soumise a deux tours de chromatographie, chaque fois sur 4OOgr de silice. L’eluant est I’ether de petrole. On obtient un hydrocarbure dont I’indice de refraction ne varie plus, n, = 1,5040. 90

4) Isolement du tricyclovktivkne par distillation fractionnk La fraction hydrocarbonk Ebo,4 = 700-800 est distillee a la colonne Todd

a l’aide d’un dkphlegmateur de vingt plateaux theoriques, sous une pression stabilisk de 0,4 mm.

Au depart de 150 gr, on obtient, aprks trois tours de distillation, 34 gr (353%) de tricyclovktivtne : 4,314 = 0,9340; n r = 1,5040; et 39 gr (40%) de I’hydrocarbure de deshydratation du vktivenol tertiaire.

5) Evaluation du nombre de groups mhthyles Nous avons utilise la methode dkrite par Henry et Ourisson (IQ). Les

mesures sont effectuks au spectrographe Perkin-Elmer, simple faisceau, avec une fente de 0,165 mm. La puissance du globar est f i xk a W = 300 et le gain a 14,5.

6) Hydrogenation du tricyclovktivhe a) Indice d’hydrogene : procede Chiurdoglu (31) : 91 mgr de tricyclove-

tivene absorbent 9,s cm3 d’hydrogtne ti 00 et 760 mm de pression. L’absorption thkorique est de 10,0cm3 sous les m&mes conditions.

6) Tricyclovetivane: il a CtC obtenu de trois manieres diffbrentes. En operant sur Pt en solution Bthbrk, sur Pt d’Adams (PtOe) en solution adtique

(*) Communication privke de Monsieur M. VERZELE, charge de cows

(31) G. CHIURDOGLU, These d’AgrCgation U. L. B. (1940). 1’UniversitC de Gand.

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TRICY CLOVETIVBNE 189

et, enfin, sur Ni de Raney W,, en solution alcoplique. Constantes et spectres : voir page 9.

7) Dbshydrogbnation du tricyclovktivhe (I) 6,5 gr de tricyclovktivkne sont chauffks avec 5 gr de selenium a 280-30O0,

durant d e w heures. Le produit rkactionnel, fortement colore en bleu, est repris a 1’6ther de pktrole (40-50°), et l’on extrait, a l’acide phosphorique, I’azulCnique fomk (750 mgr, 14% de rendement). Le trinitrobenzenate de ce produit fond a 148O, et ne donne pas de depression avec un khantillon de rkfkrence. Les spectres visible et U. V. sont identiques 5 ceux du vktivazulkne (2O,21).

Les 3,lO gr de produit constituant la fraction non azulenique (Eb. = 58-66O) fournissent par chromatographie, 1,30 gr de tricyclodtivkne et 1 , l O gr d’eudalkne, caractkrisk par le spectre infrarouge (voir page 179, fig. 5 ) et Ie point de fusion : 920-930.

8) Ozonolyse du tricycIov&iv&ne (I) a) Determination du groupe mkthylene: methode de Sorm (32). On

traite 380 mgr de tricyclovetivene; le mkthanal obtenu, trait6 par 0,3 gr de dimkdone, donne 108 mgr de complexe formaldehyde-dimedone, F = 1 8 7 O . Ceci correspond 21 82% d’un groupe =CH,. On trouve, d’autre part, 21% d’une liaison =CH, en titrant I’acide formique libere par de la soude (43 nil de NaOH 0,021 M). On a donc montrk la presence, au total, de 82 + 21, soit 103% de =CH2.

b) Preparation de la tricyclovetivanone : methode de Sorm (%). 15 gr de tricyclovetivkne sont traitks par un courant d’oxygkne ozonise a 0,3%. Le produit de decomposition de l’ozonide (10 gr) est soumis a l’action de I’eau oxygenee (801111 d’une solution a 5%) en presence de carbonate de sodium (70 ml d’une solution a 10%). On Climine ainsi les aldehydes eventuelle- ment formes au cours de la reaction (9. On separe le melange reactionnel en ses parties neutre et acide. La partie neutre (7 gr), chromatographike sur 200 gr de silicagel, fournit la tricyclovktivanone avec un rendement d’environ 30%. La fraction acide (2 gr) n’a pas kte ktudiee.

9) Oxydation permanganique mknag6e du tricyclov6tiv&ne On opkre d’aprbs (20). Lorsque la reaction est termink, on continue en

suivant le mode operatoire de Chavanne (33). Au depart de 10 gr de tricyclo- vktivkne, on obtient 7 3 gr de neutre et 1 gr d’acide (huile visqueuse non Ctudiee). En chromatographiant la fraction neutre, on obtient du tricyclovetivene non transforme, et la tricyclovktivanone avec un rendement de 20%.

10) Oxydation perbenzolque du tricyclovktivime On traite 9 gr de tricyclovetivkne par 300 ml d’une solution 0,6 N d‘acide

perbenzolque dans le chloroforme. Aprks un sejour de trois jours a la glacikre, on neutralise par une solution de bicarbonate de sou& it 2%. On lave et on shhe la couche chloroformique, puis on Bvapore le solvant sous vide, Le residu (8 ,5 gr), distill6 sous vide, donne la tricyclovktivanone avec un rendement d’environ 45%.

(32) F. SORM, L. DOLEJS, 0. KNESSE et J. PLIVA, COIL Czech. Chem. Comm.,

(33) G. CHAVANNE, Bull. SOC. Chim. Belg., 35, 283 (1926). 15, 82 (1950).

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I90 G. CHIURDOGLU ET P. TULLEN

1 1 ) Wgmdation du tricycloY@v&ne a) 60 gr de tricyclovetivene sont emulsionnes dans 600 ml d’eau distillee.

On ajoute 220 gr de permanganate de potassium pulvkrise. L’addition est commencee a temperature ordinaire et achevee a 6Oo-7O0. Le precipitk de bioxyde de mangantse forme est solubilise dans deux litres d’eau, par passage d‘un courant de SOa. On &pare en parties neutre et acide.

La fraction neutre (40 gr) est distillee sous vide. Les spectres infrarouges montrent que cette fraction est formee d’hydrocarbures (en tCte) et de ceto- nes (en queue).

La fraction acide (10 gr) renferme des acides volatils et un residu visqueux complexe.

b) MCme traitement que precedemment, mais a 6Oo-7O0. Le tricyclove- tivtne (20 gr) est trait6 a 60°-70° par 100 gr de permanganate de potassium pulverise. La fraction acide (12gr) debarassee de ses produits volatils, se prbente sous la forme d’un residu visqueux brun (8 gr). I1 n’a pas pu Ctre fractionne. Quatre grammes de ce residu ont ete chauffes a reflux, en presence de 30 ml d’anhydride acetique fraichement distille. Le produit de la rCaction est chromatographie sur 100 gr de silicagel. Le spectre infrarouge de la fraction de t&te prksente les bandes caractkristiques d’un anhydride du type glutarique.

12) Obtention de I’acide cis-l,3-cyclopentane-dicarboxylique

On obtient ainsi 10 gr du produit. a) Formation de la tricyclovktivanone: mode operatoire dkrit en 8b.

b) Prkparation de I’m-bromotricyclovktivanone 10 gr de tricyclovttivanone sont bromes par 2,6 ml de brome en solution

ethbree, d’apres (29). Operant a 100, on obtient 14 gr d’un produit huileux, brun fond.

c) Prkparation del’u-acktoxytricyclovktivanone (IX) 14 gr du derive brome VIlI sont traitb a reflux durant 12 h., par 5 gr

d’acetate de potassium anhydre, en solution dans 30 ml d’acide acetique glacial. On isole, en fin de reaction, 10 gr de IX.

d ) a-Hydroxyrricyclovktivanone (X) L’a-hydroxytricyclovetivanone (6 gr) est obtenue par hydrolyse de IX

(10 gr) par traitement reflux, pendant 7 h., au moyen d’une solution de 4,3 gr de KOH dans 20 ml d’ethanol.

e) Dkshydratation de X L’a-hydroxycetone IX (6 gr) a ete deshydratee a I’acide formique

98-100% (15 ml). Le produit de la reaction, aprhs traitement classique, a ett chromatographie sur silicagel 11. La tricyclovetivenone (XI) a 6tt caracterisee par son spectre I. R.

f ) Oxydation de XI. Obtention de l’acide cis-1,3-cyclopentanedicarboxylique La tricyclovetivenone XI est oxydee en milieu aqueux a 60-70°, par

18 gr de permanganate de potassium pulvCris6. De la fraction acide, on extrait 800mgr d’un solide blanc. Plusieurs

recristallisations conduisent a 400 mgr d’un solide I fondant a 1200 f 005. La concentration des eaux de cristallisation permet de separer 200 mgr d’un solide gris blanc (11) fondant de 89 a 940.

85 mgr de I’acide I (F = 120°) sont neutralis& par 25,5 ml de NaOH 0,040 M. On a M = 160.

L’epreuve de melange du solide I (F = 120° 0 , 5 O ) avec un tkhantillon d’acide cis-l,3-cyclopentanedicarboxylique (M = 158; F = 120° f 0,Y) donne 1190 5 005.

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TRICYCLOV~TIVI~NE 191

L’examen du spectre I. R. du solide I1 indique un melange des acides cis et trans-cyclopentane-l,3-dicarboxyliques, riche en le premier.

* * * Nous exprimons notre reconnaissance Mademoiselle L. de

Brouckbre, Directeur du DCpartement de Chimie GenCrale 11, pour l’intkr6t port6 5 ce travail, ainsi qu’a Messieurs W. De Keyser et P. Goldfinger pour les facilitks qu’ils nous ont accordtes.

11 nous est agriable de remercier, en outre, Monsieur S. F. Birch de la British Petroleum Cy, ainsi que Monsieur Y. R. Naves, Directeur Scientifique de la firme L. Givaudan et Cie (Genkve) de nous avoir procur6 des Cchantillons nicessaires a nos recherches, et Monsieur G. Ourisson, Professeur a l’univer- sit6 de Strasbourg, pour une discussion utile concernant la stCrko- chimie du tricyclovttivkne.

Le Fonds National de la Recherche Scientifique et I’lnstitut pour la Recherche Scientifique dans 1’Industrie et I’Agriculture nous ont fait bCnCficier respectivement d’un crtdit de recherche (G. C.) et d’une bourse de sptcialisation (P. T.). Nous les en remercions.

Laboruroire de Chiinie GPnPrale I I , Faculte‘ des Sciences,

UNIVERSIT~ LIBRE DE BRUXELLES.

Communiquk a la Socidtk Chimique de Belgique le 5 octobre 1956.