Corpus en Analyse de Discours

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  • 8/8/2019 Corpus en Analyse de Discours

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    Jacques GuilhaumouHistorien, Directeur de recherche au CNRS/ENS-LSH Lyon(langues, langages, discours)

    (2002)

    Le corpus en analysede discours : perspectivehistorique.

    Un document produit en version numrique par Jean-Marie Tremblay, bnvole,professeur de sociologie au Cgep de Chicoutimi

    Courriel: [email protected] web pdagogique : http://www.uqac.ca/jmt-sociologue/

    Dans le cadre de: "Les classiques des sciences sociales"Une bibliothque numrique fonde et dirige par Jean-Marie Tremblay,

    professeur de sociologie au Cgep de ChicoutimiSite web: http://classiques.uqac.ca/

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    Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/

    mailto:[email protected]://www.uqac.ca/jmt-sociologue/http://classiques.uqac.ca/http://bibliotheque.uqac.ca/http://bibliotheque.uqac.ca/http://classiques.uqac.ca/http://www.uqac.ca/jmt-sociologue/mailto:[email protected]
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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 2

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    Jean-Marie Tremblay, sociologueFondateur et Prsident-directeur gnral,LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALES.

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 3

    Cette dition lectronique a t ralise par Jean-Marie Tremblay, bnvole, profes-seur de sociologie au Cgep de Chicoutimi partir de :

    Jacques Guilhaumou

    Historien, Directeur de recherche au CNRS (langues, langages, discours)

    Le corpus en analyse de discours : perspective historique.

    Un article publi dans la revue CORPUS, no 1, novembre 2002, numro inti-tul : Corpus et recherches linguistiques.

    [Autorisation formelle accorde par lauteur le 16 aot 2008 de diffuser cetteuvre dans Les Classiques des sciences sociales.]

    Courriel : [email protected]

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    dition numrique ralise le 18 fvrier 2009 Chicoutimi,Ville de Saguenay, province de Qubec, Canada.

    mailto:[email protected]:[email protected]
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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 4

    Table des matires

    Introduction

    1. La premire configuration de lanalyse de discours: les annes 1970

    1.1. La configuration de dpart, une configuration mthodologique1.2. Dune configuration socio-linguistique au changement de terrain

    2. La dmarche configurationnelle au premier plan3. Les nouvelles conditions du retour au corpus

    Conclusion: les nouveaux corpus

    Bibliographie

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    Jacques GuilhaumouHistorien, Directeur de recherche au CNRS (langues, langages, discours)

    Le corpus en analyse de discours : perspective historique.

    Un article publi dans la revue CORPUS, no 1, novembre 2002, numro inti-tul : Corpus et recherches linguistiques.

    http://corpus.revues.org/document8.html

    Rsum

    Retour la table des matires

    Cet article prsente les diverses manires de constituer un corpus en analysedu discours, et plus particulirement dans le domaine de lanalyse du discours duct de lhistoire. Il adopte une perspective historique, en prenant comme point dedpart la configuration initiale des annes 1970. Cependant, il sagit aussidaccorder une importance particulire la formation de corpus rflexifs , tantdu ct de la lexicomtrie que de larchive et du matriau denqute. La notion derflexivit du discours apparat alors au centre de toute interrogation sur la consti-tution des nouveaux corpus.

    ZusammenfassungKorpus in der Diskursanalyse : eine historische Sicht

    Dieser Artikel stellt die verschiedenen Mglichkeiten der Korpus-erstellung inder Diskursanalyse vor, wobei dem Fachbereich Geschichte besonderes Augen-merk zukommt. In einer historischen Sicht geht der Autor von der ursprnglichenKonstellation in des 70er Jahren aus. Des weiteren wird besonderes Gewicht aufsogenannte Reflexive Korpus gelegt, sowohl was die Lexikometrie angeht, alsauch bezglich des empirischen Materials. Die Reflexivitt des Diskurs steht so-mit im Zentrum der Fragen, die sich um die Erstellung neuer Korpus drehen.

    Mots cls: analyse de discours, corpus, pistmologie, histoire, rflexivit

    http://corpus.revues.org/document8.htmlhttp://corpus.revues.org/document8.html
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    Introduction

    Retour la table des matires

    Le problme de la constitution du corpus occupe une place centrale dans

    lanalyse de discours en ses dbuts, cest--dire la fin des annes 1970, et tout

    particulirement dans le champ de lanalyse de discours comme objet de lhistoire

    mis en place par les travaux pionniers de Rgine Robin (1973) et du Centre de

    lexicologie politique de lENS de Saint-Cloud.

    Au dpart, nous prsentons donc les principes communs, en matire de cor-pus, aux premiers chercheurs dans le but de cerner les diffrentes configurations

    qui dlimitent lapport et les limites de la dmarche inaugurale en analyse de dis-

    cours au cours des annes 1970.

    Puis nous restreignons notre rflexion lanalyse de discours du ct de

    lhistoire dans la mesure o elle introduit, au dbut des annes 1980 et en rupture

    avec le corpus construit, la notion de corpus naturel , cest--dire densemble

    des noncs attests dans larchive selon une logique propre de type configura-

    tionnel. Ainsi le tournant interprtatif de lanalyse de discours rvoque le cor-pus clos, remet en cause la confrontation entre le corpus et le hors-corpus, refuse

    enfin la prsentation rfrentielle des conditions de production, au profit dune

    description de la rflexivit du discours partir dun travail configurationnel sur

    les noncs darchive, situ la croise des travaux de Michel Foucault et de ceux

    des ethnomthodologues. Il nest plus question que de ltude de moments de

    corpus caractriss lintrieur de vastes trajets thmatiques o sentremlent

    des volutions conceptuelles, des mergences de sujets dnonciation et des v-

    nements discursifs.

    Le dbut des annes 1990 est alors marqu par lmergence dune jeune gn-

    ration dhistoriens du discours qui sinterdisent toute instrumentalisation du cor-

    pus, et sengagent rsolument dans une approche des noncs darchive qui relve

    dune histoire langagire des concepts situe dsormais au centre de dbats entre

    chercheurs de nombreux pays (Guilhaumou, 2000). Le renouvellement de labord

    du corpus devient alors un dfi pour les jeunes historiens lexicomtres qui tentent

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    le dbut, sur la matrialit de la langue au sein mme de la discursivit des non-

    cs.

    Cependant une question symtrique se pose : dans quelle mesure la faon dont

    le linguiste de la langue constitue son corpus de phrases oriente-t-elle la constitu-

    tion du corpus en analyse de dnoncs ?

    voquons rapidement les tapes de lopration initiale de lanalyse de dis-

    cours. On puise dans ce que Jean Dubois appelait luniversel du discours ,

    donc dans la totalit des noncs dune poque, dun locuteur, dun groupe social.

    Dcoupage arbitraire partir dintrts, de thmes, de jugements de savoir. Dans

    un second temps, au sein du genre discours politique alors promu par les v-

    nements de mai 1968, on ne retenait finalement que lensemble des phrases conte-

    nant, en quelque position syntaxique que ce soit, tel ou tel mot pivot. Cest la der-nire phase qui produit rellement le corpus : lapplication des rgles

    dquivalence grammaticale proposes par Harris permet dobtenir un ensemble

    paradigmatique de phrases transformes, la srie des prdicats des mots-pivots.

    Ainsi dans le travail conjoint de la linguiste Denise Maldidier et de

    lhistorienne Rgine Robin (1974), sur les Remontrances parlementaires face aux

    Edits de Turgot de 1776, le corpus des phrases rgularises autour des mots-

    pivots libert et rglement est reproduit intgralement. La slection des termes

    repose ici explicitement sur un savoir historique pralable : il est supposdvidence que cest autour des notions de libert et de rglement que se joue

    alors lopposition entre noblesse et bourgeoisie dans la conjoncture de la tentative

    rformatrice, voue lchec, de Turgot.

    Cependant, ce type danalyse sest avre trs utile dans la qute dun ven-

    tuel sens cach . Souhaitant apprhender la notion de fodalit la fin du 18me

    sicle, Rgine Robin (1975) sest intresse son usage suppos dans les cahiers

    de la noblesse de 1789. Or, il apparat demble que les expressions de droits fo-

    daux et fodalit, prsentes dans les cahiers de la bourgeoisie, sont absentes descahiers de la noblesse, alors quy sont prsents avec insistance les droits inh-

    rents aux proprits de la noblesse . Cest donc partir de ltude des noncs

    autour du mot-pivot proprit que sexplicite la volont des nobles de maintenir

    les droits seigneuriaux . Nous obtenons en effet, aprs rgularisation des non-

    cs, les trois phrases de base suivantes :

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    1- Toute proprit doit tre sacre

    2- Des (ces) proprits doivent tre respectes3- Les X (de la noblesse) doivent tre respects

    La classe des X comprend certes les droits attachs aux terres , mais aussi

    les droits attachs aux fiefs et les droits attachs aux hautes, moyennes et

    basses justice , cest--dire la quasi-totalit des droits fodaux qualifis de

    droits appartenant aux proprits de la noblesse .

    Lanalyse de discours, dans sa configuration inaugurale, mettait donc ici en

    vidence une stratgie de masquage, par le fait de lutilisation dun mot du lexi-

    que bourgeois pour lgitimer le maintien des droits seigneuriaux dAncien

    Rgime. Cette dmarche repose alors sur un double pari :

    le pari sur la reprsentativit : le corpus final est cens reprsenter une

    ralit discursive. Dans les exemples voqus ci-dessus, les corpus autour

    des mots pivots libertet rglement, proprit et droits fodaux rsument,

    pour les premiers, laffrontement entre Turgot et les parlementaires en1776, et, pour les seconds, lopposition entre noblesse et bourgeoisie en

    1789.

    le pari sur la systmaticit : on recherche une homognit dans le temps

    et dans lespace, par exemple en tudiant, avec Jean-Baptiste Marcellesi

    (1971), les textes du Congrs de Tours de 1920, cest--dire des textes

    produits dans une mme situation de communication . Cette homog-

    nisation a pour corollaire une dmarche comparative, par exemple la pri-

    se en compte de textes de locuteurs diffrents au sein mme du Congrs.

    Elle produit une systmaticit, un effet de cohrence.

    La circularit de la dmarche est alors vidente : si lanalyse de discours em-

    prunte alors son modle de systmaticit la linguistique structurale, la linguisti-

    que elle-mme, par ses jugements de grammaticalit, ritre des jugements ido-

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    logiques qui servent dinstance de jugement lanalyse de discours. Ainsi en est-

    il de lapplication du modle historiographique de lidologie sans-culotte (Albert

    Soboul), dabord au champ smantique, puis aux phrases grammaticalement

    transformes autour des mots-pivots peuple et sans-culotte dans la presse pam-phltaire de lt 1793 (Guilhaumou, 1974, 1975).

    Lanalyse dun corpus, certes issu dun choix socio-historique explicite, neu-

    tralise donc son extrieur discursif, le hors-corpus, en le fixant dans un jugement

    de savoir, tout en constituant des entits discursives stables telles que le discours

    noble vs le discours bourgeois, le discours jacobin vs le discours sans-culotte. Le

    niveau interprtatif du corpus se situe alors exclusivement dans la recherche dun

    positionnement adquat du discours politique.

    1.2. Dune configuration socio-linguistique

    au changement de terrain

    Retour la table des matires

    De fait, la dmarche inaugurale de lanalyse de discours savre trs rapide-

    ment prendre la forme dune approche sociolinguistique en ce sens quelle associe

    un modle linguistique, essentiellement lanalyse dnonc, un modle sociolo-

    gique, dfini travers la notion de conditions de production, autre dsignation du

    contexte dans lequel on puise les lments du corpus tudi. Tout est ici affaire de

    correspondances, de co-variance entre des structures linguis-tiques et des modles

    sociaux. Cest ainsi que la recherche inaugurale de Rgine Robin (1970) sur une

    ville la fin de lAncien Rgime, Semur-en-Auxois, comporte dune part une

    analyse des structures sociales dun bailliage bourguignon la veille de la Rvo-

    lution franaise, et dautre part une analyse du contenu des Cahiers de dolances

    de la bourgeoisie et de la paysannerie partir dun certain nombre de mots-pivots,

    selon une approche linguistique combinant analyse dnonc et tude du vocabu-laire socio-politique. Il en est de mme de ltude de J.-B. Marcellesi (1976) sur

    les Congrs socialistes et commu-nistes de 1924 et 1925. Jean-Pierre Faye (1972)

    sy associe en introduisant une approche discursive des effets de rcit, et surtout

    des topologies narratives.

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    Lactivit langagire apparat alors immdiatement sociale. A lisomorphisme

    langue / discours succde une unit dialectique entre le linguistique et lextra-

    linguistique, un isomorphisme entre le discours et les pratiques sociales. Le choix

    des mots-pivots, donc du corpus dnoncs, prsuppose une dfinition du discourspolitique en terme dacceptabilit sociale.

    Ainsi, Jean-Baptiste Marcellesi, aprs avoir dfini le discours politique com-

    me un discours tenu pour lhgmonie par un intellectuel collectif , sous

    linfluence de Gramsci, fait porter son analyse des Congrs sur les noncs conte-

    nant les termes Parti et Congrs. Il montre comment le P.C.F. sindividualise par

    rapport aux socialistes, se constituant ainsi comme nouvel intellectuel collectif, en

    vitant lquivalence Parti / Congrs. Le Parti est ce qui fait, limage de sa lutte

    contre lhgmonie capitaliste.De mme Jean-Pierre Faye dfinit le discours politique dextrme-droite alle-

    mande comme un discours tatique visant rendre crdible lidologie nazie au

    sein des idologies nationalistes de lentre-deux-guerres. Cependant il introduit

    une dimension pragmatique et stratgique dans lapproche du discours politique

    qui permet de dsigner leffet de rcit lencontre de lisomorphisme langue /

    discours. En effet, dans premier temps, Jean-Pierre Faye constitue le corpus des

    noncs qui dsignent le noyau rgulateur du champ idologique de lextrme

    droite allemande de lAllemagne de Weimar partir de la formule de lEtat totalet de lantithse de la Rvolution conservatrice. Alors souvre la possibilit de

    jeux dinversion complexes autour de laxe smantique Vlkisch-Bndisch : de

    Louvrier cest le conservateur lnonc dHitler en 1936 Je suis le rvolu-

    tionnaire le plus conservateur du monde , une conception raciste, antismite et

    anti-internationaliste du monde est mise en acte au sein mme du langage.

    Cest alors la frappe narrative ou leffet de rcitqui donne consistance au tota-

    litarisme nazi au sein de la circulation des langages dans le champ discursif de

    lextrme droite allemande de lentre-deux-guerres. Le fait discursif devient alors

    vnement, action narre. Le discours nest pas uniquement ce qui nonce laction

    rapporte, mais il est aussi ce qui produit laction, il estlaction ; il est fondamen-

    talement acte de langage.

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    Le travail de Jean-Pierre Faye annonce ainsi un changement de terrain ,

    prsentement une ouverture vers les rcits idologiques qui rompt avec toute dfi-

    nition implicite, donc non rflchie, du discours politique.

    Cependant le changement de terrain est alors essentiellement perceptible, dans

    lanalyse de discours des annes 1970, partir de la sortie interprtative du corpus

    vers une rflexion thorique dinspiration marxiste sur le discours politique com-

    me pratique relativement autonome. Dans la ligne des rflexions de Michel Fou-

    cault dans Larchologie du savoir (1969) et du renouveau de la pense marxiste

    linitiative de Louis Althusser (1965), Rgine Robin et Michel Pcheux

    sefforcent plus dapprocher les pratiques discursives dans leur historicit et leur

    spcificit que de constituer, de manire phmre, une thorie du discours articu-

    le sur une thorie des idologies. Le discours politique nest pas dfini a priori,ses caractristiques sont lies au moment actuel, au plus loin de toute dmarche

    taxinomique.

    Deux concepts, tels quils sont formuls par Michel Pcheux (1975), devien-

    nent centraux : ceux de formation discursive et dinterdiscours. Ltude des for-

    mations discursives permet alors de dterminer ce qui peut et doit tre dit dans

    une conjoncture donne. Le risque tait l, nous lavons dj soulign, de classer

    les diverses formations discursives dune formation sociale, lexemple de

    lopposition noblesse / bourgeoisie sous lAncien Rgime. Le conceptdinterdiscours introduit alors une approche plus dialectique, dans la mesure o il

    permet de dire que toute formation discursive dissimule, dans la transparence du

    sens propre la linarit du texte, une dpendance lgard dun tout complexe

    dominante selon la formule du philosophe marxiste Louis Althusser (1965),

    ensemble qui nest autre que linterdiscours, cet espace discursif et idologique o

    se dploient les formations discursives en fonction de rapports de domination, de

    subordination et de contradiction. Cette conceptualisation forte rencontre alors

    le souci de lhistorien du discours dinscrire durablement son interrogation du

    ct de la tradition marxiste 1. L o dominait au dpart une approche taxinomi-que, isolant des lments simples (discours bourgeois / discours fodal ; discours

    jacobin / discours sans-culotte) dans le corps complexe des discours, il devenait

    1 Nous navons pas la place de dvelopper cette relation fondamentale au mar-xisme, dont nous rsumons les tapes, au sein de notre propre itinraire de re-cherche, dans Guilhaumou 1996.

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    question en fin de compte, dans le jeu de linterdiscours et de lintradiscours,

    dintrication de stratgies discursives, daffrontements et dalliances langagiers.

    En fin de compte, le changement de terrain , svrement jug aprs-coup,

    ne visait pas linstallation du discursif dans un systme conceptuel fig et externe,

    mais au contraire poussait le chercheur un perptuel travail de remaniement des

    concepts sur une base discursive. Dans cette ultime mtamorphose de la configu-

    ration de dpart, la question de la constitution du corpus rendait obligatoire

    ltude des conditions de production du discours, en liaison avec lhistoire des

    formations sociales. Quant la notion de conditions de production, elle dsignait

    alors moins la ralit stable de la situation de communication quun travail sur les

    effets de conjoncture, de leffet-sujet leffet-appareil en passant par leffet ma-

    jeur de lvnement.Cependant lanalyse du discours comme objet de lhistoire narrivait pas

    sortir, dans cette configuration, dun triple cueil. En premier lieu, elle introdui-

    sait une coupure nette entre le corpus choisi, vrai dire fort restreint au terme de

    la procdure danalyse, et le hors-corpus dfini de faon rfrentielle et idologi-

    que par la notion de conditions de production. En second lieu, le choix des mots-

    pivots reposait sur le jugement de savoir de lhistorien, pris lui-mme dans le

    champ des dbats historiographiques, et non dans les termes du moment actuel.

    Enfin, elle constituait, sur des bases idologiques et historiographiques, des enti-ts discursives spares telles que le discours noble, le discours bourgeois, le dis-

    cours jacobin, le discours sans-culotte, etc.

    2. La dmarche configurationnelleau premier plan

    Retour la table des matires

    La lexicomtrie est mise en place au cours des annes 1970 avec ltude pion-

    nire des tracts de mai 1968 (Tournier et alii, 1975) : ses avances sont percepti-

    bles travers la premire formule de la revue Mots jusqu la fin des annes 1980.

    En quantifiant les faits langagiers, elle ouvre la voie une linguistique de corpus

    qui dfinit le corpus comme une collection de donnes langagires slectionnes

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    et organises selon des critres linguistiques explicites pour servir dchantillon

    du langage (Habert, Nazarenko & Salem, 1997 : 11), rsolvant ainsi en partie les

    problmes des linguistes face au corpus. Le linguiste finit en effet par concentrer

    son attention sur lenrichissement des corpus, via les banques de donnes,laccroissement de leur taille et lamlioration des accs aux corpus.

    Mais lhistorien du discours a dabord fait appel la lexicomtrie pour dm-

    ler, en premire approche, lintrication des phnomnes nonciatifs et rhtoriques

    qui constituent la surface discursive dun texte, par contraste avec les noncs qui

    le structurent smantiquement autour de mots-pivots tudis en analyse harissien-

    ne. L encore, la procdure danalyse portait au dpart sur un corpus rduit, non

    plus un corpus dnoncs, mais le tableau lexical double entre des formes du

    corpus, recenses automatiquement, qui sont ventiles sur la base de leurs fr-quences absolue et relative dans les diverses parties du discours.

    Le passage par larchive, si spcifique de la dmarche de lhistorien du dis-

    cours pendant les annes 1980 mais sur lequel nous serons fort succinct dans la

    mesure o elle a fait lobjet dun ouvrage-bilan (Guilhaumou, Maldidier & Robin,

    1994), devait permettre denrichir lapproche lexicomtrique de lhistorien du

    discours. Certes lanalyse de corpus, laide doutils linguistiques adquats, de-

    meure plus que jamais dactualit. Cependant il ne sagit plus de construire

    demble un corpus sur la base dun jugement de savoir, au titre de la dsignationpralable de conditions de production, mais il convient de dcrire dabord des

    configurations darchives significatives la fois dun thme, dun sujet, dun

    concept, et en fin de compte dun vnement. Il est alors toujours temps disoler

    en leur sein un moment de corpus , cest--dire un ensemble dnoncs sur des

    critres lexicaux, syntaxiques ou nonciatifs et de constituer ainsi un sous-corpus

    susceptible dune approche linguistique fine.

    Lapport de la dmarche lexicomtrique sen trouve singulirement modifi.

    Nous prendrons lexemple dun corpus chronologique denviron 150 000 occur-

    rences, le Pre Duchesne dHbert en 1793-1794, que nous avons tudi (1986a)

    en collaboration troite avec le linguiste lexicomtre Andr Salem (1986). Il ne

    sagit plus seulement, partir de lanalyse du tableau lexical de rpartition des

    formes, de dcrire une volution du vocabulaire sur la base automatise de re-

    groupements quasi-smantiques de termes. La dmarche la fois descriptive et

    interprtative consiste plutt articuler des indices quantitatifs de fonctionnement

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    discursif, introduisant des lments contrastifs dans le corpus, des descriptions

    locales en prise sur des noncs hors-corpus.

    Prenons lexemple de la mise lordre du jour de la Terreur en 1793, mot

    dordre dont nous avons retrac par ailleurs le cheminement (1981), en nous po-

    sant la question suivante : quelle place discursive occupe cet vnement discursif

    dans la narration duchnienne ?

    Le rseau dnoncs portant la thmatique de la terreur sorganise alors en

    deux temps au sein du Pre Duchesne dHbert. Au moment de la mise en place

    du mot dordre de terreur, pendant le mois daot 1793, lusage rpt de la figure

    de laristocrate travers les multiformes tous les aristocrates, aux aristocrates,

    les aristocrates lgitime de lextrieur lexistence mme de la terreur. Puis

    linversion de lusage de lexpression populaire perdre le got du pain qui,dabord applique aux amis de la Rpublique, concerne ensuite ses ennemis, rit-

    re le processus de retournement de la terreur, exerc initialement par les ennemis,

    contre ces mmes ennemis. Dans un second temps, une fois la mise lordre du

    jour de la terreur lgitime par la Convention Nationale, le Pre Duchesne use

    systmatiquement de la multiforme tous les ennemis, indice de lmergence dune

    systmatique de terreur dans le discours duchesnien.

    En fin de compte, une telle description locale dorigine lexicomtrique permet

    de situer les enjeux stratgiques lintrieur mme de la description textuelle, etnon dans larticulation dune surface discursive une formation discursive dter-

    mine par ses conditions de production, comme cela tait le cas au dbut de

    lanalyse de discours, lorsquil sagissait dtablir un lien entre les effets populai-

    res dans le Pre Duchesne et son contenu jacobin (Guilhaumou, 1974).

    De la dmarche configurationnelle de lhistorien du discours qui se met en

    place dans les annes 1980, nous avons dcrit les principales entres, configura-

    tion / archive, trajet thmatique et vnement discursif, sous forme dun second

    bilan, dans le rcent Dictionnaire danalyse de discours (Chareaudeau & Main-gueneau, 2001). Dans la mesure o cette dmarche tend remplacer la dmarche

    usuelle de construction du corpus par une approche en corpus naturel des

    noncs darchive, il est difficile dy trouver une quelconque centralit de la ques-

    tion du corpus.

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 16

    Larchive est ici dfinie comme le jeu de rgles qui dterminent dans une

    culture lapparition et la disparition des noncs, leur rmanence et leur efface-

    ment, leur existence paradoxale dvnements et de choses (Foucault, 1994, I :

    708). Elle est alors associe un geste de lecture de facture hermneutique, doncfoncirement anti-constructiviste, cest--dire bas sur les capacits rflexives,

    donc interprtatives, des acteurs naturels de lhistoire. Elle sinscrit ainsi dans

    lactivit ordinaire des gens ordinaires, lencontre de toute prsance des acteurs

    jugs lgitimes. Dsormais, lnonc rare ne prend sens quau terme dun tra-

    vail configurationnel sur un ensemble dnoncs attests, disperss et rguliers,

    donc nous renvoie larticulation de la description et de la rflexion au sein dun

    acte configurant centr sur une intrigue, bien souvent concentre dans un vne-

    ment discursif. Il se situe au plus loin du dcoupage, par le linguiste, de la linari-

    t du discours en expressions, propositions et phrases.

    Paradoxe apparent, la dmarche rvoquant la primaut de la construction du

    corpus permet lhistorien et au linguiste de se rencontrer au mieux sur le terrain

    de la matrialit de la langue au sein de la discursivit de larchive. Ainsi peut-on

    valuer lexemplarit de notre tude, mene avec Denise Maldidier, des modalits

    discursives de la rcurrence de lexpression du pain et X (Guilhaumou & Maldi-

    dier, 1986) au sein du trajet thmatique des subsistances, dcrit par ailleurs dans

    toute son amplitude (Guilhaumou, 2001a). Il en est de mme du moment de

    corpus constitu des noncs autour de Marat est mort/ Marat nest pas mort

    dans la description configurationnelle de lvnement Mort de Marat (Guil-

    haumou, 1986b et 1987).

    Les ouvertures problmatiques des historiens du discours dans les annes

    1980 ont t rendues possibles par la neutralisation progressive de toute dmarche

    analogique de type sociolinguistique et la constitution de lanalyse de discours

    comme discipline interprtative part entire (Guilhaumou, 1993). Mais il a fallu

    dabord rcuser la notion de conditions de production, et son corollaire, la situa-

    tion de communication, en situant les ressources interprtatives des textes en leursein. Puis lhistoire du discours sest libre en partie des modlisations smanti-

    ques a priori dans la manire dagencer les phrases de base de lanalyse

    dnoncs et/ou dorganiser les listes de termes issus des analyses lexicomtriques

    de tableaux lexicaux. Enfin il est devenu possible de ne plus instrumentaliser la

    linguistique en sen servant comme dun simple outil, pour ensuite lexclure du

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 17

    moment interprtatif. Il sagit donc bien l dun tournant langagier de facture

    fortement hermneutique, qui sintgre dans ce quil est convenu dappeler le

    tournant interprtatif : lacte dinterprter est mis au centre de la constitution

    linguistique du monde et se concrtise dans lhistoricit des discours par unevaste gamme pragmatique dactes de langage. Il sagit bien alors dattester de

    lexistence de lvnement discursif, den dclarer la signification atteste par

    rapport ce qui est dit dans un moment donn au sein dune configuration

    dnoncs. A partir de la lecture darchives, lintrt justifi des analystes de dis-

    cours pour lvnement de communication (Chareaudeau, 1997), chelle commu-

    ne de notre socit mdiatique, est dplac vers des vnements o la mise en

    vidence de lattitude rflexive des acteurs, cest--dire de leur capacit

    lautodtermination, permet dinsister plus sur leur libert de sujet smancipant

    que sur leur ralit dtre social dtermin.

    Que devient alors la question initiale de la constitution du corpus hors du

    champ restreint du questionnement linguistique sur lenrichissement des corpus,

    en particulier par le biais des corpus annots (Habert, Nazarenko & Salem, 1997),

    auquel lhistorien peut tre sensible ? Sans aucun doute elle parat quelque peu

    marginalise la lecture des travaux rcents de jeunes historiens du discours en-

    gags du ct de lhistoire langagire des concepts.

    De fait, lhistorien du discours tend de plus en plus, au cours des annes 1980, considrer lanalyse de discours comme une ethno-mthode. Il sagit dabord

    dadopter la posture dindiffrence ethnomthodologique qui refuse dinduire de

    la position sociale les pratiques discursives dun individu, ou dun groupe. Puis la

    frontire entre texte et contexte sestompe dans la mesure o les individus utili-

    sent le langage naturel comme contexte, ressource, thme, donnant ainsi un sens

    leur action par la seule rflexivit du discours. Ethno se rfre ici conjointe-

    ment la culture, aux croyances locales dun membre de la socit au-del de son

    appartenance une groupe dtermin et la connaissance dont dispose ce mem-

    bre de cette culture dont il est la fois lacteur, le protagoniste, lauteur et le spec-tateur (Widmer, 1986 ; Coulon, 1987). La perspective ethnomthodologique per-

    met galement daborder les ordres de grandeur qui hirarchisent lidologie

    sociale, donc les relations dordre entre les individus au sein des institutions,

    daprs ce dont les gens sont capables (Boltanski, 1990 ; Thvenot & Boltans-

    ki, 1991).

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 18

    Lanalyse de discours tend ainsi prendre un tournant anthropologique o

    les problmes de lintersubjectivit et de laltrit sont au centre des proccupa-

    tions des jeunes historiens du discours. Ltude de Sophie Wahnich (1997) sur la

    thmatique de ltranger pendant la Rvolution franaise savre tout fait signi-ficative de ce tournant.

    Sans entrer dans les rsultats de ltude de trajets thmatiques trs intriqus,

    constatons dabord que ce travail discursif sur lespace interlocutif du discours

    dassemble pendant la Rvolution franaise montre la capacit produire des

    rsultats historiques dun travail configurationnel sur les noncs darchive. Son

    apport central au tournant anthropologique tient une recherche en cours

    (2002) sur la thmatisation des motions au sein mme des discours argumentatifs

    politiques de la Rvolution franaise. La rflexivit langagire du thme des mo-tions devient ainsi un objet de recherche part entire au sein dune conomie

    motive de lvnement qui peut prendre, dans certains cas, la forme dune co-

    nomie linguistique. Ainsi en est-il lorsque les Montagnards, en lan II, dnoncent

    lusage fortement motif par les Anglais de syntagmes figs (les soldats de Ro-

    bespierre, les hordes conventionnels), de structures syntaxiques ( Robespierre a

    fait ordonner, les hordes conventionnels ont fait ...) lencontre de

    lappropriation historique et mmorielle des vnements rvolutionnaires (Wah-

    nich, 1999). Nous pouvons terminer ce point par un autre exemple particulire-

    ment significatif de la mise lcart de la question de la construction du corpus

    dans lanalyse configurationnelle des noncs darchive : lorsque Sophie Wahnich

    montre que lacte de demande constitutif de la radicalit rvolutionnaire ds 1789

    devient lui-mme un acte motif, qui plus est que la demande motive de terreur

    est prsente ds 1792 et prcde donc la mise lordre du jour de la terreur pen-

    dant lt 1793, elle contourne le corpus des noncs darchive, aussi vaste soit-il,

    de lvnementialit particulirement dense de lt 1793, pour aller au plus pro-

    fond de la rationalit pratique des motions.

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 19

    3. Les nouvelles conditions

    du retour au corpus

    Retour la table des matires

    vrai dire, tant chez lhistorien que chez le linguiste, la construction du cor-

    pus, selon une procdure explicite et sur la base dune validation empirique, tait

    perue comme une donne scientifique permettant dlargir la continuit du social

    vers les phnomnes langagiers. Dsormais, le choix dune chelle dobservation,

    et plus spcifiquement la dtermination dun observatoire des discours selon le

    point de vue adopt prime dans lopration de construction du corpus.Nous lavons constat au moment o nous avons pu confronter, de concert

    avec dautres linguistes, diverses dmarches en analyse de discours qui ont pour

    trait commun de sintresser des corpus historiques dune part, et de prendre en

    compte la matrialit du langage et des formes de la langue dautre part (Branca-

    Rosoff, Collinot, Guilhaumou & Mazire, 1995).

    Au terme de cette confrontation, il est apparu au moins trois modalits diff-

    rentes dobservatoire linguistique, dont dpend lopration mme de construction

    du corpus.

    Il est tout dabord question dun observatoire des discours o se confrontent

    en permanence la matrialit des formes linguistiques et les valeurs de

    linstitution sociale fortement mobilises dans lopration de construction du cor-

    pus. Ici lobservateur-linguiste porte toute son attention sur les ressources inter-

    prtatives des discours en les interprtant pas la mdiation des formes linguisti-

    ques, et plus largement des formes de lcriture. Cest ainsi que Sonia Branca et

    Nathalie Schneider (1994) ont constitu un corpus des manires de dire formes

    socialement rgles mais soumises des dplacements, en particulier sur laxeoral / crit des peu-lettrs provenaux pendant la Rvolution franaise partir

    de discours publics manuscrits. Cet observatoire des discours accorde une place

    importante la lexicologie sociale sur la base dune approche du mot comme no-

    tion htrogne (Branca (d.), 1998). De ce fait, la lexicologie peut tout aussi bien

    sintresser la valeur dusage dun mot dans un vaste corpus ouvert comme

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 20

    Frantex, enrichi de lectures complmentaires, lexemple de ltude du mot clas-

    se par Marie-France Piguet (1996) que sen tenir une premire analyse exhausti-

    ve dun corpus bien dlimit, pour lenrichir ensuite sur la base de nouvelles sour-

    ces. Ainsi la saisie vif de lusage des mots rsulte dune clture en profondeurdu corpus, par la rencontre avec larchive, et propos de laquelle le mieux est ...

    de ne pas clore (Eluerd, 2000 : 101).

    En second lieu, larrive rcente de lanalyste du discours dans le champ de

    lhistoire de la linguistique (Auroux, 1989-1999) fait apparatre un observateur-

    historien soucieux de dcrire, dans la connexion empirique entre la ralit et le

    discours un moment historique donn, les capacits rflexives de sujets de la

    langue explicitement dots doutils et de conscience linguistiques, par exemple les

    grammairiens-philosophes du 18me

    sicle (Guilhaumou 2001b et 2002). Le travaildarchives permet non seulement de fournir un matriau empirique indit, mais

    aussi de cerner la langue empirique en tant quelle est compose dtats et de su-

    jets cognitifs fixant le possible en langue. Il ne sagit donc pas de dcrire de sim-

    ples manifestations de conscience linguistique au sein de lvnement discursif,

    mais plus avant de reprer dans lespace-temps de la communication humaine les

    sujets et les objets, par exemple le quelquun qui parle et le quelque chose qui

    existe comme sujet politique de la langue franaise au 18me sicle, au sein dune

    vnementialit originaire vide dune signification premire mais qui juge de

    lappartenance de chacun une communaut de langage. Cet observatoire, consti-

    tu dans la connexion empirique entre un matriau archiviste et une langue arch-

    typique, ne peut sautoriser, vrai dire, daucune autre opration de construction

    de corpus que de lexistence externe dobjets linguistiques. Sur cette base cogniti-

    ve, toutes sortes de connexions sont possibles, y compris dans lespace fortement

    subjectif et rflexif de lvnement discursif, processus qui continue sexpliquer

    pour une part par la capacit rflexive des acteurs agissant en son sein.

    La rflexivit gnralise des discours, propre la dmarche hermneutique

    en histoire du discours des annes en 1980, est actuellement fortement nuancepar une interrogation sur un rfrent toujours intersubjectivement ngociable,

    tant alors entendu que la forme langagire de laccord humain, de

    lintentionnalit collective importe beaucoup plus que la signification du contenu

    des reprsentations. Dans cette perspective, le corpus est soit une modalit de

    structuration du savoir en analyse de discours minemment transitoire donc qui

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 21

    peut disparatre, soit un nouvel objet technique analogue au mode dexistence

    matriel de la langue. Le dbat sur le corpus peut alors reprendre, nous le verrons,

    si lon part de la remarque suivante, vrai dire trs matrielle : la langue a lair

    assez diffrente quand on examine un grand morceau dun coup (cit par Ha-bert, Nazarenko & Salem, 1997 : 217).

    Cependant, il convient dabord de dlimiter un troisime observatoire possi-

    ble, lobservatoire de la langue constitu partir de lhtrognit mme du dis-

    cours. Cet observatoire est toujours pris dans la tension dune instrumentation

    confronte en permanence avec les avances de la linguistique au sein de mo-

    ments de corpus o se manifeste la matrialit de la langue dans la discursivit de

    larchive. Cependant, le processus de construction du corpus est alors motiv par

    lassociation de lexigence formaliste un geste de lecture effectu au seindunivers discursifs non stabiliss logiquement. Il relve de la constitution de

    machines paradoxales qui interdisent toute construction du corpus par tapes

    et ordre fixe. Une fois acquis, sans connotation intentionaliste, que cest de

    lintrieur du champ discursif, dans limmense circulation des noncs, que la

    question du corpus est dsormais pose, linteraction de moments de lanalyse

    linguistique et de lanalyse discursive relve de la production en spirales de re-

    configurations de corpus (Pcheux, 1990). Ce troisime observatoire peut

    stendre aux objets linguistiques eux-mmes, par exemple les dictionnaires (Col-

    linot & Mazire, 1997), en vue de mettre en vidence des fonctionnements aveu-

    gles des discours dans la mise en collocation des mots entre eux et dans les per-

    turbations apportes par le recours aux citations.

    Dans tous les cas voqus ci-dessus, lexigence initiale dun corpus stable,

    homogne et clos a t abandonne. Pour le jeune historien du discours Marc De-

    leplace, cet abandon, justifi par la ncessaire ouverture au large ventail des pu-

    blications imprimes et des sources manuscrites, permet de passer du discours

    comme simple objet de lhistoire au discours constitu comme objet social en lui-

    mme (Deleplace, 1996). Ainsi rejoint-il la rflexion de lhistorien allemandReinhart Koselleck (1997) sur la connexion empirique entre ralit et discours

    dans la ncessaire distinction entre les faits sociaux et les faits de langage. Mais il

    lui importe tout autant dassurer la cohrence du corpus utilis de manire ga-

    rantir la permutation des nonciateurs. Et de citer Antoine Prost, un de ses ans

    historiens les plus intresss par lanalyse de discours : Nous avons vu que ce

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 22

    corpus devait prsenter trois caractres : tre contrastif, pour permettre des com-

    paraisons ; tre diachronique, cest--dire schelonner dans le temps, pour per-

    mettre de reprer continuits et tournants ; enfin tre constitu, sinon de textes

    dorganisation, du moins de textes significatifs, assignables des situations decommunication dtermines (1988 : 280). Caractres que nous retrouvons donc

    dans le vaste travail de Marc Deleplace sur le concept danarchie de Mably

    Proudhon (2001).

    En fin de compte, lanalyse de discours du ct de lhistoire en France souvre

    sur une histoire linguistique des usages conceptuels en tant que partie intgrante

    de lhistoire langagire des concepts (Guilhaumou, 2000). Elle garde ainsi sa sp-

    cificit tout en sintgrant au sein dun cadre europen plus large dans la mesure

    o elle introduit, dans la dsignation commune dhistoire des concepts, deux no-tions centrales dans les travaux franais : lune, lusage, associe une longue

    tradition danalyse lexicologique de lusage des mots en discours (Eluerd, 2000),

    lautre, la linguistique, issue dun champ de la linguistique en France o chaque

    volution majeure ncessite un repositionnement par rapport la rfrence relati-

    vement stable au mtier dhistorien. La rcente publication collective du labora-

    toire de lexicologie politique de Saint-Cloud, sous la responsabilit de Pierre Fiala

    (1999), amorce une telle volution. En son sein, nous notons en particulier la pr-

    sence de lhistorienne de la Rvolution franaise, Raymonde Monnier, lune des

    responsables par ailleurs du rseau europen History of concepts dont les r-

    cents travaux (1999a et b) marquent une volution sensible vers lanalyse de dis-

    cours.

    Nous avons vu que lanalyse de discours a considrablement progress par la

    prise en compte de la rflexivit du discours. Plutt que de prciser les enjeux

    dune telle catgorisation sur une base rflexive, dans la mesure o nous lavons

    dj fait dans la postface relative aux historiens et au tournant hermneutique

    de notre ouvrage de synthse sur les porte-parole pendant la Rvolution franaise

    (1998), nous prfrons montrer en quoi limpact de cette volution sur la lexico-mtrie ouvre une perspective novatrice en matire de construction de corpus.

    Au-del de lapport de la lexicomtrie au travail du linguiste sur des matriaux

    historiques, relatifs en particulier la Rvolution franaise (Moreau-Steuckardt,

    2000), nous retiendrons comme particulirement significatif de cette volution le

    rcent travail de Damon Mayaffre (2000), qui nous entrane sur les rives du dis-

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 23

    cours politique franais de lentre-deux-guerres. Dans la mesure o ce jeune cher-

    cheur prcise ici mme loriginalit de sa dmarche en matire de construction de

    corpus, nous nous contentons de souligner les apports qui nous semblent essen-

    tiels de sa premire recherche, lui laissant ainsi le soin den systmatiser les ou-vertures nouvelles.

    La premire originalit de ce travail rside dans la constitution d'un vaste cor-

    pus denviron 1 500 000 occurrences rparties de manire peu prs quivalentes

    entre les discours de quatre dirigeants politiques des annes 30, Thorez, Blum,

    Flandin et Tardieu, sur une dizaine dannes, justifiant ainsi une tude la fois

    contrastive, synchronique et diachronique. La lexicomtrie, avec sa bote outils

    (les listes de frquences et de rpartition des formes par sous-corpus, l'analyse

    factorielle des correspondances valeur globalisante, les noncs rpts, etc.),est mise contribution tout au long de ce travail. Mais ce quil importe avant tout

    de souligner, cest quil sagit dune exprimentation tout fait novatrice en ma-

    tire de trs grand corpus : il est avant tout question ici du corpus discursif lui-

    mme comme objet dhistoire lhorizon dun genre discursif spcifique.

    Ainsi les critres usuels de constitution de corpus (homognit, contrastivit

    et diachronicit) sont respects, mais ils naboutissent pas lchantillonnage

    habituel. Le choix se veut quasi-exhaustif dans le champ discursif tudi, le dis-

    cours parlementaire de quatre dirigeants politiques, sur la base dun travaildarchivage et de numrisation systmatique. Cest donc le corpus lui-mme, plus

    exactement sa description partir de critres quantitatifs, qui constitue sa propre

    norme interprtative.

    Qui plus est, lanalyse de discours sur des corpus de faible envergure devait

    faire appel en permanence des donnes contextuelles pour valider

    linterprtation historique. Mais ici la taille mme du corpus rend possible, dans

    de nombreux cas, la prsence du contexte dans le texte lui-mme. Cette question

    de la rflexivit du corpus, donc de la disponibilit, dans le corpus lui-mme,

    dune grande partie des ressources ncessaires pour interprter les discours politi-

    ques tudis marque un bond qualitatif par rapport aux tudes lexicomtriques

    antrieures. Nous percevons tout particuli-rement lintrt de cette dmarche au

    moment de linter-prtation historique des rsultats, l o les textes lappui du

    dbat sur des questions historiographiques prcises sont le plus souvent des textes

    du corpus qui font en quelque sorte rseau. L stablit un lien fructueux avec la

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 24

    manire dont les historiens des concepts reposent actuellement la question du

    contexte partir de la prise en compte du lien entre les croyances au sein de r-

    seaux interconnects (Guilhaumou, 2001c).

    Au systme citationnel usuel constitu sur la base dune lecture ordinaire dun

    hors-corpus dfinissant la situation de communication se substitue donc une mise

    en configuration construite lintrieur mme de lespace du corpus. Le temps du

    corpus limit, chantillonn, clos est dsormais bien rvolu chez les historiens du

    discours. Et dans le mme temps, la spcificit de la dmarche franaise en analy-

    se de discours, acquise ds son origine et qui est de faire appel des outils lin-

    guistiques danalyse au sens large, demeure avec les modifications inhrentes

    lenrichissement de loutillage mthodologique de lanalyse de discours.

    CONCLUSION:LES NOUVEAUX CORPUS

    Retour la table des matires

    Lanalyse de discours naccordait en ses dbuts aucune place particulire la

    question des genres discursifs, dautant plus que la notion de genre tait gnra-

    lement rapporte une catgorie idologique pr-construite. Cependant il est aisde constater que les nouveaux historiens du discours voluent majoritairement, en

    matire de corpus historiques, dans un genre politique fortement lgitim, le dis-

    cours parlementaire.

    ce titre, il importe dsormais dexpliciter, dans la ligne des travaux de

    Pierre Achard (1995) et de Sonia Branca (1999), la dynamique des genres dans la

    constitution de nouveaux corpus.

    Ainsi Pierre Achard sintresse la manire dont tout chercheur peut homo-

    gniser des discours, donc les constituer en corpus, sur la base de lorganisationinterne de leur nonciation. Il sagit alors, pour le sociologue du langage, de pren-

    dre en compte conjointement lnonciation telle que le dveloppement interne

    du discours la dploie et les actions sociales dont le discours est le support

    (Achard, 1995 : 87). Le registre discursif dsigne alors la modalit ainsi mise en

    oeuvre de construction sociale du sens laquelle sassocie ncessairement un gen-

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    J. Guilhaumou, Le corpus en analyse de discours : perspective historique. (2002) 25

    re discursif reprable par des lments linguistiques internes. La langue comme

    objet social, dans la ligne des travaux de Rene Balibar sur le colinguisme

    (Branca-Rosoff & Wionet, 1998), est un exemple particulirement intressant de

    registre discursif.

    Dans cette voie, il est galement possible denvisager, sur le versant de

    lvnement linguistique, la formation de nouveaux corpus par une attention par-

    ticulire la restructuration des formes langagires plus ou moins stabilises

    que constituent les genres (Branca-Rosoff, 1999 : 125). Il ne sagit pas de rep-

    rer la formation dun nouveau genre par une simple accumulation de faits linguis-

    tiques, mais de mettre en valeur la monte progressive de formes, leur visibilit,

    par un dplacement de normes autorises dans un contexte de rupture. Ainsi en

    est-il de lcriture des peu-lettrs pendant la Rvolution franaise (Branca-Rosoff& Schneider, 1994) qui peut faire corpus par la manire dont les chercheures va-

    lorisent sa dimension rflexive, sa crativit au sein mme de lvnement rvolu-

    tionnaire

    Nous constatons donc que laspect rflexif du discours prend une importance

    toujours plus grande dans la procdure de formation de nouveaux corpus. Il sagit

    en effet dassocier dans un corpus issu de lactivit langagire de locuteurs prcis

    non seulement des acteurs stratgiques et des acteurs mergents, des experts et

    des militants ordinaires, des protagonistes et des spectateurs, mais aussi les cher-cheurs en sciences sociales eux-mmes. Nous entrons ainsi dans un processus de

    co-construction des corpus o la question de larticulation du discours et du m-

    tadiscours constitue une dynamique interne la formation de nouveaux corpus.

    De plus en plus, le chercheur est confront, dans le matriau denqute et/ou

    le matriau darchive, des configurations de sens indites qui contribuent valo-

    riser des sujets mergents, cest--dire pris, selon la formule de Michel Pcheux

    (1990), dans la dlocalisation tendancielle du sujet dnonciation . Il est alors

    interpell par des formes nouvelles de subjectivation et par des objets notionnels

    indits. Nous lavons constat dans notre recherche conjointe avec des sociolo-

    gues et des ethnologues (Mesini, Pelen & Guilhaumou, 2003) sur les acteurs

    mergents, dits exclus dans le champ de la lutte contre lexclusion. Lhistorien

    linguiste tend ici singulariser, dans les rcits de vie des dits exclus, un trajet

    narratif o lautonomie interprtative des ressources du sujet dnonciation,

    lenqut, est trs forte au point que les arguments avancs sont co-construits

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    part gale entre lenquteur et lenqut. Le corpus analys consiste alors dans un

    trajet nonciatif o ltude de fonctionnements linguistiques met en vidence une

    reconnaissance rciproque de lenquteur et de lenqut, un co-partage des res-

    sources entre co-auteurs, traduisant ainsi la violence exerce par la socit sur lesdits exclus en une certaine forme de rconciliation discursive, sans pour autant

    occulter les formes de rsistance et de conflit. En effet, le chercheur est confront

    lui-mme sa propre responsabilit en matire de qute dautonomie. De fait

    lirruption de la parole du dit exclu est si forte quelle fait clater conjointe-

    ment la notion de sujet social dpendant et celle de chercheur-expert matrisant

    son mtadiscours. Ainsi, interpell par une recherche dautonomie, lenquteur ne

    se contente pas de se laisser guider par les convictions de lenqut. Prenant sa

    part de responsabilit dans lmergence dune dimension universalisante de

    lexpression authentique de lindividu empirique, il participe aux moments forts

    producteurs darguments dans le cours du trajet narratif. Son point de vue fait

    donc partie intgrante du corpus analys, et ne ncessite donc pas la construction

    dun observatoire spar.

    La rflexivit du discours, thme dsormais majeur de lanalyse de discours, a

    ouvert la voie au corpus rflexif non seulement sous la forme du trs grand cor-

    pus o texte et contexte se retrouvent dans un mme espace construit, mais aussi

    sous la forme de corpus co-construits lintrieur desquels le point de vue du

    chercheur est lune des donnes majeures de la construction de ces corpus. Dou-

    ble dfi que la lexicomtrie semble actuellement apte relever. Nous lavons

    montr propos des travaux rcents de Damon Mayaffre sur les trs grands

    corpus . Il en est de mme, en matire dencodage du corpus, lorsque Serge Hei-

    den (1999) prvoit une solution dextensibilit du format dencodage mis en u-

    vre dans lannotation du corpus, non seulement sur la base de lvolution future

    des logiciels danalyse, mais aussi en fonction de la variation du point de vue du

    chercheur.

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