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COUPLE RADIO-ECHOGRAPHIE : QUEL ROLE DANS LA STRATEGIE DIAGNOSTIQUE DE LA LITHIASE DE LA GLANDE SOUS-MANDIBULAIRE Siaka Ben-Aziz DAO (1), Y GYEBRE (2), M SEREME (2), O DIALLO (1), B OUATTARA (1), R ZOUNGRANA, D GOITA (1), R CISSE (1). 1- Service de Radiologie et d’Imagerie Médicale.. 2- Service d’ORL et de Chirurgie Cervico-Faciale. CHU-Yalgado Ouédraogo Burkina Faso INTRODUCTION La lithiase salivaire se définit par la présence de calcul au niveau de la glande et/ou des canaux salivaires. Elle représente la plus fréquente affection des glandes salivaires principales, soit plus de 50% [1]. L’atteinte implique dans 80 à 90% la glande sous mandibulaire tandis que le restant concerne presquexclusivement la parotide [1-3]. De nos jours plusieurs techniques d’imagerie médicale peuvent explorer les sialolithiases sous- mandibulaires telles que la radiographie conventionnelle, la sialographie conventionnelle ou digitale, l’échographie, le scanner, l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) et la sialo-endoscopie. Si le diagnostique de la sialolithiase est dévolu au scanner sans injection aux Etats Unis, en Europe cela relève plutôt de l’échographie ou de la sialographie digitale . Ainsi la stratégie diagnostique de la lithiase sous mandibulaire n’est pas univoque en Occident où le plateau technique est riche. Quelle peut-être sa meilleure démarche diagnostique dans un contexte de rareté des ressources? OBSERVATION Il s’agissait d’un homme de 47ans, adressé pour une échographie cervicale en raison d’une tuméfaction sous mandibulaire droite, intermittente et douloureuse. Il n’y’avait aucun antécédent important, en dehors d’une symptomatologie similaire évoluant depuis seize ans. L’examen notait une tuméfaction sous mandibulaire droite, globale, ferme, sensible et sans signe local d’inflammation. Le versant homolatéral du plancher buccal présentait une nette procidence. La biologie était revenue normale. L’échographie sur un échographe-doppler de type Voluson S8 de General Electric, muni d’une sonde superficielle (12MHz) avait retrouvé, d’une part un arc échogène irrégulier muni d’un cône d’ombre postérieur de 15.3mm au niveau du hile de la glande sous- mandibulaire droite et d’autre part, une augmentation de taille de la glande, une hypo-échogenicité et un rehaussement au Döppler couleur. Ces anomalies étaient compatibles à priori avec une lithiase compliquée d’une sialadénite (Figure 1). Le cliché de défilé mandibulaire droit, avait montré par la suite le caractère pseudo-stratifié de la lésion, confortant ainsi le diagnostic de sialolithiase (Figure 2). La sous mandibulectomie avait objectivé un calcul intra- parenchymateux centimétrique avec une suite favorable (Figure 3). L’examen anatomo-pathologique avait posé le diagnostic d’une sialadénite chronique non spécifique. Plus de 6 mois après, l’évolution était marquée par la résolution complète des plaintes. DISCUSSION-COMMENTAIRE La composition chimique de la salive de la glande sous-mandibulaire et les particularités anatomiques du canal de Wharton expliquent sa fréquence élevée en sialolithiases. Selon l’une des théories éthiopathogéniques, la formation de la lithiase salivaire résulte d’une précipitation de sel de calcium autour d’un « cœur » constitué de cellules épithéliales desquamées, de bactéries ou de mucus . Il en résulte un caractère radio-opaque et une architecture lamellaire. Ces caractéristiques sont objectivables à la radiographie conventionnelle sous forme d’une opacité de tonalité calcique, munie d’un centre moins radio-opaque. Cela était le cas dans notre observation tout comme dans la littérature. Dans une série nigérienne, rapportée par Salha et al, 15 patients sur 27, opérés pour calcul sous-mandibulaire, avaient bénéficié de la réalisation d’une radiographie conventionnelle, soit un taux de réalisation de 0.56 . La radiographie de la glande sous mandibulaire comprend des incidences intra ou extra-orales. Parmi celles-ci, le cliché de défilé mandibulaire est le plus souvent demandé dans le contexte sub-saharien. Thiam et al, au Sénégal documentent la réalisation de cette incidence radiographique chez 20 patients opérés également pour lithiase sur un total de 30, soit un taux de réalisation de 0.67. Ainsi le bilan de la lithiase sous mandibulaire motive la pratique de la radiographie standard dans plus de 50% des cas. Plusieurs avantages tels que l’accessibilité financière et géographique, la nature peu irradiante et non invasive justifient ce constat. Toutefois plus de 20% des lithiases sous mandibulaires sont radio-transparentes. Par ailleurs, la taille moyenne de 4.3mm et le nombre multiple des sialolithiases représentent les seconde et troisième limites à l’indication de la radiographie conventionnelle . Si ces insuffisances sont invraisemblables pour le diagnostic d’une lithiase d’au moins 15mm, comme dans notre observation, ailleurs, elles nécessitent le recours à l’imagerie en coupe. La modalité qui a la faveur des prescripteurs, est l’échographie, contrairement au scanner sans injection aux USA. Il s’agit d’une exploration avantageuse de la loge sous mandibulaire, permettant de diagnostiquer aussi bien la lithiase que ses complications. Elle avait été moins fréquemment réalisée que la radiographie conventionnelle dans les deux études sous régionales sus-citées. Son accessibilité, sa performance et son innocuité en font un examen de première intention, comme cela est le cas en Europe. Toutefois l’échographie reste « manipulateur- dépendant ». La sensibilité de l’échographie atteint 94% contre 86% pour la radiographie selon Youssem en citant la série de Gritzmann. Rarement le scanner, l’IRM ou la sialographie sont prescrits dans notre contexte devant une suspicion de lithiase de la glande sous mandibulaire. Par ailleurs, le coût moyen du couple radio-échographie est d’environ la moitié de celui du scanner et le cinquième de celui de l’IRM. Dans notre observation, la découverte de la lithiase sous-mandibulaire avait été fortuite à l’échographie, motivée par une tuméfaction cervicale. Autrement, la suspicion clinique de sialolithiase s’accompagne le plus souvent d’un complément à la radiographie conventionnelle. Quelque soit l’incidence radiographique réalisée, la recherche du caractère lamellaire de la lésion devrait être d’une grande importance. A notre avis l’échographie devrait être systématiquement associée à la radiographie, afin de dépister un syndrome obstructif, un remaniement infectieux et surtout une lithiase radio-transparente. Quant à la radiographie, elle permet de ne pas méconnaître des calculs adjacents décrits comme une lithiase unique à l’échographie. Le scanner pourrait être réservé aux seuls cas d’échec du couple radio-échographie. En revanche, nous déconseillons la réalisation d’une IRM aux seuls fins d’un bilan de sialolithiase de la glande sous mandibulaire. Par ailleurs, l’échographie avait assuré le contrôle post-opératoire avec une suite favorable. CONCLUSION En Afrique sub-saharienne, l’exploration radiologique de la lithiase sous mandibulaire, pourrait se baser avantageusement sur le couple radio-échographie en raison de sa disponibilité, de son accessibilité et de sa fiabilité. Ainsi, les autres modalités seraient indiquées en seconde intention. BIBLIOGRAPHIE 1. Witt RL. Salivary gland diseases, surgical and medical management. Thieme Medical Pub. (2006) ISBN:1588904148. 2- Sumi M, Izumi M, Yonetsu K et-al. The MR imaging assessment of submandibular gland sialoadenitis secondary to sialolithiasis: correlation with CT and histopathologic findings. AJNR Am J Neuroradiol. 1999;20 (9): 1737-43. 3- Jäger L, Menauer F, Holzknecht N et-al. Sialolithiasis: MR sialography of the submandibular duct--an alternative to conventional sialography and US? Radiology. 2000;216 (3): 665-71.

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COUPLE RADIO-ECHOGRAPHIE : QUEL ROLE DANS LA STRATEGIE DIAGNOSTIQUE DE LA LITHIASE DE LA GLANDE

SOUS-MANDIBULAIRE Siaka Ben-Aziz DAO (1), Y GYEBRE (2), M SEREME (2), O DIALLO (1), B OUATTARA (1), R ZOUNGRANA, D GOITA (1), R CISSE (1).

1- Service de Radiologie et d’Imagerie Médicale.. 2- Service d’ORL et de Chirurgie Cervico-Faciale. CHU-Yalgado Ouédraogo – Burkina Faso

INTRODUCTION

La lithiase salivaire se définit par la présence de calcul au niveau de la glande et/ou des canaux salivaires. Elle représente la plus fréquente affection des glandes

salivaires principales, soit plus de 50% [1]. L’atteinte implique dans 80 à 90% la glande sous mandibulaire tandis que le restant concerne presqu’ exclusivement la

parotide [1-3]. De nos jours plusieurs techniques d’imagerie médicale peuvent explorer les sialolithiases sous- mandibulaires telles que la radiographie conventionnelle,

la sialographie conventionnelle ou digitale, l’échographie, le scanner, l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) et la sialo-endoscopie. Si le diagnostique de la

sialolithiase est dévolu au scanner sans injection aux Etats Unis, en Europe cela relève plutôt de l’échographie ou de la sialographie digitale . Ainsi la stratégie

diagnostique de la lithiase sous mandibulaire n’est pas univoque en Occident où le plateau technique est riche. Quelle peut-être sa meilleure démarche diagnostique dans

un contexte de rareté des ressources?

OBSERVATION

Il s’agissait d’un homme de 47ans, adressé pour une échographie cervicale en raison d’une tuméfaction sous mandibulaire droite, intermittente et douloureuse. Il n’y’avait

aucun antécédent important, en dehors d’une symptomatologie similaire évoluant depuis seize ans. L’examen notait une tuméfaction sous mandibulaire droite, globale,

ferme, sensible et sans signe local d’inflammation. Le versant homolatéral du plancher buccal présentait une nette procidence. La biologie était revenue normale.

L’échographie sur un échographe-doppler de type Voluson S8 de General Electric, muni d’une sonde superficielle (12MHz) avait retrouvé, d’une part un arc échogène

irrégulier muni d’un cône d’ombre postérieur de 15.3mm au niveau du hile de la glande sous- mandibulaire droite et d’autre part, une augmentation de taille de la glande,

une hypo-échogenicité et un rehaussement au Döppler couleur. Ces anomalies étaient compatibles à priori avec une lithiase compliquée d’une sialadénite (Figure 1). Le

cliché de défilé mandibulaire droit, avait montré par la suite le

caractère pseudo-stratifié de la lésion, confortant ainsi le diagnostic de sialolithiase (Figure 2). La sous mandibulectomie avait objectivé un calcul intra-

parenchymateux centimétrique avec une suite favorable (Figure 3). L’examen anatomo-pathologique avait posé le diagnostic d’une sialadénite chronique non

spécifique. Plus de 6 mois après, l’évolution était marquée par la résolution complète des plaintes.

DISCUSSION-COMMENTAIRE

La composition chimique de la salive de la glande sous-mandibulaire et les particularités anatomiques du canal de Wharton expliquent sa fréquence élevée en

sialolithiases. Selon l’une des théories éthiopathogéniques, la formation de la lithiase salivaire résulte d’une précipitation de sel de calcium autour d’un « cœur »

constitué de cellules épithéliales desquamées, de bactéries ou de mucus . Il en résulte un caractère radio-opaque et une architecture lamellaire. Ces caractéristiques

sont objectivables à la radiographie conventionnelle sous forme d’une opacité de tonalité calcique, munie d’un centre moins radio-opaque. Cela était le cas dans notre

observation tout comme dans la littérature. Dans une série nigérienne, rapportée par Salha et al, 15 patients sur 27, opérés pour calcul sous-mandibulaire, avaient

bénéficié de la réalisation d’une radiographie conventionnelle, soit un taux de réalisation de 0.56 . La radiographie de la glande sous mandibulaire comprend des

incidences intra ou extra-orales. Parmi celles-ci, le cliché de défilé mandibulaire est le plus souvent demandé dans le contexte sub-saharien. Thiam et al, au Sénégal

documentent la réalisation de cette incidence radiographique chez 20 patients opérés également pour lithiase sur un total de 30, soit un taux de réalisation de 0.67. Ainsi

le bilan de la lithiase sous mandibulaire motive la pratique de la radiographie standard dans plus de 50% des cas. Plusieurs avantages tels que l’accessibilité financière et

géographique, la nature peu irradiante et non invasive justifient ce constat. Toutefois plus de 20% des lithiases sous mandibulaires sont radio-transparentes. Par

ailleurs, la taille moyenne de 4.3mm et le nombre multiple des sialolithiases représentent les seconde et troisième limites à l’indication de la radiographie conventionnelle

. Si ces insuffisances sont invraisemblables pour le diagnostic d’une lithiase d’au moins 15mm, comme dans notre observation, ailleurs, elles nécessitent le recours à

l’imagerie en coupe. La modalité qui a la faveur des prescripteurs, est l’échographie, contrairement au scanner sans injection aux USA. Il s’agit d’une exploration

avantageuse de la loge sous mandibulaire, permettant de diagnostiquer aussi bien la lithiase que ses complications. Elle avait été moins fréquemment réalisée

que la radiographie conventionnelle dans les deux études sous régionales sus-citées. Son accessibilité, sa performance et son innocuité en font un examen de première

intention, comme cela est le cas en Europe. Toutefois l’échographie reste « manipulateur- dépendant ». La sensibilité de l’échographie atteint 94% contre 86% pour

la radiographie selon Youssem en citant la série de Gritzmann. Rarement le scanner, l’IRM ou la sialographie sont prescrits dans notre contexte devant une suspicion

de lithiase de la glande sous mandibulaire. Par ailleurs, le coût moyen du couple radio-échographie est d’environ la moitié de celui du scanner et le cinquième de celui de

l’IRM. Dans notre observation, la découverte de la lithiase sous-mandibulaire avait été fortuite à l’échographie, motivée par une tuméfaction cervicale. Autrement, la

suspicion clinique de sialolithiase s’accompagne le plus souvent d’un complément à la radiographie conventionnelle. Quelque soit l’incidence radiographique réalisée, la

recherche du caractère lamellaire de la lésion devrait être d’une grande importance. A notre avis l’échographie devrait être systématiquement associée à la radiographie,

afin de dépister un syndrome obstructif, un remaniement infectieux et surtout une lithiase radio-transparente. Quant à la radiographie, elle permet de ne pas méconnaître

des calculs adjacents décrits comme une lithiase unique à l’échographie. Le scanner pourrait être réservé aux seuls cas d’échec du couple radio-échographie. En

revanche, nous déconseillons la réalisation d’une IRM aux seuls fins d’un bilan de sialolithiase de la glande sous mandibulaire. Par ailleurs, l’échographie avait assuré le

contrôle post-opératoire avec une suite favorable.

CONCLUSION

En Afrique sub-saharienne, l’exploration radiologique de la lithiase sous mandibulaire, pourrait se baser avantageusement sur le couple radio-échographie

en raison de sa disponibilité, de son accessibilité et de sa fiabilité. Ainsi, les autres modalités seraient indiquées en seconde intention.

BIBLIOGRAPHIE

1. Witt RL. Salivary gland diseases, surgical and medical management. Thieme Medical Pub. (2006) ISBN:1588904148. 2- Sumi M, Izumi M, Yonetsu K et-al. The MR imaging assessment of

submandibular gland sialoadenitis secondary to sialolithiasis: correlation with CT and histopathologic findings. AJNR Am J Neuroradiol. 1999;20 (9): 1737-43. 3- Jäger L, Menauer F, Holzknecht N

et-al. Sialolithiasis: MR sialography of the submandibular duct--an alternative to conventional sialography and US? Radiology. 2000;216 (3): 665-71.