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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10e Chambre ARRÊT AU FOND DU 19 JUIN 2014 N° 2014/343 Rôle N° 10/00645 Sabine E. C/ Didier M.

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 10e Chambre · PDF filereprésenté par Me Joseph-Paul M. de la SCP PAUL ET JOSEPH M., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Pascal C.,

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COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 19 JUIN 2014

N° 2014/343

Rôle N° 10/00645

Sabine E.

C/

Didier M.

MUTUELLE D'ASSURANCES DES PROFESSIONS ALIMENTAIRES MAPA

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE - CPAM

Grosse délivrée

le :

à :

Me B.

Me M.

Décision déférée à la Cour :

arrêt de la Cour de Cassation en date du 10 Novembre 2009 enregistré au répertoire général sous le n° H08/16920 cassant et annulant l'arrêt rendu par la 10ème chambre de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE le 25 Mars 2008.

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Tarascon en date du 7 Novembre 2002.

DEMANDERESSE A LA SAISINE

Mademoiselle Sabine E.

née le 23 Juillet 1962 à [...], demeurant [...]

représentée par Me Françoise B. de la SELARL B. C. I., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Michel D. de la SCP D. & ASSOCIES, avocat au barreau d'AVIGNON,

DÉFENDEURS A LA SAISINE

Monsieur Didier M.

demeurant [...]

représenté par Me Joseph-Paul M. de la SCP PAUL ET JOSEPH M., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Pascal C., avocat au barreau de MARSEILLE

MUTUELLE D'ASSURANCES DES PROFESSIONS ALIMENTAIRES MAPA, agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis, [...]

représentée par Me Joseph-Paul M. de la SCP PAUL ET JOSEPH M., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Pascal C., avocat au barreau de MARSEILLE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES DU RHONE, prise en la personne de son représentant légal domicilié au siège, assignée à personne habilitée[...]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 15 Avril 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Lise LEROY-GISSINGER, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christiane BELIERES, Présidente

Mme Jacqueline FAURE, Conseiller

Madame Lise LEROY-GISSINGER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Juin 2014

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Juin 2014,

Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Geneviève JAUFFRES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Mme E., née le 23 juillet 1962, a été victime, le 26 juin 1994, d'un accident de la circulation impliquant le véhicule conduit par M. M., assuré auprès de la Mutuelle assurance des professions alimentaires (MAPA), qui ne conteste pas devoir l'indemniser. Le lendemain de l'accident, Mme E. a souffert de cervicalgies. En octobre 1994, elle a présenté une importante anorexie puis est apparue progressivement à compter du mois de mars 1995, une paralysie des membres inférieurs remontant au milieu du tronc.

Statuant sur assignations des 8 et 12 février et 18 mars 2002 délivrées par Mme E. à M. M. , la MAPA et la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, le tribunal de grande instance de Tarascon, par jugement du 7 novembre 2002, rendu au vu du rapport

déposé par le Dr B., chirurgien spécialiste de l'appareil moteur, qui s'était adjoint des sapiteurs en pathologies digestives, le Dr L. et en psychiatrie, le Dr B., a débouté Mme E. d'une demande d'expertise et liquidé son préjudice à la somme de 9 500 euros, retenant que les conséquences dommageables de l'accident devaient être limitées à leur manifestation psychique et à l'entorse cervicale, soit un déficit fonctionnel permanent de 4%. Il a par ailleurs condamné la Mapa et M. M. à lui verser la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur appel de Mme E., la cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt mixte, du 4 janvier 2005, confirmé le jugement sauf en ce qui concerne l'évaluation du préjudice et ordonné une expertise psychiatrique confiée au Dr T..

Par arrêt du 25 mars 2008, la cour d'appel a retenu qu'il ressort 'des constatations et de l'analyse des experts que la paraplégie de Melle E. ressort de la mise en scène d'un conflit psychique inconscient lié au dommage causé au véhicule neuf de son oncle ensuite décédé d'une maladie neurologique, véhicule emprunté malgré un interdit familial', que 'la paraplégie s'inscrivant ainsi dans le cadre d'une conversion neurologique liée à l'histoire individuelle et familiale de Melle E., il n'y a pas de lien de causalité entre cette affection favorisée par une prédisposition et l'accident du 26 juin 1994 impliquant le véhicule de M. M.'. La cour d'appel a donc condamné M. M. et la MAPA à lui payer, en deniers ou quittance, la somme de 15 875 euros en réparation de son entier préjudice consécutif à l'accident, celui-ci ne comprenant pas la paraplégie dont elle était atteinte.

Cet arrêt a été cassé par un arrêt de la Cour de cassation du du 10 novembre 2009 , en toutes ses dispositions.

La Cour de cassation a jugé que 'le droit à indemnisation de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable' et que la cour d'appel avait violé le principe de la réparation intégrale en rejetant 'la demande de la victime d'un accident de la circulation aux motifs que l'évolution de son état en une paraplégie qui a été favorisée par une prédisposition s'inscrit dans le cadre

d'une conversion neurologique liée à son histoire individuelle et familiale et n'a pas de lien de causalité avec l'accident'.

Statuant sur renvoi, la cour d'appel, autrement composée, par arrêt du 15 février 2012, a, dans son dispositif,

- dit que la paraplégie dont souffre Melle E. est imputable à l'accident du 26 juin 1994,

- sursis à statuer sur l'indemnisation de son préjudice, sur la demande d'application des dispositions de l'article L.211-9 du code des assurances et sur les indemnités au titre des frais irrépétibles,

- ordonné une expertise médicale confiée au Dr R.-E.,

- condamné M. M. et la MAPA à verser à Mme E. une provision de 100 000 euros.

La cour d'appel a retenu : 'que la paraplégie dont mademoiselle E. est atteinte a été provoquée par l'accident qui, en particulier par l'émotion qu'il a suscitée, a révélé sa personnalité hystérique jusque là sans manifestation' et que 'par suite le droit de mademoiselle E. à être indemnisée de toutes les conséquences de l'accident doit s'étendre à l'indemnisation des conséquences de sa paraplégie'. L'expertise ordonnée, destinée à déterminer le dommage corporel de Mme E., portait notamment sur la description des lésions qui lui ont été causées par cet accident, en ce incluse sa paraplégie.

Le Dr R.-E., qui s'est adjoint un sapiteur neurologue, le Dr C., a déposé son rapport le 5 novembre 2013.

Prétentions et moyens des parties :

Par ses dernières écritures du 28 janvier 2014, Mme E., observant à titre préalable que le sapiteur désigné était un neurologue choisi par l'expert sur la suggestion du médecin conseil de la MAPA et non un spécialiste en psychiatrie, sollicite son indemnisation sur la base de la réparation intégrale de la paraplégie dont elle est atteinte. Faisant valoir que son état est irréversible, elle sollicite la prise en compte d'un déficit fonctionnel permanent quantifié à 80%, et fait observer que, par ses conclusions du 18 janvier 2011, la MAPA avait fait des offres sur cette base.

Mme E. a conclu en ces termes :

1° - Sur l'indemnisation :

Déficit fonctionnel permanent : 416 800 euro

Tierce personne : 1 983 043,54 euro

Préjudice sexuel : 40 000 euro

Préjudice d'établissement : 40 000 euro

Souffrances endurées : 70 000 euro

Préjudice esthétique : 40 000 euro

Préjudice professionnel : 824 147,82 euro

Logement aménagé : 150 000 euro

Fauteuil électrique : 48 147,43 euro

Frais d'adaptation du véhicule : 57 409,50 euro

Frais d'assistance à l'expertise : 4 210 euro

Condamner en conséquence M. M. et la société MAPA au paiement de la somme de 3 553 758,29 euros,

Subsidiairement,

Lui donner acte de ce qu'elle accepte les offres d'indemnisation présentées par la société MAPA dans ses conclusions du 18 janvier 2011,

Condamner M. M. et la compagnie MAPA sur la base des offres ainsi présentées et acceptées subsidiairement.

2°- Sur l'application des articles L 211-9 et 13 du code des assurances

Condamner M. M. et la compagnie MAPA sur le fondement des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances au paiement des intérêts légaux doublés du 26 février 1995 jusqu'au 18 janvier 2011 sur le montant total de l'offre présentée par elle à cette date, soit 1.173.541,32 euros.

3°- Sur les demandes annexes :

Ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil.

Déduire des condamnations prononcées les provisions perçues soit 150.500 euros.

Condamner M. M. et la compagnie MAPA au paiement d'une indemnité de 5.000 euros sur 1e fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les condamner aux entiers dépens, comprenant des frais d'expertise judiciaire et de location de salle pour 4 485 euros.

Par leurs dernières écritures du 25 mars 2014, M. M. et la MAPA ont conclu dans les termes suivants :

- Homologuer purement et simplement le rapport du Dr R.-E., notamment en ce qu'elle a retenu un déficit fonctionnel permanent de 15%,

- Réduire les demandes présentées par Mme E. aux sommes suivantes :

Déficit fonctionnel permanent : 42 000 euro

Tierce personne : 845,70 euro

Souffrances endurées : 8 000 euro

Préjudice esthétique : 8 000 euro

Logement aménagé : 500 euro

Frais d'assistance à l'expertise : 4 210 euro

- Compte tenu des provisions déjà versées pour 166 375 euros, condamner Mme E. à leur rembourser la somme de 102 819, 30 euros indûment perçues,

- Débouter Mme E. de sa demande de doublement du taux des intérêts,

- Dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamner Mme E. à leur verser sur ce fondement la somme de 4 000 euros ainsi qu'aux dépens.

La CPAM des Bouches-du-Rhône assignée à personne habilitée le 30 mars 2010, n'a pas constitué avocat. L'arrêt sera réputé contradictoire par application de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

L'expertise :

L'expert désigné par l'arrêt du 15 février 2012, le Dr R.-E. a décidé de prendre l'avis d'un sapiteur neurochirurgien, afin de

'Dire si l'état de Mme E. est

*consolidé

* ou reste évolutif

Faire un bilan d'autonomie situationnelle, à domicile.'

Le Dr C., choisi en qualité de sapiteur, expert honoraire de la liste nationale, a déposé un rapport dans lequel il indique 'qu'au plan strictement médical et médico-légal il importe (...) d'affirmer qu'il n'existe pas de relation de cause à effet - a fortiori directe, exclusive et certaine - entre la pseudo-paraplégie alléguée et le traumatisme cervical bénin subi en 1994".

Il a confirmé qu'aucun trouble neurologique organique n'avait été identifié chez Mme E. et que toutes les investigations complémentaires entreprises, en particulier neuro-radiologiques et électro-physiologiques, avaient confirmé l'intégrité anatomique et physiologique de son système nerveux. L'expert retient donc le diagnostic de 'pseudo-paraplégie', en se fondant sur un usage en pratique neurologique.

Il estime que les pseudo-paraplégies hystériques sont potentiellement réversibles : 'sous réserve d'une prise en charge judicieuse, personnalisée, adaptée, au long cours et très spécialisée, les évolutions favorables avec récupération progressive des déficits et même guérisons sont possibles et d'ailleurs régulièrement observées en pratique clinique' de sorte qu'il est impossible, selon lui, de fixer une date de consolidation et 'regrettable que Mme E. ait interrompu tout contact avec les psychiatres et laissé en quelque sorte la situation se chroniciser'.

Ses conclusions sont les suivantes :

- La pseudo-paraplégie dont est atteinte Mme E. relève d'un phénomène de conversion hystérique,

- L'imputabilité de cette symptomatologie déficitaire de niveau dorsal moyen au traumatisme cervical bénin subi le 26 juin 1994 n'est pas du tout médicalement établie,

- La situation clinique observée actuellement, plus de 18 ans après l'accident, est potentiellement évolutive, en conséquence et stricto-sensu,

- L'état de la malade ne peut être considéré comme consolidé.

Le Dr R.-E., au travers de l'examen clinique de la victime, a confirmé l'existence d'un 'syndrome para-parétique sensitivo-moteur, sans systématisation organique, dans un contexte de 'conversion'.

Elle a rappelé que les lésions qui ont été causées directement par l'accident sont :

- une entorse cervicale bénigne, ayant laissé des cervicalgies limitant les mouvements du cou, en tous sens,

- une paraplégie, débutée 8 mois après l'accident, retenue par la cour qui est en fait un syndrome para-parétique (la paraparésie étant une paralysie psychogène) sans substrat organique, dans un contexte de conversion.

Ses conclusions au plan des préjudices sont les suivantes :

- Déficit fonctionnel temporaire total :

Du 25 octobre 1994 au 12 décembre 1994

Du 12 décembre 1994 au 1er février 1995

Du 2 février 1995 au 1er mars 1995 (4 mois et 4 jours)

Du 3 juin 1995 : 1 semaine

Du 8 août 1995 au 22 août 1995

Du 22 août 1995 au 7 décembre 1995 (4 mois et 1 semaine)

- Déficit fonctionnel temporaire partiel :

* à 50% entre les périodes d'hospitalisation ci-dessus

* à 33% du 8 décembre 1995 au 13 août 1997

- Consolidation : 13 août 1997 correspondant aux examens des potentiels évoqués dans les domaines visuels et auditifs, tous normaux

- Souffrances endurées : 3,5/7

- Déficit fonctionnel permanent : 15% (paraplégie sans systématisation organique, d'origine psychogène, dans un contexte de conversion)

- Incidence professionnelle et universitaire : le 26 juin 1994, elle avait 32 ans, elle travaillait lors des faits dans un lycée comme remplaçante et préparait le CAPES et devait travailler comme emballeuse saisonnière à partir du 1er Juillet 1994. L'expert a noté que l'absence de documents justificatifs ne lui permettait pas d'établir la réalité d'un préjudice professionnel, basé sur la perte ou l'interruption d'une activité professionnelle définie et rétribuée. Mme E. est apte à un exercice professionnel, dans le cadre d'un travail aménagé et sédentaire.

- La tierce personne peut être retenue durant le déficit fonctionnel temporaire partiel de 50% à raison d'une heure par jour. Actuellement l'évidence de la nécessité d'une tierce personne n'est pas démontrée, ni établie, en particulier après les opérations expertales diligentées à domicile, le 18 janvier 2013 et en l'absence de documents justificatifs.

- Matériel orthopédique : si les troubles actuels n'évoluent pas dans le sens de l'amélioration, il convient de retenir la notion d'un renouvellement du fauteuil électrique tous les 5 ans.

- L'acquisition d'un véhicule automobile aménagé, dans le cas précis, n'apparaît pas justifiée, dans la mesure où Mme E. a bien déclaré au cours des opérations expertales qu'elle 'n'a pas passé le permis de conduire spécial'.

- Domotique : Elle habite une chambre au rez de chaussée de la maison individuelle de ses parents. Il convient de prendre en charge les aménagements a minima, effectués selon ses dires concernant une douche fauteuil et des poignées de soutien, pour la toilette.

- Préjudice esthétique : 3,5/7

- Préjudice d'agrément : aucun préjudice signalé ou documenté

- Préjudice sexuel : Mme E. se déclare inapte à une pratique sexuelle. Ce préjudice n'est pas documenté, il n'y a pas de faits signalés par une tierce personne, ni empêchement physique.

-Préjudice d'établissement : Mme E., qui avait 32 ans au jour de l'accident était célibataire, sans enfant, sans projet finalisé ni précis lors des différentes opérations expertales. Ce préjudice non documenté est difficile à retenir en l'état du dossier.

Répondant au dire déposé par l'avocat de Mme E., elle a indiqué que le taux de déficit fonctionnel permanent retenu appréciait la seule composante psychiatrique, reliée aux conséquences directes et certaines de l'accident, à l'exclusion de toute atteinte neurologique objective.

Le préjudice indemnisable.

Il convient à titre préalable de rappeler que par son arrêt du 15 février 2012, dont aucune partie n'indique qu'il aurait été frappé de pourvoi, la présente cour a, statuant sur renvoi de cassation et se conformant à l' arrêt de la Cour de cassation du du 10 novembre 2009 , dit que la paraplégie dont souffre Mme E. est imputable à l'accident du 26 juin 1994. L'autorité de la chose jugée s'attache à ce chef du dispositif et n'est donc plus en débat, de sorte que tous les développements contenus dans le rapport du sapiteur neurologue concernant le lien de causalité entre la paralysie et l'accident sont sans pertinence au plan juridique, de même que

les allégations de la MAPA selon lesquelles 'l'indemnisation de la paraplégie de la victime serait contraire à la jurisprudence en vigueur' et constituerait 'un enrichissement sans cause' (page 6 des conclusions) ou selon lesquelles 'la paraplégie ne peut être la conséquence de l'accident' et que 'le syndrome de conversion hystérique aurait eu lieu sans l'accident' (conclusions page 7)..

Il appartient en revanche à la cour de quantifier le préjudice résultant de cette paraplégie et d'en donner une traduction monétaire, l'arrêt du 15 février 2012 ayant sursis à l'indemnisation du préjudice et ayant ordonné une expertise destinée à déterminer les conséquences médicales et sociales de la paraplégie pour la victime. Notamment, il était demandé à l'expert de déterminer le taux de déficit fonctionnel permanent subsistant après consolidation, de dire si l'état de la victime nécessite l'assistance d'une tierce personne et l'ampleur de cette aide en se référant de façon précise à l'aide qu'elle reçoit aujourd'hui et en déterminant l'aide qui lui sera nécessaire dans l'avenir.

Au regard de ce qui a été jugé par l'arrêt du 15 février 2012 et du principe de réparation intégrale, sans perte ni profit pour la victime, il appartient à la cour d'appel d'indemniser Mme E. de tous les préjudices corporels, dont elle a souffert entre l'accident et la date de consolidation retenue par l'expert, soit le 13 août 1997, les parties acceptant cette date, ainsi que tous ceux liés à la paraplégie dont elle reste atteinte après consolidation.

S'il est acquis qu'aucune atteinte organique n'empêche Mme E. de se servir de ses membres inférieurs, les experts ont tous mis en évidence qu'elle était dans l'incapacité de mouvoir ses jambes et présentait une anesthésie à partir de D4 jusqu'à la plante des pieds (Rapport d'expertise p. 17), dont les premiers signes sont apparus au cours de son hospitalisation au centre diététique de Vallespir au Boulou du 2 février au 1er mars 1995 (page 12 du rapport). Son état ne s'est pas fondamentalement modifié au fil des 15 années suivantes, l'examen pratiqué par le Dr R.-E. le 9 mai 2012 ayant mis en évidence :

- qu'elle ne bouge pas, ne tient pas debout et reste dans un fauteuil roulant, sans collier ou orthèse des membres inférieurs,

- qu'elle présente une anesthésie s'étendant de l'appendice xyphoïde à la plante des pieds, à tous les modes à partir de T4 ,

- qu'il n'existait pas de motricité volontaire dans les membres inférieurs, de flexion de la cuisse, des genoux et du pied.

Cependant, dans ce tableau de paralysie, les experts ont noté certains éléments discordants par rapport aux paralysies organiques touchant ce niveau du corps. Ainsi, le Dr R.-E. a noté que lors de son examen clinique, Mme E. ne présentait pas de troubles sphinctériens importants, ni d'escarre, qu'il n'y avait pas de trouble trophique au niveau des deux cuisses, les deux jambes ayant cependant des téguments plus froids avec des troubles vasculaires et des taches ecchymotiques sur les deux régions malléolaires internes et qu'il n'existait pas de blocage articulaire des pieds et genoux. Le Dr C. avait noté l'absence de fonte musculaire.

Les parties s'opposent sur la façon d'indemniser un tel handicap, sans substrat organique d'atteinte neurologique, ce qui conduit en premier lieu à s'interroger sur la réversibilité possible des symptômes.

Tant le Dr C. que le Dr R.-E. ont indiqué qu'en l'absence de lésion organique, l'éventualité d'une guérison 'reste dans le domaine des possibilités', d'autant que l'état général de Mme E. est satisfaisant, qu'elle ne présente pas de fonte musculaire, pas d'escarre, pas de rétraction tendineuse ou de déformation articulaire. Cependant, le Dr R.-E. ajoute que 'cette récupération n'est envisageable que sous réserve que soit effectuée une prise en charge psychiatrique et psychanalytique personnalisée au long cours'. Le Dr B., psychiatre qui a examiné Mme E. en 1996 avait précisé que l'évolution de ce type de pathologie était imprévisible, pouvant aller d'une chronicisation en l'état à une guérison, avec ou sans séquelle.

Le barème indicatif d'évaluation des taux d'incapacité en droit commun du concours médical indique que l'évolution des troubles conversifs est imprévisible mais que ceux 'ayant déjà évolué depuis plus d'un ou deux ans avant la consultation psychiatrique sont souvent résistants à tout traitement'. En l'espèce, Mme E. a été hospitalisée pendant 4 mois dans le service psychiatrique du Dr G. à la Timone en 1995, sans que ce séjour ait conduit à une amélioration, le bilan de sortie faisant apparaître que la prise en charge psychothérapeutique était difficile en raison du désinvestissement de la patiente. Aucun suivi psychiatrique ou psychothérapeutique n'a été objectivé depuis l'année 1995. Mme E. a consulté le 9 octobre 2001 un psychiatre, le Dr P., pour une évaluation ponctuelle, sans que ce médecin ne l'ait régulièrement suivie par la suite.

Ainsi, les chances de guérison et de disparition des symptômes de conversion apparaissent, de manière générale, très aléatoires et, selon les experts, conditionnées par un suivi psychiatrique précoce, avant toute chronicisation. Au demeurant, aucun expert ne cite de statistique issue de la littérature médicale sur les chances de guérison de troubles de conversion prenant la forme d'une paralysie.

En l'espèce, compte tenu de l'absence d'amélioration de l'état de Mme E., 19 ans après l'apparition des premiers symptômes, de l'échec de la tentative de prise en charge psychiatrique dans l'année qui a suivi l'accident, il ne peut être considéré que l'état de Mme E. présente une chance sérieuse d'amélioration. En conséquence, la réversibilité théorique possible de ces pathologies ne peut influer sur l'indemnisation de Mme E., étant rappelé qu'il ne peut être reproché à celle-ci de ne pas avoir poursuivi de traitement psychothérapique au long cours, la victime n'ayant pas l'obligation de se soumettre à des traitements médicaux préconisés pour tenter de réduire les troubles dont elle souffre.

Le préjudice indemnisable de Mme E. est donc celui résultant, en toutes ses composantes, de l'état séquellaire qu'elle présente, bien que celui-ci ne s'explique pas par une atteinte neurologique correspondante, constitué par une paralysie des membres inférieurs et remontant jusqu'au milieu des seins. Elle a pour conséquence une incapacité de marcher et de se tenir debout et impose de se déplacer en fauteuil roulant.

C'est en considération de ces observations préalables et eu égard à la définition jurisprudentielle des divers postes de préjudice indemnisables ainsi que des articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, d'une part, de tous les rapports d'expertise médicale déposés au fil des années, des pièces produites, de l'âge de la victime et de la date de consolidation, d'autre part, que son préjudice sera déterminé et indemnisé.

L'évaluation du préjudice

1. Préjudices temporaires :

a. Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

. Frais divers : assistance à l'expertise 4 210 euro

Mme E. sollicite à ce titre le remboursement des honoraires du Dr R., qui l'a assistée à l'occasion des opérations d'expertise du Dr T., pour un montant total de 1900 euros et ceux du Dr B. qui l'a assistée à l'occasion de l'expertise du Dr R.-E., pour la somme totale de 2310 euros. L'ensemble de ces honoraires doit être considéré comme en lien avec l'accident, ces expertises ayant été nécessaires pour évaluer le préjudice qui est résulté de celui-ci, la complexité de la situation médicale de Mme E. ayant rendu indispensable son assistance par des médecins choisis par elle à l'occasion des opérations d'expertise. La MAPA ne s'oppose d'ailleurs pas à cette demande.

. Tierce personne : 67 250,16 euro

Mme E. sollicite l'allocation d'une somme représentant une assistance quotidienne de 8 heures depuis l'accident, calculée à partir d'un montant de 15,72 euros de l'heure (SMIC augmenté des congés payés et des charges sociales) à raison de 412 jours par an. Elle propose de capitaliser la dépense annuelle en utilisant le barème de capitalisation publié par la Gazette du Palais en mars 2013 (avec prise en compte d'un taux d'intérêt de 1,2% ), soit la somme suivante : 51 813,12 euro x 38,273 (32 ans) = 1 983 043,54 euros.

A titre préalable, il convient de rappeler que l'indemnisation du préjudice doit distinguer la période avant consolidation des blessures de celle située après, y compris en ce qui concerne la prise en charge du coût de l'assistance par une tierce personne.

S'agissant de la période avant consolidation, l'expert a indiqué que l'assistance de Mme E. durant le déficit fonctionnel temporaire à 50% était justifiée à raison d'une heure par jour. La MAPA propose d'indemniser ce préjudice en prenant pour base de calcul le SMIC brut de 1995, à raison d'1 heure par jour durant 150 jours.

Cependant, il convient de noter qu'en raison de l'accident, Mme E. a souffert, dans un premier temps, d'une entorse cervicale qui n'a pas rendu nécessaire son assistance par une tierce personne. Ce n'est qu'à compter de son retour à domicile, alors qu'avait été constaté en milieu hospitalier en mars 1995 l'apparition d'une paralysie des membres inférieurs, que commence à se poser la question du besoin d'aide à domicile. Le 10 avril 1995, le Dr M. indique que la patiente présente une asthénie avec amyotrophie des membres inférieurs et rétraction tendineuse, qui entraîne de gros problèmes de locomotion. Le 3 juin 1995, le Dr P. a indiqué qu'elle marchait 'péniblement avec deux attelles (illisible) avec flexus des hanches et des genoux' (reproduit page 14 du rapport d'expertise). Le 24 juillet 1995, le Dr L. (représentant de Groupama) et le Dr T. (représentant de la MAPA) ont indiqué qu'elle déclarait ne pas tenir debout, être aidée par sa mère pour aller aux toilettes et être portée pour se déplacer d'un étage de la maison à l'autre (rapport page 16). Le 27 juillet 1995 le Dr T., médecin du centre R Sabran de Hyères, spécialisé dans la rééducation des tétraplégiques, a écrit qu'il existait chez la patiente 'une anesthésie de tous les modes à partir de D4" et que l'on ne retrouvait 'pas de motricité volontaire dans les membres inférieurs mais des 'contractures' se manifestant sous forme de flexion de la cuisse, des genoux et du pied avec une sensation de contraction permanente de tous les muscles' (rapport page 17).

Bien que l'expert n'ait retenu le besoin d'assistance qu'une heure par jour, il ressort des éléments ci-dessus rappelés, extraits du rapport d'expertise, qu'à compter du mois d'avril 1995 Mme E. a présenté des troubles moteurs qui ont conduit en juillet 1995, à une paralysie des membres inférieurs l'empêchant de marcher. Une telle situation physiologique, qu'elle soit ou non le résultat d'une atteinte neurologique organique, l'empêchait d'accomplir de nombreux actes de la vie quotidienne, sans l'assistance d'un tiers.

Cet état doit donc donner lieu à une indemnisation de la part du responsable, sous la forme de la prise en charge des frais liés à l'emploi d'une aide à domicile, cette aide devant tendre à restituer à la victime des conditions d'existence les plus proches possibles de celles qui étaient les siennes avant l'accident et à lui offrir une qualité de vie en rapport avec ses capacités actuelles. Ces impératifs conduisent en l'espèce, à retenir la nécessité d'une aide 6 heures par jour.

En application du principe de réparation intégrale, le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne peut être réduit en cas d'aide bénévole par un membre de la famille ni subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectuées. Il sera donc retenu que du 1er juillet 1995 au 13 août 1997, date de consolidation (deux ans, un mois et 13 jours) et hormis durant les périodes d'hospitalisation comprises dans cette période, s'étendant du 8 août au 7 décembre 1995 (4 mois), Mme E. a eu besoin de l'aide d'une tierce personne, soit durant 713 jours.

L'indemnisation devant se faire au jour où la cour d'appel statue, elle sera fixée sur la base de la somme de 15,72 euros, tel que demandé, représentant le coût horaire moyen d'une assistance non qualifiée à la personne, employée directement par la victime, en 2014. Ce montant représente le coût total, charges sociales incluses, et devra être pris en compte sur une durée de 400 jours par an, pour tenir compte des congés payés.

Ainsi, l'indemnisation au titre de l'assistance par tierce personne durant la période temporaire s'établit à la somme de

15,72 x 6 x 713 jours = 67 250,16 euros.

b. Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation) :

. Déficit fonctionnel temporaire : Mme E. ne sollicite aucune somme au titre de son déficit fonctionnel temporaire.

. Souffrances endurées : 30 000 euro

Doivent être indemnisées à ce titre toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique.

En l'espèce, ces souffrances ont été constituées de celles liées à l'entorse cervicale causée immédiatement par l'accident, qui a nécessité le port d'un collier cervical ainsi qu'au syndrome dépressif post traumatique, mais aussi de toutes les souffrances physiques et psychiques occasionnées avant consolidation par l'apparition des symptômes de paralysie des membres inférieurs. Compte tenu de l'inquiétude et de la souffrance morale générées par l'apparition de ces symptômes, annonciateurs d'un bouleversement total de la vie future de Mme E., et ayant conduit à une multiplicité d'investigations, il y a lieu d'indemniser ces souffrances à hauteur de 30 000 euros.

2. Préjudices permanents :

a. Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) :

. Perte de gains professionnels futurs : 632 237,48 euro

Ce poste indemnise la perte ou la diminution des revenus de la victime consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du dommage.

Mme E. soutient qu'au moment de l'accident elle était engagée dans un projet professionnel devant la conduire à devenir professeur de langue, ayant passé les épreuves écrites du CAPES d'anglais et qu'elle a perdu la chance de mener ce projet à bien. Elle évalue son préjudice sur la base du salaire d'un professeur certifié débutant en 1995 (11 770,83 francs nets - 1794,45 euros) et sollicite son indemnisation sous la forme d'un capital constitutif d'une rente viagère selon le barème Gazette du Palais mars 2013 soit :1794,45 euro x 12 mois x 38,273 = 824 147,82 euros. La Mapa considère qu'il n'existe aucun préjudice professionnel prouvé, compte tenu de la situation professionnelle de Mme E. avant l'accident.

Le Dr R.-E. a indiqué que Mme E. était apte à un exercice professionnel dans le cadre d'un travail aménagé et sédentaire.

Il ressort des rapports d'expertise et des écritures des parties que Mme E., qui avait 32 ans au moment de l'accident et avait obtenu une maîtrise de langues étrangères appliquées l'année précédant l'accident, n'avait encore jamais occupé d'emploi stable. Elle avait, selon son curriculum vitae, occupé des postes de vacataire au Trésor public pour quelques mois en 1991

et 1992 et, ayant fait des séjours aux Etats Unis et au Royaume Uni, elle avait occupé dans ce dernier pays des postes temporaires dans l'hôtellerie. Elle justifie avoir postulé avant l'accident à un emploi de maître auxiliaire de l'éducation nationale en anglais et avoir été inscrite en première année d'IUFM en 1993/1994 pour préparer le CAPES d'anglais, mais ne produit aucune pièce indiquant qu'elle s'était présentée aux épreuves écrites de ce concours ni aucun élément permettant de savoir quelles étaient ses chances de réussir ces épreuves. Elle devait occuper un emploi saisonnier agricole l'été suivant l'accident. Elle ne produit par ailleurs aucun avis d'imposition permettant de déterminer quels avaient été ses revenus éventuels avant l'accident.

Bien que l'état de Mme E. ne lui interdise pas d'occuper un emploi sédentaire et intellectuel, l'expert a précisé qu'il ne pouvait s'agir que d'un emploi aménagé de sorte ses chances de trouver un emploi rémunéré sont sérieusement réduites, compte tenu par ailleurs de la situation de l'emploi. La réparation de cette perte de chance ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée et doit être mesurée à la chance perdue. Compte tenu du parcours professionnel de Mme E. antérieurement à l'accident, qui ne témoigne pas de sa détermination ou sa capacité à entrer dans une vie professionnelle stable, il y a lieu de considérer que la chance qu'elle a perdue d'occuper, sa vie durant, un emploi s'évalue à 70%.

Contrairement à ce qu'elle demande, il ne peut être considéré qu'elle a perdu une chance sérieuse de devenir professeur certifié de langue, l'accès à cette profession étant soumis à la réussite à un concours, dont elle ne justifie pas qu'elle avait passé les épreuves écrites, étant observé qu'elle ne fournit aucun élément sur les chances qu'elle avait de le réussir. En revanche, son niveau d'étude devait lui permettre d'avoir accès à des professions rémunérées au dessus du SMIC, de sorte que son indemnisation se fera sur la base du salaire mensuel moyen pour une femme travaillant dans une profession intermédiaire, selon la table publiée par l'Insee intitulée 'salaire mensuel moyen net de tous prélèvements selon le sexe et la catégorie socioprofessionnelle', qui fait apparaître la somme de 2011 euros, pour l'année 2011, année la plus proche de ce jour, l'évaluation devant se faire au jour où le juge statue. Mme E. a donc perdu la chance de gagner, sa vie durant, 70% de 2011 euros par mois, soit 1407,70 euros nets par mois.

Ses pertes de gains professionnels futurs s'établissent donc ainsi :

Pour la période allant de la consolidation à ce jour, soit16 ans et 10 mois (202 mois), l'indemnisation s'élève à la somme de 284 355,40 euros.

Pour la période postérieure à la liquidation, le montant annuel (16 892,40 euros) sera capitalisé suivant le barème publié par la Gazette du Palais en novembre 2004, selon l'euro de rente viagère, pour une femme de 51 ans, pour tenir compte de l'incidence de la perte de gains sur les droits à la retraite de Mme E., soit 16 892,40 euro x 20,594 = 347 882,08 euros.

Le préjudice professionnel de Mme E. s'évalue donc à la somme totale de 632 237,48 euros.

. Tierce personne : 1 412 026,99 euro

Ces dépenses sont liées à l'assistance permanente d'une tierce personne pour aider la personne handicapée à effectuer les démarches et plus généralement les actes de la vie courante. Elles visent à indemniser le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière définitive, d'une tierce personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie. Mme E. chiffre son besoin quotidien d'aide à 8 heures en été et 6 heures en hiver, la différence s'expliquant par le fait qu'elle se rend à la piscine d'un ami tous les jours en été et doit y être conduite par un tiers.

Le sapiteur chargé par le Dr R. E. d'effectuer un bilan d'autonomie situationnelle de la victime n'a pas procédé à une description de l'autonomie de celle-ci et s'est borné à constater que lors du rendez-vous d'expertise, au domicile de celle-ci, elle était seule, sans l'aide d'un tiers. Le Dr R. E. a conclu que 'l'évidence de la nécessité d'une tierce personne n'est pas démontrée ni établie, en particulier par les opérations d'expertales diligentées à domicile le 18 janvier 2013

et en l'absence de documents justificatifs'. La Mapa, s'appuyant sur ces conclusions, se formule aucune offre à ce titre.

Cependant, eu égard au fait qu'il est établi que Mme E. est atteinte d'une paralysie des membres inférieurs, serait-elle anorganique, il ne peut être raisonnablement soutenu qu'elle peut accomplir seule tous les actes de la vie quotidienne, dès lors qu'elle ne peut marcher, monter des marches, se mettre debout, ni accroupie...Selon le témoignage de ses proches et la description de sa journée type faite par elle-même et figurant en page 48 du rapport d'expertise judiciaire du Dr R. E., dont les éléments sont compatibles avec son état, il apparaît que, vivant au rez de chaussée du domicile de ses parents, elle circule dans un fauteuil roulant électrique et peut ainsi se déplacer dans le village qu'elle habite pour effectuer certaines courses mais qu'elle est aidée pour l'habillage, la prise de douche et la toilette, qu'elle n'est pas en mesure d'assurer l'entretien de son domicile, de faire du repassage ni de confectionner tous ses repas et qu'elle dépend de son entourage pour ses déplacements éloignés. Elle a indiqué au Dr C. qu'elle pouvait effectuer les transferts lit-fauteuil-lit en s'aidant d'une planche.

Au vu de ces éléments, qui ne témoignent pas d'une amélioration du degré de dépendance de la victime par rapport à la période avant consolidation, il y a lieu de retenir que Mme E. aura besoin, sa vie durant, d'une aide par tierce personne 6 heures par jour.

Compte tenu du coût de cette aide évalué par la demanderesse à la somme de 15,72 euros de l'heure et pour 400 jours par an pour les raisons précédemment indiquées, l'indemnisation s'établit aux sommes suivantes :

De la consolidation à la liquidation (16 ans et 10 mois), l'indemnisation se fera en capital, soit :

(15,72 x 6) = 94,32 euros par jour

94,32 euro x 6733 jours = 635 056,56 euros

A compter de la liquidation, le montant annuel de 37 728 euros (94,32 euro x 400 jours), doit être capitalisé selon l'euro de rente viagère pour une femme de 51 ans, selon le barème publié par la Gazette du Palais en 2004, soit 20, 594:

37 728,00 euro x 20,594 = 776 970,43 euros

Afin de permettre à la victime de disposer sa vie durant des fonds qui lui seront nécessaires pour faire face à cette dépense qui s'échelonne dans le temps, l'indemnité allouée au titre de ce poste sera payée à compter du 20 juin 2014 sous forme de rente trimestrielle et viagère d'un montant de 9 432 euros, indexée conformément à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et dont le versement sera suspendu en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme de sécurité sociale d'une durée supérieure à 45 jours.

. Frais d'adaptation du logement : 500 euro

et réserves pour le surplus

Constitue un préjudice réparable en relation directe avec l'accident de la circulation ayant causé le handicap de la victime le montant des frais que celle-ci doit débourser pour adapter son logement et bénéficier ainsi d'un habitat en adéquation avec ce handicap. A ce titre, Mme E. sollicite le coût d'acquisition d'un logement adapté à son handicap, sur la base d'un appartement P2 de 60m2, soit la somme de 150 000 euros.

Mme E., qui n'indique pas qu'elle disposait d'un logement indépendant avant l'accident ou au moment de la consolidation, vit au rez de chaussée de la maison de ses parents et ne soutient pas que celui-ci serait inadapté à son handicap, ce qui la contraindrait à se reloger, par l'acquisition ou la location d'un autre logement. Sa demande de voir prendre en charge le prix d'achat d'un appartement n'est donc pas justifiée à ce jour En l'état, le seul préjudice établi est donc celui, constaté par l'expert, résidant dans certains aménagements (siège de douche et poignées de soutien pour la toilette) effectués pour 500 euros et que la MAPA accepte de prendre en charge, aucun autre aménagement n'étant revendiqué par Mme E..

Néanmoins, ce poste de préjudice permet à Mme E., au cas où elle viendrait à changer de domicile, pour quelle que cause que ce soit, d'obtenir l'indemnisation des surcoûts générés par son handicap, qu'ils tiennent à un prix d'achat majoré par des contraintes architecturales liées au handicap ou aux frais engagés pour rendre le logement compatible avec celui-ci.

. Frais d'adaptation d'un véhicule : Réservé

Mme E. indiquant qu'elle n'a pas passé le permis spécial lui permettant de conduire un véhicule adapté à son handicap, sa demande de prise en charge d'un véhicule est prématurée et sera réservée.

. Dépenses de santé futures :

Mme E. sollicite à ce titre le renouvellement de son fauteuil roulant électrique pour un coût de 6 290 euros.

Cependant, elle ne produit au soutien de sa demande que l'impression d'une page extraite d'un site internet à l'exclusion de tout devis ou facture. Elle ne donne aucune précision sur le type de fauteuil qu'elle utilise actuellement, ni sa date d'acquisition ni le pourcentage de la dépense qui a été pris en charge par son organisme social. Elle ne justifie donc pas que les frais de renouvellement de cet appareillage seront à sa charge de sorte que sa demande sera rejetée.

b. Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation) :

. Déficit fonctionnel permanent : 255 000 euro

Les parties s'opposent sur le taux de déficit fonctionnel permanent à retenir pour rendre compte du handicap dont est atteinte Mme E..

L'expert judiciaire l'a chiffré à 15% au regard du fait qu'elle est atteinte d'une paraplégie sans systématisation organique, d'origine psychogène dans un contexte de conversion. Mme E. sollicite pour sa part une indemnisation sur la base d'un taux de 80%, qui avoisine celui généralement proposé pour une personne atteinte de paralysie d'origine organique des membres inférieurs et qui présente tous les autres troubles associés, notamment sphinctériens.

Pour déterminer si le fait que l'incapacité dont est atteinte Mme E. ne trouve pas de cause organique doit influer sur l'indemnisation de son déficit fonctionnel permanent, il y a lieu de tenir compte de la définition de ce poste de préjudice qui cherche à indemniser un préjudice extra-patrimonial découlant d'une incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une incidence sur les fonctions du corps humain de la victime. Il s'agit de réparer les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime. Il convient d'indemniser, à ce titre, non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu'elle ressent, la perte de la

qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence qu'elle rencontre au quotidien après sa consolidation.

Ce poste de préjudice, qui est évalué à partir d'un taux médico-légal d'atteinte à l'intégrité physique et psychique, n'est donc pas limité à l'évaluation d'une affection organique, mais inclut toutes les incidences des lésions permanentes subies par la victime sur ses conditions d'existence.

S'agissant de handicaps causés par des troubles psychiques, le barème du Concours médical, produit aux débats, indique qu'il est possible pour l'expert de proposer, un taux d'incapacité permanente partielle 'qui ne peut se référer à aucune fourchette, mais qui ne peut jamais atteindre le même taux que celui qui serait dressé pour un tableau clinique similaire traduisant une lésion organique'. M. A. , médecin intervenant lors d'un congrès d'experts organisé en 2012, a proposé de 'considérer le trouble de conversion comme une entité clinique psychiatrique post-traumatique à l'instar de l'état de stress post traumatique. Des formes légères, moyennes et sévères pourraient être retenues, mais leur bornage chiffré en termes de déficit fonctionnel permanent pourrait être contenu dans des limites raisonnables, consensuellement arrêtées de 0 à 40%'.

Cependant, au regard de la définition du déficit fonctionnel permanent, cette limitation de principe du taux médico légal d'incapacité ne paraît pas justifiée au plan de l'indemnisation judiciaire du préjudice, dès lors qu'il s'agit de troubles chronicisés dont on ne peut sérieusement espérer la résorption, comme c'est le cas pour Mme E..

En l'espèce, il est constant qu'il a été médicalement constaté l'impossibilité pour Mme E. de mouvoir ses membres inférieurs, avec les conséquences qu'une telle impossibilité comporte dans la capacité à mener une vie normale et les souffrances morales qu'elle cause. Il a été indiqué précédemment qu'il ne pouvait être sérieusement espéré une amélioration de ces symptômes installés depuis de si nombreuses années. La définition de ce poste de préjudice conduit donc à indemniser la réduction définitive de la capacité physique de Mme E. et des douleurs, physiques et psychiques permanentes qu'elle en ressent, sans égard pour leur origine organique ou psychiatrique. En conséquence, le taux de 15% proposé par l'expert judiciaire ne

peut être retenu comme base d'évaluation, dès lors qu'il ne correspond aucunement à la réduction objective de la capacité physique de la victime, aux douleurs morales qu'elle engendre et à la perte de qualité de vie qu'elle induit, étant relevé que Mme E. menait avant l'accident une vie très active (elle avait notamment vécu plusieurs années à l'étranger).

Le barème 'concours médical' propose, pour une paralysie des membres inférieurs, le taux de 70 à 80% lorsque la gène fonctionnelle excède la stricte perte de la fonction locomotrice.

Cependant, ce taux ne peut être retenu en l'espèce, dès lors qu'il convient de tenir compte du fait que les troubles de Mme E. sont atypiques et ne correspondent pas totalement à ceux généralement rencontrés par les personnes atteintes de paralysie de même niveau. Notamment, elle ne présente pas de troubles sphinctériens majeurs, ni d'escarre ni de fonte musculaire. Par ailleurs, le fait qu'elle puisse procéder elle-même à ses transferts à partir du fauteuil est important au regard de son degré d'autonomie. Son taux de déficit est donc moindre que celui d'une personne atteinte d'une paraplégie de même niveau mais présentant tous les troubles associés. Dans ces conditions, il sera retenu un taux d'atteinte à l'intégrité physique et psychique de 60%.

Compte tenu de l'âge de Mme E. au moment de la consolidation (35 ans) son déficit fonctionnel permanent sera indemnisé par la somme de 255 000 euros.

. Préjudice esthétique : 25 000 euro

Ce poste cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique de la victime. En l'espèce, ce préjudice réside dans la modification de l'image corporelle de Mme E. qui doit désormais se déplacer en fauteuil roulant. Il justifie une indemnisation de 25 000 euros.

. Préjudice sexuel : 30 000 euro

Ce poste répare les préjudices touchant la sphère sexuelle comprenant le préjudice morphologique (atteintes aux organes sexuels), le préjudice lié à l'acte sexuel lui-même (perte de la libido, de la capacité à réaliser l'acte ou à accéder au plaisir) et l'impossibilité ou difficulté à procréer.

Le Dr R.-E. a précisé qu'il n'existait pas d'empêchement physique à l'acte sexuel.

Cependant, ce poste de préjudice ne se limitant pas à l'impossibilité physiologique d'avoir un rapport sexuel ou de procréer, il doit être considéré que le fait d'être incapable de mouvoir la partie inférieure de son corps jusqu'au milieu du tronc constitue indubitablement une limitation à la réalisation de l'acte sexuel. Ce préjudice sera évalué à la somme de 30 000 euros.

. Préjudice d'établissement : 30 000 euro

Ce poste de préjudice cherche à indemniser la perte d'espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale 'normale' (fonder une famille, élever des enfants...) en raison de la gravité du handicap permanent dont reste atteinte la victime après sa consolidation.

Le fait que Mme E. n'ait pas vécu en couple au moment de l'accident ou de la consolidation ne peut conduire à exclure toute réparation à ce titre, compte tenu de son âge, étant observé au demeurant qu'un des rapports médicaux indique qu'elle avait un ami au début de l'année 1995

(lettre du Dr R. au Dr M. cité page 9 du rapport d'expertise). Il est incontestable que le mode de vie mené par Mme E. en raison de son accident, la réduction de son autonomie et la limitation de sa vie sociale qui en résultent ont limité ses chances de pouvoir fonder une famille, préjudice qui sera indemnisé à hauteur de 30 000 euros.

. Préjudice d'agrément : aucune demande n'est formulée.

Le préjudice corporel global de Mme E. s'établit ainsi à la somme de 2 486 224,63 euros que M. M. et la MAPA seront condamnés, in solidum, à lui payer, selon les modalités suivantes :

- une somme de 1 709 254,20 euros en capital (2 486 224,63 - 776 970,43 euro), provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, conformément à l'article 1153-1 du code civil, sous réserve de ce qui sera indiqué ci-après concernant le doublement du taux de l'intérêt légal,

- une rente trimestrielle de 9 432 euros indexée, au titre de la tierce personne à compter du 20 juin 2014.

Ainsi que demandé par Mme E. dès ses conclusions du 11 juillet 2007 devant la cour d'appel, les intérêts échus de cette somme produiront intérêt lorsqu'ils seront dus pour une année entière, dans les conditions de l'article 1154 du code civil, mais seulement à compter du présent arrêt, le point de départ de la capitalisation ne pouvant être antérieur à celui des intérêts eux-mêmes.

Sur la demande d'application de l'article L. 211-9 du code des assurances :

En application des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances, l'assureur est tenu de présenter une offre d'indemnité à la victime dans un délai maximal de 8 mois à compter de l'accident, l'offre pouvant avoir un caractère provisionnel si l'assureur n'a pas, dans le délai de 3 mois à compter de l'accident, été informé de l'état de la victime et un nouveau délai de 5 mois, à compter de la date à laquelle l'assureur a été informé de la consolidation, étant ouvert pour l'offre définitive d'indemnisation.

Lorsque l'offre n'a pas été faite dans les délais impartis, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

Lorsqu'une offre a été faite par l'assureur avec retard, l'assiette du doublement du taux des intérêts est constituée par le montant de l'offre faite, avant imputation de la créance des organismes sociaux et son terme est le jour où l'assureur a présenté cette offre, sauf si, celle-ci ayant été incomplète ou manifestement insuffisante, il doit être considéré qu'aucune offre n'a été faite.

En l'espèce, Mme E. sollicite que le taux de l'intérêt légal soit doublé du 26 février 1995 au 18 janvier 2011, date des conclusions de la Mapa contenant des offres et sur le montant total de cette offre, soit 1 173 541, 32 euros.

Cependant, il ne peut être considéré que l'assureur devait faire une offre provisionnelle prenant en compte l'intégralité des postes de préjudice correspondant à celui aujourd'hui indemnisé au terme d'une période courant à compter de l'accident, dès lors que la paralysie totale des membres inférieurs n'est apparue qu'à compter de juillet 1995 et qu'à cette date, compte tenu de son caractère psychogène, sa résorption pouvait être espérée. Par ailleurs, les rapports d'expertise judiciaire déposés avant l'arrêt du 25 mars 2008 de cette cour ayant tous conclu à l'impossibilité d'imputer la paralysie à l'accident, de même que cet arrêt, il apparaît que ce n'est qu'à compter de l' arrêt de la Cour de cassation du du 10 novembre 2009 que

l'assureur a connu l'étendue du préjudice indemnisable et qu'il était en mesure de présenter une offre provisionnelle, de sorte qu'il devait la faire au plus tard le 11 juillet 2010.

La MAPA n'indique pas avoir fait une offre à Mme E. avant ses conclusions du 18 janvier 2011, le fait qu'elle ait toujours exécuté les décisions judiciaires étant sans pertinence au regard de l'application des articles L.211-9 et L. 211-13 du code des assurances. L'offre complète et non manifestement insuffisante formulée par ces écritures est donc tardive, de sorte que la sanction de l'article L. 221-13 est encourue du 11 juillet 2010 au 18 janvier 2011, sur la somme offerte dans les conclusions de la même date, soit 1 167 251,30 euros.

Sur les demandes annexes :

M. M. et la MAPA succombant, ils seront condamnés, in solidum, aux dépens d'appel, qui comprennent les frais des expertises judiciaires ordonnées par la cour d'appel et les frais de location d'une salle destinée aux opérations d'expertise du sapiteur, et à verser, in solidum, à Mme E. la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Vu les arrêts du 4 janvier 2005 et du 5 février 2012,

- Fixe le préjudice corporel de Mme E. à la somme totale de 2 486 224,63 euros,

- Condamne M. M. et la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires, in solidum, à verser à Mme E., provisions non déduites,

* la somme de 1 709 254,20 euros en capital avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

* une rente trimestrielle de 9 432 euros à compter du 20 juin 2014 au titre de l'indemnité de tierce personne indexée conformément aux dispositions de l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, dont le versement sera suspendu en cas d'hospitalisation d'une durée supérieure à 45 jours prise en charge par un organisme de sécurité sociale,

- Dit que les intérêts de ces sommes porteront intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code de procédure civile, avec comme point de départ le 19 juin 2014,

- Dit que les intérêts au double du taux légal sont dus par la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires à compter du 11 juillet 2010 jusqu'au 18 janvier 2011 sur la somme de 1 167 251,30 euros,

- Condamne M. M. et la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires, in solidum, à verser à Mme E. la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-Rejette la demande de M. M. et la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires formée sur le même fondement.

- Condamne M. M. et la Mutuelle d'assurance des professions alimentaires, in solidum, aux dépens d'appel et dit qu'ils pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,