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Cour d'Appel de Bruxelles - Arrêt du 29 juin 2007 - RG n° 2004/AR/571 - confirmé par Cassation, 19 mars 2009, RG F.07.0096.F/1. Provisions pour risques et charges, provision complémentaire vie, avantages anormaux et bénévoles consistant en abandon de créances. Compagnie P c/ Etat belge (Finances) Avocats: Maître Pol Glineur - pour l’appelante Maître Eric Thiry - pour l’Etat Belge Décision entreprise : jugement du 18 septembre 2003 du tribunal de première instance de Bruxelles I. Faits et antécédents 1. L’EVALUATION DE LA PROVISION "VIE " Par un avis de rectification du 13 novembre 1998, l’administration a annoncé à P qu’elle allait ajouter un montant de 8.960.983.777 F à ses bénéfices déclarés pour l’exercice d’imposition 1996. Ce montant correspond à la différence entre : * d’une part la provision de bilan " vie ", constituée au fil du temps grâce à des dotations annuelles, et figurant au passif du bilan au 31 décembre 1995 pour un montant de 49.282.321.636 F, et * d’autre part un montant de 40.321.337.859 F étant la somme des " réserves mathématiques d’inventaire " de tous les contrats d’assurance vie souscrits auprès de P, à la date précitée. L’administration considère que cette différence est à tenir pour une surestimation d’éléments du passif au sens de l’article 24, alinéa 1, 4° du CIR/92, révélée par l’examen de la comptabilité de l’année 1995 de P et à ce titre, intégralement taxable, durant cette période imposable, comme prévu par l’article 361 du CIR/92. 2. L’ABANDON DES CREANCES SUR L’ASBL P

Cour d'Appel de Bruxelles - Arrêt du 29 juin 2007 - RG n° 2004/AR

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Cour d'Appel de Bruxelles - Arrêt du 29 juin 2007 - RG n° 2004/AR/571 - confirmé par Cassation, 19 mars 2009, RG F.07.0096.F/1.

Provisions pour risques et charges, provision complémentaire vie, avantages anormaux et bénévoles consistant en abandon de créances.

Compagnie P c/ Etat belge (Finances)

Avocats:

Maître Pol Glineur - pour l’appelante

Maître Eric Thiry - pour l’Etat Belge

Décision entreprise : jugement du 18 septembre 2003 du tribunal de première instance de Bruxelles

I. Faits et antécédents

1. L’EVALUATION DE LA PROVISION "VIE "

Par un avis de rectification du 13 novembre 1998, l’administration a annoncé à P qu’elle allait ajouter un montant de 8.960.983.777 F à ses bénéfices déclarés pour l’exercice d’imposition 1996.

Ce montant correspond à la différence entre :

* d’une part la provision de bilan " vie ", constituée au fil du temps grâce à des dotations annuelles, et figurant au passif du bilan au 31 décembre 1995 pour un montant de 49.282.321.636 F, et

* d’autre part un montant de 40.321.337.859 F étant la somme des " réserves mathématiques d’inventaire " de tous les contrats d’assurance vie souscrits auprès de P, à la date précitée.

L’administration considère que cette différence est à tenir pour une surestimation d’éléments du passif au sens de l’article 24, alinéa 1, 4° du CIR/92, révélée par l’examen de la comptabilité de l’année 1995 de P et à ce titre, intégralement taxable, durant cette période imposable, comme prévu par l’article 361 du CIR/92.

2. L’ABANDON DES CREANCES SUR L’ASBL P

2.1. Dans l’avis de rectification précité, l’administration a estimé qu’un avantage anormal ou bénévole de 459.000.000 F devait être ajouté aux bénéfices de l’exercice d’imposition 1996, pour le motif suivant.

En 1995, P a abandonné des créances sur l’ASBL P s’élevant à 510.000.000 F. Conformément à l’accord conclu avec l’administration pour un exercice antérieur, P a déclaré un avantage anormal ou bénévole de 10 % de ce montant soit 51.000.000 F.

L’agent taxateur reproche à l’intéressée de ne pas avoir déclaré un avantage de 100 % pour l’exercice litigieux, soit 510.000.000 F. Il entend dès lors imposer la différence, soit (510.000.000 - 51.000.000 =) 459.000.000 F.

2.2. Un raisonnement identique est tenu dans un avis rectificatif du 28 octobre 1999 à l’occasion de l’abandon d’une créance de 100.000.000 F sur l’ASBL. P durant l’exercice d’imposition 1997. Un avantage anormal ou bénévole complémentaire de (100.000.000 F - 10.000.000 F déclarés = 90.000.000 F) est taxé à charge de P.

2.3. Il est également reproché à P dans les deux avis rectificatifs précités de ne pas avoir réclamé des intérêts à l’ASBL. P sur les avances consenties durant les exercices d’imposition 1996 et 1997.

Ces intérêts, calculés par l’administration à un taux de 4,50 % sur la moyenne arithmétique des avances au début et à la fin de l’exercice comptable et fixés sur cette base respectivement à 19.881.972 F et à 10.862.546 F, ont également été taxés à charge de P au titre d’avantages anormaux ou bénévoles consentis à l’ASBL.P.

3. LES COTISATIONS LITIGIEUSES

La provision " vie " de 8.960.983.777 F et les avantages anormaux ou bénévoles précités consentis, selon le taxateur, à l’ASBL. P. en 1995 par l’abandon de créances et l’octroi d’avances sans intérêts, ont fait l’objet de la cotisation supplémentaire à l’impôt des sociétés d’un montant de 4.143.873.894 F (avant addition de la cotisation primitive de 136.629.003 F), établie en 1998 sous l’article 863.226 du rôle de l’exercice d’imposition 1996 formé pour la commune de Saint-Josse-Ten-Noode .

Les avantages anormaux ou bénévoles consentis, selon le taxateur, à l’ASBL P en 1996 ont fait l’objet de la cotisation supplémentaire à l’impôt des sociétés d’un montant de 13.793.883 F (après imputation de 135.182.001 F de précomptes remboursables, repris dans la cotisation primitive), établie sous l’article 963.066 du rôle de l’exercice d’imposition 1997 formé pour la même commune .

Les cotisations primitive et supplémentaire de l’exercice d’imposition 1997 enrôlées respectivement sous les articles 874.415.494 et 963.066 pour un remboursement de 135.182.000 F et un montant de 13.793.883 F sont litigieuses dans la mesure où elles sont établies sur la différence entre le montant de 8.960.983.777 F taxé au titre de surévaluation du passif pour l’exercice d’imposition 1996 et le montant de 8.751.936.212 F représentant, aux yeux de l’administration, la surévaluation du passif subsistant pour l’exercice d’imposition 1997. Cette différence s’élève à 209.040.564 F.

Les cotisations primitive et supplémentaire de l’exercice d’imposition 1998 enrôlées respectivement sous les articles 884.418.635 et 063.371 sont litigieuses dans la mesure où elles sont établies sur la différence entre le montant de 8.960.983.777 F taxé au titre de surévaluation du passif pour l’exercice d’imposition 1996, la somme de 209.047.564 F à détaxer pour l’exercice d’imposition 1997 ( cfr. alinéa précédent) et le montant de 8.327.721.460 F représentant, aux yeux de l’administration, la surévaluation du passif subsistant pour l’exercice d’imposition 1998. Cette différence s’élève à 424.214.753 F.

4. LE LITIGE EN 1ère INSTANCE

P a saisi le tribunal de première instance par requête contradictoire du 30 juillet 2001, conformément aux articles 1385decies et 1385undecies du Code judiciaire, avant que le directeur régional n’ait statué sur les réclamations

Cette requête contenait six griefs ; comme devant la cour ne subsistent que les problèmes relatifs à l’évaluation de la provision " vie " et aux avantages anormaux ou bénévoles qui auraient été accordés à l’ASBL. PS par l’abandon de créances sur cette association, il ne paraît pas utile de faire état des quatre autres griefs.

4.1. Le litige en 1ère instance relatif à l’évaluation de la provision " vie "

4.1.1. La requête contradictoire tendait :

A titre principal : à entendre dire pour droit que la provision au passif du bilan de P au 31 décembre 1995 n’était pas surévaluée et en conséquence, à entendre le tribunal ordonner le dégrèvement de la cotisation à l’I.Soc de l’exercice d’imposition 1996 enrôlée sous l’article 863.226, dans la mesure où cette cotisation a été calculée sur une base imposable incluant à tort, selon P, une somme de 8.960.983.777 F au titre de surestimation du passif ;

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le tribunal estimerait que la provision vie du bilan au 31.12.95 est surévaluée à concurrence de 8.960.983.777 F:

- à entendre ordonner le dégrèvement des deux cotisations à l’I.Soc de l’exercice d’imposition 1997, enrôlées sous les articles 874.415.494 et 963.066, dans la mesure où ces cotisations sont établies sur une base imposable incluant une somme de [8.960.983.777 F (montant de la surévaluation du passif déjà taxé pour l’exercice d’imposition 1996) - 8.751.936.212 F (montant de la surévaluation du passif subsistant pour l’exercice d’imposition 1997) ] = 209.040.564 F, et

- à entendre ordonner le dégrèvement des deux cotisations à l’I.Soc de l’exercice d’imposition 1998, enrôlées sous les articles 884.418.635 et 063.371 dans la mesure où ces cotisations sont établies sur une base imposable incluant une somme de [8.960.983.777 F (montant de la surévaluation du passif déjà taxé pour l’exercice d’imposition 1996) - 209.047.564 F (somme à détaxer pour l’exercice d’imposition 1997 ; cfr. alinéa précédent) - 8.327.721.460 F (montant de la surévaluation du passif subsistant pour l’exercice d’imposition 1998) ] = 424.214.753 F.

4.1.2. Le premier juge a rejeté la demande principale de P qui visait à entendre dire que le passif de son bilan au 31.12.1995 n’était pas surévalué en estimant que la provision vie avait été imposée à bon droit dans la mesure où elle excède la valeur de rachat théorique des contrats, dans laquelle les engagements de l’assureur sont actualisés sur la base du taux d’intérêt tarifaire Selon le premier juge, la constitution de réserves destinées à faire face à une possible baisse de rendements des avoirs doit rester sans incidence sur la valorisation de l’élément de passif constitué de la dette certaine et liquide et du passif exigible à terme " probable ", avec au surplus, l’inclusion en l’espèce d’une véritable provision sur des charges futures.

Il a accueilli sa demande formée à titre subsidiaire et il a ordonné le dégrèvement des cotisations des exercices d’imposition 1997 et 1998 dans la mesure où celles-ci avaient été calculées sur une base imposable incluant respectivement des sommes de 209.040.564 F et de 424.214.753 F.

4.2. Le litige en 1ère instance relatif à l’abandon de créances sur l’ASBL P

4.2.1. La requête contradictoire tendait à entendre ordonner le dégrèvement de la cotisation à l’I.Soc pour l’exercice d’imposition 1996, enrôlée sous l’article 863.226 et de la cotisation à l’I.Soc pour l’exercice d’imposition 1997 enrôlée sous l’article 963.066, dans la mesure où ces cotisations ont été calculées sur des bénéfices majorés respectivement de 478.881.912 F et de 100.862.546 F.

4.2.2. Le premier juge a accueilli la demande de P et a accordé les dégrèvements sollicités.

II. Objet de l’appel

1. L’APPEL PRINCIPAL

L’appel, interjeté par P, tend à obtenir que la demande principale qu’elle a formée devant le premier juge au sujet de la provision " vie " soit déclarée fondée, et que l’intégralité des dépens de première instance soit mise à charge de l’Etat.

Elle demande à titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour confirmerait le jugement entrepris au sujet de la provision " vie ", de dire pour droit que le cours des intérêts de retard relatif à la quotité non immédiatement due de la cotisation à l’I.Soc. de l’exercice d’imposition 1996 établie sous l’article 863.226, doit être suspendu depuis le 01.08.2000 jusqu’au jour où une décision judiciaire définitive relative à la cotisation précitée sera coulée en force de chose jugée.

Elle demande que les entiers dépens d’appel soient mis à charge de l’Etat.

2. L’APPEL INCIDENT

L’Etat a formé appel incident, par voie de conclusions, en vue d’obtenir que la demande initiale de P relative aux avantages anormaux ou bénévoles soit déclarée non fondée.

Il demande en conséquence à la cour de dire pour droit que les bases imposables des cotisations enrôlées sous les articles 863.226 (exercice d’imposition 1996) et 963.066 (exercice d’imposition 1997) comprennent à juste titre des avantages de respectivement 478.881.972 F et de 100.862.546 F, et de condamner P aux dépens des deux instances.

III. Discussion

L’appel principal : évaluation de la provision " vie "

A. ELEMENTS D’APPRECIATION

1. Le taux tarifaire

1.1. L’assureur " vie " s’engage, moyennant encaissement de primes qu’il fera fructifier, à verser un capital lorsque surviendra l’événement garanti, c’est-à-dire le décès au cours de la période d’assurance ou la survie à l’expiration du contrat.

Il détermine, à cet égard, au moment de la conclusion du contrat, le montant des primes et des capitaux à l’aide d’un taux d’intérêt, appelé taux tarifaire ou taux garanti.

1.2 Ce taux est fixé avec grande prudence par l’assureur puisque ce dernier garantit à très long terme le payement d’un capital dont le montant n’est pas révisable en cours d’exécution du contrat. En outre, le capital est financé par des primes dont certaines seront versées dans un futur très lointain.

Le taux est déterminé compte tenu, notamment :

* du rendement brut des placements des primes, qui seront opérés par l’assureur tout au cours du contrat, et

* des frais de gestion des placements, des polices et des sinistres dans la mesure où ces frais ne sont pas contenus dans les primes.

1.3. Le taux tarifaire s’élevait pour tous les contrats litigieux conclus par P durant la période litigieuse à 4,75 %.

2. la réserve mathématique d’inventaire

" La réserve mathématique d’inventaire d’un contrat est égale à la valeur de rachat théorique de ce contrat, majorée de la valeur de zillmérisation " .

2.1. La valeur de rachat théorique.

2.1.1. Les preneurs d’assurance ont en tout temps droit à la réduction ou au rachat de leur contrat.

Il y a réduction de contrat lorsque l’intéressé cesse de payer les primes à partir d’un moment donné et demande que la somme à laquelle il a droit à ce moment, serve de

prime unique d’une nouvelle assurance portant sur un capital réduit dont l’importance dépendra du nombre des primes déjà effectivement payées.

Il y a rachat de contrat lorsque le preneur cesse de payer les primes, demande la résiliation unilatérale du contrat et le versement à son profit de la somme à laquelle il a droit à ce moment là, compte tenu des primes payées et du taux tarifaire y afférent.

2.1.2. Les valeurs de réduction et de rachat correspondent à la " valeur de rachat théorique ", diminuée d’une indemnité éventuelle couvrant forfaitairement le dommage susceptible d’être subi par l’assureur en raison de l’exigibilité impromptue de ses obligations.

L’article 29 de l’arrêté-vie prévoit à cet égard que la valeur de rachat théorique doit être égale à la différence entre la valeur actuelle d’inventaire des engagements de l’assureur et la valeur actuelle des primes de réduction relatives aux échéances futures.

Les bases techniques utilisées pour le calcul des valeurs de rachat théorique sont celles utilisées pour la tarification.

Cette différence dégage ce que le point 22 de l’annexe 2 de l’arrêté-vie qualifie de " réserve constituée auprès de l’assureur par la capitalisation des sommes payées , déduction faite des sommes consommées ".

2.1.3. En d’autres mots, les preneurs d’assurance ont en tout temps droit à obtenir payement (en espèces ou sous forme de prime unique de conversion du contrat) de la réserve mathématique d’inventaire de leur contrat étant la différence entre :

* d’une part, les capitaux garantis actualisés au moyen du taux d’intérêt tarifaire et des tables de survie et de mortalité prises en considération pour le calcul des primes et des prestations, et

* d’autre part les primes futures restant dues, actualisées au moyen du taux d’intérêt tarifaire et des tables de survie et de mortalité précitées.

La réserve mathématique d’inventaire est donc déterminée en fonction du taux tarifaire (de 4,75 % en l’espèce).

2.2. La valeur de zillmérisation

La valeur de zillmérisation vise les commissions d’acquisition, c’est à dire la quotité de la prime revenant au courtier ou à l’agent par l’intermédiaire duquel le contrat a été souscrit.

P a abandonné à partir du 1er janvier 1993 le système des commissions d’acquisition de sorte que pour tous les contrats postérieurs à 1992, la réserve mathématique d’inventaire des contrats est égale à la " valeur théorique de rachat ", ce qui n’est pas contesté par l’administration.

La valeur de zillmérisation applicable aux contrats conclus avant le 1er janvier 1993 n’influence, quant à elle, le présent litige en aucune façon, dès lors que le taxateur a admis le caractère non imposable de l’ensemble de la " réserve mathématique d’inventaire " .

2.3. Le traitement fiscal des réserves mathématiques d’inventaire

2.3.1. Les réserves mathématiques d’inventaire, calculées et actualisées comme dit ci-dessus sur la base du taux tarifaire, doivent être comptabilisées sous la rubrique C " Provisions techniques ", sous-rubrique C.II " Provisions d’assurance vie " du passif du bilan des entreprises d’assurance . Il sera question de la " provision vie de bilan ", ci-après au n° 3.

2.3.2 L’administration admet, dans les termes suivants, que, dans la mesure où la " provision vie de bilan " comprend des " réserves mathématiques d’inventaire " basées sur la valeur de rachat théorique (et éventuellement une valeur de zillmérisation) des contrats, ces réserves mathématiques d’inventaire ne sont pas imposables :

" (…) L’article 16 §1er, alinéa 1er de l’Arrêté royal du 17 décembre 1992 (…), en accordant au preneur le droit en tout temps au rachat de son contrat, autorise, la plupart du temps, à considérer la valeur de rachat comme une dette certaine et liquide de la compagnie envers le preneur.

" Sous l’angle fiscal, la conséquence de cette particularité propre à la provision d’assurance-vie amène fort justement à conclure que les valeurs de rachat comprises dans les réserves mathématiques de bilan ne peuvent être assimilées à des sommes tombant sous le coup de l’article 25,5° du CIR/92 et ne sont en conséquence pas imposables " (mots soulignés par l’administration dans ses conclusions).

2.3.3 Dans ces conditions, il est inutile que la cour se prononce sur les autres arguments de P tendant à démontrer le caractère non imposable des " réserves mathématiques d’inventaire ".

3. La provision vie de bilan estimée à un montant supérieur aux réserves mathématiques d’inventaire

3.1. La provision d’assurance vie, qui est une des "provisions techniques " devant figurer au passif du bilan des entreprises d’assurance, est communément appelée " provision vie de bilan ".

Elle correspond selon la sous- rubrique CII de l’annexe III - Passif du bilan - de l’A.R. du 17 novembre 1994 relatif aux comptes annuels des entreprises d’assurances (voir ci-avant n° 2.3.1. à " (…) la valeur actuarielle es timée des engagements de l’entreprise d’assurance, y compris les participations aux bénéfices déjà attribués et déduction faite de la valeur actuarielle des primes futures (…) ".

3.2. L’A.R. précité du 17 novembre 1994 relatif aux comptes annuels des entreprises d’assurances dispose que " les provisions techniques (…) doivent répondre aux

critères de prudence, de sincérité et de bonne foi " et que " la provision d’assurance vie est en principe calculée séparément pour chaque contrat. Est autorisée l’utilisation de méthodes statistiques ou mathématiques, lorsqu’il y a lieu de supposer qu’elles donneront approximativement les mêmes résultats que des calculs individuels. Le calcul est fait annuellement par un actuaire sur la base de méthodes actuarielles généralement reconnues " (mots soulignés par la cour).

Ces dispositions n’interdisent donc pas à l’assureur de prévoir une provision vie de bilan plus importante que les réserves mathématiques d’inventaire, s’il l’estime nécessaire compte tenu de l’application à sa situation des critères de prudence, de sincérité et de bonne foi et pour autant qu’il se base sur des méthodes actuarielles généralement reconnues.

3.3. Ceci est confirmé - sur le plan des normes prudentielles - par la loi du 9 juillet 1975 relative au contrôle des entreprises d’assurances et l’A.R. d’exécution du 17 décembre 1992, dit " arrêté vie ", qui indiquent dans les termes suivants que les réserves mathématique d’inventaire constituent une provision vie de bilan minimale :

* " Le Roi détermine le mode de calcul, et le cas échéant, le niveau minimum des réserves ou provisions techniques, en ce compris les réserves ou provisions mathématiques de bilan et les provisions éventuelles pour la participation des assurés dans les bénéfices " (mot souligné par la cour).

* " le montant des provisions mathématiques de bilan ne peut être inférieur à la somme, pour tous les contrats, des réserves mathématiques d’inventaire, le montant négatif de ces dernières étant exclu " ( mots soulignés par la cour).

3.4. L’administration ne conteste pas le fait que les assureurs prévoient une provision vie de bilan supérieure à la réserve mathématique d’inventaire, puisqu’elle écrit page 15 de ses conclusions :

" Des raisons très diverses, liées aux obligations imposées par la réglementation de contrôle ou par la réglementation comptable spécifique aux entreprises d’assurances, à une prudence comptable normale, inhabituelle ou anormale, voire même à la structure capitalistique d’une entreprise, peuvent amener cette dernière à calculer, pour l’établissement de la provision mathématique de bilan, la valeur des engagements respectifs des parties au moyen de facteurs qui donneront comme résultat non pas la valeur actuelle probable du passif exigible à plus ou moins longue échéance, mais une valeur supérieure, destinée à couvrir des charges ou pertes (…) ".

3.5. Il a été indiqué ci-dessus (n° 1.2) que le tau x tarifaire sur lequel est fondé l’évaluation de la réserve mathématique d’inventaire, est déterminé compte tenu :

* du rendement brut des placements des primes, qui seront opérés par l’assureur tout au long du contrat, et

* des frais de gestion des placements, des polices et des sinistres dans la mesure où ces frais ne sont pas compris dans les primes.

3.6 Depuis la fin des années 1980, P a craint que - compte tenu de ses prévisions pessimistes relatives au rendement futur de ses placement et de ses craintes de voir augmenter démesurément ses frais de gestion non compris dans les primes - une provision vie de bilan correspondant à ses réserves mathématiques d’inventaire fixée sur la base du taux d’actualisation de 4,75 % (égal à son taux tarifaire) fût insuffisante pour garantir raisonnablement le payement des capitaux assurés.

Elle a dès lors augmenté sa provision vie de bilan, en estimant celle-ci sur la base d’un taux d’actualisation de 3,70 %, c’est-à-dire un taux inférieur au taux tarifaire de 4,75 % déterminant le montant de la réserve mathématique d’inventaire non taxable.

Le taux de 3,70 % a été obtenu de la façon suivante :

* la moyenne des dix taux moyens annuels les plus bas des emprunts de l’Etat belge à échéance de six ans et plus, retenus sur une période d’observation correspondant aux années 1960 à 1995, s’élève à 6,14 % ;

* P a estimé que le taux de 6,14 %, à retenir comme taux de rendement brut de ses placements, devait être diminué de 20 % pour tenir compte du déficit récurrent de ses frais de gestion non compris dans les primes, et de 20 autres % pour tenir compte de sa crainte d’une poursuite durable de la baisse des rendements bruts amorcée depuis 1990 et confirmée, selon elle, par les autorités monétaires et financières ;

* 6,14 % - (2 x 20 % = 40 %) = 3,68 % arrondis à 3,70 %.

3.7. Le 31 décembre 1995, date de la fin de l’exercice d’imposition 1996 litigieux, le total des dotations annuelles à la provision mathématique de bilan antérieures à l’exercice litigieux (46.202.465.830 FB, soit près de 94 % du total) et de la dotation de 1995 ( 3.079.855.806 FB, soit environ 6 % du total) calculées sur la base d’un taux d’actualisation de 3,70 %, s’élevait à 49.282.321.636 FB.

Si P avait déterminé la provision mathématique de bilan au taux d’actualisation applicable aux réserves mathématiques d’inventaire (le taux tarifaire de 4,75 %), le total des dotations annuelles antérieures à l’exercice litigieux et de la dotation de 1995, ne se serait élevé qu’à 40.321.337.859 FB.

B. LE LITIGE

1. L’administration soutient que la différence entre les sommes de 49.282.321.636 FB et 40.321.337.859 FB, soit 8.960.983.777 F, constitue une provision non exonérée, taxable sur la base de l’article 25,5° du CIR/92.

On examinera ci-après si, dans ces conditions, l’administration est en droit d’invoquer les dispositions des articles 24, alinéa 1er, 4° et 361 du CIR/92 pour taxer en 1998, avec les bénéfices réalisés par P durant l’exercice d’imposition 1996, 94 % des dotations et reprises annuelles de la provision vie supplémentaire, comptabilisées durant les exercices d’imposition antérieurs à l’exercice 1996.

2. En cas de réponse négative à cette question, la cour se prononcera sur la légalité de la taxation, au titre de provision visée par l’article 25,5° du CIR/92 ne répondant pas aux conditions d’exonération prévues par l’article 48 du CIR/92, des dotations et reprises de provision opérées durant le seul exercice d’imposition litigieux (1996), ce qui ne représente que 6 % du total.

En cas de réponse affirmative, la cour se prononcera sur le même problème, étant entendu que le litige porterait alors sur la totalité des dotations et reprises de provision, c’est-à-dire sur celles opérées tant durant l’exercice litigieux que durant tous les exercices antérieurs.

C. APPRECIATION PAR LA COUR

1. Quant au droit de l’administration de taxer, pour l’exercice d’imposition 1996, les dotations et reprises de la provision vie supplémentaire, comptabilisées avant cet exercice

1.1. L’administration soutient que la provision vie supplémentaire comptabilisée par P constitue une provision taxable au sens de l’article 25,5° du CIR/92.

Elle invoque les dispositions des articles 24, alinéa 1er, 4° et 361 du CIR/92 pour taxer, en 1998, avec les bénéfices réalisés par P durant l’exercice d’imposition 1996, les dotations et reprises annuelles de la provision supplémentaire, comptabilisées durant les exercices d’imposition antérieurs à cet exercice.

Ces dotations et reprises annuelles opérées antérieurement représentent la quasi-totalité (94 %) de la provision supplémentaire.

L’article 24, alinéa 1er, 4° du CIR/92 dispose que " Les bénéfices (…) sont ceux qui proviennent (…) de sous-estimations d’éléments de l’actif ou de surestimations d’éléments du passif, dans la mesure où la sous-estimation ou la surestimation ne correspond pas à un accroissement ou à un amoindrissement, selon le cas, exprimé ou non, ni à des amortissements pris en considération pour l’application de l’impôt ".

L’article 361 du CIR/92 prévoit que " Lorsque l’examen de la comptabilité d’une période imposable déterminée fait apparaître des sous-estimations d’éléments de l’actif ou de surestimations d’éléments du passif visées à l’article 24, alinéa 1er, 4°, celles-ci sont considérées comme des bénéfices de cette période imposable, même si elles résultent d’écritures comptables se rapportant à des périodes imposables antérieures, sauf si le contribuable établit qu’elles ont été prises en compte pour déterminer les résultats fiscaux de ces dernières périodes ".

1.2. Les surestimations d’éléments du passif dont question dans les dispositions précitées visent exclusivement des réserves occultes. En effet :

* l’exposé des motifs de la loi du 3 novembre 1976, qui a inséré l’article 21, alinéa 1°, 3° dans le CIR/64 (lequel correspond à l’article 24 , alinéa 1er , 4° du CIR/92), prévoit que la nouvelle définition des bénéfices englobe " les sous-estimations d’éléments de l’actif ou les surestimations d’éléments du passif, étant entendu qu’il s’agit ici de plus-values ou moins values occultes (…) " et que " les réserves occultes constituées par

des sous-estimations d’éléments de l’actif ou des surestimations d’éléments du passif sont considérées comme des bénéfices (…) " .

* la circulaire du 25 mars 1977, qui commente la nouvelle disposition, confirme que les surestimations du passif sont " des réserves occultes (…) dont le caractère imposable n’a jamais été contesté (…) " .

* le commentaire administratif 24/80 du CIR/92 indique qu’on " peut donc généralement affirmer que lorsque des éléments de l’actif ont été sous-estimés ou des éléments du passif surestimés à l’encontre des dispositions comptables ou fiscales, ces éléments doivent être traités comme des réserves dites " occultes ", c’est-à-dire des réserves dissimulées et qui n’apparaissent pas au bilan sous leur dénomination normale. Il s’agit notamment ici des éléments de l’actif (…) qui ont été comptabilisés de manière erronée (…). Sont également visées les réserves apparaissant parmi les éléments du passif sous une dénomination inexacte et qui représentent donc en fait des bénéfices dissimulés (mention de dettes fictives ou éteintes) ".

* le cadre I " Réserves ", A " Bénéfices réservés imposables " des déclarations à l’impôt des sociétés comprend une rubrique " réserves occultes " qui est subdivisé en trois sections : 1/ réductions de valeur imposables (il s’agit d’un cas de sous-estimation d’un élément de l’actif) ; 2/ excédents d’amortissements (il s’agit d’un autre cas de sous-estimation d’un élément de l’actif), et 3/ " autres sous-évaluations d’actif et surestimations du passif ".

Les réserves occultes sont des réserves qui ne sont pas comptabilisées ou qui ont été comptabilisées sous une dénomination inexacte. L’administration définit à bon droit les réserves occultes du passif comme étant " celles qui sont dissimulées dans les comptes de dettes (maintien au passif de comptes de dettes ne représentant plus des dettes réelles à concurrence du montant comptabilisé) " ou qui apparaissent " parmi les éléments du passif sous une dénomination inexacte et qui représentent donc en fait des bénéfices dissimulés (mention de dettes fictives ou éteintes) " .

1.3. L’administration a la charge de la preuve . De ce que les conditions d’application de l’article 361 du CIR/92 sont remplies, c’est-à-dire qu’elle doit établir qu’en l’espèce les dotations et reprises antérieures de la provision vie supplémentaire soit n’ont pas été comptabilisées, soit ont été comptabilisées sous une dénomination inexacte.

Or,

* elle admet que les dotations et reprises antérieures ont été comptabilisées ;

* elle ne soutient pas que la provision supplémentaire a été comptabilisée sous une dénomination inexacte

L’administration résume sa position de la façon suivante, dans ses conclusions :

" Il a été suffisamment démontré que :

* (…) " la différence entre les provisions mathématiques de bilan et la somme des réserves d’inventaire constitue une majoration du passif constituée par la requérante pour tenir compte de la perte qui naîtrait si le risque, qu’elle avait pris en prenant des engagements de taux, se réalisait ;

* cette majoration relève à l’évidence de l’article 25,5 ° du CIR/92 et que, partant, son exonération ne peut être acquise que dans le respect de l’article 48 du CIR/92, en vertu duquel la charge qu’une provision est censée couvrir, doit avoir un caractère probable ;

* le seul fait qu’à l’époque de l’avis de rectification la requérante garantissait sur ses contrats un taux d’intérêt de 4,75 % (…) suffit à conclure que dans ses comptes au 31.12.1995 la partie de la provision mathématique supérieure à celle représentant les engagements déterminés en bases d’inventaire ne traduisait pas au bilan, à ses propres yeux, la valeur actuelle probable des engagements respectifs, mais bien l’existence d’une provision générale pour aléas financiers imposable (dont la comptabilisation n’était, par ailleurs, pas nécessaire au regard d’une prudence comptable normale) ;

* accessoirement (…), la requérante n’a à aucun moment établi le caractère probable de cette perte, mais qu’elle en a simplement démontré l’éventualité ;

* en conséquence, c’est à juste titre qu’a été établie l’imposition contestée ".

Elle se contente ainsi d’affirmer que la provision supplémentaire comptabilisée par P constitue non pas une dette, mais une partie des provisions mathématiques de bilan dont question à l’article 25,5° du CIR/92 visant à couvrir des charges ou pertes futures éventuelles ne permettant pas à P de bénéficier de l’exonération prévue par l’article 48 du CIR/92, dans la mesure où cette dernière resterait en défaut de prouver que la provision est destinée à faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que les événements en cours rendent probables.

Il semble utile, à cet égard, de rappeler que l’article 25,5° du CIR/92 dispose que " Les bénéfices comprennent également (…) les réserves, fonds de prévision ou provisions quelconques, le résultat reporté à nouveau et toutes sommes auxquelles une affectation analogue est donnée " et que l’article 48 du CIR/92 prévoit toutefois que " Les réductions de valeur et les provisions pour risques et charges qui sont comptabilisées par les entreprises en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que les événements en cours rendent probables sont exonérées dans les limites et aux conditions déterminées par le Roi ".

Le seul fait, pour un contribuable, de déduire chaque année des dotations et reprises de provisions comptabilisées au titre de provision visée - comme l’admet l’administration - par l’article 25,5° du CIR/92, a lors que, selon cette dernière, ces sommes n’étaient pas déductibles car non destinées à faire face à des pertes ou charges nettement précisées que les événements en cours rendent probables - au sens de l’article 48 du CIR/92- ne permet pas à l’administration de considérer que ces sommes constituent dès lors des réserves occultes et qu’il y a surestimation d’éléments du passif au sens des articles 24, alinéa 1er, 4° et 361 du CIR/92.

En d’autres mots, le refus - lors de l’examen de la comptabilité d’une période imposable déterminée - d’exonérer sur la base de l’article 48 une provision visée par l’article 25,5°, résultant d’écritures comptabl es se rapportant à des périodes imposables antérieures, ne permet pas à l’agent taxateur de considérer les dotations antérieures à cette provision comme des bénéfices de cette période imposable.

Il ressort de ce qui précède que l’administration n’apporte pas la preuve qui lui incombe de ce qu’elle est en droit de bénéficier en l’espèce de la règle dérogatoire au principe de l’annualité de l’impôt, consacrée de façon limitative par l’article 361 du CIR/92.

1.4. C’est par conséquent à tort que les dotations et reprises de la << provision >> supplémentaire comptabilisées avant le 1er janvier 1995 ont, par application de l’article 361 du CIR/92, été taxées comme des bénéfices de la période imposable 1995 (exercice d’imposition 1996).

1.5. La solution ainsi retenue s’impose d’autant plus à la cour que le principe de la comptabilisation par P de la provision " vie " supplémentaire a reçu l’aval de l’Office de Contrôle des Assurances (OCA) (infra, I), et que le principe de pareille comptabilisation a été consacré par l’arrêté royal du 30 avril 1999 (infra, II).

I. le principe de la comptabilisation, par P, de la provision supplémentaire a reçu l’aval de l’OCA.

* Le 23 juillet 1993, P écrivait à monsieur Jean Marie Delporte, président de l’OCA, que " (…) par la présente, nous souhaiterions obtenir confirmation de l’OCA sur les points que nous vous avons exposés, à savoir :

- les réserves mathématiques d’inventaire fixées par l’arrêté royal du 17 décembre 1992 constituent des provisions minima, mais il est raisonnable, voire indispensable, de créer des provisions mathématiques supérieures lorsqu’il apparaît des éléments propres à la compagnie d’assurance concernée tels que les charges liées à la branche visée, sont supérieures à celles constatées dans d’autres compagnies d’assurance ou lorsqu’il existe des risques particuliers ;

- s’il résulte de l’évolution, soit de la clientèle, soit du mode de gestion de la compagnie d’assurance, que le niveau des provisions peut être réduit sans descendre en-dessous du minimum des réserves mathématiques, ces provisions peuvent être reprises au compte de résultats selon un plan échelonné en fonction de la constatation effective de la modification des éléments qui ont justifié antérieurement la constitution des provisions mathématiques ;

- (….) "

* Le 23 août 1993, le président de l’OCA répondait que " les premier et troisième point repris dans votre lettre, ne suscitent aucune objection de ma part.

" Quant au deuxième point (…), il rencontre également mon accord, mais seulement dans la mesure où, comme vous le proposiez, la réduction s’opérera de manière progressive et uniquement en fonction de l’évolution des éléments qui la justifient,

principalement une meilleure maîtrise de vos frais de fonctionnement, et dans la mesure où un bon rendement de vos actifs financiers est maintenu. Un calcul actuariel devra justifier la relation entre le niveau de vos provisions et le taux technique utilisé ".

* Dans une lettre du 3 mars 1999, P exposait à l’OCA le présent litige fiscal. Elle y écrivait notamment qu’elle avait calculé la provision vie selon la méthode prospective, en retenant un taux technique de 3,70 %. " Ce taux technique correspond à 60 % (…) de la moyenne des dix taux moyens annuels les moins élevés des emprunts de l’Etat belge à six ans et plus, retenus sur une période d’observation correspondant aux trente-six dernières années (…) " .

Elle ajoutait qu’elle considérait " que l’évaluation prudente par un assureur " vie " de son passif à plus ou moins longue échéance envers les assurés et les bénéficiaires était essentiellement fonction du caractère judicieux du taux d’actualisation utilisé pour cette évaluation, étant entendu que ce taux d’actualisation peut être distinct (…) du taux d’intérêt appliqué par l’entreprise d’assurances pour établir sa tarification ".

* L’OCA a répondu le 16 mars 1999 qu’elle partageait l’analyse de P de la réglementation relative à ses provisions.

L’OCA étaye sa réponse en invoquant, notamment les arguments suivants :

- " (…) Les provisions techniques doivent répondre aux critères de prudence, de sincérité et de bonne foi. Il appartient donc à l’entreprise d’assurance d’évaluer ses provisions en fonction de l’évolution du contexte économique et des particularités économiques inhérentes à son portefeuille vie. En matière de taux d’actualisation des engagements, il convient notamment de tenir compte des rendements que l’on peut raisonnablement espérer lors du renouvellement des actifs et du placement des primes futures.

L’arrimage du BEF au DEM et le plan de convergence du traité de Maastricht laissaient supposer depuis plusieurs années une diminution des taux de rendement sur le marché belge ".

- " Cette approche s’est trouvée renforcée par l’adoption de la directive 92/96/CEE du 10 novembre 1992 (…) dont l’article 18 stipule en son point Aiii ’qu’une évaluation prudente’ (des provisions techniques) ’ne signifie pas une évaluation sur base des hypothèses considérées les plus probables, mais doit tenir compte d’une marge raisonnable pour variations défavorables des différents facteurs en jeu’ et en son point B, d que ’l’Etat membre exige que l’entreprise constitue dans ses comptes une provision destinée à faire face aux engagements de taux pris envers les assurés, lorsque le rendement actuel ou prévisible de l’actif de l’entreprise ne suffit pas à couvrir ces engagements’.

" (…) L’article 18 consacre donc le principe que, pour le calcul de la provision d’assurance vie, une entreprise d’assurance se doit de tenir compte de facteurs économiques particuliers aux entreprises d’assurance comme, par exemple (…) les conditions d’exploitation lorsque celles-ci se révèlent défavorables au niveau des frais de gestion et de distribution (c’est-à-dire lorsque les chargements tarifaires sont

insuffisants pour assurer la gestion des dossiers) ou lorsque le rendement actuel ou prévisible des actifs d’une entreprise ne suffit pas à couvrir ses engagements ".

II. le principe de pareille comptabilisation a été ultérieurement consacré par l’arrêté royal du 30 avril 1999.

L’article 5 de cet arrêté royal qui n’est pas encore applicable à l’exercice litigieux, consacre, en ces termes, le principe (et dans certains cas l’obligation !) de la comptabilisation d’une provision supplémentaire dont P avait été un précurseur dix ans auparavant :

" L’entreprise d’assurance est tenue de constituer une provision complémentaire dès que le taux d’intérêt garanti excède 80 % du taux d’intérêt moyen sur les cinq dernières années des OLO’s à dix ans, de plus de 0,1 %.

" Cette provision complémentaire à constituer fait partie de la provision d’assurance vie. Elle est égale à la somme, pour tous les contrats, de la différence positive entre la réserve d’inventaire du contrat recalculée au moyen de ses bases techniques (…), mais où le taux d’intérêt technique est remplacé par le taux correspondant à 80% du taux d’intérêt moyen cité au premier alinéa et la réserve d’inventaire de ce contrat (…) ".

La provision supplémentaire (ou " complémentaire " comme indiqué dans l’arrêté royal du 30 avril 1999) constituée par P depuis la fin des années 1980, dont le principe a été approuvé par après par l’OCA, par la Directive 92/96/CEE et par l’arrêté royal précité, ne peut donc en tout état de cause pas être tenue pour une réserve occulte ou la surestimation d’un élément du passif parce qu’elle est -par définition- " supplémentaire ", c’est à dire plus importante que la provision de bilan correspondant à la réserve mathématique d’inventaire.

1.6. La cour devra donc exclusivement trancher ci-après la question de savoir si les dotations et reprises de la provision supplémentaire comptabilisées en 1995 (soit 3.079.855.806 F) étaient taxables ou non.

2. Quant à la taxation, au titre de provision visée par l’article 25,5° du CIR/92 ne répondant pas - selon l’administration - aux conditions d’exonération prévues par l’article 48 du CIR/92, des dotations et reprises de provision opérées durant le seul exercice d’imposition litigieux (1996)

C’est à tort que l’administration soutient que la provision vie supplémentaire est " générale " et qu’elle ne peut dès lors bénéficier de l’exonération prévue par l’article 48 du CIR/92 dans la mesure où, selon l’administration, elle n’a pas été comptabilisée en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que les événements en cours rendent probables.

Il ressort en effet des considérations suivantes que les pertes ou charges couvertes par la provision supplémentaire étaient nettement précisées et que les événements en cours les rendaient probables.

2.1. Le risque couvert est d’une part le risque spécifique des assureurs vie du rendement invariable promis et garanti aux assurés à très long terme et pour des primes non encore versées, et d’autre part l’engagement irrévocable de poursuivre la gestion des polices et des avoirs représentatifs, même sans contrepartie effectivement payée.

Ce risque de pertes ou charges est dès lors nettement précisé.

2.2. Les normes comptables prévoient que " les provisions techniques (…) doivent répondre aux critères de prudence, de sincérité et de bonne foi " et que " (…) est autorisée l’utilisation de méthodes statistiques ou mathématiques, lorsqu’il y a lieu de supposer qu’elles donneront approximativement les mêmes résultats que des calculs individuels. Le calcul est fait annuellement par un actuaire sur la base de méthodes actuarielles généralement reconnues ".

P soutient qu’elle a agi avec prudence, sincérité et bonne foi et s’est basée sur des méthodes actuarielles généralement reconnues en retenant, sur la base des rendements des 36 dernières années, un taux de rendement brut de ses placements de 6,14 % dont elle a déduit deux fois 20 % pour tenir compte des deux risques suivants qu’elle craignait depuis la fin des années 1980, à savoir :

* celui de voir augmenter démesurément ses frais de gestion non couverts par les primes, et

* celui d’une diminution durable des rendements futurs de ses placements.

Ces éléments l’ont amenée à valoriser sa provision " vie " de bilan sur la base d’un taux d’actualisation de (6,14 - 20 % - 20 % =) 3,70 % au lieu de 4,75 %.

2.3. Ces trois paramètres appellent les appréciations suivantes :

2.3.1. Le taux de rendement brut de 6,14 % fixé sur la base des rendements des 36 dernières années.

Le taux de 6,14 % est la moyenne des dix taux moyens les plus bas des obligations d’Etat à six ans et plus, enregistrés de 1960 à 1995.

P s’est basée de façon raisonnable sur le rendement d’obligations d’Etat à long terme. La période de référence est représentative de par sa longueur. Il est normal que seuls les taux moyens les plus bas soient pris en considération car le but de la provision supplémentaire était de couvrir un risque intégralement ; si la provision avait été déterminée sur la base de taux moyens plus élevés, elle n’aurait pas rempli l’objectif visé puisqu’une partie du risque n’aurait pas été couverte.

Il s’est avéré plus tard que les critères retenus n’étaient pas trop pessimistes dès lors qu’en 1995 le rendement brut moyen " coupons " de l’ensemble des titres et des valeurs représentatifs de la provision vie était de seulement 5,1 % et qu’en 2003 il atteignait à peine 3,5 %, ainsi qu’il ressort du graphique 3 des conclusions de P non critiqué par l’Etat .

Le taux de 6,14 % n’était pas non plus pessimiste, même si P avait tenu compte, outre du rendement brut " coupons ", des plus-values réalisées sur les titres et valeurs détenus, c’est-à-dire du rendement brut financier comptable et ce malgré le caractère aléatoire de la réalisation de plus-values boursières. Ce rendement était de 6 % en 1995 ; il est passé sous le taux de 6 % en 1996 et après avoir une nouvelle fois atteint 6 % en 1997 et dépassé ce taux en 1998 et 1999, il a fortement décru à partir de 2000 pour devenir négatif (- 1,70 %) en 2002 et atteindre à nouveau 6 % en 2003.

2.3.2. La diminution de 20 % du taux brut de 6,14 % pour couvrir le risque de déficit des frais de gestion.

Le déficit des frais de gestion de P s’élevait à 596.183.000 BEF le 31 décembre 1995. Il représentait 1,20 % de la provision bilantaire vie et absorbait, en 1995, 20 % du rendement financier brut global.

Ce résultat négatif représente la différence entre d’une part, le total des frais de gestion des sinistres et des placements, et des frais d’exploitation (1.173.358.000 BEF) et d’autre part, les chargements contenus dans les primes payées par les clients et les chargements d’inventaire consommés, obtenu par la différence entre les primes brutes de frais et l’accroissement net de frais de la provision " vie " (571.175.000 BEF).

Ce déficit, qui est récurrent, trouve notamment son origine dans des frais non couverts par les chargements d’inventaire contenus dans les primes.

Tel sera le cas lorsque, comme c’est son droit, le preneur d’assurance arrête de verser les primes à un moment donné, sans solliciter le rachat du contrat. Ce dernier est alors appelé " contrat réduit " parce que le capital assuré sera réduit en fonction de l’absence de versement de primes.

Dans cette hypothèse les obligations de gestion perdureront pourtant pendant toute la durée du contrat parce que l’obligation de gestion des assureurs ne cesse que lorsque le contrat -même réduit- prend fin soit par le décès, soit par l’arrivée du terme, soit par le rachat.

L’assureur sera ainsi amené à exposer des frais de gestion non couverts par des primes (par définition non payées) en cas de rachat ultérieur du " contrat réduit ", de sa cession, de sa mise en gage ou de sa remise en vigueur éventuels ; le changement éventuel d’intermédiaire ou des bénéficiaires du contrat réduit entraîne aussi des frais exceptionnels.

La diminution de 20 % du taux de 6,14 % parait judicieuse, eu égard aux éléments exposés ci avant.

2.3.3. La diminution de 20 % supplémentaires du taux de 6,14 % pour faire face au risque de baisse durable des rendements futurs.

En 1990, les taux à long terme étaient de 10,06 %. Ensuite, ils n’ont cessé de diminuer pour s’établir à 7,35 % en 1995, soit une chute de 26 % en cinq ans.

Les autorités monétaires et financières confirmaient, en 1995, la poursuite de cette baisse.

Dans son rapport annuel pour 1995, la Banque Nationale de Belgique écrivait à cet égard, pages 106 et 107, que " le recul (des taux d’intérêt à long terme) a été particulièrement prononcé. Le rendement de l’obligation linéaire de référence à 10 ans - qui était encore de 8,45 % en janvier - est revenu à 6,7 % en décembre (…). Cette évolution est principalement liée au recul de rendement des obligations allemandes (…).La réduction de l’écart de taux d’intérêt avec l’Allemagne s’inscrit par ailleurs dans une tendance à plus long terme ".

L’UPEA indiquait par ailleurs dans son rapport pour 1995 " que si le passage à la monnaie unique constitue (…) une grande chance, il représente aussi un formidable défi (…). Des questions très concrètes vont se poser aux assureurs (…) :

- la stabilité monétaire, qui exercera une pression à la baisse sur les taux d’intérêt à long terme et pèsera donc sur les produits financiers dont le volume constitue un facteur essentiel dans la formation du résultat ;

- le taux d’intérêt technique garanti en assurances vie, qui devrait subir une baisse sensible (…) ».

2.3.4. Le fait pour P de n’avoir retenu que (100 - 20 % - 20 % =) 60 % du rendement brut de 6,14 %, soit 3,70 %, comme taux d’actualisation n’a rien de surprenant.

On relèvera à ce propos, que l’article 18, B, a de la Directive 92/96/CEE du 10 novembre 1992 a imposé aux Etats membres de fixer pour les contrats d’assurance vie " un taux d’intérêt maximal unique (…) ne pouvant être supérieur à 60 % de celui des emprunts obligataires de l’Etat dans la devise duquel est libellé le contrat ".

2.4. C’est à bon droit que P affirme qu’elle a évalué les risques de façon scientifique, selon des méthodes actuarielles préconisées tant par la doctrine que par les autorités nationales (OCA) que communautaires, et que cette évaluation a déterminé ce qui était probable (et pas simplement possible) en fonction des données objectives du passé, de ses propres données notamment au 31 décembre 1995 et des projections des autorités monétaires et financières.

2.5. Les arguments, développés par l’administration pour contester le caractère précis et probable du risque couvert, ne sont pas convaincants.

2.5.1. Compte tenu de ce qui précède, la cour ne partage ainsi pas l’opinion de l’administration selon laquelle les affirmations de P " apparaissent comme extraordinairement contradictoires " .

2.5.2. Contrairement à ce que soutient l’administration, ce n’est ainsi pas parce que P, notamment contrainte par des impératifs de la concurrence, proposait encore à l’époque du litige, des contrats avec un taux tarifaire de 4,75 %, qu’il faut en conclure qu’à ce moment elle estimait que ses engagements était sûrement équilibrés, que la valeur actualisée probable de la différence entre ses engagements et ceux de ses assurés était nécessairement égale à leur valeur d’inventaire et que la provision

supplémentaire ne pouvait dès lors porter que sur une charge simplement possible, et non probable.

L’ensemble des éléments précités démontre en effet le contraire.

2.5.3. L’administration estime le taux de 3,70 % anormalement bas parce qu’il se situe 40 % au-dessous de la moyenne des 10 taux de rendement des obligations belges les moins élevés de la période 1960-1996. Il a été démontré ci-avant que dans le cas d’espèce, ce taux était justifié.

2.5.4. Dans la requête d’appel, P écrivait que l’actualisation de la provision doit être calculée en fonction du taux permettant à l’assureur de faire face aux pertes enregistrées et à l’entame de ses fonds propres lorsque, pendant une ou plusieurs périodes de temps pouvant être nettement plus courtes que 30 années, le rendement net effectif des actifs devient inférieur au taux tarifaire garanti, c’est-à-dire 4,75 %.

Il est répondu de façon inadéquate à cet argument par l’administration lorsque celle-ci avance que " (…) il faut nécessairement, pour que cette perte atteigne un niveau égal à celle obtenue sur base d’un rendement de 3,70 % durant 30 ans des actifs représentatifs, que le taux de rendement des actifs sur cette période de quelques années, se fixe en deçà de 3,70 % (…) " . P faisait en effet référence à un taux de rendement de 4,75 %, alors que l’administration répond en se basant sur le taux de 3,70 % qui a précisément été fixé par P pour faire face aux risques probables dont question.

2.5.5. La réduction de 20 % du taux de rendement brut de 6,14 % destinée à faire face au risque probable de déficit des frais de gestion, est contestée par l’administration, notamment dans les termes suivants, : " on rappellera d’abord que les primes versées par l’assuré comprennent divers chargements définis par l’arrêté royal du 17 décembre 1992 : ce sont les chargements d’inventaire, d’acquisition et d’encaissement. Par définition, les chargements payés par l’assuré ne sont pas affectés à la constitution de prestations mais servent à couvrir les frais de l’assureur. Le coût de la gestion des contrats est couvert grâce à l’introduction de chargements pour frais compris dans la prime commerciale versée par l’assuré " .

Il a déjà été répondu à cette affirmation, ci-dessus au n° 2.3.2 où il a été démontré qu’il existe des frais non couverts par les chargements d’inventaire contenus dans les primes, qui sont la cause d’un déficit récurrent.

2.5.6. Il est reproché à tort à P de n’avoir " à aucun moment " donné une mesure précise de l’importance relative de la provision pour risque de pertes futures sur frais généraux par rapport à la provision constituée pour parer à l’aléa financier.

Cette mesure précise a été donnée ; un pourcentage de 20 % du taux de rendement brut de 6,14 % a été déduit pour tenir compte du déficit des frais de gestion.

2.5.7. P n’aurait tenu aucun compte du fait qu’une partie de ses engagements de taux étaient déjà couverts par des actifs dont le rendement était encore, à l’époque du litige, bien supérieur à 4,75 %, permettant -selon l’administration- de supporter

une baisse des taux au dessous de 4,75 %, sur la durée restant à courir de ces actifs.

L’agent taxateur illustrait cette affirmation en citant, dans l’avis rectificatif, l’exemple d’un individu de 30 ans qui conclurait le 1er janvier 1995 un contrat destiné à lui assurer un capital de 5.000.000 F à 65 ans, moyennant versement d’une prime unique. Dans l’exemple du taxateur le contrat avait ainsi le 1er janvier 1995 une durée restante de 35 ans.

P a répondu à bon droit -outre le fait que le contrat à prime unique était un contrat assez marginal - que si l’on ne pouvait effectivement pas considérer que le contrat engendrait un risque de taux pour les sept ou huit premières années, il engendrait toutefois un risque pour les vingt sept années qui suivent pour un contrat d’une durée restante de trente cinq ans. Elle ajoutait, à titre d’exemple, que si le taux se fixait à 3 % pour ces vingt sept dernières années, le rendement moyen pour la durée totale de trente cinq ans s’élèverait à 3,40 %.

L’administration conteste cette démonstration en se contentant :

* de s’étonner de ce que dans ses conclusions, le taux minimal de rendement est fixé par P à 3,70 % et non à 3,40 %. L’administration se demande ce que représente dans ce cas, le taux de 3 %.

On rappellera que le taux de 3 % applicable aux 27 dernières années (ce qui donnait un taux moyen de 3,40 % pour les 35 années), a été donné à titre exemplatif. Grâce à un calcul scientifique, P a démontré qu’en réalité le taux moyen pour toute la durée restante du contrat (35 ans) pouvait être fixé à 3,70 %, ce qui a comme conséquence que selon ces calculs, le taux de rendement sera en réalité légèrement supérieur à 3 % durant les 27 dernières années.

* d’affirmer qu’elle ne connaît pas la composition exacte du portefeuille de P, mais que le portefeuille d’un assureur est " en général, pour une partie assez importante des provisions, composés de contrats dont la durée restante est inférieure à 20 ans et dont le risque de taux ne court en principe que sur une durée inférieure à 12 ans " .

Il s’agit là d’une affirmation générale ne reposant sur aucun élément du dossier et s’écartant du propre exemple donné par l’administration elle-même où le contrat était souscrit par un individu de 30 ans espérant bénéficier d’un capital à 65 ans ; P a répondu adéquatement au reproche précité de l’administration.

2.5.8. L’administration reproche à P de n’avoir pas tenu compte de la valeur de zillmérisation.

Comme indiqué dans la section A. Eléménts d’appréciation, n° 2.2, traitant de cette valeur qui vise les commissions d’acquisition, c’est-à-dire la quotité de la prime revenant au courtier ou à l’agent par l’intermédiaire duquel le contrat a été souscrit, P a abandonné à partir du 1er janvier 1993 le système des commissions d’acquisition de sorte que pour tous les contrats postérieurs à 1992, la réserve mathématique

d’inventaire des contrats est égale à la " valeur théorique de rachat ", ce qui n’est pas contesté par l’administration.

Quant à la valeur de zillmérisation applicable aux contrats conclus avant le 1er janvier 1993, celle-ci n’influence le présent litige en aucune façon, dès lors que le taxateur a admis le caractère non imposable de l’ensemble de la " réserve mathématique d’inventaire ".

2.5.9. L’administration invoque en vain le fait que " pour appréhender le caractère probable ou non de la charge, (elle) a, pour évaluer la mesure du risque, comparé le comportement de la requérante (P) par rapport à celui de contribuables placés dans la même situation qu’elle ; que dès lors qu’il est apparu que la plupart d’entre eux (de nombreux, dit la requérante) n’avaient aucunement majoré leur passif pour tenir compte de ce risque, il en résultait forcément, sauf à considérer que la majorité des assureurs du pays étaient en infraction avec les règles comptables applicables en matière de provisions, que la réalisation de ce risque avait été considérée par eux comme non probable " .

La situation de chaque assureur est différente. Par ailleurs, l’administration ne précise pas le nombre, ni la valeur du portefeuille des assureurs qui n’ont pas créé une provision supplémentaire. Enfin, et surtout, le caractère probable ou non des risques de P couverts par celle-ci ne dépend pas de la situation et des décisions des autres assureurs.

2.6. Il apparaît par conséquent clairement que les trois paramètres retenus par P, pour le calcul de la dotation de 1995 à sa provision supplémentaire de bilan, étaient sérieux et concordants. Ils avaient trait à des risques nettement précisés et probables, comme exigé par l’article 48 du CIR/92, et y répondaient adéquatement.

Cette dotation n’est donc pas taxable.

3. Conclusion

L’appel principal, interjeté par P, est fondé.

L’appel incident : les avantages anormaux ou bénévoles qui auraient été consentis à l’ASBL. PS par l’abandon d’une créance de 510.000.000 F sur cette dernière.

A. ELEMENTS D’APPRECIATION

1. Rapports entre P et l’ASBL PS

1.1. Dans l’entre deux guerres, P a entamé une action sociale . Elle l’a développée par l’intermédiaire d’une personne juridique distincte, l’ASBL P, car la loi de contrôle des entreprises d’assurance du 9 juillet 1975 contraint celles-ci à limiter leur objet social et leurs activités, aux seules opérations d’assurance et aux opérations qui en découlent directement.

1.2. Dès le début des années 1980, l’ASBL P a connu d’importantes difficultés économiques.

P avait alors le choix, soit de mettre fin aux activités de l’ASBL P, de vendre ses actifs et de licencier son personnel, soit de mener une restructuration en douceur, pour préserver la réputation de P et la paix sociale en son sein, ce qui impliquait un appui financier pour éviter la déconfiture judiciaire.

Elle a choisi la seconde voie : elle a réduit progressivement les activités de l’association, (ce qui a suscité de vifs mécontentements auprès des bénéficiaires) ; des membres du personnel de l’association ont été licenciés (en 1991, elle comptait encore 1.055 employés comparés aux 2.399 personnes au service de P) ; elle a accordé des avances sans intérêts à l’ASBL P puis a renoncé à ses créances irrécouvrables et ensuite, elle a accordé de nouvelles avances auxquelles elle a renoncé à nouveau.

L’ASBL P a été dissoute en 1999.

2. Les abandons de créance de 1981 et 1983

L’administration a rejeté, sur la base de l’article 44 du CIR/64 (article 49 du CIR/92), la déduction par P des créances sur l’ASBL P, auxquelles elle avait renoncé en 1981 et 1983.

Un arrêt du 4 mai 2005 de la cour d’appel de Liège, devenu définitif suite au rejet, le 19 octobre 2006, du pourvoi introduit contre cet arrêt, a décidé que les conditions d’application de l’article 44 du CIR/64 n’étaient pas remplies, aux motifs notamment que les " moins-values actées constituaient une opération sans rapport nécessaire avec l’acquisition ou la conservation de revenus résultant de l’exercice de la profession du contribuable ; qu’il n’est pas établi que la comptabilisation des moins-values était basée sur la situation financière réelle de l’ASBL (…) ; qu’il ne peut être considéré que la perte des créances est devenue réelle ou certaine au cours des exercices litigieux (…) ; qu’il est dès lors incohérent de la part de la requérante de tenter de soutenir qu’un créancier décide d’abandonner sa créance à l’encontre d’un débiteur au motif que la situation financière de ce dernier apparaît définitivement compromise et, simultanément, de lui accorder de nouveaux crédits importants (…) ".

3. L’abandon de créance de 1992

3.1. Le dossier ne fait état d’aucun litige relatif à l’abandon de créances sur l’ASBL. P de 1984 à 1992.

3.2. En 1992, P a abandonné la créance d’une avance sans intérêts de 289.000.000 F sur l’ASBL P. Cet abandon de créance n’a pas été imposé comme une dépense non déductible au titre de charge professionnelle (article 49 du CIR/92), mais bien comme un avantage anormal ou bénévole, visé par l’article 26 du CIR/92, consenti à l’association.

3.3. Le 29 décembre 1995 l’agent taxateur écrivait à P : " J’ai l’honneur d’accuser réception de votre réponse du 27.12.95, réf (…), à mon avis de rectification du 21.11.95 concernant votre déclaration fiscale de l’exercice d’imposition 1993. Vous voudrez bien trouver, ci-après, les éléments sur base desquels l’imposition a été établie : (…) avantages anormaux ou bénévoles : 28.900.000 F (renvoi 3) (…) "

Le renvoi 3 est libellé comme suit : " Avantages anormaux ou bénévoles : 28.900.000 F

L’argumentation que vous avez développée concernant l’avantage anormal ou bénévole concédé dans l’opération d’abandon de créance vis-à-vis de l’ASBL.PS a retenu toute mon attention. Je ne puis cependant y souscrire. Sans vouloir répondre point par point à votre raisonnement, j’estime que les arguments développés dans mon avis établissent à suffisance l’existence d’un avantage anormal ou bénévole. Toutefois, je puis vous rejoindre dans l’évaluation dudit avantage sur base de la valeur réelle qu’il a dans le chef du bénéficiaire. Le montant de l’avantage peut (être) ainsi fixé, de manière raisonnable, à 10 % du montant de l’abandon de créance ".

P a marqué son accord sur cette solution.

4. Les abandons de créance litigieux de 1995 et 1996

4.1. En 1995 et 1996, P a abandonné la créance de deux avances sans intérêts de respectivement 510.000.000 F et de 100.000.000 F sur l’ASBL P.

Se conformant à l’accord précité (n° 5), intervenu le 29 décembre 1995, elle a déclaré 10 % de chacun de ces montants comme avantages anormaux ou bénévoles.

4.2. L’agent taxateur a taxé 100 % de ces montants, en précisant dans son avis rectificatif du 13 novembre 1998 relatif aux revenus de 1995 (exercice d’imposition 1996) que :

" Vous objecterez sans doute (…) que l’administration ne peut opérer la rectification envisagée sans nuire à la sécurité juridique des accords passés (…). En ce faisant, l’administration violerait le principe de bonne administration reconnu par la Cour de cassation.

Je ne puis être d’accord avec votre analyse (…). En vertu du principe de légalité, aucun impôt ne peut être instauré au profit de l’Etat que par la loi. (…). Il est également admis que l’administration ne peut transiger avec le contribuable sur des questions de droit mais bien sur des questions de fait (…).

Il n’est nullement contesté qu’une opération similaire d’abandon de créance au cours de l’année 1992 a été traitée fiscalement comme constitutive d’un avantage anormal ou bénévole à concurrence de 10 % du montant de la valeur nominale de la créance abandonnée. J’estime que l’accord intervenu à cette occasion entre la société et l’administration portait sur une question de fait, à savoir l’évaluation de l’avantage anormal ou bénévole à hauteur de 10 %.

Pour l’exercice d’imposition 1996, la convention d’abandon de créance du 28.12.95 constitue un nouvel élément en ce sens qu’elle est opérée sur de nouvelles créances accordées, notamment, en 1995 ".

Un avis rectificatif analogue a été envoyé le 28 octobre 1999 au sujet des revenus de 1996, exercice d’imposition 1997.

4.3. Dans ces deux avis rectificatifs, il n’est jamais question de l’article 49 du CIR/92 relatif à la déduction des charges professionnelles.

4.4. Dans ses secondes conclusions prises devant le 1er juge, l’administration :

* soutient que l’abandon de créance constitue un avantage anormal ou bénévole au sens de l’article 26 du CIR/92, que l’avantage consenti en 1995 et 1996 correspond à 100 % de la créance abandonnée et justifie son accord de fixer à seulement 10 % du montant de la créance, l’avantage consenti en 1992 par la seule considération que ce pourcentage a été déterminé " in concreto compte tenu des circonstances de fait propres à l’exercice concerné et, notamment, le fait que la société requérante a modifié sa dénomination qui créait jusqu’alors une confusion avec l’ASBL " ;

* indique " à titre subsidiaire que si, comme le prétend la requérante, la renonciation à la créance devait être considérée sous l’angle de l’article 49 CIR parce qu’il s’agirait d’une dépense à fonds perdus, quod non, il appartiendrait à la requérante de prouver que ladite dépense a été supportée par elle en vue d’acquérir ou de conserver des revenus imposables. Cette preuve n’est pas rapportée (…) ".

4.5. Dans ses conclusions prises devant la cour, l’administration

* estime que " la circonstance que l’administration ait fait application de l’article 26 CIR/92 dans le cadre du présent litige, ne peut donc être considérée comme contraire à la volonté du Législateur. En tout état de cause, les conséquences qui résulteraient d’une application de l’article 49 CIR/92 (art.44 CIR/64) dans le présent litige, sont également envisagées ci-dessous ». L’administration invoque, à cet égard, principalement la motivation retenue par la cour d’appel de Liège dans son arrêt précité du 4 mai 2005, concernant la non déductibilité des abandons de créance en 1981 et 1983 (cf. ci-dessus n° 2).

* affirme qu’à ses yeux, l’évaluation de l’avantage à 10 % des créances abandonnées, apparaît " pour le moins dérisoire, de sorte qu’il serait opportun pour la cour de reconsidérer de manière plus objective et raisonnable, le montant des abandons de créance à taxer comme avantages anormaux et bénévoles, et d’évaluer celui-ci, à tout le moins, à une quotité de 50 % ".

B. DECISION DE LA COUR

1. La taxation des créances abandonnées et du manque à gagner résultant des avances consenties sans intérêts à l’ASBL P en 1995 et 1996, a été effectuée sur la base de l’article 26 du CIR/92 : l’administration a toujours considéré, d’une part, que P accordait un avantage à l’association et, d’autre part, que cet avantage était anormal ou bénévole.

Le montant des avantages anormaux ou bénévoles doit être fixé compte tenu de la valeur réelle qu’ils ont dans le chef du bénéficiaire, l’ASBL P en l’occurrence. C’est l’administration qui doit apporter la preuve de l’existence matérielle de ces avantages

Fin décembre 1995, un accord est intervenu entre P et l’agent taxateur au sujet de la créance abandonnée en 1992 ; aux termes de cet accord, les parties estimaient "

raisonnable " de considérer que, dans le chef de l’ASBL P, seuls 10 % de la créance constituait un avantage et que celui-ci était anormal ou bénévole. Ceci avait pour conséquence que 90 % de ladite créance était déductible des bénéfices de P.

P a immédiatement appliqué cet accord - dans sa comptabilité et ses déclarations fiscales - aux abandons de créances litigieux de 1995 et 1996.

2. Le taxateur est revenu sur l’accord dans les avis rectificatifs des 13 novembre 1998 et 28 octobre 1999, en invoquant le principe de la légalité et l’interdiction qui lui était faite de transiger sur des questions de droit.

Dans ces mêmes avis rectificatifs, il précise pourtant que l’accord intervenu fin décembre 1995 " portait sur une question de fait, à savoir l’évaluation de l’avantage anormal ou bénévole à hauteur de 10 % " (cf. ci-dessus A - n° 4.2).

L’administration ne démontre pas en quoi la fixation de commun accord de la valeur -dans le chef de l’association- d’un avantage anormal ou bénévole à un pourcentage de 10 % du montant concerné, plutôt qu’à 20 %, 50% ou 100 % de celui-ci, violerait le " principe de légalité " selon lequel, selon les termes des avis rectificatifs " aucun impôt ne peut être instauré au profit de l’Etat que par la loi " (ibidem).

Le pourcentage de 10 % a été déterminé d’une part " de manière raisonnable " (cf. ci-dessus A - n° 3.3) et d’autre part " in concreto compte tenu des circonstances de fait propres à l’exercice concerné et, notamment, le fait que la société requérante a modifié sa dénomination qui créait jusqu’alors une confusion avec l’ASBL " (cf. ci-dessus A - n° 4.4), tandis que le pourcentage a été fixé à 100 % en 1995 et 1996 parce que les abandons de créance de ces années constitueraient un " nouvel élément " en ce sens qu’ils sont opérés sur de nouvelles créances accordées durant ces années (cf. ci-dessus A - n° 4.2 in fine).

Le simple fait que P ait encore accordé des avances en 1995 et 1996 et se soit rendu compte à la fin de l’exercice social qu’elle devait y renoncer pour éviter la déconfiture de l’association, ne permet pas de considérer que cette association ait bénéficié durant ces années d’un avantage anormal ou bénévole supérieur à celui qui a été raisonnablement déterminé fin 1995, à savoir 10 % de la somme concernée.

L’administration hésite même quant au pourcentage à appliquer puisqu’elle invite la cour à évaluer l’avantage " à tout le moins à une quotité de 50 % " (cf. ci-dessus A - n° 4.5).

Il ressort de ce qui précède que les motifs invoqués par l’administration, pour s’écarter de l’accord litigieux, alors qu’elle a la charge de la preuve de la réalité et du montant de l’avantage anormal ou bénévole et a conclu un accord à ce sujet, ne sont pas convaincants.

En l’espèce, l’administration a violé le principe de légitime confiance de P en remettant en cause - en 1998 - avec effet rétroactif aux années 1995 et 1996, l’accord intervenu fin décembre 1995.

Dès lors, seules les sommes déclarées par P au titre d’avantages anormaux ou bénévoles, sont taxables, comme décidé par le 1er juge.

L’appel incident de l’Etat n’est pas fondé.

3. A supposer même qu’aucun accord n’ait été conclu entre les parties au sujet de la détermination de l’avantage visé par l’article 26 du CIR, ou à supposer que le régime fiscal de l’abandon de créances ait été régi par les conditions de déduction prévues par l’article 49 du CIR, encore l’appel incident n’aurait-il pas été fondé pour les motifs suivants.

* Dès l’entre deux guerres, P (…), s’est ouverte aux problèmes d’environnement social, en participant activement -notamment- à la lutte contre la tuberculose. Après la guerre, P (…) créa et finança une ASBL, appelée comme elle " P ", qui a mis à la disposition de la collectivité un réseau d’œuvres comprenant des centres de thermalisme social, une clinique pour enfants asthmatiques et des institutions médico-pédagogiques.

P cherchait ainsi à se faire connaître du public et à se faire apprécier de sa clientèle d’assurés, grâce à ces actions menées dans le domaine humanitaire et social.

Ces actions étaient menées par une ASBL (P) en raison des impératifs de la loi de contrôle des entreprises d’assurances. Personne n’ignorait toutefois que l’ASBL intervenait en réalité exclusivement pour compte de la société (P). Cette dernière présentait d’ailleurs, dans ses rapports annuels, les institutions de l’ASBL, comme étant ses propres institutions. Pour les exercices 1988 et 1991, les comptes de la société (P) étaient présentés au public dans le cadre du " groupe P " dont l’ASBL faisait partie intégrante .

Les actions sociales de l’ASBL P étaient ainsi réputées l’œuvre de la société (P).

A partir des années 1980, les interventions publiques auprès de l’ASBL se tarirent et P dut se rendre à l’évidence que le remboursement des avances, qu’elle faisait régulièrement à l’association, devenait compromis. Il était toutefois impossible à P d’arrêter le financement de l’association, sauf à faire rejaillir sur elle des conséquences commerciales et sociales redoutables. L’ASBL occupait à l’époque plus de 1.000 membres du personnel.

P, à qui la loi sur le contrôle des entreprises d’assurances interdisait d’acheter les institutions de l’ASBL, d’intégrer son personnel et de procéder en douceur à un dégagement progressif, a procédé à l’octroi d’avances importantes à l’ASBL, avances sans intérêts à la récupération desquelles elle devait ensuite rapidement renoncer.

* Il ressort des considérations convaincantes développées par P tout au long du litige, que les pertes résultant des abandons de créances en 1995 et en 1996, d’ailleurs non porteuses d’intérêts, se rattachaient à l’exercice de l’activité professionnelle de P, étaient certaines et liquides à la fin de chaque exercice concerné, et ont été subies " en vue d’acquérir ou de conserver des revenus

imposables ", de sorte qu’en tout état de cause, les conditions d’application de l’article 49 du CIR sont remplies en l’espèce.

* L’appauvrissement de P ne peut pas constituer un avantage dans le chef du bénéficiaire ASBL. P, si - comme tel a été le cas en l’espèce pour les années 1995 et 1996 - le but poursuivi par celui qui a engagé la dépense, ou renoncé à réclamer des intérêts sur les avances consenties, était 1/ d’indemniser complètement ce bénéficiaire, 2/ d’acquérir des revenus supplémentaires ou de conserver des revenus, grâce à l’activité déployée, en contrepartie, auprès du public, par ce bénéficiaire, 3/ de sauvegarder son image de marque et sa renommée et 4/ d’éviter la mise à mal de la paix sociale par le licenciement d’un tiers du personnel du Groupe P employé par le bénéficiaire.

Dès lors que, sous réserve de la quotité de 10 % convenue en 1995 entre l’administration et P, aucun avantage n’a été consenti à l’ASBL, il est sans intérêt d’examiner s’il y a avantage anormal ou bénévole. L’administration ne démontre donc pas que, sous réserve de la quotité précitée de 10 %, les conditions d’application de l’article 26 du CIR sont remplies.

L’appel incident de l’Etat n’est en conséquence pas fondé.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant contradictoirement,

Vu l’article 24 de la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire;

Déclare les appels principal et incident recevables.

Déclare seul l’appel principal fondé.

En conséquence, réforme le jugement entrepris uniquement en ce qu’il a statué sur la provision vie, non seulement en rejetant, à due concurrence, la demande de dégrèvement relative à l’exercice d’imposition 1996, mais aussi en ordonnant par voie de conséquence le dégrèvement correspondant des cotisations litigieuses des exercices d’imposition 1997 et 1998 ; le réforme également en ce qu’il a condamné aux dépens ; le confirme pour le surplus.

Statuant à nouveau concernant la provision vie, dit pour droit que l’administration est forclose du droit d’imposer, au titre de surestimation du passif, la partie de la provision vie résultant d’écritures comptables antérieures à 1995 et que la partie de la provision vie résultant des écritures de 1995 n’était pas surévaluée.

Partant, annule partiellement, et ordonne le dégrèvement correspondant, de la cotisation à l’impôt des sociétés de l’exercice d’imposition 1996 enrôlée sous l’article 863.226, dans la mesure où ladite cotisation a été calculée sur une base imposable incluant à tort, au titre de surestimation du passif, la somme de 222.136.985,39 € ( ou 8.960.983.777 BEF) ; déclare non fondée la demande originaire tendant au dégrèvement par voie de répercussion, des cotisations litigieuses afférentes aux exercices d’imposition 1997 et 1998.

Condamne l’Etat belge aux dépens des deux instances liquidés en appel

M. Remion, conseiller ff de président, S. Geubel, conseiller, B.de Clippel, conseiller suppléant