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Cours International Francophone de Vaccinologie Diplôme Universitaire de Vaccinologie 2011-2012 LAVACCINATION DES MIGRANTS EN FRANCE Présenté par Mme ESQUERRE Blandine Née le 11/03/1961

Cours International Francophone de Vaccinologie … · GAVI : Global Alliance for Vaccines and Immunisation HB : hépatite B HBC : hépatite B chronique INPES : Institut National

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C o u r s I n t e r n a t i o n a lF r a n c o p h o n e d e V a c c i n o l o g i e

D i p l ô m e U n i v e r s i t a i r ed e V a c c i n o l o g i e

2 0 1 1 - 2 0 1 2

LLAA VVAACCCCIINNAATTIIOONN DDEESS MMIIGGRRAANNTTSS

EENN FFRRAANNCCEE

Présenté par Mme ESQUERRE Blandine

Née le 11/03/1961

1

Résumé

Ils sont environ 5 millions de migrants qui vivent en France, et l’on pourrait résumer leur

situation vis à vis des maladies à prévention vaccinales ainsi : risque supérieur et moindre

couverture vaccinale que les français.

Plus ou moins bien vaccinées dans leur pays d’origine, ces personnes doivent souvent

bénéficier d’une mise à jour selon le calendrier vaccinal français. Mais leurs conditions de vie

en France les exposant souvent davantage (hépatite B, tuberculose), ainsi que les voyages « au

pays » (notamment vis à vis de l’hépatite A pour les enfants nés en France), ils font aussi

l’objet de recommandations vaccinales particulières, liées à ces risques spécifiques.

Souvent mouvante, cette population est difficile à vacciner malgré une bonne acceptation de

la vaccination, parce qu’elle connaît mal les vaccins recommandés, leur prise en charge et les

lieux de vaccination, d’ailleurs assez peu nombreux. Quant aux vaccins du voyage, non

obligatoires, ils restent largement sous-utilisés pour des raisons financières.

Une meilleure information des migrants mais aussi du corps de santé, une organisation plus

claire de l’offre vaccinale et une simplification des protocoles pourraient améliorer leur

couverture vaccinale. A ce titre, le carnet de vaccination électronique se présente comme un

outil très pratique.

Abstract

They are around 5 millions migrants living in France and we could sum up their situation

towards vaccinal prevention diseases like this: higher risk and less vaccination than French

population.

More or less vaccinated in their country of origin those people often have to benefit of an

updated according to the French vaccinal calendar. But their way of life in France often

displaying them more (hepatitis B, tuberculosis) and also travels to home country (especially

opposite with hepatitis A for children born in France), moreover they are the object of

particular immunization recommendations connected with those specific risks.

Often in motion, this population is a hard target for vaccination despite a good acceptance of

it, because they barely know the recommended vaccines, how and where they can get

vaccinated.

About travel immunization, it remains actually unused for many reasons.

Better information of migrants but also of the clinics, a clearer organization of the vaccinal

offer and more simple protocols could improve the vaccinal coverage. Along these lines,

electronic immunisation record seems to be a very useful implement.

2

Plan de l’EXPOSE PAGES

GLOSSAIRE……………………………………………………………………………… 3

INTRODUCTION

ENJEUX ………………………………………………………………………… 4

POPULATION CONCERNEE …………………………………………………. 5

DEFINITIONS…………………………………………………………………… 6

1- AVANT L’ARRIVEE EN FRANCE

LES MALADIES A PREVENTION VACCINALE DANS LES PVD…………. 7

VACCINATION DANS LES PVD - PEV - GAVI…………………………….. 8

2- L’ARRIVEE EN FRANCE

RISQUES PARTICULIERS : HEPATITE B, TUBERCULOSE………………. 10

LE RATTRAPAGE VACCINAL ……………………………………………….. 13

3- LA VIE EN FRANCE

L’ENFANT NE EN FRANCE recommandations particulières …………………. 19

LA COUVERTURE VACCINALE DES MIGRANTS…………………………… 20

LES ROMS…………………………………………………………………………. 22

4- LE VOYAGE

VISITE AU PAYS………………………………………………………………… 23

PELERINAGE A LA MECQUE……………………………. …………………… 29

5- COMMENT AMELIORER LA PROTECTION VACCINALE DES MIGRANTS ?

LES ACTEURS DE LA POLITIQUE VACCINALE EN FRANCE ……………. 30

PISTES D’AMELIORATION …………………………………………………….. 32

LE CARNET DE VACCINATION ELECTRONIQUE…………….34

CONCLUSION………………………………………………………………………….… 35

BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………… 36

3

GLOSSAIRE

AME : aide médicale d’Etat

ANAEM : Agence Nationale de l’Accueil des Etrangers et des Migrations (maintenant OFII)

BEH : Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire

CADA Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile

CDAG : Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit

CDC : Center for Disease Control and prevention

CIDDIST : Centre d’Information de Dépistage et de Diagnostic des IST

CMU : couverture maladie universelle CMUc : (id) complémentaire

CPAM : caisse primaire d’assurance maladie

COMEDE : COmité MEDical pour les Exilés

CV : centre de vaccination

CVI : Centre de Vaccinations Internationales

DDV : Dispositif Départemental de Vaccination

DDLAT : dispositif départemental de lutte anti-tuberculeuse

GAVI : Global Alliance for Vaccines and Immunisation

HB : hépatite B HBC : hépatite B chronique

INPES : Institut National de Prévention et d’Education pour la santé

INVS : Institut National de Veille Sanitaire

IST : Infections Sexuellement Transmissibles

MDM : Médecins Du Monde

OFII : Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (ex ANAEM)

OMS : Organisation Mondiale de la Santé (WHO en anglais)

OPV : vaccin polio oral

OQTF : Obligation de Quitter le Territoire Français)

PASS : Permanence d’Accès aux Soins de Santé

PEV : Programme Elargi de Vaccination

PMI : Protection Maternelle et Infantile (conseil général)

PVD : pays en voie de développement

ROR : rougeole oreillons rubéole

VFR : Visiting Friends and Relatives

WHO = OMS

4

INTRODUCTION

En 2012, plus de 5 millions d’immigrés habitent en France, où ils ne sont pas nés mais qui

souvent a vu naître leurs enfants. La plupart sont en « séjour régulier », définitif ou non,

certains par contre font partie de ceux que l’on appelle les « sans papiers ». Du bébé né en

France de parents ivoiriens au vieux magrébin venu construire les cités-dortoirs abritant

aujourd’hui d’autres générations de personnes attirées par l’image encore rayonnante de la

France, en passant par le petit rom, tous ont, outre la résidence en France, un point commun :

le voyage. Celui qu’ils firent, font ou ferons et qui détermine en quelque sorte leur « statut »

de migrant.

ENJEUX : Pourquoi vacciner les migrants ?

« La santé des migrants est un élément diagnostique et pronostique de la santé de la société

française » Anne-Marie Moulin CNRS UMR 7219, Paris VII

L'atteinte et le maintien d'une couverture vaccinale élevée à tous les âges de la vie constituent

l'un des objectifs de la politique française de santé publique. Il s'agit en effet d'un enjeu

sanitaire majeur dans la mesure où l'état vaccinal des individus peut avoir un impact important

sur la transmission des agents infectieux et la protection de l'ensemble de la population.

L'institut de veille sanitaire recommande en France de renforcer la vaccination des personnes

âgées de 9 mois à 30 ans, en insistant sur les populations les plus précaires, notamment

migrants et roms. (1)

L’objectif des vaccinations est de protéger les personnes susceptibles, c’est-à-dire celles qui

n’ont pas fait les maladies d’enfance habituelles, celles qui n’ont pas reçu les vaccinations de

routine du plan élargi de vaccination de l’OMS (PEV, voir plus loin) ou celles qui n’ont pas

reçu le nombre requis d’injections pour une immunisation de base complète.

Pour les migrants il faut aussi prendre en compte le risque supérieur à la population

générale de contracter certaines maladies infectieuses (hépatites, tuberculose, rougeole).

On vaccine donc :

pour protéger les migrants et leur famille (conditions de vie, risque lié au voyage)

pour protéger la communauté d’accueil (éviter les épidémies et leurs conséquences

sanitaires et économiques), voire la population mondiale (en vue d’une éradication).

5

POPULATION CONCERNEE

Fig 1 Population d’étrangers et immigrés résidant en France (document COMEDE)

La grande majorité des migrants français viennent du continent africain : Maghreb, Afrique

subsaharienne anciennement française. Le flux migratoire d’Afrique subsaharienne est en

augmentation, mais les chiffres ne comptabilisent pas l’immigration clandestine (fig2).

Fig 2 Flux migratoire en France

( CEU médecine des voyages Marseille 2011- D.Andriamanantena Hôpital Bégin)

Maghreb

Afrique sub-saharienne

anciennement française

Autres

Cas particuliers : Guyane et Mayotte : Dans ces départements français, le taux d’immigrés

dans les villes est très important, dont beaucoup en situation irrégulière (respectivement

77,5% et 43,6% à Saint-Laurent du Maroni –Guyane). D’autre part, les ressortissants de ces

départements sont souvent considérés comme population à risque comme les migrants et

relèvent d’un calendrier vaccinal particulier (1, 2, 6).

6

DEFINITIONS

■ Étranger : personne résidant en France et qui n’a pas la nationalité française

■ Emigré : personne ayant quitté son pays d’origine pour vivre ailleurs (travail ou définitif)

■ Immigré (INSEE) : personne vivant en France, née étrangère dans un pays étranger. Un

immigré peut être étranger, ou avoir acquis la nationalité française ; la (ou les) générations

issues de l’immigration (et né(s) en France) sont souvent inclues. C’est ce que nous ferons

dans ce travail pour les personnes originaires de pays en voie de développement (PVD).

■ Migrant : ce mot désigne la synthèse des deux précédents : notions de départ d’une société

d’origine et d’arrivée dans une société d’accueil.

■ Exilés : personnes résidant en France et contraintes de vivre hors de leur pays d’origine,

parfois expulsées, le plus souvent ayant fui la persécution. (COMEDE)

■ Demandeurs d’asile : étrangers entrés en France, en séjour régulier dans l’attente de la

réponse à leur demande de statut de réfugié.

■ Réfugiés : sont réfugiés « statutaires » les demandeurs d’asile à qui l’OFPRA (Office

Français de Protection des Réfugiés et Apatrides) ou la CRR (Commission de Recours des

Réfugiés) a reconnu la qualité de réfugié ; les autres sont « sans papiers ». (3)

7

1- AVANT L’ARRIVEE EN FRANCE

La prise en charge vaccinale des migrants arrivant en France nécessite des notions

d’épidémiologie des maladies à prévention vaccinale dans le pays d’origine (et de passage), si

possible du programme vaccinal du pays d’origine ainsi que les risques particuliers pour ces

personnes en France.

o MALADIES A PREVENTION VACCINALE DANS LES PVD :

Tendances globales (disponibles sur les sites de l’OMS

http://www.who.int/topics/epidemiology/fr/ ou du CDC

http://wwwnc.cdc.gov/travel/pdf/yellowbook-2012-map)

Tétanos : la maladie est très présente dans les PVD ; le tétanos néo-natal est en nette

diminution car les mères sont de mieux en mieux vaccinées.

Diphtérie : encore présente dans de nombreux pays dans le monde (fig 3).

Polio : foyers dans le sous-continent indien, et l’Afrique (Pakistan, Inde, Nigeria surtout).

Coqueluche : moins active chez l’enfant dans les populations vaccinées (dans les pays

industrialisés où la bactérie circule peu on voit une recrudescence de cas chez les adultes).

Rougeole : encore présente et dangereuse dans les pays pauvres (mais aussi chez nous…)

Pneumocoque : nombreux sérotypes, pathologies respiratoires très souvent mortelles.

Rotavirus : très présent (comme en France) mais mortalité très grande dans les pays pauvres.

Rubéole : Toujours la cause d’atteintes fœtales et d’affections néo-natales dans les PVD

Varicelle : primo-infection beaucoup moins fréquente dans les tropiques qu’en France.

Haemophilus influenzae de type b (Hib) : responsable de méningites et pneumonies dans les

PVD, les nourrissons âgés de 4 à 18 mois étant particulièrement vulnérables.

Méningococcie : épidémies dans la « ceinture » de la méningite, surtout dues à la souche A ;

En France on vaccine contre la souche C

Hépatite B : très présente : séroprévalence importante dans les PVD (fig 5).

Tuberculose : très présente dans de nombreux PVD (chapitre « enfant » fig 8)

Hépatite A : très présente : les adultes sont souvent immuns à l’arrivée (fig 9,10).

Typhoïde : toujours présente dans les pays (ou zones) dont l’hygiène est précaire (fig 11)

Rage : présente dans la plupart des PVD, risque principal pour les enfants.

Encéphalite japonaise : touche certaines zones rurales de l’Asie de l’est (fig 12)

Cholera : épidémies locales après catastrophes ou conflits (2012 : Sierra Leone, RDC).

8

Fig 3 : Tableau des pays où la diphtérie est endémique :

Exemple de document disponible sur le site CDC (notamment yellowbook) :

REGION COUNTRIES

Africa Algeria, Angola, Egypt, Eritrea, Ethiopia, Guinea, Niger, Nigeria, Sudan, Zambia, and

other sub- Saharan countries

Americas Bolivia, Brazil, Colombia, Dominican Republic, Ecuador, Haiti, and Paraguay

Asia/Sou

th Pacific

Bangladesh, Bhutan, Burma (Myanmar), Cambodia, China, India, Indonesia, Laos,

Malaysia, Mongolia, Nepal, Pakistan, Papua New Guinea, Philippines, Thailand, and

Vietnam

Middle

East

Afghanistan, Iran, Iraq, Saudi Arabia, Syria, Turkey, and Yemen

Europe Albania, Armenia, Azerbaijan, Belarus, Estonia, Georgia, Kazakhstan, Kyrgyzstan,

Latvia, Lithuania, Moldova, Russia, Tajikistan, Turkmenistan, Ukraine, and Uzbekistan

o VACCINATION DANS LES PVD :

Le programme élargi de vaccination (PEV)

Après le succès total de la vaccination contre la variole, qui démontrait la possibilité de

protéger par vaccination toute la population mondiale, la vaccination dans les pays en voie de

développement s’est développée sous l’impulsion de l’OMS.

Le PEV est né dans les années 70, pour rendre accessible à tout enfant dans le monde, la

vaccination contre les six maladies les plus meurtrières : la tuberculose, la poliomyélite, la

diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la rougeole. C’est à cette époque que Charles Mérieux et

Jonas Salk, très impliqués dans ce projet, créent le terme de « vaccinologie ».

Puis, de nouveaux vaccins ont été ajoutés à la liste : hépatite B, fièvre jaune en zones

endémiques, vaccin conjugué contre Haemophilus influenzae de type b (Hib) pour les pays à

forte prévalence. Ce plan ne cesse d’évoluer et ces objectifs actuels sont :

- assurer l’immunisation totale des enfants de moins de un an dans le monde,

- éradiquer globalement la poliomyélite,

- réduire le tétanos maternel et néonatal

- diminuer de moitié le nombre de décès liés à la rougeole par rapport à 1999,

- étendre tous les nouveaux vaccins et les interventions de santé préventive pour les

enfants dans toutes les régions du monde.

9

La fondation GAVI

Mais les moyens ne suivent pas toujours, et les vaccins arrivent trop lentement dans ces pays.

Pour remédier à l’inégalité de vaccination et atteindre les buts du PEV, la fondation GAVI -

Global Alliance for Vaccines and Immunisation*- a été créée en 2000 à Davos, associant la

fondation Bill et Melinda Gates, l’OMS, l’UNICEF, la Banque Mondiale, des laboratoires et

de nombreux mécènes.

Basé à Genève, ce dispositif cofinance l’achat de vaccins, pousse les industriels à réduire les

délais, incite financièrement les pays à des efforts de recherche ou de production. Ainsi le

transfert de technologies avec production sur place et moins chère a permis au Sérum Institute

of India de devenir le premier producteur de vaccins du GAVI..

Les objectifs 2006-2015 incluent la vaccination contre le pneumocoque (Ghana 2012), le

rotavirus (Rwanda 2012), le méningocoque A conjugué, la rubéole, le HPV.

Une relance de 10 millions de dollars a été faite pour la décade 2010-2020, avec en attente des

vaccins contre la typhoïde (conjugué), la dengue, ou encore le paludisme.

*http://www.gavialliance.org

Mais il est encore difficile de passer de la mise à disposition à l’utilisation : on estime que 19

millions d’enfants ne sont toujours pas vaccinés avec 3 doses de dTCoq (fig 4)

Fig. 4 Pourcentages estimés de population africaine vaccinée, par antigènes

2010 2009 2008 2007 (estimations OMS-UNICEF)

BCG 85 83 81 79

DTP1 85 85 82 80

DTP3 77 76 72 70

HepB3 76 75 67 66

Hib3 62 62 39 31

MCV* 76 73 70 68 * rougeole

pab ** 80 81 78 76 ** protection antitétanique à la naissance

TT2plus*** 64 63 68 64 *** 2è dose tétanique et plus

PCV3**** 4 0 - - **** pneumocoque 3 doses

Pol3 79 76 73 72

YFV 45 44 39 39 fièvre jaune

WHO vaccine-preventable disease monitoring system, 2011 global

10

2- L’ARRIVEE EN FRANCE

RISQUES PARTICULIERS : HEPATITE B, TUBERCULOSE

La tuberculose et l’hépatite B sont, à côté du VIH, surreprésentées dans les populations

récemment immigrées. La moitié des cas de tuberculose en 2009 concernaient des étrangers

en France. La part de l’Afrique subsaharienne était importante, puisque 70% des migrants

découvrant leur séropositivité VIH, 54% de ceux pris en charge pour une HB chronique et un

tiers de ceux déclarés pour une tuberculose étaient nés dans cette partie du monde.

Certaines de ces maladies évoluent depuis le pays d’origine, mais leur diagnostic est effectué

en France dans une très forte majorité des cas (95 % pour les infections virales chroniques).

Les conditions de vie en France favorisent la transmission de ces infections, (précarité sociale,

promiscuité, groupe à risque comme les personnes se prostituant) (4).

Hépatite B :

Entre janvier 2008 et décembre 2009, 1 715 patients naïfs de traitement antiviral ont été

nouvellement pris en charge dans les pôles de référence pour une hépatite B chronique. Les

trois-quarts étaient nés à l’étranger, dont plus de la moitié en Afrique subsaharienne,

principalement au Sénégal, Congo, Guinée, Cameroun et Mali (4). Le Comede rapporte que,

sur 415 patients exilés atteints d’ HBC, seulement 6% des diagnostics étaient connus au pays

(principalement Afrique de l’Ouest, d’Asie centrale, d’Asie de l’Est et d’Afrique centrale)(3),

Les personnes originaires d’Afrique subsaharienne présentent une prévalence élevée de

portage de l’antigène HBs (5,3%). Seules 17,4% des porteurs en auraient connaissance. Selon

une étude qualitative réalisée auprès de 41 personnes originaires d’Afrique subsaharienne en

Ile de France en 2008 pour évaluer les connaissances, perceptions et attitudes vis-à-vis de

l’hépatite B et de sa prévention. « Bien que l’hépatite B fasse partie des préoccupations de

santé des migrants, la plupart d’entre eux ne se sent pas personnellement exposé. S’ils savent

que l’hépatite B est une maladie virale qui touche le foie, ils ignorent qu’elle peut entraîner

une cirrhose et un cancer du foie. La transmission sanguine est connue et la transmission

salivaire évoquée. Les voies sexuelles, de la mère à l’enfant et suite à un contact avec une

personne infectée sont rarement connues. Une minorité connaît l’existence d’une vaccination

contre le VHB et la plupart ignorent leur statut vaccinal ». (5)

11

Fig 5 Prévalence de l’hépatite B chronique dans le monde :

Yellowbook-2012 – prévalence -chronic –infection- hépatitis B CDC

Tuberculose :

L’ANAEM notait en 2006 une prévalence des cas de tuberculose de 755/1 000 000 chez les

migrants (principalement d’Afrique subsaharienne et du Maghreb) surtout entre 30 et 39 ans.

En 2009 selon l’étude INVS (6) parmi les 5 276 cas de tuberculose maladie déclarés, la moitié

concernait des personnes nées à l’étranger : 36% en Afrique subsaharienne, 29% en Afrique

du Nord, 14% en Asie (fig 8). Le risque de tuberculose diminuait au fur et à mesure de

l’ancienneté de vie en France. La proportion de cas chez des personnes nées à l’étranger a

augmenté.

Le taux de déclarations de tuberculose était environ 8 fois supérieur chez les personnes nées à

l’étranger (35,1 contre 4,3 pour 100 000 habitants nés en France). On retrouve cette différence

dans tous les groupes d’âges mais surtout chez les jeunes adultes, avec un risque plus marqué

pour les personnes résidant en collectivité. Comparées aux personnes nées en France, les

personnes migrantes présentaient moins souvent de formes pulmonaires de tuberculose qui

correspondent aux formes potentiellement contagieuses de la maladie. Les formes multi

résistantes de tuberculose étaient plus fréquentes chez les migrants.

12

C’est donc au contact d’autres émigrés (ne se sachant pas forcément malades), que le migrant

risque de se contaminer en France pour ces deux maladies à prévention vaccinale.

Sur la base de ces éléments, les « primo arrivants » se verront proposer des dépistages et/ou

des vaccinations, de façon plus ou moins organisée et efficace en fonction de leur statut

officiel ou non (les sans-papiers ne bénéficiant pas de l’accueil par l’OFII).

DEPISTAGE, VACCINATION : un « parcours d’orientation »

En France les lieux d’accueil premier de l’étranger n’ont souvent pas de vaccins disponibles

sur place mais tentent de faire le point et orientent vers les lieux de vaccination :

Pour les étrangers en situation régulière admis à séjourner plus de trois mois en France

l’OFII accueille et effectue une visite médicale règlementaire et obligatoire. L’arrêté (JO 24

janvier 2006) prévoit notamment : «(…) 2°Un examen radiographique des poumons (..)�Les

enfants de moins de 15 ans venant de pays à forte prévalence de tuberculose bénéficieront de

surcroît d'un test à la tuberculine dans un service, une structure ou auprès d'un professionnel

dont les coordonnées seront indiquées au cours de la visite médicale ;�3° Une vérification du

statut vaccinal qui doit être conforme à la législation et à la réglementation en vigueur

(..)�Des conseils et des informations sanitaires adaptées ainsi que les adresses des structures

de soins et de prévention seront dispensés aux bénéficiaires de ces visites médicales ». l’OFII

dispose de livrets d’accueil donnant une information multilingue, notamment sur les

vaccinations. Les personnes non vaccinées sont en général orientées vers un centre de

vaccination (cela concerne environ 27%), mais le suivi n’est pas prévu (le certificat médical

est délivré dans la mesure ou la personne n’est pas contagieuse) ; beaucoup ne seront pas

vaccinées correctement.

Les demandeurs d’asile admis en Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile, sont également

dépistés de façon systématique et des séances de vaccinations sont organisées dans ces

CADA.

Les dépistages ont lieu en général dans des centres de dépistage d’Etat ou territoriaux, pas

toujours géographiquement proches : DDLAT -dispositif départemental de Lutte Anti-

Tuberculeuse, CDAG –centre de dépistage anonymes et gratuits ou CDDIST – centre de

dépistage des IST).

13

Les vaccins se font en centres de vaccinations départementaux (DDV -Dispositifs

Départementaux de Vaccination) ou municipaux, certains centres de santé notamment

communautaires, les services de PMI pour les moins de 6 ans.

Pour les migrants sans-papiers, c’est à l’occasion d’une consultation auprès de Médecin du

Monde, d’une PASS ou d’un centre de dépistage que leur statut vaccinal va se poser ; ces

structures n’ont souvent pas les vaccins sur place et doivent réorienter … A l’idéal c’est le

premier médecin rencontré qui devrait vacciner ou orienter s’il y a lieu ; mais comment savoir

si l’on est le premier médecin rencontré sur un parcours d’immigration souvent long et qui est

passé par d’autres pays ?

LE RATTRAPAGE VACCINAL

Selon le pays d’origine, le degré d’immunité contre les maladies est variable : souvent, les

personnes en provenance de régions tropicales auront déjà été exposé au virus d’Epstein Barr,

à ceux des hépatites A, B, voire au VIH, mais n’ont pas eu la varicelle, ce qui en fait

théoriquement une population à risque. La plupart du temps, les personnes ont reçu des

vaccinations de base, notamment concernant le tétanos, la poliomyélite et la diphtérie, par

contre la couverture vaccinale de la rougeole et de la rubéole est souvent moins bonne. Pour

l'Haemophilus influenzae et l'Hépatite B, les migrants n'ont pratiquement jamais reçu de

primo vaccination. Cette situation peut éventuellement se modifier dans le futur avec

l'application plus générale du programme étendu de vaccination.

Des sérologies vaccinales (tétanos, hépatite B) permettent d’orienter le schémas des

vaccinations ; cependant les difficultés sociales et de compréhension de la langue et du

système de santé à l’arrivée en France incite à simplifier leurs démarches (d’autant que faire

une sérologie a un coût, et l’aide médicale d’état n’est obtenu qu’après 3 mois de séjour) : on

est souvent amené à vacciner sans connaître le statut immunologique.

Le pays d’origine bien sûr, mais aussi les conditions de vie, de départ et de voyage sont à

considérer. Les populations de migrants proviennent de pays divers où les services de santé,

notamment les vaccinations, sont souvent adéquats. -du moins avant la période de conflit pour

ceux qui proviennent de pays en guerre. On peut se faire une idée de la couverture vaccinale

sur les cartes de l’OMS (fig.).

14

Fig. 6 : Couverture vaccinale polio 3 doses)

(Exemple de documents disponibles sur le site de l’OMS)

http://www.who.int/immunization_monitoring/diseases/Polio_coverage_map.jpg

Comment ? (6)

Pour les personnes déjà vaccinées, il n'est jamais nécessaire de recommencer une vaccination

de base, même s'il existe un intervalle de temps considérable depuis la dernière injection

administrée. Le schéma est repris au temps où il a été abandonné. Il est rarement délétère de

laisser un espace de temps supérieur à celui qui est recommandé ; par contre, il est déconseillé

de raccourcir l'intervalle de temps entre deux injections.

La connaissance des calendriers vaccinaux par pays peut être une aide. On peut retrouver ces

calendriers sur le site de l’OMS

http://apps.who.int/immunization_monitoring/en/globalsummary/countryprofileselect.cfm

ou encore pour l’Europe le site ecdc.europa.eu. Attention : la vaccination

Diphtérie/Tétanos/Coqueluche, est appelée DTP en pays anglophone (P pour « pertussis »).

Théoriquement, les sujets au statut vaccinal inconnu sont considérés comme non vaccinés et

doivent donc recevoir une vaccination de base complète. En pratique, la situation est souvent

complexe et incite à la prudence : le risque de présenter des effets secondaires étant

directement proportionnel au taux d'anticorps circulants, il s'avère hasardeux de pratiquer à

nouveau une vaccination de base (3 injection avec dosage fort pour la diphtérie = D).

Une cicatrice de vaccination de BCG peut être recherchée pour savoir si la personne a été en

contact avec un service médical qui aurait opéré d'autres vaccinations à la même occasion.

15

Souvent, les adultes se rappellent avoir été vaccinés mais ne peuvent préciser ni la nature du

vaccin ni le nombre d'injections, se souvenant parfois d’avoir reçu un vaccin oral « dans la

rue » lors de campagne de vaccination contre la polio. Dans ces cas, il est raisonnable de faire

une injection de rappel pour les vaccinations de routine (diphtérie tétanos polio voire ROR).

A l'occasion de ces injections, les personnes devraient être observées et, suivant l'intensité des

effets secondaires, une nouvelle injection peut être proposée ou le schéma interrompu. (7)

Tableau_de_rattrapage_des_vaccinations_recommandees_de_base_pour_les_enfants_

a_partir_d_un_an_les_adolescents_et_les_adultes_jamais_vaccines.pdf

16

Il n’y a pas d’inconvénient à administrer un vaccin rougeole-oreillons-rubéole, Hib, hépatite

B ou polio à une personne éventuellement déjà immune pour l’une ou l’autre des maladies,

mais toujours tenir compte des contre-indications (ROR et grossesse par exemple).

Tuberculose

Les centres de dépistage effectuent pour les primo arrivants une IDR et si besoin vaccinent les

personnes négatives. Cette IDR devrait être proposée aux sans-papiers par le premier médecin

rencontré (orientation en centre spécialisé car ce n’est pas de la pratique courante).

Rougeole

Les personnes venues des PVD peuvent avoir eu la rougeole dans l’enfance. Les sujets

vaccinés n’ont pas eu les deux injections de ROR préconisées aujourd’hui en France.

Diphtérie, tétanos, polio, coqueluche

Quand le statut vaccinal est inconnu, on administre une première dose de vaccin et on titre

ensuite, 4 à 6 semaines plus tard, les anticorps tétaniques. Le test ELISA est considéré par

l'Organisation Mondiale de la Santé comme la référence pour juger de l’état d’immunisation

contre le tétanos, avec un seuil de 0.1 IU/ml, un seuil 10 fois plus élevé que le niveau sérique

d'antitoxine considéré comme protecteur. La sérologie pour la polio n’a pas d’intérêt : elle est

peu fiable, chère et peu utile ; la vaccination polio est faite en général très tôt dans les PVD,

habituellement en polio oral (OPV).

17

Interprétation de la sérologie tétanos post vaccination chez l’enfant : Antitoxine tétanique :

inférieure à 0,1 UI/ml * n’a probablement jamais été

vacciné

appliquer le programme

complet de rattrapage.

entre 0,1 et 1 UI/ml

la primo vaccination n’a

certainement pas été

complète

taux entre 0.1 et 0.5 UI/ml refaire deux doses en plus à

2 et 6 mois

taux entre 0.5 et 1 UI/ml refaire une dose

6 mois après la précédente

supérieure à 1 UI/ml

de type anamnestique

a sûrement été vacciné

auparavant le plus souvent

avec un vaccin DTCoq

Son schéma vaccinal peut

être considéré comme

complet.

D’après Infovac 18/07/2011

Pour les adolescents, il est préférable d’utiliser, en cas de doute sur une vaccination

antérieure, un vaccin combiné diphtérie- tétanos-polio sous dosé en anatoxine diphtérique.

Chez l’adulte ayant eu un schéma vaccinal complet et dont la dernière vaccination, remonte à

plus de 20 ans, on réalisera deux injections à 6 mois d’intervalle, dont une avec la valence

coqueluche.

NB : il existe maintenant des tests rapides pratiqués dans les services d’urgences afin de

connaitre le statut sérologique anti-tétanique d’un patient blessé ; Ils indiquent si le taux

d’anticorps est en dessus ou en dessous de 0.1UI/ml.

Hépatite B : recommandé pour les personnes à risque, dont les migrants

Sans anamnèse, faire une sérologie initiale avant toute vaccination ; une sérologie complète

permet si besoin de dépister une éventuelle maladie : Ag HB, Ac antiHBc, Ac antiHBs - c’est

ce dernier qui reflète l’immunité vaccinale.

Interprétation de l’immunité vaccinale selon le taux d’Ac Anti HBs :

> 100 mUI/ml protégé par vaccination ok

10 et 100 mUI/ml protégé à long terme si son âge

est compatible avec une

vaccination ancienne (> 10ans)

ok ou en cas de doute :

une dose supplémentaire à

6 mois

< 10 mUI/ml injection tout de suite et

contrôler les Ac anti HBs 4 à 6

semaines après.

Suivant les résultats :

Nouvelle injection ou non

D’après Infovac 18/07/2011

18

NB : les résultats des tests effectués en centre de dépistage ne renseignent pas toujours sur

l’état immunitaire du sujet : la séronégativité vis à vis de l’antigène ne permet pas de savoir

s’il est protégé ou non par une vaccination antérieure ou une hépatite B aigue guérie.

Particularités :

Varicelle

En France, la vaccination est recommandée pour :

-Les adolescents de 12 à 18 ans n’ayant pas d’antécédent clinique de varicelle (ou douteux) ;

-Les femmes en âge de procréer, surtout si projet de grossesse, sans antécédent de varicelle ;

-Les femmes n’ayant pas d’antécédent clinique de varicelle (ou dont l’histoire est douteuse)

dans les suites d’une première grossesse (6, 7).

En l’absence d’anamnèse un contrôle sérologique préalable à la vaccination peut être pratiqué.

Il n’y a pas de recommandation vaccinale particulière en France pour les migrants. Mais la

primo-infection y étant beaucoup moins fréquente qu’en France, les immigrants des régions

tropicales seraient particulièrement à risque. Or la varicelle n’étant pas à déclaration

obligatoire (mais surveillée par le réseau sentinelle) on ne peut guère savoir si elle touche

davantage une population qu’une autre ; cependant une récente épidémie de varicelle chez des

immigrés africains arrivés en Italie illustre ce propos. Extrêmement contagieuse, elle le plus

souvent bénigne mais entraîne tout de même chaque année dans l’Hexagone 3 000

hospitalisations et 20 décès (dont 70% ont plus de 10 ans).

Méningocoque C

Fig. 7 : Ceinture de la méningite

L’enfant dont les parents ont pour origine un pays de la

ceinture africaine de la méningite (fig 7)) pose un

problème particulier car il ne va pas être uniquement

exposé au types B ou C de méningocoque en France mais

aussi au type A ou W s’il voyage dans ce pays (intérêt du

vaccin A+C et bientôt Nimenrix° voir chapitre voyage).

(7, 12).

Document Edisan

19

3- LA VIE EN FRANCE

o L’ENFANT NE EN FRANCE : Recommandations particulières (6, 7)

La vaccination contre l’hépatite A est recommandée pour les enfants, à partir de l’âge de un

an, nés de familles dont l’un des membres (au moins) est originaire d’un pays de haute

endémicité et qui sont susceptibles d’y séjourner. Les recommandations indiquent une

vaccination des plus jeunes (plus à risque avant l’âge de la propreté). L’âge maximum n’est

pas précisé, or la maladie est plus dangereuse avec l’âge ; cette recommandation n’est pas

assortie d’une prise en charge par l’assurance maladie. Certaines structures proposent ces

vaccins gratuitement, mais il s’agit de volontés locales.

La vaccination contre la tuberculose

Elle n’est plus obligatoire en France depuis 2007 mais le BCG par IDR est recommandé dès

la naissance pour :

- les enfants nés dans un pays de forte endémie tuberculeuse ;

- dont au moins l'un des parents est originaire de l’un de ces pays ;

- devant séjourner au moins un mois d’affilée dans l’un de ces pays ;

- ayant des antécédents familiaux de tuberculose (collatéraux ou ascendants directs) ;

- résidant en Île-de-France, en Guyane ou à Mayotte ;

Et dans toute situation jugée par le médecin à risque d'exposition au bacille tuberculeux

notamment enfants vivant dans des conditions de logement défavorables (habitat précaire ou

surpeuplé) ou socio-économiques défavorables ou précaires (en particulier parmi les

bénéficiaires de la CMU, CMUc, AME) ou en contact régulier avec des adultes originaires

d’un pays de forte endémie. Ces situations concernent beaucoup de migrants.

Les nourrissons de moins de 3 mois sont vaccinés sans test tuberculinique préalable. Chez les

enfants à risque non vaccinés, la vaccination peut être réalisée jusqu'à l'âge de 15 ans.

L’intradermoréaction (IDR) à la tuberculine préalable à la vaccination doit être réalisée à

partir de l’âge de 3 mois pour éviter de vacciner un enfant qui aurait été contaminé. La

vaccination ne s’applique qu’aux personnes ayant une intradermoréaction à la tuberculine

négative. Seule la forme intradermique du BCG est disponible en France.

20

Fig 8 : Zones géographiques à forte incidence tuberculeuse :

- Continent africain dans son ensemble

- Continent asiatique dans son ensemble, y

compris les pays du Proche et Moyen-Orient

- Amérique Centrale et du Sud

- Pays d’Europe Centrale et de l’Est y

compris les pays de l’ex URSS

- Dans l’Union européenne : Bulgarie,

Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie,

Pologne, Portugal, Roumanie.

Document Edisan selon les estimations de l’OMS

Qui vaccine ?

Le Conseil supérieur d’hygiène publique de France, dans son avis du 09 mars 2007,

recommande que lors de la consultation de prévention du 4ème mois de grossesse,

l’évaluation du risque de tuberculose et l’indication de la vaccination BCG soient

systématiquement abordés avec les parents, et que lors de la consultation du 8ème jour après

la naissance, une discussion sur l’indication du BCG ait lieu avec mention de la décision dans

le carnet de santé.

Cependant la vaccination du nourrisson par IDR nécessitant une bonne maîtrise de la

technique, certains médecins libéraux ou même de PMI vont éluder la question et la

couverture vaccinale sera meilleure dans les départements où cette technique a été adoptée

rapidement après la loi, et les médecins bien formés.

o LA COUVERTURE VACCINALE DES MIGRANTS

Peu de données

La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) estime,

dans son rapport sur l’état de santé de la population (2009-2010), que plus de 50 % des

adultes n’ont aucun document sur lequel seraient reportées leurs vaccinations. On imagine

aisément que ce pourcentage augmente chez les migrants. Il en résulte des risques de sous- ou

de sur- vaccination néfaste à leur santé.

« Si les immigrés déclarent globalement se faire plus fréquemment vacciner que les Français

avec les mêmes besoins de soins et situations économique et sociale, ils reportent en revanche

21

moins fréquemment un vaccin contre l’hépatite B (...) Les taux de vaccination contre la

poliomyélite et le tétanos sont également plus faibles parmi la population immigrée ibérique

et maghrébine que parmi la population française. En revanche, on ne retrouve pas de

différence significative dans les taux de vaccination contre la grippe, à l’exception des

hommes immigrés maghrébins qui sont plus souvent vaccinés que les hommes français » (8).

(Prévalence supérieure du diabète ? Vaccin fait pour le Hadj ? ) .

On peut noter que les sans papiers et les Roms ne doivent être que rarement inclus dans ces

études ; pour l’enfant par exemple, les données de couverture vaccinale de l’INVS viennent

de l’étude des certificats de santé du 24è mois chez des enfants scolarisés.

Une population difficile à vacciner ?

Non a priori car :

- Elle souhaite se protéger (ont vu les dégâts dans leur pays, ont une bonne image de la

vaccination) et surtout protéger ses enfants,

- elle est confiante dans le conseil du médecin et le système de santé français,

- elle est rarement réticente à l’acte vaccinal,

- L’accès existe : les centres de vaccinations couvrent tout le territoire français.

Oui parce que les migrants :

- Ne connaissent pas les recommandations vaccinales françaises,

- ne connaissent pas bien leurs droits, ni le système de santé français,

- ont d’autres préoccupations (administratives, logement, nourriture etc.),

- bougent souvent (hébergement, logement, voire expulsions, OQTF, nomadisme des Roms),

- perdent les carnets de vaccination (plus encore que les non migrants…),

- n’ont pas la couverture sociale ou le budget (sérologies, hépatite A, vaccins du voyage) – à

noter que l’AME ne concerne que les personnes qui sont depuis 3 mois sur le territoire.

Selon Médecins Du Monde, les freins à l’accès à la santé sont surtout pour 26 % la barrière

linguistique, pour 60% la peur de l’arrestation. Les expulsions et la sectorisation des services

de PMI grèvent également beaucoup les campagnes de vaccination humanitaire (9).

Le oui l’emporte sur le non surtout du fait notamment d’un système de santé français qui

s’organise difficilement autour de la vaccination.

22

o LES ROMS (tsiganes, gens du voyage)

L’Union européenne utilise le terme de Roms (ou Roma en anglais), qui signifie «homme» en

hindi en «référence à divers groupes d'individus qui se décrivent eux-mêmes comme Roms,

Gitans, Gens du voyage, Manouches, Ashkali, Sinti, etc.» et qui ont en commun une origine et

la langue romani. Déportés au XIe siècle de la vallée du Gange, en Inde, cette population a

migré progressivement à travers l’Asie occidentale puis l’Europe jusqu’au début du XXe

siècle. Les premiers Roms sont arrivés en France autour du XVe siècle.

Si l’on accepte cette définition, il y aurait actuellement en France entre 350.000 à 500.000

Roms, dont la quasi totalité est de nationalité française, sur un total de 10 à 12 millions dans

l’Union européenne. Une idée reçue répandue voudrait que les Roms soient des nomades,

pourtant seulement 2% d’entre eux sont du voyage en Europe. Les termes «Roms» au sens de

l’Union européenne ou «Tsigane» ne sont pas utilisés par les autorités françaises, justement

parce qu’il qualifie une population sur des bases ethniques, ce qui est contraire à la

constitution. «Gens du voyage» est le terme juridique et administratif qui désigne une

catégorie de personnes dans le droit français. 10% d’entre eux en France sont des roumains ;

les Roms au sens français du terme, sont majoritairement roumains et bulgares, arrivés pour la

plupart en France après la chute du Mur de Berlin. (10).

Couverture vaccinale des roms :

Elle est difficile à évaluer car les carnets de vaccination sont souvent inexistants, les enfants

roms souvent absents de l’école le jour de l’enquête, et l’épidémiologie française n’intègre

pas de caractéristiques « ethniques ».

Selon MDM il s’agit d’une population dont la couverture vaccinale n'est que de 10 à 20%

pour l'ensemble des vaccins obligatoires et dont les conditions de vie précaires impliquent des

risques particuliers : les cas d’hépatite A ou de rougeole sont plus fréquents et graves et à

risque d’extension épidémique dans la communauté du fait de la grande proximité.

Dans l’enquête 2010-2011 conduite par MDM auprès de 281 personnes roms de moins de 30

ans (10), seules 38% des personnes rencontrées avaient un carnet de santé (30% parmi les

personnes nées en Roumanie, 83% parmi celles nées en France). Chez les enfants de moins de

2 ans disposant d’un carnet, seuls 71% étaient vaccinés contre la diphtérie, le tétanos et la

poliomyélite, pourtant obligatoires (en 1998, selon les certificats de santé du 24ème mois,

97% des enfants français étaient à jour des trois injections DTP).

23

Enfin, seul un quart des enfants roms âgés de un an avait eu la vaccination ROR (contre 88%

des enfants de 12-18 mois dans une enquête CPAM parisienne conduite en 2009).

Cette très faible couverture chez les migrants Roms s’explique bien sûr par la culture et

notamment le nomadisme (volontaire ou non) par une plus grande précarité, des expulsions à

répétition (lorsqu’il n’y a pas de terrains d’accueil légal pour elles), et des OQTF, avec une

grande méfiance à la fréquentation des institutions, mêmes celles qui du fait d’une action

humanitaire médicale, pourraient les accueillir sans risque. Pourtant lorsque son intérêt est

expliqué, la vaccination est souvent très bien acceptée.

Les professionnels de santé qui rencontrent les roms (souvent aux urgences, mais aussi dans

les pharmacies) devraient aborder avec eux la vaccination, notamment à côté du DTP, le

vaccin ROR, voire contre l’hépatite A selon les conditions d’hygiène.

4 - LE VOYAGE

VISITE AU PAYS : QUELS VACCINS ?

Le VFR : un voyageur pas comme les autres

Beaucoup de migrants vivant en France depuis (et pour) plusieurs années font une ou des

visites au pays pour des raisons familiales, et si c’est le cas, présenter leurs enfants nés en

France. La médecine des voyage les intègre dans une catégorie de voyageurs appelés VFR :

Visiting Friends and Relatives.

Les VFR, et spécialement les jeunes, sont reconnus comme un groupe de voyageurs à haut

risque. Le CDC (11) note pour eux une incidence supérieure d’infections comme le

paludisme, la fièvre typhoïde, la tuberculose, l’hépatite A et les maladies sexuellement

transmissibles.

La vaccination participe à la prévention de quelques-unes de ces maladies, en attendant les

vaccins annoncés contre la dengue, le paludisme…

24

Pourquoi plus de risques que les autres voyageurs ? Les raisons sont multiples : Manque

d’information sur les risques (ou certitude d’être immunisés par leur vie là-bas), barrières

financières et de la langue, destinations plus à risque avec services médicaux sur place

souvent insuffisants, mode de vie « local » avec pression culturelle et sociale (difficulté de

refuser des plats offerts par les hôtes), enfin ces VFR partent souvent dans des zones à risque

avec des enfants petits et même parfois très petits (et sont très difficiles à dissuader !).

La consultation de conseil au voyage (quand elle est accessible) n’est pas forcément jugée

nécessaire et il faut adapter les messages de sensibilisation, utiliser si besoin des traducteurs

ou des documents en plusieurs langues.

Deux cas de figure se présentent concernant le VFR :

Il n’y a pas d’obligation vaccinale pour le voyage :

les personnes ne vont pas forcément consulter leur médecin traitant avant de partir, a fortiori

une consultation de médecine des voyages, ce qui sera dommageable pour la prévention

vaccinale (mais aussi souvent celle du paludisme ou des diarrhées). Les médecins traitants

consultés ne sont pas forcément au fait des conseils vaccinaux qui sont complexes et en

évolution constante.

Le pays visité est à obligation vaccinale de fièvre jaune :

la visite est obligatoire en centre de vaccinations internationales (CVI) pour les personnes non

vaccinées et si le vaccin date de plus de 10 ans : c’est l’occasion de mettre à jour les

vaccinations du calendrier vaccinal français, et de conseiller d’autres vaccins du voyage.

Mais le budget, généralement très serré, ne motive pas à dépenser pour vacciner, d’autant que

les risques pour leur enfant né en France ne leur sont pas trop connus. Souvent les familles

arrivent avec l’argent calculé pour la vaccination obligatoire (fièvre jaune) et l’on ne peut rien

envisager d’autre en vaccin du voyage, c’est à dire payant.

Notons que les personnes fragiles et notamment immunodéprimées, (diabète, infection VIH et

VHB plus fréquentes chez les migrants), doivent pouvoir être vaccinées car leur risque de

faire des infections graves est plus important.

25

Les Vaccins principaux (12) :

Fièvre jaune : souvent obligatoire (en CVI)

Cette vaccination concerne l’Afrique sub-saharienne et les pays d’Amérique du sud et (la

France est concernée par son département guyanais : vaccin obligatoire). On distingue

obligations et recommandations vaccinales : les premières sont nécessaire à l’obtention du

visa, alors que les recommandations sont liées au risque encouru et elles déterminent le

conseil vaccinal.

Le vaccin antiamarile est un vaccin vivant atténué : il est contre-indiqué en cas de grossesse,

d’immunodépression, avant l’âge de 9 mois, pendant l’allaitement, et doit être administré à

distance d’un autre vaccin vivant (ROR). Cependant, comme pour tout acte médical, il faut

considérer le bénéfice/risque et si une personne doit partir en urgence dans une zone

endémique, ces conditions peuvent parfois être assouplies et la vaccination effectuée.

Hépatite A :

Le virus de l’hépatite A est extrêmement répandu dans le monde. La plupart des migrants ont

été en contact avec lui, même s’ils n’ont pas fait de manifestation clinique bruyante comme la

« jaunisse », et sont donc immuns, (fig. 9,10) : Ils ne nécessitent pas de vaccination lors du

retour au pays.

Fig. 9. Séroprévalence hépatite A selon l’origine

% ORIGINE

90 Afrique sub-saharienne

82,6 Proche et Moyen Orient

81,2 Afrique du nord

68,4 Asie

56,9 Amérique latine

50 Europe de l’est

Pourcentage de séroprévalence hépatite A sur 646 migrants étudiés à l’Institut pasteur en

2008-2010. A.E. Gergely, S. Bechet, A. Le Simons de Fanti, A-S. Le Guern, C. Goujon, M.

Pelicot, G. Benabdelmoumen, P-H. Consigny. Hepatitis A Séroprevalence in a Population of

Immigrants at a French Vaccination Center : J Travel Med 2011; 18: 126–129).

26

Fig. 10 Prévalence mondiale du virus de l’hépatite A:

Yellowbook-2012 estimated prévalence hépatitis A (CDC)

Cependant, les personnes qui ont quitté leur pays jeunes peuvent ne pas être immunisées :

dans cette même étude, 75% des séronégatifs avaient moins de 36 ans. L’équipe

recommandait d’étendre la recherche d’immunité et en cas de manque le temps pour la

sérologie, de proposer la vaccination aux moins de 36 ans. Le CDC recommande aussi une

sérologie de hépatite A pour les jeunes adultes avant le voyage (11).

Typhoïde : protéger l’enfant surtout.

Le vaccin est recommandé en cas séjour en zone d’endémie, long ou dans de mauvaises

conditions d’hygiène. Cette infection bactérienne liée à l’eau contaminée, comme l’hépatite

A, est plus fréquente et grave chez l’enfant VFR : la vaccination doit être proposée.

Le conseil est délicat cependant car ce vaccin, polyosidique, ne protège que 3 ans et perd

beaucoup de son efficacité après plusieurs injections. Or les africains le demandent souvent

car ils connaissent la maladie. Pourtant, pour certains séjours courts en Afrique, où il n’y a pas

(ou très peu) de résistance à l’antibiothérapie, la vaccination n’est pas indispensable à l’adulte.

Pour l’Inde ou l’Asie du sud-est, en revanche, elle est fortement recommandée.

27

Le CDC a révisé ses recommandations en retirant 26 pays de la liste : ce sont les pays

d’Europe de l’est dont on estime que l’état sanitaire s’est nettement amélioré :

Fig. 11 : Typhoïde : zones de recommandations vaccinales

Méningococcémies :

Alors qu’en France les cas (sporadiques en général, très vite jugulés) sont dus au

méningocoques B ou C, certains pays d’Afrique subsaharienne, dits pays de la « ceinture de

la méningite » zones de savane et Sahel, d’Ouest en Est, du Sénégal à l’Éthiopie (fig. 7),

sont le lieu d’épidémies de méningite dues principalement au groupe A (mais aussi, et en

proportion croissante, au groupe W135, voire Y). Ces épidémies ont lieu au moment de la

saison sèche, favorable à la transmission du méningocoque (habituellement hiver et

printemps) ou dans toute autre zone où sévit une épidémie, dans des conditions de contact

étroit et prolongé avec la population locale et sont surveillées de près par l’OMS (25 pays

concernés).

L’importance et la mortalité des épidémies de méningite à méningocoque A dans la ceinture

africaine ont conduit à la mise au point d’un vaccin anti-méningocoque conjugué utilisable

chez le jeune enfant, procurant une immunité de longue durée et diminuant le portage

(immunité de groupe si la couverture vaccinale est suffisante), le MenAfriVac°.

28

Une vaccination de masse débute dans ces pays, qui ciblera les 1 à 29 ans, puis le vaccin sera

intégré aux programmes de routine. Burkina Faso, Niger et Mali, jugés les plus vulnérables,

ont été prioritaires, et la méningite à méningocoque a quasiment disparu des régions

vaccinées, laissant la place au méningocoque non A, dont le W135 :

Le vaccin est indiqué aux voyageurs qui se rendent pendant la saison sèche dans cette région

et qui se trouveront au contact étroit avec la population locale, ou en cas d’épidémie.

Dans un avis du 12 juillet 2012 (13), le HCSP (Haut Conseil de santé publique) recommande

de privilégier l'utilisation des vaccins tétravalents méningococciques conjugués dès l'âge

autorisé par leurs AMM (autorisations de mise sur le marché) et au dépens des vaccins

méningococciques non conjugués (Mencevax° cf. chapitre Pèlerinage) .

Parmi les vaccins tétravalents méningococciques conjugués,

MENVEO° est autorisé chez les enfants à partir de 2 ans,

NIMENRIX° est autorisé chez l'enfant à partir de 1 an (disponible en France début 2013).

Cependant, en l'absence d'AMM pour les vaccins méningococciques tétravalents conjugués

avant l'âge de 1 an, seul le vaccin bivalent non conjugué A+C peut être actuellement utilisé

entre 6 mois et 1 an dans l'unique objectif d'une protection contre les infections invasives à

méningocoque du groupe A. L'avantage de cette vaccination précoce doit être pesé au regard

des risques théoriques liés à l'induction d'une hypo réactivité lors de vaccinations ultérieures,

notamment contre le méningocoque C.

D’autres vaccins du voyage :

Rage : La vaccination contre la rage est recommandée pour les voyageurs dont le séjour est

prolongé ou aventureux et en situation d’isolement dans des zones à haut risque (Asie,

Afrique dont Afrique du Nord, Amérique du

Sud). Elle est recommandée en particulier

chez les jeunes enfants dès l’âge de la marche.

En effet, ceux-ci ont un risque plus élevé

d’exposition par morsure ou par contact

mineur passé inaperçu (léchage sur peau

excoriée, griffure...).

29

Encéphalite japonaise : elle concerne l’Asie du sud-est :

fig. 12 : Aperçu de la zone de prévalence de l’encéphalite japonaise

Le VFR en zone rurale humide sur une

durée prolongée est plus à risque,

notamment les enfants, que le touriste

européen qui estime faire un voyage

« aventurier ». Malheureusement il

décline souvent le conseil vaccinal

pour des raisons économiques

évidentes (à l’heure actuelle les deux

injections coûtent autour de 170

euros !).

PELERINAGE A LA MECQUE : LE HADJ (14).

Obligation vaccinale :

Suite plusieurs épisodes épidémiques de méningite pendant le pèlerinage, les autorités

saoudiennes ont rendu obligatoire pour les pèlerins la vaccination contre les méningocoques

par un vaccin tétravalent (A, C, Y, W 135). Le vaccin méningocoque A+C n’est pas adapté et

ne permet pas l’obtention du visa.

Vaccins disponibles actuellement :

Menvéo* est un vaccin conjugué, très efficace et de longue durée, il évite le portage (côté

altruiste) mais il est plus cher et peu connu.

Mencevax*, vaccin polyosidique, est moins efficace, ne dure que 3 ans et n’évite pas le

portage, mais étant moins cher il reste préféré de nombreux pèlerins qui répondent ainsi à

moindre frais à l’obligation vaccinale. (Vaccin réservé aux CVI).

Du fait de la grande promiscuité, et surtout pour les plus fragiles (le diabète est fréquent dans

la population maghrébine, le Hadj a souvent lieu tard dans la vie) : la vaccination contre la

grippe saisonnière est conseillée, la vaccination anti-pneumococcique souvent souhaitable.

Peuvent également être conseillées les vaccinations contre la typhoïde, l’hépatite A, voire

l’hépatite B (rasage de la tête pour les hommes).

30

Toutes les vaccinations, sauf le Mencevax° peuvent être pratiquées par le médecin traitant.

Et c’est l’occasion de mettre à jour le carnet vaccinal : rappel dTP, avec ou sans valence

coqueluche. Il n’est pas rare de recevoir en CVI de vieux maghrébins vivant depuis des

décennies en France, venus sans carnet de vaccination, qui n’ont aucune idée de leur situation

vaccinale. Le monsieur a souvent été vacciné par son travail, la dame ne se souvient pas

d’avoir été vaccinée en France.

5 - COMMENT AMELIORER LA COUVERTURE VACCINALE

DES MIGRANTS ?

Les acteurs de la politique vaccinale en France

La vaccination est le plus important moyen de Santé Publique. L'atteinte et le maintien d'une

couverture vaccinale élevée à tous les âges de la vie constituent l'un des 100 objectifs du

rapport annexé à la loi du 09 août 2004 relative à la politique de santé publique.

- L’InVS: contribue à l’expertise menée, notamment dans le domaine des maladies

infectieuses, dont les maladies à prévention vaccinale. De plus, l’InVS a pour mission de

suivre et d’évaluer la CV en France ; Il publie les BEH.

- La HAS (Haute autorité de santé) transmet aux autorités décisionnaires un avis sur la prise

en charge des médicaments par la sécurité sociale et/ou pour leur utilisation par les

collectivités publiques.

- Le HCSP : haut conseil de la santé publique est une instance d’expertise qui contribue à la

définition des objectifs nationaux de santé publique, en émettant avis et rapports www.hcsp.fr

- Le Comité Technique des Vaccinations (CTV), comité permanent rattaché au HCSP, élabore

les recommandations dans le domaine de la vaccination et met à jour le calendrier vaccinal. Il

regroupe des experts de différentes disciplines (infectiologie, pédiatrie, microbiologie,

immunologie, épidémiologie, pharmaco épidémiologie, médecine générale...).

- l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation à la santé) développe les éléments et

outils d’informations nécessaires aux programmes de prévention et d’éducation pour la santé,

pour le grand public et pour les professionnels de santé ; il élabore notamment des calendriers

vaccinaux dans de nombreuses langues.

31

- Depuis 2004 les compétences en matière de vaccinations ont été transférées à l’Etat mais

l’organisation n’est pas identique partout : La loi prévoit que les collectivités territoriales

(départements, communes) aient la possibilité de conserver leurs prérogatives par le biais

d’une convention avec l’État. Les vaccinations jusqu’à l’âge de 6 ans restent de la compétence

des départements (services de PMI des Conseils généraux), et la compétence déléguée est

étendue pour les personnes au-delà de l’âge de 6 ans.

Source : Vade-mecum recentralisation, Direction générale de la santé (DGS)

Les CV participent à l’information (voire à la formation) des professionnels de santé.

Aujourd’hui chaque structure (CV, PMI…) possède son propre logiciel d’enregistrement et la

personne qui change de ville (ou de pays) ne peut pas (ou très difficilement) retrouver trace de

ses vaccinations antérieures. Or quel impact sur la santé peut avoir une revaccination

régulière des personnes qui perdent leurs certificats de vaccination ?

- Les médecins, généralistes et pédiatres surtout, mais aussi médecins du travail par

exemple, sont les acteurs désignés de la prévention, chargés de l’information, du

conseil, de la vaccination de leurs patients et de son suivi. Aujourd’hui cette

prévention n’est pas tout à fait satisfaisante, les médecins manquent d’information,

parfois de motivation à l’acte, voire même pour quelques-uns au conseil vaccinal.

- Les autres acteurs de prévention vaccinale :

. Sages-femmes : la grossesse est aussi l’occasion de vacciner les proches

. Pharmaciens : ce sont les acteurs au quotidien de la santé des personnes

. Biologistes : on constate, pour les sérologies les plus fréquemment demandées, de

grandes disparités selon les laboratoires, tant dans les examens effectués (Ac totaux, Ig G,

etc.) que dans leur interprétation.

- Les acteurs associatifs, souvent motivés, ne possèdent que très rarement les vaccins sur

place ; or il doivent « parer au plus urgent » et la prévention n’en fait pas partie.

32

Quelques pistes d’amélioration

1. Auprès du public migrant :

- Ne pas perdre une occasion

Pour des personnes en situation d’exclusion et/ou de grande précarité, la consultation

médicale représente une opportunité rare d’échange autour des questions de prévention.

Aussi, quel que soit le motif de la consultation, il est fondamental que la prévention soit

abordée en toute occasion non seulement dans les dispositifs de santé publique mais

également dans les dispositifs de soins auxquels les migrants ont recours : cabinets médicaux,

centres de santé, services hospitaliers (notamment les urgences pour les Roms) et PASS, ces

dernières étant très souvent en contact avec les personnes migrantes précaires. En effet, seul le

droit commun peut garantir une prise en charge suivie à long terme.

Cela implique une gestion volontariste de la prévention, reflet de la qualité de l’organisation

de la santé publique (5).

Une organisation incluant la première vaccination dès l’accueil avec fiche navette ou tout

support centralisé où sont consignés les tests, sérologies et les vaccins, relais prévu auprès des

médecins de libéraux, et ce quelque soit l’entrée du migrant : officielle ou clandestine.

- Traduire informations et conseils dans des documents en plusieurs langues, voire faire

intervenir des traducteurs (pour beaucoup, dont les roms, l’écrit n’est pas utilisable).

- Utiliser des supports communautaires

Pour avoir un minimum d’impact, comme pour toute population, les actions de prévention

doivent tenir compte du contexte global de l’individu : culture du pays d’origine et du pays

d’asile, contexte de l’exil, de la précarité. L’étude citée page 11 concernant l’hépatite B

auprès de migrants venus d’Afrique subsaharienne (5) notait qu’« Une minorité connaît

l’existence d’une vaccination contre le VHB et la plupart ignorent leur statut vaccinal. Si peu

de participants ont déjà réalisé un dépistage de l’hépatite B par manque d’information, ils

seraient favorables à sa réalisation par l’intermédiaire de leur médecin traitant. Les femmes

ignorent que le dépistage de l’hépatite B est obligatoire pendant la grossesse. Les

participants sont plutôt réceptifs aux messages d’informations qui leur ont été présentés et

apprécient les supports de communication communautaires. ».

33

- Hépatite B : Dépistage et/ou vaccination ?

Mieux articuler les dispositifs dépistage/prévention pour l’hépatite B : les centres de santé

CPAM, les CDAG et CIDDIST effectuent des dépistages de la maladie par la recherche de

l’antigène HBs, mais il n’y a pas systématiquement de recherche d’anticorps : si le patient est

négatif on ne sait pas s’il est protégé ou non par une vaccination antérieure ou une hépatite B

aigue guérie. Le développement des TROD (tests rapide d’orientation diagnostique) va dans

le même sens : il semble que l’amélioration du dépistage ne favorisera pas la prévention.

Inciter à la prescription de la sérologie totale (Ag HBs, Ac HBc et HBs) et favoriser l’accès

aux vaccins sur place. Pour les moins de 35 ans il serait licite de prescrire aussi la sérologie

hépatite A en prévision d’un futur voyage au pays.

2. Côté professionnels :

- Rapprocher géographiquement les « pôles » pour simplifier les démarches : OFFI, centres

de dépistage, centres de vaccination, centres de santé associatifs ou institutionnels.

- Enseigner la vaccinologie dans des facultés de médecine, pharmacie, aux sages-femmes et

infirmiers.

- Parler de la vaccination dans les modules concernant les migrants.

- Uniformiser les prescriptions de sérologie pour l’hépatite B : la recherche des marqueurs

Ac anti-HBc et Ac anti-HBs (correspondant au contrôle avant vaccination dans la

nomenclature des actes de biologie médicale (NABM)) devrait être conjointe à la

recherche de l’Ag HBs lors du dépistage.

- Harmoniser les résultats et interprétations de sérologies par les laboratoires d’analyse.

- Unifier les recommandations vaccinales (européennes, pour commencer)

- Former et informer en continu les professionnels par des moyens facilement accessibles.

34

Le carnet de vaccination électronique

Cet outil, créé par le GPV (Groupe d’étude en préventologie), association à but non lucratif

créée dans un seul objectif de santé publique (indépendant des laboratoires pharmaceutiques

et sans publicité ni exploitation commerciale des données de santé), est actuellement intégré

au site « mesvaccins.net » qui propose d’autre part au public et aux professionnels de santé

des informations et données exhaustives et actualisées concernant vaccins (recommandés ou

du voyage), maladies à prévention vaccinales et voyage.

Il permet aux patients de créer un carnet qui pourra être officiellement validé par un médecin

(de façon sécurisée), et de recevoir des recommandations vaccinales très personnalisées (selon

l’âge, le sexe, ou encore le métier).

Ce logiciel inclut dans son questionnaire les items concernant l’origine de la personne ou de

ses parents s’il s’agit d’un enfant ; Les recommandations vaccinales concernant les migrants y

sont donc parfaitement intégrées.

Il peut tout à fait être utilisé par une personne « aidante » qui accompagne le migrant.

Il permet également au médecin de créer et/ou valider le carnet de ses patients, de suivre leur

état vaccinal, et d’être au courant des recommandations de façon très actualisée.

Le Haut Conseil de la Santé Publique dans son rapport du 25 mai 2012 relatif au programme

national d’amélioration de la politique vaccinale 2012-2017 propose des actions visant entre

autre à accélérer le processus de simplification du calendrier vaccinal et simplifier l’accès aux

données du carnet de vaccination notamment dans un carnet de vaccination partagé avec les

professionnels de santé, intégré à un dossier médical informatisé.

Le Carnet de vaccination électronique est un des projets retenus par ce rapport ; il pourrait

être intégré au futur dossier médical partagé DMP (15).

35

CONCLUSION

Lors de leur arrivée en France, les migrants ne sont pas toujours les parents pauvres en terme

de vaccinations : ils ont souvent reçu une vaccination complète dans leur pays d'origine, voire

les pays de passage, et ceci surtout pour les vaccinations de routine (diphtérie tétanos

coqueluche polio). Pour les autres c’est plus aléatoire et le rattrapage complexe. Cette

population reste mal vaccinée (trop ou trop peu -notamment lorsqu’elle doit voyager)

L’application des recommandations vaccinales est souvent facilitée par l’attitude positive des

migrants en ce qui concerne les vaccins. L’expérience vécue des ravages potentiels de ces

maladies dans leur pays d’origine les incite à accepter les nombreuses injections qu’ils voient

comme un moyen de diminuer leurs souffrances et celles de leur famille. Le problème est

plutôt la barrière de la langue et l’accès au système de soin pour ces personnes, notamment les

« sans papiers » qui n’osent pas trop se déplacer surtout s’ils risquent l’expulsion, et

l’information des professionnels de la santé notamment sur les recommandations particulières.

Une meilleure organisation pour une action concertée entre les différents intervenants est

nécessaire, et la généralisation du carnet de vaccination électronique faciliterait grandement le

suivi vaccinal des populations les plus fragiles. Adapté aux personnes en mouvement, cet outil

devrait avoir une évolution européenne voire internationale.

« La science n’a pas de patrie »

Louis Pasteur

Discours d’inauguration de l’institut Pasteur le 14 novembre 1888.

36

Bibliographie :

1. www.invs.sante.fr

2. C. Wihtol de Wenden : Tendances récentes des migrations en France, Santé et recours

aux soins des Migrants en France. BEH 17 janvier 2012/p 15. Invs.

3. Prise en charge médico-psycho-sociale des migrants/étrangers en situation précaire

COMEDE : Guide pratique 2008. www.comede.org.

4. F. Lot, D. Antoine, C. Pioche, C. Larsen, D. Che, F. Cazein, C. Semaille, C. Saura :

Trois pathologies infectieuses fréquemment rencontrées chez les migrants en France : le VIH,

la tuberculose et l’hépatite B. Santé et recours aux soins des migrants en France ; BEH 2-3-

4/17 janvier 2012/p25. Invs.

5. L'hépatite B chez les migrants originaires d'Afrique subsaharienne vivant en France.

État des lieux et Étude de leur perception de la maladie. N. Vignier, thèse pour le doctorat en

médecine -santé publique et médecine sociale, Octobre 2009 n° 2009PA06S079

6. Le calendrier des vaccinations et les recommandations vaccinales 2012 ; BEH n°14-

15 10 avril 2012. Invs.

7. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Calendrier_vaccinal__Recommandations_2012.pdf

8. C. Berchet, F. Jusot : Etat de santé et recours aux soins des immigrés en France : une

revue de la littérature. BEH 2-3-4/17 janvier 2012/p17. Invs.

9. Observatoire de l’accès aux soins de la Mission France – Médecins du Monde octobre

2011 www.medecinsdumonde.org/En.../Observatoire-de-l-acces-aux-soins

10. Promouvoir la santé et les droits d’une minorité en détresse Projet Romeurope,

Médecins du Monde. Colloque Roms, Sinte, Kale, Tsiganes en Europe., Paris, 19-20/10/2000

11. Jay S. Keystone Immigrants Returning Home to Visit Friends & Relatives (VFRs)

chap 8 – 2012 Yellow book – travelers’health-CDC

12. Recommandations sanitaires pour les voyageurs INVS : BEH n°20-21 29 mai 2012

13. www.hcsp.fr

14. Weekly Epidemiological Record No. 30, 2012, 87, 277–288 http://www.who.int/wer

15. Rapport relatif au programme national d’amélioration de la politique vaccinale 2012-

2017 25 mai 2012 : www.hcsp.fr/explore.cgi/hcspr20120525_ameriopolvaccinale.pdf

Remerciements aux organisateurs et enseignants de cette passionnante formation

où la rencontre multiculturelle était au rendez-vous.