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Licence 1 / Institut Français de Presse / 1 er semestre 2016-2017 Vendredi de 15h à 18h Amphi 300, Centre Vaugirard Cours Magistral Histoire et sémiologie de l’écrit et de l’image Giuseppina Sapio Ce cours est une introduction générale à l’histoire et à la sémiologie de l’écrit et de l’image et il vise à offrir aux étudiant.e.s les rudiments de l’analyse des textes et des images. Pour cela, chaque séance du cours est conçue autour d’une thématique générale (la perspective, le détail, le regard, le laid, le cri, etc.) qui est étudiée au travers d’objets spécifiques (textes, tableaux, photographies, films, dessins, graffiti et tags, etc.). L’analyse de ces objets sera systématiquement liée à la présentation du cadre historique dans lequel ceux-ci ont été produits et reçus et aux évolutions qui sont intervenues au fil du temps. Une telle démarche nous permettra d’inscrire les images et les textes médiatiques actuels au sein d’une tradition qui remonte jusqu’à l’Antiquité. Cours 1 Vendredi 30 septembre 2016 Ceci n’est pas une pipe : l’image est un texte, le texte est une image. L’objectif de cette séance est de donner un aperçu historique de l’écrit et de l’image à travers de multiples exemples, allant des idéogrammes aux écritures numériques, en passant par la naissance des alphabets, et allant des tableaux aux photographies, en passant par le cinéma. Ainsi, dans une perspective sémiologique, nous allons étudier la textualité des images et l’iconicité des mots. Cette présentation générale sera suivie par l’analyse sémiologique des œuvres de René Magritte. La présente séance est liée à celle du 21 octobre 2016, pour laquelle est prévue une visite collective de l’exposition René Magritté. La trahison des images au Centre Pompidou. Cours 2 Vendredi 7 octobre 2016 La perspective. De l’influence de La Ricotta (1963) de Pier Paolo Pasolini sur le tableau « La Flagellation du Christ » (vers 1455) de Piero della Francesca. Avec ce titre « provocateur », nous souhaitons mettre l’accent sur le fait que les images modernes et contemporaines influencent notre regard sur les images plus anciennes. Après la projection du moyen-métrage La Ricotta de P.P. Pasolini (35 min. environ), nous nous attarderons sur l’analyse des « tableaux vivants » de crucifixion présents dans le film, en interrogeant la perspective comme « forme symbolique » (E. Panofsky). Cette analyse nous permettra de dresser une histoire (H. Damisch) et une sémiologie de la perspective, en montrant comment celle-ci a évolué en fonction des systèmes de valeurs des cultures dans lesquelles elle était employée, en provoquant parfois de véritables « scandales », comme dans le cas du tableau « La Flagellation du Christ » de Piero della Francesca.

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Licence 1 / Institut Français de Presse / 1er

semestre 2016-2017

Vendredi de 15h à 18h

Amphi 300, Centre Vaugirard

Cours Magistral

Histoire et sémiologie de l’écrit et de l’image

Giuseppina Sapio

Ce cours est une introduction générale à l’histoire et à la sémiologie de l’écrit et de l’image et il vise

à offrir aux étudiant.e.s les rudiments de l’analyse des textes et des images.

Pour cela, chaque séance du cours est conçue autour d’une thématique générale (la perspective, le

détail, le regard, le laid, le cri, etc.) qui est étudiée au travers d’objets spécifiques (textes, tableaux,

photographies, films, dessins, graffiti et tags, etc.).

L’analyse de ces objets sera systématiquement liée à la présentation du cadre historique dans lequel

ceux-ci ont été produits et reçus et aux évolutions qui sont intervenues au fil du temps. Une telle

démarche nous permettra d’inscrire les images et les textes médiatiques actuels au sein d’une

tradition qui remonte jusqu’à l’Antiquité.

Cours 1

Vendredi 30 septembre 2016

Ceci n’est pas une pipe : l’image est un texte, le texte est une image. L’objectif de cette séance est de donner un aperçu historique de l’écrit et de l’image à travers de

multiples exemples, allant des idéogrammes aux écritures numériques, en passant par la naissance

des alphabets, et allant des tableaux aux photographies, en passant par le cinéma. Ainsi, dans une

perspective sémiologique, nous allons étudier la textualité des images et l’iconicité des mots. Cette

présentation générale sera suivie par l’analyse sémiologique des œuvres de René Magritte. La

présente séance est liée à celle du 21 octobre 2016, pour laquelle est prévue une visite collective de

l’exposition René Magritté. La trahison des images au Centre Pompidou.

Cours 2 Vendredi 7 octobre 2016

La perspective. De l’influence de La Ricotta (1963) de Pier Paolo Pasolini sur le tableau « La Flagellation du Christ » (vers 1455) de Piero della Francesca.

Avec ce titre « provocateur », nous souhaitons mettre l’accent sur le fait que les images modernes et

contemporaines influencent notre regard sur les images plus anciennes. Après la projection du

moyen-métrage La Ricotta de P.P. Pasolini (35 min. environ), nous nous attarderons sur l’analyse

des « tableaux vivants » de crucifixion présents dans le film, en interrogeant la perspective comme

« forme symbolique » (E. Panofsky). Cette analyse nous permettra de dresser une histoire (H.

Damisch) et une sémiologie de la perspective, en montrant comment celle-ci a évolué en fonction

des systèmes de valeurs des cultures dans lesquelles elle était employée, en provoquant parfois de

véritables « scandales », comme dans le cas du tableau « La Flagellation du Christ » de Piero della

Francesca.

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Cours 3

Lundi 17 octobre 2016 (rattrapage du cours du vendredi 14 octobre 2016)

Le détail. Le toit dans le tableau « American Gothic » (1930) de Grant Wood (et ses parodies virtuelles) Parfois, il suffit d’un escargot (D. Arrasse) ou d’une mouche (O. Calabrese) pour troubler

l’harmonie d’une perspective. Dans cette séance, nous nous intéresserons à l’histoire (D. Arrasse)

et à la sémiologie (R. Barthes) des détails. À travers l’analyse du détail du toit dans le tableau

« American Gothic » de Grant Wood, nous tenterons de comprendre l’évolution historique d’un

symbole de l’union familiale, en nous appuyant sur des formes d’écriture et d’images plus

anciennes, tels que les arbres généalogiques (M.-E. Gautier).

Cours 4

Vendredi 21 octobre 2016

Visite de l’exposition « René Magritte. La trahison des images » au Centre Pompidou

L’exposition explore l’intérêt du peintre pour la philosophie, qui culmine, en 1973, avec Ceci n’est pas une pipe que publie Michel Foucault, fruit de ses échanges avec l’artiste.

La visite de l’exposition sera le prolongement de la première séance du Cours Magistral et elle sera

l’occasion d’approfondir la réflexion sur les images et les mots à travers l’œuvre d’un artiste

éclectique.

Cours 5

Vendredi 28 octobre 2016

Face et profil. Portraits et autoportraits en peinture, selfies et regards-caméras Inspiré d’une photographie de famille, le tableau de Grant Wood nous permettra d’aborder

l’histoire des portraits et des autoportraits en peinture (O. Calabrese) ainsi que de leurs

déclinaisons contemporaines (selfies et regards-camera). Nous produirons une étude sémiologique

de la représentation du regard dans le portrait (« Face et profil », M. Schapiro), de la disposition

des sujets, de leurs postures.

Cours 6

Vendredi 4 novembre 2016

Le laid. L’anthropologie criminelle de Cesare Lombroso : les photographies de criminels et leurs

légendes De face ou de profil, la tradition des portraits de délinquants est un chapitre essentiel de l’histoire

de la laideur (U. Eco). La physiognomonie s’est toujours servie d’images afin d’illustrer

« scientifiquement » les liens entre les traits physionomiques et les comportements humains : des

dessins de G.B. Della Porta (1610) ou de Gaspar Lavater (1735) aux portraits photographiques de

C. Lombroso (1876).

Dans le cas de l’anthropologue italien, les images de criminels sont accompagnées par des textes

« sémiologiques », qui lient les difformités physiques des individus à des anomalies

comportementales. L’étude des images et des textes de Cesare Lombroso nous permettra ainsi de

faire un détour par la caricature, où le laid devient comique.

11 novembre 2016, Jour férié – pas de cours

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Cours 7

Vendredi 18 novembre 2016

Le cri. Manicomio, les clichés de Raymond Depardon La douleur peut induire la laideur, un cri peut déformer un visage. Dans cette séance, nous nous

intéresserons à la représentation de la douleur à travers les photographies réalisées par Raymond

Depardon dans un asile vénitien. À partir de l’étude de l’un de ses clichés, figeant le cri d’un

homme, nous tracerons une histoire sémiologique du cri, en nous appuyant sur l’analyse du cri de

Laocoon, sculpture en marbre découverte en Italie en 1506 (G.E. Lessing), du cri d’Edvard

Munch, des bouches béantes des tableaux de Francis Bacon, jusqu’au cri de douleur de la

« Madone algérienne », photographiée en 1997 par le photojournaliste Hocine.

Cours 8

Vendredi 25 novembre 2016

La voix du cri. Les mots et les dessins militants d’Ugo Guarino à propos des asiles italiens Comme l’écrivait Gotthold E. Lessing, il existe une différence essentielle entre l’image d’un cri et

les mots qui tentent de le décrire. Dans cette séance, nous nous occuperons des dessins de presse

d’Ugo Guarino, ayant milité à la fin des années soixante pour l’abolition des asiles italiens. Les

mots et les images de ce dessinateur nous permettront d’aborder la question de la représentation

de la douleur sous un autre angle, celui du dessin de presse. Ce dernier, qui renvoie visuellement

aux caractéristiques du dessin d’enfant, s’appuie sur un usage des mots très proche du « Witz », le

« mot d’esprit » théorisé par S. Freud.

Cours 9

Vendredi 2 décembre 2016

Qui dit Je ?, 1. Les cris et les frissons des (fausses) images d’amateur dans le cinéma d’horreur Dans cette séance, nous aborderons la représentation de la peur et de la douleur à travers l’étude

des fausses images d’amateur dans le cinéma d’horreur. À partir d’un ensemble de films tournés,

en partie ou entièrement, en caméra subjective (The Blair Witch Project, 1999 ; [REC], 2007,

Cloverfield, 2008 ; Quarantine, 2008, etc.), nous nous intéresserons à la manière dont la peur est

exprimée dans les images cinématographiques par le biais du mouvement et des effets sonores.

Cette étude sera également l’occasion d’aborder la prolifération d’images d’amateur dans les

médias lors d’événements néfastes touchant des collectivités. Nous montrerons alors comment ces

images se déclinent à la « première personne » et disent ou, plutôt, crient : « Je » !

Cours 10

Vendredi 9 décembre 2016

Maëlle Bazin, doctorante au Carism Qui dit Je ? 2. La mémoire des murs : une brève histoire du graffiti. Je de signatures, Je t’aime, "Je suis Charlie" Nous retracerons l’évolution du graffiti à travers les siècles depuis l’Antiquité jusqu’à la période

contemporaine, marquée par la naissance du tag aux États-Unis dans les années 1970 et

l’envahissement de l’espace urbain par les signatures. La ville est alors le lieu d’une « prise de

parole » (M. De Certeau) : politique, artistique, triviale. Il faut attendre le début du XXe siècle pour

que le graffiti soit reconnu comme un objet de recherche légitime, avec les travaux d’artistes issus

du mouvement surréaliste (Brassaï, Dubuffet, Picabia, etc.) inaugurant une tradition d’archivage

photographique. Nous tacherons alors de distinguer le street art, qui connait une

institutionnalisation croissante notamment dans cette dernière décennie, des "écrits de contenus"

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(C. Lamireau), qui nous intéressent plus particulièrement ici. Considéré comme l’expression des

« sans voix », le graffiti est une trace par excellence : trace d’un passage, et d’un acte, celui d’inscrire

ou d’écrire sur des supports non prévus à cet effet. Attestations de présence (Taki 183) ou de

passages sur les monuments historiques (Victor Hugo notamment), graffitis amoureux, formule « Je

suis Charlie », nous interrogerons la ville comme laboratoire de signes, et comme lieu

d’énonciation d’un « Je », souvent anonyme.

Lectures obligatoires en prévision de la séance :

BAUDRILLARD Jean, « Kool Killer ou l'insurrection par les signes », in L'Echange symbolique et la mort, Paris, Gallimard, 1976. http://lpdme.org/projects/jeanbaudrillard/koolkiller.pdf

BAZIN Maëlle, « L’énonciation d’un deuil national. Usages de “Je suis Charlie” dans les écritures

urbaines », in Lefébure Pierre, Sécail Claire (sous la dir. de), Le défi Charlie. Les médias à

l’épreuve des attentats, Lemieux éditeur, 2016, pp. 153-186.

Cours 11

Vendredi 16 décembre 2016

Flore Di Sciullo, doctorante au Carism

Art Press (1975-2015), l’exemple d’une revue d’art pour penser les rapports entre art, médias et politique Dans cette séance, nous nous intéresserons à un cas bien particulier, celui du magazine Art Press, qui paraît depuis 1972. Son étude nous permettra d’aborder des enjeux historiques (le rôle

de la presse alternative dans la vie politique), sémiologiques (le rapport texte / image dans un

document imprimé, le statut des images reproduites) et esthétiques (définition des avant-gardes,

importance de la critique d’art).

Modalités d’évaluation :

Les étudiant.e.s devront répondre à deux questions : l’une (12 points) portant sur les notions

d’histoire et sémiologie de l’écrit et de l’image évoquées en cours, à l’appui d’exemples personnels

ou issus du cours, l’autre (8 points) centrée sur l’analyse d’une image ou d’un texte.

Lectures obligatoires :

ARRASSE Daniel, « Le regard de l’escargot », in Arrasse Daniel, On n’y voit rien. Descriptions, Paris : Éditions Denoël, 2000, pp. 29-56.

BENJAMIN Walter, Petite histoire de la photographie, Paris : Éditions Allia, 2012, 63 p.

ECO Umberto, « Echanges entre liste pratique et liste poétique », in Eco Umberto, Le vertige de la

liste, Paris : Flammarion, 2009, pp. 371-393.

FOUCAULT Michel, Ceci n’est pas une pipe, Saint-Clément-la-Rivière : Fata Morgana, 1977, 90

p.

POSTEL Jean-Philippe, L’affaire Arnolfini : enquête sur un tableau de Van Eyck, Arles : Actes

Sud, 2016, 156 p.

SAPIO Giuseppina, « La noce à l’écran. Interactions et représentations familiales dans les home movies », Reset, n°3, 2014. Lien : http://reset.revues.org/390.

SCHAPIRO Meyer, « Face et profil comme formes symboliques », Les mots et les images, Paris :

Éditions Macula, 2011, pp. 94-119.