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30 jours 4

Revue de presse 5

Portrait 6• Steve Keen

Actualité 8• Après le 19 mai• Grève : polémique sur les chiffres• Réforme collège : l’action continue• Consulation programmes• Sciences et technologie au collège • IMP et hiérarchies intermédiaires• Les retraités dans l’action• Négociation fonction publique• SEGPA• Défense du secteur public à Guéret

Éco/social 18• Les idées fausses sur la dette publique• Crise systémique et les mutations climatiques• CHSCT du privé• Santé des personnels

Dossier 21• La protection sociale

Métier 28• Langues vivantes et langues anciennes• Baccalauréat 2015• Polémique autour de l’histoire-géographie• Les Rendez-Vous de Blois

21 DossierLa protection sociale

Catégories 30• Affectations stagiaires• Indemnité REP+• Mouvement 2015• CO-Psy

Sur le terrain 32• Le harcèlement entre élèves

Fenêtre sur 34• L’Europe sociale

Culture 36• Livres/Revues• Cinéma/Théâtre/Spectacles/Expositions

Entretien 40• Sophie Wahnich

International 42• 25e anniversaire de la FSLE• UDEN Sénégal• Enseignants et 1er mai dans le monde

Rattrapage 44• Les réformes dans l’éducation

Dans la classe 5• Les chorales scolaires

Droits et libertés 46• Immigration• Droit au logement

ÉditoRespecterles grévistesComment avoir de la considérationpour un pouvoir qui, d’un côtéprône les vertus du dialogue socialet, de l’autre, méprise descitoyens qui s’engagent dansl’action syndicale. Faire grève n’estpas un plaisir. Perdre une journéede salaire pour son métier, pourl’avenir de la jeunesse, pourdéfendre ses idéaux de justice etd’égalité devant l’accès auxsavoirs mérite en réponse autrechose qu’un coup de menton avecla publication du décret dèsle lendemain. Une provocationjamais vue dans l’histoire récentedu second degré !Les ravages provoqués par unetelle attitude risquent fort d’allerbien au-delà de la colèreimmédiate. Parce que dans uncontexte social et politique aussidélétère, elle interroge surla capacité de nos dirigeants àentendre, écouter et comprendre.De même la tentative derécupération politique de ceux quiont cassé la formation desenseignants et supprimé 80 000postes en cinq ans, accentueencore le fossé entre une classepolitique qui n’est plus reconnuecomme étant au service du bienpublic et la population victime despolitiques d’austérité.Il est de notre responsabilité de nepas céder devant tant de brutalitéet de poursuivre la constructiond’un mouvement social capable defaire entendre raison augouvernement. Un décret et un

arrêté peuventêtre abrogés ouremplacés.

SOMMAIRE

Roland Hubertcosecrétaire général

L’Université Syndicaliste, le journal du Syndicat national des enseignements de second degré (SNES, 46, avenue d’Ivry, 75647 Paris Cedex 13. Tél. standard :01 40 63 29 00). Directeur de la publication : Roland Hubert ([email protected]). Rédacteur en chef : Thierry Petrault. Secrétaire de direction :Bénédicte Derieux. Collaborateurs permanents : Nicolas Béniès, Jean-François Claudon, Monique Degos, Caroline Gros, Véronique Ponvert, Stéphane Rio,Nicolas Sueur. Régie publicitaire : Com d’habitude publicité, 25, rue Fernand-Delmas, 19100 Brive. Clotilde Poitevin, tél. : 05 55 24 14 03, fax : 05 55 18 03 73,www.comdhabitude.fr. Compogravure : C.A.G., Paris. Imprimerie : SEGO, Taverny (95). C.P. N° 0118 S 06386. I.S.S.N. N° 0751-5839. Dépôt légal à parution.Conception : Voltaire & Associés, 15, rue de la Banque, 75002 Paris. Photo de couverture : © Adrian Hillman/Fotolia.fr.

Prix du numéro : 1,30€. Abonnement : 1) Personnels de l’Éducation nationale : France 30€ ; étranger et DOM-TOM : 44€. 2) Autres, France : 42 € ; étranger : 56€. Publicité : CASDEN (p. 2), CASIO (p. 48). Joint à ce numéro :8 p. CPE ; 16 p. Collège ; 24 p. ORS ; 32 p. Courrier de S1 n° 6

32 Sur le terrainLe harcèlement entre élèves

6Portrait

Steve Keen et« l’imposture économique »

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4 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

BILLET D’HUMEUR

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Je décrète !

30 JOURS

volonté délibérée d’afficher sonmépris à l’endroit de toute uneprofession. Car qui dans lessalles des profs approuve réel-lement cette réforme régres-sive dans tous les domaines ? Simadame la ministre veut vrai-ment «  entendre  » les ensei-gnants, comme elle prétend lefaire, qu’elle tende l’oreille ducôté de la rue où résonnent lesclameurs des manifestants, etnon en direction des alcôves oùs’agitent fiévreusement leszélés du socle  ! n

Jean-François Claudon

Pouvait-on imaginer pire pro-vocation ? Malgré un taux

de grévistes supérieur à 50 %,des centaines de collèges fer-més dans tout le pays, unemanifestation parisienne telleque l’on en avait pas vuesdepuis plus de dix ans, le Pre-mier ministre a décidé depublier, quelques heures aprèsla fin de cette belle journée demobilisation, à la hussarde, ledécret portant sur la réforme ducollège ! Il a osé ! Sans doutepar fidélité à son image d’auto-ritarisme. Sans doute aussi par

Pas tousGénocide arménien : Obama renonce à froisser la Turquie.

24avril

CatastropheLe Népal frappé par un très violent séisme.

25avril

Hep !La présidente de l’INA rattrapée par des notes mirobolantes de taxi.

26avril

InexorableLe chômage poursuit sa hausse au mois de mars : + 0,4 %.

27avril

Mal logésPlus de milliards pour la Défense, moins pour le Logement et la Santé.

28avril

Pas si vieux29 avril 1945, les Françaises votent pour la première fois.

29avril

En plein vol !Airbus porte plainte contre X pour espionnage.

29avril

FemeNLe discours de Marine Le Pen perturbé par des Femen.

1ER

mai

Un pour un...60 millions de brins vendus soit quasiment un brin par Français.

1ER

mai

Nein !Classes bilangues : le froid entre l’Allemagne et la France.

2maiDégel

Obama à Castro : « La guerre froide est terminée ».

11avril

Sans tambourL’écrivain et prix Nobel allemand Günter Grass est mort.

12avril

Excédent de bagagesAlaska Airlines : un bagagiste avait été oublié dans la soute.

13avril

Avis de recherche. La Commission européenne accuse Google d’abus de position dominante.

13avril

Se faire Draghi. Le président de la Banque centraleeuropéenne « attaqué » à coup de confettis.

14avril

On airFin de la grève à Radio France après 28 jours de mouvement.

15avril

Hisse et hoL’Hermione a largué les amarres.

Plus joliesLa fréquentation des colonies de vacances en baisse.

20avril

Comptable de ses actes. Le « comptable » d’Auschwitzdevant la justice, le dernier procès d’un nazi.

21avril

Tragédie. Migrants : « la mer est pleine de cadavres »,témoignent les pêcheurs tunisiens.

23avril

18avril

Migrer à en mourirIls sont Népalais et travaillent pour des salaires de misère à la construction

des stades de la coupe du monde de football qui doit se tenir au Qatar en2022. Ils sont Érythréens et sont enfermés dans des camps et rançonnés enplein milieu du Sinaï. Ils sont Bangladais et les bateaux qui les transportentdérivent sur la mer d’Andaman... Les images de migrants cherchant à fuir lamisère, la guerre ou les persécutions dont ils sont victimes dans leur pays d’ori-gine se banalisent. Elles suscitent de la compassion tout autant qu’ellesinquiètent. L’époque aime à vanter les vertus de la mobilité (des capitaux etdes marchandises), mais se montre soupçonneuse quant à ces déracinés, sansfeu ni lieu, qui ne sont pas sans rappeler les paysans anglais chassés deleurs terres par les enclosures au XIXe siècle. Pour les chercheurs du groupe Mobglob (Mobilité globale et gouvernance des migrations), la fermeturedes frontières alimente l’immigration clandestine et entretient les réseaux depasseurs. L’une des solutions consisterait à libéraliser la circulation deshommes et bien évidemment à apporter une aide au développement pourréduire les inégalités nord-sud. Une telle mesure nécessiterait du courage poli-tique. Pas sûr qu’il y en ait beaucoup face à une extrême droite qui tend à serenforcer partout en Europe.

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21 mai 2015

Pourquoi Valls faitle pari de la fermeté

par Eric Hacquemand et Rosalie Lucas

Réforme du collège. Le décret sur le texte de Najat Vallaud-Belkacem a été publié au lendemain

de la grève des enseignants. Ses opposantsdénoncent un passage en force.

9-10 mai 2015

A BÉZIERS, LES SYNDICATS CONTRE« L’IMPOSTURE SOCIALE »« L’extrême droite est incompatibleavec le syndicalisme, entonne unmembre de la CGT devant une centainede représentants syndicaux réunis,mercredi, à la Bourse du travail deBéziers (Hérault). Le syndicalisme,c’est le rassemblement de tous lessalariés pour défendre leurs intérêts ;l’extrême droite, c’est la division ». Lediscours contre «  l’imposture sociale »des politiques extrémistes est martelétout au long de cette rencontre entresix organisations (CGT, FSU, Solidaires,UNEF, UNL et FIDL). Venus de Béziers,de Hayange (Moselle), d’Orange(Vaucluse), de Beaucaire (Gard) etd’autres communes passées aux mainsdu Front national, les participantsapplaudissent […]. « On doit dépasserla simple dénonciation du racismeen démontrant qu’ils (les élus FN)ne règlent en rien la questiondes salaires, du pouvoir d’achat,du logement » note Éric Bachelart de laFSU. «  Il faut créer le rassemblementdes salariés autour du progrèssocial », appuie Pascal Debay de la CGT[…] Un rassemblement déjà à l’œuvre,selon lui. [...] « On travaille à unedéclaration signée par l’ensembledes organisations. Sauf une, hélas »,complète un militant. Soit FO, fidèleà sa ligne d’indépendance vis-à-visdu politique. Au risque de fairele jeu du FN.

11 mai 2015

HOLLANDE : « LA FRANCEFACE À SON HISTOIRE »François Hollande a inaugurédimanche à Pointe-à-Pitre lemémorial ACTe, centre caribéend’expression et de mémoire dela traite et de l’esclavage, le plusimportant au monde. « La Franceest capable de regarder sonhistoire en face », a-t-il déclarélors d’un discours écrit en partiepar la Garde des Sceaux ChristianeTaubira. Il a rendu hommage à«  la force d’âme » de ces hommeset femmes «  réduits à l’état demarchandises et promis à unlabeur épuisant, en vertu de codeset de lois que la justice faisaitimplacablement respecter ».

4 mai 2015

L’ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE VEUT FAVORISERLA MIXITÉ SOCIALEL’enseignement catholique veut faireplus et mieux en termes de mixité. Le17 avril, son secrétaire général, PascalBalmand, a présenté les avancées deson plan « pour les réussites » [...].Le principe : donner la priorité, dansle cadre de la répartition des moyens,aux établissements qui font l’effortd’ouvrir leurs portes à une diversitéde publics. […] À compter de larentrée 2016, une partie des postesrestera distribuée selon des critèresdémographiques ; une autre partie– « 50 % a minima », précise PascalBalmand – sera affectée auxétablissements en fonction de leursefforts en termes de mixité. […]Rien ne garantit que cette volonté,présente au sommet de l’institution,sera suivie d’effets. « Disons quec’est une invitation, on encouragenos établissements à s’engager danscette voie », explique Pascal Balmand,qui se refuse à toute solution plusdirective ou contraignante.

11 mai 2015

LE GOUVERNEMENTVALLS A-T-IL OUBLIÉ LESTATUT DES ÉTUDIANTS ?L’UNEF a obtenu de FrançoisHollande qu’il s’engage à mettreen place l’allocation d’autonomie.Une mesure pour répondre àl’urgence sociale, 200 000 viventsous le seuil de pauvreté et 50 %d’entre eux sont contraints detravailler à côté de leurs étudespour les financer. […] Maisl’engagement de François Hollandeest très vite rentré encontradiction avec sa politiqued’austérité : la réduction desdépenses publique a dépassé lajeunesse dans l’ordre des prioritéset le gouvernement se refuse àenvisager tout nouvelinvestissement d’ici la fin duquinquennat. Ce bilan est d’autantplus critiquable quand il estcomparé à d’autres choixpolitiques qui ont été faits depuis2012. Le coût du Pacte deresponsabilité représente à lui seulle financement d’une allocationd’autonomie et le doublementdu budget des universités !

Le dessin du mois

Le Canard Enchaîné, 20 mai 2015

En voulant accélérer, le gouvernement a pris un risque. À encroire les sondages, les Français sont très partagés sur cette

réforme. Selon une enquête Odoxa pour Le Parisien – Aujourd’huien France, 61 % des Français la désapprouvent. Et dès hiermatin, les syndicats ont eux aussi regretté la parution du décret.«  C’est une publication incendiaire  », a notamment lancé leSNES-FSU.« Bomber le torse, la brutalité permanente, c’est du Valls tout cra-ché, s’inquiète un ancien ministre. C’est une connerie. » « Je sou-tiens la réforme, mais on ne peut pas agir comme ça. Au lende-main d’une manifestation, il fallait recevoir les syndicats etpublier dans deux ou trois jours », estime un ancien ministre. D’au-tant que ce nouveau point de crispation avec les enseignants (quiont largement voté Hollande en 2012) s’ajoute à d’autres décep-tions : gel du point d’indice et donc du pouvoir d’achat, réformedes rythmes scolaires au forceps...La ministre Najat Vallaud-Berlkacem, plus que jamais sous le feude la critique, a pris soin de garder sa porte ouverte en promettantde discuter des modalités d’application de la réforme. Il reste àsavoir si les syndicats auront digéré.

REVUE DE PRESSEEN MAI

Ne fais pas ce qu’il te plaît !

Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 5

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6 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

L’économiste se différencie dePaul Krugman par sa critiquesans concession des théories

néoclassiques. C’est le sujetpremier de sa thèse traduiterécemment en français auxéditions de l’Atelier, L’impos-ture économique, qui déconstruitcette fausse «  science écono-mique » qui se trouve en dehorsde toute réalité.

Un économiste hétérodoxe majeurIl se dit «  postkeynésien  » etprend appui sur la théorie de JohnMaynard Keynes développéedans son grand livre La théoriegénérale de l’emploi, de l’inté-rêt et de la monnaie (1936) pourcritiquer les hypothèses et les fon-dements des théories néoclas-siques. La première partie du livrereprésente une synthèse de toutesles critiques formulées par leséconomistes pour détruire cettevision impropre à expliquer ladynamique des sociétés et le pro-cessus de création de richesses.Une lecture souvent ardue mêmesi l’auteur se refuse à utiliser lesmodèles mathématiques pour permettre àchacun(e) de comprendre l’inanité des abs-tractions néoclassiques. Par exemple, lacourbe de la demande ne peut pas fonction-ner, celle de l’offre non plus. Les consom-mateurs agrégés n’ont pas tous le mêmecomportement, les producteurs non plus. Lesabstractions sont-elles « réelles » ? Permet-tent-elles d’analyser les sociétés ? Sur cesdeux terrains, les théorisations néoclassiquesne résistent pas à la critique de Keen. Elless’écroulent purement et simplement en rai-son de l’oubli volontaire des groupes sociauxet des antagonismes de classes.

Les thèses néoclassiques sont infondéesPour l’Australien, la dénomination néoclas-sique est celle qui convient pour désignercette école théorique. Celle de « libéra-lisme » est facteur de confusion car dans lespays anglo-saxons, un « libéral » est un cri-tique de la société capitaliste et un défenseurdes droits.

Cette théorie néoclassique n’est pas en liendirect avec les Classiques – pour l’économiepolitique, Adam Smith, David Ricardo etFrançois Quesnay – mais plutôt avec le phi-losophe Jeremy Bentham, véritable inventeurde la « main invisible du marché », véritablemantra de tous ces penseurs.En même temps, cette théo-rie se veut une réponse à laCritique de l’économie poli-tique de Karl Marx, en fai-sant l’apologie d’un capita-lisme tellement idéal qu’ilse perd dans les limbes de lamétaphysique.L’équilibre des marchés,une idée chère à L. Walras,n’a aucun sens. La réduc-tion de l’économie à lamicro-économie – l’éco-nomie de l’entreprise – nepermet pas d’appréhenderle mouvement de l’accumu-

lation du Capital et les dyna-miques en cours. La réductionde la monnaie à un moyend’échange est contradictoire avecla réalité même du Capital et aufait que l’Argent devenant Capi-tal change la donne. Enfin, lesnéoclassiques ne connaissent quela statique comparative et, ducoup, tombent du côté des « Para-doxes de la flèche de Zénon  ».Si chaque mouvement de laflèche est figé et vu en statique, laflèche est immobile à un momentdonné de sa course et ne rend pascompte du mouvement qui la

pousse vers son objectif. La statique com-parative ne peut donc permettre de com-prendre les processus en cours, les crisesinscrites dans les modalités de fonctionne-ment du mode de production lui-même.Steve Keen ironise chaque fois qu’il le peut,

sur la notion d’équi-libre, sur ces marchés«  autorégulateurs  » etce monde où les crisesne peuvent exister, carelles ne font pas partiede la théorie. Ce sontpourtant ces « utopies »conservatrices qui sontcensées conduire lespolitiques économiques.C’est en leur nom quel’austérité domine, c’esten leur nom que Thatcher a parlé de« TINA » (il n’y a pasd’alternative)...

PORTRAIT UN ÉCONOMISTE HÉTÉRODOXESTEVE KEEN, né le 28 mars 1953 à Sydney (Australie), a longtemps enseigné l’économie à l’University of Western Sydney. Depuis 2014, il professe à la Kingston University of London. Comme Paul Krugman,Prix Nobel d’économie, il est un familier des médias australiens et a mis en garde contre les risquesde crise financière dès les années 2000.

Les théorisations

néoclassiques

s’écroulent purement

et simplement en raison

de l’oubli volontaire des

groupes sociaux et des

antagonismes de classes

Steve Keen et« l’imposture économique »

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 7

Le mouvement de l’économie est faitde multiples et continuels déséquilibres. Lescontradictions s’inscrivent dans le processusdynamique du circuit économique.Steve Keen interroge : «  Pourquoi n’ont-ils pas vu venir la crise ? » et il répond endémontrant que « le prix n’est pas le bon »sous-entendu le prix d’équilibre, ce prix quine tient pas compte de la spéculation, ni desformes de la création monétaire et du crédit.De ces impasses découlent des « Méprisessur la grande dépression et la grande réces-sion(1) » – aux États-Unis, la crise dite de1929 est appelée «  Great Depression  » etcelle de 2008, « Great Recession » – pourcritiquer les visions à la fois de Ben Ber-nanke, l’ancien président de la Banque deRéserve Fédérale Américaine (FED) et desdirigeants des États-Unis.

Des alternatives existentPour comprendre les spécificités de ce capi-talisme à dominante financière dans lequelnous vivons, une forme particulière de capitalisme, il construit un petit modèlesimple d’économie monétaire dans lequel, àjuste raison, l’endettement privé joue le rôleclé. La création monétaire suinte de tousles pores des agents économiques. Ellen’est pas seulement dévolue à l’institutd’émission. Il fait vivre les théorisations de Keynes en lesnourrissant des travaux des autres écono-mistes à commencer par Joseph Schumpeteret Hyman Minsky et son hypothèse d’insta-bilité financière. Il faut insister sur l’incerti-tude profonde d’un monde capitaliste enpleine mutation. La crise systémique se tra-duit par des destructions profondes. Le monded’hier fait partie du passé. Le monde dedemain n’est pas encore construit. Une chose

est sûre, l’idéologie libérale ne permet pas decomprendre ces transformations. Les alternatives aux théorisations néoclas-siques existent, on commence à les rencon-

trer et c’est une grande nouvelle. Steve Keende son côté annonce une suite pour pour-suivre la réflexion.Ouvrons grand portes et fenêtres de la

théorie et des pratiques pour sortir de l’enfermement idéologique qui est lelot des gouvernements et des institutionsinternationales, pour renouer avec les voies

de la connaissance du monde qui nousentoure. n

(1) Titre d’un chapitre du livre de Steve Keen

Pour en savoir plus◗ Interview de Gaël Giraud, préfacier du livre

L’imposture économique, à retrouver sur le sitedu SNES : www.snes.edu.

◗ Prochaine conférence avec Steve Keen et GaëlGiraud le 16 juin à Paris : ESCP Europe – 79, avenuede la République, 75011 Paris (amphi Vital-Roux).

IL EXISTE DES ALTERNATIVES !

Les écoles de pensée qui permettent de sortir de l’ornière libérale

La réduction de l’économie à la micro-économie – l’économie

de l’entreprise – ne permet pas d’appréhender le mouvement

de l’accumulation du Capital et les dynamiques en cours

Pages réalisées par Micheline Rousselet,Nicolas Bénies et Stéphane Rio

◗ L’école autrichienne, surtout Joseph Schumpeter et son Histoire de l’analyseéconomique, son dernier grand livre. Très proche de l’école dominante, elleest en phase avec tous les aspects de l’économie néoclassique à une excep-tion près : l’obsession pour l’équilibre.

◗ L’école postkeynésienne différencie incertitude et risque et construit sesmodèles dans un environnement incertain en s’inspirant de Keynes et Kalecki.

◗ L’école sraffienne s’appuie sur la théorie de la valeur de Piero Sraffa de« production des marchandises par des marchandises ».

◗ La théorie de la complexité et l’éconophysique appliquent la dynamiquenon linéaire et la « théorie du chaos » existant en physique.

◗ L’école évolutionniste prend sa source dans les théories de Darwin. Elle traitel’économie comme un système en évolution.

Pour Steve Keen chacune de ces écoles a des atouts et des faiblesses, etaucune d’elle n’est assez forte ou assez complète pour prétendre à être la théorieéconomique du XXIe siècle.

Bibliographie : pour des alternatives théoriqueset pratiques au libéralisme

• Penser l’économie autrement sonne comme une invi-tation à sortir des ornières de la pensée encore dominante.Conversations avec Marc Lambrechts, le sous-titre, enlimite la portée. Paul Jorion est connu pour ses collabora-tions au Monde notamment et par ses cris d’alarme, avantaoût 2007, sur l’arrivée de la crise financière tandis queBruno Colmant, ancien banquier, croyait dur comme fer auxthéories néoclassiques. Ce « libéral défroqué » s’interrogesur la validité de ces théories économiques et sur lapossibilité de les dépasser. Sans y arriver. Jorion lui offrepourtant le terreau keynésien – qu’il partage avec SteveKeen –, un pas que l’ex-banquier n’arrive pas à franchir.

D’une lecture facile, celivre permet de poserles questionsqui fâchent... (Fayard).

• Marx politique, un livre collectif sous la direction deJean-Numa Ducange et Isabelle Garo, veut redonner vieaux concepts et à la méthode de Marx, méthode qui ne seréduit pas à l’économie politique. Une contribution, deGuillaume Fondu, analyse d’un œil critique l’économie poli-tique hétérodoxe tandis qu’Antoine Artous revient sur « lathéorie de la valeur » souvent mal comprise. Le plusnovateur, les recherches de Kevin Anderon sur lessociétés non occidentales dans les textes de Marx, icirésumées mais qui ont donné naissance à sa thèse :Marx aux antipodes, nations, ethnicité et sociétés nonoccidentales (Syllepse).

Voir aussi les livres dans les pages « Éco/Social » et sur WWW.SNES.EDU

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8 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

ACTUALITÉAPRÈS LE 19 MAI : LA MOBILISATION CONTINUE !L’actualité de la profession, qui a été aussi pendant quelques jours celle de tous les médiasnationaux, est marquée fortement par la journée de grève du 19 mai dans le second degré, avecdes taux de grévistes les plus importants qu’ait connus le collège depuis des années, même si legouvernement s’est acharné à les minimiser. Ce pouvoir démontre une nouvelle fois qu’il est prêtà nier l’évidence des réalités sociales pour inscrire son action dans les logiques d’austérité.

C’est pourquoi le projet de loi de finances2016 en cours de préparation sera l’objetde toutes les attentions. Le gouverne-

ment prépare le terrain en médiatisant la com-munication sur la dette qui justifierait la pour-suite des politiques d’austérité. Ce fut le cœurdes récents propos de la ministre de la Fonc-tion publique mise devant la réalité d’unebaisse de pouvoir d’achat des fonctionnaires.Les fédérations de fonctionnaires se sont, dece fait, adressées ensemble au président de laRépublique pour dénoncer trop d’années d’af-faiblissement de la Fonction publique, récla-mer une augmentation immédiate et généralede la valeur du point d’indice, et des mesuresde rattrapage pour les pertes subies. Elles ontégalement fait part de leur inquiétude faceaux conséquences de la loi relative à la nou-velle organisation territoriale, pour les usa-gers davantage éloignés des services publicscomme pour les personnels susceptibles demobilité forcée et de révision de leurs missions.

Contestation à tous les étagesLe ministère de l’Éducation nationale setargue d’avoir fait valoir ses spécificités etobtenu des délais de concertation avantd’éventuelles fusions d’académies, lesannonces étant prévues début juillet. La FSUet ses syndicats suivent attentivement ce dos-sier et font savoir, dans les différentes ins-tances, leur opposition à des fusions.

Nombreux donc sont les dossiers qui concer-nent directement la Fonction publique, enparticulier l’Éducation nationale. Le SNES-FSU suivra de près le traitement qui leur serafait dans le cadre du congrès du Parti socialistetenu à Poitiers du 5 au 7 juin. S’il est impos-sible à l’heure actuelle de savoir quel accueilsera fait à nos propositions, il est certain quele premier secrétaire du PS devra faire bien

plus qu’agiter l’étendard du dialogue socialpour nous convaincre qu’un engagement deFrançois Hollande aura au moins été tenu !

Et maintenant ?L’échec est patent dans le privé, de la loiMacron à la loi sur le dialogue social. Quantà l’éducation, le coup de force du Premierministre publiant des textes incriminés lelendemain même d’un mouvement socialimportant a constitué une véritable insultepour les personnels. Et mis en péril les pos-sibilités de discussion. Cette provocation n’a fait que renforcer ladétermination des personnels du second degréet l’intersyndicale a décidé d’une nouvellejournée de grève le 11. Les troubles qui ontmarqué le congrès de la FCPE, la contesta-tion du mode de gouvernance et d’une lignefédérale se résumant à un soutien incondi-tionnel au gouvernement, montrent qu’endépit du discours officiel les parents sontconscients des inégalités et difficultés defonctionnement que provoquera l’actuelleréforme du collège. C’est pourquoi il estimportant, avant et après le 4 juin, de mul-tiplier les contacts avec les parents et demontrer que, si une réforme est nécessairepour améliorer les conditions d’apprentissagedes élèves, celle-ci est loin d’être la bonne. n

Frédérique Rolet

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 9

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DÉCOMPTE DES GRÉVISTES,QUI A RAISON ?Au lendemain du 19 mai, une polémique est née entre le gouvernement et les syndicats à propos du décompte des personnels en grève. Pour traditionnelle qu’elle puisse paraître, cette querelle de chiffres n’en constitue pas moins un des éléments de la bataille actuelle.

Une fois encore, la communication desuns et des autres sur le décompte desgrévistes a mis en évidence de grandes

disparités entre les pourcentages donnés parle ministère d’une part et par le SNES-FSUd’autre part.Si le décompte du nombre de grévistes estpeu ou prou le même, c’est sur le nombred’agents à prendre en compte comme déno-minateur pour les taux que résident les dif-férences... et les désaccords.Le ministère prend comme référence l’ensemble des agents, qu’ils soient de ser-vice ou non.Ainsi, au niveau d’un établissement, pour cequi concerne les enseignants, c’est l’en-semble du corps professoral de cet établis-sement qui est pris en compte. Le tauxannoncé (le pourcentage issu du calcul dunombre de grévistes par rapport au nombretotal de professeurs) est donc celui desagents qui feront l’objet d’une retenue surtraitement.

Avoir effectivement coursLe SNES-FSU, considérant que faire grèvec’est cesser le travail, prend comme réfé-rence le nombre d’agents devant effective-ment travailler, les « attendus ».Ainsi au Collège Jean-Zay (voir tableau ci-

contre), nous ne prenons en compte pourcalculer le nombre de professeurs potentiel-lement grévistes que celles et ceux ayanteffectivement cours à une heure donnée et quine vont pas assurer leurs cours parce qu’ilssont en grève. Si vous n’êtes pas censé fairecours (pas à l’emploi du temps, en stage –

c’est hélas de plus en plus rare –, en arrêt detravail, en voyage scolaire...) vous n’êtes pascompté dans celles et ceux pouvant fairegrève. Le même principe s’applique pour les autrescatégories.Ces chiffres nous sont transmis par nos cor-respondants dans les établissements, secré-taires et trésoriers de S1 notamment, qui sou-vent les obtiennent auprès de la direction del’établissement.

Étonnant non ?Les deux logiques de décompte, celle duministère et la nôtre, s’opposent donc :

nous avons la conviction que notre méthodede décompte est plus proche de la réalité dela vie des établissements que celle duministère, purement financière, mais lagrève n’est pas le seul espace où ce hiatusse manifeste. n

Jacques Lacroix

Nombre Nombre Pourcentage Pourcentage

Collège de professeurs de professeurs Nombre de gréviste de grévistes

Jean-Zay dans ayant cours de grévistes selon selon lel’établissement à 9 heures (C) le ministère SNES-FSU

(A) (B) (C/A) (C/B)

50 30 20 20/50 = 40 % 20/30 = 66 %

EXEMPLE

Collège Commune Grévistes Attendus %

Collège François-Marie-Luzel Plouaret 12 18 66,67Collège Saint-Exupery Lesneven 12 34 35,29Collège François-Collobert Pont-de-Buis-les-Quimerch 8 18 44,44Collège du Château Morlaix Cedex 9 37 24,32Collège Paul-Langevin Guilvinec 9 13 69,23Collège Anna-Marly Brest Cedex 2 15 30 50,00Collège de Kerallan Plouzane 15 25 60,00Collège du Querpon Maure-de-Bretagne 14 17 82,35Collège Jacques-Prévert Romille 12 35 34,29Collège F.-R.-de-Chateaubriand Combourg 4 16 25,00Collège Jean-Monnet Janze 10 26 38,46Collège Martin-Luther-King Liffre Cedex 20 27 74,07Collège La Roche-aux-Fées Retiers 18 22 81,82Collège Gérard-de-Nerval Vitre Cedex 24 53 45,28Collège Françoise-Dolto Pace Cedex 25 40 62,50Collège Jean-Moulin St-Jacques-de-la-Lande 6 11 54,55Collège Andrée-Recipon Orgeres 15 25 60,00Collège Jean-Rostand Muzillac 7 24 29,17Collège Charles-de-Gaulle Ploemeur Cedex 7 16 43,75

La preuve par les chiffres : ci-dessus les relevés du nombre de grévistes pour un certain nombrede collèges de l’académie de Rennes effectués par les sections académiques SNES-Bretagne.

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10 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

ACTUALITÉRÉFORME DU COLLÈGE :C’EST TOUJOURS NONN’en déplaise au gouvernement et aux thuriféraires de la réforme du collège, la grèvedans les collèges était majoritaire le 19 mai. La publication du décret, dès le lendemain matin, est un affront à une profession qui se bat au quotidien pour les jeunes qui lui sont confiés et un coup porté au service public national d’éducation.

La communication ministérielle sur lestaux de grève participe d’une désinfor-mation destinée à minimiser l’importance

du refus de la réforme, mais aussi d’unevolonté de décourager les personnels endéconsidérant cette forme d’action. Il en estde même du discours sur l’ampleur de lamanifestation parisienne qui, si l’on compareavec les manifestations concernant le mêmepérimètre de personnes appelées à manifester(les personnels du second degré), est une desplus importantes depuis quinze ans. Une telleméthode est une véritable provocation et undanger pour le fonctionnement démocratiquede notre société.

Amplifier la mobilisationL’intersyndicale du second degré, réunie dèsle 20 mai, a réaffirmé sa détermination àobtenir l’abrogation des textes publiés (décretet arrêté) et la réouverture immédiate desdiscussions pour des améliorations du collègeau profit des élèves et de nos métiers. Ellea appelé les collègues à amplifier la mobili-sation en variant les modalités de l’actionpour conjuguer campagne d’informationdans les établissements et de signature dela pétition, tenue d’assemblées générales,dépôt de motions, rencontres avec les parents,interpellation des élus et distribution detracts... C’est dans cet esprit qu’elle a décidéd’appeler à une nouvelle journée de grèvele jeudi 11 juin, sans le SNALC qui entendlimiter l’action à la seule menace d’un boycott du brevet.

Sur tous les frontsLe SNES-FSU a multiplié les interventionsdans les médias aux niveaux national et local,et sur les réseaux sociaux, il s’adresse auxparents et aux élus et interpellera le Partisocialiste lors de la tenue de son congrès.Il s’agit bien d’imposer la voix des personnelsà une ministre qui refuse de les entendre ets’obstine à répéter que sa réforme est néces-saire parce qu’elle est juste, sans jamais expli-quer ce qui dans la nouvelle organisation

du collège créera justice sociale et égalité :les EPI installés au détriment des horairesdisciplinaires ? l’AP, sur le modèle de ce quine fonctionne pas au lycée ? la suppressiondes options langues anciennes accusées d’éli-tisme ? la diminution globale des horairesélèves sur l’ensemble des quatre années ducollège? l’organisation en cycle sans repèresannuels ? La globalisation des horaires de certaines disciplines ? la possibilité de modu-lation des horaires annuels ? l’amoncellementdes hiérarchies et la multiplication desréunions ? Si la ministre persiste dans son refus d’en-tendre ce que les personnels ne cessent delui dire, elle devra en assumer les consé-quences sur le calendrier de fin d’année sco-laire dans les collèges et la tenue des exa-mens. n Roland Hubert

LETTRE OUVERTE À LA MINISTRELe SNES-FSU et le SNEP-FSU se sont adressésà la ministre dans une lettre ouverte, luidemandant l’abrogation des textes publiés le20 mai et la reprise immédiate des discus-sions, et la mettant en garde contre les consé-quences de son entêtement sur l’organisationde la fin de l’année scolaire et le déroulementdes examens.

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 11

UN MOIS DE JUIN DANS L’ACTION Le refus de la réforme doit s’accompagner de l’affirmation de nos revendications en termes deconditions de travail, d’allégement de nos services et de possibilités de concertation, de maintiend’horaires disciplinaires suffisants et définis nationalement, de respect de notre liberté pédagogique,de formation initiale et continue…

Rennes : un exemple de rendez-vousDans l’académie, le SNES-FSU organise des rassemblements les mercredis 3 et 17 juin à 15 h 30 au rectorat de Rennes Le 3 juin : rassemblement des professeurs de langues vivantes, delangues régionales et de langues anciennes. Suppression des bilangues,des options breton et gallo, du latin, des classe euros... autant de dis-ciplines directement menacées par la réforme avec un effet inévitableà terme sur les effectifs en lycée. « Qu’allez-vous faire de nous à larentrée 2016 ? » est la question que nous vous proposons de venirposer directement au rectorat ce 3 juin. Le 17 juin : rassemblement des professeurs de technologie, SVT etsciences physiques et chimie. Réduction et globalisation des horairesdisciplinaires, suppression des dédoublements réglementaires, sup-pression de la DP3... C’est non ! Venez le dire haut et fort dans lacour du rectorat. Une audience avec le recteur sera demandée pour chaque journée et lapresse sera invitée à venir couvrir ces événements. Des déplacementsen car au départ de Brest et Quimper seront mis en place.

Journée nationale de mobilisation dans les collèges le jeudi 4 juinLe SNES-FSU vous suggère quelques pistes à mettre rapidement en débatavec vos collègues pour faire du 4 juin la journée, voire la nuit, des collèges.  ◗ Heure d’information syndicale à prendre dans la journée. ◗ Distribution de tracts auprès des parents d’élèves et des futurs parentsd’élèves (nous vous adresserons un modèle).◗ Invitation des parents d’élèves du collège mais aussi des écoles dusecteur et des élus locaux à participer à une réunion en fin de journéepour débattre de la réforme. À un chef d’établissement opposé à toutemise à disposition d’une salle dans le collège, répondez qu’une occupationla nuit est également possible s’il le préfère ! Des solutions alternativesdans des salles municipales sont aussi à étudier en dernier recours. Encas de blocage, faites appel aux militants du SNES-FSU. ◗ Inviter la presse locale.◗ Les militants des sections départementales et académique se rendentdisponibles pour être à vos côtés : n’hésitez pas à les solliciter pour le4 ou toute autre date proche.

La journée du 4 juin doit être une puissante journéenationale des collèges sous des formes variées, pouvantaller de la simple prise d’une heure d’information syn-dicale à une réunion rassemblant personnels, parentset élus locaux pour débattre des besoins du systèmeéducatif et des évolutions nécessaires du collège, enpassant par l’envoi d’un communiqué de presse ou latenue d’un rassemblement devant l’inspection acadé-mique ou le rectorat. La question des suites de l’action tout au long du moisde juin doit être mise en débat avec le souci de rassemblerle plus largement possible et de permettre à tous ceux

et celles qui s’opposent à cette réforme de trouver leurplace dans le mouvement d’ampleur que nous devonsconstruire. Certains ont déjà fait le choix de limiter l’ac-tion à un blocage du DNB, au risque de diviser la pro-fession et de perdre l’adhésion, montrée par plusieurssondages, de l’opinion publique à notre refus de laréforme. Pour le SNES-FSU, la tenue des examensne saurait stopper un mouvement social puissant maisl’instrumentalisation des examens ne peut être unmoyen de lutte efficace parce qu’elle pénalise en pre-mier ceux que nous défendons dans notre rejet de laréforme : les élèves.

La réussite de cette journée de grève et d’action est indispensablepour amplifier le rapport de forces et faire taire tous ceux qui,au ministère ou dans le débat public, expliquent doctement queles opposants à cette réforme seraient minori-taires et guidés par une vision élitiste du collègequi rejette les élèves les plus en difficulté, et sesatisferaient des inégalités sociales et scolaires.

Il ne s’agit pas d’une grève de plus, mais bien de montrernotre détermination et que, contrairement aux déclarationsgouvernementales, la page n’est pas tournée avec la publi-

cation du décret et de l’arrêté. D’autres décretsen leur temps ont été abrogés (décret Robiensur les statuts, décret Chatel sur l’évaluation desenseignants pour les plus récents).

SIGNER ET FAIRE SIGNER LA PÉTITIONSigner et faire circuler le plus largement pos-sible la pétition intersyndicale pour un « autrecollège 2016 » : http://unautrecollege2016.net,élément central de la mobilisation qui doit être

proposée le plus largement possible. Pour ceux qui lepréfèrent, une version papier est téléchargeable sur lesite (à renvoyer au SNES, 46, avenue d’Ivry, 75647Paris Cedex 13).

GRÈVE NATIONALE INTERSYNDICALE

4 JUIN : JOURNÉE DES COLLÈGES

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12 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

ACTUALITÉPROJETS DE PROGRAMMES :CONSULTATIONS À INVESTIRLes projets de programmes des cycles 3 et 4 élaborés par le Conseil supérieur des programmes (CSP)sont en consultation du 11 mai au 12 juin 2015(1) : ils seront ensuite amendés par le CSP.

SCIENCES ET TECHNOLOGIE :L’ÉCLIPSE MÉDIATIQUE... L’opinion a beau se focaliser sur les programmes d’histoire et sur la question des langues anciennes, des attaques tout aussigraves, mais plus insidieuses, menacent d’autres disciplines.

Le contexte de la réforme du collègeincite peu à s’investir dans cetteconsultation. C’est pourtant une occa-

sion supplémentaire pour donner son avissur la réforme elle-même, certaines ques-tions permettant une expression libre.Il est aussi nécessaire de s’en emparerpour faire évoluer les textes, enjeu crucialpour nos métiers et la formation des jeunes.

Des éléments de réponsesLe questionnaire ministériel est très géné-ral et pose peu de questions sur la perti-nence des contenus à enseigner. Le SNES-FSU vous propose quelqueséléments de réponses aux questions les plus lourdes d’enjeux pournos élèves, nos métiers et pour le système édu catif à l’adresse sui-vante : www.snes.edu/ Programmes-consultation.html.La demande du SNES-FSU de repères annuels dans toutes les disciplinesn’a pas été entendue et les « documents explicatifs » complémentairesmis en ligne – qui n’auront aucune valeur réglementaire – n’y répondentpas entièrement. Les enseignants risquent de passer beaucoup de tempsen concertation. En outre, les élèves qui devront changer d’établissementen cours de cycle risquent de travailler certaines notions, thèmes ou

problématiques plusieurs fois, sans jamaisen travailler d’autres qui figurent dans lesprogrammes. Quant à la cohérence néces-saire entre les programmes, pour per-mettre un travail interdisciplinaire, ellen’est pas au rendez-vous. Le projet de programme du cycle 4 pré-sente en annexe des pistes pour un travailinterdisciplinaire qui méritent d’êtredébattues, retravaillées, et qui gagneraientà être inscrites dans les programmes dis-ciplinaires. Cette conception de l’inter-disciplinarité nous paraît plus intéressante

que les huit thèmes d’EPI imposés par le ministère. De façon générale, ces projets ne sont pas aboutis et certains pro-grammes sont encore trop lourds et/ou inopérants. Soucieux de se fonder sur l’expertise des enseignants, le SNES-FSUorganise sa propre consultation qui lui permettra d’intervenir entant que syndicat majoritaire et représentatif de la profession :http://www.snes.edu/Enquetes-SNES-sur-les-projets-de-programmes.html. n Sandrine Charrier, [email protected]

(1) http://eduscol.education.fr/consultations-2014-2015/events/college

La réforme du collège et certains projetsde programmes portent des attaquessévères à l’enseignement des sciences et

de la technologie au collège... dans un silencemédiatique assourdissant.

Des conditions d’enseignement dégradéesLes horaires de physique-chimie et de tech-nologie en Troisième sont diminués d’unedemi-heure – soit une perte de 25 % du tempsd’enseignement pour ce niveau ! La « contre-partie » est l’apparition d’un bloc « scienceset technologie » de 4 heures en Sixième (aulieu d’1 h 30 de SVT et d’1 h 30 de techno-logie), mais sans mention de groupes à effec-tifs réduits dans les grilles horaires. Une « concurrence » entre les disciplines vade fait s’installer. Elle mettra les collèguesen grande difficulté pour répartir les horaires

et porte le danger d’une mise en place d’un« Enseignement intégré de sciences et detechnologie (EIST) », pourtant rejeté par lamajorité de la profession. Il est en outre illu-soire de compter sur les « dotations horairessupplémentaires » de 3 heures par classe pourtravailler en groupes en sciences ou techno-logie tant la bagarre va être âpre pour lesrépartir entre les différentes disciplines et lesenseignements complémentaires (EPI ou AP).

Des projets de programmes à revoirLes projets de programmes prolongent cetteoffensive de l’EIST au cycle 3 (CM1-CM2-Sixième). Un unique programme de « scienceset technologie » incite dès l’introduction à lamise en place de l’EIST. Cette structurationest révélatrice d’une volonté d’occulter lesdifférences fondamentales de démarche entreles sciences et la technologie. Les programmes

de cycle 4 sont aussi problématiques (voirl’analyse sur le site du SNES-FSU à l’adressewww.snes.edu/Projets-de-programmes-du-college-premiers-elements-d-analyse.html) :manque de repères en sciences physiques,structuration et surtout liberté de program-mation sur l’ensemble du cycle pour les SVT,optique très réductrice pour la technologie. Prenons la parole ! Exprimons-nous lors dela consultation ministérielle1, sans oublier derenseigner les enquêtes du SNES-FSU :http://www.snes.edu/Enquetes-SNES-sur-les-projets-de-programmes.html n

Sandrine Charrier et Xavier [email protected]

(1) http://eduscol.education.fr/consultations-2014-2015/events/ college

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 13

MISSIONS PARTICULIÈRES :HIÉRARCHIES INTERMÉDIAIRES ?

Le ministère élargit le champ de ces mis-sions sous la forme de coordination dediscipline, nécessaire au bon fonctionne-

ment des enseignements dans les établisse-ments. Mais sont ajoutées aussi d’autres mis-sions particulières, dont certaines peuventconduire à l’instauration de hiérarchies inter-médiaires.

La vigilance de tous s’imposeAinsi, les missions de coordonnateur de cycleou de niveau prennent-elles un sens particulierdans le cadre de la réforme du collège : l’au-tonomie de gestion prévue multipliant lesréunions de toute nature (pédagogique, deniveau, de cycle, conseil écoles-collège...),

le contenu de ces missions risque de créerdes pseudo-adjoints au chef d’établissement.

Contenu inquiétantLe contenu de ces missions empiète claire-ment sur les missions des autres personnelsde l’établissement (personnels de direction,CPE...) ou des autres professeurs. Parexemple, la mission du coordonnateur deniveau d’enseignement prévoit qu’il « coor-donne et anime le travail éducatif deséquipes du niveau [...], coordonne la miseen place de liens étroits avec les parents ».Quant au coordonnateur de cycle, il « contri-bue à l’animation et à l’organisation desréunions d’équipe et des conseils d’ensei-

gnement consacrés au projet  » ou encore« contribue à la mise en place de la liaisonécole collège ».Le SNES-FSU appelle à refuser et combattrela mise en place de telles missions nuisiblesau fonctionnement serein des équipes péda-gogiques et éducatives, et contraires au res-pect de la liberté pédagogique. n X. M.

ORS : VIGILANCE LORS DES CONSEILS D’ENSEIGNEMENT

Reprenant les principes fondateurs des décretsde 1950, en particulier la définition hebdoma-daire du service en heure d’enseignement, il

donne une vision plus complète du métier. Il dis-tingue, en plus du service d’enseignement, les mis-sions qui y sont directement liées de celles ditesparticulières qui peuvent être attribuées sur la basedu volontariat.Lors des conseils d’enseignement de préparationde la rentrée 2015, il faudra veiller à la bonneapplication du nouveau système de décompte desservices. Le décret 2014-940 introduit une visionégalitaire pour décompter les heures d’enseigne-ment dans le service en supprimant les notionsde classes parallèles ou d’heures à effectifs réduitset en généralisant le système des pondérations.En cela, il doit conduire à réduire les inégalitésde traitement entre les établissements et les académies.

Calcul des servicesDorénavant, sont pondérées toutes les heures d’enseignement effec-tuées dans un établissement REP+, ou en BTS, ainsi que les dix pre-mières heures en cycle terminal : ces pondérations constituent uneréduction progressive du service hebdomadaire d’enseignement.Le décret prévoit aussi trois situations dans lesquelles le maximum deservice est réduit : en cas de complément de service dans un autre éta-

blissement d’une autre commune ou de servicesur trois établissements, en cas d’attribution del’heure dite « de vaisselle » en collège. Le servicepeut aussi être allégé en cas d’exercice de missionsparticulières.Le décompte individuel du temps de serviceest établi après application des pondérationset prise en compte des réductions ou allége-ments. Les éventuelles heures supplémentairessont calculées par différence entre ce temps deservice individuel et le maximum de servicedu corps. Pour vous aider dans ces calculs, le

SNES-FSU joint à cette US une publication spéciale.

Halte à la réunioniteLe système de pondération a pour objet de « tenir compte des spé-cificités en matière de préparation et de recherches...  » ou, enREP+, « de tenir compte du travail en équipe ». Le temps libérépar l’application des pondérations n’a aucune vocation à être comp-tabilisé et encore moins « compensé » : les professeurs sont maîtresdes modalités d’organisation de ce temps. n Xavier Marand

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Préparation de la rentrée 2015 : tout sur lesobligations réglementaires des professeurs, lesmodalités de calcul des services… Dans la publicationspéciale jointe à ce numéro.

À la rentrée 2015, entrera pleinement en vigueur le décret 2014-940 définissant nos obligationsréglementaires de service.

Le décret définissant nos obligations de service instaure les « missions particulières ».Attribuées sur la base du volontariat, ces missions reprennent les missions de gestion des cabinetsd’histoire-géographie, des laboratoires de sciences, de technologie et de langues vivantes quiexistaient, sous certaines conditions, dans les décrets de 1950.

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14 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

ACTUALITÉ

Tout régime confondu, les retraités ontperçu une pension moyenne de1 306 euros brut mensuels (993 euros

pour les femmes contre 1 642 euros pourles hommes).Selon une étude du ministère des Affairessociales, les pensions de retraités ont reculéen euros constants (calcul tenant comptede l’inflation) entre 2008 et 2013, et de0,9 % par rapport à celles de 2012, tandisque le COR signale le décrochage de 1 %par an des pensions par rapport au salairemoyen et ce dès maintenant. Et le gouver-nement a annoncé la poursuite du gel despensions jusqu’en 2016.

Quelle équité !L’enjeu des négociations ARRCO-AGIRC,outre les répercussions catastrophiques pourles retraités du privé ou les polypension-nés de plus en plus nombreux parmi noscollègues, est évident pour les retraités dupublic : les accords ARRCO-ARGIC serventd’argument au gouvernement Valls pours’attaquer aux pensions des agents de laFonction publique et continuer à en faire unevariable d’ajustement. Ainsi la presse s’em-pare-t-elle des propositions du MEDEF derecul de l’âge effectif de départ en retraite à67 ans pour demander l’alignement dupublic sur le privé. C’est dire si le pouvoird’achat, déjà réduit par les mesures et

réformes successives, est mis à mal alors queles dépenses contraintes augmentent.Autre dossier brûlant : la mise en œuvre dela loi dite de vieillissement. Certes le gouvernement assure de son effectivité dèsjanvier 2016, mais les débats dans lesassemblées ne sont pas au calendrier par-lementaire.

À destination de l’ÉlyséeLes retraités attendront encore le bénéficedes quelques mesures prévues.

Face à ces deux grandes questions, l’inter-syndicale a décidé de l’envoi d’une carterappelant les revendications des retraitésà François Hollande, autour du 1er octobre,avec conférence de presse, demande d’au-dience et remise des cartes à l’Élysée.

Le SNES-FSU appelle lesretraités à signer, faire signerles cartes et à les renvoyer àleur section départementale ouacadémique. n

Marylène Cahouet

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INSTITUT DE RECHERCHES DE LA FSUPROCHAIN SÉMINAIRE LE 3 JUINDans le cadre du Chantier de recherches « Disciplines », le prochain séminaire portera sur les savoirsdisciplinaires et la mise en cohérence des savoirs entre les disciplines.

L’actualité du projet de réforme du col-lège pose de manière évidente lanécessité d’une réflexion approfon-

die sur la question des disciplines, de leurrôle dans l’éducation des élèves et du sensà donner aux relations jugées nécessairesentre ces disciplines. La recherche d’uneconstruction cohérente des savoirs sco-laires ne peut se contenter d’organisa-tions basées sur des liens thématiquessuperficiels.

Réflexion sur l’interdisciplinaritéLe séminaire s’attachera à discuter dela nécessité d’un ancrage des savoirsdans des pratiques de référence bienidentifiées et d’une analyse claire de la

nature des liens entre les domaines desavoirs et de problèmes. L’enjeu est delutter contre des fausses évidences qui,par leurs simplifications outrancières,entravent la réflexion sur l’interdis -ciplinarité.Ce séminaire sera marqué par l’interven-tion de Bernard Rey, professeur ensciences de l’éducation à l’Université deBruxelles. Il aura lieu mercredi 3 juin2015, de 10 heures à 16 h 30 dans leslocaux du SNEP-FSU au 76, rue des Ron-deaux, 75020 Paris.Inscription gratuite, mais obligatoire.Envoyez un courriel indiquant votre nomet prénom à [email protected] n

RETRAITÉS : LA BONNE ADRESSEEn France, 15,6 millions de retraités (16,7 en comptant les titulaires de pension de réversion)voient leur situation se dégrader depuis des années.

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 15

Avec la séquence 4, «  rénover lesgrilles  », la négociation sur les Par-cours professionnels, les carrières et

les rémunérations (PPCR) se heurte à la fai-blesse du financement dégagé pour l’amé-lioration des carrières. L’ensemble des orga-nisations syndicales s’est donc adressé auPremier ministre afin qu’il revoie ses pro-positions. Deux types de mesures étaientproposés en vue de la réunion du 19 mai.En premier lieu, il est envisagé un transfertréduisant les indemnités pour augmenter letraitement indiciaire. Représentant unapport de 9 points en catégorie A, de 7 enB et de 4 en C, la mesure qui va dans le bonsens est cependant bien trop limitée pour«  rééquilibrer la part de la rémunérationindemnitaire au profit de l’indiciaire  ».Utile pour la pension de retraite, elle n’ap-porte cependant rien dans l’immédiat sur lafiche de paie. En second lieu, des pointsd’indice seraient ajoutés aux différentséchelons de la grille, avec parfois un allon-gement de la carrière.

Déposé depuis deux ans à l’Assembléenationale, le projet de loi n'est toujourspas inscrit à l’ordre du jour du Parle-

ment. Le gouvernement choisit de le recen-trer sur les valeurs et la prévention desconflits d’intérêt, la nouvelle version devantêtre adoptée par le Conseil des ministres du17 juin pour un débat à l’Assemblée en sep-tembre.Le Parlement n’aurait pas le temps d’exa-miner le projet de loi initial, dont tout laissepourtant à penser que ce serait le seul duquinquennat à s’intéresser à la Fonctionpublique. La nouvelle version est donc res-serrée sur vingt-cinq articles, renvoyantplusieurs dispositions dont celles relativesà la mobilité à une adoption par la voied’ordonnances. D’autres points seraienttraités par le biais d’amendements que legouvernement déposerait au long du débatparlementaire. La méthode est penaudepour un projet de loi qui en 2013 devait

marquer le 30e anniversaire du statut desfonctionnaires, en affirmer la pertinence etla modernité.La version examinée au Conseil commun dela fonction publique (CCFP) prévoyait queles futurs fonctionnaires devraient s’engagerà respecter la loi. La FSU a obtenu le retraitde cette disposition au profit d’une infor-mation faite à tout nouveau recruté. Mais lamise en exergue du manquement que consti-tue la manifestation de ses croyances reli-gieuses dans l’exercice du service demeure,faisant du manquement à cette obligation leseul à être explicité dans le statut.

Donner du sensPour la FSU, l’ensemble des obligationsdes fonctionnaires, dont le respect de lalaïcité, doit faire l’objet des mêmes actionsd’information et d’explicitation. L’enjeuest de leur donner du sens auprès des agentset de la population.

Le gouvernement n’a pas inscrit dans cetexte la prolongation de deux ans des recru-tements réservés en application de la loiSauvadet, annonçant des amendements dugouvernement. La FSU a rappelé qu’unesimple prolongation ne suffit pas et que lebilan contrasté des titularisations devaitêtre l’occasion d’une nouvelle négociation.Elle organisera l’intervention des personnelspour que ce rendez-vous ne soit pas unnouveau rendez-vous manqué. n A. F.

Très étalées dans le tempsPour la catégorie A, les propositions gou-vernementales ne sont formulées que surla grille des attachés d’administration, sansqu’aucune précision n’ait encore été appor-tée sur les principes de la transposition desmesures aux corps enseignants.D’ampleur limitée, ces propositionsseraient étalées jusqu’en 2022,seules le transfert de primes enpoints étant programméavant 2017.Dénonçant l’insuffisance desmesures et leur étalement, lesorganisations syndicales se sontadressées ensemble le 13 maiau Premier ministre, lui deman-dant de formuler de nouvellespropositions à la hauteur des attenteset des enjeux pour la Fonction publique etindiquant que la réunion du 19 mai devait setenir sur un autre ordre du jour(1).Matignon dit avoir entendu l'interpellation.Restera à apprécier la réponse qui sera appor-

tée sur lesgrilles, comme le

texte du protocole dontaucun projet de rédaction n'a

encore été soumis aux organisationssyndicales. En effet, la FSU s'efforce

dans la négociation de récuser la logique dumanagement très présente dans les problé-matiques de l'administration. n Anne Féray

(1) Ce qui a été le cas. Voir les comptes rendus www.fsu.fr

PROJET DE LOI DÉONTOLOGIEBIS REPETITAÉlaboré depuis 2013, le projet de loi relatif à la déontologie, aux droits et aux obligations des fonctionnaires, traîne toujours.

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LA BALLE EST DANS LE CAMPDU GOUVERNEMENTLes négociations sur la fonction publique butent sur le financement. Tous les syndicats s’adressent ensemble au Premier ministre.

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ACTUALITÉCHORALE : A QUELLE SAUCE À LA RENTRÉE ?De nouveaux textes(1) entrent en vigueur dès la rentrée 2015 : l’heure de chorale effective sera prise en compte dans le service des enseignants.

SEGPA : RASSURÉS ?Après avoir tenté sans succès cet hiver de dissoudre les SEGPA dans les classes ordinaires, leministère semble être revenu à davantage de raison. Le dernier projet de circulaire est tout aussiinapplicable que les précédents, mais moins provocateur.

Le groupe de travail ministériel sur lessections générales d’enseignement adapté(SEGPA) a commencé ses travaux il y

a maintenant un an. Sous couvert de mise àjour des circulaires de 2006 et de 2009, ils’agissait de transformer ces sections en dis-

positifs «  inclusifs » : suppression de laSixième SEGPA au titre de la continuité avecl’école instaurée par le cycle 3 (CM1-CM2-Sixième), et « organisation moins cloison-née » en SEGPA et classe ordinaire pour lecycle 4 (Cinquième-Quatrième-Troisième).La FSU a fait valoir la pertinence de la struc-ture SEGPA pour les élèves aux difficultésscolaires graves et durables en l’état actueldu collège. Elle s’est heurtée en cela auxtenants d’une inclusion à tout crin, fusse-t-elle dommageable aux élèves, le SE-UNSAet le SGEN-CFDT.

Vigilance nécessaireEn son état actuel, si le projet maintient lastructure et ses quatre divisions, de la Sixièmeà la Troisième, il est loin d’avoir abouti. L’idéed’une double inscription des élèves dans une« classe de référence » ordinaire semble avoir

été abandonnée, mais les indicateurs de pilo-tage demeurent axés sur « l’inclusion ». L’ar-ticulation entre les modalités de « préorien-tation » en Sixième puis d’orientation enCinquième n’est pas claire. Les obligationsdes différents personnels (professeurs desécoles et du second degré, psychologues sco-laires et CO-Psy, etc.) sont à préciser. Le pro-blème de la nature des stages et de leur durée,pour des élèves plus jeunes qu’auparavant carn’ayant pas redoublé, n’est pas réglé, etc.Au-delà du discours du ministère, qui se veutrassurant, des velléités de fermetures deSixièmes SEGPA subsistent dans certainsdépartements. Aucun texte réglementaire nele justifie. Le SNES avec la FSU restent vigi-lants tant sur la teneur des textes à venir quelocalement, en s’opposant aux fermetureslors des Comités techniques. n

V. Sipahimalani, V. Bellegueulle© T

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En complément, un allégement de serviceou une IMP(2) pourra être attribué par lerecteur. Ces nouvelles dispositions consti-

tuent une régression pour les collègues quiavaient jusqu’alors deux heures décomptéesdans leur service.À partir de la rentrée 2015, chaque heureeffective de chorale devra obligatoirementfigurer dans la VS. Elle devra donc être pon-dérée en REP+ et en lycée. L’heure de chorale ne devra plus être rému-nérée en HSE (ce qui pouvait être parfois lecas), puisqu’elle est reconnue par décretcomme une heure d’enseignement.

Allégement de service ou IMPAu-delà de l’heure dans le service, la priseen compte de l’« implication dans les mani-festations et rencontres liées à l’activité deschorales » ouvre la possibilité d’un allégementde service ou d’une IMP attribuée par le rec-teur, sur proposition du chef d’établissement.L’IMP éventuelle pourra être d’un taux dif-férent d’un établissement à l’autre, « en fonc-tion de la charge de travail effective »(3). La circulaire de 2011 est toujours en vigueur.

C’est un point d’appui pour obtenir la recon-naissance de cette charge de travail par unallégement de service d’une heure. LeSNES-FSU s’exprimera auprès des recteursen ce sens, comme il l’a déjà fait auprès duministère. En cas d’attribution d’une IMP, le SNES-

FSU revendique qu’elle soit au minimum àtaux plein(4). Il a déposé des amendements ence sens lors des discussions sur les textes ; leministère ne les a pas retenus.

Le SNES-FSU appelle à être vigi-lants lors de la consultation du CAafin que ces nouvelles dispositionsne conduisent pas à un alourdis-sement de la charge de travail

(prise en charge d’une classe supplémentaire).Il soutient les collègues qui s’exprimerontlors des concerts de fin d’année pour dénoncerces nouvelles dispositions et ceux qui refu-seraient de participer notamment à l’opérationministérielle « l’École en chœur ». n

Sandrine Charrier

(1) Décret n° 2014-940 du 20 août 2014 relatifaux obligations de service et les circulairesn° 2015-058 et n° 2015-057 du 29-4-2015 concer-nant les modalités d’attribution de l’indemnité pourmission particulière.(2) Indemnité pour mission particulière (3) Cinq taux annuels forfaitaires possibles :312,50 €, 625 €, 1 250 €, 2 500 € et 3 750 €. (4) 1 250 €.

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 17

DÉFENSE DES SERVICES PUBLICS : TOUS À GUÉRET

FICHAGE DES ÉLÈVES À BÉZIERS :QUAND LE FN SE DÉVOILE...À la fois bête et raciste : le maire de Béziers a récemment admis à la télévision avoir recenséles élèves musulmans de sa ville... Comment ? Et pourquoi ?

Dix ans après une première manifestationà Guéret déjà, dans cette ville symbole,il s’agit non seulement de défendre les

services publics, mais de manifester notreconviction qu’ils sont toujours plus néces-saires  dans la lutte contre les inégalités etpour plus de cohésion sociale : crise qui exigeplus de solidarité, pour répondre à unedemande sociale plus forte.

Converger…Les réformes éducatives fondées sur le déve-loppement de la concurrence produisent tou-jours plus d’inégalités. Ainsi, la réformedes collèges, en renvoyant à chaque collègele soin de décider d’une grande partie dece qu’il faut enseigner, participe de ce mou-vement de dégradation du service publicd’éducation. À Guéret, nous manifesteronsavec la Convergence nationale des collectifsde défense et de développement des servicespublics qui regroupe des organisations syn-dicales, des associations, des élus et descollectifs (défense des hôpitaux de proxi-mité, convergence rail...), et d’autres secteursqui luttent pour sauvegarder et développer

… être ambitieuxNous ne sommes pas des nostalgiques,nous pensons que nous sommes plusforts en développant des propositionspour que le second degré amène tous lesjeunes à un haut niveau de qualification,ce qui n’est pas le cas actuellement.L’ambition de l’initiative de Guéret estaussi d’initier des assises pour le servicepublic du XXIe siècle, rejoignant ainsi nospréoccupations. Agir et débattre avecd’autres est une nécessité pour faire évo-luer l’opinion, et peser ainsi pour que lesservices publics remplissent totalementleurs missions dans l’intérêt général. n

Michel Galin

RENSEIGNEMENTS PRATIQUES Manifestation nationale, samedi 13 juin,14 heures. Transport : car, covoiturage – prendrecontact avec votre section départementale FSUou www.convergence-sp.org. Assises pour larédaction d’un manifeste des services publicsdu XXIe siècle, à Guéret toujours !

La rigueur de la méthode en dit long :grâce aux prénoms des enfants, censésindiquer leur confession (sic). La vieille

rengaine nauséabonde arabe = musulman =étranger est bien là... Et si elle est là, alors on ne peut que craindrele pire quant aux motivations de ces pseudo-statisticiens qui s’en prennent à des enfantset ignorent le principe de laïcité. Le FN remet en cause la notion même denation et de nationalité qui fonde notreRépublique : non pas toutes et tous iden-tiques, mais toutes et tous égaux. C’estla définition de la nation qui est remiseen cause, un mot que les défenseurs dela République doivent réinvestir sans tarder,sous peine de s’en voir confisquer l’idéemême.

Dérives dans les villes FNLe FN doit être combattu partout et jusquedans l’École. Dans cette perspective, la FSU,avec d’autres syndicats (CGT, Solidaires,UNEF, UNL et FIDL), mène une grandecampagne pour déconstruire les idées duFront National et lutter contre les dérivesque connaissent les mairies gérées par leFN. Le collectif « Pour un avenir solidaire »a choisi la ville de Béziers pour dresser le9 mai, un état des lieux et présenter lesoutils syndicaux élaborés au cours des derniers mois. La FSU y a pris toute saplace et a participé aux manifestations quiont suivi. Dans un tel contexte, l’école est etdoit rester un lieu d’intégration et de respectde l’autre. n

Aurélia Sarrasin

Avec la FSU, le SNES participe à l’initiative nationale de la Convergence nationale des collectifs de défense et de développement des services publics qui aura lieu à Guéret le 13 juin.

le service public. Nous pourrons y faire par-tager et porter ce que voulons pour le sys-tème éducatif.

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En Grèce, depuis 2008i

Les pauvres,premières victimesde l’austéritéUne étude de l’institut H. Böckler a établique les hausses d’impôts appliquées enGrèce depuis le début de la crise ont aug-menté de 337 % pour les pauvres tandisqu’elles n’ont augmenté que de 9 % pourles plus riches. Le revenu moyen avantimpôt est passé de 23 100  € en 2008,avant la crise, à 17 900 € en 2012, soit unebaisse de 23 %. Sur les inégalités, leconstat est pire encore.

Grèce toujoursi

10%Les 10 % les plus pauvres

ont perdu 86 % de leur revenu qui est

passé de 8 462 €à 1 150€ en moyenne.

Or noiri

Suprématie croissantedes États-UnisIls sont encore en 2014 numéro un mondialpour la production d’hydrocarbures, ausens large (pétrole brut, liquides de gaznaturel, condensats, produits pétroliers ycompris biofuels, gaz naturel). La montéeen puissance du gaz et du pétrole deschiste outre-Atlantique a permis auxÉtats-Unis de dépasser, depuis 2012, laRussie, longtemps leader du secteur. Leurproduction de pétrole brut (y compris lesliquides de gaz naturels), a atteint 11,8 mil-lions de barils par jour (mb/j), rattrapantcelle de l’Arabie Saoudite (12,4 mb/j)

Grande-Bretagnei

« Brexit » ?D. Cameron, le gagnant des électionslégislatives du 7 mai, avait promis unréférendum sur le maintien du pays dansl’UE. Le «  Brexit  » (British et exit), estnotamment soutenu par les euroscep-tiques du United Kingdom IndependenceParty (UKIP –  le Parti de l’indépendancedu Royaume-Uni) et certains membres duParti conservateur. Selon le centre deréflexion  Open Europe, la Grande Bre-tagne, si elle sortait de l’Union euro-péenne (UE), verrait son PIB amputé demanière permanente de 2,2 % d’ici à2030 ; une perte que des accords delibre-échange avec ses anciens parte-naires pourraient pour partie compenser.

Gaz de schistei

Bruxelles ouvrela porte aux lobbiesLa Commission européenne vient de créerun groupe d’experts chargés de collecter

ECO/SOCIAL

18 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

OUVRAGE : LES IDÉES FAUSSES SUR LA DETTE PUBLIQUE

De la nécessité de sortirde l’étau de la detteLe Collectif pour un Audit Citoyen de la dette publique(1) avait publié en mai 2014 un premierrapport d’audit citoyen qui montrait que 59 % de la dette publique française pouvait êtreconsidérée comme illégitime (du fait des taux d’intérêts excessifs et des cadeaux fiscaux).Le Petit guide contre les bobards médiatiques(2) édité en avril dernier vise cette fois à démonterles contre-vérités véhiculées dans les discours officiels sur la Grèce et à en tirer quelquesleçons pour la France et l’Europe.

Depuis que les Grecs ont massivement rejeté le25 janvier les politiques d’austérité qui ontplongé leur pays dans la misère et la récession,

le nouveau gouvernement sorti des urnes se heurteà l’intransigeance des institutions et des dirigeantsde l’Union européenne qui font tout pour asphyxierla Grèce sur le plan financier.Leur objectif est d’empêcher ce pays de sortir de lalogique des « memorandums »(3) et de dissuader àl’avenir tout peuple de porter démocratiquementune alternative à l’austérité. Ils ont en effet comprisque la victoire de Syriza avait ouvert une brèchecontre l’Europe de la finance et le diktat des plansd’austérité imposés par la Troïka (Commissioneuropéenne, BCE et FMI). Une brèche dans laquelled’autres peuples pourraient s’engouffrer pourconstruire une autre Europe.

Une dette, ça roule... ou ça se restructureMalgré l’opposition de la Commission européenne,le Parlement grec a voté une loi d’aide humanitairecoûtant plusieurs centaines de millions d’euros.Mais sa présidente a surtout lancé une commis-sion d’audit de la dette publique grecque car lepoids de la dette (190 % de son PIB) empêche demener une véritable politique alternative.La Grèce demande donc un allégement substantielde sa dette publique. Mais des voix se sont immé-diatement élevées de toutes parts pour relayer l’exi-gence qu’elle paie l’intégralité de sa dette au nom dela doxa selon laquelle « quand on doit, on rem-bourse ». De grands médias ont également tenté

de faire croire que l’annulation de la dette grecquelaisserait à chaque contribuable français une ardoisede 636 à 735 €.C’est donc dans le détail, mais dans un langagetrès accessible pour le citoyen non expert, que cepetit guide reprend chacune des sept idées faussesvéhiculées sur la Grèce et sur la notion de dettepublique.On y lit par exemple que les 40 Mds € sur lesquelsla France s’est engagée par rapport à la Grèce sontdéjà comptabilisés dans la dette publique française(2 000 Mds €) et que chaque contribuable françaisne perdrait en fait que 15 € par an si la dette grecqueétait annulée (part des intérêts versés par la Grèce).On y apprend aussi que, contrairement à un parti-culier, un État ne rembourse jamais vraiment sadette mais qu’il la fait « rouler » en empruntant denouveau pour faire face aux échéances... Sauf quandla dette est trop lourde et/ou que les taux d’intérêtsexigés par les créanciers sont exorbitants. Il faut alorsannuler la dette ou la restructurer pour permettre unnouveau départ. Cela s’est déjà produit à plusieursreprises dans le passé (l’accord de Londres en 1953a par exemple annulé plus de 60 % de la dette de laRépublique Fédérale Allemande).Les auteurs montrent que la flambée de la dettegrecque ne résulte pas d’une prétendue gabegie defonctionnaires(4) et de prestations sociales, mais destaux d’intérêt extravagants exigés par les prêteursentre 1990 et 2000 (avec effet « boule de neige »)ainsi que des cadeaux fiscaux au bénéfice des plusriches(5). Une large partie de la dette grecque pour-rait donc être considérée comme illégitime (la moi-tié en 2007 avant même qu’elle n’explose à comp-ter de cette date sous l’effet de la récession infligéepar la Troïka).Le CAC donne dans ce petit guide des outils auxcitoyens pour les aider à se mobiliser contre leslogiques d’austérité et en faveur d’une conférenceeuropéenne sur les dettes publiques. Son appel« La Grèce, une chance pour l’Europe » peut êtresigné à partir du lien suivant : www.audit-citoyen.org/?p=6412 n Monique Daune

(1) La FSU est membre du CAC.(2) www.audit-citoyen.org/?p=6374(3) Plans d’aide internationaux assortis d’obligations deréformes austéritaires.(4) Seulement 8 % de l’emploi total en 2011.(5) Réduction des droits de succession, diminution des tauxd'imposition sur le revenu, trois lois d'amnistie fiscale pourles fraudeurs.©

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des informations sur l’exploitationdes gaz de schiste et sur d’éventuellesméthodes d’extraction moins polluantes.Cependant, la grande majorité de ces«  experts  » sont liés à l’industrie pétro-lière et gazière, favorable aux gaz deschiste. L’un des cinq présidents desgroupes de travail du « réseau », le Polo-nais Grzegorz Pienkowski, se montre trèsclair : « La mise en place de ce réseau estun pas en vue de renverser l’attitudedéfavorable ou soupçonneuse envers legaz de schiste qui prévaut en Europe ».

Budgets des universitési

Razzia sur les fondsde roulement À deux mois de la fin de l’année univer-sitaire, il était temps que la ministretrouve les moyens de boucler la réparti-tion des dotations de l’année 2015 pourfinancer, entre autres, l’augmentationmécanique de la masse salariale (glisse-ment vieillesse technicité), l’exonérationdes droits d’inscription accordés aux étu-diants boursiers et la création de 1 000emplois. La ministre a présenté au CNESERun projet selon lequel les fonds de rou-lement des universités seraient ampu-tés en conséquence : 100 millions eurosseraient ainsi captés dont 60 sur 11 des76 universités. 49 élus sur 51 présentsau CNESER se sont prononcés contre.

Emploii

Des espoirs…pour 2022 ?Alors que la barre record des 3,5  mil-lions de sans-emploi a été franchie enmars, l’avenir tendrait à se dégager,selon un rapport sur «  Les métiers en2022  » rendu par France Stratégie auministère du Travail. Même si la Francedevait se contenter de créer à cet hori-zon 180 000 emplois par an (hypothèsebasse), la hausse des départs à la retraitedes générations issues du baby-boompermettrait d’assurer un volume de800 000  postes à pourvoir par an sus-ceptible de ramener le taux de chômageà 8  % en 2022, dans une situation glo-balement plus favorable au tertiaire, auxcadres, aux professionnels de la santé età certains ouvriers qualifiés.

Qualité de l’airi

Paris peut mieux faire Selon une étude du Bureau Européen del’Environnement (BEE), portant sur lesefforts pour combattre la pollution del’air dans vingt-trois villes européennes,Zurich arrive en tête, suivie de Copen-hague, de Vienne et Stockholm, tandisque Rome et Lisbonne ferment la marcheavec le Luxembourg.Paris se classe au sixième rang, ex-æquoavec Helsinki et Londres, une place de

Suite page 20 ‰‰‰

CRISE SYSTÉMIQUE ET LES MUTATIONS CLIMATIQUES

Combattre et proposerLa proximité de la conférence sur le climat à Paris à la fin de cette année 2015 explique sansdoute la multiplication d'ouvrages sur la nécessité de lutter contre le réchauffement de laplanète en prenant en compte les mutations climatiques et la profonde crise écologique quimarque notre monde.

Le constat est désormais général, sauf pour lesgrandes firmes conduites par la seule lumièrede l’augmentation du profit qui assombrit

l’avenir de l’ensemble des populations.Naomi Klein s’essaie à démontrer que Tout peut

changer si l’on com-prend que « Capita-lisme & changementclimatique » sont liés.Elle ironise sur lesoxymores comme«  capitalisme vert  »ou « entreprise envi-ronnementale » pourmettre en cause les« fondamentalistes dulibéralisme  » dansla dégradation desconditions de vie etde la nature. La terre,

pour les capitalistes est un bien gratuit et exploi-table à l’infini, comme le sous-sol. La préservationde l’environnement ne fait pas partie de leur boîteà outils.Pour combattre ces politiques d’inspiration libé-rale, pour combattre ces « croyants » dans la toutepuissance du marché, elle propose plusieursniveaux de réponse. La planification d’abord, leretour des services publics, l’insistance sur les« Communs » comme sur les réalisations concrètesà tous les niveaux pour rendre visible la possibi-lité des transformations. La crise écologique per-met de prendre conscience de ses causes poli-tiques et économiques et ainsi œuvrer àl’émergence d’une autre société, plus démocra-tique, plus libre, plus fraternelle. Il est regrettablequ’elle n’ait pas su – ou pas voulu – synthétiserson propos pour rendre plus percutant ce plai-doyer pour l’action politique et la nécessité de ladémocratie.Impératif transition, de Michael Lewis et PatConaty, sous-titré « Construire uneéconomie solidaire » vient apporterde l’eau au moulin de la thèsedéfendue par Klein. L’intérêt deleur livre est de répertorier toutes lesexpériences de résilience – Kleinpréfère parler de « régénération » –un peu partout dans le monde, maissurtout en Amérique du Nord. Ilspermettent de se rendre compte dela richesse de ces tentatives pourvivre mieux en conservant les« biens communs » qu’ils opposentà la richesse privée. Leurs proposi-tions plus générales sont empreintesd’une volonté de «  moralisation

du capitalisme » explicitement rejetée par Kleinqui entre en contradiction avec les luttes des« zadistes » appelés « blocadie » en Amériquedu Nord. Jean-Pierre Brovelli et Claude Simon pour le« Collectif Roosevelt » traitent de la même ques-tion avec ce « Stop au mirage de la croissance ».Trois parties. La première sur les mesures de lacroissance dont le fameux PIB manié souventsans précaution, la deuxième sur la volonté ducapitalisme d’avoir une «  croissance exponen-tielle », qui appauvrit toutes les ressources natu-relles et ouvre unevaste crise écolo-gique tout en bais-sant toujours plus lecoût du travail et enobligeant les salariésà travailler toujoursplus. La troisièmepartie est une sorted’ébauche de pro-gramme dont lepoint de départ setrouve, pour eux,dans la nécessité delimiter la croissancemesurée par le PIB, par les marchandises. « Réus-sir la transition écologique » arrive évidemment entête de ce programme. Au-delà de ce terme utiliséà toutes les sauces, ils proposent un nouveau pactesocial passant par la réduction massive du tempsde travail et des mesures urgentes pour permettrela survie de l’humanité. Une base de discussion. Un oubli est commun à toutes ces théorisations :la forme particulière du capitalisme actuel. Lesmodalités de création de richesse sont soumisesaux critères du capitalisme financier dont le prin-cipal est le court-termisme qui bloque toute visiondu futur. Ce capitalisme-là subit une crise systé-mique qui oblige à une révolution interne au capi-

talisme pour permettre sa survie.Cette crise, et c’est le sens qu’ilfaut donner à toutes ces analyses,élargit le champ des possibles endonnant à la lutte contre les muta-tions climatiques et la crise éco-logique une place de premier planpour sortir de cette société inéga-litaire et dépassée. n

Nicolas Béniès• Tout peut changer, N. Klein, ActesSud/Lux ; Impératif transition,M. Lewis & P. Conaty, Éditions éco-société ; Stop au mirage de la crois-sance, J.-P. Brovelli & C. Simon, éditions de l’Atelier.

Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 19

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ECO/SOCIALmieux, seulement, par rapport au précé-dent classement de 2011, en dépit desannonces répétées de la mairie de Paris.Globalement, les villes ont progressé dansla réduction des émissions de particulesfines PM10, mais régressé pour les résultatsconcernant le NO2 (dioxyde d’azote).

Électricitéi

100 % verte en 2050 ?Une étude de l’Agence de l’environne-ment et de la maîtrise de l’énergie(Ademe) montre qu’à l’horizon 2050,la France pourra produire la totalité deson électricité à partir d’énergies renou-velables (éolien, solaire, biomasse, géo-thermie, etc.). Cela coûterait 30 % pluscher qu’avec le système actuel, maisquasiment autant qu’avec une part de50 % pour le nucléaire, hypothèse rete-nue par la loi sur la transition énergé-tique d’ici 2025. La production d’élec-tricité maximale pourrait ainsiatteindre  en 2050, en prenant encompte les améliorations techniquesd’ici là, « 1 268 TWh, soit le triple de lademande annuelle de 422 TWh ».

Europei

Vieillissement vs. croissanceUne note de la Commission européennesouligne que les pays les plus richesauront du mal à retrouver le rythme decroissance qu’ils ont connu avant la crisefinancière de 2008, du fait du vieillisse-ment démographique et donc de labaisse de la population en âge de tra-vailler (entre 15 et 64 ans). Cette der-nière devrait croître, au niveau mon-dial, de 20  % seulement entre 2010 et2030, alors qu’elle a augmenté de 40 %entre 1990 et 2010. Entre 2010 et 2030,elle devrait augmenter de 77  % enAfrique subsaharienne, de 20 % en Amé-rique du Sud, en Amérique latine et enAsie, de 11 % en Amérique du Nord et de9 % seulement en Europe.

Pollution atmosphériquei

Entre 1 et 2 Mds par anSelon l’Inserm, le coût total en Francede la pollution sur la santé est estiméentre 1 milliard et 2 milliards d’euros/an.L’objet de l’étude était d’approcher auplus près les coûts de la part attri-buable à la pollution de l’air dans lemontant de prise en charge par le sys-tème de santé des cinq maladies res-piratoires les plus répandues (BPCO,bronchites chronique et aiguë, asthmeet cancer des voies respiratoires). Cecoût représente 15 % à 31 % du déficit2012 (de 5,5 Mds €) pour la brancheassurance maladie du régime général dela Sécurité sociale

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‰‰‰ Suite de la page 19

Créés dans le privé en 1982(lois Auroux), les CHSCTont conquis une place impor-

tante. Complétant les autresinstances, le CHSCT dispose deprérogatives spécifiques, s’appuiesur une observation du travail réelet permet l’expression des salariéssur leurs conditions de travail, enassociant régulièrement tous lesacteurs de prévention. Cesdernières années, dans ce cadre,des organisations syndicales d’en-treprise ont obtenu l’interdictiond’organisations du travail et demodalités d’évaluation des sala-riés délétères. Cette instance, qui a toujours étédans le collimateur du patronat,rappelle sans cesse les obliga-tions de résultat des employeursen matière de santé et de sécuritéau travail.Le gouvernement assure que lesprérogatives actuelles seraientmaintenues malgré la fusion. La

CGT, FO et SUD estiment deleur côté que celle-ci affaibliraitl’instance. Il y aura une diminu-tion des moyens syndicaux dansun grand nombre d’entreprises, etla disparition d’un espace dedébat spécifique risque de mar-ginaliser la question du travail.

Quels effets pour la fonction publique ?Les CHSCT du public, institués30 ans après ceux du privé, ne

sont pas directement concernéspar cette loi. Mais ils sont encorefréquemment confrontés auxfreins et blocages de l’adminis-tration. Les moyens consacréspar le décret ne sont pas accordéspartout, alors même qu’ils sontinsuffisants par rapport à l’am-pleur de la tâche.Dans ce contexte, un recul desmarges d’action de cette instancedans le privé serait un signe trèsnégatif. n Hervé Moreau

Pour plus d’un million de salariés, il n’y a que83 médecins de prévention dans l’Éducationnationale (64,7 équivalents temps plein) alors

qu’il en faudrait 400 a minima. Six académies n’enont encore aucun en 2014. Malgré quelques progrèsrécents, la médecine de prévention dans l’Éducationnationale reste donc sinistrée et en queue de pelotonde la Fonction publique.Mais, au-delà du faible attrait financier, il y a un véri-table problème de vocation et les offres de formationen médecine du travail sont rares. Ainsi, sur la régionparisienne, il n’y a que deux places pour la Fonctionpublique pour être formé à cette spécialité.

Des conditions de travail qui n’attirent pasSurchargés de travail, les médecins de préventionde l’Éducation nationale ne sont pas non plus aidés,dans bien des cas, par l’administration. Les condi-tions matérielles restent en effet à améliorer (pas desecrétariat, locaux inadaptés, matériel manquant...),et la liste des personnels devant être particulièrement

suivis ne leur est, la plupart du temps, pas com-muniquée.

Des conséquences surla santé des personnelsPourtant, les obligations réglementaires et lesbesoins sont nombreux : possibilité de visiteannuelle pour les agents qui le souhaitent, visitequinquennale obligatoire, analyse des situationsde travail, surveillance médicale particulière (mater-nité, handicap, réintégration après un congé longuemaladie ou longue durée...).Des pistes sont explorées pour améliorer la situa-tion (réactivation du travail en réseau, équipes plu-ridisciplinaires, médecin collaborateur auprès dumédecin de prévention). Mais les infirmières recru-tées pour renforcer les équipes de prévention doi-vent être véritablement formées en santé au travailet ne pas dégarnir le contingent des infirmières auservice des élèves. n

Hervé Moreau

CHSCT DU PRIVÉ

Fusion ou disparition programméeAprès l’échec des négociations sur la modernisation du dialogue social dans le privé, le gouvernement a repris la main. Un projet de loi prévoit notamment l’absorption des CHSCTdans une délégation unique des personnels.

SANTÉ DES PERSONNELS

Éducation nationale en manque de médecinsLes médecins de prévention sont, pour les agents de la fonction publique, l’équivalent desmédecins du travail. Leurs missions sont nombreuses mais ces médecins en nombre insuffisantne peuvent les assumer toutes, au détriment des droits et de la santé des personnels.

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DOSSIERLa protection sociale

Ont participé à la rédaction de ce dossier : Claudine Bezol, Bernard Boisseau, Georges Bouchart,Marylène Cahouet, Monique Daune, Rozenn Jarnouën, Hervé Moreau et Daniel Rallet

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 21

La santé à tout prix

La France a longtemps été enviée pour son système de santé performant, sacouverture maladie universelle avec un taux élevé de prise en charge par l’as-surance maladie obligatoire. Mais la prévention demeure marginale, la méde-cine du travail est sinistrée (surtout dans la Fonction publique), les inégalitésd’accès aux soins se creusent. Les hôpitaux publics doivent faire des économies

drastiques, les déserts médicaux sont un problème majeur et le milieu social reste déter-minant en matière de vie en bonne santé et d’espérance de vie.Hors hospitalisation et affections de longue durée, la Sécurité sociale ne rembourse plusaujourd’hui que 50 % des soins en moyenne. La régression des droits a entraîné un trans-fert des charges vers les ménages qui doivent se tourner vers le marché concurrentiel descomplémentaires santé dans lequel les mutuelles peinent à maintenir les solidarités.Le projet de loi santé voté par les députés en avril comporte des avancées mais ilmanque d’ambition. L’enjeu est d’obtenir une politique volontariste de santé publiquepour tous qui revienne sur les régressions imposées et garantisse une assurance maladiecouvrant tous les besoins utiles, à définir démocratiquement. Cela suppose des moda-lités de financement qui permettent une distribution plus juste des richesses.

Malgré des disparités selon

les pays, les dépenses

de santé progressent partout

dans le monde. Les progrès

de la médecine permettent

d’augmenter le bien-être, de

faire reculer les maladies et

d’allonger l’espérance de vie.

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La protection sociale

Ces dépenses ont augmenté plus rapide-ment que le PIB de 1950 à 1980. Jus-qu’en 1975, ce dernier s’est accru en

moyenne de 5 % par an (en volume) pendantque les dépenses de santé augmentaient de9 à 10 %. Cela a permis d’améliorer la santédes personnes, d’allonger l’espérance de vieet de réduire les inégalités. Depuis, avec lacréation en 1995 de l’ONDAM (outil derégulation des dépenses remboursées), lahausse est beaucoup moins vive : elle est

Pendant la guerre, le Conseil national de la Résistance intègre à son programme« un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas oùils sont incapables de se le procurer par letravail, avec gestion appartenant auxreprésentants des intéressés et de l’État ».

1945Chiffres

Évolution des dépenses de santé

De moins en moins remboursées

C’est le déficit de l’assurancemaladie prévu pour 2015. Un«  trou » impressionnant quidoit être relativisé enle comparant aux exonérationsde cotisations sociales« patronales » et à la fraude sociale.

6,9 Mds €C’était le total, pour la France, desdépenses de santé (publiques etprivées) en 2013. Soit 11,7 % du PIB.À titre de comparaison, cesdépenses représentent 17,1 % duPIB aux États-Unis, 11,3 % enAllemagne et 9,1 % au Royaume-Uni.

247,7 Mds €

Les dépenses de santé représentent 12 % du PIB aujourd’hui dans notre pays.Ce niveau n’a rien d’anormal, mais les évolutions récentes et la structure de leur financement peuvent inquiéter.

passée sous la barre des 3 % en 2010 et estplafonnée à 2,05 % pour 2015.

Un renoncement inquiétant...En effet, certains besoins vont fortements’accroître et d’autres ne sont pas satisfaits.Ainsi, le vieillissement de la populationentraîne une augmentation des dépenses liéesaux ALD (affections longue durée), théori-quement couvertes à 100 %. Par ailleurs, lerenoncement aux soins pour des raisons

financières reste élevé : il touche en moyenne15 % des assurés, mais 30 % pour les per-sonnes sans complémentaire (voire 41  %pour les soins dentaires).

... qui pénalise le patientAu fil des désengagements successifs(déremboursements, franchises, forfaits...), lapart financée par l’assurance maladie obli-gatoire a reculé, passant de 80 % il y a 30 ansà 75 % en 2013. Les mutuelles ont dû par-tiellement suppléer et le « reste à charge » despatients s’est accru. 75 % ne constitue qu’unemoyenne, car les soins courants ne sont cou-verts qu’à 50 % et une personne enchaînantles pathologies sans entrer dans la catégoriedes ALD peut avoir à payer personnelle-ment plus de 900 € sur une année.Enfin, les dépenses de santé, ce sont aussi desemplois et une qualité de soins : ces dernièresannées, le nombre d’infirmières pour 25 patientsen hôpital est passé de quatre à deux.Les débats sont souvent focalisés sur la pro-gression des dépenses, mais c’est bien sur lesmoyens à mettre en œuvre pour maintenir etaméliorer la santé que nous devons nousmobiliser. n

Consacrant l’ANI de 2013, la loi de « sécurisation »de l’emploi impose à chaque employeur privé decofinancer une complémentaire santé obligatoire

pour tous ses salariés. Ce sera un progrès pour quelque400 000 personnes. Mais cette mesure aura des effets redoutables pour lespersonnes non couvertes (étudiants, sans emploi, indé-pendants et fonctionnaires) qui restent sur la touche.

Véritable progrès ?Par ailleurs, la couverture obligatoire porte sur un panierde soins minimal qui stimule une segmentation des« offres » et une guerre des prix. Les salariés du privé déjà titulaires d’un contratindividuel risquent, pour maintenir leur niveau de couverture, de devoir com-pléter le contrat collectif d’entreprise par un complément optionnel totalementà leur charge. Les institutions non lucratives (mutualité et prévoyance) ont déjà

commencé à modifier leurs offres, contraintes par la nou-velle logique de parts de marchés. Enfin, cette évolutions’inscrit dans une tendance plus longue de désengagementde la Sécurité sociale. n

Accord national interprofessionnel (ANI)

Les effets secondaires

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Suite auxdésengagements

de la Sécu, le reste à charge

des patientsaugmente

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C’est le taux deremboursement des soinscourants (hors hôpital et ALD) du fait desdésengagements de l’assurance maladieobligatoire.

50 %L’espérance de vie était de 79,3 anspour les hommes et 85,5 ans pour lesfemmes en 2014. C’est, en 20 ans, ungain de 5,6 ans pour les hommes et de3,6 ans pour les femmes, l’écart entreles deux sexes ne cessant de seréduire.

79,3 et 85,5Les affections de longue durée (essentiellementmaladies cardio-vasculaires, cancers, diabète etaffections psychiatriques) concernent aujourd’hui8 millions de personnes, en progression constantede 5 % par an depuis dix ans. Les soins pratiqués àce titre représentent près de 60 % du total desdépenses remboursées par l’assurance maladie.

+ 5 % par an

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Complémentaires santé

La santé, une marchandise ?Considérant la santé comme une simple marchandise, les directives

européennes visent à organiser un système d’assurance santé complémentaireextrêmement concurrentiel et fortement capitalisé.

Le code de la mutualité a transposé cesdirectives en 2001 en modifiant lesrègles comptables et financières appli-

cables aux mutuelles. Soumises au régimeprudentiel « Solvabilité 2 » qui s’applique àtoutes les familles d’assurances, les mutuellesdoivent constituer une « marge de solvabi-lité » (capital minimum pour garantir leursengagements vis-à-vis de leurs assurés),quitte à souscrire à une réassurance auprèsd’un organisme privé.

Vers une fragilisationFragilisées par la concurrence exacerbée desgrands groupes privés, les mutuelles soli-daires cherchent à se rapprocher entre elles,voire à fusionner pour ne pas disparaître.Elles sont déjà conduites à augmenter leurscotisations et/ou à diversifier leur offre com-

plémentaire. Elles tentent en effet de capterl’adhésion des jeunes qui n’est plus auto-matique aujourd’hui en proposant, comme lesassureurs privés, des tarifs qui varient selonl’âge des assurés sociaux et la gamme desprestations offertes, et en remboursant unepartie des dépassements d’honoraires. Injustement taxées (à 7 %), les mutuellessolidaires de fonctionnaires bénéficient aumieux d’une aide dérisoire de l’Étatemployeur (6 € par agent au ministère del’Éducation nationale !) et risquent de perdrela gestion du régime obligatoire des fonc-tionnaires. Elles vont en outre être un peuplus « siphonnées » par les complémentairessanté collectives qui seront généralisées au1er janvier 2016 (suite à la transposition légis-lative de l’ANI du 11 janvier 2013), car denombreux fonctionnaires feront le choix

d’être couverts par la complémentaire d’en-treprise largement subventionnée de leurconjoint-e. Le périmètre de mutualisationva donc se rétrécir et renchérir le coût de lacotisation complémentaire individuelle ouavoir des incidences sur le niveau des pres-tations servies. n

Après avoir augmenté la cotisation desseuls retraités (3,56 % contre 2,97 %pour les actifs), baissé celle des actifs

de moins de 30 ans (2,38 %) et mis en placeune offre moins chère et moins complète(MGéné ration initiale), la MGEN a prévuune refonte complète de son offre à compterdu 1er janvier 2016.Les cotisations ne seront plus proportion-nelles au revenu mais calculées en fonctionde l’offre choisie par l’adhérent (voir tableauci-dessous), de sa catégorie (actif/retraité)et de sa tranche d’âge (huit pour les actifs,deux pour les retraités). Les cotisationsenfants seront par ailleurs réévaluées pour

limiter l’écart entre la consommation et lacotisation. La MGEN s’éloigne ainsi des principes fon-dateurs de solidarité (notamment généra-tionnelle) qui justifiaient l’adhésion à unemutuelle plutôt qu’à une assurance complé-mentaire.Lourde de conséquences, la décision prise parl’AG du 11/04/2015 aurait mérité a minimaune information de tous les adhérents MGENet un débat largement contradictoire autourde toutes les pistes d’évolution possibles,comme une augmentation uniforme des coti-sations ou une modulation de leur taux selonles revenus plutôt que l’âge. n

N° 1 Initiale Couvre les besoins « essentiels » en matière de santé (frais médicaux courants).

N° 2 Équilibre Offre intermédiaire entre une couverture classique et des soins particuliers avec priseen charge des dépassements d’honoraires, des médecines alternatives et forfait prévention.

N° 3 Référence Correspond à l’offre globale actuelle avec un renforcement en dentaire et optique.

N° 4 Intégrale Offre la plus complète et la plus chère.

QUATRE OFFRES DE PRESTATIONS DIFFÉRENTES À COMPTER DU 1ER JANVIER 2016

Mutualité :quelles valeurs fondatrices ? Liberté, solidarité, démocratie et indépen-dance sont les quatre valeurs fondamentalesdu mouvement mutualiste qui a initié un sys-tème de solidarité, d’entraide et de pré-voyance.

◗ Liberté : l’adhésion repose sur le choix del’individu, prenant seul une décision, dénuéede toute contrainte.

◗ Solidarité : la mutualité recherche dessolutions collectives aux problèmes que peutrencontrer un individu en matière de protec-tion sociale. Les adhérents sont solidaires lesuns des autres, entre les générations, sans dis-tinction entre hommes et femmes, jeunes etmoins jeunes.

◗ Démocratie : tout mutualiste peut parti-ciper à la vie de sa mutuelle, selon le principe«  un homme, une voix  », en élisant les admi-nistrateurs, en participant aux assembléesgénérales, en prenant une part militante aufonctionnement.

◗ Indépendance du pouvoir public, des partis politiques et des organisations syndi-cales.

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Changement de logique

Les mutuelles solidairesopèrent de nouvelles stratégies

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La protection socialeDO

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Mais ce sont les ARS (Agences régio-nales de la santé) créées par la loiHPST (Hôpital patients santé terri-

toires) qui sont chargées de la mise en œuvreconcrète. Elles élaborent un Schéma régionald’offre de soins (SROS) appliqué dans lesterritoires qu’elles définissent(1). Une Confé-rence Régionale de la Santé et de l’Autono-mie rend un avis sur le SROS et les mesuresproposées après consultation de la Commis-sion spécialisée d’offre de soins. C’est levolet « démocratie sanitaire » affiché par laloi HPST.

Plan régional de santéLes orientations nationales sont déclinéeslocalement dans un Plan régional de santé(PRS) qui décide, entre autres, de créer ou sup-primer des activités de soins et d’équipementsmatériels lourds, de transformer et de regrou-

per les établissements de santé concernant lepublic ou le privé : des décisions qui devien-nent concrètes pour les usagers. Pour faire face aux déserts médicaux, il existeun « zonage de l’offre de soins de premierrecours ». Dans les « zones en difficulté »(établies à partir d’indicateurs chiffrés calés surles bassins de vie de l’INSEE) auxquelles cer-taines ARS ajoutent des « zones fragiles », desaides financières sont accordées au maintienet/ou à l’installation de professionnels de santé. L’insistance sur « l’offre », au détriment de lademande et des besoins réels, est singulière.Il s’agit d’un outil de gestion qui permet de

réguler les dépenses de santé honorées parl’assurance-maladie. En verrouillant sites etstructures et à travers les « conventions pré-visionnelles d’objectifs et de moyens », lesARS assurent la « gouvernance » de la santéen encadrant les recours aux soins pour res-pecter l’ONDAM(2). L’expression des organisations syndicales autitre de la démocratie sanitaire est limitée(3)

mais il existe une représentation des usagersoù nos mandats doivent pouvoir être portés etentendus. Il en va de la pérennité et de laqualité des soins pour tous dans notre pays. n(1) Il existe aussi des schémas interrégionaux.(2) Objectif national des dépenses d’assurancemaladie.(3) La FSU, considérée comme non-représentative,en est exclue.

L’offre de soins

Planification sanitaire pour rationnaliserIl y a dans ce domaine un État stratège avec une « direction générale de l’offre de soins » dont l’approche globale

intègre aussi bien la médecine de ville (ambulatoire) que les établissements de santé publics et privés.

Il y avait 215 000 médecins en France en2014 contre 60 000 en 1968. Pourtant, lesdéserts médicaux existent. Le numerus clau-

sus a certes été relevé mais la pénurie menace.Elle est surtout liée à un problème de réparti-tion avec une polarisation des activités médi-cales sur les métropoles, dans les régions et lesvilles les plus riches, du fait de la liberté d’ins-tallation qui permet aux médecins d’exercer làoù se concentrent les activités économiques. La désertification concerne les zones rurales,mais aussi les zones urbaines les plus pauvreset celles en périphérie des métropoles. Lesincitations financières ont peu d’effet surl’installation des jeunes médecins.Ceux qui sont prêts à s’installer dans desdéserts médicaux à condition de pouvoir exer-cer en équipe (dans des maisons de santé)

n’y vont pas toujours car ils n’y trouvent pasles spécialistes qui leur permettraient detravailler réellement en réseau.Les spécialistes, qui sont plus nombreuxque les généralistes en France, s’installenten effet de préférence dans les grandesvilles.Enfin les dépassements d’honoraires sont encause. La pénurie de médecins en secteur 1sur Paris fait ainsi de la capitale... un désertmédical pour les patients ordinaires. n

Les effets pervers de la T2ADepuis 2005, les hôpitaux sont financés sur la base de la tarification à l’activité. Au niveau natio-nal est défini par acte un coût moyen mesuré sur la base d’un groupe homogène de malades.Chaque hôpital est rémunéré sur la base de ce tarif. Si la T2A est adaptée à des actes bien pré-cis, notamment chirurgicaux, elle ne fonctionne pas pour la prise en charge des maladies chro-niques, de patients qui ont plusieurs pathologies, des personnes âgées et des malades qui ontbesoin d’un accompagnement interdisciplinaire et social. Elle diminue la durée des séjours (laT2A est forfaitaire quelle que soit la durée), encourage la chirurgie ambulatoire, conduit à sélec-tionner les malades les moins coûteux et à la spécialisation des cliniques privées dans les actesstandardisés rentables.

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Désertification en zones rurales, mais aussi dans leszones urbaines les plus pauvres

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L’insistance sur «  l’offre », au détriment de la demande et

des besoins réels, est singulière

Les déserts médicaux

SOS médecinsActuellement, la pénurie de médecins est devenue un problème majeur de santé publique.

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Une loi fourre-tout avec aussi bien lesfontaines à soda, les mannequins ano-rexiques, les centres de santé, les

cabines de bronzage que l’amélioration de lacontraception, la généralisation du tierspayant à l’horizon 2017 et le droit à l’oublipour les anciens malades du cancer, parexemple.Les quelques avancées ne règlent pas la per-sistance des inégalités de santé. Ainsi, endépit des déclarations, la loi ne répond pasà une vraie politique de prévention. Lesmoyens accordés à la médecine scolairesont insuffisants. Les forfaits, les franchisesaugmentant le reste à charge, demeurent. Le gouvernement a réécrit des articles pourrépondre à la grogne des professionnels etaux inquiétudes des élus locaux, notam-ment en supprimant la notion de « serviceterritorial de santé au public » au profit de« communauté professionnelle territoriale desanté » et « d’équipes de soins primaires »pour assurer que l’organisation des par-cours de santé sera à l’initiative des pro-fessionnels. La loi parle de diagnostic par-tagé sans spécifier l’échelon territorial et nerépond pas aux exigences d’une vraie démo-cratie sanitaire. Les dispositifs établis dansle respect de la liberté d’installation des

médecins ne lutteront pas contre les« déserts médicaux ».La loi reste dans la logique de la loi«  HPST  ». Les Groupements hospitaliersde territoire (GHT), censés restructurer lesterritoires avec l’objectif d’une offre et d’unaccès aux soins de qualité cohérents sur leterritoire, ont surtout pour finalité la réduc-tion des coûts de santé. Le texte réaffirme lesobligations spécifiques du service public etlaisse à un groupe de travail le soin de fixerl’obligation de missions pour le privé.Autres problèmes : la remise en cause dela confidentialité des données et la possibi-lité de légiférer pour certains articles parordonnance.Un projet qui manque de vraies proposi-tions de service public de santé et ce alorsque les hôpitaux publics devront faire 3 Mdsd’économie d’ici 2017. n

Loi santé

Le compte n’y est pasLe projet de loi de modernisation de la santé adopté par l’Assemblée nationale ne règle pas les inégalités de santé.

Les Établissements hospitaliers pour lespersonnes âgées dépendantes sont exclusde la loi d’adaptation au vieillissement.

Pourtant le reste à charge est lourd pour les

résidents et/ou leur famille : il serait, aprèsdéduction des aides publiques, de 1 850 €

mensuels (minimum de 1 300 € et maximumde 3 700 €). L’enquête menée par la direction

générale de la cohésionsociale explique que le parcpublic, le moins cher etmajoritaire, est «  inégale-ment entretenu » et « devraitêtre sérieusement moder-nisé  ». Ce problème dou-loureux est un scandale faceaux déclarations gouverne-mentales qui entendent valo-

riser la place des personnes âgées dans lasociété et améliorer leur situation. Et quedire des personnels peu formés, précaires,aux conditions de travail particulièrementdifficiles ?Le 9 décembre 2014, Laurence Rossignol amis en place un groupe de travail sur laréforme de la tarification des EHPAD quidevrait rendre ses conclusions fin juin. Lesassociations directement concernées sontdéçues par les premières mesures proposées.Les organisations syndicales sont tenues àl’écart du processus. n

Une loi qui ne répond pasaux exigences d’une vraie

démocratie sanitaire

Les personnes âgéesdoivent pouvoirvieillir dansdes lieux adaptés

La politique du médicamentLa question essentielle est le pouvoir dulobby de l’industrie pharmaceutique quioriente la recherche en fonction de sesintérêts économiques (les marchés lesplus porteurs), qui évalue lui-même l’effi-cacité des médicaments qu’il produit etqui présente ces résultats à des agencesde contrôle qui n’ont pas les moyens de lesvérifier. Les commissions qui délivrent lesautorisations de mise sur le marché et quifixent les prix fonctionnent dans l’opacitéavec la présence d’experts liés aux laboset de hauts fonctionnaires qui font le va-et-vient entre l’administration et le privé.Les labos ont une politique active de mar-keting en direction des médecins (visi-teurs médicaux et utilisation de leadersd’opinion), dont ils financent la formationcontinue.

EHPAD

Les oubliés de la loi

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L’US Mag : La France consacre une part de plus en plus importante de son PIB aux dépenses de santé. Faut-il s’en réjouir ou s’en inquiéter ?Comme tous les pays développés, la France consacre « sponta-nément » une part croissante de la richesse produite aux soins.Son budget se « déforme » donc« spontanément » en faveur desdépenses de santé. Des politiquesd’austérité drastiques peuventmettre en cause cette tendance spon-tanée, comme en Grèce depuis 2010avec des conséquences dramatiques.En France, les dépenses d’assu-rance maladie continuent de croîtremais à un rythme moins rapide.Leur rythme de progression estmaîtrisé, inférieur à 2 % par an(contre 4 % si les pouvoirs publicsne faisaient rien). Mais la questionde savoir si on a en a pour sonargent fait débat. Certains arguentdes indicateurs de santé publiquepour montrer que l’efficacité desdépenses n’est pas évidente.D’autres comme l’économiste Bri-gitte Dormont montrent que l’aug-mentation des dépenses est bienfaitrice (même si l’ef-ficience peut en être améliorée) et surtout socialementsouhaitée, la santé étant considérée comme un biensupérieur. Pour ma part, je dirais qu’au regard des 215Mds d’euros consacrés, il est anormal que nous ayonsdes inégalités sociales devant la maladie et la mort etdans l’accès aux soins. Par ailleurs, tout notre sys-tème s’est construit autour de l’équation santé = méde-cine et la profession médicale s’est arrogée le mono-pole du discours sur la santé. Or, 70 % des déterminantsde la santé sont non médicaux. Il faudrait donc davan-tage consacrer les euros publics à l’amélioration dulogement ou des conditions de travail plutôt qu’àl’achat d’un robot chirurgical dernier cri.

L’US Mag : Quel regard portez-vous sur l’organisation actuelle des soins en France ? Pour certains, on serait passé du meilleur système de santé aumonde à un système en crise... Ce n’est pas sérieux. Notre sys-tème permet dans une certaine mesure à toutes et tous d’accé-der à une médecine de pointe, notamment hospitalière, sansdiscrimination, ce que le monde nous envie (de nombreuxmalades étrangers viennent se faire soigner dans les CHU fran-çais). Mais il a au moins deux faiblesses. La première tient à la

défense d’arrière-garde d’une médecine libérale définie au débutdu XXe siècle. La libre installation, le paiement à l’acte, l’exer-cice isolé sur le mode artisanal... ne sont plus adaptés au défi desmaladies chroniques et de l’accès de tous à des soins de qualité.La seconde tient à la marginalité de la santé publique, en parti-culier de la prévention primaire qui entend agir sur les milieux

de vie pour empêcher les pathologies d’apparaître et quel’on confond, en France, avec les politiques de dépis-tage médicalisé (prévention secondaire). Cela dit, ilfaut faire de la prévention non pour faire des économiesmais pour réduire les injustices.

L’US Mag : Le recours aux complémentaires santéest de plus en plus nécessaire aujourd’hui. Ce mouvement est-il irréversible ?Les assurances maladie complémentaires, qui cofinan-cent les soins de base, sont une particularité française.Dans beaucoup de pays le « panier de soins » est sou-vent pris en charge à 100 % par les budgets publics.C’est un mode de financement inégalitaire (les primesdes complémentaires ne sont pas proportionnelles auxrevenus), inefficient (en sus des frais de marketing, les

systèmes de gestion sont doublés etles complémentaires ont tendance àalimenter l’inflation des dépasse-ments d’honoraires ou des prix desopticiens) et sanitairement contre-productif. Bref c’est une voiefuneste que les gouvernements ontempruntée pour réduire la dépensepublique et privilégier la dépenseprivée, une idée qui n’a aucun fon-dement économique et sanitaire.Cette politique de santé à courte vuepeut devenir irréversible car une foisbien installés dans un secteur donné,les acteurs privés sont très difficilesà déloger.Regardez par exemple les forcesqu’a affrontées Obama dans saréforme du système de santé améri-cain. La Sécu n’a plus d’intérêtsorganisés pour la défendre. Les syn-dicats de salariés ont été expulsés de

sa gestion et tentent de reconstruire une Sécu bis via les insti-tutions de prévoyance. Premier mouvement social de France, laMutualité est tentée par le jeu de la concurrence avec les assu-reurs et les institutions de prévoyance, aux dépens de la Sécu-rité sociale. Nous sommes à un point de bascule des fonda-mentaux définis en 1945. n

Entretien

« Il est anormal que nous ayons desinégalités sociales devant la maladieet la mort et dans l’accès aux soins »Frédéric Pierru, chercheur en sciences sociales et politiques CNRS-CERAPS (UMR 8026) –Lille 2 et membre du comité de direction de la Chaire Santé de Sciences Po Paris.

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Les déficits ne sont pas dus à desdépenses sociales trop lourdes mais àl’insuffisance des recettes. Le SNES-

FSU réaffirme son attachement à la logiquesolidaire de la Sécurité sociale qui prévalaiten 1945 (« Chacun contribue selon sesmoyens et reçoit selon ses besoins »). Àl’opposé de la fiscalisation croissante de laSécurité sociale, il estime que les richessescréées par le travail doivent rester le mode definancement prépondérant et que les revenusfinanciers doivent être davantage mis àcontribution.

Revenir sur les régressionsUne politique économique et sociale enfaveur de l’emploi et des salaires, des finan-cements solidaires fondés sur un autre par-tage des richesses doivent permettre de reve-nir sur les régressions (déremboursements,franchises, forfait hospitalier), de couvrirtous les besoins (pour aller vers un rem-boursement à 100 %) et de développer laprévention à tous les âges de la vie. Dansl’immédiat, les employeurs publics doiventparticiper à la couverture santé complémen-taire de leurs agents.La solidarité intergénérationnelle doit êtrepréservée. Le SNES-FSU demande notam-ment la création d’un droit universel à la

compensation de la perte d’autonomie, ycompris pour les moins de 60 ans, dans lecadre de services publics à créer ou renforcer.Parallèlement à l’accroissement des res-sources, il est indispensable d’agir sur l’or-ganisation du système, et pour cela, il fautnotamment :

– repenser le rôle et la rémunérationdu généraliste ;– encadrer les dépassements d’ho-noraires pour aboutir à leur inter-diction ;– lutter contre les déserts médicauxurbains comme ruraux ;– attribuer à l’hôpital public desdotations adaptées aux besoins (enrevenant vraiment sur la loi HPSTet en abrogeant la T2A) ;– supprimer les possibilités deconsultations et de soins privés ausein de l’hôpital public ;

– promouvoir une politique du médica-ment indépendante des lobbies pharma-ceutiques.Il faut par ailleurs que la recherche et laprévention soient financées à la hauteur desbesoins car ce sont des facteurs de bonnesanté, de longévité et d’autonomie. n

Santé

Ce que le SNES-FSU défendDésengagement de l’assurance maladie obligatoire, logique concurrentielle et financière des complémentaires, domination de l’industrie pharmaceutique, charge du patient en progression et renoncements aux soins, inégalités sociales et territoriales persistantes, prévention insuffisante, besoins croissants notamment en matière de dépendance, déserts médicaux…, une réformed’ensemble du système de santé s’impose tant sur le plan du financement que sur celui de l’organisation des soins.

En Europe

Des systèmes de santé différentsMais une privatisation croissante dans tous les pays.

Les systèmes de santé européens se répar-tissent en deux grandes catégories : ilssont financés soit par l’impôt (pays nor-

diques, Espagne, Portugal...), soit par les reve-

nus du travail (Allemagne, Belgique...), maisles Allemands ont aussi la possibilité d’êtreaffiliés à des assureurs privés. Le systèmefrançais est hybride, avec une fiscalisationcroissante à travers notamment la CSG etdiverses taxes affectées.Les modèles d’organisation sont aussi par-fois très différents du nôtre. Ainsi, en Alle-magne, les assurés publics choisissent leurmédecin généraliste et les consultations sontgratuites. Les Länder rémunèrent les médecinset définissent des quotas par zones pour luttercontre les déserts médicaux. Pour réduire les

dépenses, des prestations ne sont plus rem-boursées depuis 2003. En Espagne, les médecins sont salariés et tra-vaillent dans des centres de santé publics quiregroupent des équipes multidisciplinaires.Les patients ne font pas l’avance de frais ;ils peuvent choisir leur médecin traitant. Celui-ci les oriente vers des spécialistes qui n’exer-cent qu’à l’hôpital.Tous les pays d’Europe sont confrontés aucoût croissant des soins, au vieillissement dela population, aux délais pour consulter un spé-cialiste et pour les opérations non urgentes,comme à la privatisation croissante de leursystème de santé. Chaque système national ases propres spécificités qui ne sont pas forcé-ment transposables. Mais le paiement à l’actedes médecins libéraux en France n’existe pasforcément au-delà de nos frontières. n

Revenir à la logiqueinitiale de solidarité de la Sécurité sociale

Un financement soit par l’impôt,soit par les revenus du travail

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28 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

MÉTIERÉTRANGÈRES, RÉGIONALES, ANCIENNES... Les enseignants de langues vivantes étrangères et régionales, et ceux de langues anciennes sont particulièrement engagés dans la lutte contre la réforme du collège.Voici les raisons de leur colère et de leur mobilisation.

Des langues bien vivantes !P

our le latin et le grec, l’inquiétude majeureréside dans la suppression d’un horairehebdomadaire dédié garanti dans tous les

collèges, remplacé par un enseignement decomplément dont l’existence – avec un horaireamputé par rapport à aujourd’hui – dépendra dela décision de chaque établissement. Annoncerque les élèves « éveillés à l’intérêt des languesanciennes » lors des Enseignements pratiquesinterdisciplinaires (EPI) pourront « continuer,faire plus de déclinaisons, travailler davan-tage la langue » avec « un nombre d’heures quiest exactement le même qu’aujourd’hui », n’estque de la poudre aux yeux : rien n’est assuré.

À quel prix !Le SNES-FSU défend la démocratisationde l’enseignement des langues et cultures del’antiquité par une initiation à celles-ci dèsla classe de Sixième, incluse dans les coursde français. Au nom de quel principe l’accèsà un enseignement disciplinaire devrait-il

La ministre affiche sa volonté de rendre le col-lège plus égalitaire, mais confond nature d’unenseignement et usages sociaux. Stigmatiserainsi des disciplines lui permet d’éviter d’en-gager une véritable réflexion sur les condi-tions d’enseignement, et sur la carte scolairepour plus de mixité sociale et scolaire. n

Sandrine Charrier, Valérie Sipahimalani

BAC 2015 : chaque année, le mois de juin est l’occasion pour le SNES-FSU de réaffirmer son attachement au baccalauréat, à des épreuves nationales et terminales.

Délais de correction insuffisantsU

ne audience au ministère en novembre2014 avait permis de dénoncerquelques problèmes liés à l’organisa-

tion (convocations simultanées BTS et bac)ou aux corrections (pressions hiérarchiquessur les correcteurs et examinateurs, dispa-rités de rémunération d’une académie àl’autre...). Le SNES-FSU avait alors insistésur la nécessité d’un véritable cadrage natio-

nal afin de lutter contre des pratiques bienpeu respectueuses des candidats commedes enseignants, et battant en brèche le prin-cipe d’égalité.

Égalité face à l’examenLe ministère s’était alors engagé à rappelerà l’inspection et aux rectorats que les ensei-gnants ne pouvaient pas être dessaisis d’une

partie du processus de notation des épreuves,et à recenser les épreuves appelant indem-nisation afin d’établir une norme qui s’im-poserait à tous. La session 2015 s’ouvrecependant avec quelques inquiétudes liéesnotamment à un calendrier des épreuvesécrites plus étalé. Celui-ci entraîne du mêmecoup une réduction parfois importante desdélais de correction, surtout pour les épreuvesayant lieu les 23 et 24 juin. Les sections aca-démiques d’Île de France ont interpellé le ser-vice des examens et concours (SIEC) pourobtenir des aménagements de calendrier afinde permettre aux correcteurs de récupérerbeaucoup plus rapidement leurs copies.

Accumulation des tâchesDe même, la saisie des notes par les pro-fesseurs eux-mêmes devrait aboutir à gagnerdu temps pour les corrections et non l’in-verse. Le 15 mai dernier, le SIEC s’estengagé par écrit à diminuer le nombre decopies par correcteur et, pour les SES enparticulier, a avancé la date de retrait descopies afin de gagner une journée complètesur le calendrier.Permettre aux enseignants examinateurs etcorrecteurs de faire leur travail dans debonnes conditions et dans des délais raison-nables serait en effet le minimum. n

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passer par une réalisation pratique interdis-ciplinaire ?L’introduction de la LV2 en Cinquième, aprèsdes expérimentations sans bilan, est prévue auprix de la diminution de l’horaire à 2 h 30 enQuatrième et en Troisième, et de la suppressiondes sections européennes et de la majorité desclasses bilangues. Parfois critiquables, parce quepeu mixtes socialement pour certaines, cesclasses et sections ont pourtant permis de main-tenir ou de développer une diversification lin-guistique (en allemand, italien, portugais, chi-nois...) et de lutter contre la ghettoïsation,notamment en éducation prioritaire.

Exposition insuffisanteCette réforme conduirait à un renforcement duduo anglais espagnol. En outre, l’expositionhebdomadaire est insuffisante, d’autant plusdans des classes chargées. Les langues régio-nales sont quant à elles traitées sur le modèlecatastrophique des langues anciennes.

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Ce stage propose à la fois des réunions entrecollègues du SNES-FSU sur l’actualité de ladiscipline, et la participation aux manifes-

tations des Rendez-Vous qui ont cette annéepour thème « Les Empires ».La table ronde animée par le SNES-FSU porterasur «  Citoyens et citoyenneté en empire, del’édit de Caracalla à l’Union Française de1946 ». Interviendront Yann Rivière, maître deconférence à l’EHESS, spécialiste de l’histoirede Rome, Marc Aymes, chargé de recherche auCNRS et au Centre d’études turques, ottomanes,balkaniques et centrasiatiques, CatherineCoquery-Vidrovitch, professeur émérite à l’uni-versité Paris 7, et Pascale Barthélémy, maîtrede conférence ENS à Lyon, spécialiste de

l’histoire de l’Afrique et de l’histoiredes femmes.Les inscriptions au stage se feront par lesite du SNES-FSU à l’adresse suivante :https://www.snes.edu/private/Inscription-pour-les-rendez-vous-de-l-Histoire-de-Blois.html ou exceptionnellement à formation. [email protected] participation au stage donne droit àune autorisation d’absence (pour for-mation syndicale).Le nombre de places étant limité, n’ou-bliez pas de vous inscrire rapidement.Une priorité sera donnée aux nouveauxparticipants. n

Le groupe histoire-géographie

PROGRAMME HISTOIRE-GÉO COLLÈGE : une instrumentalisation politique et médiatique qui occulte les vrais enjeux de la réflexion sur le renouvellement de la discipline.

Une ambition formatrice avant toutD

epuis que les projets de programmed’histoire-géographie des cycles 3 et 4sont parus officiellement, plusieurs voix

se sont élevées pour le dénoncer ; lesmédias ont amplement relayé des cri-tiques les plus caricaturales et fantai-sistes portées par des soi-disant« experts », politiques souvent, univer-sitaires aussi parfois. On dote, parailleurs, cette discipline d’une effica-cité sociale largement fantasmée.Avant même que n’ait démarré laconsultation officielle des profession-nels qui seront chargés de mettre enœuvre ces nouveaux programmes, lePrésident lui-même et la ministre del’Éducation annoncent qu’ils serontréécrits arguant que « L’enseignementde l’histoire doit bien être un récit quiraconte notre appartenance à la com-munauté nationale ».

Favoriser la constructionde l’autonomie intellectuelleAinsi, il y a urgence à rappeler qu’onn’enseigne pas l’histoire pour produiredes effets d’inculcation. L’histoire sco-laire a d’autres ambitions formatricespour les jeunes d’aujourd’hui (ambitionsqui légitiment par ailleurs son arrimageà l’histoire universitaire et les exigencesde qualification de ceux qui l’ensei-gnent) : elle doit favoriser la constructionde l’autonomie intellectuelle et les aiderà affronter les défis de leur temps. Par ailleurs, la consultation « d’historiens derenom », dans ce contexte d’instrumentali-sation de l’histoire, pose question. Certes

on peut espérer un large débat pluraliste etouvert sur ces questions, mais la remise encause du projet du CSP, avant même que les

enseignants n’aient pu se prononcer sur lecontenu, a de quoi inquiéter dans ce contexted’instrumentalisation de l’histoire scolaire.Qui trop embrasse mal étreint, ainsi le risque

est grand de voir les questions au choix setransformer toutes en questions obligatoires,faute de vouloir assumer des arbitrages pou-

vant donner lieu ensuite à une suren-chère d’interprétations. Les rencontreset les échanges entre collègues, orga-nisés par le SNES, ont montré, depuisdes années, la nécessité d’alléger desprogrammes que peu d’enseignantsparviennent à « boucler » sans perdrela saveur et les finalités de la disci-pline. Cela implique notammentqu’une possibilité de choix, à l’inté-rieur des grandes thématiques, soitproposée, comme c’est déjà le cas enlycée et même en géographie au col-lège.

Entendre la professionIl est urgent de prendre d’abord letemps d’entendre la profession et defaire confiance aux enseignants qui

savent ce qu’est unprogramme d’histoireet de géographie cohé-rent, pertinent dans sesapproches et réalisabledans les horairesdédiés. Ils sauront faire

remonter les critiques constructivesafin d’améliorer le projet et sans doutede le préciser car l’absence d’explica-tions sur les différentes thématiques alargement alimenté les déclarations

les plus enflammées voire de mauvaise foi surla disparition de tel ou tel objet d’histoire. n

Alice Cardoso, groupe histoire-géographie SNES

COMME CHAQUE ANNÉE, le SNES-FSU organise un stage syndical national pour les adhérents professeurs d’histoire-géographie,dans le cadre des Rendez-vous de l’Histoire à Blois, du 8 au 10 octobre.

Le SNES-FSU présent à Blois

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CATÉGORIES

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PRIMES EN REP. La refonte du régime indemnitaire pour les établissements de l’éducation prioritaire(REP et REP+) entrera en vigueur à la rentrée 2015. Des clauses de sauvegarde sont prévues pour les établissements déclassés ou qui viendraient à l’être.

Nouvelles indemnitésD

ans les 351 collèges classés REP +, l’in-demnité est portée à 2 312 € brutsannuels, soit deux fois le montant de

l’actuelle ISS-ZEP (1 155,60 €). Dans les704 collèges classés REP, l’indemnité estportée à 1 734 € bruts annuels, soit une foiset demie le montant de l’actuelle ISS-ZEP.Par ailleurs, pour 106 établissements classés«  sensibles », qu’ils soient ou non classésREP, la NBI de 30 points est maintenue, soitl’équivalent de 1 666,90 € : même si ce mon-tant est inférieur à celui de la nouvelle indem-nité REP, le gain sur l’ensemble de la carrièreest supérieur en raison de la prise en comptepour la pension.

Clauses de sauvegardeAu total, sont concernés les professeurs, CPE,personnels administratifs et techniques, per-sonnels de direction… exerçant dans 1 161établissements du second degré. Les CO-Psyet les personnels sociaux et de santé nonaffectés dans ces établissements mais exerçantdans au moins un de ces établissements per-cevront l’indemnité REP.En cas de déclassement de la catégorie

REP/REP+, les personnels restant affectésdans un établissement déclassé conserverontle bénéfice de l’indemnité pendant unepériode de trois ans à compter de la date dedéclassement. À cette clause permanentes’ajoutent deux clauses transitoires :– les collègues actuellement affectés dansun établissement auparavant classé ZEP ouÉCLAIR mais non classé REP/REP+ conser-vent le bénéfice de l’actuelle ISS-ZEP (mon-tant gelé) pendant trois ans à compter de larentrée 2015 ;– concernant les lycées, dans la mesure où leministère n’a classé aucun lycée dans le nou-veau dispositif, et dans l’éventualité d’uneextension du classement REP/REP+, les col-lègues venant à y être nouvellement affectésdans les deux ans à compter de la rentrée2015 bénéficieront également de l’actuelleISS-ZEP (montant gelé).

Améliorer le dispositifEn actant ces avancées, le SNES-FSU reven-dique l’élargissement du régime indemni-taire mis en place aux AED et AESH exerçantdans ces établissements. Il revendique aussi

l’amélioration du dispositif : indexation del’indemnité REP/REP+ sur la valeur du pointd’indice, mise en place d’une NBI au lieud’une indemnité, augmentation de l’indemnité« clause de sauvegarde transitoire » au mon-tant REP. n Christophe Barbillat

Les stagiaires étant utilisés comme moyensd’enseignement et d’éducation, des règlesd’affectation sont nécessaires. Avant la

réforme de la formation, les règles étaientcommunes à tous les stagiaires avec desbonifications permettant de donner la prioritéaux situations familiales et administrativesantérieures. La réforme de la formation aentraîné la mise en place de règles diffé-rentes selon le concours obtenu et la situationadministrative, la situation familiale n’étanten outre plus prioritaire. Ainsi :– sont maintenus dans leur académie d’exer-cice, donc affectés hors barème, les lauréatsdes concours réservés et ceux des autresconcours avec plus d’1,5 an d’équivalenttemps plein depuis le 1/09/2012 dans la dis-cipline de recrutement ;– sont maintenus dans leur académie d’ins-cription à l’université, les lauréats desconcours externe hors agrégation, inscritsen M1 ;– les autres lauréats doivent participer au mou-vement interacadémique. Ils sont affectés enfonction des capacités d’accueil de chaque

académie, celles-ci étant diminuées par lemaintien en académie des lauréats précédem-ment cités, ce qui rend plus difficile la satis-faction de leur vœu. Ainsi 54 % des lauréatshors PLP et EPS qui participaient à la phaseinter en 2014 ont obtenu leur vœu 1 alorsqu’ils étaient 76 % en 2013.

Aux côtés des lauréatsPar ailleurs, le ministère travaille dans l’ur-gence, sans transparence, ce qui suscite denombreuses erreurs.

Le SNES-FSU, avec le SNUEP et le SNEP,a obtenu des améliorations, notamment dansle recueil des pièces justificatives. Mais denombreux problèmes demeurent, que seule ladécision de ne plus utiliser les stagiairescomme moyens d’enseignants pourraitrésoudre.En attendant, les militants du SNES-FSUdélivrent conseils et informations aux cen-taines de lauréats qui les contactent à[email protected] et au 01 40 63 29 57. n

Caroline Lechevallier

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AFFECTATION DES LAURÉATS DE CONCOURS. Les admis et admissibles aux concours doivent formuler des vœux d’affectation jusqu’au 15 juin. Ils contactent le SNES-FSU en nombre, la réforme ayant complexifié la procédure à l’excès et créé des inégalités de traitement.

Quel raz de marée !

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LE MINISTÈRE vient de communiquer une carte de sauvegarde pour 360 CIO. Toujours insuffisant !

CIO, dans la cible !E

n mars dernier, le ministère communi-quait aux recteurs le nombre des CIOqu’il s’engageait à reprendre par

académie, soit 360 CIO sur les 524 exis-tants. C’est le résultat de la bataille du SNES-FSU pour démontrer l’utilité de leursmissions institutionnelles mais c’est évidem-ment très insuffisant !Bien que le courrier adressé aux recteursalertait sur la nécessité de ne pas commencerde démarches tant que les conseils départe-mentaux ne se désengageaient pas, nombrede rectorats ont interprété cette carte de sau-vegarde comme un objectif à atteindre pourla rentrée 2015 ! Certains, comme à Rouen,poussent le zèle jusqu’à vouloir fermer desantennes de CIO, hébergées gratuitementpar les municipalités depuis plus de 40 anscomme à EU par exemple.

Toujours des fermeturesAujourd’hui, 17 % des conseils départe-mentaux se sont désengagés ou ont annoncéleur volonté de le faire prochainement, mais

la plupart des académies anticipent d’éven-tuels retraits et conduisent des tractationsavec les collectivités territoriales sans véri-table concertation avec les personnels. Ainsi,actuellement quinze CIO sont en attented’une fermeture, d’un déménagement, dontcertains comme nos collègues de Paris ou deVersailles sans information sur leur situationau 1er septembre 2015 !

Poursuivre la batailleLa concertation n’est manifestement pas lesouci majeur de nos chefs de service puisquemoins de 20 % des académies ont tenu des GTacadémiques sur la carte des CIO ! Par contre,à la faveur de la mise en place du SPRO, plu-sieurs rectorats espèrent pouvoir trouver deshébergements dans des «  lieux uniques »,imposant ainsi aux collègues des modalités defonctionnement inspirées des cités des métiers,ce qu’ils rejettent largement.L’application dès aujourd’hui de cette cartecible amputerait le réseau des CIO du tiers deses implantations actuelles, au détriment des

élèves et des parents mais au bénéfice destructures d’ordre associatif et privé. Elleserait paradoxale au moment où les CIO sevoient chargés de nouvelles missions, notam-ment dans le cadre du droit au retour en for-mation pour les jeunes décrocheurs.Il faut poursuivre la bataille pour que l’Étatprogramme, en accord avec les collectivitésterritoriales, une reprise progressive de tousles CIO. n Marie-Agnès Monnier

PHASE INTRA DU MOUVEMENT 2015

Une étape crucialeL

a campagne de vérification des vœux etbarèmes est maintenant terminée.Conscients du caractère décisif de cette

phase, les élus du SNES-FSU ont fait unimportant travail de vérification, qui a permisde faire corriger de nombreux oublis ou erreursde l’administration, et contrôlé que les droitsde chacun sont pleinement pris en compte

par les services rectoraux. Début juins’ouvre, selon les calendriers rectoraux, lapériode des commissions paritaires d’af-fectations (FPMA et CAPA). La « qualitédu mouvement » et la satisfaction desdemandeurs ne dépendent pas que de cetteindispensable phase de vérification et decorrection des barèmes. Elles dépendentaussi des postes offerts au mouvement. Laphase inter a été d’une fluidité que nousn’avions pas connue depuis longtemps.En conséquence, globalement, le nombred’entrants à l’inter dans de nombreusesdisciplines est très important. Il y a fort àparier que les viviers de TZR vont êtreaugmentés car les créations de postesfixes en établissements ne permettrontpas d’absorber tous ces nouveaux arri-vants. Le SNES-FSU continuera à être auxcôtés de ces collègues pour défendre leursconditions d’affectation et de travail.

Défendre les droits des personnelsLes rectorats vont maintenant élaborer un« projet » de mouvement, au caractère nonfiable du fait de la variabilité de nombreuxparamètres. Ce projet ne sera qu’une ébaucheinformatique et les élus du SNES-FSU tra-vailleront à l’améliorer afin de satisfaire unmaximum de demandeurs, dans le respectdes règles communes d’affectation. Les com-

Aux syndiquésdemandeurs de mutation :

actualisez vos coordonnées !Pour disposer d’une information rapidesur le suivi et le résultat de votre demande,il importe de vérifier vos coordonnées per-sonnelles sur le site du SNES (accès avecvotre code syndical personnel). Vousdevez, en particulier, actualiser le caséchéant votre adresse postale, votreadresse mél et votre numéro de téléphoneportable (envoi des résultats par SMS).Pensez aussi à actualiser vos coordon-nées après le mouvement si votre muta-tion vous amène à changer d’adresse. C’estindispensable pour que le SNES puissecontinuer à vous contacter.

Les élus des personnels, commissaires paritaires SNES-FSU

missaires paritaires du SNES-FSU vont four-nir un travail intensif, conjuguant technicitéet sens de l’intérêt général, qui les mobilisesouvent soirs et week-ends. Ce travail esteffectué dans la transparence, avec la déter-mination de défendre les droits des personnelset le paritarisme. Ce n’est qu’à l’issue descommissions (CAPA et FPMA) que nos élustransmettront à chaque intéressé un résultatfiable et définitif. n

Lionel Millot, Thierry Meyssonnier,[email protected]

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tion à des jeux dangereux (« t’es pas cap »)ou des violences morales au travers demoqueries, de quolibets, de rumeurs qui iso-lent la victime de ses pairs et la fragilisent.Plus fréquent en fin d’école primaire et aucollège, «  lors d’étapes charnières entre laconstruction de soi et l’affiliation au groupe »,le harcèlement se fonde « sur le rejet de la dif-férence et sa stigmatisation  » (apparencephysique, identité de genre, handicaps, appar-tenance à une minorité, échec ou réussitescolaire). Des études montrent les effets à trèslong terme du harcèlement sur les victimes etleurs auteurs.

Un phénomène de groupe Il implique un agresseur et des spectateurs quiinstallent une relation de domination sur lavictime. Harceleurs et harcelés partagent sou-vent la même vulnérabilité – une mauvaiseestime de soi et des difficultés relationnelles– mais gérée de manière différente. Le harceleur recherche la caution de ses cama-rades en s’imposant par la force ou la van-

tardise. Il peut utiliser aussi la dérision quiinduit une confusion (« c’était pour rire »). Lesattaques sont souvent furtives, visibles pourles camarades mais pas pour les adultes. L’ab-sence d’empathie vis-à-vis de sa victime estconfortée par le sentiment d’impunité. Il tirede sa position de force un bénéfice narcissiquequi l’entraîne vers la répétition.La victime est résignée et silencieuse parpeur des représailles et aussi par honte. Ostra-cisée par ses pairs, elle est souvent perçuecomme peu sociable et reçoit peu de soutienmême chez les adultes, ce qui génère un sen-timent d’abandon. Cette fragilisation se réper-cute sur son développement social et rela-tionnel et sur ses compétences et son assiduitéscolaires. Des troubles anxio-dépressifs peu-vent se développer avec des effets à longterme.Les spectateurs sont caution, soutenant leharcèlement ou feignant de l’ignorer, soula-gés de n’être pas victimes eux-mêmes. Ainsile harcelé ne trouve auprès d’eux ni soutien niempathie, ce qui accentue son isolement, son

Longtemps ignoré en tant que tel, ce phé-nomène a des retentissements psycholo-giques, sociaux et scolaires importants.

Des Assises ministérielles lui ont été consa-crées en 2011, un guide en ligne est à la dis-position des équipes pour « nommer le phé-nomène », « le comprendre et le repérer », « leprendre en charge et le prévenir » ainsi qu’unprotocole de traitements, mais ils ne peuventremplacer la mobilisation collective.« Un élève est une victime de harcèlementlorsqu’il est soumis de façon répétée et àlong terme à des comportements agressifsvisant à lui porter préjudice, le blesser ou lemettre en difficulté de la part d’un ou plu-sieurs élèves. Il s’agit d’une situation inten-tionnellement agressive, induisant une rela-tion d’asservissement psychologique, qui serépète régulièrement » (Olweus, 1993).Le harcèlement revêt différentes formes, plusphysique chez les plus jeunes et chez lesgarçons, plus à travers le langage chez lesplus âgés et chez les filles. Il se traduit par desviolences physiques ou verbales, de l’incita-

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Violence et tyrannie à prendre au sérieux

ALORS QUE LE HARCÈLEMENT peut se reconnaître dans de multiples dysfonctionnements sociaux, il a étéabordé dans le milieu scolaire en France seulement dans les années 2000, bien après les premières études anglo-saxonnes. Selon le ministère, 15 % des enfants et adolescents scolarisés seraient concernés.

Le harcèlement entre élèves

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sentiment de honte et de perte de l’estime desoi. Un spectateur peut à son tour devenirsoit harceleur soit harcelé.

La vigilance des adultesprise en défautC’est souvent le cas quand, pour diverses rai-sons, ils sont indisponibles à ce qui se jouedans le groupe ou quand les cadres et lesrègles ne sont pas assez structurants. C’estaussi une absence d’attention à un phéno-mène mal connu, trop banalisé qui se déve-loppe particulièrement dans des lieux pro-pices, pas assez surveillés.La mise en commun au sein des équipes per-met de mieux détecter les phénomènes et deles prévenir, notamment par des dynamiquesde groupes en classe et en dehors, plus favo-rables à la collaboration et à l’empathie. Lacohésion des équipes est un facteur protecteurcontre les violences. Des règles claires doiventêtre posées ainsi qu’un cadre de prévention etde sanctions pour lutter contre le harcèlement.Les premiers signes du harcèlement pour lavictime sont des stratégies d’évitement : retardsystématique, nouveaux trajets, dire qu’on aoublié son matériel alors qu’il a été détérioré,s’isoler dans la cour, au CDI, accumuler desabsences. Ensuite, la victime tente de sedéfendre par des attitudes agressives qui, malinterprétées, masquent le harcèlement et ren-forcent le sentiment d’abandon. Des troubleset des signes de somatisation anxieuse peuventse développer avec risques de déscolarisationet de passage à l’acte suicidaire.

Les réponses concernentvictimes et harceleursLa sanction ne suffit pas, elle doit s’accom-pagner d’une prise de conscience pour res-taurer la victime et augmenter l’empathie desagresseurs et spectateurs. Un harceleur exclu,fragilisé à nouveau sur le plan affectif, risquede répéter ailleurs son comportement : cer-tains s’enferment ainsi dans ces agissementsau risque d’une déscolarisation.Les parents sont parfois étonnés du compor-tement scolaire de leur enfant, très différent decelui qu’il présente au sein de la cellule fami-liale. Ils doivent être systématiquement aver-tis. Une médiation entre les familles de la vic-time et de l’agresseur doit être prévue, ainsiqu’une action de prévention envers la classeconcernée. Des actions plus larges peuventsuivre en impliquant les parents d’élèves et lesélèves dans le cadre du CESC. L’heure devie de classe est une occasion pour les élèvesde s’exprimer par rapport au fonctionnementdu groupe. Elle peut permettre des régula-tions mais aussi de mettre en place des pra-tiques collaboratives entre élèves, et des rela-tions plus positives.Ce phénomène mis en exergue illustre bien lanécessité dans les établissements d’un tra-vail commun sur les dimensions éducatives dela vie scolaire dans son ensemble, dans la

classe et hors la classe. Les règles de vie col-lective, l’apprentissage de la civilité, de lasolidarité entre pairs, de relations respec-tueuses doivent être fondatrices de ce qui estappelé le climat scolaire. Le rôle d’instancestelle que la « commission éducative » doit per-mettre de répondre à ces phénomènes com-plexes qui nécessitent écoute, accompagne-ment, sanction réparatrice et médiation entredes interlocuteurs multiples que sont les élèvesimpliqués et leur famille. Les regards desdifférents professionnels sont complémen-taires. La formation des personnels doit êtreeffective et présentielle, les guides et l’auto-formation en ligne ne pouvant suffire. Il fautaussi que les chefs d’établissement jouenttout leur rôle dans les prises de décisions(instances éducatives, auditions, sanctions)

et la mise en place des dispositifs de concer-tation et de prévention.Le cyberharcèlement est l’une des modalitésdu harcèlement à l’école, qui en s’affranchis-sant des limites spatio-temporelles de l’éta-blissement scolaire, peut devenir continu.L’éducation au bon usage des technologies decommunication nécessite une formation despersonnels et des parents sur les risques poten-tiels, et des dispositifs de filtrage dans les éta-blissements doivent permettre de réduire lesdérives. L’école a un rôle préventif à jouerdans ce domaine comme dans bien d’autres,encore faut-il qu’elle dispose des moyens etdes ressources nécessaires. n

Rubrique réalisée par Valérie Héraut

Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 33

Nathalie BernardCPE dans un LP de la banlieue nantaise nous fait partager son expérience

Trois questions à...

Selon vous, le harcèlement entre élèves a-t-ilchangé, s’est-il intensifié ?Dans mon lycée, il s’est intensifié avec lesSMS, Facebook, Snapchat... Il ne s’arrêteplus à la sortie du lycée, la sphère privéen’est plus protectrice. La dématérialisation,notamment l’insulte à distance, entraîne uneplus grande violence des propos, de lamoquerie aux menaces physiques, voire desencouragements au suicide dans le pire descas. Les familles interviennent parfois sur lemême mode de communication que leursenfants...L’accueil d’élèves de plus en plus jeunes,dans une période de construction de soi quipasse par l’affiliation au groupe, fait que desclasses sont souvent impliquées. Il est très dif-ficile de rendre actif le groupe de spectateurspassifs qui ne se sent pas mis en cause. Deplus, la banalisation et la médiatisation dece phénomène par leurs idoles (téléréalités...)dédramatisent les conséquences sur la victime.Par contre, les victimes et leur famille vien-nent plus volontiers en parler et le cyber-harcèlement laisse des traces matérielles quifont preuve. Le travail commence alors...

Dans votre pratique, quels types de réponsessont apportés et en quoi impliquent-elles leséquipes ?Les victimes et leur famille viennent souventchercher de l’aide et de la justice auprès desCPE mais pas seulement. Les professeursse sentent plus démunis. La première réponseest l’écoute individuelle et la prise en chargede la victime avec les infirmières, l’assis-tant-e social-e... Ensuite, le travail sur legroupe est long et passe par la prise de parole,le débat dans la classe et la sanction du har-celeur. L’impunité est désastreuse. Le chan-gement de positionnement du groupe estessentiel pour faire barrage à la dynamiquedu harceleur. L’implication du professeurprincipal montre la prise de position de toutel’équipe.

Nos élèves n’ont plus de sentiment de cul-pabilité face à la souffrance de la victime ettrouvent légitime ce qui lui arrive sans se sen-tir concernés par sa souffrance. Le discoursmoralisateur ne fonctionne pas, le débat estdonc essentiel et le soutien des enseignantsaussi. Le groupe classe doit se sentir en sécu-rité pour se désolidariser du harceleur. Le lienet le respect entre les jeunes doivent êtrerenforcés.De plus en plus souvent confrontés à ce pro-blème grave, agir collectivement pour pré-venir devient urgent. Le CESC(1), à lademande du CVL, met en place une actionavec une formation des enseignants, uneconférence pour les parents, une interventiondans les classes et un système d’alerte gérépar les pairs. Les élèves et les familles sont-elles très aver-ties de ces phénomènes ? Comment font-ilsface ?Les élèves sont de plus en plus avertis etparfois viennent alerter. La campagne NAH(« Non au harcèlement ») a servi mais il fautcontinuer à informer et former. Les famillesportent de plus en plus souvent plainte maisont une grande attente vis-à-vis de l’institu-tion. Les soutenir et briser l’isolement estessentiel d’autant plus que la victime a par-fois un profil de harcelé récurrent et dans tousles cas sa souffrance est lourde.Un certain nombre d’outils sont en lignepour les personnels, sont-ils suffisants ? Ils sont intéressants et ont permis l’infor-mation. Maintenant, il est plus difficile depasser à la construction d’actions de pré-vention qui doivent s’inscrire dans le collectifet la durée. Dans mon établissement, en plusdu stage sur site pour les enseignants et CPE,une association va intervenir auprès desélèves.

(1) CESC : Comité d’éducation à la santé et à lacitoyenneté

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sation des Indignés en Espagne, des Précairesau Portugal, des places en Grèce, d’Occupydans d’autres pays au-delà de l’Union euro-péenne (Turquie, Brésil, États-Unis...).L’Europe du Sud se révèle être un labora-toire de l’austérité imposée, mais aussi denouveaux processus sociaux et politiques.Après la période d’occupation des placespubliques, ces mouvements se sont ensuiteenracinés de façon dispersée dans la société(par exemple la plate-forme contre lesexpulsions locatives en Espagne, les mou-

vements d’auto-organisation en Grèce).La rencontre entre les organisations tradi-tionnelles et ces nouveaux processus n’apas été évidente, mais leur interaction a toutde même eu lieu, par exemple avec lesmobilisations citoyennes comme les« marées » en Espagne.Ces mouvements portent des caractéris-tiques nouvelles, que l’on retrouve aussidans un processus atypique en Allemagne(Blockupy Francfort (http://institut.fsu.fr/Blockupy-Francfort-Ce-que-les.html),

Depuis 2010, la Grèce, l’Espagne, lePortugal ont connu d’importantesmobilisations sociales contre l’austérité

imposée par les troïkas. Des mouvements« traditionnels », essentiellement conduitspar les syndicats : grèves générales (40en Grèce !), grèves sectorielles de grandeampleur par exemple dans l’éducation contredes attaques sans précédent visant les droitssociaux et les services publics.Parallèlement, d’autres mouvements plusnouveaux ont émergé à partir de la mobili-

SYRIZA, PODEMOS sont la partie émergente de mouvements sociaux et politiques qui proposent une alternative aucredo libéral (« on ne peut pas faire autrement » que l’austérité) et à son corollaire, la montée de l’extrême droiteen Europe. La brutalité des politiques imposées aux peuples d’Europe du Sud et ses conséquences, la crise sociale,l’effondrement de systèmes politiques minés par la corruption sont certes des facteurs importants mais passuffisants pour rendre compte de cette émergence.

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L’émergence de nouveauxmouvements sociaux

SOLIDARITÉ POUR TOUS« Construire l’espoir contre la peur et la dévastation », tel est le slogande ce réseau de résistance (www.solidarity4all.gr) qui regroupe en Grèceles mouvements d’auto-organisation qui sont apparus suite à l’occupa-tion des places à l’été 2011 pour répondre aux besoins fondamentaux dela population. Fondées sur une culture de la démocratie directe et del’auto-organisation, ces structures de solidarité au nombre de 400aujourd’hui, ne prétendent pas se substituer aux services publics, mais

visent à organiser la population à partir de ses besoins concrets. On yrencontre des cliniques et des pharmacies de solidarité, des épiceries etdes cuisines coopératives, des réseaux de distribution « sans intermé-diaires », des monnaies locales, l’usine autogérée de VIOME, la protec-tion contre les expulsions locatives, des « tutoriels solidaires » à l’initiatived’enseignants syndiqués, de parents, des centres culturels et des réseauxde solidarité avec les migrants.

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L’Europe sociale

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devenu Blockupy International, qui a orga-nisé l’encerclement de la BCE le 18 mars2015. Ce sont des mouvements citoyensqui cherchent à décloisonner les luttes tra-ditionnelles, à rassembler des secteurs etdes gens différents, à construire un récitcommun, à impliquer les victimes de l’aus-térité pour en faire des acteurs sociaux. Parexemple, les mouvements d’auto-organisa-tion en Grèce ont comme slogan « Ne lais-ser personne seul face à la crise » : il nes’agit pas de philanthropie mais du fait quechaque personne qui a accès à une phar-macie sociale ou à un dispensaire doit par-ticiper à leur développement.

Le « nous » de la mobilisationCes nouveaux mouvements se méfient engénéral des incantations idéologiques etpréfèrent mettre en œuvre des solidaritésconcrètes qui permettent de mobiliser unpublic large, bien au-delà des cercles mili-tants. Le mode de fonctionnement est sou-vent horizontal, en réseaux, mais en mêmetemps très organisé. Une grande attention est portée au langagequi s’écarte du vocabulaire militant tradi-tionnel et du discours de la déploration :être offensif, désigner des cibles concrètes,porter l’espoir. Le « nous » de la mobilisation n’estpas donné d’avance, ni imposé de façon verticale, il doit être co-construit avec ceuxque l’on veut mobiliser. Surtout le discoursdoit s’appuyer sur la subjectivité positive deceux et celles qui ne supportent plus ledéni de l’avenir et se mettent en mouve-ment pour faire de l’espoir une puissancecollective.C’est une dimension très importante du défique le peuple et le gouvernement grecs lan-cent aux 18 États qui prétendent faire plieret humilier les Grecs. Or ceux-ci ne veulentpas être chassés de l’Europe, mais luttentpour une autre Europe.

Pour une autre EuropeDepuis février un bras de fer oppose le gou-vernement grec à l’Eurogroupe, qui ras-semble les ministres des Finances de la zoneeuro. Médias et gouvernement ne cessent derépéter à chaque négociation que le gou-vernement grec a cédé et renoncé à son pro-gramme électoral. Pourtant la confronta-tion est toujours là et tout le monde saitqu’elle est politique, puisqu’il s’agit pourl’Eurogroupe de ruiner l’idée même de poli-tique alternative à l’austérité.Un accord doit être trouvé fin juin, maisd’ici-là la situation est très instable et toutpeut arriver.On sait que le conflit avec l’Eurogroupeporte essentiellement sur les pensions et le

droit du travail, ce qui devrait intéresser deprès le mouvement syndical.En Grèce, il y a une forte tension autour desnégociations entre États et la mobilisationsociale est comme suspendue à cette attente.Le 2 mai dernier, une réunion rassemblant dif-férents réseaux européens à l’initiative de l’Al-tersommet s’est tenue à Athènes pour essayerd’impulser des mobilisations à l’échelle euro-péenne. Une semaine d’action décentraliséedevrait avoir lieu en Europe du 20 au 26 juin,quelques jours après la sortie du rapport de lacommission pour la vérité sur la dette grecqueinitiée par la présidente du Parlement grec(cadtm.org/Comite-pour-la-verite-sur-la-dette).En Espagne, le succès des listes alternativeset de Podemos aux élections municipales etrégionales montre la vitalité de mouvementsqui ont travaillé la société en profondeur ettémoignent d’un esprit résolument offensif.Comme l’a déclaré Manuela Carmena qui aconduit la liste madrilène : « Le plus singu-lier et extraordinaire de cette campagne estque notre unique monnaie pour la faire a étél’imagination, la joie et la créativité ».À Berlin, à Rome, les marches du 20 juin surla situation des migrants seront connectéesà la question de la dette.Un appel « la Grèce est une chance pourl’Europe » signé par des personnalités, dontles dirigeants de la FSU, de la CGT et deSolidaires, est proposé en pétition par le Col-lectif Audit Citoyen (www.audit-citoyen.org).À la rentrée de septembre, une marche euro-péenne sur Bruxelles est proposée par les orga-nisations espagnoles avec une manifestation àl’occasion du Sommet européen de la mi-octobre.Une conférence citoyenne sur la dette seraitorganisée dans ce cadre. n Daniel Rallet

L’US Mag : Où en est le mouvement social en Espagne aujourd’hui ?Après le mouvement des indignés en Espagne, et pendant les der-nières années, les « marées » – blanche, contre la privatisationdes hôpitaux ; verte, en défense de l’école publique ; bleue,contre la privatisation des services d’eau ; orange, en défense desservices sociaux ; violette, pour le respect du droit des femmes

etc. – ont pris le relais de la mobilisation sociale contre les politiques d’austérité de la Troïkaet du gouvernement espagnol.

L’US Mag : Comment expliquer la montée de Podemos ?Podemos a osé lancer dans le champ politique, institutionnel et électoral les demandesdes « indignés » et des « marées », tout en promouvant une dynamique participativedirecte, à travers les assemblés des « Cercles Podemos », et à travers internet, où toutle monde, militants ou pas, discute et vote y compris au sujet des décisions les plus impor-tantes du parti.Podemos est également inspiré par l’expérience de la gauche latino-américaine qui, autourde leaders charismatiques, veut rassembler le peuple contre la « caste » représentée parl’oligarchie. Ces deux tendances coexistent, avec des frictions entre elles car en octobre dernier les élec-tions internes ont désigné une majorité insistant sur l’efficacité de structures verticales pourgagner les élections, au détriment des Cercles horizontaux. n

Pedro Arrojo (ATTAC Espagne)

Deux questions à...

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CULTURE L iv res/Revues

À LIRENotre sélection� UNE ILIADE MODERNE

« Je chante Achille, non pas saseule colère. » Ainsi aurait pucommencer Patrocle, narrateurdu remarquable Chant d’Achille,premier roman de Madeline Miller, déjà traduit en 23langues. Source de déceptionpour son père qui l’exile,

Patrocle admire le divin et parfait Achillequi trouve enfin son compagnon le pluscher, Philtatos. Le lecteur relit ainsi uneIliade moderne, belle, captivante, émou-vante avec la sensibilité de Patrocle.Achille travesti en Pyrrha pour échapperà la guerre ? C’est le stratagème mater-nel trouvé par l’omniprésente Thétis etdéjoué par l’ingénieux Ulysse. MadelineMiller donne à comprendre l’antago-nisme entre Agamemnon et Achille, l’at-tachement doux et réciproque d’Achilleà Patrocle. Un nouveau regard surAchille. Éblouissant !

Jean-Baptiste Margantin• Le Chant d’Achille, Madeline Miller, traduc-tion Christine Auché, éd. Pocket., 480 p.

� L’AMÉRIQUE LATINE AUJOURD’HUIDepuis une quinzaine d’années,dans plusieurs pays d’Amé-rique Latine, des chefs d’Étatde gauche ou de centre gauchesont arrivés au pouvoir grâceaux mobilisations populaires.Même si beaucoup reste àfaire, les progrès sont nom-

breux. Mais ces transformations ne sontpas du goût des oligarchies locales quis’accrochent à leurs privilèges. Parfoisréussies, parfois mises en échec, ten-tatives de coups d’État et déstabilisa-tions ont affecté le Venezuela, Haïti, laBolivie, le Honduras, l’Équateur et leParaguay. Dans son dernier livre, Lesenfants cachés du général Pinochet,Maurice Lemoine, ancien rédacteur enchef du Monde diplomatique, mêle passéet présent, récit, témoignages et analysepour décrypter les enjeux de ces opé-rations. Cathy Ferré• Les enfants cachés du général Pinochet,Maurice Lemoine, Don Quichotte Édition.

� UNE LECTURE QUI FAIT DU BIENCroisées dans la rue, amies ourivales, les femmes évoquéespar l’auteure nous parlent. Avecelles, nous partageons notredestin de femmes : ce corpsque nous n’avons pas choisi etque nous voyons changer, lamaternité, l’amour, la maladie.

Et nos mères dont nous savons, au boutdu compte, si peu de choses… Généro-sité, entraide, combativité les caracté-risent et le regard tendre et compliceque leur porte Sylvie Gracia n’exclutpas les hommes. Un cadeau pour noustoutes car l’écriture est un don de soi etaide à vivre ! C. Pillé• Mes clandestines, Sylvie Gracia, Actes Sud

Du côté du polar allemand...

Friedrich Ani, né en 1959, manieavec assurance une plume acé-rée, souvent poé-

tique pour mettre enscène une société, uneville M – titre de cepolar – comme Münich,secouée par un passéqu’elle n’arrive pas àdépasser. Tabor Süden est un enquê-teur curieux, dans tous les sens duterme. Ancien flic, il n’arrive pas àvivre dans cette époque troublée.Quelle époque ! Celle de ces groupes,de ces gangs nostalgiques de lapériode nazie ? Ou celle du grandespoir de changement social qui atendance à se fondre dans un horizongris et sale ? L’univers de ce détec-tive n’est pas stable. Il est comme lemonde actuel fait de plaques tecto-niques. Qui est qui ? Pourquoi tant demasques ? La seule façon de les fairevoler en éclats, c’est l’amour. Unamour impossible et désespéré quioblige à fuir ou à mourir. La vio-lence est omniprésente. Une foisencore les femmes sont les grandesvictimes, quelquefois consentantes.

L’auteure est une spécialiste de l’his-toire médiévale et son arrière-fondhistorique semble solide. ... et françaisLa Série Noire continue de fêter ses70 ans d’existence en rééditant cinqromans de Jean-Bernard Pouy : Nousavons brûlé une sainte, La pêcheaux anges, L’homme à l’oreille cro-quée, Le cinéma de papa et RN 86pour respirer l’air de ces années1980-1990 pollué par la victoire del’idéologie libérale. La résilience dePouy est toujours actuelle. La préfacede Caryl Férey revendique une filia-tion qui n’est pas à sens unique.Quant à la postface de Jean-Bernard, elle sent un peu trople temps qui passe et la pertede motivations dans unmonde par trop marqué parl’individualisme et la perted’espoir. Le titre générique de cettesomme entre en résonance avec cesentiment : Tout doit disparaître,nous aussi sans doute... n N. B.M. Une enquête de Tabor Süden, Friedrich Ani, traduit par JohannesHonigmann, Jacqueline Chambon/Noir ;La confidente des morts, Ariana Franklin,traduit par Vincent Hugon, 10/18 ; Toutdoit disparaître, Jean-Bernard Pouy,Série Noire/Gallimard.

Le coin du polar La figure de Mia Bischoff, celle parqui l’enquête arrive, reste uneénigme. Le lecteur ne sort pas intactde cette Enquête de Tabor Süden, lesud – pour faire un jeu de mots récur-rents dans ce roman – n’est pas là oùl’on croit. ... du polar historique...Changeons d’époque, de pays pourse transporter à Cambridge, dans leroyaume de Richard II, Plantage-nêt – connu surtout par l’intermé-diaire de Robin des Bois –, soit en1171 pour élucider des meurtresd’enfants par un tueur en sériecomme on ne disait pas à cetteépoque. Les Juifs sont accusés, for-cément. Il faut trouver le coupable.De Sicile, île conquise par les suc-cesseurs de Guillaume le Conqué-rant – les Normands ont laissé destraces à Palerme –, arrivent unemédecin, Adelia Aguilar, accompa-gnée d’un Juif, Simon, et d’unMaure, Mansur qui lui sert de gardedu corps. Elle est, dirait-on aujourd’hui, méde-cin légiste, médecin desmorts et La confidentedes morts, titre de cepremier opus de ArianaFranklin (1933-2011).

Pierre Loti (1850-1923) a laisséune trace étrange dans nos sou-venirs. Un romancier « exo-

tique » au style suranné et auxintrigues un peu nunuches. Il est,pourtant, loin de cette image. JulienViaud, son nom à l’état civil, aspi-rant de marine, fait partie de cesécrivains amoureux des contréesqu’il visite et des femmes qu’il ren-contre. Une surtout, Hatidjé, l’amour de sa vie commele rappellent Bruno Vercier et Alain Quella-Villèger dansla préface à cette édition en poche de Les Désenchan-tées, sous-titré Roman des harems turcs contempo-rains. Nous sommes en 1901, au moment où le doublede l’auteur, André Lhéry, rencontre trois femmes qui sedisent évadées d’un harem. Trois femmes qui refusentleur statut, qui refusent d’être quasiment séquestrées etqui se servent de l’auteur – lequel ? – pour raconter leurhistoire au monde entier. Les femmes sont voilées,véritables fantômes qui passent dans les paysages et lesespaces occupés par Loti/Lhéry. Effet de miroir avec sesautres romans dont Azyadé sans doute le plus connu maisaussi avec la ville de Constantinople, ville magique oùrien n’est jamais à sa place, ville à cheval sur deuxcontinents, ville fantôme et d’une présence tellementenvahissante qu’elle laisse sur chacun(e) une trace indé-lébile. Il faut lire la révolte de ces femmes qui refusentde vivre en recluses et veulent voir le monde.Ce roman, paru en 1906, a fait scandale et a permis deposer la question de ces harems et des droits desfemmes dans la société ottomane. Loti a-t-il été mani-

pulé ? Ces femmes étaient-ellesce qu’elles disaient être ? Est-ceune histoire inventée de toutespièces pour attirer l’attention surces femmes cloîtrées ? Ces ques-tions, posées par les préfaciers,font l’objet d’un autre livre publiéen même temps de Alain Quella-Villéger : Évadées du harem sous-titré Affaire d’État et Féminisme à

Constantinople (1906). L’auteur se livre à une véri-table enquête policière. Qui étaient ces femmes ?Pourquoi Loti a-t-il accepté ? Surtout, il décrit lasituation de ces femmes de harem mises dans l’inca-pacité de vivre. Pour combattre les stéréotypes sexisteset se rendre compte que les fantasmes ne sont que desfantasmes. La visite des palais de cette ville superbesoudain devient autre. Les ombres murmurent desplaintes, les fontaines se transforment en des lieux derétention, de surveillance. La reconnaissance ou nondes droits des femmes est un révélateur de la forme dela société. C’est aussi la leçon de ces deux livres.Pierre Loti n’est pas aussi ringard qu’il le semblait àpremière vue. Les Désenchantées – à prendre dans lesens de l’enchantement des sorcières et des fées quifont croire, par des sortilèges, qu’une citrouille est uncarrosse – est d’abord une grande œuvre, ensuite lecheminement d’une prise de conscience et de l’aspi-ration à la liberté, et aussi de la nostalgie de l’amourperdu à tout jamais. n Nicolas Béniès• Les Désenchantées, Pierre Loti ; Évadées du harem, AlainQuella-Villèger, Babel/Actes Sud

PIERRE LOTI, UN ROMANCIER RINGARD ?

Portraits de femmes

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 37

Écrit avec la complicité de lajournaliste Judith Perrignon,Et tu n’es pas revenu est une

lettre ouverte de Marceline Lori-dan-Ivens à son père, en compa-gnie duquel elle fut déportée àAuschwitz-Birkenau. Il ne revintjamais alors que la jeune fillequ’elle était a survécu.Même si on a lu des dizaines delivres, d’articles sur les camps,même si on a vu le monumentShoah de Claude Lanzmann quiavait libéré la parole des survivantsil y a déjà trois décennies, il faut lirece témoignage. Les données his-toriques sont connues : 6 millionsde morts, la « Solution finale »,Wannsee, Eichmann... Les récitsindividuels, en l’occurrence celui-ci implacable d’une jeune filleaffectée au tri des vêtements deceux et celles envoyés dans leschambres à gaz. À son âge avancé,elle repasse en accéléré une vieentière marquée par ce moment.Il y a ce père adoré qu’elle croiseune fois dans le camp, après qu’ilsaient été séparés et dans les brasduquel elle se précipite jusqu’à cequ’un soldat allemand les sépare àcoups de crosse. La jeune fille perdconnaissance et lorsqu’elle revient

à elle, elle tient entre ses doigtsune tomate et un oignon.Le plus troublant, pour qui n’a pasconnu cette époque, c’est le retourdu camp : une mère qui ne vientmême pas accueillir sa fille à lagare et ne comprend pas ce qu’ellea vécu, un frère et une sœur quin’ont pas été déportés mais se sui-cident. Et cette conclusion qui laissepantois : « Il y a deux ans, j’aidemandé à Marie, la femmed’Henri [l’un de ses frères, ndlr] :“Maintenant que la vie se termine,tu penses qu’on a bien fait de reve-nir des camps ?” Elle m’arépondu : “Je crois que non, onn’aurait pas dû revenir. Et toi,qu’est-ce que tu en penses ?” Jen’ai pas pu lui donner tort ou rai-son, j’ai juste dit : “Je ne suis pas

loin de le penser.” Mais j’espèreque si la question m’est posée àmon tour juste avant que je m’enaille, je saurai dire oui, ça valait lecoup. »Ce récit très personnel est avanttout un témoignage sur la naturehumaine à portée universelle. Ilfaut le lire pour dépasser la « ques-tion juive », pour dépasser nos cli-vages et nos querelles stériles, ets’interroger sur cette force des-tructrice qui est en nous, et qui,aujourd’hui encore, sous desformes différentes, plonge lemonde dans une inquiétante spiralede dislocation. n Stéphane Rio• Et tu n’es pas revenu, Marceline Lori-dan-Ivens, Grasset, 2015

Dystopie captivanteMingus, mi-homme mi-lion, robusteet intelligent, est le fruit d’unemanipulation génétique. Il tue acci-dentellement son « père », unsavant génial et s’enfuit à la décou-verte d’un monde dont il étaitjusque-là protégé, avec Nin, une jeunehumaine. Au fil des rencontres, parfois ami-cales, parfois hostiles, il découvre unesociété effrayante où l’information est mani-pulée, les inégalités sociales érigées en sys-tème, l’environnement sacrifié et leshommes, dégénérés, victimes d’allergiesmortelles. Convoité par des rebelles puispar une secte religieuse, échappera-t-il au« Präsi » ? En effet, le dictateur cloné espèrel’utiliser comme modèle, modèle qui pourraitbien être la dernière chance de survie pourl’espèce humaine... Catie Pillé• Mingus, K. Von Waberer, Le Rouergue

FOR THE KIDS

NOS COLLÈGUES PUBLIENT� UNE PLANÈTE TRÉPIDANTELa Terre ne tourne pas rondet elle n’est pas parfaitementsphérique. La chose est aujour-d’hui relativement connue. Onsait moins le comment. Cetteconnaissance des difformitéset des «  trépidations  » denotre planète s’est construite par épi-sodes. Xavier Campi revisite les plusconnus sans jamais se contenter d’enreproduire les récits. Il expose aussi lesréponses les plus actuelles aux ques-tions de géodésie, de mesure du tempsou de localisation. Un ouvrage à recom-mander pour les CDI. S. R.• Xavier Campi, La Terre ne tourne pas rond.Une histoire de formes et de mouvements,éditions Cassini, Paris.

� LAÏCITÉ ÉMANCIPATRICE ? Livre modeste mais utile denotre collègue J. Sarraméa quifait le point sur cette notionô combien porteuse d’émanci-pation, aujourd’hui récupérée etutilisée à tort et à travers etparfois de la plus douteuse desfaçons ! L’auteur donne avec conci-sion une définition de la laïcité, en faitl’historique, et analyse les interpré-tations et débats d’hier et d’aujour-d’hui. En annexe se trouvent des textestrès bien choisis qui ajoutent à la sub-tilité de l’ouvrage. S. R.• La laïcité, parlons-en ! Jean Sarraméa,Éditions Tarmeye

� TRAJECTOIRE POLITIQUELucien Chich, dans cette col-lection Je suis..., a voulu redon-ner vie à Jean Zay, ministre del’Éducation nationale, à 32 ans,du Front populaire en 1936,assassiné en 1944 par la Miliceet qui a jeté les bases de l’Écoled’après-guerre. En un style alerte,Jean Zay/Chich retrace sa vie et sacarrière qui est aussi une partie del’histoire des espoirs de cette périodeet une illustration de sa barbarie.• Je suis... Jean Zay, Lucien Chich, JacquesAndré éditeur

En couverture, unepieuvre inspirée del’adaptation de

Vingt mille lieues sousles mers par Disney.L’album de Tom Tira-bosco revient aussi biensur les origines de sa

vocation artistique que sur ses peurs d’enfant. À mi-parcours l’artiste livre une autobiographie sincère desa naissance au collège. Il lui aura fallu plus de dix anspour écrire et dessiner son œuvre la plus person-nelle, « doser l’anecdote, l’humour et les choses sen-sibles ». Moins connu que Frederick Peeters, autreauteur de BD genevois, Tom Tirabosco mène depuisplus de vingt ans une riche carrière de dessinateur dansla BD (Kongo, Sous-sols, La fin du monde) commedans la presse et l’illustration jeunesse. Sa techniquedu monotype et de la craie grasse rend son styleidentifiable au premier coup d’œil. L’intensité desnoirs s’y allie à la douceur du fusain.En 1965, son père, réceptionniste dans un hôtel deRome, a le coup de foudre pour une cliente suisse.Antonio et Jacqueline se marient six mois plus tard. Lepetit Tommaso naît peu après. Très vite entre les parentsles premières disputes éclatent. Ce père italien volca-nique a un tempérament éruptif. La vie du couple estexplosive. La famille va être ensuite éprouvée par l’ar-rivée du frère cadet, Michel, un enfant né avec une

malformation des deux bras et d’une jambe. « Les pho-tos de famille n’enregistrent jamais les cris, les larmeset le désespoir. » Une large place est faite à la relationavec ce frère énergique et battant : « Michel et sa pro-thèse sont de vraies terreurs dans le village ». L’épi-logue de quatre pages réunit l’auteur quadragénaire etson frère Michel, devenu depuis un musicien renommé.Il montre les différences de ressenti. Tommaso étaitadmiratif et parfois agacé de la force de caractère deMichel. Pour Michel, Tommaso était celui qui réussissaitet faisait tout mieux que lui. Avec Wonderland, Tom Tirabosco rend hommage àcette famille exubérante et aimante qui l’a construit.Artiste contrarié, son père peignait des Madones à par-tir de photos de Playboy. Sa mère lui a inculqué desvaleurs de solidarité, l’idée de se battre pour faire valoirses droits, l’engagement pour les causes environne-mentales. Au confluent de ces influences, la nature : leBois de Jussy, terrain de jeu de son enfance, « la forêtde Blanche Neige ou celle des tableaux de CasparDavid Friedrich ». Parmi les artistes déterminants l’au-teur cite également Zdenek Burian un dessinateurtchèque oublié qui l’hypnotisait avec ses tomes de la Vieprivée des animaux. Dans une époque sans jeux vidéoni écrans tactiles, la forêt, les prés, les champs évoquentles jeunes années avec leur insouciance et leursangoisses. Une chronique familiale qui se veut aussi lachronique d’une époque. n Stéphanie Marco• Wonderland, Tom Tirabosco, Atrabile, 2015

ET TU N’ES PAS REVENU, DUR ET BOULEVERSANT

L’amour en enfer

Les enfants de déportésComment Grandir aprèsla Shoah ? Commentexprimer l’indicible ?Comment transmettre ?Ce livre et cette exposi-tion font état de la fonda-tion de foyers, de colo-

nies par les militants juifs communistes pouraccueillir entre 1945 et 1951 ces enfants. N. B.• Grandir après la Shoah, Serge Wolikow et Isabelle Las-signardie, Les Éditions de l’Atelier ; exposition jusqu’au30 juin au musée de l’Histoire vivante, Montreuil (93).

Le coin de la BDTom Tirabosco, chronique d’une enfance

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38 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

Dans la banlieue de Dehli, Titli est le benjamin d’une fratrie quis’est spécialisée dans le trafic de voitures volées. Des actionssouvent musclées, montées sous le regard complice (ou impuis-

sant) d’un vieux père, homme au foyer, passif. Titli caresse d’autresprojets que de participer aux magouilles familiales. Alors qu’ildécide de prendre son envol, ses frères lui font épouser, contre songré, une jeune voisine. Ils font miroiter à la famille de l’épousée demirifiques projets. Les braqueurs de voitures du récit ne sont plusdes jeunes gens, l’aîné des frères a 40 ans. Le manque de profes-sionnalisme dont ils font preuve, les échecs de la plupart de leurscoups, laissent à penser que leur solution de survie n’est pas un choixdélibéré. Que les circonstances ont joué le plus grand rôle. Sous cetéclairage, le film de Kanu Behl cesse d’être une histoire de malfrats,d’une bande de « bras cassés », pour devenir un constat de la réa-lité urbaine en Inde. Les sujets de société, la grande misère, lesmoyens de survie auxquels on peut avoir recours pour y remédier,le mécanisme des mariages forcés, la situation de la femme enInde... se greffent au récit. Ce contexte engendre la plus grande vio-

lence, des actes répréhen-sibles qui n’étaient pas dansla mentalité des protagonistesmais qui se sont petit à petitimposés à eux. L’horreurs’intègre au quotidien et l’es-croquerie au mariage forcéfinit par faire pâle figure,comparé aux crimes commis.Titli, une chronique indienne,qui s’annonçait comme unfilm d’action, s’affine au fur et à mesure qu’on avance dans le récitet que se précise le personnage de la jeune femme. Celle-ci fera long-temps figure de victime et le secret qu’elle porte lui permettra de serapprocher de son jeune époux et de l’aider, contre toute attente, às’autonomiser. Une chronique passionnante dont les rebondisse-ments ne surviennent pas toujours là où on les attend. n

Francis Dubois

CINÉMAComment être Chinois ?

Tang Jia Ling est un villagede la banlieue de Beijing(Pékin). Cette agglomérationa connu l’arrivée dans sesmurs de milliers de jeunestravailleurs diplômés qui s’ysont installés à cause du prix

des loyers abordables. Très vite, cetteruée dans un même secteur a entraînéune pénurie d’emplois, une montéedes prix des loyers et des abus de lapart des logeurs et des employeurs.Ces jeunes gens surdiplômés se sontretrouvés pris au piège de l’endette-ment et obligés d’accepter desemplois très éloignés de leur forma-tion. Cette population qu’on a appe-lée La tribu des fourmis, née dansles années 80-90 a connu le tour-billon des réformes du pays. Ils auronttraversé le socialisme, la Pere s troïkaet le capitalisme.Si le film de Huilong Yang (quiappartient à cette génération) n’estpas un documentaire, il montresans misérabilisme, à travers le quo-tidien d’un trio d’amis, la vie réellede ces jeunes affaiblis et désespérésqui tentent de survivre dans cesmégapoles par ailleurs prospères.Ils ne manquent ni d’ambition nid’énergie mais ils sont simplementles victimes d’une situation écono-mique dont ils sont les grands per-dants. n F. D.• La Tribu des fourmis, un film de Huilong Yang (Chine).

SÉRIEUn collectif fascinantRodrigo, chef d’orchestre au stylerock star, dirige désormais le Phil-harmonique de New York, bouscu-lant les musiciens habitués à un clas-

sicisme tranquille.Comment faire tra-vailler ensembletoutes ces person-nalités si diffé-rentes aux egospuissants ? Hailey,jeune hautboïste,que Rodrigo décide d’aider, par-viendra-t-elle à s’intégrer dans cetorchestre prestigieux ? Recours aux drogues, personnagesfantaisistes, recherche frénétique demécènes, problèmes de fin de moiset de santé nous plongent dans l’uni-vers méconnu des musiciens clas-siques, sans jargon. n C. Pillé• Mozart in the jungle

MUSIQUE• CLASSIQUEVoyage à Venise

C’est au début duXVIIe siècle qu’est néle concerto pourhautbois, instrumentun peu délaissé dans

ce genre musical, si on le compareau piano ou au violon. Ce CD réparedonc une injustice et nous proposeles plus beaux concertos qui furentcomposés pour cet instrumentenjoué, parfois mélancolique. Lesmusiciens vénitiens sont ici à l’hon-neur. Les concertos de Vivaldi etd’Albinoni, au rythme vif et rapide,permettent à l’instrument de briller.Quant à celui de Marcello, bienconnu du grand public pour avoirété transcrit par J.-S. Bach pour cla-vecin seul, il est ici présenté dans saversion originale pour hautbois. Lesthèmes de ce concerto mélancoliquesont particulièrement évocateurs etrésonnent encore à l’oreille de l’au-diteur longtemps après l’écoute. Un

disque superbe, magnifiquementinterprété, qui propose un voyageoriginal dans la ville de Venise, auXVIIIe siècle. n Nicolas Morvan• Concerti veneziani per oboe,Ensemble Zefiro, Alfredo Bernardiniau hautbois. Outhere music.

Un double salut à MahlerPour le 155e anniver-saire de Gustav Mah-ler, Actes Sud rééditedeux textes de StefanZweig décrivant à lafois le personnage etle compositeur, géniede la musique destemps modernes. Unemise en situation nécessaire pourcomprendre la place du chef d’or-chestre et créateur d’univers dansces années 1910-1915 marquées parle déclin de cette culture viennoisedont Mahler est à la fois le conti-nuateur et l’un des fossoyeurs.Le livre-disque consa cré à la Sym-phonie n° 5, écrite en 1901-1902,

remaniée en 1911, parl’Orchestre NationalBordeaux-Aquitaine,sous la direction dePaul Daniel, permetde mêler les explica-tions via le livret et

l’écoute. Une symphonie qui débutedans les ténèbres pour aller vers lalumière de l’amour. Il faut savoirredécouvrir périodiquement ce com-positeur capable d’agglomérer lesmusiques populaires et savantes. Lestextes inédits de Zweig viennent,comme un contrepoint, du passé pouréclairer le parcours de ce person-nage hors norme. Nicolas Béniès• Le retour de Gustav Mahler,S. Zweig, Actes Sud ; Mahler, col-lection « ONBA Live »/Actes Sud.

• JAZZColtrane, la quête esthétiqueJohn Coltrane (1926-1967) fait partie desgénies de notre temps.Il a marqué de sonempreinte toutes lesmusiques. Luc Bou-quet, batteur dans lecivil, s’est livré à untravail ahurissant derecherche des enregistrements« live » du saxophoniste. Il en a faitColtrane sur le vif. Il développe à lafois l’intérêt artistique, le momentde la prise, la place dans la chrono-logie des enregistrements officielset la qualité technique des CD com-mercialisés. Il en dit beaucoup sur larecherche effrénée de nouveaux hori-zons, de nouvelles sonorités et d’unchamp des possibles toujours renou-velé du créateur. N. B.• Coltrane sur le vif, Luc Bouquet,éditions Lenka Lente.

CULTURE Cinéma/Théât re/Spectac leTITLI, UNE CHRONIQUE INDIENNE, UN FILM DE KANU BEHL (INDE)

Comment être Indien ?

100 ans et toute sa forceBillie Holiday, née Eleo-nora Fagan le 7 avril 1915à Baltimore, est la voixessentielle du XXe siècle.Surnommée Lady Day,elle a illuminé toutes lesnuits. À chaque fois – àl’exception de Paris – ellea su, par on ne sait quel sortilège,conquérir le public. Ce livre-là, Ladyin Satin mis en texte par l’auteureanglaise Julia Blackburn, permet,via les témoignages des contempo-rains, de dresser un portrait multiplede ce génie de la musique.• Lady in Satin, Billie Holiday, portraitd’une diva par ses intimes, JuliaBlackburn, traduit par Nicolas Gui-chard, Rivages Rouge.

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Arpenter  l’expositionconsacrée à MichelLeiris, suivre le cata-

logue conçu de manièrechronologique, provoquel’étonnement devant lacuriosité insatiable de cepoète/ethnologue né en1901 qui incarna le XXe

siècle. Son parcours permetaussi d’approcher la notionde modernité comme celled’avant-garde. Il fut detoutes les révoltes de cesiècle, fusion étrange de guerres et de révo-lutions. Le jazz, musique révolutionnaire,après la première boucherie mondiale, lesynthétise en lui donnant son rythme, sonbattement. Il était logique que Leiris y par-ticipe, reconnaisse cette musique comme lasienne, à l’instar de la plupart des surréalistesà la double exception de Breton et Bataille.Il l’écrira souvent dans la revue Documents.Cette porte d’entrée, sans être oubliée, ne sertpas d’armature au catalogue. Pourtant, cettepassion explique l’orientation future de Lei-ris vers l’ethnologie et la reconnaissancedes arts africains et des cultures orales. Ilprendra conscience des effets destructeurs ducolonialisme qu’il démontrera dans sesfameuses leçons sur l’ethnologie. Qui sontaussi un appel à l’engagement au combatcontre l’oppression, pour l’émancipation.Le jazz, comme il l’écrira en 1939 dansL’Âge d’homme, «  fut un signe de rallie-ment, un étendard orgiaque » pour toute lajeunesse en révolte contre la barbarie decette Première Guerre mondiale. Ne pas yinsister c’est refuser de comprendre les réfé-rences communes de cette génération. Coc-teau, les dadaïstes, Darius Milhaud, Maurice

Ravel pour n’en citer quequelques-uns firent de cettemusique sans nom leurmusique, la musique del’avant-garde culturelle. La leçon du jazz ne serajamais oubliée, leçon derévolte, d’ouverture d’esprit,de respect, de fraternité. Unesorte de définition del’homme Leiris avec toutesses facettes, toutes ses orien-tations, toutes ses décou-vertes. Sa poésie en gardera

les traces. Il fera jouer les mots pour en extraireun suc inédit. Ce sera le cas dans Glossairej’y serre mes gloses (réédité dans Poésie/Gal-limard en même tempsque Bagatelles végétales).Il faut malaxer les mots,les secouer pour les forgeret leur faire dire sa vérité.Il avait pris des leçonschez Billie Holiday. Il estaussi question, dans lecatalogue, entre autres deGeorges Henri Rivière,autre fana de jazz et pia-niste à ses heures, portraituré par Leiris, unauteur oublié qu’il faudrait redécouvrir.Picasso est aussi de cette fête mais les liensde Leiris sont plus forts avec André Massonet Joan Miró avec lesquels Leiris partagentdes secrets criés à tous les vents sans que lemystère soit éclairci. Rencontrer Leiris estnécessaire. Aujourd’hui ! n

Nicolas Béniès• Leiris & Co., catalogue sous la direction d’Agnèsde la Beaumelle, Marie-Laure Bernadac et DenisHollier, Gallimard/Centre Pompidou Metz, expo-sition jusqu’au 14 septembre 2015.

Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 39

Ferrat au cœur !La jeune artiste NatachaEzdra, après l’interpréta-tion des beaux textes dontelle est l’auteure, a travailléson précédent album avecJean Ferrat qui appréciait«  son timbre de voix, sasensibilité, la justesse de son interprétation »... etle spectacle qu’elle préparait autour de ses chan-sons, juste avant qu’il nous quitte. C’est avec lacoopération de quelques autres grands de lachanson porteuse de sens et d’émotion, commeMichel Bühler, Serge Utgé-Royo... et beaucoupd’autres musiciens et artistes, avec l’ensemblevocal Que Lou Di Lam, qu’elle nous propose dedécouvrir une nouvelle interprétation et orches-tration de onze chansons importantes de Ferrat,enregistrées partiellement en public dans la salleOlivier Messiaen de Grenoble. Philippe Laville• Ferrat au c(h)œur, Mistiroux Productions. Album àcommander auprès d’Édito/Mistiroux – [email protected] – 01 43 52 20 40

MUSIQUEUn troubadour moderne

David Sire publie son 8e al -bum, un album à la musiquedépouillée et aux paroles enprise avec un temps qui aoublié la fraternité. Le titremême, Je est un nous, est

une invite à lutter contre l’individualisation, contretous les réflexes soi-disant identitaires pour allerà la rencontre de l’autre. Un message qui devraitêtre entendu. N. B.• Je est un nous, David Sire, L’Autre Distribution

Le Musée de la Mode du Palais Galliera nepropose que des expositions temporaires,les collections étant trop fragiles pour

être montrées en permanence. Jeanne Lanvin(1867-1946) y est à l’honneur jusqu’au23 août. Celle qui a installé la « haute cou-ture » comme un art à part entière lors de l’ex-position internationale des arts décoratifs de1925, a ouvert sa maison de couture en 1889.Albert Elbaz, qui la dirige aujourd’hui, aconçu l’exposition avec le conservateur Oli-vier Saillard. La scénographie est particuliè-rement réussie. Les robes, présentées sur desmannequins ou dans des vitrines, sont mon-trées sous toutes les coutures (sic) grâce à desjeux de miroirs astucieux. Plutôt que pré-sentées chronologiquement, les œuvres sontregroupées par styles. Des objets, chapeaux,dessins, carnets d’échantillons, des vidéoscomplètent le tout.

Ce qui frappe d’emblée,dès la première salle oùsont montrées les robesdu soir des années 20 à30 (extraordinaire MyFair Lady), c’est la beautéet la modernité del’œuvre. Les robes sont souvent noires,ornées de blanc, d’ivoire ou de doré. Commesur celles des autres salles, les surpiqûres,applications, lacets cousus, broderies, perlesou cristaux, rubans, nœuds créent des motifssouvent géométriques. Le bleu apparaît dansles années 40 et certaines sont plus colo-rées. Toutes, à l’exception peut-être des« robes de style » plus datées, sont encore « àla mode » aujourd’hui. n Sylvie Chardon• Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville deParis, 10, av. Pierre-Ier-de-Serbie, 75116 Paris.Tél. : 01 56 52 86 00, www.palaisgalliera.paris.fr.

Au Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris

La modernité de Jeanne

Expositions

L’actualité culturelle

www.snes.eduDe nombreux nouveaux articles complètent cespages sur www.snes.edu/-Culture-.html chaquesemaine. Une dizaine de rubriques à suivre et laliste de la centaine de lieux culturels et festivalspartenaires « Réduc’SNES » (tarif réduit surréservation et présentation de la carte SNES)dans toute la France... Sont déjà présentés dansce cadre quelques-uns des festivals de l’été quifigureront dans le cahier spécial de L’US Mag dejuin, en particulier lorsqu’il est conseillé deréserver sans attendre fin juin.Continuez à nous informer des lieux ou festivalsque vous appréciez et qui ne seraient pas par-tenaires pour qu’ils le deviennent...

[email protected]

Faire vivre les revues pour faire vivre la réflexion

Raison présente est éditée par les Nou-velles Éditions Rationalistes et a décidéd’une nouvelle vie. Pour ce faire, elle abesoin de lecteur(e)s. Ce n° 193 estconsacré à La fabrique des imaginairesnationaux en prenant comme exempledes pays comme le Mexique, le Para-guay, les Philippines et la place parti-culière de la franc-maçonnerie, la Mon-golie vue du côté des intellectuels pourreconstruire des traditions, le Tibet, enfin laconstruction d’une identité partagée entre laFrance et l’Algérie. Des réflexions nécessairespour alimenter un débat toujours renouvelé sur lamémoire, l’histoire et l’identité. N. B.• Raison présente n° 193, www.union-rationnaliste.org

Portes d’entrée dans la modernitéMichel Leiris au Centre Pompidou Metz, « Leiris & Co. »

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40 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

ENTRETIEN SOPHIE WAHNICH

L’US : Au moment où certains cherchentà dire, avec ferveur, leur attachementà la République et ses « valeurs »d’ouverture, il est tentant de vousinterroger sur ce qui fonde les rapportsqu’entretient notre pays avecl’extérieur...Sophie Wahnich : La Révolutionfrançaise est indéniablement unévénement fondateur, mais aussiparadoxal, dans la construction del’altérité politique. Au moment oùles révolutionnaires s’assignentcomme tâche ultime la constructiond’une humanité régénérée etfraternelle, s’institue en effet unevéritable hiérarchie morale etpolitique entre les peuples. La nationconstituée fait face, dans son œuvrede régénération, non seulement auxpopulations sauvages qui n’ont pasencore conquis leur liberté, maisaussi aux peuples – au premier chefles Anglais – qui, tout en connaissantle droit, lui substituent l’emploi de laforce dans leur rapport avecl’extérieur. Cette précocecondamnation de l’impérialismesous toutes ses formes(esclavagisme, colonisation...)prouve la conscience très fortequ’ont les révolutionnaires de lanotion de crime contre l’humanité.L’étranger, c’est celui qui se rend coupablede lèse-humanité en faisant obstacle àl’œuvre de régénération. C’est donc avanttout le contre-révolutionnaire. Dès 1789, la« faction de l’étranger » conspuée par lesrévolutionnaires s’identifie au « complotaristocratique ». Aux grandes heures de laRévolution, l’altérité n’est pas raciale, elleest fondamentalement pensée en termespolitiques.

L’US : Comment s’exprime ce paradoxe entrele dessein cosmopolitique de la Révolution et la réalité du conflit qui l’opposa à l’Europe ? S. W. : Les étrangers ont été inclus dans lacommunauté citoyenne à un degré inégalé

étrangers pouvant faire état d’un ande présence sur le territoire et depratiques conformes aux mœursrépublicaines (épouser une Française,travailler, élever un enfant, nourrir unvieillard...). Cette inclusion trèslibérale indique en contrepoint quel’autre, c’est l’étranger à la cité :c’est celui qui ne crée pas de liens.C’est l’oisif.Malgré les avertissements de ceuxqui, comme M. Robespierre,considèrent que l’on ne peut aider lespeuples à se ressaisir de leurs droitsen les conquérant, la guerre estproclamée en avril 1792. Elledégrade en profondeur les rapportsexistant entre la nation et les résidentsétrangers. Des comités desurveillance sont créés à leur endroit.On prévoit d’exiger que les hôtes dela République portent un ruban pourêtre reconnaissables. On emprisonne,puis on reconduit aux frontières lesressortissants des puissances enguerre contre la France. LaRévolution assiégée a donc misen place rapidement la gammeprocédurale de l’exclusion desétrangers que nous connaissonsencore aujourd’hui. Mais cetteméfiance à l’égard des étrangers s’est

exercée dans une cité ouverte, où lecosmopolitisme restait l’horizon del’humanité et où la liberté des mœurs étaitgarantie. Il ne faut en effet pas oublier quel’exclusion n’a jamais eu pour cible desgroupes religieux. La liberté de conscienceest assurée aux protestants dès 1789. Endécembre, Clermont-Tonnerre défend avecforce devant l’Assemblée l’appartenancedes Juifs à la communauté des citoyens.L’orateur insiste alors sur le fait que leursrites n’empêchent en rien leur intégration aucorps civique. Face aux surenchèresextrémistes actuelles, c’est une belle leçon àretenir : le fait communautaire ne poseaucun problème à la République tant qu’il sesitue sur le plan des mœurs.

« La V e République a brisé le rêved’une République française à visée universelle »

© D

R

Titulaire d’une thèse sur l’étranger dans la Révolution et directeur de recherche au CNRS,Sophie Wahnich est une des spécialistes reconnues de la période révolutionnaire. Elle a publié

de très nombreux ouvrages sur le sujet depuis une quinzaine d’années. Elle est également investiedans la cité, comme en attestent ses prises de positions médiatiques depuis que la question

de la République a été si tragiquement replacée, il y a quelques mois, au centre du débat public.C’est donc la militante, tout autant que l’historienne, que nous avons interrogée.

de 1789 à 1793. Participant activement à lapolitisation de la société, les plus richesd’entre eux sont des citoyens comme lesautres. Tout comme elle instaure le suffrageuniversel, l’insurrection populaire de 1792permet de généraliser l’inclusion desétrangers dans la communauté citoyenne.Deux semaines après la prise des Tuileries,le poète A. Chénier propose de conférer letitre de Français aux étrangers qui ont bienmérité de l’humanité. Des hésitationss’expriment au sein de l’Assemblée, maisG. Washington, T. Paine, le baron prussienAnacharsis Cloots et treize autrescombattants de la liberté finissent pardevenir Français par décret. La Constitutionde 1793 quant à elle proclame citoyens les

« Le fait communautaire ne pose aucunproblème à la République tant

qu’il se situe sur le plan des mœurs »

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 41

sais qu’en fonction du lieu où l’on défilait,les impressions pouvaient être différentes.La communauté maghrébine ne s’estreconnue ni dans le slogan « Je suis Charlie »,ni dans les exhortations étatiques à« défendre la République ». Au-delà de laquestion de leur origine, les citoyens n’ontpas investi d’espace de délibération pourcirconscrire leur camp et pour définir ce àquoi ils voulaient s’affronter. Je vois danscette mobilisation, notamment dans sesformes et dans sa massivité, davantage unemanifestation de deuil qu’une démonstrationde combativité. La France a fait le deuil despersonnes abattues, mais aussi d’unecertaine quiétude qui était ancrée dans biendes têtes. Le pouvoir n’a d’ailleurs pashésité à instrumentaliser cette réactionaffective en adoptant en urgence une loisécuritaire, votée le 5 mai dernier, qui risqued’entamer le droit des citoyens à résister àl’oppression. D’après les sondages, unemajorité de nos concitoyens seraientd’ailleurs prêts à abandonner une partie deleurs libertés individuelles et collectivespour combattre le terrorisme. La confusiondes esprits est telle que peu de gens trouventà redire sur le fait que le combat contrel’islamisme, mené au nom des Lumières...imposerait de brader les fondements mêmesde la pensée des Lumières !

L’US : Vous venez d’évoquer le droit derésistance à l’oppression. C’est une notioncentrale dans votre réflexion.Pouvez-vous l’expliciter ?S. W. : Elle constitue l’un des quatre droitsfondamentaux de l’Homme selon laDéclaration des droits de 1789. C’est dire sila présence de ce droit à la résistance à côtéde la liberté, de la propriété et de la sûretén’est pas le fruit du hasard. Il puise tout sonsens dans la notion de liberté comprisecomme relation de non-domination. Envertu des conceptions sensualistes en vogueau XVIIIe siècle, on considérait alors que tout

rapport de domination poussait l’opprimé,en tant qu’être naturellement libre, à selever contre cet état de fait. Le moment1789 rajoute à cette théorie répandue l’idéed’un droit légitime à résister. Pour Siéyès,qui a participé activement à l’élaboration dela Déclaration des droits de l’homme et ducitoyen, les rapports sociaux qui opprimentne relèvent pas du droit. La violenceoppressive ne peut qu’être illégale etillégitime. La résistance à la domination estquant à elle porteuse de droit, car, ennommant le lieu de l’oppression, ellepermet une production législativecorrectrice. La violence qu’emploient lesopprimés pour (re)conquérir leur droit est àce titre nécessairement légale et légitime.Aujourd’hui, les théories libérales ontbanalisé l’idée que la société n’était pasfondée sur des rapports réciproques de non-domination, mais sur des relations de guerrecivile latente entre individus et entre nations.L’autre n’est plus considéré comme unmoyen pour être libre, mais comme unobstacle qu’il s’agit d’éliminer. La violencedes dominants a gagné en assurance et celleemployée par les dominés a étédélégitimée... L’hypothèse révolutionnairefaisant de la résistance à l’oppression ledroit humain suprême survit fortheureusement dans certaines poches derésistance qu’ont pu constituer les« printemps arabes », ainsi que lesmouvements de types « indignés » et« occupé ». À l’heure où les crimes delèse-humanité des puissants crèvent lesyeux, il serait salvateur que les peuplesmettent à l’ordre du jour la question de larésistance à l’oppression comme s’efforcentde le faire Syriza en Grèce et bientôt peut-être Podemos en Espagne. n

Propos recueillis par J.-F. Claudon

(1) Voir Todd Shepard, 1962 : comment l’indépendancealgérienne a transformé la France ?, Payot, 2012.

L’US : Vous avez eu récemment l’occasion de revenir, pour rendre compte des événements de janvier, sur la questioncoloniale dans les années 1950. En quoi cet éclairage vous paraît-il opérant ? S. W. : Le XIXe siècle a été celui de la« tyrannie du national », pour reprendre letitre d’un livre de Gérard Noiriel. LaIIIe République, malgré ses proclamationshumanitaires, a été fidèle à son époque endévoyant les idéaux de 1789. La France, enasservissant d’autres peuples, a bel et bienperpétré ces crimes de lèse-humanité quedénonçaient les révolutionnaires. Lahiérarchie politique entre nations a laissé laplace à une typologie binaire relevant desmœurs (peuples adultes/peuples enfants).En conséquence, c’était au nom de laLiberté et de l’Égalité, donc des valeurs dela Révolution, que s’est déployé le projetanticolonial dans l’immédiat après-guerre,comme le prouve la proclamationd’indépendance indochinoise de 1945.La IVe République devint le lieu du combatentre ceux qui pensaient une inclusionpossible de l’altérité indigène et ceux qui larefusaient. Cette lutte eut pour cadre unparlement multicolore où les représentantsdes colonies étaient nombreux et influents.Preuve en est la carrière du GuyanaisGaston Monnerville qui parvint à se hisser àla tête du Sénat ! De nombreux intellectuels,qui rêvaient d’une France métissée,susceptible de devenir le creuset d’unenation nouvelle et dépassant l’antagonismeentre métropole et « empire », ontfinalement suivi De Gaulle. Ils ont eu pourseules récompenses l’exclusion des élus descolonies, ainsi que l’abandon total desterritoires africains, sans aucunaccompagnement politique, économique ouencore culturel par la métropole. Le résultat,ce fut les « institutions blanchies » de laVe République(1), qui ont brisé le rêve d’uneRépublique française à visée universelle.

L’US : Précisément, quels liens faites-vous entre ce renoncement à l’universel républicainet les événements de janvier 2015 ?S. W. : Simplement en constatant que laFrance qui a manifesté le 11 janvier étaitglobalement une France blanche, même si je

« La résistance à l’oppression est nécessairement légale et légitime

car elle est porteuse de droit »

Sélection bibliographique• L’impossible citoyen, l’étranger dans le discours de la Révolution française, Albin Michel, 1997

(rééd. en 2010).• Les musées d’histoire des guerres du XXe siècle, des lieux du politique ? Kimé, 2001• La liberté ou la mort – essai sur la Terreur et le terrorisme, La Fabrique, 2003.• Une histoire politique de l’amnistie, PUF, 2007.• La longue patience du peuple. 1792, naissance de la République, Payot, 2008.• Les émotions, la Révolution française et le présent : exercices pratiques de conscience historique,

CNRS Éditions, 2009.• La Révolution française, un événement de la raison sensible, Hachette, 2012.• L’intelligence politique de la Révolution française, Textuel, 2013 (choix de textes).

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42 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

INTERNATIONALCRÉÉE EN 1990, la Fédération des syndicats libres de l’enseignement (FSLE) estdevenue, au fil du temps, une organisation syndicale représentative en Roumanie.

L’outil de nos collègues roumains

À L’OCCASION DE SON 25E ANNIVERSAIRE, les revendications salariales ont été aucentre des débats de la FSLE (voir article ci-dessus), tout comme la question de laréforme du système éducatif.

Toujours au prix fort

Italiei

Mobilisation le 5 maiGrève à l’appel des cinq syndicatsde l’éducation pour protestercontre le projet de loi qui vise,selon le gouvernement, à «  réfor-mer » les conditions de travail despersonnels enseignants. Parmi lesmesures envisagées, de nouvellesprérogatives seraient accordéesaux chefs d’établissement enmatière de recrutement et derémunération des enseignants, etdes personnels auxiliaires verraientleurs contrats non renouvelés

UNESCOi

Forum mondialsur l’éducation

Un rapport intitulé «  Repenserl’éducation : vers un bien communmondial ? » sera disponible fin maià l’occasion du Forum mondial surl’éducation à Inchaon en Corée duSud. Ce document reconnaît qu’iln’a jamais été aussi urgent derepenser la finalité et l’organisationde l’éducation dans un monde deplus en plus complexe. Le SNES-FSU avec d’autres syndicats affiliésà l’IE participera aux travaux dece Forum du 17 au 21 mai.

Europe de l’Esti

CoopérationDans le cadre de son programmeannuel de coopération, le SNES-FSU a organisé les 22 et 23 avril àBudapest un atelier sur le thèmed’une éducation publique de qualitédans les PECO (Pays d’Europe cen-trale et orientale). Des représen-tant(e)s issus de onze pays ont puainsi échanger leurs analyses,notamment sur les politiques àmettre en œuvre en matière desyndicalisation auprès des jeunes.

Polognei

RevendicationssalarialesEn avril, le syndicat enseignantZNP a organisé une manifestationà Varsovie afin d’exiger une reva-lorisation salariale de 10  % à par-tir de janvier 2016. 22 000 mani-festants ont défilé dans les ruesde la capitale. Le salaire moyend’un(e) enseignant(e) est de l’ordrede 900 euros.

Elle a pour caractéristiques de regrouper lespersonnels du préprimaire, du primaire et dusecondaire, dont l’enseignement profession-

nel. Les personnels non enseignants, dont les chefsd’établissement tout comme les enseignants auxi-liaires, font partie des soixante-deux organisationsterritoriales qui constituent la structure adminis-trative de la Fédération forte de 180 000 adhérents,

Temps forts d’une histoire particulière Au lendemain de la chute du régime dictatorialde Ceaucescu (décembre 1989), de nouveaux syn-dicats ont vu le jour dans le pays et, parmi eux, laFSLE. Dès février 1990, l’enthousiasme et la fer-veur de quelques enseignants pour défendre lesdroits et conditions de travail des personnels del’éducation et faire respecter les droits syndicauxélémentaires dont le droit de grève ont permis à laFSLE de se développer. Comme le souligne sonprésident actuel, Simion Hancescu, « au cours deces vingt-cinq années, notre Fédération a été liée

aux plus grandes manifestations et actions degrève qui ont produit des résultats ». En 1991 eutlieu la première manifestation des personnels dusecteur de l’éducation. En 1993, la FSLE devientmembre fondateur de l’Internationale de l’Éduca-tion et, en 1996, elle décide de rejoindre la Confé-dération des syndicats démocratiques de Rouma-nie (CSDR). L’année 2000 marque un tournantavec le succès d’une action de grève dans l’édu-cation qui conduit à une augmentation de 82 % dessalaires. En 2011, elle a initié des mouvements deprotestation contre les mesures d’austérité imposéespar le gouvernement et, en novembre 2013, a for-tement mobilisé la profession pour de meilleuresconditions de travail et de rémunération.Le SNES-FSU entend bien continuer à entretenirdes liens d’amitié avec cette organisation dont ilfaut noter qu’elle s’implique dans le travail syndi-cal au niveau de la région Europe de l’Internatio-nale de l’Éducation. n

Odile Cordelier

Dans un pays où le salaireminimum net est de154 euros, un professeur

débutant perçoit 230 euros netet 318 en fin de carrière pour18 heures de cours par semaine.Selon Simion Hancescu, prési-dent de la FSLE, « il faut assurerde meilleurs salaires et obtenirun statut digne des enseignantsqui devraient être respectés partoute la société ». Depuis lamobilisation de novembre 2013,la question des salaires reste detoute évidence la priorité dansune plate-forme syndicale quiexige l’attribution d’au moins

6 % du PIB à l’éducation afin defaire diminuer l’écart entre laRoumanie et les autres pays del’UE.

À la recherche d’un statutPour que la profession ensei-gnante soit attractive, la FSLEestime que le salaire d’un pro-fesseur débutant devrait être égalau salaire mensuel moyen enRoumanie soit 380 euros net, puis500 euros en milieu de carrière et950 euros en fin de carrière. D’oùles pressions exercées en direc-tion du gouvernement pour obte-nir une nouvelle « loi de salari-

sation ». Chaque secteur budgé-taire (éducation, santé, etc.) a sapropre loi de salarisation. Celleconcernant l’éducation devraitprochainement être débattue. Parailleurs, la FSLE accompagne sesrevendications d’exigences enmatière de création de postesd’enseignants pour les 7 000 éta-blissements scolaires, soit unedemande de 1 250 postes pour2015-2016. La FSLE souhaite-rait également obtenir un montantforfaitaire annuel de 100 eurospour chaque enseignant(e) quisuivrait des actions de formationcontinue. Cet argent proviendraitdes fonds européens non rem-boursables.«  Il ne faut jamais oublier quel’éducation est un bien communet que nous avons l’obligation dela rendre performante, afin qu’ellegénère du progrès et de la pros-périté. » C’est en ces termes queSimion Hancescu justifie aussi lebesoin de réformes : programmesscolaires, formation des ensei-gnants, évaluation des élèves.Vaste chantier aux nombreuxdéfis pour une profession ensei-gnante à la recherche d’un vraistatut. n Florian Lascroux©

DR

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 43

L’UDEN (Union Démocratique des Enseignantes et Enseignants du Sénégal)tenait son congrès du 9 au 11 avril à Dakar. L’occasion de mettre en perspectivela situation du système éducatif et d’interroger les stratégies syndicales.

Sénégal : à la croisée des chemins

ENSEIGNANTS ET 1ER MAI DANS LE MONDE

Journée internationale des travailleurs

Une table ronde pré-congrès, réunissant lesanciens Secrétaires généraux de l’UDEN ainsique des universitaires, a permis de revenir

sur les origines de la crise actuelle du systèmeéducatif sénégalais.

Réforme ? Rénovation ? Refondation ?En réalité, ce système n’a pas fondamentalementrompu avec certains principes du système éduca-tif colonial, qui était essentiellement destiné à for-mer une élite locale pour l’administration. Ce phé-nomène a longtemps été masqué par la réussiteéclatante de quelques-uns. Mais derrière cettefaçade, les classes sont restées très chargées –entre 50 et 100 élèves par classe, voire davantageencore –, surtout dans les villes, ce qui empêche laprise en compte des difficultés de chaque élève.Aujourd’hui, l’inadéquation qualifications/emploisest criante : alors que le Sénégal aurait grand besoind’ingénieurs, de techniciens ou même d’ouvriersqualifiés, 95 % des bacheliers sont en filière géné-rale, et parmi eux, 75 % en filière littéraire.

Quelle stratégie syndicale ?Les syndicats, depuis longtemps, demandent unemeilleure formation des enseignants, une augmen-tation des budgets consacrés à l’Éducation, demeilleures conditions de travail, des revalorisations

de carrière. Le problème est que, dans un contexted’éclatement syndical, les ministres successifs ontsouvent ignoré leurs engagements et laissé pourrirles conflits. C’est ainsi que, ces dernières années, chaque annéescolaire a été amputée de nombreuses semaines,voire de mois de cours en raison de longs mouve-ments de grève. Ceci a fini par conduire à un impor-tant discrédit de l’École publique et des enseignants.Awa Wade, secrétaire générale réélue par le congrèsde l’UDEN, entend rompre avec cette stratégie mor-tifère. En investissant les cadres intersyndicauxexistants. Et également en interrogeant en profondeursa propre organisation, comme l’illustre la démarcheaudacieuse d’un audit externe permanent : transpa-rence et reddition de comptes, une priorité absoluepour recruter davantage de jeunes et de femmes, dansl’esprit du programme de coopération engagé avecle SNES-FSU. n

Florian Lascroux

Les manifestations qui ont eulieu un peu partout en Europeont vu les enseignants et

éducateurs se mobiliser. Pour

Manfred Brinkmann, secrétaireinternational de la GEW(142 000 adhérents), les ensei-gnants ont rejoint les cortèges àl’initiative du DGB (Confédéra-tion des syndicats) pour dénoncerla précarisation des emplois etdéfendre avec l’ensemble des tra-

vailleurs la nouvelle loi qui a ins-tauré le salaire minimum et quifait déjà l’objet d’attaques. AuPortugal, à quelques mois deslégislatives d’octobre, les slo-gans visaient les effets dévasta-teurs des politiques d’austéritéet les attaques contre les droitsdes travailleurs. Selon ManuelaMendonça, secrétaire internatio-nale de la FENPROF affiliée à laCGTP (Confédération généraledes travailleurs portugais),emploi, salaires et droits consti-tuaient les mots d’ordre.

Ici et ailleurs, NON à l’austéritéLors de ce 1er mai, la CES avaitmis l’accent sur l’échec des poli-tiques d’austérité. « L’Europe resteembourbée dans une crise pro-fonde. Le chômage des jeunesconnaît une hausse vertigineuseen Espagne et en Grèce où il atteintles 50 %... Près d’un Européen surquatre est menacé de pauvreté. »Sur le continent africain, si lesinitiatives autour du 1er mai varient

d’un pays à l’autre, la Fête du tra-vail est aussi l’occasion d’exiger« le paiement de salaires décents »en République Démocratique duCongo, comme l’a fait la Fédéra-tion nationale des enseignants etéducateurs sociaux du Congo. ÀDakar, le Syndicat Unique DesEnseignants du Sénégal (SUDES)avait organisé un débat sur lethème «  l’école publique avanttout. » n Odile Cordelier

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Chiffresi

58 millions d’enfants non scolarisés, 100 millions d’enfantsn’achèvent pas le cycle du primaire.(Source : Rapport mondial de suivisur l’Éducation pour tous de 2015).

Formationi

ApprentissageLe SNES-FSU a participé à un sémi-naire organisé en avril par le CSEE etl’Institut de formation de la CES sur laformation professionnelle en Europe,plus particulièrement sur le déve-loppement de l’apprentissage dans lecadre de l’accord : «  l’Alliance euro-péenne pour l’apprentissage  » dontle gouvernement français est signa-taire. En revanche, le SNES-FSU, nonsignataire de ce texte a pointé avecd’autres organisations syndicaleseuropéennes les dangers qu’il repré-sente pour la formation profession-nelle publique.

TICi

La professionenseignanteen EuropeLors de la Conférence de mi-mandatdu Comité syndical européen de l'édu-cation de novembre 2014, un groupede travail a été mis en place. Il estchargé d’élaborer un document sur laprofession enseignante au XXIe siècleet l’utilisation des technologies del'information et de la communica-tion. Les travaux débuteront fin maiavec la participation du SNES-FSU.

Népali

Besoin d’aideL’Internationale de l’Éducation a eul’occasion de constater sur le terrainles ravages causés au Népal par lesdeux puissants séismes qui ont frappéle cœur du pays, laissant derrièreeux des communautés ruinées et desvies marquées à jamais. Soixante-sixenseignant(e)s et membres dupersonnel de soutien à l’éducationont perdu la vie suite aux séismes,tandis qu’un nombre considérabled’autres personnes ont vu leur viebrusquement basculer. Le paysmettra du temps à se relever. C’est pourquoi l’Internationale del’Éducation demande de contribuer auFonds d’aide et de solidarité pourvenir en aide aux syndicats népalaisde l’éducation, à leurs membres etaux élèves.

Awa Wade, secrétaire généralei © D

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RATTRAPAGE

44 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

Les réformes dans l’éducationAlors que la ministre de l’Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, vient d’annoncer son projet de réforme ducollège, L’US MAG a souhaité revenir sur les changements impulsés par le pouvoir politique dans l’éducation depuis la findu XIXe siècle. Cette page ne prétend pas à l’exhaustivité et laisse de côté les transformations silencieuses qu’a connuesl’école, comme la généralisation de la mixité scolaire, ou les réformes manquées ou avortées, à l’image de celle de JeanZay (1936-1937), pour n’en citer qu’une.

TableauiProportion d’une classe d’âge à obtenir un baccalauréat.

Pour en savoir plusI◗ A. Prost, Du changement dans l’école, Paris,

le Seuil, 2013.◗ Denis Paget, Petite histoire des collèges et

des lycées, Adapt, 2008et de l’éducation en France, 4 volumes,Nouvelle Librairie de France, 1981.◗ Lydie Heurdier, A. Prost, Les politiques

de l’éducation en France, Paris,la documentation Française, 2014.

La réorganisation gaullienneLes trente glorieuses sont marquées par une augmentationde la population scolarisée, au-delà de 14 ans. En pleinecroissance, la toute nouvelle Ve République a consciencede manquer d’ingénieurs, de techniciens pouraccompagner le développement du pays. Répondant àla demande sociale,le gouvernementporte de 14 ansà 16 ansl’obligationscolaire (1959).L’autre objectifconsiste à démocratiser l’accès au secondaire, ordre à partentière. La réforme de 1963 crée des CES (Collègesd’enseignement secondaire) dans lesquels toutesles filières du premier cycle sont regroupées. Le collègedevient une étape obligatoire de la scolarité. En dix ans,plus de 2 400 collèges sont créés.

La création du baccalauréatprofessionnelLaurent Fabius décide d’élever le niveau de formation des jeunesen créant le baccalauréat professionnel et de conduire 80 % dugroupe d’âge à ce niveau de certification. Il s’agit de répondre aux

besoins d’une économie enmutation en s’inspirantnotamment du modèlejaponais. En allongeant lascolarité, le nouveaugouvernement cherche aussi àtrouver une solution auchômage des jeunes. La loi

constitue une réforme éducative majeure. Ses effets sont multiples :les LEP se transforment en LP et ferment leurs classes depréparation au CAP, qui recrutent au niveau Cinquième, pourouvrir des classes de lycée professionnel. La classe de Troisièmedevient le véritable palier d’orientation. Ce nouveau baccalauréatoffre des possibilités de promotion aux élèves des milieuxpopulaire.

La refondation républicaineLa refondation scolaire entreprisesous Jules Ferry reste associée autriptyque gratuité (1881),obligation scolaire, laïcité (1882).Les républicains font del’enseignement primaire unservice public d’État. Le principede gratuité est renforcé : une loiautorise les communes àaugmenter les impôts en ce sens.L’obligation scolaire est étenduede 6 à 13 ans. Le principe nouveau

de laïcité conduit à la disparition du catéchisme des horaires etdes programmes, et à la laïcisation du personnel (1886). Lesinstituteurs deviennent des fonctionnaires de l’État (1889). La loi Camille Sée (1880) instaure un enseignement pourjeunes filles. La filière moderne (sciences, histoire, auteursclassiques français, anglais) voit le jour.

La naissance del’éducation prioritaireEn juillet 1981, Alain Savary préconise le renforcementciblé de l’action éducative dans les zones où le tauxd’échec scolaire est le plus élevé. Sont définies les ZEPen croisant des critères scolaires et socio-économiques.

Dans chacune de ceszones, il s’agitd’élaborer un projetspécifique, limitédans le temps, pouréviter qu’uneassistancepermanente ne crée

des ghettos scolaires. Les ZEP sont inspiréesdes Education priority aeras britanniques. Ellesmarquent une rupture avec la politique d’affectationuniforme des moyens qu’implique la traditionrépublicaine d’égalité et consistent à développer uneréponse territorialisée au problème de l’échec scolaire.363 ZEP sont ainsi mises en place à la rentrée 1982.

16 ans1985

80%

70%

60%

50%

40%

30%

20%

10%1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012

Professionnel

2009 : création de l’épreuve de contrôle du baccalauréat professionnel

1986 : création du baccalauréat professionnel

Technologique

Général

ZEP

lois

Ferry

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DANS LA CLASSE

Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 45

Sitesi

Plusieurs sites internet peuvent être consultés :

• Fédération nationale des chorales scolaires : www.fncs.fr

• Le Hall de la chanson :www.lehall.com

• Jeunesses musicales de France :www.lesjmf.org

Chiffresi

Nombre de chorales :

4 590 en collège(1)

292 en lycée(1)

71,13 %des collèges publics offrent un enseignement complémentairede chorale.

151 258élèves participent à une chorale(1)

35 élèves est l’effectifmoyen d’une chorale en collègepublic.

Chiffres extraits de l’enquêteIGEN-DEGESCO 2010-2011http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Art_culture_sport/64/6/annexe_synthese_enquete_chorale_184646.pdf

(1) Collèges et lycées publics et privés.

LES CHORALES SCOLAIRES

Positives et pourtant menacéesL

es chorales scolaires sont desenseignements complémen-taires d’une heure hebdoma-

daire, prolongeant les cours d’édu-cation musicale, regroupant desélèves volontaires de différentesclasses, et participant à l’éducationmusicale des jeunes.En collège, cette dynamique n’estpossible qu’en lien avec l’ensei-gnement obligatoire d’éducationmusicale. L’enseignement de cho-rale permet à l’élève de travaillerde manière plus approfondie lajustesse, la qualité vocale,l’écoute, quels que soient sonniveau, ses qualités musicales ouses compétences techniques.Rimant avec plaisir artistique etengagement, les chorales scolairespermettent à de nombreux élèvesde se produire sur scène, de chan-ter devant un public, autant d’ex-périences qui resteront gravéesdans leur mémoire. Les choralesscolaires, dont le nombre estconsidérable (voir ci-contre),contribuent à l’épanouissementdes élèves, au développement del’esprit d’équipe, et favorisent laconcentration, la rigueur, la

confiance en soi. Pour l’ensei-gnant, au-delà du travail musicalpersonnel de sélection des chants,d’écriture d’arrangements, de pré-paration des concerts et des répé-titions, diriger une chorale néces-site un engagement physiqueimportant pour que l’énergie, l’im-plication, la justesse, l’émotionsoient au rendez-vous.

Rentrée 2015 : un nouveaustatut pour la choraleLe travail du geste, de l’attitude,de la voix, et la concentration ensont les clés. Le principe d’une

heure effective qui compte pourdeux heures hebdomadaires dansle service des enseignants d’édu-cation musicale est remis encause par de nouveaux textes.Dans ce contexte, qui ne prendpas en compte la réalité dumétier, se pose d’ores et déjàpour beaucoup de collègues laquestion de la poursuite de leurinvestissement. À l’heure où leministère affiche la mise à l’hon-neur des chorales scolaires avecl’opération « L’école en chœur »,chacun peut mesurer l’écart entrele discours et la réalité... n

TÉMOIGNAGE

“La chorale : efforts, exigence, plaisir”Emmanuelle Mariini, professeur d’éducation musicale, dirige lachorale «  Estelle di Biguglia  » du collège de Biguglia (Corse).

La chorale per-met aux élèvesvolontaires de

toutes les classes(Sixième à Troi-sième, SEGPA,Troisième prépapro) de se retrouverautour d’une réali-sation musicalecommune... Ellecomprend 45 élèvessur les 515 que

compte mon collège. Elle est un espace de partage oùchacun apporte sa pierre à l’édifice et où il n’est pasquestion de niveau de chant ou de solfège. Pour moi,la chorale est un vecteur privilégié pour faire com-prendre aux élèves que l’on peut associer efforts et exi-gence avec plaisir. La chorale est un plus indéniablepour mon établissement et permet aussi de valoriserles cours d’éducation musicale. Son rayonnementdépasse le cadre de l’établissement puisque les

concerts sont donnés dans tout le département. Cer-tains élèves veulent même s’inscrire au collège deBiguglia pour participer à la chorale ! Nous travaillons des chants à une et plusieurs voix, desrépertoires variés (variété, classique, traditionnel...)faisant alterner le chœur avec différentes formationsvocales (soliste, duos, petits groupes...). Nous nousproduisons parfois avec des partenaires extérieurset des artistes, et organisons jusqu’à huit concerts paran dans des lieux variés (auditorium du collège,théâtre, église, salle de spectacle...). L’an prochain cesera une comédie musicale montée avec un professeurd’EPS et un professeur de lettres.La chorale est un travail très enthousiasmant et enmême temps une charge importante qui va bien au-delà des deux heures de chorale dans mon emploidu temps : choix du répertoire, préparation desséances de cours, répétitions, concerts (dans le tempsscolaire et hors temps scolaire)... n

Rubrique réalisée par Sandrine Charrier

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Citationi

« Sans la musique, la vieserait une erreur » F. Nietzsche

Activitéi

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DROITS ET LIBERTÉSLoi renseignementi

Non à la surveillancegénéralisée !Au nom d’un droit légitime àla sécurité, le gouvernement faitce que tous les démocratescraignaient : un «  patriot act  »à la française ! Refusant le débatdémocratique en mettant enœuvre la procédure accélérée,le gouvernement légalise lespratiques illégales : écoute,interceptions de méls, misessous surveillance massives, le toutsans aucun contrôle du juge !Ainsi les mouvements sociaux,les syndicats et partis eux-mêmessont visés, au prétexte de luttercontre les «  violencescollectives  » ! Ce projet est doncbien une menace pour les libertésindividuelles et collectives.

Référendum Irlandaisi

Oui au mariagepour tous !L’Irlande a donc approuvé parréférendum, à 62 %, l’ouverture dumariage aux couples de même sexe,dans un pays qui reste un bastioncatholique. En France, les opposantsn'avaient eu de cesse de demanderun référendum, pensant que lepeuple, dans sa sagesse, s’yopposerait. Le peuple Irlandais vientd'envoyer un cinglant démenti auxsuppôts de la manif pour tous. Lemariage suit ainsi l’ouverture del’adoption aux couples de mêmesexe déjà permise, depuis avril, dansle Children and Family RelationshipAct 2015. Cela ne fait pas de l'Irlandele pays le plus avancé en terme dedroits humains, même si celaprogresse : l’IVG reste ainsi interdit,sauf dans le cas ou la vie de cellequi est enceinte est en danger.

Vote des femmesi

70 ansC’est l’âge du droit de vote pourles femmes en France.Un droit obtenu de haute lutte prèsd’un siècle après les hommes,en 1946. Pourtant, les femmes sontencore trop peu représentées dansles instances politiques. Depuisles législatives de 2012, elles nereprésentent que 27 % des élu-esà l’Assemblée nationale. Cela placela France au 58e rang mondial et au19e rang européen. Les dernièresmesures sont loin d'être suffisantespour permettre un accès égal desfemmes aux charges électives.L’égalité femmes-hommes, çacommence en politique. Il en vade la crédibilité et de lareprésentativité de nos élu-es.

Comment supporter cette insupportable et inter-minable liste d’annonces de naufrages, denoyés, de morts en Méditerranée ?

Jour après jour, la radio, les télévisions, les journauxnous apprennent que 50, 100, 400 migrants deplus sont morts en mer dans la nuit. Cette semaine,1 000 d’entre eux ont trouvé la mort en tentant latraversée de la Méditerranée, victimes des pas-seurs et de la politique de fermeture des frontièresmenée par l’Europe.Si ces migrants décident de partir malgré tous lesrisques encourus, c’est qu’en restant chez eux ilssont confrontés à des dangers encore plus grands :dictatures, terrorisme, guerres sont leur quotidien,fuir est leur seul espoir. L’Europe ne peut occultersa responsabilité. Pouvons-nous continuer à nousretrancher dans notre forteresse européenne, enne leur laissant qu’une seule alternative : mourirchez eux ou risquer de mourir en mer ?La politique de l’Europe qui ferme ses frontières,se protège derrière « Frontex », réduit ses aides, estl’une des causes de ces morts honteuses... Et ce nesont pas les larmes de crocodile de nos édiles quiy changeront quelque chose !

Une hécatombe révoltanteC’est la politique migratoire et d’accueil de l’Europe, et de la France en premier lieu, qu’ilfaut changer. Il faut donner des moyens pour luttercontre les passeurs mafieux et protéger le péripledes migrants.Malgré l’appel de 14 organisations françaises au

président de la République, celui de 32 euro-péennes à l’attention des chefs d’État européensréunis en conseil extraordinaire le 23 avril, l’Europeet la France ont résolu de tripler les moyens de sur-veillance des frontières, d’intervenir militairementen Libye contre les passeurs et de détruire desembarcations ayant transporté des migrants. Bref,le résultat est encore une fois : plus de protection-nisme, plus de repli de l’Europe sur elle-même ettoujours, toujours moins de solidarité !Assez de morts, assez de noyés : l’Europe, et laFrance, doivent organiser et sécuriser la migra-tion pour qu’elle échappe aux passeurs et mettre finà cette hécatombe scandaleuse ! n

François Sauterey

DALO (DROIT AU LOGEMENT OPPOSABLE)

Victoire pour les sans-logisde la place de la RépubliqueP

aris, 24 avril. Après vingt-quatre jours de lutte, les 250prioritaires DALO (Droit au

logement opposable), les quarante-trois mineurs isolés et dix-neufexpulsés locatifs sans relogementont gagné. Ils occupaient jour etnuit la place de la République àParis pour exiger le respect deleurs droits.Un accord a été établi avec le pré-fet de Région pour reloger pro-gressivement les familles tandisque les mineurs isolés étaienthébergés et nourris dans des foyersparisiens, en attendant une décision du juge pourenfants. Un rendez-vous, par ailleurs, est prévuavec la ministre du Logement et la Maire de Paris.Ce succès est une avancée importante pour lesmilliers de sans-logis ou de mal-logés, pour abou-

tir à la mise en œuvre effective dela loi DALO qui prévoit un relo-gement dans les six mois. Alorsque Bercy annonce des réductionsdu budget dédié à l’hébergement etaux APL, la plate-forme Logementdont la FSU est membre rappelleses exigences :• arrêt de toute expulsion sans relo-

gement préalable ;• prise en charge des mineurs à la

rue par les départements ;• construction de 200 000 nou-

veaux logements sociaux par an ;• baisse des loyers et des charges,

encadrement des loyers dans lesagglomérations ;

• réquisition des logements et bureaux vides.Le combat pour le droit au logement n’est pasterminé ! n Marylène Cahouet

APRÈS LE NAUFRAGE DU CHALUTIER AU LARGE DE LA LIBYE

Assez de morts, assez de noyés !

46 - US MAGAZINE - Supplément au no 751 du 18 avril 2015

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Supplément au no 751 du 18 avril 2015 - US MAGAZINE - 47

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LOCATIONSLarzac, village templier, mai-son 6 pers., 2 ch., jardin,calme : 450 €/s., de mai àoctobre. Tél. 06 71 17 03 [email protected] (33) Cap-Ferret, appt 4-6 pers.ds villa bord forêt, 500 mplage, 450-750 €/sem. Tél.06 22 47 46 62(35) Dinard, 15 min mer,10 min centre ville à pied, F2,non-fumeur, 44 m2, août/finjuillet, 500 €/s. et 900 €/qz.Tél. 06 78 22 68 75Paris 12e, loue vide, 3 p.,s. eau, cuis, w.c. : 1 385 € c.c.,libre le 1/07/2015. Tél. 06 5148 26 84Italie, lac Majeur, île despêcheurs, Stresa, loue app.imm. hist. bord du lac, 50 m2,1er étage, tt équipé, max. 3 pers. ;Wi-Fi ; 90 € la nuit (3 nuitsminimum) ; 600 €/sem.Tél. 00 39 0323 50 12 [email protected] Nice est, loue 2 p. vide, 57 m2,6e étage avec asc., terrassessud, 700 €/mois. Tél. 07 81 4264 88

(06) Valbonne (prox. Antibes),coll. loue villa 110 m2 +jard. 1 200 m2, 4 p. (2 ch.),11/07-8/08 : 1 050 €/2 sem.,(300 € sem. sup.) + chat à câli-ner ! Tél. 04 93 12 90 60 /06 89 07 55 21(94) Ivry, métro Curie, coll.loue F2, 46 m2 + 10 m2 balconavec vue + parking  : 880 €/mois + ch. Tél. 06 01 16 52 57Nice centre, T3, terr. : 330 €/s.Tél. 06 81 85 62 32(83) Brignoles, loue à l’annéevilla T5, prox. commerces,écoles, garage, jardin : 1 040 €.Tél. 06 50 55 98 80Torrevieja (Esp.), collègueloue F2, 4 couch., ttes com-modités, plage proche : 270 €

la sem. Tél. 07 81 54 14 80Ile d’Oléron, coll. loue 100 mmer, mais tt conf., 6 pers, jar-din clos de juin à septembre.Tél + SMS : 07 82 34 62 03(82) Quercy-Puylagarde,mais. famil., 6 p., gd jard.  :juill/août : 460 €/sem., 800 €/15 j. Tél. 06 84 58 79 68,05 63 60 67 80(66) Banyuls, 100 m plage,F3, cft, 4 pers., ttes saisons.Tél. 06 86 97 77 73

(82) Lafrançaise, loue mai-son, jardin, confort, espacecalme, 4-5 pers. Tél. 05 63 0221 06, 06 50 45 53 10Andalousie (Espagne), loueappt tt confort, 4/6 p. pisc.,clim, pt village bord de mer.De 280 à 480 €/sem. Tél. 0951304 092, port. 06 31 61 12 12(83) Cavalaire, coll. loue dsvilla rez-de-jardin : appt 2 pers.et appt 4 pers., possibilité6 pers., juillet-août-sept, vuemer, calme, 350 m plage,stamt ds jardin, prix nets sscommission agence. Tél. 04 7324 99 48 et 06 38 74 28 87limite 64/40, coll. loue mais.charme, jardin ombr. 1,5 kmplage, 5 pers. BS : 650 €/sem.HS : 850 €/sem. Tél. 06 83 2599 33Cirque de Navacelles, coll.loue mais. 6 pers., mai-sept.Tél. 06 83 33 45 36Cotentin, près mer col. louemaison, 6 pers. Juil-août  :360 €/sem. Tél. 02 33 78 05 87Autriche, Vienne, coll. louevacs, appt calme, tt confort,centre 1-4 [email protected]

(64) Hendaye, loue T2 4-5 pers.50 m plage, proche com-merces, confort, point de vue.Tél. 05 62 34 33 05Serre-Che. 1400, r.-de-ch.Chalet, 4 pers. Expo sud, ter-rasse : 300 €/sem., 500 €/qz.Tél. 06 84 11 28 58Paris, loc F2, juil./août :280 €/s. Tél. 06 85 65 88 71Toscane (proche Lucca), apptidéal 2 pers., 350 €/[email protected] Chablis, site clas. TB mais.,jard., riv. 400-500 €/sem.Tél. 01 48 09 14 58Venise et Rome, part. loueappts 2/6 pers., centre ville.Tél. 04 73 33 55 95Paris 11e, coll. loue appt trèsbien situé, 5 pers., 3/07-20/08 :500 €/sem. Tél. 06 02 35 57 97Périgord vert, loue maisonindép. 4 à 8 pers., tt conft, beaucadre, près sites tourist. De400 € à 700 €/sem. Tél. 05 5307 46 63Alicante (Espagne), coll. louemaison mitoy. tout confort,près plages, 5 pers. dans résid.avec pisc. jardin, tte période,300/540 €/s. Tél. 06 86 0128 13

Dordogne, loue maison cam-pagne calme 5/6 pers. Du18/07 au 1er/08  : 500 €/sem.Tél. 06 83 49 38 09Montpellier, appt non fumeurtt conft ds villa avec jardin,3 gdes chambres meublées,équipées, pour étudiant, prof.,stage, etc. : 390 €/mois l’une.Quartier calme. Tél. 04 71 6501 53 / 06 24 02 13 19

LOISIRSRéduc’SNES et l’associationChicokids proposent :• un circuit découverte enChine en aôut 2015 ;• un circuit de randonnées auxIles Canaries de Lanzarote etde Fuerteventura à la Tous-saint 2015.Pour de plus amples informa-tions contactez l’associationau 06 09 27 04 31/ 05 56 85 6270 ou [email protected]

IMMOBILIERMontpellier, vds appt 4 p,.80 m2, rés. priv. 1er etage, bal-con, cave, garage : 110 000 €.Tél. 06 76 24 08 54

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La Biologie au siècle des LumièresLe XVIIIe siècle est une époque de bouleverse-ments politiques et sociaux. Cette révolution

gagne aussi les naturalistes. Ce livre suit les œuvres des grandssavants du XVIIIe en reconstituant leurs démarches intellectuelles.C’est un point sur l’état de la discipline à l’époque.• Paul Mazliak, Adapt, 2013, 35 €.

Histoire de la Chimie en 80 datesUn petit livre richement illustré qui, en 80 dates, nous plonge dans lagrande aventure de la chimie tout en nous faisant comprendre combiencelle-ci est partout dans la nature comme dans l’activité humaine.Pigments, atomes ou encore chimie moléculaire, l’homme a toujourscherché à comprendre la nature et les propriétés de la matière. À traversplus de 80 fiches illustrées, cet ouvrage revient sur les grandes étapes,

expériences ou inventions qui ont conduit à l’émergence de la chimie moderne.• Alain Sevin & Christine Dezarnaud-Dandine, Coédition Adapt-SNES/Vuibert, 2014, 192 p., 25 €.

L’invention du médicament – Une histoire des théories du remèdeL’histoire du médicament est celle de méthodes de recherche, d’étudeet de fabrication qui en font un objet complexe, réinventé au fil dessiècles, depuis l’empirisme de l’Antiquité jusqu’au développement denos jours des procédés de la pharmacie industrielle et des difficultés àl’interface médicament-société, qui inventera le médicament commeobjet scientifique, technico-industriel et social.• Jean-Claude Dupont, Adapt/Hermann, 2013, 264 p., 20 €.

Débats citoyens en Rhône-AlpesÉchanger avec des personnalités du monde associatif, des universi-taires, des élus, des journalistes... de thèmes actuels, sensibles, commela désinformation, les enjeux migratoires, les réseaux sociaux, la mondia-lisation, le développement durable, Fukushima... c’est le tour de forcequ’a réalisé le lycée Fauriel de Saint-Étienne en entraînant avec luid’autres lycées de la région Rhône-Alpes.

Débats citoyens en Rhône-Alpes est à lire pour aborder ces questions vives en classe.Chaque chapitre de cet ouvrage, outre les propos des échanges, présente des inter-views, des comptes rendus d’ouvrages, des pistes pour approfondir la réflexion...• Coordonné par Franck Thénard-Duvivier, coédition Adapt/Lycée Fauriel, 300 p., 12 €.

L’image du monde des Babyloniens à NewtonComment avons-nous appris que la Terre est ronde ? Que tournant surelle-même, elle voyage autour du soleil à une vitesse vertigineuse ?L’aventure contée ici montre des savants se débattant entre scienceet croyance.• Joëlle Fontaine, Arkan Simaan, Adapt, 2014, 19 €.

Une brève histoire de la génétique humaineLa génétique humaine : entre science et idéologie. Dans chaque continentet dans chaque pays, elle montre un visage différent. Ce livre relate ces diffé-rentes histoires : personnalités et motivations individuelles, sources definancement, contextes culturels ou économiques, choix philosophiques.L’eugénisme reste un enjeu éthique majeur en génétique. Le développe-

ment des connaissances en la matière est au cœur d’innovations biotechnologiquesqui vont sensiblement modifier les pratiques médicales de demain.• Laurence Perbal, coédition Hermann Adapt, 200 p., 22 €, octobre 2014.

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