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LA MONNAIE 44 CESENA CESENA Danse / Dans 12 – 16 Nov 2011 Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

Danse / Dans CEsENanouvelle création, Cesena , dans la Cour d’Honneur du Palais des Papes en avi gnon. D’une beauté renversante, née dans la nuit et se terminant avec l’aube,

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CEsENaDanse / Dans

12 – 16 Nov 2011

Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

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Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

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après En Atendant l’an dernier, une pièce nourrie par l’ Ars Subtilior, ce courant de musique polyphonique apparu dans le sud de la France, dans le nord de l’italie et à Chypre à la fin du XiVe siècle, Anne Teresa De Keersmaeker a présenté cet été sa nouvelle création, Cesena, dans la Cour d’Honneur du Palais des Papes en avignon. D’une beauté renversante, née dans la nuit et se terminant avec l’aube, cette choré-graphie est entrée dans l’histoire du Festival. Pour Cesena, elle a à nouveau puisé dans le même répertoire musical, en collaboration cette fois avec Björn Schmelzer et son ensemble Graindelavoix. — Anne Teresa De Keersmaeker was vorig jaar op het Festival van Avignon te gast met en atendant, een werk geïnspireerd door de ars Subtilior, een polyfone muziekstroming die aan het eind van de veertiende eeuw haar opwachting maakte in Zuid–Frankrijk, Noord-Italië en Cyprus. Deze zomer schreef ze op de Cour d’Honneur van het Palais des Papes opnieuw geschiedenis met haar nieuwe creatie Cesena – een werk waarvan de onmetelijke schoonheid ’s nachts begint en zich uitstrekt tot de zonsopgang. Voor deze creatie, die uit hetzelfde muzikale repertoire put, werkte ze samen met Björn Schmelzer en zijn ensemble Graindelavoix.

aNNE tErEsa DE KEErsMaEKEr & BJÖrN sCHMElzEr

Pourquoi avez-vous choisi de travailler encore à par-tir de l’ Ars Subtilior ? Anne Teresa De Keersmaeker : D’abord et avant tout parce que c’est une musique superbe. Jusqu’à En Atendant, je n’avais jamais osé aborder la musique antérieure à monteverdi. J’étais réticente parce que je pensais que cette musique était avant tout une musique sacrée et cela me faisait peur, me gênait. en fait, mon appréhension était fondée sur des connais-sances très réduites. Quand on m’a fait connaître l’ Ars Subtilior, j’ai découvert à de nombreux égards une musique très proche de mes goûts et de mes pré-occupations : un contrepoint complexe qui dissimule une expression raffinée. mais c’est seulement en le travaillant dans En Atendant que je me suis rendu compte que ce répertoire était très beau, très vaste et que ses possibilités d’approche étaient multiples. Pour cette création dans la Cour d’Honneur, j’ai donc voulu l’aborder différemment, c’est-à-dire en colla-borant avec l’ensemble vocal Graindelavoix plutôt qu’en ayant recours à des instruments.Björn Schmelzer : nous essayons d’approcher la par-tition sans trop de fixité, sans nous laisser inhiber par le prestige de cet art ancien. Une certaine plas-ticité est tout à fait possible, elle est même dési-rable. Dans ce cas-ci, nous avons choisi un effectif exclusivement vocal et sans instruments. C’est une approche rare, car il est généralement admis que

Waarom hebt u ervoor gekozen om u nogmaals te laten inspireren door de Ars Subtilior?Anne Teresa De Keersmaeker: om te beginnen vooral omdat het fantastische muziek is. Tot En Atendant had ik het nooit gewaagd muziek van vóór monte-verdi te gebruiken. ik aarzelde omdat ik dacht dat het vooral gewijde muziek was, en daarvoor was ik bevreesd, gegeneerd. in feite was mijn vrees geba-seerd op een heel beperkte kennis van zaken. Toen men mij de Ars Subtilior heeft leren kennen, heb ik in vele opzichten een muziek ontdekt die zeer dicht staat bij mijn smaak en interesses: een complex contrapunt waarachter een geraffineerde expressie schuilgaat. maar pas door er in En Atendant mee te werken heb ik ook ingezien hoe mooi en uitgebreid dit repertoire is, en welke vele mogelijkheden het biedt. Voor deze creatie op de Cour d’Honneur wilde ik die muziek anders aanpakken, namelijk door samen te werken met het vocale ensemble Graindelavoix, en niet door een beroep te doen op instrumenten.Björn Schmelzer: We proberen de partituur niet al te rigide te benaderen, en laten ons niet intimideren door het prestige van deze oude kunst. een zekere plasticiteit is perfect mogelijk, en zelfs wenselijk. in dit geval hebben we gekozen voor een louter vocale bezetting, zonder instrumenten. Dat is een zeldzame benadering, want het wordt algemeen erkend dat de middenstemmen in de werken van de Ars Subtilior

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les voix médianes des œuvres d’ Ars Subtilior sont à ce point sophistiquées qu’elle sont inchantables et doivent être confiées à des instruments. Personnel-lement, j’en doute, et je pense que tel n’était pas le cas à l’époque. mais mon approche n’est pas qu’his-torique. Confier tout le tissu polyphonique aux voix seules les oblige à une articulation, une précision minutieuse, qui les fragilise. elles se rappellent à nous, dès lors, comme la vulnérable émanation du corps. en ce sens, la liaison avec le monde physique de la danse est plus immédiate.A.T.D.K. : l’autre raison qui fait que je retourne aujourd’hui à l’ Ars Subtilior, c’est que je suis fasci-née par le contexte historique dans lequel naît cette musique extrêmement raffinée. le XiVe siècle est une période de grands changements. Un ordre du monde se dissout et d’autres idées commencent à émerger. C’est par exemple le siècle de l’invention de l’horloge, qui quantifie le temps. Philosophiquement, on est à l’aube d’idées révolutionnaires. mais tout cela s’opère dans un contexte de chaos et de trouble pour les contemporains de cette époque : la peste, la guerre de Cent ans, la transformation de la société féodale...B.S. : en outre, des figures comme nicole oresme sont les premières à conceptualiser et donner une mesure aux notions de dynamique et d’intensité.

zo gesofisticeerd zijn dat ze onzingbaar zijn en aan instrumenten moeten worden toevertrouwd. Persoon-lijk betwijfel ik dat, en ik denk dat dit destijds niet het geval was. maar mijn benadering is niet alleen historisch. Door het hele polyfone weefsel uitslui-tend aan stemmen toe te vertrouwen, verplicht je die tot minutieuze articulatie en precisie, die ze fragiel maakt. Ze verwijzen op die manier naar onszelf, als de kwetsbare emanatie van het lichaam. in die zin is het verband met de fysieke danswereld directer.A.T.D.K.: De andere reden waarom ik nu terugkeer naar de Ars Subtilior, is dat ik gefascineerd ben door de historische context waarin deze uiterst geraffi-neerde muziek ontstaan is. De veertiende eeuw is een tijd van ingrijpende veranderingen. De wereldorde verbrokkelde en nieuwe ideeën zagen het daglicht. Het is bijvoorbeeld de eeuw van de uitvinding van het horloge, dat de tijd kwantificeert. op filosofisch gebied was het de dageraad van revolutionaire ideeën. maar dat alles kreeg gestalte in een context van chaos en ellende voor de mensen van toen: de pest, de Hon-derdjarige oorlog, de transformatie van de feodale samenleving…B.S.: Bovendien waren figuren zoals nicole oresme de eersten die de begrippen dynamiek en intensi-teit gingen conceptualiseren en meten. Dat merk je

Cesena (répétition), Palais des Papes, Avignon, 2011 © Michel François

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Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Anne Van Aerschot

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C’est ce qu’on ressent très clairement à l’écoute de cette musique. il n’est pas exagéré d’évoquer une mutation comparable au développement de l’image en mouvement au XXe siècle. Un lexique se développe pour évoquer l’accélération, l’affect, le chromatisme, toutes notions nouvelles. Dans le même temps, dans le champ intellectuel émergent les idées de démo-cratie et de redistribution des richesses – tout ce qui ne trouvera sa pleine visibilité qu’à la Renaissance.

Avez-vous, dès l’origine, pensé ces deux pièces, En Atendant et votre création Cesena, comme un ensemble ? A.T.D.K. : lorsque Vincent Baudriller m’a contactée pour l’édi-tion 2010 du Festival, ma première idée a été d’utiliser la Cour d’Honneur, et c’est ann Veronica Janssens (avec qui j’avais collaboré pour Keeping Still et The Song) qui a eu l’idée de ce spectacle qui attend l’aube. mais cela ne pou-vait pas se faire pour des raisons d’agenda. avec michel François, l’autre collaborateur de The Song, nous avons alors pensé une pièce pour le Cloître des Célestins, qui serait comme un prélude à cette création. À l’époque, je parlais déjà avec Björn de la manière de continuer ce travail sur l’ Ars Subtilior, cette musique liée à la Cour papale et à avignon. Ceci étant, cette nouvelle pièce s’inscrit aussi dans la continuité de mes pré-cédents travaux. Je tente de prolonger, de manière plus élaborée, l’expérience de la pièce The Song que j’ai créée en 2009 : un travail sur le silence avec des danseurs masculins, dans une grande économie de moyens. Dans la création de cette année, il n’y aura pas non plus d’instruments sur scène, seulement des voix. Cet intérêt pour le chant était déjà présent dans les derniers spectacles : Keeping Still, The Song, 3Abschied... avec les chanteurs de Graindelavoix, j’ai trouvé pour la première fois des partenaires qui me permettent d’explorer le travail de la voix de la même

heel duidelijk bij het beluisteren van deze muziek. Het is niet overdreven om een verandering vast te stellen die vergelijkbaar is met die van de ont-wikkeling van bewegende beelden in het begin van de twintigste eeuw. er ontwikkelde zich een lexicon om versnelling, affecten en chromatiek te beschrijven – wat allemaal nieuwe begrippen waren. Tegelijk borrelde op intellectueel gebied het streven naar democratie en naar de herverde-ling van de rijkdom op – wat allemaal pas duidelijk

zichtbaar werd tijdens de renaissance.

Hebt u deze twee wer-ken, En Atendant en deze nieuwe creatie Cesena, vanaf het begin als één geheel beschouwd?A.T.D.K.: Toen Vincent Baudriller contact met me opnam voor de edi-tie 2010 van het Festival, was mijn eerste idee om de Cour d’Honneur te gebruiken. ann Vero-nica Janssens (met wie ik had samengewerkt voor Keeping Still en The Song) kwam op het idee van een voor-stelling in afwachting van het ochtendgloren. maar om agendarede-nen lukte dat toen niet. met michel François, die ook meewerkte aan The Song, hebben we toen een stuk uitge-werkt voor het Cloître des Célestins, als een

prelude op deze creatie. Destijds had ik het met Björn al over de manier waarop we verder gebruik konden maken van de Ars Subtilior, de muziek die verbonden is met het pauselijk hof en met avignon. op die manier sluit dit nieuwe stuk ook naadloos aan bij mijn vorige werken. ik probeer voort te bou-wen op de ervaring van The Song, een stuk dat ik in 2009 creëerde, op basis van stilte en mannelijke dansers, en met een zo sober mogelijk gebruik van middelen. in de creatie van dit jaar zijn er evenmin instrumenten op de scène te zien, alleen stemmen. Die interesse voor zang was al aanwezig in mijn vorige voorstellingen: Keeping Still, The Song, 3Abschied… in de zangers van Graindelavoix heb ik voor het eerst

Depuis Fase, four move-ments to the music of Steve Reich en 1982, et la fon-dation de la compagnie Rosas l’année suivante, la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker s’est imposée comme l’une des figures majeures de la création européenne. elle n’a cessé d’enrichir une relation particulière entre musique et danse.

anne Teresa De Keersmaeker a développé un corpus d’œuvres acclamées dans toute l’europe. en copro-duction avec la monnaie, elle présente cette saison la première belge de sa nouvelle création Cesena et la reprise de Drumming. — Sinds Fase, four movements to the music of Steve Reich in 1982 en de stichting van haar compagnie Rosas het jaar erna, heeft choreografe Anne Teresa De Keersmaeker naam gemaakt als een van de belangrijkste figuren van de Europese danscreatie, waarbij ze de bijzondere relatie tussen muziek en dans voortdurend verder uitdiepte. Ondertussen bouwde zij een oeuvre uit dat in heel Europa werd toegejuicht. In samenwerking met de Munt stelt zij dit seizoen de Bel-gische première van haar nieuwste creatie Cesena voor, en de herneming van Drumming.

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façon que nous abordons le travail du mouvement. Sur scène, tous les interprètes danseront et chante-ront. les danseurs et les chanteurs vont essayer de « fusionner » ensemble. B.S. : Cette « fusion » s’annonce passionnante. Car la complexité ne réside pas dans une simple accu-mulation de notes sur le papier. Cette musique, au contraire, s’adresse à des chanteurs qui ont appris le chant à l’oreille et savent improviser sur des lignes ; c’est tout un art de l’écoute et de la flexi-bilité. Je découvre tout un monde : faire chanter les danseurs, les laisser suivre leur tonus plutôt que de les concentrer sur la qualité de leur voix, m’ouvre à de nou-velles façons d’articuler la musique, telles qu’on en trouve dans d’autres traditions culturelles. matej Kejzar, par exemple, un danseur slovène de la compa-gnie, s’est mis à chan-ter une sorte de balade pendant des répétitions, une musique modale venue de sa région d’en-fance, qui ressemblait étonnamment à de la musique médiévale – mais avec des intona-tions toutes fraîches. Un chanteur classique n’aurait pas pu produire cela, pas comme cela.A.T.D.K. : nous étions catapultés au XiVe siècle, mais sans aucune idée de « reconstitution historique ». Plutôt comme si notre histoire était tou-jours présente au cœur de notre adn.

Comment avez-vous choisi les musiques que vous utiliserez sur scène ?A.T.D.K. : la musique d’En Atendant était originaire du nord de l’italie. Je voulais que les chants de cette nouvelle création soient encore plus étroitement liés à l’histoire d’avignon, au schisme papal de la fin du XiVe siècle. B.S. : nous avons principalement puisé dans le célèbre Codex Chantilly, qui comporte plus de cent pièces [un codex est un manuscrit musical au moyen

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Björn Schmelzer a étudié l ’ethnomusicologie et l ’anthropologie, et a mené, pendant quelque temps, une recherche sur les traditions et interpré-tations musicales dans le sud de l’italie, la Sar-daigne et la Sicile. il com-bine les deux activités de chercheur et d’artiste et se spécialise avant tout dans le style et la fonc-

tion de l’ornamentation dans la musique classique méditerranéenne et occidentale. en 1999, il fonde l’ensemble Graindelavoix, avec lequel il aborde la musique ancienne sous l’angle de l’anachronisme et de l’écart géographique dans le but de retrouver le passé auditif. — Björn Schmelzer studeerde etnomusicologie en antropologie en deed enige tijd onderzoek naar de muzikale tradities en opvoeringspraktijken in Zuid-Italië, Sardinië en Sicilië. Hij combineert de twee activi-teiten van onderzoeker én kunstenaar, en specialiseert zich vooral in de stijl en de functie van ornamentatie in de mediterrane en de westerse klassieke muziek. In 1999 richtte hij het ensemble Graindelavoix op, waarmee hij de oude muziek benadert vanuit de invalshoek van anachronisme en geografische marge, met de bedoeling het auditieve verleden opnieuw uit te vinden.

partners gevonden die het me mogelijk maken om het gebruik van de stem op dezelfde manier te verkennen als we het gebruik van lichaamsbeweging benaderen. op de scène zullen alle vertolkers dansen en zingen. De dansers en zangers zullen proberen te ‘fuseren’.B.S.: Die ‘fusie’ wordt heel boeiend. Complexiteit zit namelijk niet in een eenvoudige opeenstapeling van noten op papier. Deze muziek is immers bestemd voor zangers die op het gehoor hebben leren zingen en die weten te improviseren op de zanglijnen. Het is

vooral de kunst van het luisteren en van de flexi-biliteit. ik ontdek een volstrekt nieuwe wereld: dansers laten zingen, hen hun tonus laten volgen, eerder dan hen te dwingen zich te con-centreren op de kwaliteit van hun stem. Dat toont me de weg naar nieuwe manieren om muziek te articuleren, net zoals die terug te vinden zijn in andere cultuurtradi-ties. matej Kejzar bij-voorbeeld, een Sloveense danser in het gezelschap, begon tijdens de repeti-ties een soort ballade te zingen, modale muziek uit de streek waar hij opgroeide en die ver-bazend sterk leek op middeleeuwse muziek – maar met heel verfris-sende intonaties. een klassieke zanger had dat niet kunnen produ-ceren, of toch niet op die manier.

A.T.D.K.: We werden naar de veertiende eeuw gekata-pulteerd, maar zonder enig besef van een ‘historische reconstructie’. meer alsof onze geschiedenis altijd al aanwezig is geweest in ons Dna.

Hoe hebt u de muziek gekozen die u op scène zult gebruiken?A.T.D.K.: De muziek van En Atendant is afkomstig uit noord–italië. ik wilde dat de gezangen in deze nieuwe creatie nog nauwer verbonden waren met de geschiedenis van avignon, met het pauselijke schisma aan het eind van de veertiende eeuw.B.S.: We hebben vooral geput uit de bekende Codex

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Âge], et dans l’énorme Codex de Chypre, composé de plus de trois cents pièces ; Chypre étant à l’époque sous l’autorité des seigneurs de lusignan (Poitou). Ce choix ne s’appuie pas que sur des considérations musicales ; les textes ont aussi leur importance : une sélection de dix pièces dessine un arc presque nar-ratif qui évoque le Grand Schisme d’occident. la première œuvre chantée, par exemple, est un motet anonyme, politiquement orienté, qui légitime le retour du pape Grégoire Xi d’avignon vers Rome, en usant de pseudo-preuves généalogiques et astro-logiques. Plus loin, le superbe chant de Johannes Ciconia, « le Ray au Soleil », introduit le thème émer-gent de la lumière ; c’est une méditation sur le blason des Visconti. il s’agit d’un tour de force musical et mathématique, puisque s’y superposent trois voix à trois vitesses différentes ! le chant qui clôture le spectacle est dû à Jean Hamelle, qui venait de Cam-brai mais travaillait à la cour des lusignan, et fait le pont entre l’orient et l’occident ; entre le pôle du soleil levant et celui du couchant. Cette pièce fait s’entrelacer, jusqu’à la fusion, deux textes latins dif-férents. l’un pleure notre condition mortelle, c’est un texte de nuit. l’autre repère en l’humain l’étincelle qui n’existe en aucun autre être et le rend éternel : la « Splendor », la splendeur. Texte de pleine lumière.

Chantilly, een middeleeuws muzikaal handschrift dat meer dan honderd stukken bevat, en uit de enorme Codex van Cyprus, die meer dan driehonderd werken omvat. Cyprus stond in die tijd onder het gezag van de heren van lusignan (Poitou). Deze keuze steunt niet alleen op muzikale overwegingen, ook de teksten speelden een rol. een tiental stukken vertelt bijna het hele verhaal van het Grote Westerse Schisma. Het eerste gezongen stuk is bijvoorbeeld een ano-niem politiek getint motet dat de terugkeer van paus Gregorius Xi van avignon naar Rome rechtvaardigt met genealogische en astrologische pseudo–argu-menten. Verderop introduceert het prachtige lied ‘le Ray au Soleil’ van Johannes Ciconia het thema van het licht. Het is een meditatie over het blazoen van de Visconti. Dat is een muzikale en wiskundige krachttoer, want drie stemmen met elk een andere snelheid zijn er over elkaar geweven! Het lied waar-mee we de voorstelling afsluiten, is van de hand van Jean Hamelle, die afkomstig was uit Kamerijk, maar aan het lusignanhof werkte. Hij verbindt oost met West, de opkomende zon met de ondergaande. Dit stuk verweeft twee verschillende latijnse teksten met elkaar, tot die met elkaar versmelten. De ene beweent onze sterfelijke conditie, en is een nachtelijke tekst. De andere bespeurt in de mens de vonk die in geen

Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

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Ce pont entre orient et occident, ces thèmes mêlés du jour et de la nuit, m’évoquent une prémonition de la Renaissance européenne.

Une des particularités de votre création réside dans le choix de travailler avec six chanteurs et treize dan-seurs, soit un groupe de dix-neuf personnes, parmi lesquelles seize hommes. Qu’est-ce qui est mis en jeu par ces présences majoritairement masculines ?A.T.D.K. : C’est une manière pour moi de continuer le travail entrepris depuis The Song. Travailler avec un groupe très orienté « homme » ou « femme » clarifie les lignes de force d’un spectacle, et lui donne de l’unité. Je poursuis, depuis plusieurs productions, un certain idéal de légèreté, d’affranchissement de la pesanteur, de résistance à la gravité. Cela croise la thématique du passage de la nuit à la lumière. Tout ce que j’aime et valorise chez les danseurs masculins va dans ce sens : non pas le poids, non pas la démonstration de force, mais l’énergie bondissante dont ils peuvent faire preuve, leur versant lumineux.

En regardant vos dernières pièces, The Song et En Atendant, on a l’impression que vos choix artistiques se fondent de plus en plus sur une volonté d’épurer…A.T.D.K. : oui, il n’est pas mauvais, parfois, d’en-

ander levend wezen schuilt en die hem eeuwig maakt: de ‘Splendor’ of ‘schittering’. Deze tekst zit vol licht. Deze brug tussen oost en West, deze combinatie van dag en nacht, zijn thema’s die in mijn ogen vooruit-wijzen naar de europese renaissance.

Een van de bijzonderheden van uw creatie is de keuze voor zes zangers en dertien dansers, met andere woor-den, een groep van negentien mensen, onder wie zes-tien mannen. Wat betekent dat mannelijke overwicht?A.T.D.K.: Het is voor mij een manier om het werk voort te zetten dat ik begonnen ben vanaf The Song. als je met een ‘mannelijk’ of ‘vrouwelijk’ georiën-teerde groep werkt, worden de krachtlijnen van een voorstelling duidelijker en verleen je die een eenheid. ik streef al sinds een paar producties naar een ideaal van lichtheid, naar het loskomen van alles wat zwaar is, naar het afwijzen van de zwaartekracht. Dat kruist het thema van de overgang van duisternis naar licht. alles wat ik bij mannelijke dansers waardeer, gaat in die richting: niet gewicht of het etaleren van kracht, maar de sprankelende energie waarvan ze blijk kun-nen geven, hun heldere kant.

Wie uw recentste stukken bekijkt, The Song en En Atendant, krijgt de indruk dat uw artistieke keuzes

Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

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Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Anne Van Aerschot

Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

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Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Herman Sorgeloos

Cesena, Palais des Papes, Avignon, 2011 © Anne Van Aerschot

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lever le papier cadeau pour se reposer la question essentielle : de quoi a-t-on besoin ? Comme j’ai une très forte conviction et un très grand amour pour les potentialités rhétoriques du corps, je préfère réduire au minimum les costumes et les lumières. Pour cette nouvelle création, la Cour d’Honneur sera ainsi livrée au regard du spectateur sans fard ni artifices. ou, devrais-je plutôt dire, avec les artifices scénographiques simples et subtils pensés par ann Veronica Janssens. ils sont le fruit d’une réflexion sur la lumière du jour, sa redistribution, l’aveugle-ment. S’il est vrai que En Atendant jouait du para-doxe poétique d’un dévoilement apporté par la nuit, d’une apparition au sein de l’obscur, nous aurons ici l’effet inverse : quelque chose qui se dérobe dans la lumière. Comme nous l’avions fait pour En Atendant, nous adapterons évidemment ce dispositif de plein air pour la reprise au Théâtre de la monnaie.Pour poursuivre sur votre question de la simplicité des moyens : oui, j’ai volontairement choisi un voca-bulaire chorégraphique qui s’appuie sur des éléments très simples. la marche, par exemple. la marche me permet de me déplacer dans l’espace, elle me permet d’intensifier ou de distendre le lien social. mais la marche, c’est aussi une manière de diviser le temps, de le quantifier à chaque pas. la marche

gebaseerd zijn op een steeds sterker streven naar zuiverheid…A.T.D.K.: Ja, het kan soms geen kwaad om de ver-pakking weg te halen en naar de cruciale vraag te gaan: wat hebben we nodig? aangezien ik heel erg overtuigd ben van het retorisch potentieel van het lichaam, en daar ook van houd, reduceer ik kostuums en belichting het liefst tot het minimum. Tijdens deze nieuwe creatie krijgt de toeschouwer de Cour d’Honneur te zien zonder kunst– en vliegwerk. of liever, met de eenvoudige, subtiele scenische kunst-grepen die ann Veronica Janssens heeft bedacht. Ze zijn het resultaat van een reflectie over het daglicht, zijn verspreiding en de verblinding erdoor. Terwijl En Atendant speelde met de poëtische paradox van een onthulling door de nacht, van een verschijning midden in de duisternis, krijgen we hier het tegen-overgestelde effect: iets wat in het licht verzinkt. net zoals in En Atendant passen we die openluchtaspec-ten uiteraard aan voor de reprise in de munt.om terug te komen op uw vraag over de eenvoud van de gebruikte middelen: ja, ik heb bewust gekozen voor een choreografisch vocabulaire dat steunt op heel eenvoudige elementen. De pas, bijvoorbeeld. Die biedt me de kans tot verplaatsingen in de ruimte, en om relaties aan te halen of losser te maken. maar

Cesena (répétition–détail), Palais des Papes, Avignon, 2011 © Michel François

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Danse ¦ DansCESENAanne Teresa De Keersmaeker & Björn Schmelzer

Première belge ¦ Belgische première

Coproduction ¦ Coproductie Rosas, Festival d’avignon, la monnaie ¦ De Munt, Théâtre de la Ville (Paris), les Théâtres de la Ville de luxembourg, Festival oude muziek utrecht, Guimarães 2012, Steirischer Herbst (Graz), deSingel (antwerpen) & Concertgebouw BruggeCoprésentation ¦ Copresentatie la monnaie ¦ De Munt, Rosas & Kaaitheater

12, 15 & 16 novembre ¦ November 2011 20 :0013 novembre ¦ November 2011 15 :00 — Happy Sunday!La Monnaie ¦ De Munt

Chorégraphie ¦ Choreografie Anne Teresa De KeersmaekerDirection musicale ¦ Muzikale leiding Björn SchmelzerScénographie ¦ Scenografie Ann Veronica JanssensCostumes ¦ Kostuums Anne-Catherine Kunz

Créé avec et interprété par ¦ Gecreëerd met en vertolkt door Rosas & Graindelavoixolalla alemán, Haider al Timimi, Bostjan antoncic, aron Blom, Carlos Garbin, marie Goudot, lieven Gouwy, David Hernandez, matej Kejzar, mikael marklund, Tomàs maxé, Julien monty, Chrysa Parkinson, marius Peterson, michael Pomero, albert Riera, Gabriel Schenker, Yves Van Handenhove & Sandy Williams

musique ¦ Muziek Ars Subtilior

introductions une demi-heure avant les spectacles ¦ Inleidingen een halfuur vóór de voorstellingenDurée ¦ Duur ca 2h ¦ 2h

Tickets ¦ Tickets 35 € – 30 € – 25 € – 15 €www.lamonnaie.be ¦ www.demunt.be – 070 23 39 39

HAPPYSUNDAY!13.11.11

est donc en quelque sorte l’espace et le temps ancrés dans mon corps. B.S. : C’est intéressant ce que tu dis parce qu’au XiVe siècle, le tempo des chansons était connecté à la marche et au galop du cheval. la marche est toujours un bon paramètre de la vitesse et de la lenteur. A.T.D.K. : De manière plus générale, je peux dire que je croise dans mes pièces les mêmes interrogations depuis cinq ans. Comment dévoiler les chemins et les circuits qui traversent le corps et la pensée, qui les connectent ? Ces connexions qui font de nous des humains, lorsqu’elles s’incarnent et se concrétisent dans la danse ou le chant, cela porte un nom : jubi-lation. Tenter de mettre à nu le nerf de cette jubi-lation, c’était en quelque sorte remettre le cap vers un certain minimalisme. Pas celui de mes débuts, bien sûr, ce serait plutôt un retour en spirale. nous avons commencé ce travail dans Zeitung à partir de la musique d’anton Webern et celle de Bach, et nous l’avons poursuivi dans The Song, 3Abschied et En Atendant. nous prenons comme point de départ le corps, qui est ce que nous avons de plus indivi-duel en tant qu’êtres humains – le plus voyant et en même temps le plus secret. le corps humain a sans doute peu changé à travers les siècles, mais il s’est laissé encoder par toute la masse des expériences humaines. Réaliser une création à partir des chants du XiVe siècle, c’est aussi faire remonter à la surface les mémoires du corps.

Propos recueillis par Maxime Fleuriot de Bruyn

de pas is ook een manier om de tijd te verdelen, om hem bij iedere stap te kwantificeren. De pas is dus in zekere zin de verankering van tijd en ruimte in mijn lichaam.B.S.: Wat je zegt is interessant omdat het tempo van liederen in de veertiende eeuw verband hield met de pas en galop van een paard. Die pas is nog altijd een goede parameter voor snelheid en traagheid.A.T.D.K.: meer in het algemeen kan ik zeggen dat ik in mijn werken sinds een jaar of vijf steeds dezelfde vragen tegenkom. Hoe de wegen en circuits onthul-len die ons lichaam en ons denken doorkruisen, die ze met elkaar verbinden? Die connecties maken ons mens als ze concreet gestalte krijgen in dans of zang. Dat heeft een naam: jubelen. Proberen de zenuw van die jubel bloot te leggen, betekende in zekere zin kiezen voor een soort minimalisme. niet dat van mijn beginjaren, dat niet, maar eerder een spiraalvormige terugkeer. We zijn die richting ingeslagen in Zei-tung, met de muziek van anton Webern en Bach, en zijn vervolgens op die weg doorgegaan in The Song, 3Abschied en En Atendant. We nemen het lichaam als uitgangspunt. Dat is het meest individuele wat we als mens hebben – het meest zichtbare en tegelijk het grootste geheim. Het menselijk lichaam is in de loop der eeuwen allicht veranderd, maar het heeft zich ook laten coderen door alle menselijke ervaringen. een creatie maken op basis van veertiende–eeuwse gezangen betekent ook de herinneringen van het lichaam weer aan het oppervlak brengen.

Opgetekend door Maxime Fleuriot de Bruyn

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