Davy Droit Et Personne

Embed Size (px)

Citation preview

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    1/186

    tr

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    2/186

    V

    f

    . 1

    the

    ppesence

    of

    this Book

    m

    the].

    m.

    kelly liBRAPy

    has

    Been

    mae

    possiBle

    ihROuqh

    the

    qeneROSity

    o

    Stephen

    B.

    Roman

    From

    the

    Library

    of

    Daniel

    Binch/

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    3/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    4/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    5/186

    >A'>

    VvV'

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    6/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    7/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    8/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    9/186

    LE

    DROIT, L'IDALISME

    ET L'EXPRIENCE

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    10/186

    LIBRAIRIE FELIX ALGAN

    DU

    MEME

    AUTEUR

    La

    Foi

    -jure

    :

    lude

    sociologique

    du

    Problme

    du

    contrat.

    LaForinafion

    du lien

    contractuel,

    i

    vol.

    in

    -8.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    11/186

    LE

    DROIT,

    L'IDALISME

    ET

    L'EXPRIENCE

    PAR

    GEORGES

    DVY

    Charg

    de

    Cours

    la

    Facult

    des

    Lettres

    de

    Dijon

    LIBRAIRIE

    FLIX

    ALCAN

    108,

    BOULEVARD

    S

    A

    I N

    T-

    CE R

    M A

    I N

    ,

    108

    1922

    Tous

    droits de

    traduclioa,

    d'adaptation

    et

    de

    reproduction

    rservs

    pour

    tous

    pays.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    12/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    13/186

    AVERTISSEMENT

    Je

    runis

    dans

    ce

    petit

    livide,

    et sans changer

    autre

    chose

    que

    les

    titres,

    trois

    tudes

    qui

    ont

    paru

    dans

    des recueils

    aujourd'hui

    puiss

    : la premire

    dans

    Z'

    Anne

    Sociologique

    (tome

    XII)

    sous

    le

    titre

    Personnalit

    et

    sujet

    de

    droit

    ,

    les

    deux

    dernires

    dans la

    Revue

    Philosophique [numros

    de

    Mars-

    Avril

    et Mai-

    Juin

    1920)

    sous

    le

    titre

    :

    l'Idalisme

    et les

    conceptions

    ralistes du

    droit

    .

    J'ai

    cru

    devoir

    reproduire

    ces

    articles

    sans

    y

    faire

    ni

    changement

    ni addition. Depuis

    qu'ils

    ont

    t

    crits,

    M.

    Duguit

    a

    fait

    paratre

    une

    seconde

    dition

    remanie

    et

    augmente du

    tome premier de

    son

    Trait

    de Droit constitutionnel;

    et dans

    cet

    ouvrage

    (en

    particulier

    p.

    35

    et

    sq.;

    59

    et

    sq.; kOl

    et

    sq.) il tient

    compte

    du

    point

    de

    vue que

    fai

    expos

    et

    discute

    les

    objections

    que

    j'

    ai

    prsentes

    sa

    doctrine.

    Mais comme

    il

    doit

    faire

    paratre

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    14/186

    VllI

    AVERTISSEMENT

    prochainement un

    volume

    sur

    la

    Souverainet

    ,

    f

    ai

    prfr

    attendre^

    pour

    lui rpondre mon

    tour

    et le

    discuter^

    que

    ce

    volume

    annonc aitparu.

    Enfin

    fai

    eu

    l'occasion galement

    depuis que

    les articles

    ici

    runis ont t crits de revenir sur les

    thories

    de

    M.

    Gny

    dans

    un

    article de

    la Revue

    de Mta-

    physique

    et

    de

    Morale

    de

    Janvier-Mars

    1921^

    p.

    ^9-75)

    intitul :

    A propos

    de

    rvolution

    de

    la

    pense juridique

    contemporaine.

    Dijon, Janvier

    1922.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    15/186

    LE

    DROIT,

    L'IDALISME

    ET

    L'EXPRIENCE

    PREMIERE

    PARTIE

    Le

    Droit

    et

    la

    Notion

    de

    Personne^

    I.

    Le

    sujet

    de

    droit :

    individu et

    collectivit.

    II-III.

    Les

    vues de

    Saleilles

    :

    droit corporatif, droit

    romain

    et

    droit

    germanique.

    IV.

    Les

    thories

    individualistes de

    la fiction

    et les

    conclusions de

    Saleilles.

    V.

    M

    Hauriou

    :

    institu-

    tion

    et

    droit objectif.

    YI.

    La

    personnification et

    le

    droit

    subjectif

    d'aprs

    M.

    Hauriou,

    VIL

    Critique

    des conclu-

    sions

    de M.

    Hauriou.

    YH .

    Le

    ralisme

    radical de M.

    Du-

    guit.

    Nous

    assistons

    aujourd'hui

    une

    crise

    de

    la

    fccience

    du

    droit.

    Les juristes

    parlent

    d'une trans-

    formation

    du

    droit

    priv

    et

    du

    droit

    public, d'une

    reconnaissance

    du droit naturel,

    d'une

    rvision

    ncessaire du

    Code

    civil.

    Des

    thories

    nouvelles

    surgissent du droit

    constitutionnel,

    de

    l'Etat,

    de

    la

    responsabilit

    et de la libert. Il semble que

    tout

    soit

    remis

    en question et que l'on veuille

    dcidment

    reconstruire

    sur

    des

    fondements nou-

    veaux.

    La

    vieille

    assise

    individualiste

    ne

    semble

    1.

    Cette

    tude

    a

    paru

    dans

    V

    Anne

    Sociologique

    (t.

    XII),

    sous

    la

    forme d'un

    comptc-reudu critique

    intitul

    Person-

    nalit

    et

    sujet de droit

    .Elle

    a t crite propos

    des

    ouvrages

    DAVY.

    1

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    16/186

    Z

    LE DROIT

    plus

    ni

    assez

    large

    ni assez

    solide.

    Or,

    parmi

    les

    problmes

    actuellement

    dbattus l'un de

    ceux qui

    semblent

    le

    plus

    constamment

    l'ordre

    du

    jour

    est

    celui

    de

    la

    personnalit juridique.

    11 domine

    tous

    les

    travaux

    rcents. C'est qu'en

    effet

    il

    est au

    cur

    mme

    du droit priv

    aussi bien

    que

    du

    droit

    public

    et

    qu'il

    constitue

    en dfinitive

    le problme

    fondamental

    du

    droit.

    I

    Qui

    est

    sujet

    de

    droit,

    source

    de droit?

    Est-ce

    seulement

    la

    personne

    relle

    doue de

    volont,

    c'est--dire

    l'individu

    psychologique,

    et

    doit-on

    par

    consquent

    recourir une

    fiction

    quand

    on

    parle

    de

    personnalit

    juridique

    propos

    d'une

    collectivit

    ou

    d'une

    institution,

    et sans avoir

    affaire

    un

    individu

    rel

    et distinct?

    Ou bien

    les

    groupements

    d'individus

    ou

    d'intrts

    ne

    prsen-

    tent-ils

    pas,

    sans

    constituer

    physiquement

    une

    personne

    relle

    avec corps

    et

    volont uniques,

    assez de

    ralit

    cependant pour que le lgislateur

    les

    considre

    immdiatement et sans

    aucune

    fiction

    comme

    une personne

    sui

    generis,

    et

    voie

    en

    eux

    un

    sujet

    et

    une

    source

    de

    droit?

    On

    suivants

    :

    R.

    Saleilles.

    De la

    personnalit

    juridique,

    Paris,

    1910;

    M.

    Hauriou. Principes

    de

    Droit

    public,

    Paris,

    1910;

    M.

    Hauriou. Les ides

    de

    M.

    Duguit,

    broch.,

    1911

    ;

    M.

    Hauriou.

    La

    souverainet

    nationale,

    brochure,

    1912; L. Duguit. Trait

    de

    Droit

    constitutionnel,

    Paris.

    1911; L.

    Duguit.

    Le Droit

    social,

    le

    Droit

    individuel

    et

    la

    transformation

    de

    l'tat.

    Paris.

    1911.

    L.

    Duguit.

    Les

    transformations gnrales

    du

    Droit

    priv.

    Paris, 1912.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    17/186

    LE

    DROIT

    ET LA NOTION DE PERSONNE

    3

    comprend

    qu'aucun

    problme

    ne

    saurait

    intresser

    davantage le sociologue

    puisqu'il

    s'agit

    de savoir

    en

    somme

    si

    l'on

    va

    consacrer

    juridiquement

    l'existence

    indpendante

    et

    autonome

    du groupe

    ou

    de l'institution

    ct

    de celle

    ou au mme

    titre

    que

    celle de l'individu. Il est clair que

    si

    l'on

    s'y

    dcide

    sans

    artifice ni

    rticence,

    la

    notion

    mme

    de droit

    s'en

    trouvera entirement

    renou-

    vele

    dans

    son

    origine et dans son application.

    Mais

    mme

    si

    on

    ne

    fait

    que

    tendre

    plus

    ou

    moins

    consciemment

    vers

    cette

    conception,

    en

    substituant

    peu peu,

    sous

    l'invitable

    pression

    des

    faits,

    la

    thorie de

    la

    personne

    juridique

    relle

    celle

    de

    la

    personne

    fictive,

    notre

    droit

    s'en

    trouvera

    dj

    considrablement

    transform et notre

    tradition

    individualiste

    branle.

    Or

    l'histoire des institutions

    nous

    rvle

    en

    effet

    une

    tendance

    de

    ce

    genre et

    nous

    montre le

    groupe

    s'imposant comme sujet de droit

    sous

    forme

    de

    personne

    morale

    ct de

    l'individu

    personne

    physique.

    Mais il n'y

    a l cependant

    qu'une

    tendance

    : si

    la

    personne

    morale

    est

    plus

    qu'une fiction elle

    reste

    moins qu'une

    ralit.

    Lorsque les

    collectivits s'organisent

    l'tat

    d'ins-

    titutions

    durables,

    lorsqu'elles

    prsentent

    une

    vritable unit

    d'administration et

    de dcision,

    dit

    M.

    Saleilles,

    le

    droit

    est bien

    oblig

    de

    les

    accepter

    comme

    une

    ralit

    qui

    s'impose

    lui;

    seulement il

    ne

    peut

    la

    dfinir

    qu'au

    moyen

    de

    symboles

    et

    de comparaisons.

    Il

    la

    compare

    des

    personnes

    relles

    ayant une

    individualit distincte

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    18/186

    4

    LE

    DROIT

    et

    des

    droits

    distincts. La

    Doctrine hsite,

    on

    le

    voit,

    sur la faon

    de

    dfinir

    et

    de

    reconnatre cette

    ralit

    qui

    se

    cherche.

    Ne

    peut-elle

    pas

    trouver

    des

    raisons qui la

    dispensent

    de

    comparaisons,

    et

    lui

    permettent

    une

    reconnaissance

    directe

    du

    droit

    des

    collectivits?

    Toute

    la

    question est

    l,

    et

    c'est

    bien

    ainsi

    que s'efforcent

    de la poser

    Saleilles,

    Hauriou

    et

    Duguit.

    En

    cela ils

    s'opposent en commun

    tous

    ceux

    qui

    s'en

    tiennent

    la

    thse

    purement

    subjective,

    M.

    Berthelemy,

    par exemple, qui

    crit de la faon

    la

    plus

    dcide :

    le

    mot personne

    est

    fait pour

    dsigner

    les

    hommes entant que

    sujets

    de

    droits.

    Admettre

    qu'autre

    chose

    qu'un

    homme

    aura

    le

    mme rle,

    c'est

    feindre

    que cette

    chose

    soit une

    personne.

    Quand

    Galigula

    levait

    son cheval

    la

    dignit de

    snateur romain,

    il

    feignait

    que

    ce

    cheval

    ft

    un

    homme.

    Ils

    s'opposent

    encore

    M.

    Michoud,

    sans doute

    beaucoup moins

    intransi-

    geant,

    mais retenu cependant,

    comme

    l'a

    bien

    indiqu

    M.

    Hauriou, par une

    timidit envers

    le

    droit

    objectif.

    Unis

    par

    le

    mme souci de

    faire

    une

    place

    au

    droit

    objectif

    ou social, ils se

    divisent

    sur

    la

    faon

    de

    le

    concilier

    avec

    le

    droit

    subjectif.

    Pour M.

    Duguit

    cette

    conciliation

    consiste

    en

    une

    ngation

    pure

    et

    simple

    du

    droit

    subjectif

    de

    l'tat

    aussi

    bien que

    de

    l'individu

    auxquels il

    refuse

    et

    la

    personnalit

    et la souverainet.

    Mais

    sa

    double

    ngation

    fait

    vanouir

    la

    notion de

    droit

    mme,

    car

    faute

    d'avoir

    le

    sens

    du

    social

    il

    ne

    russit pas

    la

    sauver

    avec

    sa

    thorie trop

    incon-

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    19/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA

    NOTION

    DE PERSONNE

    5

    sistante

    de

    la

    rgle

    de

    droit. Saleilles au

    contraire

    a

    le sens

    del

    ralit

    sociale

    et de

    son

    importance,

    mais

    il

    ne

    peut

    s'empcher

    de

    dfinir cette

    ralit

    qu'il sent

    en

    termes

    d'individualisme qui l'emp-

    chent

    de

    la

    comprendre dans

    sa

    vritable

    nature.

    M.

    Hauriou a,

    lui

    aussi,

    le

    sens

    de cette

    ralit

    sociale et

    il

    tente

    une trs intressante

    combinai-

    son

    entre

    le

    droit objectif de

    1'

    institution

    et le

    droit subjectif de

    la

    personne.

    Mais

    les

    rapports

    de ces deux

    facteurs

    aussi

    bien

    que

    les postulats

    de toute

    la

    construction

    restent trop obscurs.

    Quoiqu'il

    en

    soit

    et en

    dpit

    des

    divergences

    entre

    les

    auteurs

    et

    de

    l'insuffisante

    nettet

    de

    leurs

    conclusions,

    nous

    nous

    trouvons

    bien

    en

    pr-

    sence

    d'une

    tendance commune

    affirmer le

    droit

    des

    collectivits

    ou

    des

    institutions

    organises.

    II

    Le

    livre

    si

    riche de Saleilles

    nous

    permet de

    suivre

    la

    formation de

    cette

    tendance

    dans

    l'his-

    toire du

    droit romain

    et

    germanique,

    avant

    d'en

    discuter

    philosophiquement

    la

    valeur.

    L'histoire

    d'ailleurs

    nous

    prsente

    la

    fois

    les

    deux

    points

    de

    vue

    puisque

    nous voyons

    cette

    tendance

    d'une

    part

    se

    raliser

    dans les

    institutions

    et

    d'autre

    part

    s'affirmer

    chez les

    thoriciens.

    Ainsi

    Rome

    nous

    rencontrons

    l'institution

    du

    collegium

    et la

    thorie

    de

    Vuniversitas.

    Et

    Rome est

    cependant la

    terre

    privilgie

    de

    l'individualisme

    Le

    collegium

    se

    prsente

    d'abord

    Rome

    comme une imitation,

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    20/186

    b

    LE

    DROIT

    comme

    une

    filiale

    de la clvitas.

    Tant

    que

    sa

    capa-

    cit

    juridique n'est

    pas

    une

    institution

    de

    droit

    priv,

    il

    n'est encore

    qu'un

    organisme fonction-

    nant par

    dlgation de la

    puissance publique.

    Encore

    qu'association

    prive,

    il

    n'est en

    somme

    qu'une

    personne

    morale du

    droit

    public.

    Celte

    identification

    apparat Saleilles

    comme

    une

    erreur

    commune

    au

    droit

    romain

    et

    notre

    droit

    franais et

    qui en

    assimilant,

    d'aprs

    lui, la

    reconnaissance

    de

    personnalits

    civiles

    une con-

    cession

    d'tat, une

    reconnaissance

    d'utilit

    publique,

    enlve au

    collegium sa nature

    originaire

    d'association

    prive.

    Il ne

    semble

    pas

    cependant

    qu'il

    y

    ait

    rien

    l

    de contraire

    l'essence du

    droit

    corporatif,

    lequel

    ne

    nous

    parat pas devoir tablir

    de

    diffrence

    de nature

    autre qu'entre

    groupement

    et

    individu.

    Peu

    importe ds lors que

    le groupe-

    ment

    soit

    plus

    ou

    moins

    restreint, qu'il

    soit

    collge,

    municipe ou

    tat.

    La

    distinction

    entre

    le

    point

    de vue

    public

    et

    le

    point

    de

    vue

    priv est ici

    superficielle,

    ce

    qui est

    profond c'est

    celle

    entre

    un

    droit

    individuel

    et

    non

    individuel. Pour

    avoir

    servi de

    modle au

    droit

    priv, comme en bien

    d'autres

    cas,

    le

    droit

    public n'a rien eu

    lui

    dl-

    guer

    originairement.

    Il

    faut dire

    que

    le

    groupe-

    ment

    s'est

    fait

    juridiquement

    reconnatre dans

    le

    droit

    priv comme

    dans le

    droit

    public

    et

    non

    par

    le

    droit

    public. Si

    le

    droit public

    rglemente

    cependant, et

    jusqu'

    la

    fin

    du second

    sicle,

    l'exercice

    des

    droits

    privs

    du

    collegium,

    il

    ne

    le

    fait qu'au

    nom

    de

    l'opinion

    collective

    source

    de

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    21/186

    LE DROIT ET

    LA

    NOTION

    DE PERSONNE /

    tout

    droit

    et

    par laquelle il

    est rglement

    lui-

    mme.

    En

    tout

    cas

    l'poque de

    Gaus,

    les

    colle-

    gia sont

    assimils

    des personnes avec

    capacit

    civile

    drivant

    du

    droit

    commun.

    Et

    c'est

    dans l'interprtation que

    Saleilles pro-

    pose

    de leur

    nature

    qu'on

    voit

    apparatre

    les

    incer-

    titudes

    et les

    contradictions

    de

    sa

    conception

    du

    droit

    social.

    Critiquant,

    dans sa premire leon

    les

    thories

    individualistes

    il

    dclarait

    en propres

    termes :

    philosophiquement il

    y

    a un

    droit

    social avant

    qu'il

    y

    ait

    un

    droit

    individuel.

    C'est

    le groupe

    qui

    a

    des

    droits et

    qui

    en

    communique

    la virtualit chacun de

    ses membres, bien

    loin

    que

    ce

    soient

    les

    individus,

    comme le

    voulait

    Rousseau,

    qui

    mettent

    en

    commun

    leurs

    droits

    individuels

    pour crer

    un

    organe

    nouveau

    et un

    droit nouveau

    (p.

    12).

    Voulant

    maintenant

    dfi-

    nir la

    nature

    du

    collegium

    mancip

    du

    droit

    public, voici comment s'exprime le

    mme

    auteur

    quarante

    pages

    plus

    loin

    :

    On

    cesse

    de

    voir

    dans

    les

    collectivits

    ainsi personnifies

    (les

    collegia)

    des

    succdans

    de

    la

    fonction

    administrative,

    on

    en

    fait ce qu'elles

    sont

    rellement, des

    mana-

    tions du

    droit

    individuel

    agglomr... une

    pluralit

    de

    droits individuels groups en

    vue

    d'une

    action

    collective

    organise.

    Ce

    sont

    des

    droits

    privs

    qui

    font masse.

    Il

    faudrait

    s'entendre. Si c'est

    le

    groupe

    qui

    communique

    ses droits

    l'individu,

    comment

    le

    droit

    du groupe

    se

    rduit-il

    une

    masse

    de

    droits

    individuels?

    Groira-t-on,

    pour

    lever

    la

    contradic-

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    22/186

    8 LE DROIT

    tion,

    que l'auteur

    sous-entend

    l'existence

    relle

    d'un droit

    nouveau

    issu du fait

    qu'il

    y

    a masse

    et

    concentration.

    Mais

    il

    prend

    soin

    de

    nous

    inter-

    dire

    lui-mme

    cet

    essai

    d'interprtation

    en

    nous

    disant de

    cette

    concentration

    :

    Ce

    n'est

    pas elle

    qui

    change le

    caractre des droits

    qu'elle

    a cen-

    traliss

    et unifis.

    Ils

    restent

    des

    droits

    privs,

    exercs pour

    le

    profit

    d'un

    certain nombre

    d'indi-

    vidus.

    Partout

    ce sera le

    but

    individuel,

    l'initiative

    prive bien

    que

    collective qu'il faudra avoir

    en

    vue

    et

    faire respecter.

    (p.

    55).

    Cette

    initiative

    prive

    bien que

    collective,

    que nous

    soulignons,

    n'est

    pas

    en

    vrit

    chose

    claire.

    L'obscurit

    est

    peut-

    tre

    augmente

    du

    fait

    que,

    partant

    de

    la

    distinc-

    tion

    de

    la

    lgalit

    et

    de la capacit

    des

    associa-

    tions, l'auteur

    oppose

    leur

    sujet

    le

    point

    de

    vue

    du droit priv

    et

    le

    point de vue du

    droit

    public,

    et

    qu'il

    identifie

    ensuite

    avec cette

    opposition

    l'opposition

    pourtant

    bien diffrente

    du

    point

    de

    vue

    individuel

    et

    du

    point

    de

    vue

    collectif.

    L'autorisation

    rendue

    ncessaire

    par

    la

    Lex

    Julia

    pour fonder

    des associations

    licites

    ne fit

    qu'accentuer

    la similitude

    entre

    les

    collegia

    et

    les

    organismes

    du

    droit

    public.

    Et

    cette

    similitude

    tait

    si

    peu

    propre

    fausser

    le

    concept

    de

    droit

    corporatif

    que

    c'est

    en la

    creusant

    que les

    juristes

    romains

    prcisrent

    la thorie

    de V

    universitas

    ,i\\ii

    prcisment

    substitue

    la

    notion

    d'un

    ensem-

    ble

    de membres

    runis

    en

    collectivit

    celle

    de

    groupement

    organnjue

    unitaire,

    et

    superpose

    la

    respublica

    nupojjulus

    /'omanus,

    le

    municipiu/n

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    23/186

    LE

    DROIT

    ET LA

    NOTION DE

    PERSONNE

    \f

    aux

    municipes. D'une faon

    gnrale

    Vuniversitas

    dsigne

    l'unit et

    la

    ralit

    spcifique

    de toute

    espce

    de

    groupement

    de

    droit

    public

    ou

    priv.

    Elle s'oppose

    la

    somme

    des

    individus,

    aux sin-

    guli. Marcien dit

    en

    parlant

    des

    biens

    des

    cits

    :

    universitatis

    sunt

    non

    singuloruni,

    et

    de

    mme

    en

    parlant

    du servus communis

    : nec

    singulonun

    pro

    parte

    intellegitur

    sed

    universitatis.

    Ulpien,

    au

    Digeste

    (2.731

    3-4)

    s'exprime

    non

    moins

    nette-

    ment.

    Aussi

    Saleilles

    conclut-il

    avec

    raison

    :

    Vuniversitas iovx^

    apparat

    comme

    un

    sujet de

    droit

    se

    dtachant

    dsormais

    de

    la

    personnalit

    des

    individus.

    La

    notion d'unit

    efface

    donc

    celle

    de

    pluralit

    mme

    sous

    la

    forme

    de

    collecti-

    vit

    indivise.

    Ce

    nouveau

    sujet de

    droit,

    propri-

    taire

    unique,

    c'est la

    cit, c'est

    le

    collge

    consi-

    drs

    dans

    leur

    unit corporative.

    Toutefois

    cette conception

    ne

    fut

    peut-tre

    pas

    dgage

    avec

    une

    nettet

    absolue

    et

    une

    rigueur

    complte

    par

    les

    juristes

    romains

    :

    il

    y

    a

    un

    flot-

    tement

    dans les textes

    et

    certains paraissent se

    rfrer

    l'ide

    pluraliste,

    llolder et

    Binder

    n'ont

    pas manqu de

    faire

    l'objection

    Gierke,

    grand

    partisan

    de la

    thse

    de

    la

    ralit.

    On

    trou-

    vera

    dans

    le

    livre

    de

    Saleilles

    un

    expos

    de

    la

    controverse

    et une

    trs

    intressante

    discussion

    des

    textes

    de Marcien

    et

    d'Ulpien.

    Mais

    notre

    auteur,

    tout

    en

    dfendant

    l'interprtation

    qui fait

    de

    Vuniversitas

    une unit

    relle,

    ne

    peut

    dcid-

    ment

    pas

    se la

    reprsenter sous

    sa

    vritable

    forme

    collective.

    Il

    lui

    faut

    la

    composer

    toujours

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    24/186

    '10

    LE DROIT

    d'lments

    individuels qu'il

    essaie

    de

    fondre

    ensemble,

    grce

    la notion de

    but

    atteindre,

    tentant

    ainsi

    une

    conciliation

    bien

    obscure

    entre

    la

    tlise

    de

    l'unit

    et celle

    de la

    pluralit, entre

    Gierke

    et

    Holder

    :

    U

    universitas

    des

    Romains,

    crit-il

    n'tait pas un

    sujet de droit distinct des

    individualits

    qui

    la

    ralisaient, mais un

    sujet

    de

    droit

    compos

    de

    ces

    individualits

    elles-mmes,

    de

    telle

    sorte

    que

    celles-ci trouvaient dans

    le

    droit

    unitaire

    de

    Vuniversitas

    de

    nouveaux rap-

    ports

    de

    droit, on,

    si

    l'on

    veut, de nouveaux

    droits

    individuels

    destins

    caractriser

    leur

    situation

    en

    tant

    que

    membres

    de

    Vuniversitas.

    (p.

    88).

    Il

    nous

    parat

    plus

    exact

    et

    plus

    clair

    de

    con-

    clure

    que

    Vuniversitas sut

    s'imposer

    la thorie

    romaine

    comme

    une

    source

    distincte

    de

    droit,

    conclusion

    qui

    est

    bien

    aussi

    au fond celle o

    s'in

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    25/186

    LE DROIT

    ET

    LA NOTION DE PERSOiNNE

    41

    ressante

    tude des fondations

    que nous

    ne

    pou-

    vons

    suivre

    dans

    le

    dtail.

    Le

    droit

    romain,

    tout

    individualiste

    qu'il

    tait,

    a

    su

    consacrer

    juridique-

    ment

    tous les

    organismes objectifs que

    les faits

    lui

    imposaient

    depuis

    la personnalit

    purement

    corporative

    de l'association

    jusqu'

    la

    personna-

    lit

    de pure affectation

    des

    piae

    causae en

    passant

    par

    la

    conception

    mixte de

    la proprit

    ecclsias-

    tique .

    III

    Le

    mme

    point

    de

    vue

    raliste

    touchant

    le droit

    des

    groupes

    ne

    pouvait

    pas

    ne

    pas

    triompher dans

    le droit

    germanique.

    Le

    rgime

    de

    communisme

    qui

    caractrisait

    l'tat social des

    Germains

    y

    tait

    essentiellement

    favorable

    :

    ils taient

    habitus

    n'envisager

    la

    communaut que

    par son

    ct

    social,

    et

    jamais

    par

    son

    ct

    individualiste.

    L'indi-

    vision

    ou proprit en

    main

    commune,

    par

    Gesamte

    Hand,

    fut

    donc

    tout

    naturellement

    leur

    premire

    tape

    dans

    le

    progrs

    dont

    nous

    parlons

    :

    au

    sein

    de

    cette

    indivision

    on

    ne

    pouvait

    pas

    imiivi-

    dualiser

    les

    droits de

    chacun

    comme

    dans

    la

    coproprit

    romaine,

    car

    le

    principe

    de

    commu-

    naut

    s'tendait non pas

    seulement

    au

    rgime

    des

    parts

    mais

    aussi

    la

    conception

    du

    droit,

    La

    proprit commune

    du

    droit

    germanique

    forme

    donc

    une

    masse

    part,

    administre

    par

    l'ensemble

    des

    copropritaires, et

    elle recle

    en

    elle

    la plu-

    part

    des

    avantages

    attachs

    la

    personnalit

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    26/186

    12

    LE

    DROIT

    civile,

    d'autant

    plus qu'en pratique la gestion s'en

    unifia

    souvent

    par

    dlgation,

    de faon

    fonc-

    tionner

    comme

    ferait

    un

    patrimoine

    rig

    en

    per-

    sonne

    juridique

    et dou

    de

    personnalit.

    Et

    ainsi,

    la

    diffrence

    de

    ce

    qui

    se

    passait

    Rome,

    l'indivision

    s'organisait

    spontanment

    chez

    les

    Germains

    en association, la

    Gesamte

    Hand

    en

    Genossenschaft,

    Mais

    thoriquement la

    diffrence entre ces

    deux

    formes

    est grande

    parce

    cjuela

    seconde

    seulement

    ralise

    l'unification

    vritable du

    patrimoine

    et la

    substitution

    du

    droit collectif au droit

    individuel

    des

    propritaires

    communs.

    La premire

    cependant

    l'annonait

    dj.

    Aussi

    dans

    ce

    droit

    n'est-il

    besoin de

    nul effort

    pour

    se

    reprsenter

    le

    droit

    propre

    du groupe.

    Et

    Saleilles

    crit

    trs juste-

    ment

    :

    pour

    qui

    et

    voulu

    cette

    poque

    identi-

    fier

    le

    droit

    avec

    l'ide

    de

    volont,

    c'est

    la

    volont

    collective

    qu'il

    et

    fallu

    en

    rattacher

    la

    manifestation.

    Et

    encore

    :

    La

    force

    cratrice

    du droit est

    au moyen-ge

    dans

    les

    collectivits,

    peine dans

    l'individu

    .

    (p.

    200-201). Peuimporte

    aprs

    cela

    que

    la

    Genossenschaft

    ne

    ralise

    pas

    encore

    intgralement dans les

    faits le

    droit

    col-

    lectif

    unitaire,

    et

    qu'elle

    recle

    encore

    en

    elle

    des

    survivances

    du

    rgime

    d'indivision :

    complte-

    ment

    actualise ou non,

    la

    tendance

    laquelle

    elle

    rpond

    est

    certaine. Et l'on s'tonne

    que

    Saleilles

    qui l'a

    si bien

    analyse

    et qui a

    mis

    si

    fortement

    enlumire

    la

    volont

    collective

    distincte

    qu'elle

    implique

    cherche

    encore, aprs les

    dcla-

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    27/186

    LE

    DROIT ET

    LA

    NOTION DE

    PERSONNE

    13

    rations

    trs

    nettes

    que

    nous

    avons cites

    parmi

    une foule

    d'autres,

    un biais

    qui

    permette

    de

    ramner

    ce

    droit

    au

    droit

    subjectif,

    pour

    le

    cas

    dit-il,

    o

    l'on

    voudrait

    tout prix

    donner

    pour

    fondement

    unique au droit la

    volont

    autonome

    de

    l'individu.

    Pour qui ne le veut pas

    tout prix,

    il

    faut

    recon-

    natre

    qu'en droit

    romain le

    collegium,

    qu'en

    droit germanique la

    Genosse?ischaft

    comme

    aussi

    la

    Korperschaft

    laquelle

    Saleilles

    consacre

    ga-

    lement

    un

    intressant chapitre,

    s'imposrent,

    dans

    le

    domaine des

    institutions,

    la

    conscration

    du

    lgislateur. Voil

    donc

    des

    choses qui

    appa-

    raissent

    au

    mme

    titre

    que

    les

    sujets individuels,

    comme

    des

    sources, comme

    des centres de

    droit.

    Il semble ds

    lors que

    la

    thorie

    n'aura

    qu'

    suivre la pratique

    pour l'laborer

    et dgager

    de

    ses indications de fait une

    notion

    systmatique

    moins troite que celle

    de

    droit

    subjectif indivi-

    duel.

    Or

    aprs

    s'tre en

    efet oriente

    dans

    cette

    direction au

    moyen

    ge

    propos

    de la

    Korperschaft

    nous

    voyons au contraire

    la

    doctrine incliner

    peu

    peu vers un

    point

    de vue diffrent.

    On

    ne

    peut

    videmment

    mconnatre

    l'existence

    et

    la

    situa-

    tion

    de

    fait

    des collectivits

    et

    des institutions,

    mais

    on

    cherche

    des

    artifices

    pour

    en

    rendre

    compte

    sans

    renoncer

    aux principes

    fondamentaux

    de

    l'individualit

    et

    de la volont.

    C'est ainsi que

    nat

    la

    thorie moderne de

    la

    fiction

    de Savigny

    et

    de

    ses

    successeurs

    : elle

    considre

    la

    collectif

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    28/186

    14

    LE

    DROIT

    vite comme

    une

    entit

    abstraite,

    comme

    une

    con-

    ception

    de

    l'esprit,

    et non comme

    une

    ralit,

    sinon

    fictive,

    et

    conclut

    par

    consquent

    que

    la

    personnalit

    juridique

    ne peut

    tre que

    de

    cra-

    tion

    lgale,

    parce que

    seule

    la loi

    peut donner

    Ttre

    juridique

    des

    entits qui

    n'existent

    pas dans

    la

    ralit.

    Il en

    rsulte

    que

    la thorie de

    la

    fiction

    se

    trouve

    dangereuse,

    par

    un

    curieux

    contre

    coup, au droit

    individuel

    en mme

    temps

    qu'au droit

    des

    collectivits

    :

    c'est

    le

    rsultat de

    son

    principe de

    l'autorisation lgale.

    Voil une

    construction

    bien

    complique

    et

    bien

    artificielle :

    de

    peur

    d'admettre

    des droits sans

    sujet,

    on

    invente

    un

    sujet

    fictif,

    et

    puis

    l'invention

    de

    ce

    sujet

    fictif

    empche

    dans certains

    cas le

    sujet rel

    de

    jouer son

    rle de

    sujet rel,

    et

    tout cela prci-

    sment

    pour

    sauvegarder

    la notion

    de

    sujet

    Mais

    la

    contradiction semble

    bien

    en

    effet

    tre

    le

    destin

    de

    la

    thorie

    de

    la

    fiction.

    N'est-elle

    pas

    ne

    au

    moyen ge,

    comme l'a trs

    bien

    montr Saleilles,

    pour

    consacrer une ralit

    juridique

    en

    soi, et

    faire

    sanctionner

    un

    nouveau

    rapport

    de

    droit. Et

    cependant

    partir

    de Domat,

    de Pothier

    et

    de

    Savigny on

    voit

    tout

    changer

    :

    la fiction

    sert

    dsormais

    faire

    comprendre

    qu'on

    avait

    sanc-

    tionn

    tort

    ce rapport

    juridique

    nouveau. La

    fiction

    produit

    son

    effet

    rebours

    :

    elle

    aboutit

    une

    dformation de la ralit

    et

    une

    rgression

    du

    droit.

    D'autres

    tentatives

    doctrinales

    ont

    t

    faites

    encore

    pour

    essayer

    de

    montrer

    que

    le vocable

    de

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    29/186

    LE DROIT

    ET

    LA

    NOTION

    DE

    PERSONNE

    15

    personnalit

    ne dsigne

    vritablement

    aucune

    ralit propre.

    Pour

    M.

    Planiol par

    exemple

    la

    personnalit

    signifierait

    simplement

    qu'on

    est

    en

    prsence

    d'un

    patrimoine

    qui

    appartient

    collec-

    tivement

    tous les associs;

    et

    pour

    Brinz

    d'un

    patrimoine

    qui

    n'appartient personne

    sinon

    son afFectalion.

    Dans

    le

    premier cas

    on voit

    que

    nous sommes aussi loin

    que possible

    de

    la ten-

    dance raliste

    laquelle nous nous

    sommes

    atta-

    chs. Dans le

    second on

    nous

    fait

    aboutir

    au

    contraire

    ses consquences

    les plus

    excessives.

    Or,

    pour

    affirmer

    l'existence

    d'une ralit,

    nous

    ne

    prtendons

    nullement

    supprimer

    toutes

    les

    autres,

    et

    nierle

    rle

    de

    la

    volont

    comme

    source

    et

    sujet

    de

    droit.

    On

    a

    raison

    de

    parler

    de

    ralit

    patrimo-

    niale

    affecte;

    mais

    cela

    ne

    doit

    pas

    plus

    exclure

    la

    volont

    collective

    que

    la volont

    individuelle

    comme

    sujet

    de

    droit.

    En dfinitive

    la

    leon

    qui

    se

    dgage de

    l'obser-

    vation

    des

    faits

    et

    de

    la

    confrontation

    des

    thories,

    c'est

    la

    ncessit

    d'largir

    la notion

    de

    droit

    loin

    d'en exclure

    tel

    ou

    tel

    lment.

    Et

    c'est cette

    ncessit que conclut Saleilles, aprs

    un dernier

    examen des

    thories

    complexes

    de

    Holder

    et

    de

    Binder.

    Pour

    lui

    le

    droit

    est

    un

    pouvoir

    de

    rali-

    ser

    des intrts,

    et

    un

    pouvoir qui

    est

    exerc

    par

    une volont.

    Mais

    quoique

    le

    type de

    cette

    volont

    soit

    videmment

    la personne

    humaine,

    ce

    n'en est

    cependant

    pas

    le

    type

    unique

    :

    11 n'y a plus

    rien,

    crit-il,

    dans ce

    qui fait

    l'essence du droit

    telle

    que nous

    l'avons

    vue

    ressortir

    des

    faits

    et

    de

    la

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    30/186

    16

    LE

    DROIT

    nature

    des

    choses

    qui

    exige que la

    personne

    humaine

    soit

    le

    seul

    tre

    capable

    de

    droits.

    On

    le

    proclame dans

    la

    thse

    qui

    ne

    voit

    que

    l'individu,

    et

    qui

    part

    de

    l'individu

    pour constituer

    la socit,

    dans

    la

    thorie du

    contrat

    social. Il

    n'est

    plus

    pos-

    sible de

    le dire

    dans

    celle

    qui

    fait du

    droit avant

    tout un

    produit de

    la

    vie

    en

    commun organise

    et

    hirarchise.

    Car

    cet

    tre

    qui

    s'appelle

    la

    socit

    peut contenir

    ou

    produire

    en

    lui-mme

    d'autres

    groupements

    similaires

    investis

    d'une

    fonction

    sociale partiellement

    identique,

    et

    dont

    le but

    par

    consquent

    soit

    au

    suprme degr

    celui

    que

    le

    droit a

    en

    vue.

    Ce

    sont

    donc

    des

    collectivits

    ayant

    des

    droits,

    et par

    suite des

    personnes

    juridiques

    au

    sens

    idal

    du

    mot

    (p,

    545).

    V

    A

    ces

    conclusions

    de

    Saleilles

    qui

    nous

    parais-

    sent

    en

    effet

    s'imposer,

    sinon

    s'accorder

    absolu-

    ment avec

    toutes

    ses

    prmisses,

    comparons

    celles

    dont

    nous

    avons dj

    indiqu

    l'esprit,

    de

    M. Hau-

    riou

    et de

    M.

    Duguit.

    Or

    il

    est

    vident

    que

    \

    institution

    telle

    que

    la

    dfinit

    M.

    Hauriou

    sera

    une

    de

    ces

    ralits

    dans

    lesquelles Saleilles

    nous

    propose de

    voir,

    aussi

    bien

    que dans

    la

    personne

    humaine,

    une

    source

    de

    droit. Lorsque

    Saleilles

    nous

    signale

    que les

    premiers

    procds

    de

    ralisation

    du

    droit

    nous

    apparaissent

    comme

    le

    produit

    d'organisations

    plus

    ou

    moins

    rudimentaires

    destines

    agir

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    31/186

    LE

    DROIT ET LA

    NOTION DE

    PERSONNE

    17

    sur le

    terrain juridique

    et

    produire

    des

    effets

    de

    droit; lorsqu'il

    nous

    raconte

    que

    les

    pre-

    miers

    groupements

    humains

    nous

    apparaissent

    moins comme des

    associations

    que comme

    des

    institutions

    organises

    et

    hirarchises,

    sup-

    rieures

    aux

    individualits

    qui

    les composent,

    comme c'est le

    cas

    de

    la famille

    groupe

    en

    institution

    sociale

    et

    de

    tous les

    groupements

    du

    rgime

    fodal,

    ne

    semble-t-il

    pas

    qu'il

    nous

    introduit prcisment

    la

    trs

    intressante thorie

    institutionnelle de

    M.

    Hauriou?

    C'est en efet,

    pour cet

    auteur, de l'organisation,

    dans

    les

    faits,

    d'institutions juridiques amnages

    etquilibres,

    qu'il faut partir

    avant de parler

    de

    personnalit

    juridique.

    Pour

    lui

    les

    lments

    qui

    constituent

    la

    personne juridique

    ne

    doivent pas

    tre

    dduits

    du

    concept

    subjectif de

    la

    personne. C'est au con-

    traire

    le fait

    qu'ils

    se

    trouvent rassembls objecti-

    vement dans

    une certaine institution qui permet

    d'attribuer

    cette

    institution

    la

    personnalit

    juri-

    dique.

    Ces lments

    se rattachent en

    effet si

    peu

    a priori

    au concept de personne subjective

    qu'on

    peut les

    trouver

    rassembls dans des

    institutions

    qui n'ont pas,

    mais

    qui, de

    ce

    fait,

    se

    trouvent

    sus-

    ceptibles d'avoir la

    personnalit

    juridique.

    Tels

    les

    ministres,

    qui sont

    des

    institutions o l'on

    trouve un centre d'intrt

    et

    de volont

    et

    un

    pouvoir

    de dcision, des organes, un

    amnagement

    et un

    quilibre,

    et

    qui

    malgr'

    la prsence

    de ces

    lments

    que la thorie

    classique rapporte

    la

    personne

    morale

    comme

    telle,

    ne

    sont

    cependant

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    32/186

    18

    LE

    DROIT

    que

    des

    individualits

    objectives

    et non

    des

    per-

    sonnes

    morales.

    Ds

    lors

    il

    n'y

    a

    pas

    de raison

    pour

    que,

    lorsque

    nat

    la

    personne

    morale,

    on

    se

    croie

    oblig

    de

    ne

    rattacher

    qu'

    elle

    seule tous

    ces

    lments

    qu'on

    se

    hte

    pour

    cela

    de

    dtacher

    de

    Torganisme

    objectif.

    C'est

    donc

    bien

    des lments

    objectifs

    qu'il

    faut

    partir

    :

    c'est

    eux

    qui

    sont

    le

    support

    de

    la

    personnalit.

    Qu'est-ce donc

    que V

    institution

    ^

    synthse

    de ces

    lments

    objectifs?

    Traitant

    de

    droit

    public,

    celle

    que

    l'auteur

    va

    tudier

    c'est

    la nation.

    Or

    toute

    l'organisation

    sociale d'un pays

    peut se

    ramener

    un

    ensemble

    de

    situations tablies,

    maintenues

    ou

    cres

    par

    un

    pouvoir

    de

    domination.

    Si

    l'quilibre

    s'tablit

    entre le

    pouvoir de

    domination

    et

    l'en-

    semble des

    situations

    tablies,

    alors

    les

    tats

    de

    fait se

    transforment en tats de droit

    Tintrieur

    de

    la

    nation.

    Mais

    pour que cette

    transformation

    d'ensemble

    soit

    possible,

    il

    faut

    que,

    dans

    chacune

    des

    situations,

    il se

    produise un

    tat prjuridique,

    qui

    appelle la

    reconnaissance

    du

    droit,

    en raison

    du

    but

    et

    de

    la fonction

    impliqus

    par

    cette

    situa-

    tion et

    non

    pas

    seulement

    en raison

    del

    volont.

    Donc

    par

    la

    vertu de

    l'ordre

    et

    le

    jeu

    de l'qui-

    libre,

    la

    nation se trouve

    amnage

    en

    rgime

    d'tat

    . Et c'est

    l

    l'institution

    objective

    qui

    ser-

    vira

    de

    support

    l'tat

    personnifi.

    L'individua-

    lit

    sociale

    de

    la

    nation,

    crit

    notre

    auteur,

    n'est

    apte

    tre

    complte

    par

    une

    personnalit

    juri-

    dique

    qu'aprs

    avoir

    t

    amnage

    en rgime

    d'tat

    par

    un

    systme d'quilibres

    de

    pouvoirs

    et

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    33/186

    LE DROIT

    ET LA

    NOTION

    DE

    PERSONNE

    49

    de

    situations

    tablies,

    de

    mme

    que

    l'individualit

    physique

    de

    l'homme

    n'est

    apte

    tre

    complte

    par

    une

    personnalit

    morale

    qu'aprs

    avoir

    t

    elle

    aussi

    amnage

    par

    des

    quilibres

    physiques

    et

    physiologiques.

    (p.

    100).

    Bien

    que cette

    compa-

    raison ne soit

    peut-tre

    pas des

    plus

    claires,

    l'institution

    o

    va s'incarner

    le

    droit

    nous

    apparat

    bien

    nanmoins, chez l'auteur,

    comme

    une

    ralit

    sociale

    distincte des

    individus

    (cf.

    p.

    129,

    note

    3),

    et

    comme

    constituant

    un

    droit

    de

    groupe

    ct

    du

    droit individuel.

    Et c'est

    avec

    raison

    qu'

    ce

    point

    de

    vue

    il

    n'tablit

    aucune

    diflrence

    de

    nature

    entre

    les groupements divers,

    entre

    le

    droit

    public

    et

    le

    droit

    priv

    :

    Le

    plinomne

    de

    la cration des

    rgles juridiques

    va tre tudi,

    dclare-t-il,

    en

    prenant

    pour

    objectif

    principal

    l'institution

    nationale,

    mais

    en observant

    nan-

    moins qu'il se

    manifeste aussi

    dans

    les

    autres

    institutions

    quoique

    un

    degr

    moindre.

    (p.

    156).

    Ces

    rgles

    de droit d'origine

    institutionnelle

    ainsi

    poses

    ct, sinon

    la place

    des rgles

    d'origine individuelle

    comprennent

    des

    rgles

    de

    droit

    disciplinaire,

    dans

    lesquelles

    l'intrt

    du

    groupe

    se

    manifeste

    par

    la

    coercition

    du

    pouvoir

    de

    domination,

    et des

    rgles de

    droit statutaire

    qui

    expriment

    l'adhsion

    individuelle

    des membres

    aux

    procdures

    collectives de

    la

    vie

    corporative.

    Les

    rgles

    disciplinaires ne

    se

    confondent

    pas

    avec

    le droit

    public de

    l'tat, mais

    elles viennent

    l'alimenter.

    Le

    droit pnal

    par

    exemple,

    qui

    est

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    34/186

    20

    LE

    DROIT

    devenu

    du

    droit public,

    a d

    tre

    d'abord

    du

    droit

    institutionnel disciplinaire.

    Voil

    pourquoi

    il

    a

    des bases si

    multiples.

    Quant

    au

    droit

    statutaire il

    reprsente

    les

    modes d'action

    permis aux

    indi-

    vidus

    au

    sein

    de

    l'organisme

    dont

    ils

    font

    partie.

    Et

    il

    fournit l'explication

    de

    la valeur

    juridique

    d'actes qui

    ne

    sont pas

    des

    contrats

    tout

    en

    repo-

    sant

    sur

    des

    phnomnes

    de

    consentement

    et

    que

    les juristes

    ont

    appels

    des

    actes

    complexes.

    L'institution

    ainsi dfinie

    par un

    ensemble

    de

    situations tablies,

    rendues

    juridiques

    par la

    con-

    scration

    du

    droit disciplinaire

    et

    du

    droit

    statu-

    taire,

    nous

    place

    immdiatement

    en

    plein

    droit

    rel,

    sans

    qu'il

    y

    ait

    eu lieu

    de

    ramener les

    rap-

    ports

    juridiques

    qu'elle

    contient

    des relations

    de

    droit

    personnel. Gomme

    application

    particu-

    lire

    de

    ce

    nouveau point de

    vue, on substituera

    par

    exemple

    la considration

    des

    rapports

    per-

    sonnels

    entre

    la

    personnalit

    morale

    de

    l'institu-

    tion

    et

    ses

    organes (fonctionnaires,

    etc.),

    celle

    des

    rapports

    de

    droit

    rel

    entre

    l'organe

    et

    la

    fonction

    considre

    comme une

    chose

    active.

    D'une

    faon

    gnrale

    le

    systme juridique

    a deux

    ples, celui

    des

    personnes avec

    le

    droit

    subjectif,

    celui

    du

    droit

    objectif avec les choses.

    Laissons

    l'auteur

    prciser

    lui-mme

    son

    point

    de

    vue

    et

    l'opposer

    celui de

    M. Diiguit

    ;

    Il est

    impossible,

    crit-il,

    de

    prendre

    la

    direction

    du

    droit

    objectif

    sans aller

    jusqu'aux

    choses.

    S'arrter

    mi-chemin

    n'est

    pas

    logique.

    C'est

    le

    parti

    qu'a

    pris

    M. Duguit qui

    n'arrive

    pas

    une

    conception

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    35/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA NOTION

    DE

    PERSONNE

    24

    des

    fonctions

    sociales

    considres comme

    des

    choses... Sa construction

    de

    droit subjectif est

    vide

    de

    choses.

    Il

    n'y

    a

    pas

    dans

    l'tat

    tel

    qu'il

    le

    con-

    oit

    de

    personnalit

    subjective, et

    il

    n'y

    a

    pas non

    plus

    de choses. Il n'y

    a

    qu'un

    pouvoir

    obissant

    uno rgle

    juridique.

    On

    ne voit pas

    comment

    un

    pouvoir

    peut s'asseoir et

    par

    consquent

    devenir

    un

    tat

    de

    choses.

    (p.

    174).

    Pour

    M.

    Hauriou

    au

    contraire l'tat

    est bien une

    chose,

    et si

    bien une

    chose, qu'il

    le

    considre

    plutt comme

    une

    Fon-

    dation, c'est--dire

    un

    ensemble actif de choses

    que

    comme une

    association,

    c'est--dire

    un

    ensemble

    de

    personnes.

    Et

    sans

    doute, M.

    Hauriou

    a

    raison

    de

    reprocher

    M.

    Duguit

    un

    dfaut

    de

    ralisme,

    mais

    qu'

    son

    tour il

    se

    garde

    lui-mme

    d'un excs de

    ralisme,

    car

    le

    droit

    n'est

    dans

    les

    choses que si

    l'opinion veut

    bien l'y

    sentir. Il

    y

    a

    l

    un point sur

    lequel

    nous

    aurons

    revenir.

    VI

    Ainsi

    d'aprs

    notre auteur tous les

    droits sont

    d'abord objectifs

    et

    ils

    naissent de

    l'institution.

    Mais

    certaines

    influences agissent

    ct

    de

    l'ins-

    titution

    et

    viennent

    introduire

    les

    lments

    sub-

    jectifs

    :

    ce

    sont le

    commerce

    juridique

    et

    le

    contrat.

    Le

    commerce

    juridique

    introduit dans

    la

    socit

    institutionnelle

    un

    lment nouveau

    :

    l'change

    qui

    implique

    la notion

    subjective

    de

    valeur et

    aussi

    la

    distinction

    entre

    sujets diffrents.

    L'auteur

    indique

    avec

    raison

    que

    le

    commerce

    juridique a,

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    36/186

    22

    LE

    DROIT

    au

    point

    de

    vue

    du

    dveloppement

    du

    droit,

    une

    importance

    qu'on

    ne

    saurait

    exagrer.

    Notre

    droit

    des

    obligations

    n'est

    qu'un

    rsidu

    du

    droit

    com-

    mercial

    de l'antiquit.

    Le

    droit

    du

    prteur

    tait

    une

    sorte

    de

    droit

    commun

    commercial emprunt

    aux

    Grecs et aux Phniciens qui

    eux-mmes

    l'avaient

    emprunt aux

    Egyptiens

    et

    aux Ghal-

    dens.

    Et non

    seulement

    les

    usages

    du

    commerce

    crent

    des rgles

    de

    dtail

    comme

    celles

    du droit

    maritime

    ou des contrats,

    mais

    ils

    dgagent

    des

    rgles

    gnrales qui sont

    proprement parler des

    postulats

    de la

    justice

    commutative,

    de

    celle

    qui

    a

    pour

    symbole

    la

    balance.

    Enfin

    en mettant

    en

    rapportles

    individus

    les

    uns

    avec

    les autres,

    et en

    leur

    donnant

    l'occasion

    du

    pari,

    du risque

    et

    du

    crdit,

    ils favorisent singulirement l'closion

    et

    le

    dveloppement de la

    libert

    individuelle.

    Ainsi,

    conclut

    M. Hauriou,

    ce

    qui

    cre le

    droit

    individuel,

    ce

    n'est

    pas

    seulement

    l'minente

    dignit

    de la

    personne humaine. Le

    droit

    ne

    nat

    que

    de l'action.

    L'minente dignit

    de

    l'homme

    serait

    impuissante sans

    la

    dmarche par laquelle

    il

    affirme

    sa

    foi

    en la socit,

    en risquant pour

    elle

    sa

    personne.

    La

    valeur

    du

    commerce

    juridique

    est de multiplier

    les occasions

    o

    l'individu

    fait

    ainsi

    crdit.

    (p.

    197-198).

    Tandis que

    le droit

    social

    s'laborait

    dans l'ins-

    titution politique

    sous la

    double

    forme

    discipli-

    naire

    et

    statutaire,

    le

    droit

    individualiste

    se

    constitue

    donc

    surtout

    dans les usages

    du

    com-

    merce juridique,

    dans

    le

    contrat, dans

    l'exercice

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    37/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA

    NOTION

    DE PERSONNE

    23

    de

    la

    proprit.

    A

    ct

    de la

    synthse

    objective

    de

    l'institution

    se constitue la

    synthse

    subjective

    de

    la

    personnalit : l'institution

    sous

    l'action

    de

    ces nouveaux lments

    subjectifs

    se

    personnifie.

    Et

    c'est

    l'exercice

    de

    l'acte

    juridique qui

    vient

    consommer l'union finale de

    la

    personne et de

    l'institution.

    Cette

    union

    n'est

    pas une

    confusion :

    elle

    s'accomplit,

    crit

    M.

    Hauriou,

    dans

    une

    action commune, dans

    l'acte juridique

    o

    la

    per-

    sonnalit

    et

    l'individualit

    (entendez l'individualit

    objective

    c'est--dire

    l'institution)

    s'engageront

    tout

    entires

    d'une faon momentane bien

    que la

    rptition

    des

    actes

    doive transformer

    leurs

    con-

    tacts

    en

    une

    sorte

    de

    vibration

    rythmique.

    (p.

    680).

    C'est donc la

    dcision

    excutoire renfer-

    me

    dans l'acte juridique

    qui

    produit

    l'insertion

    de

    la

    personnalit juridique

    dans

    l'individualit

    objective

    et

    qui

    permet

    au

    sujet

    de

    se poser

    comme

    un

    et

    responsable

    en

    face

    des

    autres

    sujets.

    Mais malgr

    cette

    union intime

    dans laquelle

    les

    deux

    lments sont

    donns

    simultanment,

    n'oublions pas

    que

    l'un d'eux,

    l'lment

    objectif

    nous a toujours t prsent comme le

    plus

    impor-

    tant

    et

    le

    premier

    constitu.

    Reprenons

    l'exemple

    de l'Etat qui

    est

    celui propos

    duquel l'auteur

    construit

    sa

    thorie.

    L'Etat

    est

    d'abord une

    insti-

    tution.

    C'est

    ensuite,

    et une fois

    amnag comme

    institution, qu'il devient

    une personne.

    Pour

    devenir

    le

    sige

    d'une

    personnalit

    subjective,

    une

    institution a

    besoin,

    nous

    dclare

    l'auteur,

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    38/186

    24

    LE

    DROIT

    d'tre amnage

    en un

    certain rgime quilibr;

    il

    y

    a

    place

    pour

    toute

    une

    srie

    de

    phnomnes

    prpersonnels

    ou

    subpersonnels ,

    en soi

    trs

    objectifs

    quoique

    prparatoires

    la personnalit.

    En ce

    qui

    concerne

    l'tat, ces phnomnes pr-

    personnels

    sont les

    diverses phases de l'amna-

    gement

    objectif

    de la nation

    :

    institution politique,

    commerce

    juridique et

    contrat,

    quilibre

    de

    super-

    position,

    quilibre politico-conomique, protection

    de

    la

    vie

    civile,

    sparations

    de

    pouvoir,

    quilibres

    constitutionnels.

    Voil

    les

    principaux

    lments

    qui

    dfinissent l'tat comme

    institution avant

    qu'il

    soit

    personne.

    Mais

    il

    y

    a

    plus

    :

    avant

    d'tre

    per-

    sonne,

    l'tat

    peut

    encore

    tre dfini

    objectivement

    comme

    souverainet.

    Ce

    point

    de

    vue, conforme

    la logique

    du

    systme,

    mais qui

    n'tait

    pas bien

    dgag

    dans

    les

    Principes

    du

    Droit

    public

    l'est

    tout

    fait dans une

    plus rcente

    brochure

    de

    M.

    Hauriou sur la Souverainet Nationale,

    que

    nous

    avons mentionne

    en tte de

    cette

    tude.

    M.

    Hauriou

    nous

    montre

    qu'avant

    de

    parler

    de

    droit

    subjectif et

    de

    personnalit

    il

    y

    a

    lieu

    de

    constituer une thorie pralable

    et

    purement

    objective

    de

    la

    souverainet

    qui vient

    prendre

    place

    ct

    de

    la thorie analogue

    l'institution.

    Ds

    lors

    la souverainet

    nationale,

    par

    opposition

    la

    souverainet de

    l'tat

    qui,

    elle,

    est

    person-

    nelle,

    apparat

    comme une

    force objective

    incor-

    pore

    l'institution

    sans tre

    encore

    rapporte

    aucun

    sujet

    de

    droit (cf.

    en

    particulier

    p.

    10 et

    147).

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    39/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA

    NOTION

    DE

    PERSONNE

    25

    VII

    Nous

    sommes donc

    bien

    fonds

    conclure

    l'antriorit

    et

    la primaut

    du

    point

    de vue de

    l'institution sur celui

    de la

    personnalit,

    du

    droit

    objectif

    sur le

    droit

    subjectif. Et

    en effet

    l'auteur

    nous

    dit

    ailleurs

    que le droit

    subjectif

    jaillit

    du

    droit

    objectif

    qui en

    est la

    condition

    pralable.

    Mais si

    le

    droit

    subjectif est

    driv, que devient

    son autonomie

    qui

    est

    pourtant affirme

    par

    l'auteur

    en

    maint

    endroit? Le

    rapport de

    ces

    deux

    points

    de

    vue reste obscur.

    L'auteur

    n'est pas plus

    clair

    quand

    il

    prsente

    ce

    rapport

    sous

    la

    forme

    de l'opposition entre l'individu et

    la socit.

    Cette

    fois il

    n'y a

    plus

    drivation

    mais

    opposition

    et

    dualisme

    :

    Cette

    opposition

    ne

    peut

    exister,

    crit-il, que

    si

    d'une

    part

    l'individu

    possde une

    conscience

    autonome qui

    ne doive

    pas tout la

    socit, si d'autre

    part l'organisation

    sociale

    est

    le

    produit d'une

    certaine

    ncessit

    des

    choses qui

    ne

    doive pas

    tout

    aux

    consciences individuelles .

    (Pr. de

    Dr.

    Pub.,

    542).

    Combinaison pratique,

    comme

    le

    dit l'auteur,

    d'un certain

    libre

    arbitre

    avec

    un

    certain

    dterminisme.

    Et

    le

    droit

    indivi-

    duel autonome,

    capable de

    limiter

    celui

    de

    la

    socit est

    fond

    d'une

    faon

    bien

    obscure

    et bien

    fcheusement

    rousseauiste

    sur

    le

    sacrifice que

    fait

    l'individu de

    son

    pouvoir autonome

    et

    sur sa

    foi

    en

    l'institution

    sociale

    {ibicL,

    p.

    40).

    A

    un tel

    droit

    irrductible

    de l'individu l'auteur

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    40/186

    26

    LE

    unoiT

    croit

    en

    effet

    d'une

    faon

    trs ferme

    : il

    ne

    s'agit

    pas

    ici

    de

    lui

    en

    faire grief, mais de

    se demander

    comment

    se

    concilie avec

    ses dclarations sur

    la

    primaut

    du droit objectif

    le

    point

    de

    vue

    si indi-

    vidualiste

    et

    si

    subjectiviste qu'il affirme dans

    son

    article

    sur

    les ides de

    M.

    Duguit

    .

    L

    en

    effet

    il

    parle

    des

    droits

    naturels,

    individuels

    et

    impres-

    criptibles

    de

    rhomme,que

    M.

    Duguit

    a

    mconnus.

    Et cependant n'a-t-il pas

    lui-mme

    ailleurs critiqu

    la

    notion d'minente

    dignit

    de

    la

    personne

    comme

    source

    du

    droit?

    L,

    encore

    il proteste

    contre

    la

    mconnaissance

    par

    M.

    Duguit

    de la

    puissance

    cratrice du

    sentiment

    subjectif

    du

    droit

    dans

    les

    manifestations

    de

    la volont

    individuelle

    L

    enfin

    il

    affirme

    que le

    droit

    objectif

    ne

    nous

    fournit

    pas du

    tout la

    garantie

    qui rsulte

    de la

    distinction

    du

    juste

    et de l'injuste

    et que cette

    distinction

    ne peut

    tre

    opre

    que

    par

    les

    consciences

    individuelles.

    Ne

    voil-t-il

    pas

    des

    postulats

    bien

    difficiles

    concilier avec

    ceux

    qu'implique

    et qu'affirme

    sans cesse

    la

    thorie

    de

    l'institution.

    Quoiqu'il

    en soit cette thorie

    prise en

    elle-

    mme reste neuve

    et

    fconde.

    Elle

    atteste

    un

    sens

    profond

    de

    la ralit

    juridique

    et de

    la faon

    dont

    cette

    ralit

    s'est toujours

    impose

    au cours

    de

    l'histoire

    en

    dpit

    de l'idalisme

    juridique

    du

    droit

    naturel. Elle

    aboutit

    donc,

    de

    la

    mme

    faon

    que

    celle de Saleilles

    largir trs

    heureusement

    la

    notion

    de

    droit.

    Mais il

    ne

    suffit

    pas

    d'largir

    la

    notion de

    droit

    :

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    41/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA

    NOTION DE

    PERSONNE

    27

    il

    faut

    la fonder. L'institution est

    une source

    de

    droit.

    Soit :

    mais

    pourquoi est-elle

    source

    de

    droit? Si

    l'auteur s'tait pos

    cette

    question

    nous

    n'aurions pas

    lui reprocher

    son indcision

    tou-

    chant

    l'antriorit

    ou

    la

    simultanit

    de

    l'institution

    par

    rapport

    la

    personnalit.

    Ce

    n'est

    pas

    la pre-

    mire

    qui fonde

    juridiquement

    la

    seconde

    ni

    inver-

    sement.

    Ni

    l'intrt,

    rellement

    contenu

    dans

    l'ins-

    titution, ni le

    pouvoir,

    idalement contenu

    dans

    la

    volont

    ne se

    trouvent

    consacrs comme

    tels

    par

    le

    droit.

    Il faut qu'il

    leur

    soit

    attribu

    une

    valeur,

    une

    respectabilit. Et cette

    attribution

    ne peut

    rsulter que

    du

    jugement de l'opinion

    collective.

    C'est

    ce jugement

    qu'en dernire

    analyse il faut

    rapporter

    la

    conscration et

    la

    sanction que

    le

    droit

    accorde

    certaines

    ralits,

    la

    personne

    humaine

    au

    mme

    titre

    qu'au

    groupement

    et

    l'institution.

    Ce

    sont

    l des

    centres

    de

    droit

    :

    et

    il

    faut

    savoir

    gr

    Saleilleset

    ]\.

    Hauriou

    d'avoir

    nettement

    dfini et dgag-

    les

    deux

    derniers.

    Mais

    la vraie

    source du droit est

    une;

    elle

    rside

    dans

    l'opinion collective

    puisque

    le

    droit

    ne

    fait

    que

    reprsenter

    et

    consacrer

    une

    valeur

    reconnue

    par

    elle.

    Et ainsi

    ct

    du point

    de vue

    raliste

    qu'il

    faut

    adopter,

    mais

    dpasser,

    l'idalisme

    retrouve

    ses

    droits.

    VIII

    C'est

    ce

    qu'a

    compltement

    mconnu

    M.

    Duguit.

    Saleilles

    et

    M.

    Hauriou

    n'arrivaient pas

    concilier

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    42/186

    28 LE

    DROIT

    d'une

    manire satisfaisante

    le

    droit

    objectif

    et

    le

    droit

    subjectif,

    mais

    ils

    avaient

    du

    moins

    le

    senti-

    ment du

    rle jou

    par l'un

    et

    par l'autre.

    Duguit

    au

    contraire

    nie

    radicalement

    toute

    espce

    de droit

    subjectif.

    Dans

    son

    ardeur

    repousser toutes

    les thories

    mthaphysiques,

    il

    refuse de

    reconnatre

    aucun

    droit

    ni

    l'individu

    ni la

    collectivit

    comme

    tels. L'ide

    de sujet

    est une fiction au

    mme

    litre

    que celle

    de

    personnalit civile.

    Les

    notions

    de

    volont

    et de

    souverainet

    doivent tre

    bannies

    et du droit

    public (cf.

    Trait

    du Droit

    constitution-

    nel

    et

    confrences

    sur

    le

    droit social

    et

    le

    droit

    individuel)

    et du droit

    priv

    (cf.

    les

    Transforma-

    tions

    gnrales

    du droit priv). Voici,

    d'aprs

    l'auteur

    lui-mme,

    les deux propositions

    fonda-

    mentales

    qui

    rsument

    le

    changement de

    point de

    vue

    dont

    on

    constate

    et

    dont

    on

    doit hter

    l'accom-

    plissement.

    La

    dclaration des

    droits

    et

    tous

    les

    codes

    modernes

    reposent

    sur

    une

    conception

    purement

    individualiste

    du

    droit

    :

    aujourd'hui

    s'labore

    un

    systme

    juridique fond

    sur

    une

    conception

    sociale.

    En second

    lieu,

    ce

    nouveau

    systme

    qui

    est

    d'ordre

    raliste

    et

    non

    plus

    mta-

    physique

    tend

    s'tablir

    sur

    la

    constatation

    du

    fait

    de fonction

    sociale s'imposant

    aux individus

    et

    aux

    groupes.

    Donc

    aucune voloTit

    n'est

    qualifie,

    pas

    mme

    celle de

    l'Etat,

    pour s'imposer

    d'autres

    volonts

    : nos devoirs

    ne sont relatifs

    aucune

    souverainet,

    mais

    seulement

    la fonction

    sociale

    que

    nous

    remplissons.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    43/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA NOTION DE

    PERSONNE

    '29

    L'homme

    n'a

    pas

    de

    droits, dclare

    l'auteur.

    Mais

    tout individu a, dans

    la

    socit, une certaine

    fonction

    remplir,

    une certaine

    besogne

    excu-

    ter. Et cela

    est

    prcisment

    le

    fondement

    de

    la

    rgle

    de

    droit qui s'impose

    tous,

    grands

    et

    petits,

    gouvernants

    et

    gouverns.

    (Les transf.

    gnr.

    du Dr. priv,

    p.

    19-20). Et dans

    le

    mme

    livre

    (p.

    71)

    :

    Les

    collectivits,

    associations,

    cor-

    porations,

    fondations,

    sont-elles ou

    ne

    sont-elles

    pas

    des sujets de droit par

    nature?

    Je n'en

    sais

    rien

    et

    cela

    m'est totalement

    indiffrent.

    Peuvent-

    elles ou non tre

    titulaires

    de droits

    subjectifs?

    Je

    n'en

    sais

    rien,

    et

    cela

    m'est

    encore totalement

    indiffrent, pour cette bonne raison

    que

    le

    droit

    subjectif

    tant une

    chose

    qui n'existe

    pas,

    le

    sujet

    de

    droit

    n'existe

    pas davantage.

    La

    seule

    question

    qui se

    pose est

    une

    question

    de

    fait.

    Une collecti-

    vit,

    association,

    fondation

    poursuit-elle

    un

    but

    conforme

    la

    solidarit

    sociale,

    telle

    qu'elle

    est

    comprise

    un moment

    donn

    dans

    le

    pays consi-

    dr et par

    consquent

    conforme

    au droit

    objectif

    de

    ce pays?

    Si

    oui tous

    les actes

    faits

    dans

    ce

    but

    doivent

    tre

    reconnus et protgs

    juridiquement.

    L'affectation

    des

    biens

    ce

    but

    doit

    tre aussi

    pro-

    tge.

    Des

    ncessits

    incluses

    en

    fait

    dans

    la

    soli-

    darit

    sociale

    rsulte

    donc

    une

    rgle

    de droit

    qui

    sanctionne

    l'activit

    de

    chacun, individu,

    groupe

    ou

    tat

    peu

    importe,

    du moment

    qu'elle

    est

    con-

    forme

    SA

    fonction

    respective. Dans le mot

    droit

    il

    n'y

    a

    rien

    de

    plus

    que

    ce

    fait,

    et

    il

    faut

    l'exorciser

    de

    toute mtaphysique

    et

    de

    tout

    subjectivisme.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    44/186

    30

    LE DROIT

    Telles

    sont

    les thses de l'auteur, celles

    qu'on

    retrouve

    dans

    tous

    ses livres.

    On

    conoit

    qu'elles

    aient

    t

    vivement

    critiques par

    tous les

    thori-

    ciens

    individualistes.

    Mais il faut

    dire

    qu'elles

    l'on t

    presque de

    tous cts soit

    au

    nom

    du

    droit

    subjectif

    individuel, soit au nom de

    Tautorit,

    soit

    au

    nom de

    la

    libert, soit au nom

    mme

    du

    droit

    social

    que M.

    Duguit

    prtend

    instaurer.

    Saleilles

    a pu

    dnoncer

    leur caractre

    tyrannique

    et

    M.

    Esmein au

    contraire leur

    caractre

    anar-

    chique.

    De

    mme

    M.

    Hauriou dans la

    brochure

    qu'il

    a

    consacre aux

    Ides

    de M.

    Duguit

    s'exprim.e

    ainsi

    aprs

    avoir

    critiqu

    sa

    thorie

    de

    l'autorit

    de l'tat

    :

    nier

    la ncessit

    de Tobis-

    sance

    pralable

    aux

    ordres

    des

    gouvernements,

    nier le

    droit

    propre

    des

    gouvernements

    imposer

    cette obissance pralable,

    tout

    en

    reconnaissant

    la ncessit

    du fait des

    gouvernements,

    c'est

    une

    faon

    d'anarchisme

    et

    la

    plus

    dangereuse

    de

    toutes

    .

    C'est qu'en

    effet

    la

    rgle

    de droit

    dont

    parle

    M.

    Duguit est une

    chose

    bien

    inconsistante,

    et

    on

    ne

    voit comment

    elle pourrait

    fonder

    l'auto-

    rit

    ncessaire

    du

    droit. Nous

    n'allons point

    repro-

    cher

    M. Duguit

    de

    ne

    la

    point

    appuyer sur une

    mthaphysique

    individualiste.

    Mais

    nous

    sommes

    bien

    obligs

    de

    constater

    qu'il

    se

    trompe

    lorsqu'il

    croit

    l'tayer

    surdes

    postulats

    sociologiques et

    en

    particulier

    sur

    une

    conception

    de la

    solidarit

    sociale

    conforme

    celle

    de

    Durkheim.

    La

    rgle

    de

    droit

    ramene

    une

    rgle

    de

    solida-

    rit

    sociale

    ne

    peut

    avoir

    d'autorit

    que

    si

    elle

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    45/186

    LE

    DROIT

    ET

    LA

    NOTION

    UE

    PERSONNE

    31

    mane

    du

    groupe

    lui-mme dont elle

    exprime la

    solidarit.

    Et

    cela

    implique

    que ce groupe

    a

    une

    ralit

    en

    face

    des

    individus qu'il

    groupe,

    et une

    opinion en

    face

    de la

    leur

    qui

    ne

    soit

    point

    la

    moyenne

    mais

    la

    rgulatrice

    de

    la

    leur,

    et

    leur

    impose

    la

    reconnaissance

    des

    valeurs

    juridiques

    qu'elle

    juge

    devoir consacrer

    comme

    relles.

    C'est

    ce

    prix

    seulement

    que

    la

    solidarit

    sociale

    peut

    fonder

    un

    droit

    objectif.

    Or

    M.

    Duguit

    affirme

    sans

    cesse

    le

    Droit

    objectif mais

    il en sape

    la

    base,

    en

    se

    livrant,

    en

    grand

    dtail

    dans

    son

    livre

    dj

    ancien

    sur

    Vtat,

    le

    droit

    objectif

    et la

    loipositive^

    et,

    par allusion,

    dans ses

    livres

    suivants,

    une

    critique

    aussi

    troitement

    individualiste

    que pos-

    sible

    de

    la

    notion de

    ralit collective

    de la cons-

    cience

    sociale.

    Voil

    comment

    M.

    Duguit

    reni

    parles

    individualistes

    risque

    bien

    de l'tre

    aussi

    par

    les sociologues.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    46/186

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    47/186

    DEUXIME

    PARTIE

    De

    l'Exprience

    l'Idalisme

    L'Idalisme

    et les

    Conceptions

    ralistes

    du Droit

    INTRODUCTION

    I

    I.

    Le Droit, les

    faits

    et la

    guerre.

    II.

    La

    thorie

    m-taphy-

    sique du droit naturel a-t-elle

    le monopole

    de

    l'idalisme

    ?

    in.

    Que

    vaut

    l'antithse

    du

    ralisme

    et

    de

    lidalisme

    ?

    Avant

    la

    guerre

    dj

    le problme

    de

    la

    nature

    et

    de

    la

    porte

    du

    Droit tait l'un de

    ceux

    qui

    solli-

    citaient

    le

    plus vivement l'examen des

    juristes

    et

    mme

    des

    philosophes, Le xix^ sicle

    finissant

    semblait

    vouloir

    remettre

    en

    question

    ce

    que

    le

    XVIII

    paraissait au

    contraire avoir

    dfinitivement

    consacr.

    Le

    droit naturel de l'individu,

    droit

    imprescriptible

    et

    inalinable, grav

    sur

    l'airain

    et

    pour toujours par

    la

    Dclaration de

    89,

    et

    orga-

    nis

    par

    le

    code Napolon, perdait

    son

    caractre

    de

    dogme

    intangible.

    Certains allaient

    jusqu'

    le

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    48/186

    34

    LE DROIT

    nier

    purement

    et

    simplement

    comme ils

    niaient

    toute

    mtaphysique

    au nom

    de

    l'historisme

    et

    du

    positivisme

    .

    Leur

    ngation

    avait

    trouv

    un

    incroya-

    ble

    cho

    une

    poque o l'essor

    des

    sciences

    exprimentales et

    le

    triomphe

    de

    l'art raliste

    et

    de

    la

    philosophie

    positive avaient

    inculqu

    tous

    les

    esprits la

    religion

    du

    fait.

    Bien rares

    taient

    ceux

    l'exception

    des

    champions

    attitrs

    de

    la

    doctrine

    classique

    qui osaient invoquer,

    mme

    timidement,

    ce

    droit naturel

    par

    lequel au con-

    traire jurait

    la gnration

    prcdente.

    Par contre

    la

    doctrine

    purement

    raliste

    et positive

    s'affirmait

    sans

    la

    moindre

    attnuation

    dans

    les

    ouvrages

    des

    matres de

    l'orientation

    nouvelle.

    Les

    juristes sans doute

    ne

    faisaient

    que

    suivre

    dans cette

    voie

    les philosophes. Mais

    leur

    nga-

    tion

    de

    a

    priori

    n'tait

    pas

    moins dcide

    que

    la

    leur.

    Parlant du

    systme

    individualiste

    classique

    M.

    Duguit

    dclare

    que

    sa

    dsagrgation

    apparat

    tous

    :

    Les

    deux ides,

    dit-il,

    qui

    lui

    servaient

    de

    support,

    la

    souverainet

    de

    l'Etat

    et

    le

    droit

    naturel de

    l'individu

    disparaissent.

    On s'aperoit

    que

    l'une

    et l'autre

    sont

    des

    concepts

    mtaphysi-

    ques

    qui

    ne

    peuvent plus servir

    de

    fondement

    au

    systme

    juridique d'une socit

    toute

    pntre

    de

    positivisme^ .

    Et

    il

    est

    certain

    en effet

    que

    la

    transformation

    de

    la

    vie

    conomique,

    en

    rendant

    les

    relations

    sociales beaucoup

    plus

    complexes,

    et

    1.

    Duguit,

    Les

    Transformt,

    du

    Droit

    ptih.,

    p,

    xv,

    xvi,

    Paris,

    1913.

  • 7/26/2019 Davy Droit Et Personne

    49/186

    INTRODUCTION

    35

    en

    faisant surgir avec

    l'industrialisme la

    question

    ouvrire,

    a contribu

    plus

    encore

    que l'volution

    de

    la

    doctrine

    branler

    l'individualisme

    civi-

    liste.

    Les

    efforts

    de la jurisprudence

    ont

    t

    impuissants

    adapter

    suffisamment

    le

    vieux

    code

    aux

    nouveaux besoins.

    On

    pourrait

    citer

    une foule

    d'ouvrages

    ou

    d'ar-

    ticles

    o

    ce

    besoin

    de ralisme

    s'affirme,

    et

    il

    est

    significatif

    de

    voir

    avec

    quelle

    facilit

    s'est

    en

    effet

    introduite

    dans

    la

    doctrine

    franaise

    et

    quelle

    profonde

    influence

    y

    a exerce la

    conception

    puis-

    samment

    raliste de l'Allemand

    Ihering,

    Cette

    influence

    ne s'est pas

    mme

    puise

    sur une

    gn-

    ration :

    on la retrouve aussi

    vive dans

    l'ouvrage

    assez

    rcent

    de

    Demogue*

    que

    dans

    les

    crits

    plus

    anciens de son matre Saleilles.

    Et

    chose

    plus

    significative encore,

    le

    souffle

    nouveau

    n'a

    pas

    seulement

    touch

    ceux qui

    apparaissent

    aussi

    franchement

    rvolutionnaires

    que

    Dugu