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69 Le praticien en anesthésie réanimation © 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Sous la direction de Catherine Spielvogel lu pour vous Littérature francophone L’infiltration de la cicatrice de césarienne : une modalité analgésique supplément AIRE Incisional and epidural analgesia after caesarean delivery: a prospective, placebo-controlled, randomised clinical study Ranta PO, Ala-Kokko TI, Kukkonen JE, Ohtonen PP, Raudaskoski TH, Reponen PK, Rawal N. Int J Obstet Anesth 2006;15:189-94. L’analgésie après césarienne est essentiellement basée sur l’admi- nistration de morphine intrathécale lorsque la césarienne est effectuée sous rachianesthésie ou en péridurale et devrait faire appel à la morphine intraveineuse en PCA après une anesthésie générale. Cependant, l’administration de morphine a pour incon- vénient de provoquer des nausées, des vomissements, du prurit et de faciliter les rétentions d’urines et d’autres techniques pour- raient être utilisées pour réduire les besoins en morphine. Ce groupe suédois a évalué l’infiltration de l’incision de Pfannens- tiel sur les 72 premières heures post-césarienne ; deux groupes de 20 patientes césarisées sous rachianesthésie à la bupivacaïne seule ont été comparés, les unes analgésiées à la demande par des bolus de 10 ml de levobupivacaïne 0,25 % dans un cathéter multi perforé inséré sous le fascia de la paroi et recevant du sérum phy- siologique dans le cathéter de péridurale lombaire, et les autres par des bolus de 10 ml de levobupivacaïne 0,125 % via le cathéter péridural également à la demande et recevant du sérum physiolo- gique dans le cathéter sous-fascial. Les cathéters d’infiltration posés par le chirurgien étaient reliés à des pompes élastomériques ; l’évaluation de la douleur au repos et au mouvement se faisait sur une échelle numérique et à la fin de l’étude par une évaluation du soulagement analgésique global et une échelle de satisfaction ; les patientes restaient 4 heures en salle de réveil puis 72 heures en salle d’hospitalisation ; elles recevaient systématiquement 4 g de paracétamol quotidiennement et de l’oxycodone en secours si besoin, c’est-à-dire si le score douleur était > 3. Trois femmes dans le groupe APD et quatre dans le groupe « sous- fascial » sont sorties de l’étude pour analgésie insuffisante (ce qui est beaucoup !). La douleur au repos des 4 premières heures en salle de réveil était moindre dans le groupe APD ; mais en salle d’hospitalisation les scores de douleur n’étaient pas différents tout au long de l’étude dans les 2 groupes que ce soit au repos ou au mouvement et la consommation d’oxycodone secours était fai- ble et identique : soit 32 à 37 mg en 24 heures. Toutes les femmes ont pu s’occuper de leur bébé ; les scores de satisfaction étaient donc identiques et bons ; mais la moitié des femmes du groupe infiltré ont considéré à la 72 e  heure que leur douleur n’avait été que faiblement soulagée. Cette étude montre que l’infiltration sous-fasciale répétée via un cathéter posé en per opératoire dans l’incision de Pfannenstiel est une option à peu près aussi efficace qu’une péridurale ambulatoire. En réalité, il est rare d’opter en routine pour une analgésie post- césarienne qui ne reposerait que sur une péridurale aux anesthési- ques locaux, le risque de bloc moteur chez des femmes qui veulent se mobiliser, la lourdeur de la surveillance inhérente vont contre ; l’analgésie post-césarienne repose sur la morphine (et/ou dérivés), administrée de préférence par voie rachidienne aux plus faibles doses associée à des anti-inflammatoires et du paracétamol. La place et les modalités de l’infiltration continue sous-fasciale res- tent à préciser, on peut penser qu’on en démontrera l’intérêt après les premières heures et la disparition de l’effet de la morphine mais surtout, cette technique devrait être utile dans les césariennes sous anesthésie générale avec l’espoir de diminuer les doses de morphi- niques et les effets indésirables attenants. Catherine Spielvogel, Hôpital Trousseau, Paris. Décès liés au propofol Reports of Death with Use of Propofol (Diprivan) for Nonprocedural (Long-term) Sedation and Literature Review Wysowski DK, Pollock ML. Anesthesiology 2006;105:1047-51. Les auteurs de cette mise au point se sont intéressés aux décès observés tant chez l’enfant que l’adulte à la suite de la perfusion continue de propofol utilisé en tant qu’agent de sédation en ser- vice de soins intensifs ou de réanimation, pour des indications ne relevant pas de l’anesthésie. Cet agent a en effet dans ces circons- tances des propriétés pharmacocinétiques particulièrement inté- ressantes pour la surveillance neurologique, à savoir un délai d’action et une demi-vie contextuelle courts. Ils ont utilisé les données épidémiologiques recueillies par la FDA et les données de la littérature internationale sur ce qui constitue le « syndrome du propofol en perfusion » rapporté depuis 1992 (1). Ce syndrome

Décès liés au propofol

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69

Le praticien en anesthésie réanimation© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Sous la direction de Catherine Spielvogel

lu pour vous

Littérature francophone

L’infiltration de la cicatrice de césarienne : une modalité analgésique supplément AIRE

Incisional and epidural analgesia after caesarean delivery: a prospective, placebo-controlled, randomised clinical study

Ranta PO, Ala-Kokko TI, Kukkonen JE, Ohtonen PP, Raudaskoski TH, Reponen PK, Rawal N. Int J Obstet Anesth 2006;15:189-94.

L’analgésie après césarienne est essentiellement basée sur l’admi-nistration de morphine intrathécale lorsque la césarienne esteffectuée sous rachianesthésie ou en péridurale et devrait faireappel à la morphine intraveineuse en PCA après une anesthésiegénérale. Cependant, l’administration de morphine a pour incon-vénient de provoquer des nausées, des vomissements, du prurit etde faciliter les rétentions d’urines et d’autres techniques pour-raient être utilisées pour réduire les besoins en morphine.Ce groupe suédois a évalué l’infiltration de l’incision de Pfannens-tiel sur les 72 premières heures post-césarienne ; deux groupes de20 patientes césarisées sous rachianesthésie à la bupivacaïneseule ont été comparés, les unes analgésiées à la demande par desbolus de 10 ml de levobupivacaïne 0,25 % dans un cathéter multiperforé inséré sous le fascia de la paroi et recevant du sérum phy-siologique dans le cathéter de péridurale lombaire, et les autrespar des bolus de 10 ml de levobupivacaïne 0,125 % via le cathéterpéridural également à la demande et recevant du sérum physiolo-gique dans le cathéter sous-fascial. Les cathéters d’infiltrationposés par le chirurgien étaient reliés à des pompes élastomériques ;l’évaluation de la douleur au repos et au mouvement se faisait surune échelle numérique et à la fin de l’étude par une évaluation dusoulagement analgésique global et une échelle de satisfaction ;les patientes restaient 4 heures en salle de réveil puis 72 heuresen salle d’hospitalisation ; elles recevaient systématiquement 4 gde paracétamol quotidiennement et de l’oxycodone en secours sibesoin, c’est-à-dire si le score douleur était > 3.Trois femmes dans le groupe APD et quatre dans le groupe « sous-fascial » sont sorties de l’étude pour analgésie insuffisante (ce quiest beaucoup !). La douleur au repos des 4 premières heures ensalle de réveil était moindre dans le groupe APD ; mais en salled’hospitalisation les scores de douleur n’étaient pas différentstout au long de l’étude dans les 2 groupes que ce soit au repos ou

au mouvement et la consommation d’oxycodone secours était fai-ble et identique : soit 32 à 37 mg en 24 heures. Toutes les femmesont pu s’occuper de leur bébé ; les scores de satisfaction étaientdonc identiques et bons ; mais la moitié des femmes du groupeinfiltré ont considéré à la 72

e

 heure que leur douleur n’avait étéque faiblement soulagée.Cette étude montre que l’infiltration sous-fasciale répétée via uncathéter posé en per opératoire dans l’incision de Pfannenstiel estune option à peu près aussi efficace qu’une péridurale ambulatoire.En réalité, il est rare d’opter en routine pour une analgésie post-césarienne qui ne reposerait que sur une péridurale aux anesthési-ques locaux, le risque de bloc moteur chez des femmes qui veulentse mobiliser, la lourdeur de la surveillance inhérente vont contre ;l’analgésie post-césarienne repose sur la morphine (et/ou dérivés),administrée de préférence par voie rachidienne aux plus faiblesdoses associée à des anti-inflammatoires et du paracétamol. Laplace et les modalités de l’infiltration continue sous-fasciale res-tent à préciser, on peut penser qu’on en démontrera l’intérêt aprèsles premières heures et la disparition de l’effet de la morphine maissurtout, cette technique devrait être utile dans les césariennes sousanesthésie générale avec l’espoir de diminuer les doses de morphi-niques et les effets indésirables attenants.

Catherine Spielvogel,

Hôpital Trousseau, Paris.

Décès liés au propofol

Reports of Death with Use of Propofol (Diprivan) for Nonprocedural (Long-term) Sedation and Literature Review

Wysowski DK, Pollock ML. Anesthesiology 2006;105:1047-51.

Les auteurs de cette mise au point se sont intéressés aux décèsobservés tant chez l’enfant que l’adulte à la suite de la perfusioncontinue de propofol utilisé en tant qu’agent de sédation en ser-vice de soins intensifs ou de réanimation, pour des indications nerelevant pas de l’anesthésie. Cet agent a en effet dans ces circons-tances des propriétés pharmacocinétiques particulièrement inté-ressantes pour la surveillance neurologique, à savoir un délaid’action et une demi-vie contextuelle courts. Ils ont utilisé lesdonnées épidémiologiques recueillies par la FDA et les données dela littérature internationale sur ce qui constitue le « syndrome dupropofol en perfusion » rapporté depuis 1992 (1). Ce syndrome

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lu pour vous

associe une dysfonction myocardique progressive et des perturba-tions métaboliques (acidose, rhabdomyolyse) : les données ensont rassemblées dans le

tableau 1

. Il faut noter que ce syndromea été rapporté pour de simples anesthésies (2) et que les donnéesanalysées de cet article ne représentent bien sûr que la partieémergée de l’iceberg… Les auteurs rapportent notamment quedans deux essais randomisés effectués chez l’enfant (

vs

lorazé-pam) et l’adulte (

vs

midazolam), la mortalité a été significative-ment plus élevée dans le groupe propofol que dans les groupesbenzodiazépines. Le mécanisme responsable de ce syndromeserait une antagonisation, dose-dépendante, des récepteurs 

β

-adrénergiques myocardiques (3). Le propofol induit vraisembla-blement une perturbation de la physiologie de la fonction respira-toire de la mitochondrie en bloquant l’oxydation des acides gras(4). Certains auteurs recommandent donc de ne pas dépasser uneperfusion de 4-5 mg/kg/h. Le monitorage métabolique et cardia-que s’impose chez les patients concernés (sédation de longuedurée). En cas de perturbation hémodynamique en cours de perfu-sion ou de nécessité d’utiliser des agents inotropes sans explica-tion évidente, il faut passer à un autre agent de sédation.

Références

1. Parke TJ, Stevens JE, Rice AS,

et al

. Metabolic acidosis and fatal myocar-dial failure after propofol infusion in children: five case reports. Br Med J 1992;305:613-6.

2. Funston JS, Prough DS. Two reports of propofol anesthesia associated with metabolic acidosis in adults. Anesthesiology 2004;101:6-8.

3. Brussel T, Theissen JL, Vigfusson G, Lunkenheimer PP, Van Aken H, Lawin P. Hemodynamic and cardiodynamic effects of propofol and etomidate: ne-gative inotropic properties of propofol. Anesth Analg 1989;69:35-40.

4. Muravchick S, Levy RJ. Clinical implications of mitochondrial dysfunc-tion. Anesthesiology 2006;105:819-37.

Marc Gentili,

Rennes.

Le bloc paravertébral améliore-t-il la survie des patientes opérées d’un cancer du sein ?

Can anesthetic technique for primary breast cancer surgery affect recurrence or metastasis?

Exadaktylos AK, Buggy DJ, Moriarty DC, Mascha E, Sessler DI. Anesthesiology 2006;105:660-4.

L’analgésie au cours et au décours de la chirurgie du sein faitl’objet d’un intérêt récent illustré par la publication de plusieursétudes cliniques. Le contrôle de la douleur postopératoire et dustress chirurgical (1) est également susceptible d’influencer lasurvenue de douleurs chroniques, fréquentes sur ce terrain.L’étude présentée ici porte sur un sujet nouveau, à savoir

Données FDA : 1989-2005.Patients pédiatriques < 16 ans

Décès : 2113 F/8 MÂge25 mois –12 ans

Indications :ÉpilepsieHypertension intracrânienneInsuffisance respiratoire

Débit moyen de perfusion13 mg/kg/h (2,2-54)Durée moyenne :2,4 j (6 h-6 j)

Symptômes :Bradycardie, défaillance cardiaque, arrythmie, acidose, rhabdomyolyse

Patients adultes> 16 ans

Décès : 6822 F/46 M19 ans/86 ans

Indications :Insuffisance Respiratoire ÉpilepsieHICSédation postopératoireAgitationDelirium tremens

Concentration moyenne :7,2 mg/kg/h(0,6-25)Durée moyenne :7,3 j (1 h-42 j)

Symptômes :Bradycardie, défaillance cardiaque, insuffisance rénale, arythmie, acidose rhabdomyolyse

Données de la littérature : 1992-2004.

12 publications pédiatriques

Indications :ÉpilepsieHICInsuffisance respiratoire

Débit moyen de perfusion9,7 mg/kg/h (5,1-15)

Symptômes :Bradycardie, défaillance cardiaque arythmie, acidose, rhabdomyolyse

33 enfants – 24 décès dont 2 séries de 5 et 18 enfants

Durée moyenne : 2,8 j

7 publications chez l’adulte dont 2 hors États-Unis

Indications :Sédation

Débit moyen de perfusion > 5 mg/kg/hDurée moyenne > 2,4 j

Symptômes : idem