30

Désintoxiquez-vous, - excerpts.numilog.comexcerpts.numilog.com/books/9782081353619.pdf · Les fruits et légumes sont la plupart du temps contaminés par les pesticides, la viande

Embed Size (px)

Citation preview

Désintoxiquez-vous,

Ce guide peut vous sauver la vie

Des mêmes auteurs

Véronique Vasseur

Médecin-chef à la prison de la Santé, Le Cherche-Midi,2000.

L’Hôpital en danger, Flammarion, 2005.À la rue : quand travailler ne suffit plus, avec Hélène

Fresnel, Flammarion, 2008.Le Panier de crabes : les dessous des campagnes électorales,

Flammarion, 2009.« La prison doit changer, la prison va changer », avait-il dit,

avec Gabriel Mouesca, Flammarion, 2011.Santé, le grand fiasco, avec Clémence Thévenot, Flamma-

rion, 2013.

Véronique Vasseur& Clémence Thévenot

Désintoxiquez-vous

Flammarion

© Flammarion, 2016.ISBN : 978-2-0813-5361-9

« Quand on pense qu’il suffirait queles gens n’achètent plus de saloperies

pour que ça ne se vende plus ! »

Coluche

AVANT-PROPOS

Une nouvelle vie est possible

Respirer, manger, boire, se laver, se nourrir, télépho-ner… Notre quotidien, aussi basique soit-il, peut par-fois prendre des allures de voyage en terrain miné.Comme dans un jeu vidéo de combat, nous devonschaque jour naviguer au milieu d’éléments hostiles.Toutes ne sont pas nocives mais plus de 100 000 subs-tances chimiques sont présentes dans notre environne-ment quotidien, des poisons de l’alimentationmoderne aux polluants de l’air en passant par lestoxiques présents dans les vêtements ou les cosmé-tiques… L’agression est permanente !

Sans tomber dans l’écologisme extrémiste, la para-noïa ou la diabolisation de l’industrie agroalimen-taire, il faut bien se rendre à l’évidence : au cœurde la vie moderne, nos organismes sont très souventagressés et contaminés à notre insu. La terre, l’eau,l’air… des quatre éléments, il n’y a que le feu quin’est pas pollué.

Les fruits et légumes sont la plupart du tempscontaminés par les pesticides, la viande est souvent

9

Désintoxiquez-vous

de mauvaise qualité, infestée elle aussi par les pesti-cides et les antibiotiques. Restait le poisson, quijouissait encore d’une bonne réputation avant quel’on n’y retrouve du mercure entre deux arêtes.Certes les producteurs respectent les dosages dechaque pesticide, mais nul ne sait quel est l’effet d’uncocktail de trente substances !

Et si vous pensiez être à l’abri de toute pollutionbien calfeutrés chez vous, détrompez-vous ! L’airintérieur d’un appartement est parfois plus toxiqueencore que l’atmosphère de nos rues. Les polluantschimiques se retrouvent en effet sur nos murs (pein-tures, colles) comme dans nos produits ménagers,mais aussi dans nos cosmétiques et la plupart destextiles de nos vêtements.

Et qui sait que 8 millions de tonnes de dioxydede titane sont chaque année disséminées à travers lemonde dans des produits de consommation cou-rante comme les crèmes solaires, le dentifrice ou cer-tains chewing-gums ? Des nanoparticules de la tailled’un virus dont on ne connaît pas encore tous leseffets sanitaires. Sans compter les ondes électroma-gnétiques désormais considérées comme « pouvantêtre cancérigènes » par l’Organisation mondiale de lasanté. Tabou parmi les tabous, vu les enjeux écono-miques, l’éventuelle nocivité des ondes se retrouve aucœur d’une immense controverse scientifique. Alorsque certaines études ne relèvent aucun effet, d’autres,tout aussi sérieuses, les mettent en cause dans diffé-rentes pathologies.

En seulement deux générations, les activitéshumaines ont réussi à polluer l’ensemble des écosys-tèmes, au point que les effets bénéfiques des « progrès »

10

Avant-propos

scientifiques et technologiques réalisés semblentdésormais largement compromis. C’est un des para-doxes de la vie moderne : les découvertes de la méde-cine et de l’hygiène ont entraîné une forte réductionde la mortalité dans les pays développés, mais cer-taines pathologies graves y sont aussi devenues plusfréquentes. Nous sommes désormais les victimesd’innovations débridées et mal maîtrisées, trop sou-vent soumises aux desiderata de quelques lobbysindustriels, et des faiblesses d’une réglementationinsuffisante, voire inexistante. Revers pervers et terri-fiant du progrès technologique.

À l’échelle individuelle, ça passe ou ça casse ! Laplupart du temps, on se faufile entre les mailles du filet,mais, malheureusement, des substances chimiques desynthèse, même à doses infimes (notamment dansle cas des perturbateurs endocriniens), peuvent nousexposer à de nouvelles maladies contemporaines,dites « de civilisation ». 7 à 20 % des cas de cancersseraient associés à des facteurs environnementauxnon liés à des comportements individuels. Les casd’allergies, d’affections respiratoires, d’obésité, dediabète, de maladies auto-immunes ou de troublesde la fécondité augmentent à une vitesse record.…Et la liste des pathologies est si longue qu’elle donnele tournis. On ne peut plus nier l’impact sur notresanté de cet environnement quotidien.

Les molécules chimiques toxiques de plus en plusnombreuses et la pollution affectent nos organismesau quotidien tel un poison administré, goutte aprèsgoutte. Invisible mais corrosif.

11

Désintoxiquez-vous

Les effets ne sont pas toujours immédiats, doncles vraies mesures se font attendre. Ces substancesprovoqueraient en nous des maladies à retardement.Ce que nous mangeons, ce que nous respirons ou cequi entre en contact avec notre peau affecte chaquecellule de notre corps : des hormones aux os, desnerfs à la peau, des enzymes aux muscles.

Le problème est évidemment environnemental,mais aussi sociétal ; ce sont les activités humaineselles-mêmes et notre mode de vie qui sont à remettreen question, vu les conséquences désastreuses à longterme d’une exposition prolongée et répétée auxpolluants.

Mais la tentation de ne pas voir ou de minimiserle problème est souvent plus forte. On se déresponsa-bilise souvent par ignorance en permanence face à cedrame sanitaire collectif. Nous sommes pourtant lespremiers acteurs de cette situation que nous déplo-rons aujourd’hui. Chacun à sa place obéit à sa propreparesse, à sa propre négligence, et cela suffit à créer,geste après geste, achat après achat, le désordre quenous connaissons tous.

Alors, indignons-nous ! Regardons la réalité enface et adoptons enfin de nouveaux réflexes qui pour-raient inverser la tendance. À condition bien sûr dedéjouer le système de désinformation qui bien sou-vent règne dans ce domaine.

Il est encore possible de réagir : avec quelquesactions simples pour réduire la toxicité de son ali-mentation, améliorer la qualité de l’air chez soi,diminuer son exposition aux ondes et autres alterna-tives pour se « décontaminer » au quotidien ! Car

12

Avant-propos

même si la nocivité n’est pas prouvée aujourd’hui,elle le sera demain. La législation a toujours un oudeux trains de retard.

Chacun pourra à son niveau (re)découvrir d’autresvaleurs que l’efficacité à tout prix, la performance, larentabilité. Une autre vision du monde est possible,à condition d’entamer sa propre écologie de consom-mation ! Tout au long de ces pages, suivez notre filrouge, faites preuve de bon sens, de cohérence etd’un peu de courage. Le seul risque que vous pren-drez alors, c’est celui de vivre mieux !

Certains contesteront le contenu de ce livre, maisnous préférons appliquer le principe de précaution.Notre but est avant tout de vous informer et de par-tager avec vous la connaissance actuelle sur la toxicitédes substances qui nous agressent chaque jour.

Libre à chacun d’en tirer ses propres conclusions.

Partie 1

TERRE : LA FRANCECHAMPIONNE DES PESTICIDES

Vache folle, listeria, dioxine… Les scandales sani-taires ne manquent pas. Mais, au-delà de ces casisolés et surmédiatisés, plus ou moins graves, c’est lecontenu même de notre assiette qui devrait désor-mais nous inquiéter. Parmi les principales menaces,la présence de pesticides agricoles et d’engrais chi-miques dans les fruits et légumes que nous consom-mons chaque jour.

Chapitre 1

CINQ FRUITS ET LÉGUMES PAR JOUR :MÊME AVEC DES PESTICIDES ?

Ce n’est pas une question de milieu social. Qu’onsoit cadre, employé ou disposant de faibles revenus,nous sommes tous préoccupés par les effets de l’ali-mentation sur notre santé1. Parce que nous man-quons cruellement d’information sur l’origine de nosproduits de consommation courante, nous commen-çons à nous inquiéter. Sans doute à raison. Car notrealimentation quotidienne est très souvent… polluée.L’homme empoisonne la terre qui le nourrit. Onmarche sur la tête.

Les pesticides sont partout : dans l’air, dans l’eau,dans le sol, dans cette carotte que je vais manger oudans cette pomme que je vais croquer.

Si les professionnels de l’agriculture sont très tou-chés par les nuisances des produits phytosanitaires,toute la population y est également fortement expo-sée. Et pour cause : c’est l’alimentation qui reste laprincipale source de contamination par les pesticides.

1. « Observatoire de la qualité des aliments, les attentes desconsommateurs », Ipsos pour Agri-Confiance, juin 2014.

17

Terre : La France championne des pesticides

Viande, poissons, produits laitiers, céréales, fruits etlégumes… Tous ces produits, pourtant essentielsdans le cadre d’une alimentation équilibrée, sontporteurs de nombreux pesticides. 62 % des fruits,37 % des céréales et 30 % des légumes consomméscontiennent des résidus de pesticides. On trouve destraces de 338 pesticides différents dans les échantillo-nages de légumes, 319 dans les fruits, 93 dans lescéréales et 34 dans les produits animaux1. Des chif-fres qui dépassent l’entendement quand on analysecertains fruits comme les pommes, qui cumulent 36traitements en moyenne, mais aussi les poires ou lespêches. Quant aux fraises vendues en France, notam-ment celles cultivées hors sol dans des serres chauf-fées, 92 % d’entre elles2 contiennent un ou plusieursrésidus chimiques (85 % pour les françaises, 100 %pour les espagnoles). En réalité, certains cultivateursjouent avec la limite maximale de résidus (LMR). Enalternant différents pesticides, ils ne dépassent pas lesvaleurs légales pour chacun d’eux. Mais si on addi-tionne la quantité totale de produits utilisés, onatteint des taux astronomiques. Par exemple, tou-jours selon la même étude, la somme des pesticidesd’un lot de fraises acheté dans un supermarché debanlieue parisienne explosait la limite totale de

1. Pour réaliser cette étude, l’Autorité européenne de sécu-rité des aliments (EFSA) a analysé quelque 70 000 alimentspour connaître leur teneur en résidus de pesticides sur des pro-duits issus de l’agriculture conventionnelle (non biologique).

2. Enquête EXPPERT 2 : « Des pesticides interdits et desperturbateurs endocriniens (PE) dans des fraises », Générationsfutures, juillet 2013.

18

Cinq fruits et légumes par jour

LMR, à + 264 %. Soit deux fois et demie le seuilthéorique autorisé.

Du côté des bons élèves, on retrouve étonnam-ment des fruits d’importation comme l’ananas, lesavocats, les mangues ou les kiwis. On peut consom-mer également sans modération des oignons, le maïs(en évitant les OGM), le chou, les petits pois ouencore les asperges.

France : l’overdose de pesticides

Herbicides, fongicides, insecticides, nématicides1,rodonticides2 : leurs noms riment entre eux et cesproduits peuvent faire des ravages…

Près d’un millier de substances actives sont utiliséesdans l’agriculture, dont la toxicité des molécules a étémultipliée par 5 000, voire par 10 0003 depuis unecentaine d’années. Et si le célèbre DDT a été interditen France depuis 1971, il restait encore, en 2013, 423substances approuvées au niveau européen.

Les exploitants agricoles français continuent depulvériser abondamment plantes et sols, au point quela France, terre agricole par excellence, est toujoursla plus grande consommatrice de pesticides enEurope, avec 62 700 tonnes de matières actives utili-sées chaque année. 90 % du tonnage concerne l’agri-culture, le reste est utilisé pour l’entretien des voiries,

1. Les nématicides vont servir à éliminer les vers, notam-ment ceux qui s’attaquent aux racines.

2. Produit destiné à l’élimination des rongeurs considéréscomme nuisibles.

3. Selon Jean-Marc Bonmatin, chercheur au Centre natio-nal de la recherche scientifique (CNRS), dans Insecticide monamour, film de Guillaume Bodin, Dahu Production, 2015.

19

Terre : La France championne des pesticides

des jardins et des parcs ; dans le secteur industriel(fabrication, traitement du bois…) ou médical etpour les usages domestiques (plantes, animaux, dés-insectisation, jardinage, bois).

Droit dans le mur ?

Et, a priori, les choses ne vont pas aller en s’arran-geant. Si l’utilisation de certains pesticides a étéinterdite en 2008, notamment grâce au moratoirefrançais sur les pesticides comme le Cruiser, levolume global n’a en revanche pas baissé. La consom-mation de pesticides a même augmenté de 9,2 %en 2013. Un chiffre qui démontre l’inefficacité dupremier plan Écophyto de 2008 issu du Grenelle del’environnement, lequel visait pourtant à réduire demoitié la consommation de ces produits avant 2018.Un objectif encore une fois repoussé par le gouverne-ment actuel, le plan Écophyto 2 présenté en février2015 par l’actuel ministre de l’Agriculture, StéphaneLe Foll, tablant désormais sur 2025 pour atteindrecet objectif.

Hélas, de nouveaux pesticides jugés très dangereuxne sont toujours pas interdits et le nouveau plan Éco-phyto n’inclut aucune mesure agissant sur lademande (comme la promotion des produits biolocaux et des labels de qualité dans la restauration col-lective, par exemple). Et, vu l’ampleur du problème,le timide développement du biocontrôle (utilisationde micro-organismes comme les insectes pour proté-ger les plantes), des agroéquipements comme lescaméras de surveillance ou des fermes DEPHY(fermes pionnières Écophyto qui expérimentent des

20

Cinq fruits et légumes par jour

techniques sobres en pesticides) sont des armes bienminces.

Pourtant, les idées ne manquent pas, comme ledispositif expérimental de certificats d’économie deproduits phytosanitaires (CEPP), qui obligera les dis-tributeurs de ces produits à baisser de 20 % lenombre de doses utilisées. Mais il subit la grogne dessyndicats agricoles qui craignent de nouvelles charges(en cas de non-respect de ce quota, une sanction éco-nomique sera appliquée).

Un premier pas ?

Le Centre international de recherche sur le cancer(CIRC), la branche cancer de l’Organisation mon-diale de la santé (OMS), a enfin déclaré en 2014que le glyphosate – l’ingrédient actif dans l’herbicideRoundup, le désherbant le plus utilisé au monde –peut « probablement » causer le cancer, le classantcomme « probable cancérigène pour l’homme ». Et siMonsanto conteste avec autant d’ardeur la « sciencepoubelle » (junk science, dans le texte) de l’agenceintergouvernementale, c’est que le coup est rudepour la firme américaine, qui synthétise la substancetoxique utilisée dans plus de 750 produits. En recon-naissant la nocivité « probable » du glyphosate,l’OMS vient de mettre en péril la stratégie du secteurdes biotechnologies. Cette molécule est le produitphare de Monsanto et représente des milliards de dol-lars de chiffre d’affaires si on y ajoute les semences quisont vendues dans le monde entier pour s’adapter auRoundup. Car la grande majorité des plantes généti-quement modifiées mises en culture (90 % du soja de

21

Terre : La France championne des pesticides

plusieurs pays, dont les États-Unis et plus de 60 % desplantes OGM commercialisées) est en effet conçuepour tolérer cet herbicide, permettant ainsi un épan-dage direct sur les cultures. La boucle est bouclée. Pourpouvoir utiliser plus de pesticides, on modifie lesplantes.

Malheureusement pour notre santé à tous, l’avis desexperts du CIRC n’a pas force exécutoire. Quant àl’agence allemande – le Bundesinstitut für Risi-kobewertung (BfR) –, chargée par l’Union euro-péenne de l’actuelle réévaluation du glyphosate, untiers des membres de son groupe d’experts « Pesti-cides » seraient directement salariés par des géants del’agrochimie ou des biotechnologies ! Dans les faits,l’interdiction du glyphosate, réclamée par plusieursONG, risque donc de se faire attendre. En attendant,certaines associations, comme CLCV, appellent à lasuspension, par mesure de précaution, de la vente enlibre-service de ce produit et conseillent aux particu-liers de se tourner vers des solutions alternatives auxdésherbants à base de glyphosate1 comme le roulageou le scalpage du sol.

1. 8 juin 2015. Consommation, logement et cadre de vie estune association nationale qui défend exclusivement les intérêtsspécifiques des consommateurs et des usagers.

Chapitre 2

QUELS SONT LES EFFETS

SUR NOTRE SANTÉ ?

La contamination permanente de notre alimenta-tion justifie toutes les inquiétudes, les pesticides étantpar nature des substances dangereuses censées agirsur des organismes vivants (insectes, bactéries, cham-pignons, vertébrés, vers, plantes..) pour les détruire,les contrôler ou les repousser. Sans compter les vic-times par ricochet que sont les abeilles, dont le tauxde mortalité est très préoccupant, 20 % en moyenneen Europe, voire de 50 à 80 % dans les grandesrégions de production du sud du pays pour 20141.La production de miel a, quant à elle, été divisée partrois en vingt ans, pour le même nombre de ruches.

Cela ne vous viendrait pas à l’idée d’avaler de lamort-aux-rats ? Pourtant, c’est ce que nous faisons,certes à doses infimes. Les produits phytosanitaires,s’ils étaient avalés tels quels, provoqueraient desintoxications violentes pouvant aller jusqu’à la mort.On peut donc aisément imaginer leur possible

1. Selon l’Union nationale de l’apiculture française (UNAF).

23

Terre : La France championne des pesticides

nocivité sur notre santé à des doses faibles maisrépétées…

La rémanence des pesticides dans l’environnementpeut varier de quelques heures ou quelques jours àplusieurs années. Certains, comme les organochlorés(comme le DDT), persistent pendant des annéesdans l’environnement et se retrouvent dans la chaînealimentaire. Les pesticides se déposent alors sur lespeaux des fruits/légumes et pénètrent aussi leur chair(on parle de pesticide systémique). On peut toujourssuivre certaines recommandations de base commelaver/rincer/éplucher nos aliments, mais il est impos-sible d’éliminer totalement les traces encore présentesdans la pulpe. Ces « résidus » n’étant pas biodégra-dables, on les retrouve dans nos cheveux, nos tissusadipeux, notre cerveau, notre sang, le lait maternelet même le placenta1…

Les agriculteurs très exposés

Mais les risques ne sont pas réservés aux consom-mateurs, loin de là. Plus on est exposé frontalementà ces produits (par leur manipulation, leur pulvérisa-tion), plus leurs effets à long terme sur la santérisquent d’être importants. En milieu professionnel,la voie cutanée représente la principale voie d’expo-sition (environ 80 %). L’exposition par voie respi-ratoire existe lors de circonstances particulièresd’application (fumigation, utilisation en milieu

1. Enquête EXPPERT 4, « Quelles expositions aux pertur-bateurs endocriniens pour des Franciliennes en âge de pro-créer ? », Générations futures, avril 2015.

24

Quels sont les effets sur notre santé ?

fermé). L’exposition peut se produire à différentsmoments : manutention, préparation, application,nettoyage…

Or, depuis une trentaine d’années, les enquêtes épi-démiologiques évoquent l’implication des pesticidesdans plusieurs pathologies chez les professionnels :problèmes respiratoires, pathologies cancéreuses(cancer de la prostate, lymphome non hodgkinien,myélomes multiples), maladies neurologiques (mala-die de Parkinson, tumeurs au cerveau), effondrementdu système immunitaire, troubles de la reproduc-tion… L’augmentation du risque de développer, parexemple, un cancer de la prostate chez les agri-culteurs, les ouvriers d’usines de production de pesti-cides et les populations rurales est bien réelle : entre+ 12 et + 28 % selon les populations1. Plus de qua-rante agriculteurs ou salariés agricoles2 ont d’ailleursobtenu la reconnaissance de leur pathologie commemaladie professionnelle du fait de leur exposition auxpesticides. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de1 million d’empoisonnements par pesticides et plusde 220 000 décès sont à déplorer chaque année dansle monde3.

Le cerveau du fœtus particulièrement sensible

Et si l’exposition professionnelle aux pesticides amalheureusement lieu en période prénatale, les

1. Rapport Inserm 2013.2. « Données Mutualité sociale agricole », Direction des

études des répertoires et des statistiques, étude avril 2014.3. « Public Health Impact of Pesticides Used in Agri-

culture », OMS et PNUE, Genève, Suisse, 1989.

25

Terre : La France championne des pesticides

conséquences peuvent être désastreuses. Les agri-cultrices connaissent plus que les autres les risques demorts fœtales (fausses-couches) ou de malformationscongénitales (malformations cardiaques, du tubeneural, hypospadias (anomalie de la position del’urètre sur le pénis). D’autres études pointent uneatteinte de la motricité fine et de l’acuité visuelle ouencore de la mémoire récente lors du développementde l’enfant. Une diminution du poids de naissance,des atteintes neuro-développementales et une aug-mentation significative du risque de leucémie sontégalement rapportées. Une équipe de l’Inserm àRennes a suivi en 2011 des femmes dont les analysesd’urine montraient des traces d’Atrazine, un désher-bant interdit qui persiste dans l’eau. Résultat : unrisque accru de 50 à 70 % de faible périmètre crânienet de faible poids de naissance.

Des expositions particulièrement néfastes, donc,pour le développement de l’enfant, notamment ledéveloppement du cerveau du fœtus, puisque plu-sieurs enquêtes font également état d’un rapporttroublant entre un contact avec les pesticides endébut de grossesse (2e et 3e trimestre de grossesse) etle risque d’autisme. Aux États-Unis, l’autisme atouché 1 enfant sur 68 en 2014, au lieu de 1 sur150 en 2000 (dans la population générale). Une pro-gression qui serait en partie liée au développementdes pesticides. D’après une étude de chercheurs del’université Davis en Californie, une femme enceintequi vit près d’une ferme utilisant ces produits chi-miques a un risque 66 % plus élevé de voir sonenfant développer cette maladie.

26

Quels sont les effets sur notre santé ?

Pour les consommateurs « classiques », vu la diver-sité des produits utilisés, il reste délicat d’évaluer pré-cisément l’augmentation de risque de cancers due àune exposition aux pesticides et à certains produitsen particulier. Mais on sait déjà que les Français ontdes taux d’imprégnation par certains pesticides parmiles plus élevés1. Plus de quatre-vingts substances chi-miques, dont certaines susceptibles d’être cancéri-gènes, sont ingérées en une seule journée par unenfant de 10 ans à travers ses repas composés suivantles recommandations du ministère de la Santé2. Dequoi inquiéter, en tout état de cause. Si on ne peutaccuser directement tel ou tel produit dans l’appari-tion de telle ou telle maladie, l’utilisation massive deces substances toxiques est de toute façon liée à cer-tains types de cancers (tumeurs cérébrales, maladiesmalignes du sang chez les adultes, cancer de la pros-tate…). Les spécialistes appellent cela l’« effet cock-tail », c’est-à-dire des pathologies liées à plus oumoyen terme au mélange des produits chimiques.Mais, en attendant, est-ce si grave de consommer desfruits et légumes pollués ? Les spécialistes sou-tiennent que les bénéfices santé en termes de pro-tection apportés par les fruits et légumes restentsupérieurs aux risques liés à la consommation de pes-ticides. Mais, pour limiter les dégâts, il vaut mieuxsuivre certaines précautions d’usage.

1. Exposition de la population française aux substances chi-miques de l’environnement, Tome 2-Polychlorobiphényles(PCB-NDL)/Pesticides, Institut de veille sanitaire, avril 2013.

2. Selon une étude du mouvement Générations futurespubliée en décembre 2010.

FICHE PRATIQUE

FRUITS ET LÉGUMES.COMMENT ÉVITER LES PESTICIDES ?

On ne peut éliminer 100 % des résidus de pesti-cides. Et, bien évidemment, leur présence dans lesfruits et les légumes ne doit pas être un prétexte pourne plus en consommer. Les bienfaits des vitamines,des minéraux et des fibres sont plus importants queles effets néfastes des pesticides. Il faut donc compo-ser avec les dérives de la société de consommation demasse et jongler avec les produits « bio » pour tou-jours avoir un apport varié et complet de fruits et delégumes. Voici nos conseils pour limiter la « casse » :

1/ Consommez des fruits et légumessous le label « biologique »

S’il n’y avait qu’un conseil à retenir, ça serait celui-ci : mangez bio !

Cela peut être agaçant de se voir resservir la cartedu bio à toutes les sauces, mais prenons du recul

28

N° d’édition : L.01ELKN000544.N001Dépôt légal : janvier 2016