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Difficultés d’interprétation des biopsies prostatiques. Cas no 3. Adénocarcinome de forme atrophique

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nnales de pathologie (2012) 32, 118—122

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

ISTOSÉMINAIRE SFP

ifficultés d’interprétation des biopsiesrostatiques. Cas no 3. Adénocarcinome de formetrophique

iagnostic issues of prostate biopsies. Case 3. Atrophic carcinoma

Mathilde Sibony ∗

Service d’anatomie et cytologie pathologiques, hôpital Cochin, 27, rue duFaubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France

Accepté pour publication le 24 janvier 2012Disponible sur Internet le 3 avril 2012

Renseignements cliniques

Homme de 68 ans, taux de PSA sérique de 5,5 ng/mL. Première série de biopsies prosta-tiques. Biopsie médiane gauche (HES).

Diagnostic

Adénocarcinome prostatique, variant atrophique (ou pseudo-atrophique), de score deGleason 6 (3 + 3).

Description histologique

Sur l’une des deux biopsies, il existe un petit foyer tumoral constitué de glandes pros-tatiques rondes ou ovales, volontiers rigides, espacées les unes des autres, qui tranchepar rapport au reste de la biopsie. Ce foyer d’aspect infiltrant, s’interposant entre lesglandes normales, atrophiques ou dilatées, mesure 1,5 mm (Fig. 1). L’épithélium tumorala un aspect clair et atrophique. Les noyaux sont généralement augmentés de taille etle rapport nucléo-cytoplasmique est élevé (Fig. 2). La cytologie est globalement rassu-rante, car les nucléoles sont souvent peu visibles ; ils sont cependant augmentés de tailledans quelques cellules tumorales et dans les glandes tumorales voisines d’aspect classique(Fig. 3). Les cellules basales ne sont pas visibles. Il existe de plus un infiltrat inflamma-toire lymphocytaire dans le stroma prostatique se disposant préférentiellement autour desglandes non tumorales, témoignant d’une prostatite associée, cet aspect est mieux visiblesur la biopsie prostatique du haut (Fig. 1).

∗ Département de pathologie, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75970 Paris cedex 20, France.Adresse e-mail : [email protected]

242-6498/$ — see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS.oi:10.1016/j.annpat.2012.02.005

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Figure 1. Apercu des deux biopsies prostatiques, à très faiblegrandissement. En haut: atrophie glandulaire et inflammation, enbas : foyer d’adénocarcinome prostatique atrophique.Overview of the two biopsies, with very low magnification. Top:glandular atrophy and inflammation, bottom: outbreak of atrophicprostatic adenocarcinoma.

Figure 2. Foyer d’adénocarcinome prostatique atrophique surl’une des deux biopsies.Atrophic prostatic adenocarcinoma focus on one of the two biop-sies.

Étant donné le caractère rassurant de l’architecture dece variant, il faut s’attacher à en faire le diagnostic dèsle faible grossissement (x2, x5, x10). La recherche atten-tive de caractéristiques cytologiques de malignité se feraalors aux objectifs supérieurs (x20, voire x40). On retrouveen effet les caractéristiques de malignité des cancers pros-

Figure 3. Détail sur le foyer de carcinome atrophique.L’épithélium tumoral est atrophique, quelques noyaux sont volumi-neux et des nucléoles sont visibles, par comparaison avec la glandebénigne, en bas à droite.Detail of atrophic carcinoma. The tumor epithelium is atrophic,some nuclei are large and nucleoli are visible, compared with thebenign gland, bottom right.

Figure 4. Aspect microkystique du variant atrophique. Lesglandes tumorales dilatées sont tapissées par un épithélium atro-phique.Microcystic appearance of atrophic variant. Tumor dilated glandsare lined by atrophic epithelium.

Commentaires

Le variant atrophique ou pseudo atrophique d’adénocarci-nome prostatique a été décrit en 1997 par JI Epstein [1] etpar D Bostwick [2].

Il est considéré comme l’un des variants mimant unelésion bénigne, pouvant, s’il n’est pas diagnostiqué, êtreà l’origine d’un faux négatif.

Le diagnostic repose sur l’examen morphologique minu-tieux du foyer, par comparaison avec les glandes voisines etsur l’immunomarquage.

Les glandes atrophiques peuvent être petites et rondes,parfois plus grandes et dilatées, ce qui a été récemmentrapporté sur le terme : « forme microkystique de carcinomeatrophique » dans laquelle les cellules tumorales ont unaspect atrophique et quelques nucléoles bien visibles [3](Fig. 4).

tatiques (noyaux et nucléoles augmentés de taille) dansquelques glandes tumorales atrophiques, mais rarementdans toutes (Fig. 5). Ces atypies seront mieux vues dansles glandes tumorales voisines de type acineux classique.Il s’agit d’un grade de Gleason : 3 ; le score est donc ici 6(3 + 3).

Idéalement l’utilisation combinée d’un marqueur descellules basales (marqueur nucléaire : p63 ou marqueurcytoplasmique : cytokératine de haut poids moléculaire) etdu marqueur des cellules tumorales prostatiques (racémaseou p504 s), permet de conforter le diagnostic (Fig. 6).

Dans le variant atrophique de l’adénocarcinome prosta-tique, il n’y a pas d’assise basale (la p63 est négative) et lecytoplasme des cellules tumorales est faiblement à modéré-ment positif, de facon hétérogène (d’une glande à l’autre),pour la racémase dans 70 % des cas [4] (Fig. 7) ; d’où la néces-sité d’utiliser un marqueur « positif » du cancer (racémase)et un marqueur « négatif » du cancer (p63, cytokératine de

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Figure 5. Détail sur les glandes tumorales atrophiques coexistantavec des glandes plus amphophiles d’adénocarcinome prostatiqueacineux classique.Detail on the tumor atrophic glands coexisting with moreamphophilic glands of a classic acinar prostatic adenocarcinomacontingeant.

Figure 6. Double immunomarquage avec le marqueur nucléairedes cellules basales (p63) et le marqueur cytoplasmique des cellulescancéreuses (racémase p504 s). Dans l’adénocarcinome atrophique,les glandes tumorales sont faiblement positives pour la racé-mase (voire négatives) et négatives pour la p63. Dans les glandesbénignes, les cellules basales ont un noyau p63+, mais elles ne sontpas marquées par la racémase.Double immunostaining with the nuclear marker of basal cells (p63)and cytoplasmic cancer cell cancer (P504 s racemase). In the atro-phic adenocarcinoma, the tumor glands were weakly positive forracemase (some are negative) and negative for p63. In benignglands, basal cells have a nucleus p63 +, but they are not stainedracemase.

Figure 7. Détail de la figure précédente (Fig. 6). Noter le discretrenforcement apical du marquage granulaire de la racémase.Detail of the previous figure (Fig. 6). Note the discrete apical gra-nular reinforcement of the racemase labeling.

Figure 8. L’immunomarquage permet, en plus de confirmer lediagnostic de cancer, de le mesurer.Immunolabeling allows, in addition of confirming the diagnosis ofcancer, also its measurement.

FA

FlHv

hplmvc

igure 9. Atrophie.trophy.

igure 10. Mise en évidence des cellules basales par’immunomarquage p63 (positivité nucléaire).ighlighting of basal cells by p63 immunostaining (nuclear positi-ity).

aut poids moléculaire 903 ou 34bE12, cytokératine 5/6),our conforter le diagnostic. L’intérêt supplémentaire de’immunomarquage dans ce variant est de permettre deieux apprécier la taille du ou des foyer(s) tumoral(ux),

oire de découvrir d’autres foyers passés inapercus sur laoloration standard (Fig. 8).

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Tableau 1 Diagnostic différentiel entre adénocarcinome atrophique et atrophie.Differential diagnosis between atrophic adenocarcinoma and atrophy.

Adénocarcinome atrophique Atrophie

MorphologieContours de la lésion Irréguliers Arrondis, respect de l’architecture

du lobulestiques Tortueuses souples, parfois

kystiques, rarement rigidesPrésenteVariable

amphophile Petit basophilee Sensiblement normalins focalement Peu visible

± Sympexions ±Cristalloïdes ±

Présente mais focale etsegmentaire

Présents, mais marquage discontinu

ree, fse

d’adénocarcinome conventionnel (acineux) ;• davantage d’atypies nucléo-nucléolaires (noyaux

Aspect des glandes Rigides, parfois ky

StromaScléroseInflammation

VariableInhabituelle

Cytoplasme Petit, basophile ouNoyau Augmenté de taillNucléole Proéminent au moSécrétions Dense éosinophile

mucineuseCristalloïdesPas de sympexions

Assise basale Absente

ImmunohistochimieMarqueurs des cellules basales : p63,

34bE12, CK5/6Absents

p504s (racémase) Marquage granulaiintra-cytoplasmiqumodérément inten

Le variant atrophique se rencontre de novo ou audécours d’un traitement par hormonothérapie (blocageandrogénique) pour adénocarcinome prostatique [5]. Ilest rarement pur, plus volontiers associé à la forme aci-neuse classique d’adénocarcinome prostatique qu’il faudrarechercher sur la biopsie ou sur les autres biopsies dupatient.

Le diagnostic différentiel principal est l’atrophie. Ils’agit d’une lésion bénigne pouvant être associée à uneélévation de la concentration du PSA sérique, très fréquem-

ment retrouvée dans la zone périphérique (donc sur lesbiopsies prostatiques) [6]. Il n’a pas été démontré qu’ils’agissait d’une lésion précancéreuse, ni d’une lésion plusfréquemment associée au cancer, mais elle est fréquem-ment rapportée comme une lésion mimant un cancer de typeatrophique [7].

Dans l’atrophie épithéliale, les glandes atrophiquesrespectent l’architecture du lobule prostatique (Fig. 9),les glandes sont souples et peuvent contenir des sym-pexions mais exceptionnellement des cristalloïdes ou desmucines (Tableau 1). L’atrophie est parfois kystique etpeut poser le problème de diagnostic différentiel avecle carcinome atrophique micro-kystique. Théoriquement,le profil immunohistochimique est inversé par rapportau cancer : les glandes atrophiques possèdent le plussouvent des cellules basales (p63 + ) et les cellules pros-tatiques sont négatives ou très faiblement positivespour la racémase (p504 s ± ) (Fig. 10). En pratique,l’immunomarquage peut être plus délicat à interpréter[8] et on ne posera le diagnostic d’adénocarcinome quesi l’on en a la certitude ; cela implique la nécessité detoujours corréler l’immunomarquage à la morphologie stan-dard.

aiblement àAbsence de marquage (ou trèsfaible marquage)

POINTS IMPORTANTS À RETENIR

Points clés du diagnostic d’adénocarcinomeatrophique :

• acini tumoraux s’infiltrant entre les glandesnormales (grade 3 de Gleason) ;

• parfois présence concomitante de glandes

augmentés de taille, nucléoles visibles) que dansl’atrophie ;

• marqueurs des cellules basales négatifs ;• racémase faiblement ou modérément positive

dans ce variant.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

Références

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[2] Egan AJ, Lopez-Beltran A, Bostwick DG. Prostatic adenocarci-noma with atrophic features: malignancy mimicking a benignprocess. Am J Surg Pathol 1997;21:931—5.

[3] Yaskiv O, Cao D, Humphrey PA. Microcystic adenocarcinoma ofthe prostate: a variant of pseudohyperplastic and atrophic pat-terns. Am J Surg Pathol 2010;34:556—61.

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4] Farinola MA, Epstein JI. Utility of immunohistochemistry foralpha-mathyl-CoA racemase in distinguishing atrophic pros-tate cancer from benign atrophy. Hum Pathol 2004;35:1272—8.

5] Têtu B. Morphological changes induced by androgenblockade in normal prostate and prostatic carci-noma. Best Pract Res Clin Endocrinol Metab 2008;22:271—83.

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M. Sibony

6] Prando A, Billis A. Focal prostatic atrophy: mimicry of pros-tatic cancer on TRUS and 3D-MRSI studies. Abdom Imaging2009;34:271—5.

7] Hameed O, Humphrey PA. Pseudoneoplastic mimics of prostateand bladder carcinomas. Arch Pathol Lab Med 2010;134:427—43.

8] Wang W, Sun X, Epstein JI. Partial atrophy on prostate needlebiopsy cores: a morphologic and immunohistochemical study.Am J Surg Pathol 2008;32:851—87.