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THHÈÈSSEE
En vue de l'obtention du
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Délivré par l'Université Toulouse III - Paul Sabatier
Discipline ou spécialité : Ecologie et Biologie de l’Evolution
Présentée et soutenue par Raphaël François Xavier NDZANA ABANDA Le 30 novembre 2012
Titre : Régulation des bio-agresseurs dans les cultures associées de blé dur et de pois:
impact de la diversité végétale sur la démographie des pucerons du pois
JURY
Serge KREITER, Professeur, Montpellier SupAgro, Rapporteur Joëlle FUSTEC, Professeure, Ecole Supérieure d’Agriculture d’Angers, Rapporteur Anthony DIXON, Emeritus Professor, Academic of Sciences of the Czech Republic, Examinateur Sébastien BROSSE, Professeur, Université Paul Sabatier Toulouse III, Examinateur J-L HEMPTINNE, Professeur, ENFA de Toulouse, Directeur de thèse
Ecole doctorale : Sciences Ecologiques, Vétérinaires, Agronomiques, Bioingénieries Unité de recherche : Laboratoire Evolution et Diversité Biologique Directeur de Thèse : Jean-Louis HEMPTINNE Co-Directrice : Alexandra MAGRO Rapporteurs : Serge KREITER, Serge QUILICI et Joëlle FUSTEC
2
THESE
En vue de l’obtention du
DOCTORAT DE L’UNIVERSITÉ DE TOULOUSE
Délivré par l’Université Toulouse III - Paul Sabatier Discipline ou spécialité : Ecologie et Biologie de l’Evolution
Présentée et soutenue le 30 novembre 2012 par : Raphaël François Xavier NDZANA ABANDA
Titre : Régulation des bio-agresseurs dans les cultures associées de blé dur et de
pois: impact de la diversité végétale sur la démographie des pucerons du pois
Jury
Serge KREITER, Professeur, Montpellier SupAgro, Rapporteur Joëlle FUSTEC, Professeure, Ecole Supérieure d’Agriculture d’Angers, Rapporteur Anthony DIXON, Emeritus Professor, Academic of Sciences of the Czech Republic, Examinateur Sébastien BROSSE, Professeur, Université Paul Sabatier Toulouse III, Examinateur J-L H EMPTINNE , Professeur, ENFA de Toulouse, Directeur de thèse
Ecole doctorale : Sciences Ecologiques, Vétérinaires, Agronomiques, Bioingénieries Unité de recherche : Laboratoire Evolution et Diversité Biologique Directeur de Thèse : Jean-Louis HEMPTINNE Co-Directrice : Alexandra MAGRO Rapporteurs : Serge KREITER, Serge QUILICI et Joëlle FUSTEC
3
Auteur : NDZANA ABANDA Raphaël François Xavier Directeur de thèse : Jean-Louis Hemptinne Lieu et date de soutenance : Toulouse
RÉSUMÉ
Les pucerons font partie des principaux ravageurs des cultures dans les régions tempérées.
Leur succès comme ravageurs des plantes repose sur leur fort potentiel reproductif dû à la
parthénogenèse durant le printemps et l’été, la transmission des virus aux plantes et leur
polyphénisme. Ce mode de multiplication asexué explique leur importante dynamique
démographique et les dégâts causés sur les cultures. Plusieurs méthodes de lutte ont été
envisagées à leur encontre, entre autre la régulation « Top-down », qui est l’approche par les
ennemis naturels, de la lutte chimique.
Lorsqu’on compare les temps de développement des pucerons et leurs ennemis naturels, à
l’instar des coccinelles, on constate que les premiers se développent plus vite que les seconds.
C’est cette différence de vitesse de développement qui confère aux pucerons leur caractère de
proie éphémère ou limitée dans le temps. Le calcul du rapport du temps de génération des
prédateurs sur celui des pucerons, « Generation Time Ratio », est supérieur à 1. Or, les
rapports supérieurs à 1 correspondent à des relations trophiques défavorables à la mise en
place d’une régulation « Top-down ». Dés lors, pour réguler les pucerons du pois, il faudrait
envisager d’autres possibilités de lutte biologique. La voie « Bottom-up » semble ainsi être la
plus appropriée.
Cette approche par le «Bottom-up » privilégie l’augmentation de la biodiversité végétale en
champ pour réguler la dynamique de population du puceron du pois.
Le présent travail de thèse a pour objectif d’évaluer l’impact de la diversité végétale sur la
démographie du puceron du pois (A. pisum Harris) en monoculture de pois d’hiver par rapport
à la culture associée de pois d’hiver et de blé dur. Au cours de nos travaux en champ, par des
comptages de pucerons, nous avons pu ainsi vérifier que les infestations de pucerons étaient
statistiquement plus élevées en monoculture de pois par rapport à la culture associée de pois
d’hiver et de blé dur.
4
Nous avons également pu évaluer l’influence de la plante-hôte sur les déplacements et
l’aptitude des pucerons. Les déplacements et les paramètres démographiques d’A. pisum
adultes ont été examinés dans un peuplement pur de pois d’hiver et dans un peuplement mixte
de pois d’hiver et de blé dur. Les distances parcourues en culture pure de pois sont
significativement plus longues qu’en culture associée. Le taux de fécondité est plus élevé en
culture associée de pois/blé qu’en culture pure de pois. De même, le taux de survie des larves
est plus élevé en culture associée qu’en culture pure de pois même si la différence n’est pas
significative.
Nous avons, au cours de ce travail, testé sur 1036 pucerons leur choix sur les sources d’odeur
entre deux types de cultures (monoculture de pois et une culture associée de blé dur au pois).
A cela, nous avons ajouté d’autres paramètres tels que la forme du puceron (ailé ou aptère), la
souche du puceron (sauvage ou élevé au laboratoire), la quantité de plante dans les pots lors
de l’expérience. Le choix des pucerons selon le type de plante n’a pas montré des résultats
significatifs. Cependant, on note une tendance des pucerons à choisir la source d’odeur chez
la monoculture de pois. Ces résultats mettent en évidence l’importance de la diversité végétale
sur la régulation des pucerons. Les effets liés à la plante hôte « Bottom- up » permettent de
réguler certains ravageurs. Toutefois, d’autres variétés d’espèces de plantes dans le couple
céréale-légumineuse devraient être testées afin de confirmer cette hypothèse.
Mots clés : Acyrthosiphon pisum Harris, Bottom-up, monoculture, culture associée, diversité
végétale, paramètres démographiques, polyphénisme, Generation Time Ratio.
DISCIPLINE ADMINISTRATIVE
Ecologie et Biologie de l’Evolution
INTITULE ET ADRESSE DE L’U.F.R. OU DU LABORATOIRE : UMR 5174
Laboratoire Evolution et Diversité Biologique – ENFA, 2 route de Narbonne - BP 22687 –
31326 CASTANET TOLOSAN Cedex
5
DÉDICACE
A ma famille restée au Cameroun et qui a beaucoup souffert de mon absence durant la
préparation de cette thèse.
Je pense spécifiquement à Denise Ndzana mon épouse, et à mes enfants Princesse Flavie
Murielle, Aloys Enzo et Solenne Ndzana.
Enfin, comment ne pas aussi penser à ma chère maman, Mme veuve Abanda Salomé qui m’a
élévé et m’a beaucoup apporté au lendemain du décès de mon feu père, alors que je n’avais
que six ans ! Reçois ici, Maman, toute ma reconnaissance et ma gratitude.
6
AVANT -PROPOS ET REMERCIEMENTS
Une thèse est le résultat de nombreuses interactions au sein d’une communauté de chercheurs
et de personnes d’horizons divers. Le travail qui vous est présenté ici, a été rendu possible
grâce au concours appréciable de plusieures personnes.
De prime abord, qu’il me soit permis d’exprimer toute ma gratitude et mon profond respect
au Professeur Jean-Louis Hemptinne qui m’a accueilli chaleureusement au sein du
laboratoire d’Agroécologie de l’Ecole Nationale de Formation Agronomique d’Auzeville
(ENFA) et a bien voulu diriger cette thèse. Les conseils qu’il m’a prodigués, sa patience et sa
disponibilité m’ont permis de mener à bien ce travail. Il a toujours été à mes côtés pour
m’encourager. Jean-Louis, je ne saurais oublier également l’important soutien financier mis à
ma disposition pour achever cette thèse. Je n’oublie pas non plus ton humour spontané et
toujours adapté à chaque circonstance. Tu as été pour moi un véritable rock sur lequel j’ai dû
prendre appui pour boucler ce travail.
Je voudrais également adresser mes remerciements à Alexandra Magro, Co-Directrice de ma
thèse pour sa rigueur scientifique et son attachement inlassable au travail bien fait et soigné.
Tes encouragements m’ont permis de tenir bon même lorsque le doute s’emparait de moi.
Je remercie les membres de mon comité de pilotage qui ont participé activement à la réflexion
sur mon travail tout au long de ma thèse. Je pense à Eric Justes et à Etienne-Pascal Journet.
Je tiens à remercier Laurent Bedoussac pour son orientation, ses conseils et l’importante
bibliographie mise à ma disposition sur les cultures associées.
Mes remerciements vont également à l’endroit de Messieurs Serge Kreiter, Serge Quilici et
Madame Fustec Joëlle qui m’ont fait l’honneur d’accepter d’examiner ce travail comme
rapporteurs. Qu’ils soient assurés de ma profonde gratitude et de mes sentiments déférents.
L’expression de ma reconnaissance va également à la Région Midi Pyrénées et au Ministère
de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du
territoire pour le financement de ce travail de thèse.
7
Ce travail de thèse qui aboutit aujourd’hui a connu l’implication de plus d’une personne. Je
voudrais dire merci à :
- Jean François Garrigues Technicien au laboratoire d’Agroécologie de l’ENFA avec qui j’ai
fait le terrain dans le Gers et l’Aude. Ton initiation à l’élevage des pucerons en laboratoire a
tenu ses promesses. Merci pour ta bonne humeur et tes encouragements. Tu fais parti de ce
travail de bout en bout.
- Patrice Rouet de l’INRA d’Auzeville avec qui j’ai fait mes premiers pas sur le terrain dans le
Gers et dans L’Aude.
- Félipé Ramon Portugal pour ta précieuse aide sur la partie olfactométrie. Tes
encouragements et conseils pour mener à bien ce travail m’ont été forts utiles.
- Tous les autres membres du laboratoire; je pense à : Nathalie Dardenne, Christine Ducamp,
Gilles Espinasse, Olivine et Virginy Chatain.
Je tiens à exprimer ma reconnaissance à l’endroit de Marion Lindia et Louis Vignali stagiaires
au laboratoire, pour votre aide sur les manipulations au laboratoire et à la serre. J’ai gagné un
précieux temps grâce à votre disponibilité.
Merci aux Doctorants que j’ai trouvés dans le laboratoire et qui m’ont chaleureusement
accueilli et guidé. Je pense notamment à Aurélie Ferrer et Xavier Martini.
Je tiens également à dire Merci à mes collègues de bureau : Eric Zoukekang, Lucie Aussel,
Arnaud Sentis, Eline Susset, Achille Dienderé, Palou Oumarou Madi, Javier Nunez, Jean Luc
Favreau ainsi qu’à mes collègues doctorants de l’ENFA.
Merci à Michel Havard, Chantal Alené et Darie Nga qui ont bien voulu relire avec abnégation
une partie de ce travail.
Il me plaît d’exprimer ma reconnaissance à mon employeur, l’Institut de Recherche Agricole
pour le Développement (IRAD) au Cameroun dont le Directeur Général m’a autorisé à
préparer et à finaliser ce travail.
Merci aux stagiaires du laboratoire. Je pense à Meghan Hill, Christian et Gaspard.
8
J’adresse tout particulièrement mes remerciements à Jean Marie Rouane et à Sandrine
Bensaci pour leur encouragement. Vos démarches administratives m’ont été d’un apport
indéniable dans l’élaboration de mon travail.
Je tiens à remercier mes collègues du Réseau Fasa Alumni pour leur soutien constant. Je
pense à : Augustin Wambo, Cyprien Awono, Eric Clotaire Mbenoun, Francis Emmanuel
Ngome, Paul Marie Désiré Ko Awono, et Aimé Landry Dongmo.
Je voudrais exprimer toute ma gratitude à ma famille restée au Cameroun. Je sais que je vous
ai beaucoup manqué. J’ai manqué par exemple, les premiers pas d’Aloys Enzo et Solenne nés
durant cette thèse le 4 décembre 2009. Votre grande sœur aînée Princesse Flavie avait déjà
aussi souffert de cette absence. Que dire de ma bien-aimée épouse Denise Philomène qui a su,
avec beaucoup de courage s’occuper de la famille et continuer ses études. Merci pour tous
ces sacrifices.
Merci à ma grande famille de France et de Belgique qui m’a assisté de bout en bout durant
cette thèse. Bien qu’étant à distance parfois. Je pense à Amélie Potier Abanda, Carole
Honorine Abanda Richebon, Angèle Abanda Payneau, Tarcisius Essomba Abanda, Marie
Michelle Valleau, Eric Valentin Mbarga et Marie Marcelle Biloa Abanda.
Je tiens à remercier Monsieur Martin Dieudonné Ebolo pour ses encouragements et son grand
sens de la fraternité.
Un Merci particulier à Monsieur Ambassa Zang Dieudonné pour son soutien permanent dans
notre quotidien à Toulouse.
Merci aux familles Fantin et Husson pour leur soutien tout au long de mon séjour à Toulouse.
Je n’oublie pas la grande famille du Cameroun, dont je ne pourrais pas citer tous les noms.
Je voudrais dire Merci à Nathalie Guerra, Dieudonné Tchuenté et Marguerite Alégobé de
m’avoir aidé à faire la mise en page de ce document.
Merci à tous ceux qui, très nombreux pour être cités ici, m’ont apporté leur soutien au cours
de ce travail.
9
TABLE DES MATIERES
RÉSUMÉ ........................................................................................................................................................... 3
DÉDICACE ......................................................................................................................................................... 5
AVANT-PROPOS ET REMERCIEMENTS .............................................................................................................. 6
I. LE CONTEXTE ............................................................................................................................................... 12
II. LES CULTURES ASSOCIÉES : LE CAS PARTICULIER POIS-BLÉ DUR ................................................................. 15
III. LA LUTTE BIOLOGIQUE .............................................................................................................................. 16
IV. LE PUCERON DU POIS ACYRTHOSIPHON PISUM HARRIS COMME CAS CONCRET ....................................... 18
V. LE RÔLE DE LA RÉGULATION « BOTTOM-UP» DES HERBIVORES GRÂCES A DES AGROÉCOSYSTÈMES COMPLXES ..................................................................................................................................................... 19
A) UNE APPROCHE GÉNÉRALE................................................................................................................................... 19 A) DES EXEMPLES DE CULTURES ASSOCIÉES AVEC LES LÉGUMINEUSES ............................................................................... 22
V.I. LES ODEURS DES PLANTES ........................................................................................................................ 23
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................................... 26
Chapitre 1: Y aurait-il une résistance assocoative de la culture associée de blé dur-pois d'hiver face au puceron du Acyrthosiphon pisum Harris?...............................................
RÉSUMÉ : ....................................................................................................................................................... 33
ABSTRACT: ..................................................................................................................................................... 34
1.1. INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 35
1.2. MATERIAL AND METHODS....................................................................................................................... 37
1.2.1- THE ABUNDANCE OF A. PISUM IN DURUM WHEAT-WINTER PEA INTERCROP AND IN PURE STANDS OF WINTER PEA. .......... 37 1.2.2- THE INFLUENCE OF TWO BOTTOM-UP FACTORS ON APHID ABUNDANCE: SPECTRAL ANALYSES OF STANDS AND NITROGEN
CONTENT OF PLANTS .............................................................................................................................................. 39 1.2.2.1- Spectral analyses of stands of durum wheat-winter pea intercrop and pure stand of winter pea 39 1.2.2.2- Nitrogen content of winter pea shoots grown in stands of durum wheat-winter pea intercrop and
in pure stands of winter pea. ....................................................................................................................... 39
1.3. RESULTS .................................................................................................................................................. 40
1.3.1- THE ABUNDANCE OF A. PISUM IN DURUM WHEAT-WINTER PEA INTERCROP AND IN PURE STANDS OF WINTER PEA. .......... 40 1.3.2- THE INFLUENCE OF TWO BOTTOM-UP FACTORS ON APHID ABUNDANCE: SPECTRAL ANALYSES OF STANDS AND NITROGEN
CONTENT OF PLANTS .............................................................................................................................................. 41 1.3.2.1- Spectral analyses of stands of durum wheat-winter pea intercrop and pure stands of winter pea.
..................................................................................................................................................................... 41 1.3.2.2-- Nitrogen content of winter pea shoots grown in stands of durum wheat-winter pea intercrop and
in pure stands of winter pea. ....................................................................................................................... 41
1.4. DISCUSSION AND CONCLUSIONS ............................................................................................................. 42
ACKNOWLEDGEMENTS .................................................................................................................................. 43
REFERENCES ................................................................................................................................................... 44
Chapitre 2: Rôle des odeurs émises par les plantes dans la recherche d'hôtes par les puceorns du pois (Acyrthosiphon pisum Harris)…………………………………………………………………
RÉSUMÉ : ....................................................................................................................................................... 49
10
2.1. INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 50
2.2. QUALITÉ DE LA PLANTE HÔTE ................................................................................................................. 54
2.3. IMPORTANCE DES SIGNAUX OLFACTIFS ET VISUELS DANS LE CHOIX DE LA PLANTE HÔTE ...................... 54
2.3.1. REPÈRES OLFACTIFS ...................................................................................................................................... 56 2.3.2. SÉLECTION DE LA PLANTE HÔTE ....................................................................................................................... 56 2.3.3. RECHERCHE DE LA PLANTE ET LOCALISATION ...................................................................................................... 57
2.4. NATURE ET ORIGINE DES STIMULI ........................................................................................................... 58
2.5. SÉLECTION DE L’HABITAT CHEZ LES PUCERONS ....................................................................................... 60
2.6. OBJECTIF DU CHAPITRE ........................................................................................................................... 61
2.7. MATÉRIEL ET MÉTHODES ........................................................................................................................ 61
2.7.1. LES PUCERONS ............................................................................................................................................ 62 2.7.2. LES PLANTES ............................................................................................................................................... 62 2.7.3. OLFACTOMÈTRE .......................................................................................................................................... 64
2.7.3.1. Description de l’olfactomètre ......................................................................................................... 64 2.7.3.2 Déroulement des expériences et analyse statistique ....................................................................... 66
2.8. RÉSULTATS ............................................................................................................................................. 68
2.8.1. CHOIX DES PUCERONS ET EFFECTIF DES PUCERONS TESTÉS .................................................................................... 68 2.8.2. LE CAS DES PUCERONS APTERES ...................................................................................................................... 70 2.8.3. LE CAS DES PUCERONS AILES ........................................................................................................................... 71
2.9. DISCUSSION ............................................................................................................................................. 74
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................................... 80
Chapitre 3: Déplacements et aptitude du puceron du pois (Acyrthosiphon pisum Harris) dans un peuplement pur de pois (Pisum sativum L) et dans un peuplement mixte de pois et de blé dur (Triticum aestivum L)………………………………………………………………………………………
RÉSUMÉ : ........................................................................................................................................................ 88
3.1. INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 89
3.1.1 HISTOIRE DE VIE ET DÉPLACEMENT DES PUCERONS ............................................................................................... 90 3.1.2. LE CAS DE POLYPHÉNISME EST-IL PROPRE AUX PUCERONS? ................................................................................... 92 3.1.3. EVOLUTION DU DÉPLACEMENT DES PUCERONS ................................................................................................... 93
3.2. MATÉRIEL ET MÉTHODES ......................................................................................................................... 95
3.2.1 SITE ET PÉRIODE D’ÉTUDE ............................................................................................................................... 95 3.2.2. LE MATÉRIEL VÉGÉTAL................................................................................................................................... 95 3.2.3. LE MATÉRIEL ANIMAL .................................................................................................................................... 95 3.2.4. DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL ............................................................................................................................. 95 3.2.5. EXPÉRIENCE 1 : LE DÉPLACEMENT DES PUCERONS ............................................................................................... 96 3.2.6. EXPÉRIENCE 2 : ESTIMATION DE L’APTITUDE ..................................................................................................... 97
3.3. RÉSULTATS .............................................................................................................................................. 99
3.3.1. EXPÉRIENCE I : DÉPLACEMENT DES PUCERONS ................................................................................................... 99 3.3.2. LA VALEUR SÉLECTIVE DES PUCERONS ............................................................................................................. 103
3.3.2..1 Survie des pucerons ..................................................................................................................... 105 3.3.2.2. Ponte et aptitude .......................................................................................................................... 106
3.4. DISCUSSION ........................................................................................................................................... 107
3.4.1. SUR LE DÉPLACEMENT DES PUCERONS ............................................................................................................ 108 3.4.2. SURVIE ET FÉCONDITÉ DES PUCERONS ............................................................................................................ 109
3.5. CONCLUSION ......................................................................................................................................... 110
11
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................................. 112
Chapitre 4: Discussion Générale……………………………………………………………….
4.1. L’INTÉRÊT DES CULTURES ASSOCIÉES : CONTEXTE GÉNÉRAL ET RAPPEL DE LA PROBLÉMATIQUE .......... 116
4. 2. LA REGULATION DE L’ABONDANCE DES HERBIVORES ........................................................................... 118
4.3. RAPPEL DES PRINCIPAUX RÉSULTATS .................................................................................................... 120
4.3.1. LES EXPÉRIENCES EN CHAMPS : ÉVALUATION DE L’ABONDANCE DES PUCERONS VERTS DU POIS EN MONOCULTURE ET EN
CULTURE ASSOCIÉE............................................................................................................................................... 120 4.3.2. SUR LES DÉPLACEMENTS ET LA VALEUR PHÉNOTYPIQUE DES PUCERONS SUR LES DIFFÉRENTES CULTURES ..................... 123 4.3.3. INFLUENCE DES ODEURS DES PLANTES SUR LE CHOIX DES PUCERONS .................................................................... 123
4.4. PERSPECTIVES ET THÉMATIQUES ........................................................................................................... 124
4.4.1. PERSPECTIVES ET THÉMATIQUES DE RECHERCHE À DÉVELOPPER POUR UNE MEILLEURE RÉGULATION DU PUCERON DU POIS
........................................................................................................................................................................ 124 4.4.2. LES PERSPECTIVES DE RECHERCHE À APPROFONDIR ........................................................................................... 125
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................................................. 126
ANNEXE 1 ..................................................................................................................................................... 134
LISTE DES TABLEAUX .................................................................................................................................... 134
ANNEXE 2 ..................................................................................................................................................... 136
LISTE DES FIGURES ....................................................................................................................................... 136
PARCELLES CULTIVÉES .................................................................................................................................. 137
ANNEXE 4: .................................................................................................................................................... 139
ANNEXE 5: .................................................................................................................................................... 140
ANNEXE 6:……………………………………………………………………………………………………………………………………………. .. 141
12
Introduction Générale
I. LE CONTEXTE
La période allant de 1950 à 1990 a été profondément marquée par un développement rapide
de la production agricole et un changement des paysages ruraux en Europe de l’Ouest suite à
l’intensification et à la mécanisation de l’agriculture (Chamberlain et al., 2000 ; Krebs et al.,
1999). Cette intensification de l’agriculture en Europe, a entraîné une réduction de la
biodiversité liée à la destruction des habitats naturels de nombreuses espèces. L’utilisation
accrue des pesticides au sein des parcelles cultivées a favorisé la réduction des cultures
associées jusqu’à leur quasi disparition des agro-systèmes (Flawerdew 1997 ; Matson et al.,
1997). Cette intensification de l’agriculture s’est traduite dans certaines zones géographiques
par l’érosion des sols, des pollutions environnementales par les produits phytosanitaires et les
engrais, mais aussi, l’apparition de maladies, d’insectes et de plantes adventices résistantes
aux produits phytosanitaires (Vandermeer et al., 1998).
Sur le plan agronomique, cette intensification se traduit par une simplification des itinéraires
techniques qui permet une meilleure maîtrise de l’utilisation des intrants au service d’une
forte productivité primaire (Doré et al., 2011). Au niveau des exploitations agricoles, les
rotations des cultures sont devenues moins complexes. Les légumineuses fixatrices d’azote
atmosphérique n’étant plus nécessaires pour contribuer au maintien de la fertilité des sols sont
rarement cultivées. L’assolement triennal est devenu la règle mais, dans certaines régions
européennes, les systèmes de culture peuvent être encore plus simples et consister en des
rotations de deux cultures seulement, voire la répétition d’une seule culture année après année
pour des monocultures (Sotherton, 1998).
Au niveau des parcelles, l’intensification de l’agriculture moderne favorise la culture d’une
seule plante (Benton et al., 2003). Les systèmes plus complexes associant plusieurs plantes
sur la même parcelle ont pratiquement disparu ou sont seulement pratiqués par une minorité
d’agriculteurs engagés dans des modes de production à bas niveaux d’intrants (Flawerdew,
1997; Matson et al., 1997).
Cependant, la prise de conscience des retombées négatives de l’intensification de l’agriculture
sur le plan de la biodiversité et de la santé ouvre progressivement de nouvelles perspectives
agronomiques. Par exemple, l’incidence négative des pesticides sur les écosystèmes et la
13
santé a placé la question de leur utilisation au cœur des débats. Cela s’est traduit en France, en
particulier et dans un premier temps, par l’adoption du « paquet pesticides », puis par le Plan
Interministériel de Réduction des Risques liés aux Pesticides (PIRRP) et le Grenelle de
l’environnement (Butault et al., 2010). Ces contraintes nouvelles imposées par l’Etat vont
probablement modifier les pratiques agronomiques au cours des prochaines décennies. Les
démarches françaises s’inscrivent dans un contexte européen qui a conduit à l’adoption de la
directive communautaire 2009/128/CE, le 21 octobre 2009 (Butault et al., 2010). Cette
directive impose aux États membres d’adopter des plans d’action nationaux pour fixer leurs
objectifs quantitatifs, leurs cibles, leurs mesures et leurs calendriers en vue de réduire les
risques et les effets de l’utilisation des pesticides sur la santé humaine et l’environnement.
Elle encourage l’élaboration et l’introduction de la lutte intégrée contre les ennemis des
cultures ainsi que de méthodes ou de techniques de substitution en vue de réduire la
dépendance à l’égard de l’utilisation des pesticides. S’inscrivant dans ce contexte
international, le plan « Ecophyto 2018 » prévoit une réduction de 50 % de l’utilisation des
pesticides en 2018 par rapport à la consommation actuelle.
Cette prise de conscience confirme un profond changement de mentalité qui fut entamé lors
de la préparation du Sommet de la Terre, à Rio de Janeiro, en 1992. Cette année là, le mot
« biodiversité » sortit des cénacles scientifiques et entra dans le langage courant. En cette fin
du XXème siècle, les écologues commencèrent à mieux comprendre l’importance que joue la
diversité biologique dans le fonctionnement des écosystèmes. A mesure que les chercheurs
amélioraient leurs connaissances à propos du rôle fonctionnel de la diversité biologique, des
économistes se préoccupaient d’évaluer la valeur des services que les écosystèmes fournissent
aux sociétés humaines (Costanza et al., 1997). L’un de ces services est la régulation des
ravageurs et des maladies des plantes cultivées (Kaiser, 2000 ; Loreau, 2000 ; Hector et al.,
1999 ; Tilman, 1997). Or, la perte de la complexité d’habitats naturels dans les campagnes, la
simplification des itinéraires techniques qui va de paire avec une fertilisation minérale et
l’utilisation de produits phytosanitaires ont amoindri le potentiel de lutte biologique (Andow
1991 ; Kruess & Tscharntke 1994 ; Hawkins et al., 1999). Dans ce contexte, alors que les
acteurs du développement agricole doivent commencer à inscrire leurs pratiques
professionnelles dans une perspective de développement durable, la recherche agronomique
s’intéresse à des modes de production agricole économes en intrants faisant appel à une
approche intégrée des systèmes de production.
14
Parmi ces pistes, les légumineuses à graines, notamment le pois protéagineux (Pisum sativum
L), présentent des atouts agro-environnementaux majeurs à valoriser dans les systèmes à
faibles intrants (Munier-Jolain & Carrouée, 2003). Ainsi, le pois produit des graines riches en
protéines utilisables pour l’alimentation du bétail; il a de faibles besoins en eau par rapport
aux autres cultures et, enfin, il fixe l’azote atmosphérique. De ce fait, la présence de pois dans
les rotations de grandes cultures facilite la gestion des problèmes environnementaux découlant
de la fertilisation azotée. Le retour des légumineuses dans les rotations constitue une
amélioration de la diversité végétale à l’échelle des parcelles, des exploitations ou des
paysages. Cette amélioration est-elle suffisante pour se traduire par une réduction des dégâts
infligés aux cultures par les ravageurs? Nous reviendrons ultérieurement à cette question.
L’autonomie des légumineuses vis-à-vis de l’azote permet une réduction significative des
rejets de gaz à effet de serre (Munier-Jolain & Carrouée, 2003). Le pois s’affiche ainsi comme
une solution utile pour la diversification des cultures rendue indispensable pour un meilleur
respect de l’environnement.
Cependant, le pois protéagineux est attaqué par de nombreux ravageurs, parmi lesquels
Acyrthosiphon pisum (Harris) (Homoptère, Aphididae) et Sitona lineatus L (Coléoptère,
Curculionidae). Cette sensibilité aux ravageurs constitue un handicap pour l’insertion des pois
dans les rotations.
Certains ont pensé à associer intimement les légumineuses et les céréales en les cultivant en
mélange sur les mêmes parcelles. L’intérêt de ce mode de culture est de permettre la
production de grains de céréales plus riches en azote. Les mécanismes de cet enrichissement
en azote sont notamment expliqués par Ghaley et al. (2005). Le taux de fixation des
légumineuses est vu sous l’angle d’un modèle écophysiologique basé sur le coût en carbone
de la fixation, opposé à celui du développement racinaire nécessaire au prélèvement de l’azote
disponible dans le sol. Les résultats agronomiques sont si spectaculaires en termes de
rendement que les associations de céréales et de légumineuses font aujourd’hui l’objet d’un
regain d’intérêt en Europe (Hauggaard-Nielsen & Andersen, 2000). Lors d’essais réalisés à
l’INRA de Toulouse entre 2005 et 2007, Justes et Bedoussac ont remarqué que les pois
cultivés en association avec des céréales étaient moins attaqués par le puceron du pois
(Bedoussac, 2009). Cette première observation suggère que l’association du pois et du blé dur
(Triticum turgidum L. subsp. durum (Desf.) Husn.) pourrait atténuer les effets des infestations
liées aux pucerons du pois. Cette association de cultures entre le pois protéagineux et le blé
15
dur serait une tentative d’utiliser la lutte biologique pour réguler les pucerons du pois. Le
présent travail de thèse se propose d’explorer cette possibilité et d’identifier quelques
mécanismes qui pourraient expliquer ce phénomène.
II. LES CULTURES ASSOCIÉES : LE CAS PARTICULIER POIS -BLÉ DUR
Les cultures associées peuvent être définies comme la culture simultanée d’au moins deux
cultures sur une même parcelle durant une phase significative de leur croissance, mais sans
nécessairement être semées ou récoltées en même temps (Vandermeer, 1989 ; Willey, 1979).
Les associations céréale-légumineuse destinées à la production de graines sont
essentiellement cultivées en agriculture biologique. D’après des enquêtes menées dans le
cadre du projet européen INTERCROP (2003), ces associations sont majoritairement
composées d’orge et de pois, d’avoine et de pois de printemps ou encore de triticale et de pois
d’hiver. L’association du pois protéagineux à une céréale constituerait une alternative au pois
pur pour une meilleure gestion des adventices et une réduction des infestations des ravageurs,
notamment les pucerons. C’est l’une des principales motivations des agriculteurs vis-à vis de
cette pratique (Butault et al., 2010 ; Bedoussac, 2009 ; Hauggaard-Nielsen et al., 2008 ;
Bedoussac & Justes, 2006 ; INTERCROP , 2003).
Les premiers résultats des travaux conduits à l’INRA d’Auzeville à Toulouse dans le cadre
d’associations entre les céréales, notamment le blé (tendre ou dur) et des légumineuses pois
ou féverole, montrent que les teneurs en protéines du blé et de pois sont supérieures à celles
mesurées dans les cultures pures (Bedoussac, 2009 ; Justes et al., 2009). La culture associée
améliore le rendement relatif, ainsi que le montrent des valeurs de LER (Land Equivalent
Ratio) supérieures à l’unité. Le LER est un indice agronomique proposé pour la première fois
par Willey & Osiru (1972). Il compare le rendement économique de la culture associée au
meilleur rendement de chacune des espèces constituant l’association. Plusieurs travaux ont en
effet montré que les associations céréale-légumineuse sont largement plus compétitives vis-à-
vis des adventices que la légumineuse cultivée seule (Hauggaard-Nielsen et al., 2001a ;
Bulson et al., 1997 ; Liebman & Dick, 1993). La présence d’une céréale dans un couvert de
pois permettrait de mieux utiliser l’azote minéral du sol en comparaison du pois pur et de
réduire ainsi cette ressource disponible pour les adventices, limitant ainsi leur croissance
(Hauggaard-Nielsen et al., 2001b). La plus forte compétitivité de la céréale pour l’azote du sol
16
permettrait d’autre part de réduire les risques de pertes d’azote minéral par lessivage par
rapport à ce qui est observé dans les cultures de pois pures (Hauggaard-Nielsen et al., 2003).
Les cultures associées induisent aussi une réduction de la population des pucerons du pois et
des maladies foliaires du blé-rouille- et du pois-anthracnose-(Munier-Jolain & Carrouée,
2003). Les céréales servent de tuteurs aux légumineuses ou encore de couvert végétal. Grâce à
ces tuteurs, les plantes de pois ne sont pas plaquées au sol en cas de fortes pluies et sont donc
moins sensibles aux maladies cryptogamiques. Il est donc intéressant de comprendre les
mécanismes de ces effets à l’encontre des ravageurs. Le fait que les pois soient entourés de
plantes de céréales, peut compliquer l’exploitation de cette ressource par les ravageurs. Cela
nous conduit à rechercher des explications en termes de concentration/dilution des ressources
des ravageurs, de la dynamique des populations de prédateurs ou des effets de barrière
physique ou de modification de l’habitat.
III. LA LUTTE BIOLOGIQUE
D’après van Lenteren (2008), la lutte biologique en agriculture peut être définie comme une
méthode de lutte contre un ravageur ou une plante adventice au moyen d'organismes naturels
antagonistes, tels que des phytophages, des parasitoïdes, des prédateurs, nématodes,
arthropodes, vertébrés, mollusques ou des agents pathogènes (virus, bactéries, champignons,
etc.).
Dans l’esprit des agronomes, la lutte biologique a toujours laissé suggérer une régulation
« Top-down » ; c’est-à-dire qu’un niveau trophique est régulé par des organismes du niveau
qui lui est immédiatement supérieur (Schmitz, 1994). Par exemple, l’abondance des
herbivores est régulée par les carnivores. Cette vision de la régulation de l’abondance des
herbivores s’inspire des représentations exprimées par Hairston et al.(1960). Selon ces
auteurs, « le monde est vert », c’est-à-dire que la couleur des plantes vertes domine les
paysages, car l’abondance des herbivores est régulée par la mortalité que leur infligent les
prédateurs. Sans cette régulation, les herbivores détruiraient la végétation et le monde serait
alors brun !
Murdoch (1966) critiqua vivement Hairston et al., 1960 et proposa des mécanismes alternatifs
de régulation : le monde est toujours vert parce qu’il est « épineux et a mauvais goût ».
Autrement dit, la couleur dominante de la planète est encore verte car les végétaux ont mis en
place des systèmes de défense physique ou chimique contre leurs consommateurs. Dans cette
17
représentation, la population des herbivores est contrôlée directement par la ressource qu’elle
exploite et non par l’action des carnivores. L’abondance des herbivores pourrait donc tout
aussi bien être régulée par des forces se propageant du bas vers le haut des chaînes trophiques,
c’est ce qu’on appelle une régulation « Bottom-up ». Toutefois, les personnes intéressées par
la lutte biologique semblent fréquemment ignorer ces deux possibilités de régulation
démographique des populations et ne retenir que la première.
Outre cette ignorance des deux grands modes de régulation des chaînes trophiques, les
travaux en lutte biologique sont rarement appuyés par des études écologiques permettant de
comprendre les mécanismes responsables d’évaluer son efficacité et de définir les conditions
d’application efficace (Pimentel et al., 1984). A titre d’exemple, la lutte biologique telle que
pratiquée actuellement est toujours basée sur l’hypothèse des effets de cascade qui stipule que
lorsqu’on augmente la population d’une espèce à un niveau trophique donné (les ennemis
naturels), ceci se répercute sur le niveau inférieur par une diminution d’abondance des
ravageurs et ce qui, à son tour, se répercute sur le niveau inférieur des plantes, en augmentant
leur population et/ou leur production (Wooton, 1994).
Or, l’effet cascade, fondement théorique de la lutte biologique, peut être annihilé par des
interactions horizontales entre individus du même niveau trophique, ou des interactions
verticales débordant les trois seuls niveaux trophiques présentés en lutte biologique
(Rosenheim, 1998). Plusieurs études récentes ont démontré que les interactions de ce type
sont omniprésentes et peuvent même être prépondérantes dans certains systèmes (Lucas et al.,
1998). Un bon exemple de ces interactions qui touchent la lutte biologique est celui de la
prédation intraguilde. Celle-ci survient lorsqu'un ennemi naturel tue et dévore un compétiteur,
donc un organisme qui s'attaque aux mêmes proies que lui (Polis et al., 1989). En 1993, dans
des champs de coton aux USA, des lâchers de chrysopes (Neuroptères, Chrysopidés)
prédatrices pour lutter contre le puceron du cotonnier, Aphis gossypii Glover ont échoué parce
que des punaises prédatrices Hémiptères des pucerons présentes naturellement dans ces
champs, ont consommé les chrysopes (Rosenheim et al., 1993). Cette méthode de lutte
biologique par introduction d’ennemis naturels a souvent montré des résultats mitigés
(Rosenheim, 1998) à cause de nombreuses lacunes, notamment dans la compréhension de
l’effet de cascades ou à cause de la non-acclimatation des espèces introduites (Halaj & Wise,
2001).
18
IV. LE PUCERON DU POIS ACYRTHOSIPHON PISUM HARRIS COMME CAS CONCRET
Les pucerons sont des insectes extrêmement répandus dans le monde qui se nourrissent de
sève élaborée (Douglas, 1993 ; Auclair, 1963). Leur période de présence sur une plante est
généralement courte. Pour se reproduire, les pucerons sont en effet tributaires de la croissance
des végétaux et plus précisément de la concentration en azote de la sève élaborée (Douglas,
1993 ; Spiller et al., 1990). Leur pic de reproduction va ainsi correspondre au pic de
concentration en azote de la sève élaborée, ce qui ne va correspondre qu’à une période de six
à huit semaines au printemps (Hemptinne et al., 2004). En réponse à ces contraintes posées
par la qualité des plantes-hôtes, l’histoire de vie des pucerons a évolué dans le sens de la
rapidité. Puisque leurs ressources ne sont disponibles que pendant une courte période, il est
impératif de se développer et de se reproduire le plus rapidement possible. Leur faible taille
est un atout pour se développer rapidement. En outre, ils pratiquent la reproduction
parthénogénétique au printemps et en été. Grâce à ce mode de reproduction, une autre
adaptation, le télescopage des générations a pu évoluer. Cela signifie que chaque puceron
adulte engendre des filles qui portent déjà dans leurs organes de reproduction, des filles
fonctionnelles (Kindlmann & Dixon, 1989).
D’un point de vue théorique, pour que les coccinelles régulent efficacement les pucerons par
un effet top-down, il faudrait qu’elles infligent à leurs proies une mortalité densité-
dépendante, c’est-à-dire que l’intensité de celle-ci doit augmenter plus vite que la densité des
proies. Or, les stratégies de ponte des coccinelles ne permettent pas d’obtenir une telle
réponse. En ne pondant qu'un nombre limité d'œufs dans les jeunes colonies de pucerons qui
ne sont pas encore exploitées par d’autres congénères, les coccinelles fournissent
difficilement une réponse numérique agrégative (Hemptinne et al., 1992). Cette réponse
numérique agrégative serait pourtant nécessaire pour affecter de façon négative une
population de proies ayant un taux de croissance supérieur au taux de croissance ou d'attaque
du prédateur (Beddington et al. 1978). Or, les coccinelles ont un taux de croissance largement
inférieur à celui de leur proie puisque plusieurs générations de pucerons se succèdent au cours
du développement d'une larve de coccinelle (Dixon, 2000). Les coccinelles sont ainsi limitées
dans leur réponse, car les femelles arrêtent de pondre lorsqu’elles détectent des traces
déposées par des larves. Elles ont donc tendance à répartir leurs œufs entre de nombreuses
colonies de pucerons, ce qui est le contraire d’une réponse numérique agrégative (Hemptinne
et al., 1992). Ce type de comportement n’est pas propre aux coccinelles mais à tous les
19
prédateurs de pucerons et, d’une manière générale, à tous les consommateurs de ressources
limitées dans le temps ou dans l’espace (Nufio & Papaj, 2001).
La comparaison entre les temps de développement des pucerons et des coccinelles, montre
que les premiers se développent beaucoup plus vite que les secondes. C’est cette différence de
vitesse de développement qui confère aux pucerons leur caractère de proie éphémère ou
limitée dans le temps. Si on calcule le rapport du temps de génération des prédateurs sur celui
des pucerons, le « Generation Time Ratio » ou GTR, on obtient une valeur supérieure à 1.
Selon une simulation mathématique, les rapports supérieurs à 1 correspondent à des relations
trophiques défavorables à la mise en place d’une régulation top-down (Kindlmann & Dixon,
1999). Dans ces circonstances, il semble peu probable que la régulation des pucerons du pois
dans les cultures associées soit le résultat d’un processus « Top-down » dans lequel les
prédateurs joueraient un rôle prépondérant. Dés lors, pour réguler les pucerons du pois, il
faudrait envisager d’autres possibilités de lutte biologique. La voie « Bottom-up » pourrait-
elle être appliquée? Telle est la question qui sous-tend cette thèse.
Il faut signaler que dans le cas de certaines proies, comme les cochenilles, qui ont une vitesse
de développement comparable à celle des coccinelles prédatrices, le rapport des temps de
génération est proche de 1 voire inférieur à cette valeur et la régulation « Top-down » est
possible. Cela expliquerait une meilleure efficacité de la lutte biologique contre les
cochenilles. La valeur du GTR est ainsi déterminante dans le choix du type de régulation.
V. LE RÔLE DE LA RÉGULATION « BOTTOM -UP» DES HERBIVORES GRÂCES A DES
AGROÉCOSYSTÈMES COMPLXES
a) Une approche générale
La diversité des plantes cultivées et non cultivées dans un champ influence l’abondance des
herbivores parmi lesquels certains sont des ravageurs des cultures (Siemann, 1998 ; Elliot et
al., 1998 ; Honek, 1986 ; Risch et al., 1983 ; Altieri & Letourneau, 1982). Cette diversité
permettrait également une plus grande stabilité de la productivité primaire puisqu’elle
assurerait un plus grand nombre de mécanismes de régulation (Risser, 1986). Cependant,
l’influence de cette diversité sur les ravageurs dépendra de la taille, de l’architecture et de la
productivité des plantes (Tilman et al., 1997 ; Southwood et al., 1979). Les mécanismes
évoqués pour comprendre l’effet de cette diversité des espèces végétales sur l’abondance des
ravageurs font principalement appel à l’hypothèse de la concentration des ressources (Root,
1973) ; celle-ci prévoit une réduction des capacités des herbivores surtout les spécialistes
20
comme les pucerons ou les doryphores à découvrir et utiliser efficacement leurs plantes hôtes
dans les milieux à forte diversité végétale.
Les cultures associées seraient un moyen d’augmenter la diversité végétale au sein des
parcelles et donc de réguler l’abondance des herbivores. Toutefois, les études sur les
ravageurs sont nombreuses et souvent contradictoires du fait de la difficulté d’isoler
expérimentalement l’influence des facteurs écologiques qui peuvent affecter les relations
plantes-insectes (Altieri, 1994 ; Andow, 1991).
La revue bibliographique d’Andow (1991), qui porte sur 209 articles, considérée comme une
référence en la matière, mentionne que 51,9 % des 287 espèces de ravageurs étudiées étaient
moins nombreuses en système de polyculture que de monoculture, alors que seulement 15,3
%, montraient une plus forte densité en polyculture. Cette revue va encore plus loin en faisant
la différence entre les ravageurs monophages et les polyphages qu’on rencontre dans les
divers systèmes étudiés. Ainsi, 60 % appartenaient au groupe des insectes monophages et 28
% au groupe des polyphages. Cette revue montre également que les populations d’ennemis
naturels des ravageurs étaient plus élevées dans 53 % des études en polycultures par rapport
aux monocultures et moins élevées dans seulement 9 % des cas. Les deux hypothèses de Root
(1973) sont évoquées dans ces études, mais on note cependant que l’hypothèse de la
concentration des ressources s’avère être la plus citée.
Une méta-analyse de Tonhasca & Byrne (1994) portant sur 21 publications parues entre 1983
et 1992, apporte des résultats allant dans le même sens : la diversification des cultures est
négativement corrélée à une réduction modérée des densités de population des ravageurs dans
60 à 70 % des publications étudiées, selon les modalités de calcul.
Une autre revue de 150 études faites par Risch et al. (1983), montre que les cultures
pratiquées sur des agroécosystèmes diversifiés présentent moins de ravageurs par rapport aux
monocultures dans 53 % des cas, une augmentation n’étant observée que dans seulement 18
% des études.
La revue de littérature faite par Baliddawa (1985) révèle également que, sur 36 études, 24 ont
montré qu’il y avait moins de ravageurs en polycultures qu’en monocultures. L’explication
avancée serait que les ravageurs ont plus de difficultés à localiser leurs plantes hôtes dans les
21
polycultures. Cette revue montre néanmoins que sur les 12 autres études, la mortalité élevée
des ravageurs est due à l’abondance des ennemis naturels.
D’après Russell (1989) dont le travail a porté sur 18 études, l’on a noté aussi que les taux de
mortalité infligés par les ennemis naturels aux ravageurs sont la plupart du temps plus élevés
dans les polycultures que dans les monocultures. Ces chiffres montrent que les manipulations
de la diversité agissent 1 fois sur 2 sur les ravageurs selon un schéma «Bottom-up» puisque
l’abondance des prédateurs n’est pas affectée. Ce qui justifie l’approche qui consiste à
s’intéresser aux peuplements de plantes qui est privilégiée dans cette thèse.
Ces synthèses et méta-analyses montrent que les effets de diversification végétale des cultures
sur les arthropodes ravageurs et auxiliaires sont très variables. Les raisons de cette variabilité
sont multiples, mais la raison essentielle semblerait être des cas particuliers et spécifiques aux
taxons d’arthropodes qui seraient beaucoup plus nombreux que ce qui est généralement
supposé. Nous pensons que l’identité spécifique et/ou fonctionnelle des plantes et celle des
insectes seraient les paramètres de diversité les plus importants. De plus, les relations
fonctionnelles entre les plantes et les herbivores sont très variables et dépendent par exemple
des tissus ou des organes végétaux dont se nourrissent les herbivores. Par ailleurs, nous
pensons aussi que la variabilité des résultats tiendrait au fait que les valeurs de GTR dans les
différents systèmes analysés ne sont pas toutes les mêmes.
Bien que les effets de la diversification des agro écosystèmes sur le succès des ennemis
naturels demeurent mal compris (Russell, 1989), quatre principales hypothèses sont avancées
pour expliquer la réduction des populations de ravageurs dans les systèmes d’association de
cultures (Altieri, 1994).
1- L’existence d’une forme de résistance spécifique aux agroécosystèmes dans lesquels
les plantes sont intégrées selon les patrons divers : polyculture, cultures associées,
plantes intercalaires, etc. Ce type d’agroécosystème, dont les cultures associées
créeraient un environnement physique, olfactif ou visuel, ainsi qu’un microclimat
défavorable aux phytophages ;
2- L’existence des ennemis naturels dont l’abondance et la diversité seraient plus grandes
dans les systèmes de polyculture que dans ceux de monoculture ;
3- La concentration de la ressource qui voudrait que plus les plantes hôtes sont
distribuées entre les plantes non-hôtes, plus un ravageur aura des difficultés à les
localiser;
22
4- L’apparence de la plante selon la théorie de la défense chimique des plantes (Feeny,
1976). Celles-ci peuvent être classées comme apparentes (prédictibles) ou non
apparentes (imprévisibles) en fonction de leur degré de susceptibilité aux ravageurs.
Malgré de nombreuses études expérimentales qui montrent une corrélation positive entre la
diversification des habitats et la régulation des insectes phytophages, aucun cadre explicatif et
prédictif n’a pu encore être élaboré afin de déterminer quels éléments spécifiques de la
biodiversité devraient être retenus, ajoutés ou éliminés pour augmenter le contrôle naturel des
ravageurs des cultures (Altieri, 1994). En d’autres termes, la corrélation n’est pas synonyme
d’explication.
a) Des exemples de cultures associées avec les légumineuses
Il existe plusieurs exemples de cultures associées avec des légumineuses ayant permis la
réduction des ravageurs ou des maladies (Jensen et al., 2006 ; Corre-Hellou et al., 2005). Le
trèfle associé à une culture de choux (Brassica oleracea L) repousse la mouche du chou
(Finch & Edmonds, 1994). La culture de luzerne (Medicago littoralis Rhode) associée à une
culture de carottes (Daucus carota L) permet d’éloigner la mouche de la carotte- Psila rosae
F- (Rämert & Ekbom, 1996 ; Rämert, 1993). Une culture de fèves maraîchères associées à
l’avoine (Avena sativa L) a permis de réduire la densité et le taux d’attaque de la population
de sitones (Sitona lineatus L) sur feuilles de fèves (Baliddawa, 1985).
Les travaux de Jensen et al. (2006) ont montré que le mélange d’espèces annuelles telles que
des céréales et des légumineuses permettait de réduire l’incidence des maladies tant des
céréales (oïdium) que des légumineuses (anthracnose) en comparaison aux mêmes espèces
cultivées seules. Des recherches analogues menées dans l’ouest de la France, de 2001 à 2003,
ont montré des résultats similaires avec le mélange blé-pois (Corre-Hellou, 2005).
Cependant, certains auteurs, comme Helenius (1989), ont montré que la culture associée de
féveroles et d’avoine avait parfois un effet différent et augmentait le nombre de pucerons
verts dans l’avoine. Ce dernier pose l’hypothèse que cela pourrait être dû à l’augmentation du
taux d’azote dans la céréale cultivée en association.
En effet, il apparaît que les insectes ne sont favorisés que si la diversification végétale a été
spécialement conçue à leur intention. Ces effets varieraient selon les identités des herbivores,
23
des prédateurs et des espèces végétales mises en scène. Il faudrait ainsi étudier chaque
association avant de promouvoir l’utilisation de tels ou tels systèmes de cultures. Toutefois,
les mécanismes expliquant les différents résultats que nous venons d’évoquer n’ont pas été
identifiés.
Il serait donc risqué de généraliser les résultats que nous venons de souligner dans la mesure
où les auteurs ne donnent pas d’indications claires sur les mécanismes en jeu. Il est admis que
les insectes herbivores exploitent des informations olfactives pour localiser leurs plantes
hôtes. En effet, celles-ci libèrent des substances volatiles dans l’air (Karban, 1993 ; David &
Hardie, 1988). L’exploitation de ces informations est fortement dépendante du contexte
général dans lequel ces substances sont émises. Ainsi, la réponse d’insectes herbivores à des
molécules émises par leurs plante-hôtes est influencée par des odeurs produites par d’autres
plantes. Dès lors, nous avons pensé que l’effet bénéfique des cultures associées sur la
protection des plantes pourrait s’expliquer en partie par une perturbation de l’information
olfactive dégagée par les plantes hôtes.
V.I. LES ODEURS DES PLANTES
Les substances volatiles jouent un rôle important dans la localisation et la sélection de l’hôte
par les herbivores (Karban, 1993 ; Karban & Myers, 1989). Les travaux de Nottingham et al.
(1991) montrent que les pucerons Aphis fabae Scopoli, Myzus persicae Sulzer ou encore
Brevicoryne brassicae L, qu’ils soient aptères ou ailés, sont attirés par les odeurs de leurs
plantes hôtes tandis qu’ils sont repoussés pour les odeurs des plantes non-hôtes. Ces dernières
peuvent éventuellement masquer l’attraction des premières.
Contrairement aux travaux de Kennedy et al. (1959) qui indiquent que la plante hôte est
sélectionnée uniquement après l’atterrissage, ceux de Nottingham et al.(1991) montrent bien
que l’olfaction joue un rôle important à distance. Considérant l’hypothèse de la concentration
des ressources de Root (1973), il est permis d’imaginer que les ravageurs auraient d’avantage
de difficultés à localiser des plantes hôtes et les quittent plus rapidement lorsqu’elles sont en
situation de polyculture que de monoculture. Les mécanismes impliqués ne sont pas
précisément identifiés, mais divers stimuli sont mis en jeu.
La diversité des stimuli olfactifs perçus par les phytophages dans une polyculture, peut
masquer ceux que les ravageurs spécialisés utilisent pour localiser leur plante hôte,
24
provoquant alors un ralentissement dans l’installation de ces derniers, voire leur départ
comme l’ont démontré Tahvanainen & Root (1972).
L’exemple d’un hyménoptère parasitoïde cherchant à localiser les œufs de son hôte, un
hyménoptère tenthrèdinède, illustre la subtilité de l’information olfactive et permet d’imaginer
les perturbations provoquées par l’association d’une plante non-hôte à une plante-hôte dans
un champ. Des études d’antenno-électrographie couplées à de la GC-MS ont montré que
l’(E)-β- farnésène était le composé essentiel utilisé par ce parasitoïde. Toutefois, cette
information chimique n’est utilisable que si elle est présente simultanément à un cocktail
complexe de molécules caractéristiques de l’odeur du pin. Dans ce mélange complexe, autant
la concentration absolue du farnésène que les concentrations relatives de tous les composés se
révèlent être des paramètres décisifs (Francis et al., 2004).
Dans les cultures associées, l’attractivité des plantes hôtes serait donc réduite. Ce qui
limiterait le nombre d’insectes pour les plantes associées (Thierry & Viser, 1986). Les
perturbations de l’information olfactive dans une culture associée se combinent probablement
avec d’autres facteurs comme une modification de l’aspect visuel de la culture.
Selon Finch & Collier (2000), les stimuli visuels joueraient aussi un rôle central dans le
processus de reconnaissance des plantes hôtes. Ces stimuli visuels seraient la seconde étape
dans le processus localisation/identification de la plante hôte. Ils proposent donc une nouvelle
hypothèse pour expliquer l’avantage des cultures associées en matière de protection des
cultures : celle des atterrissages « appropriés et non appropriés ». Pour ces auteurs, durant la
recherche de la plante hôte, les insectes atterrissent indifféremment sur les objets verts comme
des feuilles de plantes hôtes (atterrissages appropriés) ou de plantes non hôtes (atterrissages
non appropriés). Lorsqu’ils atterrissent sur les plantes non hôtes, ils doivent repartir. Ils
auraient donc plus de chance de se perdre ou de mourir parce qu’ils rencontrent des ennemis
naturels dans une culture associée que dans une culture pure.
Les cultures associées comme méthodes de limitation des insectes pourraient donc être
comparées en utilisant la méthode de confusion des sexes (mating disruption).
Cette thèse comporte trois chapitres outre une introduction générale et une discussion finale.
Le premier chapitre a pour objectif de vérifier que les pucerons du pois (Acyrthosiphon pisum
Harris) sont moins abondants sur des pois d’hiver cultivés en association avec du blé dur
(Triticum turgidum L. subsp. durum (Desf.) Husn.) que sur des pois en peuplement pur. Les
travaux qui sous-tendent ce chapitre se sont étalés sur quatre années. Durant les deux
25
premières années, on a compté les pucerons du pois dans les parcelles de petite taille (de
l’ordre de 16 m²) installées dans le domaine expérimental de l’INRA à Auzeville. Les deux
années suivantes, les comptages furent réalisés dans les parcelles de 300 m² dans des fermes
réparties dans la région Midi-Pyrénées. Lors de l’analyse de comptage, on a exploité des
données agronomiques relevées par nos collègues afin de rechercher une corrélation entre la
teneur en azote des plantes, d’une part, la couleur des peuplements, et l’abondance des
pucerons d’autre part.
Le deuxième chapitre étudie l’importance que l’odeur des plantes jouerait dans la localisation
des pois par le puceron A. pisum. Des pucerons ailés puis des pucerons aptères ont été placés
dans un olfactomètre où ils pouvaient successivement choisir entre les sources d’air pur et des
sources d’air contaminées par l’odeur émise avec une dizaine de pois et l’odeur dégagée par
un nombre équivalent de plantes de pois et de blé dur.
Le troisième chapitre explore une autre possibilité de régulation «Bottom-up» inspirée de
l’hypothèse formulée par Finch & Collier (2000), notamment le fait que dans une culture
associée, les pucerons aient plus de difficultés à trouver une plante hôte car ils perdent
beaucoup de temps sur des plantes non-hôtes. Ces pertes de temps nécessiteraient de plus
longues recherches qui affecteraient négativement l’aptitude phénotypique des pucerons. Pour
tester cette hypothèse, nous avons en premier lieu suivi la manière dont les pucerons vivaient
dans un groupe de pois cultivés seuls ou en mélange avec du blé dur. Nous avons mesuré le
temps pendant lequel ils se nourrissaient ou se déplaçaient, les distances parcourues. Nous
avons cherché à savoir si les pucerons changeaient fréquemment de plantes-hôtes.
Dans une seconde phase de ce chapitre, nous avons réalisé une table de survie de pucerons
vivant sur des pois cultivés seuls ou sur des pois cultivés en association avec du blé dur. Nous
avons ainsi pu comparer la mortalité et la fertilité des deux cohortes de pucerons.
La discussion finale intègre les différents résultats que nous avons obtenus. Elle permet de se
faire une opinion sur la part que prennent les facteurs de régulation « Bottom-up », telles que
l’odeur émise par les plantes et la structure du peuplement, sur la régulation de l’abondance
des pucerons du pois ou dans des cultures associées de pois d’hiver et de blé dur.
26
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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Chapitre 1 : Y aurait-il une résistance associative de la culture associée de blé dur-pois d’hiver face au puceron du pois
Acyrthosiphon pisum Harris?
Ce chapitre 1 a fait l’objet d’une soummission d’un article dans la Revue Crop Protection.
RÉSUMÉ :
Il est connu que la diversité des plantes promeut la régulation des ravageurs, mais les
mécanismes écologiques prenant en compte ce phénomène sont toujours en discussion. Les
informations sur l’écologie des pucerons et leurs ennemis naturels indiquent que les facteurs
régulateurs ascendants « Bottom-up » plutôt que des facteurs régulateurs descendants « Top-
down » seraient à l’origine du contrôle des pucerons.
Dans ce travail, nous comparons la résistance de la culture du pois d’hiver face au puceron
vert du pois Acyrthosiphon pisum Harris et discutons du rôle des facteurs ascendants ; « le
spectre de reflectance des peuplements » et la teneur en azote des plantes sur l’abondance des
herbivores dans les deux agrosystèmes.
Nos résultats indiquent une forte résistance de la culture associée blé dur-pois d’hiver aux
pucerons du pois. Des stimuli visuels (longueurs d’ondes reflétées des plantes) ne semblent
pas être à l’origine de cette résistance. La teneur en azote pourrait en partie expliquer les
différences observées dans l’abondance des herbivores, mais nos données n’étaient pas
probablement assez précises pour donner une réponse définitive.
Mots clés : Culture associée, pucerons, résistance associative, ascendance, spectre de
reflectance
34
Is there an associational resistance of winter pea - durum wheat intercrops towards Acyrthosiphon pisum Harris?
Abanda, Raphael Ndzanaa,b, Magro, Alexandraa,b, Bedoussac, Laurentc,d, Justes, Ericd &
Hemptinne, Jean-Louisa,b a Université de Toulouse – ENFA, UMR CNRS 5174 EDB (Laboratoire Evolution et Diversité Biologique), 2 rt de Narbonne, 31320 Castanet-Tolosan, France. b CNRS, UMR 5174 EDB (Laboratoire Evolution et Diversité Biologique), 31062 Toulouse, France. c Université de Toulouse – ENFA, UMR INRA-INPT/ENSAT 1248 AGIR (Agrosystèmes et agricultures, Gestion des ressources, Innovations & Ruralités), 2 rt de Narbonne, 31320 Castanet-Tolosan, France d INRA, UMR INRA-INPT/ENSAT 1248 AGIR (Laboratoire Agrosystèmes et agricultures, Gestion des ressources, Innovations & Ruralités), Auzeville, BP 52627, 31320 Castanet-Tolosan, France [email protected] [email protected] [email protected] [email protected] [email protected]
ABSTRACT:
Plant diversity is known to promote pest regulation but the ecological mechanisms accounting
for this phenomenon are still under discussion. Information on the ecology of aphids and their
natural enemies indicates that bottom-up rather than top-down regulating factors should be at
the origin of aphid control.
In this work we compare the resistance of durum wheat-winter pea intercrops and pure stands
of winter pea towards the pea aphid Acyrthosiphon pisum Harris and discuss the role of the
bottom-up factors “reflectance spectra of the stands” and “plant nitrogen content” on the
abundance of the herbivores in the two agricultural systems.
Our results indicate a strong resistance of intercrop of durum wheat and winter peas to the pea
aphids. Visual stimuli (plant-reflected wavelengths) do not seem to be at the origin of this
resistance. Nitrogen content could partly explain the observed differences in abundance but
our data was probably not accurate enough to give a definitive answer.
Keywords: Intercrops, aphids, associational resistance, bottom-up control, reflectance
spectra, nitrogen content.
35
1.1. INTRODUCTION
The simplification and intensification of cropping management in Western Europe in the last
60 years allowed a better understanding and modelling of the relationships between the
atmosphere, the soil and populations of cultivated plants. This led to a remarkable increase in
food production. However, this was not without consequences to the environment: several
authors have pointed out that changes in landscapes use and agricultural practices have
pervasive effects on biodiversity, soil erosion, reduction of soil fertility, pollution, and the
appearance of new pests, (e.g. Benton et al., 2003; Flowerdew 1997; Matson et al, 1997;
Pimentel et al., 1995; Stoate et al., 2001; Tilman et al., 2001; Vandermeer et al., 1998).
Nowadays, it has become widely accepted that ecologically based management strategies
must be implemented to increase the sustainability of agricultural production (Matson et al.,
1997). Crop diversification, through the building of a complex network of ecological
interactions, is one of those strategies (Malézieux et al., 2008; Lin, 2011).
Intercropping (IC), the simultaneous growing of two or more species in the same field for a
significant period but without necessarily being sown and harvested at the same time (Willey,
1979), could be one way to increase the number of species cultivated (Malézieux et al., 2008,
Vandermeer et al., 1998). Intercropping is known to have higher grain productivity than pure
stands (Hauggaard-Nielsen et al., 2006). Niche complementarity and facilitation are common
explanations for this higher yield. Interspecific differences in nutriments or environmental
requirements allow combinations of certain species to complementarily use resources in space
and /or in time (Bedoussac & Justes, 2010a). Eventually they positively interact and that
improves the capture of the resources (Hopper et al., 2005; Mommer et al., 2010; Tilman,
2001, 1999). Plant diversity is also known to promote pest regulation (see Letourneau et al.,
2011 and Risch et al., 1983 for reviews). However, the ecological mechanisms accounting for
the differences in pest abundance between more or less diverse systems are still under
discussion.
Root (1973) offered two hypotheses to explain reduced abundance of herbivores in more
diverse habitats. The resource concentration hypothesis, which is a bottom-up or resource-
based perspective, predicts that herbivorous are more likely to find and remain on host plants
that are growing in pure stands than on polycultures. The enemies hypothesis, on a top-down
or natural enemy-based perspective, holds that there is a positive correlation between plant
36
species richness and natural enemy abundance with the consequent reduction of herbivore
populations at lower levels in more diverse vegetation stands. The two hypotheses are not
mutually exclusive (Letourneau, 1987). However, the empirical studies relating plant diversity
and population density of herbivores are often contradictory (review in Altieri & Nicholls,
2004). That is, ever since “the world is green” by Hairston et al. (1960) and the opposite view
“the world is prickly” proposed by Murdoch (1966), the question of whether the control of
herbivores is driven by upper or lower trophic levels has received much attention but not a
straightforward answer. The reasons preventing the emergence of a synthesis of the relative
roles of top-down and bottom-up forces in plant–insect herbivore–natural enemy systems
appear to be multiple and have been discussed by Walker & Jones (2001); the absence of
appropriate empirical data is one of those reasons.
Aphids (Hemiptera: Aphididae) are the most important agricultural insect pests of temperate
regions (Hill, 1987; Minks & Harrewijn, 1989). They are potentially capable of becoming
very abundant over large areas (Dixon, 2005) and, as a consequence, there has been great
concern over regulating their abundance. However, there are two contrasting views of the
relative roles of top-down and bottom-up forces regulating aphids’ abundance.
Classical biological control programmes against aphids have been common. Nonetheless,
their results are far from being extraordinary. For instance, there was only one successful
introduction of ladybird beetles to control aphids (Coleoptera, Coccinellidae) out of 155
attempts (Dixon, 2000). Ladybirds but also hoverflies and chrysopids are unable to regulate
aphid abundance because their developmental time from egg to adult is nearly as long as the
lifespan of aphid colonies (Kindlmann & Dixon, 1999). Strategy of prey exploitation that
minimizes the risk of starvation before completing development is clearly advantageous in
this context. Evolution favours females that lay few eggs early in the development of their
prey colonies, and avoid colonies that are already exploited, as the presence of other predators
increases the risk of resource collapse (Hemptinne et al., 1992). Ladybirds and chrysopids use
chemical cues (Doumbia et al., 1998; Magro et al., 2010; Ružička, 1997) and hoverflies
visual cues (Kan, 1989, 1988a,b) to select suitable colonies to lay eggs. Therefore, the
behaviour of predators is shaped by the necessity to avoid prey scarcity at the end of larval
development rather than by response to high prey density. Accordingly, predators do not
develop strong numerical response to prey density (Hemptinne et al., 1992), and top-down
regulation of aphids is unlikely (Dixon, 2005). The same reasoning applies to aphid parasitoid
37
wasps (Dixon, 2005; Hemptinne, 2003). That is, bottom-up rather than top-down regulation
should shape the population dynamics of aphids (Dixon, 2005).
In Southern France, particular research attention has been paid to cultivation of durum wheat
(Triticum turgidum L.) in association with winter pea (Pisum sativum L.), in low N input
systems including organic farming. Beside the fact that the complementary use of N sources
between cereals and legumes can be of particular interest in low-N-input cropping systems
(Bedoussac & Justes, 2010b), several examples of grass-leguminous intercrops show a
reduction in pest and disease attacks when compared to pure stands (e.g. Baliddawa, 1985;
Corre-Hellou et al., 2005; Rämert & Ekbom, 1996; Rämert et al., 2002). Indeed, preliminary
observations seem to indicate that the pea aphid, Acyrthosiphon pisum (Harris) (Aphididae:
Hemiptera), an important pest in organic farming systems, is less abundant in the durum
wheat-winter pea intercrop than in pure stands of winter pea (Bedoussac, 2009).
In the present work, our objective is to gather empirical data i) to confirm the increased
resistance of the durum wheat-winter pea intercrops towards the pea aphid, compared with
pure stands of winter pea and ii) to discuss the role of the bottom-up factors “reflectance
spectra of the stands” and “plant nitrogen content” on the abundance of the herbivores in the
two agricultural systems. These two factors were chosen because light quality plays an
important role for aphids in the location of and landing on host-plants and nitrogen is often a
factor limiting herbivore growth rate.
1.2. MATERIAL AND METHODS
1.2.1- The abundance of A. pisum in durum wheat-winter pea intercrop and in pure stands of winter pea.
Field studies were carried out in the Toulouse region (South-West of France) at two different
scales: i) in 2007 and 2008, aphids were counted in respectively 4 and 6 small plots (11 m²
each) located on fields of the INRA (Institut National de la Recherche Agronomique)
experimental station (Auzeville, 43°31′N, 1°30′E) and ii) in 2009 and 2010 they were counted
on 6 large plots (200 m² each), located on three different farms around Toulouse (2 plots per
farm). In each year and locality an equal number of replicates of durum wheat-winter pea
intercrops and sole crops of winter pea were compared. Plant densities in each plot as well as
treatments are described in Table 1.
38
Table 1- Plant densities (per m2) and pesticide treatments in intercrops (IC) of winter pea (Wp) and durum wheat (Dw) and sole crops (SC) of winter pea, in 2007, 2008 (small plots) and in 2009, 2010 (large plots). F= seed treated with a fungicide; H= herbicide applied 2-4 days after sowing.
Year / Site
Treatment
IC SC
Wp / Dw Wp
Small plots
2007 F & H 27 / 93 56
2008 H 59 / 109 59
Large plots
2009
Farm A Organic 51 / 169 97
Farm B Organic 102 / 83 96
Farm C Organic 118 / 134 117
2010
Farm C Organic 32 / 168 70
Farm D Organic 85 / 246 102
Farm E Organic 67 / 175 62
Counting started as soon as aphids were detected in the plots, generally in March. They went
on once a week until aphids disappeared, generally in June. For each plot, ten or twenty
plants, respectively in small and large plots, were randomly chosen. Each plant was
individually shaken over a white plastic box of 348 cm² and the number of collected aphids
was recorded.
The total number of aphids collected each week in each plot was analysed by general linear
mixed models with a Poisson error using package lme4 in R (R Development Core Team,
2010). In 2007 and 2008, the fixed factor was “Crop” (pure stand of peas or intercrop) and the
random factor was “Time” to account for the fact that aphids were counted in the same plots
every week. In 2009 and 2010, the fixed factor was “Crop” (pure stand of peas or intercrop)
and the random factor was “Time nested in Locations”.
39
1.2.2- The influence of two bottom-up factors on aphid abundance: spectral analyses of stands and nitrogen content of plants
1.2.2.1- Spectral analyses of stands of durum wheat-winter pea intercrop and pure stand of winter pea
In 2007 and 2008, aerial pictures were taken throughout the plants growth period to determine
the soil fraction covered by plants and the colour balance of the crops. Pictures were not
necessarily taken over the plots where aphids were counted (see 2.1.) but in similar ones.
Among the pictures of both types of stands, we choose those from the end of March, around
the beginning of aphid colonisation of peas. Pictures were taken horizontally with a numeric
camera (Nikon Coolpix 3100) 1 m above soil surface in the middle of plots. Images were
automatically analysed using ‘Measure RGB’ Plugin, from ImageJ software (version 1.44p) to
determine the RGB spectra (mean values of Red, Green and Blue, where each colour coded
from 0 to 255).
1.2.2.2- Nitrogen content of winter pea shoots grown in stands of durum wheat-winter pea intercrop and in pure stands of winter pea.
We analysed the nitrogen content of pea aerial parts to see if intercropped peas differed from
sole cropped peas in their nitrogen content in such a way that could explain differences in
aphid abundance.
Measures of total N in pea shoots were made from March to July, in 2009 and 2010, for each
plot mentioned in Table 1. For each date there were 3 replicates per plot. Each replicate
corresponded to a 0.5 m² of crop surface, randomly selected. All pea plants in this area were
cut just above soil surface, dried at 80°C for 48 h and then weighed. The concentration of N
content was then determined in sub-samples of finely ground plant material, following the
method described in Bedoussac & Justes (2010b). The nitrogen concentration was analysed
using a general linear mixed model with “Crop” as a fixed factor and “Month nested in Sites”
as random factors. Package lme4 in R (R Development Core Team, 2010) was used.
40
1.3. RESULTS
1.3.1- The abundance of A. pisum in durum wheat-winter pea intercrop and in pure stands of winter pea.
A. pisum was present in all the plots and it was the only aphid present. Pure stands of winter
pea were always significantly more infested than intercrop stands (P= 0.000 in each case;
Table 2).
Table 2- The mean, standard deviation (sd) and maximum (max) number of aphids per plant
in intercrops (IC) of winter pea and durum wheat and sole crops (SC) of winter pea, for plots
studied in 2007, 2008 (small plots), and in 2009, 2010 (large plots).
Year / Site
IC Sole crop
Mean (sd) Max Mean (sd) Max
Small plots
2007 2.8 (3.3) 10.1 6.4 (6.6) 24.6
2008 2.2 (2.7) 9.1 4.5 (6.2) 19.5
Large plots
2009
Farm A 0.9 (1.6) 4.7 1.4 (2.4) 6.9
Farm B 2.5 (4.2) 11.8 6.3 (9.2) 27.5
Farm C 1.7 (2.0) 5.2 3.0 (3.6) 8.4
2010
Farm C 1.1 (1.2) 2.5 5.8 (8.5) 22.7
Farm D 0.5 (0.7) 2.0 10.1 (14.1) 34.7
Farm E 1.2 (1.6) 4.1 8.5 (12.8) 28.4
41
1.3.2- The influence of two bottom-up factors on aphid abundance: spectral analyses of stands and nitrogen content of plants
1.3.2.1- Spectral analyses of stands of durum wheat-winter pea intercrop and pure stands of winter pea.
In both kinds of crop, the three reflectance bands present very close values but the green band
is always the most important one, followed by the red and finally the bleu bands (Table 3).
Table 3- The mean values of red, green and blue spectrum in pictures of stands of durum wheat-winter pea intercrop and pure stands of winter pea. N= number of analysed images; Sd= standard deviation.
N Red Green Bleu
2007
IC 2 130 (Sd 6) 144 (Sd 2) 101 (Sd 2)
SC 3 133 (Sd 6) 146 (Sd 8) 112 (Sd 17)
2008
IC 8 137 (Sd 22) 164 (Sd 23) 105 (Sd 22)
SC 6 134 (Sd 15) 154 (Sd 15) 96 (Sd 13)
In 2007 the values of the three reflectance bands are more important in sole crops than in
intercrops, contrary to what happens in 2008. This might be related to the fact that in 2007 the
intercrop was of the substitutive type while in 2008 it was of the additive type (Table 1). That
is, although the overall density (and therefore biomass) of plants is similar in both years for
the sole crops, it is much more important in 2008 in what intercrops are concerned.
1.3.2.2-- Nitrogen content of winter pea shoots grown in stands of durum wheat-winter pea intercrop and in pure stands of winter pea.
The nitrogen content of pea aerials parts displays the same trends in both years. Tissues of
peas contain about 4% of N early in the season (March - April), and this value falls to 2% in
May and June. The factor “Month” respectively represents 84.9 % and 91.9% of the variance
in 2009 and 2010. By comparison, “Site” effect is much weaker with respectively 12.2% and
1.9% of the variance in 2009 and 2010. Peas in the sole crops are slightly richer in N than
peas in the intercrop in 2009 and 2010 but these differences are not significant (2009:
NIC=2.61; NSC=2.64, t = 0.408, P<0.05; 2010: NIC=2.68; NSC=2.75, t = 1.079, P<0.05).
42
1.4. DISCUSSION AND CONCLUSIONS
Plant diversity is known to promote pest regulation (Letourneau et al., 2011). In what
concerns aphids in particular, this has been shown by for Aphis citricola van der Goot (Song
et al., 2011), Aphis gossypii Glover (Parajulee & Slosser, 1999; Showler & Greenberg, 2003)
or Brevicoryne brassicae (L.) (Bukovinszky et al., 2004). Our results establish for the first
time that intercropping durum wheat with winter pea significantly decreases A. pisum
abundance compared to winter pea monocultures. This is consistent across scale, year, locality
or type of intercrop (additive or substitutive).
Knowledge on the ecology of aphids and aphidophagous insects points out that bottom-up
rather than top-down factors should be at the origin of the regulation of these herbivores.
Theoretically, top-down regulation is possible if several species of predators attack aphids and
if the intensity of intraspecific competition is stronger than interspecific competition
(Northfield et al., 2010). As this possibility has never been validated in the field, our
hypothesis is therefore that intercrops of durum wheat - winter pea should display an
associational resistance (Tahvanainen & Root, 1972) towards A. pisum. We thus investigated
two bottom-up factors - spectral reflectance of stands and nitrogen content of pea plants– to
evaluate their contribution to the control of A. pisum on peas intercropped with wheat when
compared to pea sole crops.
Plants are first colonised by winged aphids. They are weak flyers but they are able to control
flight speed and direction when in the vicinity of vegetation (Dixon, 1998; Powell et al.,
2006). Selection of plants for landing is in part the result of the response to plant-reflected
wavelengths. Aphid eyes contain three types of colour receptors, each sensitive to the UV,
blue, or green spectra but in terms of behavioural responses Myzus persicae (Sulzer), the best
studied species concerning aphids vision, only positively reacts to green or yellow surfaces
and ignores surfaces reflecting red or blue light (Chittka & Doring, 2007). We tested the
hypothesis that intercropping durum wheat with winter pea masks the visual stimuli
emanating from the A. pisum host plants, leading to a lower colonization of the intercropped
peas. Yet, the spectral analyses of the two kinds of stands do not show any important
differences in the red, green or blue reflectance bands. We are aware that our method might
not be accurate enough to pinpoint a difference in reflectance. We therefore recommend that it
should be completed by e.g. a hyperspectral images analysis. However, if our results are
confirmed, this might indicate that the landing response of A. pisum is preferentially based on
43
volatiles emanating from plants, as it has been shown for other aphid species (Powell et al.,
2006). The hypothesis that those olfactory stimuli would be masked by the wheat non-host
odors still needs to be proved.
Aphids feed on the phloem sap of plants, which is rich in sugars and relatively poor in amino
acids (Dixon, 1998). Nitrogen content was shown to constrain the survivorship, rate of growth
and fecundity of aphids in general (Dinant et al., 2010; Nowak & Komor, 2010) and of the
pea aphid in particular, at least for the first two parameters (Abisgold et al., 1994).
Accordingly, aphids identify and choose hosts of higher nutritional quality (Nowak & Komor,
2010).
In intercrops of cereals and legumes, the cereal is a superior competitor for soil inorganic N,
through a faster and deeper root growth and increased demand for mineral N. As a result, the
intercropped legume has to increase symbiotic N2 fixation to satisfy its N requirements
(Bedoussac & Justes, 2010b; Naudin et al., 2010). Could this difference in the use of N by
peas, when intercropped with wheat compared to sole crops, have an impact on the N
available for aphids in peas?
Our results show that indeed peas in sole crops are richer in N than peas intercropped with
durum wheat, but this difference is not significant. However, we measured shoot richness in N
and it is possible that the slight differences observed here might translate into larger
differences in phloem nutrient composition. Other than quantitative differences, aphid
performance is known to be related to changes in the amino acid composition of the phloem
(Karley et al., 2002) and Parsons & Baker (1996) state that different modes of nitrogen
nutrition, which do alter the rate of nitrogen fixation, influence the nitrogen content of phloem
sap.
In conclusion, our work indicates a strong resistance of intercrop of durum wheat and winter
peas to the pea aphids. Visual stimuli (plant-reflected wavelengths) do not seem to be at the
origin of this resistance. Nitrogen content could contribute to explain the observed differences
in abundance but our data was probably not accurate enough to give a definitive answer.
ACKNOWLEDGEMENTS
The authors would like to thank J-F. Garrigues and P. Rouet for technical support. This work was done under the projects CASDAR 8058, ANR SYSTERRA PERFCOM and PSDR3 CITODAB. The laboratory “Evolution et Diversité Biologique” (UMR CNRS 5174) is part of the "Laboratoire d'Excellence” (LABEX) entitled TULIP (ANR -10-LABX-41).
44
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49
Chapitre 2 : Rôle des odeurs émises par les plantes dans la recherche
d’hôtes par les pucerons du pois (Acyrthosiphon pisum Harris)
RÉSUMÉ :
Le puceron du pois Acyrthosiphon pisum (Harris) attaque de nombreuses légumineuses, parmi
lesquelles le petit pois (Pisum sativum L). Pour coloniser sa plante hôte, A. pisum doit la
rechercher, puis la localiser. Dans un environnement marqué par la présence des autres
plantes, comme dans le cas des cultures associées, nous nous posons la question de savoir ce
qui détermine le choix définitif du puceron pour localiser et exploiter sa plante hôte. Le
présent travail se propose aussi d’examiner si des substances volatiles émises par la plante
hôte guident les pucerons.
Nous avons, au cours de ce travail, testé l’incidence de l’odeur produite par deux types de
cultures (monoculture de pois et une culture associée de blé dur au pois) sur le choix effectué
par les pucerons. Le choix des pucerons n’a pas été guidé par les odeurs des plantes.
Cependant, on note une tendance des pucerons à se diriger vers la source d’odeur émanant
d’une monoculture de pois. Nous avons aussi observé que la forme du puceron avait un effet
significatif sur le choix de la source d’odeur. C’est le cas des pucerons aptères qui vont
beaucoup plus vers la source d’odeur. Les quantités de plantes émettant les substances
volatiles n’ont pas eu un effet significatif sur le choix des pucerons.
Mots clés : Acyrthosiphon pisum Harris, source d’odeur, monoculture, culture associée
50
2.1. INTRODUCTION
Le développement, le vieillissement ou les attaques des herbivores modifient la valeur
nutritive et l’appétence des végétaux vis-à-vis des herbivores (Welter, 1989). Ces altérations
emmènent les herbivores à se déplacer à la recherche de sources de nourriture de qualité
optimale (Awmack & Leather, 2002 ; Karban & Myers, 1989).
Localiser et coloniser de nouvelles plantes dans des milieux où la diversité végétale est
souvent importante constitue un défi pour les herbivores (Lombaert et al., 2006). Les
individus qui ne trouvent pas suffisamment vite des plantes hôtes adéquates risquent de
mourir avant d’avoir pu réaliser leur fécondité potentielle. Plus le temps de recherche est long,
plus les herbivores sont exposés aux rencontres avec des ennemis potentiels et plus les risques
de mortalité augmentent. La localisation des plantes hôtes est donc une contrainte qui pèse
probablement assez fortement sur l’aptitude phénotypique des herbivores (Picket et al., 1992 ;
Irwin et al., 2007). Il n’est donc pas étonnant que la sélection naturelle ait favorisé les
individus ayant la capacité à utiliser des informations qui augmentent la probabilité de trouver
ces plantes. Les molécules volatiles qu’émettent la plupart des végétaux font patie des
informations prépondérantes, à côté de la vision qu’utilisent les herbivores.
Le défi que nous venons d’évoquer est très important pour la compréhension de la vie des
pucerons. En effet, ceux-ci ont une durée de vie très courte, de l’ordre de 20 à 30 jours en
moyenne (Dixon, 1997 ; Dixon, 1992). Cette rapidité de développement tient au télescopage
des générations, une stratégie qui est possible parce que les pucerons se reproduisent par
parthénogenèse pendant le printemps et l’été et qu’ils sont vivipares. Ce télescopage de
génération signifie qu’une femelle contient dans ses ovaires des pucerons femelles qui
contiennent- elles mêmes dans leurs ovaires des petites larves fonctionnelles. Ce télescopage
des générations, outre qu’il permet de réduire le temps de développement, contribue à
l’augmentation rapide des populations de pucerons, influençant ainsi l’ampleur de leur impact
sur les plantes hôtes qu’ils exploitent.
Il faut relever que les pucerons se nourrissent de la sève élaborée des plantes (Sandström et
al., 2000 ; Mattson, 1980). Ils insèrent en effet leur stylet entre les cellules et celui-ci pénètre
dans les canaux du phloème pour atteindre leur nourriture (Douglas, 2003). Les plantes
51
réagissent aux ponctions de sève en obstruant les canaux du phloème exploités par les
pucerons (Will & van Bel, 2006 ; Douglas, 2003). Ces conditions de défense forcent les
pucerons à partir fréquemment à la recherche d’autres parties de la plante hôte, voire d’autres
plantes. Les déplacements des pucerons ne sont donc pas seulement provoqués par les
détériorations de la plante. Avant d’arriver à ce point, l’augmentation du nombre de
consommateurs en un endroit donné de la plante, suite à la reproduction des colonisateurs,
augmente la compétition intra-spécifique et attire des ennemis naturels. En chassant, ces
derniers émettent des informations que perçoivent les pucerons. En réponse, on observe une
production accélérée d’individus ailés (Dixon & Agarwala, 1999 ; Weisser et al., 1999) .
En résumé, ces déplacements ont lieu non seulement lorsque les ressources alimentaires
diminuent, mais aussi lorsqu’il existe une forte compétition entre les consommateurs ou en
présence d’ennemis naturels. Les insectes en consommant les différentes parties d’une plante
influencent la croissance ou la reproduction de celle-ci et exercent ainsi de fortes pressions de
sélection sur elle. En réponse à ces pressions, la sélection naturelle a favorisé les génotypes
des végétaux possédant des moyens de défense constitutifs ou inductibles contre les
herbivores.
Confrontés à la nécessité de se déplacer, les pucerons ont fait évolué la capacité de présenter
comme d’autres herbivores, à l’exemple des criquets, diverses formes au cours de leur vie : ils
sont aptères ou ailés (Braendle et al., 2006). L’investissement apporté sur les deux formes est
différent : la forme ailée qui permet, par exemple, de faire rapidement les déplacements, se
distingue par le développement important des muscles thoraciques. Ce développement se fait
au détriment de l’investissement dans la reproduction (Lombaert et al., 2006 ; Hodgson,
1991). Les pucerons doivent donc faire des compromis dans l’allocation de leurs ressources
au soma et aux gonades (Mattson, 1980).
Les plantes émettent des substances volatiles au cours de leur vie. Au départ, ces odeurs
n’avaient probablement pas de fonctions particulières. Cependant, quelques insectes en ont
tiré profit et développé l’aptitude à les percevoir et à les utiliser. Ce qui était non intentionnel
fini par devenir un signal pour les herbivores. Au fil du temps, cette communication chimique
est devenue de plus en plus complexe. Par exemple, les substances volatiles des plantes sont
devenues des signaux susceptibles d’informer d’autres plantes des risques d’attaques par les
herbivores. En effet, une plante blessée par un herbivore qui la mâche ou la perfore émet une
52
signature distincte d’une plante saine (Turlings et al., 1990 ; Dicke & Sabelis, 1988). Cette
différence est mise à profit par divers ennemis naturels à la recherche des proies. On observe
également que certaines plantes peuvent aussi se mettre à synthétiser des toxines, histoire
d’empoisonner leurs éventuels assaillants dans leur développement (Paré & Tumlinson,
1999). Les herbivores, à leur tour, ont acquis et développé des capacités leur permettant
d’utiliser ces odeurs pour retrouver les plantes qu’ils consomment. Des capacités qui ne sont
pas sans conséquence pour le développement des plantes.
Les plantes, à cause de ces substances volatiles, sont susceptibles soit de recevoir les
herbivores qui vont les consommer, soit les ennemis naturels qui pourront éliminer les
herbivores (Karban et al., 2000 ; Vet & Dicke, 1992). Les herbivores vont ainsi se servir de
ces odeurs pour localiser leurs plantes hôtes. Dès lors qu’ils attaquent une plante, les
herbivores peuvent aussi communiquer avec leurs congénères de la présence d’une plante
hôte.
Les pucerons peuvent détecter les odeurs émises par les plantes grâce à leurs antennes (Storer
et al., 1996). De plus, les substances volatiles émises par les plantes peuvent influencer les
processus d’acceptation des plantes hôtes par les aphides (Pickett et al., 1992). Les travaux de
Webster et al (2008a, 2008b) ont permis d’identifier 16 molécules émises par la fève Vicia
faba var Sutton dwarf utilisée par le puceron noir des fèves (A. fabae Scopoli) pour trouver
cette plante hôte. En agriculture à bas niveau d’intrants ou en agriculture biologique, la lutte
biologique est l’option préférentielle pour réguler l’abondance des herbivores. Les ennemis
naturels des phytophages, tels que les coccinelles ou divers parasitoïdes, sont souvent perçus
comme capables de réguler l’abondance des pucerons (Dixon et al., 1996). Or, une analyse
des stratégies de vie de ces organismes indique qu’ils en sont rarement capables.
Pour réguler rapidement l’abondance de leurs proies, il faudrait que les ennemis naturels
infligent à ces proies une mortalité qui soit dépendante de leur densité (Murdoch, 1994;
Huntly, 1991). Cela signifie que la mortalité doit augmenter plus rapidement que l’abondance
des proies. Une telle mortalité est théoriquement possible si un nombre suffisant de prédateurs
ou de parasitoïdes converge vers ces proies (ce qu’on appelle la réponse numérique) et que la
consommation de chaque individu (sa réponse fonctionnelle) est également positivement
corrélée à l’abondance des proies. Or, il a été démontré que les ennemis naturels des pucerons
sont très sensibles aux risques de compétition, de cannibalisme ou de parasitisme. L’incidence
de ces risques sur l’aptitude phénotypique des ennemis naturels est telle qu’on observe
53
l’évolution de stratégies d’exploitation des pucerons qui réduisent ces risques. De telles
stratégies ont été mises en évidence chez les parasitoïdes et plusieurs espèces de prédateurs
(Martini et al., 2009 ; Muratori et al., 2008). Le cas des Coccinellidae, particulièrement étudié
au laboratoire, illustre ces adaptations. Hemptinne et al.(1992) ont montré que la réponse
numérique des coccinelles était très faible car les femelles évitent de pondre dans les colonies
de pucerons qui sont déjà exploitées. Elles perçoivent des informations chimiques, un cocktail
d’hydrobcarbures que les larves de coccinelles laissent sur les plantes en se déplaçant. Ainsi,
les coccinelles ont tendance à répartir leurs œufs entre les colonies de pucerons plutôt que de
les rassembler. En conséquence, les chances d’une régulation de la démographie des pucerons
par leurs ennemis naturels (régulation « Top-down » dans le réseau trophique) sont très
réduites. Northfield et al.(2010) estiment que cette régulation serait toutefois possible si
plusieurs cohortes d’ennemis naturels appartenant à des espèces différentes additionnent leur
capacité à tuer des pucerons. Ils notent cependant, que cela ne peut fonctionner que si ces
ennemis naturels sont moins sensibles à la compétition intraspécifique qu’à la compétition
interspécifique.
Des expériences réalisées en cage, au cours desquelles de telles cohortes étaient assemblées
par les chercheurs confirment la suggestion de Northfield et al. (2010). Toutefois, on ne sait
pas si de telles cohortes se regroupent spontanément dans les champs.
Dans ce chapitre, nous avons choisi d’explorer les mécanismes « Bottom-up » de contrôle des
populations de pucerons. Cela signifie que la régulation de l’abondance des pucerons se ferait
sur la base des réseaux trophiques (Denno et al., 2002 ; Menge, 1992). L’une des voix
possibles consiste à modifier les signaux émis par les plantes-hôtes afin de perturber la
recherche de ces plantes par les pucerons. Plusieurs voies de recherche sont envisageables. On
pourrait par exemple envisager de s’intéresser à des variétés de pois qui émettraient peu de
substances volatiles. Les essais de culture associant du blé dur et du pois d’hiver implantés à
la station de recherche de l’INRA d’Auzeville ouvrent une autre piste.
En effet, ces essais en champ nous ont montré (cf Chapitre 1, Ndzana et al., soumis) que les
pois cultivés en association avec du blé d’hiver étaient significativement moins attaqués par
les pucerons du pois (Acyrthosiphon pisum Harris) que des pois cultivés en peuplements purs.
Comme l’action des ennemis naturels est improbable comme mécanisme expliquant ce
résultat, nous avons choisi d’explorer une autre piste : la perturbation du signal olfactif émis
par le pois par les odeurs du blé d’hiver. Nous avons donc réalisé des expériences de
54
laboratoire à l’aide d’un olfactomètre afin de savoir si, premièrement, les pucerons du pois
sont attirés par les substances volatiles émises par le pois et si, deuxièmement, un mélange
d’odeur de pois et de blé dur les empêche de retrouver leur plante hôte. Dans ce cas, on
s’attend à ce que les pucerons se dirigent moins fréquemment vers la source de cette odeur
mixte qu’ils ne le font vers une source d’odeur provenant seulement du pois.
2.2. QUALITÉ DE LA PLANTE HÔTE
La culture d’une plante en association avec une autre s’accompagne inévitablement d’une
modification (amélioration ou détérioration) de la qualité d’une ou plusieurs plantes en
présence, ce qui peut gêner, par effet confondant, l’évaluation des seuls effets de la
diversification végétale sur les ravageurs (Hooks & Johnson, 2003 ; Theunissen et al., 1995).
L’augmentation de la fertilisation minérale, essentiellement azotée, des plantes cultivées
provoque des effets secondaires selon les types de ravageurs suceurs de sève et une réduction
des broyeurs (Altieri & Nichols, 2003 ; Letourneau, 1988). L’augmentation de la teneur en
azote s’accompagne dans la plante de celles des composés secondaires, souvent des
inhibiteurs de protéines de digestion, qui peuvent affecter l’appétibilité et/ou la digestibilité de
la plante, et qui s’accumulent dans les vacuoles des cellules. Ils ne sont pas ainsi consommés
par les suceurs de sève dont les stylets s’insèrent dans les tissus végétaux jusqu’au phloème en
évitant ces vacuoles, mais le sont pour les broyeurs (Mattson, 1980). Ces phénomènes sont
respectivement à l’origine, d’une part, de l’augmentation des densités de population de
ravageurs de certaines espèces végétales en polyculture, comme le relate Risch (1981) en
cultures tropicales, et Helenius (1989) pour un mélange avoine-fève, et, d’autre part, de la
diminution de ravageurs suite à l’altération volontaire de la qualité de la plante hôte en
mélange (Power, 1987).
La qualité de la plante hôte peut également être liée à un phénomène de sénescence plus ou
moins rapide des feuilles : Andow & Risch (1985) ont montré qu’en situation ombragée de
polyculture, les feuilles de citrouilles vieillissaient plus lentement qu’en situation plus ouverte
de monoculture et que les pucerons recherchant les feuilles les plus âgées phénologiquement,
étaient de ce fait plus nombreux en monoculture.
2.3. IMPORTANCE DES SIGNAUX OLFACTIFS ET VISUELS DANS LE CHOIX DE LA PLANTE HÔTE
Le comportement de recherche et d’utilisation des ressources vitales par les insectes
phytophages peut être subdivisé en trois étapes :
55
- la localisation de l’habitat de l’hôte ou de la proie,
- la localisation de l’hôte ou de la proie,
- l’acceptation de l’hôte ou de la proie.
Un insecte phytophage dépend entièrement de la disponibilité de ses plantes hôtes pour
survivre et se reproduire. Il se doit pour cela de les rencontrer dès qu’elles apparaissent dans
son écosystème pour y déposer ses œufs et/ou s’alimenter. Pour cela, d’une part, son cycle
reproducteur doit coïncider avec le développement de la plante hôte et d’autre part, il doit
disposer de mécanismes efficaces pour la localiser et l’identifier. Ceci est possible grâce à
l’élaboration de comportements cohérents et parfois sophistiqués, qui reposent sur la détection
de signaux pertinents renseignant l’insecte sur la qualité et les variations de son
environnement. Les insectes phytophages utilisent des repères visuels et/ou olfactifs pour
localiser leur plante-hôte à distance (Turlings et al., 1990 ; Dicke & Sabelis, 1988).
Les pucerons comme les autres insectes phytophages, peuvent utiliser des repères visuels, tels
que la couleur, la forme ou la structure de la plante-hôte pour la détecter (Prokopy et Owens,
1983). Ainsi, le puceron (Myzus persicae Sulzer) répond positivement à la couleur verte
comparativement à d’autres couleurs (Bernays & Chapman, 1994). D’autres facteurs peuvent
également intervenir. Par exemple, chez les charançons de l’espèce Pissodes strobi Peck
(Curculionidae), ces derniers trouvent leur hôte en utilisant une phototaxie (comportement par
rapport à la lumière). On parle de phototaxie positive lorsque le mouvement va à la lumière et
d’orientation négative lorsque le mouvement fuit la lumière et une géotaxie comportement par
rapport au sol. On parle de géotaxie positive lorsque le mouvement va vers la terre et
d’orientation négative lorsque le mouvement s’élève (Vandersar & Borden, 1977).
D’autres auteurs mentionnent la perception des substances volatiles par les antennes des
pucerons (Wadhams, 1990 ; Wohlers & Tjallingii, 1983; Yan & Visser, 1982). Les pucerons
répondent notamment aux odeurs des plantes par leur marche dans des expériences en
laboratoire (Nottingham et al., 1991 ; Pettersson, 1973, 1971), par le vol (Nottingham &
Hardie, 1993) et en champ (Chapman et al., 1981).
56
2.3.1. Repères olfactifs
La chimie des plantes joue un rôle majeur dans la reconnaissance des plantes via la détection
des substances chimiques volatiles, les substances allélochimiques, émises par les plantes
(Bernays & Chapman, 1994). En effet, les substances allélochimiques peuvent être
spécifiques des taxons, et le système des insectes a souvent la capacité de distinguer ces
odeurs parmi d’autres.
Ces odeurs peuvent être interprétées comme attractives, non attractives, voire répulsives par
les insectes phytophages (Dethier, 1982). La perception de ces odeurs se fait via des neurones
récepteurs olfactifs localisés sur les antennes des insectes (Hansson, 2002). Deux hypothèses
ont été proposées pour expliquer la reconnaissance des composés chimiques de l’hôte : (i) la
reconnaissance d’une odeur spécifique de l’hôte et ii) la reconnaissance d’un ratio spécifique
de composés volatiles. La première possibilité a été mise en évidence pour des pucerons qui
exploitent des plantes émettant des odeurs très spécifiques, comme les Brassicaceae et les
Alliacea. La seconde possibilité semble être la plus fréquente et suggère que la reconnaissance
de l’hôte par l’insecte phytophage se fait via un ratio de composés chimiques de la plante
(Bruce et al., 2005).
2.3.2. Sélection de la plante hôte
Les insectes phytophages sélectionnent leur hôte par des repères gustatifs (Visser, 1986). La
phénologie et la physiologie de la plante varient avec l’environnement et l’âge de la plante
(Schoonhoven et al., 1998). Cette variation implique une modification de la disponibilité et de
la qualité des ressources pour l’insecte phytophage, qui peut affecter ses performances ainsi
que la dynamique des populations d’insecte. Le choix de l’hôte va, en effet, être déterminant
pour les taux de croissance larvaire, la taille des adultes et leur fécondité (Awmack & Leather,
2002).
Le choix alimentaire pour certaines parties de la plante hôte peut également jouer un rôle
déterminant pour la fécondité et la survie des larves. Chez les pucerons, les jeunes pousses
sont ainsi plus prisées. Chez certains insectes, la maturation des œufs et le comportement
d’oviposition peuvent varier substantiellement selon la disponibilité et la qualité de l’hôte
(Papaj, 2000).
57
D’autres facteurs, peuvent influencer le choix de l’hôte, tels que l’arrangement spatial des
plantes hôtes, la présence de prédateurs (Bernays, 1989), la présence d’œufs de congénères
(Bernays & Chapman, 1994). Ces étapes correspondent à la sélection des ressources.
Par ailleurs, les plantes soumises à un stress, comme l’attaque par un herbivore, peuvent
modifier le profil des substances volatiles qu’elles émettent et ce, en vue de faire fuir ce
parasite et/ou de devenir plus attractives envers leurs ennemis naturels (prédateurs ou
parasitoïdes) de l’herbivore en question.
A distance, les pucerons utilisent les substances volatiles pour reconnaître leurs plantes hôtes
(David & Hardie 1988 ; Gish & Inbar 2006). Les substances volatiles gustatives jouent un
rôle important dans l’acceptation ou le rejet de la plante hôte après l’atterrissage du puceron
Powell et al., (1999). Lorsqu’il est perturbé, un puceron sécrète via ses cornicules, des
gouttelettes contenant une phéromone d’alarme, ce qui provoque la fuite de ses congénères.
La constitution chimique de ces sécrétions varie d’une espèce de puceron à l’autre, mais est
constituée essentiellement, ou en totalité d’(E)-β farnésene (EBF) (Francis et al., 2004).
L’(E)-β farnésene est également un composé sécrété par les plantes. Mais dans ce cas, la
réponse des prédateurs diffère à cause de la détection d’autres composés, dont le (-)-β
caryophyllène (Dawson et al., 1984).
Le puceron Rhopalosiphum maidis (Fich) se nourrit préférentiellement de plantes de maïs
(Zea mays L) saines lorsque des plantes non endommagées ou des plantes infestées de
pucerons lui sont présentées. L’effet répulsif vis-à-vis de R. maidis des substances volatiles
émises par les plantes attaquées peut s’expliquer de différentes manières. La production des
composés volatiles par la plante peut permettre soit d’informer les autres ravageurs de la
présence de concurrents phytophages soit d’attirer les ennemis naturels des pucerons. Une
molécule volatile, le (E)-β-farnesene est produite à la fois par la plante et par le puceron et
agit comme substance d’alarme chez les pucerons (Bernasconi et al., 1998).
2.3.3. Recherche de la plante et localisation
Les insectes, pour trouver leur site de ponte, d’alimentation ou encore leurs lieux
d’accouplement, sont obligés de faire des choix parmi différentes plantes. Cette recherche de
la plante hôte peut être perçue par de nombreux signaux physiques (sons émis, mouvements
58
de la proie, chaleur) ou chimiques (odeurs) des insectes ou des plantes interviennent dans la
localisation des sources alimentaires par les insectes.
Chez Delia radicum L (la mouche du chou), lorsque les femelles sont à 25 cm environ des
plantes, elles n’utiliseraient plus de signaux olfactifs, mais des signaux visuels, en particulier
la couleur et la taille des feuilles pour choisir la plante sur laquelle elles vont se poser
(Prokopy et al., 1983). D’autres insectes à l’instar de la mouche méditerranéenne des fruits
Ceratitis capitata Wiedemann, Ligth et al. (1988) ou la mouche de la carotte (Psila rosae F
(Guerin et Viser, 1980), ont montré qu’ils répondaient très favorablement aux odeurs de leurs
plantes hôtes.
Chez M. persicae, les couleurs vertes et jaunes ont été corrélées à la localisation de plante
hôte adéquate. Un comportement de recherches ponctuelles aléatoires est observé chez les
espèces aphidiennes et fournit au puceron une information sur les propriétés physiques et
chimiques de la plante. A ce moment, l’acceptabilité du site est déterminée. Ensuite, les
insertions répétées du stylet de l’homoptère dans les organes végétaux testés sont plus
nombreuses et aboutissent à l’acceptation de la plante hôte lorsque cette dernière est jugée
adéquate (Powell et al., 1995).
La topologie, la couleur (Pelletier, 1990), les exsudats trichomes (Neal et al., 1990),
influencent le comportement des pucerons avant l’insertion des stylets.
2.4. NATURE ET ORIGINE DES STIMULI
Les substances volatiles jouent un rôle important dans la localisation et la sélection de l’hôte
par les pucerons. Les travaux de Nottingham et al. (1991) montrent que les pucerons (Aphis
fabae Scopoli, Myzus persicae (Sulzer), Brevicoryne brassicae (Linnaeus)) aptères et ailés
sont attirés par leurs plantes hôtes tandis qu’ils sont repoussés pour les odeurs des plantes
non-hôtes. Ces dernières peuvent éventuellement masquer l’attraction des premières.
Chez les parasitoïdes (où le plus grand nombre des travaux ont été faits), les stimuli utilisés
semblent varier essentiellement en fonction de deux facteurs : le degré de spécialisation du
parasitoïde et le stade hôte attaqué (Turlings & Benrey, 1998). D’une manière générale, les
signaux chimiques sont les plus utilisés dans la localisation des patches d’hôtes (Turlings &
Tumlison, 1992). Les travaux de (Bukovinszky, 2004), montrent que les effets masqués des
plantes non hôtes seraient à l’origine de la faible abondance des ravageurs dans les habitats de
plantes diversifiés. Les travaux de Bukovinszky confortent l’hypothèse de la concentration
59
des ressources de Root (1973), les ravageurs ont davantage de difficultés à localiser ces
dernières et les quittent plus rapidement lorsqu’elles sont en situation de polyculture que de
monoculture.
Contrairement aux travaux de Kennedy et al. (1959) qui montrent que la plante hôte est
sélectionnée uniquement après l’atterrissage, ceux de Nottingham et al. (1991) démontrent
bien que l’olfaction a un rôle important à distance. Les mécanismes impliqués ne sont pas
précisément identifiés, mais divers stimuli sont mis en jeu. Nos résultats sur le terrain révèlent
également que les pucerons du pois infestent moins les cultures associées de pois et de blé dur
par rapport à la monoculture de pois pur (cf chapitre 1).
La diversité des stimuli olfactifs perçus par les phytophages dans une polyculture, peut
masquer ceux que les ravageurs spécialisés utilisent pour localiser leur plante hôte,
provoquant alors un ralentissement dans l’installation de ces derniers, voire leur départ
comme l’ont démontré Tahvanainen & Root (1972).
Dans les systèmes de cultures diversifiées, dans lesquels les plantes non hôtes peuvent
masquer l’odeur des plantes hôtes, les espèces les plus sensibles sont là aussi pour davantage
retrouver leurs plantes hôtes que les autres. Les ravageurs auraient moins d’incidence sur les
cultures plurispécifiques que sur les monospécifiques grâce à l’interférence avec plusieurs
stimuli et paramètres culturaux : (i) les stimuli olfactifs des plantes hôtes sont masqués par les
autres espèces cultivées, rendant leur localisation difficile ; (ii) les stimuli visuels, (iii) la
qualité de la plante hôte. L’augmentation de la fertilisation minérale, essentiellement azotée
des plantes cultivées provoquerait des effets contraires selon les types de ravageurs avec la
plupart du temps une augmentation des ravageurs suceurs de sève et une réduction des
broyeurs (Altieri & Nichols, 2003 ; Letourneau, 1988). Cette augmentation de la teneur en
azote s’accompagne, en effet, de celle des composés secondaires qui peuvent affecter
l’appétibilité et/ou digestibilité de la plante.
Les odeurs des plantes non hôtes et les odeurs des plantes hôtes attractives peuvent affecter
négativement l’orientation des odeurs de certains insectes à l’exemple des pucerons
(Pettersson, 1973) ou des mouches blanches (Chapman et al., 1981). On parle de méthodes de
camouflages olfactives qui pourraient prévenir les attaques de certains ravageurs (Thiery &
Visser, 1986).
60
Dans les cultures associées, l’attractivité des plantes hôtes est réduite, ce qui limiterait le
nombre d’insectes pour les plantes associées. Selon Finch & Collier (2000), les stimuli visuels
joueraient un rôle central dans le processus de reconnaissance des plantes hôtes et proposent
une nouvelle hypothèse, celle des atterrissages « appropriés et non appropriés ». Pour eux,
durant la recherche de la plante hôte, les insectes atterrissent indifféremment sur les objets
verts comme les feuilles des plantes hôtes (atterrissages appropriés) ou de plantes non hôtes
(atterrissages non appropriés). Les cultures associées comme méthodes de limitation des
insectes pourraient donc être comparées par la méthode de confusion des sexes (« mating
disruption »).
Grâce à l’interférence avec plusieurs stimuli et paramètres culturaux, les ravageurs auraient
moins d’incidence sur les cultures plurispécifiques que sur les cultures monospécifiques. Les
stimuli olfactifs des plantes hôtes sont masqués par les autres espèces cultivées, rendant leur
localisation difficile. Selon (Finch & Collier, 2000), les stimuli visuels seraient la seconde
étape dans le processus de localisation et d’identification de la plante hôte. Toutefois, ils sont
exacerbés en cas d’attaque de ravageurs et utilisés par certains auxiliaires pour se diriger vers
les foyers d’attaque. Les stimuli visuels sont eux aussi moins efficients, car les ravageurs
doivent distinguer les divers tons de vert des plantes. De même, la biomasse non hôte dilue les
ravageurs incapables de la distinguer de la biomasse hôte et fait fuir ceux qui sont capables
d’effectuer cette distinction. Les polycultures offrent également un microclimat en général
tamponné concernant les températures et la vitesse du vent, ce que recherchent bon nombre de
ravageurs.
2.5. SÉLECTION DE L ’HABITAT CHEZ LES PUCERONS
Dans le monde des insectes phytophages, 95 % des espèces sont monophages, c’est-à-dire
qu’elles n’exploitent qu’un seul genre ou qu’une seule famille. On parle d’adaptation à une
plante hôte (Via, 1990). Les 5 % des espèces restantes se partagent entre les espèces
oligophages et les insectes polyphages (Pettersson et al., 2007).
La sélection de l’habitat chez le puceron se fait en réponse à plusieurs types de stimuli. Une
étude de Hardie (1989) a mis en évidence l’existence d’une adaptation qui permet au puceron
Aphis fabae Scopoli qui est une espèce polyphage, de faire une sélection à distance de la
61
plante. Cette espèce réagit en effet à des longueurs d’ondes dans la région verte du spectre de
la lumière. Moericke (1969) pense que l’orientation visuelle des pucerons contribue fortement
à la sélection de leurs plantes hôte. D’autres études ont montré que d’autres espèces de
pucerons réagissent également à des jaunes saturés (Chapman et al., 1981), qui réfléchissent
certains ultra-violets (Pettersson et al., 2007).
De même, une étude faite par Hori (1999) a démontré que plusieurs espèces de pucerons
réagissaient également à des stimuli olfactifs. Il a utilisé les espèces monophages ainsi que des
polyphages. Les résultats de ces tests montrent que ce sont surtout les tests qui réagissent à
leur plante hôte, tandis que les espèces polyphages utilisent principalement les stimuli visuels.
Ceci vient confirmer une étude par ce même auteur effectuée en 1997, qui a démontré que
l’espèce de puceron Neotoxoptera formosana (Takahashi) était repoussée par les odeurs de
romarin et attirée par l’odeur de leur plante hôte, Allium fitulosum L (Hori & Komatsu, 1997).
En revanche, une étape de la sélection de la plante hôte s’effectue pour toutes les espèces de
pucerons directement sur la plante (Deguine & Leclant, 1997). En effet, une fois que le
puceron se retrouve sur la feuille, il procède à une série de ponctions dans l’épiderme de la
plante avec son stylet (Powell et al., 2006). Le stylet ainsi que le rostre semble n’avoir aucun
récepteur chimique externe, mais, il est probable que la sève de la plante soit ingérée et mise
en contact avec un organe gustatif dans la région épipharyngeale pendant la pénétration du
stylet.
2.6. OBJECTIF DU CHAPITRE
L’objectif de ce chapitre consiste premièrement à voir si des substances volatiles émises par
les petits pois attireraient les pucerons du pois (A. pisum Harris) vers leur plante-hôte.
Deuxièmement, il s’agira de voir si l’odeur du blé dur peut modifier l’information émise par
les pois au point d’affecter négativement la recherche des plantes-hôtes.
2.7. MATÉRIEL ET MÉTHODES
Les expériences présentées dans ce chapitre poursuivent un double objectif. Premièrement, il
s’agit de vérifier si les pucerons du pois sont attirés par l’odeur que dégage leur plante-hôte,
Pisum sativum L. Deuxièmement, on essaiera de voir si un mélange de blé dur et de pois est
moins attractif que des plantes de pois présentées seules. Les réactions de pucerons aptères et
de pucerons ailés à des odeurs émises par des plantes de pois d’hiver ou par un mélange de
62
plantes de blé dur et de pois d’hiver seront observées dans un olfactomètre construit au
laboratoire selon les indications de Vet et al. (1983). Il s’agira aussi, de voir s’il y a des
différences entre une souche sauvage de pucerons, dont les individus ont été récoltés dans des
champs de pois, et une souche élevée au laboratoire. Les opérations d’élevage des pucerons et
de cultures des plantes, les caractéristiques de l’olfactomètre et les conditions dans lesquelles
se sont déroulées les expériences sont successivement décrites ci-dessous.
2.7.1. Les pucerons
Les pucerons utilisés tout au long de l’expérience proviennent de l’élevage des pucerons du
pois, A. pisum Harris, réalisé au sein du laboratoire de l’UMR CNRS 5174 Evolution et
Diversité biologique de l’ENFA. Ceux-ci ont été préalablement élevés sur des plants de fève
(Vicia faba L), pendant de nombreuses générations afin de pourvoir à l’élevage des
populations de coccinelles. Pour les besoins de cette expérience, les pucerons ont été
implantés sur une culture de pois P. sativum, de façon à sélectionner des individus adaptés à
cette plante-hôte. Après quatre générations, les performances des pucerons sur les pois étaient
redevenues équivalentes à celles de leurs ancêtres sur les fèves.
Pour les besoins des expériences, des individus adultes de la quatrième génération élevée sur
des pois sont sélectionnés aléatoirement et isolés dans des boîtes de Pétri de 90 mm de
diamètre. Dans chaque boîte est préalablement disposée une pousse de pois P. sativum, de
7 jours (L = 50-65 mm). Celle-ci a germé au sein d’un morceau de coton humide
(250 x 250 mm = 6,25 cm²) posé sur une pièce de papier filtre Watmann®
(400 x 400 mm = 16 cm²). Ces pucerons sont ainsi élevés isolément jusqu’à ce qu’ils
produisent leurs premières larves. Ces juvéniles, issus d’une même mère, sont maintenus dans
une boîte de Pétri et ont accès à une pousse de pois jusqu’à atteindre la fin de leur
développement, soit après 7(±1) jours (Vet et al., 1983). Ils sont alors isolés à leur tour. On
les considère comme les adultes, dès qu’ils engendrent des pucerons de deuxième génération
parthénogénétique. Les individus sont maintenus dans des enceintes climatisées à 22 °C et
soumis à un cycle photopériodique de 16h/8 h.
2.7.2. Les plantes
La variété de blé dur utilisée pour ces expériences est 1823. Elle a été obtenue à l’Institut
National de Recherche Agronomique (INRA d’Auzeville). Quant au pois, il s’agissait de la
variété Enduro également obtenue à l’INRA d’Auzeville.
63
La préparation des graines de pois et de blé dur se fait de la manière suivante : les graines sont
mises sur une couche de coton imbibé d’eau. On les recouvre par la suite d’une seconde
couche de coton humide pendant 24 h afin de les humecter rapidement. Des pots (hauteur
14 cm ; diamètre : 30 cm) sont remplis d’un terreau contenant 70 % de tourbe et 30 % d’un
mélange en proportions égales des autres composants (argile, perlite, fibre de coco, sable,
vermiculite).
Cinq jours après la germination, les plantes sont repiquées de façon à constituer les différents
traitements (Figure 1). Le substrat utilisé est composé de perlite et de vermiculite dans le
rapport 1:1. Il permet à la fois l’aération du milieu et la conservation de l’humidité.
L’arrosage se fait trois fois par semaine à raison d’un litre d’eau pour cinq pots. Les plantes
mesurent 10 à 15 cm de hauteur au moment de l’expérience (Figure 2). Les plantes dans les
pots ont différentes densités suivant le type de plante. Ainsi, la monoculture de pois pur, a les
densités suivantes : 4 plantes, 8 plantes, 12 plantes, et 24 plantes. Quant à la culture associée
de blé dur et pois d’hiver, nous avons les densités suivantes : 10, 12, 24 graines/pot.
Figure 1 : Plantules de pois pur 4 jours après la transplantation.
64
Figure 2 : Plants de pois en monoculture prêts pour un test
2.7.3. Olfactomètre
2.7.3.1. Description de l’olfactomètre
L’olfactomètre à quatre bras a la même forme que celui décrit par Pettersson (1970) et
amélioré par Vet et al. (1983) et Saïd (2006). L’olfactomètre est constitué par une chambre
intérieure en forme d’étoile à 4 branches : les dimensions d’un sommet d’une branche de
l’étoile à celui qui est diamétralement opposé est de 12 cm. La hauteur intérieure de la
chambre est de 1 cm. Les sommets des quatre bras de l’olfactomètre sont percés d’un trou de
2 mm de diamètre dans lequel un embout en verre est enfoncé. Un tuyau en plastique est
emboîté sur chacun de ces embouts. Deux tuyaux convergent vers un raccord en T ; celui-ci
est connecté à un conduit en plastique dont l’extrémité s’ouvre dans une cloche en verre. Ces
quatre cloches mesurent chacune 35 cm de hauteur et 25 cm de diamètre (Figure 3), soit un
volume de 13355,21cm³ (13,35 litres).
Les cloches sont posées sur une plaque de verre rectangulaire, elle-même posée sur un support
métallique à quatre pieds dont les dimensions sont de 20 cm en largeur pour une hauteur de 22
cm. A la base de ce support, se trouve un rectangle sur lequel est posée la cloche. La plaque
de verre est coupée en deux parties égales. Chaque moitié est percée d’une encoche en demi-
65
cercle. Lorsqu’on rapproche les deux moitiés, ces deux encoches forment un orifice circulaire
qui permettra de laisser passer les tiges des plantes (Figure 3).
Le centre de la chambre de l’olfactomètre est percé d’un orifice de 2 mm de diamètre. Un
embout de verre est inséré dans cet orifice et un tuyau en plastique de même diamètre est
emboîté à cet embout. Ce tuyau est relié à une pompe qui aspire ainsi l’air à travers les quatre
branches de cet olfactomètre. L’air passe d’abord dans un dispositif qui permet de la saturer
en eau puis à travers un filtre à charbon de bois. Le filtre à charbon permet d’éliminer les
composés volatiles qui pourraient contaminer le flux d’air. Un débitmètre, réglé à 100 ml/min,
permet de contrôler le flux d’air dans chaque tuyau, entre les deux raccords en T et les entrées
de l’olfactomètre (Pham-Delègue et al., 1990). Si les quatre flux d’air sont égaux, ils
déterminent quatre champs d’odeur de même surface, centrés sur l’orifice par où l’air est
aspiré. Ainsi, lorsqu’un puceron sera introduit au centre de l’olfactomètre, il pourra analyser
les odeurs véhiculées par chacun des flux d’air. On vérifie régulièrement le réglage des
débitmètres et l’égalité des champs d’odeur en aspirant des vapeurs de NH4Cl dans
l’olfactomètre.
Figure 3 : Olfactomètre à quatre voies
66
2.7.3.2 Déroulement des expériences et analyse statistique
Les expériences se sont déroulées de février 2010 à mars 2011. Les expériences ont été faites
avec des pucerons adultes préparés comme cela fut précédemment expliqué plus haut. Les
expériences débutaient à 14 heures afin de laisser les pucerons à jeun durant 6 heures. Le
substrat du pot des plantes a été isolé par papier d’aluminium de façon à éviter que les odeurs
de ce substrat perturbent l’expérience. Un pot contenant la plante a été introduit dans une des
cloches. Afin d’éviter des hétérogénéités dans l’éclairage, l’olfactomètre a été placé dans une
chambre noire cylindrique de 10,5 cm de diamètre et 22 cm de hauteur (Figure 3). Une source
de lumière est placée sous l’olfactomètre. L’expérimentation est réalisée dans une pièce à une
température ambiante de 20 ± 1 °C avec une humidité relative de 70 %.
Au début de chaque expérience, un puceron est introduit dans une fiole en verre de 2 ml
pendant 5 min. Cette fiole est vissée sur un pas de vis adapté à un orifice percé au centre de la
face inférieure de l’olfactomètre. Lorsque le puceron sort de cette fiole et pénètre dans
l’olfactomètre, il rencontre les 4 champs d’odeur et il peut alors faire éventuellement un
choix. On observe le comportement du puceron sur une durée de cinq minutes. Une feuille en
polyester transparente sur laquelle sont tracés des cercles concentriques faits avec un feutre de
couleur noire. Elle est placée sous l’olfactomètre, le centre des cercles étant placés sous le
centre de l’olfactomètre (Figure 4). Ainsi, par transparence, on distingue quatre zones de
choix dans l’olfactomètre. On relève le premier choix effectué par chaque puceron, c’est-à-
dire s’il s’est immobilisé plus de 3 min dans une même zone. Les comportements des
pucerons sont également observés et notés. A la veille des expériences, tous les équipements
ont été lavés au détergent Teepol. Ces équipements sont rincés par la suite à l’éthanol à 70 %,
puis à l’eau distillée (Webster et al., 2008). Les équipements sont laissés toute la nuit à sécher
dans un four à 60 °C. A la fin des répétitions et chaque jour, l’olfactomètre a été lavé au
détergent Teepol. A l’intérieur de l’olfactomètre, il a été mis un papier filtre blanc de 90 mm
de diamètre (Whatman International Ltd Maidstone England). Ce papier blanc permet les
déplacements du puceron. Le papier filtre a été remplacé par un autre après chaque répétition.
Les deux entrées d’air attribuées aux différents traitements sont réattribuées aléatoirement à
chaque expérimentation. Une cloche inutilisée pendant l’expérience permet de placer une
autre plante en vue des expérimentations suivantes. En effet, les plantes doivent être mises
sous cloches fermées 24 heures avant l’expérimentation associée, afin de laisser le temps à la
cloche de se remplir des composés émis par la plante.
67
Les pucerons utilisés sont successivement des aptères et des ailés. Le nombre de répétitions
est présenté aux Tableaux 1 et 2. La proportion de pucerons ayant effectué un choix a été
analysée à l’aide d’un test binomial (Siegel, 1956). L’hypothèse nulle était que la probabilité
de choisir une odeur était égale à celle de ne pas le faire. Dans ce cas, effectuer un choix
signifie se diriger vers une source d’air par opposition à rester au centre de l’olfactomètre.
Ensuite, pour chaque type de puceron et chaque variante de l’expérience, le nombre de
pucerons se dirigeant vers la source d’air chargée de l’odeur du pois ou du mélange du pois et
du blé dur a été comparé au nombre de ceux qui se dirigeaient vers les trois sources d’air pur
au moyen d’un test de X² pour un échantillon (Siegel, 1956). L’hypothèse nulle était que les
pucerons choisiraient les sources d’air pur selon une probabilité de 0,75 et celle d’air
contaminé par l’odeur des plantes avec une probabilité de 0,25. Les résultats sont analysés à
l’aide du logiciel R (R Development Core Team, 2010).
Figure 4 : Olfactomètre délimité en zone permettant de mieux suivre la progression du puceron.
68
2.8. RÉSULTATS
2.8.1. Choix des pucerons et effectif des pucerons testés
Indépendamment des différentes souches ou formes, 1036 pucerons ont été utilisés (Tableau
1). Parmi ceux-ci, 569 furent soumis aux odeurs pures de pois et 467 aux odeurs émanant
d’un mélange de pois et de blé dur. Les pucerons ailés représentent 43,1 % et les aptères 56,9
% de l’effectif total. Parmi les deux souches expérimentées, la souche du laboratoire
représente 81,4 % des effectifs et la souche sauvage 18,6 % (Tableaux 2 et 3).
Tableau 1 : Les nombres de pucerons, en fonction de la source d’odeur et de la souche, ayant effectué ou non le choix de quitter la zone centrale de l’olfactomètre et de se diriger vers une des quatre sources d’odeur.
Type de
puceron
Type d’odeur Souche Choix
effectué
Pas de choix Total
Ailé
Ailé
Sous-Total
Pois pur Laboratoire 165 51 216
Blé pois Laboratoire 179 52 231
344 103 447
Aptère Pois pur Laboratoire 216 16 232
Aptère
Sous-Total
Aptère
Blé pois Laboratoire 152 12 164
368 28 396
Pois pur Sauvage 109 12 121
Aptère Blé pois Sauvage 65 7 72
Sous-Total 174 19 193
Total 886 150 1036
69
Tableau 2 Résumé des principales conditions expérimentales et des résultats des tests réalisés avec l’olfactomètre à quatre bras. Cas de pucerons ailés. Date Type de pucerons Type de plante Souche Nbre de plantes Temps (heure) Pas de choix Odeur Pas d’Odeur Total
19-11-6 dec 2010 Ailés Pois pur Laboratoire 12 24 18 18 43 79
18-11-18-11 Ailés Pois pur Laboratoire 12 48 1 4 11 16
22-11- 13-12 Ailés Pois pur Laboratoire 12 72 3 4 8 15
26-2-28-2-2011 Ailés Pois pur Laboratoire 24 24 19 12 35 66
1-3- 2011 Ailés Pois pur Laboratoire 24 48 10 11 19 40
Sous-total 51 49 116 216
24-1-12- 2010 et 19-2-22-
2- 2011
Ailés Ble pois Laboratoire 12*12 24 21 11 61 93
25-26-11- 2010 et 20-23 -
2- 2011
Ailés Ble pois Laboratoire 12*12 48 21 24 59 104
3 au 8 -12 2010 Ailés Ble pois Laboratoire 12*12 72 10 11 13 34
Sous-total 52 46 133 231
Tableau 3 Résumé des principales conditions expérimentales et des résultats des tests réalisés avec l’olfactomètre à quatre bras (cas des pucerons aptères) Date Type de pucerons Type de plante Souche Nbre de plantes Temps (heure) Pas de choix Odeur Pas d’Odeur Total
15-2 au-01 3- 2010 Aptères Pois pur Laboratoire 4 24 8 23 68 99
02-3- 2010 Aptères Pois pur Laboratoire 8 24 2 7 15 24
22-3s-29 mars 2010 Aptères Pois pur Laboratoire 12 24 6 31 72 109
Sous-total 16 61 155 232
25-2-17 -3 2010 Aptères Ble pois Laboratoire 5*5 24 8 13 43 64
31-3-14-4 2010 Aptères Ble pois Laboratoire 10*10 48 4 19 77 100
Sous-total 12 32 120 164
19 -5-02-6 2010 Aptères Pois pur Sauvage 12 24 12 25 84 121
04-au 9-6 2010 Aptères Blé pois Sauvage 10*10 24 7 18 47 72
70
2.8.2. Le cas des pucerons aptères
A la lecture du Tableau 4, on constate que la majorité des pucerons aptères introduits dans
l’olfactomètre a effectué un choix. Cela signifie que 92 % de l’effectif total s’est dirigé vers
l’une des quatre sources d’odeur de l’olfactomètre. Une petite minorité d’individus (8 % de
l’effectif total) est restée au centre de l’olfactomètre sans s’engager dans l’une des quatre
branches. Les valeurs des tests binomiaux calculées pour chaque traitement, chaque variante
en fonction du nombre de plantes et du temps d’émission des substances volatiles par les
plantes avant le début des expériences sont toutes hautement significatives.
Tableau 4. Analyse du comportement des pucerons aptères dans l’olfactomètre : le nombre de pucerons ayant effectué un choix, le nombre de pucerons ayant choisi de se diriger vers la source d’air chargé de l’odeur d’un groupe de pois ou vers l’odeur de pois cultivés en mélange avec du blé dur, en fonction du nombre de plantes qui ont produit l’odeur et du temps pendant lequel cette odeur s’est accumulée dans les cloches en verre avant le début de l’expérience. Traitements Nbre plantes Temps
(h) Choix Total Test binomial
(z) Vers l’odeur
Vers l’air pur
Test Chi²
Pois pur 4 24 91 99 -2,4498*** 23 68 0,0037 NS 8 24 22 24 P<0,0021 7 15 0,5454 NS 12 24 103 109 -3,9404*** 31 72 1,4271 NS 12a 24 109 121 -8,7272*** 25 84 0,2477 NS
Blé-pois 5 – 5 24 56 64 -6,1250*** 13 43 0,0952 NS 10–10 48 96 100 -9,1000*** 19 77 1,3889 NS 10–10a 72 65 72 -6,7176*** 18 47 0,2513 NS
• a Pour ce test, on a utilisé des pucerons du pois capturés dans des champs de pois et acclimatés ensuite au laboratoire (souche sauvage).
• 1 Comme l’effectif est inférieur à 25, le test a été calculé directement à partir de la table D de Siegel (1956).
• *** : hypothèse nulle rejetée au niveau de probabilité de 0,001. NS ; hypothèse nulle acceptée.
En ce qui concerne les pucerons ayant eu le choix entre trois sources d’air pur et une source
d’air contaminé par les odeurs de pois, la partie de droite du Tableau 4 indique également que
les proportions de pucerons se dirigeant vers la source d’air contaminé par l’odeur des pois ne
sont jamais significativement différentes des fréquences attendues. Celles-ci ont été calculées
en tenant compte du fait que les pucerons choisiraient la source d’odeur de plantes avec une
probabilité de 0,25 et les trois sources d’air pur avec une probabilité de 0,75. Dans un premier
temps, les résultats obtenus lors des deux expériences en offrant aux pucerons de l’odeur de
12 pois pur qui s’était accumulée pendant 24 h dans les cloches en verre de l’olfactomètre ont
71
été regroupés afin d’augmenter la puissance du test de Chi². Néanmoins, celui-ci reste non
significatif (Chi² : 0,2264 ; 1 d. l.). Le fait de regrouper ensuite les quatre expériences au
cours desquelles l’odeur émise par 4 à 12 pois cultivés seuls ne permet pas non plus de rejeter
l’hypothèse nulle (Chi² : 0,3703 ; 1 d. l.).
En ce qui concerne les pucerons ayant eu le choix entre trois sources d’air pur et une source
d’air contaminé par l’odeur émise par des pois cultivés en mélange avec du blé dur, on
constate également que les proportions de pucerons se dirigeant vers la source d’air contaminé
par l’odeur des plantes ne sont jamais significativement différente des fréquences attendues.
Celles-ci ont été calculées comme expliqué précédemment. Pour augmenter la puissance du
test statistique, on a d’abord regroupé les résultats des deux expériences au cours desquelles
des pucerons de la souche du laboratoire et de la souche sauvage ont été exposés à l’odeur de
10 plantes de pois et 10 plantes de blé dur. Le test Chi² n’est pas significatif (Chi² : 1,3668 ; 1
d. l). Le fait de regrouper ensuite les trois expériences au cours desquelles les pucerons eurent
l’occasion de choisir l’odeur émise par un mélange de pois et de blé dur ne permet pas non
plus de rejeter l’hypothèse nulle (Chi² : 0,4439 ; 1 d. l).
Enfin, la comparaison des résultats obtenus en exposant les pucerons à l’odeur des pois à ceux
obtenus en les exposant à l’odeur d’un mélange de pois et de blé dur ne met pas en évidence
de différences significatives, que ce soit au niveau des proportions de pucerons effectuant un
choix (Chi : 0,0027 ; 1 d. l) ou de la proportion de pucerons se dirigeant vers la source d’air
contaminée par une odeur de plante (Chi² : 0,8098 ; 1 d. l).
En conclusion, il apparaît que le comportement des pucerons aptères n’est pas influencé par
l’odeur des pois ni par l’odeur des pois cultivés avec du blé dur. La Figure 2 de l’Annexe 6,
nous permet de voir quelques pucerons aptères.
2.8.3. Le cas des pucerons ailés
En lisant toutes les lignes du Tableau 5, on s’aperçoit qu’une majorité de pucerons a toujours
effectué un choix. Sur l’ensemble des expériences résumées dans ce tableau, 77 % des
individus se sont dirigés vers une source d’air que celle-ci soit une source d’air pur ou d’air
contaminé par l’odeur de plantes. Les valeurs des tests binomiaux calculées pour chaque
traitement, chaque variante en fonction du nombre de plantes et du temps d’émission des
72
substances volatiles par les plantes avant le début des expériences sont toutes hautement
significatives. La proportion de pucerons qui choisissent de se diriger vers une des quatre
sources d’air n’est pas significativement différente lorsqu’on compare les 5 expériences
réalisées avec du pois aux 3 expériences réalisées avec un mélange de pois et de blé dur
(Chi² : 0,0762 ; 1 d. l). Par rapport aux pucerons aptères, la proportion de pucerons effectuant
un choix est significativement plus faible (pucerons ailés : 77 % ; pucerons aptères : 92 % ;
Chi : 46,5664 ; 1 d. l; P < 0,001).
En ce qui concerne les pucerons ayant eu le choix entre trois sources d’air pur et une source
d’air contaminé par les odeurs de pois, la partie de droite du Tableau 5 indique également que
les proportions de pucerons se dirigeant vers la source d’air contaminé par l’odeur des pois ne
sont jamais significativement différente des fréquences attendues. Celles-ci ont été calculées
en tenant compte du fait que les pucerons choisiraient la source d’odeur de plantes avec une
probabilité de 0,25 et les trois sources d’air pur avec une probabilité de 0,75. Dans un premier
temps, les résultats obtenus lors des trois expériences offrant aux pucerons de l’odeur de 12
pois cultivés seuls ont été regroupés afin d’augmenter la puissance du test de Chi².
Néanmoins, celui-ci reste non significatif (Chi² : 0,9697 ; 1 d. l). Le fait de regrouper ensuite
les deux expériences au cours desquelles l’odeur émise par les 24 pois cultivés seuls ne
permet pas non plus de rejeter l’hypothèse nulle (Chi² :0,9740 ; 1 d. l). Enfin, le regroupement
des cinq premières lignes du Tableau 5 ne permet pas non plus de rejeter l’hypothèse nulle
(Chi² : 1,9414 ; 1 d. l).
Au delà de cette analyse statistique des proportions, une tendance intéressante apparaît à la
cinquième ligne du Tableau 5 : lorsque l’odeur de 24 plantes a pu s’accumuler pendant 48 h
dans les cloches de verre de l’olfactomètre avant le début de l’expérience, les pucerons ont
plus tendance à se diriger vers l’odeur des pois. C’est dans ces conditions que la valeur du test
de Chi² se rapproche le plus de la valeur seuil au niveau de probabilité de 0,05.
La Figure 1 de l’Annexe 6, nous permet de voir un puceron ailé.
73
Tableau 5. Analyse du comportement des pucerons ailés dans l’olfactomètre : le nombre de pucerons ayant effectué un choix, le nombre de pucerons ayant choisi de se diriger vers la source d’air chargé de l’odeur d’un groupe de pois ou vers l’odeur de pois cultivés en mélange avec du blé dur, en fonction du nombre de plantes qui ont produit l’odeur et du temps pendant lequel cette odeur s’est accumulée dans les cloches en verre avant le début de l’expérience. Traitements Nbre
plantes Temps
(h) Choix Total Test binomial (z) Vers
l’odeur Vers l’air pur
Test Chi²
Pois pur 12 24 61 79 -4,9504*** 18 43 0,2309 NS 12 48 15 16 P<0,0041 4 11 0,0222 NS 12 72 12 15 P<0,0361 4 8 0,4444 NS 24 24 47 66 -3,3227*** 12 35 0,0071 NS 24 48 30 40 -3,3204*** 11 19 2,1778 NS
Blé-pois 12 - 12 24 72 93 -5,3922*** 11 61 3,6296 NS2 12 - 12 48 83 104 -6,1777*** 24 59 0,1790 NS 12 - 12 72 24 34 -2,5724*** 11 13 5,5556 *
• 1 Comme l’effectif est inférieur à 25, le test a été calculé directement à partir de la table D de Siegel (1956).
• * : hypothèse nulle rejetée au niveau de probabilité de 0,05 ; *** : hypothèse nulle rejetée au niveau de probabilité de 0,001. NS ; hypothèse nulle acceptée.
• 2 Cette valeur est significative au niveau de probabilité de 0,10.
En ce qui concerne les pucerons ayant eu le choix entre trois sources d’air pur et une source
d’air contaminé par l’odeur émise par des pois cultivés en mélange avec du blé dur, on
constate que les proportions de pucerons se dirigeant vers la source d’air contaminé par
l’odeur des plantes dépendent des conditions expérimentales. Lorsque l’odeur provient d’un
mélange de 12 pois et 12 pieds de blé dur qui s’est accumulée sous la cloche de verre de
l’olfactomètre pendant 24 h, on constate que les pucerons ont une tendance à préférer l’air pur
et qu’ils se détournent de l’air chargé de l’odeur des plantes (Chi² : 3, 6296 ; 1 d. l ; P < 0,10
mais > 0,05). Lorsque l’odeur d’autant de plantes s’est accumulée sous la cloche de verre
pendant 48 h, on n’observe pas de différence significative. Enfin, lorsque cette odeur s’est
accumulée pendant 72 h, la proportion de pucerons se dirigeant vers la source d’odeur est
significativement différente de celle des pucerons marchant vers les sources d’air pur (Chi² :
5,5556 ; 1 d. l ; P < 0,05).
Enfin, la comparaison globale de la proportion de pucerons se dirigeant vers la source d’odeur
de plantes montre que celle-ci n’est pas significativement influencée par le fait que les
pucerons soient aptères ou ailés (Chi² : 0,6955 ; 1 d. l). Néanmoins et bien que le test
statistique ne mette pas en évidence une différence significative, il semblerait que les
74
pucerons aptères aient plus tendance à se diriger vers l’air pur (406 observations ; effectif
attendu : 400,7) tandis que les pucerons ailés auraient plus tendance à marcher vers l’odeur de
plantes (95 observations ; effectif attendu : 89,7).
En conclusion, il apparaît que le comportement des pucerons ailés n’est pas influencé par
l’odeur des pois. Il l’est par l’odeur des pois cultivés avec du blé dur sous certaines conditions
expérimentales.
2.9. DISCUSSION
Les petits pois (Pisum sativum) cultivés en association avec du blé dur (Triticum turgidum L
subsp. Durum (Desf.) Husn) sont significativement moins attaqués par les pucerons A. pisum
que les pois cultivés en peuplement pur (Ndzana et al, soumis). La culture associée de ces
deux plantes peut donc être considérée comme une possibilité de lutte biologique. Il est
cependant peu probable que les ennemis naturels des pucerons soient responsables de cette
différence d’infestation (Dixon, 2000). En effet, les ennemis naturels des pucerons ont une
durée de vie plus longue que celle de leurs proies. Des modèles mathématiques indiquent que
dans ces conditions, les ennemis naturels n’infligent pas de mortalité suffisante à leurs proies
que pour exercer une régulation démographique (Kindlmann & Dixon, 1999). Comme les
pucerons vivent peu de temps, les colonies qu’ils forment sont assez éphémères du point de
vue des ennemis naturels qui ont une plus grande longévité. En conséquence, le mode de vie
des ennemis naturels n’a pas évolué pour tirer parti des périodes d’abondance des pucerons
mais plutôt pour leur permettre de survivre lors des périodes où les proies sont rares. Dans ces
conditions, nous nous sommes intéressés à d’autres facteurs susceptibles d’expliquer les
différences d’abondance de pucerons du pois que nous avons pu observer entre la culture pure
de pois et l’association de celle-ci et du blé dur. Il est maintenant bien démontré que le
bouquet de molécules volatiles émises par les plantes attire souvent les insectes herbivores
vers leurs plantes-hôtes (Hilker & McNeil, 2007). Nous avons donc voulu vérifier si le
puceron du pois (A. pisum) utilisait les odeurs qui se dégagent des petits pois (P. sativum)
pour se diriger vers ceux-ci. Il est bien connu que le blé (Triticum sp) émet un bouquet de
substances volatiles (Birkett et al., 2004). Une culture associée de blé dur et de petit pois doit
donc dégager une odeur qui combine les molécules volatiles des deux plantes. Nous avons
également voulu vérifier si la présence de substances volatiles du blé dur dans le bouquet
olfactif que perçoit le puceron du pois perturbait la recherche de plante-hôte au point de
pouvoir expliquer la moindre infestation observée dans les cultures associées.
75
Les recherches qui ont été rapportées dans ce chapitre sont basées sur des expériences
réalisées au moyen d’un olfactomètre à quatre bras ou à quatre entrées d’odeur. On introduit
un insecte au centre de cet appareil puis on aspire une odeur, que l’on souhaite tester dans
l’olfactomètre. Lorsque ce dernier est correctement réglé, l’insecte qui est au centre se trouve
au carrefour des quatre champs olfactifs. Il perçoit alors les molécules qui sont aspirées et
peut décider soit de rester sur place, s’il est inhibé par ce qu’il perçoit, soit de se diriger vers
le secteur de l’olfactomètre qui baigne dans l’odeur qu’il préfère.
D’une manière générale, sans entrer dans le détail des comportements, nous avons observé
une nette différence dans le comportement des pucerons aptères et celui des pucerons ailés.
Quelles que soient les conditions expérimentales que nous avons mises en œuvre (Tableaux 2
et 3), les pucerons aptères ne semblent pas répondre aux odeurs que nous leur proposions. Par
contre, le comportement des pucerons ailés est influencé par les odeurs émises par les plantes.
Webster et al., (2008a) a analysé le comportement de recherche de plantes-hôtes déployé par
le puceron noir de la fève, Aphis fabae Scopoli. Cet auteur a démontré que les formes ailées
de ce puceron répondent positivement à un mélange de 15 molécules. Il ne donne toutefois
pas d’information sur le comportement des individus aptères.
Une autre étude, sur Rhopalosiphon padi Linnaeus, conforte la différence de réponse que nous
observons entre les pucerons ailés et aptères (Webster, 2012). En effet, ce puceron s’oriente
vers des plantes de blé ou d’avoine en réponse à un mélange de molécules volatiles. Les
individus aptères répondent à 11 molécules tandis que les ailés ne répondent qu’à 4 d’entre
elles. Selon Webster (2012), cette différence reflèterait le mode de vie spécifique de ces deux
morphes du puceron : les aptères se déplacent sur de courtes distances en marchant si bien
qu’ils ont de fortes chances de retrouver une plante-hôte qui leur convient. Ils n’ont donc pas
besoin d’une source d’information très précise. A l’opposé, les pucerons ailés parcourent de
plus grandes distances lorsqu’ils volent. Une information plus précise, basée sur un petit
nombre de molécules plus spécifiques devrait les aider à localiser des plantes-hôtes au sein
d’une végétation diversifiée.
Lorsqu’on analyse plus finement le comportement des pucerons ailés et aptères, la première
différence réside dans la proportion d’individus qui effectue un choix, c’est-à-dire qui quitte
la zone centrale de l’olfactomètre pour se diriger vers une des quatre sources d’odeur. En ce
qui concerne les pucerons aptères, presque tous effectuent un choix puisque seulement 8%
76
d’entre eux restent au centre de l’olfactomètre. Cependant, les pucerons qui décident de se
diriger vers une source d’odeur le font autant vers les courants d’air pur que vers le courant
d’air chargé d’odeur de plantes. Que celle-ci soit celle des petits pois ou un mélange d’odeur
de petit pois et de blé dur ne modifie leur choix.
A l’opposé, 23 % des pucerons ailés ne choisissent pas et restent au centre de l’olfactomètre
pendant toute la durée de l’expérience. Ces deux proportions sont significativement
différentes. Cette différence est-elle en rapport avec la plus grande sensibilité des pucerons
ailés que nous avons précédemment évoquée à propos de R. padi (Webster, 2012) ? Cet auteur
rapporte également qu’au sein d’une population de pucerons ailés, tous les individus ne volent
pas, certains préférant toujours marcher. La plus grande sensibilité des ailés s’appliquerait-elle
à tous les individus ou seulement à ceux qui volent volontiers ? Nous ne pouvons pas
répondre à cette question. Toutefois, cette variabilité dans la manière de se déplacer des
pucerons fait écho aux considérations de Hilker & McNeil (2007), qui soulignent que les
réponses des individus d’une espèce peuvent être très variables. Ils n’excluent pas une
composante génétique. Il a en effet, été démontré qu’on peut améliorer la propension des
insectes à répondre à des odeurs en sélectionnant, génération après génération, les individus
qui ont tendance à répondre le plus à ces odeurs. De même, la réponse aux odeurs peut être
améliorée par un processus d’apprentissage (Vet et al., 1995).
Nous ne parlerons plus dans cette discussion des pucerons aptères puisqu’ils n’ont jamais
répondu aux odeurs que nous leur proposions. Par contre, l’observation du comportement des
pucerons ailés procure beaucoup d’informations intéressantes.
En première lecture, le Tableau 5 indique que les individus ailés d’A. pisum ne répondent pas
de manière significative aux odeurs du petit pois. Pourtant, une tendance intéressante est
perceptible. En effet, si on augmente à la fois le nombre de plantes qui libèrent des molécules
volatiles et le temps pendant lequel elles dégagent ces molécules avant le début de
l’expérience, on constate que les pucerons ont tendance à préférer le courant chargé par ces
molécules plutôt que l’air pur. Lorsque 24 plantes sont laissées pendant 48h sous une cloche
de verre avant que l’on commence à aspirer les molécules qui se sont accumulées vers
l’olfactomètre, on constate que la valeur calculée du test Chi² de comparaison des proportions
se rapproche de la valeur limite de rejet de l’hypothèse nulle d’égalité des proportions. Certes,
ce n’est qu’une tendance mais elle laisse à penser que la concentration des molécules volatiles
77
dans l’air serait un facteur important à prendre en considération pour comprendre le
comportement du puceron du pois. Si cette tendance devait se confirmer, elle conforterait les
connaissances sur l’utilisation des substances volatiles par les insectes pour trouver des
ressources alimentaires (Hilker & McNeil, 2007) : une plus grande concentration totale peut
soit augmenter la capacité de détection de molécules essentielles dans la reconnaissance des
ressources ou mettre mieux en évidence les molécules informatives par rapport aux multiples
odeurs de l’environnement qui constitue le « bruit de fond » du signal olfactif.
Comment expliquer que nous ne soyons pas parvenus à mettre en évidence une préférence
nette des pucerons du pois pour l’odeur de leur plante-hôte ? La question est pertinente à la
lumière des résultats probants obtenus par Webster et al., (2008a,b ; 2010) avec A. fabae.
Une première explication provient peut-être de la différence entre la méthode employée par
Webster et nous. Lorsqu’il mesure la réponse d’A. fabae aux substances volatiles des fèves
(Vicia faba L.), Webster et al., (2008a) enregistrent le temps que chaque puceron passe dans
chacun des quatre secteurs de l’olfactomètre. Quant à nous, nous n’avons pas enregistré de
temps de séjour. Nous considérons qu’un puceron effectue un choix lorsqu’il s’engage dans
l’une des branches de l’olfactomètre. Chaque branche était divisée en trois zones, la première
englobant le point de contact avec les trois autres et la dernière se situant au fond, au point
d’entrée de l’air. Il fallait qu’un puceron atteigne cette troisième zone pour que nous
considérions qu’un choix avait été fait. Notre manière de procéder est probablement plus
sévère que celle adoptée par Webster (2008a) et nous pensons que cela explique largement le
fait que nos résultats apparaissent moins nets que les siens.
Deuxièmement, des facteurs affectant la qualité de l’information olfactive dans nos
expériences pourraient également expliquer nos résultats mitigés : l’incidence de la qualité de
la plante et les interactions entre le bouquet olfactif caractéristique des petits pois et un « bruit
de fond » olfactif provenant de l’habitat des plantes-hôtes.
L’une des contraintes de nos expériences était la taille des cloches en verre dans lesquelles
nous enfermions les pots de petits pois ou de petits pois cultivés avec du blé dur. Nous étions
contraints d’utiliser des plantes relativement petites, mesurant en moyenne 10 à 15 cm.
Celles-ci sont nettement plus petites que les plantes qui sont colonisées au champ. Il a par
exemple été montré que le bouquet olfactif émis par certaines plantes change avec l’âge
78
(Johnson et al., 2004). Il se pourrait donc que l’odeur des jeunes pois ou du mélange de pois
et de blé dur n’attire pas encore suffisamment les pucerons du pois.
Le « bruit de fond » olfactif, c’est-à-dire un bouquet complexe émis par l’habitat dans lequel
vivent les plantes–hôtes recherchées par les herbivores, joue parfois un rôle important dans la
perception et l’utilisation d’informations olfactives par les insectes. La détection des plantes
ne dépend pas seulement de la quantité de substances volatiles dégagées par ces plantes mais
aussi du mélange de ces odeurs dans un contexte olfactif plus large. Ainsi, des odeurs émises
par le sol ou des plantes non-hôtes peuvent, soit masquer l’information intéressant un
herbivore particulier, l’empêchant ainsi de trouver des plantes hôtes, soit rendre cette
information plus perceptible en créant un fort contraste olfactif (Vet & Dicke, 1992). Par
analogie, l’odeur d’une jacinthe perdue dans un tapis de muguets sera aisément masquée
tandis que l’odeur d’un petit cadavre de rongeurs se décomposant dans ce même tapis de
muguets sera perçue avec d’autant plus de netteté qu’elle tranche avec l’environnement
olfactif dominant.
Or, en concevant nos expériences, nous avions essayé de supprimer toute source d’odeur qui
pourrait contaminer l’information émanant des plantes. Nous recouvrions notamment la
surface des pots pour éviter que des odeurs émanant du compost soient entraînées dans
l’olfactomètre, suivant des démarches expérimentales mises en place par plusieurs auteurs
(Mendesil et al., 2009 ; Webster et al., 2008a,b ; Vet et al., 1983 ; Pettersson, 1970). Il
apparaît maintenant que nous nous sommes peut-être privés de compléments d’information
qui auraient mis en valeur l’odeur des petits pois.
Les pucerons du pois que nous avions observé ont répondu plus nettement à l’odeur d’un
mélange de petits pois et de blé dur. Toutes les expériences proposaient une odeur émanant de
12 petits pois et de 12 plantes de blé dur. Confrontés à une odeur correspondant à 24 h
d’émission dans la cloche de verre de l’olfactomètre, les pucerons choisissaient de se diriger
vers la source d’air pur, évitant le mélange d’odeurs. Lorsqu’ils percevaient une odeur
correspondant à 48 h d’émission, aucune tendance statistiquement significative n’était
enregistrée, les individus se dirigeant aussi bien vers l’odeur des plantes que vers la source
d’air pur. Enfin, les substances qui s’étaient accumulées pendant 72 h dans la cloche de verre
déclenchaient une réponse significative des pucerons vers la source d’odeur. Ce changement
dans la réponse en fonction du temps d’accumulation de l’odeur nous renvoie vers la notion
de concentration de l’information ainsi que celle de contraste du signal (voir plus haut).
79
L’odeur des petits pois devient de plus en plus perceptible au fur et à mesure que la
concentration des molécules volatiles augmente dans les cloches de verre de l’olfactomètre.
En conclusion, nous avons montré que le puceron du pois est sensible à des molécules
volatiles émises par une de ses plantes-hôtes, le petit pois (Pisum sativum L.) ; ce puceron est
également affecté par l’odeur d’une plante non-hôte, dans ce cas-ci, du blé dur. Nous avons
montré que lorsque des substances volatiles du blé dur se mêlent à celles du petit pois, les
pucerons évitent de se diriger vers cette odeur et préfèrent l’air pur. Ce résultat est intéressant
dans l’optique de la protection des petits pois cultivés en association avec du blé dur. Il
convient toutefois de rester prudent et nos résultats attendent une confirmation expérimentale.
Il faudra en premier lieu s’affranchir de la contrainte que constitue le volume des cloches de
verre de l’olfactomètre. Ces cloches étaient trop petites pour nous permettre de travailler avec
des plantes d’une taille comparable avec celles que les pucerons rencontrent dans les champs.
Au delà de cette problématique de la taille des plantes, se pose la question de la variabilité de
l’information olfactive en fonction de la taille et donc de l’âge des plantes.
Ensuite, il faudra analyser l’odeur des petits pois et celle des petits pois en association avec du
blé dur. A la lumière de notre dispositif expérimental, il n’y a aucun doute quant à l’émission
de substances volatiles par ces plantes. Celles qui émanent du blé sont connues (Birkett et al.,
2004), mais ce n’est pas le cas pour celles du petit pois. Une fois cette identification réalisée,
il faudra proposer aux pucerons un mélange synthétique ; cette démarche nous permettra, en
cas de succès, de mettre en évidence les molécules qui délivrent une information utile pour les
pucerons. Il sera sans doute plus facile de manipuler la concentration totale de l’information
olfactive dans l’air ainsi que la concentration relative des composés, une démarche
indispensable pour confirmer nos observations quant à l’attractivité ou le caractère répulsif
des odeurs (Webster, 2010 ; 2008 a,b).
Enfin, il devient pertinent, au vu de nos premiers résultats de soumettre des pucerons du pois
à de l’électro-antennographie, seule méthode qui permettra de connaître avec certitude les
molécules perçues par le système nerveux de ces insectes.
A ce moment, toute ambiguïté quant au rôle des molécules olfactives dans le comportement
de recherche de plante-hôte développé par le puceron du pois sera levée. On pourra alors
explorer les applications pratiques agronomiques de ces molécules.
80
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88
Chapitre 3 : Déplacements et aptitude du puceron du pois (Acyrthosiphon pisum Harris) dans un peuplement pur de pois (Pisum sativum L) et dans un peuplement mixte de pois et de blé dur
(Triticum aestivum L)
RÉSUMÉ :
Le puceron du pois Acyrthosiphon pisum (Harris) attaque de nombreuses légumineuses, parmi
lesquelles le petit pois (Pisum sativum L). Comme la plupart des pucerons, A. pisum est
caractérisé par sa forte propension à migrer et par son polymorphisme. Ces deux
caractéristiques permettent aux pucerons de traquer les meilleures ressources alimentaires
disponibles dans le temps et dans l’espace. Dans ce contexte, nous avons voulu savoir si
l’environnement de la plante-hôte avait une influence sur les déplacements et l’aptitude des
pucerons. Dans une serre, nous avons observé les déplacements et calculé les paramètres
démographiques d’A. pisum adultes dans un peuplement pur de pois d’hiver et dans un
peuplement mixte de pois d’hiver et de blé dur. Les distances parcourues en culture pure de
pois sont significativement plus longues qu’en culture associée. Nous avons également
observé que le taux de fécondité est plus élevé en culture associée de blé/pois par rapport à la
culture de pois pur. De même, le taux de survie des larves est plus élevé en culture associée
par rapport à la culture de pois pur même si la différence n’est pas significative. Nous nous
posons cependant la question de savoir si ces différences constatées en serre sont susceptibles
d’expliquer la moindre infestation des cultures associées au champ?
Mots clés : Acyrthosiphon pisum, Pisum sativum, déplacement des pucerons, valeur sélective.
89
3.1. INTRODUCTION
Dans le chapitre 1 de cette thèse, nous avons montré que les cultures associées de pois et de
blé dur sont significativement moins infestées par les pucerons du pois que les cultures pures
de pois. Il est peu probable que les ennemis naturels soient à eux seuls capables de réguler
l’abondance des pucerons au champ. En effet, les prédateurs et les parasitoïdes ne répondent
pas ou peu à l’accroissement de l’abondance de leurs proies par une augmentation
significative de leurs effectifs aux endroits où les pucerons sont nombreux. Cette absence de
réponse est une adaptation au caractère éphémère des colonies de pucerons (Kindlmann &
Dixon, 2001 ; Kindlmann & Dixon, 1999 ; Hemptinne & Dixon, 1991). En effet, la longévité
des pucerons est de l’ordre d’une semaine. Une colonie de pucerons croît et disparaît en 6 à 8
semaines. Les prédateurs des pucerons se développent de l’œuf à l’état adulte en 4 à 5
semaines. A la lecture de ces différences, on comprend le défi évolutif auquel doivent faire
face les prédateurs : éviter que la compétition ne fasse disparaître la ressource avant la fin de
leur développement. La solution qui a été privilégiée par la sélection naturelle n’est pas une
réponse à l’abondance temporaire des proies, mais plutôt un évitement de la compétition. En
conséquence, les ennemis naturels répartissent leurs œufs entre de nombreuses colonies de
pucerons plutôt que de les rassembler en fonction de l’abondance des proies.
Dans ce chapitre, nous nous proposons de rechercher d’autres mécanismes qui justifieraient la
différence d’infestation constatée au chapitre 1. Nous mettrons plus particulièrement l’accent
sur des expériences destinées à comprendre l’influence de la structure du peuplement végétal
et l’aptitude phénotypique des pucerons.
Les pucerons se nourrissent de la sève élaborée des plantes (Sandström et al., 2000 ; Douglas,
1993). Celle-ci n’est généralement disponible que pendant une période limitée de l’année,
pendant la phase de croissance des plantes annuelles et pérennes. De plus cette disponibilité
est modulée par les réactions de la plante aux piqûres des pucerons. Les plantes ont en effet la
faculté de tarir le flot de sève vers les apex fortement attaqués (Tjallingii, 1995). Dès lors, les
pucerons doivent continuellement se déplacer sur les plantes ou entre les plantes, à la
recherche de sites favorables pour extraire de la sève. En nous appuyant sur l’hypothèse de la
concentration des ressources (Root, 1973), nous formulons l’hypothèse qu’un peuplement
mixte de blé et de pois constitue un milieu moins favorable pour les déplacements des
90
pucerons que des parcelles de cultures pures de pois. En effet, les pucerons auraient plus de
chance de se perdre et passeraient plus de temps à rechercher une plante de pois dans un
peuplement mélangé que dans un peuplement pur. Dans ces circonstances, nous émettons
l’hypothèse que l’énergie qui serait dissipée pour supporter de longues recherches de plantes-
hôtes ne pourrait pas être allouée à la reproduction. Celle-ci devrait donc être réduite.
L’aptitude phénotypique des pucerons ne serait pas seulement affectée par cette allocation
d’énergie défavorable à la reproduction, mais aussi par la mortalité qui serait plus forte dans
les cultures associées de pois et de blé. En effet, plus les déplacements sont longs, plus les
pucerons ont de chance de rencontrer des ennemis naturels, par exemple des coccinelles, des
syrphes, ou des parasitoïdes.
3.1.1 Histoire de vie et déplacement des pucerons
A la lumière des considérations précédentes, la sève, du point de vue des pucerons, est une
ressource éphémère. Les pucerons se sont adaptés à cette ressource de plusieurs manières.
Premièrement, ils sont relativement petits et ont une durée de vie courte. Deuxièmement,
plusieurs générations de pucerons se développent par parthénogenèse au printemps et en été
sur des hôtes qualifiés de secondaires. Troisièmement, les générations parthénogénétiques
sont télescopiques (Kindlmann & Dixon, 1999 ; Dixon, 1998) ; c’est-à-dire que chaque
femelle donne naissance à des filles qui portent déjà leurs filles en état avancé de
développement dans leurs oviductes, et ces dernières leurs filles également. Enfin, en
automne, des individus ailés volent vers des plantes-hôtes primaires sur lesquels leurs
descendants passeront l’hiver. La nécessité de se déplacer est donc une adaptation essentielle
des pucerons à la fois pour trouver des sites optimaux d’extraction de sève et pour trouver des
plantes-hôtes adéquates pour se reproduire tout au long de l’année.
Les pucerons se déplacent également sur de courtes distances, ce qui leur permet de trouver
de nouvelles plantes-hôtes dans leur voisinage immédiat. Les individus aptères sont impliqués
dans de courts déplacements sur une plante hôte ou entre des plantes - hôtes en contact les
unes avec les autres. Les pucerons peuvent également voler pour découvrir des plantes - hôtes
éloignées (Harrington & Taylor, 1990). A titre d’exemple, chez Schizaphis graminum
Rondani (Kring & Kring, 1990), les individus ailés peuvent parcourir de longues distances de
l’ordre de plusieurs centaines à un millier de kilomètres (Irwin & Tresh, 1988 ; Robert, 1987).
91
Le polyphénisme, c'est-à-dire la succession d’individus ayant des morphologies différentes et
accomplissant des fonctions écologiques différentes (Dedryver, 2010) est sous la dépendance
de divers facteurs comme l’effet de groupe, l’état physiologique de la plante hôte ou la
présence d’ennemis naturels. A l’exemple d’A. pisum, les pucerons ailés sont généralement
produits lorsque les conditions environnementales deviennent mauvaises, c’est-à-dire lorsque
la qualité de la sève diminue ou lorsque des prédateurs ou des parasitoïdes attaquent la colonie
(Podjasek et al., 2005 ; Slogget & Weisser, 2002 ; Dixon & Agarwala, 1999). Cette évolution
se traduit par des changements et des coûts physiologiques. Ainsi, les femelles ailées sont
moins fécondes et croissent moins vite que les femelles non ailées (Muller et al., 2001). Par
contre, leurs muscles thoraciques qui actionnent les ailes sont très développés (Dixon, 1998;
Mackay et al., 1983; Mackay & Wellington, 1975).
La seconde forme de polyphénisme chez le puceron du pois est la reproduction sexuelle et la
reproduction asexuelle encore appelée parthénogénèse. En effet, afin de survivre aux
conditions environnementales délicates pendant la période hivernale, les pucerons produisent
des individus sexués à la fin de l’été, lesquels vont s’accoupler pour produire un œuf résistant
au froid. On parle de photopériodisme saisonnier chez les pucerons (Le Trionnaire et al.,
2008). Ce polyphénisme de reproduction est principalement induit par la diminution de la
photopériode à la fin de l’été. La descendance issue de la parthénogénèse est uniquement
femelle.
D’autres polyphénismes sont observés chez les pucerons, tels que la présence des larves
soldats chez les espèces sociales organisées en castes (Stern & Foster, 1996). Chez le puceron
Colophina arma (famille Pemphigidae) par exemple, les femelles parthénogétiques produisent
deux types de larves : des larves qui se développent pour donner des adultes se reproduisant
par parthénogenèse et des larves soldats dont le développement s’arrête au dernier stade
larvaire et dont les pattes antérieures et médianes sont modifiées et renforcées en forme de
pinces (Simon, 2007).
Il existe également un important polyphénisme de coloration chez les pucerons. C’est le cas
des variations de couleur intramorphique, qui sont d’ordinaire induites par des facteurs
environnementaux et sont réversibles. Parmi ces facteurs environnementaux, l’on retrouve les
variations de température ou d’intensité lumineuse. Par exemple, la forme rouge du puceron
Sitobion avenae F produit une progéniture verte, ou de couleur intermédiaire lorsqu’elle est
soumise à de courtes périodes d’éclairage et à faible intensité (Markkula et al., 1967). Enfin, il
92
a été récemment montré que l’infection d’A. pisum par une bactérie endosymbiotique
facultative, appartenant au genre Rickettsia, est susceptible d’intervenir sur la synthèse des
pigments conférant au puceron du pois sa couleur, en provoquant des changements de
coloration du rose au vert dans les populations naturelles (Tsuchida et al., 2011). La couleur
des insectes est une caractéristique importante qui influence les relations prédateur-proie
puisque certains phénotypes se camouflent mieux que d’autres (Abrams, 2000).
3.1.2. Le cas de polyphénisme est-il propre aux pucerons?
Chez les autres animaux, on parle volontiers de polymorphisme plutôt que de polyphénisme.
Le polymorphisme, ainsi qu’on le découvrira à travers les deux exemples présentés ci-
dessous, est la propriété des espèces animales qui se présentent sous plusieurs formes
différentes, à un même stade de développement ou plus généralement à la fin de leur
développement (Moran, 1992 ; Kawada, 1987). Il permet de faire face à plusieurs problèmes
dont le déplacement pour la recherche de nouveaux sites de nutrition et la défense contre les
prédateurs. Toutefois, polyphénisme et polymorphisme sont assez proches.
Chez les criquets, à l’exemple de Locusta migratoria (Linné), un polymorphisme apparaît en
fonction des conditions du milieu (Tanaka, 2000). Si les criquets sont peu nombreux et la
végétation peu abondante, ils arborent le phénotype de la forme solitaire, caractérisé par une
coloration verte. Mais si la végétation devient plus abondante en réponse à des circonstances
environnementales favorables, ils deviennent plus nombreux et prennent alors le phénotype de
la forme grégaire, caractérisé par des colorations brunes et jaunes et un comportement de
groupe qui les pousse, lorsqu'ils sont adultes, à s'envoler en essaims dévastateurs regroupant
plusieurs milliers d’individus. Ces différentes formes intéressent aussi bien les larves que les
adultes, mâles et femelles. Notons que ce polymorphisme est anatomique et corrélé à des
comportements particuliers (Tanaka, 2000 ; Pener, 1991). On remarque une similitude entre
les effets de groupe chez les pucerons ou les orthoptères.
Chez les termites (Ordre des Isoptères), qui sont des insectes sociaux, le polymorphisme se
traduit au niveau des castes correspondant à une division du travail et une hiérarchie sociale.
Une société est en fait une famille nombreuse, fondée par un roi et une reine, tous les deux
ailés. Parvenu à l’état adulte, ces ailés émigrent de leur colonie de naissance après un vol
nuptial et s'accouplent. Peu de temps après, ils perdent leurs ailes et creusent un terrier dans le
sol. Ce sera le point de départ de la termitière. Les premiers œufs sont pondus, ils donnent
93
naissance à des larves qui se développent en individus très différents des parents : blancs,
aveugles, sans ailes, on les appelle ouvriers. Ils prennent en charge la récolte de nourriture et
l'agrandissement de la termitière. Plus tard, apparaîtront les premiers soldats qui protégeront
la termitière. Ces derniers sont généralement de plus grande taille que les ouvriers, ont des
mandibules hypertrophiées et, selon les espèces, en forme de poire qui peut projeter de la glu
sur tout assaillant. Ouvriers et soldats sont stériles ; ils sont dits neutres. Toutefois, leurs
stades larvaires peuvent évoluer en sexués de remplacement, appelés néoténiques, en cas de
disparition du couple royal. Chez Microcerotermes strunkii (Sörensen), des individus se
différencient dès les premiers stades de développement pour former une caste de
développement permanente. Les ouvriers se distinguent des nymphes pourvues de bourgeons
alaires. Seules ces dernières pourront se développer en ailés qui s’envoleront pour fonder de
nouvelles colonies (Roisin & Korb, 2011).
Contrairement au cas des criquets, de nombreuses formes différentes sont donc présentes en
même temps dans la société des termites. Ce n'est que lorsque la colonie aura atteint une taille
importante que de nouveaux ailés se formeront et partiront de leur termitière pour fonder de
nouvelles colonies.
L'existence répandue du polymorphisme lié à la possession d’ailes dans quelques espèces
d'insectes différentes implique un compromis (« trade-off ») entre la capacité de dispersion et
les autres composants de l’aptitude phénotypique des insectes (Muller et al. 2001 ; Harrison,
1980). Les insectes ailés bénéficient de la capacité de coloniser de nouvelles plantes dans de
nouveaux habitats à travers des vols de longues distances (Sack & Stern, 2007 ; Weisser et al.,
1999). Les vols des insectes devant faciliter la recherche de la nourriture ou d’un partenaire
pour s’accoupler.
3.1.3. Evolution du déplacement des pucerons
Une fois que les plantes- hôtes ont produit leurs graines et qu’elles entrent en sénescence, les
pucerons ont le choix d’émigrer vers une nouvelle plante ou de rester pour tirer parti du peu
de sève qui circule encore. L’émigration permet aux pucerons de trouver de nouvelles plantes-
hôtes et donc de meilleurs sites pour leur développement. Cependant, cette dispersion n’est
pas sans risque : ils peuvent ne pas trouver de nouvelles plantes avant la fin de leur vie, ou
être victimes de prédateurs. Il semble néanmoins que la mortalité provoquée directement par
la dispersion est significativement plus grande que celle infligée par d’éventuels prédateurs
94
rencontrés pendant la dispersion. La plupart des ailés meurent en effet en cours de migration
avant d’avoir pu trouver une nouvelle plante-hôte. Ward et al. (1998) estiment que près de 99
% des ailés meurent au cours de ce vol. Les pucerons ailés possèdent, proportionnellement à
leur taille, de plus gros muscles thoraciques et de plus petits organes de reproduction que les
pucerons aptères. Les formes ailées sont donc moins fécondes que les formes aptères. Ceci
constitue un handicap supplémentaire.
Toutefois, le fait que la capacité de migrer ait été favorisée par la sélection naturelle indique
que les bénéfices liés à la migration sont supérieurs aux coûts. En conséquence, les individus
qui trouvent une nouvelle plante-hôte et qui parviennent à s’y développer ont une bien
meilleure aptitude que ceux qui seraient restés sur des plantes sénescentes. En effet, les
pucerons qui ne seraient pas partis n’auraient à leur disposition que des plantes déjà
colonisées, ou sénescentes voire desséchées, ce qui se traduira tout d’abord par une
compétition intense dont le résultat sera une diminution de la taille et donc de la fécondité des
individus (Murdie, 1969). Ensuite, ces pucerons sédentaires mourront de faim lorsque ces
vieilles plantes se dessècheront.
Le déplacement des pucerons est donc une stratégie évolutive fondamentale chez les
pucerons. C’est pourquoi, il est pertinent de rechercher les facteurs susceptibles de perturber
leur capacité innée à se déplacer au point d’affecter leur aptitude phénotypique. Plusieurs
études sur les déplacements des pucerons se sont focalisées sur de longues distances (Loxdale
& Lushai, 1999) et très peu sur de petits déplacements (Lombaert et al., 2006). Nous nous
proposons dans ce chapitre, de combler cette lacune et de nous intéresser aux petits
déplacements au sein d’un peuplement de plantes.
L’objectif de ce chapitre consistera à : 1. Vérifier que les pucerons adultes se déplacent sur les
plantes et répartissent leurs descendants en plusieurs endroits (d’une même plante ou sur des
plantes différentes) ou si, au contraire, ils sont peu mobiles; 2. Vérifier en fonction de la
réponse à la question précédente, si la présence de plantes non-hôtes tel que du blé dur autour
des plantes-hôtes du pois, perturbe les déplacements des pucerons; 3. Estimer l’aptitude
phénotypique des pucerons ayant à leur disposition plusieurs plantes de pois ou un mélange
de plantes de pois et de blé dur.
95
3.2. MATÉRIEL ET MÉTHODES
3.2.1 Site et période d’étude
Les expériences ont été réalisées dans le campus de l’Ecole Nationale de Formation
Agronomique (ENFA) d’Auzeville (Toulouse). Les expériences décrites ci-dessous se sont
déroulées au cours des mois de juin et juillet 2011.
3.2.2. Le matériel végétal
La variété de blé dur utilisée pour ces expériences est 1823. Celle du pois était Enduro. Toutes
les deux ont été obtenues à l’Institut National de Recherche Agronomique (INRA
d’Auzeville).
3.2.3. Le matériel animal
Les pucerons utilisés tout au long de l’expérience proviennent de l’élevage des pucerons du
pois, Acyrthosiphon pisum Harris, réalisé au sein du laboratoire de l’UMR 5174 Evolution et
Diversité biologique sur le site de l’ENFA d’Auzeville (Toulouse). Ceux-ci ont été
préalablement élevés sur des plants de fève (Vicia faba L), pendant de nombreuses
générations afin de pourvoir à l’élevage des populations de coccinelles. Pour les besoins de
cette expérience, on a acclimaté ces pucerons sur une culture de pois P. sativum, de façon à
sélectionner des individus adaptés à cette plante-hôte. Après 4 générations, les performances
des pucerons sur les pois étaient redevenues équivalentes à celles de leurs ancêtres sur les
fèves.
3.2.4. Dispositif expérimental
La préparation des graines de pois et de blé dur se fait de la manière suivante : les graines sont
mises sur une couche de coton imbibé d’eau. On les recouvre par la suite d’une seconde
couche de coton humide pendant 24 h afin de les humecter rapidement. Des vasques (hauteur
14 cm ; diamètre : 30 cm) sont remplies d’un terreau contenant 70 % de tourbe et 30 % des
autres composants (argile, perlite, fibre de coco, sable, vermiculite).
Les graines sont ensuite semées avec une densité de 6 graines par vasque pour mimer un
peuplement de pois pur, et pour mimer l’association blé-pois de 6 graines de pois et 6 graines
de blé dur.
96
Les vasques ont été placées dans un tunnel horticole en plastique de type Filclair (longueur :
30 m ; largeur : 8 m ; hauteur : 3 m), dont les côtés étaient relevés de manière à ce que les
expériences se déroulent dans des conditions de température, d’humidité et de luminosité
proches de celles qui règnent dans les champs. La température maximale pendant les essais
était de 37,3 ºC et la température minimale de 23,4 ºC. L’expérience a été réalisée dans 30
vasques de pois pur et 30 de blé dur associé au pois.
3.2.5. Expérience 1 : le déplacement des pucerons
Les tests de déplacement ont débuté avec des plantes de pois et de blé dur de taille comprises
entre 15 et 20 cm, soit un stade de développement avec cinq à sept feuilles pour le pois et cinq
feuilles pour le blé.
Pour les besoins des expériences, des individus adultes élevés sur des pois sont sélectionnés
aléatoirement et isolés dans des boîtes de Pétri de 90 mm de diamètre. Dans chaque boîte est
préalablement disposée une pousse de pois P. sativum, de 7 jours (L = 50-65 mm). Celle-ci a
germé au sein d’un morceau de coton (250 x 250 mm = 6,25 cm²) reposant sur une pièce de
papier filtre Watmann® (400 x 400 mm = 16 cm²) au fond de la boîte de Pétri. Ces pucerons
sont ainsi élevés isolément jusqu’à ce qu’ils produisent leurs premières larves. Ces juvéniles,
issus d’une même mère, sont maintenus dans une boîte de Pétri et ont accès à une pousse de
pois jusqu’à atteindre la fin de leur développement larvaire soit après 7(±1) jours (Vet et al,
1983). Ils sont alors isolés à leur tour. On les considère comme les adultes, dès qu’ils
engendrent leur premier puceron de deuxième génération parthénogénétique.
Tous les matins, l’état des pucerons a été observé, les boîtes ont été débarrassées des
éventuels morts ou exuvies et le coton servant de support à la pousse de pois a été humidifié si
nécessaire. Les individus ont été maintenus dans des enceintes climatisées à 22 °C et soumis à
un cycle photopériodique de 16 h de lumière contre 8 h d’obscurité.
Deux pucerons adultes standardisés selon la procédure présentée ci-dessus, étaient placés sur
deux plants de petits pois de chaque vasque. Pour éviter de stresser les pucerons, les
manipulations étaient faites lorsqu’il faisait frais. Les déplacements des pucerons étaient
suivis en observant les plantes toutes les heures, de 8 h à 18 h. Les informations suivantes ont
été enregistrées : la mobilité du puceron sur la plante où il a été introduit. On mesure la
97
distance parcourue sur cette plante à l’aide d’une règle et on observe si le puceron passe sur
une autre plante. Les pucerons qui sortaient de la vasque ont été également comptabilisés.
Au cours de cette expérience, les pucerons perdus dans les premières 24 h ont été remplacés.
Une vasque pouvait ainsi servir plusieurs fois. Nous avons deux traitements dans cette
expérience à savoir, des vasques mimant une culture pure de pois, et d’autres mimant une
culture associée de pois et de blé. Cette expérience s’est déroulée durant quatre jours du 05 au
08 juillet 2011. Cent vingt pucerons au total ont été utilisés au cours de cette expérience.
Les proportions de pucerons ayant changé de place tout en restant sur la plante initiale dans
les vasques avec du pois pur et dans les vasques avec des pois associés au blé dur ont été
comparées à l’aide d’un test de Chi². Les proportions de pucerons qui se sont déplacés sur une
autre plante ont été analysées de la même manière.
Les distances moyennes journalières parcourues par les pucerons dans les vasques avec des
pois et dans les vasques avec des pois et du blé ont été comparées à l’aide d’un modèle
linéaire mixte généralisé, la distance étant la variable dépendante, le type de végétation dans
le vasque étant un facteur fixe, les jours au cours desquels étaient réalisées les observations un
facteur aléatoire.
3.2.6. Expérience 2 : Estimation de l’aptitude
Pour cette expérience, des pucerons âgés de 5 à 8 jours ont été utilisés. Les pucerons ont été
standardisés de la même manière que lors de l’expérience 1. Chaque individu a été pesé tous
les jours avant d’être soumis à l’expérience, car les paramètres permettant d’apprécier
l’aptitude, comme la fécondité, sont dépendants de la taille. Les pucerons ont été par la suite
individuellement introduits dans des « clip cages » à l’aide d’un fin pinceau. Les « clip
cages » sont constitués de deux petits cylindres de plexiglas translucide (diamètre 1 cm,
hauteur : 1 cm). Chaque cylindre est collé à l’extrémité d’une pince métallique de 3,6 cm de
longueur et 0,5 cm de largeur (Figure 1). Avec le «clip cage», les feuilles étaient pincées
chacune au niveau de la nervure principale. Les pucerons étaient placés dans la mâchoire
inférieure de la cage afin qu’ils puissent s’installer sur la nervure ; à la face inférieure des
feuilles comme ils le font en conditions naturelles. Les pucerons étaient alors laissés dans les
« clip cages» autant de jours que pouvait durer l’expérience. Ces petites cages sont soutenues
par un tuteur pour éviter de faire plier les plantes à cause de leur masse.
98
Figure 1: Un modèle de clip cage enserrant une foliole de pois.
Tous les jours du 11 au 31 juillet 2011, le nombre de larves produites a été comptabilisé.
Ensuite, à l’aide d’un pinceau, ces larves ont été enlevées de la plante afin d’éviter que nous
confondions, quelques jours plus tard, la femelle initiale et ses filles devenues adultes. Au
cours de cette expérience, le nombre de pucerons morts a été compté et enregistré chaque
jour. Au total, 130 pucerons ont été utilisés au cours de cette expérience. Pour atteindre cet
effectif, les pucerons perdus ou morts pendant les premières 24 h ont été remplacés.
A la fin de l’expérience, une table de survie a été élaborée afin de comparer le taux de survie,
la fécondité en fonction du temps et le taux d’accroissement des cohortes de pucerons dans la
vasque de pois et dans la vasque du blé associée au pois. Les masses corporelles des pucerons
installés dans les deux types de vasques ont été comparées à l’aide d’un test t de Student.
La méthode de Kaplan Meier a été utilisée pour comparer les courbes de survie des pucerons
des deux traitements. C’est une méthode non paramétrique d’estimation de la survie, prenant
en compte les différents temps de vie des pucerons (Hill et al., 1990 ; Kaplan & Meir, 1958).
Les proportions de pucerons ayant pondu dans les deux types de cultures ont été comparées
par un test Chi². La longévité et la fécondité de ces pucerons ont été comparées à l’aide de
tests t de Student après avoir vérifié les conditions d’application de ce test. Dresser une table
de survie est une activité qui prend beaucoup de temps si bien qu’il n’est pas facile de prévoir
suffisamment de répétitions pour analyser la distribution de fréquences des paramètres
calculés et réaliser une analyse statistique des différences éventuellement observées.
Dans le cas des taux d’accroissement des cohortes de pucerons, nous avons utilisé la méthode
du Jackknife (Maia et al., 2000) pour obtenir une distribution de fréquences de valeurs
observées de ces taux d’accroissement. Ensuite, après vérification de l’égalité des variances,
les taux d’accroissement des deux cohortes ont été comparés par un test t de Student. Toutes
99
les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel R (R Development Core Team,
2010).
3.3. RÉSULTATS
3.3.1. Expérience I : Déplacement des pucerons
Cette expérience a été conçue pour durer cinq jours. Cependant, 73 % des pucerons sont morts
au cours de la première journée. Cette mortalité étant probablement due aux conséquences des
manipulations lors de l’installation des pucerons sur les plantes, les proportions de pucerons
se déplaçant ont d’abord été analysées en ne tenant pas en compte des observations faites
durant le premier jour. Les tests de Chi² n’ont donc été calculés que pour une expérience de 4
jours (Tableaux 1 et 2).
Nous avons également pensé qu’au bout de 5 jours, l’âge pourrait provoquer un biais dans nos
résultats. Pour tenir compte de cette éventualité, nous avons analysé une nouvelle fois les
observations sans tenir en compte ni de la première, ni de la dernière journée. Les tests de
Chi² n’ont été donc calculés que sur une durée de 3 jours (Tableau 1 et 2).
Les Annexes 4 et 5, montrent les valeurs des distances parcourues sur les deux types de
culture.
Soixante pucerons ont été observés pendant 4 jours sur les pois cultivés seuls et soixante sur
les pois cultivés avec du blé dur. Le nombre de pucerons qui se sont déplacés sur les pois est
légèrement plus élevé dans le traitement associant pois et blé. Toutefois, ces proportions ne
sont pas significativement différentes (Tableau 1). Le fait de ne pas considérer les
observations du 1er et du 5ème jour ne modifie en rien les résultats du test de comparaison des
proportions (Tableau 1, durée : 3 jours).
En considérant les observations faîtes pendant les 4 derniers jours de l’expérience, 6 pucerons
sur 9 se sont déplacés du pois initial vers une autre plante de pois dans les vasques où ne
poussaient que des pois. Dans les vasques où des pois étaient associés au blé, 2 pucerons sur
13 émigrèrent vers une nouvelle plante. Ces 2 proportions sont significativement différentes
(Tableau 2). Le fait de ne pas tenir compte des observations du cinquième jour ne modifient
pas ces conclusions (Tableau 2, durée : 3 jours).
100
Tableau 1: Nombre de pucerons se déplaçant au sein d’un plant de pois sur lequel, ils ont été déposés dans les vasques de pois et dans les vasques de pois et de blé dur. Les données sont présentées lorsqu’on déclasse les observations du premier jour en raison de la mortalité (4 jours), puis celle du premier et du cinquième jour pour éviter un biais dû à la sénescence des pucerons.
Durée de l’expérience (jours)
Type de culture Effectif qui bouge Total Test X²
4 Pois Pur 9 15
Blé Pois 13 15
Total 22 30 2,7272 (NS)
3 Pois Pur 9 15
Blé Pois 13 15
Total 22 30 2,7272 (NS)
(NS : non significatif au seuil α = 0,05)
Tableau 2: Nombre de pucerons ayant changé de plante dans les vasques avec des pois et
dans les vasques avec des pois et du blé dur. Les données sont présentées lorsqu’on déclasse
les observations du premier jour en raison de la mortalité (4 jours), puis celle du premier et du
cinquième pour éviter un biais dû à la sénescence des pucerons.
Durée de l’expérience (jours)
Type de culture Effectif qui change de plante
Total Test X²
4 Pois Pur 6 9
Blé/Pois 2 13
Total 8 22 5,639*
3 Pois Pur 4 9
Blé/Pois 1 13
Total 5 22 4,004*
(* : Test significatif au niveau α = 0,05)
Les pucerons dans les vasques plantées uniquement de pois sont ceux qui ont effectué le plus
de déplacement en valeur absolue sur les 4 jours d’expérience (Tableau 3; distance moyenne
pois pur 30,6 cm/jour, n = 9 ; distance moyenne pois-blé dur = 17,4 cm/jour, n = 13). La distance
moyenne parcourue par les pucerons en culture de pois est significativement supérieure à celle
de la culture associée blé dur et pois (P < 0,01). Les résultats de l’analyse statistique réalisée
101
sur les données enregistrées sur trois jours ne sont pas différents de ceux obtenus avec les
données enregistrées sur 4 jours (Tableau 4; distance moyenne pois pur = 21,3 cm; distance
moyenne pois-blé dur = 13,1 cm; t = -1,0215 ; ddl = 20, P= 0,3192).
Les Figures 2 et 3 montrent les courbes de déplacement dans les deux types de culture.
On constate que les distances sur les cultures de pois pur sont celles qui sont les plus longues.
On note cependant, une petite exception avec des distances plus longues en cultures associées
pour les deux premiers jours de l’expérience.
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
-20
-10
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
110
Dis
tanc
e pa
rcou
rue(
cm)
Numéro de puceron
Culture Pois pur Culture Pois + blé
Figure 2: Distances totales parcourues par les pucerons durant 4 jours dans les vasques de pois et les vasques du blé dur associé au pois
102
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
-20
-10
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
Dis
tanc
e pa
rcou
rue(
cm)
Numéro de puceron
Culture Pois pur Culture Pois + blé
Figure 3: Distances totales parcourues par les pucerons durant 3 jours dans les vasques de pois et les vasques de pois/blé. Au-delà de cette analyse, le comportement individuel des pucerons est différent dans les deux types de vasques. Dans les vasques où pousse seulement le pois, la variabilité entre les jours est plus grande que dans les vasques associant les 2 plantes (Figure 4).
103
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
0 2 4 6 8 10 12 14
Puceron
Dis
tan
ce (
cm)
dist_totale ppdist_totale pb
Figure 4: Distance totale parcourue par chaque puceron durant 4 jours en fonction du type de vasques et durant quatre journées successives d’observation. (pp = vasques de pois d’hiver; pb = vasques de pois d’hiver et de blé dur).
3.3.2. La valeur sélective des pucerons
La table de survie dressée à partir des pucerons installés dans les vasques ne contenant que
des pois d’hiver et dans celles contenant des pois d’hiver associés à du blé dur est présentée
au Tableau 3. Elle a été analysée en tenant d’abord compte à la survie des membres des deux
cohortes et de la fécondité.
104
Tableau 3: Table de survie dressée pour deux cohortes de 52 pucerons élevés respectivement sur des plantes de pois d’hiver cultivées en peuplement pur et sur des plantes de pois d’hiver cultivées en association avec du blé dur.
Jours Survie Survie relative (lx)
Nb de Larves
Taux de mortalité
(qx)
Taux de fécondité
(mx)
lxmx
PB PP PB PP PB PP PB PP PB PP PB PP
0 58 72 1,000 1,000 0 0 0,103 0,278 0,000 0,000 0 0
1 52 52 0,897 0,722 31 11 0,404 0,346 0,596 0,212 0,534 0,153
2 31 34 0,534 0,472 100 30 0,323 0,235 3,226 0,882 1,724 0,417
3 21 26 0,362 0,361 86 60 0,095 0,115 4,095 2,308 1,483 0,833
4 19 23 0,328 0,319 82 57 0,211 0,174 4,316 2,478 1,414 0,792
5 15 19 0,259 0,264 72 80 0,200 0,263 4,800 4,211 1,241 1,111
6 12 14 0,207 0,194 42 39 0,167 0,071 3,500 2,786 0,724 0,542
7 10 13 0,172 0,181 46 50 0,100 0,154 4,600 3,846 0,793 0,694
8 9 11 0,155 0,153 29 36 0,222 0,455 3,222 3,273 0,500 0,500
9 7 6 0,121 0,083 20 23 0,143 0,000 2,857 3,833 0,345 0,319
10 6 6 0,103 0,083 15 15 0,167 0,167 2,500 2,500 0,259 0,208
11 5 5 0,086 0,069 10 17 0,200 0,600 2,000 3,400 0,172 0,236
12 4 2 0,069 0,028 12 5 0,000 0,000 3,000 2,500 0,207 0,069
13 4 2 0,069 0,028 6 9 0,000 0,000 1,500 4,500 0,103 0,125
14 4 2 0,069 0,028 3 10 0,000 0,500 0,750 5,000 0,052 0,139
15 4 1 0,069 0,014 13 1 0,250 0,000 3,250 1,000 0,224 0,014
16 3 1 0,052 0,014 5 5 0,667 0,000 1,667 5,000 0,086 0,069
17 1 1 0,017 0,014 0 0 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
R0 9,862 6,222
Légende : PP : pois pur ; PB : pois-blé
Ro : Taux de Reproduction Net = Ʃ lxmx
105
3.3.2.1 Survie des pucerons
Au début de l’expérience, la cohorte de pucerons déployée dans les vasques de pois
comportait 72 individus et celle des vasques de pois et de blé 58 individus. La masse
corporelle moyenne des pucerons de la cohorte des vasques de pois n’est pas
significativement différente de celle des pucerons des vasques de pois et de blé (Puceron pois
pur : 1,4537 mg, puceron pois-blé : 1,6134 mg. Le test de t de Student avec variances égales, nous
permet d’avoir : t = 1,705; ddl = 128; P = 0,08242).
Le taux de survie des deux cohortes de pucerons est similaire. Dans les deux cas, 50 % des
pucerons meurent au cours des trois premiers jours de l’expérience. Après 5 jours, le taux de
survie est de l’ordre de 25 %. Cependant, on ne note pas de différence statistiquement
significative entre l’évolution du taux de survie au cours du temps dans les deux cohortes de
pucerons sur les deux types de plantes (Figure 5, P = 0,415).
0
0.2
0.4
0.6
0.8
1
1.2
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18
Jour
Eff
ecti
f re
lati
f
Survie relative pbSurvie relative pp
Figure 5 : Taux de survie des pucerons des cohortes déposées dans la vasque de pois et dans la vasque de pois d’hiver et du blé dur (pb).
106
3.3.2.2. Ponte et aptitude
Un grand nombre de pucerons n’a jamais pondu au cours de l’expérience quel que soit le type
de vasque : 46 sur 72 parmi les pucerons installés dans les vasques de pois d’hiver et 32 sur
58 dans les vasques de pois d’hiver et de blé dur. La proportion de pucerons qui pondent était
de 36 % dans les vasques de pois pur et de 44 % dans les vasques de culture associée. Ces
deux proportions ne sont pas significativement différentes (Chi²= 1,017, ddl = 1; P > 0.05). La
longévité des pucerons stériles (9,8 j) était significativement plus courte que celles des
pucerons qui eurent une descendance (15,2 j) et ce, quel que soit le type de vasque (test t avec
variances inégales : t = -8,4864, 54,54 ddl, P = 1,510e-11). Il a été décidé de ne pas tenir
compte de ces pucerons sans descendance dans la suite de l’analyse. En effet, ces derniers
furent peut-être blessés lors de leur installation dans les clips cages.
La longévité moyenne des pucerons féconds élevés dans les vasques de pois était en moyenne
de 15,6 j et celle de ceux élevés dans les vasques de pois/blé de 14,8 j pour ceux qui furent
élevés dans les vasques de pois associés au blé dur. Cette différence n’est pas significative
(Test t avec variances égales : t = -0,7081, 50 ddl, P = 0,4824). De même, la fécondité
moyenne des pucerons des vasques de pois (17,2 larves/individu) n’est pas significativement
différente de celle des pucerons des vasques associant pois d’hiver et blé dur (22,0
larves/individu) (test t avec variances égales : t = 0,9760, 50 ddl, P = 0,3338).
A la lecture du Tableau 4, il ressort que la cohorte des pucerons élevés dans les vasques où
pousse une culture mixte de pois d’hiver et de blé dur a un taux net moyen de reproduction
supérieur à celle des vasques où pousse seulement du pois (21,874 vs 16,999 respectivement).
Ces deux valeurs, comparées à l’aide d’un test non-paramétrique de Wilcoxon, sont
significativement différentes (W = 625, P = 1,409e09).
107
Tableau 4: Les nombres totaux de larves produites et les taux nets de reproduction calculés pour les cohortes élevées dans des vasques de pois d’hiver (PP) ou des vasques associant pois d’hiver et blé dur (PB) : application de la méthode du Jackknife à la table de survie présentée au Tableau 3. Permutation Nb total de larves Taux net de reproduction (R0) PB PP PB PP 1 531 448 21,235 17,914 2 503 431 20,118 17,237 3 560 431 23,189 17,238 4 569 453 22,758 18,118 5 565 398 22,598 15,918 6 515 436 20,598 17,438 7 547 439 21,879 17,558 8 549 396 21,960 15,840 9 544 428 21,760 17,120 10 556 405 22,238 14,958 11 554 440 22,157 17,598 12 556 423 22,238 16,918 13 534 428 21,358 17,119 14 557 443 22,278 17,717 15 558 424 22,318 16,958 16 494 434 19,759 17,358 17 557 441 22,278 17,637 18 544 435 21,758 17,397 19 550 434 21,998 17,358 20 551 406 22,039 16,238 21 521 391 20,838 15,358 22 541 432 21,638 17,277 23 561 421 22,438 16,837 24 565 408 22,598 16,318 25 565 439 22,827 17,558
R0 moyen 21,874 16,999
3.4. DISCUSSION
Au cours d’observations de terrain réalisées de 2007 à 2010, nous avons observé que les
cultures associées de pois d’hiver et de blé dur étaient toujours significativement moins
infestées par le puceron du pois (A. pisum) que les cultures pures de pois (Chapitre 1). En
partant de nos connaissances sur l’écologie des prédateurs de pucerons (Kindlmann & Dixon,
1999), cette différence ne semble pas découler d’un meilleur contrôle biologique dans les
cultures associées.
L’objectif de ce chapitre est de rechercher d’autres explications, en analysant les
déplacements, la survie et la fécondité de deux cohortes de pucerons, l’une dans un
108
peuplement expérimental de pois d’hiver et l’autre dans une culture associée de pois d’hiver
et de blé dur.
3.4.1. Sur le déplacement des pucerons
Les pucerons cherchent leurs plantes-hôtes lorsque celles-ci sont au maximum de leur
production en termes de qualité. Dans notre dispositif expérimental, les pucerons ont été très
mobiles aussi bien dans les vasques de pois d’hiver que dans les vasques de pois d’hiver et de
blé dur. Ils se sont déplacés tout au long des journées, à la recherche de sites d’alimentation et
de ponte. Nous n’avons pas constaté de différence significative dans le nombre de pucerons
en mouvement dans les deux types de culture. Par contre, les pucerons des vasques mimant
des cultures pures de pois d’hiver sont ceux qui ont le plus changé de plante. De ce fait, les
déplacements quotidiens des pucerons en culture pure sont à peu près le double (30 cm) de
ceux des pucerons en culture associée (17 cm).
Nous avons montré que les pucerons se déplacent très fréquemment sur une plante à la
recherche de meilleurs sites d’alimentation. Ils changent aussi de plantes lors de leurs petits
déplacements. Au cours de notre expérience, nous avons pu observer que les pucerons en
culture pure de pois se déplaçaient beaucoup plus que les pucerons en culture associée de blé
et pois. Selon nos observations, ces déplacements semblaient être facilités par le réseau dense
de vrilles reliant les plantes de pois entre elles.
Par le passé, les études sur les déplacements des pucerons ont porté beaucoup plus sur de
longues distances avec l’utilisation des moyens aériens (Kring & Kring, 1990 ; Kring, 1972).
Dans le cas par exemple des déplacements internes, la position sur la plante varie selon le
stade phénologique de la plante, la valeur nutritionnelle et des conditions microclimatiques
régnant sur une zone donnée de la plante. D’autres travaux ont porté sur les déplacements des
pucerons en utilisant des radars, des pièges, sur des altitudes très hautes ou par vidéos
(Mashanova et al., 2010 ; Oliver et al., 2007). L’originalité de notre travail porte sur la
comparaison réalisée en serre dans des conditions proches de celles du terrain, des
déplacements et des paramètres démographiques du puceron du pois dans une monoculture et
dans une culture associée.
109
Les travaux d’Oliver et al. (2007) ont montré que les pucerons (notamment Aphis fabae
Scopoli et A. pisum Harris) dans leur relation de mutualisme avec les fourmis, pouvaient être
freinés dans leur déplacement par les fourmis notamment (Lasius niger (L) par une substance
chimique.
Nos résultats suggèrent que les pucerons colonisent rapidement un peuplement pur de leurs
plantes-hôtes comparés aux pucerons installés dans les vasques mixtes : les premiers changent
plus de plantes et se déplacent sur de plus grandes distances que les seconds. Grâce à ce
comportement, les femelles évitent de mettre leurs descendants en situation de compétition.
En conséquence, à une échelle de temps plus longue que celle sur laquelle nous avons réalisé
nos observations.
On peut penser que cela doit conduire à un accroissement plus rapide et plus important des
effectifs dans les cultures pures. Cette supposition s’appuie sur le fait que la compétition
intraspécifique réduit la fécondité des pucerons et induit plus rapidement l’apparition
d’individus ailés (Dixon, 1998). Lorsque ces derniers émigrent, ils provoquent la disparition
de leur colonie.
3.4.2. Survie et fécondité des pucerons
La survie des pucerons sur les cultures associées de pois d’hiver et de blé dur n’est pas
significativement différente de celle des pucerons n’ayant que des pois d’hiver à leur
disposition. Néanmoins, on observe quelques tendances dignes d’intérêt. Au début de
l’expérience, entre le 1er et le 7ème jour, la courbe de survie en culture pure de pois est au
dessus de celle des cultures associées. A la fin de l’expérience, de l’intervalle du 12ème au
16ème jour, la tendance s’inverse et la courbe en culture associée passe au dessus de celle des
vasques de monoculture de pois d’hiver.
En termes de longévité et de fécondité totale, les pucerons des deux cohortes ne sont pas
différents. Pourtant, lorsqu’on calcule le taux net d’accroissement des deux cohortes, la valeur
de la cohorte élevée sur des pois d’hiver associés à du blé dur est significativement supérieur
à celle des pucerons des vasques de culture pure de pois d’hiver. Ce résultat suggère que les
tendances non significatives observées dans les courbes de survie des pucerons des deux
cohortes jouent finalement un rôle cumulatif important.
110
De plus, ce résultat est contraire aux observations faites sur le terrain en termes d’infestations
des pucerons. Toutefois, il suggère que les plantes de pois d’hiver en culture associée seraient
d’une meilleure qualité nutritive que les plantes de pois en culture pure. Serait-il possible que
nous ayons reproduit les effets de la cohabitation observés au champ, à savoir que les plantes
de pois fixeraient plus d’azote atmosphérique (Bedoussac & Justes, 2010) ?
Dans une étude de Hutchinson & Hogg, 1985 sur les tables de survie de trois populations d’A.
pisum sur la luzerne (Medicago sativa L), le déplacement et les transmissions de maladies par
les virus sont les principales causes de la mortalité d’A. pisum. Les paramètres
démographiques du puceron du niébé Aphis craccivora Koch ont été mesurés sur la résistance
de cinq variétés de plantes, il en ressort que les paramètres démographiques sont influencés
par la variété de plante (Obopile & Ositile, 2010), bien que cette étude ait porté dans des
conditions en milieu tropical. Le présent travail pourrait donc s’orienter dans le futur sur une
comparaison des différentes variétés du pois et du blé dur en vue de mieux mesurer les
paramètres démographiques d’A. pisum.
Une des faiblesses de notre expérience réside dans le fait que les pucerons ont été maintenus
toute leur vie dans les clips cages et qu’ils n’ont pas eu l’occasion de se déplacer parmi les
plantes à leur disposition dans les vasques. Ainsi, nous n’avons pu estimer le poids relatif du
taux net de reproduction par rapport à la capacité de se déplacer. Cette restriction au
mouvement s’explique par l’expérience que nous avions acquise lors de notre essai sur les
déplacements. En ouvrant les cages après l’installation des adultes, ceux-ci se déplacent et
déposent des larves au gré de ces déplacements. Comme les larves sont petites et vertes, on a
du mal à les repérer. Il y a donc un risque de sous-estimer la fécondité et à termes, de
confondre les filles avec leurs mères, de confondre et de compter les descendants des
premières et des secondes.
3.5. CONCLUSION
Nous savions que les pucerons se déplacent en marchant sur de courtes distances, ce qui leur
permet de découvrir de nouvelles plantes-hôtes dans leur voisinage immédiat ou volent pour
découvrir des plantes-hôtes situées à de très longues distances. Le déplacement des pucerons
sur de longues distances est celui sur lequel beaucoup de travaux ont été réalisés, comme ces
vols actifs effectués par Schizaphis graminum Rondani (Kring & Kring, 1990) aux USA ou
111
les vols passifs au cours desquels Rhopalosiphum maidis Fitch est emporté par les courants
aériens sur de longues distances aux USA (Irwin & Tresh, 1988). Dans notre travail, il était
question de se pencher sur les déplacements relatifs aux courtes distances sur une même
plante ou sur les plantes situées dans un environnement très proche, aspect de l’écologie des
pucerons à laquelle on prête généralement peu d’attention.
Etant plus mobiles et bénéficiant probablement du réseau de vrilles reliant les plantes de pois,
les distances parcourues par les pucerons en culture pure de pois d’hiver sont plus longues
qu’en culture associée. Ainsi, les pucerons tirent un excellent profit de la structure simple de
la monoculture. Ils colonisent rapidement le peuplement végétal et découvrent ainsi de
nombreux sites de bonne qualité pour s’alimenter et pour déposer leurs larves. Ceci constitue
un avantage en termes d’aptitude phénotypique car la compétition intraspécifique s’en trouve
réduite.
Par contre nos résultats ont permis de montrer que l’association blé dur/pois d’hiver réduisait
l’amplitude des déplacements des pucerons par rapport à la culture de pois pur, ce qui aurait
une forte incidence sur les infestations de pucerons en culture associée de blé dur et pois
d’hiver. La plus grande complexité de la végétation d’une culture associée par rapport à des
monocultures serait donc un facteur déterminant dans la réduction de l’abondance des
pucerons dans les cultures associées.
Pour ce qui est de la survie et de la fécondité des pucerons, nos résultats n’expliquent pas les
différences d’infestation que nous avons observées en champ (voir Chapitre 1). Les pucerons
ne pouvant se déplacer dans les clips cages, les pucerons des vasques plantées de pois d’hiver
ont la même longévité que ceux des vasques associant pois d’hiver et blé dur. Néanmoins, le
taux net de reproduction des pucerons est plus faible en culture pure qu’en culture mixte,
comme ces derniers s’épanouissent mieux dans ce dernier type de culture. Nous avons émis
l’hypothèse que ceci s’expliquerait par une meilleure qualité du pois, probablement parce que
leur sève serait plus riche en azote (Bedoussac et Justes, 2010)
Même s’il serait intéressant d’imaginer une expérience qui permette aux pucerons de se
déplacer et de répartir leurs larves entre plusieurs plantes, nos résultats indiquent que la
colonisation aisée de nouvelles plantes est probablement le facteur prépondérant expliquant la
moindre infestation des monocultures de pois d’hiver par le puceron du pois, A. pisum.
112
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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116
Chapitre IV. Discussion générale
4.1. L’ INTÉRÊT DES CULTURES ASSOCIÉES : CONTEXTE GÉNÉRAL ET RAPPEL DE LA
PROBLÉMATIQUE
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’agriculture européenne entamait une profonde
mutation. La surface des exploitations augmentait tandis que la main d’œuvre diminuait. En
parallèle, les exploitations agricoles se spécialisèrent et les itinéraires techniques devinrent
plus simples et mieux maîtrisables. Cette évolution fut contrariée à partir de la fin du
vingtième siècle. En effet, suite au Sommet de la Terre en 1992 à Rio de Janeiro, on
commença à mettre l’accent sur la nécessité d’un développement durable. Les travaux de
recherche sur les cultures associées, dont il est question dans cette thèse, s’inscrivent dans
cette recherche de durabilité.
La concurrence et la complémentarité entre des plantes en cultures associées, sélectionnées de
façon appropriée, améliorent la stabilité générale du système agricole en procurant notamment
une résistance efficace contre les organismes nuisibles, maladies et mauvaises herbes
(Bedoussac, 2009). L’objectif général de cette thèse est d’explorer les mécanismes qui
conféreraient cette protection.
Les recherches qui sont relatées dans les chapitres précédents s’inscrivent dans le contexte des
associations entre céréales et légumineuses. Les deux raisons le plus souvent avancées, pour
l’adoption de telles associations, résident dans le gain de rendement global par rapport à des
cultures « pures » ou monospécifiques et dans l’amélioration de la teneur en protéines des
grains de la céréale. Ces résultats, obtenus aussi bien en agriculture conventionnelle (avec
apport d’engrais azotés et contrôle chimique des maladies, ravageurs et adventices) qu’en
agriculture biologique (sans intrant chimique), s’expliqueraient par une meilleure valorisation
des ressources du milieu. Ceci est vrai dans les systèmes à bas niveaux d’intrants azotés
(Bedoussac & Justes, 2010a, 2010b ; Hauggaard-Nielsen et al., 2003; Jensen, 1996; Willey,
1990; Vandermeer, 1989 ; Ofori & Stern, 1987 ; Willey 1979).
Les associations pourraient également être un moyen de réduire, dans certaines situations, la
pression des adventices, maladies et ravageurs (Altieri, 1999 ; Trenbath, 1993), souvent
considérés comme des facteurs déterminants de la production agricole, faisant ainsi des
117
associations une alternative à la lutte chimique (Hauggaard-Nielsen et al., 2001b ; Bulson et
al., 1997 ; Liebman, 1988). D’autre part, le mélange des espèces présente d’autres avantages
comme : i) la réduction de l’érosion des sols par une meilleure couverture du sol et un plus
grand enracinement (Anil et al., 1998), ii) une amélioration de la résistance à la verse (Anil et
al., 1998), iii) une réduction des risques de lixiviation de nitrates (Corre-Hellou, 2005;
Hauggaard-Nielsen et al., 2003) ou, encore iv) une meilleure stabilité interannuelle des
rendements (Lithourgidis et al., 2006). Les associations céréale-légumineuse pourraient par
conséquent présenter un intérêt aussi bien en agriculture biologique pour améliorer la qualité
des blés durs qu’en agriculture conventionnelle pour réduire les intrants chimiques et
améliorer les performances économiques et environnementales des systèmes de production.
L’azote étant un facteur limitant de la production et de la qualité du blé, il est possible de
réduire autant que possible ces pertes en adaptant le système de culture. Une des voies
possibles est la culture associée du blé avec des légumineuses à graines et notamment dans le
cas de cette thèse, le petit pois. En ce qui concerne la complémentarité entre cultures dans le
cas des céréales et légumineuses, les céréales profitent de la fixation de l’azote par les
légumineuses. Ainsi, il a été montré que la teneur en protéines de l’orge de printemps
augmente lorsqu’elle est cultivée en association avec du pois de printemps en agriculture
biologique (Jensen et al., 2006). L’une des principales hypothèses avancées pour expliquer
l’amélioration du rendement et de la teneur en protéines de la céréale cultivée en association
avec une légumineuse dans les systèmes à bas intrants est une disponibilité en azote minéral
par plante de céréale qui serait plus importante. Il y a ainsi complémentarité dans l’utilisation
des ressources azotées liée à deux pools d’azote différents. Il s’agit ici, de l’azote du sol
exploité par la céréale et de l’azote atmosphérique exploité par la légumineuse. Les travaux
d’Andersen et al. (2005) et Jensen (1996) montrent ainsi une meilleure utilisation de l’azote
du sol par la céréale et une augmentation de la contribution de la fixation symbiotique chez la
légumineuse. Cela s’expliquerait en partie par un équilibre entre fixation et absorption d’azote
minéral du sol par les deux espèces qui utilisent des sources d’azote différentes et, par
ailleurs, comme il y a moins de pieds de céréales par hectare, par une utilisation du pool par
moins de consommateurs (Corre-Hellou, 2005 ; Hauggaard-Nielsen et al., 2003; Hauggaard-
Nielsen et al., 2001a,b ; Tofinga et al., 1993). Des processus similaires sont en jeu pour
l’utilisation de la lumière (Berntsen et al., 2004), dans le cas où les espèces associées
présentent des architectures aériennes ou des dynamiques de croissance différentes et
complémentaires (Tsubo & Walker, 2004 ; Tsubo et al., 2001 ; Trenbath, 1986), à ceci près
118
qu’il n’existe qu’une seule source de lumière disponible, contrairement à l’azote. Ces
différences et complémentarités interspécifiques permettraient une meilleure occupation
dynamique de l’espace et donc une augmentation de l’interception du rayonnement solaire
incident tout au long de la croissance de l’association. Ces deux mécanismes, que sont
l’acquisition de l’azote et l’interception du rayonnement, sont intimement liés et sous la
dépendance des dynamiques de croissance du système aérien et racinaire (Dreccer et al.,
2000). La complémentarité se traduit par une meilleure valorisation de l’énergie lumineuse
sur l’ensemble du cycle comparativement aux cultures pures. On a ainsi, une croissance
décalée des deux espèces, le pois d’hiver se développant de façon plus tardive que le blé dur.
A ces éléments, s’ajoutent les différences de hauteur entre les couverts, le blé dur étant plus
haut que le pois d’hiver. Cela pourrait expliquer à la fois le gain de rendement et la réduction
des adventices souvent observés (Banik et al., 2006).
Les travaux de Bedoussac & Justes (2010a, 2010b ; 2006) ont montré que les associations
céréales-légumineuses, notamment blé dur-pois d’hiver ou féverole, avaient des rendements
supérieurs aux monocultures, et semblaient avoir aussi une plus faible susceptibilité aux
maladies et aux ravageurs, notamment aux pucerons verts du pois (Acyrthosiphon pisum
Harris).
Le présent travail de thèse a pour objectif de vérifier la moindre susceptibilité des cultures
associées de blé dur et de pois d’hiver aux pucerons verts du pois et de rechercher les
mécanismes responsables de la réduction des infestations de pucerons en culture associée par
rapport à la monoculture de pois.
4. 2. LA REGULATION DE L ’ABONDANCE DES HERBIVORES
Selon l’hypothèse du « monde est vert » (« the green world hypothesis ») de Hairston et al.,
(1960), la régulation de l’abondance des herbivores se ferait le plus souvent par la mortalité
infligée par des ennemis naturels. Comme ces derniers occupent une place plus élevée dans
les réseaux trophiques que leurs proies, on parle de régulation « top-down », du haut vers le
bas. L’application pratique de cette manière de réguler consiste en une lutte contre un
ravageur en favorisant ou introduisant son ou ses ennemis naturels.
L’effet « Top-down », suppose donc une régulation des populations de phytophages par les
niveaux trophiques supérieurs. En effet, les ennemis naturels, par la pression de la prédation
119
ou du parasitisme qu’ils exercent, peuvent réguler les populations de phytophages à condition
que la mortalité infligée soit densité-dépendante (Halaj & Wise, 2001).
Au contraire l’effet « Bottom-up » suppose donc une régulation des phytophages par les
niveaux inférieurs des chaînes trophiques, en général par les plantes. Les plantes étant des
producteurs primaires, elles sont à la base des réseaux trophiques. Ainsi, leurs caractéristiques
morphologiques, physiologiques, nutritives, physiques, architecturales ou chimiques peuvent
limiter le développement des populations d’organismes herbivores. Les plantes peuvent avoir
un impact négatif sur les performances des insectes. Par exemple, Petermann et al. (2010), en
milieu naturel, et Winter & Rostas (2010), en laboratoire montrent que l’absence de l’azote
peut entraîner une diminution du poids des phytophages.
Les défenses constitutives ou inductibles des plantes peuvent également influencer sur les
performances des phytophages (Fernandes, 1994). Ainsi, les trichomes (défenses physiques)
de certaines plantes, empêchent les insectes de consommer les feuilles. Les trichomes peuvent
aussi former des crochets ou des pointes qui piègent les insectes. De même les défenses
chimiques rencontrées chez certaines espèces de plantes, comme les alcaloïdes ou les
glycosides, peuvent réduire les performances des phytophages (Lampert & Bowers, 2010 ;
Barbosa et al., 1991).
Aux défenses directes des plantes contre les phytophages, peuvent s’ajouter des défenses
indirectes via l’attraction des ennemis naturels (Turlings et al. 1995 ; Turlings et al., 1990).
Cette attraction faciliterait la localisation de plantes infestées par les ennemis naturels. Ces
derniers par leur contribution à la limitation au développement des populations de
phytophages, effet « Top-down », augmenteraient la valeur phénotypique des plantes (Dicke,
2009). Il a été également observé que des plantes voisines attaquées peuvent attirer les
ennemis naturels des phytophages présents sur une plante cible, lui procurant ainsi une
protection contre ses agresseurs ; c’est l’hypothèse de la résistance par association via les
ennemis naturels (Stiling et al., 2003). On parle ici de plantes compagnes qui attireraient ou
repousseraient les ennemis naturels. Les critères de leur choix restent déterminants pour
optimiser ces associations.
Les caractéristiques individuelles des plantes ainsi que leur environnement proche peuvent
affecter le comportement des phytophages. Ainsi, la régulation des phytophages peut
également être due à des modifications de leur comportement de choix de la plante hôte. La
120
colonisation d’une plante cible par des phytophages spécialistes et généralistes pourrait être
influencée par la présence de plantes voisines qui seraient soit attractives ou répulsives. Des
études ont montré que les plantes voisines, par l’intermédiaire de leurs composés chimiques
toxiques ou de leurs caractéristiques physiques (grande taille ou présence d’épines) pouvaient
repousser des phytophages généralistes (Barbosa et al., 2009), conduisant à une résistance par
association pour la plante cible (Atsatt & O’Dowd, 1976). Ce phénomène peut également
avoir lieu si les plantes voisines sont très attractives (présence de composés spécifiques), pour
un phytophage spécialiste.
Néanmoins, ces plantes voisines attractives peuvent finalement provoquer une colonisation
plus importante de la plante cible lorsque les phytophages attirés en masse colonisent celle-ci.
Dans ce cas, il s’agit du phénomène de susceptibilité par association. Afin de mieux
appréhender le rôle joué par des plantes dans la régulation des populations de phytophages, il
apparaît donc nécessaire de prendre en compte la présence de plantes voisines sur le
comportement de choix des phytophages. Dans notre cas, ces plantes voisines se conçoivent
dans le cadre d’une association de culture (blé dur et pois d’hiver) d’une part, et, d’autre part
par une monoculture de pois d’hiver pur.
Cependant, selon les spécificités des ravageurs, cette hypothèse de la régulation par les
ennemis naturels peut s’appliquer difficilement comme dans le cas des pucerons du pois
(Kindlmann & Dixon, 1999). Il s’avère donc important de considérer aussi l’hypothèse selon
laquelle, les ravageurs seraient régulés par le « Bottom-up», c’est-à-dire en montrant
l’importance relative de la plante hôte et des pratiques culturales.
4.3. RAPPEL DES PRINCIPAUX RÉSULTATS
4.3.1. Les expériences en champs : évaluation de l’abondance des pucerons verts du pois en monoculture et en culture associée
Sur la base des campagnes de terrain de 2007 et 2008, puis de 2009 et de 2010, nous pouvons
affirmer qu’associer les pois d’hiver au blé dur est un moyen efficace de réduire les
populations de pucerons verts du pois par rapport à la monoculture de pois d’hiver.
Ce travail est certes basé sur deux années sur de petites parcelles d’expérimentation et sur de
grandes parcelles en milieu réel les deux autres années. Cela nous a permis de prendre en
considération différents contextes pédoclimatiques ainsi que diverses pressions
démographiques des pucerons. L’avantage des cultures associées est donc à l’épreuve des
121
variations de conditions climatiques au cours du temps et des variations de l’abondance des
pucerons d’une année à l’autre. Plusieurs explications peuvent être avancées pour rendre
compte de ces différences significatives.
En premier lieu, cet effet significatif des monocultures qui sont plus infestées, s’expliquerait
par l’usage des stimuli visuels et olfactifs par lesquels les insectes reconnaissent leurs plantes
hôtes qui seraient plus facilement repérables en monoculture qu’en culture associée. Selon
l’hypothèse de la concentration des ressources formulée par Tahvanainen & Root (1972) et
Root (1973), beaucoup d’herbivores notamment les plus spécialistes ont plus de probabilité de
trouver leurs plantes-hôtes quand celles-ci se présentent en peuplements denses ou même
monospécifiques par rapport aux peuplements plurispécifiques. De nombreux travaux ont
cherché à tester l’hypothèse de la concentration des ressources. Cependant, beaucoup ont
porté sur les relations entre diversité végétale et diversité des arthropodes phytophages
(Koricheva et al., 2000; Mulder et al., 1999), et celles existant entre deux extrêmes de
diversité (« monocultures vs polycultures », en agriculture comme en sylviculture) et les
niveaux de population des arthropodes phytophages (Jactel et al., 2005 ; Finch & Collier,
2000 ; Andow, 1991 ; Russell, 1989).
L’hypothèse d’une barrière chimique à la colonisation de la plante hôte suggère que les
insectes qui repèrent leurs hôtes par certains composés volatiles qu’ils émettent, sont
perturbés par la présence de composés émis par d’autres plantes. Dans les cultures associées,
le signal olfactif émis est donc plus complexe que dans la monoculture, rendant difficile le
repérage de la plante hôte par l’insecte.
La notion de barrière physique concerne également les insectes utilisant activement des
stimuli visuels pour détecter leurs hôtes (Prokopy & Owens, 1983). Ces insectes peuvent être
perturbés par la présence de plantes non hôtes ayant une forme ou une couleur différente.
Enfin, les fortes infestations des pucerons en monoculture de pois, pourraient aussi
s’expliquer par les qualités nutritives élevées du pois avec un taux élevé d’azote qui
favoriserait la reproduction des pucerons. Les travaux de Hu et al. (1992) ; Walter & Difonzo
(2007), ont montré que l’azote favorisait parfois une forte présence du puceron du soja (Aphis
glycine Matsumura) chez les plantes qui sont plus riches en cet élément.
A côté de cette hypothèse de la concentration des ressources, on pourrait aussi citer celle des
ennemis naturels «Top-down» qui fut formulée par Pimentel (1961). Elle stipule que la
122
dynamique des populations de ravageurs est réduite dans les systèmes diversifiés parce que
l’activité des ennemis naturels est augmentée par des paramètres environnementaux comme la
température, l’ensoleillement qui prévalent dans les agroécosystèmes complexes. Le contrôle
biologique des ravageurs par leurs ennemis naturels selon Pimentel (1961) rejoint un peu
l’hypothèse de la concentration des ressources en ce sens que les pullulations des ravageurs
sont plus fréquentes en monocultures (Risch et al., 1983 ; Andow, 1986). Il reste cependant à
concilier cette hypothèse avec les freins à la régulation biologique avancés par Kindlmann &
Dixon (1999).
Les pucerons avec leur temps de développement très rapide, posent d’énormes difficultés pour
leur régulation par les ennemis naturels notamment les prédateurs. En effet, les prédateurs
aphidiphages ont un temps de développement plus lent que celui de leur proie. Le rapport des
temps de génération est une des clés de compréhension de la limite de la régulation des
pucerons par les coccinelles (Kindlmann & Dixon, 1999). Les femelles des espèces dont les
larves se développent plus lentement que les proies courent le risque de voir disparaître ces
dernières avant la fin du développement de leurs larves. Pour les espèces aphidiphages, dont
le temps de développement des larves est à peu près équivalent à la durée de vie d’une colonie
de pucerons (Hemptinne et al., 1992), la fenêtre d’oviposition, c’est-à-dire le moment optimal
de ponte par rapport au développement de la proie, serait donc relativement étroite et se
situerait au début du développement d’une colonie de pucerons.
Notre étude et l’ensemble des études citées dans ce travail traitent le plus souvent de la
diversité végétale à l’échelle de la parcelle ou du peuplement. Or, les capacités de dispersion
des insectes herbivores, qui peuvent atteindre plusieurs kilomètres, indiquent que leur
territoire peut s’étendre à des surfaces bien plus importantes. Par ailleurs, la diversité des
plantes est aussi distribuée à l’échelle du paysage notamment quand celui-ci est composé de
parcelles de compositions végétales différentes. Bien que les cultures associées soient
actuellement l’objet d’un regain d’intérêt en Europe, elles posent de problèmes techniques
pour pouvoir être étendues à l’ensemble des monocultures. Or, certains travaux ont montré
que la biodiversité pouvait être conservée ou restaurée en modifiant la composition des
paysages des cultures (Brockerhoff et al., 2008). Il apparaît donc intéressant et utile de
considérer la relation entre diversité et résistance des écosystèmes aux insectes herbivores à
l’échelle du paysage.
123
4.3.2. Sur les déplacements et la valeur phénotypique des pucerons sur les différentes cultures
A la suite des résultats obtenus en champ, on a voulu vérifier au laboratoire si les pucerons
étaient handicapés par le mélange de plantes. Le travail actuel s’est donc proposé de suivre la
longévité des pucerons depuis leur naissance jusqu’à leur fin de vie, en comptant en même
temps leur déplacement et leur fécondité.
Les travaux en serre nous ont permis de constater que les déplacements des pucerons étaient
plus longs en culture pure de pois d’hiver qu’en culture associée. Ces déplacements longs
permettent aux pucerons de pouvoir parcourir les plantes de pois à la recherche de jeunes
feuilles. En outre, ces déplacements longs sur la monoculture du pois permettent aux pucerons
de trouver facilement de bons sites de ponte et probablement d’optimiser le développement de
ses descendants. Ceci favoriserait ainsi de fortes infestations en culture pure de pois d’hiver.
4.3.3. Influence des odeurs des plantes sur le choix des pucerons
Nous avons montré que le puceron du pois est sensible à des molécules volatiles émises par
une de ses plantes-hôtes, le petit pois (P.sativum L.). Ce puceron est également affecté par
l’odeur d’une plante non-hôte, dans ce cas-ci, le blé dur. Nous avons montré que lorsque des
substances volatiles du blé dur se mêlent à celles du petit pois, les pucerons évitent de se
diriger vers cette odeur et préfèrent la source d’air pur. Ce résultat est intéressant dans
l’optique de la protection des petits pois cultivés en association avec du blé dur.
Il faudra en premier lieu s’affranchir de la contrainte que constitue le volume des cloches de
verre de l’olfactomètre. Ces cloches étaient trop petites pour nous permettre de travailler avec
des plantes d’une taille comparable à celles que les pucerons rencontrent dans les champs.
Au-delà de cette problématique de la taille des plantes, se pose la question de la variabilité de
l’information olfactive en fonction de la taille et donc de l’âge des plantes.
Ensuite, il faudra analyser l’odeur des petits pois et celle des petits pois en association avec du
blé dur. A la lumière de notre dispositif expérimental, il n’y a aucun doute quant à l’émission
de substances volatiles par ces plantes. Celles qui émanent du blé sont connues (Birkett et al.,
2004), mais ce n’est pas le cas pour celles du petit pois. Une fois cette identification réalisée,
il faudra proposer aux pucerons un mélange synthétique ; cette démarche nous permettra, en
cas de succès, de mettre en évidence les molécules qui délivrent une information utile pour les
pucerons. Il sera sans doute plus facile de manipuler la concentration totale de l’information
olfactive dans l’air ainsi que la concentration relative des composés, une démarche
124
indispensable pour confirmer nos observations quant à l’attractivité ou le caractère répulsif
des odeurs (Webster, 2008 a,b ; 2010).
Enfin, il devient pertinent, au vu de nos premiers résultats, de soumettre des pucerons du pois
à de l’électro-antennographie, seule méthode qui permettra de connaître avec certitude les
molécules perçues par le système nerveux de ces insectes.
A ce moment, toute ambiguïté quant au rôle des molécules olfactives dans le comportement
de recherche de plante-hôte développé par le puceron du pois sera levée. On pourrait alors
éventuellement explorer les applications pratiques agronomiques de ces molécules.
4.4. PERSPECTIVES ET THÉMATIQUES
4.4.1. Perspectives et thématiques de recherche à développer pour une meilleure régulation du puceron du pois
Il a été démontré dans ce travail que les associations blé dur-petit pois permettaient une
réduction des infestations du puceron du pois. Cependant, nous pensons que les paramètres
suivants devraient consituer de nouvelles pistes d’approfondissement.
Il s’agit par exemple, de pouvoir établir les meilleures densistés de semis entre les deux
cultures en association. La densité de semis ayant une incidence directe sur le couvert végétal.
Les dates de semis ont montré également dans ce travail, qu’elles pouvaient avoir une forte
incidence sur les périodes de pic des infestations des pucerons, il serait ainsi bien indiqué,
qu’une étude bien approfondie se fasse afin de montrer les périodes de fortes infestations.
Les variétés cultivées devraient aussi faire l’objet d’une étude approfondie. Le travail actuel
ayant été fait sur deux varités.
Nous pensons également que des études plus approfondies sur le taux de fécondité et la survie
du puceron devraient se poursuivre en serre et en laboratoire. Les résultats ayant été obtenus
sous une campagne (dans le cas de la fitness et des odeurs des pucerons) et avec des variétés
limitées, il serait important de répéter l’expérience. Ainsi, on pourrait associer d’autres
variétés de pois ou de blé. Les paramètres tels que la température, l’hydrométrie, les variétés
des espèces cultivées devraient être modulées en vu de voir leur importance.
En qui concerne le choix des plantes par les pucerons en laboratoire, il serait indiqué de faire
les expériences complémentaires, en associant le temps mis par le puceron dans chaque
compartiment de l’olfactomètre.
125
4.4.2. Les perspectives de recherche à approfondir
Nous pensons qu’une étude sur les différents mécanismes de colonisation du puceron du pois
en présence de sa plante hôte qui est le petit pois, mais aussi, en présence de l’association blé
dur et pois d’hiver devrait être envisagée. Ceci pourrait se faire en champ, mais aussi en serre
ou au laboratoire. Les interactions fonctionnelles entre le puceron du pois et sa plante-hôte
devraient ainsi faire l’objet d’études plus détaillées.
Nous avons montré que le puceron du pois est sensible à des molécules volatiles émises par
une de ses plantes-hôtes, le petit pois (P. sativum); ce puceron est également affecté par
l’odeur d’une plante non-hôte, dans ce cas-ci, celle du blé dur. Nous avons montré que
lorsque des substances volatiles du blé dur se mêlent à celles du petit pois, les pucerons
évitent de se diriger vers cette odeur et préfèrent l’air pur. Ce résultat est intéressant dans
l’optique de la protection des petits pois cultivés en association avec du blé dur.
Ensuite, il faudra analyser l’odeur des petits pois seuls et celle des petits pois en association
avec du blé dur. Celles qui émanent du blé étant connues (Birkett et al., 2004), mais ce n’est
pas le cas pour celles du petit pois. Une fois cette identification réalisée, il faudra proposer
aux pucerons un mélange synthétique ; cette démarche nous permettra, en cas de succès, de
mettre en évidence les molécules qui délivrent une information utile pour les pucerons.
Enfin, il sera pertinent, au vu de nos premiers résultats, de soumettre des pucerons du pois à
de l’électro-antennographie, seule méthode qui permettra de connaître avec certitude les
molécules perçues par le système nerveux de ces insectes.
A ce moment, toute ambiguïté quant au rôle des molécules olfactives dans le comportement
de recherche de plante-hôte développé par le puceron du pois sera levée. On pourra alors
explorer les applications pratiques agronomiques de ces molécules.
126
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131
Auteur : NDZANA ABANDA Raphaël François Xavier
Titre : Régulation des bio-agresseurs dans les cultures associées de blé dur et de pois :
impact de la diversité végétale sur la démographie des pucerons du pois.
Directeur de thèse : Jean-Louis HEMPTINNE
Co-Directrice : Alexandra MAGRO
Lieu et date de soutenance : 30 novembre 2012 à l’Ecole Nationale de Formation
Agronomique d’Auzeville (Toulouse).
Résumé: Les pucerons font partie des principaux ravageurs des cultures dans les régions
tempérées. Leur succès comme ravageurs des plantes repose sur leur fort potentiel reproductif
dû à la parthénogenèse durant le printemps et l’été, la transmission des virus aux plantes, ainsi
que leur polyphénisme. Ce mode de multiplication asexué explique leur importante
dynamique démographique et les dégâts causés sur les cultures. Plusieurs méthodes de lutte
ont été envisagées à leur encontre, entre autre la régulation « Top-down », qui est l’approche
par les ennemis naturels, et la lutte chimique.
Lorsqu’on compare les temps de développement des pucerons et celui de leurs ennemis
naturels, à l’instar des coccinelles, on constate que les premiers se développent plus vite que
les seconds. C’est cette différence de vitesse de développement qui confère aux pucerons leur
caractère de proie éphémère ou limitée dans le temps. Le calcul du rapport du temps de
génération des prédateurs sur celui des pucerons, « Generation Time Ratio », est supérieure à
1. Or, les rapports supérieurs à 1 correspondent à des relations trophiques défavorables à la
mise en place d’une régulation « Top-down ». Dés lors, pour réguler la population des
pucerons du pois, il faudrait envisager d’autres possibilités de lutte biologique. La voie
« Bottom-up » semble ainsi être une voie plus appropriée.
Cette approche dite du « Bottom-up » privilégie l’augmentation de la biodiversité végétale en
champ pour réguler la dynamique de population du puceron du pois (A. pisum Harris).
Le présent travail de thèse a pour objectif de vérifier l’impact de la diversité végétale sur la
démographie du puceron du pois en monoculture de pois d’hiver par rapport à la culture
associée de pois d’hiver et de blé dur. Au cours de nos travaux en champ basés sur le
comptage de pucerons, nous avons pu ainsi vérifier que les infestations de pucerons étaient
statistiquement plus élevées en monoculture de pois par rapport à la culture associée de pois
d’hiver et de blé dur.
132
Nous avons ainsi pu évaluer l’influence de la plante-hôte sur les déplacements et l’aptitude
des pucerons. Les déplacements et les paramètres démographiques d’A. pisum adultes ont été
examinés dans un peuplement pur de pois d’hiver et dans un peuplement mixte de pois
d’hiver et de blé dur. Les distances parcourues par les pucerons en culture pure de pois sont
significativement plus longues qu’en culture associée. Le taux de fécondité est plus élevé en
culture associée de pois/blé qu’en culture pure de pois. De même, le taux de survie des larves
est plus élevé en culture associée qu’en culture pure de pois, même si la différence n’est pas
significative.
Nous avons au cours de ce travail, testé sur 1036 pucerons leur choix sur les sources d’odeur
entre deux types de cultures (monoculture de pois et une culture associée de blé dur au pois).
A cela, nous avons ajouté d’autres paramètres tels que la forme du puceron (ailé ou aptère), la
souche du puceron (sauvage ou élevé au laboratoire), la quantité de plante dans les pots lors
de l’expérience. Le choix des pucerons selon le type de plante n’a pas montré des résultats
significatifs. Cependant, on note une tendance des pucerons à choisir la source d’odeur chez
la monoculture de pois. Ces résultats mettent en évidence l’importance de la diversité végétale
sur la régulation des pucerons. Ainsi, les effets liés à la plante hôte « Bottom- up » permettent
de réguler certains ravageurs. Toutefois, d’autres variétés d’espèces de plantes dans le couple
céréale-légumineuse devraient être testées afin de confirmer cette hypothèse.
Mots clés : Acyrthosiphon pisum Harris, Bottom-up, monoculture, culture associée, diversité
végétale, paramètres démographiques, polyphénisme, Generation Time Ratio.
133
Author : NDZANA ABANDA Raphaël François Xavier
Title: Regulation of bio-aggressors in intercrops of durum wheat and pea: effect of plant diversity on the demography of pea aphids PhD Directors: Jean-Louis HEMPTINNE and Alexandra MAGRO
Place and date of defense: Toulouse
Summary: Aphids are major pests of crops in temperate regions. Their status as major crop pests is based on their high reproductive potential due to parthenogenesis in spring and summer, their polyphenism, and the transmission of viruses to plants. Several control methods have been considered against aphids. Of these methods, the most popular includes the "top down" appoach, which considers natural enemies and chemical control. When comparing the development time of aphids and their natural enemies, like ladybirds, we observe that the former grow faster than the latter. This difference in the speed of development characterizes aphids as short-lived prey. The generation time ratio of the natural enemies of aphids to that of the aphids is greater than 1. This value indicates that “Top-down” regulation is unlikely. Thus, to regulate pea aphids, other possibilities for biological control need to be considered. The «Bottom-up» approach seems to be more appropriate. This approach (Bottom-up) encourages an increase in plant biodiversity in the farm to regulate the population dynamics of pea aphids (A. pisum Harris). This thesis aims at verifying the impact of plant diversity on the demography of pea aphid (A. pisum Harris) in winter pea monoculture and in winter pea and durum wheat intercropping system. During our field work we were able to verify that aphid infestations were statistically higher in monoculture pea compared to an intercrop of winter pea and durum. We were also able to evaluate the influence of the host plant on the movements and the fitness of the aphids. The movements and demographic parameters of adults A. pisum were examined in a pure stand of winter peas and an intercrop of winter pea and durum wheat. The distances covered in pure culture of peas were significantly longer than in intercropping. The fertility rate was higher in intercropping pea / wheat than in pure culture of peas. Similarly, the survival rate of the larvae of aphids was higher in intercrop than in sole crop pea although the difference was not significant. We tested 1,036 aphids on their choice between odor sources from two types of cropping systems (peas monoculture and an intercrop of durum wheat and pea). To this, we added other parameters such as the morph of the aphid (winged or wingless), the aphid strain (wild or reared in the laboratory), and the amount of plants in pots during the experiment. The choice of aphids on the type of crop did not show significant results. However, there was a tendency of the aphids to be attracted by the odor from the pea monoculture. These results highlight the importance of plant diversity in the control of aphids. Effects related to the host plant "bottom up" help regulate certain pests. However, other varieties of plant species in the cereal-legume couple should be tested to confirm this hypothesis. Keywords: Acyrthosiphon pisum Harris, Bottom-up, monoculture, intercropping, crop diversity, demographics, polyphenism, Generation Time Ratio.
134
Annexes
ANNEXE 1
L ISTE DES TABLEAUX
Chapitre I: Is there an associational resistance of winter pea - durum wheat intercrops towards Acyrthosiphon pisum Harris? Table 1- Plant densities (per m2) and pesticide treatments in intercrops (IC) of winter pea (Wp) and durum wheat (Dw) and sole crops (SC) of winter pea, in 2007, 2008 (small plots) and in 2009, 2010 (large plots). F= seed treated with a fungicide; H= herbicide applied 2-4 days after sowing. Table 2- The mean, standard deviation (sd) and maximum (max) number of aphids per plant in intercrops (IC) of winter pea and durum wheat and sole crops (SC) of winter pea, for plots studied in 2007, 2008 (small plots), and in 2009, 2010 (large plots). Table 3- The mean values of red, green and blue spectrum in pictures of stands of durum wheat-winter pea intercrop and pure stands of winter pea. N= number of analysed images; Sd= standard deviation.
Chapitre II : Rôle des odeurs émises par des plantes dans la recherche d’hôtes par les pucerons du pois (Acyrthosiphon pisum Harris)
Tableau 1 : Les nombres de pucerons en fonction de la source d’odeur et de la souche, ayant effectué ou non le choix de quitter la zone centrale de l’olfactomètre et de se diriger vers une des quatre sources d’odeur Tableau 2 : Résumé des principales conditions expérimentales et des résultats des tests réalisés avec l’olfactomètre à quatre bras. Cas des pucerons ailés. Tableau 3 : Résumé des principales conditions expérimentales et des résultats des tests réalisés avec l’olfactomètre à quatre bras (cas des pucerons aptères). Tableau 4 : Analyse du comportement des pucerons aptères dans l’olfactomètre. Tableau 5 : Analyse du comportement des pucerons ailés dans l’olfactomètre. Chapitre III : Déplacements et aptitude du puceron du pois (Acyrthosiphon pisum Harris) dans un peuplement pur de pois (Pisum sativum L) et dans un peuplement mixte de pois et de blé dur (Triticum aestivum L) Tableau I : Nombre de pucerons se déplaçant au sein d’un plant de pois (données pour 4 jours). Tableau II : Nombre de pucerons ayant changé de plante dans les vasques.
135
Tableau III : Table de survie dressée pour deux cohortes de 52 pucerons élevés respectivement sur des plantes de pois d’hiver cultivés en peuplement pur et sur des plantes de pois d’hiver cultivés en association avec du blé dur. Tableau IV : Les nombres totaux de larves produites et les taux nets de reproduction calculés pour les cohortes élevées dans les vasques de pois d’hiver (PP) ou des vasques associant pois d’hiver et blé dur (PB).
136
ANNEXE 2
L ISTE DES FIGURES
Chapitre 2 Figure 1 : Plantules de pois pur quatre jours après transplantation Figure 2 : Plants de pois en monoculture prêts pour un test Figure 3 : Olfactomètre à 4 voies Figure 4 : Olfactomètre délimité en zone permettant de mieux suivre la progression du puceron Chapitre 3 Figure 1 : Un modèle de « clip cage » enserrant une fiole de pois Figure 2 : Distance totales parcourues par les pucerons durant 4 jours dans les vasques du blé dur associé au pois. Figure 3 : Distance totales parcourues par les pucerons durant 3 jours dans les vasques du blé dur associé au pois Figure 4 : Distance totale parcourue par chaque puceron durant 4 jours en fonction du type de vasque et durant 4 journées d’observation successives. Figure 5 : Taux de survie des pucerons des cohortes déposées dans la vasque de pois et dans la vasque de pois d’hiver et du blé dur.
137
ANNEXE 3
PARCELLES CULTIVÉES
Photo : Raphaël Ndzana
Figure 1: Parcelle de culture associée (blé dur et petit pois) à Lussan dans le Gers.
Photo : Raphaël Ndzana
Figure 2 : Parcelle de culture associée (blé dur et petit pois) à Qinsac dans le Gers
138
Photo : Raphaël Ndzana Figure 3 : Parcelle de culture associée (blé dur et petit pois) à Lussan dans le Gers. Parcelle
proche de la maturation pour la culture du petit pois.
Photo : Raphaël Ndzana
Figure 4 : Parcelle de petit pois pur proche à être récolté à Lussan dans le Gers.
139
ANNEXE 4:
Distances totales parcourues par les pucerons durant 4 jours dans les vasques de pois et les vasques du blé dur associé au pois
Type de culture Jour Numéro Puceron Distance totale/puceron (cm)
Pois Pur Jour 2 au jour 5 1 35,1
2 31
3 80,3
4 11,5
5 10
6 4
7 58,5
8 7,7
9 37
Moyenne 30,6
Pois-Blé Jour 2 au jour 5 1 51,5
2 44
3 18,5
4 13,3
5 10,5
6 19,4
7 17,5
8 3,7
9 28
10 6
11 2,5
12 9,7
13 1,2
Moyenne 17,4
140
ANNEXE 5:
Distances totales parcourues par les pucerons durant 3 jours dans les vasques de pois et les vasques de pois/blé.
Type de plante Jour Numéro Puceron Distance totale/puceron (cm)
Pois Pur Jour 2 au jour 4 1 32
2 18
3 63,3
4 5,5
5 3
6 2,3
7 46,5
8 7
9 14,5
Moyenne 21,3
Pois-Blé Jour 2 au jour 4 1 0,5
2 50,5
3 44
4 18,5
5 11,8
6 10,5
7 18,9
8 5,5
9 3,7
10 0,5
11 2
12 2,2
13 1,2
Moyenne 13,1
141
ANNEXE 6:
Photo : Pucerons verts du pois. (c) Inra, M. Hullé
Figure 1: Puceron vert ailé du pois
Photo r. Coutin - OPIE / INRA - Figure 2 : Pucerons adultes et exsuvies sur feuille de pois