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N° 331 MARS 2018 1 er trimestre DOSSIER La France, puissance maritime Pages 5 à 14

DOSSIER La France, puissance maritime

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N° 331

MARS 2018

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DOSSIERLa France, puissance maritime

Pages 5 à 14

ASSOCIATION NATIONALE DES CROIX DEGUERRE ET DE LA VALEUR MILITAIRE Fondée en 1919. Déclarée conformément à la loi du 1-VII-1901. Approuvée par le ministre del’Intérieur. Reconnue d’utilité publique : décret du 22avril 1963. Affiliée à la Fédération nationale AndréMaginot - Gr. 31 Comité d’honneur :Général d’armée (2S) Bertrand Ract-Madoux, Amiral (2S) Alain Oudot deDainville, Général d’armée (2S)Denis Favier, la Ville de ParisPrésidents d’honneur :Général (2S) Jacques LarchetChef d’escadrons (H) FrançoisCastanier

Président national :Michel Bachette-PeyradeVice-Présidents :Alain Bonnet, Daniel Gyre Secrétaire général :Emmanuel MontaniéTrésorière nationale :Jacqueline CombémorelChancelier :Christian BayolConseil d’administration :Yves Allanet, Alain Artisson, MichelBachette-Peyrade, Alain Bonnet,Michel Bugeaud, François Castanier,Pierre Castillon, JacquelineCombémorel, Jean Folia, DanielGyre, Emmanuel Montanié, LoïcSalmon, Fabrice Tedoldi (conseillertechnique).

ADRESSE DU SIÈGE SOCIAL : A.N.C.G.V.M.Hôtel national des InvalidesCour d’honneur escalier G129, rue de Grenelle - 75700 PARIS CEDEX 07

PERMANENCE SECRÉTARIAT : mardi, mercredi et jeudi 9h30-16h00Charlette Dumont - 01 44 42 38 47Courriel : [email protected]

REVUE CROIX DE GUERRE ET VALEUR MILITAIREDirecteur de la publication :Michel Bachette-PeyradeRédacteur en chef :Loïc Salmon - 01 44 42 38 47Courriel : [email protected]étaire de rédaction :Nelly Gosselin

Site : www.croixdeguerre-valeurmilitaire.frFacebook : Croix de guerre et Valeur militaireTwitter : Valeur MilitaireCourriel : [email protected] : Centr’Imprim36101 Issoudun CedexDépôt légal N°2018_030006Commission paritaire N° 0321 A O6885I.S.S.N. 1247-9918

� ÉDITORIAL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

� INFORMATIONS SERVICES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

� DOSSIER. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

La France, puissance maritime mondiale

� HISTOIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

� CULTURE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

� VILLES, INSTITUTIONS CIVILES ET UNITÉS DÉCORÉES. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

� VIE DES SECTIONS. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

� CARNET. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

SOMMAIRE

Des informations complémentaires sur la Défense, renouvelées périodiquement,sont accessibles sur le site internet :

www.croixdeguerre-valeurmilitaire.frVous pouvez les retrouver toutes en cliquant sur « Actualités » ou « Archives ».

Des vidéos complémentaires sur les armées sont en ligne, soit de :- longue durée, sur « Médias » dans la page d’accueil du site ;- courte durée, sur la page Facebook « Croix de guerre et Valeur militaire ».

Il y a aussi une page Twitter : « Valeur Militaire ».

Le centenaire de la croix de Guerre est pérennisé dans « Médias » grâce à :- la vidéo « La croix de Guerre : cent ans de bravoure (1915-2015) » ;- la galerie photos « Honneur aux braves ! La croix de Guerre ».

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CROIX DE GUERRE ET VALEUR MILITAIRE

ÉDITORIALChers amis,

Je suis heureux de m'adresser à vous à l'occasion de ce nouveau numéro devotre revue “Croix de guerre & Valeur militaire”.

La rubrique “Institutions civiles décorées” traite des “Gadz'Arts”. Les Artset Métiers font partie des grandes écoles civiles décorées au cours des deuxconflits mondiaux.

Le dossier de ce numéro porte sur la dimension maritime mondiale de la France. Il inclut unchapitre sur l’histoire de l’aéronautique navale, à partir de l’ouvrage de l’amiral Alain Oudot deDainville, ancien chef d’état-major de la Marine.

A la suite de nos actions de communication, des volontaires se sont faits connaître auprès de notresiège pour relever des sections affaiblies ou bien pour recréer des sections disparues. Je félicite d'oreset déjà et remercie vivement ces “soldats”, qui prendront les responsabilités dans ces sections. LeBureau national les assure de tout son soutien. Je tiens aussi à remercier les délégations militairesdépartementales, les directions de l'ONACVG et les commandants d’unités, qui accueillent, avecbienveillance, nos délégués en toutes circonstances.

Notre communication, via les réseaux sociaux, est en progression constante, principalement sur“Facebook” et “Twitter”. N'hésitez plus à vous connecter, ces sources d'information complétantefficacement notre revue trimestrielle et le site internet.

Notre assemblée générale annuelle se tiendra dans le département de la Meuse au cours de notreCongrès national 2018, du 16 au 19 novembre. Ce congrès inclura un colloque de portée nationale,traitant des villes décorées lors des deux conflits mondiaux du XXème siècle, en liaison avec leService historique de la Défense. Il marquera l'ouverture des manifestations du Centenaire de lacréation de notre association en 1919 par le vice-amiral Emile Guépratte.

Nos armées ont été à nouveau frappées par la mort au combat de deux soldats du 1er Régiment despahis. De nouveaux blessés, souvent très lourdement atteints, ont rejoint la longue liste desvictimes suivies dans nos hôpitaux militaires ou en cours de rééducation. Nous nous inclinonsdevant la douleur des familles éprouvées et souhaitons un bon rétablissement à nos blessés.

Bien fidèlement. Colonel Michel BACHETTE-PEYRADE,

président national

INFORMATIONS

SERVICES

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CONTINGENTS ORDRES NATIONAUX 2018 - 2020

Légion d’honneurLe décret n° 2018-26 du 19 janvier 2018 (JournalOfficiel du 21 janvier 2018) fixe les contingents decroix de la Légion d’honneur pour la période du1er janvier 2018 au 31 décembre 2020.

Article 1 Les contingents annuels de croix de la Légiond’honneur sont fixés comme suit.A titre civil : grands-croix, 4 ; grands officiers, 8;commandeurs, 34 ; officiers, 164 ; chevaliers,1.290. A titre militaire : grands-croix, 3 ; grands officiers,6; commandeurs, 50 ; officiers, 226 ; chevaliers,815. Le contingent militaire ci-dessus doit êtreconsacré, au minimum à 75 %, au personnel ap-partenant à l’armée d’active.

Article 2Pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décem-bre 2020, les contingents annuels dont dispose laministre des Armées pour les personnels militairessont exceptionnellement majorés de 200 croix dechevalier destinées à des anciens combattants jus-tifiant, pour les anciens de la guerre 1939-1945,d'un fait de guerre ou citation au titre de cetteguerre et, pour les anciens des TOE ou d'AFN, dela Médaille militaire et de deux blessures de guerreou citations.

Médaille militaireLe décret n° 2018-28 du 19 janvier 2018 (Journalofficiel du 21 janvier 2018) fixe les contingents deMédailles militaires pour la période du 1er janvier2018 au 31 décembre 2020 : 2.000 pour le person-nel appartenant à l’armée d’active et 1.000 pour le

personnel n'appartenant pas à l'armée d’active,dont un minimum de 15 % consacré à la réserveopérationnelle.

Ordre national du MériteLe décret n° 2018-29 du 19 janvier 2018 (Journalofficiel du 21 janvier 2018) fixe les contingents decroix de l’Ordre national du Mérite pour la pé-riode du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020.Les contingents annuels de croix de l’Ordre natio-nal du Mérite sont fixés comme suit.A titre civil : grands-croix, 4 ; grands officiers, 8 ;commandeurs, 106 ; officiers, 538; chevaliers,2.544. A titre militaire : grands-croix, 2 ; grands officiers,6 ; commandeurs, 70 ; officiers, 380 ; chevaliers,1.342. Le contingent militaire ci-dessus doit êtreconsacré, au minimum à 65 %, au personnel ap-partenant à l’armée d’active.

ÉtrangersLe décret n° 2018-27 du 19 janvier 2018 (Journalofficiel du 21 janvier 2018) fixe les contingents an-nuels de croix de la Légion d’honneur et de Mé-dailles militaires destinées aux étrangers pour lapériode du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020:grands-croix, 2 ; grands officiers, 4; comman-deurs, 30 ; officiers, 84 ; chevaliers, 200 ; Médaillesmilitaires, 30.Le décret n° 2018-30 du 19 janvier 2018 (Journalofficiel du 21 janvier 2018) fixe les contingents an-nuels de croix de l’Ordre national du Mérite des-tinées aux étrangers pour la période du 1er janvier2018 au 31 décembre 2020 : grands-croix, 2;grands officiers, 4 ; commandeurs, 40 ; officiers,94 ; chevaliers, 200.

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LA FRANCE, PUISSANCE MARITIME Une présence mondialeDepuis l’Antiquité, des liens très étroits existent entrepuissances économique et politique et contrôle de la mer. Lesdeux guerres mondiales se sont aussi jouées sur mer. Devenuepremière puissance maritime en 1945, les Etats-Unis se sontdonné les moyens de le rester. La Russie et l’Inde développentleur Marine de haute mer. L’augmentation régulière desdépenses militaires de la Chine lui permettront de s’affirmerdans le domaine naval vers 2035. La puissance de la Francerepose notamment sur la dissuasion, assurée essentiellementpar la Force océanique stratégique des sous-marins nucléaireslanceurs d’engins. La supériorité aérienne, garantie par lesporte-aéronefs, est devenue la condition nécessaire à celle surmer. Aujourd’hui, l’interopérabilité des Marines française etaméricaine, effective lors d’opérations communes, résulte de laformation des pilotes français aux Etats-Unis et del’adaptation technique de l’ensemble porte-avions Charles-De-Gaulle/groupe aérien de Rafale Marine.

La connaissance des mers p.6

L’espace Indo-Pacifique p.8

L’aéronautique navale p.10

Les drones navals p.13

Dossier réalisé par Loïc SalmonRédacteur en chef

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LA CONNAISSANCE DES MERS

Une nécessité opérationnelleLa connaissance de l’environnement marin permetde planifier, définir une idée de manœuvre, réglerdes armes pour tous types d’actions sur un théâtreayant un volet naval. La performance des capteursmis en œuvre prend une dimension tactique pourdéterminer la fenêtre d’opportunité du lancementd’une opération interarmées contre la terre. Cetteconnaissance devient alors stratégique au niveaupolitico-militaire (débarquement des Alliés enNormandie en 1944). Pour garantir lasouveraineté sur les 11 Mkm2 de zoneséconomiques exclusives de la France, sa Marinedoit couvrir 45 Mkm2.

Le capitaine de frégate Samuel Quéré, com-mandant le Beautemps-Beaupré (photo), l’aexpliqué au cours d’une conférence-débat or-

ganisée, le 24 janvier 2018 à Paris, par le Centre d’é-tudes stratégiques de la marine.

ENJEUX ET CAPACITÉSLes besoins sur le plan naval dépassent ceux desopérations terrestres ou aériennes en raison del’élargissement des théâtres, de la multiplication descrises, de l’exploitation des richesses de la mer et des

modifications du climat avec des conséquences surles courants marins. Les recherches hydrographiquesne nécessitent pas d’accord préalable d’un paysriverain. En outre, tout navire de guerre peuttransiter dans les eaux territoriales d’un Etat s’iln’effectue pas d’opération militaire.Le Service hydrographique et océanographique de lamarine et le Centre interarmées de soutien météo-océanographique des forces effectuent le recueil dedonnées, du Grand Nord à l’océan Indien, enpassant par l’Atlantique et la Méditerranée, surtoutes les zones de crises. L’acquisition derenseignements de valeur s’accompagne d’échangesavec les Marines alliées, notamment sur les champsde mines dans le golfe Arabo-Persique. Letraitement des informations essentielles destinées àla Force d’action navale (bâtiments de surface etsous-marins nucléaires d’attaque) et à la Forceocéanique stratégique (sous-marins nucléaireslanceurs d’engins) en renforce la capacité et lacrédibilité. Le Grand Nord, où se déplacent ets’observent les Marines russe, américaine,britannique et norvégienne, présente un intérêtmajeur pour l’Etat-major français des armées et unenjeu pour les forces sous-marines. Celles-ci peuvent

Le navire hydrographique et océanographiqueBeautemps-Beaupré (3.300 t de déplacement à pleinecharge) peut parcourir 8.100 milles (15.000 km) à 10

nœuds (18,5 km/h). D’une longueur de 80,64 m etd’une autonomie de 45 jours, il est équipé de 3

laboratoires, 4 salles de traitement ; 2 portiques, 2grues, 2 vedettes hydrographiques (8 m de long) et

divers appareils électroniques (2 radars et 2 systèmesde transmissions) et scientifiques (sondeurs et autres

appareils de mesure).

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en effet opérer dans l’Arctique, à condition de bienconnaître les glaces et leurs dérives. Le déploiementd’une frégate française nécessite le recours àl’expertise de la Marine norvégienne.Par ailleurs, les données hydrographiques,océanologiques et sédimentologiques, plus précisesque les cartes marines, permettent à l’état-major dela Marine de mettre en œuvre les unités à la mer et laforce aéronavale. Elles sont indispensables à touteopération amphibie en vue de connaître laprofondeur des plages et la violence des vagues.Leurs mesures dans le temps déterminentl’évolution des paramètres, avant la mise en serviced’un hélicoptère ou d’un engin de débarquementpour en garantir le retour. La lutte sous la mer dépend des mesures de la vitessede propagation du son dans l’eau, variable selon latempérature et la saison. Par exemple dansl’Atlantique, le sonar de coque d’une frégate détectedes indiscrétions de sous-marin à 13 km en hiver,mais seulement à 3 km en été. Le sonar remorquécomble les lacunes de détection jusqu’à 22 km parune immersion à 160 m en hiver, réduite à 70 m enété. La bathymétrie (mesure des profondeurs) établitdes cartes précises du fond de la mer avec des épaveséventuelles pour lever le doute sur un écho sonar. Lamise en commun des radar et sonar permet dedétecter les tirs de torpilles et d’autres armes. Salinitéde la mer, taux d’hygrométrie de l’air et variationatmosphérique entrent dans le calcul des portées desarmes et des moyens de détection. Tout cela permetde vérifier la véracité des modèles établis en état-major et d’interpréter les manœuvres possibles del’adversaire.

DISPOSITIFS ÉVOLUTIFSLa sûreté d’une force navale repose sur laconnaissance des zones de vulnérabilité et de non-détection, grâce au réglage des sonars de ses unités.

Pour assurer leur discrétion, les sous-marinsdisposent de cartographies spécifiques etconfidentielles. Leurs zones de patrouille restentsecrètes et adaptées en cas de besoin. Chacun doit sefondre dans l’environnement marin, donc dans lebruit ambiant, en continu pour savoir s’il est détectéou non. Il doit se positionner à l’immersionoptimale pour éviter toute indiscrétion magnétique,captable par un avion de patrouille maritime. Ildétermine des fenêtres d’opportunités dans sonpérimètre de patrouille. Ainsi, il peut évoluer, entoute impunité, dans les zones très profondes enhiver et rester plus proche de la surface en été. Enconséquence, une force navale, centrée sur un porte-avions avec son escorte de quatre frégates et d’unsous-marin d’attaque (configuration p.12), devraélargir son dispositif en hiver mais pourra le resserreren été. Les frégates et leurs hélicoptères embarquéssurveillent la portée des capteurs infrarouges dessous-marins d’attaque adverses pour détecter touteindiscrétion.

Selon le Centre d’études stratégiques de la marine, la rechercheocéanique française est assurée par le Service hydrographiqueet océanographique de la marine et l’Administration des terresaustrales et antarctiques françaises ainsi que quatre opérateurspublics civils : le Centre national de la recherche scientifique,l’Ifremer, l’Institut polaire français Paul-Emile Victor et l’Institutde recherche pour le développement. Leur flotte totalise 18 na-vires. Les principales campagnes de recherche océanogra-phiques sont assurées par 6 unités de haute mer, dont les Pour-quoi-Pas ?, Thalassa et Marion-Dufresne. S’y ajoutent 5 navirescôtiers, spécialisés dans la recherche scientifique, et 7 navires destation, répartis sur les façades maritimes en métropole et ou-tre-mer. Ils mettent notamment en œuvre le robot Victor-6000ou le sous-marin habité Nautile, capables d’intervenir à 6.000m de profondeur. Cette flotte mène, en cohérence, des cam-pagnes de paléo-océanographie, d’estimation de biomasse et dechimie des océans ou de suivi d’aléas naturels (secousses sis-miques, éruptions volcaniques sous-marines ou tsunamis).

La flotte océanique française

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L’INDO-PACIFIQUE

Des enjeux de sécurité partagés

Avec la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, la France est présente sur la zone quis’étend de l’océan Indien au Pacifique.Aujourd’hui, elle y est considérée comme unpartenaire stable par les pays riverains. Elle peut yprotéger ses intérêts en tirant parti de ses atouts,malgré la distance et ses engagements au Sud de laMéditerranée et en Afrique.

Un officier général, qui connaît bien cettezone et en particulier l’Asie du Sud-Est, l’aexpliqué au cours d’une conférence-débat,

organisée le 23 janvier 2018 à Paris par l’Associationrégionale Paris Ile-de-France des auditeurs de l’Insti-tut national des hautes études de défense nationale.

CONTEXTE GÉOPOLITIQUELe document officiel « Revue stratégique 2017 » in-dique les conséquences, pour la France, de la dégrada-tion de la sécurité dans cette région. Sont mention-nés : son statut de membre permanent du Conseil desécurité de l’ONU ; ses intérêts économiques, terri-toires d’outre-mer et ressortissants (130.000) ; sespartenariats stratégiques avec l’Australie, l’Inde, leJapon, Singapour, la Malaisie, l’Indonésie et le ViêtNam ; la liberté de navigation et d’approvision-nements, intérêts partagés par les Etats membres del’Union européenne (UE). Cette région, rappelle l’officier général, inclut unegrande partie des zones économiques exclusivesfrançaises (11 Mkm2, carte p.5), la 2ème du mondeaprès celle des Etats-Unis. Elle abrite son 2ème client,à savoir l’Association des nations du Sud-Est(ASEAN) qui regroupe Brunei, Birmanie, Cam-

bodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Sin-gapour, Thaïlande et Viêt Nam. Membre de la com-mission d’armistice militaire entre les Corées duNord et du Sud depuis 1953, la France serait amenéeà intervenir en cas de conflit (1). La Corée du Norda procédé à plusieurs essais nucléaires et des tirs demissiles balistiques intercontinentaux, mais ne dis-pose pas encore de la technologie pour les actionnerensemble, à savoir l’arme nucléaire proprement dite.La Corée du Sud accueille sur son sol le système demissiles antibalistiques américain THAAD. Ce sys-tème amoindrit la dissuasion nucléaire de la Chine,dont l’île de Hainan abrite sa base de sous-marins nu-cléaires lanceurs d’engins. Cette île se trouve à envi-ron 170 milles marins (315 km) de l’archipel desParacels, qu’elle revendique depuis 2012 ainsi que leViêt Nam. Outre la présence permanente de leurVIème Flotte, les Etats-Unis disposent de bases mili-taires en Corée du Sud, au Japon et à Guam (archipeldes Mariannes). Par ailleurs, la Chine est perçue comme une menaceen Asie du Sud-Est depuis qu’elle construit aéro-ports, héliports et immeubles sur 7 îles artificiellesadossées à des récifs de l’archipel des Spratleys, dontla plus grande partie est revendiquée par les Philip-pines. Dès 2009, ces dernières ont porté l’affaire de-vant la Cour permanente d’arbitrage de La Haye quia estimé, en juillet 2016, que la Chine n’y avait aucundroit historique, pas plus que sur les Paracels. En outre, la Chine, qui considère Taïwan commeune partie de son territoire, l’isole par tous lesmoyens, mais en évitant toute action violente qui en-traînerait une réaction militaire des Etats-Unis. Pourcontrer leur influence politique dans la zone Indo-

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Pacifique, elle se tourne vers l’UE, dont elle constituele premier partenaire commercial. Or, l’ASEANcompte sur la France, seul Etat membre de l’UE à yenvoyer sa Marine, pour faire respecter la liberté desmers face à l’expansion maritime chinoise. De soncôté, la France s’intéresse au projet des « nouvellesroutes de la soie », maritime et terrestre, de la Chinesur qui elle compte depuis l’entrée en vigueur en2016 de l’accord de Paris sur le climat (COP 21).

PERSPECTIVES POUR LA FRANCEL’image de la France dans la région s’est beaucoupaméliorée depuis sa ratification du traité d’interdic-tion complète des essais nucléaires, souligne l’officiergénéral. En outre, elle participe aux grandes opéra-tions humanitaires et à la lutte contre la piraterie enocéan Indien et contre le terrorisme. En matière de sécurité, elle possède un outil militairecomplet, de l’entrée en premier sur un théâtre à la dis-suasion nucléaire stratégique. Quoique n’ayant con-clu aucun accord de défense avec un pays de la région,elle y dispose de 18 attachés militaires. Elle y assureun continuum militaire à Djibouti, à La Réunion, àAbou Dhabi, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

La culture industrielle française d’armement est re-connue dans la région Indo-Pacifique, où le marchémilitaire connaît une forte expansion. Malgré la viveconcurrence des constructeurs allemand et japonais,elle est parvenue à vendre 12 sous-marins à propul-sion diesel-électrique à l’Australie, dans le cadre d’unpartenariat stratégique de 50 ans, avec un démarragede la construction en 2022 et une première mise àl’eau en 2030. Depuis 2015, le groupe école d’appli-cation des officiers de Marine (mission « Jeanned’Arc ») se rend tous les ans en Australie et, depuis2017, un officier australien est affecté à l‘état-majorde la Marine à Paris. La France a construit la forcesous-marine de la Malaisie et coopère avec Singapouren matière de recherche. Son partenariat avec lesEtats-Unis inclut le partage du renseignement sur lazone. Mais son approche différente rassure les petitspays face à l’Australie et à la Chine.(1) Lors des consultations politico-militaires ministérielles(Affaires étrangères et Défense) tenues à Tokyo le 26 janvier2018, la France et le Japon ont souligné qu’ils ne reconnaî-traient jamais la possession de l’arme nucléaire par la Corée duNord. Ils ont aussi réaffirmé leur volonté de la contraindre àabandonner tout programme d’armes de destruction massive,via les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU.

L’AÉRONAUTIQUE NAVALE

Une histoire mouvementéeune commission d’études qui conclut à la nécessitéd’aéroplanes volant à 500 m d’altitude, avec un équi-page et des projectiles pour lutter contre les sous-ma-rins et les grands cuirassés. En 1910, des officiers deMarine vont passer leur brevet de pilotes dans les aéro-dromes de l’armée de Terre. La même année en no-vembre, un pilote civil américain parvient à décollerdu pont d’un croiseur. Trois mois plus tard, il réussit àatterrir sur le pont aménagé d’un cuirassé. En 1911, unamiral britannique propose un navire porte-avions. En1912, la Marine française met en service cinq biplansutilisables à terre ou en hydravion. « L’esprit aérona-val » se forge au centre d’expérimentations de Saint-Raphaël qui, dès 1919, teste les matériels et forme lespilotes. L’année suivante, la coque du cuirassé (ina-chevé) Béarn est transformée en bâtiment d’essaispour l’aviation d’escadre, avec une plate-forme en bois,des brins d’arrêt comme à Saint-Raphaël et une mired’appontage. En 1920-1921, 16 pilotes y ont décollé etapponté, donnant ainsi naissance à l’aviation embar-quée. En 1927, le Béarn emporte 40 avions de chasse,de reconnaissance, de bombardement et lance-tor-pilles. La Marine américaine avait testé les premiers ca-tapultages en 1912 et 1915. En France, après des essaisconcluants à terre en 1924, une catapulte est installéesur le croiseur Primauguet, d’où le premier catapultageen haute mer sera réussi deux ans plus tard. Cela en-traîne l’abandon des hydravions sur les bâtiments, enraison de leurs difficultés à se poser en mer et du risqued’accidents dans les rades portuaires encombrées. Ilsperdurent dans la lutte contre les feux de forêts. Dansles années 1930, sont mis au point les trains d’atterris-sage rétractables et un système de repliage des ailespour abriter les avions dans les hangars des bateaux. En1946, la construction de la première série d’avions à

L’arme aérienne de la Marine s’est affirmée aucours d’un siècle de péripéties et de guerres. Aprèsson indépendance de l’armée de Terre, elle a dûaffronter la rivalité de l’armée de l’Air et l’hostilitéde ses détracteurs au sein même de la Marine (lescanonniers partisans des cuirassés puis lesmissiliers). Aujourd’hui, le porte-avions, basemilitaire mobile et bâtiment d’influence, permetaux autorités politiques de conserver une libertéd’action dans les crises qui secouent le monde, dont80 % de la population vit à proximité des côtes.

L’amiral Alain Oudot de Dainville, anciencommandant du porte-avions Clemenceau,est devenu le troisième pilote de chasse em-

barquée à occuper les fonctions de chef d’état-majorde la Marine (2005-2008). Dans son ouvrage « Volau vent marin », il relate la saga de l’aviation navale,instrument de la puissance maritime des nations quipèsent sur les affaires du monde.

ÉVOLUTIONDes ballons, déjà utilisés comme plates-formes d’ob-servation à la bataille de Fleurus (1794), seront embar-qués sur un navire de la campagne d’Egypte qui seracoulé lors de la bataille navale d’Aboukir (1798). Lorsdu siège de Paris (1870), les ballons, conduits par desmarins en raison de leurs connaissances en navigation,effectuent 71 missions. En 1900, un officier de Marinepropose de doter les vaisseaux de ballons, capablesd’éclairer les escadres, de repérer les sous-marins (misau point en 1887) et de régler les tirs d’artillerie. En1908, un autre envisage un « aéroplane naval » pou-vant flotter, décoller d’une mer peu agitée et être logésur un bateau. Après la traversée de la Manche parLouis Blériot en 1909, le ministre de la Marine crée

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réaction embarqués est lancée aux Etats-Unis, après lesuccès du premier appontage de nuit sur le porte-avions Franklin-Roosevelt. En 1952, le porte-avionsfrançais Arromanchespart pour l’Indochine avec, pourla première fois, deux hélicoptères surnommés « Pe-dro » pour le sauvetage des pilotes accidentés le longdu bord. L’hélicoptère avait été testé en mer en 1943par des officiers anglais et américains pour embarquerdirectement sur un cargo. La Marine britanniquel’avait utilisé pour la chasse aux sous-marins et dans lacampagne de Birmanie. En 1947, un pilote de porte-avions, tombé en mer, avait été sauvé par un hélicop-tère, qui ouvre ainsi la carrière des Pedro. En 1956, ap-paraît l’hélicoptère de combat, qui va gagner ses lettresde noblesse en Algérie. Les porte-avions Clemenceau(mis à flot en 1957) et Foch (1960) sont équipés de ca-tapultes à vapeur pour lancer les avions à réactionlourds à plus de 90 nœuds (167 km/h). Ils sont aussidotés d’une piste oblique, qui permet de lancer et de ré-cupérer les avions simultanément. Cela permet : d’évi-ter, en cas d’appontage raté, qu’un avion s’écrase surceux parqués à l’avant du pont ; de maintenir une per-manence d’avions en vol ; d’améliorer les capacitésd’emport, car la partie avant peut servir de parking. Lesavions de chasse embarquée Super-Etendard sontéquipés du missiles mer-mer Exocet dès 1981 puis lesavions de patrouille maritime Atlantique 2, qui rece-vront ensuite la bombe guidée laser. Celle-ci et le mis-sile de croisière, monté sur le Rafale Marine, sont en ef-fet plus adaptés aux objectifs terrestres et navals. Enmatière de dissuasion, les Super-Etendard emportentla bombe nucléaire AN52 dès 1973 puis, en 1991, lemissile ASMP (missile air-sol moyenne portée) à têtenucléaire. A partir de 2010, le Rafale prend la relèveavec l’ASMPA (air-sol moyenne portée amélioré).

GUERRES L’aviation maritime commence la première guerremondiale avec 14 hydravions disparates (27 pilotes),

dont 6 sont acheminés sur le navireFoudre en Egyptepour défendre du canal de Suez. Rapatriés, ils ontcontribué, avec les dirigeables, à interdire l’accès dulittoral français aux sous-marins allemands et autri-chiens. La production aéronautique est accrue aprèsla déclaration de la guerre sous-marine à outrance en1917. Le 11 novembre 1918, la Marine compte :1.264 hydravions de haute mer, de patrouille côtière,d’alerte et de chasse ; 37 dirigeables et 200 ballonscaptifs ; 7.000 hommes dans l’aviation, dont 700 pi-lotes d’hydravions et 700 observateurs. Pendant leconflit, 135 pilotes et observateurs ont disparu. Dès1917, pour assurer la protection des convois mari-times à travers l’Atlantique, des pilotes de l’aviationmaritime américaine naissante sont formés dans descentres français, événement à l’origine d’une frater-

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“Vol au vent marin, un regard pour l’histoire de l’Aéronautiquenavale”, par l’amiral Alain Oudot de Dainville, édité par l’ARDHAN.306 pages, nombreuses photos et illustrations. 42 €.

Marine est effectué avec succès contre Gibraltar (24septembre). Après le débarquement allié en Afriquedu Nord (8 novembre 1942), les pilotes de chasseMarine sont intégrés à l’armée de l’Air jusqu’à la finde la guerre. Celle-ci a confirmé l’intérêt de la pa-trouille maritime avec des avions à long rayon d’ac-tion et du couple porte-avions/aviation embarquée.Pendant la guerre d’Indochine (1946-1954), les au-torités militaires prennent en compte la souplesse etla puissance de cette base aérienne mobile, à la fois ca-serne, restaurant, soutes, hangar, centre de contrôleet piste flottante. Pendant la guerre d’Algérie(1954-1962), la Marine participe à toutes les opéra-tions avec ses avions et le tandem hélicoptères/com-mandos. Dans les grands conflits, résume l’historienbritannique Liddell Hart (1895-1970), l’armée deTerre remporte la victoire, l’armée de l’Air en pré-pare les voies et la Marine la rend possible.

nité d’arme jamais démentie par la suite. Le 10 mai1940, la Marine dispose des porte-avions Béarn etCommandant-Teste et de 354 avions et hydravions,répartis en 50 escadrilles. Tous participent aux com-bats de mai et juin, où 50 % d’entre eux sont abattuspar l’artillerie allemande. En outre, les pilotes alle-mands sont mieux entraînés, alors que la tactiquefrançaise n’est pas au point et l’aviation maritime in-suffisamment organisée pour le combat. Pourtant,elle parvient à bombarder les ports italiens de Gêneset Valdo Ligure (18 juin) et même, avec un avionlong courrier d’Air France réquisitionné, les usinesaéronautiques de la banlieue de Berlin en 13h40 devol (7 juin). Après l’armistice (22 juin), 70 avionspartent pour l’Afrique du Nord rejoindre les 150 quis’y trouvaient déjà. Après les attaques britanniquescontre Mers-el-Kébir (3 juillet) et Dakar (23 septem-bre), un raid de représailles conjoint armée de l’Air et

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La France rattrape son retard dans le domaine desdrones aériens, de surface et sous-marins. Ceux-civarient de l’engin rustique, bon marché,consommant peu et idéal pour les missions risquéespour l’homme, à l’appareil sophistiqué, télépiloté,aidé par intelligence artificielle et capable dechanger de milieu selon la situation. Une réflexionest en cours sur le drone autonome, agissant loin etsans intervention humaine pour le recueil d’imageset l’évaluation d’une frappe. A terme, un dronearmé apporterait une démultiplicationopérationnelle.

Le capitaine de frégate Pierre Marcellin et le ca-pitaine de corvette Augustin Blanchet ontprésenté les drones, actuels et en projet, dans

la Marine, au cours d’une conférence-débat organi-sée, le 14 février 2018 à Paris, par le Centre d’étudesstratégiques de la marine.

COMPLÉMENTARITÉSLes drones navals doivent effectuer les tâches mono-tones, sales et dangereuses, explique le capitaine defrégate Marcellin. Démultiplicateurs des capacités derecueil d’informations, ils permettent d’assurer uneplus grande persistance au profit d’une mission per-manente. Ainsi, le drone tactique embarqué sur unefrégate (illustration), pourra rester 10 heures surzone, contre 3 heures pour un hélicoptère. Il limiterason exposition à la menace en vue d’agir mieux et pluslongtemps dans des environnements hostiles,comme le recueil de preuves lors d’une pollution parun chimiquier. Le drone télécommandé de premièregénération déplace les opérateurs sans en diminuer lenombre par rapport à l’équipage d’un hélicoptère envol. L’intelligence artificielle doit encore progresserpour automatiser ses tâches, afin de le maintenirlongtemps sur zone. En milieu dégradé, le drone nepeut faire preuve de résilience, alors que l’équipage de

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Projet de drone naval pour la frégate multimissions de 6.000 t (à gauche) et la future frégate de taille intermédiaire de 4.200 t.

(c) Naval Group

LES DRONES NAVALS

Une supériorité informationnelle

l’hélicoptère synthétise les informations et réagit enconséquence. Quoique le drone réduise le risque faceà la menace, l’exposition des militaires restera inévi-table pour la réussite de la mission. Avec un moindrecoût d’exploitation qu’un aéronef habité, la montéeen puissance des drones complète les plates-formeshabitées (hélicoptères, avions et navires de surface),en profitant des apports de chacun sans en dupliquerles capacités.

LES DRONES AÉRIENSLe rayon d’action d’un drone aérien reste en cohé-rence avec sa zone d’intérêt et sa « survivabilité » se-lon le niveau de la menace. Ainsi, le micro-drone, des-tiné aux commandos, porte jusqu’à 55 km. Lemini-drone d’un patrouilleur est utile de 55 km à 110km et le drone tactique d’une frégate de 110 km à 185km. Par son allonge, le futur drone de combat éten-dra la zone d’opération d’une force navale de luttecontre la terre (action amphibie ou groupe aérona-val) jusqu’à 550 km. Grâce à sa longue endurance, ilcomplètera l’aviation maritime pour la surveillancedes approches maritimes en Atlantique et en Médi-terranée. La Marine et la Délégation générale de l’ar-mement ont procédé, depuis la terre, aux essais de di-vers types de mini-drones à voilure fixe (type avion)et tournante (type hélicoptère) et leurs charges utilespour confirmer leur plus-value et adapter leurs sen-seurs, par exemple pour la recherche de mines déri-vantes. En outre, des expérimentations se sont dérou-lées sur l’aviso Commandant-Bouan, pour lelancement par catapulte d’un mini-drone à voilurefixe et sa récupération par un filet vertical tendu surla plage arrière. L’escadrille 10 S a effectué, sur le pa-trouilleur L’Adroit, plus de 200 appontages dedrones tactiques embarqués S-100 à voilure tour-nante entre 2012 et 2014 (170 heures de vol). En-suite, l’expérimentation « Serval » (Système embar-qué de reconnaissance vecteur aérien léger) a réalisé

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plus de 40 heures de vol du S-100 en 2017, combinéavec un hélicoptère Alouette III du bâtiment de pro-jection et de commandement Dixmude, dans un en-vironnement opérationnel. Poursuivie en 2018, ellevise d’abord à établir le concept d’emploi d’un dronetactique à décollage et atterrissage vertical pour desmissions de surveillance maritime, de reconnais-sance, de renseignement et d’appui aux opérationstactiques. Ensuite, elle en évaluera les contraintesd’intégration physiques et fonctionnelles sur un na-vire et dans l’espace aéromaritime ainsi que sa main-tenance et sa mise en œuvre en toute sécurité. En-fin,« Serval » devra aussi déterminer les processus derecrutement et de formation des opérateurs et destechniciens de maintenance.

LA GUERRE DES MINESLes drones de surface et sous-marins trouveront uneapplication dans la guerre des mines, qui pourraitmenacer le canal de Suez et les détroits des Darda-nelles, de Bab el-Mandeb et d’Ormuz. Les navireschasseurs de mines les détectent par sonar et les clas-sent. Ensuite, des robots sous-marins ou des plon-geurs démineurs les identifient et les neutralisent.Déjà, les deux premières opérations sont réalisablesde façon discrète par des drones sous-marins légers,embarqués sur des canots pneumatiques, en vued’une analyse des images sonar à terre (identifica-tion). A l’horizon 2030, le « système de lutte anti-mines futur » (SLAMF) remplacera les moyens ac-tuels par des drones de surface et sous-marins, desbâtiments pour plongeurs démineurs et le renouvel-lement du système d’exploitation des données. Lapremière étape du programme porte sur un proto-type franco-britannique développé à partir de 2019,en vue d’une livraison d’un système de drones parpays en 2022. Le SLAMF doit notamment sécuriserla mise en œuvre des sous-marins nucléaires lanceursd’engins à Brest et du porte-avions à Toulon.

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Novembre 1918, aléas d’une mission de paix

Le 4 octobre 1918, le chancelier alle-mand Max de Bade propose au prési-dent américain Wilson un armisticeimmédiat. Souhaitant au préalablel’évacuation des pays occupés, voirela capitulation militaire, le 5 novem-bre, une note des Alliés indique qu’ilssont prêts à entamer des négociationsde paix sur la base du programme ditdes « 14 points ». Dans la nuit du 6au 7 novembre, à minuit trente pré-cisément, un radiotélégramme duhaut-commandement allemand pro-pose une entrevue avec les autoritésfrançaises. Le maréchal Foch répondque « les plénipotentiaires allemands[pourront se présenter] aux avant-postes français par la route de Chi-may-Fourmies-La Capelle-Guise. Desordres sont donnés pour les recevoir etles conduire au lieu fixé pour la ren-contre ».

Franchir le frontLa délégation allemande comportequatre membres principaux : le secré-taire d’Etat impérial, M. Mathias Erz-berger, président de la délégation,l’envoyé extraordinaire impérial etministre plénipotentiaire, le comte Al-fred Oberndorff, le général-majorprussien Detlof von Winterfeldt (an-cien attaché militaire en France), lecapitaine de vaisseau impérial Vanse-low. Ils sont assistés du capitained’état-major Geyer, d’un interprète, lecapitaine de cavalerie von Helldorff,et d’un sténographe. A partir de laville de Spa, où est établi le GrandQuartier Général (GQG) allemand, ungroupe de cinq véhicules se dirige dèsle 6 novembre vers la frontière fran-çaise. Hélas, à peine cette expéditionentamée, un accident contraint lesplénipotentiaires à s’entasser dans

trois véhicules. Vers 14h45, des sol-dats allemands désarmés sont faitsprisonniers près de la ligne française.D’après eux, l’armistice est signé de-puis 13h30 et un ordre de cessez-le-feu a été donné. Des faits que vien-nent corroborer peu après unémissaire et deux cavaliers. Ils préci-sent d’ailleurs que le retard de la dé-légation est dû au mauvais état desroutes et que son arrivée est repous-sée à 17h00. Dans ses «Souvenirs de guerre », Ma-thias Erzberger raconte : « Ce voyagefut lent, à cause des masses detroupes allemandes qui refluaient. A latombée de la nuit [la veille], nous ar-rivâmes, vers six heures, à Chimay, oùle général allemand […] me disaitque, pour assurer la retraite de l’ar-mée allemande, les routes étaientbarrées par des arbres qu’on avait je-

De l’Armistice, on retient le plus souvent l’image du wagon de Rethondes et le cessez-le-feu final le11 novembre à 11h00 mais, généralement, on ignore les conditions improbables dans lesquelles lesplénipotentiaires allemands ont mené leur mission.

Portraits des trois principauxplénipotentiaires allemands, à partir de

la gauche, le secrétaire d’EtatErzberger, le général-major von

Winterfeldt et le comte Oberndorff(source : “La victoire : supplément au

Panorama de la Guerre précédé del'Allemagne vaincue : étude

d'ensemble “ lieutenant-colonelRousset, J. Tallandier, 1919, p.9).

©Gallica

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tés au travers d’elles. La route étaitloin d’être sûre. J’insistai pour conti-nuer mon voyage, et j’y parvins aprèsune conversation téléphonique avecl’Etat-Major allemand le plus proche,qui était à Trelon. J’y arrivai vers septheures et demie. […] Un détache-ment de pionniers avait débarrassé lechemin de toutes les mines […]Après un court arrêt, nous conti-nuâmes, beaucoup plus vite parce queles routes n’étaient plus si encom-brées. J’avais emmené avec moi untrompette. […] A partir des lignes al-lemandes, les autos avancèrent trèslentement. Le feu avait cessé desdeux côtés depuis quelques heures.Un grand drapeau blanc [une nappeblanche récupérée au passage à Four-mies] fut hissé sur la première auto.Le trompette faisait entendreconstamment de brefs appels. A envi-ron 150 mètres du front allemand ap-parurent les premiers soldats fran-çais », ceux du 19ème Bataillon dechasseurs à pied.

RethondesC’est l’heure de gloire du caporal-clai-ron Pierre Sellier du 171ème Régi-ment d’infanterie (RI), plus tard sur-nommé le « clairon de l’armistice »,qui sonne les ordres de cessez-le-feuaux troupes françaises environnantes.Le monument de la Pierre d’Haudroy(1925), marque l’emplacement hau-tement symbolique de la rencontre.Après une prise en charge par le repré-

sentant du corps d’armée, à la VillaPasques (poste de commandementdu 171ème RI), on procède à unéchange avec des véhicules français.Le convoi se dirige vers Homblières,au quartier général de la Ire Armée.Après un dîner tardif, les Allemandssont escortés jusqu’à la gare de Ter-gnier, où les attend un train spécial quiles mènera à la forêt de Rethondes, cequ’ils ignorent. Pour autant, l’offen-sive française ne faiblit pas. « L’en-nemi désorganisé par [les] attaquesrépétées cède sur tout le front » ; il im-porte d’entretenir les actions en courssans se relâcher afin d’en finir avec la

Reconstitution de la scène d’arrivée des plénipotentiaires allemands dans les lignesfrançaises avec le clairon Pierre Sellier sonnant le cessez-le-feu provisoire le 7novembre 1918. Couverture Le Petit Journal illustré du 11 novembre 1928.

©Gettyimages

résistance allemande. Le 8 novem-bre, en fin de matinée, le capitainevon Helldorff est chargé de repasserles lignes pour apporter les conditionsd’armistice au GQG de Spa. Vers18h00, le voilà de retour à proximitéde la ligne de front avec deux véhi-cules. Malgré l’annonce d’une nou-velle zone de cessez-le-feu, le claironfrançais qui l’escorte ne parvient pasà ouvrir la voie. Pire, les troupes alle-mandes stoppent leur progression pardes tirs de mitrailleuses et d’obus.Contourner est impossible car la plu-part des ponts ont été détruits pourpréserver le retrait allemand.

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Le 9 novembre, un dispositif provi-soire est mis en œuvre par le géniefrançais. Plusieurs solutions de se-cours sont envisagées : un retour paravion à partir du terrain de Crupilly, si-tué à 15 km de La Capelle, et des che-vaux sont également préparés. Alorsque les combats ont repris, un premierpont puis un second sont rétablis. Lecapitaine entre enfin dans les lignesallemandes à 14h20. Sitôt le passagede l’officier allemand achevé, les com-bats reprennent en direction de lafrontière belge, vers Beauwelz, loca-lité reconquise dans la journée. Suite à la transmission du projet, le

GQG allemand se résout à le ratifier etemporte la décision des politiques. Le 11 novembre vers 12h30, pouréviter toute nouvelle péripétie, le capi-taine allemand Geyer est rapatrié versSpa par avion depuis Tergnier. Il estporteur de la carte officielle des zonesd’évacuation et de l’acte de l’armis-tice. Le reste de la délégation estacheminé à peu près au même mo-ment par train vers Tergnier. Aprèsavoir attendu le retour de leurs véhi-cules, ils rejoignent la ligne de front àdeux heures du matin le 12 novem-bre. Si ce passage s’est cette fois dé-roulé sans encombre, cinq des sept vé-

hicules trouvent tout de même lemoyen de se perdre en route ! Fortheureusement, tout le monde se re-trouve sain et sauf, à Spa. A Beau-welz, si, à l’heure dite, le claironPierre Sellier a sonné l’arrêt définitifdu conflit. Une plaque commémora-tive inaugurée le 9 novembre 1998 lerappelle. Pour lui, comme pour ses ca-marades, la mobilisation au service dela France va cependant se poursuivrependant de très longs mois. Il n’estdémobilisé que le 25 août 1919.

Capitaine Eva Renuccichargée de recherches

Service historique de la Défense

Carte récapitulative de la mission des plénipotentiaires allemand ©RNI

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DANS LES LIVRES

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DÉFAITES MILITAIRES, CE QU’IL FAUT ÉVITER

Les échecs militaires résultent de causes diverses : non préparation de l’outil guerrier, vision erronéede l’ennemi, mauvaise appropriation des rapports de force, incompétence des chefs ou manque devolonté de la troupe. Lors de la conduite de la bataille, certains chefs, sous le coup de l’émotion,confondent intuition et réflexion, perception et réalité. Charisme et compétence technique ne suffi-sent pas. Le chef doit avoir une vision globale et donner un sens à l’action militaire.

La défaite de la Prusse à Iéna en 1806, face à Na-poléon, conduit le général von Scharnhorst à créerune académie militaire en 1810. La Prusse neconnaît ensuite que des victoires : contre la Franceen 1813 (Leipzig), contre le Danemark en 1864(guerre des Duchés), contre l’Autriche en 1866(Sadowa) et à nouveau contre la France en 1870(Sedan). Celle-ci en tire les leçons et crée l’Ecolesupérieure de guerre en 1876, où enseignera le fu-tur maréchal Foch qui, méthodiquement, forceral’Empire allemand à demander l’armistice en no-vembre 1918. Certaines précautions tactiques assurent la vic-toire ou, du moins, limitent la portée de la défaiteen évitant des erreurs lourdes de conséquences. S’engager sans renseignement. La collecte préa-lable et permanente du renseignement contribueà la sûreté et à la liberté d’action. A Trasimène (21juin 217 avant JC), le général carthaginois Hanni-bal a su utiliser le terrain pour détruire une arméeromaine complète dans une embuscade. Le consulromain Flaminius a mal appréhendé le champ debataille, créant les conditions d’une défaite totalequi met la ville de Rome sous la menace directe destroupes carthaginoises. A Castillon (17 juillet1453), le prestigieux capitaine anglais John Tal-bot n’a guère pris en compte la nouveauté tech-nique que constitue l’artillerie de campagne (ca-nons légers à roues) acquise par Charles VII. Ladéfaite de Castillon met fin à la guerre de Cent

Ans et contraint l’Angleterre à renoncer à ses pré-tentions sur la couronne de France. A Adoua (1ermars 1896), l’empereur d’Ethiopie Ménélik IIécrase le corps expéditionnaire italien du généralBaratieri, mal renseigné sur le terrain, l’effectif del’ennemi et sa capacité manœuvrière. Pour la pre-mière fois, un peuple autochtone parvient à s’op-poser, par les armes, à un processus occidental decolonisation..Se laisser imposer le terrain. Accepter le combatsur le terrain choisi par l’adversaire paralyse la ca-pacité de manœuvre et rend les atouts inopérants.A Bannockburn (23-24 juin 1314), le roi d’EcosseRobert Bruce, fort de son infanterie, livre combatsur un espace boisé, étriqué et marécageux, quiempêche la cavalerie anglaise de charger et les ar-chers gallois de tirer un déluge de flèches. A Spion-kop (24 janvier 1900), l’armée britannique af-fronte, sans reconnaissance préalable, les« kommandos » boers, excellents tireurs se dé-plaçant rapidement à cheval. Elle mettra deux ansà s’adapter à leur tactique à grande mobilité. Subir le rythme de l’adversaire. La réflexion tac-tique permet d’anticiper les options de manœuvrede l’adversaire. Basée sur l’étude du terrain et desforces et faiblesses ennemies, elle laisse aussi uneplace à l’imprévu, par l’étude de cas susceptibles deremettre en cause le plan initial. ARossbach (5 no-vembre 1757), l’armée prussienne de Frédéric IImanœuvre plus rapidement que la coalition

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franco-autrichienne, deux fois plus nombreusemais à la cohérence et au niveau opérationnel hé-térogènes. A Yorktown (28 septembre-17 octobre1781), les généraux français Rochambeau et amé-ricain Washington profitent de l’arrivée de lapuissante flotte française de l’amiral de Grasse,pour prendre de vitesse les troupes britanniquesenvoyées y renforcer l’armée de Lord Cornwallis,qui sera contraint de capituler. A Cao Bang (2-9octobre 1950), le général viêt minh Giap, très bienrenseigné sur le terrain et par des « fuites » à Pa-ris, devance la manœuvre française. La force viet-namienne de guérilla s’est muée en une arméeconventionnelle, mobile et puissamment armée.Sous-estimer son ennemi. Obtenir une visionjuste et actualisée de l’adversaire se heurte à la pro-tection du secret et aux leurres sur ses buts réels,forces et faiblesses. A Carrhes (9 juin 53 avant

JC), les légions romaines du triumvirCrassus, infanterie lourde et cavale-rie légère, sont anéanties, sur un ter-rain désertique, par l’armée du géné-ral parthe Suréna, composée decavaliers cuirassés, capables de replisans limites géographiques, et d’ar-chers disposant d’approvisionne-ments continus de flèches. Pendant

la guerre d’hiver russo-finlandaise (30 novembre1939-13 mars 1940), l’Armée rouge se heurte à lacombativité et la qualité du commandement desunités finlandaises, beaucoup moins nombreusesmais soutenues par le patriotisme de leur nation.Sur le million d’hommes engagés en 1940, elle enperd 270.000, qui manqueront lors de l’offensiveallemande de 1941.Manquer d’audace. Engager le combat, sans enmaîtriser toutes les données, implique de prendreun risque (pertes humaines), donc de laisser unepart au hasard. A Balaklava (25 octobre 1854), lesdeux belligérants, tant britannique que russe,manquent à plusieurs reprises de profiter des fra-gilisations ponctuelles de leur adversaire sur le ter-rain. Cette bataille des occasions manquées impo-sera à la coalition franco-britannique de s’installerlongtemps en Crimée avec le long et sanglant siège

Le colonel Gilles Haberey, saint-cyrien etbreveté de l’École de guerre, a commandé le92ème Régiment d’infanterie de Clermont-Ferrand et a participé à plus d’unedizaine d’opérations extérieures. Le lieutenant-colonel Hugues Perot, saint-cyrien et breveté de l’École de guerre, a servicomme chef opérations du 126ème Régimentd’infanterie de Brive-la-Gaillarde et a étéengagé au Kosovo, en Côte d’Ivoire et enAfghanistan. Leur précédent ouvrage, intitulé“L’Art de conduire une bataille”, a reçu le prixde la Saint-Cyrienne en 2017. (voir revueN°326 Décembre 2016, p.8-10).”

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de Sébastopol. A Metz (14-18 août 1870), le hautcommandement français n’a pas saisi les opportu-nités de contourner le dispositif allemand. Pen-dant cette guerre, les chefs militaires français,expérimentés et compétents dans le commande-ment au contact mais manquant de connaissancesen termes de planification, logistique et manœu-vre de grande ampleur, n’ont jamais cherché àprendre l’initiative tactique. Lors de la réductionde la poche de Falaise (12-21 août 1944),malgré lasuprématie aérienne et la supériorité numériquedes forces alliées, le général américain Bradley a ra-lenti la manœuvre de jonction avec les troupes bri-tanniques, par excès de prudence. Environ 90.000Allemands parviennent à s’échapper de Falaise etjoueront un rôle décisif dans l’échec de l’opérationaéroportée alliée à Arnhem, qui aurait pu hâter lafin de la guerre.S’obstiner inutilement. Des conceptions tac-tiques trop rigides, sclérosant la réflexion, peuventconduire à des choix néfastes. Aucune batailled’usure ou d’attrition ne s’est avérée payante auniveau stratégique, y compris pour le vainqueur. AMalplaquet (11 septembre 1709), le maréchal deVillars, à la tête de la dernière force militaire fran-çaise, y a disposé des lignes de défense successivesface à une coalition d’armées européennes, beau-coup plus nombreuses et commandées par le ducde Marlborough (Angleterre) et le prince Eugène(Saint Empire romain germanique). Il se replie enbon ordre, après avoir infligé à l’ennemi trois foisplus de pertes que les siennes. Quoique maîtres duterrain, les coalisés se trouveront dans l’incapacitéde poursuivre leur campagne en France. Dans laforêt de Hürtgen (19 septembre 1944-10 février1945), le haut commandement allié n’a pas pris encompte ce terrain peu pénétrable pour les blindés,

une météorologie défavorable à l’aviation et unerupture d’approvisionnements en obus. Le com-mandement allemand, conscient de cette partiede la ligne Siegfried, l’avait renforcée en effectifs ety avait camouflé pièges antichar et antipersonnel,champs de mines et réseaux de barbelés. Ce fut laplus sanglante bataille de l’armée américaine de laseconde guerre mondiale pour un résultat limité.Céder à la panique. Sentiment d’incertitude,perspective de la défaite et surprise peuvent dé-clencher un stress collectif conduisant à la disloca-tion d’un dispositif, dont l’adversaire profitequand il ne l’a pas sciemment recherché. A LasNavas de Tolosa (16 juillet 1212), le calife Muha-mad an-Nâsir (Andalousie) dispose, sur un ter-rain favorable, de troupes aguerries et deux foisplus nombreuses que celles des rois Alphonse VIII(Castille), Pierre II (Aragon) et Alphonse II (Por-tugal), des Templiers et des Hospitaliers. Contretoute logique, les trois rois déclenchent, sur toutela largeur du front, une charge de cavalerie qui dé-stabilise les unités musulmanes, tétanisées parcette réaction incohérente. La « Reconquista »chrétienne de l’Andalousie est relancée. A Capo-retto (24 octobre-12 novembre 1917), l’offensiveaustro-allemande, planifiée, a été précédée par uneinfiltration rapide de commandos de fantassinschargés de s’emparer d’objectifs clés en profon-deur. Quoique installées dans un massif monta-gneux favorable, les troupes italiennes ont eu lesentiment d’être tournées par l’adversaire. Cechoc psychologique fait découvrir à l’Italie, stupé-faite, l’état réel de ses forces.

Loïc Salmon« Les 7 péchés capitaux du chef militaire » par Gilles Haberey et Hugues Pérot.Éditions Pierre du Taillac/258 pages/26,90 €

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LES GADZ’ARTS

Croix de Guerre 1914-1918 et 1939-1945

L’Ecole des Arts et Métiers(« Gadz’Arts »), créée en 1780 par leduc de la Rochefoucauld-Liancourt, estaujourd’hui, sous le nom d’Arts et Mé-tiers Paritech, la plus grande écoled’ingénieurs en termes d’effectifs enFrance. Elle délivre un diplôme orientéd’abord vers le génie industriel et mé-canique, avec la présence globale de6.000 élèves, masterants et docto-rants, répartis sur 8 campus.

Première guerre mondialeA sa prestigieuse histoire technique etindustrielle, est associé un engage-ment patriotique sans faille. SeptEcoles d’Arts et Métiers figurent parmiles 16 institutions civiles françaises ti-tulaires de la croix de Guerre 1914-1918 : Châlons-en-Champagne, An-gers, Aix-en-Provence, Cluny, Lille,

Beaupréau (prédécesseur d’Angers),Paris. La Grande Guerre mobilisa envi-ron 6.500 anciens élèves et élèves,dont 1.100 périrent dès la premièreannée du conflit.La croix de Guerre 1914-1918 a étéremise le 28 mai 1927 aux Ecolesdes Arts et Métiers par le maréchal Jo-seph Joffre, en présence du présidentde la République Gaston Doumergue,du ministre de la Marine GeorgesLeygues, du ministre de l’Instructionpublique Edouard Herriot, du maré-chal Philippe Pétain et des plus hautesautorités des Arts et Métiers, en l’Hô-tel des ingénieurs des Arts et Métiersde l’avenue d’Iéna à Paris. Cette croixétait accompagnée d’une citation àl’ordre de l’armée, signée du ministrede la Guerre Paul Painlevé : « Ont ap-porté, au front comme à l’arrière, une

part glorieuse de services à la DéfenseNationale, en fournissant d’une partun important contingent d’officiers,sous-officiers, et soldats pourvusd’une instruction spéciale, et en colla-borant d’autre part à intensifier les fa-brications de guerre par les initiativesde leurs anciens élèves ».La croix devait circuler d’année en an-née dans les établissements. Ainsi,après Châlons-en-Champagne, elleétait reçue le 17 juin 1928 à Angerspuis à Aix, Cluny et Lille. Bordeaux etMetz ayant été créées ultérieurement.Le dernier transfert eut lieu à Paris, le29 mai 1932, en présence du prési-dent de la République Albert Lebrun.Trois exemples furent cités lors dutransfert de la décoration à Aix-en-Pro-vence : - le capitaine du génie Imbert (Aix1891) mort à Châlons-en-Cham-pagne en avril 1915 : « Blessé à lamain par un éclat d’obus, a continuéà diriger les travaux de défense sur lechamp de bataille ; blessé une se-conde fois à la cuisse, a conservé soncommandement sur la ligne de feutrois jours et trois nuits » ;- l’ingénieur électricien Daoust, lieute-nant d’infanterie, mort en Alsace endécembre 1914 : « A été mortelle-ment blessé, en entraînant sa sectionà l’assaut des tranchées ennemies, eten disant à ses hommes : « ma mort

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LES GADZ’ARTS

n’est rien si nous avons la victoire.Malgré ses souffrances, a occupé sesderniers moments à laisser des legsaux familles de ceux de ses hommestués en même temps que lui » ;- l’aspirant Guillou (Aix 1912), mortà Souchez : « Grièvement blessé, le16 juin 1915, en se portant à l’assautdes tranchées allemandes. Est restéquatre jours sur le terrain et a montréune énergie remarquable durant sontransport à l’ambulance, où il est morten disant : « ça m’est égal, c’est pourla France ! »A l’arrière, le soutien technique desécoles et de leurs ateliers eut un rôlecrucial, attesté par une lettre du minis-tre des Munitions en 1916 : « L’Ecoledes Arts et Métiers d’Aix, qui assuredepuis longtemps déjà, et dans d’ex-cellentes conditions, l’usinage desobus de 75, s’est appliquée par sur-croit, et avec le plus grand succès, à lasolution de nombreux et difficiles pro-blèmes intéressant la fabrication desprojectiles. »La Légion d’honneur fut remise auxmêmes écoles, en 1934, par le prési-dent Albert Lebrun.

Deuxième guerre mondialeEn 1956, complétant la reconnais-sance nationale, eut lieu la remise dela croix de Guerre 1939-1945 par leprésident René Coty, avec la citationsuivante : « De 1939 à 1945 ont prisune large part tant aux opérations de

miracle à l’enfer de la bataille, portentdepuis la croix des braves, et l’ont mé-ritée avec nos chers morts, pour notrecollectivité d’ingénieur des Arts et Mé-tiers ». Il poursuivait ainsi : « C’estvers ce rôle qu’il faut vous efforcer,mes chers jeunes camarades ; travail-lez de tout votre courage, de toute vo-tre âme ; soyez dignes de ceux qui, auprix de leur existence, ont refait uneFrance plus grande. »Le drapeau de l’Ecole des Arts et Mé-tiers porte désormais la croix de la Lé-gion d’honneur et celles des deuxguerres mondiales. Un siècle plustard, perdure l’esprit « Gadz’Arts »,marqué par ce passé glorieux, avec latrace bicentenaire de son origine mili-taire. Pierre Castillon

membre du conseil d’administration de l’ANCGVM

guerre qu’aux combats de la Résis-tance. Ont apporté une contributiontechnique de premier plan à la victoirede nos armes. Trois cent cinquante-trois de leurs élèves ou anciens élèvessont tombés au champ d’honneur,dont quatre-vingt morts en déporta-tion ou fusillés par l’ennemi. »

Effort industriel gigantesqueCes témoignages émouvants ne suffi-sent pas à rappeler, cent ans après,l’effort gigantesque qui a marqué laFrance, bien au-delà d’une généra-tion. L’industriel Jean Wittmann, pré-sident de l’Association des anciensélèves, s’adressant aux élèves en1928, évoquait « la suite des cita-tions accordées à ceux des nôtres quine sont plus ; à ceux aussi qui, vivantencore parmi nous, ayant échappé par

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AIRAINES (Somme)

Croix de Guerre 1939-1945

Airaines est une commune située à 20km au Sud-Ouest d’Amiens. Après ladésastreuse campagne de France demai 1940, le président de la Répu-blique Albert Lebrun remplace, à latête de l’Armée française, le généralMaurice Gamelin par le généralMaxime Weygand. Ce dernier réorga-nise la défense et recrée un front. Le53ème Régiment d’infanterie colo-niale mixte sénégalais (RICMS), ap-partenant à la 5ème Division d’infan-terie coloniale (DIC), reçoit pourmission de défendre le front s’éten-dant de Condé-Folie à Hanguest(Somme). Le 2ème Bataillon du53ème RICMS (II/ 53ème RICMS) afait d’Airaines un point d’appui. Du 5au 7 juin 1940, il résiste aux assautsrépétés de l’infanterie allemande ap-puyée par des chars et de l’artillerie etsoutenue par les bombardements dela Lufwaffe. La 5ème compagnie ducapitaine Charles N’Tchoréré détruit 8

chars allemands. Le 7 juin au matin,les Allemands détruisent le dépôt demunitions du bataillon. Ce dernier nepouvant plus accomplir sa mission,son chef, le commandant Seymour,décide de sortir en force pour briserl’encerclement. Le capitaine N’Tcho-réré demande l’honneur de couvrir laretraite du bataillon en restant surplace. Les Allemands réduisent les po-sitions de la compagnie une à une aumoyen de lance-flammes. A 22 h, ilne reste plus que 10 Africains et 5 mé-tropolitains valides mais sans muni-tions. Le capitaine N’Tchoréré décidede se rendre et sort à la tête de seshommes. Les militaires allemands du25ème Régiment d’infanterie appar-tenant à la 7ème Panzerdivision,commandée par le général ErwinRommel, séparent les militairesblancs des militaires noirs. Le capi-taine N’Tchoréré proteste et refuseque les Noirs soient considérés

comme des sous-hommes. Il estabattu d’une balle dans la nuque et unchar passe sur son corps. Cette façonde mutiler les corps des Africains a étéutilisée à plusieurs reprises et en par-ticulier à Chasselay où 104 tirailleurssénégalais sont tués et 856 portésdisparus. Les Allemands accusent lestirailleurs sénégalais de commettredes crimes de guerre avec leurs coupe-coupes. Or les mutilations constatéesne résultent pas de coups portés avecune arme blanche mais sont dues àdes éclats d’obus. Les Allemands dé-clarent alors que le coupe-coupe est in-terdit par les conventions de La Hayesur les lois et coutumes de la guerre.Selon les Allemands, les officiersblancs qui commandent les tirailleurssont les complices de ces crimes etdoivent donc être exécutés. Au boisd’Eraine (Oise), 8 officiers des16ème et 24ème Régiments de tirail-leurs sénégalais sont fusillés. Ainsi, lesAllemands justifient-ils leurs crimes deguerre par des faux crimes de guerre.En 1940, sur 40.000 tirailleurs séné-galais (1), 17.000 sont tués, blessésou disparus, dont 3.500 exécutéssommairement selon l’historien amé-ricain Raffaël Scheck.Les tirailleurs sénégalais prisonniers,séparés de leurs camarades métropo-litains et nord-africains, furent incarcé-rés en France. L’Allemagne ne voulait

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AIRAINES (Somme)

pas que les « Indigènes », ces sous-hommes, selon la théorie nazie, fou-lent le sol allemand. Après la premièreguerre mondiale, les Allemands orga-nisent une campagne de propagandeinternationale contre la présence detroupes coloniales dans les forcesd’occupation française en Allemagne.La France méprise l’Allemagne aupoint de la faire garder par des Noirset souhaite l’abâtardir par le mélangedes sangs, suite à des accusations deviols effectués par des Sénégalais.C’est la théorie de la « honte noire »à laquelle Adolf Hitler a fait référencedans son livre « Mein Kampf ».Sa brillante attitude et son dévoue-ment à la défense de la patrie avec1.200 tués au combat en 1940 vau-dront au 53ème RICMS la citation sui-vante à l’ordre de l’armée : «Au coursde la journée du 5 juin, sous les ordresdu lieutenant-colonel Polidori, a sup-porté tout le poids de l’attaque enne-mie menée par des chars d’assaut etde l’infanterie appuyée par l’aviationet l’artillerie. Malgré l’écrasante supé-riorité des moyens de l’adversaire, adisputé pied à pied le terrain qu’il étaitchargé de défendre et a ainsi réussi àcontenir la ruée adverse jusqu’à seizeheures. A finalement succombé, sub-mergé par les chars et l’infanterie en-nemis après un combat opiniâtre deplus de douze heures. A perdu les7/8èmes de ses officiers et les9/10èmes de son effectif troupe

croix de Guerre 1939-1945 avecétoile de bronze accompagnée de lacitation : « Sur la ligne de feu, fin maiet début juin 1940, a été le théâtredes furieux combats soutenus par la5ème DIC. Très violemment bom-bardé, aux 2/3 détruit, a supporté di-gnement le malheur et envisagé avecconfiance l’avenir. Vaillant et admira-ble village au patriotisme élevé, quis’est remis avec cœur et acharnementau travail ».Deux habitants d’Airaines, Albert etRaymonde Poiret, vont se mobiliserpour que le sacrifice des tirailleurs sé-négalais soit honoré. Aujourd’hui, laplace où est implanté l’hôtel de villes’appelle : «Place du 53ème RICMS».Une avenue porte le nom de « Capi-taine N’Tchoréré ». Une stèle est éri-gée à sa gloire et celle des combat-tants d’Afrique noire qui ont versé leursang pour la France. Le fils du capi-taine N’Tchoréré, Jean-Pierre, tom-bera les armes à la main une semaineplus tard dans les derniers combats dela campagne de France.En 2014, la 198ème session régio-nale de l’Institut des hautes études dedéfense nationale portera le nom de« Promotion capitaine Charles N’Tcho-réré».

Marc Beauvoissection de la Haute-Garonne

(1) Terme désignant les militaires provenantdes Etats issus de l’Afrique occidentale fran-çaise : Sénégal, Mali, Niger, etc.).

composée d’Européens et d’Indi-gènes ».Quant à la commune d’Airaines, elleest détruite à 75 % à l’issue des com-bats. Elle reçoit, le 11 novembre1948, la croix de Guerre 1939-1945avec étoile de bronze. La citation quil’accompagne est la suivante : « Com-mune martyre qui a témoigné aucours de la guerre 1939-1945 d’unpatriotisme exemplaire. Théâtre desviolents combats soutenus par la5ème DIC du 5 au 7 juin 1940. A étéau ¾ détruite. A la libération, s’est re-mise courageusement au travail, fai-sant preuve des plus belles qualitésfrançaises ».Le village de Dreuil-Hamel, absorbé en1972 par la commune d’Airaines, setrouvait dans le secteur défendu par la5ème DIC et sera détruit à 60 %. Il re-cevra aussi, le 11 novembre 1948, la

Le capitaine Charles N’Tchoréré,commandant la 5ème compagnie du 53ème Régiment d’infanterie

coloniale mixte sénégalais.

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MOYON (Manche)

Croix de Guerre 1939-1945La section de la Manche tiendra sonassemblée générale à Moyon, com-mune décorée de la croix de Guerre1939-1945, le 15 septembre 2018.

La bataille de NormandieLe 7 juin 1944, un habitant, JulesGuérin, se déplaçant avec sa voiture àâne est tué par un mitraillage. Le 11juin au matin, une colonne SS, proba-blement de la 12ème PanzerdivisionHitler Jugend, arrive à Moyon et, avecbrutalité, prend ses aises chez l’habi-tant pour repartir en début de mati-née. L’aviation américaine a repéré leconvoi, le mitraille sur 2 km en lui cau-sant de lourds dégâts. Les soldats al-lemands tués sont enterrés dans unchamp. Le 27 juillet, un avion volantbas s’est accroché à un arbre, le piloteest tué. La deuxième phase de la ba-taille de Normandie est commencée.Aux ordres du général Dempsey, la2ème Armée britannique lance l’opé-ration « Blue Coat », avec Falaise pourobjectif. L’opération « Cobra » est encours. Le général Patton, à la tête dela 3ème Armée américaine est prêt àfoncer sur Avranches et la Bretagne.Sur son flanc gauche, le général Rose,commandant la 2ème Division blin-dée, renforcée du 113ème groupe decavalerie et du 22ème Régiment d’in-fanterie forme le CCA2 (acronyme an-glais) avec Vire comme objectif. Entreces deux armées, le 19ème Corps

d’armée, aux ordres du général Cor-lett et avec 5 divisions d’infanterie, aVire pour objectif. Corlett et son état-major pensent qu’ils n’ont plus d’Alle-mands en corps de bataille face à eux.Or, Von Kluge a fait relever du front la12ème Panzerdivision et obtenu la326ème Division d’infanterie ainsique le 116ème Régiment venus duPas-de-Calais et a concentré sestroupes. La 12ème Panzerdivisions’est rassemblée aux alentours deMoyon, rejointe par les restes de la352ème Division qui était, le 6 juin, àOmaha face à la 29ème Division d’in-fanterie américaine.Dans l’après-midi du 28 juillet, lescombats font rage. La 30ème Divisionentre en contact avecles Allemands à Trois-got. Les Panzer occu-pent le carrefour Parissur la route de Percy.Ils menacent de cou-per la route. Le géné-ral Rose tente d’érigerune barrière. Il divisele CCA2 en trois «TaskForces» chacune ren-forcée d’une compa-gnie du 22ème Régi-ment d’infanterie.Deux sont envoyéesvers Moyon. L’une tra-verse le Mesnil Opac,y détruit 5 chars et 4

canons antichar, mais la résistance al-lemande l’a conduite à revenir à sabase. L’autre, au Sud de Moyon,passe sans perte et provoque delourds dégâts aux Allemands, maisleur résistance l’oblige à refluer. Le 29juillet, l’arrivée de la 29ème Divisiond’infanterie américaine qui s’est sacri-fiée à Omaha et a libéré Saint-Lô, per-met de mettre en ligne les 116ème et175ème Régiments près de Moyon.Les Allemands résistent et s’infiltrent.Les combats durent jusqu’au 31 juil-let, date où le 116ème Régiment pé-nètre dans Moyon. Les pertes améri-caines sur la commune sont de 272tués. Vire est atteint le 6 août.Les habitants s’étaient réfugiés dans

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MOYON (Manche)

les champs. La commune a été dé-truite aux deux tiers. Son clocher, quiservait d’observatoire aux Allemands,est abattu. Le général Rose a été tuéen mars 1945. Il était décoré de la Lé-gion d’honneur et des croix de Guerre1914-18 et 1939-45 avec palme.

Histoire de MoyonLe nom de Moyon, d’origine celtique,impliquerait l’existence d’un village àcet endroit à l’époque gauloise. Plustard, on trouve Moyon comme faisantpartie des biens appartenant à Guil-laume le Conquérant, duc de Norman-die, sous le nom de «Cour deMoyon». Il l’érigea en baronnie et ladonna à un de ses fidèles compa-gnons, en remerciement de son sou-

revint à la couronne de France. Lenom Moyon apparaît dans l’histoiredes familles Paisnel, d’Estouville, Ma-tignon et Grimaldi. Les d’Estouville fu-rent les défenseurs du mont Saint-Mi-chel contre les Anglais en1421-1422. Les Matignon, dont l’hô-tel du même nom était leur résidenceparisienne, étaient également comtesde Thorigny et lieutenants générauxde Normandie. Jacques de Matignona épousé Louise Grimaldi, seule héri-tière de la famille princière de Mo-naco. Leur fils Honoré III de Monaco,qui vécut au château de Thorigny, futdépossédé de ses biens pendant la Ré-volution française, mais la famille aconservé le titre. Le prince Albert II deMonaco est aussi baron de Moyon.Comme vestige de ce passé histo-rique, Moyon n’a conservé que lesbases du clocher du XIIème siècle.

Paul Laurent, présidentde la section de la Manche

Sources : Georges Cirou, témoin del'époque, J-F. Pignet, président de l’Associa-tion Guillaume de Moyon, et documents surla bataille de Normandie.

tien pour asseoir son pouvoir en Nor-mandie en 1027. Ce dernier prit le ti-tre de baron Guillaume 1er de Moyon.Lors de la conquête de l’Angleterre en1066, Guillaume de Moyon, s’étantparticulièrement illustré, reçut lescomtés de Dorset et Sommerset. Dansce dernier, un château fut érigé àDunster face à la mer et devint lesiège de ses terres en Angleterre. Lorsde l’annexion de la Normandie par laFrance en 1204, son descendant, Re-naud 1er, mis en demeure de choisirentre le roi de France et celui d’Angle-terre, renonça à ses terres en Norman-die. Il s’installa définitivement en An-gleterre, où ses descendants jouèrentun rôle politique. La lignée directes’étant éteinte en 1404, la baronnie

Le mot du maire“Moyon, commune atypique, fut une baronnie importante dans la région. Un château fort, qui y était implanté, fut brûlé à la Ré-volution. La guerre de 1939-1945 a fortement endommagé la commune. Le bourg fut détruit à plus de 80%. La commune a suse relever et fut reconstruite : mairie, école, clocher de l’église, presbytère entre autres. Après la reconstruction, des investissementsont été réalisés : stade, salle des fêtes, assainissement collectif. En 25 ans, le bourg de Moyon s’est transformé : déplacement ducimetière et réaménagement autour de l’église. La commune s’est développée avec la création de zones d’activités, avec plus de250 emplois, et des lotissements d’habitations, ce qui a permis de maintenir un tissu commercial varié. Pendant cette période, lapopulation a doublé pour arriver à 1.300 habitants. En 2016, la nouvelle commune de Moyon Villages, regroupant les communesde Moyon, Chevry et Le Mesnil Opac avec 1.570 habitants, a été créée. Moyon Villages, une commune rurale dynamique, où ilfait bon vivre”. Gilles Beaufils, maire depuis 1990

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La Flottille 28 F

La Flottille 28 F est l’héritière des tra-ditions de la 8ème Flottille d’explora-tion (8 FE). En novembre 1942,après le débarquement anglo-améri-cain en Afrique du Nord, l’aéronau-tique navale est regroupée en Algérieet au Maroc. Le 15 mai 1944, la 8 FEest créée et son personnel est envoyéaux Etats-Unis pour y être formé. Ellereçoit 15 hydravions Catalina. Sa mis-sion consiste à assurer la protectiondes convois dans la zone Madère-Gi-braltar-Casablanca. En février 1945,elle effectue la protection du croiseuraméricain qui emmène le présidentFranklin Roosevelt à Yalta. Elle contri-buera à la découverte de champs demines au large de la Provence, de laCorse et de la Grèce. Au cours de la se-conde guerre mondiale, elle a effec-tué 539 missions de guerre en 4.566heures de vol. En septembre 1945, la 8 FE part enIndochine. Ses avions effectuent desmissions de reconnaissance, de liai-sons, d’évacuations sanitaires, d’in-terventions armées et de surveillancemaritime. En décembre 1945, la 8 FEest rebaptisée 8 F. A partir du 24 no-vembre 1950, les Catalina sont rem-placés par 10 Privateer. Ces dernierssont des avions de patrouille maritimedérivés du B-24 Liberator. Ils vont par-

ticulièrement s’illustrer, en décembre1952, dans les combats de Na San.Leur intervention sauve le point d’ap-pui. Au cours de l’année 1953, la 8 Fparticipe à des opérations dans laplaine des Jarres. Le 20 juin 1953, la8 F devient la 28 F. A partir de fin 1953, celle-ci intervientau profit du camp retranché de DienBien Phu. Sa citation à l’ordre de l’ar-mée de Mer résume sa participation àcette bataille : « Grâce au travailacharné de son personnel non volant,ses équipages animés du plus bel es-prit ont pris une très large part auxcombats livrés autour du camp retran-ché de Dien Bien Phu.A effectué du 1er décembre 1953 au31 mai 1954, 2.389 heures de volde guerre dont 691 de nuit au coursdesquelles elle a lancé sur les posi-

tions adverses plus de 3.200 tonnesde bombes.Se dépensant sans compter en dépitdes conditions météorologiques sou-vent difficiles, d'une DCA de plus enplus nourrie, a causé aux rebelles despertes sévères en hommes et en ma-tériel, par des bombardements précisaux abords du camp retranché et surles arrières. »En mars 1956, la 28 F quitte Saïgon,pour l’Algérie. Elle y effectue des mis-sions d’entraînement à la lutte anti-sous-marine (ASM), de surveillancemaritime (SURMAR) et de bombarde-ment. En 1961, les Privateer sontremplacés par des P2V6 Neptune. Sesmissions sont recentrées sur l’ASM etla SURMAR. En mars 1962, elle s’im-plante à Nîmes-Garons. Dissoute le 6avril 1963, elle est recréée sur la based’Hyères le 31 mars 2000. Elle estéquipée de 3 Nord 262 E pour effec-tuer des missions SURMAR et de 4Embraer 121 Xingu pour réaliser desmissions de transport. En 2010, la 28F est transférée sur la base de Lann-Bihoué où, uniquement équipée deXingu, elle forme les pilotes de l’Ecoledu Personnel Naviguant et assure desmissions de transport.

Marc Beauvoissection de la Haute-Garonne

La flottille 28 F de l’aéronautique navale est titulaire de la croix de Guerre 1939-1945 avec 2 citations à l’ordredu corps d’armée et de celle des théâtres d’opérations extérieurs avec 6 citations à l’ordre de l’armée de Mer.

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Paris - 75 - Invalides

Avant de s’engager dans laRésistance, pendant la secondeguerre mondiale, 118 des 1.038compagnons de la Libération et 18unités militaires ont participé à la pre-mière. Dans le cadre du centenaire dela Grande guerre, le musée del’Armée et celui de l’Ordre de laLibération leur ont rendu hommagedans les galeries de la cour d’honneurdes Invalides à Paris (30 janvier-2avril 2018).Après la déclaration de guerre enaoût 1914, environ 40 % d’entreeux se portent volontaires contre 3 %de l’ensemble des Français sous lesdrapeaux. Parmi ces 118 (dont 13sont pilotes), 96 sont mobilisés dansl’armée de Terre et 8 dans la Marine.En outre, 45 ont été blessés aumoins une fois, totalisant 95 bles-sures de guerre. Leur valeur leur aapporté 99 croix de Guerre et 287citations. Parmi ces combattants d’originesdiverses, figurent quelques noms quise feront connaître par la suite :

Georges Bidault (1899-1983), plu-sieurs fois ministre des Affaires étran-gères et de la Défense nationale etune fois président du Conseil sous laIVème République ; le juriste RenéCassin (1887-1976), prix Nobel dela paix en 1968 et inhumé auPanthéon ; le général GeorgesCatroux (1877-1969), ancien grandchancelier de la Légion d’honneur etporteur du projet de l’Ordre nationaldu Mérite (1963) ; l’amiral GeorgesThierry d’Argenlieu (1889-1964,voir revue décembre 2017, p.16-18); Sir Winston Churchill (1874-1965), Premier ministre britannique;le roi d’Angleterre George VI (1895-1952) ; le général Pierre Dejussieu-Pontcarral (1888-1984), ancien pré-sident de l’Association nationale descroix de guerre et de la valeur mili-taire (1969-1984) ; le maréchal (àtitre posthume) Jean de Lattre deTassigny (1889-1952) ; le généralJoseph de Goislard de Montsabert(1887-1981) ; le maréchal (à titreposthume) Pierre-Marie Koenig

(1898-1970) ; le général MartialValin (1898-1980, voir revue mars2017, p.16-18). S’y ajoutent le501ème Régiment de chars de com-bat, le 1er Régiment de fusiliersmarins et le 1er Régiment d’artilleriecoloniale.

Mentions particulièresLe capitaine Charles de Gaulle(1890-1970) est blessé à Dinant(Belgique) en 1914, en Champagneen 1915, et à Douaumont en 1916.Fait prisonnier et malgré cinq tenta-tives d’évasion, il reste interné enAllemagne jusqu’en 1918. Promugénéral de brigade en mai 1940, ilentre le 5 juin au gouvernement puispart pour Londres d’où il lancera, à laradio, l’appel à la résistance le 18juin. Fondateur de l’Ordre de laLibération (1940-1946), il devien-dra le premier président de la VèmeRépublique.L’infirmière de la Croix-Rouge BertyAlbrecht (1893-1943) s’occupe desblessés, mutilés, invalides et« gueules cassées » dans les hôpi-taux de Marseille. Co-fondatrice dumouvement « Combat » et arrêtéepar la Gestapo en 1943, elle mettrafin à ses jours pour ne rien dévoiler.Emilienne Moreau-Evrard (1898-1971) reçoit la croix de Guerre et laMilitary Medal en 1915, à 17 ans !Elle entrera dans la Résistance en1940 et rejoindra Londres en 1944,pour éviter d’être arrêtée.

Loïc Salmon

Exposition « Une vie d’engagement » dans la cour d’honneur

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N° 331 - Mars 2018 - 1er trimestre 29

CROIX DE GUERRE ET VALEUR MILITAIRE

Vœux du préfet de la région Nouvelle-Aquitaine

Gironde - 33 - Bordeaux

départemental de l’Ancgvm/33, pré-sentait ses vœux au préfet. Durantson allocution, ce dernier présentaittrois volets de son action. Le premier concerne l’économie et lesatouts de la région Nouvelle-Aquitaine. Le deuxième porte sur lasécurité de nos concitoyens dont ilremerciait les principaux acteurs surle terrain « les policiers, les gen-darmes et l’armée Sentinelle ». Lepréfet parlait ensuite du taux de mor-talité important sur les circuits auto-routiers, dont le gouvernement s’en-gage à diminuer le nombre par dessurveillances et sanctions nouvelles,qui seront mises en application trèsprochainement. Il terminait par levolet « amélioration du réseau auto-routier en Aquitaine », en assurant lafluidité de la circulation, notammentdans l’agglomération bordelaise.Des

constructions ou aménagements ver-ront le jour .Il se charge du suivi de cedossier. Enfin, la secrétaire d’État auxArmées, Geneviève Darrieussecq,souhaitait ses meilleurs vœux à tousles Aquitains, son soutien aux forcesarmées, avec une pensée particulièrepour les militaires de l’« arméeSentinelle » et des opérations exté-rieures, et notamment pour leurfamille. Elle terminait par une « réus-site dans tous les domaines pour larégion Nouvelle-Aquitaine ». Elle rap-pelait, qu’avant ses fonctions ministé-rielles, elle avait assuré durant plu-sieurs années, comme élue, celles demaire de Mont-de-Marsan (Landes),de conseillère régionale d’Aquitaineet de députée.

Roland DahanDélégué départemental

Le 12 janvier 2018, DidierLallement, préfet de la régionNouvelle-Aquitaine recevait les corpsconstitués à la résidence préfectoralede Bordeaux et leur souhaitait sesmeilleurs vœux pour l’année 2018.Parmi les personnalités civiles et mili-taires, se trouvaient GenevièveDarrieussecq, secrétaire d’État auxArmées auprès de Florence Parly,ministre des Armées, et Alain Juppé,ancien Premier ministre, président deBordeaux métropole et maire deBordeaux, des élus de la régionNouvelle-Aquitaine et du départementde la Gironde. A cette occasion, Roland Dahan, pré-sident régional de l’Aacrmi Sud-OuestNouvelle-Aquitaine (Association desanciens combattants et résistants duministère de l’Intérieur) et délégué

Geneviève Darrieusecq, secrétaire d’Etat aux Armées.

Le préfet Didier Lallement et le délégué départemental Roland Dahan.

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CROIX DE GUERRE ET VALEUR MILITAIRE

30 N° 331 - Mars 2018 - 1er trimestre

CARNET

Section d’Antibes

Emile GONZALES

Section du Born et de Haute Lande

André JOUET

Section des Bouches-du-Rhône

Maurice ERARD

Section de Cestas et Graves

Jean-Marie CEAUX

Anne-marie LABEGUERRE

(veuve de décoré)

Section de la Haute-Savoie

Edmond ADAM

Section de Moulins

Lucien METAIRIE

Section du Puy-de-Dôme

Fernand GUILLOCHON

Section de la Somme

François DELEDALLE

Section de la Vendée

Paul MAILLARD

L’ASSOCIATION NATIONALE DES CROIX DE GUERRE ET DE LA VALEUR MILITAIRE ADRESSE

SES SINCÈRES CONDOLÉANCES AUX FAMILLES ENDEUILLÉES ET LES ASSURE DE TOUTE SON AMITIÉ.

ELLE FÉLICITE CHALEUREUSEMENT LES DÉCORÉS.

DÉCORATIONS

N° 331 - Mars 2018 - 1er trimestre 31

DÉCÈS

Carte du combattantPour tout renseignement concernant la carte du combattant et

ses droits, vous pouvez vous adresser au bureau de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre

(ONACVG) de votre département.www.onac-vg.fr/fr

MÉDAILLE MILITAIRE

Section de la Haute-Savoie

Marius CHAFFAROD

André GUIHARD

André MUGNIER

Section de Moulins

Jean-Claude DESSIBOURG

Section de Poitou-Charentes

Jean-Jacques BASSET

Le 12 janvier 2018 à Montauban, le général Patrick Collet,commandant la 11ème Brigade parachutiste, a remis la croix de laValeur militaire (VM) au 17ème Régiment du génie parachutiste pourl’ensemble de ses actions entreprises au Sahel et au Sahara entre2013 et 2015. Le régiment totalise 7 citations : 1 croix de Guerre1939-1945, 1 croix de Guerre des TOE et 5 croix de la VM.

Hôtellerie IGESAVous pouvez bénéficier des prestations de l’Institution degestion sociale des armées (IGESA) pour l’hôtellerie avec

inscription individuelle en scannant votre carte du combattantou celle du titre de Reconnaissance de la nation (TRN).

Ensuite, vous l’envoyez en pièce jointe par internet à l’adressesuivante : www.igesa.fr

Téléphone : 04 95 55 20 20