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28 L’Officiel 3865 - septembre 2017 dossier Ce n’est pas parce que les manufacturiers ont le sourire que tout va pour le mieux dans le monde du pneu. Certes, les chiffres confirment une embellie amorcée en 2015. Ils réaffirment que les catégories reines – sport touring et supersport – font toujours recette. Ce qui ne s’améliore pas, c’est la marge dégagée par les détaillants sur ces consommables à haute teneur technologique. Et les marchands en ligne, souvent pointés du doigt à ce sujet, ne seraient pas les seuls à blâmer… PNEUMATIQUES 2/3-RM À LA HAUSSE, MAIS… PNEU MIEUX FAIRE ! L S L d i D n r L ( s s l e + 2 u d f A d q a a 1 l 1 1 p e C P m b l U « c d q d 2 s e C s p « c r m I u ( o C p à c d

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Ce n’est pas parce que les manufacturiers ont le sourire que tout va pour le mieux dans le monde du pneu. Certes, les chiffres con� rment une embellie amorcée en 2015. Ils réaf� rment que les catégories reines – sport touring et supersport – font toujours recette. Ce qui ne s’améliore pas, c’est la marge dégagée par les détaillants sur ces consommables à haute teneur technologique. Et les marchands en ligne, souvent pointés du doigt à ce sujet, ne seraient pas les seuls à blâmer…

PNEUMATIQUES 2/3-RMÀ LA HAUSSE, MAIS…PNEU MIEUX FAIRE !

LE CLUB DES CINQ S’ACTIVE SUR TOUS LES FRONTSLes cinq manufacturiers qui animent le marché français veillent à maintenir une sorte d’équilibre dans leur façon d’alimenter les canaux d’irrigation du secteur. Tentés de soigner les gros distributeurs, ils s’assurent cependant de ne négliger aucun client professionnel.

Depuis la publication dans L’Officiel du dernier dossier consacré au marché du pneu (cf. n° 3839 de juin 2015), de

nouvelles données chiffrées sont venues remonter le moral des manufacturiers. La hausse des volumes entre 2015 et 2016 (+ 8 %) ne peut être taxée de spectaculaire. Mais elle est, comme on dit, significative. Plus encourageant encore : les cinq premiers mois de 2017 laissent entrevoir une nouvelle progression de + 6 % par rapport à la même période de 2016. Pour mémoire, entre 2014 et 2015, un + 0,11 % avait marqué la fin de la dégringolade des volumes. « On était au fond de la piscine », résume Francis Audefroy, directeur de la division moto du groupe Goodyear Dunlop, qui précise qu’en France au cours de la première année citée, 1 198 349 pneus de 2/3‑RM avaient été écoulés en France, contre 1 199 630 l’année d’après. En 2016, le chiffre est passé à quelque 1 302 540 enveloppes, soit environ 102 34 0 de plus. Ces données officielles, produites par l’organisme Europool (qui enregistre les déclarations de Bridgestone, Continental, Dunlop, Metzeler, Michelin et Pirelli), ne sont contestées par personne ; même si, à la marge, quelques milliers de boudins sont probablement écoulés dans l’Hexagone par des marques exotiques.

Une meilleure conjoncture« Par définition, nul ne sait très bien ce que ces volumes représentent. Mais ce sont des petites marques qui arrivent en faible quantité par rapport aux acteurs majeurs du secteur. Même si elles placent 10 000 ou 20 000 unités par an, ce n’est pas assez significatif pour produire un quelconque effet sur le marché », estime le responsable.Cette hausse quantitative, pour revenir aux statistiques précitées, s’appuierait sur trois piliers principaux et concomitants. « La conjoncture économique s’est améliorée, c’est certain. Ce qui se traduit par une légère reprise de la consommation des ménages, moins enclins à différer telle ou telle dépense. Il est également possible que pendant un temps, des pneus achetés à l’étranger (notamment en Allemagne, voire en Espagne ou aux Pays-Bas) aient roulé en France. Cela ne signifiait pas qu’il y avait plus de pneus sur la route. Mais si ces utilisateurs ont à nouveau décidé d’acheter en France, cela aura pu favoriser l’augmentation des volumes qui y sont effectivement facturés

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par François Blanc, photos DR

Ce n’est pas parce que les manufacturiers ont le sourire que tout va pour le mieux dans le monde du pneu. Certes, les chiffres con� rment une embellie amorcée en 2015. Ils réaf� rment que les catégories reines – sport touring et supersport – font toujours recette. Ce qui ne s’améliore pas, c’est la marge dégagée par les détaillants sur ces consommables à haute teneur technologique. Et les marchands en ligne, souvent pointés du doigt à ce sujet, ne seraient pas les seuls à blâmer…

PNEUMATIQUES 2/3-RMÀ LA HAUSSE, MAIS…PNEU MIEUX FAIRE !

LE CLUB DES CINQ S’ACTIVE SUR TOUS LES FRONTSLes cinq manufacturiers qui animent le marché français veillent à maintenir une sorte d’équilibre dans leur façon d’alimenter les canaux d’irrigation du secteur. Tentés de soigner les gros distributeurs, ils s’assurent cependant de ne négliger aucun client professionnel.

MANUFACTURIERS1

Depuis la publication dans L’Officiel du dernier dossier consacré au marché du pneu (cf. n° 3839 de juin 2015), de

nouvelles données chiffrées sont venues remonter le moral des manufacturiers. La hausse des volumes entre 2015 et 2016 (+ 8 %) ne peut être taxée de spectaculaire. Mais elle est, comme on dit, significative. Plus encourageant encore : les cinq premiers mois de 2017 laissent entrevoir une nouvelle progression de + 6 % par rapport à la même période de 2016. Pour mémoire, entre 2014 et 2015, un + 0,11 % avait marqué la fin de la dégringolade des volumes. « On était au fond de la piscine », résume Francis Audefroy, directeur de la division moto du groupe Goodyear Dunlop, qui précise qu’en France au cours de la première année citée, 1 198 349 pneus de 2/3‑RM avaient été écoulés en France, contre 1 199 630 l’année d’après. En 2016, le chiffre est passé à quelque 1 302 540 enveloppes, soit environ 102 34 0 de plus. Ces données officielles, produites par l’organisme Europool (qui enregistre les déclarations de Bridgestone, Continental, Dunlop, Metzeler, Michelin et Pirelli), ne sont contestées par personne ; même si, à la marge, quelques milliers de boudins sont probablement écoulés dans l’Hexagone par des marques exotiques.

Une meilleure conjoncture« Par définition, nul ne sait très bien ce que ces volumes représentent. Mais ce sont des petites marques qui arrivent en faible quantité par rapport aux acteurs majeurs du secteur. Même si elles placent 10 000 ou 20 000 unités par an, ce n’est pas assez significatif pour produire un quelconque effet sur le marché », estime le responsable.Cette hausse quantitative, pour revenir aux statistiques précitées, s’appuierait sur trois piliers principaux et concomitants. « La conjoncture économique s’est améliorée, c’est certain. Ce qui se traduit par une légère reprise de la consommation des ménages, moins enclins à différer telle ou telle dépense. Il est également possible que pendant un temps, des pneus achetés à l’étranger (notamment en Allemagne, voire en Espagne ou aux Pays-Bas) aient roulé en France. Cela ne signifiait pas qu’il y avait plus de pneus sur la route. Mais si ces utilisateurs ont à nouveau décidé d’acheter en France, cela aura pu favoriser l’augmentation des volumes qui y sont effectivement facturés

est le sport touring radial. Vient ensuite le sport route et enfin le cross et l’enduro », confirme‑t‑on chez Michelin. « Au-delà de ces catégories, on voit que le segment trail routier commence vraiment à émerger de la mêlée – cela correspond à une tendance qui prend bien en France », renchérit Denis Turpin, responsable du marché 2/3‑RM chez Continental. Didier Gapany, patron de la division moto chez Bridgestone en France, souligne au passage que la famille des pneus radiaux est la grande gagnante de cette distribution des rôles : « Les deux premières catégories de pneus représentent à elles deux plus de 80 % du marché du radial. Et elles augmentent au moins autant que le marché global lui-même. Les maxi-scooters contribuent également à cette domination. »

Les strates du marchéUne remarque de Francis Audefroy, pour Dunlop, vient affiner ce premier balayage du découpage du marché : « La position dominante du sport touring et de l’hyper sport est entretenue de façon cyclique. En fait, les catégories qui s’en sortent le mieux sont celles sur lesquelles des efforts d’innovation sont régulièrement consentis par les manufacturiers. S’il y a eu des lancements de produit sur le segment sport par exemple, cette famille de pneus va être tirée vers le haut. L’année d’après, si c’est au tour du sport touring, un nouvel essor de cette catégorie pourra être constaté.

(et donc pris en compte dans le calcul des ventes côté français). Enfin, il y a l’effet du recul des immatriculations qui aura pu jouer en faveur du marché du remplacement des pneumatiques sur des véhicules que l’on a cherché à faire durer, en attendant d’en acheter un neuf. »Quelles familles de produits bénéficient de cette embellie quantitative ? « Le marché du pneu moto se scinde en trois catégories principales : le sport-touring, le super sport et l’off-road, rappelle Danilo Bernini, patron de la division moto du groupe Pirelli (les marques Pirelli et Metzeler). En France, c’est la première famille citée qui domine assez largement le marché, à hauteur d’environ 40 % des ventes. Les deux autres y représentent, respectivement, quelque 30 % et 20 % chacune. Les 10 % restant concernent ce que nous appelons le trail-road (les gros trails routiers, en forte hausse actuellement) et le custom. Notez que nous avons développé une gamme de pneus que nous appelons le “trail on-off”. Il s’agit de pneus orientés tout-terrain, mais homologués pour la route – ils sont aussi on‑road qu’off‑road. Depuis 2014, le marché enregistre une croissance de l’ordre de 25 % par an sur cette catégorie. » Un taux notable, mais qui, pour l’heure, concerne un segment qui ne représenterait que 1 % des volumes.De leurs côtés, tant Michelin que Continental édifient le même constat. « L’ensemble des segments de gamme est en augmentation. Le plus important en volume

« Les grossistes proposent font

le tampon entre les manufacturiers

et le détaillant.»Denis Turpin,

responsable du marché 2/3 RM chez Continental

COLLECTE ET RECYCLAGE : ÉVOLUTIONS RÉCENTES ET À VENIRObligatoires, la collecte et le recyclage demeurent l’affaire des pros de la réparation de motocycles, dès lors qu’ils sont des détenteurs de pneumatiques usagés. La gestion des déchets, en France, est encadrée depuis 2003. La réglementation a été « renforcée en 2015 a� n de préparer l’échéance de l’année 2020 qui verra l’agrément des organismes collectifs et l’approbation des systèmes individuels en matière de gestion des déchets. (…) On estime à 460 700 tonnes environ les pneumatiques (soit 45 millions de pneus toutes catégories confondues) mis sur le marché chaque année en France », peut-on lire sur le site du ministère de la Transition écologique et solidaire (https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/pneumatiques-usages). Le renforcement réglementaire précité aura consisté, entre autres, à élargir la fi lière aux pneus de cyclomoteurs. Il a aussi institué la fi xation d’objectifs pour les organismes collectifs et les producteurs en systèmes individuels.Les deux principaux collecteurs de pneus usagés, en France, sont Aliapur et le GIE France Recyclage Pneumatiques (FRP). Pour se clarifi er les idées, voir aussi sur https://www.service-public.fr

« Les détaillants conservent un rôle

prééminent dans la distribution

du pneumatique. »Didier Gapany,

Patron de la divison moto chez Bridgestone

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Il existe comme ça des passages de relais d’un segment à l’autre sous l’impulsion des manufacturiers. » Un enchaînement logique, même si, au départ, il est inutile de se demander pourquoi les cycles en question se révèlent plus courts sur le touring et sur le sport, ces deux catégories, compte tenu de la physionomie du parc roulant, étant parmi les plus consommées par le marché français.Les canaux par lesquels les fabricants de pneus écoulent leurs productions, eux, n’ont guère varié depuis une demi‑douzaine d’années. Au début, il y a eu les concessionnaires et les réparateurs indépendants. Puis sont arrivés les premiers accessoiristes (Cardy, Dafy Moto), prompts à verser dans le service rapide destiné à un motard tenté de se détourner de son fournisseur de véhicule. La deuxième vague de porteurs d’enseigne (matérialisée par la Sadem, pour l’essentiel) aura précédé de quelques années l’émergence d’une troisième strate : celle des marchands en ligne.

15 % des ventes sur InternetToute fin d’un monopole historique, dans le monde de l’industrie, modifie le paysage au détriment – forcément – des premiers acteurs en lice. Chacun se souvient par conséquent du début d’une “guerre des prix” livrée entre professionnels, ceux de la première heure étant amenés à modifier leur modèle commercial sous l’impulsion des petits nouveaux. Avec la vente par canaux numériques interposés, la donne a à nouveau changé. « La vente de pneus sur Internet monte en puissance. Nous estimons leur part de marché actuelle à quelque 15 % », note Danilo Bernini.Mais d’ores et déjà, un distinguo s’impose aux yeux des manufacturiers. « Il est souvent question d’Internet comme d’une chose à combattre, l’ennemi des professionnels, etc. Bien sûr, il s’agit d’un concurrent pour le revendeur et réparateur traditionnel, qu’il soit ou non concessionnaire. Donc, il faut apprendre à se mesurer à ce nouvel acteur ; et ce d’autant que l’explosion du commerce en ligne est un phénomène appelé à perdurer et à changer durablement les réflexes du consommateur. J’insiste d’abord

sur le fait que les réseaux de réparateurs classiques dominent largement le marché du pneumatique de 2/3-RM. Par ailleurs, gardons à l’esprit qu’il ne faut pas considérer tous les marchands du Web de la même manière. Parmi eux, il y a de vrais professionnels, comme le français Allo Pneus, qui achètent leur marchandise, la stockent, la livrent et apportent une solution de montage et de l’information sur le produit, donc un service. Mais il existe aussi des opérateurs qui sont surtout de bons informaticiens, et pas du tout des spécialistes du pneumatique ! Avec leur faibles charges fixes et leur volonté de capter des clients uniquement par le prix affiché, ceux-là vont effectivement dans le sens d’une destruction de la chaîne de valeur. Mais attention, le service, chez eux, c’est égal à zéro », déclare le patron de la division 2/3‑RM du groupe Pirelli. Autrement dit, il serait surprenant que ces « opérateurs » parviennent à prendre racine sur un marché où, surtout dans la moto, l’utilisateur noue un lien particulier avec son véhicule et nourrit par conséquent un certain nombre d’exigences, notamment technico‑sécuritaires. « Ce qui peut et doit vraiment faire la différence entre ces acteurs, au bénéfice des détaillants traditionnels, c’est l’ensemble des services qu’ils déploient ou restent susceptibles de développer à l’avenir », poursuit Danilo Bernini. Didier Gapany, pour Bridgestone, pousse un peu plus loin le décorticage, lorsqu’il

explique que « Les détaillants conservent un rôle prééminent dans la distribution du pneu. En revanche, l’évolution à privilégier pour eux, c’est d’aller vers le “click and brick”, c’est-à-dire la capacité à capter la clientèle via Internet et à transformer la vente de façon concrète en apportant le service qui va avec – le rendez-vous et le montage en atelier. »

Les grossistes à la rescousse ?Contrer Internet par Internet ? Le recours à l’allumage du contre‑feu, chez les pompiers, a déjà fait ses preuves. Mais comme chacun sait, les moyens d’améliorer le ratio du pneumatique en magasin peuvent aussi être d’une autre nature. La disponibilité du produit en fait partie, garante d’une bonne réactivité face à la demande du client. Ce qui soulève la question du stock, une des hantises du réseau, même si nombre de grosses (ou groupements de) concessions consentent encore à immobiliser de la trésorerie sur ce poste‑là. Denis Turpin, pour Continental : « Les vendeurs professionnels hésitent de plus en plus à stocker. Ils se demandent par exemple s’il faut attendre telle ou telle nouveauté avant de commander en quantité ; sans parler de l’espace et des conditions de stockage nécessaires, plutôt contraignants. » C’est là qu’un autre acteur, du point de vue de quelques manufacturiers, peut servir les intérêts des pros : les grossistes. « Ces distributeurs proposent une solution au problème. Ils font le tampon entre les manufacturiers et le détaillant », plaide Denis Turpin, dont

La montée en puissance des grossistes permet aux revendeurs de s’affranchir d’un certain nombre de contraintes.

Le segment des motos typées custom ne représente que 3,5 % du marché du pneu en 2016. Mais il a augmenté de près de 10 % depuis 2015.

Véritable casse-tête pour les détaillants, le stockage reste pour les grossistes l’un des piliers du modèle économique choisi.

Routières ou plutôt sportives, les motos de type roadster, en France, stimulent le marché des pneus supersport et sport touring.

SCOOTERS : PRÈS D’UN PNEU SUR QUATREEn 2016, sur 1 302 540 pneus de 2/3-RM écoulés sur le marché français par les manufacturiers déclarants à Europool (les marques Bridgestone, Continental, Dunlop, Metzeler, Michelin et Pirelli), 304 183 étaient des pneus de scooter, soit 23,35 % du total. Sur ce nombre, 35 003 étaient des pneus radiaux (soit 11,5 %) montés pour la plupart sur des maxi-scooters, mais aussi sur quelques 125 cm3 haut de gamme. Ce chiffre dénote une progression de 18 % de la catégorie scooter radial par rapport à 2015. Les pneus les plus vendus dans le segment du scooter restent cependant les non radiaux (dits à structure diagonale) de gamme moyenne, soit 186 215 unités en 2016 (61,22 % des ventes de pneus de scooters aux professionnels), un chiffre qui

traduit une augmentation de 13 % par rapport à 2015. Ces enveloppes équipent la plupart des 125 cm3, ainsi que quelques machines de plus petite cylindrée performantes. Enfin, toujours en 2016, 82 965 pneus d’entrée de gamme ont été servis aux réseaux de la revente – montés sur une grande majorité de 50 cm3.Compte tenu de leurs prix de vente en magasin, et même si les tarifs peuvent varier du simple au double (voire plus) selon le niveau de technicité du produit, les pneus de scooter – à taux de marge égale – génèrent bien sûr moins de chiffre d’affaires et de bénéfice que les pneus de moto. Pour les pros, leur commerce s’inscrit donc dans une logique de prestation d’entretien global des véhicules, plus encore que dans la moto.

Pour autant, aucun manufacturier n’est enclin à négliger cette catégorie de pneumatiques, pas plus que les revendeurs, évidemment. Car non seulement les volumes réalisés (en augmentation constante, y compris en 2017) pèsent leur poids,

mais encore les besoins exprimés par la clientèle sur ce segment fournissent autant d’occasions pour les fabricants de pneus et les réparateurs-monteurs de fidéliser l’utilisateur, qu’il soit lycéen (et donc automobiliste ou motard en herbe), actif (et généralement automobiliste), ou même retraité.Enfin, la proportion de pneus de scooter radiaux vendus aux réseaux, en augmentation de 11 % au premier semestre de 2017 par rapport à la même période de 2016, montre qu’à terme, leur contribution au bénéfice des entreprises pourrait se rapprocher de celle que génèrent les pneus de moto du segment custom (48 258 pneus en 2016). Une raison supplémentaire de ne pas négliger cette famille de produits.

ÉVOLUTION DU MARCHÉ DU PNEU 2013/2016 1

MARCHÉ DU PNEU 2016 PAR FAMILLE 1

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on se souvient qu’il s’appuie sur Bihr SAS pour conquérir sa part de marché en France. Une nouvelle tendance, l’action renforcée des grossistes dans la diffusion des pneumatiques ? Dans un sens, oui. Car leur montée en puissance, « depuis cinq à six ans », selon le responsable de Continental, s’expliquerait en ce qu’elle donnerait à éviter trois écueils : outre la moindre nécessité de stockage, ils permettraient d’améliorer la gestion d’un point de vente via la réduction du nombre de fournisseurs, ainsi que, pour des établissements géographiquement moins bien placés que d’autres, par la diminution des frais engendrés par la livraison.

Livraison rapide exigéeUn point que confirme Francis Audefroy, tout comme Danilo Berni. « Aller servir un client isolé qui commande un pneu par semaine oblige à procéder à un dégroupage sur les derniers kilomètres ; et ça coûte bien trop cher », rappelle le premier. « Je plaisante parfois avec mes collègues, lorsque je leur demande si nous sommes des fabricants de pneus ou des logisticiens manutentionnaires ! Blague à part, nous sommes capables de livrer deux fois par jour en région parisienne et en 24 heures dans la plupart des régions de France. À l’extrême, nous livrons les points de vente vraiment éloignés des grands axes en 48 h », raconte le second. Mais affinons encore. Les grossistes dont il est question ici sont français. Et leur entrée dans la danse aurait aussi quelque vertu pour les commerçants hexagonaux, comme le démontre Francis Audefroy : « À une époque, l’offensive de grossistes

explique que « Les détaillants conservent un rôle prééminent dans la distribution du pneu. En revanche, l’évolution à privilégier pour eux, c’est d’aller vers le “click and brick”, c’est-à-dire la capacité à capter la clientèle via Internet et à transformer la vente de façon concrète en apportant le service qui va avec – le rendez-vous et le montage en atelier. »

Les grossistes à la rescousse ?Contrer Internet par Internet ? Le recours à l’allumage du contre‑feu, chez les pompiers, a déjà fait ses preuves. Mais comme chacun sait, les moyens d’améliorer le ratio du pneumatique en magasin peuvent aussi être d’une autre nature. La disponibilité du produit en fait partie, garante d’une bonne réactivité face à la demande du client. Ce qui soulève la question du stock, une des hantises du réseau, même si nombre de grosses (ou groupements de) concessions consentent encore à immobiliser de la trésorerie sur ce poste‑là. Denis Turpin, pour Continental : « Les vendeurs professionnels hésitent de plus en plus à stocker. Ils se demandent par exemple s’il faut attendre telle ou telle nouveauté avant de commander en quantité ; sans parler de l’espace et des conditions de stockage nécessaires, plutôt contraignants. » C’est là qu’un autre acteur, du point de vue de quelques manufacturiers, peut servir les intérêts des pros : les grossistes. « Ces distributeurs proposent une solution au problème. Ils font le tampon entre les manufacturiers et le détaillant », plaide Denis Turpin, dont

allemands, qui pratiquaient des prix de conquête très agressifs, aura pu conduire des détaillants à commander leurs consommables en France et leurs pneus chez Parts Europe, ou ailleurs outre-Rhin. Petit à petit, ils auront pu être tentés, pour se faciliter la vie et réduire leurs frais, de tout commander en Allemagne. C’est entre autres ce qui a décidé des Bihr, Sifam ou France Equipement à regarder le pneu autrement, c’est-à-dire comme le moyen d’augmenter le panier moyen de leurs clients, et non plus comme un produit compliqué à travailler. » De ce point de vue, le recours aux grossistes français aurait donc freiné la course aux prix bas et, par conséquent, contribué à instaurer une politique tarifaire « cohérente », pour reprendre un terme cher à tous les acteurs consultés. Cohérente, dans leur propos, signifie potentiellement profitable, et aussi très concurrentielle, pour ne pas dire tendue. Mais comme le professe Danilo Bernini, « dans notre modèle économique, le grossiste joue un rôle important, car il ne serait pas rentable de servir en direct tous les détaillants français – nous livrons directement environ 25 % d’entre eux. Mais l’effort que nous faisons de façon transparente (fourniture d’outils d’aide à la vente, livraisons rapides, participation à la vie des professionnels à travers les Pirelli Days notamment, ou l’organisation de journée de roulage sur piste comme en tout-terrain) avec les uns et les autres vise l’efficacité et cherche à ne pas détruire de la valeur pour l’un ou pour l’autre. » Un exercice d’équilibriste que tous les manufacturiers du plateau français pratiquent tous les jours. >>

Véritable casse-tête pour les détaillants, le stockage reste pour les grossistes l’un des piliers du modèle économique choisi.

« Pour les grossistes français, le pneu permet

d’augmenter le panier moyen de leurs clients,

et n’est plus considéré comme un produit

compliqué à travailler. »Francis Audefroy,

directeur de la division moto du groupe

Goodyear Dunlop

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MARCHÉ DU PNEU 2016 PAR FAMILLE 1

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L’apparente facilité du

remplacement d’un pneu de

moto ne doit pas tromper sur ses exigences, tant techniques que

sécuritaires.

Ils ont beau marteler que les détaillants français qui exploitent des établissements “en dur” génèrent au moins 85 %

des volumes annuels de pneumatiques (face aux sites de vente en ligne), et que le marché continue à reprendre des couleurs en France, les manufacturiers ne convaincront pas tout le monde. Trois concessionnaires multimarques questionnés par L’Officiel livrent d’ailleurs leurs impressions, sans complaisance. Ainsi Paris Nord Motos, par la voix de son responsable du département pneus, relève que depuis le début de l’année, « les ventes ont tendance à baisser ». Pourtant, il se comprendrait que les panneaux Aprilia, Moto Guzzi, Kawasaki, Suzuki, Triumph, MV Agusta, Piaggio et Spyder garantissent un trafic dense, à plus forte raison en région parisienne (dans le 93). Difficile en outre de fonder ce reflux sur un défaut de stockage, dans la mesure où la concession veille à avoir quelque « 300 pneus en fond de roulement » d’un bout de l’année à l’autre. Comment expliquer le phénomène ? Sans se lancer dans une analyse approfondie, le responsable de cette multi‑concession pointe du doigt une « guerre des prix » et estime avant tout qu’il faudrait « que les marchands de pneus sur Internet cessent toute activité pendant quelques mois » pour vérifier que cette concurrence‑là est bien à l’origine du problème.

Les prix “vus sur Internet”À Carpentras (84), Marie‑Paule Morel, gérante de la concession Bleu Blanc Motos (Suzuki, Yamaha, Piaggio et MBK), annonce 417 pneus vendus en 2015, contre 371 en 2016 (– 11 %). Cela ne prouve certes pas que le marché se soit effondré, mais plus probablement que les rouleurs de la région ont modéré leur ardeur au guidon. À moins que ? « Nous ne voyons pas comment dégager plus de marge aujourd’hui sur ces produits-là. Il est fréquent que le client avance un prix “vu sur Internet” pour négocier notre prestation », déplore la gérante. Dans ces conditions, pour éviter que les acheteurs aillent voir ailleurs, « il est devenu normal de renoncer à sa marge. Quand nous parvenons à conserver 7 à 10 points sur un pneu, nous nous estimons heureux ». L’autre façon de limiter la casse, dans son cas, consiste à commander auprès des manufacturiers, mais « dans le cadre d’accords commerciaux passés avec

Suzuki ou Yamaha. Nous obtenons ainsi des prix d’achat un peu plus intéressants. En plus, ces pneus entrent dans notre quota annuel réalisé avec ces marques sur la pièce et l’accessoire ». Le dernier argument parfois utilisé en cours de négociation : le savoir‑faire d’un atelier peuplé de techniciens spécialisés et dont les compétences sont entretenues au fil des ans : « Les ateliers de montage sur lesquels s’appuient les marchands d’Internet ne sont sans doute pas mauvais, mais il est difficile de le savoir, au fond ». Heureusement, la plupart des motards se montrent « sensibles à cet aspect des choses ».Didier Le Brasseur, concessionnaire multimarque basé à La Roche‑sur‑Yon (85), reconnaît pour sa part que la vente de pneumatiques se porte relativement bien.

Cependant, il impute volontiers ce résultat « à la météo qui a été plutôt clémente depuis le début de la saison 2017. Dans la mesure où le gros de notre clientèle pratique la moto sur le mode loisirs, plus il fait beau, plus ils roulent ». Tout simplement. Cela dit, il considère que les beaux jours du pneu de concession sont derrière lui : « C’est devenu un marché très éclaté. La part des concessionnaires sur ce segment a diminué. Certains ont baissé les bras, d’autres, comme nous, se battent encore. » Comment ? « Chaque professionnel doit voir midi à sa porte. Il existe des grands principes, comme le fait de voir les motos rouler plus par beau temps ; mais le contexte concurrentiel de chaque établissement nécessite a priori de suivre une stratégie distincte pour chacun. Par exemple, nous, nous avons Dafy et Moto Expert dans notre secteur. Ils détiennent une certaine puissance de feu en matière de conditions d’achat, y compris de pneumatiques. Comme je tiens à ma liberté et n’adhère à aucune centrale, j’ai pris la décision de privilégier un fournisseur de pneus de manière à obtenir de lui des tarifs compétitifs. Il me fournit entre 80 et 90 % des pneus vendus chez nous. »

Défaut de valorisationBien sûr, pas question de louper une vente lorsqu’un client insiste pour faire monter une enveloppe d’une marque différente de celle poussée par Le Brasseur Motos. « C’est l’écueil : nous sommes moins bien placés en prix sur les autres marques. Mais cela nous incite d’autant plus à nous battre pour notre marque partenaire ». Par « se battre », entendons trois choses : la première concerne le stock (500 pneus entreposés, rien qu’à La Roche‑sur‑Yon). « Non seulement nous nous efforçons de ne pas être trop décalés en prix par rapport à nos concurrents, mais nous faisons le maximum pour servir, et pour servir vite. Le produit doit donc être disponible. Les clients finissent par savoir qu’il l’est presque toujours, chez nous. » La seconde sous‑tend la notion de cadre dont il s’agit de ne pas sortir en termes de remise : « À partir d’une marge minimum que nous voulons sauvegarder, nous fixons une limite à l’effort que nous pouvons être amenés à faire. En général, à ce stade, nous ne sommes pas beaucoup plus chers que les concurrents ; au point que si nous nous y prenons bien, nous faisons affaire. »Enfin, l’effort commercial peut parfois prendre la forme « non pas d’une remise, mais d’un bon d’achat offert sur une dépense ultérieure.

Selon leur pro� l, leur implantation géographique, le nombre de marques de véhicules qu’ils travaillent et leur éventuelle spéci� cité, les détaillants français ne portent pas tous le même regard sur le pneu. Normal. Reste que tous subissent la pénurie de marge sur ce type de produit. Est-ce inéluctable ?

DÉTAILLANTS2

LES REVENDEURS LUTTENT À ARMES INÉGALES

85 % des pneus de 2/3-RM sont toujours montés en concession ou dans un atelier de réparation.

Il est devenu diffi cile pour les concessionnaires

de préserver leurs marges.

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L’Offi ciel 3865 - septembre 2017 33

BENOÎT FIRMIN

« Le terme de “guerre des prix” ne me paraît plus approprié aujourd’hui »

éputé n°1 français de la vente de pneumatiques en ligne, Allo Pneus déclare

3,5 millions d’enveloppes vendues en 2016, tous secteurs confondus. Il estime sa part de marché sur le 2/3-RM à 12 %. Il stocke 600 000 pneus dans son entrepôt d’Oignies (62) et a lancé la construction d’un second hangar à Valence (26) destiné à tripler ses capacités de stockage.

Quelles marques de pneumatiques destinés au 2/3-RM proposez-vous à vos clients ?Nous distribuons l’ensemble des marques dites “premium”, à savoir Michelin, Bridgestone, Continental, Dunlop, Pirelli et Metzeler. Pour renforcer notre catalogue et proposer des gammes plus spécifiques, nous proposons également des marques comme Heidenau ou Avon, qui ont dans leurs gammes des produits différenciés. A contrario, nous avons choisi de ne vendre aucun pneu de marque low-cost, comme il en existe parfois. Car à ce jour, ces offres ne répondent pas à nos standards de qualité et de sécurité pour nos clients. Pour autant, nous répondons aux attentes des budgets les plus modestes avec des “secondes lignes”, qui sont des nouvelles fabrications d’anciens modèles haut de gamme et qui disposent aujourd’hui d’un excellent rapport qualité/prix.

Quelle tendance quantitative avez-vous noté au cours des trois dernières années, s’agissant des volumes réalisés par votre entreprise ?Nos volumes de vente continuent à afficher des progressions significatives, avec une croissance qui sera sans aucun doute encore à deux chiffres cette année. C’est‑à‑dire que nous continuons de gagner des parts de marché, forts d’une offre et d’un service en constante amélioration.

Quelle est votre opinion en ce qui concerne la tenue des prix de vente

TTC sur le marché français aujourd’hui ? Estimez-vous qu’il existe toujours une guerre des prix ?Le terme de “guerre des prix” ne me paraît plus approprié aujourd’hui. Elle a eu lieu lors de l’apparition des offres Internet et on la retrouve quand un nouvel acteur cherche à pénétrer le marché. Nous sommes plutôt dans une phase cruciale où le marché est en train de trouver naturellement sa cohérence entre les différents canaux de distribution. Chez les marchands d’Internet, la concurrence est malgré tout forte et les niveaux de prix restent bas, du fait de notre modèle économique.

Selon vous, sur quel(s) terrain(s) la commercialisation du pneu de 2/3-RM va-t-elle se jouer dans les années à venir ?Les manufacturiers se livrent une guerre acharnée au niveau technologique, ce qui se traduit par une amélioration frappante de la qualité de l’offre, en termes d’adhérence, de longévité, de mise en température, de polyvalence des gommes, etc. C’est leur enjeu principal. En tant que distributeur, nous devons mettre l’accent sur le service apporté au consommateur. L’offre en pneus est très large, souvent difficile à comprendre. À nous de faire en sorte que l’on mette à disposition de nos visiteurs les moyens et outils leur permettant de faire le bon choix pour leur moto et l’utilisation qu’ils entendent en faire. L’avantage que nous avons, c’est de stocker la totalité de l’assortiment des manufacturiers. De cette façon, nous n’avons aucun intérêt à aiguiller le consommateur vers tel ou tel produit, son choix n’est jamais fait sous la contrainte. En parallèle, il y a un gros travail de fond à faire auprès des propriétaires de 2/3‑RM pour leur faire comprendre le rôle que jouent les pneus et l’importance du choix comme de leur entretien. Ce travail passe par la communication auprès du consommateur. C’est l’un de nos chevaux de bataille pour les mois et années à venir.

LA À...PAROLE

Responsable moto et scooter d’Allo Pneus

R

C’est moins coûteux qu’une remise pure ». Didier Le Brasseur identifie par ailleurs d’autres paramètres d’aide à la vente sur lesquels les revendeurs n’ont aucune prise, comme la longueur du cycle de renouvellement des gammes chez les manufacturiers. « Le pneu dernier cri, en général, intéresse le consommateur. La refabrication par une marque d’un modèle de trois, cinq, voire dix ans d’âge, permet souvent de proposer un bon produit à moindre coût. » Mais au fond, tout serait différent « si les fabricants de pneu savaient valoriser leurs produits, y compris chez les accessoiristes. Le problème, c’est qu’ils travaillent avec une vision à court terme et considèrent, de facto, que n’importe qui peut vendre et monter un pneu, alors même qu’il s’agit d’un objet issu d’une technologie poussée, garante de la sécurité de l’utilisateur. S’ils élaboraient un cahier des charges applicable aux monteurs proportionnel à l’exigence qu’ils s’imposent à eux-mêmes dans la mise au point de leurs pneus, la physionomie du marché serait peut-être différente. »

Culture de la sécuritéLe fait est que la pratique qui consiste à se servir d’un produit à forte valeur ajoutée en le bradant pour attirer le chaland vient tout droit du monde de l’automobile. Or chacun sait, chez les pros du 2/3‑RM, que l’enjeu lié à un pneu de voiture diffère notoirement de celui que porte une moto, fût‑elle de puissance moyenne. « La culture de la sécurité tend à s’immiscer et à se renforcer dans de nombreux domaines, songe Didier Le Brasseur. Qui sait, peut-être que le montage d’un pneu par les bonnes personnes et avec les bons outils, un jour, l’emportera sur le seul critère du tarif ».

Cependant, il impute volontiers ce résultat « à la météo qui a été plutôt clémente depuis le début de la saison 2017. Dans la mesure où le gros de notre clientèle pratique la moto sur le mode loisirs, plus il fait beau, plus ils roulent ». Tout simplement. Cela dit, il considère que les beaux jours du pneu de concession sont derrière lui : « C’est devenu un marché très éclaté. La part des concessionnaires sur ce segment a diminué. Certains ont baissé les bras, d’autres, comme nous, se battent encore. » Comment ? « Chaque professionnel doit voir midi à sa porte. Il existe des grands principes, comme le fait de voir les motos rouler plus par beau temps ; mais le contexte concurrentiel de chaque établissement nécessite a priori de suivre une stratégie distincte pour chacun. Par exemple, nous, nous avons Dafy et Moto Expert dans notre secteur. Ils détiennent une certaine puissance de feu en matière de conditions d’achat, y compris de pneumatiques. Comme je tiens à ma liberté et n’adhère à aucune centrale, j’ai pris la décision de privilégier un fournisseur de pneus de manière à obtenir de lui des tarifs compétitifs. Il me fournit entre 80 et 90 % des pneus vendus chez nous. »

Défaut de valorisationBien sûr, pas question de louper une vente lorsqu’un client insiste pour faire monter une enveloppe d’une marque différente de celle poussée par Le Brasseur Motos. « C’est l’écueil : nous sommes moins bien placés en prix sur les autres marques. Mais cela nous incite d’autant plus à nous battre pour notre marque partenaire ». Par « se battre », entendons trois choses : la première concerne le stock (500 pneus entreposés, rien qu’à La Roche‑sur‑Yon). « Non seulement nous nous efforçons de ne pas être trop décalés en prix par rapport à nos concurrents, mais nous faisons le maximum pour servir, et pour servir vite. Le produit doit donc être disponible. Les clients finissent par savoir qu’il l’est presque toujours, chez nous. » La seconde sous‑tend la notion de cadre dont il s’agit de ne pas sortir en termes de remise : « À partir d’une marge minimum que nous voulons sauvegarder, nous fixons une limite à l’effort que nous pouvons être amenés à faire. En général, à ce stade, nous ne sommes pas beaucoup plus chers que les concurrents ; au point que si nous nous y prenons bien, nous faisons affaire. »Enfin, l’effort commercial peut parfois prendre la forme « non pas d’une remise, mais d’un bon d’achat offert sur une dépense ultérieure.

Selon leur pro� l, leur implantation géographique, le nombre de marques de véhicules qu’ils travaillent et leur éventuelle spéci� cité, les détaillants français ne portent pas tous le même regard sur le pneu. Normal. Reste que tous subissent la pénurie de marge sur ce type de produit. Est-ce inéluctable ?

LES REVENDEURS LUTTENT À ARMES INÉGALES

Pneu le plus vendu en France, le “sport touring“ ne représente pas un gros risque en matière de stockage.

85 % des pneus de 2/3-RM sont toujours montés en concession ou dans un atelier de réparation.