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T H E S E
en vue de l’obtention du
DOCTORAT DE L'UNIVERSITE DE TOULOUSE délivré par l’Université Toulouse III – Paul Sabatier
Ecole doctorale : Sciences de la Matière Spécialité: Physique et Nanophysique
présentée et soutenue par
Saioa COBO SANTAMARIA
le 23 novembre 2007
Dépôt en couches minces et nano-structuration de complexes bistables à transition de spin et à transfert de
charge : élaboration et propriétés physiques _______
Directeurs de thèse : Azzedine BOUSSEKSOU
Gabor MOLNAR ______
JURY
M. Gero DECHER, Professeur à l’Université Louis Pasteur, Strasbourg, Président
M. Didier ASTRUC, Professeur à l’Université de Bordeaux I, Rapporteur
M. Talal MALLAH, Professeur à l’Université de Paris XI, Rapporteur
M. José Antonio REAL, Professeur à l’Université de Valence, Espagne, Examinateur
M. Michel ETIENNE, Professeur à l’Université Paul Sabatier, Toulouse, Examinateur
M. Azzedine BOUSSEKSOU, Directeur de recherche au CNRS, Toulouse, Directeur de thèse
Laboratoire de Chimie de Coordination du C.N.R.S. associé à l’Université Paul Sabatier
205 route de Narbonne, 31077 Toulouse Cedex
Je remercie Monsieur Jean-Jacques Bonnet, initialement Directeur du Laboratoire de Chimie
de Coordination, de m’avoir accueilli au sein de celui-ci et de m’avoir permis de mener à bien
mes travaux de recherche.
Je tiens également à remercier Messieurs Bruno Chaudret et Denis Neickbeker, actuels
directeurs du Laboratoire de Chimie de Coordination, de m’avoir permis de poursuivre ce
travail.
Ce travail de thèse a été réalisé dans le groupe « Propriétés Physiques Moléculaires » dirigé
par Azzedine Bousseksou, Directeur de Recherche au CNRS, à qui j’exprime toute ma
gratitude. D’abord pour m’avoir accueilli il a déjà quatre ans, et ensuite pour s’être battu afin
que je puisse réaliser cette thèse. Je veux aussi exprimer ma plus sincère reconnaissance au
Docteur Gabor Molnar, Chargé de Recherche au CNRS, et co-directeur de ma thèse, pour
avoir crû en moi et m’avoir encadrée dans la juste mesure. Je voulais vous dire à les tous deux
: MERCI.
Je tiens à remercier vivement Monsieur Didier Astruc, Professeur à l’Université de Bordeaux
I, et Monsieur Talal Mallah, Professeur à l’Université de Paris XI, de m’avoir fait l’honneur
d’accepter de juger ce travail.
J’exprime ma profonde gratitude à Monsieur Gero Decher, Professeur à l’Université Louis
Pasteur (Strasbourg) et Michel Etienne, Professeur à l’Université Paul Sabatier pour leur
participation au jury de thèse.
Que José Antonio Real, Professeur de l’Université de Valencia, participe à ce jury est un
honneur pour moi. Sa contribution a été fondamentale à l’avancée de ce travail. Je lui adresse
mes remerciements les plus sincères. Gracias José Antonio !
Je voudrais remercier toutes les personnes que j’ai connues lors de mes differents stages : un
grand merci au Professeur John McGarvey à Belfast et à l’ensemble de l’équipe de Valencia
pour l’accueil qui m’a été réservé lors de mes séjours là bas. Mes remerciements vont aussi à
Christophe Vieu, Professeur à l’INSA de Toulouse, pour son aide précieuse.
Au sein du laboratoire, je souhaite remercier les personnes qui ont participé, de près ou de
loin, à ce travail de recherche.
Auprès de Monsieur Lionel Salmon, Chargé de Recherche au CNRS, j’ai pu trouver, en plus
de conseils avisés, une atmosphère chaleureuse et détendue. Un grand merci pour tout
Lionel !
C’est avec le plus grand plaisir que je remercie Lionel Rechignat, ITA, pour avoir su me
supporter pendant ces années et pour toutes les mesures Raman et SQUID réalisées. Je ne
voudrais pas oublier Nicolas Bréfuel à qui je dois une grande partie de cette thèse : pour
m’avoir donné l'envie de l’entreprendre, pour ses précieux conseils et pour toutes les journées
passées à corriger les fautes d’orthographe de ce manuscrit…
J’adresse aussi mes remerciements à tous mes camarades, amis du laboratoire et d’ailleurs
pour leur soutien, leur bonne humeur et leur sympathie : Merci Sébas, Thomas, Amaia,
Laurent, Carlos, Denis, Raquel, Villö, Petra, Nawel, Mouri…
Enfin, même loin de mon cher Pays Basque, j’ai eu le soutien de l’ensemble de mes proches,
en particulier ma mère et mon père, toujours à mes cotés. Gracias Aita y Ama!
Sommaire
Introduction générale p. 1
Partie A - Transition de spin : Clathrates de Hofmann
A.1 Introduction à la Transition de spin p. 5
A.1.1 Le phénomène de la transition de spin p. 6
A.1.2 Déclenchement de la transition de spin p. 9
A.1.2.1 Origine entropique de la transition de spin thermo-induite p. 10
A.1.2.2 Transition de spin photo-induite p. 13
A.1.3 Principales méthodes d’étude de la transition de spin p. 16
A.1.4 Références p. 19
A.2 Introduction aux Clathrates de Hofmann p. 22
A.2.1 Composé {Fe(pz)[Pt(CN)4]}·n H2O p. 27
A.2.1.1 Description de la structure cristalline p. 27
A.2.1.2 Influence du degré de solvatation sur les propriétés magnétiques p. 29
A.2.1.3 Spectroscopie Raman p. 30
A.2.1.4 Etudes des effets de Pression p. 32
A.2.1.5 Photo-commutation réversible par impulsion laser p. 33
A.2.2 Références p. 35
A.3 Dépôt en couches minces des complexes Fe(pz)[M(CN)4] (M=Pt, Pd, Ni) p. 36
A.3.1 Synthèse : dépôt en couches minces du complexe p. 39
A.3.1.1 Le substrat p. 39
A.3.1.2 La couche d’accrochage p. 39
A.3.1.3 Assemblage du complexe p. 40
A.3.2 Etude des propriétés p. 40
A.3.2.1 Techniques d’imagerie p. 40
A.3.2.2 Etude des propriétés physiques : Micro-Spectroscopie Raman p. 44
A.3.3 Conclusions et perspectives p. 47
A.3.4 Références p. 49
A.4 Dépôt en couches minces du complexe Fe(azpy)[M(CN)4] (M=Pt, Pd, Ni) p. 51
A.4.1. Synthèse des complexes Fe(azpy)(M(CN)4)]·H2O p. 51
sous forme de poudre
A.4.2. Synthèse en couches minces de la famille Fe(azpy)(M(CN)4)]·H2O p. 53
A.4.3 Comparaison des propriétés physico-chimiques p. 54
de la poudre et des dépôts
A.4.3.1 Techniques d’imagerie p. 54
A.4.3.2 Propriétés physiques p. 57
A.4.4 Conclusions et perspectives p. 64
A.4.5 Références p. 65
A.5 Structuration de la surface p. 66
A.5.1 Introduction p. 66
A.5.2 Lithographie électronique et lift off p. 67
A.5.3 Caractérisation et étude des propriétés p. 71
A.5.3.1 Techniques d’imagerie p. 71
A.5.3.2 Détection Raman p. 78
A.5.4. Structuration par Sélectivité chimique p. 81
A.5.4.1 µ-contact printing (µCP) p. 82
A.5.4.2 Lift-off p. 84
A.5.4 Conclusion p. 88
A.5.5 Références p. 91
Partie B - Transfert de charge : Bleu de Prusse et analogues
B.1 Introduction p. 94
B.1.1 Composes de formule Ax[B(CN)6]y·zH2O p. 94
B.1.2 Composés de formule DAII[BIII(CN)6] ·xH2O p. 96
B.1.3 Résultats : le Bleu de Prusse et ses analogues p. 96
B.1.3.1 Tautomères de valence p. 96
B.1.3.2 Les aimants moléculaires à haute température critique p. 98
B.1.3.3 De nouveaux analogues p. 99
B.1.4 Références p. 101
B.2 Dépôt en couches minces du bleu de Prusse p. 104
B.2.1. Etat de l’art p. 104
B.2.2. Dépôt en couches minces du complexe du bleu de Prusse: p. 105
B.2.2.1. Le substrat p. 105
B.2.2.2 Assemblage du complexe p. 105
B.2.3. Caractérisation des couches minces du bleu de Prusse p. 106
B.2.3.1. Propriétés physiques des dépôts KxFe[Fe(CN)6] y p. 111
B.2.4. Structuration de la surface du BP p. 117
B.2.4.1 Lithographie optique p. 118
B.2.4.2 Caractérisation microscopique p. 119
B.2.4.3 Lithographie électronique et lift off p. 123
B.2.4.4 µ-contact printing p. 126
B.2.5 Conclusion p. 128
B.2.6 Références p. 129
B.3 Dépôt en couches minces des analogues du bleu de Prusse :
AxCo[Fe(CN)6]y·zH2O
B.3.1. Etat de l’art. p. 131
B.3.2. Dépôt en couches minces du complexe NaxCo[Fe(CN)6]y·zH2O p. 133
B.3.2.1. Couche d’accrochage p. 133
B.3.2.2. Dépôt en couches minces p. 135
B.3.3. Caractérisation des couches minces du NaxCo[Fe(CN)6]y·zH2O p. 136
B.3.2.1. Etudes en fonction de la concentration de sodium p. 140
B.3.2.2. Etude Raman en fonction de la température p. 142
B.3.2.3. Etude des propriétés magnétiques des dépôts p.144
de AxCo[Fe(CN)6]y·zH2O
B.3.2.4. Etude du photomagnétisme p. 146
B.3.4 Conclusion perspectives p. 149
B.3.5 Références p. 151
B.4 Synthèse en forme de poudre : RbMn[Fe(CN)6] p. 152
B.4.1 Introduction p. 152
B.4.2Synthèse p. 154
B.4.3 Stœchiométrie p. 154
B.4.4 Mesures magnétiques p. 156
B.4.5 Changement d’entropie lors de la transition de phase p. 160
B.4.6 Conclusions et perspectives p. 164
B.4.7 Références p. 165
Conclusion générale p. 166
Annexes p.170
Abréviations
Phen : 1,10- Phénantroline
Ptz : 1-n-Propyl-tétrazole
pm-bia : N-2’-pyridilméthylèn-4-aminobiphényl
pz : pyrazine
py : pyridine
azpy : 4,4’-azopyridine
TBA : Tétrabutylammonium
PMMA : poly(méthyl méthacrilate)
IPA : IsoPropylic Alcool
BP: bleu de Prusse
PDMS : poly(diméthylsiloxane)
OTS : trichloro(octadécyl)silane
ODT octadécanethiol
APTES : 3-amino-propyl triéthoxy silane
HDMS : hexaméthyldisiloxane
PAH : poly(allylamine hydrochloride)
PSS : poly(styrène sulfonate)
AFM : Microscopie à Force Atomique
ATG : Analyse Thermogravimétrique
BT : Basse Température
BS : Bas Spin
µCP : µ-Contact Printing
DSC : Differential Scanning Calorimetry
EBL : Electron-Beam Lithography
EDX: Energy Dispersive X-ray analysis
FC : Field-Cooled magnetization
HS : Haut Spin
HT : Haute Température
LbL : Layer by Layer
LD-LISC : Ligand-Driven Light Induced Spin Change
LIESST : Light Induced Excited Spin State Trapping
LITH : Light Induced Thermal Hysteresis
MEB : Microscopie Electronique à Balayage
MLCT : Metal to Ligand Charge Transfer
MSA : Multiple Sequential Adsorption
PIPT : Photo-Induced-Phase Transition
RPE : Résonnance Paramagnétique Electronique
SA: Self-Assembled
SAM : Self-Assembled Monolayers
SERS: Surface enhanced Raman scattering
TS : Transition de Spin
XANES : X-ray Absorption Near Edge Structure
XES : X-ray Emission Spectroscopy
ZFC: Zero Field Cooled magnetization
1
Introduction générale
De nos jours, l’idée qu’une molécule ou un ensemble de molécules (matériau moléculaire)
puissent servir comme un élément actif dans un dispositif électronique stimule de plus en plus
l’activité scientifique des laboratoires à l’échelle de la planète. Une des stratégies des plus
prometteuses est basée sur le concept de bistabilité moléculaire, qui se traduit par le
basculement entre deux états électroniques, de la même manière qu’un interrupteur binaire : il
est ainsi possible de passer de façon réversible et détectable d'un état (OFF = 0) à un autre
(ON = 1) sous l'effet d'une perturbation extérieure contrôlée.
Dans ce contexte, le phénomène de la transition de spin constitue un exemple typique de cette
propriété. Il est possible dans ce cas de commuter le système entre ses états de spin haut et
bas. Un autre exemple est celui des tautomères de valence dans lesquels la commutation est
liée à un transfert d’électron. La présence d’hystérésis du phénomène pour certains de ces
composés en fait des matériaux de choix pour les dispositifs de stockage de l’information à
très petite échelle.
En effet, dans le domaine informatique, les demandes technologiques en termes de capacité de
stockage de l’information augmentent de manière exponentielle et sont à l’origine du
développement des nanosciences : l’objectif est de stocker toujours plus dans un volume le
plus petit possible et le plus rapidement possible. De plus, la miniaturisation d’autres
composants tels que les capteurs, les dispositifs de l’optique est aussi un domaine en plein
expansion.
L’élaboration d’objets de taille nanométrique est, outre leur intérêt intrinsèque pour des
applications données, un enjeu majeur du point de vue du fondamental : l’objectif est de
maîtriser des systèmes modèles pour progresser dans la compréhension d’effets spécifiques
aux objets de petite taille. Par exemple, dans le cas des complexes à transition de spin, une des
questions des plus importantes est de savoir comment la réduction de taille influencera la
largeur de l’hystérésis observée à l’échelle macroscopique ainsi que l’établissement même du
phénomène via les processus coopératifs.
2
Le travail de thèse que je présente dans ce manuscrit s’inscrit, pour la première fois, dans le
cadre d’une combinaison de ces deux thématiques : la bistabilité moléculaire et les
nanosciences, tant au niveau de la synthèse des objets qu’au niveau de leur analyse par les
différents méthodes existantes. Un premier objectif de cette thèse est la synthèse de couches
minces avec maintien de la bistabilité autour de la température ambiante et, si possible, avec
hystérésis. Un deuxième objectif principal est la nanostructuration de ces couches minces
avec maintien de la propriété. Le mariage de ces deux objectifs donne lieu à la stratégie de
recherche ‘‘de la molécule au device’’, en passant par toutes les études fondamentales
physico-chimiques que nécessite le passage du macroscopique au nanoscopique.
En effet, le dépôt en forme de couches minces des complexes à transition de spin est une
étape incontournable dans la conception de tout dispositif, mais aussi dans la fabrication des
nano-objets par les méthodes lithographiques. Cependant, les méthodes de dépôt proposées
jusqu’à présent sont peu adaptées aux procédés de la microélectronique. L’obstacle majeur
rencontré lors du dépôt de ces matériaux est la perte de la propriété de transition de spin ou la
non-régularité de la surface obtenue ou encore la dilution du produit actif dans une matrice
inactive.
La première partie de ce manuscrit concernera les complexes à transition de spin et sera
divisée en cinq sous-chapitres. Le premier sous-chapitre sera consacré à la présentation
générale des propriétés de la transition de spin des composés du Fe(II), en rappelant
brièvement le phénomène. Dans le deuxième sous-chapitre, nous présenterons une
introduction aux matériaux de type « clathrates d’Hofmann » et leurs propriétés. Les troisième
et quatrième sous-chapitres aborderont le dépôt en couches minces par la méthode
d’assemblage séquentielle des « clathrates d’Hofmann » Fe(pyrazine)[M(CN)4] et Fe(4,4’-
azopyridine)[M(CN)4] à transition de spin (M : Ni(II), Pt(II), Pd(II)). Enfin, le cinquième
sous-chapitre abordera la nano-structuration de ces couches minces à transition de spin par les
techniques lithographiques.
La deuxième partie du mémoire sera dédiée aux complexes à transfert de charge et est
décomposée en quatre sous-chapitres. Le premier sous-chapitre donnera un aperçu des
systèmes à transfert de charge de la famille du bleu de Prusse. Dans le deuxième sous-
chapitre sera détaillée la synthèse des couches minces du bleu de Prusse par la méthode
d’«assemblage électrostatique séquentielle» ainsi que sa nanostructuration et sa
3
caractérisation. Ces méthodes élaborées seront utilisées dans le troisième sous-chapitre pour
la fabrication des dépôts des analogues Co-Fe du bleu de Prusse, susceptibles de posséder un
transfert charge. Enfin, dans le quatrième sous-chapitre, nous présenterons l’étude de
l’analogue Rb-Mn-Fe du bleu de Prusse possédant un transfert de charge. Cette dernière étude
a été achevée sur les échantillons massifs. Leur mise en forme de couches minces est encore
en cours.
Enfin, nous conclurons ce manuscrit en rappelant les principales avancées que nous avons
apportées aux différentes questions abordées puis nous proposerons quelques perspectives de
recherche.
5
A.1 Introduction à la transition de spin
Au début du XXème siècle, la synthèse par Delépine[1] d’un nombre important de complexes
du Fe(III), donna lieu à plusieurs publications de Cambi et al., entre 1931 et 1937.[2-4] Ces
travaux incluaient l’étude des propriétés magnétiques de ces complexes à base de ligands
dérivés de dithiocarbamates (Figure A.1.1). Vingt ans plus tard, après la consolidation de la
théorie du champ de ligands et de la chimie de coordination, Martin et White font des apports
décisifs sur l’étude détaillée des propriétés magnétiques des complexes tris(dithiocarbamate)
du Fe(III).[5] Ces complexes présentent en fonction de la température des variations du
moment magnétique. Les états haut-spin (HS) et bas-spin (BS) peuvent coexister en
équilibre thermodynamique. Ceci établit les bases conceptuelles de l’équilibre de la transition
spin (TS).
Figure A.1.1. Anion dithiocarbamate
Depuis, de tels équilibres ont été observés pour un grand nombre de complexes du Fe(II) et Fe
(III),[6-8] du Co(II) [9-11] et Co(III),[12-14] du Cr(II), [15, 16] du Mn(II) [17, 18] et Mn(III) [19, 20] qui
ont été étudies tant à l’état solide qu’en solution.
Les complexes à TS font l’objet d’un important regain d’intérêt ces vingt dernières années,[21]
du fait que : (i) d’une part, les perturbations utilisées pour modifier l’équilibre se diversifient
notamment avec la découverte des effets photo-induits dans ces systèmes ; (ii) d’autre part,
parmi les systèmes synthétisés présentant des transitions thermo-induites, certains sont le
siège d’une hystérésis ouvrant la voie à des applications potentielles, en particulier dans le
domaine du stockage de l’information ou de l’affichage numérique.[21-23a]
Dans ce chapitre, nous présenterons les concepts les plus importants du phénomène de la TS.
N
S
SR
R
6
A.1.1. Le phénomène de la transition de spin
Certains métaux de la première série de transition, de configuration électronique 3dn (4< n <
7) peuvent exister dans deux états électroniques stables, selon la force du champ cristallin :
l’état HS et l’état BS.
Pour ces systèmes, l’effet d’un champ de ligand octaédrique provoque l’éclatement des
niveaux d’énergie des orbitales d (dégénérés dans le cas de l’ion libre) en deux niveaux
d’énergie : un premier niveau comportant trois orbitales t2g non liantes et triplement dégénéré
(dxy, dyz, dzx) et un second composé de deux orbitales eg antiliantes et doublement dégénéré
(dz2, dx2-y2). Ces deux niveaux sont séparés par un éclatement de 10 Dq, caractérisant la force
du champ de ligand. Cet éclatement dépend de la nature de l’ion et des ligands qui
l’entourent.
Figure A.1.2: Levée de dégénérescence et configuration électronique des états HS et BS dans
le cas d’un complexe octaédrique du FeII.
Pour des systèmes comptant plus d’un électron d, la répulsion électron-électron (énergie
d’appariement Π) doit être aussi considéré en même temps que la force du champ de ligands.
eg
eg
t2g
t2g
10DqHS
Π>10DqS=25T2g
Π10DqS=25T2g
Π
7
Dans le cas du Fe(II) de configuration électronique d6, deux cas limites sont envisageables en
fonction de la force du champ de ligands (Figure A.1.2), conduisant aux états fondamentaux 1A1 et 5T2g comme le montre le diagramme de Tanabe-Sugano (Figure A.1.3).
- Quand Π > 10 Dq (champ cristallin faible) : les électrons d se répartissent sur les deux
niveaux t2g et eg en respectant la règle de Hund du maximum de spins parallèles. Le spin total
est S = 2 et la configuration électronique énergétiquement la plus favorable est celle de l’état
HS paramagnétique 5T2g (t42ge2g).
- Dans le cas où Π < 10 Dq (champ cristallin fort) : les électrons s’apparient dans les orbitales
t2g de plus basse énergie, en violant la règle de Hund et en suivant cette fois la règle de Pauli.
Le spin total est S = 0 et le complexe est dans l’état BS diamagnétique 1A1g(t62g).
Le diagramme de Tanabe-Sugano de la figure A.1.3 montre l’ensemble de termes
spectroscopiques correspondant aux niveaux fondamentaux et excités d’un ion d6 en
environnement octaédrique en fonction de la force du champ du ligand 10Dq. Pour des
complexes avec un champ ligand proche de la valeur critique (∆crit), une TS provoque le
changement du paramètre 10Dq.
Figure A.1.3 : Diagramme de Tanabe-Sugano pour un ion de configuration d6 en symétrie
octaédrique.
De plus, les liaisons de coordination métal-ligand des complexes FeII HS sont
substantiellement plus faibles et leur longueur plus grande que pour les complexes BS (1.9-
2.0 Ǻ dans l’état BS et 2.1-2.2 Ǻ dans l’état HS, soit un changement d’environ 10%).
∆crit
8
Figure A.1.4 : Variation de l’énergie potentielle des niveaux HS et BS pour des complexes à
TS du FeII en fonction de la distance métal-ligand.
Comment évolue la force du champ de ligand lorsqu’un complexe passe de l’état HS à l’état
BS ?
Le rapport des forces de champ de ligand entre les deux états de spin est donné par l’équation:
où rHS et rBS sont respectivement les distances métal-ligand moyennes dans les états HS et BS
et n = 5-6. En considérant les valeurs moyens rBS = 2.0 Ǻ et rHS = 2.2 Ǻ et n = 6, ce rapport est
estimé à ~1.77.
En se basant sur le diagramme de la figure A.1.3 et A.1.4, du fait que 10Dq dépende de la
longueur de liaison métal-ligand et comme Π varie peu, la différence d’énergie ∆E°= E°HS-
E°LS peut être estimée en fonction de 10DqHS
ou 10DqBS :
- Pour 10DqHS
< 10000 cm-1, ∆E° < 0 et l’état fondamental est HS qui est donc
thermodynamiquement stable à toute température.
- Pour 10DqBS > 23000 cm-1, ∆E° > 2000 cm-1
et l’état fondamental est BS qui reste stable
pour des très hautes températures.
( )BS
HSn
HS
BS
rr
DqDq =
1010
9
Pour l’intervalle 10DqHS = 11000-12500 cm-1
et 10DqBS
= 19000-22000 cm-1, ∆E° = 0-2000
cm-1 et correspond à l’intervalle de champ de ligand pour lequel le phénomène de TS thermo-
induite peut avoir lieu (Figure A.1.5).
Figure A.1.5 : Régions de stabilité des états HS et BS en fonction de la force du champ de
ligand.[23]
A.1.2. Déclenchement de la transition de spin
Il est possible de contrôler la configuration HS ou BS d’un système à TS au moyen de
perturbations extérieures telles qu’une variation de température (T), d’une pression
hydrostatique (P), d’un champ magnétique intense (H), ou d’une irradiation lumineuse (hν).
Dans le cas de la pression, l’état BS est favorisé. Ceci conduit à déplacer l’équilibre du
système biphasique à TS à plus haute température. Cet effet peut s’expliquer en tenant compte
de la réduction de volume qui accompagne le changement de l’état HS vers l’état BS : la
pression favorise l’état de plus petit volume.
L’application d’un champ magnétique (H) provoque un glissement de son cycle d’hystérésis
thermique vers les basses températures. Ce déplacement thermique négatif est rigoureusement
opposé à l’effet d’une pression et peut s’expliquer par l’effet Zeeman : le champ magnétique
stabilisant l’état de plus haut spin ici l’état HS.
Dans ce chapitre, les effets d’une variation de température (TS thermo-induite) et d’une
irradiation lumineuse (TS photo-induite) seront décrits plus en détail plus loin.
10
A.1.2.1. Origine entropique de la transition de spin thermo-induite
Parmi les moyens d’induire une transition de spin, la variation de température est
historiquement le premier et sans conteste le plus utilisé, servant même le plus souvent de
référence et de comparaison par rapport aux autres stimuli. Du point de vue
thermodynamique, l’énergie libre de Gibbs G est composée d’un terme entropique TS et d’un
terme enthalpique H. A pression constante, la variation d’énergie libre ∆G vérifie à chaque
instant la relation :
∆G = ∆H − T∆S
avec dans le cas d’une TS : ∆G = GHS −GBS, ∆H = HHS −HBS et ∆S = SHS − SBS.
Les deux quantités ∆H et ∆S sont positives. A basse température, le terme enthalpique
domine, ∆G est positive et l’état fondamental est BS. A haute température au contraire, le
terme entropique devient dominant, ∆G est négative et l’état fondamental est HS. Enfin, à la
température d’équilibre T1/2 pour laquelle la moitié des molécules se trouvent dans l’état HS et
l’autre dans l’état BS, ∆G = 0 et T1/2=∆H/∆S.
La variation de l’entropie peut être estimée en prenant en compte les contributions
électroniques, vibrationnelles, configurationnelles, rotationnelles et translationnelles. Ces
deux dernières pouvant être exclues si on considère le complexe à l’état solide. De plus, en
absence de désordre d’orientation, le terme configurationnel est aussi exclu. L’entropie est
composée alors en deux contributions, une électronique (∆Sél) et une vibrationnelle (∆Svib) :
∆S =∆Sélec + ∆Svib + ∆Sconf + ∆Srot + ∆Strans
∆Sélec est elle-même la somme de contributions dues à des changements d’état de spin
(∆Sélecspin) et de moment orbital (∆Sélecorb). Cependant, la dégénérescence orbitale n’est à
prendre en compte qu’en cas de symétrie octaédrique parfaite, ce qui n’est jamais le cas pour
les systèmes moléculaires complexes. En conséquence, dans la plupart des cas :
⎥⎦
⎤⎢⎣
⎡++
=∆=∆LS
HSélecélec S
SRSS spin )12()12(ln
11
où (2S+1)HS et (2S+1)BS sont respectivement les multiplicités de spin de l’état HS et BS. De
ce fait, pour un ion Fe(II) où la conversion de spin a lieu entre les états 1A1 et 5T2, ∆Sélspin = R
ln 5/1 = 13,38 J K-1 mol-1.
Expérimentalement les valeurs de ∆S pour des TS complètes de complexes du Fe(II) se
situent entre 30 et 80 kJ mol−1 [29]. Ces valeurs expérimentales sont très supérieures aux 13,38
J K-1 mol-1 correspondants à la variation de l’entropie d’origine électronique. La contribution
restante vient alors des variations des fréquences de vibration moléculaires. Ainsi, la
différence de la valeur totale de l’entropie obtenue expérimentalement et l’entropie d’origine
électronique déterminent la contribution vibrationnelle dont Sorai et Seki ont montré les
premiers le rôle prépondérant.[30] Étant donné que ∆Sélec et ∆Svib sont toujours positives, ∆Stotal
peut être considérée comme la force motrice de la TS, le terme T∆Stotal modulant la différence
d’énergie entre GHS et GBS.
Les paramètres thermodynamiques ∆H et ∆S associés à la TS sont obtenus directement à
partir des mesures calorimétriques pour lesquelles une anomalie de Cp est observée autour de
T1/2 :
Figure A.1.6: capacité calorifique (à p constante) pour le complexe [Fe(Phen)2(NCSe)2].30
Depuis la découverte du premier complexe à TS, la compréhension du phénomène et des
propriétés associées à celui-ci ont considérablement progressé, tant du point de vue physique
que de la synthèse chimique.
En phase liquide, le phénomène de changement (transition) de spin s’effectue toujours selon
une statistique de Boltzmann : la TS est par conséquent très graduelle.
A l’état solide, les effets de réseau cristallin, résultant des interactions entre molécules,
conduisent à une grande variété de comportements : la TS peut être graduelle (complète
12
(A.1.7a) ou incomplète (A.1.7e)), correspondant à des systèmes présentant de très faibles
interactions ou à des systèmes fortement dilués. Chaque centre métallique subit alors le
phénomène de TS indépendamment de son voisin. A l’inverse, une TS abrupte (A.1.7b) est
caractéristique d’un système beaucoup plus coopératif possédant des interactions fortes.
Chaque centre métallique est fortement associé aux autres et subit l’influence de la
modification d’état de spin de ses voisins. Il est important de noter que ces interactions entre
les molécules ont une origine élastique et sont donc directement liées au changement de
volume des molécules lors de la TS.[27]
Figure A.1.7 : Les différents types de transition de spin possibles :
(a) graduelle ; (b) abrupte ; (c) avec hystérésis ; (d) en deux étapes ; (e) incomplète.
La TS peut être aussi accompagnée d'une boucle d’hystérésis (A.1.7c), celle-ci conférant au
système un effet mémoire sur un intervalle de températures qui pourrait être mis à profit dans
l’élaboration de dispositifs de stockage d’information, d’affichage et de commutation
moléculaire. Les transitions avec hystérésis (figure A.1.7c) sont définies par deux
températures, une en mode de refroidissement (T↓1/2) et l’autre en mode de chauffage (T↑1/2).
La TS peut aussi s’effectuer en deux étapes (A.1.7d) en présence de deux sites
cristallographiques distincts dans le cristal mais également dans les systèmes mono ou
binucléaires où l’environnement des atomes métalliques est identique. Dans ces systèmes, des
13
interactions de courte portée rentrent en compétition avec des interactions de longue portée et
vont stabiliser les paires HS-BS conduisant à une transition de spin en deux étapes. Dans le
langage des modèles phénoménologiques, cette stabilisation peut être vue comme la
manifestation d’une interaction type « antiferro ». On peut citer comme exemple le complexe
binucleaire {Fe(bt)(NCS)2]2bpym} dans lequel l’augmentation du volume d’un des deux
centres métalliques lors de la TS donne lieu à une augmentation de la barrière d’énergie entre
l’état HS et BS pour le deuxième centre métallique. Cet effet dû à une pression intra-
moléculaire générée par le premier centre métallique conduit à un décalage de la température
de transition du deuxième centre vers de plus hautes températures.
A.1.2.2. Transition de spin photo-induite
Il existe deux principaux moyens d'induire la TS par la lumière (UV, visible ou proche IR) :
soit directement sur l’ion à basse température (effet LIESST), soit sur le ligand (LD-LISC).
Plus récemment, un autre phénomène appelé transition de phase photo-induite (PIPT- de
l’anglais photo-induced-phase transition) a été également décrit : il s’agit alors d’irradier le
complexe dans la boucle d’hystérésis thermique.
a) L’effet LIESST : McGarvey et al. [31] furent le premier en 1982 à montrer qu'une irradiation laser pulsée dans la bande de transfert de charge métal-ligand (MLCT en anglais) de certains
complexes du Fe(II) à TS induisait la population transitoire d'un état HS.
L’effet LIESST (abréviation de l'expression anglaise: "Light Induced Excited Spin State
Trapping") a été découvert dans l’état solide il y a une vingtaine d’années par Descurtins et
al.[32] Il correspond au piégeage quantitatif de composés dans un état HS métastable par
pompage optique à température cryogénique (typiquement au dessous de 50 K), c'est-à-dire
quand la relaxation HS BS, rapide à haute température, ralentit. Par exemple, une excitation
lumineuse à 530 nm transforme l’état BS d’un composé, [Fe(ptz)6](BF4)2, en un état HS
métastable dont la durée de vie à 20 K est supérieure à 106 s. Le mécanisme présumé de ce
piégeage photo-induit est schématisé dans la figure 2.1.8 :
14
E
r
HS
LS
1A1
5T2
1T1
5E
3T1
530 nm
820 nm
980
nm
E
r
HS
LS
1A1
5T2
1T1
5E
3T1
530 nm
820 nm
980
nm
E
r
HS
LS
1A1
5T2
1T1
5E
3T1
530 nm
820 nm
980
nm
E
r
HS
LS
1A1
5T2
1T1
5E
3T1
530 nm
820 nm
980
nm
Figure A.1.8: Diagramme de Jablonski représentant les effets LIESST direct et inverse: cas
du complexe [Fe(ptz)6](BF4)2.[33] Les flèches ondulées représentant des relaxations non-
radiatives (intersystem crossing)
Ce processus implique initialement une transition depuis l’état fondamental 1A1 vers l’état
excité 1T1 qui possède une durée de vie courte (
15
Figure A.1.9 : Irradiation permanente à 647 nm du composé [Fe(PM-BiA)2(NCS)2].
Evolution en température (◊) avant irradiation et (■) pendant irradiation.
b) L’effet LD-LISC (Ligand Driven - Light Induced Spin Crossover) a été introduit par
Zarembowitch et al.[38] il y a une quinzaine d’années avec l’ambition de mener à la synthèse
de matériaux photo-commutables à des températures plus élevées que celles permises par
l’effet LIESST. L’irradiation d’un composé à la longueur d’onde correspondant à la réaction
d’isomérisation chimique du ligand permet de modifier le champ du ligand et donc le
comportement magnétique du complexe.[39] Ces études utilisent la photo-isomérisation cis-
trans de l’entité C=C incorporée à un ligand coordonné à un centre FeII.[40]
Par exemple, le composé [Fe(trans-stpy)4(NCS)2] présente une TS graduelle centrée autour de
180 K alors que le composé [Fe(cis-stpy)4(NCS)2] reste HS sur toute la gamme de
température (10-300 K). Cette différence de propriété magnétique est attribuée à un champ de
ligand plus fort dans le cas du ligand trans que du ligand cis. (Figure A.1.10)
16
Figure A.1.10: a) Structure cristallographique du
complexe [Fe(trans-stpy)4(NCS)2] (Ct) et [Fe(cis-
stpy)4(NCS)2] (Cc), b) χMT vs. T pour les isomères Ct
(trans) et Cc (cis).
c) PIPT dans la boucle d’hystérésis : La première transition BS HS photo-induite à haute
température n’a pu être observée que très récemment dans le cas du complexe [Fe(pm-
bia)2(NCS)2] à la température de 170 K, c'est-à-dire à l’intérieur de la boucle d’hystérésis
thermique à l’aide d’un laser pulsé (8 ns).[17] Le changement inverse HS BS, n’a par contre
pas pu être observé. Dans notre équipe, dans le cadre de la thèse de S. Bonhommeau[11] par
application d’un laser pulsé de 8 ns a été mise en évidence par spectroscopie Raman une TS
photo-induite et bidirectionnelle (BS HS et HS BS) à température ambiante à l’intérieur de
la boucle d’hystérésis du complexe [Fe(pz)Pt(CN)6]. Cette observation ouvre des perspectives
d’applications intéressantes et sera décrite plus en détail dans le chapitre A.2.
A.1.3. Principales méthodes d’étude de la transition de spin
La TS, qu’elle soit activée thermiquement, par application d’une pression, d’un champ
magnétique ou par la lumière, peut être suivie par des techniques très variées, rendant compte
de la structure électronique du centre métallique. Parmi ces techniques, nous citerons :
Ct
Cc
17
- La mesure de la susceptibilité magnétique en fonction de la température, χ(T), est sans
doute la principale technique de caractérisation des complexes à TS.[26, 27] Le produit χT pour
un matériau à TS est déterminé par la dépendance en température des contributions χHS et χBS,
selon l’équation : χ(T)=γHSχHS+(1-γHS)χBS. Connaissant les susceptibilités de l’état HS et BS
purs, la fraction molaire de l’état HS (resp. BS), γHS, (resp. γBS) peut être facilement
déterminée et représentée en fonction de T pour obtenir la courbe de la TS ; cependant, le plus
souvent on représente χT vs. T (quand χHS et χBS ne sont pas connus, ou déterminés de façon
imprécise). Notons par ailleurs, que pour un paramagnétique χT est une constante à toute
température (loi de Curie). Cette représentation permet donc pour un composé à TS de mieux
localiser la température de transition correspondant à un saut entre deux constantes lorsque la
transition est abrupte.
- La spectrométrie Mössbauer [41] est la méthode spectroscopique de choix pour l'étude de la
TS dans le cas du fer. Elle permet de suivre la proportion atomique d'un état de spin donné et
elle est ainsi souvent utilisée pour calibrer les courbes γHS (T) obtenues à partir des mesures
magnétiques où γHS est la proportion de l’état HS dans le matériau. Elle fournit aussi de
précieuses informations structurales locales du matériau.
- Les mesures cristallographiques (diffraction des rayons X sur monocristaux
principalement) permettent de suivre l’évolution structurale des composés dans la gamme de
température de la TS. De manière générale, on observe une augmentation des distances métal-
ligand ainsi que des déformations d’angles lors d’une conversion BS HS.43
- Les paramètres thermodynamiques comme les changements d’enthalpie et d’entropie
peuvent être estimés par mesures calorimétriques. Ces méthodes permettent de remonter à la
température de transition et à l’ordre de la transition.44
- Les mesures de réflectivité ou d’absorption optique sont basées sur les changements de
propriétés optiques du matériau lors de la TS.45 En effet, pour de nombreux systèmes, les
bandes d’absorption sont dues aux transitions entre les états électroniques des centres
métalliques. A cause des règles de sélection de spin, différentes bandes apparaissent dans les
états HS et BS : ainsi, par exemple, l’état HS du Fe(II) est généralement peu coloré, au
contraire dans l’état BS de l’ion métallique, la couleur du matériau est plus foncée.
Cependant, ces changements peuvent être occultés (à l’œil) par l’absorption des ligands
même. Notons ainsi que les transitions MLCT dépendent aussi de l’état de spin du système.
18
- Le passage de deux électrons d’orbitales liantes à des orbitales anti-liantes lors d'une
transition BS HS conduit à un changement de polarisabilité moléculaire qu’il est possible de
suivre par des mesures de la constante diélectrique du matériau.46
- Les mesures spectroscopiques vibrationnelles comme l’absorption infra rouge23c ou la
diffusion Raman sont aussi très utilisées car la force des liaisons de coordination change
spectaculairement d’un état de spin à l’autre.
- D’autres techniques de mesure : RPE, XANES, XES… sont aussi utilisées.
19
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21
[45] W. Morscheidt, J. Jeftic, E. Codjovi, J. Linares, A. Bousseksou, H.Constant-Machado, F.
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[46] A. Bousseksou, G. Molnar, P. Demont, J. Menegotto, J. Mat. Chem. 2003, 13, 2069
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Chem, 2004, 235, 1.
22
A.2 Introduction aux Clathrates d’Hofmann
Tout récemment, de remarquables progrès ont été accomplis dans le domaine des complexes à
TS : des polymères de coordination constitués de réseaux infinis mono- (1D), bi- (2D), ou
tridimensionnels (3D), mettant en jeu des liaisons covalentes fortes entre centres métalliques,
ont permis d’augmenter la coopérativité de ces matériaux, en particulier la largeur de la
boucle d’hystérésis. Ainsi, de nouveaux systèmes polymères fortement coopératifs récemment
rapportés dans la littérature présentent une bistabilité (température, pression ou irradiation
lumineuse), parfois à température ambiante.[9]
L’histoire des complexes de métaux de transition avec des ligands cyanures débute par la
découverte accidentelle par Diesbach du complexe connu comme « Bleu de Prusse ». Ce
complexe a été très utilisé aux XVIII et XIX siècles comme pigment dans l’industrie des
peintures. Depuis, il fait l’objet de très nombreuses études. Cependant, sa composition
chimique exacte, Fe4III[FeII(CN)6]3·15H2O et sa structure cristallographique détaillée n’ont été
élucidées que depuis 40 ans par Buser et al.[1], à cause de difficultés de synthèse des cristaux.
Les clathrates d’Hofmann font partie de cette grande famille de complexes. Les premiers ont
êtes synthétisés par Hofmann et Höchtlen en 1903 [2a, 2b] et présentent la formule générale du
type [Ni(NH3)2Ni(CN)4·2G] où G ( = benzène, pyrrol, thiofène, ou furane) est une molécule
‘‘invitée’’ (de l’anglais Guest). Leur structure, résolue par Powell et Rayner dans les années
50 [3a, 3b, 3c] est formée de 2 types d’ions nickel (II) : (i) l’anion diamagnétique plan-carré
[Ni(CN)4]2- ; (ii) l’autre ion paramagnétique coordonné octaédriquement à quatre atomes
d’azote des groupes CN appartenant à 4 unités [Ni(CN)4]2-, les deux sites restants étant
occupés par des atomes d’azote des molécules d’ammoniaque (figure A.2.1). En résumé, les
deux types d’ions nickel liés par le groupe cyanure forment un réseau bidimensionnel infini :
ces plans sont empilés dans la direction z avec un espacement d’environ 8 Å, ce qui permet
l’introduction des molécules ‘‘Guest’’.
23
Figure A.2.1 : Structure du Clathrate de Hofmann [Ni(NH3)2Ni(CN)4·2G] où G= benzène
Au début des années 60, Schwarzenbach et al. [4] ont synthétisé de nouveaux complexes de
type clathrates d’Hofmann en substituant dans la structure originale les atomes de nickel (II),
qui occupent l’environnement octaédrique, par des ions cadmium (II), cuivre (II) et zinc (II).
Dans les années 80, Iwamoto et col. [5,6,7] ont poursuivi ces travaux en développant la famille
de formule générale : [M(NH3)M’(CN)4]·2G (M= Mn(II), Fe(II), Co(II), Ni(II), Zn(II), Cd(II),
ou Cu(II) ; M’= benzène, pyrrol, thiofène, dioxane, aniline, ou biphényle). De plus, ces
auteurs ont substitué les molécules d’ammoniaque par des ligands bis-monodentes tels que
l’éthylènediamine, la diaminobutane ou la méthanolamine dans le but d’étudier la possibilité
du changement de dimensionnalité (de deux dimensions (2D) à trois dimensions (3D)) (Figure
A.2.2).
Figure A.2.2 : structure du Clathrate d’Hofmann [Cd(1,4-diaminobutane)Ni(CN)4]·benzène
24
Plus tard, au cours de la dernière décennie, Kitazawa et col. [8] ont synthétisé le système
polymère 2D {Fe(py)2[Ni(CN)4]} (1) où les ligands axiaux d’ammoniaque ont été substitués
par deux pyridines. La structure de ce complexe est similaire aux clathrates d’Hofmann
classiques, mais la taille beaucoup plus grande de la pyridine (par rapport à l’ammoniaque),
conduit à un déplacement des plans formés par les atomes de fer et les groupes cyano, de sorte
que l’atome de fer d’un plan donné se place verticalement par rapport aux atomes de nickel
des plans immédiatement supérieur et inférieur. Ceci conduit à un espace restreint entre ces
plans d’où la plus grande difficulté d’accueillir des molécules ‘‘Guest’’ dans ce type de
matériaux par rapport aux structures poreuses précédentes (Figure A.2.3).
Figure A.2.3: Structure du complexe [Fe(py)2Ni(CN)4](1)
L’étude des propriétés magnétiques du composé 1 montre une TS centrée à 191 K, avec une
boucle d’hystérésis de 10 K (T1/2↓=186 K et T1/2↑=196 K). Plus récemment Niel et al. [9a, 9b],
ont observé des résultats similaires pour des composés homologues à base de [Pd(CN)4]2- (2)
et [Pt(CN)4]2- (3). Ces complexes présentent aussi une TS avec une boucle d’hystérésis (2 : de
5K, T1/2↓=208K, T1/2↑=213K ; 3 : de 8K, T1/2↓=208 K, T1/2↑=216 K).
Pour ces trois systèmes {Fe(py)2[M(CN)4]} (M= Ni, Pd, Pt), un changement de couleur
caractéristique est observé avec la TS : les complexes sont respectivement orange, jaune pale
ou blanc dans l’état HS et rouge orangé dans l’état BS.
25
Ces travaux constituent un premier pas vers une nouvelle stratégie de synthèse pour des
nouveaux systèmes polymères à TS. En ce sens, le remplacement du ligand pyridine
monodente par le ligand pyrazine (pz) bidente conduit à une nouvelle famille de composés
tridimensionnels {Fe(pz)[M(CN)4]}·2H2O (M= Ni (4), Pd (5), Pt (6)) où le ligand pyrazine
joue le rôle de pont entre deux atomes de fer de couches consécutives (Figure A.2.4).
Figure A.2.4: Structure du complexe {Fe(pz)[Pt(CN)4]}(6)
Le comportement magnétique des complexes 4-6 met en évidence une TS du premier ordre
avec une boucle d’hystérésis marquée (4 : T1/2↓=280 K et T1/2↑=300 K ; 5 : T1/2↓=239 K et
T1/2↑=262 K ; 6 : T1/2↓= 222 K et T1/2↑= 240 K). Le changement d’état de spin s’accompagne
également d’une modification prononcée de la coloration du matériau : jaune (platine,
palladium) ou orange (nickel) dans l’état HS, il devient rouge dans l’état BS.
Les propriétés magnétiques des complexes [9a, 9b] 1-3 (ligand pyridine) et 4-6 (ligand pyrazine)
ont été comparées sur la figure A.2.5. Les dérivés 3D présentent des TS plus coopératives que
leurs homologues 2D, avec hystérésis très large (entre 20-40 K, alors qu’elle est au maximum
de 9 K pour les dérivés de la pyridine) et à plus haute température. L’augmentation
significative des valeurs T1/2 observées pour les dérivés de pyrazine, comparés aux
homologues de pyridine, ne peut pas être expliquée par la théorie du champ de ligand, puisque
la pyridine est un ligand à champ plus fort que la pyrazine. Par contre, la pression interne
induite par la structure 3D plus rigide, peut expliquer la stabilisation de l’état BS dans le cas
de la pyrazine.
26
Figure A.2.5 : Propriétés magnétiques des polymères 1-6.
Les complexes décrits ci-dessus constituent avec les systèmes monodimensionnels (1D) à
base de triazole développés par Kahn et al.[10], des exemples typiques de systèmes polymères
à TS. Ces matériaux dotés d’une coopérativité accrue par rapport aux systèmes monomères
font l’objet d’un intérêt croissant de la part de la communauté scientifique, en raison de leurs
potentielles possibilités d’utilisation dans les dispositifs applicatifs. Aussi, afin de pouvoir
contrôler à volonté leurs propriétés (T1/2 et la largeur de l’hystérésis en particulier), il est
nécessaire de synthétiser de nouveaux complexes polymères 3D. En ce sens, une nouvelle
famille de clathrates d’Hofmann a été obtenue en remplaçant le ligand pyrazine par le ligand
azopyridine : [Fe(4,4’-azopyridine)M(CN)4]·nH2O (M = Ni(II) (7), Pd(II) (8) et Pt(II) (9)).
Ceci fera l’objet du chapitre A.4.
Dans la suite de ce chapitre, nous décrirons les études physico-chimiques réalisées
précédemment sur la famille Fe(pz)[M(CN)4] (M = Pt, Pd, Ni) en particulier le complexe
{Fe(pz)[Pt(CN)4]}·nH2O. La thématique principale de ce manuscrit s’inscrit dans la suite de
ces travaux : il s’agit de l’élaboration de couches minces dans un premier temps puis la micro-
nano-structuration de ces composés ainsi que leur caractérisation.
(5) (2)
(4)
(1)
(3)
(6)
27
A.2.1. Composé {Fe(pz)[Pt(CN)4]}·nH2O.
A.2.1.1 Description de la structure cristalline [9a, 9b]
La structure cristalline du complexe Fe(pz)[Pt(CN)4]·2H2O (6) a été déterminée par V. Niel
par calcul « ab initio » à partir du diffractogramme de poudre, mesuré à température ambiante.
Elle se présente sous forme d’un système tétragonal (groupe d’espace P4/m) des paramètres
de maille a = b = 7.4144(5) Å et c = 7.2141(6) Å, avec V = 396.58 Å3, ρcalc = 1.955 g cm-3 et
Z = 1.
Chaque atome de FeII est lié à quatre groupes [Pt(CN)4]2- à travers les ponts CN, et chaque
atome de platine entouré de quatre atomes de FeII situés à une distance de 5.243 Å ; la
distance entre deux atomes de Fe du même plan est de 10.486 Å, formant ainsi un réseau
infini dans les directions x et y. Les atomes de Fe de deux plans consécutifs sont liés à deux
molécules de pyrazine, à une distance 7.214 Å donnant lieu à un réseau tridimensionnel très
stable.
Récemment, nous avons pu synthétiser des monocristaux (figure A.2.6) en forme d’aiguilles
jaunes du complexe Fe(pz)[Pt(CN)4]·nH2O par une méthode similaire à celle développée par
E. Velterman. A température ambiante, un flacon (i) de 8 ml est placé à l’intérieur d’un autre
flacon (ii) de 60 ml rempli d’une solution aqueuse 0.5 M de pyrazine jusqu’à environ 0.5 cm
en dessus de la limite supérieure. 2ml d’une solution aqueuse 0.5 M de Fe(BF4)2·6H2O
(refroidi dans la glace) est injectée au fond de (ii), et 2ml d’une solution aqueuse 0.5 M de
K2Pt(CN)4 (refroidi dans la glace) est injecté au fond de (i). (i) est fermé et placé dans un bain
d’eau à 45°C pendant 3 jours. Après 3 jours des cristaux jaunes en forme d’aiguilles
apparaissent, ceux-ci sont filtrés et séchés à l’air pendant un jour. Le produit est déshydraté
par la suite à 150°C (30 min) dans une étuve.
Bain d’eau 45 °C
Pyrazine
K2[Pt(CN)4]
Fe(BF4)2
28
Figure A.2.6: a) Montage expérimental pour l’obtention des cristaux, b) cristaux du complexe
Fe(pz)Pt(CN)4 dans l’état HS (droite) et BS (gauche).
Les mesures de susceptibilité magnétique montrent une transition de spin avec une boucle
d’hystérésis de 14 K centrée à température ambiante pour le produit dans sa forme
déshydratée (Figure A.2.7). L’influence du degré d’hydratation est décrite dans le paragraphe
qui suit.
Figure A.2.7 : Evolution du produit χMT en fonction de la température pour les cristaux du
complexe 6 après traitement thermique à 430 K.
La structure cristalline obtenue par diffraction de rayons X montre que les paramètres de
maille à température ambiante sont proches de ceux obtenus par calcul « ab initio » dans la
poudre non-déshydratée: groupe d’espace P4mmm (tétragonal), a = b = 7.4314(6) Å, c =
7.2468(18) Å, V = 400.21(11) Å3, ρcalc = 1.789 g cm-3 et Z = 1. Les paramètres obtenus dans
l’état BS sont : a = b = 7.1710(6) Å et c = 6.7700(18) Å, avec V = 348.14(10) Å3, ρcalc = 2.056
g cm-3 et Z = 1. Notons le changement de volume de 13%, le plus grand observé pour des
complexes à TS. (voir annexe E)
250 260 270 280 290 300 310 320 330
0
1
2
3
4
χ MT
(cm
3 K m
ol-1)
T (K)
29
A.2.1.2 Influence du degré de solvatation sur les propriétés magnétiques
Le composé Fe(pz)[Pt(CN)4] (6) a été synthétisé pour la première fois sous sa forme
polycristalline hydratée(9a), puis des études complémentaires ont montré que le comportement
de ce matériau dépend fortement du nombre de molécules d’eau que le réseau cristallin
contient.[12] En effet, les premières synthèses de ce type de clathrates montraient des TS très
coopératives avec des boucles d’hystérésis assez larges autour de 30-40 K mais leur
reproductibilité (températures critiques T1/2↑ et T1/2↓ et largeur de la boucle d’hystérésis) n’est
pas garantie.[12]
A titre d’exemple, le comportement magnétique du composé 6 avant et après chauffage à
430K est présenté sur la figure A.2.8. La TS de la forme hydratée s’étale sur un large
intervalle de températures (110K), avec une hystérésis de largeur 20 K centrée autour de
260K. Le traitement thermique améliore notablement les caractéristiques de cette transition,
celle-ci devenant alors plus rectangulaire et centrée à la température ambiante. De plus, la
largeur du cycle d’hystérésis augmente à 24 K et les propriétés magnétiques restent
reproductibles après plusieurs cycles thermiques.
Des analyses thermo-gravimétriques ont révélé qu’un chauffage des échantillons à plus de
473 K est nécessaire pour éliminer les deux molécules d’eau de cristallisation, mais en contact
avec l’air l’échantillon récupère rapidement une molécule d’eau. Le matériau déshydraté
possède des propriétés magnétiques reproductibles, identiques à celle de l’espèce
monohydratée. [12] On peut obtenir une reproductibilité des propriétés magnétiques suite à un
traitement thermique entre 430-450 K pendant 10-30 minutes qui permet d’obtenir l’espèce
monohydratée.
Figure A.2.8 : Evolution du produit χMT en fonction de la température pour le complexe 6
avant et après traitement thermique à 430 K.
160 200 240 280 3200
1
2
3
4
Température (K)
χ MT(
cm3 K
mol
-1)
- H2O
30
A.2.1.3. Spectroscopie Raman
Les spectres Raman de l’échantillon déshydraté du complexe 6 ont été enregistrés dans la
gamme de fréquence 30 - 2250 cm−1 à 88, 248 et 328K (figures A.2.9 et A.2.10) [13]. Dans la
zone 600 - 1700 cm−1 (figure 6a), toutes les raies Raman peuvent être attribuées aux modes
intramoléculaires de la molécule de pyrazine. Les modes situés autour de 2100 - 2200 cm−1
correspondent aux modes d’élongation CN;[13] ces derniers ne subissent toutefois que de
faibles déplacements de fréquence lors de la TS.[14, 15] Par contre, les pics autour de 650 cm−1
constituent de bons marqueurs pour suivre la transition du fait de leur déplacement fréquentiel
de 32 cm−1 (de 645 cm−1 (HS) à 677 cm−1 (BS)). Il est ainsi possible de reproduire les courbes
de magnétisme en reportant l’évolution de l’intensité d’un de ces modes par rapport à l’autre
(I(645 cm−1) / [I(645 cm−1) + I(677 cm−1)]), en fonction de la température.
La modification d’état de spin entre 88 et 328 K provoque aussi des changements importants
dans la zone de fréquences 315 - 585 cm−1 (figure A.2.9b). Les spectres à 248 K présentent
des raies Raman supplémentaires à ceux enregistrés à 88 K, indiquées par des flèches sur la
figure 6b. Ces modes additionnels suggèrent l’existence des deux phases cristallines
distinctes, correspondant chacune à des ions FeII BS, indépendamment de la TS:[13] en effet à
88 K comme à 248 K, le complexe est dans l’état BS.
Figure A.2.9 : Spectres Raman du complexe 6 : a) 585-2250 cm-1 et b) 315-585 cm-1.
Entre 30 et 315 cm−1 (figure A.2.10a), trois modes caractéristiques de l’état HS (330 K)
apparaissent autour de 50, 175 et 225 cm−1 comme indiqué par les notations A1, A2 et A3,
respectivement. Les modes Raman A2 et A3 sont attribués à l’élongation de la liaison Fe-N
800 1200 1600 2000
677 cm-1
645 cm-1
x 1/15
x 1/15
Inte
nsité
Décalage Raman (cm-1)
328 K
248 K
88 K
350 400 450 500 550
377 cm-1 509 cm-1
431 cm-1
248 K
88 K
328 K
Inte
nsité
Décalage Raman (cm-1)
a) b)
31
50 100 150 200 250 300
B3
A1
A3A2
B2B188 K
248 K
328 K
Inte
nsité
Décalage Raman (cm-1)
C1C2
de l’état HS [14]. Puisque la raie Raman A1 disparaît au voisinage de la transition, elle peut
également être attribuée à un mode Fe-ligand HS. Entre 300 et 250 K, les pics A1-A3
disparaissent et les modes Raman indiqués par B1 - B3 émergent.
Figure A.2.10 : a) Spectres Raman du complexe 6 entre 30-315 cm-1 et b) Intensité
normalisée des modes Raman A1, B2, B3 en fonction de la température.
En poursuivant le refroidissement (entre 200 et 150 K), les modes B1 et B2 disparaissent et de
nouveaux modes (C1 et C2) apparaissent. En même temps, l’intensité du mode B3, décrit
comme un mode d’élongation Fe-N(pz) BS[14], s’amplifie. La figure A.2.10b montre la
dépendance thermique des intensités Raman intégrées des pics A1, B2 et B3 en mode
refroidissement. Ces intensités sont également normalisées par rapport à l’intensité maximale
mesurée. Le mode A1 apparaît dans l’état HS, le mode B2 dans l’état BS mais exclusivement
dans la gamme de températures intermédiaires entre 150 et 275 K et le mode B3 dans l’état
BS en dessous de 275 K. Ce dernier présente une forte hausse en intensité en dessous de 150
K. Ces changements spectraux sont totalement reproductibles sur plusieurs cycles de
chauffage et de refroidissement.
En résumé, il est possible de suivre la TS pour le complexe 6 à l’aide de ces différents
marqueurs. Cependant, lorsque l’intensité du signal Raman est faible, il est préférable de
suivre d’autres marqueurs plus intenses situés autour de 1028 et 1231 cm-1 permettant un tracé
plus précis du rapport d’intensité.
100 150 200 250 3000.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0 B3 B2A1
Inte
nsité
nor
mal
isée
T (K)
32
240 260 280 300 320 3400
1
2
3
4
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0χMT
χ MT
(cm
3 mol
-1K
)
T (K)
Raman
I norm
A titre d’exemple, on présente la courbe obtenue en suivant le rapport d’intensité de ces
derniers pics, en fonction de la température : cette courbe est superposable à celle obtenue à
partir des mesures de susceptibilité magnétique. Il est donc possible de reproduire précisément
le comportement des données magnétiques en traçant l’évolution de l’intensité d’un de ces
modes par rapport à l’autre, I(1231 cm-1)/[I(1231 cm-1)+I(1028 cm-1)]. (Figure A.2.11)
Figure A.2.11 : Dépendance en température de l’intensité Raman normalisée
(I(norm)=I(1025 cm-1) / I(1230 cm-1)) et celle du produit χMT du complexe Fe(pz)[Pt(CN)4]
A.2.1.4. Etudes des effets de Pression
Des études Raman de la famille Fe(pz)[M(CN)4]·2H2O (M = Ni, Pd, Pt) à température
ambiante ont été effectuées en fonction de la pression dans notre équipe. Il a été montré pour
la première fois une boucle d’hystérésis piézo-induite à température constante (ambiante)
pour le complexe de nickel, avec les pressions caractéristiques P1/2↑ = 1350 (±50) bar et P1/2↓
= 650 (±50) bar (figure A.2.12a). Pour les complexes de palladium et platine, la TS se produit
autour de 1800 (±50) et 3500 (±50) bar, respectivement. La spectrométrie Raman a également
montré pour ces deux derniers complexes que la TS est repoussée à de plus hautes pressions
en raison d’une transition de phase structurale dans l’état HS, ce qui n’avait pas été observée
dans le cas du nickel. En effet, à des pressions intermédiaires, des raies Raman différentes de
celles de la phase HS et BS sont observées (par exemple autour de 660 cm-1 ou encore dans la
région des élongations CN) qu’on peut attribuer à une transition de phase structurale
différente de la TS (figure A.2.12b).
33
Figure A.2.12: a) Piezo-hystérésis expérimentale du complexe Fe(pz)[Ni(CN)4]·2H2O à TS ;
b) Spectres Raman du complexe Fe(pyrazine)[Pt(CN)4]·2H2O à différentes valeurs de la
pression appliquée
A.2.1.5. Photo-commutation réversible par impulsion laser nano-seconde
L’effet LIESST dans ce composé a été démontré à 5K à l’aide d’un laser continu. Cependant,
la durée de vie de l’état HS métastable déjà très courte à basse température décroit
exponentiellement avec l’augmentation de la température. Pour palier à ce problème, nous
avons eu l’idée de travailler à l’intérieur de la boucle d’hystérésis (centrée autour de la
température ambiante) où la durée de vie des états métastables (macroscopiques) est infinie.
Dans notre équipe, S. Bonhommeau[11] a mis en évidence par spectroscopie Raman une TS
photo-induite à température ambiante et bidirectionnelle (BS HS et HS BS) dans le
complexe 6 par application d’un laser pulsé.
Cette transition bidirectionnelle a été induite à l’aide d’impulsions de 5 ns, de longueur
d’onde λ = 532 nm et d’énergie d’environ ~ 20 mJ cm-2 environ au niveau de l’échantillon. La
figure A.2.12 indique la fraction HS, évaluée à partir de l’intensité des pics Raman, avant et
après excitation laser. Les spectres Raman enregistrés entre 620 et 720 cm-1, avant et après
l’application des impulsions, sont présentés dans les encarts de la figure. Les modifications
spectrales, comme le changement de couleur observé après excitation lumineuse, indiquent
clairement qu’une impulsion génère aussi bien la transition BS HS que la transition
HS BS, selon la position initiale sur le cycle d’hystérésis. Les effets thermiques (chauffage
de l’échantillon) provoqués par cette irradiation laser très courte peuvent être négligés. En
T=295 K
0 500 1000 1500 2000 2500
0.6
0.8
1.0
nHS
pressure (bar)
a b
34
effet, si cet échauffement est susceptible d’induire la transition BS HS, l’observation d’une
transition HS BS est une preuve irréfutable de l’effet purement photo-induit.
Si le changement d’état de spin semble complet dans la direction BS HS, la conversion
HS BS ne concerne que 20 % des ions FeII. Des mesures de densité optique du complexe
sont indispensables pour comprendre ce phénomène et connaître les conditions de pénétration
du faisceau aux différentes longueurs d’onde.[11] De plus, l’ensemble de ces expériences a été
réalisé sur des poudres ; aussi, pour des études plus quantitatives, il est nécessaire de préparer
des couches minces de ces matériaux qui garantissent une pénétration complète des lasers
d’excitation et de mesure.
Figure A.2.13 : Fraction HS avant et après une impulsion laser à 532 nm du complexe 6 à
l’intérieur de son cycle d’hystérésis. Les spectres Raman enregistrés avant et âpres la
photoexcitation sont présentés dans les encarts.
260 270 280 290 300 310 320 3300.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
γ HS
T (K)
532 nm532 nm
640 680 720
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
LS
640 680 720
HS
LS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
260 270 280 290 300 310 320 3300.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
γ HS
T (K)
532 nm532 nm
640 680 720
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
LS
640 680 720
HS
LS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
260 270 280 290 300 310 320 3300.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
γ HS
T (K)
532 nm532 nm
640 680 720
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
LS
640 680 720
HS
LS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
260 270 280 290 300 310 320 3300.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
γ HS
T (K)
532 nm532 nm
640 680 720
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
LS
640 680 720
HS
LS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
640 680 720
LS
HS
Inte
nsity
(arb
. uni
ts)
Raman shift (cm-1)
35
A.2.2. Références [1] H. J. Buser, D. Schwarzenbach, W. Peter, A. Ludi, Inorg. Chem., 1973, 16, 2704.
[2] a) K. A. Hofmann, F. Höchtlen, Chem. Ber., 1903, 36, 1149; b) K. A. Hofmann, H.
Arnildi, Chem. Ber., 1906, 39, 339.
[3] a) H. M. Powell, J. H. Rayner, Nature (London), 1949, 163, 566; b) H. M. Powell, J. H.
Rayner, J. Chem. Soc., 1952, 319; c) H. M. Powell, J. H. Rayner, J. Chem. Soc., 1958, 3412.
[4] R. Bauer, G. Schwarzenbach, Helv. Chim. Acta, 1960, 43, 842.
[5] T. Iwamoto, Inclusion Compounds, J. L. Atwood, J. E. D. Davies and D. D. MacNicols,
Eds., Academic, London, 1984, vol. 1, chapitre 2, 29.
[6] T. Iwamoto, Inclusion Compounds, J. L. Atwood, J. E. D. Davies and D. D. MacNicols,
Eds., Academic, London, 1996, vol. 5, chapitre 6, 117.
[7] T. Iwamoto, D. F. Shiver, Inorg. Chem. 1972, 11, 2570.
[8] T. Kitazawa, Y. Gomi, M. Takahashi, M. Takeda, M. Enomoto, A. Miyazaki, T. Enoki, J.
Mater. Chem. 1996, 6, 119.
[9] a) V. Niel, J.-M. Martinez-Agudo, M.-C. Munoz, A.-B. Gaspar, J.-A. Real, Inorg. Chem.
2001, 40, 3838-3839; b) V. Niel, thèse de doctorat, Universidad de Valencia, 2002.
[10] O. Kahn , C. Jay Martinez, Science, 1998, 279, 44
[11] S. Bonhommeau, G. Molnar, A. Galet, A. Zwick, J.-A. Real, J. J.McGarvey, A.
Bousseksou, Angew. Chem. 2005, 117, 4137; Angew. Chem. Int. Ed. 2005, 44, 4069.
[12] A. Galet, thèse de doctorat, Universidad de Valencia, 2006.
[13] T. Tayagaki, A. Galet, G. Molnar, M.-C. Munoz, A. Zwick, K. Tanaka, J.-A. Real, A.
Bousseksou, J. Phys. Chem. B, 2005, 109, 14859.
[14] G. Molnar, V. Niel, A. Gaspar, J. Real, A. Zwick, A. Bousseksou, J. McGarvey, J. Phys.
Chem. B, 2002, 106, 9701.
[15] G. Molnar, V. Niel, J. Real, L. Dubrovinsky, A. Bousseksou, J. Mc- Garvey, J. Phys.
Chem. B, 2003, 107, 3149.
[16] S. Descurtins, P. Gütlich, C.P. Kohler,, H. Spiering, A. Hauser, Chem. Phys. Lett. 1984,
105, 1.
[17] E. Freysz, S. Montant, S. Létard, J.-F. Létard, Chem. Phys. Lett., 2004, 394, 318.
36
A.3 Dépôt en couches minces des complexes
Fe(pz)[M(CN)4] (M= Pt, Pd, Ni) Notre équipe a montré récemment, dans le cas de plusieurs exemples de complexes à TS, que
le changement de l’état de spin est en général accompagné par une variation de la constante
diélectrique (ε) du matériau : pour certains systèmes, on observe même un cycle d’hystérésis
de cette constante, centré à température ambiante.[3] Ce résultat suggère l’utilisation des
matériaux à TS pour la fabrication des dispositifs mémoire qui puissent stocker de
l’information par la voie électrique selon l’état de haute ou de basse capacitance (état HS ou
LS respectivement). De plus, les récents travaux réalisés par Freysz et al. [4] et Bonhommeau
et al.,[5] ont permis de démontrer qu’un changement entre deux états de spin est possible par
une courte impulsion laser de quelques nanosecondes. Ces propriétés remarquables ont été
jusqu’à présent observées sur des complexes synthétisés à l’état de poudre. Dans l’optique
d’applications dans des dispositifs ou tout simplement pour des études plus quantitatives, il
est apparu nécessaire de fabriquer des couches minces de ces matériaux. Ceci fait l’objet du
présent chapitre.
La difficulté de ce travail réside dans la compatibilité entre le maintien des propriétés
magnétiques du complexe et le procédé de dépôt car la TS est un phénomène très sensible aux
différentes perturbations du réseau cristallin. Peu d’exemples décrivent la synthèse des
couches minces des complexes à TS, dans la littérature.[6] Quelques travaux ont été réalisés
par les techniques :
- de Langmuir Blodgett : [7] des monocouches sont formées à l’interface aqueuse et
ensuite transférées sur un support.
- de "spin coating", qui consiste à déposer un fluide sur un support puis évaporer le
solvant par centrifugation (sur une tournette). Néanmoins, dans le cas des fluides peu
visqueux la surface obtenue est très irrégulière. Pour palier ce problème le complexe peut être
mélangé avec un polymère qui augmente la viscosité mais l’inconvénient de cette méthode est
que la couche résultante n’est pas le complexe à TS pur. Ceci altère en général fortement la
transition et les propriétés diélectriques et optiques de ces films.
37
Au début de ce travail, il n'existait aucune méthode permettant le dépôt en couche minces de
complexes à TS purs avec maintien de la propriété d’hystérésis et un état de surface de qualité
acceptable. Dans notre objectif de fabriquer des couches minces des complexes à TS, nous
avons choisi la méthode de l’assemblage multicouche séquentiel (MSA- de l’anglais
« multilayer sequential assembly »), aussi appelée « couche par couche » (LbL- de l’anglais
« Layer by Layer ») ou assemblage dirigé (directed-assembly)
Cette méthode permet, en plus de sa facilité de mise en œuvre, un contrôle précis de
l’assemblage moléculaire et de l’épaisseur de la couche (à l’échelle de quelques nanomètres).
Ainsi, à l’aide de cette technique, différents types d’assemblage de couches minces ont été
mis au point et reportés dans la littérature pour d’autre complexes sans transition de spin:
- Assemblage électrostatique : Iler[9b] et Decher[9a] ont été les pionniers de cette
technique. Une monocouche polycation ou polyanion est déposée sur un substrat
chargé de façon opposée ; après 3 ou 4 rinçages dans l’eau ultrapure pour éliminer
l’excès de molécules, le substrat est plongé à nouveau dans la solution polyanionique
ou polycationique pour adsorber la deuxième monocouche. Le substrat est rincé à
nouveau pour éliminer l’excès de molécules, formant ainsi une bicouche polyanion-
polycation, qui pourra être répétée pour assembler des multicouches. (voir aussi la
partie B)
- Assemblage par liaisons covalentes : cette technique mise au point par Sagiv et al.[8]
réussi la formation de films multicouches en utilisant des organosilanes bifonctionels :
CH2=CH-(CH2)14 . SiCl3. La fonction SiCl3 permet la liaison covalent des molécules à
la surface riche en groupes hydroxyle, pendant que le groupe éthylénique terminal,
peut donner lieu a des groupes hydroxyle, grâce à une hydroboration et oxydation par
H2O2, en suite la méthode peut être répète. D’autres types d’assemblage des films
multicouches avec liaison covalent ont été développés par la suite.[8]
- Assemblage par pont d’hydrogène[10] : procédé introduit par Rubner et Zhang, il est
basé sur l’alternance dans le dépôt de 2 types de polymères : un avec groupes donneurs
de liaisons hydrogène et l’autre avec groupes accepteurs. L’inconvénient de cette
méthode est que les ponts d’hydrogène sont des liaisons très faibles.
- Assemblage par liaisons de coordination [11] : la méthode sera décrite ci-dessous.
38
Même si l’assemblage des couches de métaux de transition par des liaisons de coordination
est beaucoup moins décrit que l’assemblage ionique, il existe malgré tout un certain nombre
d’exemples de ce type d’assemblage.[12] On peut citer les travaux de Mallouk et al. qui ont
décrit pour la première fois la synthèse en couches minces d’un polymère 3D de type
Clathrate de Hofmann : Ni(bpy)Ni(CN)4 (figure A.3.1).
Figure A.3.1: Assemblage séquentiel du complexe Ni(bpy)Ni(CN)4.[12]
En principe, ce travail précurseur peut être adapté à l’ensemble de la famille de complexes de
type clathrates de Hofmann, en particulier à ceux à TS. Nous nous sommes inspirés de cette
méthode pour déposer des polymères de coordination tridimensionnels à TS,
Fe(pyrazine)[M(CN)4] (M = Ni, Pd ou Pt), dans le but d’obtenir de couches minces présentant
un cycle d’hystérésis centré autour de la température ambiante.
(1)
NSN
N
M(H2O)52+
M(H2O)52+
L= M’(CN)42-
(2)
M2+
(3)
N
N
M
M
L
H2O
H2O(4)
(2),(3),(4), etc
N
N
M
M
Lmultilayerthin film
Au
NS
NS
S-CH2-CH3-CH2-CH3 -CH2-CH3
-CH2-CH3
-CH2-CH3
N N
N N
N N
39
A.3.1. Synthèse : dépôt en couches minces du complexe
A.3.1.1. Le substrat
Le choix du substrat est une des étapes cruciales pour le dépôt car il conditionne l’accrochage
des couches minces. Différents types de substrats (Au, Si, SiO2, verre, ITO…) ont été
envisagés, mais notre choix s’est porté sur un substrat de silicium (Si(100) de taille 4-pouce
type-p, 10 Ω cm-1) recouvert de 5 nm de titane (pour une meilleure adhésion entre le Si et
l’Au) et 15 nm d’or déposés par évaporation thermique à une pression de 5.10-7 Torr
(évaporateur « Veeco Thermal »). En effet, une telle surface peut être facilement
fonctionnalisée par des thiols de manière à amorcer l’assemblage du complexe. Il est possible
aussi de fonctionnaliser la surface de silicium avec différents silanes, comme on verra dans la
partie A.5
A.3.1.2. La couche d’accrochage
Pour une adsorption efficace du dépôt, la surface du substrat doit être modifiée par ce qu’on
appelle « une monocouche d’accrochage ». Il s’agit d’une couche hautement stable formée
généralement d’un thiol ou d’un disulfide qui peut être déposé tout simplement en plongeant
le substrat dans la solution correspondante. La couche se forme par auto-assemblage sur le
substrat. Ce processus peut être considéré comme une oxydation de la liaison S-H sur la
surface d’or, suivie de l’élimination de l’hydrogène. La réaction mise en jeu est la
suivante :[15]
R-SH + Aun0 R-S- - Au+ + 1/2H2 + Aun-10
Dans un premier temps nous avons fonctionnalisé les substrats d’or avec des solutions
millimolaires de mercaptopyridine ou de cystamine (figure A.3.2) dans l’éthanol pour générer
les monocouches.
Figure A.3.2 : Structures des molécules utilisées pour des couches d’accrochage.
NH2S
SH2N
cystamine
NHS
4-mercaptopyridine
40
Cependant, ce type de couche d’accrochage conduit à des dépôts trop irrégulières.[13] Des
résultats plus satisfaisants ont été obtenus avec la molécule 4-4’-azopyridine (Figure A.3.3).
Typiquement, le substrat est plongé dans une solution éthanolique de 4-4’-azopyridine (30
mM) pendant une nuit, puis rincé à l’éthanol, et enfin séché sous azote.
Figure A.3.3: Ligand 4-4’-azopyridine
A.3.1.3. Assemblage du complexe
Une fois la couche d’accrochage formée, le substrat est plongé séquentiellement dans
différentes solutions selon le schéma ci-dessous, pour obtenir le complexe souhaité (Figure
A.3.4).
Figure A.3.5 : Mode opératoire pour le dépôt MSA du complexe
Le procédé est le suivant : le substrat est tout d’abord plongé dans une solution de
Fe(BF4)2.6H2O (50 mM) pendant une minute, puis lavé pendant 30 secondes à l’aide d’une
solution d’éthanol (première étape). Ce substrat est ensuite immergé pendant une minute dans
une solution de (TBA)2M(CN)4 (où M = Ni, Pd ou Pt, TBA = Tetrabutylammonium) à 50
mM dans l’éthanol, et lavé à nouveau dans l’éthanol pendant 30 secondes (deuxième étape).
N
N
N
N
4-4'-azopyridine
41
Enfin, le substrat est plongé pendant une minute dans une solution de pyrazine (50 mM) dans
l’éthanol puis nettoyé pendant 30 secondes dans l’éthanol (troisième étape). Ces trois étapes
correspondent à un cycle, qui peut être répété à volonté. Une moyenne de 15 et 20 cycles est
suffisante pour obtenir des dépôts suffisamment épais pour les différentes analyses.
Pour réduire la vitesse de désorption des espèces coordinnées (notamment le FeII), il est
nécessaire d’utiliser de l’éthanol dans la préparation des solutions, pour permettre une
température de travail autour de -60°C. Ces conditions de température sont obtenues à l’aide
d’un bain acétone/carboglace. De plus, l’ensemble du procédé est réalisé sous flux d’azote
pour éviter l’oxydation du FeII.
Figure A.3.4 : Mode opératoire pour le dépôt MSA du complexe 6
La figure suivante présente une vue tridimensionnelle idéalisée du dépôt : Il est à noter
cependant que des défauts peuvent survenir lors de sa fabrication, ce qui pourrait expliquer les
différences observées lors de la caractérisation entre la poudre et le dépôt en termes de
propriétés de la TS (voir ci-après).
N
N
N
N
N
N
N
N(1)
HSN Fe(H2O)52+
Fe(H2O)52+
L= M’(CN)42-
(2)
Fe2+
(3)
Fe
Fe
L
H2O
H2O(4)