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49 DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008 Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa région La planification à l’échelle de la région parisienne La planification à l’échelle de la région parisienne Le projet de 1934 Depuis sa création en 1928, le CSAORP a déjà beaucoup travaillé sur l’aménagement de la région parisienne. Les équipes constituées autour d’Henri Prost et de Raoul Dautry ont mis à jour les cartes du département de la Seine, recensé les lotissements, préparé la future loi de 1932 en rencontrant les différentes administrations pour connaître leurs projets, en particulier ceux des Ponts et Chaussées. La loi du 14 mai 1932 donne au comité supérieur un délai d’un an pour réaliser le plan d’aménagement de la région parisienne. Toutefois des difficultés d’ordre financier et technique allongent ce délai d’une autre année. Le ministère de l’Intérieur ne disposant pas de service organisé pour effectuer ce travail fait appel à la Ville de Paris ; l’accord est entériné entre l’Etat et la Ville après une délibération du conseil municipal du 13 juillet 1933. Le projet d’aménagement régional est élaboré sous la direction d’Henri Prost, architecte urbaniste en chef du comité supérieur, assisté par Pierre Rémaury et Jean Royer. Participent également M. Jayot, directeur général des transports, de l’extension et de l’inspection générale, le service technique de la ville de Paris, le service géographique de l’armée qui fournit les photographies aériennes et une carte de la région parisienne de grande précision. Le plan est présenté en mai 1934. Les grandes orientations du plan Les orientations du nouveau plan suivent les objec- tifs fixés en 1928 par Albert Sarrault quand il installa le CSAORP. Après la période de développement anarchique des lotissements pavillonnaires de la dé- cennie précédente, l’arrivée de populations déplacées par la guerre et d’une immigration étrangère, la pen- sée des décideurs et réalisateurs du plan est que la population de la région parisienne ne doit plus s’ac- croître et qu’il est nécessaire de dédensifier le cen- tre. « Le centre doit être décongestionné, l’habi- tat insalubre résorbé et l’expansion urbaine con- tenue dans un cercle de 35 km autour de Paris ». Décongestionner le centre La concentration des habitants, des industries des équipements dans le centre de l’agglomération et prin- cipalement de Paris est jugée comme néfaste. Paris accueille 46 % des établissements industriels clas- sés. Dans les communes limitrophes au nord, au sud- est, au sud-ouest ont été rejetés de très nombreux établissements nécessaires à la salubrité mais incom- modes pour les habitants et qui donnent à l’agglomé- ration, lorsque les conditions météorologiques sont « favorables », cette odeur si particulière qualifiée « d’air de Paris ». « Le surpeuplement est condamnable au nom de l’hygiène physique et de l’hygiène morale. Le plan d’aménagement s’efforce de remédier à ce mal dans toute la mesure du possible 1 ». 1934 – 1939 Le plan d’aménagement de la région parisienne (PARP) ou plan PROST 1 Mémoire descriptif général du plan, 15 juin 1935.

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DREIF, Claude COTTOUR, septembre 2008

Une brève histoire de l'aménagement de Paris et sa régionLa planification à l’échelle de la région parisienne

La planification à l’échelle dela région parisienne

Le projet de 1934Depuis sa création en 1928, le CSAORP a déjàbeaucoup travaillé sur l’aménagement de la régionparisienne. Les équipes constituées autour d’HenriProst et de Raoul Dautry ont mis à jour les cartes dudépartement de la Seine, recensé les lotissements,préparé la future loi de 1932 en rencontrant lesdifférentes administrations pour connaître leursprojets, en particulier ceux des Ponts et Chaussées.La loi du 14 mai 1932 donne au comité supérieur undélai d’un an pour réaliser le plan d’aménagement dela région parisienne. Toutefois des difficultés d’ordrefinancier et technique allongent ce délai d’une autreannée. Le ministère de l’Intérieur ne disposant pasde service organisé pour effectuer ce travail fait appelà la Ville de Paris ; l’accord est entériné entre l’Etatet la Ville après une délibération du conseil municipaldu 13 juillet 1933.

Le projet d’aménagement régional est élaboré sousla direction d’Henri Prost, architecte urbaniste en chefdu comité supérieur, assisté par Pierre Rémaury etJean Royer. Participent également M. Jayot, directeurgénéral des transports, de l’extension et de l’inspectiongénérale, le service technique de la ville de Paris, leservice géographique de l’armée qui fournit lesphotographies aériennes et une carte de la régionparisienne de grande précision.Le plan est présenté en mai 1934.

Les grandes orientations du plan

Les orientations du nouveau plan suivent les objec-tifs fixés en 1928 par Albert Sarrault quand il installale CSAORP. Après la période de développementanarchique des lotissements pavillonnaires de la dé-cennie précédente, l’arrivée de populations déplacéespar la guerre et d’une immigration étrangère, la pen-sée des décideurs et réalisateurs du plan est que lapopulation de la région parisienne ne doit plus s’ac-croître et qu’il est nécessaire de dédensifier le cen-tre. « Le centre doit être décongestionné, l’habi-tat insalubre résorbé et l’expansion urbaine con-tenue dans un cercle de 35 km autour de Paris ».

Décongestionner le centreLa concentration des habitants, des industries deséquipements dans le centre de l’agglomération et prin-cipalement de Paris est jugée comme néfaste. Parisaccueille 46 % des établissements industriels clas-sés. Dans les communes limitrophes au nord, au sud-est, au sud-ouest ont été rejetés de très nombreuxétablissements nécessaires à la salubrité mais incom-modes pour les habitants et qui donnent à l’agglomé-ration, lorsque les conditions météorologiques sont« favorables », cette odeur si particulière qualifiée« d’air de Paris ».« Le surpeuplement est condamnable au nom del’hygiène physique et de l’hygiène morale. Le pland’aménagement s’efforce de remédier à ce maldans toute la mesure du possible1 ».

1934 – 1939Le plan d’aménagement de la régionparisienne (PARP) ou plan PROST

1 Mémoire descriptif général du plan, 15 juin 1935.

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Contenir l’expansion urbaineConformément à l’article 2 de la loi du 14 mai 1932,les communes faisant partie de la région parisienne àlaquelle s’applique le projet régional sont comprisesà l’intérieur d’un cercle de 35 km autour de Paris. Laliste est fixée par l’arrêté du ministre de l’intérieur endate du 29 juillet 1934. La région parisienne ainsidéfinie est peuplée d’à peu près 6 300 000 habitants.Elle comprend 6572 communes réparties sur 51 200hectares dont :

- les 81 communes du département de la Seine ;- 386 communes du département de Seine-et-Oise(toutes les communes de ce département ne sontpas intégrées dans cette région en particulier lescantons d’Houdan, Rambouillet, Etampes, Magny-en-Vexin…) ;- 107 communes de Seine-et-Marne (les cantonsde Meaux, Melun, Montereau, Provins… n’en fontpas partie) ;- 83 communes de 5 cantons du sud de l’Oise.

la région parisienne (en orange) définie parla loi du 14 mai 1932 (DREIF/DUSD/ME/CC)

2 Le mémoire descriptif général du plan cite 656 communes.

PARP : réglementation de l’utilisation du solen 4 classes

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Prescrire des règles d’utilisation du solLes communes sont réparties, au point de vue del’utilisation du sol et des règlements de construction,en quatre classes en excluant Paris. (carte p.50)

Le projet d’aménagement régional :- détermine pour chaque commune un périmètred’agglomération, c’est à dire la limite du territoire àurbaniser. En dehors de celui-ci, la zone « nonaffectée » est réservée plus spécialement àl’agriculture dans laquelle il n’est permis d’édifier quedes bâtiments servant à l’exploitation agricole,- affirme des mesures de protection pour certainssites particulièrement remarquables (axe du canal deVersailles, de Sceaux, terrasse de Saint-Germain, deMeudon),- prévoit des réserves pour de nombreux espaceslibres publics et pour des grands équipements publicstels que cimetières intercommunaux, aérodromes…

Circulation, créer de nouvelles infrastructuresroutièresLe projet d’aménagement définit un programmed’opérations routières important avec la création decinq grandes infrastructures autoroutières partant deParis et permettant de desservir l’aéroport du Bourgeten service et celui de Trappes en projet, « de gagnertoutes les plages de la Manche, de Bretagne et del’Océan sans croisement dans la régionparisienne », d’accéder rapidement aux grandesroutes nationales sans traverser la banlieue :Et d’une voie circulaire, rocade de grande ceinture« du noyau parisien, permettant sur une largeurde cent mètres de faire le tour de la capitale et degagner en pleine campagne ses principauxaccès ».

Il faut noter que le projet d’aménagement prend enconsidération un grand nombre de projets déjà étudiéset prêts à être réalisés comme par exemple l’autoroutede l’Ouest dont les travaux débuteront l’annéesuivante.Les tracés de ces nouvelles autoroutes sont choisispour être rapidement réalisables en recourant le moinspossible à des expropriations. Aussi ils empruntentdes terrains du domaine public, principalement les boiset forêts. Ce qui constitue un avantage, toujours dansle contexte de l’époque, d’offrir des voiesautoroutières "paysagères" permettant auxautomobilistes de circuler dans les plus beaux sitesde la région parisienne et de découvrir les grandsdomaines nationaux de Versailles, Marly, Saint-Germain.

Ce projet d’aménagement en traçant les voies rapides

à travers des parcs boisés, s’inspire du modèleaméricain des « park-ways » pour concentrer lacirculation sur ces axes et libérer d’une circulationintense les espaces récréatifs proches de Paris.Les nouvelles voies seraient aussi l’occasion detransformer le paysage par la plantation continue d’unrideau d’arbres de chaque côté qui aurait aussi commeobjectif de cacher la misère architecturale et socialede la banlieue. « Les abords de ces voies devront être traités demanière à réaliser pour les touristes ou lesétrangers, une sorte de « paysage routier » quidissimulera à leurs yeux les quartiers sidésordonnés qu’ils doivent traverser [...] lamalheureuse banlieue parisienne à laquelle 20années d’extension irraisonnée ont imprimé desmarques indélébiles qu’il faudra, avec le temps,s’efforcer d’atténuer ».

ZoningLe développement des lotissements pavillonnaires estperçu sous le double aspect de l’esthétisme et dessurcoûts que ces extensions misérables font peseraux budgets des collectivités : « La dispersion deslotissements au hasard des spéculations, depuisla guerre, est une lourde charge qui grèverapendant très longtemps les finances desmunicipalités de la région parisienne. »Des modestes restrictions au droit de lotir sonténoncées : « il importe que chaque communedélimite les parties de son territoire qu’elle jugesusceptibles d’être complètement urbanisées àl’aide des ressources dont elle pourra disposer... »

Le programme des servitudes de chaque plancommunal prévoit des quartiers d’industries etorganise une zone de transition, sorte de quartiermixte, entre ces quartiers et les quartiers d’habitationoù ne seraient tolérées que les industries susceptiblesde ne causer aucune gêne.

Par certaines de ses préconisations, ce plan renforcele déséquilibre sociologique entre l’ouest et le nord-est de l’agglomération :« Certains quartiers industriels existants sontparticulièrement mal placés par rapport àl’agglomération parisienne [...] l’aménagement dela rive gauche de la Seine permettraitvraisemblablement une transformationprogressive mais assurée de toute la région d’Issy-les-Moulineaux et de Meudon, dont les fuméessont très gênantes pour les quartiers de Passy etd’Auteuil ; en outre, qu’elles salissent le ciel d’undes plus beaux paysages de la banlieue parisiennevue de Meudon ou de Bellevue… »

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Projet de 1934 : voie triomphale à l’ouest (documentation DREIF)

Projet de 1934 : autoroute de l’est (documentation DREIF)

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Projet de 1934 : voie triomphale à l’ouest (documentation DREIF)

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« Le plan d’aménagement prévoit, pourl’installation de nouvelles usines et pourl’évacuation de celles trop gênantes par leursodeurs et dangereuses par leur voisinage, unezone spéciale rejetée au nord-est del’agglomération ».

Des règles de densité des constructions sont proposéesavec comme objectif « un desserrement del’agglomération centrale constituée par labanlieue immédiate de Paris ».« La limitation de la surface agglomérée dechacune des communes et la limitation du volumedes constructions permettra de remédier àl’éparpillement des éléments formant la régionparisienne et, en même temps, d’en assurer ledéveloppement méthodique ».Le règlement de construction « tend à éviter, dansl’intérêt de l’hygiène, la hauteur ou l’entassementexagéré des habitations ». Dans la banlieue immé-diate, les immeubles doivent y être moins élevés qu’àParis et les cours plus larges. Dans les localités for-mant la banlieue moyenne les constructions sont net-tement moins élevées pour réaliser des « habitationssaines et agréables à habiter ». Enfin, la banlieuepériphérique doit garder en partie son caractère ru-ral.

Espaces libres et protection des sitesLe plan prévoit la création d’espaces libres nouveauxdestinés à des promenades publiques, à des terrainsde jeux ou l’implantation de services publics.La protection des espaces boisés existants et des

principaux sites remarquables de la région estaffirmée (Versailles, Saint-Germain, Meudon, Marly,Sceaux... )

Certains y voient une volonté de desserrer la« ceinture rouge » qui entoure Paris, d’autres, unevolonté de rationaliser les longs déplacements avecces autoroutes dont le plan décrit d’une façon trèsdétaillée leurs tracés prévisionnels. D’autresreprochent à la simple lecture du document d’avoiroublié les transports en commun. Il convientcependant de rappeler que les projets de transportsen commun ont été définis quelques annéesauparavant par le conseil général de la Seine.

La consultationCe projet régional est remis au Gouvernement en 1934et soumis à enquête publique le 2 août 1935 dans les657 communes intéressées.Le 16 décembre 19353 le préfet de la Seine, AchilleVilley, porte à la connaissance du conseil général dela Seine les résultats de l’enquête à laquelle le projetd’aménagement a donné lieu dans son département :

- 8 communes sont favorables sans réserve- 35 communes sont favorables avec réserves oupour partie- 15 communes ne formulent pas nettement un avisfavorable, mais demandent des modifications surcertains points, « ce qui paraît impliquer uneadhésion de principe à l’ensemble du projet »- 23 communes émettent un avis défavorablecomme celui d’Alfortville (ci dessous).

3 Préfecture de la Seine, Mémoire de M. Le préfet de la Seine au conseil général, 1935, archives DREIF 1934 W2.

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La structure générale du réseau routier projeté n’estpas critiquée.La traversée du bois de Vincennes et lefranchissement de la Marne par l’autoroute de l’Estsuscitent des protestations des communes de Saint-Maurice, de Nogent-sur-Marne contre le projet enviaduc sur la Marne qui altérerait profondément lesite.La Commission des monuments naturels et des sitesdemande que « les bois de Boulogne et le bois deVincennes doivent être mis hors d’axe et laissés àl’écart des systèmes de pénétration dans Paris [...]que d’une façon générale les voies de grandecirculation devraient être conçues de manière àcontourner les massifs forestiers et à ne pas lestraverser ».

La Commission d’aménagement et d’extension dudépartement de la Seine est du même avis en ce quiconcerne la traversée du bois de Vincennes etsouligne « que les cinq voies réservées nouvellesvont amener aux boulevards militaires des apportsconsidérables de véhicules automobiles ».

La création des « zones non affectées » provoquede nombreuses observations et les critiques sontnombreuses sur le règlement de construction « quiportent interdiction pratique aux propriétaires depetits terrains d’y élever leur foyer » (Alfortville,Colombes, Epinay-sur-Seine, Ivry-sur-Seine,Nanterre, Noisy-le-Sec, Pavillons-sous-Bois...).

L’aspect financier de l’exécution du projet soulèvede très nombreuses remarques de la part descommunes, inquiétudes que le préfet de la Seinesignale dans son mémoire :« Les communes de banlieue ont, en grandnombre, exprimé leur inquiétude au sujet des fraisqu’entraînera l’exécution du projetd’aménagement de la région parisienne ».

En conclusion, si globalement les avis sont favorablesà la réalisation de ce plan d’aménagement, le préfetde la Seine, cite le sénateur maire de Pantin, M.Auray, pour dire « que les municipalités étaientprêtes à apporter à l’œuvre entreprise lacollaboration la plus confiante, mais à lacondition que l’autorité supérieure ne considérâtpas comme négligeables les avis qu’elles ont étésollicitées de donner. Si ces avis contiennent desréserves, que celles-ci soient examinées

soigneusement, dans les conférences où toutes lesadministrations compétentes auront place ».Suite à cette consultation et aux demandes incessantesdes communes pour apporter des modifications, lamise au point des plans de détails, véritables plansd’occupation des sols qui accompagnent le planrégional s’enlise pendant près de trois ans. LeGouvernement est amené à prendre des mesuresréglementaires pour mettre fin à cette situation.

Approbation du plan en 1939Dans son rapport préliminaire en date du 13 juin 1939,au président de la République, le président du conseil,ministre de la défense nationale et de la guerre,Edouard Daladier et le ministre des finances PaulReynaud précisent l’urgence d’approuver le pland’aménagement de la région parisienne :« Il a donné lieu à des observations qui ont motivédes modifications. Mais, comme l’a rappelé unavis de la section de l’intérieur du conseil d’Etaten date du 26 juillet 1938, lorsque desmodifications substantielles ont été apportées auprojet postérieurement à l’enquête, ledit projet nepeut être approuvé et déclaré d’utilité publiquesans une nouvelle enquête. Or, on évalue à deuxcents environ, le nombre des communes danslesquelles les modifications intervenues peuventêtre considérées comme substantielles. On setrouve ainsi conduit à procéder, dans un nombreconsidérable de communes, à la formalité longueet dispendieuse d’une enquête, mais si, comme ilest à prévoir, de nouvelles observations se fontjour au cours de l’enquête, la nécessité de donnersatisfaction à celles qui seraient reconnuesjustifiées peut conduire à des modifications elles-même substantielles, et imposant une troisièmeenquête. Rien ne permet de prévoir la fin d’uneprocédure qui peut renaître indéfiniment de sescendres.L’approbation du plan d’aménagement de larégion parisienne est pourtant, etindépendamment du point de vue de l’urbanismepur, une nécessité d’ordre économique etnational »4.

Le plan Prost est approuvé par décret le 22 juin 1939 ;il comprend une carte générale d’aménagement (en6 feuilles) à l’échelle du 1/50 000e, 192 feuilles àl’échelle du 1/10 000e et 27 feuilles à l’échelle du 1/20 000e.

4 Rapport du Président du conseil, Edouard Daladier au Président de la République en date du 13 juin 1939 introduisant le décret du22 juin 1939.

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détail de la feuille 3 du plan de 1939 : autoroute de l’Ouest,Voie Triomphale, rocade autour de Paris (archives DREIF)

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carte générale du plan d’aménagement approuvé en 1939 validé en 1941 (archives DREIF)

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Cette approbation est confirmée par la loi validée du28 août 1941 qui, en même temps, étend les limitesde la région parisienne à la totalité des départementsde Seine-et-Oise et de Seine-et-Marne.

Le projet de 1939 est un document opposable auxtiers puisqu’approuvé après enquête dans toutes lescommunes. Il a fait l’objet de deux modificatifs :

- le premier concernant l’autoroute du Sud et sesabords, approuvé par décret du 19 décembre 1962,- le second concernant le secteur de la Défenseapprouvé par décret du 20 octobre 1956.

Ses dispositions sont restées en vigueur jusqu’au 1erjanvier 1976 dans les communes où d’autresdocuments plus récents n’ont pas été élaborés.

Première réalisation, l’autoroutede l’Ouest

En 1934, le ministre du travail Adrien ThéodoreMarquet lance un des rares programmes de grandstravaux pour lutter contre le chômage lié à la criseéconomique dit « d’outillage national ». Dans cecadre est décidée entre autres la construction del’autoroute de l’Ouest en 1935.

Les travaux démarrent avant la Guerre pour une miseen circulation prévue pour la fin 1940. Le 1er

septembre 1939, le gros œuvre du tunnel de Saint-Cloud est à peu près terminé ainsi que lesterrassements et ouvrages d’art du tronc communde la branche nord du triangle de Rocquencourt, surlesquels les chaussées en béton sont en cours deconstruction. L’infrastructure de la branche sud (A12)est également bien avancée. Durant les mois d’hiver1939 – 1940, les travaux continuent difficilement dufait de la mobilisation et sont stoppés en juin 1940.

Quelques mois plus tard, ils reprennent dans le cadred’un autre programme de grands travaux de luttecontre le chômage pour s’arrêter une nouvelle foisdans le courant de l’année 1941 à cause de la pénuriede matériaux et de l’interdiction imposée par lesautorités d’occupation. Les chaussées de la branchenord et du tronc commun sont partiellement exécutées(à l’exception d’une des deux chaussées sur le tronçonde 3,5 km entre Vaucresson et Rocquencourt) etmises en service le 4 octobre 1941 avec un débouchéprovisoire sur la RN185 de Versailles à Saint-Cloudcourt-circuitant le tunnel de Saint-Cloud. Celui ci,entièrement terminé, à l’exception des installationsde ventilation, est réquisitionné par la Kriegsmarinequi l’aménage en dépôt de torpilles.

entrée du tunnel de Saint-Cloud côté Paris début des années 1970,avant le doublement de l’ouvrage (photothèque DREIF)

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Durant l’occupation, un système de commandementterritorial allemand, plus ou moins calqué sur lesystème administratif français est mis en place enplus des unités militaires proprement dites. Allemandset Parisiens relèvent de l’autorité du chef de laKommandantur de Paris, qui couvre le territoire du« Groß Paris » (Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne)5.

La Constitution républicaine et les assembléesparlementaires étant placées en congé illimité, l’Etatcontinue de fonctionner sur la base d’aspirationsantiparlementaristes. « Les bureaux del’administration en profitèrent pour faire avaliserdes textes qu’ils auraient été difficiles de soumettreà la procédure parlementaire antérieure [...] Lafacilité avec laquelle se faisait la loi contribua àaccroître une tendance à légiférer »6.

Un certain nombre de ces textes concerne desréformes touchant au fonctionnement interne del’administration comme la création de préfetsrégionaux.

Des textes réglementaires relatifs à l’aménagementvont être pris dont certains concernent directementla région parisienne : la loi du 2 février 1941 supprimele comité supérieur de l’aménagement et del’organisation générale de la région parisienne et leremplace par un commissariat aux travaux de la régionparisienne.

La loi du 28 août 1941 confirme l’approbation du plande 1934 et donne une nouvelle définition de la régionparisienne qui comprend les départements de la Seine,de la Seine-et-Oise, de la Seine-et-Marne et 5 cantonsdu département de l’Oise.

Loi du 15 juin 1943Jusqu’à la deuxième guerre mondiale, l’urbanismeétait supervisé par le ministère de l’intérieur dans lecadre de la tutelle sur les communes.

La loi de 1943 est la première grande loi qui organisela gestion de l’urbanisme d’une manière cohérenteen France et donne à l’Etat la maîtrise de l’urbanismeen imposant une réforme en trois grands volets : lacréation d’une administration spécifique, la refontedes projets d’aménagement et le renforcement dessujétions d’urbanisme.Elle codifie et complète les textes antérieurs sur lesplans d’aménagement et crée les services d’Etat del’urbanisme.Elle institue auprès du délégué général à l’équipementnational7 un comité consultatif, le comitéd’aménagement de la région parisienne (CARP) etun service technique : le service d’aménagement dela région parisienne (SARP).

La délégation générale à l’équipement national(DGEN) est chargée d’élaborer une politique géné-rale de l’urbanisme et de la construction immobilière.

Une nouvelle région parisienneD’importants textes réglementaires dans le

domaine de l’urbanisme entre 1941 et 1944

5 MARTENS, Stephan, La France sous l’occupation allemande, 1940–1944 DHI PARIS Deutches Historitches Institut Paris ;PAXTON, Robert O., La France de Vichy, Le Seuil « Points », 1997 ;AZEMA, Jean-Pierre, De Munich à la Libération, Le Seuil « Points », 1979.6 BARUCH, Marc Olivier, Servir l’Etat français L’administration en France de 1940 à 1944 , éd. Fayard, 1997.7 COUZON, Isabelle, Espaces savants et divisions administratives dans l’invention et la mise en place de la politique d’aménagementdu territoire en France (1920-1960), thèse de doctorat préparée à l’EHESS (Ecole des hautes études en sciences sociales), Cybergéo.La DGEN regroupe le commissariat à la reconstruction immobilière (où se trouvent des Ingénieurs des Ponts et Chaussées chargés dela reconstruction) et les architectes urbanistes du ministère de l’intérieur en postes dans les préfectures pour élaborer les plansd’urbanisme des zones sinistrées.

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La réorganisation des services de l’Etat s’accompa-gne d’une réorganisation de la gestion des projetsd’aménagement.

La loi donne au délégué général à l’équipement na-tional la maîtrise des projets d’aménagement :

- projets intercommunaux établis dans le cadre de«groupements d’urbanisme» qui regroupent descommunes liées par un « intérêt commun ». Cesgroupements sont constitués à l’initiative des mairesou du délégué général.- les projets communaux obligatoirement établis dansles communes de plus de 10 000 habitants...

La loi renforce les obligations imposées aux cons-tructeurs. Le principe de la non indemnisation desservitudes d’urbanisme est posé, sauf si ces derniè-res entraînent une modification de l’état antérieur deslieux déterminant un dommage direct, matériel et

certain (principe encore aujourd’hui en vigueur et quiconstitue l’un des piliers du droit de l’urbanisme).Dans le même temps, la législation sur les lotisse-ments est entièrement refondue et le permis de cons-truire est généralisé et unifié. Il est délivré par le pré-fet au nom de l’Etat.

Après la libération de Paris, le décret du 16 novembre1944 créé le ministère de la reconstruction et del’urbanisme (MRU) qui regroupe, sous la directionde Raoul Dautry8, les services de la délégationgénérale à l’équipement national et ceux ducommissariat à la reconstruction immobilière etintègre le CARP et le SARP au ministère de lareconstruction et de l’urbanisme.

La Ville de Paris et le Département de la Seine, privésd’assemblées élues pendant l’occupation, retrouventleurs attributions et quelques élargissements mineursde leurs pouvoirs par une ordonnance du 13 avril 1945.

8 Ministre de la reconstruction et de l’urbanisme du 16 novembre 1944 au 20 janvier 1946, appelé par le général de Gaulle dans ses3e et 4e gouvernements provisoires.

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Les dix années d’après-guerre sont consacrées à lareconstitution des infrastructures et à lareconstruction. L’idée du Grand Paris comme celuides années 1930 ne sera plus évoquée avantlongtemps, l’expression a disparu du discours despolitiques et des techniciens, peut-être rappelle-t-elletrop celui du « Groß Paris » de l’occupation ?

Dans la région parisienne, 27 000 logements et 300usines ont été détruits par les bombardements commeà Saint-Ouen ou à Boulogne-Billancourt. Au débutdes années 1950, le ministère de la reconstructiond’Eugène Claudius-Petit a pour mission d’organiserla reconstruction des villes et des quartiers sinistrés.

En 1951, moins de 10 000 logements sont construitsdans l’agglomération parisienne. Le parc immobilierdu centre de Paris n’a pratiquement pas été renouvelédepuis 1920 et la plupart des logements manque deconfort.

La croissance démographique arrêtée depuis 1931 arepris et de 1946 à 1954 l’agglomération gagne600 000 habitants (alors que la population de la Francetoute entière augmente de 1 million). De plus lenombre de ménages s’est accru plus vite encore quela population. Une terrible crise du logement sévitavec tout son cortège de conséquences ; entassement,spéculation et escroqueries, multiplication des conflits,drames des sans-logis ou des mal-logés. Cet affluxde population « a de néfastes répercussions pourParis même, pour la province et pour l’ensemblede l’économie nationale »9.

Décentraliser la région parisiennevers la province

Pour résoudre cette crise en région parisienne, lapolitique des gouvernements français vise àdécentraliser une part d’activités en province pourne plus attirer de population nouvelle. Cettepréoccupation d’un aménagement tendant à limiterla croissance dictera les grands principes

d’aménagement des futurs plans d’urbanisme de larégion parisienne : révision du PARP en 1956, pland’aménagement et d’organisation général de la régionparisienne de 1960, et même du schéma directeurd’aménagement et d’urbanisme de Paris de 1965.

L’idée de décentraliser les industries de la régionparisienne est antérieure à 1940 puisque déjà en 1938,l’administrateur des usines Renault établissait un pro-jet de décentralisation de la région parisienne versLe Mans et Saint-Jean-de-Maurienne.Durant la guerre, des cercles de réflexion envisagentla décentralisation industrielle dans le cadre de ladéfense stratégique du pays, poussée par lesbombardements des usines de la région parisienne.Cette décentralisation doit s’effectuer dans un cadrenational pour étudier la localisation des industries, leurrépartition sur le territoire, la structure des villes, leproblème de l’habitat ouvrier et l’interpénétration dumonde ouvrier et du monde rural, prônant la créationde cités satellites permettant aux ouvriers d’être encontact avec la vie rurale et d’échapper àl’entassement et à la promiscuité des villes10.

Le projet de « villes satellites » est étudié par ladélégation générale à l’équipement national (DGEN)suite à la loi du 6 avril 1941 relative à l’équipementnational qui établit un « plan d’équipement national ».La DGEN regroupe le commissariat à lareconstruction immobilière (dans lequel sont présentsdes ingénieurs des Ponts et Chaussées chargés de lareconstruction) et les architectes urbanistes duministère de l’intérieur en poste dans les préfecturespour élaborer les plans d’urbanisme des zonessinistrées.A la demande de la DGEN, un rapport est rédigé enjanvier 1943 concernant « la consultation sur leproblème de la décentralisation industrielle et ladécongestion urbaine ».

A la Libération, des fonctionnaires de la DGEN seretrouvent au ministère de la reconstruction et del’urbanisme (MRU) au sein duquel Jean FrançoisGravier chargé de mission publie en 1947 « Paris etle désert français », ouvrage qui marquera

La région Parisienneentre 1945 - 1956

9 Allocution du ministre pour l’ouverture de la session de la commission de construction au commissariat général du plan, 1955, A. N.771 119/05 citée par LEGOULLON (Gwenaëlle) : Regard sur la politique du logement dans la France des années 1950-1960 Centred’histoire sociale université Paris 1.10 COUZON, op.cit 7 p.59.

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profondément les futures politiques d’aménagement.La planification territoriale française et la planificationéconomique s’efforcent de répartir au mieux lesressources, les moyens matériels et financiers du payset les populations. L’effort du pays dans le domainede la construction se porte vers la reconstruction desvilles sinistrées, dans une période de pénurie dematériaux et de difficultés de transport.

« Le premier plan de modernisation etd’équipement qui fixe les orientations et choixbudgétaires pour l’ensemble des pouvoirs publicsfrançais après-guerre est élaboré sous la directionde Jean Monnet pour les années 1947-1951. Ildonne la priorité aux industries lourdes et nonau logement, conformément aux obligations quiconditionnent l’obtention de subventionsaméricaines dans le cadre du plan Marshall. LeMRU doit donc appliquer la politique décidée parle commissariat général au plan, qui est composéde diverses commissions, dont l’une est consacréeà la Construction. Cette commission est elle-mêmedivisée en groupes de travail : cités-satellite,matériaux de construction, objectifs (nombre delogements à construire par an, financement, maind’œuvre, industries annexes au secteur dubâtiment »11.

La réorganisation du territoire français, « destinée àsauver Paris de l’asphyxie totale qui la menacene constitue qu’une étape de l’énorme tâche àaccomplir ». Mais l’ensemble des dispositions nedonne pas les résultats attendus. Le rythme des cons-tructions industrielles dans la région parisienne resteexcessif car elle intéresse en particulier les indus-tries en expansion. En 1954, les industries électroni-ques y ont 81,5% de leur effectif, la construction auto-mobile 70%, les industries pharmaceutiques 62%…

Un texte d’importance capitale daté du 5 janvier 1955est pris en application de la loi sur les pouvoirs spéciauxprescrivant que dans la région parisienne et dansd’autres zones congestionnées, l’autorisation deconstruire des bâtiments industriels d’une surfacesupérieure à 1 000 m² est subordonnée à un agrémentdu ministre du logement et de la reconstruction, aprèsavis d’une commission interministérielle. Quelquesannées plus tard, la moitié des opérations dedécentralisation se sont effectuées dans un rayoncompris entre 70 et 250 km autour de Paris. Cesopérations concernent des établissements parisiensqui souhaitent s’étendre, se regrouper ou s’installersur un site plus adapté. Mais le rythme de construction

industrielle en région parisienne est supérieur à lamoyenne française.

Desserrement de l’industrievers la périphérie

Les usines Renault sont nationalisées en 1945 pourdevenir la régie nationale des usines Renault(RNUR) dirigée par Pierre Lefaucheux. La questionse pose du maintien du site de Billancourtpratiquement détruit par les bombardements. LeGouvernement est favorable à la décentralisation,mais la France a des besoins industriels immédiats.Billancourt est donc reconstruit. Cependant toutesles extensions futures se font sur d’autres sites.Une nouvelle usine est construite à Flins dans la valléede la Seine en 1952, à quelques kilomètres des usinesFord de Poissy donnant ainsi naissance à un pôled’activités secondaires de la région parisienne appeléà se développer également dans le domaine del’énergie avec la mise en service en 1953 du premierpipe-line d’Europe à produits finis entre le Havre etla région parisienne.

Origine d’un pôle scientifique à Saclay et OrsayA la Libération, le Général de Gaulle veut doter laFrance d’un outil de recherche sur l’énergie atomiquepour garantir l’indépendance énergétique et militairedu pays. L’ordonnance du 18 octobre 1945 crée lecommissariat à l’énergie atomique (CEA) dirigé parFrédéric Joliot-Curie, commissaire scientifique etRaoul Dautry, chargé de l’administration générale.Le CEA est hébergé dans les locaux du fort deChâtillon où sera mise au point la première pileatomique expérimentale française en 1948.L’équipe du CEA rêve d’un campus à l’américaineni trop près (le lieu doit être isolé pour des raisons desécurité), ni trop loin de l’agglomération parisienneoù est concentrée la matière grise. « Le choix d’unemplacement à proximité de la ligne de Sceauxs’imposait, pour des raisons de commodités detransport depuis Paris, où de nombreuxscientifiques avaient des activités, entre autred’enseignement »12 et proche d’un lieu queconnaissent bien les Joliot-Curie.

Le 11 décembre 1946 est publié l’arrêté déclarantd’utilité publique l’acquisition de terrains sur le plateaude Saclay pour y installer les services industriels etscientifiques du CEA. Mais la construction d’une «cité atomique », quelques années après les ravages

11 LEGOULLON, Gwenaëlle, op.cit 9 p.61.12 LEFEBVRE, Véronique, 50 ans de recherche au CEA de Saclay, éd. le Cherche Midi, 2002.

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provoqués par les bombes atomiques sur Hiroshimaet Nagasaki ne manque pas d’inquiéter les habitantsdu secteur. La perte de terres à blé dans une périodede rationnement et de pénurie de produits alimentairesde base est aussi mal vécue. Pour construire cetemple de la science, Raoul Dautry et Frédéric JoliotCurie font appel à Auguste Perret, l’homme de lareconstruction de la ville du Havre12.

En 1946 également, le centre d’essais des propulseurs(CEPr) relevant de la délégation générale pourl’armement (DGA) s’installe sur 210 ha du plateaude Saclay. En 1954, les laboratoires de physiquenucléaire de la Sorbonne s’implantent dans un parcde 160 ha acquis à Orsay par le ministère del’éducation nationale.

La crise du logement des années 1950De 1914 à 1948, les loyers parisiens ont été multipliéspar 11 et le coût de la construction par 122. En 1950,les loyers parisiens sont bloqués depuis la loi du 3août 1914 périodiquement reconduite et amendée. Laloi de 1948 est imaginée pour organiser la libéralisationprogressive des loyers et pourtant des dizainesd’années plus tard, elle a permis une modération deshausses des loyers.La construction de logements étant pratiquementarrêtée pendant 15 ans, la population des zones nonsinistrées doit s’entasser dans des logements anciens

dépourvus de confort. Les familles doivent cohabiterou trouver un logement comme elles peuvent. « En1949, 190 000 Parisiens vivent en garni, ils sontà nouveau 300 000 en 1954 ! Parmi eux, 41%d’ouvriers, 15,5% d’employés, mais aussi 13,7%de cadres et professions libérales qui ne trouventpas à se loger. Tous s’entassent dans un secteurrétréci. On va finir par voir naître les bidonvilleset l’autoconstruction ! De plus, les meublés, quijusque-là ne se distinguaient pas physiquement,vont se dégrader, alors même que le parc delogements et l’hôtellerie de tourisme semodernisent. Il y a un décrochage. Et c’est à cemoment-là que l’arrivée de familles entières dansces espaces réduits est de plus en plus visible »13.

Le point culminant de la crise du logement est atteintdurant l’hiver 1954 – 1955 lorsque les températurestrès rudes mettent en lumière les conditions difficilesdes plus démunis. L’abbé Pierre lance un cri d’alertequi sera déterminant pour faire agir le Gouvernementen toute urgence, notamment en faveur de tous cesexclus de la politique urbaine qui tentent de survivredans des bidonvilles situés aux portes de la capitale14.

La construction de logements de première nécessitépour les plus démunis est entreprise dès 1954 parl’association Emmaüs. Mais la réponse à la crise dulogement est la construction massive de grands en-sembles qui va être entreprise.

13 WALTER, Emanuelle, Paris obs Nº325_2218, semaine du jeudi 10 mai 2007.14 DEWEVER, Jean, réalisateur des documentaires La crise du logement (1956) et Des logis et des hommes (1958) qui dénoncent avecvirulence des conditions de vie déplorables et la crise du logement.

bidonville de la Courneuve (photothèque DREIF)

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Les transports

Les années 1945 et 1946 marquent l’apogée du traficdu métro mais la modernisation et le prolongementde lignes de transport urbain connaissent une périoded’immobilisme de près de vingt ans. Seuls les travauxengagés avant guerre se terminent comme leprolongements de la ligne 7 ouvert au public le 1ermai 1946 et celui de la ligne 13 vers le CarrefourPleyel achevé début 1950. Les crédits alloués à lamodernisation des transports en communs’amenuisent d’année en année.

Les transports de la région parisienne sont réorgani-sés par la loi du 21 mars 1948 qui crée, à partir du1er janvier 1949, la régie autonome des transportsparisiens (RATP) et l’office régional des transportsparisiens (ORTP). Le décret du 14 novembre 1949fixe l’organisation des transports de voyageurs.En 1959 le syndicat des transports parisiens (STP)se substitue à l’office régional des transports pari-siens. Le STP, établissement public, constitué del’Etat, de la Ville de Paris des départements de laSeine, de la Seine-et-Oise et de la Seine-et-Marne,est responsable de l’organisation, de la coordinationtechnique et tarifaire des transports en commun devoyageurs dans la région dite des transports pari-siens. Il approuve les projets d’investissement et fixeles tarifs.

15 Commissaire à la construction et à l’urbanisme pour la région parisienne avec la collaboration du SARP, de la préfecture de la Seine,des directions départementales du secrétariat d’Etat à la reconstruction et au logement de la Seine, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, et de MM. les architectes d’opération, Construction et urbanisme dans la région parisienne, annuaire, septembre 1957.16 FOURCAUT, Annie, Paris/Banlieues conflits et solidarités, éd. Créathis, 2007, témoignage de Pierre Sudreau p. 288.17 décret n°55-581 du 20 mai 1955 instituant un commissaire à la construction et à l’urbanisme pour la région parisienne.18 FOURCAUT, op.cit.15.

Organisation et planification

En 1948, le comité d’aménagement de la régionparisienne signale l’urgence du problème del’aménagement de l’agglomération parisienne. « Ilfaut également, et parallèlement, remettre del’ordre dans la région parisienne en supprimantles banlieues lépreuses et en améliorantl’équipement de l’immense métropole dont ledéveloppement s’est effectué sans ordre, sansdiscipline, dans des conditions de dispersion etd’anarchie indignes de la physionomie d’unegrande cité. Ce développement de l’urbanisationa donné naissance à une couronne de faubourgsinorganisés et de cités dortoirs, où la vie localeest pratiquement inexistante.Pour redonner une structure organique à l’ag-glomération parisienne, il convient de prévoird’urgence la formation d’un certain nombre depôles attractifs, bien répartis autour de Paris,grâce auxquels la vie locale pourra renaître »15.

Pour tenter de coordonner l’action des services del’Etat, un poste nouveau est créé par le décret du 20mai 1955 : celui de commissaire à la construction età l’urbanisme pour la région parisienne. « Cettecréation s’explique par la peur que les hommesde la IVe République avait de l’abbé Pierre et qu’ilfallait donner l’impression que l’on faisaitquelque chose face à la crise du logement »16.Le décret précise dans ses motifs que « ledéveloppement de la construction se heurteactuellement, à Paris et dans sa banlieue, à desdifficultés qui proviennent essentiellement d’unmanque de coordination à l’échelon del’agglomération parisienne »17. Le conseilmunicipal de Paris s’étonne et s’indigne de cettedangereuse innovation 18.

C’est dans ce contexte que le plan d’aménagementde la région parisienne est remis en chantier.

bus de banlieue dans les années 1950 (photothèque DREIF)

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L’élaboration de ce document relève du travail desfonctionnaires du ministère de la reconstruction et dulogement dont ceux du SARP qui est mis la dispositionde Pierre Sudreau, nommé commissaire à laconstruction et à l’urbanisme par le décret du 21 juin1955.Le décret du 5 juillet 1958 place le SARP sousl’autorité du commissaire à la construction et àl’urbanisme.Le décret du 9 mars 1959 fixe les pouvoirs de cecommissaire et confirme que le SARP est placé sousson autorité L’établissement des plans d’urbanismede la région parisienne est prescrit.

L’avenir de Paris tient dans les trois lignes directri-ces du plan d’aménagement de la région parisienne :

- décentraliser l’agglomération parisienne vers laprovince,- décongestionner Paris vers sa banlieue,- régénérer la banlieue par les grands ensembles.

Le futur plan devra :- donner un cadre rationnel à l’habitat et à son dé-veloppement en définissant différentes zones d’ur-banisme ;- doter la région parisienne de voies de circulationà la mesure de son trafic ;- moderniser et étendre à toute la région le béné-fice des grands services publics ;- protéger efficacement les sites.

Dédensifier la partie centralede l’agglomération -Rénover les quartiers insalubresComme dans le plan de 1939, il est admis que la po-pulation de la région ne doit pas augmenter. « L’ana-lyse de l’état actuel des différentes zones de larégion parisienne conduit à prévoir dans des pé-rimètres d’agglomération plus réduits qu’au plande 1935 un accroissement de la densité trop fai-

ble de la zone de banlieue... accroissement com-pensé par une diminution de la densité de la zonecentrale »19.La décongestion du centre de Paris par éliminationde tous les modes d’occupation non valorisantsnécessite la rénovation des quartiers insalubres oumal construits. Les maisons de la capitale ont un âgemoyen de 100 ans. « L’entassement de bâtimentsvétustes sur des parcelles trop petites et malconformées, l’implantation anarchique d’activitéscommerciales ou industrielles, le manqued’équipement en établissements sociaux et jardinspublics, l’insuffisance de la voirie et despossibilités de stationnement, contribuent àaccuser le caractère d’usure et de vétusté devastes secteurs de l’agglomération ».Pour Paris on estime que 180 000 personnes habitentdans les îlots insalubres (soit 50 000 logements) et400 000 personnes sont logées dans des immeubleshors d’âge (soit 100 000 logements) . A cela s’ajoutent50 000 autres logements vétustes des départementsde la Seine et de la Seine-et-Oise.Au total environ 1 500 hectares d’îlots dans Paris(voirie non comprise) abritant 967 000 habitants ontété désignés pour une rénovation.

Pour la première fois, le contrôle de la densité deconstruction fait son apparition dans le pland’urbanisme de Paris. Il s’agit explicitementd’empêcher la croissance de population que lesrèglements précédents rendaient possibles.

Pour faciliter le renouvellement progressif dupatrimoine immobilier des quartiers centraux de Paris,les plus denses et les plus vétustes, le PARP révisésouhaite accélérer le départ des établissementsindustriels nuisants en s’appuyant sur l’agrémentpréalable défini par le décret du 5 janvier 1955.Parallèlement, pour encourager la reconquête de labanlieue plusieurs mesures sont prises. D’abord, lepérimètre d’agglomération, définissant les zones oùles constructions seraient autorisées, est de taille pluslimitée que dans le plan Prost. Une zone rurale est

La révision du plan d’aménagementde la région parisienne (PARP) en 1956

19 GIBEL, Pierre, directeur du SARP, présentant le nouveau projet de plan directeur dans « La vie urbaine », avril-juin 1960.

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créée, ayant « pour but essentiel d’éviter quel’accroissement de la population dans les zonespériphériques de la capitale ne se traduise parun étalement en surface, dont les conséquencesseraient néfastes pour la collectivité ».

La législation nationale permet de simplifier lesprocédures de rénovation de ces îlots insalubres. Lespremières destructions commencent en 1955 au cœurde l’îlot 11, l’un des plus misérables de la capitale, lesecteur des Amandiers. Ce n’est que le début devastes opérations d’urbanisme dans Paris où entre1955 et 1960, 15 opérations (40 ha) vont êtreengagées, deux en régie directe par la Ville, deux parla SCIC20 liée par convention, les autres par l’officed’HLM de la Ville. En 1960, 36 ha sont acquis, lerelogement des habitants amorcé, ainsi que lareconstruction des îlots remaniant profondément letissu urbain. « Sur les 1 200 hectares ayant subiune opération de démolition, de construction entre1954 et 1974, près de la moitié (4 050 parcellessur 9 255) furent remembrés »21.

Régénérer la banlieue par desgrands ensembles

Diverses mesures, en premier lieu de financement,font démarrer la construction en 1954. L’industrie dubâtiment s’organise et s’équipe peu à peu pour uneproduction en plus grande série : en 1953, 13 000logements sont terminés en France, 25 000 en 1954,42 000 en 1955 et 80 000 en 1959.

Quelques opérations sont lancées dès la fin de 1947comme la cité de la Plaine à Clamart avec la créationd’un office d’habitations à loyer modéré (HLM).En 1953, Pierre Courant, ministre de la constructionfait voter une loi qui met en place une séried’interventions facilitant la construction de logementstant du point de vue foncier que du point de vue dufinancement et de l’appareil de production. En août1953, un décret crée le 1% patronal. Cette contributionobligatoire des entreprises à l’effort de construction(1 % de la masse des salaires pour les entreprises deplus de 10 salariés) introduit des ressourcessupplémentaires pour la réalisation de logementssociaux.

En décembre de la même année, le gouvernementcrée l’office central interprofessionnel du logement(OCIL) pour assurer la collecte du 1% et la maîtrised’ouvrage de logements. Avant même d’être constituéofficiellement, l’OCIL lance courant 1953 un concourssans site pour sélectionner des équipes de conception/ réalisation (architectes et entreprises) pour 5 000logements. Cinq équipes sont lauréates22. Chacuneconstruira 1 000 logements en plusieurs tranches.

En 1957, une nouvelle politique globale en faveur dulogement est tentée avec la loi cadre du 7 août 1957.Cette loi crée les ZUP (zone à urbaniser en priorité)qui, pour la première fois, associe la création delogements et d’équipements publics nécessaires à ceslogements. Un programme quinquennal deconstruction est mis en place et prévoit de réaliser300 000 logements HLM par an. La politique miseen place favorise très nettement le logement locatif.

L’exigence «moderne» d’industrialiser le bâtiment,énoncée de multiples fois dans les années 1920-1930,va se concrétiser dès le lendemain de la guerre 1939-1945. Des concours lancés par le ministère de lareconstruction et de l’urbanisme visent à réduire lesdélais et les coûts de construction des logements. Lamontée en régime de la construction sera lente alorsque la crise du logement ne cesse d’être constatée.L’augmentation du volume des opérations est unfacteur d’amélioration de la productivité quis’accompagne d’efforts en matière de conceptiontechnique et de planification. L’utilisation de planstypes homologués, suscitée par l’Etat au moyen definancements particuliers permet d’aborder laconstruction répétitive.

(photothèque Ministère de l’Ecologie, duDéveloppement et de l’Aménagement Durables)

20 La société centrale immobilière de la Caisse des dépôts et consignations est la première SEM d’HLM, créée en 1954, dirigée parFrançois Bloch-Lainé. Elle s’est rendue célèbre en édifiant le nouveau Sarcelles.21 BONVALET, Catherine et LEFEBVRE, Monique, Le dépeuplement de Paris de 1968 à 1975. Quelques éléments d’explication –Population, novembre 1983.22 Héaume et Persitz, André Gutton, Boileau et Labourdette, Cazaneuve et Peray, Pottier et Tessier.

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En 1959, une étape est franchie avec la naissancedes marchés triennaux qui permettent de lancer desprogrammes de 80 000 logements par an. Ainsi lacontinuité des équipes et des techniques, facteurd’associations poussées entre architectes, ingénieurset entrepreneurs devient possible. On assiste à unerationalisation optimale du travail et à l’utilisation detechniques de pointe.

« L’essor économique et démographique de notreépoque nous permet et nous oblige à construiredes villes nouvelles. Nous en avons les moyenstechniques. L’échelle de nos réalisations s’esttransformée en 10 ans. Des chantiers de 10 000logements viennent de s’ouvrir. Mais nous nesommes pas seulement en face d’un problèmetechnique. De nouvelles banlieues, des citésdortoirs, des alignements de maisons mortes oude bâtiments sans caractère, toutes ces erreursdes générations précédentes doivent être évitées.Les opérations qui s’engagent serontessentiellement au service de l’homme ».Cet humanisme consiste surtout à un effort pourréaliser des équipements en même temps que deslogements, pour « créer les meilleures conditionspossibles à l’épanouissement d’une vie urbaineheureuse »23.

L’impact médiatique de la crise du logement conduitle commissaire à la construction et à l’urbanisme àproposer une politique d’acquisition et d’équipementde grands ensembles.Les objectifs de cette politique sont de :

- mettre en oeuvre la politique d’urbanisme déci-dée pour la région parisienne, par l’implantation

délibérée en des sites convenablement choisis,d’ensembles d’habitation étudiés sous tous leursaspects ;- mettre à la disposition des constructeurs désignéssuivant une procédure fixée par le secrétariat d’Etatà la reconstruction et au logement, des superficiesde terrains suffisantes pour permettre la réalisationdes programmes de construction et pour éviter ainsila hausse spéculative due au déséquilibre de l’offreet de la demande - réaliser des programmes de construction de loge-ments et des travaux d’aménagement annexes dansles meilleures conditions de productivité ;- aider les communes dans leurs tâches d’équipe-ment ;

- grouper, en vue de les simplifier et de les accélérer,les opérations administratives d’expropriation, d’ap-probation de programmes, d’octroi de subventions oude prêts.

Tandis que les lotissements de l’entre deux-guerress’étaient en général localisés en fonction des gares,en raison du développement des moyens de transportindividuel, les collectifs postérieurs à 1954 occupentles vides du tissu urbain souvent moins éloignés deParis en kilomètres, mais davantage en distance-temps. L’implantation des grands ensembles estdécidée par le secrétariat d’Etat à la reconstructionet au logement sur proposition du commissaire à laconstruction et à l’urbanisme, et après études duservice d’aménagement de la région parisienne. Ilssont répartis en couronne autour de Paris, à faibledistance du centre et à proximité des zones industriellesles plus denses.

23 SUDREAU, Pierre, ministre de la construction, revue Urbanisme n°62/63, 1er trimestre 1959.

Sarcelles va représenter aux yeux de l’opinion, un cas d’espèce où s’affichent les problèmes des aggloméra-tions nouvelles. On va alors parler dans les années 1960 d’une nouvelle maladie de société : la "sarcellite".(photothèque DREIF)

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« Le but n’est pas de créer selon le stylebritannique des villes satellites dans la régionparisienne, mais d’insérer dans la banlieueactuelle des villes nouvelles de 20 à 40 000habitants. Nos urbanistes chercheront la plus pureet la plus moderne expression du génie françaisdans l’alliance de la pierre et des arbres [...] Ainsipar l’implantation délibérée de plusieurs dizainesde milliers de logements, construits avec la qualitéque seule permet la quantité, rationnellementorganisés en grands ensembles, reliés entre euxet aux zones d’activité, aérés par de largesespaces verts, dotés de services communsmodernes et vivants, va véritablement se révélerla création de la ville de notre époque »24.

La DéfenseLe plan d’aménagement de la région parisienne de1939 a fait l’objet d’un modificatif concernant lesecteur de la Défense approuvé par décret du 20octobre 1956 pour « répondre à la nécessité deconstruire de grands ensembles correspondant audéveloppement du tertiaire comme cela se fait dansles grandes cités du monde et créer un noyauurbain résidentiel ».

L’aménagement de ce quartier commence en 1958avec la construction du centre des nouvelles industrieset technologies (CNIT) à l’emplacement desanciennes usines Zodiac.« L’opération dite de la Défense fut l’objet demultiples propositions, concours, projets, visantà marquer une volonté de prolonger vers l’ouestle grand axe de Paris : Louvre, Concorde, Etoile25

repris dans l’avant projet de 1934 d’Henri Prost.Aujourd’hui, l’accord s’est fait sur une réalisationqui marque un premier prolongement versl’extérieur de Paris du mouvement vers l’ouest duquartier des affaires, mouvement qui a atteintl’avenue de la Grande-Armée et se dessine àNeuilly. Mais alors que son développement estpresque purement linéaire jusqu’à présent, ilconnaîtrait dans le quartier de la Défense uneintensité et un étalement très importants »26.

Nouveau plan routier Un nouveau plan pour la révision et l’extension duprojet d’aménagement de la région parisienne de 1939est entrepris en 1951 et soumis au ministère destravaux publics, des transports et du tourisme. Leplan, à l’échelle du 1/100 000e, définit la consistancedu réseau général et le tracé d’ensemble des grandescirculations à créer ou à aménager. Comme le projetde 1939, il prévoit des voies radiales de pénétrationrapide vers Paris, distinctes des routes existantes. Ilcrée de nouvelles rocades et améliore les anciennes.Le tracé de la grande rocade de 1939, par sa positionmême est abandonné dans un souci d’arrêterl’extension en surface de l’agglomération parisienne.Le plan accepté le 23 mai 1951 par le ministère destravaux publics sert de base au plan routier du projetrégional pris en considération le 12 janvier 1956.27

Un ensemble de directives constituant le projetd’aménagement de la région parisienne28 est élaborépar le comité d’aménagement de la région parisienneet le SARP. La révision est prise en considérationpar le ministre de la reconstruction et du logement le12 janvier 1956.

24 SUDREAU, Pierre, Revue Urbanisme Paris et sa région, 1957.25 Un concours avait été ouvert et jugé en 1931 pour l’aménagement de la voie allant de la place de l’Etoile au Rond-point de laDéfense.26 plan d’aménagement et d’organisation général de la région parisienne de 1960 (PADOG) p.32.27 PADOG, annexe A, circulation et stationnement.28 L’ensemble des communes de chacun des départements de la Seine, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, ainsi que les communesdu département de l’Oise appartenant aux cantons de Creil, Neuilly-en Thelle, Pont-Sainte-Maxence, Senlis et Nauteuil-le-Haudouinconstituent un groupement d’urbanisme au sens de l’article 11 du présent code (art 48 du Code de l’Urbanisme et de l’Habitation).

aménagement du secteur de la boucle deMontesson avec la création de parcs

d’exposition permanents et d’un stade olympique(revue Urbanisme 1956, le nouveau plan d’aménagement)

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Après la période des plans de reconstruction, et deetravaux pour la révision du plan d’aménagement dela région parisienne, la réalisation d’un nouveaudocument de synthèse est prescrit par le décret du31 décembre 1958 pour servir de cadre aux différentsplans directeurs d’urbanisme intercommunaux et auxplans d’urbanisme communaux.

L’équipe chargée de la conception de ce plan d’amé-nagement et d’organisation générale de la région pa-risienne (PADOG) est celle qui a procédé aux ex-tensions et aux révisions du PARP en 1950 et en 1956,sous la direction de M. Gibel, chef du SARP et sousla responsabilité du commissaire à la construction,M. Sudreau puis M. Diebolt. Le PADOG est forte-ment inspiré du document de 1956, complété et élargià certaines dispositions. L’horizon de ce plan est li-mité à 10 ans : « le projet de plan, destiné à rem-placer le PARP 29[...] n’a nullement l’ambition dedessiner le Paris de l’an 2000, mais cherche sim-plement à mieux poser certains problèmes, à af-firmer une volonté d’aménagement et d’organi-sation et à définir un cadre d’action pour les pro-chaines années »30.

La réalisation du PADOG s’inscrit dans une politi-que nationale d’aménagement du territoire.« Aujourd’hui, aux problèmes d’aménagementurbain proprement dit s’ajoutent des problèmesd’aménagement du territoire où dominent les ques-tions économiques et sociales, où l’équipementprend une place prépondérante et dont l’impor-tance veut qu’y participent, non seulement Pariset sa région, mais la France entière.En plaçant dans le cadre d’une politique d’amé-nagement de l’ensemble du territoire national lesétudes du nouveau plan d’aménagement et d’or-ganisation de la région parisienne […] le gou-vernement du Général de Gaulle a marqué unenouvelle et importante étape dans l’histoire deParis et sa région »31.

Au 1 janvier 1960, la région parisienne atteint 8,4millions d’habitants dont 7,2 millions dans la zone ag-glomérée continue de Paris définie par l’INSEE. Cettezone agglomérée représente 16% de la populationfrançaise et a augmenté de 800 000 habitants depuis1954. Ce sont principalement les communes de Seine-et-Oise autour du département de la Seine qui ontconnu une forte augmentation de population alors queles 11 arrondissements du centre de Paris enregis-trent une forte baisse qui touche aussi les 18e et 19e

arrondissements, Neuilly-sur-Seine et des cantonsruraux de Seine-et-Marne et Seine-et-Oise.Le rythme d’accroissement annuel de la région pari-sienne est de 160 000 à 180 000 personnes entre 1954et 1960 dont 100 000 personnes proviennent de pro-vince, des départements ou des territoires françaisd’Afrique et de l’étranger.

Les objectifs du PADOG :Les objectifs du plan sont :

- stabiliser le nombre d’habitants,- décentraliser les emplois,- aménager la région parisienne elle-même par uneaction de déconcentration et de décongestion deParis,- loger la population dans les meilleures conditionset, dans ce but, veiller à une meilleure répartitiondes densités de population,- restructurer et organiser la banlieue, sansl’étendre, par une action de rénovation et dereconquête avec la création de pôles d’attraction.« Le noyau central est trop dense et trop lointainde la périphérie de l’agglomération. Il faut à lafois reconquérir et rénover les noyaux anciensde la banlieue et aussi créer des noyauxnouveaux ».

Le PADOG reprend donc globalement les objectifsde ceux du PARP de 1956, guidé par la volonté de

Le plan d’aménagement et d’organisationgénéral de la région

parisienne de 1960 (PADOG)

29 PADOG, p.430 PADOG, p.231 PADOG, introduction p.III.

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décentraliser la région parisienne vers la province,d’accueillir les nouvelles populations dans des grandsensembles en banlieue mais aussi dans les grandesvilles de la région parisienne et les grandes villes dubassin parisien. Le plan définit une zone aggloméréequi ignore les frontières départementales à l’extérieurde laquelle la construction sera limitée et les espacesverts protégés :« L’étendue, la densité, le développementtentaculaire des grandes agglomérationsurbaines, les conditions d’existence qu’ellesimposent, la rapidité de leurs moyens de transport,obligent à concevoir largement et à assurer, toutà la fois, la protection, la mise en valeur,l’aménagement et la création de ce que l’on estconvenu d’appeler les espaces verts parce quecette expression englobe les paysages à l’étatnaturel, les bois, les parcs et les jardins qui,nécessaires au développement harmonieux d’unegrande ville, sont indispensables à la santéphysique et morale de ses habitants »32.

Quatre hypothèses sont évoquées dans le PADOG, àpropos des « noyaux nouveaux » :

- des villes nouvelles le long d’une grande voie,- une extension importante des villes existantes,- des villes nouvelles à 40 ou 50 km de Paris,- des noyaux urbains dans l’agglomération.

L’idée de villes nouvelles est pour la première foisréellement prise en considération dans un documentde planification régionale. Mais le choix se porte fi-nalement sur la dernière de ces hypothèses : « Autantse justifie un desserrement de la partie centralede l’agglomération parisienne, autant un regrou-pement et une densification de la partie périphé-rique de l’agglomération dans ses limites actuel-les s’imposent [...] Vaut-il mieux alors continuer àétendre l’agglomération déjà trop distendue etaggraver encore ses maux ou tenter au contraireun effort de réorganisation dans son sein per-mettant ainsi, quand la « pression logement » di-minuera, une transformation et une régénérationprogressives du tissu urbain trop lâche de la ban-lieue en partant de ces noyaux modernes ? ». Cechoix en faveur du principe de la densification du tissuexistant était déjà pris dans le plan précédent.

Les grands principes d’aménagementLes objectifs du plan se traduisent en 3 grands prin-cipes d’aménagement :- création de quatre centres urbains nouveaux, pla-cés aux quatre points cardinaux : le Bourget au nord,Montesson-la Défense (700 ha) à l’ouest, Vélizy (700ha) au sud ; un à l’est dont la localisation n’est pasprécisée- construction de neuf grands ensembles, relative-ment proches de Paris pour créer des « centres se-condaires » représentant un total de 85 000 logementset 200 hectares de zones d’activités : Massy - An-tony, Créteil, Alfortville - Maisons-Alfort, Vitry, Stains- Saint-Denis - Pierrefitte, Argenteuil, Fontenay-sous-Bois, Aulnay-sous-Bois – Sevran -Tremblay-les-Go-nesse, Bures-Orsay- développement de grandes agglomérations au-delàdes limites de la région parisienne dans des villes si-tuées à 100 km au moins et au plus près des villessituées à deux heures de Paris (Rouen, Amiens,Reims, Troyes, Orléans, Le Mans).

Les transportsDans le domaine des transports ferrés, le PADOGse veut volontariste « des modifications importantessont nécessaires dans la structure du réseau destransports en commun. Si la création de nouveauxnoyaux urbains, principaux ou secondaires, entreprogressivement en application, si l’on veut quecette restructuration soit possible et réussisse, ilest indispensable que le réseau des transportsferrés soit repensé dans l’esprit d’une liaisonrapide entre différents points de la région, et nonpas seulement dans celui des liaisons convergentesvers le cœur de Paris »33.La création d’un réseau express régional figurant déjàdans le PARP de 1956 doit être étudiée d’urgence.Le réseau comprend :

- des transversales nord-sud et est-ouest,- la liaison Versailles – Villeneuve-Saint-Georgespar les Invalides et Orsay,- la desserte du plateau de Villacoublay tant endirection de Versailles que de Paris,- la desserte de la région du Bourget et du Mesnil-Amelot- la desserte de la région est par l’incorporationdans le réseau régional des lignes de l’est et deVincennes au moyen d’une liaison éventuelle àNogent.

31 PADOG, annexe F, espaces verts.32 PADOG p.57.

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PADOG : carte générale

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Le parc automobile de la région parisienne passe de1 040 000 en 1956 à 1 585 000 en 1960.34

Pour faire face à cet accroissement spectaculaire,les auteurs du PADOG estiment que Paris est déjàsaturé. « Malgré les aménagements qui, en toutétat de cause, sont nécessaires mais fort coûteux,il est inéluctable que, dans quelques années, lesbesoins d’une circulation libre dans certainssecteurs ne pourront plus être satisfaits et que l’onest à la veille d’une paralysie partielle plus oumoins étendue [...] Dès maintenant, il importe doncde faire porter un effort maximum surl’amélioration des transports en commun,notamment par la création d’un réseau souterrainexpress régional, dont la rapidité et la fréquencejustifieraient très souvent pour de nombreuxautomobilistes, la non utilisation de leurs voitures,tout au moins dans les quartiers centraux, ce qui,du même coup, apporterait une solution partielleaux délicats problèmes de stationnement. Dans lazone de banlieue, il y a une impérieuse nécessitéà décongestionner le tronçon urbain desprincipales routes nationales par la création denouvelles radiales ou rocades à circulationprivilégiée et rapide de type autoroute ou voieexpress »35.

« Les autoroutes de dégagement de la capitale, larocade périphérique de Paris et la rocadepériphérique de l’agglomération, [l’ARISO(autoroute de rocade interurbaine de Seine-et-Oise],ainsi que certaines liaisons entre ces deux rocades,et une voie de liaison nord-sud à travers,constituent la trame des voies de circulation rapideet à grand gabarit à réaliser dans l’agglomérationparisienne »36.

L’autoroute du Sud dont les travaux ont commencéen 1953 est ouverte à la circulation au printemps 1960entre Paris et le Plessis-Piquet au delà de Corbeil.Le prolongement de cette autoroute jusqu’à la RN7,au nord de Nemours, est déclaré d’utilité publiquepar le décret du 3 octobre 1958. « Ce tracécanalisera une circulation rapide actuellementdispersée sur diverses voies traversant la forêtdomaniale de Fontainebleau, tout en constituantun utile pare-feu »37.

Le PADOG s’articule avec le plan directeur de la

ville de Paris qui le complète et précise les dispositionspour le territoire de la capitale.

En octobre 1959, le conseil municipal de Paris donneson avis sur le plan directeur et, en particulier, sur lesdispositions concernant le réseau de circulation. Leschéma proposé comprend essentiellement deuxrocades à grand débit : rocade périphérique et rocadeintérieure. Celle ci correspond aux voies et boulevardsétablis sur l’ancienne enceinte des FermiersGénéraux, reliées par des radiales prolongeant lesautoroutes de dégagement : l’une en direction de laporte de la Chapelle et de l’autoroute du Nord, l’autrepartant de la gare Maine-Montparnasse en directionde la porte de la Plaine.Le conseil municipal souhaite également qu’unenouvelle liaison nord-sud soit étudiée entre la gare duNord et la place d’Italie (sur l’emprise du canal Saint-Martin).

Le PADOG est interministériel et planifie leséquipements et aménagements dans les domainesconcernant la circulation et le stationnement, lestransports, les établissements scolaires, universitaireset hospitaliers, l’approvisionnement, les espaces verts,l’infrastructure aéronautique, la navigation, l’énergie,les ordures ménagères, les cultures spécialisées, lesgrandes installations sportives et les centresd’exposition, les gisements naturels, l’alimentation eneau, l’assainissement, les cimetières, le domainemilitaire, les postes et télécommunication.« Le plan figure avec précision les opérations quiparaissent devoir être maintenant retenues pouren guider l’action des pouvoirs publics et desparticuliers au cours des prochaines années. […]Il sera précisé par des plans inter-communaux etde détail qui devront être mis au point en 1960 et1961 »38.

Approbation du planLe document n’est pas opposable aux tiers, ce n’estqu’un document d’intention que seules lesadministrations doivent respecter. Il est approuvé pardécret le 6 août 1960.Le PADOG est très rapidement critiqué par certainsprofessionnels pour son manque d’anticipation, pourn’avoir pas vu assez grand et pour avoir accordé tropde dérogations au plan d’origine en dehors dupérimètre d’agglomération.

34 Décomposition du parc des véhicules automobiles dans la Région Parisienne au 1er janvier 1960 d’après l’INSEE bulletin régionalde statistique n°2, 1960.35 PADOG, annexe A : circulation et stationnement.36 PADOG, p.62 et 6337 PADOG, annexe A : circulation et stationnement38 PADOG, p.5

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PADOG : extrait de la carte au 1/50 000 de la zone centrale

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Les dossiers réglementaires soumis à l’avis du comitéd’aménagement de la région parisienne donnent lechiffre de 10 000 dérogations (pour 60 000demandes). D’après le SARP, ce chiffre estrelativement faible par rapport aux 400 000 logementsréalisés en 5 ans et aux 300 à 350 000 logementsprojetés, pour la plupart dans les périmètres des zonesurbaines du PADOG.39

La région parisienne au centredu bassin parisien

L’aménagement de la région parisienne préconisé parle PADOG s’articule avec celui du bassin parisienL’aménagement de cet espace suprarégional, « leplus grand Paris » 40 considéré approximativementdans un cercle de rayon de 200 km autour de Notre-Dame venant non pas se substituer, mais sesuperposer à celui de la région parisienne.41

Le bassin parisien devient le grand bénéficiaire de ladécentralisation industrielle de la région parisienne.Entre la fin de la 2ème guerre mondiale et le 31décembre 1965, il reçoit 40% des opérations et desemplois créés dans le cadre de cette politique, soit800 opérations.C’est l’ouest du bassin qui en profite le plus, enparticulier le premier arc constitué par lesdépartements de l’Eure et l’Eure-et-Loir où lesimplantations sont importantes, diffuses et diversifiées.

Tous les départements du bassin parisien voient croîtreleur population entre 1954 et 1962, principalementdans les villes.42

Plusieurs agglomérations du bassin parisien ont untaux de croissance de leur population supérieur à celuide l’agglomération parisienne (15%) comme parexemple :

- Caen (35%), Orléans (23%), Le Mans (21,8%),Tours (20%), Amiens (17,2%), Rouen (16,4%) pourles villes de plus de 100 000 habitants- Evreux (68%), Dreux (36%) et Chartres (28%)

pour les villes moyennes comprises entre 20 000 et50 000 habitants.

La politique d’aménagement du territoire vise d’unepart à freiner la croissance parisienne en y limitantles créations d’emploi et d’autre part à doter les villesde la couronne du bassin parisien d’un pouvoir derayonnement sur l’ensemble du bassin, plus importantque le seul voisinage des zones rurales ou dudépartement.43

L’exemple d’Orléans est ainsi significatif. Prévue pourêtre desservie par l’aérotrain44 qui mettra la ville à20 minutes de Paris, Orléans, capitale administrative,siège d’académie est en pleine expansion. Sur les700 ha du domaine de la Source sont implantés uncampus universitaire, des laboratoires du CNRS, lebureau de recherches géologiques et minières et leservices des Chèques postaux. La ville satellite de laSource est prévue pour accueillir 35 000 habitants.

Le Mans et Tours accueillent plusieurs compagniesd’assurance qui ont décentralisé leur service degestion.Les grandes villes du bassin parisien s’équipent pouroffrir à leurs habitants des conditions de vie urbainesriches. Caen, Rouen, Amiens, Reims, Orléans, Tours,Le Mans accueillent de nouvelles facultés de droit,lettres, sciences, médecine et pharmacie.

Des grands hôpitaux sont construits ainsi que deséquipements sportifs et culturels de qualité commepar exemple à Rouen où le théâtre se classe au 3ème

rang des théâtres de province.

Pourtant ces centres régionaux qui possèdent unpatrimoine architectural de renommée mondiale(cathédrales, châteaux, ensembles architecturauxremarquables...) ne jouent pas encore totalement leurrôle au regard de l’aménagement du territoire. Si ladécentralisation de l’emploi industriel est bien amorcée,celle de l’emploi tertiaire reste encore timide alorsque ce secteur se développe fortement dans la régionparisienne.

39 GIBEL note à l’attention de M. DELOUVRIER.40 Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la région de Paris de 1965, p.27.41 Revue Urbanisme n°96/97 Le bassin parisien, 4ème trimestre 1966.42 BASTIE, Jean, Le bassin parisien existe-t-il ? in revue Urbanisme n°96/97 Le bassin parisien, 4ème trimestre 1966.43 WEILL, Gérard, Les centres urbains du bassin parisien – Perspectives de développement des activités tertiaires in revue Urbanismen°96/97 Le bassin parisien, 4ème trimestre 1966.44 Les travaux de la voie d’Orléans débutent en janvier 1968. Un tronçon de 18 km est construit pour servir de voie d’essais au coursdesquels l’engin conçu par l’ingénieur Bertin atteint 430 km/h. Alors que l’on imaginait des possibles liaisons entre Cergy-Pontoiseet la Défense, les projets d’aérotrain sont abandonnés en France en 1974.