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D ROIT DE LA CONCURRENCE Dernière sauvegarde : dimanche 6 juin 2010 – Cours complet, non relu Notes du cours de Mme CLAUDEL

Droit européen et français de la concurrence - Cours 2009/2010

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Notes du cru 2010 complètes, mais non relues, incluant le premier rattrapage fourni sur le site de Nanterre. Reste le second, celui de la fin du cours sur les décisions prises par les autorités judiciaires.

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D R O I T D E L A C O N C U R R E N C E Dernière sauvegarde : dimanche 6 juin 2010 – Cours complet, non relu

Notes du cours de Mme CLAUDEL

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · L’entreprise 2

Informations pratiques

� Fond

Ø Ce ne sont que des notes de cours, se voulant retranscrire le cours de la manière plus fidèle possible. A l’impossible nul n’est tenu. Des fautes, coquilles, inexactitudes peuvent exister. Elles ne sauraient engager ni le professeur ni même moi, à la rigueur toi, honorable lecteur, qui aura pris le risque de te reporter sur le travail d’autrui pour combler tes lacunes, peu importe leur origine.

Ø Ce ne sont que des notes de cours, gratuites. Elles ne doivent en aucun cas être vendues, revendues, bref monnayées d’une quelconque façon.

Ø Ce ne sont que des notes de cours, perfectibles. La critique est donc toujours la bienvenue, si tant est qu’elle soit constructive.

� Forme

Ø C’est pour des raisons de compatibilité, et d’affichage uniforme, que le fichier est en PDF.

Ø Par conséquent, et c’est ballo, d’une part, les niveaux de texte (partie, sous-partie, titre et compagnie) ne sont pas utilisables dans la version PDF. Il faudra donc le faire soi-même comme un grand si le besoin s’en ressent. D’autre part, les liens hypertextes ne sont pas disponibles dans la version PDF, et il en est de même pour les notes de bas de page.

� Annotations

Ø Un (x) signifie qu’un morceau manque à l’appel. Un –x–, --x– ou –x-- signifie que le morceau qui manque à l’appel est plus gros, probablement un cours en moins.

Ø Un (≈⋲) signifie que le morceau est à prendre avec des pincettes car éventuellement avarié. C’est pareil lorsque le texte est écrit en rouge.

Ø Un (!) signifie quant à lui une information d’une importance toute particulière, genre actualité, allusion suspecte au partiel…

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

3 C h a p i t r e I · L’entreprise

Introduction

Ø Biblio

à Traité de Droit européen de la concurrence, M. BLASSELLE, LGDJ, en plusieurs volumes, youhou, 2008.

à Politique et pratique du Droit de la concurrence BRAULT, LGDJ Droit des affaires, 2004, et il ne traite que du Droit français.

à L’application en France du Droit des pratiques anticoncurrentielles, LGDJ, 2008, 5 auteurs dont MME CLAUDEL.

à Le nouveau Droit français de la concurrence, Jurismanager, 2009, M. CONDOMINES (études de cas…)

à Droit de la concurrence interne et communautaire, LGDJ, M&M. DECOQ, 2008

à Droit de la concurrence, Dalloz, MMES FRISON-ROCHE et PAYET, 2006.

à Droit des affaires de l’Union Européenne, Litec, 2006

à Droit interne et communautaire de la concurrence, Armand Colin, 2008.

à Droit de la concurrence, Vuibert (≈⋲), MME. NICOLAS-VULLIERME, 2008.

Ø Revues

à Revue des droits de la concurrence, RDLC, trimestriel

à Revue Lamy de la concurrence, RDLC, aussi trimestriel

à Revue contrats/concurrence/consommation, mensuel

à Revue Europe

à Revue trimestrielle de Droit européen

à Revue trimestrielle de Droit commercial, où Cloclo s’occupe de la partie française.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · L’entreprise 4

Section 1 Historique du Droit communautaire de la concurrence Ça commence à l’après-guerre. La volonté est d’intégrer les économies nationales

dans un marché qui a la dimension d’un continent. L’idée était de permettre aux entreprises européennes d’effectuer une croissance qui permettrait de donner un vrai potentiel économique à l’Europe. On entendait donc permettre à ces entreprises de lutter à armes égales contre notamment les entreprises américaines. On a d’abord travaillé sous le cadre du Traité CECA de 1951. Le Traité de Paris s’est intéressé à 4 aspects au Droit de la concurrence. Il interdisait les accords entre entreprises du charbon et de l’acier qui tendraient à restreindre le jeu normal de la concurrence. Ce même traité a également posé l’interdiction des abus de position dominante. Le Traité a entendu aussi réguler les interventions de l’État dans ce secteur, genre les aides publiques. Il fallait réguler les attitudes débauchées des États. Enfin, un principe de contrôle des autorisations des fusions et compagnie a été posé. Ce Traité a ainsi servi de modèle lorsqu’on a voulu déterminer les règles s’appliquant à la concurrence dans le cadre du Traité de Rome de 1957. Le Droit américain reste également une référence. Le Sherman Act du 2 juillet 1880 est ainsi une référence sur les ententes et monopoles. Un peu poussiéreux quand même. Le Traité de Rome a entendu lutter contre les pratiques anticoncurrentielles, les ententes illicites, les cartels, les abus de position dominante. Il y a eu également accord sur la volonté de surveiller et contrôler les monopoles nationaux. Mais on n’a pas voulu tâter les concentrations et fusions, sans doute parce que les États membres n’étaient pas encore prêts à abandonner cette part de leur souveraineté. On s’est encore accordé sur le fait de mettre au cœur du dispositif la Commission européenne, avec pas loin la CJCE et plus tard le tribunal de première instance des Communautés Européennes. De ces textes et leur application par ces autorités a résulté une véritable politique générale. Cette politique s’est intercalée avec les autres politiques communautaires. Le Droit de la concurrence a ainsi conçu comme un mode de construction du Marché intérieur, avec toujours objectif de décloisonner les marchés nationaux.

Peu à peu, ce Droit de la concurrence a été intégré. En 1989, quand même, avec le Règlement 4069/89 du 21 décembre 1989, on a accepté l’idée d’un contrôle communautaire des concentrations. Qui dit règlement sous-tend Droit dérivé. Les États sont au fur et à mesure dotés de règles sur concurrence. En France, l’ordonnance du 1er décembre 1986 est à retenir. Il a découlé une décentralisation du Droit communautaire. Le Règlement 1/03 du 16 décembre 2002 y a eu un rôle majeur.

Section 2 Objectifs & fondements du Droit communautaire de la concurrence

1 · La place de la concurrence dans les textes, révélatrice du lien entre libre concurrence et économie de marché

a · Les textes d’origine

Ces textes d’origine, ce sont l’Art. 2 TCE, définissant les missions appartenant à la Communauté. Ces grandes missions étaient définies d’une manière générale, avec pour idée principale de parvenir à un développement harmonieux des activités économiques et à un haut degré de compétitivité. L’Art. 3 TCE définissait les actions à entreprendre pour parvenir

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

5 C h a p i t r e I · L’entreprise

à ces objectifs. L’Art. 3-1 énonçait l’interdiction entre États membres des droits de douane et restriction quantitative, instauration d’une politique commerciale commune, abolition des obstacles, un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée à l’intérieur du Marché intérieur. La Concurrence était conçue comme un moyen, pas une fin en soi.

L’Art. 4 TCE avait aussi un rôle important. Il entendait préciser le régime économique choisi. Il énonce que l’action des États membres et de la Commission sera « conduite conformément au respect du principe d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre ». Cet Art. 4 a été ajouté en 1992 avec le TUE. C’est lui qui a consacré officiellement le libéralisme « en tant que guide de la politique économique des États membres et de la Communauté » dixit DECOQ. La référence est dorénavant explicite.

b · La place de la concurrence dans le Traité de Lisbonne

Signé le 13 décembre 2007, entré en vigueur dans la douleur le 1er décembre 2009. Il en résulte le TUE et le TFUE. La référence à la concurrence non faussée disparaît du TUE et notamment de son Art. 3. On a entendu préférer « une économie sociale de marché hautement compétitive ». La classe. La France, suite au débat sur le projet de Constitution européenne, dont l’Art. 1-3 définissait, parmi des objectifs, une concurrence libre et non faussée. Le fait de la mentionner au niveau des objectifs a fait jaser. Le Gouvernement français a entendu jarter cette référence dans le TUE. Bon, mais le TFUE, lui, conserve cette notion de concurrence libre et non faussée. La symbolique est qu’on ne touche plus aux grands objectifs. Plus précisément les Art. 119 et 120 TFUE. En outre, tout un tas de protocole suit les traités. Le protocole XXVII vise ainsi le marché intérieur et la concurrence. On y repère que les hautes parties contractantes, compte tenu du fait que le marché intérieur, tel qu’il est défini à l’Art. 2 TUE, comprend un système garantissant que la concurrence n’est pas faussée, sont convenues qu’à cet effet, l'union prend les dispositions nécessaires. On peut tenter d’y voir une forme de dégradation de l’importance attachée au principe de libre concurrence et à la référence à une économie de marché ouverte. Il demeure que, juridiquement, c’est du pipeau, car tous ces textes, le TUE, le TFUE, comme la cohorte de protocoles, ont les mêmes force et valeur juridiques. Dixit M. MAELBROECK, « les mots « compte tenu du fait » ont à mon avis une grande importance. En effet, ils montrent que pour les 27 États membres, la notion de marché intérieur inclue nécessairement celle de concurrence non faussée… ».

2 · Le sens des mots

On entend savoir ce qu’il se cache derrière une économie de marché et une concurrence libre.

L'économie de marché suppose une économie libérale, reposant sur des principes, genre celui de propriété privée, la liberté d’entreprendre (intégrant donc le Droit de la concurrence), la liberté contractuelle. L'économie de marché apparaissait comme la meilleure forme d’organisation de la société, permettant une allocation optimale des marchés. Range moi cette main invisible. Des nuances ont apporté quelques corrections à tout ça.

La planification, bah c’est l’inverse. C’est alors l’État qui fixe les objectifs, et qui vérifie que ceux-ci sont remplies. L'économie est administrée.

Le Droit communautaire a clairement fait le choix de l'économie de marché, mais de manière tempérée.

La concurrence libre, alors elle, requiert déjà de savoir ce que sous-entend la concurrence. On peut y associer l’idée de compétition. Dixit M. CHAMPAUD, la concurrence implique l’idée d’une sélection et l’existence d’un gain attribué au vainqueur du concours. Il

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Chapitre I · L’entreprise 6

y a donc une compétition entre opérateurs. La concurrence apparaît comme un vecteur de réussite économique, à la fois pour que les entreprises européennes soient compétitives au niveau mondial, mais encore au niveau du consommateur. On suppose que cette concurrence est favorable aux intérêts du consommateur. Dixit FRISON-ROCHE & PAYET, la concurrence est avant tout l’expression d’une liberté reconnue par le Droit, celle d’entrer en compétition avec d’autres entreprises en vue de la conquête d’une clientèle.

Le paradoxe, c’est que, pour préserver cette libre concurrence, cette capacité des opérateurs à se taper les uns sur les autres, il va être nécessaire de limiter la liberté économique des opérateurs. La Liberté ne peut pas être totale pour les opérateurs économiques. S’il y avait une telle liberté, certains en profiteraient pour hypertrophier le marché. Le Droit de la concurrence intervient ici. Il a deux fins, la première, d’ouvrir le marché à la concurrence lorsqu’elle n’existe pas, d’où le fait que petit à petit, les monopoles passent à la trappe les uns après les autres. La deuxième, maintenir la concurrence dans les secteurs où elle existe, en luttant contre les comportements et les structures du marché qui pourraient la restreindre ou la supprimer. D’où la prohibition des abus de position dominante, des ententes anticoncurrentielles et donc les concentrations.

Aux Usa, dans les années 1950, on entendu défendre l’école structuraliste, développée par l’école de Harvard, qui dissociait nettement la structure de la concurrence et le pouvoir de marché. La structure de la concurrence repose sur un nombre d’opérateurs et un pouvoir de marché qui fixait des prix. Lorsqu’on a affaire à une structure de marché très concentrée, genre monopolistique, alors, naturellement, les prix vont découler du pouvoir de marché du peu d’entreprises, et ces prix seront d’autant plus élevés. En cas de marché atomisé, plein de petites entreprises de petite dimension opèrent, si bien que les prix sont plus bas. Brrr, la concentration, c’est le mal.

Le marché oligopolistique voit quant à lui seuls quelques opérateurs intervenir.

Dans les années 1970, l’école de Chicago a avancé que ce préjugé contre les concentrations était mauvais. Certes, sur un marché atomistique, les prix sont bas, la concurrence est vive, mais les entreprises font alors peu de profits. Peu de profits, donc peu d’investissements. L’innovation sera très réduite. Peu d’innovation donc peu de progrès, donc pas bien.

Ce Droit de la concurrence, de la liberté économique est un Droit particulièrement intrusif dans les relations contractuelles. On pourrait finalement définir le Droit de la concurrence comme un ensemble de règles tendant à ordonner une compétition économique fondée sur des échanges de biens et de services.

Cette compétition, cette concurrence entre les opérateurs, n’est pas une fin en soi. Elle n’apparaît que comme un moyen pour parvenir à une certaine efficience économique. Cette efficience économique, c’est la meilleure allocation des richesses compte tenu des ressources de la collectivité. Si c’est une fin en soit, toutes les atteintes portées à cette concurrence sont prohibées, sans exception. Le Droit américain y est sensible. Les ententes anticoncurrentielles sont prohibées sans exception. bon, il y a toujours moyen de s’arranger hein, avec des règles de raison notamment. L’autre système voit la concurrence comme un simple moyen, et on part du principe que c’est le meilleur moyen pour satisfaire la collectivité, mais s’il apparaît que le sacrifice de la concurrence s’avérait nécessaire pour parvenir à cette satisfaction, on l’accepterait. L’Art. 81 TCE interdit les ententes anticoncurrentielles. Restent les exceptions. Les ententes anticoncurrentielles qui en bénéficient permettent de contribuer au progrès économique (environnement, progrès social…).

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

7 C h a p i t r e I · L’entreprise

Section 3 Les différents modèles économiques de concurrence C’est le modèle libéral du XVIIIème siècle. Le contrat apparaissait nécessairement

juste. Chaque partie entendait défendre ses intérêts. De cet antagonisme était supposée naître la justice contractuelle. Parallèlement, le consommateur choisissait la meilleure option possible, le plus rationnellement possible. Il en résultait un modèle de concurrence pure et parfaite. Il fallait ainsi que les entreprises soient de taille sensiblement égale. Aucune n’aurait une force économique très supérieure aux autres. Il fallait aussi que ces entreprises puissent entrer et sortir librement du marché, techniquement, financièrement. Il fallait encore que ce marché soit parfaitement transparent, entre les entreprises, mais vis-à-vis aussi des consommateurs. Mais finalement, le système de concurrence est donc apparu imparfait. On a donc admis que les entreprises ne soient pas à arme égale. Certaines entreprises peuvent avoir un avantage. Une entreprise peut avoir une avance technologie, une facilité de payement. On admet encore que le consommateur ne soit pas l’être aussi rationnel qu’on l’eut espéré. En outre, il se peut que, sur un temps déterminé, une entreprise se retrouve en situation de monopole car propose un nouveau produit, avec une innovation suffisamment importante pour que ce produit-là ne soit pas substituable à d’autres. Ce qui va alors importer, c’est la contestabilité. Il faut que le marché puisse être contestable, bref que toute position d’entreprise puisse être contestée par d’autres.

Ce modèle de concurrence imparfait repose également sur des conditions. Trois principales. Il faut ainsi une condition d’incertitude, ce qui signifie que chaque offreur doit prendre ses décisions stratégiques dans l’ignorance des choix stratégiques ce que vont faire les autres. On parle ainsi d’économie d’inquiétude. Il faut encore une condition d’autonomie. Les décisions sont prises seules. Cela explique qu’on prohibe les ententes de prix. Il faut aussi une condition de fluidité. Un marché concurrentiel doit être fluide. Les obstacles ne peuvent pas être trop importants, que ce soit pour l’entrée ou la sortie d’un marché. On va se contenter finalement d’une concurrence praticable. On veille à ce que soit sauvegardée la dose de concurrence indispensable afin que soient préservées les exigences fondamentales du marché intérieur. On admet que l’intensité de la concurrence varie selon le type de produits ou de services.

Section 4 Contenu et fondements du Droit communautaire de la concurrence Le droit de la concurrence est une branche du Droit large. Il y a des dispositions qui

vont viser directement les entreprises, des dispositions qui ont généralement un pendant dans les droits internes, mais il y a aussi des règles qui s’adressent aux États, et ces règles-là sont sans équivalent dans les ordres juridiques internes.

A · Les règles qui s’appliquent aux entreprises 1 · Les concentrations entre entreprises

Le droit communautaire s’intéresse aux concentrations, assez tardivement en 1999. Rafraichi par le règlement 139/2004 du 20 janvier 2004. Le Droit communautaire vise des seuils, au-delà desquels le règlement 139/2004 s’applique. En deçà, mais au-dessus de certains seuils nationaux, on applique le Droit national des concentrations. En France, les Art. L430-1 CCom et suivants les traitent. En deçà de ces seuils, il n’y aura pas de concentration.

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Chapitre I · L’entreprise 8

2 · Les pratiques anticoncurrentielles

Il ne s’agit plus de contrôler mais de prohiber. Elles sont de deux types. Il y a d’abord les ententes anticoncurrentielles. Elles étaient sabrées par l’Art. 101 TFUE, par l’Art. L420-1 CCom. Les abus de position dominante sont encore visés. L’Art. 102 TFUE au niveau communautaire, l’Art. L420-2 §1 CCom au niveau interne. En Droit français, on dispose d’une autre pratique interdite, à savoir les abus de dépendance économique. Un abus de position dominante voit, au sein d’un marché, la position d’une entreprise, avec comme critères notamment les parts de marché. L’abus de dépendance économique s’intéresse non pas à la position de l’entreprise sur le marché, mais si une entreprise est dépendante dans une large mesure pour une autre qui n’est elle pas forcément dominante sur le marché. L’Art. L420-5 CCom vise quant à lui les prix abusivement bas, au préjudice du consommateur.

3 · Les pratiques restrictives de concurrence

Ou les actes de concurrence déloyale.

La question est d’apprécier comment une entreprise se comporte par rapport à une autre. En France, le Droit est assez développé. Tout ce qui est concurrence déloyale repose sur l’Art. 1382 CCiv et la responsabilité délictuelle. Le parasitisme, c’est un comportement déloyal.

Le Droit des pratiques restrictives de concurrence s’appuie quant à lui sur les Art. L440 + CCom. La revente à perte, les règles de facturation (transparence…), sont des exemples. L’Art. 442-6 CCom vise lui toute une brochette de pratiques prohibées, genre le fait de rompre abusivement une relation commerciale établie.

B · Les règles qui s’appliquent aux États

1 · Les aides publiques

Alors en principe, elles sont interdites car elles faussent le jeu de la concurrence. L’Art. 107 TFUE le rappelle. Mais évidemment, tout un tas d’exception suit. Les aides pour aider la réunification allemande, pour gérer les catastrophes naturelles… genre Eyjafjöll.

2 · Les monopoles publics et entreprises auxquelles l’État accorde des droits spéciaux ou exclusifs

Le Droit communautaire n’interdit pas les monopoles publics. Le Droit communautaire autorise l’État à accorder des droits spéciaux à des entreprises. L’Art. 106 TFUE envisage que l’État qui autorise les monopoles publics ou des droits d’exploitation exclusifs, doit malgré tout respecter les règles de concurrence. L’État va ainsi devoir veiller à ce que l’entreprise n’abuse pas de ce monopole pour enfreindre les règles de concurrence.

3 · Les SIEG (Services d’intérêt économique général)

L’Art. 106 §2 TFUE les vise. Le principe, ici, c’est que le Droit de la concurrence s’applique à ces services, mais que dans la limite où cela ne porte pas atteinte à la mission de service public opérée par les entreprises, sauf cas spécial.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

9 C h a p i t r e I · L’entreprise

PARTIE I • Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · L’entreprise 1 0

Ø Les notions fondamentales

Ø Le champ d’application du Droit communautaire de la concurrence

TITRE I • Les notions fondamentales du Droit de la concurrence

Chapitre I L’entreprise

Section 1 L’objet de l’entreprise : une entité exerçant une activité économique Ici, ce qui nous intéresse, ce n’est pas le statut juridique de l’opérateur, mais

l'activité qu’il exerce. On ne s’intéresse qu’aux entités qui exercent une activité économique sur un marché. Ces entités sont qualifiées d’entreprises en Droit de la concurrence.

Paragraphe 1er Les définitions jurisprudentielles

A · La définition de l’entreprise

L’entreprise est une notion autonome en Droit communautaire comme en Droit interne de la concurrence. En droit communautaire, on n’a pas de définition textuelle de l’entreprise. La jurisprudence est passée par là. La définition actuelle repose sur un arrêt de principe HÖFNER C/ ELSER du 23 avril 1991 :

La notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement.

La notion d’entreprise est davantage économique que juridique. C’est une notion plus fonctionnelle qu’organique. Ce qui compte, c’est l'activité qui est exercée, pas la nature de l’organe. On en déduit que la notion d’entreprise est une notion déconnectée de celle de sujet de droit.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

1 1 C h a p i t r e I · L’entreprise

1 · Les éléments indifférents

a · Le statut juridique de l’entité

On se moque de savoir si l’entité est d’un côté une personne physique, genre un commerçant individuel, un avocat, ou le titulaire d’un brevet, ou d’un autre côté une personne morale.

On se moque encore de savoir si l’entreprise est publique ou privée. Le Droit de la concurrence transcende la frontière entre public et privé.

Cette entité peut encore être une société comme une association, un syndicat, un Groupement d'intérêt économique…

b · Le mode de financement

Il faut un financement au sens où l’entité observée va déployer une activité, activité qui génère une rémunération. Il faut donc une contrepartie susceptible d’évaluation pécuniaire.

Peu importe ensuite la nature de cette contrepartie pécuniaire. Ce peut être un prix, une cotisation, une redevance…

Cette notion de contrepartie va au-delà du seul caractère lucratif. Il n’est ainsi pas requis, pour que l’entité soit qualifiée d’entreprise, qu’elle développe une activité lucrative, bref le fait de faire un profit. C’est pourquoi les associations, mutuelles, offices, coopératives peuvent être qualifiées d’entreprises. L’arrêt C49/07 CJCE du 1er juillet 2008 MOTOSYKLETISTIKI. Mot compte triple. Une association grecque ELPA a deux objets. Elle organise des manifestations sportives et prend part aux décisions administratives de l’État autorisant les courses sportives. Une autre association, MOTOE, se fait refouler à une manifestation sportive. Elle attaque sur le fondement des Art. 102 Et 106 TFUE et demande si l’ELPA est une entreprise ou non. La CJCE considère que le caractère non lucratif est indifférent. Ce qui compte, c’est l'activité. Lorsque l’ELPA organise des manifestations, elle conclue des contrats de tous ordres et exerce alors une activité économique. Lorsqu’elle prend part aux décisions administratives autorisant les courses sportives, c’est l’exercice d’une prérogative de puissance publique, et elle n’est alors pas une entreprise. La CJCE a fait une application distributive de la notion d’entreprise. Une même entité se voit qualifiée d’entreprise pour une partie de ses activités, et se la voit refuser pour une autre partie de celles-ci.

B · Définition de l'activité économique

1 · Qu’est-ce qu’une activité économique

Il y a critère de l'activité économique qui a été donné dans l’arrêt du TPICE du 12 décembre 2000, aéroport de paris. Constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné. En Droit français, on applique l’Art. L410-1 CCom, en vertu duquel les dispositions du code applicable en matière de concurrence s’appliquent « à toutes les activités de production, de distribution, et de service, y compris celles qui sont les fait de personnes publiques ».

Il y a une vocation quasi universelle des règles de concurrence.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · L’entreprise 1 2

La CJCE a formulé deux remarques récemment. La première a été formée dans un arrêt FENIN du 11 juillet 2006 dans une affaire C205/03 : un acte d’achat ne suffit pas à caractériser une activité économique. ce n’est pas parce qu’on est acheteur qu’on est une entreprise. tout va dépendre ensuite de l'activité qu’on réalise grâce aux biens ou services achetés. En l’espèce, un organisme regroupe des entreprises commercialisant du matériel sanitaire. Cet organisme en vend à un autre organisme, gestionnaire du système national de santé espagnol. Celui-là se fout du monde. Le premier s’en plaint et agit sur le fondement des Art. 82 et 86. Le seul fait d’acheter ne suffit pas. Tout dépend de l'activité. Or, cet organisme exerce une activité purement sociale.

La solution a été reprise dans un arrêt du TPICE du 14 décembre 2006, dont le doux nom est SELEX SISTEMI, et qui rappelle qu’exercer une activité publique, ce n’est pas exercer économique.

L'activité économique peut être exercée directement ou indirectement. Alors ça, ça remonte à un arrêt du 10 janvier 2006 d’une affaire C222/04. L’État italien vote une Loi prévoyant une exonération fiscale sur les dividendes perçus par des organismes exerçant une activité de bienfaisance, d’éducation, de recherche scientifique. La Commission européenne considère que cette exonération ne peut être assimilée à une aide d’État si l’organisme qui la reçoit est effectivement un organisme de bienfaisance, et non une entreprise. ici, l’organisme était une fondation bancaire. Cette fondation soutenait qu’elle n’était pas une entreprise. mais Josette avait des participations dans les banques, ce qui lui permettait quand même de contrôler ces banques. La CJCE a considéré que l'activité économique peut l’être indirectement, via des participations.

2 · Conséquences : Application des règles de concurrence à toutes les activités économiques

Ces règles de concurrence sont appliquées à toutes les activités commerciales classiques. Certains secteurs ont été un peu plus contestés. On s’est donc demandé si on pouvait leur coller le régime de la concurrence.

Le régime libéral est un premier exemple. oh que oui bibi. Dans un arrêt PAVLOV, la CJCE a, le 12 septembre 2000, dans une affaire C180/98, considéré qu’un médecin est bien une entreprise car il rend un service en contrepartie d’une rémunération. La solution a été élargie aux avocats, architectes, experts comptables etc.

Le secteur de la finance, banque et assurance, a essayé de filouter. Raté.

Le secteur culturel, genre l'activité cinématographiques, désigne une activité économique.

La Presse aussi.

Le secteur sportif a fait jaser. Les clubs de sport ou fédérations sportives peuvent, sous certaines circonstances, être considérées comme des entreprises car réalisent des activités économiques. Il faut donc savoir quelles sont les activités exercées. Un arrêt du 2 décembre 1997 concernait la LNF, ligue nationale de football, qui a des compétences réglementaires, genre les règlements des compétitions sportives ou les conditions pour obtenir une licence… Alors là, la LNF n’exerce pas d’activité économique. L'activité est purement sportive. En l’espèce, un article 315 d’un règlement prévoyait que les clubs de première et deuxième division devraient porter les vêtements de la marque Adadas. Ce faisant, on a considéré qu’il y avait exercice d’une activité économique. Le droit communautaire retient la même conception. Dans une décision de la Commission du 27 octobre 1992 à propos de la fédération internationale de football, l'activité est de nature économique lorsque sont conclus des contrats de publicité sur les panneaux de stade ou lorsque sont négociés avec les télévisions des contrats de retransmission télévisuelle.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

1 3 C h a p i t r e I · L’entreprise

L’application des règles de concurrence est distributive. Un autre arrêt de la CJCE, WALRAVE du 12 décembre 1974 est à noter.

Paragraphe 2e Des activités soustraites au Droit de la concurrence Certaines activités n’ont pas vocation à se réaliser sur un marché.

l’autoconsommation vise l'hypothèse où une entreprise va fabriquer certains produits mais les consomme elle-même, histoire de proposer ensuite un autre produit sur le marché. De l’autoconsommation on en déduit un circuit fermé, différent de la notion de marché.

Certaines activités sont étrangères à la sphère des échanges économiques.

A · L’exclusion des activités étrangères à la sphère des échanges économiques

1 · Les activités purement sociales

On s’est demandé si les caisses, les organismes gestionnaires de régime de sécurité sociale, étaient ou non des entreprises ou des trous sans fond. Un arrêt POUCET du 17 février 1993, dans une affaire C159/91 a vu la CJCE donner une réponse. elle a considéré que les caisses de maladie, ou les organismes qui concourent à la gestion du service public de la Sécurité Sociale, remplissent une activité de caractère exclusivement social. cette activité est en effet fondée sur le principe de solidarité nationale, dépourvu de tout effet lucratif. Elle en rajoute une couche. Les prestations versées sont des prestations légales et indépendantes du montant des cotisations. Ces caisses ne sont donc pas des entreprises, donc soustraites au Droit de la concurrence.

Il faut donc que des conditions soient cumulativement remplies.

Il faut que les organismes participent à un principe de solidarité nationale. Au niveau du payement des cotisations, on paye à hauteur de revenus. Chacun a droit aux mêmes prestations, indépendantes de ce qui a été versé.

L’affiliation est encore obligatoire.

La Loi fixe le montant des cotisations en fonction des revenus de chacun, et c’est la Loi qui fixe le montant des prestations.

Les caisses n’ont finalement aucune influence sur leurs propres revenus, ni sur les charges. Ceci explique cela.

Cette solution POUCET a été élargie avec un arrêt CISAL du 22 janvier 2002, pour le régime italien des accidents du travail et maladies professionnelles. Un arrêt du 5 mars 2009, KATNERSTAHLABAU vise lui le régime allemand d’assurance contre les accidents du travail et maladies professionnelles. La Cour insiste sur le contrôle opéré par l’État. Un arrêt de la Chambre sociale du 21 janvier 2009 à propos d’une caisse de congés payés retient la même solution. Le fait qu’il existe une caisse poursuivant une finalité sociale ne suffit pas pour exclure le jeu du Droit de la concurrence. C’est pourquoi les caisses de retraite qui fonctionnent, selon un régime de capitalisation, sont elles des entreprises. L’arrêt du 16 novembre 2005, fédération française des sociétés d’assurance, a vu la CJCE le reconnaître.

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Chapitre I · L’entreprise 1 4

2 · Les activités purement corporatives

Le Droit de la concurrence pouvait-il se mêler des relations qui se nouent entre les partenaires sociaux ? Le Droit de la concurrence peut-il tâter des conventions collectives ? Avec un arrêt ALBANY de la CJCE du 21 septembre 1999, la Cour a considéré que les accords conclus dans le cadre de négociations collectives entre partenaires sociaux destinés à améliorer les conditions d’emploi et de travail échappent au Droit de la concurrence. Ici, les syndicats ne font que défendre les intérêts de leurs membres. L'activité en cause n’est pas économique.

Le Droit de la concurrence retrouve son emprise lorsque les conventions collectives portent sur des matières qui ne relèvent pas de l’essence des négociations collectives ou lorsqu’elles visent à affecter les relations entre les employeurs et des tiers tels que les clients, fournisseurs, consommateurs. La décision 03D30 du 2 juillet 2003 du Conseil français de la concurrence l’établit.

Ce raisonnement a été généralisé à toutes les associations professionnelles, syndicats, organismes collectifs, genre ordre professionnel. Ces organismes sont soustraits au Droit de la concurrence tant qu’ils se bornent à défendre les intérêts de leurs membres. Un arrêt CJCE, PÂTE DE BOIS (n°1 sur 3), du 27 septembre 1993. Fixer les tarifs de vente des produits, de prestations des adhérents aux tiers, c’est alors toucher au marché, et là on ne s’intéresse plus aux seuls intérêts de leurs membres.

3 · Les activités purement sportives : une jurisprudence… troublante *brrr*

On fait application distributive des règles de concurrence.

L’arrêt DAVID MECA MEDINA a foutu le boxon. L’arrêt est dû au TPICE et remonte au 30 septembre 2004. était en cause un règlement émanant de la Fédération internationale de natation sur le dopage, et les sanctions applicables ne respectant pas les réglementations antidopage. Deux joueurs sont visés, mais contestent les sanctions, invoquant le caractère excessif des règles imposées par la Fédération. Le TPICE les déboute, estimant que l’exercice des sports ne relève du Droit communautaire que dans la mesure où il constitue une activité économique. Le TPICE considère que la lutte antidopage participe de l’exercice même du sport, sans poursuivre aucun objectif économique. Le geste sportif est dans son essence même un acte… gratuit. La CJCE, avec un arrêt du 26 juillet 2006, considère dans la même affaire que le TPICE a commis une erreur de droit. La Cour reconnaît que les règles antidopage sont purement sportives mais estime que « la réglementation antidopage doit être examinée à l’aune des règles de concurrence dès lors que son caractère répressif et l’importance des sanctions applicables en cas de violation de celle-ci, sont susceptibles de produire des effets négatifs sur la concurrence, car elle pourrait, pour le cas où les sanctions s’avéreraient finalement infondées, conduire à l’exclusion injustifiée des athlètes de la compétition et donc fausser les conditions d’exercice de l'activité en cause ». Les phrases courtes, tout ça… Il en résulte une sorte de principe de proportionnalité. Est-ce que les sanctions sont excessives ou non. Si oui, le Droit de la concurrence peut s’appliquer. Sinon, a priori, bah non. En l’espèce, la réglementation n’était pas excessive. La Cour sanctionne la motivation, mais le Droit de la concurrence ne s’applique quand même pas car la sanction n’est pas excessive. Mais l’arrêt admet qu’une activité purement sportive puisse malgré tout relever du Droit de la concurrence. Cet arrêt serait en fait… politique, au sens où la Cour a voulu montrer la volonté du Droit communautaire à contrôler le domaine sportif, voire de l’assainir.

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B · Les activités d’autorité publique : le problème d’activité de puissance publique

Le Droit de la concurrence est indifférent au caractère public ou privé de l’entité. Ce Droit a vocation à s’appliquer aussi à l’État, aux collectivités publiques, aux entreprises publiques, aux entreprises privées auxquelles l’État aurait confié une mission particulière. Mais est-ce que le Droit de la concurrence a-t-il toujours vocation à s’intéresser à leurs activités ?

Par nature, l’entité n’est pas soustraite au Droit de la concurrence. Tout va dépendre de l'activité exercée. Est-ce que cette activité est ou non économique ?

L’arrêt à connaître ici, c’est l’arrêt CALI C/ SERVIZI de la CJCE, vu l’affaire C343/95. En ce qui concerne l’application éventuelle des règles de concurrence du Traité, il convient de distinguer entre l'hypothèse où l’État agit en exerçant l’autorité publique et celle où il exerce des activités économiques de caractère industriel ou commercial, consistant à offrir des biens ou des services sur le marché.

Si l’État ou son extension exerce l’autorité publique et l'activité n’est pas économique. Mais si l’État propose des biens ou services sur un marché, l'activité est économique, et le Droit de la concurrence s’applique.

La mise en œuvre de distinction est plus tendue qu’il n’y paraît.

1 · Hypothèse de l’État et ses extensions où les missions ne sont pas considérées comme des activités économiques

a · Exclusion des actes manifestant l’exercice du pouvoir législatif et exécutif

Une personne publique qui met en place une réglementation n’exerce pas d’activité économique. on est alors dans la prérogative régalienne. Le Droit de la concurrence ne s’applique pas, même si la réglementation en cause est de nature économique. L’État qui fixe les conditions d’ouverture le dimanche a des enjeux économiques. Le fait d’instituer cette réglementation n’est que l’exercice du pouvoir législatif, prérogative régalienne.

b · Exclusion des actes par lesquels l’État exerce ses missions essentielles

Bah alors là, c’est le maintien de l’ordre, la défense, la justice, la police, l’éducation… tout ça ne relève pas du Droit de la concurrence car l’État ne fait qu’exercer des missions essentielles. Leur exercice suppose généralement la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique. Des missions essentielles de l’État assorties de prérogatives de puissance publique se retrouvent souvent dans la jurisprudence communautaire. Bon, le petit détail, c’est que la PPP n’est pas définie. Pour CHAPUS, la PPP (prérogative de puissance publique), c’est l’exercice d’un pouvoir de décision destiné à satisfaire les exigences de l’intérêt général, ou plus précisément les besoins du service public. cette notion vise des pouvoirs exorbitants à l’égard des personnes comme des biens.

L’affaire C364/92 EUROCONTROL ayant donné lieu à un arrêt de 19 janvier 1994 a vu la CJCE traiter d’une organisation européenne chargée de la sécurité aérienne. Dans le cadre de cette mission, lorsque c’est au profit de compagnies aériennes, cela se fait au travers de redevances. Une compagnie aérienne a considéré que ces redevances étaient excessives et a voulu agir contre la société EUROCONTROL pour abus de position dominante. La CJCE répond que les États sont souverains dans leur espace aérien, et y assurent donc police.

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Chapitre I · L’entreprise 1 6

EUROCONTROL les aide. Cette aide se fait par une convention. EUROCONTROL dispose ainsi de prérogatives de puissance publique, nécessaires pour assurer la police dans l’espace aérien. La perception de redevances n’est pas détachable de cette activité de police de l’espace aérien.

Une autre affaire CALI C/ SERVIZI du 18 mars 1997. Un espace très réduit est visé, c’est celui du port de Gêne. Une entreprise privée, SERVIZI, s’est vue concédée le pouvoir d’assurer la mission d’un service de lutte contre la pollution. A plusieurs entreprises, une autorité entreprise a utilisé le port. SERVIZI facture les services par des redevances. CALI est pas content et agit pour abus de position dominante. La CJCE a considéré qu’il s’agissait d’une activité de surveillance contre la pollution, et que cette activité se rattache à l’exercice de prérogatives relatives à la protection de l’environnement qui sont typiquement des prérogatives de puissance publique. En conséquence, pas d’activité économique, donc pas d’entreprise.

Une entité peut être dotée de prérogatives de puissance publique pour exercer une activité économique et alors le Droit de la concurrence s’applique. L’arrêt TPICE du 14 décembre 2006 a été suivi par un arrêt SELEX de la CJCE du 26 mars 2009. EUROCONTROL est visé par la société SELEX. Le TPICE avait décortiqué toutes les activités d’EUROCONTROL, histoire de savoir si c’était distinct d’une mission d’intérêt général. Pour la CJCE, chacune de ces activités doit être appréciée à l’aune de la mission d’Intérêt général de l’entité poursuivie. Cet arrêt a été interprété comme retenant une conception plus restrictive dans la notion d’activité économique. Ce qui doit laisser sans voix. Tout au moins la prof.

[Début du rattrapage à base de concentré de cours en provenance directe de la prof].

c · Exclusion des décisions relatives à l’utilisation du domaine public mettant en œuvre des PPP

Ces décisions ne sont pas de nature économique.

Par exemple, dans une affaire ADP – Aéroports de Paris, ayant donné lieu à une décision du Tribunal des conflits du 18 octobre 1999, il était donc question des aéroports de Paris (entreprise publique jusqu’en 2005) qui gèrent une dépendance du domaine public.

La décision prise par ADP de regrouper à l’aérogare d’Orly ouest les activités d’Air France et de refuser à TAT d’ouvrir de nouvelles lignes à partir de cet aérogare se rattache à la gestion du domaine public et constitue l’usage de PPP (prérogatives de puissance publique). Le fait de refuser à TAT d’ouvrir de nouvelles lignes à partir de cet aérogare se rattache à la gestion du domaine public. Donc impossible d’invoquer une entente antre ADP et air France ou un abus de position dominante d’ADP.

Mais attention, lorsqu’ il s’agit, non plus d’utiliser le domaine public mais de l’exploiter économiquement, le droit de la concurrence retrouve son emprise. Ce n’est plus l’acte par lequel l’Etat a concédé le droit d’utiliser le domaine public qui est en cause, mais la façon dont l’entreprise se comporte ensuite.

Un autre exemple voit s’opposer à nouveau TAT à Air France. TAT reprochait à ADP de lui avoir imposé ses services d’assistance en escale (type ravitaillement), alors qu’elle voulait les faire assurer par son propre personnel.

Le tribunal des conflits considère qu’il s’agit là d’une activité annexe d’ADP, détachable de son activité de gestion du domaine public, et qu’un APD peut lui être reproché. Aucune PPP n’est en cause.

Une décision allant dans le même sens a été rendue par la CJCE à propos de la même affaire. Elle date du 24 octobre 2002 et oppose ADP C/ COMMISSION. La CJCE s’appuie sur le caractère détachable du service d’assistance en escale.

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(extrait de l’arrêt du TPI du 12/12/2000 que la CJCE approuvera : « C'est donc à juste titre que, dans la décision attaquée, la Commission fait une distinction entre, d'une part, l'occupation des terrains, bâtiments et équipements situés dans le périmètre de l'aéroport, en contrepartie de laquelle le prestataire de services verse une redevance domaniale, et, d'autre part, les services de gestion de l'aéroport et l'autorisation de prestations des services d'assistance en escale en contrepartie de laquelle le prestataire verse une redevance commerciale ».

Il en est de même pour la location de voitures aux passagers ou la distribution de boissons…

Dans un autre exemple français, issu de l’arrêt de la Chambre commerciale du 7 janvier 2004, toujours à propos d’ADP, ADP refusait aux hôteliers de la périphérie l’accès à la signalisation destinée à l’information, alors que ADP donne accès à cette signalisation aux hôteliers situés sur la plateforme. La Cour de cassation considère qu’il ne s’agit pas là d’une décision prise dans le cadre d’une mission de SP relevant de PPP, mais d’une offre de prestation de services.

d · Exclusion des actes par lesquels l’Etat délègue un service public ou choisit un prestataire

Un Arrêt à retenir, c’est l’arrêt BODSON de la CJCE du 4 mai 1988, résultant de l’affaire C30/87. « L’article 85 (devenu 81, aujourd'hui 101) ne vise pas les contrats de concession conclus entre des communes agissant dans leur qualité d’autorités publiques et des entreprises chargées de l’exécution d’un service public ». Il s’agissait en l’espèce d’un contrat de concession de service public conclu entre des communes et des entreprises dans le domaine des pompes funèbres. Le fait pour une commune d’accorder une concession de SP à une entreprise (monopole), donc de choisir un prestataire pour assurer le service de pompes funèbres, ne constitue pas une activité économique.

On retrouve la même solution en droit interne avec l’arrêt… My God ! ça me rappelle du droit administratif ça, bref l’arrêt du Tribunal des conflits du 30 juin 1988 VILLE DE PAMIERS. Il en ressortait que « l’organisation du service public de la distribution de l’eau à laquelle procède un conseil municipal n’est pas constitutive » d’une activité économique. Pour le Tribunal des conflits, le fait de choisir un délégataire participe de cette organisation.

On peut en tout cas relever trois régimes.

Ø Le premier, déjà vu, lorsque l’Etat (ou une des entités à laquelle il a confié une mission de SP) exercent des activités détachables de celles assorties de PPP, le droit de la concurrence s’applique.

En effet, une administration de l’Etat, une entreprise publique ou une personne privée investie d’une mission de SS et dotée de PPP peuvent exercer parallèlement à titre onéreux et sans faire usage de ces prérogatives une activité éco. Elle sera alors considérée comme une entreprise au sens du droit de la concurrence

Ø Le deuxième, c’est le critère de l’intérêt général, des missions essentielles de l’Etat, qui est évolutif. C’est par exemple le service postal ou la distribution du gaz.

Ø Si l’Etat ou une entreprise qui exerce une mission de Service public qui s’accompagne de PPP n’exerce pas d’activité économique et ne peut donc être qualifié d’entreprise, cela ne signifie pas que l’Etat ou l’entreprise publique n’aura pas à respecter les règles de concurrence.

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Chapitre I · L’entreprise 1 8

On ne pourra certes pas lui appliquer les Art. 81 (101) et 82 (102) qui ne s’appliquent qu’aux entreprises. Mais l’Etat, ou par extension l’entreprise publique en cause, sera assujetti aux règles de concurrence en tant qu’autorité publique, dans le cadre spécifique de l’article 86 §1 (devenu 106).

à Cf. le tableau (non retranscrit ici) réalisé en début d’année et qui distingue, en droit communautaire, les règles applicables aux entreprises (art. 81 et 82 devenus 101 et 102) et les règles applicables aux Etats (article 86 et 87, devenus 106 et 107).

Lorsque l’Etat accorde des droits exclusifs à certaines entreprises (lorsqu’il confie à une entreprise privée la mission d’organiser un SP par exemple) il doit respecter les règles de concurrence (Art. 86 §1 devenu 106 §1).

2 · La difficulté introduite par le droit français (problème de la compétence juridictionnelle)

Bis repetita placent, dixit L’Art. L410-1 CCom, Le droit français de la concurrence s’applique « à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de délégation de service public ».

Cet article traite du problème de l’applicabilité du droit de la concurrence. Et on voit que cette application ne dépend pas de la nature privée ou publique de l’entité observée, puisque le droit français a pris la peine de prévoir que les activités économiques déployées par les personnes publiques étaient concernées.

Mais cet article ne préjuge pas de l’autorité compétente pour appliquer les règles de concurrence aux personnes publiques. Or, en France, il existe une dualité bien connue entre le contentieux judiciaire, d’une part, et le contentieux administratif, d’autre part. Cette dualité ne devrait pas avoir d’incidence. Beaucoup d’auteurs considèrent que la compétence devrait suivre le fond dans deux cas :

à si le droit de la concurrence s’applique parce que l’activité en cause est une activité économique, l’Autorité de concurrence devrait être compétente

à si le droit de la concurrence ne s’applique pas (notamment car mission de SP avec usage de PPP), le juge administratif devrait être seul compétent pour apprécier la validité d’un acte et ce au regard d’autres règles que les règles de concurrence. Donc exclusion à la fois de la compétence de l’autorité de concurrence et de l’application des règles de concurrence

« Hélas, les choses sont plus complexes »… Alors là, tout le monde sort les mouchoirs.

La jurisprudence est extrêmement confuse qu’il est presque impossible à synthétiser. Mais bon, à l’impossible nul n’est tenu. Ouf.

Un principe a été dégagé le 18 octobre 1999 par le Tribunal de conflits dans la décision Aéroport de paris, une décision de principe, pour trancher le conflit de compétence : « les décisions par lesquelles les personnes publiques ou les personnes privées chargées d’un SP exercent la mission qui leur est confiée et mettent en œuvre des PPP ET qui peuvent constituer des actes de production, de distribution ou de services au sens de l’article 53 de l‘ordonnance du 1er décembre 1986 entrant dans son champ d’application, ne relèvent pas de la compétence du Conseil de la concurrence ; qu’il en est autrement lorsque ces organismes interviennent par leurs décisions hors de cette mission ou ne mettent en œuvre aucune PPP ».

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1 9 C h a p i t r e I · L’entreprise

On comprend donc qu’en droit français, il peut à la fois y avoir exercice d’une mission de SP et usage de PPP et activité économique (là où le droit communautaire de la concurrence dirait a priori qu’il n’y a pas d’activité économique).

Si c’est le cas, qu’il y a SP (service public) + PPP (prérogatives de puissance publique) + AE (activité économique) = compétence du Tribunal administratif (TA).

Si l’organisme dépasse sa mission de service public, ou exerce une activité détachable de celle-ci, l’Autorité de concurrence est compétente.

Cette clé de répartition a été rappelée par le Conseil de la concurrence par exemple dans une décision 04-D-79 du 23 décembre 2004.

« Aux termes de l’article L. 410-1 du code de commerce, les règles relatives aux pratiques anticoncurrentielles s’appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques. Ainsi, le seul fait que la Régie soit une personne publique ne la fait pas échapper à l’application du droit de la concurrence, pour autant qu’elle se livre à des activités de production, de distribution et de services.

La répartition de compétence entre le Conseil de la concurrence et les juridictions administratives pour appliquer les règles de concurrence aux personnes publiques ou aux personnes privées chargées d’une mission de service public, obéit à des critères appliqués de manière uniforme par les deux ordres de juridictions depuis la décision du Tribunal des conflits du 18 octobre 1999 AEROPORTS DE PARIS.

Si la mesure contestée au regard du droit de la concurrence met en œuvre des prérogatives de puissance publique se rattachant à une mission de service public, la juridiction administrative est seule compétente pour en apprécier la légalité et, le cas échéant, pour statuer sur la mise en jeu de la responsabilité encourue par ces personnes. Si, à l’inverse, la mesure contestée relève d’une pratique « détachable » de l’exercice de prérogative de puissance publique, le Conseil de la concurrence est alors compétent »

Mais on rencontre toujours le même problème : s’il y a des PPP se rattachant à une mission de SP, on comprend bien qu’il y ait compétence du juge administratif, mais on a du mal à voir en quoi il y a exercice d’une activité économique qui justifie l’application du droit de la concurrence par ce juge.

Certains auteurs considèrent qu’en fait, le droit de la concurrence ne serait pas directement applicable à cette hypothèse, mais serait opposable à la personne publique. Le juge administratif aurait fait le choix d’appliquer le droit de la concurrence dans le bloc de légalité administrative, en quelque sorte par transposition en droit français d’un mécanisme s’apparentant à celui de l’article 86 §1 CE (devenu 106 §1 TFUE, c’est tellement bon de radoter). Cela lui permet d’apprécier la légalité d’un acte administratif au regard des règles de concurrence, alors que l’autorité de concurrence n’est évidemment pas compétente pour le faire.

L’illustration, c’est une décision du Conseil de la concurrence du 11 décembre 2006, 06-MC-2006, aka CORSICA FERRIES : une collectivité territoriale décide d’attribuer à une entreprise privée le service public tendant à assurer des liaisons maritimes entre la Corse et le continent). Elle procède par appel d’offres et attribue la délégation de service public à une entreprise, la SNCM. Un candidat évincé, la COMMUN, considère que les conditions de l’appel d’offre étaient anticoncurrentielles et il saisit le Conseil de la concurrence. Celui-ci va

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Chapitre I · L’entreprise 20

faire une distinction entre activité détachable et activité non détachable des actes de puissance publique.

Le règlement de l’appel d’offre constitue un acte d’organisation du service public avec usage de prérogatives de puissance publique. Il en est de même de l’acte de dévolution de cette délégation au candidat retenu à l’issue de l’appel d’offre.

Si l’appel d’offres a été conçu de manière à favoriser un candidat (discrimination, voire boycott), il peut y avoir entente anticoncurrentielle entre la collectivité territoriale et le candidat retenu, mais l’autorité de la concurrence ne pourra pas en traiter, car cela reviendrait à apprécier la légalité de l’appel d’offre public, ce que l’autorité de concurrence ne peut pas faire. Cela relève de la compétence du Juge administratif (on retrouve ici le problème précédent sur l’applicabilité même du droit de la concurrence)

En revanche, le Conseil pourra apprécier si le candidat retenu a abusé de sa position dominante éventuelle en proposant une offre abusive car cette fois les abus, émanant du candidat, sont détachables de l’appréciation de la légalité de l’appel d’offre.

Un autre exemple provient cette fois de la jurisprudence administrative.

C’est l’arrêt du Conseil d'État du 26 mars 1999, Société EDA C/ ADP. Une requérante demandait l’annulation d’une décision par laquelle Aéroport de Paris avait rejeté son offre d’exercer l’activité de loueur de voiture sans chauffeur sur les Aéroports d’Orly et de Roissy, alors que les offres de certains concurrents avaient été acceptées.

« Considérant que s'il appartient à l'autorité administrative affectataire de dépendances du domaine public de gérer celles-ci tant dans l'intérêt du domaine et de son affectation que dans l'intérêt général, il lui incombe en outre lorsque, conformément à l'affectation de ces dépendances, celles-ci sont le siège d'activités de production, de distribution ou de services, de prendre en considération les diverses règles, telles que le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ou l'ordonnance du 1er décembre 1986, dans le cadre desquelles s'exercent ces activités ; qu'il appartient alors au juge de l'excès de pouvoir, à qui il revient d'apprécier la légalité des actes juridiques de gestion du domaine public, de s'assurer que ces actes ont été pris compte tenu de l'ensemble de ces principes et de ces règles et qu'ils en ont fait, en les combinant, une exacte application ;… ».

Le contentieux, extrêmement complexe, obscurcit le critère matériel d’application du droit de la concurrence en introduisant un critère organique. Si bien qu’une large partie de la doctrine milite en faveur d’une unification du contentieux. Deux tendances :

Ø Soit un regroupement total devant l’Autorité de la concurrence

Ø Soit un regroupement devant le Juge administratif lorsqu’une personne publique est en cause et l’Autorité de la concurrence ne s’occuperait que des entreprises privées.

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2 1 C h a p i t r e I · L’entreprise

Section 2 L’organisation de l’entreprise : une entité autonome Pour être considéré comme une entreprise au sens du droit communautaire (et

interne), il ne suffit pas de déployer une activité économique. Il faut être autonome.

Les règles de concurrence supposent en effet l’autonomie de comportement sur le marché des entreprises qu’elles concernent. Il en résulte une autonomie de décision dans la détermination de leur comportement sur le marché (CJCE 21 fév. 1973, CONTINENTAL CAN)

Trois parpaings ont été soulevés :

Ø une filiale (ou une succursale, ou une agence) est-elle autonome vis-à-vis de la société mère (problème des groupes de sociétés ?

Ø un agent commercial est –il autonome vis-à-vis de son commettant ?

Ø et plus récemment : un salarié est-il autonome vis à vis de son employeur ?

Et bah moralité, pas de réponse automatique, c’est toujours du cas par cas.

Paragraphe 1er Une filiale est-elle autonome vis-à-vis de la société mère ?

A · Les enjeux attachés à la détermination de l’autonomie de la filiale

Là, on a soulevé non plus trois mais deux parpaings.

Ø Un accord (qui contiendrait des dispositions anticoncurrentielles) entre une filiale et sa mère tombe-t-il sous le coup de la prohibition des ententes (on se situe donc ici dans le cadre interne du groupe)? L’accord suppose que l’on soit en présence de deux entreprises, et donc que la société filiale puisse être considérée comme telle.

Ø Peut-on imputer à une société mère le comportement de sa filiale vis-à-vis des tiers ?

A chaque fois, même solution : cela dépend de l’autonomie de la filiale. Blasant.

La filiale est certes autonome juridiquement. Mais l’est-elle en fait, ou économiquement ? Détermine-t-elle « de façon autonome son comportement sur le marché » (CJCE 21 fév. 1973, CONTINENTAL CAN, Rec. 215) ?

Bon alors là, retiens ta respiration. *Petite musique de gym-tonic*

Ø Si la filiale est autonome : il peut y avoir entente entre la mère et sa filiale (CJCE 24 oct 1996 Viho Europe aff. C-73/95, R,I-5457)et, si la filiale a eu un comportement anticoncurrentiel vis-à-vis des tiers, elle répond seule de ce comportement (qui ne peut être imputé à la mère)

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · L’entreprise 22

Ø Si la filiale n’est pas autonome (bien qu'ayant une personnalité juridique distincte, elle ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l'essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, compte tenu notamment des liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent la société mère et sa filiale), les autorités de concurrence considèrent que la mère et la filiale constituent en fait une seule entité économique. 2 conséquences

Ù ➀ 1ère conséquence (en interne) : Il ne peut y avoir d’entente entre la mère et la filiale

Formule retenue dans l’affaire Hydrotherm CJCE 12/07/84, aff. 170/83, Rec. 1999 :

L’Art. 85 (devenu 81, 101 today) « ne vise pas les accords ou pratiques concertées entre des entreprises appartenant au même groupe en tant que sociétés mères et filiales si ces entreprises forment une unité économique à l’intérieur de laquelle la filiale ne jouit pas d’une autonomie réelle dans la détermination de ses lignes d’action sur le marché et si ces accords ou pratiques ont pour but d’établir une répartition interne des tâches entre les entreprises »

Par la suite, la référence à la répartition des tâches a disparu.

Ù ➁ 2ème conséquence (en externe). Si la filiale a un comportement anticoncurrentiel dans ses relations avec les tiers, il sera possible d’imputer ce comportement à sa mère, alors même que celle-ci n’a pris aucune part à l’infraction. La seule existence d’une unité économique entre la mère et la filiale explique cette solution (CJCE 10 sept. 2009, AKSO NOBEL, aff. C97/08. La responsabilité de la mère ne repose pas sur une relation d’instigation.

Conséquence concrète : il pourra y avoir responsabilité solidaire de la mère et de la fille pour le paiement de l’amende.

*retour de la petite musique de gym-tonic* allez on expire, on détend les fessiers, et on reprend.

B · La preuve de l’autonomie de la filiale

Le seul constat qu’il existe un groupe de sociétés ne suffit pas à établir que la filiale n’est pas autonome vis-à-vis de la société mère. Il faut prouver cette autonomie (ou cette absence d’autonomie). D’où une distinction. Et oui, encore.

Ø Si la société mère détient 100% du capital de la filiale (ou presque), la filiale est présumée ne pas être autonome vis-à-vis de la société mère. Ce constat suffit et il n’est pas besoin de rapporter d’autres indices de l’absence d’autonomie de la filiale (même s’il est possible d’en invoquer d’autres)

Le bon point, c’est que la jurisprudence est constante, comme le rappelle ce récent arrêt de la CJCE du 10 septembre 2009 pour une affaire 97/08, 3e ch., AKZO NOBEL NV C/ COMMISSION.

Il s’agit d’une présomption simple (donc réfragable). La mère est présumée exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.

Mais la mère pourra tenter de renverser cette présomption. Il lui faudra alors démonter que la filiale est bien autonome dans sa ligne d’action. Si elle conteste

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

23 C h a p i t r e I · L’entreprise

devant le juge communautaire une décision de la Commission de lui infliger une amende pour un comportement commis par sa filiale, elle devra apporter tout élément relatif aux liens économiques, organisationnels et juridiques avec sa filiale de nature à démontrer qu'elles ne constituent pas une seule entité économique (CJCE, 16/XI/2000, 286/98, STORA : Rec. I-9925).

En réalité, présomption difficile à renverser.

Ø autres cas : l’absence d’autonomie doit être démontrée

Différents indices possibles : on regarde la participation au capital, les droits de vote, le niveau d’endettement de la filiale et le fait que la mère soit son principal créditeur, la présence de dirigeants communs, le fait que la mère soit le principal fournisseur ou le principal client…

Paragraphe 2e Un représentant de commerce est–il autonome vis-à-vis de son commettant ? L’agent commercial qui conclut un contrat avec une entreprise aux fins de

représenter ses produits est-il une entreprise, et les deux entités sont-elles liées par les liens d’une entente ? Quel est le degré d’intégration de l’agent ?

En décembre 1962, la Commission de Bruxelles a publié une communication dégageant le critère de la charge du risque avait été retenu. C’est à partir de ce critère qu’elle a distingué les représentants de commerce des distributeurs indépendants.

Il en découle des critères pour déterminer la charge du risque : liberté de fixer les prix et propriété des stocks. S’il fixe les prix et est propriétaire des stocks, il supporte la charge du risque et c’est alors un distributeur indépendant, sinon c’est un représentant de commerce.

Ça a été repris et approfondi en parallèle par les lignes directrices de la Commission sur les restrictions verticales du 13/X/2000, mais ce texte est plus complet :

(…)

Point (15). Le contrat d'agence est considéré comme un vrai contrat d'agence et par conséquent ne relève pas de l'article 81, paragraphe 1, si l'agent ne supporte pas tous les risques ou alors n'en supporte qu'une partie négligeable en ce qui concerne les contrats qu'il conclut et/ou négocie pour le compte du commettant et pour ce qui est des investissements spécifiques au marché considéré pour ce domaine d'activité. La fonction de vente ou d'achat fait alors partie des activités du commettant, même si l'agent est une entreprise distincte. Le commettant supporte donc les risques commerciaux et financiers correspondants, et l'agent n'exerce pas d'activité économique indépendante en ce qui concerne les activités pour lesquelles le commettant l'a désigné. Dans le cas contraire, le contrat d'agence n'est pas considéré comme un vrai contrat d'agence et peut relever de l'article 81, paragraphe 1. Dans ce cas, l'agent supporte de tels risques et sera regardé comme un distributeur indépendant qui doit rester libre de déterminer sa stratégie commerciale de manière à pouvoir recouvrer les investissements qu'il a réalisés et qui sont liés au contrat ou qui sont spécifiques au marché considéré. Les risques qui sont attachés aux prestations de services d'agence en général, comme le risque que les revenus de l'agent soient subordonnés à sa réussite en tant

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · L’entreprise 24

qu'agent ou les investissements généraux dans un local ou du personnel, par exemple, ne sont pas pertinents pour cette appréciation.

Point (16). La question du risque doit être analysée cas par cas et en tenant compte de la réalité économique plutôt que de la forme juridique. Pour autant, la Commission considère que, d'une manière générale, l'article 81, paragraphe 1, n'est pas applicable aux obligations imposées à l'agent quant aux contrats qu'il négocie et/ou conclut pour le compte du commettant lorsque l'agent n'est pas propriétaire des biens contractuels achetés ou vendus ou lorsqu'il ne fournit pas lui-même les services contractuels, et en particulier lorsque l'agent :

- Ne contribue pas aux coûts liés à la fourniture ou à l'achat des biens ou des services contractuels, y compris les coûts de transport des biens; cela n'empêche pas l'agent d'effectuer le service de transport, sous réserve que les coûts soient couverts par le commettant,

- N'est pas tenu, directement ni indirectement, d'investir dans des actions de promotion des ventes, telles qu'une contribution au budget publicitaire du commettant,

- Ne tient pas, à ses propres frais ou à ses propres risques, de stocks de biens contractuels, et notamment ne supporte pas le coût de financement des stocks ni le coût lié à la perte des stocks, et peut retourner au commettant, sans frais, les invendus, à moins que la responsabilité pour faute de l'agent ne soit engagée (par exemple, pour ne pas avoir pris de mesures de sécurité suffisantes pour empêcher cette perte),

- Ne crée pas ou n'exploite pas de services d'après-vente, de réparation ou de garantie, à moins d'être remboursé intégralement par le commettant,

- Ne réalise pas d'investissements spécifiques au marché dans des équipements, des locaux ou la formation du personnel (par exemple, un réservoir d'essence pour la vente au détail de carburant ou un logiciel spécialisé pour la vente de polices d'assurance dans le cas d'agents d'assurance),

- N'assume pas de responsabilité vis-à-vis des tiers pour les dommages causés par le produit vendu (responsabilité du fait des produits), sauf si la responsabilité pour faute de l'agent est engagée à cet égard,

- n'assume pas la responsabilité en cas de non-exécution du contrat par le client, à l'exception de la perte de sa commission, sauf si sa responsabilité pour faute est engagée (par exemple, pour ne pas avoir pris de mesures de sécurité ou contre le vol suffisantes ou de mesures raisonnables pour signaler un vol au commettant ou à la police, ou pour ne pas avoir communiqué au commettant toute information en sa possession concernant la fiabilité financière du client).

Point (17). Cette liste n'est pas exhaustive. Cependant, si l'agent assume un ou plusieurs des risques ou des coûts précités, l'article 81, paragraphe 1, peut s'appliquer au contrat d'agence comme à tout autre accord vertical. »

Ce critère des risques a été souvent repris en jurisprudence. On en tient pour exemple l’arrêt de la CJCE du 16 décembre 1975, SUIKER UNIE, pour des aff. jointes 40/73, R 1663 ; TPICE 11 déc. 2003, MINOAS LINES SA, aff. T-66/99 ; Volkswagen et VAG Leasing, aff. C-266/93.

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25 C h a p i t r e I · L’entreprise

Plus récemment, en application des lignes directrices de 2000, la CJCE s’est intéressée aux relations entre une compagnie pétrolière et ses pompistes. C’est l’arrêt du 15 décembre 2006.

Dans une affaire plus récente, l’arrêt CEPSA du 11 septembre 2008, découlant d’une affaire C279/06, la CJCE a apporté une précision, à savoir que la question du risque assumée par un agent (à apprécier au cas par cas) permet de régler la question de l’imputabilité des comportements litigieux vis-à-vis des tiers.

Mais l’assimilation de l’agent à l’entité du commettant n’est pas absolue : le droit de la concurrence redevient applicable s’agissant des relations entre l’agent et le commettant. Les clauses de non concurrence ou d’exclusivité qui figure par exemple dans le contrat cadre unissant l’agent à son commettant peuvent tomber sous le coup du droit des ententes. Il peut y avoir entente entre l’agent et le commettant.

Paragraphe 3e Un salarié est-il indépendant vis-à-vis de son employeur ? A · Sur un plan national

La décision du conseil de la concurrence 06-MC-02 du 27 juin 2006, COMMUNE DE BOUC BEL AIR, y apporte une réponse négative.

(pour information, voici l’extrait d’un commentaire paru à la RTDCOm 2007-1, note EC)

« Une association Bouc’Choux, gérante de trois structures d’accueil de la petite enfance de la commune, entendait de pas être dépossédée du marché public dont elle était attributaire.

En effet, en application du Code des marchés publics, les contrats relevant des services éducatifs relèvent des marchés publics. Craignant la concurrence d’autres associations dans la perspective d’un prochain appel d’offres, elle avait introduit un avenant au contrat de travail de ses salariés .

Cet avenant prévoyait le versement à chacun d’entre eux (l’association comprenait à l’époque des faits une quarantaine de salariés, 37 ayant signé l’avenant) de la modique somme de 100 000 euros, dans l’hypothèse où leur employeur dépasserait un effectif de 60 salariés. LoL.

Que l’on ne s’y trompe pas : ce n’est pas l’intérêt des salariés qui était visé et le débiteur de cette indemnité n’était pas supposé être l’association Bouc Bel Air. Il était en effet très peu probable que l’effectif de celle-ci passe de 38 à 60. En réalité, c’est une véritable barrière à l’entrée qui était ainsi instituée, dans l’hypothèse où le marché aurait un nouvel attributaire.

En effet, en application de l’article 122-12 du Code du travail, l’employeur entrant (le nouvel attributaire du marché) doit reprendre tous les contrats de travail de l’employeur sortant. Si ce nouvel entrant dépasse le seuil de 60 salariés, hypothèse jugée probable par le Conseil de la concurrence puisque tous les candidats potentiels ont déjà une activité de gestion de crèches dans des communes de la région, l’avenant aura donc vocation à jouer. De quoi décourager de possibles candidats, invités à verser aux salariés signataires de l’avenant la somme globale de 3,3 millions d’euros…

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre II · Le marché pertinent 26

La manœuvre faillit être efficace. Une procédure d’appel d’offres a effectivement été organisée à l’été 2005 et des offres ont été déposées, dont celle de la société Bouc Choux.

Cette dernière a été rejetée, une administration étant dans l’obligation de rejeter une candidature dans le cadre d’un appel d’offre public lorsque le choix de cette entreprise conduirait à avaliser une pratique anticoncurrentielle. Découvrant les risques financiers liés à l’avenant, deux candidats ont par ailleurs retiré leur candidature. Le marché fut finalement signé avec l’association des crèches d’Aix en Provence. Une négociation s’engagea alors entre celle-ci et les salariés signataires, afin qu’ils renoncent à l’avenant. Celle-ci ayant échoué, le nouvel attributaire résilia le contrat la liant à la commune.

Le souci de ne pas interrompre le service public rendu aux enfants contraignit la commune à attribuer à l’association Bouc Choux le marché résultant du nouvel appel d’offres.

(…) La commune a (cependant) saisi le Conseil de la concurrence.

(Problème) Pouvait-on qualifier l’avenant d’entente anticoncurrentielle entre l’association et les salariés ? La commune le soutenait, mais le Conseil s’y refuse. Si l’objet de l’avenant est clairement anticoncurrentiel, puisqu’il s’agissait de créer une « barrière à l’entrée » pour les futurs candidats, le concours de volontés fait défaut : selon le Conseil, « même si tout contrat peut-être le support d’une entente au sens de l’article L. 420-1 du code de commerce, il est difficile de qualifier ainsi une relation qui lie un employeur à son salarié, plaçant ce dernier dans une position de subordination qui rend incertaine l’application de la notion d’accord de volonté au sens du droit des ententes ». Ce sont les relations entre une entreprise et ses salariés sont en cause, ces derniers étant juridiquement et économiquement dépendants de leur employeur.

(…)

Tout n’était pas perdu pour autant pour la commune : là où le concours de volonté fait défaut, la volonté unilatérale peut suffire. Selon le Conseil, l’association Bouc Choux a abusé de sa position dominante (…) »

B · Sur un plan communautaire

La CJCE répond de la même manière avec l’arrêt BECU du 16 septembre 2008 issu de l’affaire C22/98.

« Une réglementation nationale imposant, pour l’exécution de travaux portuaires, le recours à des ouvriers reconnus et le versement d’un certain niveau de salaire n’est pas visée par les règles de concurrence dès lors que les salariés, même pris collectivement, ne constituent pas une entreprise. Ils sont dans une relation de subordination avec les entreprises qui recourent à leurs services et forment avec elle une unité économique ».

[fin du rattrapage]

Chapitre II Le marché pertinent Cette notion est empruntée à la théorie économique. Elle donne des sensations à la

doctrine qui y voit un engin essentiel permettant d’identifier et définir le périmètre à

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

27 C h a p i t r e I I · Le marché pertinent

l’intérieur duquel s’exerce la concurrence entre entreprises. Dixit Mme PASTUREL, le marché, c’est le théâtre, la scène sur laquelle se sont déroulés les agissements incriminés.

Section 1 Questions et remarques préalables

Paragraphe 1er Pourquoi définir un marché de référence ? Cela permet d’apprécier le pouvoir de marché d’une entreprise, mais aussi les

concurrents de l’entreprise.

Le document de base, c’est une communication du 9 décembre 1997, adoptée par la Commission européenne. A sont point 2, « la délimitation du marché doit permettre de déterminer s’il existe des concurrents réels capables de peser sur le comportement des entreprises en cause ou de les empêcher d’agir, indépendamment des pressions qu’exerce une concurrence effective ». Cette délimitation du marché se retrouve dans toutes les branches du Droit, du Droit des concentrations au Droit des abus de position dominante… où un arrêt du TPICE du 6 juillet 2000 a vu cette définition adéquate du marché en cause être une condition nécessaire et préalable du jugement porté sur un comportement car avant d’établir un abus de position dominante, il faut établir une position dominante sur le marché donné. Une autre branche du Droit, c’est le Droit des ententes. Une pratique d’entente ne sera interdite parce qu’elle produit un effet anticoncurrentiel que si cet effet anticoncurrentiel est… sensible. Pour ce faire, il faut déterminer au préalable un marché de référence. Cet effet sensible s’appréciera finalement au regard des parts de marché.

Paragraphe 2e Remarques sur le marché Ça c’est du titre.

Un marché peut évoluer dans le temps. Les marchés évoluent. La question à se poser alors, c’est de savoir à quel moment se situer pour délimiter un marché. En Droit des pratiques anticoncurrentielles, lorsqu’il est question d’abus de position dominante ou de pratique anticoncurrentielle, on se situe à la date de la pratique elle-même. L’analyse se fait ex post. On regarde de ce qui s’est passé avant la pratique anticoncurrentielle. Pour les concentrations, l’analyse est davantage dynamique, prospective, ex ante. On va probabiliser (le terme n’existe pas mais ça fait plus mieux). Ici Jean-Pierre Gaillard, à la bourse de Paris.

Il existe souvent plusieurs marchés au sein d’une même chaîne économique. Les produits, services circulent. on va ainsi confronter l’offre d’un fournisseur et la demande d’un distributeur dans un marché en amont. Un autre marché va résulter de l’offre du distributeur avec la demande du consommateur, et alors, c’est le marché en aval. Un même opérateur peut donc demander et offrir.

Un marché repose généralement sur certaine stabilité. Son existence peut être bien plus ponctuelle. En Droit français, on considère qu’un appel d’offre de l’État pour la construction d’un ouvrage entraîne un marché public. Ce marché public est en soi un marché pertinent.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre II · Le marché pertinent 28

Paragraphe 3e La délimitation du marché, question de droit ou de fait ? Dans un premier temps, les juridictions de contrôle ont semblé considérer que la

délimitation du marché était une question de fait échappant à leur contrôle. Ce n’est plus le cas. CJUE, Cour de cassation vérifient désormais la correcte délimitation du marché de référence. Ça reste une question de droit. En France, un arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 1992, FRANCE LOISIRS l’a exprimé.

Section 2 Comment définir un marché de référence Pas de définition légale du marché de référence, si bien que la jurisprudence s’en

est chargée. C’est le lieu théorique où se confrontent offre et demande de produits ou services substituables entre eux, mais non substituables aux autres.

La Communication du 9 décembre 1997 a également une importance.

Le marché pertinent rassemble deux sous-marchés. Le marché économique et le marché géographique. Le marché économique est le marché des produits ou des services. il comprend donc tous les produits et / ou services que le consommateur considère comme interchangeables en raison notamment de leurs caractéristiques, de leur prix ou de l’usage auquel ils sont destinés.

Le marché géographique, lui, comprend le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans l’offre des biens et services en cause, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes.

Paragraphe 1er Le marché économique On va raisonner en terme de substituabilité. Pour appartenir à un même marché,

des produits et / ou services doivent être substituables entre eux. Ils doivent constituer des moyens alternatifs de satisfaire la même demande. Mais bon, deux produits sont rarement des substituts parfaits. Ils seront plus ou moins substituables. Bon et c’est sans prendre en compte les yeux des consommateurs, embués par le péché ! la vente de téléviseurs est ainsi considérée comme substituable à la location d’un téléviseur. A l’inverse, il arrivera que deux produits, a priori proches, se retrouvent comme non substituables par des consommateurs ou utilisateurs. Buk. Genre les annuaires.

Pour apprécier la substituabilité, on va raisonner par un faisceau d’indices.

A · Les méthodes qualitatives permettant d’apprécier la substituabilité

Ces méthodes sont communes au droit interne et communautaire.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

29 C h a p i t r e I I · Le marché pertinent

Un premier critère, c’est la perception et les besoins des utilisateurs. Bref, comment les produits ou services sont perçus par les utilisateurs.

On s’intéresse ici à la perception substantielle des utilisateurs. L’arrêt UNITED BRANDS de la CJUE du 14 février 1978, également nommée affaire de la banane. La question, c’était de savoir si la banane était ou non substituable à d’autres fruits. Pour les utilisateurs, bah non, c’est pas substituables à d’autres fruits. La banane, ça n’a pas de pépin, ça s’épluche, ça se transporte facilement… bref la banane n’est pas une courgette.

La décision BRITISH SUGAR de la Commission du 18 juillet 1988 a bizarrement traité des sucres. En réalité il y a plusieurs marchés de sucre. Il y a le sucre en morceau, le sucre liquide et le sirop. Les consommateurs ne perçoivent pas de la même manière ces différents sucres. Les édulcorants, c’est également à part.

L’arrêt de la Chambre commerciale du 25 avril 1989 à propos des produits parapharmaceutiques a posé la question de savoir s’il y avait un marché spécifique à ces produits, ou s’il y en avait un plus étroit, des produits pharmaceutiques vendus en pharmacie. Pour les consommateurs, ces produits vendus en pharmacie ne sont pas substituables aux produits pharmaceutiques vendus en supermarché.

Il arrive que les autorités de la concurrence fassent des enquêtes, qu’elles recourent à des études… psychosociologiques. Une décision 99-D-45 du Conseil de la concurrence du 30 juin 1999 visait le secteur des jouets. La société MATEL était-elle dominante ? le Conseil de la concurrence a médité sur les poupées poupon et les poupées mannequins. Oh my god. SATAN sort de ce corps. Le Conseil de la concurrence s’est donc intéressé aux caractères des produits. Il a même pris le luxe de demandé l’avis d’experts. Moi ce que j’en dis, c’est vive les LEGO. Bon toujours est-il que MATEL a été considérée comme dominante.

Les caractéristiques du produit, physiques et matérielles, sont un deuxième critère.

On va donc s’intéresser à la forme, à la composition, au confort d’utilisation, mais aussi à la durabilité ou au conditionnement voire les fonctions organiques du produit. Des vitamines ne sont ainsi pas substituables entre elles. Il y a marché des vitamines B, un marché du viagra, etc. ce qui importe aussi, c’est le coût du produit. Un écart de prix substantiel est un indice de non-substituabilité. La commission, le 5 décembre 2001, a considéré que les services de courrier entre entreprises sont distincts du service général de la Poste. La tarification est bizarrement plus avantageuse dans le premier cas.

Les conditions d’utilisation sont un troisième critère. Pour la Télévision numérique, les techniques de diffusion par satellite et par câble ne sont pas substituables à la diffusion par voie hertzienne.

Les modes de commercialisation sont un quatrième. Le fait qu’un fabriquant recoure à un nombre restreint de revendeurs est un indice de non-substituabilité. Une affaire a ainsi visé les montres Cartier.

La nature de la demande est un autre critère. Le marché grand public se dissocie du marché professionnel. Au sein d’une catégorie d’acheteurs, il arrivera que l’on distingue des utilisateurs spécialisés aux besoins spécifiques.

Un dernier exemple tient à l’image et à la notoriété du produit. La notoriété de France télécom est un exemple. La retransmission des droits télévisuels pour les compétitions sportives a également posé des questions. Le football et l’attractivité (?) de la ligue 1 requiert qu’on isole ce marché précis.

B · Les méthodes quantitatives

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Chapitre II · Le marché pertinent 30

Ces méthodes consistent à analyser l’élasticité de la demande, quelquefois de l’offre, sur le marché. on va éventuellement s’intéresser à la capacité d’un produit à se reporter vers un autre.

On va ainsi analyser son passé récent, faire une enquête auprès de consommateurs, mais on va surtout appliquer la méthode du SSNIP Test (Small but Significant and Non-transitory Increase in Price). Buk. La méthode consiste à méditer sur le point de savoir si, à la suite d’une variation légère, mais constante, du prix d’un produit, les clients du produit en cause ont la possibilité d’accéder de façon immédiate et efficace à un produit similaire. Généralement, on s’intéresse à une variation de prix comprise entre 5 et 10 %. Le consommateur utilise le produit A. Si ce produit voit son prix augmenter de manière constante, va-t-il pouvoir se reporter sur un produit B. Si c’est le cas, les produits A et B seront considérés comme substituables, appartenant donc au même marché. TGV vs avion, Coca Cola vs Pepsi…

On peut aussi raisonner sur l’élasticité de l’offre. La question n’est alors plus de savoir si le consommateur peut ou pas se reporter, mais de savoir si le fabriquant, l’entreprise, a ou non la possibilité d’investir dans un autre produit, bref d’accéder à un nouveau marché. L’entreprise a-t-elle la possibilité d’y accéder facilement ?

Avec l’arrêt du 14 novembre 1996 et l’affaire TETRAPAK, la CJUE s’est posé la question de savoir s’il y avait un marché large des cartons ou un marché plus réduit des cartons aseptiques. On entendait savoir si une autre entreprise pouvait ou pas facilement se lancer dans ce type de carton. La réponse est négative. Il y a un marché spécifique des cartons aseptiques, et TETRAPAK était considérée comme dominante.

Paragraphe 2e Le marché géographique

A · Sens de la délimitation du marché géographique

La notion de marché de produit, de marché économique, permet d’évaluer les possibilités pour l’utilisateur de se tourner vers d’autres produits servant aux mêmes fins. on va partir du prélat que ce travail-là a été effectué. Il y a un lien de substituabilité.

Le marché géographique sert à délimiter l’aire à l’intérieur de laquelle l’utilisateur peut se tourner vers d’autres fournisseurs. Cette notion de marché géographique permet d’apprécier si les demandeurs ont dans les faits la possibilité d’arbitrer entre des produits et services certes substituables mais disponibles dans des zones géographiques distinctes. La question, c’est celle de l’accès au produit. Il va falloir déterminer concrètement l’espace au sein duquel une pratique va être examinée.

B · Critère de délimitation du marché géographique

Marché mondial ? Marché de l’Union Européenne ? Marché de certains États membres ? Marché d’un État ? Marché d’une région ?…

L’arrêt du 14 février 1978 UNITED BRANDS a vu la CJCE estimer qu’il faille raisonner par référence à une zone géographique définie dans laquelle le produit en cause est commercialisé et ou les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes pour pouvoir apprécier le jeu de la puissance économique de l’entreprise intéressée. L’idée étant que des entreprises qui offrent des produits substituables et qui subissent les mêmes contraintes fassent partie du même marché géographique. Les offreurs seront sur un pied d’égalité. Ils auront des chances égales vis-à-vis des consommateurs.

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3 1 C h a p i t r e I I · Le marché pertinent

1 · Les critères qualitatifs ou objectifs de délimitation du marché géographique

On applique ici aussi la méthode du faisceau d’indices. Ou du suce-miette.

Premier critère. Le prix.

Dans sa communication de 1997, la Commission considère que l’existence de prix différents dans les États membres est une bonne indication de marchés nationaux séparés.

Deuxième critère. Les facteurs liés aux consommateurs.

On s’intéresse là aux caractéristiques de la demande. Le consommateur achète plutôt local, national, communautaire mondial, spatial ? on va tenir compte des habitudes des consommateurs. On tient compte de la mode. Mais éventuellement aussi des préjugés nationaux, des préférences nationales. Les obstacles culturels, linguistiques sont à prendre en compte. Les habitudes culturelles et les traditions aussi. Les prestations des pompes funèbres (!) ont permis d’observer qu’à la suite d’un décès, les membres de la famille ne s’amusent généralement pas à farfouiller la meilleure offre sur 300 km à la ronde. On reste dans le local, le communal.

Autre critère, les facteurs liés à la nature du produit.

Certains produits voyagent mal. la fraise. La fraise n’est pas le chou-fleur. Le marché est généralement régional. Enfin on trouve souvent des fraises en provenance d’Espagne mais bon.

Le coût du transport est un autre critère.

Plus le produit est coûteux et difficile à transporter, plus le territoire géographique se réduit. Les frais de transport ont ainsi une incidence on ne peut plus importante, d’autant plus au regard du coût du produit lui-même. Le sucre. Ça ne coûte pas cher. Mais c’est lourd. Faire voyager du sucre, ça coûter bien plus cher que le produire. Les facilités de transport jouent également.

Les obstacles tarifaires et les contraintes réglementaires sont un autre critère.

Si pour franchir un territoire, il faut payer une taxe, cela réduit la zone géographique. Si un État impose des normes qualitatives pour un produit ou service, cela réduit aussi la zone géographique.

L’organisation de ou des entreprises en cause révèle un autre critère.

Le fait qu’une entreprise dispose de filiales sur tout le territoire communautaire aboutira à ce que l’on retienne plus facilement le marché communautaire.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire 32

2 · Le critère de l’élasticité de la demande et de l’offre

--

Conclusion

Le marché géographique est extensible ou réductible à l’extrême. On va du mondial au microlocal.

TITRE II • Le champ d’application du Droit communautaire de la concurrence

Chapitre I Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire

Pas les situations strictement internes ou totalement hors de l’Union. Moralité, il faut que la pratique affecte le commerce intracommunautaire. Cette condition d’affectation du commerce intracommunautaire est posée dans deux articles phares, les Art. 101 et 102, qui interdisent respectivement les pratiques anticoncurrentielles et les abus de position dominante. Vu l’Art. 101, sont incompatibles avec le marché commun et interdits tout accord, pratique concertée, bref toutes ententes susceptibles d’affecter le commerce intracommunautaire et qui ont pour objet de porter atteinte à la concurrence. Et c’est pareil à l’Art. 102. Le règlement applicable aux concentrations reprend implicitement cette formule. Les soldes qui conditionnent son application contiennent implicitement cette condition d’affectation.

Deux notions sont à dissocier.

On comprend qu’il doit y avoir une affectation sensible du commerce au Droit communautaire. c’est une condition d’applicabilité. Cette condition ne doit pas être confondue avec l’affectation, elle aussi sensible, de la concurrence. Cette affectation sensible est une condition à la prohibition des pratiques. On s’intéresse alors plus à la licéité quand ce n’est pas le cas dans l’affectation du commerce intracommunautaire.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

33 C h a p i t r e I · Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire

Section 1 La condition d’affectation du commerce entre États membres Cette notion est autonome. Elle est de Droit, contrôlée par les juridictions. Cette

notion est ressortie de l’action de la jurisprudence. La Commission a synthétisé tout ça dans une communication du 27 avril 2004, intitulée ligne directrice relative à la notion d’affectation du commerce figurant aux Art. 81 et 82 {101 et 102}. Il en découle le champ d’application du Droit communautaire de la concurrence, mais sert aussi de clé de répartition entre le Droit national et le Droit communautaire.

L’affaire du Club LOMBARD a vu le TPICE rendre un arrêt le 14 décembre 2006, qui vient d’être confirmé le 27 septembre 2009 par la CJCE. En l’espèce, les principales banques autrichiennes s’étaient entendues dans un club LOMBARD réunissant les représentants de 8 grands établissements. Il y fixaient les paramètres de la concurrence dans le secteur bancaire. Roh. La Commission en a eu vent, a condamné ces banques en 2002. Mais les banques contestaient qu’on leur applique le Droit communautaire. pour les banques, cette affaire est strictement autrichienne, strictement interne. Au point 162, la condition relative à l’affectation du commerce vise à déterminer le domaine du Droit communautaire par rapport à celui des États membres. C’est ainsi que relèvent du domaine du Droit communautaire toute entente et toute pratique susceptible de remettre en cause la liberté du commerce entre États membres dans un sens qui pourrait nuire à la réalisation des objectifs d’un marché unique entre les États membres, notamment en cloisonnant les marchés nationaux ou en modifiant la structure de la concurrence dans le Marché commun. Les comportements dont les effets se localisent à l’intérieur du territoire d’un seul État membre relèvent de l’ordre juridique national.

Paragraphe 1er Sens de la notion d’affectation du commerce entre État membre Qu’entendre par commerce ?

La Commission énonce que la notion de commerce n’est pas limitée aux échanges transfrontaliers traditionnels de produits et de services mais a une portée plus large, qui recouvre toute activité économique internationale, y compris l’établissement ou les échanges monétaires.

A · Sens du mot affecter

Au départ, certains entendaient y voire un terme péjoratif, quand d’autres le voyaient le plus neutre. finalement, c’est cette dernière qui a été retenue. La CJCE l’a affirmé dans un arrêt de principe BRASSERIE DE HAECHT du 12 décembre 1967. La Cour retient pour formule ce qui est devenu un standard jurisprudentiel. Cette condition d’affectation du commerce intracommunautaire est remplie dès lors que la pratique est en mesure « d’exercer éventuellement une incidence directe ou indirecte sur les courants d’échange entre États membres, de contribuer au cloisonnement du Marché commun, de rendre plus difficile l’interpénétration économique voulue par le Traité ».

La Commission a eu elle pour formulation en 2004 qu’il y a « affectation dès l’instant où le commerce se développer du fait de la pratique anticoncurrentielle dans d’autres conditions qui ne l’auraient fait sans elle ».

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre I · Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire 34

On va recourir à un faisceau d’indice, un ensemble de facteurs. La jurisprudence considère que cette affectation résulte en général de la réunion de plusieurs facteurs qui, prises isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants.

B · Illustration

Le Droit communautaire de la concurrence s’applique à différents types de situation.

1 · Des accords ou abus qui couvrent plusieurs États membres

Ces pratiques-là vont par nature affecter le commerce entre États membres. Cela vise par exemple les ententes à l’exportation ou à l’importation. Une entente qui interdit l’exportation d’un produit, c’est le mal.

Une entente horizontale ou verticale couvre plusieurs États membres. L’entente horizontale vise des entreprises au même stade du circuit économique. C’est par défaut une entente entre fabricants, entre grossistes, distributeurs… qui visent donc une même clientèle L’entente verticale voit les entreprises intervenir à des stades différents du circuit économique. ce ne sont pas les mêmes clientèles qui sont visées.

Les ententes horizontales sont plus graves car elles voient des concurrents directs s’entendre. Les ententes verticales n’opposent pas directement les concurrents. Elles sont appréciées de manière moins sévère. Enfin tout dépendra de l’entente.

Des abus de position dominante peuvent aussi couvrir plusieurs États membres.

Ces hypothèses sont relativement claires.

2 · Des accords ou abus mis en œuvre sur le territoire d’un seul État membre voire d’une partie de l’État membre

Si ces accords ou abus produisent un effet de cloisonnement.

Ici, il faudra rechercher l’effet de cloisonnement. Ce qui sera plus… fastidieux. Les ententes horizontales qui couvrent l’ensemble d’un État membre sont un exemple. dans ce cadre, la jurisprudence communautaire, relayée par la jurisprudence française, considère constamment consolide par nature les cloisonnements nationaux.

L’affaire LOMBARD voyait les banques s’opposer à ce que la Commission ne les remette à leur place car c’était pour eux strictement national. Mais justement, l’entente vise l’ensemble du territoire, qui produit un effet de cloisonnement. Cette présomption ne jouera cependant plus lorsque l’entente ne couvre qu’une partie du territoire national. Il faudra alors rechercher où se cache l’effet de cloisonnement.

Il en est de même pour les accords verticaux. Il faudra également rechercher l’effet de cloisonnement.

3 · Des pratiques extracommunautaires qui déploient leurs effets sur le territoire communautaire

L’idée, c’est qu’une entreprise étrangère met en œuvre une entente dont les effets vont s’entendre même dans le territoire communautaire.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

35 C h a p i t r e I · Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire

C · Précision sur les Art. 101 et 102 et par les lignes directrices

Vu l’Art. 101 (ex 81), l’accord doit être susceptible d’affecter le commerce entre États membres. La Commission précise que le fait qu’une entreprise donnée n’ait contribué que faiblement à cette affectation est indifférent. Ce qui compte, c’est l’accord.

Vu l’Art. 102 (ex 82), la Commission énonce que c’est l’abus qui doit affecter le commerce entre États membres.

Paragraphe 2e Le degré de compatibilité de l’affectation du commerce entre États membres L’arrêt du 12 décembre 1967 BRASSERIE DE HAECHT est fondamental.

L’accord dont il s’agit doit, sur la base d’un ensemble d’éléments objectifs de Droit ou de fait, permettre d’envisager avec un degré de probabilité suffisant qu’il puisse exercer une influence directe, actuelle ou potentielle sur les courants d’échange entre États membres.

Il faut en retenir qu’on prend en compte non seulement les atteintes directes au commerce intracommunautaire, mais également les atteintes indirectes. On se contente en outre de ce que les pratiques en cause soient susceptibles d’affecter le commerce intracommunautaire.

A · La possibilité d’effet direct ou indirect sur le commerce entre États membres

1 · L’effet direct

Le plus fréquent.

Ici, les effets sur le commerce intracommunautaire sont en rapport direct avec les produits concernés par la pratique.

Un fournisseur décide de limiter l’octroi de remises au produit vendu par les distributeurs dans l’État membre où ces distributeurs sont établis.

2 · L’effet indirect

La pratique produit alors des effets sur des produits apparentés à ceux qui sont directement concernés.

Il y a accord sur un produit semi-fini. Ce produit semi-fini n’est pas commercialisé sur le territoire de l’Union Européenne. En revanche, ce produit semi-fini est ensuite intégré à un produit fini, lui commercialisé sur le territoire communautaire. il y a alors affectation indirecte. L’accord porte sur l’accord semi-fini mais il y a un effet sur le produit fini.

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Chapitre I · Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire 36

B · La possibilité d’effet actuel ou potentiel

La jurisprudence est constante sur ce point.

La pratique ne doit pas nécessairement avoir un effet sur le territoire communautaire. il suffit qu’elle soit apte à produire un tel effet. Il n’y aura à calculer le volume du commerce affecté. Dans l’affaire du Club LOMBARD, c’est réaffirmé. La seule aptitude suffit.

Une clause d’interdiction d’exporter, jamais mise en œuvre, n’en est pas néanmoins considérée comme de nature à affecter le commerce intracommunautaire, notamment par le fait qu’elle peut créer un climat psychologique contribuant potentiellement à une répartition des marchés.

Probabilité, aptitude, c’est similaire. On va se reposer sur des critères. La nature de l’accord, la nature de la pratique, les comportements, pratiques qui affectent par hypothèse le territoire communautaire genre l’entente à l’importation ou l’exportation ou qui concerne plusieurs États membres. On va prendre en compte la nature du produit ou service. Lorsque le commerce des produits en cause est aisé, ou lorsque ces produits sont importants pour des entreprises qui veulent s’implanter sur le marché, il y aura probabilité ou aptitude. On va également prendre en compte la position et l’importance des entreprises concernées. Si une entreprise est importante, la probabilité que leur pratique affecte le commerce intracommunautaire est plus importante que dans le cas où leur envergure serait plus faible.

La seule limite, c’est qu’on ne peut se contenter d’effets abstraits ou hypothétiques sur le commerce intracommunautaire.

Section 2 Les seuils d’affectation du commerce intracommunautaire : L’effet sensible

On ne soumet pas au Droit communautaire toutes les ententes et les pratiques émanant d’entreprises dominantes. On ne va pas s’intéresser aux pratiques de petite envergure.

Pour que le Droit communautaire s’applique, il faut non seulement que le commerce intracommunautaire soit affecté, mais qu’il le soit encore de manière sensible.

Dans l’affaire du Club LOMBARD, l’effet ne doit pas être insignifiant pour le TPICE. Pour la Commission, la pratique doit être susceptible d’avoir un niveau minimal d’effet transfrontalier à l’intérieur de la communauté.

Reste à savoir quand, comment opère cette sensibilité.

Dans la communication de 2004, la Commission considère qu’elle n’est pas capable de déterminer de manière générale quand une pratique a un effet sensible. En revanche, elle détermine lorsqu’une pratique n’a pas d’effet sensible.

La présomption est négative.

Il en résulte deux séries de règles.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

37 C h a p i t r e I · Le critère d’application du Droit communautaire : l’affectation du commerce intracommunautaire

1 · Les pratiques entre PME non susceptibles d’affecter de manière sensible le jeu de la concurrence

Le commerce intracommunautaire n’est pas sensiblement affecté. La présomption est simple. La Commission pourrait démontrer que ces mêmes PME se livrent en fait à un commerce transfrontalier qui a des effets sur le commerce entre États membres.

2 · Les accords qui n’affectent pas sensiblement le jeu de la concurrence lorsque deux conditions sont cumulativement remplies

a · La part de marché

La part de marché totale des parties sur le Marché communautaire en cause affecté par l’accord n’excède pas 5 %.

b · Le chiffre d’affaire annuel opéré dans la Communauté

Le chiffre d’affaire annuel opéré dans la Communauté par les entreprises en cause avec les produits concernés par l’accord est inférieur à 40 millions d’euros. On ne retient donc pas le chiffre d’affaire intégral.

On va distinguer selon que l’accord est horizontal ou vertical.

Dans le cas d’un accord horizontal, on additionne les chiffres d’affaire de toutes les entreprises. Si l’accord est vertical, on se cristallise sur le chiffre d’affaire du fournisseur.

Il peut y avoir des périodes de tolérance de 2 ans. mais on vise tous les accords, directs ou indirects.

c · Accords particuliers

La Commission ne s’arrête pas là.

Concernant un type spécifique d’accords, qui, par nature affectent le commerce intracommunautaire, il y aura affectation sensible si soit les entreprises en cause réalisent des parts de marché supérieures à 5 %, soit les entreprises en cause réalisent un chiffre d’affaire supérieur à 40 millions d’euros.

Ces lignes directrices ne sont toutefois pas contraignantes. Elles n’ont pas de force contraignante, tout en sachant qu’elles sont généralement suivies. Elles sont appliquées par la Commission européenne, mais aussi spontanément par les autorités nationales.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre II · Les relations entre le Droit communautaire et les États tiers 38

Chapitre II Les relations entre le Droit communautaire et les États tiers Bref, l’application du Droit communautaire de la concurrence à des éléments non

communautaires.

Paragraphe 1er L’application du Droit communautaire à des pratiques anticoncurrentielles présentant des éléments d’extranéité

Il faut que les pratiques examinées produisent un effet sur le territoire communautaire. Ceci pousse à méditer sur deux situations.

La première, c’est de savoir ce qu’il se passe pour des pratiques dont les effets sont dirigés vers un ou plusieurs États tiers. Normalement, le droit communautaire des pratiques anticoncurrentielles ne s’applique pas. Mais bon, ce sera rarement le cas.

La deuxième, c’est de savoir ce qu’il se passe pour des pratiques effectuées par des entreprises d’États tiers dont les effets visent les États membres. Le Droit communautaire s’appliquera. Ce qui compte, c’est que la pratique soit mise en œuvre sur le territoire communautaire. Ceci dit, la règle ne coule pas si facilement de source que ça, car les entreprises ont leur siège en dehors de l’Union Européenne. Au départ, les autorités communautaires, pour justifier l’application du Droit communautaire, ont recouru à une théorie un peu casse-noisette, à savoir l’unité de l’entreprise économique. on recherchait si la société-mère extérieure disposait d’une filiale ou d’un autre élément dans l’Union Européenne. On rattachait ensuite cet élément pour lui porter un coup de Droit communautaire. Le Droit américain, lui, se fatigue moins et applique ses règles de manière beaucoup plus décomplexée, extraterritoriale. Le droit américain s’applique dès lors qu’un effet touche le territoire américain. L’affaire ALCOA de 1945 l’illustre.

Avec l’arrêt pâte de bois du 27 septembre 1988, la CJUE énonce que « faire dépendre l’applicabilité des interdictions énoncées par l’Art. 85 (aujourd'hui Art. 101) du lieu de formation de l’entente, aboutirait à l’évidence à fournir aux entreprises un moyen commode de se soustraire aux dites interdictions. Ce qui est déterminant est donc le lieu où l’entente est mise en œuvre ». Dans cette affaire, l’entente unissait des entreprises américaine, canadienne, finnoise.

Paragraphe 2e L’application du Droit communautaire aux opérations de concentration présentant des éléments d’extranéité

L’Art. 1er des règlements concentrations, en l’occurrence celui 139-2004, pose des seuils, dont certains en chiffres d’affaire, devant être réalisés sur le territoire communautaire, ce quelle que soit l’origine des entreprises. On pourrait donc appliquer le Droit communautaire des concentrations à des entreprises étrangères dès lors que les seuils sont remplis.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

39 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

D’où des chaleurs. Le TPICE affirme la compétence du règlement dans un arrêt GENCOR LDT du 25 mars 1999.

Paragraphe 3e Critique de l’application extraterritoriale des règles de la concurrence Il y a une plus grande efficacité des règles. Cette théorie de l’effet, de la mise en

œuvre, ne heurte aucune règle de Droit international public. L’affaire du LOTUS examinée le 7 septembre 1927 par la CPJI le démontre.

Mais bon, cette règle n’est pas parfaite. Elle reste inefficace dans certains cas, notamment pour obtenir des preuves qui sont situées sur des territoires autres que l’Union Européenne. A supposer que la pratique soit démontrée, imposer des mesures de coercition ne sera pas non plus aisé, du fait du principe de territorialité.

Ensuite, cette application extraterritoriale est parfois inégalitaire. Pour M. SIROEN, l’unilatéralisme n’est accessible qu’aux pays qui bénéficient d’un réel pouvoir d’influence. Lorsque les USA appliquent des sanctions à une entreprise située sur un État tiers, son influence le permet.

Enfin, cette théorie est source de tensions politiques. Un État sera rarement content de voir un État étranger toucher à l’une de ses entreprises. Lorsque la Commission refuse une opération de concentration dans le domaine aéronautique impliquant de grandes entreprises américaines, il y a quelques frictions politiques, voire des mesures de répercussion commerciales. EADS montre-toi !

D’où la recherche d’autres modes, genre des conventions bilatérales pour faciliter les échanges de preuve, pour faciliter la prise en compte des intérêts de chacun, etc… un exemple notable, c’est la convention signée en 1991, réformée en 1995, entre Usa et Union Européenne.

Un autre mode, en cours d’élaboration, c’est tout simplement un Droit international de la concurrence, avec des règles communes, minimum. Il y aurait alors une institution compétente pour les appliquer. Ce pourrait être l’OMC comme l’OCDE, la CNUCED…

Chapitre III Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

Les règles coexistent. En matière de concentration, on avoir une règle dite de compétence partagée, au sens où vont être réparties les compétences. Le Droit communautaire des concentrations sera applicable à titre exclusif lorsque l’opération de concentration est de dimension communautaire, lorsque par exemple certains seuils sont atteints. Le Droit national sera lui compétent mais en dehors de ces seuils communautaires.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 40

Lorsque le commerce intracommunautaire entre États membres est affecté, les deux droits pourront s’appliquer. Suite à une grande réforme du Droit communautaire de la concurrence de 2002, il était envisagé de fermer l’application du Droit national lorsque le commerce intracommunautaire était affecté. Cette proposition de la Commission européenne a engendré tellement de résistances qu’on a préféré maintenir cette compétence parallèle.

Section apéricub • Historique du Droit français Le Droit français de la concurrence s’est construit par étapes. Le premier grand

texte, bien light, remonte à 1945.

Paragraphe 1er L’ordonnance du 30 juin 1945 et ses suites On s’inscrivait alors dans un régime d’économie administrée, avec un contrôle des

prix. Quasiment aucune règle ne visait la concurrence.

Le premier texte d’importance qui lui a été greffé, le 9 août 1953, a intégré le refus de vente entre professionnels. Il a en outre intégré les ententes anticoncurrentielles, avec, comme d’habitude, des exemptions. Le Ministre de l'économie s’en chargeait. Il pouvait s’aider de la Commission technique des ententes. Il pouvait saisir le Parquet pour lancer d’éventuelles poursuites. Le dispositif était alors entièrement répressif. Seules les personnes physiques étaient poursuivies.

La Loi du 2 juillet 1963 a incriminé les abus de position dominante. Il a permis au Ministre de proposer un règlement amiable au lieu de transmettre directement au Parquet. C’est le début du contrôle administratif.

La Loi du 19 juillet 1977 a elle pondu la Commission de la Concurrence. Cette Loi introduit en outre un contrôle des concentrations. En Droit communautaire, faudra attendre 1989. Cette Loi supprime en outre le règlement amiable. Elle permet au Ministre de prononcer injonctions et amendes.

Toutes ces lois ont été regroupées derrière l’ordonnance de 1945 et il faut attendre 1986 pour voir un changement notable.

Paragraphe 2e L’ordonnance du 1er décembre 1986 C’est par elle que prend forme le Droit de la concurrence actuel. Elle met fin au

contrôle des prix. L’ordonnance s’intitule d’ailleurs pour la liberté des prix et de la concurrence. Cette ordonnance va racler les fonds de tiroir du Droit communautaire de la concurrence. Elle engendre un Conseil de la Concurrence qui remplace la Commission de la concurrence. Ce Conseil reçoit compétence en lieux et places du Ministre de l’économique au sujet des pratiques anticoncurrentielles. Il dispose en outre d’une large compétence consultative. Le Ministre de l'économie reste lui compétent en matière de concentration, avec pour obligation de saisir le Conseil nouvellement créé et pour certaines hypothèses.

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4 1 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

Deux incriminations apparaissent. Les abus de dépendance économique et les prix abusivement bas au préjudice des consommateurs.

Enfin prend forme un Droit des pratiques dites restrictives de concurrence. Le Droit est davantage microéconomique, avec par exemple la prohibition des discriminations entre entreprises, ou encore la prohibition des ventes liées.

L’ordonnance de 1986 a été réformée avec la Loi NRE du 15 mai 2001 qui en profite pour introduire une nouvelle notion, la clémence. Elle crée encore une procédure de non-contestation de griefs, source de réduction des sanctions. Cette Loi NRE rafraichit encore le Droit des concentrations, avec des contrôles plus systématiques et plus transparents, tout en enrichissant le champ des pratiques restrictives.

Par ailleurs, toute une série de textes ponctuels, genre l’ordonnance du 25 mars 2004, introduit une règle de minimis, un seuil de sensibilité en matière de concurrence.

L’ordonnance du 4 novembre 2004 tâte elle des prescriptions, des astreintes et crée la procédure d’engagement, procédure qui existe également en Droit communautaire. Cela envisage un traitement négocié pour un problème identifié, voyant l’entreprise prendre des engagements spontanés et qui lui empêche d’être sanctionnée si ces engagements sont efficaces.. En outre, le secret des affaires y est rénové.

Plusieurs décrets de la fin 2005, comme ceux du 27 ou du 30, créent notamment des tribunaux spécialisés en Droit de la concurrence.

Paragraphe 3e La LME du 4 août 2008, l’ordonnance du 13 novembre 2008 & leurs décrets d’application de février et mars 2009

La Commission ATTALI, dite pour la libération de la croissance, était dirigée donc par Jacques. il fallait… libérer la croissance française. Il en a découlé la volonté de ravaler le Droit concurrentiel. Bizarrement, des changements sont apparus plus rapidement que prévu.

La Loi LME crée une autorité de la concurrence qui remplace le Conseil de la concurrence. Cette loi élargit en outre les compétences. Cette Loi confie ainsi à l’autorité de la concurrence le contrôle des concentrations. L’idée était de permettre à l’Autorité de la concurrence d’exercer d’une manière intégrée toutes les activités de régulation de la concurrence. Le Droit français et l'intervention du Ministre de l'économie était jusque-là considéré comme quelque peu… poussiéreux.

On lui confie également des pouvoirs d’instruction, au détriment de la DGCCRF, mais pour partie seulement. par ailleurs, cette autorité de la concurrence dispose dorénavant de pouvoirs d'intervention accrus, notamment en cas d’avis. Elle peut donner son avis de manière spontanée, donc sans avoir à être saisie. Le Ministre de l'économie ne perd pas tous ses pouvoirs pour autant. Il garde ainsi un pouvoir résiduel en Droit des concentrations. S’il parvient à démontrer que la concentration touche l’intérêt général, et donc pas seulement strictement concurrentiel. Le Ministre dispose en outre d’un contrôle sur les micropratiques concurrentielles. La Loi renforce et améliore les droits des entreprises.

Le Droit des pratiques concurrentielles est assez intrusif, inquisitoire. En contrepartie de cette sévérité, les garanties procédurales sont toujours plus importantes. Un nouveau personnage, le Conseiller auditeur, intégré à l’Autorité de la concurrence, a pour fonction de vérifier que les droits de la défense des parties en jeu sont bien respectées. Les

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 42

règles qui l’entourent découlent d’un décret du 26 mars. Ce Conseiller auditeur a été nommé pour la première fois par un arrêté du 10 juillet 2009.

Le secret des affaires est amélioré. Un décret du 10 février 2009 va dans ce sens.

La prescription aussi subit quelques aménagements. Jusqu’ici, c’était 5 ans, délai qui était trop facilement interrompu. Dorénavant, c’est 10 ans entre le premier acte d’instruction et le moment où la décision est véritablement rendue.

Les Art. L410 + CCom s’intéressent aux mécanismes sur les concentrations (≈⋲). Les Art. L420 + CCom visent les pratiques anticoncurrentielles. Le droit des concentrations est fixé aux Art. L430 + CCom. Le Droit des pratiques restrictives, microéconomique, est visé par les Art. L 440 + CCom. L’Art. 442-6 CCom tout particulièrement. Les pouvoirs d’enquête, notamment pour la DGCCRF et compagnie, sont ciblés par les Art. L450 + CCom. L’autorité de la concurrence est quant à elle encadrée par les Art. L460 + CCom. Les dispositions fourre-tout sont rangées dans les Art. L470 + CCom.

Le Droit communautaire est très proche du Droit français, notamment pour les pratiques anticoncurrentielles et les concentrations…

Outre la coexistence de normes, il y a coexistence d’institutions.

Section 1 Les organismes de contrôle dans les deux ordres juridiques

Paragraphe 1er Rappel sommaire du cadre institutionnel communautaire

A · La Commission

Gardienne de la correcte application des textes. C’est l’organe de sanction. Cette Commission peut ouvrir une procédure à l’encontre d’un État membre si celui-ci ne respecte les règles communautaires de la concurrence, notamment au regard des aides d’État, genre l’action en manquement. Elle peut également sabrer les entreprises qui adoptent des pratiques anticoncurrentielles. 3 à 4 milliards d’amende par an. c’est encore la Commission qui autorise les opérations de concentration à dimension communautaire.

Bref, elle contrôle. Mais elle a également compétence législative. Elle a toujours eu compétence pour formuler des propositions. De fait, elle est à la source de nombreux textes en matière de Droit de la concurrence, comme les règlements. Elle pouvait proposer des règlements d’exemption, règlements permettant d’autoriser malgré tout des pratiques anticoncurrentielles. Elle avait habilitation directe par le Conseil. Le Traité de Lisbonne a entendu renforcer les compétences propres de la Commission. Elle peut désormais elle-même adopter des textes.

En outre, la Commission européenne a une compétence… pseudo législative, dans la mesure où elle est à l’origine d’une brochette de communications et lignes directrices. Cette compétence est pseudo législative car ces communications et lignes directrices n’ont pas de portée contraignante, mais revêtent tout de même une autorité réelle. Une communication de décembre 2008 traite ainsi des pratiques d’éviction au sein des abus de position dominante. Ces communications et lignes directrices sont supposées récapituler

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

43 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

tant la jurisprudence que la position de la Commission. Ces documents éclairent les États et entreprises pour leur faciliter la tâche. Mais ces textes sont quelquefois.

B · Le TPIUE et la CJUE

Le TPIUE (ex TPICE) remonte à 1989. Ses domaines sont précis. Le principal, c’est le Droit de la concurrence. Il statue sur tous les recours contre les décisions de la Commission européenne en matière de la concurrence. Lorsque le TPIUE rejette un recours, l’appelant peut former un dernier recours devant la CJUE (ex CJCE) qui ne s’intéressera qu’aux points de droit. La CJUE est l’institution suprême de contrôle. Cette elle qui, in fine, assure le respect du Droit dans l’interprétation et l’application des traités. La CJUE a ainsi une compétence importante pour guider les juges nationaux avec les renvois préjudiciels en interprétation. Les arrêts préjudiciels ont une importance notable dans la construction du Droit communautaire de la concurrence.

Paragraphe 2e Cadre institutionnel français

A · L’autorité de la concurrence et ses organes de contrôle

Spécialement chargée d’appliquer le Droit de la concurrence.

1 · L’autorité de la concurrence

Cette autorité remonte donc à la LME du 4 août 2008. Elle est véritablement entrée en vigueur lorsque ses membres ont été nommés, le 2 mars 2009. Cette autorité de la concurrence n’est pas une juridiction. C’est une autorité administrative indépendante. L’Art. L461-1 CCom le mentionne de manière expresse. Elle agit au nom de l’État sans relever de son autorité. L’autorité de la concurrence dispose d’un pouvoir d’autosaisine, ce dont ne dispose pas une juridiction. elle fait partie du réseau d’autorité de la concurrence institué par le Règlement 1/2003.

a · Composition

Autorité collégiale, composée de 17 membres, pour 5 ans. Son président est nommé en raison de ses compétences. Ça alors. C’est Bruno LASSERRE, ex-président du Conseil de la concurrence. Il y a 6 magistrats. Mais aussi 5 personnalités choisies en fonction de leurs compétences en matière économique ou de concurrence et consommation. Parmi ces personnalités, on trouve quand même un professeur de Droit. Il y a encore 5 personnalités qui exercent ou ont exercé leur activité dans les secteurs de la production, de la distribution, de l’artisanat, des services ou des professions libérales.

Le mandat de chacun est renouvelable une fois. L’Art. L461-2 l’illustre.

b · Compétence

L’autorité a une compétence ramasse-miette.

Sa compétence est ainsi contentieuse. C’est cette autorité de la concurrence qui mène une action répressive à l’encontre des entreprises qui se livrent à des pratiques anticoncurrentielles. Elle statue à la fois sur le fondement du Droit national et sur le

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 44

fondement du Droit communautaire, du moins si le commerce intracommunautaire est touché. Elle peut ne se reposer que sur le Droit communautaire, ce qui est toutefois rare.

L’autorité peut être saisie sur demande du Ministre chargé de l'économie, genre suite à une enquête. Elle peut l’être encore par des entreprises victimes d’agissements anticoncurrentiels. Les collectivités territoriales peuvent aussi y faire appel, de même que les organisations professionnelles ou syndicales, voire aussi les associations de consommateurs. QUE CHOISIR est ainsi assez active. Les particuliers, eux, bah non. L’éventuelle solution serait de faire appel à la DGCCRF.

L’autorité de la concurrence dispose de pouvoirs d’enquête, de pouvoirs d’instruction, que chapeaute le rapporteur général. Un grand principe, c’est celui de la séparation entre l’instruction et le jugement. Le principe du procès équitable n’y est pas pour rien.

Elle peut accorder des mesures conservatoires en cas d’urgence. Elle peut sanctionner au fond via des amendes et / ou des injonctions.

Elle peut encore accepter des engagements.

Autre possibilité, c’est celle de transmettre le dossier au Juge pénal, pour quelques hypothèses.

Sa compétence est d’attribution. Seuls ces pouvoirs sont visés. Dans le cas où elle serait saisie pour autre chose, elle doit décliner sa compétence. L’autorité de la concurrence n’est pas compétente pour annuler un contrat contraire au Droit de la concurrence, de même que pour n’accorder que des dommages et intérêts. Ce se fera au profit d’un Juge.

Outre les contrats, elle n’est pas compétente pour annuler un acte administratif, pour apprécier sa légalité, etc. Là aussi, au profit d’un Juge, probablement le Juge administratif.

Autre compétence, c’est celle en matière de contrôle des opérations de concentration, à la place du Ministre de l'économie. C’est elle qui autorise ou non la concentration, et qui la soumet éventuellement à condition ou la subordonne au respect d’engagements.

Enfin, Elle a une compétence est consultative. Elle donne son avis. Pour des cas obligatoires ou non. Pour les cas obligatoires, la Loi impose ainsi de saisir l’autorité de la concurrence pour tous les projets de décret qui intéressent la concurrence. L’Art. L410-2 et L462-2 CCom. Il y a aussi des cas de saisine facultative, par le Gouvernement. Le Ministre de l'économie l’a saisie au sujet de la numérisation des salles de cinéma ou encore de la publicité sur internet. Le Parlement, les collectivités territoriales, les organisations professionnelles, syndicales, de consommateur peuvent lui poser des questions relatives à la concurrence. Les juridictions civiles, pénales, administratives qui statuent sur le fondement des textes de Droit de la concurrence, communautaire ou nationaux, peuvent lui demander conseil. L’autorité de la concurrence peut encore être saisie par des autorités sectorielles, genre le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel), la CRE (Commission de régulation de l’énergie, créée suite à l’ouverture du secteur de l’énergie), et l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes). Bon alors le particulier, là aussi, il y a pas droit. Par contre, elle peut s’autosaisir pour avis. L’Art. L462-4 permet à l’autorité de se saisir d’office sur toute question de concurrence, et recommander toute mesure utile au Ministre de l'économie ou au Ministre en charge du secteur.

Récemment, le 25 février 2010, elle s’est autosaisie au sujet de la grande distribution, et se propose farfouiller dans les contrats de franchise.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

45 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

2 · Les organes de contrôle de l’autorité de la concurrence

Evidemment, les décisions adoptées peuvent faire l’objet de recours. Les décisions qui tâtent des pratiques anticoncurrentielles verront le recours porté devant la Cour d'appel de Paris, sous 1 mois à compter de la notification. Une chambre spécialisée, la chambre H, brrr, s’en charge. L’Art. L464-8 CCom le démontre. Le recours est en annulation ou réformation, mais n’est pas suspensif.

La Cour d'appel de Paris peut s’exciter sur les décisions de l’autorité de la concurrence. L’arrêt de la Cour d'appel de Paris peut faire l’objet d’un pourvoi devant la Cour de cassation, sous 1 mois à compter de la notification de l’arrêt d’appel.

La Loi NRE octroie pour possibilité à l’autorité de la concurrence de saisir elle-même d’un pourvoi. Un Juge insatisfait de l’arrêt d’appel peut aller devant la Cour de cassation. C’est… original.

B · Les juridictions

Juridictions de première instance.

Les juges ont compétence pour appliquer les règles nationales de concurrence. Les Art. 420 + CCom le rappellent. Mais pas seulement, les Art. 101 et 102 également.

On a ainsi des juges civils et commerciaux. Le Juge de Droit commun a été considéré comme mal armé pour appliquer correctement les règles de la concurrence. On a donc créé des juridictions spécialisées avec la Loi NRE. Leur principe figure à l’Art. L420-7 CCom. L’idée est de retirer le contentieux au Juge de Droit commun pour le confier aux juridictions spécialisées. Il faudra attendre le décret du 30 décembre 2005 pour que soient désignées ces juridictions spécialement compétentes. Moralité, seuls 8 tribunaux sont spécialisés en Droit de la concurrence. Marseille, Bordeaux, Lille, Fort-de-France, Lyon, Nancy, Paris et Rennes. Pauvre tribunal de commerce de Nanterre. Le contentieux issu de ces 8 juridictions spécialisées peut aussi faire l’objet de recours, là aussi centralisé devant la Cour d'appel de Paris.

Le Juge administratif sera parfois compétent.

Le Juge pénal aussi. Il intervient pour des hypothèses visées à l’Art. L’420-6 CCom. Il peut poursuivre là des personnes physiques qui ont pris part personnelle frauduleuse et déterminante à l’a commission d’une pratique anticoncurrentielle. Le contentieux pénal reste limité. L’affaire des lycées en Ile-de-France est toutefois un bon exemple.

C · Le Ministre chargé de l'économie

Il n’a plus la compétence consistant à contrôler les concentrations.

Il conserve une compétence résiduelle lorsqu’est en cause une raison d’Intérêt général. Le Ministre n’a pour l’instant jamais évoqué une affaire le mettant en cause. Il n’a jamais cherché à retirer un dossier à l’autorité de la concurrentielle.

Il a une compétence relative aux micropratiques anticoncurrentielles. Il traite des pratiques répondant à trois critères cumulatifs. En tête desquels une pratique insusceptible d’être visée par les Art. 101 et 102. Si la pratique affecte le Droit communautaire, le Ministre n’y touche pas. La micropratique doit encore avoir une dimension locale. Il faut en outre que les entreprises visées aient chacun réalisé en France un chiffre d’affaire inférieur à 50 millions d’euros, 100 millions lorsqu’elles sont prises ensembles.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 46

On préfère à « micropratique » le terme de pratique de dimension locale.

Le Ministre de l'économie dispose de deux pouvoirs dans ce domaine, un pouvoir d’injonction de cesser les pratiques anticoncurrentielles, et un pouvoir de transiger, pour un montant maximum de 75000 € ou 5 % du chiffre d’affaires (la plus faible des sommes étant retenue fonction des circonstances).

Avec le décret du 10 février 2009, une sorte de procédure contradictoire est mise en place.

Des passerelles ont été établies entre les services ministériels et l’autorité de la concurrence, avec pour possibilité au rapporteur général de préempter l’affaire, donc éjecter le Ministre, au niveau par exemple de l’instruction ou du traitement. Le décret du 20 mars 2009 va dans ce sens.

Le Ministre est assisté dans sa mission par la DGCCRF, qui présente l’avantage de posséder d’un maillage territorial dense car elle se double notamment de directions régionales.

Section 2 L’application du Droit de la concurrence par les différentes instances Les pratiques anticoncurrentielles essentiellement.

Paragraphe 1er La concurrence de compétences pour appliquer le Droit communautaire de la concurrence

A · Des compétences parallèles : le conflit d’autorité

Alors ici, qui intervient ?

Et bah tout d’abord la Commission européenne. Compétente au premier chef, le principe est toutefois qu’elle se limite aux seules affaires qui présentent un intérêt particulier pour la Communauté. La Commission européenne a pour avantage qu’elle soit maître de l’opportunité des poursuites. C’est elle qui fait le choix de poursuivre ou non.

A côté d’elle, en même temps, avant ou après, ce sont les instances nationales. Elles sont le Droit mais aussi l'obligation d’appliquer le Droit communautaire de la concurrence lorsque le commerce intracommunautaire est affecté. Cela résulte de l’Art. 3 du Règlement 1/2003 adopté le 16 décembre 2002. Jusqu’à récemment, lorsque le Conseil de la concurrence était saisi, il avait pour manie de n’appliquer que le droit interne, sans toucher le Droit communautaire. Le Juge commercial ou civil d’ailleurs. Il a été décidé que ça suffisait, que momo ne devait plus pousser le bouchon. Les autorités et juridictions de droit commun sont dorénavant obligées d’appliquer le Droit communautaire. Cela explique que, désormais et très souvent, les textes français et communautaires sont visés.

Le contentieux est objectif devant l’autorité de la concurrence, quand le contentieux est subjectif devant le Juge.

Application du Droit européen de la concurrence (affectation du commerce entre États membres)

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47 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

Droit des pratiques anticoncurrentielles Droit des concentrations

Art. 102 et 102 TFUE

Compétence communautaire

Commission

TPIUE

CJUE

Amendes et injonctions

Le contentieux est objectif

Compétence nationale

L420-1 et L420-2. CCom

Compétence exclusive de la Commission

TPIUE

CJUE

Application du Droit national

ADLC

CA de Paris

Cour de cassation

Amendes et injonctions

Le contentieux est là aussi objectif

8 juridictions nationales

CAP

Cour de cassation

Contentieux subjectif

dommages et intérêts/nullité

Juge administratif

CA Paris

CAA

CE

Juge pénal

420-6 CCom

Ministre de l’économie

460-9 CCom

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 48

B · Le principe de coopération entre les différentes instances

Le Droit communautaire est ici applicable.

On distingue deux niveaux de coopération.

1 · Tout d’abord la coopération entre autorités de la concurrence

En décembre 2002, on a réfléchi. Buk. Le but, c’était d’améliorer la coopération entre Commission, autorité nationales et autorités nationales de concurrence.

Avec la grande réforme initiée par le Règlement 1/2003 du 16 décembre 2002 a été créé un réseau des autorités de la concurrence, le réseau ECN. L’Art. 11 du Règlement 1/2003 le cite expressément. La communication de la Commission du 27 avril 2004 explicite son fonctionnement (coopération au sein du réseau ECN).

Ce réseau est pyramidal. En haut, la Commission (organe de tutelle), en bas les autorités nationales de la concurrence.

Tous les États membres doivent désigner sur le territoire au moins une autorité de la concurrence, une autorité spécialement chargée d’appliquer les règles de concurrence. En France, il y a ADLC et Ministre de l'économie. Ces différentes autorités coopèrent avec la Commission. Ça, c’est pour la coopération verticale. Elles coopèrent également entre elles. Ça, c’est la coopération horizontale.

Il en résulte une division du travail, une répartition du travail. Il arrive fréquemment qu’une pratique concurrentielle ait des effets outre frontières. Plusieurs États seront donc visés. On va désigner l’autorité la mieux placée. Et cela repose sur des critères.

Pour déterminer l’autorité nationale de la concurrence la mieux placée, il y a trois critères. Le premier, c’est sur son territoire que la pratique entraîne des effets substantiels, qu’elle est mise en œuvre ou qu’elle trouve son origine sur le territoire. C’est une sorte de critère de proximité. Le second, c’est que l’autorité soit la plus à même de faire cesser efficacement la pratique, ce, dans son intégralité. Le troisième critère repose sur le fait que l’autorité soit en mesure de rassembler des preuves de la pratique, éventuellement avec le concours des autres autorités nationales de la concurrence. Dans la majorité des cas, tout ça doit permettre d’en désigner une, poussant les autres à se dessaisir à son profit. Mais bon, elles n’en ont qu’une option. Il arrivera que, par application de ces critères, il y a plusieurs autorités bien placées. Alors, il y aura un chef de file désigné… En France, cette faculté a été établie avec l’ordonnance du 4 novembre 2004.

La Commission sera bien placée si plus de trois États membres sont concernés par la pratique et surtout si cette pratique présente un intérêt communautaire. La différence substantielle étant que l’ouverture d’une procédure par la Commission dessaisie immédiatement les autorités nationales. On voit là combien la Commission est un organe de tutelle des autres autorités nationales de la concurrence. La réattribution des affaires est réputée se faire dans les deux mois suivant la première information rendue. Le réseau ECN informatique, crypté, est réputé faire circuler tout ça le plus rapidement possible.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence

49 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

2 · Soutiens réciproques

Les autorités membres du réseau sont invitées à s’aider. La première expression, prévue à l’Art. 12 du règlement 1/2003, consiste à prévoir l’échange d’informations entre ces autorités, même si celles-ci sont confidentielles. Si l’échange porte sur des secrets d’affaire, il est prévu qu’alors, la transmission de l’information sera subordonnée au fait que l’autorité qui réceptionne protège le secret d’affaire aussi bien que l’autorité qui transfère l’information. L’Art. L462-9 CCom l’a intégré en Droit français, suite à une ordonnance du 4 novembre 2004.

Le règlement 1/2003 prévoit encore que ces autorités peuvent s’assister lors des enquêtes qu’elles mènent. Il est ainsi prévu que la Commission européenne puisse charger une autorité de la concurrence nationale de faire sur son territoire ses besoins, pardon, une inspection en son nom et pour son compte.

Par ailleurs, il existe une coopération entre autorités nationales de la concurrence, mais qui est facultative, lorsqu’une autorité nationale demande de faire sur son territoire encore ses besoins en son nom et pour son compte. L’autorité à laquelle est faite cette demande pourra s’y soumettre ou non.

En France, dans le cadre de l’affaire de l’approvisionnement en kérosène d’Air France à la Réunion, avec une décision du 4 décembre 2008, 08-D-30, le Conseil de la concurrence a sanctionné SHELL, ESSO, CHEVRON, TOTAL de s’être concertées entre elles lors d’un appel d’offre réalisé par Air France en 2002. Oh. Le but était de savoir qui fournirait du carburant à Air France lorsque ses avions font escale à la Réunion. Forcément, il y a eu quelques problèmes de preuves, car certaines compagnies pétrolières avaient leurs sièges au Royaume-Uni. Le Conseil de la concurrence a quémandé l'assistance de l’autorité anglaise qui a accepté. Le Conseil de la concurrence a distingué 3 phases. Une première, de demande d’assistance, qui relève du droit de l’autorité nationale requérante. Une deuxième, d’autorisation, par l’autorité nationale requise, où l’opération d’investigation s’effectue elle-même. Buk. C’est le droit de l’autorité nationale requise qui s’applique alors, genre pour le déroulement de l’opération. La troisième, d’utilisation des documents transmis à la suite de ces opérations d’investigation, le Droit européen et le Droit de l’autorité requérante s’appliquent. La Cour d'appel de Paris a approuvé la décision du Conseil le 4 novembre 2009. Cet arrêt vérifie bien que le commerce entre États membres est affecté pour justification l’application du règlement communautaire.

C · La coopération de la Commission européenne avec les juridictions

Pour une même affaire, on peut voir l'intervention concomitante ou successive de la Commission européenne et de juridictions nationales. Reste à savoir comment concilier leur pluralité de compétence.

La coopération entre la Commission européenne et les juridictions nationales n’est pas aussi poussée que celle entre les autorités nationales de la concurrence, notamment parce qu’il n’y a pas de réseau équivalent. Par ailleurs, alors que la Commission européenne est l’organe de tutelle des autorités nationale de concurrence, il n’en est pas de même pour les juridictions nationales. C’est le principe d’indépendance institutionnelle des juridictions par rapport à la Commission.

Cette coopération a été cernée par la CJCE, du moins dans un premier temps. Deux arrêts sont à relever. Le premier remonte au 28 février 1991, c’est l’arrêt DELIMITIS. Le second, c’est l’arrêt du 14 décembre 2000 MASTERFOOD a été un peu plus gourmand. Il en résulte qu’en aucun cas le Juge n’a pour obligation de surseoir à statuer au profit de la Commission européenne si celle-ci statue en même temps que lui. Restent les cas où il est

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Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 50

« opportun », notamment lorsqu’est en cause un problème de bonne administration de la Justice.

Mais depuis, avec l'intervention du Règlement 1/2003, l’Art. 15 a encadré tout ça. La communication du 27 avril 2004 l’a précisé. Ces deux textes poursuivent deux finalités.

1 · Eviter les conflits de décision

Ces textes dissocient deux situations selon l’organe qui statue en premier.

a · La juridiction nationale statue en premier, ou en même temps que la Commission

Bah là, la juridiction n’a pas pour obligation de surseoir à statuer, dans l’attente que la Commission se prononce. Mais bon, il est dit que la juridiction doit « éviter » d’adopter une décision qui irait à l’encontre de celle envisagée par la Commission.

Le Juge national doit se demander ce quoi vers penche la Commission. La juridiction peut ainsi sonder la Commission pour savoir si elle a ouvert une procédure. Si celle-ci répond par la positive, alors le Juge décider ou non de surseoir à statuer, dans l’attente qu’elle rende sa décision. Le Juge peut très bien n’avoir aucun doute sur l’issue de la décision et statuera alors sans attendre.

Il va alors se référer à la pratique décisionnelle antérieure de la Commission. Il pourra encore se référer à des lignes directrices, aux communications pondues régulièrement par la Commission.

b · La Commission statue la première

La juridiction prend acte de ce que la Commission dit. En aucun cas, la juridiction ne peut aboutir à une solution contraire.

Vu le principe primauté, le Droit communautaire s’impose aux juridictions nationales. Si le Juge considère que la Commission a mal appliqué le Droit communautaire, il doit toujours surseoir à statuer mais dans l’idée de faire un recours préjudiciel devant la CJCE.

2 · Aides réciproques

a · La Commission aide les juridictions nationales

La Commission aide d’abord les juridictions nationales. Le règlement 1/2003 lui donne une fonction particulière, l’amicus curiae, c’est l’ami de la Cour. Oh.

La Commission peut ainsi communiquer des informations aux juridictions nationales qui la saisiraient d’une information allant dans ce sens. Ces informations vont porter sur des points factuels, juridiques, économiques. La France a organisé tout ça dans un décret du 27 décembre 2005, introduit dans le Code de Commerce à l’Art. R470-4 CCom. Les parties à la procédure devront ainsi pouvoir présenter des observations à la suite des documents reçus. C’est une application du principe du contradictoire.

La Commission européenne peut encore transmettre des avis, sur la demande des juridictions. Cet avis peut porter sur toute question relevant de la compétence de la Commission, donc là aussi économique, juridique ou factuel. La Commission rend son avis sans en parler aux parties. Elle le fait, sous 4 mois. Le décret du 27 décembre 2005 a organisé les modalités procédurales. L’Art. 470-3 CCom l’a repris. La juridiction doit prévenir les

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5 1 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

parties à la procédure avant de solliciter l’avis de la Commission. Une fois l’avis reçu, il faudra leur demander si elles ont des observations à faire.

La Commission peut encore présenter des observations, de manière spontanée. La Commission apprend qu’une procédure est en cours devant une juridiction nationale, l’affaire l’intéresse, elle estime qu’il de l’intérêt pour le Droit communautaire qu’elle donne son avis. Ces observations pourront être tant écrites qu’orales. Alors, un fonctionnaire européen se ramène au procès. Cette intrusion orale dans le procès n’est cependant possible qu’avec l’accord de la juridiction nationale.

Dans l’affaire PIERRE FABRE et l’arrêt de la Cour d'appel de Paris du 29 octobre 2009, on s’intéresse aux cosmétiques et à l’hygiène. Pendant longtemps, ils interdisaient la vente en ligne de leurs produits. Le Conseil de la Concurrence s’y est intéressé. Pour lui, c’est anticoncurrentiel. La plupart des fabricants de cosmétiques et compagnie ont alors pris des engagements pour rendre licite la vente en ligne sous conditions. Forcément, il fallait qu’une société vienne casser les genoux. Bah qu’à cela ne tienne, la société PIERRE FABRE s’est faite souffletée par le Conseil de la Concurrence, puis par la Cour d'appel de Paris. La Commission a présenté des observations, au soutien du Conseil de la Concurrence. La Cour d'appel de Paris en a pris note, mais a tout de même posé un recours préjudiciel devant la CJCE pour en savoir plus.

b · Les juridictions aident la Commission

Vu l’Art. 15 §2 du Règlement 1/2003, les juridictions des États membres doivent envoyer copie à la Commission de tout jugement rendu statuant sur le fondement des Art. 101 et 102 (81 et 82). L’idée est d’aider à savoir comment les juridictions statuent, bref à mieux connaître la jurisprudence nationale.

L’Art. R470-2 CCom l’intègre.

Les juridictions doivent encore apporter leur soutien à la Commission dans le cadre d’une inspection qu’elle déciderait de diligenter. Elle aura alors et le soutien de la juridiction et le soutien de l’autorité nationale de la concurrence.

L’Art. L470-6 CCom le révèle.

Paragraphe 2e L’application parallèle du Droit communautaire et des droits nationaux : Le conflit de normes

Dès lorsqu’il y aurait eu affectation du commerce intracommunautaire, seul le Droit communautaire de la concurrence aurait eu vocation à s’appliquer. Mais cela n’ayant pas été retenu, l’application reste parallèle voire cumulative des deux corps de norme.

Pour cumuler, on va appliquer le principe de primauté, posé par l’arrêt WALT WILHEM du 13 février 1969. L’idée est ici que l’application du Droit national ne doive priver le Droit communautaire de son effet utile.

D’où deux conséquences. La première, c’est que les juridictions et les autorités nationales ont l'obligation de laisser inappliquée toute disposition de la Loi nationale qui serait contraire au Droit communautaire.

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Droit de la concurrence Les principes de base du Droit communautaire de la concurrence 2009 - 2010

Chapitre III · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence 52

L’arrêt CONZORTIO INDUSTRIE FIAMMIFERI du 9 septembre 2003 C198-01 rappelle cette obligation et s’est au passage intéressée aux sanctions qui pourraient être encourues par les entreprises mises en cause. On ne peut pas les sanctionner si leur comportement viole le Droit communautaire tout en étant conforme au droit national, du moins pour les comportements passés. En revanche, une fois que le Juge a déclaré le Droit national inapplicable parce que contraire au Droit communautaire, si les entreprises persévèrent dans leur débauche, elles pourront être sanctionnées.

La seconde conséquence, c’est que l’application du Droit national ne doive pas permettre d’adopter une solution contraire à celle qui découlerait d’une décision communautaire.

Le règlement 1/2003 distingue la question des ententes avec la question des comportements unilatéraux.

La théorie de la barrière unique, ou théorie de la simple barrière, s’applique ici. l’application parallèle du Droit national de la concurrence à des accords ne peut aboutir à des conclusions différentes de celles qui découlent de l’application du droit communautaire. Si, au regard du Droit communautaire, l’accord est considéré comme n’étant pas contraire à l’Art. 101 §1 (81 §1), ou qu’il est considéré comme contraire, mais susceptible d’exemption, vu l’Art. 101 §3 (81 §3), bref qu’il est licite au regard du Droit communautaire, bah alors, l’autorité ou la juridiction ne pourra interdire cet accord en application du Droit national. Si l’entente est considérée comme contraire au même article, et non susceptible d’exemptions, là… oulà… et bah il ne pourra pas être validé au regard du Droit national.

Pour les comportements unilatéraux, le règlement 1/2003 ne pose pas la même obligation de convergence. L’Art. 3.2 du règlement est visé. Le Droit national peut prévoir une législation plus stricte que celle qui existe au niveau communautaire. En France, le Code de Commerce prohibe non seulement les abus de position dominante, mais encore les abus de dépendance économique. L’Art. 420-2 fait pschitt à tout cela lors de ses deux premiers alinéas. L’Art. 3.3 du règlement 1/2003 prévoit encore qu’il soit possible d’adopter des dispositions nationales visant des objectifs différents de ceux poursuivis par le Droit des pratiques anticoncurrentielles. Le Droit communautaire entendait valider les législations telles que françaises, sur les pratiques restrictives de la concurrence.

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Le Droit communautaire de la concurrence appliqué aux entreprises

53 C h a p i t r e I I I · Les relations entre le Droit communautaire avec les droits nationaux de la concurrence

PARTIE II • Le Droit communautaire de la concurrence appliqué aux entreprises

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Droit de la concurrence Le Droit communautaire de la concurrence appliqué aux entreprises

2009 - 2010

Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 54

Les entreprises sont assez surveillées. Leurs comportements font l’objet d’un contrôle tantôt a posteriori, tantôt a priori.

Pour un contrôle a posteriori, ce sont essentiellement les comportements des entreprises qui sont sanctionnés au regard du droit des pratiques anticoncurrentielles.

Pour un contrôle a priori, le contrôle vise davantage les structures du marché, les structures des entreprises, bien plus que leurs comportements.

TITRE I • Le contrôle des comportements : les pratiques anticoncurrentielles

Chapitre I Les ententes anticoncurrentielles Dixit MMES FRISON-ROCHE et PAYET, « L’entente traduit une compréhension, une

intelligence ».

De là à ce que ce soit suspect, pas nécessairement, mais cette intelligence, cette compréhension commune le sera.

Dixit Adam SMITH, en 1776, « des gens du même métier se rencontrent rarement pour se distraire et s’amuser sans que la conversation se termine par une conspiration contre la société ou par quelque manigance pour faire monter les prix ».

Depuis quelques décennies, on a pris conscience des conséquences de ces ententes, des dommages qui pouvaient en résulter. L’OCDE passe cela à la loupe et en qualifie certaines injustifiables, recommandant à leur égard la plus grande sévérité. Concrètement, cela va se traduire par des moyens d’investigation évolués, et des sanctions très lourdes lorsque ces ententes sont démontrées.

Ces ententes coûtent généralement plusieurs milliards par an à la collectivité.

En droit communautaire, le contrôle des ententes anticoncurrentielles repose sur l’Art. 101 (81), sur l’Art. 420-1 CCom.

L’Art. 101 §1 (81 §1) évoque que « sont incompatibles avec le Marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toute décision d’association d’entreprise et toute pratique concertée qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre États membres et qui

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2009 - 2010 Droit de la concurrence Le Droit communautaire de la concurrence appliqué aux entreprises

55 C h a p i t r e I · Les ententes anticoncurrentielles

ont pour objet ou pour effet d’empêcher de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du Marché commun.

L’Art. L420-1 CCom exprime que « sont prohibées, même par l’intermédiaire direct ou indirect d’une société du groupe implanté hors de France, lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir effet d’empêcher de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu’elles tendent à [liste d’ententes possibles] ».

D’où finalement, un principe d’interdiction.

Ces deux textes énoncent des sanctions, à savoir la sanction de nullité. au niveau communautaire, l’Art. 101 §2 le démontre. Au niveau français, la nullité est prévue à l’Art. L420-3 CCom. Par ailleurs, les deux textes prévoient des exemptions, bref la possibilité d’autoriser la pratique anticoncurrentielle. C’est le cas aux Art. 101 §3 (81 §3) et L420-4 CCom.

Section 1 Les conditions de la prohibition Deux conditions, l’entente, ou la concertation, et un effet anticoncurrentiel.

Paragraphe 1er Définition de l’entente Il n’y a pas de définition de l’entente. Communément, l’entente suppose un

concours de volontés.

A · Un concours de volonté

Exigence régulièrement affirmée.

1 · La volonté individuelle de chacune des parties à l’entente

Cette volonté individuelle implique une intension de s’entendre. Il y a renonciation à l’autonomie. Il y a volonté de s’entendre et non pas de porter atteinte à la concurrence.

Cette exigence d’une volonté de s’entendre a conséquences, 4 principales.

Il n’y aura pas entente lorsque le comportement des entreprises sur un marché n’est pas le fruit d’une volonté de s’entendre, mais est purement fortuit.

Il n’y aura pas non plus entente si le comportement est imposé par la structure même du marché. on touche alors aux marchés oligopolistiques (où seuls quelques acteurs sont donc présents), et on parlera d’immunité oligopolistique. Il y a des phénomènes de parallélisme comportementaux. Ces parallélismes ne puisent pas dans une volonté commune de s’entendre, mais dans la structure même du marché. cela n’empêche pas pour autant qu’il ne puisse pas y avoir d’entente. s’il y a par exemple des échanges d’informations visant des buts communs, qu’une transparence artificielle est établie, ceux-ci seront sabrés.

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 56

Il n’y aura encore pas d’entente lorsqu’un texte contraignant impose une concertation entre les acteurs. le comportement est dû aux pouvoirs publics. Un arrêt du 11 novembre 1997, Commission et France contre LADBROKE RACING LDT.

Les Art. 85 et 86 (101 et 102 aujourd'hui) ne visent que les comportements d’entreprise qui ont été adoptés par les entreprises de leur part. Si un comportement anticoncurrentiel est imposé par une législation nationale ou si celle-ci crée un cadre juridique qui élimine tout comportement concurrentiel de leur part, les Art. 85 et 86 ne sont pas d’application. Dans une telle situation, la restriction de concurrence ne trouve pas sa cause dans des comportements autonomes des entreprises. En revanche, les Art. 85 et 86 peuvent s’appliquer s’il s’avère que la législation laisse subsister la possibilité d’une concurrence susceptible d’être restreinte par des comportements autonomes des entreprises.

Moralité, on distingue entre les comportements imposés, où il n’y aura pas d’entente, et les comportements encouragés, auxquels cas il pourrait y avoir entente.

Au niveau national, considérera qu’il y a entente au regard de l’Art. L420-1, mais du fait de l’exemption prévue à l’Art. L420-4.

Enfin, il ne devrait pas y avoir entente lorsque le comportement est imposé par le partenaire. C’est le reflet de la violence économique. entre professionnels, il peut y avoir des situations d’extrême inégalité entre les acteurs économiques, certains pressurant d’autres et compagnie. Vu les positions des autorités de la concurrence ou de la Commission, le fait qu’il y ait des pressions ne fait ceci dit pas obstacle à l’entente. ces pressions seront toutefois prises en compte plus tard, au stade de la sanction. Restent quelques cas de pression irrésistible soulevés par certaines juridictions de contrôle aboutissant à ce que l’entente ne soit pas constituée.

2 · La notion d’entente exclue les manifestations de volonté unilatérale

Il faut un véritable concours de volonté se rejoignant en une volonté commune. dans certaines hypothèses, il sera difficile de savoir si une pratique est le fruit d’une volonté conjointe ou d’une volonté unilatérale.

B · La formalisation du concours de volontés

L’Art. 101 prévoit trois formes d’entente. Les accords entre entreprises, les décisions d’association d’entreprises et les pratiques concertées.

Vu l’Art. L420-1, plus prolixe, toute une série est envisagée entente expresse tacite, coalition etc. qui exprime le fait que le Droit français soit relativement indifférent à la forme de l’entente.

Il est important pour une autorité de concurrence de démontrer dans quelle forme on est, car des problèmes probatoires en découlent. Une fois cette forme désignée, cela n’emportera aucune conséquence au niveau du régime juridique, à savoir les mêmes sanctions.

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57 C h a p i t r e I · Les ententes anticoncurrentielles

1 · Distinction entre les différentes formes d’entente a · Les accords

Ø Définition de l’accord

Pour la Commission, dans une affaire BRITISH SUGAR du 14 octobre 1998, pour qu’il y ait accord, il faut que les entreprises aient exprimé une volonté commune de se comporter sur le marché d’une matière déterminée. Dans une autre affaire, celle des… conduites précalorifugées du 21 octobre 1998, la Commission évoque d’entente des entreprises sur un plan commun qui limite ou est susceptible de limiter leur comportement commercial respectif en déterminant les lignes de leur action ou abstention réciproque sur le marché. l’accord suppose un processus décisionnel commun et un engagement. L’accord n’est pas réduit à la catégorie du contrat. tout contrat sera un accord. L’accord pourra être bien autre chose qu’un contrat.

N’est pas requis ainsi le fait que les entreprises aient entendu se lier juridiquement. il n’est pas nécessaire que des mesures de contrainte accompagnent la qualification d’accord. On pourra se contenter d’une simple déclaration d’intention. On peut encore se contenter d’un simple engagement moral, d’un simple engagement d’honneur.

Ø Distinction de l’accord et des manifestations de volonté unilatérale

Pour qu’il y ait une entente, il faut au moins… deux entreprises qui se mettent d’accord sur quelque chose. Il faut noter d’ailleurs qu’un contrat conclu entre une société-mère et sa filiale, il n’y a toujours qu’une seule entreprise. L’acte sera forcément unilatéral. Il est parfois difficile de dissocier ce qui relève d’un comportement appartement unilatéral avec ce qui relève d’une pratique concertée. Les autorités de concurrence vont devoir rechercher si des mesures présentées comme unilatérale n’ont pas en réalité été acceptées, au moins tacitement, par l’autre partie. Cette question se posera surtout dans un cadre vertical. La jurisprudence a cependant évolué. Dans un premier temps, les autorités de concurrence et leurs juridictions de contrôle ont retenu une conception assez ramasse-miette du concours de volonté qui caractérise l’accord. Souvent, un fabriquant adoptait une mesure qui, posant un problème aux règles de concurrence, s’intègre dans les relations commerciales qu’il noue avec ses partenaires.

Un réseau de distribution voit un fournisseur s’articuler avec des grossistes, des distributeurs, bref des partenaires, vu des CGV (Conditions générales de vente). Si les conditions d’agrément sont anticoncurrentielles, sont-elles le fruit d’une volonté unilatérale ou non ? on considère qu’en signant les CGV, le partenaire accepte les stipulations éventuellement anticoncurrentielles. Il y aura entente. L’arrêt AEG Contre COMMISSION du 25 octobre 1983 de la CJCE est à noter.

Autre hypothèse, celle d’un concédant qui envoie à ses concessionnaires une circulaire. Cette circulaire leur annonce qu’il n’acceptera plus de commandes de véhicules avec conduite à droite. Pauvres grands bretons. Pour la CJCE, il y a bien entente car les concessionnaires avaient mis en œuvre la circulaire sur le terrain. 17 septembre 1985 FORD.

Dans une affaire SANDOZ du 11 janvier 1990 (CJCE ou COMMISSION, mystère), on se retrouve dans le secteur pharmaceutique. Des États membres ont des politiques différentes pour les médicaments (remboursement, tarif, brevets…). Très souvent, le prix de vente au consommateur final sera différent entre les États. Presque systématiquement, il va y avoir des intermédiaires qui vont aller acheter le produit là où c’est le moins cher pour le revendre là où c’est plus cher. Les producteurs essaient de lutter contre ces phénomènes d’importation parallèle. SANDOZ avait ainsi envoyé dans les factures à ses clients avec pour épitaphe, exportation interdite. Bon, ça n’a pas bougé. Mais du fait de cette absence de

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 58

protestation, du fait que la mention « exportation interdite » était de facto respectée, les autorités de concurrence ont considéré qu’il y avait entente, et non acte unilatéral. Une mention sur une facture illustre un accord à partir du moment où il n’y a pas de contestation du document sur lequel figure cette mention…

Récemment, la jurisprudence est retournée à une conception plus stricte de l’accord, avec plusieurs illustrations dans deux contextes différents. Premier contexte, celui des contrats de distribution.

Dans une affaire Volkswagen et un arrêt de principe C74/04 du TPI 31 décembre 2003, approuvé le 13 juillet 2006 par la CJCE, VW exige de ses concessionnaires de ne pas consentir de remises à sa clientèle. La Commission condamne VW et les concessionnaires pour entente, pour un motif qui a choqué. L’acquiescement des concessionnaires était acquis du simple fait qu’ils étaient entrés dans le réseau de distribution.

A chaque fois, il y a un contrat légal. L’évolution est aussi légale. Si l’évolution est illégale, il ne peut pas y avoir acceptation d’avance et il faudra un acquiescement après connaissance de l’évolution litigieuse.

La Commission a déposé un pourvoi devant la CJCE pour s’émouvoir de la position du TPICE, mais la CJCE va suivre le TPICE dans un arrêt donc du 13 juillet 2006. La Cour nuance un peu. Elle énonce qu’il ne serait d’emblée être exclu qu’une invitation qui serait contraire aux règles de concurrence puisse être considérée comme étant autorisée par des clauses appartement neutres d’un contrat de concession. Moralité il faut tenir compte du contexte, de différents facteurs, les buts poursuivis par le contrat etc. quoi qu’il en soit, la Cour pond qu’il faut prouver un acquiescement explicite ou tacite de la part des concessionnaires à la mesure adoptée par le constructeur automobile. Cette recherche incombe à la Commission.

Et dans un arrêt du 9 juillet 2009 avec une affaire T450-05 AUTOMOBILES PEUGEOT, en 1997 un système de bonus est mis en place pour les concessionnaires. Ce système était inégalitaire car il les incitait à renoncer aux ventes à l’exportation. La Commission a pris ici soin de prouver l’acquiescement des concessionnaires. Pour elle, les concessionnaires ont continué à passer des commandes. Ensuite, le concédant mit en place un système de contrôle a posteriori. Des sanctions étaient encourues par les concessionnaires récalcitrants. Enfin, le système était totalement transparent via une association des concessionnaires, qui servait de caisse de résonance, d’organe d’information.

Le TPICE relève une chose, que l’existence d’un accord ne peut être exclu au pour le simple motif qu’il semble aller à l’encontre des intérêts d’une partie dès lors qu’existe comme en l’espèce la preuve d’un acquiescement de cette partie. Acquiescement, acquiescement, acquiescement, hou retiens ce mot.

La question de l’acquiescement ne se posera que si l’atteinte à la concurrence ne résulte pas directement d’une clause contractuelle. Si le partenaire signe directement un contrat comportement une clause anticoncurrentielle, son acquiescement est acquis.

Autre illustration, or contrat de distribution, un autre arrêt de principe de la CJCE, joignant deux affaires C2/01 et C3/01, rendu le 6 janvier 2004 au sujet de la société BAYER. Il y avait des différentiels de prix non négligeables, genre 40 % de plus en Grande-Bretagne par rapport en France ou en Espagne. En même, temps ça leur apprendra à être sur une île. Bon toujours est-il que BAYER a intégré l’expérience SANDOZ. il ne décide pas d’interdire, d’apposer une mention « exportation interdite » ou équivalent, mais décide ne de plus honorer l’intégralité des commandes, et ne livre que la quantité qu’il estime nécessaire pour satisfaire la clientèle nationale. L’idée étant que le grossiste privilégie la clientèle locale. Il en résulte du contingentement. BAYER se fait sabrer… en 1996… par la Commission qui estime qu’il y a entente car ce système s’intégrait dans le cadre de relations commerciales

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continues. BAYER se défend en affirmant que ce contingentement repose sur une décision unilatérale. Le TPICE relève que BAYER n’a jamais cherché à obtenir l’accord de ses grossistes. BAYER n’a mis en place aucun contrôle des produits livrés. BAYER n’a pas menacé ni sanctionné. Le simple fait que les grossistes aient maintenu leurs relations commerciales ne suffit pas. La CJCE approuve, énonce que le seul fait qu’il existe concomitamment un accord neutre en soit et une mesure restrictive de concurrence imposée de manière unilatérale, n’équivaut pas à un accord interdit par l’Art. 81. Il faut prouver que BAYER poursuivait un but anticoncurrentiel, qu’il a formulé une invitation à l’autre partie de réaliser le but en commun. Il faut prouver un acquiescement de cette autre partie à l’invitation. C’est à la Commission de prouver l’acquiescement. La simple poursuite des relations commerciales ne suffit pas.

Le Conseil de la concurrence a repris ces arrêts VW et BAYER, les juridictions de contrôle aussi.

Un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 28 janvier 2009 dans une affaire du jouet entre des grossistes et détaillants au sein de la grande distribution et distribution spécialisée, il fallait maintenir des prix élevés à noël. La Cour d'appel a repris les jurisprudences VW et BAYER. Cette démonstration (invitation et acquiescement), résulte soit de la signature de clauses contractuelles claires, soit de la réunion d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants. ➀ Les prix doivent avoir été évoqués entre les parties, ➁ il doit y avoir surveillance des prix et ➂ il doit y avoir mise en œuvre de l’entente de prix.

La Commission peut échouer à démontrer l’acquiescement. si elle est gênée dans ses recherches, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y aura pas de moyen de casser les coquins, car ne pas démontrer l’acquiescement revient à en déduire qu’il y a acte unilatéral. Si cet acte unilatéral est mis en œuvre par une entreprise qui est dominante sur le marché, on pourra rechercher l’abus de position de dominante, à condition toutefois que l’entreprise soit dominante…

Dans une affaire GSK et un arrêt de la CJCE du 16 septembre 2008, Glaxo Smith tente de limiter les importations parallèles en refusant d’honorer des commandes normales. La CJCE considère que cela était constitutif d’un abus de position dominante. Oui car à chaque molécule, un marché propre.

b · Les associations d’entreprise

Par association d’entreprise, on entend un regroupement d’entreprises, de fait ou de droit, doté ou non de la personnalité morale, quelle que soit la forme de ce regroupement, à condition toutefois qu’il dispose d’un min d’organisation, d’un minimum d’organes habilités à prendre des décisions. Une association, un syndicat, un Groupement d'intérêt économique, des fédérations ou ordres professionnels. L’ordre des médecin est ainsi vu par le Droit communautaire une association d’entreprises. L’arrêt PAVLOV du 12 septembre 2000 voit la CJCE l’illustrer.

Une décision d’association d’entreprise, et bah c’est un acte unilatéral. Mais cet acte doit exprimer l’intention collective des membres de cette association. On range cette décision dans la catégorie des ententes. Cette décision doit provenir d’un organe compétent pour exprimer cette intention collective. Cet acte, ce peut être les statuts dès le départ comme une décision durant la vie du groupement… Ces décisions peuvent être des chartes, des consignes, des circulaires, directives etc. Pour la recommandation, avec l’arrêt VERBAND DES SACHVERSICHERE du 27 janvier 1987, il suffit qu’elle constitue l’expression fidèle de la volonté d’association de coordonner le comportement de ses membres sur le marché.

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 60

c · Les pratiques concertées

La concertation est plus diffuse, informelle, en deçà de l’accord. C’est la forme « la plus silencieuse de l’entente ».

Ø Définition de la pratique concertée

Le législateur communautaire a introduit cette forme pour s’assurer que soient couvertes toutes les possibilités de concertation.

Dans un grand arrêt du 14 juillet 1972 de la jurisprudence communautaire, pour une affaire ICI ou des MATIERES COLORANTES, une définition est devenue un standard. C’est une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu’à une convention proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique entre elles (les entreprises) au risque de la concurrence.

Dans une décision de la Commission du 21 octobre 1998, pour l’affaire des conduites précalorifugées, pour qu’il y ait pratique concertée, il suffit que les entreprises adoptent ou adhèrent en pleine connaissance de cause à un système de collusion qui encourage ou facilite la coordination de leur comportement commercial.

Dans l’arrêt CIMENTERIES (≈⋲) du TPICE du 15 mars 2000, la pratique concertée suppose l’existence de contacts caractérisés par la réciprocité. Cette condition est satisfaite si une entreprise divulgue à l’autre ses intentions ou son comportement futur sur les marchés, et que cette divulgation a été sollicitée ou acceptée par l’autre. Il n’est pas nécessaire que chaque entreprise s’engage à adopter un comportement. Il suffit, qu’à travers sa déclaration d’intention, l’opérateur économique ait éliminé ou réduit l’incertitude quant au comportement à attendre de sa part sur le marché.

Ø Preuve de la pratique concertée

Diffuse, informelle, donc difficile à chopper. C’est pourquoi les autorités de la concurrence ont entendu faciliter la preuve de cette pratique. on va donc distinguer selon que la coordination est effective, que l’on peut observer quelque chose sur le marché ou non.

Dans le premier cas, c’est la preuve d’une participation à une pratique concertée en présence d’un parallélisme comportemental (constatation d’un comportement coordonné sur le marché). Une autorité de la concurrence observe un marché et le constate que dans un intervalle déterminé. Est-ce que ce constat d’un parallélisme suffit-il à caractériser l’entente ? Dans l’affaire ICI ou des MATIERES COLORANTES du 14 juillet 1972, la CJCE énonce que ce parallélisme ne suffit pas à considérer qu’il y a pratique concertée. La Cour poursuit en affirmant que ce parallélisme est un indice sérieux lorsqu’il aboutit à des conditions de concurrence qui ne correspondent pas aux conditions normales du marché. nature des produits, importance des entreprises seront par exemple prises en compte. Première possibilité pour corroborer l’indice, c’est démontrer qu’il n’existe aucune explication plausible à ce parallélisme. C’est ce qu’on appelle la preuve négative. Et c’est contesté, car cela aboutit presque à une interversion de la charge de la preuve. Ce sera aux entreprises à démontrer qu’il n’y a pas de concertation.

La structure d’un marché oligopolistique est une explication. La CJCE, dans un arrêt SUIKER UNIE du 16 décembre 1975, énonce que l’exigence d’autonomie n’exclue pas le droit des opérateurs économiques de s’adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter celui de leur concurrent. Autre explication, c’est l’intérêt propre de l’entreprise. il pourrait être rationnel, au vu de sa structure, de sa politique commerciale, d’adopter ce type de comportement, genre les coûts d’exploitation. Une affaire 05-D-70 du 19 décembre 2005

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a traité des pratiques mises en œuvre dans le secteur des vidéocassettes enregistrées. Pour s’en défendre, les distributeurs arguent qu’ils avaient réagi à des consignes de prix conseillé.

Le recours à des preuves positives, les plus factors, est une autre explication. Un rapport, un relevé téléphonique, des billets d’avion…

Dans le deuxième cas, il y a preuve d’une participation à une pratique concertée en l’absence de tout comportement coordonné. On ne constate rien sur le marché. Ce que l’on sait, c’est qu’il y a eu réunion, échange d’informations. On sait que cette réunion avait un objet anticoncurrentiel. Est-ce que ça suffit à dire qu’il y a entente ? la jurisprudence communautaire est positive. La CJCE l’exprime dans un arrêt de principe ANIC pour une affaire du POLYPROPYLENE en date du 8 juillet 1999. Ce comportement ne doit toutefois pas être confondu avec l’effet sur le marché. L’objet anticoncurrentiel suffit. La Cour va poser une présomption simple. Les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur le marché.

S’est posé le problème de savoir si cette présomption pouvait être soulevée même après qu’une seule réunion ait été tenue. Un Juge néerlandais fait un recours préjudiciel devant la CJCE. Le 4 juin 2009, avec un arrêt T-MOBILE, dans une affaire C8/08, la Cour avance qu’une seule réunion ne suffit pas. Enfin tout va dépendre de l’entente. si elle porte sur un système complexe, avec un grand nombre d’aspects en jeu, il faudra plusieurs réunions. Mais si la concertation est ponctuelle, et vise une harmonisation unique sur un paramètre isolé de la concurrence, un seul contact peut suffire. Là, une seule réunion suffit.

Qui dit présomption simple suppose que les entreprises puissent la combattre. Un exemple de preuve contraire, c’est celle qui illustre que les entreprises ne sont plus actives sur un marché. Autre exemple, c’est prouver que leur comportement est resté totalement indépendant de l’objet de la réunion. Dans l’arrêt du CARTON du 16 novembre 2000, la Cour évoque que le fait qu’une entreprise ne donne pas suite au résultat des réunions n’est pas de nature à écarter sa responsabilité du fait de sa participation à l’entente, à moins qu’elle se soit distanciée publiquement de son contenu. Avec l’arrêt AALBORG PORTLAND, du 7 janvier 2004, la Cour explique pourquoi. cette approbation tacite constitue un mode passif de participation à l’infraction. Elle explique encore qu’il faut que cette entreprise marque ouvertement sa désapprobation à l’égard des pratiques, qu’elle informe les autres participants du fait que l’optique de la réunion est différente de la leur. Moralité, elle doit aller dénoncer tout ça auprès de la Commission. Avec l’arrêt du 19 mars 2009, portant sur une affaire ARCHER MIDLAND, C510/06P, est-ce que le fait de quitter la réunion suffit-il ? pour la Cour, niet, c’est la compréhension qu’ont les autres participants à une entente de l’intention de l’entreprise déterminée qui est déterminante pour apprécier si cette dernière a entendu se distancier de l’accord illicite. Il faut une compréhension du geste par les autres participants.

Et la force de cette présomption de causalité pour les juges nationaux et autorités nationales ? Dans l’arrêt T-MOBILE du 4 juin 2009, la CJCE répond à l’interrogation du Juge néerlandais le principe d’autonomie procédurale, processuelle. Les règles de fond peuvent être déterminées au niveau communautaire, mais tous les aspects de la procédure dépendant du Droit national. Preuve et sanction donc. Pour la CJCE, la présomption de causalité découle de l’Art. 81 §1 (101 §1) tel qu’interprété par la Cour. Par conséquent, elle fait partie du Droit communautaire applicable. Le Juge national, lorsqu’il applique l’Art. 81, doit appliquer cette présomption.

Pendant longtemps, le Conseil de la Concurrence était assez favorable aux entreprises, exigeant véritablement une corroboration. La seule réunion ne suffisait pas. Ce quelque chose pouvait être la participation à une même réunion portant sur le même objet, la mise en œuvre effective de ce qui a été évoqué lors de cette réunion…

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 62

A compter de 2006 / 2007, le Conseil de la concurrence a dissocié deux hypothèses. Si l’échange a eu lieu dans un cadre statutaire d’une organisation professionnelle, le fait d’y participer ne suffit pas. On peut y aller en toute bonne foi. Là, le Conseil maintient alors son ancienne jurisprudence. Si l’échange a lieu dans le cadre d’une réunion informelle, généralement occulte, là le Conseil de la concurrence considère qu’une seule réunion suffit, appliquant la jurisprudence communautaire. L’arrêt de la Cour d'appel de Paris, du 25 février 2009, SECTEUR DU DEMENAGEMENT, a approuvé cette position.

Si cette différenciation pose problème, ce qui est le cas en cas d’entente complexe et continue, là…

2 · L'hypothèse d’une infraction complexe ou unique et continue

Dans l’affaire ANIC du 8 juillet 1999, la CJCE a considéré que l’unicité d’objet, entre toutes ces pratiques poursuivant un seul but économique, permet de dire que ces pratiques constituent une infraction unique et complexe, relevant pour partie de la notion d’accord, pour partie de celle de pratique concertée. Reste à démontrer l’unicité d’objectif. L’arrêt BASF du TPICE du 12 décembre 2007 évoque une série d’acte ou un comportement continu s’inscrivant dans un plan d’ensemble en raison de leur objet identique. Une entreprise ayant participé à une telle infraction par des comportements qui lui étaient propres, qui relevaient des notions d’accord ou de pratiques concertées, ayant un objet anticoncurrentiel, et qui visaient à contribuer à la réalisation de l’infraction dans un ensemble, était également responsable pendant toute la période de sa participation à ladite infraction de comportements mis en œuvre par les autres entreprises dans le cadre d’une même infraction. Pour la Cour, tel est en effet le cas s’il est établi que les entreprises en question connaissaient les comportements infractionnels des autres participants, ou qu’elles pouvaient raisonnablement les prévoir et qu’elles étaient prêtes à en accepter le risque.

Deux ou trois conséquences, facilité probatoire pour l’autorité, aggravation des sanctions, allongement de la prescription. En temps normal c’est 5 ans, mais ça commence à partir du moment où la pratique continue a cessé.

Une décision 08-D-32du 16 décembre 2008 CARTEL DANS LE SECTEUR DE LA SIDERURGIE visait d’une très grande entente reposant sur des systèmes de contrôle poussés, de rencontres régulières, au niveau national, régional. Cette entente, complexe et continue, avait donné lieu à une amende de 575 millions d’euros. La Cour d'appel de paris a confirmé tout ça, mais a estimé que le Conseil avait été un peu gourmand. Elle a ramené le 19 janvier 2010 l’amende à… 75 millions d’euros.

Paragraphe 2e Un objet ou un effet anticoncurrentiel La concertation, la collusion ne suffisent pas. Il faut qu’elle ait un caractère

anticoncurrentiel.

A · Définition de l’atteinte à la concurrence et exemples

L’Art. 101 interdit les ententes qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher de fausser ou de restreindre le jeu de la concurrence à l’intérieur du Marché commun. L’Art. L420-1 CCom vise lui les ententes ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la concurrence, mais encore les ententes susceptibles d’avoir un effet anticoncurrentiel.

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En réalité, ces deux ordres juridiques prennent en considération les effets potentiels.

1 · Définition de l’atteinte à la concurrence

a · L’Art. 101 vise aussi bien l’objet que l’effet anticoncurrentiel

Le rapport est alternatif. Soit l’objet, soit l’effet.

Ce caractère alternatif a été très tôt soulevé dans un arrêt LTM – les techniques minières – du 30 juin 1966. Il a été depuis réaffirmé à maintes reprises, tel, Le 20 novembre 2008, dans un arrêt BEEF INDUSTRY, où la CJCE exprime qu’il faut d’abord vérifier s’il existe un objet anticoncurrentiel contenu du contexte de l’accord. Si l’analyse de l’accord ne révèle pas un niveau suffisant de nocivité, bah là, il faut tâter les effets de l’accord. Le Droit français retient la même analyse.

Ce caractère alternatif permet de faire une économie probatoire pour l’autorité de la concurrence. Si l’objet anticoncurrentiel est démontré, les autorités n’auront pas besoin de s’intéresser aux effets, ce qui est plus complexe.

Ù L’objet anticoncurrentiel

Il fait référence à la finalité objective de l’accord, à sa nature anticoncurrentielle. Il existe depuis quelques mois une pratique décisionnelle troublant les solutions jusqu’ici établies. Jusqu’alors, il y avait un guide d’analyse, synthétisé dans d’autres lignes directrices publiées par la Commission le 27 avril 2004, concernant l’application de l’Art. 81 §3 (101 §3).

Les accords ayant pour objet de restreindre la concurrence sont ceux qui, par nature, ont la capacité de le faire. Il s’agit de restrictions qui, au regard des objectifs poursuivis par les règles communautaires de concurrence, sont tellement susceptibles d’avoir des effets négatifs sur la concurrence, qu’il est inutile de démontrer qu’elles ont des effets concrets sur le marché. Pour la Commission, on va s’appuyer sur la gravité de la restriction, mais aussi sur l’expérience.

Il faut encore prendre certains facteurs, genre la teneur de l’accord, son contenu ses clauses, mais encore ses buts objectifs.

Il faut aussi tenir compte du contexte de l’accord.

La preuve de l’intention subjective des parties de restreindre la concurrence est un facteur important. Elle n’est cependant pas une condition nécessaire.

La Commission précisait que, globalement, ont un objet anticoncurrentiel les cartels, les ententes horizontales de prix et de répartition de marché, mais aussi les restrictions caractérisées à la concurrence.

Elle distingue les ententes horizontales, qui unissent les parties intervenant au même stade de la production économique, c'est-à-dire encore celles tendant à fixer les prix, tendant limiter la production, ou encore les ententes visant à se partager les marchés et clientèles ; avec les ententes verticales, genre l’imposition de prix de revente fixe, le prix de revente minimal, les restrictions assurant une protection territoriale absolue.

Un arrêt du TPICE du 9 juillet 2009, AUTOMOBILES PEUGEOT, illustre une restriction par objet assurant une protection territoriale, bref une entrave aux exportations.

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 64

Mais depuis quelques temps, les autorités et institutions communautaires ont une lecture large de la notion de restriction par objet.

Un premier exemple c’est l’arrêt du 20 novembre 2008, BEEF INDUSTRY, ou de la viande bovine irlandaise. Les transformateurs, qui reçoivent et débitent les tas de viande, étaient en surcapacité. Ils avaient mis en place de rationnaliser la production. Ils indemnisaient les opérateurs qui quittaient le marché. Restriction par objet ? Le Juge irlandais a posé une question préjudicielle devant la CJCE. Pour les entreprises irlandaises, la restriction par objet était entendue de manière stricte, ne viser que des restrictions caractérisées. Or, ici, le type d’accord ne rentrait pas dans la liste. L’avocat général avait argué que grosso merdo, la liste n’était pas limitative. La CJCE, le 20 novembre 2008, a donné raison à l’avocat général, énonçant ➊ premièrement que la circonstance que les parties à l’accord aient agi, en suivant des objectifs économiques louables, est sans pertinence pour apprécier l’objet de l’accord. Pour la Cour, l’objectif était donc légitime. ➋ Deuxièmement, la liste (…) n’est pas limitative. ➌ Troisième remarque, ce type d’accord se heurte de manière patente à la conception du Traité, en vertu de laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu’il entend suivre sur la marché.

Moralité, cet accord a un objet anticoncurrentiel car il supprime la condition d’autonomie entre les acteurs.

L’arrêt du 4 juin 2009 T-MOBILE opère une sorte de glissement. On se contente d’une aptitude concrète à fausser le jeu de la concurrence. Il n’y a plus de référence à l’extrême gravité de la pratique ou encore à l’expérience, ni aux restrictions caractérisées. L’échange d’informations entre concurrents poursuit un objet anticoncurrentiel lorsqu’il est susceptible d’éliminer les incertitudes quant au comportement envisagé par les entreprises concernées.

Lignes directrices du 28 avril 2004

jurisprudence récente

Définition

critères Objectifs poursuivis par le Droit de la concurrence

fondement

liste

Auparavant, une entreprise dominante qui fouettait ses partenaires faisait conclure des engagements d’exclusivité à ses partenaires était considérée comme abusant de sa position dominante.

(x)

L’échec d’une entente dont l’objet est anticoncurrentiel ne la fait pas échapper à la prohibition. La tentative suffit à être prise en compte

Ù L’effet anticoncurrentiel

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65 C h a p i t r e I · Les ententes anticoncurrentielles

C’est l’effet déjà avéré ou celui qui risque d’arriver.

Il faut donc farfouiller dans le contexte du marché. On va ainsi prendre en compte le pouvoir de marché des entreprises. Plus ce pouvoir est important, plus il y a capacité de nuire au droit de la concurrence. On va encore prendre l’existence de barrières à l’entrée sur un marché. Une entente sur un marché déjà fermé a plus de conséquences que sur un marché ouvert.

Pour qu’une pratique soit interdite, il faut qu’elle ait un effet anticoncurrentiel, mais encore que cet effet soit sensible, sauf restriction caractérisée.

b · Autres remarques sur l’atteinte à la concurrence

Ù L’atteinte à la concurrence peut être le fait d’entreprises opérant sur un même marché ou non. On retrouve la distinction entre ententes horizontales et verticales. Il y a un préjugé très défavorable contre les ententes horizontales car l’entente est par hypothèse nouée entre concurrents directs, partageant la même clientèle. Les ententes verticales font plus broder. Par hypothèse, les entreprises ne se partagent pas alors la même clientèle. Il n’en demeure pas moins que ces ententes soient aptes à troubler la concurrence. La Commission leur consacre une réglementation particulière. Le règlement 2790/99 du 22 décembre 1999 l’illustre, règlement d’ailleurs en cours de réforme.

Ù Les atteintes à la concurrence peuvent porter sur la concurrence interne ou externe. La concurrence interne, c’est s’intéresser aux restrictions intervenant entre les entreprises parties à l’entente. une clause de non-concurrence est un exemple. Les clauses de quota aussi. Ou encore la clause de fixation de prix. La concurrence externe vise les restrictions portant sur l'activité concurrentielle des tiers. On cherche à casser les genoux du tiers. Un engagement de boycott est ici un exemple. une entente tendant les prix vers le bas afin de nuire délibérément au concurrent aussi.

Ù La restriction à la concurrence peut avoir entre marques ou être intermarque. Entre marque, ou concurrence interbrand, suppose que la restriction de concurrence opère entre fournisseurs ou distributeurs et vise des produits ou services concurrents.

2 · Exemples d’atteinte à la concurrence

Cf. Art. 101.

a · Le pire, le cocktail super sucré

(x)

Les ententes injustifiables, hardcore cartels, pour lesquelles l’OCDE préconise la plus grande sévérité, le plus grand nombre de coups de fouet possible. il s’agit des ententes qui ont un caractère caché, durable, qui couvre la totalité ou la quasi-totalité d’un marché, et qui portent sur les prix, les quantités livrées ou une répartition de marché.

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 66

b · Les ententes tendant à fixer ou à geler les prix, un peu moins sucrées, on les sent plus passer

Elles interviennent au vertical comme à l’horizontal.

Au vertical, l’acheteur doit être libre de fixer ses prix. Ce qui sera interdit, c’est l'hypothèse où le prix est fixé, c’est encore l'hypothèse où le prix est fixé à minima, mais on autorise le fournisseur à fixer des prix maximas.

Pour les prix conseillers, ceux-ci sont licites, s’ils restent des prix simplement conseillés. S’ils s’accompagnent de pressions, d’une surveillance ou équivalent, le prix sera imposé.

Pour les ententes verticales de prix, l’autorité de la concurrence a développé une grille probatoire en Droit français. le caractère anticoncurrentiel est établi soit par la signature d’un contrat qui comporte une clause de prix, soit par la réunion d’un faisceau d’indices, trois, cumulatifs (prix évoqués entre fournisseur et distributeur par exemple, le fournisseur a une police des prix ou pousse les distributeurs concurrent à dénoncer, enfin il faut un constat des prix significativement respectés).

La décision 07-D-50 du 20 décembre 2007 visait les fabricants de jouet et certaines enseignes de distribution pour fixer les prix à noël. Une autre affaire sabrée le 13 mai 2006 dans une décision 06-D-04 au sujet d’ententes entre fabricants de cosmétiques de luxe et enseignes de distribution. Mais le 10 novembre 2009, la Cour d'appel de Paris a tout annulé, au motif que la procédure avait duré… trop longtemps.

A l’horizontal, l’arrêt du Club LOMBARD, précité, est à relever.

c · Les ententes tendant à une répartition des marchés ou des sources d’approvisionnement ou encore à cloisonner les marchés

L’idée, c’est que des entreprises se constituent des rentes de situation, sans plus faire d’effort en terme de prix ou de qualité.

Si l’entente est verticale, un premier exemple vise les clauses d’exclusivité de vente. Un fournisseur distribue ses produits par le biais de distributeurs, enfin un seul en réalité. Il s’engage à ne vendre ses produits qu’à cet unique distributeur. Les autres ne pourront donc pas se fournir auprès de lui. Ces clauses d’exclusivité seront sanctionnées que si elles ne sont pas suffisamment objectifs.. On prendra ainsi en compte l’étendue de l’exclusivité, mais aussi la durée des exclusivités. L’affaire de l’Iphouine en France voyait ORANGE être la seule entreprise à le distribuer et revendre. Dans une décision 08-MC-08 (MC=mesure conservatoire), le Conseil de la concurrence a jugé cette exclusivité dangereuse dans un marché peu concurrentiel. il y a donc eu une injonction faite à ORANGE et APPLE de suspendre l'exclusivité. La Cour d'appel de Paris a validé le 4 février 2009 cette décision. les entreprises ont décidé à la suite de prendre des engagements. Le 3 novembre 2009, le Conseil de la concurrence les admet, voyant ORANGE et APPLE renoncer aux exclusivités pendant 3 ans. Le 16 février 2010, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel pour défaut de base légale. Pan. Mais bon, les engagements sont pris alors…

Un autre exemple vise les clauses d’exclusivité d’approvisionnement. On inverse ici le processus. Le distributeur est alors le débiteur de l’exclusivité. Tout dépendra encore du contexte pour les sabrer.

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Les clauses d’interdiction d’exporter, éventuellement limitatives, cloisonnent en tout cas le marché commun. L’arrêt du TPICE du 9 juillet 2009 les démontre. L’arrêt GLAXOSMITH du 6 octobre 2009 aussi.

Si l’entente est horizontale, là… oulà… beaucoup d’affaires. On trouve déjà des ententes de répartition géographique. Un arrêt SÜKER UNIE du 16 décembre 1975 sur les producteurs de sucre l’illustre. La décision de la commission du 7 octobre 2009 rendue sur le secteur de la production de transformateurs de puissance, avait vu des producteurs européens et japonais conclure des accords verbaux e répartition de marché. les jap s’engageaient à ne pas vendre en Europe, les européens à ne pas s’incruster au Japon.

Les soumissions concertées à des appels d’offre sont une autre illustration. Un maître d’ouvrage public décide de construire un édifice conséquent, et passe donc des marchés publics, pour que des entreprises privées puissent y candidater. Moralité, les candidats organisent leurs passages. Certains couvrent, d’autres se surestiment volontairement pour privilégier un acteur. L’affaire des lycées d’IDF avait vu le Conseil régional d’IDF vouloir rénover son patrimoine immobilier scolaire. Outre la concertation, des dessous de table avaient permis de financer les partis politiques. Le Conseil de la concurrence a sanctionné le 9 mai 2007 dans une décision 07-D-15, que la Cour d'appel a rejeté le recours, la Chambre commerciale de la Cour de cassation, le pourvoi, le 13 octobre 2009. le 12 novembre 2008, la Commission colle une amende d’1,3 milliard dans le secteur du monde automobile. Une affaire française, sur le téléphonie mobile, a vu le 30 nombre 2005 le Conseil de la concurrence rendre une décision 05-D-65. Un pacte de non agression avait été conclu entre BOUYGUES, SFR et ORANGE. Cet accord était parfois appelé de pacification des marchés, parfois Yalta des parts de marché… on leur reprochait d’une part le non-agression, mais encore une pratique de pur échange d’informations. L’autorité de la concurrence a condamné à 215 millions d’euros pour orange, 185 pour SFR, 42 pour BOUYGUES, pour un total de 330 millions d’euros d’amende globale.

d · Ententes tendant à limiter l’accès au marché

L’exemple typique, c’est l’entente de boycott. Des entreprises décident de pas commercialiser le produit ou le service d’une autre entreprise, ou de ne pas vendre de produits ou de services à cette autre entreprise. Une autre affaire sur le marché de l'Assurance complémentaire a vu le Conseil national de l’ordre des chirurgiens dentistes voir rouge. Il a fait pression à ces derniers pour qu’ils cessent leurs relations avec une société, celle-ci intervenant pour des compagnies d’assurance et des mutuelles. La décision 09-D-07 du 12 février 2009 le démontre. Le boycott sera sanctionné que s’il y a volonté d’évincer une autre entreprise.

Les échanges d’information sont un autre type d’entente. Vu la jurisprudence SÜCKER UNIE, « s’il est exact que l’exigence d’autonomie n’exclue pas le droit des opérateurs économiques de s’adapter intelligemment au comportement constaté ou à escompter ceux des concurrents, elle s’oppose en revanche rigoureusement à toute prise de contact direct ou indirect entre de tels opérateurs, ayant pour objet ou pour effet, soit d’influencer le comportement sur le marché d’un concurrent actuel ou potentiel, soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l’on est décidé à, ou que l’on envisage de, tenir soi-même sur le marché. très souvent, les échanges d’information sont des moyens ou supports d’une entente sur les prix ou sur la répartition d’un marché. ce sont encore ce qui permet de surveiller une discipline commune. Pour ce qui est de l’échange d’information pure, tout va dépendre du marché. L’arrêt de la CJCE du 28 mai 1998, JOHN DEERE, ou l’affaire des tracteurs anglais, le démontre. Sur un marché oligopolistique fortement concentré, l’échange d’informations est de nature à permettre aux entreprises de connaître les positions sur le marché et la stratégie commerciale de leurs concurrents, et ainsi altérer sensiblement la concurrence qui subsiste entre les opérateurs économiques. A l’inverse, sur un marché concurrentiel, la transparence ne lève pas l’incertitude sur le comportement des opérateurs,

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 68

eu égard au grand nombre d’entre eux. Pour qu’il y ait prohibition sur un marché oligopolistique, il y a des conditions. La première, c’est que ce marché soit étroit, fermé. La deuxième, c’est que les échanges d’information portent sur des informations sensibles, stratégiques, précises. Par ailleurs, il faut que les informations échangées soient nominatives, qu’il y ait tel échange pour tel entreprise. il y a moins de méfiance pour les données agrégées, statistiques. Il faut encore que les échanges aient lieu selon une périodicité rapprochée. Il faut aussi que les informations soient échangées seulement entre les concurrents, sans être mises à la disposition du public ou des clients. Par ailleurs, on se méfie grandement des informations passées. Cette grille proposée a été utilisée par le Conseil de la concurrence en France dans l’affaire de la téléphonie mobile. Partage des marchés et échange d’information étaient reprochés. Nouveaux abonnements et résiliations étaient ainsi des informations échangées. Pour le Conseil de la concurrence, moui. La Cour d'appel de Paris l’a confirmé, le 12 décembre 2006. Le 29 juin 2007, la Cour de cassation casse pour défaut de base légale, non pas le partage, mais l’échange d’informations, au motif « qu’il aurait fallu rechercher de manière concrète si l’échange d’informations avait eu pour objet ou pour effet de s’adapter au comportement prévisible des autres et ainsi de fausser de façon sensible le jeu de la concurrence ». Le 11 mars 2009, la nouvelle Cour d'appel confirme la condamnation, en brodant un peu plus sa démonstration. Nouvelle cassation. PAN. Le 7 avril 2010, pour défaut de base légale. Là encore, la Cour de cassation reproche à la Cour d'appel de ne pas avoir rechercher si la concurrence s’était trouvée concrètement altérée du fait de ses échanges par rapport à ce qu’elle eût été en l’absence d’échanges ». bref, il faut prouver que l’autonomie des opérateurs est troublée par l’échange d’informations. Moralité, re-renvoi devant une nouvelle nouvelle Cour d'appel.

e · Autres types d’ententes

Bon, là, deux.

La première, c’est l’application de conditions inégales pour des prestations équivalentes. C’est de la discrimination. La seconde, c’est l’imposition dans un contrat de prestations supplémentaires sans lien avec l’objet principal.

Très souvent, les grandes ententes ont en réalité un objet… multiple. Les grands cartels, notamment horizontaux, ont pour objet et de répartir les marchés et de fixer les prix.

B · Les théories perturbatrices

Barbares.

Le Droit de la concurrence développe une démarche contextuelle des comportements d’entreprise. On ne se contentera pas d’apprécier l’entente en tant que telle, mais on se basera sur le contexte dans lequel cette entente intervient. On va alors examiner différentes théories. Certaines vont jouer en la faveur des entreprises, d’autres en leur défaveur.

1 · La règle de raison

a · Made in Normandie USA

Le Droit américain ne connaît pas la possibilité de rachat d’une entente anticoncurrentielle. Seul existe un principe prohibitif. Cela a conduit les autorités américaines à retenir une approche raisonnable de la règle prohibitive, histoire d’éviter un certain systématisme, une trop grande sévérité.

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Cette règle de raison a pris deux incarnations. La première, c’est le bilan concurrentiel, qui consiste à considérer que des restrictions de concurrence sont raisonnables. Globalement, dans un accord, les aspects proconcurrentiels l’emportent sur les aspects anticoncurrentiels. En conséquence de quoi, on valide l’ensemble. La deuxième, c’est la théorie des restrictions accessoires. L’accord est globalement bon pour la concurrence. Dans cet accord, une clause pose problème. On la valide par la théorie de l’accessoire. Le principal étant bon, l’accessoire suit le régime du principal et va être validé en même temps que le principal. Enfin toujours est-il que cette clause soit d’une part accessoire, d’autre part nécessaire.

b · Réception de la théorie en Droit communautaire et remise en cause

Bah pourquoi elle a été reçue déjà.

Elle a eu une utilité en droit communautaire à un moment. A l’époque de l’Art. 81 §1 et le principe d’interdiction, principe qui pouvait être appliqué par la Commission européenne et les autorités nationales de concurrence et les juridictions nationales. L’Art. 81 §3 était sensiblement différent, imposant 4 conditions de fond, des conditions de forme (notification) et une règle de compétence imposant la Commission européenne comme seule détentrice de la compétence.

La règle de raison, quand elle est appliquée, permet de valider une entente au moment où l’on se demande si le principe d’interdiction joue ou pas. Cette règle de raison a été introduite dans ses deux incarnations.

Le bilan concurrentiel visait essentiellement la distribution sélective. L’arrêt METRO du 15 octobre 1977 voit la CJCE évoquer que les accords de distribution sélective sont valables sous trois conditions, trois conditions cumulatives. Le recours à cette forme de distribution doit déjà être justifié, notamment au regard de la nature du produit. Les produits de haute technicité, les produits de luxe, sont deux bons exemples. Les revendeurs doivent être choisis sur des critères objectifs de caractère qualitatif. Enfin, il fallait que les critères définis par les fournisseurs n’aillent pas au-delà du réel, pardon, du nécessaire.

La théorie des restrictions accessoires joue aussi. On y a validé les clauses d’enseigne communes, permettant aux distributeurs de se regrouper lorsqu’ils passent des commandes, pour obtenir des ristournes et rabais supplémentaires. Un accord de partage des sinistres, unissant des compagnies d’assurance, permet d’assurer des sinistres lourds.

Mais comme d’ab, la jurisprudence est venu mettre son boxon. L’arrêt du TPICE du 18 septembre 2001, M6, a vu être mises en causes des entreprises cherchant à faire valider des clauses de non-concurrence par application du bilan concurrentiel. le TPICE a posé que la règle de raison n’est pas compatible avec la structure normative de l’Art. 81. L’Art. 85, devenu 81, puis 101, prévoit un troisième paragraphe. Ce n’est que dans le cadre précis de ce paragraphe qu’une mise en balance des effets pro et anticoncurrentiel est faite. A cette époque, le 18 septembre 2001, on collait le tuyau d’arrosage du règlement d’application des Art. 81 et 82. Le règlement 17/62 devait ainsi être modifié, à tel point que soit supprimée l’exigence de notification comme condition de forme, mais encore de doter l’Art. 81 §3 d’applicabilité directe.

En décembre 1999, on a adopté un grand règlement d’exemptions, pour toutes les restrictions verticales qui englobent la distribution sélective.

La communication de la Commission du 27 avril 2004, communication sur l’Art. au paragraphe 3. La mise en balance des effets proconcurrentiels s’effectue uniquement dans le cadre établis dans l’Art. 81 §3. Les restrictions accessoires jouent toujours sur le fondement de l’Art. 81 §3. Le Tribunal dénonce clairement que si l’on considère que la principale

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 70

opération couverte par l’accord ne restreint pas la concurrence, il n’est pas besoin d’examiner les restrictions qui accessoires.

Cette règle de raison, dans ces deux aspects avait été accueillie en Droit interne. Ce fut chose faite avec la distribution sélective, avec application des mêmes critères qu’en France.

2 · La théorie du seuil de sensibilité ou théorie de minimis

a · En Droit communautaire

Attention coquin, il y a deux théories de minimis. Il y a l’affectation sensible du commerce intracommunautaire, qui n’est qu’une condition d’applicabilité du droit communautaire. L’autre théorie vise une affectation sensible de la concurrence, qui est cette fois une condition pour que jouent la prohibition.

La communication de minimis qui date du 22 décembre 2001 vise les accords d’importance mineure, dont l’effet du caractère sensible est anticoncurrentiel. Pour l’atteinte à la concurrence, on recourt aux pars de marché. L’Art. 101 §1 ne joue que si les entreprises détiennent une certaine part de marché. Enfin tout dépend selon que l’entente examinée est entre entreprises concurrentes ou entre entreprises non concurrentes. Dans une entente entre entreprises concurrentes, l’entente sera horizontale. La Commission européenne poursuivre ces ententes dès que, ensemble, les entreprises détiennent plus de 10 % de parts de marché. Si les entreprises ne sont pas concurrentes, l’exemple typique vise une entente véritable. On exigera de chaque entreprise qu’elle détienne plus de 15 % du marchés. Chacune doit détenir plus de 15 % de parts de marché.

Mais intervient la théorie de l’effet cumulatif. Dans cette hypothèse où jouerait un tel effet en raison d’une présence de réseaux parallèles d’accords sur le marché, le seuil est ramené à 5 %, qu’il ait accord entre concurrents ou non-concurrents.

Par ailleurs, il y est des ententes suffisamment grave pour qu’il soit encore hors de question de les faires bénéficier d’un effet de seuil.

b · En droit interne

L’accueil a été mouvementé. Le Conseil de la concurrence ne voulait pas en entendre parler. Il ne voulait pas d’un quelconque consécration d’un seuil de sensibilité. La Cour de cassation a dû ferrailler dans deux arrêts pour que le Conseil de la concurrence fasse machine arrière. Le premier revient à la Chambre commerciale et remonte au 4 mai 1993 ROCAMAT. Avec l’arrêt ZANNIER du 12 janvier 1999, le Conseil finit par s’incliner et accepter de vérifier l’atteinte sensible. Bon, le problème, c’est que le seuil n’était pas chiffré. Il faut attendre l’ordonnance du 25 mars 2004 pour que ce seuil soit introduit dans la Loi et chiffré. Désormais l’Art. L 464-6-1 CCom l’illustre.

10 % si les entreprises sont concurrentes

15 % si les entreprises ne le sont pas.

L’Art. 464-6-1 vise à chaque fois les parts de marché cumulées. Le texte invite à apprécier cette part de marché sur les marchés affectés par l’accord.

Enfin, aucune distinction n’est faite selon que la pratique a un objet ou un effet anticoncurrentiel. Par ailleurs, l’Art. 464-6-2 prévoit que ces seuils ne s’appliqueront pas en présence de restrictions caractérisées à la concurrence. L’Art. dresse une liste des restrictions

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caractérisées. 4. La Cour d'appel de Paris vient de rendre un arrêt – le 23 février 2010 – dans une affaire SNCF EXPEDIA, où elle considère que les règles de minimis sont en droit français d’application facultative. Pour l’affirmer, la Cour s’appuie sur la lettre du texte, dont il ressort que « l’autorité de la concurrence… peut décider de ne pas poursuivre si (…) ».

3 · La théorie de l’effet cumulatif

C’est la théorie la plus contestable. Elle génère une grande insécurité juridique. C’est la seule qui joue en défaveur des entreprises. L’idée est que la nocivité d’une entente ne résulte pas uniquement de son illicéité intrinsèque. Il existe des ententes par nature nocives. Une entente de prix alors qu’on est concurrent, bon bah jcrois que c’est clair. L’illicéité d’une entente peut aussi résulter du contexte juridique et économique entourant l’entente. Cette règle a été posée dans un arrêt de principe, BRASSERIE DE HAECHT, de la CJCE du 12 décembre 1967. La Cour énonce qu’en « frappant les ententes en raison de leurs effets au regard de la concurrence, l’Art. 85 §1 implique la nécessité d’observer ces effets dans le cadre où ils se produisent, c'est-à-dire dans le contexte économique et juridique au sein duquel ces ententes se situent, et qu’ils peuvent concourir avec d’autres à un effet cumulatif sur le jeu de la concurrence (…) ; l’existence de contrats similaires peut être prise en considération dans la mesure où l’ensemble des contrats de ce genre est de mesure à restreindre la concurrence ».

L’arrêt DELIMITIS de la CJCE du 28 février 1981 a confirmé et précisé tout ça. S’en suit la merveilleuse histoire du contrat de bière, avec brasseur, grossistes, débiteurs et bien sûr consommateur. Les contrats ont des effets qui se conjuguent avec d’autres accords du même type et qui, cumulativement, produisent un effet de blocage, nocif. Il faut donc des réseaux d’accords similaires, et un effet de blocage. Dans cet arrêt, la Cour invite à rechercher s’il existe des possibilités réelles et concrètes pour un nouveau concurrent de s’infiltrer dans le faisceau de contrats.

Dans la communication de minimis de 2001, la Commission a ajouté pour précision qu’un « effet cumulatif de verrouillage n’existera vraisemblablement pas si moins de 30 % du marché est couvert par des réseaux parallèles ayant des effets similaires ».

Dans l’arrêt DELIMITIS, la CJCE a introduit une autre limitation, en vertu de laquelle seules seront sanctionnées les ententes qui contribuent de manière significative à l’effet cumulatif, en raison des parts de marché participantes et de la durée de leur engagement.

Nouvelle illustration sur la bière. Soif.

Cette théorie, pour être appliquée, doit l’être in concreto. Un arrêt du 24 novembre 2009 a vu la Chambre commerciale de la Cour de cassation mettre en cause, ça alors, KRONENBOURG. Un café-bar est vendu. l’acquéreur déclare expressément vouloir reprendre le contrat de fourniture de bière qui le lie à KRONENBOURG. Mais après la signature de l’acte, il ne s’y approvisionne pas, car le contrat serait nul au regard de l’Art. 81 §1. La Cour d'appel de Paris valide, en arguant que le marché de la bibine est fermé, en raison du nombre de débits de boisson déjà liés par un contrat de bière et du volume total de bières vendues sous exclusivité. pas la Cour de cassation. La Cour de cassation invoque le défaut de base légale, reprochant à l’arrêt de refouler du gosier, de n’avoir pas recherché concrètement si ce contrat litigieux, compte tenu de ses spécificités, contribue de manière significative à l’effet du blocage produit par l’ensemble de ces contrats. Bon, mais c’est un peu tendu pour les entreprises d’évaluer le moment où le marché devient fermé. Il est aussi tendu de savoir si elles y agissent de manière significative. Pour le plaisir, une décision 05-D49 du 28 juillet 2005.

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 72

Section 2 Les mécanismes d’exemption La concurrence n’est qu’un moyen de parvenir à l’efficience économique, au bien-

être de la collectivité. La concurrence reste un moyen. On accepte le sacrifice partiel de la concurrence si le bien-être de la collectivité peut être atteint par d’autres moyens. L’Art. 101 §3 prévoit un mécanisme d’exemption des ententes. L’Art. L420-4 CCom le fait aussi, mais en droit interne.

En Droit français, l’exemption recouvre les ententes et les abus de position dominante. Pour être exemptées, les pratiques doivent faire l’objet d’un texte législatif ou d’un décret d’application. La pratique anticoncurrentielle doit être la conséquence directe et nécessaire du texte. Les parties ne doivent pas avoir d’autre choix. Un simple encouragement des pouvoirs publics ne suffit pas. en Droit communautaire, l’ordre de la Loi ne sera pas une exemption. Mais elle peut permettre de combattre la notion d’entente. A noter que dans le cas où la pratique n’affecte que le droit national, alors, on peut invoquer l’ordre de la Loi. Si on peut démontrer qu’il y affectation du commerce intracommunautaire, il faudra démontrer que la Loi n’est pas contraire au droit communautaire. Ce en vertu du principe de primauté qui obligerait le Juge ou l’autorité de concurrence à écarter le texte.

il existe en France deux motifs d’exemption, Outre les pratiques qui résultent des textes législatifs ou des décrets d’application, le second motif, c’est la contribution de la pratique aux progrès économiques. Mais là, les deux ordres juridiques coexistent. L’exemption peut être accordée dans un cadre individuel ou un cadre collectif.

Paragraphe 1er Les exemptions individuelles Le litige est classique. Une autorité de la concurrence ou un Juge a à traiter d’une

pratique, pratique considérée comme état anticoncurrentielle. On se demande si elle ne pourrait pas être rachetée.

A · La compétence en matière d’exemption

1 · Compétence sur le fondement du droit national

L’autorité de la concurrence et le Juge nationaux sont compétents.

2 · Compétence sur le fondement du droit communautaire

Le règlement 17/62 avait considéré que l’Art. 85 §3 relevait de la compétence exclusive de la Commission. L’Art. 85 §3 n’était pas directement applicable par les juridictions et autorités nationales. On considérait à l’époque qu’il était complexe. On présupposait qu’on ne maîtrisait pas bien encore le droit de la concurrence au plan national. Et en prime, la Commission voulait à tout pris préempter l’application du Droit communautaire. Enfin, on avait peur de faire une application trop… localiste de la notion de progrès économique. résultat des courses, l’Art. 85 §1 était doté d’effet direct, mais le Juge ne

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pouvait pas tenter de valider la pratique au regard de l’Art 85§3. la seule possibilité était alors pour l’entreprise de saisir la Commission.

40 ans plus tard, on se rend compte que ça fait tard. On ne met plus en doute la compétence locale du Droit communautaire. L’Art. 85 §3, désormais 81 §3 a été rendu applicable au niveau national. En outre, la Commission, jusqu’alors dotée d’une compétence exclusive, croulait sous les demandes d’exemption. Elle a entendu lâcher du lest. Il a donc fallu réformer les textes. Le Règlement 1/2003 du 16 décembre 2002, un grand grand texte, a doté l’Art. 81 §3 d’effet direct. Une autorité nationale ou un Juge peut donc accorder une exemption.

B · Les conditions d’octroi de l’exemption

1 · Conditions de fond communes à l’exemption individuelle

4 conditions, cumulatives.

Les entreprises ont la charge de démontrer que ces conditions sont cumulativement réunies. Dans la pratique, elles galèrent. Ces conditions sont communes aux exemptions individuelles et collectives. Dans un cadre individuel, elles doivent être prouvées, mais dans un cadre collectif, elles sont présumées.

a · La contribution de la pratique aux progrès économiques

On privilégie des objectifs économiques. Cela résulte de la pratique communautaire, synthétisée dans des lignes directrices du 27 avril 2004 sur l’application de l’Art. 81 §3.

La Commission s’exprime essentiellement en terme de bilan concurrentiel et de gain d’efficacité. Ces lignes directrices marquaient le signe d’une entrée massive de la théorie économique en droit de la concurrence.

Premier type de pratique anticoncurrentielle, c’est l’entente visant l’amélioration des coûts de fabrication, genre la mise en commun d’une chaîne de montage.

Deuxième type, les économies d’échelle ou d’envergure. bah là, c’est genre la mise en commun du mode de transport.

Troisième type, tout ce qui attrait à l’amélioration de la productivité, produire plus pour gagner plus.

Quatrième type visant là l’amélioration des conditions du marché. ici, on retrouve les ententes qui permettent d’introduire de nouveaux produits ou des produits meilleurs, ou encore les ententes qui permettent de mobiliser de nouvelles technologies. Les accords de licence, de brevet sont un bon exemple. Les accords de R&D aussi. Les accords de spécialisation (bilatéraux, unilatéraux…) sont une autre illustration. Souvent, ces accords font l’objet de règlements d’exemption en droit communautaire. Ces règlements ne jouent que si les entreprises ne dépassent pas un certain pouvoir de marché, que si elles n’ont pas trop de parts de marché. faute de bénéficier d’une exemption collective, les entreprises peuvent rechercher une exemption individuelle. Il est intéressant de noter qu’en droit national, il n’y a pas de réglementation d’exemption.

Les autorités de concurrence, nationales, ou communautaires, sont réticentes à s’engager dans la voie d’une prise en compte d’objectifs non strictement concurrentiels. La Commission européenne et certains auteurs craignent des perversions des règles de la

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 74

concurrence si on prend en compte des considérations autres qu’économiques, genre sociales. Les autorités de la concurrence y sont réticentes. Ces autorités n’ont pas la responsabilité politique que demande un arbitrage entre des considérations économiques et des considérations sociales. D’autres auteurs, comme la prof, considèrent que le terme est assez ramasse-miette pour y contenir des considérations sociales. L’arrêt METRO du 25 octobre 1977 voit la CJCE énoncer que le maintien de l’emploi est un élément de stabilisation dont la recherche rentre, au titre de l’amélioration des coûts de production, spécialement dans les circonstances d’une conjoncture économique défavorable, dans le cadre des objectifs de l’Art. 85 §3 permet de viser. Une décision de la Commission du 29 avril 1994 a elle vu établir que l’entente permette de conduire des opérations de restructuration dans des conditions sociales acceptables et facilite le reclassement du personnel. En Droit français, on a l’air plus… accueillant. L’Art. 420-4 I §2 inclut la prise en considération la création et le maintien de l’emploi. La Loi NRE l’a inclut en 2001, sans que cela soit réellement mis en pratique.

L’entente de crise permet de sauver les meubles.

Mais s’il s’agit juste de sauver sa peau, l’autorité de la concurrence s’en fou. La seule survie des entreprises concernées ne peut justifier une entente. La décision 05-D-03 l’illustre. Si on est dans une situation de crise structurelle, si le secteur subit un déclin continu, en aucun cas on ne vas autoriser les entreprises à s’entendre pour lutter contre un phénomène inéluctable. Si la crise est conjoncturelle, que les entreprises se ramassent des variations de production, bah là, on peut admettre l’entente de crise. Ceci dit, les moyens mobilisés sont fondamentaux. On exige alors des entreprises qu’elles adoptent des mesures structurelles qui vont tendre à l’organisation même du secteur. En aucun cas on admet que les entreprises fixent ensemble des prix pour se répartir les marchés. On veut bien que soit rationnaliser la production, pas de se répartir le marché.

Les objectifs environnementaux sont un autre exemple non économique.

Il y a une certaine réceptivité, mais rare.

La pérennité du cinéma est également retenu,3La sécurité des usagers d’un service, des utilisateurs d’un produit, la protection des consommateurs en terme d’information, de transparence sur les prix sont dégagés au niveau national.

Moralité, la notion de progrès économique est entendue largement.

b · Une partie équitable du profit doit être réservée aux utilisateurs

L’entente ne doit pas être égoïste, ne doit pas profiter qu’aux initiateurs de l’entente. les utilisateurs doivent en retirer une « partie équitable ». L’utilisateur, c’est le partenaire, la personne qui a vocation à utiliser les produits fournis par les entreprises en cause. Ce peut être une entreprise productrice, en vue de l’incorporer à un autre. Grossiste, détaillant, maître d’ouvrage, mais surtout le consommateur final sont des exemples. on veut que le consommateur tire son épingle du jeu concurrentiel. Si l’entente permet d’améliorer la productivité, de produire mieux à moindre coût, on entendra que cela engendre une réduction des prix au bénéfice de l’utilisateur. On peut imaginer que ce ne soit aussi l’amélioration de la qualité, de la sécurité, de l’impact environnemental du produit.

Plus la restriction de concurrence est importante, plus la répercussion doit être forte. C’est l’idée de compensation. Les autorités de concurrence admettent qu’un certain délai soit nécessaire pour répercuter.

c · L’entente ne doit pas contenir de restriction de concurrence injustifiée

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75 C h a p i t r e I · Les ententes anticoncurrentielles

C’est la condition de nécessité et de proportionnalité. La restriction de concurrence doit être strictement nécessaire pour obtenir l’avantage économique escompté. Les entreprises vont avoir à prouver quelque chose de tendu. Généralement, elles échouent dans le fait de prouver que, sans la restriction de concurrence, il leur soit impossible d’acquérir un progrès économique. Elles doivent démontrer qu’il n’existe aucun autre moyen d’obtenir la restriction de concurrence. Généralement, elles n’y arrivent pas. on peut aboutir à ce que l’autorité de la concurrence et l’entreprise marchandent, validant et invalidant les clauses. Bonjour l’intrusion. Certaines restrictions, caractérisées, sont interdites car ne sont jamais nécessaires à l’obtention du progrès économique escompté.

d · L’entente ne doit pas permettre aux parties d’éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits ou services en cause

Ici apparaît une limite à la théorie de la concurrence comme moyen et non comme fin. On admet un sacrifice de la concurrentiel, mais partiel. La libre concurrence prime. On considère que dans le cas où toute concurrence serait supprimée, les entreprises ne feraient plus l’effort pour toujours garantir l’existence de ce progrès économique promis. Elles ne se bougeront plus pour le répercuter sur les utilisateurs. la Commission est réticente lorsque l’entente aboutit à conférer un pouvoir de marché très important aux parties. Elle est encore réticente lorsque l’entente englobe un… franc-tireur. Ça, c’est par exemple l’entreprise qui va casser les prix, qui brutalise les concurrents. On entend s’assurer qu’il y ait toujours un peu de pression concurrentielle. On veut éviter tout monopole.

Dans tous les cas, réunir ces 4 conditions sera tendu. L’entente sera finalement rarement exemptée.

2 · L’abandon des conditions de forme

a · Suppression de la notification

En droit français, on n’a jamais subordonné l’octroi d’une exemption à une exigence de forme. On n’a jamais requis que des entreprises, candidates à l’exemption, notifient leur accord.

En droit communautaire, jusqu’à récemment, les entreprises qui souhaitaient obtenir une exemption devaient notifier leur accord à la Commission. Sans cet accord, impossibilité d’obtenir l’exemption. Ce système de la notification prévu par le Règlement 17-62 a fait jaser. La procédure était lourde pour les entreprises, coûtait cher. Pour la Commission, bah c’était pas non plus la panacée, car elle était submergée de dossiers, auxquels elle devait répondre.

Mais un jour, avec le règlement 1/2003, cette condition de fond a été supprimée. Désormais, les ententes sont réputées valables dès l’origine. Elles le sont tant qu’elles n’ont pas été déclarées interdites par la Commission ou l’autorité nationale. Le système est dît d’exception légale.

b · Conséquences de la suppression de la notification en Droit communautaire

La première, c’est qu’il n’est plus possible de solliciter la Commission pour quémander l’octroi d’une exemption individuelle. L’inconvénient étant pour les entreprises qu’elles ne peuvent plus tâter le terrain auprès de la Commission. Le système est d’autoévaluation. Il appartient aux entreprises de répondre toutes seules à la question de savoir si cet accord est valable. Pratique jurisprudentielle, lignes directrices et compagnie leur permettent de s’évaluer. Ce nouveau système génère cependant de l’insécurité juridique. Les

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 76

réactions des entreprises ont été variées. La Commission a entendu les craintes de certaines d’entre elles, acceptant le principe des lettres d’orientation informelle. Une (autre) communication du 27 avril 2004 s’y intéresse. C’est une possibilité pour les entreprises de saisir la Commission d’une manière informelle pour lui demander de se prononcer sur leur pratique. restent qu’il faut respecter des conditions. La pratique doit poser une question nouvelle. La pratique décisionnelle antérieure ne doit pas y avoir déjà répondu. Il faut encore que la clarification apportée par la Commission soit utile. La Commission explicite. Elle s’attache à l’importance du secteur économique, à la fréquence de la pratique, ou encore l’importance intrinsèque de l’accord à travers par exemple l’importance des investissements consentis. Enfin, la Commission doit pouvoir se prononcer à partir des informations que l’entreprise transmet. Elle ne doit pas avoir à casser les genoux avec des investigations. Ces lettres d’orientation sont publiées. Elles ont donc vocation à être utiles pour les entreprises du secteur. Ces lettres ne sont pas décisions. Elles ne lient pas la Commission, ni les autorités de la concurrence et autres. La Commission peut se prononcer au regard de l’Art. 81 (101) ou l’Art. 82 (102). Pour l’instant, y en n’a toujours pas eu.

La deuxième vise les décisions en constatation d’inapplication, visées à l’Art. 10 du règlement 1/2003, sont rares. Ces décisions interviennent à l’initiative de la Commission, qui intervient donc d’office. Elle interviendra lorsqu’elle estimera que l’intérêt public le requiert. Elle interviendra lorsqu’il s’agit de clarifier le Droit, d’en garantir l’application uniforme… Cette décision aura vocation à dire que l’Art. 81 (101) ou l’Art. 82 (102) ne s’applique pas à ce type de pratique. Il s’agira de décisions qui s’imposeront donc aux autorités et juridictions nationales. Mais bon jusqu’ici aussi, il n’y en a pas eu.

Paragraphe 2e Les exemptions collectives Le mécanisme des exemptions collectives est souvent utilisé. Une exemption

collective s’incarne dans un règlement d’exemption. La Commission, forte de son expérience sur un domaine déterminé, peut obtenir l’autorisation du Conseil par voie de délégation de compétence le droit d’adopter un tel règlement. La Commission va ainsi pouvoir systématiser l’expérience acquise. Par exemple, pour telle condition, elle considérera qu’un type de contrat peut être exempté. L’intérêt d’un tel règlement, c’est qu’il dispense de l'obligation d’examiner au cas par cas chacun des contrats. Les entreprises, dont le contrat rentrera dans le giron du règlement d’exemption, sauront si leur contrat est ou non conforme. Dans le cas où il est conforme, ils disposent d’une présomption de validité. L’entreprise sera protégée. Dixit la prof, c’est un parapluie.

En droit interne, on n’en a pas l’équivalent exact. Il existe une possibilité d’exemption figurant à l’Art. L420-4 II CCom pour certaines catégories d’accord, après avis de l’autorité de la concurrence et décret pris devant le Conseil d’État. Pour l’instant, les domaines sont encore limités. L’autorité nationale de la concurrence a trouvé un biais. Soit l’accord qui lui est soumis affecte le commerce intracommunautaire, et alors le Droit communautaire s’applique et les règlements d’exemption s’appliquent. Soit le commerce intracommunautaire n’est pas touché et alors seul le Droit national s’applique. Les règlements d’exemption ne sont pas réputés être appliqués. La parade a été pour faire appliquer les règlements communautaires au titre de la grille d’analyse qu’ils proposent. Le règlement 2790/99 est ainsi plusqu’utilisé.

A · Le mécanisme des règlements d’exemption : la révolution de 1999

Rien que ça.

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77 C h a p i t r e I · Les ententes anticoncurrentielles

1 · Avant 1999

L’approche était alors très catégorielle. On raisonnait catégorie par catégorie de contrat. Un règlement s’intéressait aux accords de fourniture exclusive, un autre sur les approvisionnements exclusifs. Un autre règlement concernait les accords de franchise. Tous trois étant des accords de distribution verticale. D’autre règlements visaient les accords de brevet, de transmission de savoir-faire, de spécialisation… D’autres règlements étaient sectoriels, certains tâtant l’assurance, d’autre les transports…

Ces règlements avaient une structure identique. Des listes de clauses « blanches » visaient les clauses validées, quand des clauses « noires, brrr, qui ciblaient là les vilaines clauses. Ces listes permettaient une certaine visibilité. Restaient les clauses « grises », un peu à la Mickaël Jackson, paix à son âme.

La Commission avait compétence exclusive. Le problème ne visait pas tant un règlement, qui est d’application directe. Il couvrait les entreprises. Le problème visait plutôt le retrait du règlement. Seule la Commission peut retirer le règlement.

Les règlements d’exemption s’appliquaient quelle que soit la puissance économique des entreprises.

Tout ça a fini par être critiqué.

Alors déjà, l’approche sectorielle ne plaît pas, car des contrats importants qui ne sont pas sous le coup de ces règlements pouvaient donc morfler. Genre les contrats de distribution sélective.

Ensuite, la structure. Surtout quant aux clauses « blanches » qui vont engendrer un phénomène de standardisation contractuelle. Il faut comprendre que ces règlements sont cruciaux pour les entreprises, entreprises qui souhaitaient donc à tout pris être protégées par ces règlements. Elles pouvaient donc être contraintes à renier des clauses qui ne sont par exemple pas noires ni grises mais pas blanches non plus…

Enfin, l’histoire de puissance économique. des entreprises de taille différente peuvent faire valider des accords qui respectent ces règlements sans que l’on s’intéresse à leur particularité.

2 · Depuis 1999

a · Une nouvelle approche des règlements d’exemption

Ù Abandon de l’approche strictement catégorielle

On raisonne de manière plus empirique. Le règlement 2790/99 du 22 décembre 1999 est fondamental. Il vise les accords concernant des restrictions verticales. Sont ainsi visés les accords entre deux ou plusieurs entreprises, dont chacune opère à un niveau différent de la chaîne de production et de distribution, et qui concerne les conditions dans lesquelles les parties peuvent acheter, vendre, ou revendre certains biens ou services.

Ce règlement est prolongé par des lignes directrices, genre celles du 13 octobre 2000.

Bon et il y a eu d’autres règlements. Le règlement 772/2004 du 27 avril 2004 a visé les transferts de technologie. Le règlement 2659/2000 du 29 novembre 2000 a visé tous les accords de recherche en commun.

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Chapitre I · Les ententes anticoncurrentielles 78

Ù La structure des règlements est modifiée

Les clauses blanches disparaissent. Les clauses noires persistent. Pour le règlement 2790/1999, elles figurent à l’Art. 4. Alors maintenant, il y a des clauses rouges, des clauses qui ne bénéficient pas de l’exemption, mais dont la présence ne fera pas obstacle au règlement pour le reste de l’accord. L’Art. 5 les vise. La clause de non-concurrence qui dépasse 5 ans est un exemple.

Prochaine étape, les clauses jaunes devant, marron derrière.

Ù Une approche plus économique, tenant compte du pouvoir de marché des entreprises

Ce pouvoir de marché est défini comme la capacité de pratiquer pendant une durée significative des prix supérieurs à ceux qui résulteraient du jeu normal de la concurrence. Les entreprises qui détiennent un certain pouvoir de marché peuvent se voir refuser le bénéfice du règlement. Le règlement ne pourra bénéficier qu’aux entreprises qui détiennent moins de 30 % du marché affecté par l’accord. Ce chiffre serait apprécié par rapport aux fournisseurs. La conséquence, c’est qu’un fournisseur qui détient plus de 30 % du marché ne pourra pas être protégé par l’accord. On renoncera seulement à la validation automatique pour en revenir à une appréciation individuelle. En cas d’exemption, ce ne sera plus sur le fondement du règlement, mais sur le fondement d’une exemption individuelle.

--x—

La part de marché en deçà de laquelle un règlement peut bénéficier aux entreprises varie selon les entreprises. Ainsi, lorsqu’une entreprise détient 30 %, bah ce chiffre peut comprendre la part de marché du fournisseur. Une exception vise le contrat de fourniture exclusive, où on prend la part de marché du distributeur.

Le règlement 2659/2000 établit un seuil de 25 % pour les accords de recherche et développement. On y additionne la part de marché des participants.

Il faut conjuguer ces seuils avec les seuils de sensibilité. Par exemple, pour des entreprises non concurrentes, si le seuil de minimis de 15 % n’est pas franchi, on n’applique pas les règles de la concurrences. Dans le cas contraire, les entreprises peuvent bénéficier des seuils d’exemption, jusqu’à 30 %.

La Commission peut retirer le droit de bénéfice d’un avantage catégoriel. En cas de cumulation d’effets, elle peut retirer l’effet du règlement. Une autorité nationale de concurrence peut retirer le bénéfice du règlement si cet accord litigieux produit des effets restrictif graves sur le territoire national.

b · Les réformes récentes

Ces règlements d’exemption ont une durée nécessairement limitée. le règlement sur les restrictions verticales arrive bientôt à échéance. Un nouveau règlement et de nouvelles lignes directrices seraient sur les chaînes de production. Ah bah d’ailleurs, on me chuchote dans l’oreillette que, le 20 avril 2010, le règlement 330/2010 est sorti d’usine avec des lignes directrices. Il s’applique jusqu’en 2022, rien que ça, mais n’apporte guère de changements. Les seuils évoluent. 30 % dorénavant, mais la Commission prend en compte la puissance d’achat au niveau de la grande distribution. On prend le pouvoir d’achat du fournisseur et du distributeur. Tous les deux doivent respectivement détenir moins de 30% de part de marché. Reste à délimiter les deux marchés.

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79 C h a p i t r e I I · Les abus de position dominante

En 2007, La Cour suprême américaine a rendu un arrêt LEEGIN, qui n’interdit pas au fournisseur de contrôler les prix des distributeurs. Mais la Commission dit que ça reste une restriction caractérisée. Cependant, il est possible de convaincre du caractère nécessaire du contrôle tarifaire. Bref, ça se fait au cas par cas.

Avec internet a eu lieu un débat sur la vente. Les restrictions de la vente sur internet d’un fournisseur sur ses distributeurs est une restriction caractérisée. Le règlement ne prévoit rien, mais les lignes directrices évoquent que c’est une restriction caractérisée. Reste la possibilité pour le fournisseur de subordonner la vente sur internet par un distributeur à ce qu’il ait un point de vente réel.

Il faut encore relever une période de transition d’un an car les contrats de distribution qui sont conformes à l’ancien règlement mais pas au nouveau échappent pendant un an à l’application de l’Art. 101 §1.

Pour les automobiles, on s’est questionné quant à l’intérêt de conserver un règlement propre à ce domaine. le choix a été de le mettre sous le tapis du règlement 330/2010, après une phase transitoire de 3 ans. c’est en tout cas le cas pour le contrat de vente. Mais pour l’après-vente, un règlement spécifique s’applique.

La Commission a lancé une consultation pour réformer les règlements en matière horizontale.

B · Portée des règlements d’exemption

Un règlement d’exemption n’a pas de portée contraignante.

Ainsi, les parties n’ont pas l'obligation de mettre leur contrat en conformité avec un tel règlement. Si l’une des parties refuse, elle n’engage pas sa responsabilité. Enfin, le contrôle de non-conformité au règlement n’est pas ipso facto nul.

Bon, donc le règlement ne s’applique pas nécessairement au contrat, reste à savoir comment apprécier la validité du contrat. Le Juge est saisi, il regarde les seuils en part de marché. si le seuil de 30 % est dépassé, le règlement n’a pas à jouer. On regarde s’il y a des restrictions de concurrence. Si oui, il y a nullité, à moins que l’Art. 101 §3 s’applique. Si le seuil de 30 % n’est pas dépassé, le règlement peut s’appliquer, reste à trouver les restrictions caractérisées. Si oui, bah un examen individualisé est réalisé. Il est peu probable que l’Art. 101 §3 s’applique, le contrat a des fortes chances d’être nul. Si non, bah on va chercher s’il y a des clauses rouges. A priori, il y a nullité, sauf si encore une fois l’Art. 101 §3 s’applique. Mais seules les clauses perverties seront nulles. Le reste du contrat est couvert. S’il n’y a pas de clause rouge, le règlement s’applique pour tout l’accord.

Il n’en demeure pas moins qu’est présumée la validité du contrat.

Chapitre II Les abus de position dominante Vu l’Art. 102, « Est incompatible avec le marché intérieur et interdit, dans la mesure

où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci ».

S’en suit une liste non exhaustive des pratiques perverties.

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Chapitre II · Les abus de position dominante 80

Ce texte est bien entendu d’effet direct. En droit français, on le retrouve aux Art. L420-2-1 et L420-2-1-2. Ces deux textes n’interdisent pas les positions dominantes mais leur abus.

Les autorités de la concurrence sont au taquet vis-à-vis des entreprises dominantes, car c’est un état dangereux qui peut tenter d’abuser de sa position dominante. C’est probablement pourquoi était énoncé dans une conférence de presse au sujet de la célèbre affaire Microsoft qu’« une entreprise a une responsabilité particulière ».

Il y a des comportements que l’on admet pour une entreprise… « normale », une entreprise qui n’est donc pas dominante. J’adore ce vocable. Qui dit dominant dit dominé, ça fait très cuir clouté. Certains comportements leur étaient même interdits. Pour un cas d’exclusivité, on ne peut enfermer le cocontractant dans l’exclusivité. On veut empêcher que l’interlocuteur soit empêché d’ailler voir ailleurs.

Cela a poussé la Commission à méditer une fois de plus. avec succès. La consultation publique démarrée en 2005 aboutit en 2008. Le 3 décembre plus précisément. La Commission adopte un document d’orientation sur les priorités retenues par la commission sur l’application de l’Art. 82 sur l’es pratiques d’éviction. La Commission invite à prendre en compte les effets de ces pratiques, à lâcher l’approche sectorielle pour se concentrer sur une approche s’intéressant aux effets.

La Commission excplique que l’objectif est de protéger la concurrence et non les concurrents.

Le concurrent digne de protection est le concurrent méritant. Le document introduit la possibilité pour les entreprises dominantes de justifier leur pratique.

Ce textes n’en est pas moins qu’une communication, sans force donc contraignante. Il ne faut pas non plus déduire des évolutions de ce texte une plus grande tolérance dans le traitement des abus de position dominante. L’affaire INTEL ayant donné lieu à un arrêt du 13 mai 2009 l’illustre. Cette société s’est faite sabrée à hauteur d’un milliard d’euros pour justement abus de position dominante.

Section 1 La domination d’une entreprise Le cuir clouté, c’est la mode.

On apprécie la domination d’une entreprise sur un marché de référence. Il faut déterminer le marché pertinent. Plus c’est étroit, plus la probabilité est forte. Généralement, c’est une société qui est dominante. Mais on admet tout à fait que ce soit un groupe ou plusieurs entreprises.

Paragraphe 1er Définition et critère de la position dominante

A · Définition

Un arrêt important à retenir est celui de la CJCE en date du 14 février 1978, UNITED BRANDS. « La position dominante ... concerne une position de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause en fournissant la possibilité de comportements

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8 1 C h a p i t r e I I · Les abus de position dominante

indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des consommateurs ». Cette définition est au passage confirmée dans l’arrêt HOFFMAN-LAROCHE (CJCE 1979). La commission considère qu’une entreprise capable d’augmenter les prix pendant une longue période ne subit pas de pression concurrentielle suffisante et peut donc être considérée comme dominante.

B · Critères

La domination, c’est outre le loisir des sadomasochistes, un état de fait.

1 · La position sur le marché de l’entreprise dominante et de ses concurrents

C’est le critère fondamental. Des parts de marché très importantes constituent finalement par elles-mêmes la preuve d’une position dominante.

L’arrêt HOFFMAN-LAROCHE du 13 février 1979 le démontre.

Il faut un monopole de droit ou de fait.

Au-dessus de 90 %, il y a bizarrement une présomption très forte de position dominante. Un indice de part de marché suffit. Entre 60 et 80 %, l’indice est juste très fort, et il faudra le compléter. Autour de 50 %, la part de marché est un indice qui s’affaiblit. En dessous de 40 %, la présomption ne joue plus. si on est en dessous de 10 %, là, la présomption s’inverse carrément. Il y a présomption d’absence de position dominante. La présomption reste simple.

On regarde aussi la part de marché des concurrents. Ainsi, dans une configuration où une entreprise détient plus de 60 % et une autre 40 %, il n’y aura pas nécessairement position dominante. La Commission ne remet pas en cause les parts de marché mais invite à regarder les autres facteurs.

2 · Les facteurs complémentaires

a · Les barrières à l’entrée ou à l’expansion du marché

Pour savoir si une entreprise est dominante, il faut regarder si le marché est contestable. Sa position est-elle disputée ? des concurrents peuvent-ils entrer sur le marché et se développement ? finalement, c’est une question de barrières à l’entrée.

La Commission invite à regarder si une entreprise peut être dissuadée de relever les prix, si l’expansion ou l’entrée sont probables, si ce relèvement de prix intervient en temps utiles et est suffisant…

Il peut encore y avoir des barrières juridiques. Détenir un brevet, des autorisations administratives sont des illustrations.

Bref, il faut démontrer que l’entreprise dominante jouit d’avantages qui rendent difficile l’accès et l’expansion sur les marchés.

Ces avantages peuvent être techniques ou commerciaux. Ce peut le fait qu’une entreprise ait effectué des investissements importants, qu’elle ait conclu des contrats à long terme avec ses partenaires, éventuellement sous exclusivité… les coûts et effets des réseaux peuvent aussi avoir un impact, genre lorsqu’un client veut changer de fournisseur et que

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Chapitre II · Les abus de position dominante 82

cela coûte bonbon. De même, est un avantage le fait d’appartenir à un groupe puissant, tout comme l’est également un accès préférentiel à certaines sources financières.

b · La puissance d’achat compensatrice

On est ici dans le cas d’une pression venant de consommateurs. La question à se poser ici, c’est celle de savoir si la clientèle de l’entreprise a un pouvoir de négociation.

C · Position dominante collective

Une position dominante peut-être obtenue conjointement, par plusieurs entreprises.

La décision de la Commission sur le Verre plat en date du 7 décembre 1988 illustre le fait que des entreprises distinctes se présentent sur un marché comme une seule entité. C’est à partir de cette entité qu’on apprécie le pouvoir de domination.

On applique ensuite les mêmes critères que pour une position dominante classique.

Il convient de relever deux conditions cumulatives pour que soit établie la position dominante collective.

1 · Il doit exister entre les entreprises des liens ou une configuration de marché laissant ces entreprises interdépendantes

Bah là, jusqu’à récemment, c'est-à-dire l’arrêt SIV du TPICE du 10 mars 1992, il fallait que les liens soient stables et durables.

Ces liens pouvaient être structurels (participation au capital…), contractuels (accord de licence…), personnels, commerciaux, ou se cumuler avec une entente. Finalement, les liens ressemblent à des facteurs de corrélation. C’est du moins ce qu’il résulte d’un arrêt du 27 avril 1994 COMMUNE D’ALMEDO & AUTRES.

La position dominante collective peut-elle résulter de la seule structure du marché ? une situation oligopolistique peut-elle suffire à établir une position dominante ?

Il y toujours une interdépendance naturelle entre les entreprises. Cela explique des parallélismes comportementaux. Dans un arrêt AIR TOURS du TPICE du 6 juin 2002, le contexte est l’autorisation d’une concentration mais on le transpose aux pratiques anticoncurrentielles. 3 conditions sont dégagées pour démontrer que les membres d’une situation oligopolistique sont en situation de position dominante collective :

Ø Il faut une transparence du marché.

Ø Il faut une collusion tacite et qui se maintienne dans le temps. Il n’y a donc pas besoin d’un accord commun, la concurrence est un peu mollassonne et personne n’a intérêt à ce que ça change, ou à avoir un comportement agressif, ah si, peut-être de nouveaux acteurs.

Ø Il ne faut pas qu’il y ait une pression concurrentielle.

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83 C h a p i t r e I I · Les abus de position dominante

2 · Il faut une ligne d’action commune sur le marché des entreprises en cause doivent se présenter sur le marché comme une entreprise

Il faut donc un lien de causalité entre la position dominante collective et l’action commune.

Une fois que la position dominante collective est déterminée, on va s’intéresser à l’abus en lui-même. Cet abus peut être individuel.

Section 2 L’abus de position dominante Alors là, PAS question d’exemption. Il n’y a ici pas d’équivalent à l’Art. 101 §3.

Paragraphe 1er Définition & illustration de l’abus de position dominante

A · Définition

C’est pas dans les textes qu’il faut la chercher. Mais dans les entrailles de ce bon vieux HOFFMAN LAROCHE qui date toujours du 13 février 1979. « La notion d’exploitation abusive est une notion objective qui vise les comportements d’une entreprise en position dominante qui sont de nature a influencer la structure d’un marche ou, à la suite précisément de la présence de l ' entreprise en question , le degré de concurrence est déjà affaibli et qui ont pour effet de faire obstacle , par le recours a des moyens différents de ceux qui gouvernent une compétition normale des produits ou services sur la base des prestations des operateurs économiques , au maintien du degré de concurrence existant encore sur le marche ou au développement de cette concurrence ».

On retient deux types d’abus.

1 · L’abus de structure

Ça, c’est tout comportement d’une entreprise en position dominante qui réduit la concurrence ou qui retarde l’arrivée d’un concurrent. C’est un abus d’exclusion. Les autorités de concurrence regardent aussi l’anormalité du comportement.

2 · L’abus de résultat

C’est le cas où l’entreprise tire partie de son pouvoir de marché pour obtenir des avantages de ses clients ou fournisseurs, avantages sans lesquels l’entreprise n’aurait pas pu atteindre ce pouvoir de marché.

L’abus doit avoir lieu sur le même marché que la position dominante. Sauf exception, c'est-à-dire le cas où l’abus peut produire ses effets sur un marché différent que celui de la position dominante. Pour admettre cet abus, il faudra nécessairement respecter des conditions. il faut des circonstances particulières qui montrent que c’est pour renforcer sa position dominante que l’entreprise a mis en œuvre une pratique dominante sur un marché distinct. L’arrêt de la CJCE du 3 septembre 1991, AKSO, l’illustre. Il faut également

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des circonstances particulières qui montrent que les marchés en cause présentent des liens de connexité si étroits que l’entreprise se trouve dans une situation assimilable à une situation de position dominante sur un marché. l’arrêt TETRAPACK du 14 novembre 1996 et l’arrêt GLAXOSMITHKLINE de la Cour de cassation du 17 mars 2009 le caractérisent.

B · Exemples d’abus

1 · Abus d’éviction

C’est une pratique qui entrave ou supprime l’accès effectif au marché des concurrents, qu’ils soient actuels ou potentiels. Cette pratique est sévèrement sanctionnée. La Commission dit qu’elle n’interviendra que s’il existe des preuves solides et convaincantes que la pratique risque de produire une éviction anticoncurrentielle.

a · Accords d’exclusivité

En matière d’accord d’exclusivité, ce sont toutes les pratiques qui tendent à empêcher de vendre à des consommateurs sont visées.

Les clauses d’approvisionnement exclusives voient un fournisseur en situation de position dominante qui s’amuse à contraindre son distributeur à ne se fournir qu’auprès de lui. Ce sont des clauses typiques d’un abus de position dominante. Elles sont sanctionnées sauf exception. La Commission énonce qu’elle sera moins systématique les condamnations. Elle entend diriger son faisceau inquisiteur sur le débiteur de l’exclusivité, histoire de savoir s’il a un intérêt à l’exclusivité. Elle va aussi regarder si les consommateurs y gagnent ou non.

Les primes de fidélité, quant à elles, voient l’entreprise en situation de position dominante donner une prime à une autre si elle reste plus longtemps ou achète encore plus. l’arrêt MICHELIN de la CJCE du 30 septembre 2003 le caractérise. Michelin est en situation de position dominante sur le marché des pneus neufs pour les poids lourds. La Commission en profite pour distinguer les rabais progressifs et les rabais rétroactifs. Pour elle, les rabais rétroactifs sont les plus fourbes. L’affaire INTEL de 2009 est également à noter.

b · Pratiques de vente liée

En matière de pratiques de vente liée, lorsque le produit brut est subordonné à l’achat d’un produit de la société en situation de position dominante, la Commission intervient sur deux conditions, ➀ Si les produits sont tout d’abord véritablement distincts, au sens ou, en l’absence d’une telle vente liée, les consommateurs auraient pu acheter le produit lié auprès d’une autre entreprise ; ➁ si est prouvé l’effet d’éviction sur le marché (on va alors s’intéresser à la durée de la pratique.

c · Quant à la prédation…

Ça, ça voit l’entreprise en situation de position dominante pratiquer des prix très faibles histoire de casser du concurrent. Pendant un temps, elle peut vendre un produit à perte. Les petits concurrents vont essayer de la suivre. Mais, manque de bol, ils n’y arrivent pas et finissent par disparaître. Après, la première entreprise raugmente ses prix.

Deux hypothèses se présentent.

La première voit une prédation présumée si le prix pratiqué est inférieur à la moyenne de ses coûts variables.

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La seconde voit l’entreprise en situation de position dominante vendre à des prix supérieures à la moyenne de ses coûts variables mais inférieurs à ses coûts totaux. Il faut prouver l’intention d’éliminer le concurrent.

Faut-il prouver que l’entreprise ait la possibilité de récupérer ses pertes en pratiquant de tels prix ?

En Droit français, voui, « la pratique par laquelle une entreprise en position dominante fixe ses prix à un tel niveau qu’elle subit des pertes ou renonce à des profits à court terme dans le but d’évincer ou de discipliner un ou plusieurs concurrents, ou encore de rendre plus difficile l’entrée de futurs compétiteurs sur le marché afin ultérieurement de remonter ses prix pour récupérer ses pertes ». C’est ce qu’il ressort des décisions 07-D-09 GLAXOSMITHKLINE et 07-D-39 EUROSTAR.

En Droit communautaire, ce n’est pas un élément constitutif de pratique de prédation. L’arrêt de la CJCE du 2 avril 2007 sur FRANCE TELECOM voit la Commission n’intervenir lorsque seront en cause des pratiques d’éviction fondées sur les prix que dans le cas où les pratiques considérées ont déjà entravé ou sont de nature à entraver la concurrence d’entreprises considérées comme aussi efficaces que l’entreprise en situation de position dominante.

d · Le refus d’accès à une ressource essentielle

L'hypothèse, ici, c’est qu’une entreprise intervienne sur un marché amont. Elle y est en position dominante, allez, même en monopole. Sur ce marché amont, l’entreprise détient en prime une ressource essentielle. D’autres entreprises, qui interviennent sur un marché aval, ont besoin de cette ressource essentielle pour pouvoir intervenir sur ce marché aval. Sur ce marché aval, on retrouve la première entreprise. Si cette entreprise refuse de mettre cette ressource à la disposition de ses concurrents sur le marché aval, bah cette entreprise abusera de sa position dominante sur le marché aval. En conséquence de quoi on va mettre à sa charge une obligation de mettre cette ressource à disposition de ses concurrents, ce à un prix raisonnable.

Cette obligation de mise à disposition peut d’abord porter sur des produits, genre une matière première. L’arrêt ICI de la CJCE du 6 mars 1974 l’illustre. Une entreprise dominante est la seule à fabriquer la matière première. On parle de ressources essentielles.

On lui a coller ensuite des obligations d’accès à des installations, à des réseaux. La décision de la Commission du 21 décembre 1993, port de Robby, le démontre. L’entreprise dominante gérait un port. On parle d’infrastructures essentielles.

Plus généralement, on parle de facilités essentielles.

Cette obligation peut aussi porter sur une licence. Une entreprise qui détient un droit de propriété intellectuelle à concéder une licence sur son droit de propriété, histoire de permettre à des concurrents potentiels d’intervenir sur un marché aval.

Une affaire à retenir, c’est l’affaire MAGILL, donnant lieu à un arrêt de la CJCE le 6 avril 1995. En l’espèce, c’est une histoire de marché télévisuel. Plusieurs chaînes édictent leur propre grille de programme. Chaque a un droit d’auteur sur leur grille. Le badaud devait se débrouiller pour les obtenir. La société MAGILL a entendu rassembler tout ça. Le marché aval apparaît. Pouf. Mais elle avait besoin que chaque chaîne lui accorde une licence d’utilisation de sa propre grille de programme. Forcément, refus, d’où, contentieux. La CJCE a pris pour précaution de dénoncer qu’un refus de licence sur un droit de propriété intellectuelle, même s’il est le fait d’une entreprise en position dominante, ne serait constituer en lui-même un abus de celle-ci. Néanmoins, l’exercice du droit exclusif peut, dans des circonstances

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exceptionnelles, donner lieu à un comportement abusif. Il en résulte l'obligation d’accorder une licence en contrepartie de quoi sont payées des redevances, bien entendu raisonnables.

Mais à quelles conditions peut imposer tout ça ?

Les conditions sont cumulatives.

� La première, c’est que l’infrastructure, ressource, facilité soit entre les mains d’une entreprise en position dominante.

� L’accès à cette infrastructure, ressource, facilité, doit être strictement nécessaire pour exercer une activité concurrente sur un autre marché.

� L’infrastructure, ressource, facilité, ne doit pas pouvoir être reproduite dans des conditions économiques raisonnables.

� Le refus d’accès, de fourniture, doit en outre être dépourvu de justification.

� Dans le cas particulier où il s’agit d’un de propriété intellectuelle qui est en cause, on considère que le refus empêchait l’arrivée d’un nouveau produit, pour lequel il existe une demande potentielle

Un petit prolongement, c’est l’affaire Microsoft. Microsoft détient une double position dominante. Elle détient une position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation pour les ordinateurs personnels. 98 %. Seulement. A côté de ça, elle détient une position dominante sur le marché des serveurs de groupes de travail permettant aux ordinateurs personnels de fonctionner en réseau. Là, 60 %. Dans une décision de la Commission du 24 mars 2004, épique, il a été reproché à Microsoft de lier la vente de Windows Media Player à Windows. Ensuite, il a été reproché d’avoir refusé de livrer à ses concurrents des informations permettant d’assurer l’interopérabilité entre les systèmes d’exploitation et les serveurs de groupes en réseau. En l’occurrence, la Commission a la théorie des infrastructures essentielles. Mais le petit détail, c’est qu’aucun nouveau produit n’était visé. C’était plus l’entrave au progrès technique, l’entrave à la diversité de l’offre. Dans cette décision du 24 mars 2004, Microsoft se ramasse donc une amende. 500 millions d’euros. Et en prime, des injonctions. La première, cesser la vente liée. La seconde, livrer les informations nécessaires pour assurer ladite interopérabilité. Qu’importent les secrets et les propriétés intellectuelles. La Commission a donc balancé plusieurs mises en demeure, sous astreinte, à deux reprises successives. Le 12 juillet 2006, l’astreinte accumulée s’élevait 280,5 millions d’euros. Le 24 février 2008, on en était arrivé à 899 millions d’euros. Microsoft finit par céder. L’arrêt du TPICE du 17 septembre 2007 a approuvé la décision de la Commission, remettant cependant en cause le fait que la Commission ait désigné un mandataire pour casser les genoux chez Microsoft même.

Les documents d’orientations de décembre 2008 s’intéressent à ces théories, mais sous le vocable de refus de fourniture et compression des marges. La liberté contractuelle est réaffirmée. L’entreprise doit pouvoir disposer de ses biens et choisir ses cocontractants. Imposer de telles obligations ne doit pas décourager la recherche ou les investissements, auquel cas tout le monde y perdrait. La Commission considère que pousser le bouchon un peu trop loin, c’est encourager les concurrents à préférer profiter gratuitement des investissements réalisés par les entreprises dominantes, au lieu d’investir eux-mêmes. Moralité, 3 conditions sont réunies :

� Le refus porte sur un produit ou un service objectivement nécessaire pour pouvoir exercer une concurrence efficace sur un marché en aval. C’est dans ce cadre-là que la Commission intègre l’impossibilité de dupliquer, reproduire, dans des conditions économiques raisonnables, l’infrastructure ou équivalent. La

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Commission estime au passage que le fait de mettre fin à un accord de fourniture existant est plus grave qu’un refus de fourniture de novo.

� Le refus est susceptible de conduire à l’élimination d’une concurrence effective sur le marché en aval. La Commission prend notamment en compte la part de marché de l’entreprise dominante sur le marché en amont sur le marché en aval.

� Le refus est susceptible de léser le consommateur. La Commission rajoute que l’entreprise qui demande la fourniture ne doit pas se limiter à reproduire les produits ou les services déjà proposés par l’entreprise dominante sur le marché en aval. Il faut que cette entreprise ait l’intention d’offrir des produits ou des services nouveaux ou plus performants pour lesquels il existe une demande potentielle de la part des consommateurs, ou qui sont susceptibles de contribuer au développement technique.

2 · La recherche d’abus d’exploitation

Ici, l’entreprise dominante abuse de cette position de force ou de la suggestion économique de ses partenaires pour leur imposer des conditions… anormales, en terme de prix notamment. Il peut ainsi y avoir des pratiques discriminatoires. L’entreprise dominante impose des conditions inégales à ses partenaires pour des prestations équivalentes. L’entreprise peut également imposer des prix excessifs. Le Droit de la concurrence n’entend cependant pas permettre un contrôle généralisé des prix. Il faut qu’il y ait un excès important, généralement entre le coût effectivement supporté par l’entreprise dominante et le prix pratiqué. On peut aussi admettre de mettre en comparaison le prix pratiqué avec le prix pratiqué par les concurrents. Mais bon, il faut toujours un écart important. L’arrêt du 14 février 1978, UNITED BRANDS, le caractérise. Une clause de non-concurrence de durée excessive, un refus de vente injustifié, une rupture brutale de relations commerciales établies, une modification unilatérale des relations contractuelles, sont d’autres exemples.

Paragraphe 2e La possibilité donnée à l’entreprise de justifier ses comportements

A · Les justifications traditionnelles (mais rarement reçues)

On a toujours admis, au moins en théorie, que l’entreprise dominante puisse justifier, tenter de justifier le comportement qui lui est reproché. Attention toutefois, cette possibilité de se justifier de synonyme d’octroi d’une exemption. Il n’y a pas d’exemption pour les abus de position dominante. La justification retire seulement à l’acte son caractère abusif.

1 · Le principe et les conditions à une éventuelle justification

Le principe même d’une possible justification a été posé par l’arrêt UNITED BRANDS du 14 février 1978. La CJCE énonce qu’il est exact que l’existence d’une position dominante ne saurait priver l’entreprise se trouvant dans une telle position du droit de préserver ses propres intérêts commerciaux lorsque ceux-ci sont attaqués. Il faut lui accorder dans une mesure raisonnable la faculté d’accomplir des actes qu’elle juge appropriée en vue de défendre ou protéger ses dits intérêts. On ne peut admettre de tels comportements lorsqu’ils ont précisément pour objet de renforcer la position dominante et d’en abuser.

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Chapitre II · Les abus de position dominante 88

Des conditions sont posées. Il faut qu’il existe des justifications objectives à son comportement. Son comportement doit encore être proportionné. L’entreprise dominante doit rester dans sa réaction dans les limites d’un comportement compétitif normal.

Bref, il va y avoir une mise en balance entre le droit de défendre ses intérêts commerciaux et la lutte contre les abus de position dominante. La jurisprudence communautaire considère que la preuve du caractère approprié nécessaire et raisonnable incombe à l’entreprise dominante. Plus elle est dominante, moins elle aura de chance de s’en sortir les cuisses propres.

2 · Quelques exemples

En matière de prix, un arrêt AKSO voit la CJCE le 3 juillet 1991 reconnaître le droit pour une entreprise dominante de s’aligner sur les prix de ses concurrents, mais à condition que la pression concurrentielle qui pèse sur elle soit établie. Un arrêt plus récent, du 2 avril 2009, WANADOO, la CJCE précise que cette exception n’autorise pas un alignement général sur le prix des concurrents, mais seulement sur le prix d’un autre producteur qui serait en mesure d’approvisionner un client en particulier. Il faudra démontrer qu’elle se contente de se défendre, et non qu’elle cherche à renforcer sa position dominante.

En matière de contrainte technique, il a parfois été admis des contraintes d’espace ou de capacité. L’entreprise ne peut répondre à toutes les demandes. Il a aussi été invoqué des contraintes de sécurité. Elle peut se réserver l’exercice une prestation de service car elle estime que les autres n’offrent pas de garanties nécessaires à cette prestation. Des impératifs de protection sanitaire peuvent également jouer. Un manque de compétence de son interlocuteur aussi.

La jurisprudence reste toutefois restrictive. Lorsqu’il y a par exemple un problème de sécurité, c’est plus aux pouvoirs publics de s’en charger. En outre, le TPICE considère dans un arrêt HILTI du 12 décembre 1991 qu’il n’appartient pas à une entreprise dominante de prendre de sa propre initiative des mesures destinées à éliminer des produits qu’elle considère, à tort ou à raison, comme dangereux, ou, à tout le m oins, d’une qualité inférieure à ses propres produits.

D’une manière générale, l’entreprise ne doit pas exercer de représailles contre des pratiques qu’elle jugerait illicites ou déloyales.

B · La généralisation de la possibilité de se justifier : une nécessité objective et un gain d’efficacité

Là, on s’appuie sur le document d’orientation de décembre 2008. La Commission envisage deux types de justifications.

Ø Les justifications objectives.

La Commission suppose des facteurs extérieures, comme en matière de santé ou de sécurité. Elle admet mais souligne que ce sont plus aux pouvoirs publics de faire la police.

La Commission admet encore que l’entreprise dominante puisse invoquer des gains d’efficacité. Elle applique une grille ressemblant bizarrement à celle de l’Art. 81 §3 (101 §3). Mais là, on ne raisonne pas en terme d’exemptions, mais on apprécie le caractère prohibé du comportement. ➀ Ainsi, il faut des gains d’efficacité susceptibles d’être réalisés grâce au comportement litigieux, genre l’amélioration de la qualité des produits ou services, ou la réduction des coûts. ➁ Il faut également que le comportement litigieux soit indispensable à la réalisation de ces gains d’efficacité. ➂ Les gains d’efficacité l’emportent sur les effets préjudiciables à la concurrence. Tout en sachant qu’on prend en compte le bien-

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être des consommateurs. ➃ Le comportement n’élimine pas toute concurrence effective sur le marché.

C’est sur l’entreprise dominante que repose la charge de la preuve.

En matière de rabais, ceux-ci peuvent engendrer des gains d’efficacité lorsqu’ils permettent à l’entreprise de réaliser des investissements pour approvisionner des clients.

En matière de vente liée, celles-ci peuvent tendre à réduire les coûts de transaction pour les clients, ou permettent de proposer un produit… global, nouveau, bref intéressant.

La prédation, pour la commission, bof.

Le refus de fourniture voit la Commission l’admettre s’il permet d’assurer un rendement adéquat des capitaux investis, ou s’il permet de réaliser d’autres investissements.

La liste n’est pas exhaustive.

Chapitre III La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles C’est avant tout le Règlement 01/2003 qui joue. Règlement 774/2004 du 7 avril

2004 est complété par une commission du 27 avril 2004.

Section 1 L’établissement des infractions

Paragraphe 1er La saisine

A · L’autosaisine

Les autorités de concurrence ne sont pas des juridictions. La conséquence est qu’elles peuvent s’autosaisir. Cette faculté est d’origine jurisprudentielle, consacrée par l’Art. 7 § 1 du règlement 01/2003. L’Art. L462-5 CCom l’énonce en Droit français.

B · La saisine par les tiers

1 · Droit européen

Jusqu’au Règlement de 2003, les entreprises à l’origine de pratiques anticoncurrentielles, ou potentiellement, pouvaient saisir la Commission à titre préventif pour lui demander de se prononcer sur leurs pratiques. Avec le règlement, il est mis un terme à cette saisine préventive. Elle est dorénavant saisie sur plainte. Qui peut la saisir ? bah les États, lorsque leurs intérêts sont affectés en matière de concurrence. Les États sont supposés avoir un intérêt légitime à agir. Toutes les autres personnes devront elles prouver

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 90

l’intérêt légitime à agir. La Commission du 27 avril 2004 le précise. Ces autres personnes, ce sont avant tout les entreprises qui interviennent sur le marché affecté. Ce sont éventuellement les associations. Ce sont aussi les particuliers s’ils sont acheteurs de biens ou services faisant l’objet d’infractions. Enfin, les collectivités locales.

Il est acquis qu’il n’y a pas d’intérêt légitime si l’action est intentée pro bono publico, en vertu de considération d’Intérêt général.

2 · Droit national

L’Art. 462-5 CCom énonce lui le Ministre de l'économie, notamment parce qu’elle a sous sa coupe la DGCCRF, en suite de quoi viennent les entreprises, les collectivités territoriales, les organisations professionnelles, les organisations de consommateurs agrées, les chambres de commerce, voire certaines autorités sectorielles.

C · Prescription du droit de saisine

Presque identiques en droit européen ou droit français.

L’Art. 24 du règlement suppose que la commission ne puisse être saisie que sous 5 ans à compter l’infraction. Si elle a été commise instantanément, à compter de son apparition, ou si, lorsqu’elle a cessé, qu’elle a eu lieu de manière continue. Cette prescription peut être interrompue, dès qu’un acte de recherche est par exemple déclenché. En Droit communautaire, la Commission peut ouvrir une procédure après l’expiration de ce délai si elle estime qu’un intérêt public communautaire l’exige, mais alors, elle ne pourra que constater l’infraction, sans pouvoir infliger de sanction.

En Droit français, au départ, c’était 3 ans. avec l’ordonnance du 5 novembre 2004, il y a alignement sur le droit communautaire, 5 ans. L’ordonnance du 13 novembre 2008 a entendu pallier à la longueur des procédures. La prescription est toujours acquise si 10 ans se sont écoulés depuis la cessation de la pratique sans que l’autorité ait statué.

Paragraphe 2e La procédure d’instruction

A · Phase d’enquête préalable close par une notification

Cette enquête préalable doit permettre de réunir les preuves de la réalité et la portée de l’infraction. L’enquête peut porter sur une entreprise en particulier, un accord en particulier, ou un secteur économique particulier. Le règlement 1/2003 le prévoit.

1 · Les mesures d’enquête susceptibles d’être diligentées

Développées par le règlement 1/2003.

Ù Des renseignements

L’Art. 18 du règlement 1/2003 le caractérise, que ce soit coercitif ou non.

Ù Des déclarations

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9 1 C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

L’Art. 19 le démontre. Il pourra être demandé à toute personne, même en dehors de l’enquête, pour chopper de l’information. Mais bon, la personne n’est pas obligée de s’y soumettre.

Ù Des inspections

Deux types d’inspection. Un premier est prévu à l’Art. 20 du règlement. Il prévoit l’inspection des locaux professionnels. Les inspecteurs doivent pouvoir accéder aux locaux professionnels. Ils peuvent contrôler tout livre de l’entreprise visitée. Quel qu’en soit le support. Le but étant de pouvoir perquisitionner les ordinateurs, de farfouiller dans les disques durs, les boîtes mails et compagnie. Bon alors, évidemment, on peut copier les documents, de même qu’on peut apposer des scellées ça et là. Il est encore possible de demander à toute membre ou représentant du personnel des explications sur des faits ou des documents en rapport avec l’enquête, demande qui peut être enregistrée. Sachant qu’en parallèle, il y a une obligation de collaborer à l’enquête.

D’ailleurs, les autorités de concurrence nationale sont tenues d’apporter leur concours aux inspecteurs. Si le droit national l’exige, il peut être requis de solliciter l’autorisation du Juge judiciaire, gardien des droits fondamentaux, avant notamment une perquisition.

Vu l’Art. 21, il est possible d’inspecter d’autres locaux que les seuls locaux professionnels. La Commission peut s’inviter dans les domiciles privés de membres ou représentants de l’entreprise, genre un dirigeant. Il faudra quand même un… soupçon raisonnable que des documents utiles à l’enquête figurent dans ces locaux. Là, il faudra systématiquement l’autorisation du Juge.

L’Art. 22 prévoit lui que la Commission peut directement sous-traiter à des autorités nationales de la concurrence de faire des enquêtes en son nom et pour son compte.

En Droit français, les pouvoirs de l’autorité de la concurrence sont très proches de ceux de la Commission. La tendance reste à l’accroissement. L’ordonnance du 13 novembre 2008 l’atteste. Jusqu’ici toute la phase d’enquête était entre les mains du ministère de l'économie et de la DGCCRF. Avec l’ordonnance, l’autorité de la concurrence dispose d’un corps d’inspecteurs.

2 · La questions des droits de la défense pendant cette phase

En principe, le principe du contradictoire ne joue pas. Mais des droits ont été dégagés, genre un droit d’information sur les motifs des inspections. Les entreprises ont le devoir de collaborer à l’enquête, à défaut de quoi elles risquent des sanctions spécifiques. Toutefois, la jurisprudence communautaire a posé pour limite dans un arrêt ORKEL ou ORKEN ou ORKEM du 18 octobre 1989. En effet, « La Commission ne saurai imposer à l’entreprise l'obligation de fournir des réponses par lesquelles celles-ci seraient conduites à admettre l’existence de l’infraction et dont il appartient à la Commission d’établir l’existence ». c’est la matérialisation du droit de l’entreprise à ne pas s’autoflagéler, à ne pas s’autoincriminer. C’est à la Commission de prouver tout ça.

3 · L’issue de la procédure préalable

Deux possibilités en droit communautaire.

Une première, c’est le rejet de la plainte. La Commission rend une décision motivée, sans qu’elle soit susceptible de recours. Il y a 3 motifs de rejet de la plainte. Un

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 92

premier, c’est le fait que l’autorité nationale de la concurrence traite ou ait déjà traité l’affaire.

Deuxièmement, l’affaire peut ne pas présenter un intérêt communautaire, ce qui est l’écho d’un principe d’opportunité des poursuites. La Commission apprécie s’il est opportun ou non de poursuivre. Un arrêt connu, AUTOMEC, du TPICE du 18 septembre 1992 l’établit. La Commission entend défendre un intérêt public, à la différence du Juge civil.

Cet intérêt communautaire est défini par la communication du 27 avril 2004. La Commission peut estimer que les droits du plaignant seraient mieux préservés par les juridictions nationales. L’atteinte à la concurrence pourrait ne pas être suffisamment grave au regard des yeux de la Commission. La Commission peut mettre en balance l’intérêt qu’il y a statuer avec l’ampleur des investigations à mener. Enfin, la Commission peut décider que les entreprises mises en cause ont accepté de modifier spontanément leurs comportements.

Troisièmement, les pratiques dénoncées ne lui paraissent pas caractérisées.

Sinon, bah la procédure est ouverte.

B · Notification du grief ouvrant la phase contradictoire

Là, brrr.

Normalement, dans le cadre d’une procédure classique, ce qui ouvre la phase contradictoire est la notification de griefs. C’est le moment où les entreprises ont accès au dossier. La Commission doit indiquer les faits sur lesquelles elle s’appuie, les incriminations en cause.

Les entreprises et Commission échangent alors les pièces du dossier, aux éléments à charge, à décharge. La seule limite porte sur les secrets d’affaire. Les entreprises ont le droit d’être entendues par la Commission afin de faire des observations. Elles peuvent ainsi demander, sans que ce soit de droit, une audience. En revanche, en Droit national, celle-ci est de droit. Ces auditions ne sont pas publiques. Le plaignant n’a pas le droit à être entendu. La Commission peut décider de l’entendre.

De nouvelles procédures se sont développées. Il y a ainsi la procédure d’engagement, visée à l’Art. 9 du règlement 1/2003. Dans un tel cas, il n’y a pas de notification de grief. Tout démarre avec une évaluation préliminaire, bien moins formelle. En 2008, la procédure de transaction a également été soulevée. Elle permet aux entreprises de plaider coupable. La notification intervient tard, et sous une forme allégée. Moralité, elles plaident coupable avant qu’on lui ait tout expliqué. Les Art. L463-1 à 463-8 visent le droit national.

Section 2 Typologie des décisions

Sous-section 1 • Les décisions susceptibles d’être prises par les autorités de la concurrence Traditionnellement, l'intervention était coercitive, sanctions à la clé, amendes,

salées, ou injonctions, épicées.

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93 C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

Depuis quelques années, on a compris qu’il pouvait être aussi voire plus efficace de travailler de concert avec les entreprises poursuivies. On est un peu moins dans le rapport de force. C’est le cas avec la procédure d’engagement, qui n’aboutit pas à une sanction. Ce jeu de la négociation se retrouvera aussi dans le cadre des sanctions, avec la clémence, la non-contestation de grief… dans tous les cas, ce mouvement de négociation illustre une certaine modernisation du droit de la concurrence.

Paragraphe 1er Le rétablissement de l’ordre concurrentiel, les décisions avec engagement L’idée est ici de trouver le meilleur moyen, en commun, de faire cesser le trouble

concurrentiel. L’entreprise, plutôt que subir la décision, y participe.

A · Fondement juridique 1 · En droit européen

Les engagements existaient au départ en droit des concentrations, en dehors de toute habilitation législative. Avec le règlement 1/2003, la pratique est officialisée à l’Art. 9.

2 · En droit interne

L’ordonnance du 4 novembre 2004 complète l’Art. L464-2 CCom. L’ordonnance du 13 novembre 2008 y a mis un peu de tuyau d’arrosage. Un communiqué de procédure du 2 mars 2009 a entendu préciser tout ça.

B · Quand la procédure d’engagement est-elle appropriée ?

La procédure d’engagement est plutôt adaptée en matière d’abus de position dominante et d’entente verticale. Il faut qu’une entreprise puisse, par ses engagements, remédier au problème. Il faut que l’autorité de concurrence ne souhaite pas sanctionner.

C · La procédure d’engagement proprement dite

1 · L’autorité de concurrence envoie à l’entreprise une évaluation préliminaire

Dans ce cadre, elle exprime ses préoccupations de concurrence. Elle ne notifie pas de grief. Elle n’en formule pas. Elle ne qualifie pas expressément les faits. Il n’y a aucun acte d’accusation. Ce point a été précisé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 4 novembre 2008, GIE LES INDÉPENDANTS.

Il n’y a pas de stigmatisation, mais s’il n’y a pas accusation, et il n’y a pas lieu d’appliquer les règles du procès équitable.

2 · Les entreprises peuvent proposer des engagements

Ces engagements peuvent être structurels. On vise plus alors les entreprises en situation de position dominante.

Ces engagements peuvent être également quasi structurels, genre accorder une licence.

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 94

Ces engagements peuvent encore être strictement comportementaux, genre transmettre une information à un tiers, un concurrent ; modifier un réseau de distribution, clarifier des procédures d’appel d’offre…

Le principe est que l’engagement ne lie que l’entreprise qui le propose. Ces engagements peuvent affecter les tiers, notamment les partenaires.

3 · Négociation

En France, c’est avec le rapporteur. L’autorité de la concurrence donne ensuite son avis.

4 · Le test de marché

L’autorité publie les engagements proposés par l’entreprise. démarre alors un délai d’1 mois pour que les tiers puissent formuler des observations.

5 · Adoption de la décision rendant obligatoire les engagements

Cette décision liste et fixe les engagements. Eventuellement, pour une période déterminée. Genre 3 ans pour l’histoire de l’Ifaune. Si l’entreprise ne respecte pas ses engagements, elle s’expose aux mêmes sanctions que celles prévues dans le cas d’une pratique anticoncurrentielle.

L’autorité de la concurrence clôt la procédure avec cette décision. Il n’y a pas poursuite.

Un arrêt ALROSA rendu par le TPICE le 11 juillet 2007 a vu le tribunal préciser que, même dans un tel cadre, la Commission est assujettie au principe de proportionnalité. Cela signifie qu’elle ne peut accepter que les engagements strictement nécessaires pour mettre fin aux préoccupations de concurrence. Le communiqué de procédure de mars 2009 le confirme.

D · Effet des engagements

Les engagements lient l’entreprise. Ces engagements peuvent éventuellement être assortis d’une astreinte. La Commission peut rouvrir une procédure de sa propre initiative, ou sur plainte, dans trois hypothèses, ➀ l’un des faits sur lesquels la décision repose, suivie d’un changement important, ➁ les entreprises concernées contreviennent à leurs engagements, ➂ la décision d’acceptation d’engagement repose sur informations fournies mais incomplètes, inexactes, ou dénaturées. Le communiqué de mars 2009 reprend tout ça.

Paragraphe 2e Les injonctions susceptibles d’être adoptées par les juges Il s’agit d’un ordre qui est là pour faire cesser l’illicite.

A · Les injonctions prononcées dans un cadre conservatoire : les mesures provisoires

En Droit européen, l’Art. 8 du règlement 1/2003 s’applique. Ce règlement prive le plaignant de la possibilité de demander des mesures provisoires. C’est la Commission qui décide. Le justiciable doit quant à lui intervenir dans un cadre national.

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95 C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

Ø Il faut une infraction prima facie à la concurrence. Soit c’est une sorte d’apparence d’infraction.

Ø Il faut démontrer l’urgence, bref qu’un préjudice grave et irréparable risque d’être causé à la concurrence

Ce sont des mesures strictement limitées à ce qu’il faut. Le principe de proportionnalité s’applique d’ailleurs. En outre, les sanctions ne sont pas pécuniaires. Seule est visée l’injonction de cesser. Et elle est à durée limitée. Elle peut être assortie d’astreintes. Et si l’injonction n’est pas respectée, une amende peut être prononcée.

En droit français, l’Art. L464-1 CCom s’applique.

Ø La pratique doit être susceptible de constituer une pratique anticoncurrentielle

Ø La pratique doit porter une atteinte grave et immédiate à l'économie générale du secteur, à l’intérêt des consommateurs ou à l’entreprise plaignante.

Un marché s’ouvre à la concurrence. L’opérateur historique adopte des mesures qui freinent l’entrée de nouveaux venus, bah tu vas voir ! coup de tête – balayette et c’est réglé.

B · Les injonctions dans le cadre d’une procédure au fond

Pour le Droit européen, c’est l’Art. 7 du règlement 1/2003 qui s’applique.

Pour le Droit français, c’est l’Art. L464-2.

On ordonne aux entreprises, soit de cesser leur comportement, soit de faire quelque chose, genre modifier, supprimer, ajouter une clause, nouer des relations contractuelles…

En Droit communautaire, il existe des injonctions comportementales et structurelles, et visent la réduction de la puissance de l’entreprise. Les injonctions structurelles sont l’exception. On contrôle en tout cas leur proportionnalité.

En Droit interne, on retrouve l’injonction de publication à l’Art. L464-2 I §5, par lequel le Juge ordonne que soit publiée sa décision sur un certain support, tel un grand quotidien de la presse concernée. Ça coûte cher, plus à la réputation qu’au portefeuille.

C · Les astreintes

En Droit européen, l’Art. 24 du règlement 1/2003 les vise.

En Droit français, c’est l’Art. L464-II-2.

Pour que l’injonction soit respectée, on lui accole généralement une astreinte. 5% du chiffre d’affaire journalier moyen réalisé par l’entreprise, multiplié par le jour de retard.

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 96

Paragraphe 3e Les amendes Les amendes de procédure entendent sanctionner la révélation d’informations

incorrectes ou des obstructions à l’enquête. Pas bien. L’Art. 23 §1 du règlement 1/2003 les cible au niveau européen, quand c’est le numéro 464-2 V du Code de Commerce.

Cette amende s’élève à 1 % du chiffre d’affaire annuel.

Les amendes au fond sanctionnent elles la commission d’une pratique anticoncurrentielle et le non-respect d’un engagement, d’une mesures conservatoire, d’une injonction. elles sont versées soit au Trésor public de Lancôme soit au budget sans fond de l’Union Européenne.

A · Les amendes susceptibles d’être prononcées

L’Art. L420-1 et L420-2 s’appliquent pour les propos délibérés ou par négligence. La volonté anticoncurrentielle n’est pas requise.

1 · Montant maximum de l’amende encourue

Ce montant maximum est prévu à l’Art. 23 du règlement 1/2003. La Commission peut prononcer des amendes pouvant aller jusque 10 % du chiffre d’affaire mondial de l’entreprise, pas le bénéfice. Si l’entreprise, auteur de l’infraction, est à la tête d’un groupe, constituant une entité économique, le chiffre d’affaire que l’on prend en compte est celui de l’ensemble des sociétés du groupe. Si l’auteur est une association d’entreprises, là, l’Art. 23-2 du règlement ne vise pas les cotisations, mais les chiffres d’affaire des entreprises adhérentes. Non mais oh. Si l’association n’a pas assez, bah elle lance un appel à contribution de ses membres, sous délai. Si, après ce délai, les fonds n’ont toujours pas été payés, la Commission peut exiger le payement par toute entreprise dont les représentants étaient membres des organes décisionnels de l’association, bref les plus impliquées. Et si ça ne suffit toujours pas, on peut exiger le payement par tout membre de l’association.

En France, le plafond de l’amende est fixé à l’Art. L464-2 §4, qui fait une distinction si le contrevenant est une entreprise ou non. s’il n’est pas une entreprise, ce qui est rare, c’est maximum 3 millions. S’il est une entreprise, c’est 10 % du chiffre d’affaire annuel, on prend en compte l’un des derniers chiffres d’affaire, sachant que dans le cas de comptes consolidés, on prend en compte le chiffre d’affaire de l’entreprise consolidante. Buk. Cette assiette a été augmentée à l’occasion de la Loi NRE du 10 mai 2001. Avant, c’était 5 % seulement. il existe en outre en France une procédure simplifiée, sans passer par l’établissement d’un rapport, mais bon en passant quand même par l’énoncé des griefs, et alors l’amende est maximum 750 000 €.

Dans la pratique, c’est vraiment un plafond, qu’on crève vraiment rarement.

a · La méthode de fixation des amendes en Droit européen

Cette méthode est fixée dans des lignes directrices. Les dernières lignes directrices adoptées l’ont été en juin 2006, publiées en septembre de cette année. De nouvelles lignes directrices s’appliquent aux communications de griefs après le 1er septembre 2006. Encore aujourd'hui, des décisions sont publiées au regard d’anciennes lignes directrices.

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97 C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

Ù L’ancien système

Il s’attachait à deux critères. La gravité de l’infraction et la durée. Ces deux critères sont inscrits dans le règlement 1/2003. Pour apprécier la gravité, la Commission prenait en compte la nature de l’infraction, genre une entente de prix grave par nature… on prend en compte la part de marché des entreprises incriminées. Plus elle est importante, plus c’est grave. Les effets de l’infraction sur les consommateurs, sur les concurrents aussi. De même que les bénéfices tirés de la pratique. bon et puis quant à la durée, bah plus la pratique durait, plus elle était grave. en prime, on pouvait prendre en compte des système aggravantes ou atténuantes.

Dans cet ancien système, la Commission avait établit une sorte de hiérarchie des infractions. Il y avait des infractions non graves, genre une entente verticale sur un marché restreint dans une sphère géographique réduite. De 1000 à 1 million d’euros. Après, il y a l’infraction grave, genre une entente de prix pur. Là on voit poindre les ententes horizontales et les abus de position dominante, mais pas des plus grandes. Là, c’est entre 1 million et 20 millions d’euros. Après han tu vas avoir des problèmes toi. Ce sont les ententes de cartels, les vrais abus de position dominante. Et là l’amende, c’est au moins 20 millions, avec pour limite 10 %. La Commission s’est rendue compte que son système ne calmait pas les ardeurs.

Ù Le nouveau système

Le 1er septembre 2006, les lignes directrices dévoilent une vraie méthodologie pour déterminer la sanction, qui continue à générer beaucoup d’imprévisibilité. On a parlé d’imprévisibilité transparente. Elle dégage des règles très précises.

Actuellement, le contentieux est plus ciblé sur la sanction que sur le fond de l’infraction…

Cette méthode repose sur le calcul d’un montant de base, lui-même établit sur différents éléments. On commence par un pourcentage de la valeur des ventes effectuée grâce à l’infraction. Ce pourcentage peut aller jusque 30 %. Ensuite, on retrouve des trucs genre nature de l’infraction, part de marchés, étendue géographique, mise en œuvre ou non de l’infraction. On trouve un chiffre, multiplié par le nombre d’années d’infractions. Le simple fait de participer à l’infraction, d’autant plus si elle est grave, coûtera à l’entreprise entre et 15 et 25 % de son chiffre d’affaire dans le secteur concerné.

Une fois ce montant de bas évalué, on l’ajuste, à coup de circonstances aggravantes tout d’abord. En cas de récidive, et bah c’est 100 %. Bon, en général, c’est 50 %, mais c’est déjà monté à 80 %. Et si l’entreprise est multirécidiviste, c’est 100+100+100+n ou n est le nombre de récidives. Et là, il n’y a pas besoin que la récidive soit la même, et il n’y a pas de durée à partir de laquelle on oublie tout. On oublie rien mais on peut amoindrir si la récidive remonte à longtemps. Un refus de coopérer, un rôle de meneur, d’incitateur coûtera également cher. Et si l’entreprise s’amuse à contraindre ses partenaires, ou a leur coller aux fesses des mesures de rétorsion, c’est pareil.

Viennent ensuite les circonstances atténuantes.

Elle a mis fin à l’infraction dès les mesures d’enquête. Elle a effectué une infraction par négligence, ce qui récurent, car les voies du droit européen restent souvent impénétrables. Une participation mineure est un autre cas de circonstance atténuante. Si la coopération va au-delà de ce qui est demandé par les textes, et bah c’est bien vu. Si le comportement a été autorisé au départ par les pouvoirs publics, on en prend également compte.

Mais ce n’est pas tout. La Commission se réserve encore le droit de majorer le montant obtenu, histoire de dépasser le montant des gains illicites réalisés grâce à

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 98

l’infraction. Mais on s’arrête à 10 %. La Commission peut encore apposer un coefficient multiplicateur pour tenir compte de la puissance économique de ou des entreprises mises en cause. Ce coefficient peut aller de 1,25 à 3. La Commission s’est rendue compte qu’une amende importante, lorsqu’elle est à payer par une entreprise puissante, n’avait pas autant d’impact qu’une entreprise moins puissante. C’était contesté, mais TPIUE et CJUE ont validé. La Commission sera quand même sensible au fait que le montant ne corresponde pas aux capacités contributives. Dans des circonstances exceptionnelles, il sera tenu compte de l’incapacité contributive. Encore une fois, on parle de chiffre d’affaire, pas des bénéfices, et pour l’année précédente. L’année en cours peut voir l’entreprise montrer que ses résultats sont en berne, notamment qu’une procédure collective a été engagée, etc. Et quoi qu’il en soit, on ne dépasse pas 10 % du chiffre totale annuel mondial.

b · La méthode de fixation des amendes en Droit français

La méthodologie est moins précise, même si cela est en train de changer.

L’Art. L464-2 §3 s’applique. En Droit français, l’amende est fixée au regard de 4 paramètres. Le premier, c’est la gravité des faits reprochés. Nature de l’infraction, importance, du marché géographique sont des exemples. Autre critère, l’importance du dommage causé à l’économie. Buk. Ainsi, le dommage n’a pas besoin d’être chiffré. Il doit être démontré, mais pas besoin de la chiffrer précisément. Autre critère, la situation de l’entreprise, organisme ou groupe concerné. Dernier critère, la réitération, notion appréciée de manière aussi floue qu’en droit européen.

Le droit français est actuellement… « perturbé ». l’affaire du cartel de l’acier n’y est pas étrangère. Le ministère de l'économie avait fait une petite enquête auprès des entreprises faisant du négoce de l’acier. Il y découvre une vaste entente. Oh. Elle durait depuis belle lurette, concernait quasiment toutes les régions de France, avec des système de contrôle, de réunion, très organisés. Le Conseil, dans une décision 08-D-32, du 16 décembre 2008, avait prononcé 575 millions d’euros. Avec la téléphonie mobile c’était déjà 300 millions. La Cour d'appel de Paris, réformée en 2008, qui rend un arrêt le 19 janvier 2010. Mais elle fait sa rabat-joie, réduisant à seulement 75 millions d’euros. La Cour d'appel fait leçon au Conseil de la concurrence. Il faut que la sanction soit juste et équitable. Il faut que la sanction soit… acceptable par l’entreprise qui se la ramasse. Bon allez, c’est pas si grave que ça hein finalement. Peut-être faut-il prendre en compte le fait que le secteur soit en crise. Mais loll. Et au fait, pourquoi il est en crise ton secteur ?! L’arrêt est donc contesté car il met en compte la politique du gourdin du conseil de la concurrence. Bizarrement, il n’y a pas de pourvoi. Le MINEFI a pondu une commission pour méditer sur les sanctions, au grand dam du Conseil de la concurrence. Le 5 mai 2010, l’autorité de la concurrence a fait savoir qu’elle allait adopté sous peu des lignes directrices. Amouuuur, gloiiiire et beauté.

c · Illustration

En Droit européen, quelques affaires emblématiques. La décision de la Commission du 21 novembre 2001 sur l’affaire des vitamines avait vu 855 millions d’euros, dont 462 pour HOFFMAN LAROCHE. Le dénonciateur était Rhône-Poulenc. Ouh !

Avec Microsoft, 497 millions d’euros pour une seule entreprise, soit la plus grosse pour une entreprise. sans compter le 1,2 milliards d’astreinte.

Avec le cartel des ascenseurs, 992 millions d’euros, pondus dans une décision des 21 février 2007.

Avec le verre plat automobile, une décision de la commission du 12 novembre 2008 établit à 1,38 milliard d’euros. Seulement.

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99 C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

Avec INTEL, 1,06 milliard pour une seule entreprise. la décision remonte au 13 mai 2009.

Dans toutes ces affaires, il y a eu clémence, clémence pour les dénonciateurs. Ptdr. Lorsqu’une entreprise dénonce, toutes les autres font leurs rats et quittent le navire pour obtenir des abattements. Et dans la majorité des cas, les amendes ne visent que quelques dizaines de millions d’euros.

En 2008, 2,271 milliards d’euros ont été prononcés, pour 7 affaire étudiées en 2008.

Quelques autres chiffres. Dans les années 1990, les sanctions tournaient autour de 10 millions. Dans les années 2000, jusque 2005, 50 millions en moyenne, avec de petits pics genre 83 millions. Bon et alors après, bah on se lâche, 754 millions en 2005, et depuis en moyenne plus de 150 millions. On reste cependant toujours en deçà des profits générés par les entreprises. Alors jusqu’où aller pour être suffisamment dissuasif ? vu toutes les conséquences en matière notamment d’économie et d’emploi, on ne peut cependant pas trop taper dessus.

B · Les règles sur la clémence

Les ententes les plus graves sont celles qui sont dissimulées. Certaines sont trop cachées. On entend donc encourager les parties à ces ententes à (se) dénoncer pour les mettre à jour. La récompense, c’est la clémence, empruntée au Droit américain. Elle a été introduite en 1996 en droit communautaire. Peu à peu, on a amélioré le mécanisme, dans le but notamment de donner plus de sécurité à ceux qui dénoncent. Actuellement, la communication du 8 décembre 2006 les pose. En France, il faut attendre 2001 et la Loi NRE pour que la clémence soit introduite. L’Art. L464-2 IV l’illustre.

La clémence ne joue toutefois que pour les cartels. C’est clairement dit en Droit européen, quand, en droit français, c’est exprimé dans un communiqué de procédure du 2 mars 2009. Ce sont ces surtout ces ententes là qui sont les plus croustillantes.

Dénicher les ententes secrètes, faire des économies procédurales, probatoires, et déstabiliser les cartels sont les objectifs avérés de la clémence.

Lorsqu’une décision est adoptée, c’est à grand renfort de publicité, histoire de dissuader les autres.

On ne se préoccupe pas du motif du délateur. On reste toutefois attentif à ce que cela ne lui permette pas d’être à son tour en position dominante.

1 · Conditions pour obtenir la clémence

Ces conditions sont les mêmes en Droit européen et Droit interne. Enfin quasiment.

On distingue deux situations.

La clémence permet d’obtenir une réduction de sanction ou l’immunité totale.

a · Condition pour obtenir une immunité totale

Il faut être le premier à dénoncer. Il faut que la dénonciation permette soit d’effectuer une inspection ciblée, soit de constater l’infraction. Dans les deux cas, il faudra livrer différents éléments. Il faudra décrire l’entente, dire sur quel marché elle intervient, depuis quand, quel est l’objectif, etc. il faudra nommer tous les protagonistes, donc bonjour

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la réputation. Par ailleurs, l’autorité qui reçoit l’information ne doit pas eu en sa possession les éléments montrés pour inspecter ou constater l’infraction. En outre, l’entreprise qui dénonce doit coopérer loyalement et totalement. L’entreprise doit s’abstenir de falsifier ou détruire des preuves. Faut en prime ne pas avoir contraint les autres. jklmùàzertyuiop^qsdfghjklmwxcvbn. Il faudra aussi avoir mis fin à sa participation à l’entente dès la délation, sauf autorisation contraire. En revanche, si on ne doit pas avoir contraint les autres, on peut avoir été un meneur, un des principaux protagonistes.

b · Conditions pour obtenir une immunité partielle

Ø Tu as fait de la délation, mais tu n’es pas le premier, ou tu ne remplies pas les conditions demandées. Et bah malgré tout, on peut obtenir une ristourne.

Ø Il faut apporter des éléments qui ont une valeur ajoutée significative par rapport à ceux dont dispose déjà l’autorité.

Il est prévu que le rabais peut aller jusque 50 % de l’amende normalement encourue. Le Droit français s’arrête en tout cas là. Le Droit européen est plus précis. Le premier qui intervient à ce titre peut ramasser entre 30 et 50 %. Le deuxième, entre 20 et 30 %. Pour les autres, c’est des miettes, assez grosses quand même, ne dépassant pas 20 %.

2 · Les étapes de la procédure

Il y a prise de contact informelle.

En Droit européen, il existe une procédure ignorée du Droit français. Il est possible de formuler des demandes de clémence sous forme hypothétique. L’entreprise peut encore rester anonyme.

Si l’information est suffisamment croustillante, les éléments sont fournis. Il est possible d’obtenir ici un marqueur, pour dater la demande. L’entreprise qui n’a pas encore tous les éléments peut obtenir un autre marqueur, de droit en droit interne, discrétionnaire en droit européen, pour obtenir les éléments restants.

L’autorité de concurrence va vérifier ensuite si les conditions sont remplies. Si oui, immunité conditionnelle. Sinon, bah réduction partielle ou rien du tout. Mais il faudra attendre la fin de l’affaire au fond.

On entend protéger les déclarations du délateur. Ce qui est oral reste insaisissable par les tiers. La tentative américaine de discovery permet, elle, une partie demander à une autre de communiquer toute pièce relative au litige. Le dossier de clémence est accessible aux parties accusées lors de l’enquête, pas au plaignant.

C · Les autres procédures pouvant avoir une incidence sur le montant de l’amende : non-contestation de griefs et transaction

1 · La procédure française de non-contestation de griefs

L’idée est de faire des économies de procédure. Cette procédure de non-contestation a été introduite en Droit français par la Loi NRE du 15 mai 2001, réformée par l’ordonnance du 13 novembre 2008. L’Art. L464-2 III la cible. L’idée est de garantir à une entreprise qui accepterait de ne pas contester les griefs qu’elle aura une récompense. Ce

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n’est pas totalement du plaider-coupable. L’entreprise ne reconnaît pas les faits mais renonce à les contester. Cette procédure de non-contestation vaut pour toutes les pratiques anticoncurrentielles.

Les conditions sont premièrement qu’il ne faut pas contester les griefs, les faits et la qualification juridique des faits. En revanche, on admet en Droit français que l’entreprise conteste les éléments qui serviront de calcul à l’amende.

Deuxièmement, mais jusqu’en 2008, il fallait que les entreprises prennent des engagements. Ce pouvait être le fait de cesser et de ne plus faire. Ce pouvait encore être le fait d’informer un partenaire… Mais les engagements de conformité, les programmes de conformité, compliance engagements sont apparus. Ils entend former le personnel au droit de la concurrence. Résultat des courses, c’est lourd en temps comme en argent, car, pour être efficace, il faut le faire à tout niveau. En outre, les procédures de whistle blowing ont été mises en place. C’est une alerte mais en interne. On entend pousser les salariés à dénoncer leurs camarades de jeu, en principe de manière anonyme. Un tiers peut être celui qui reçoit ces dénonciations en interne. Avec l’affaire 07-D-26, cette méthode a été consacrée par le Conseil de la concurrence, après revirement, sous autorisation de la CNIL.

En 2008, le législateur a décidé que la seule non-contestation était requise. A titre facultatif, l’entreprise peut en prime proposer des engagements.

Dans un tel cas de non-contestation des griefs, ce qui est obtenu est une réduction, dont le plafond ne dépasse pas 50 % de l’amende, amende calculée selon une base normale, auquel un coefficient de réduction est appliqué.

Celui qui obtient une telle réduction ne peut jamais obtenir plus que ce que obtenir un candidat à la clémence.

Dans la pratique, entre 10 et 35 ou 40 %.

2 · La procédure européenne de transaction

C’est tout frais. Enfin ça date quand même du 2 juillet 2008 avec la communication relative aux procédures de transaction.

Cette procédure est limitée aux ententes, plus spécifiquement aux cartels. L’idée sera de la faire jouer en parallèle d’une procédure de clémence.

L’intérêt de la procédure est d’abréger les souffrances, enfin la procédure, les coûts d’instruction. La conséquence étant que des ressources sont dégagées pour « investir d’autres terrains ».

Pour les entreprises, l’avantage est la rapidité de la procédure. Pour une entreprise, il vaut mieux de ne pas s’engager sur la voie du contentieux. En outre, cela peut permettre d’obtenir aussi du rabais sur l’amende.

Là, l’entreprise reconnaît tout. C’est du plaider-coupable.

� Tout débute par une phase exploratoire. La Commission a l’initiative. Elle invite les parties à consulter un proctologue. Les parties ont 2 semaines pour dire si elles sont ou non intéressées.

� S’en suivent des discussions bilatérales. La Commission peut choisir de continuer ou d’arrêter. Au fur et à mesure, la Commission communique des informations en sa possession. A aucun moment il y a accès au dossier. Les parties peuvent

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 1 02

cependant demander la communication d’éléments spécifiques, histoire de savoir quelle épée de Damoclès plane au-dessus d’elles.

� Les entreprises ont alors 15 jours pour faire une proposition écrite de transaction, à partir de quoi elles sont engagées, alors qu’elles n’ont pas eu accès total au dossier ou que les griefs ne leur ont pas été fournis. Il y a là reconnaissance sans équivoque de responsabilité. Il y a indication du montant d’amende pressenti et accepté. Il y a ensuite confirmation de leurs points de vue. elles renoncent en outre à tout accès ultérieur au dossier. Enfin, elles acceptent de recevoir alors une communication de griefs allégée.

� Communication des griefs allégée. Entre temps, la Commission peut toujours arrêter.

� Décision finale, sans autre acte de procédure. Si la décision finale s’écarte de tout ce qui a été négocié, on en revient à une procédure normale. Toutes les pièces communiquées par l’entreprise sont retirées du dossier. Sinon, youhou 10 % de réduction sur l’amende.

Une décision du 19 mai 2010 sur les puces à mémoire (SAMSUNG et compagnie) a visé cette procédure de la transaction.

3 · Les décisions prises par les autorités judiciaires {non traité, non requis aux partiels}

En principe fourni sur le site de la fac.

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C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

D R O I T D E L A C O N C U R R E N C E  .......................................................................................................    Section  1  Historique  du  Droit  communautaire  de  la  concurrence  ...................................................    Section  2  Objectifs  &  fondements  du  Droit  communautaire  de  la  concurrence  .........................    

1  ∙  La  place  de  la  concurrence  dans  les  textes,    révélatrice  du  lien  entre  libre  concurrence  et  économie  de  marché  ...........................................................................................    a  ∙  Les  textes  d’origine  ..................................................................................................................    b  ∙  La  place  de  la  concurrence  dans  le  Traité  de  Lisbonne  ............................................    

2  ∙  Le  sens  des  mots  .............................................................................................................................    Section  3  Les  différents  modèles  économiques  de  concurrence  .......................................................    Section  4  Contenu  et  fondements  du  Droit  communautaire  de  la  concurrence  .........................    

A  ∙  Les  règles  qui  s’appliquent  aux  entreprises  .............................................................................    1  ∙  Les  concentrations  entre  entreprises  ....................................................................................    2  ∙  Les  pratiques  anticoncurrentielles  .........................................................................................    3  ∙  Les  pratiques  restrictives  de  concurrence  ..........................................................................    

B  ∙  Les  règles  qui  s’appliquent  aux  États  ..........................................................................................    1  ∙  Les  aides  publiques  ........................................................................................................................    2  ∙  Les  monopoles  publics  et  entreprises  auxquelles  l’État  accorde  des  droits  spéciaux  ou  exclusifs  ...........................................................................................................................    3  ∙  Les  SIEG  (Services  d’intérêt  économique  général)  ..........................................................    

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Droit de la concurrence Le Droit communautaire de la concurrence appliqué aux entreprises

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 1 04

PARTIE  I  •  Les  principes  de  base  du  Droit  communautaire  de  la  concurrence  ...........    TITRE  I  •  Les  notions  fondamentales  du  Droit  de  la  concurrence  ..................................................    

Chapitre  I  L’entreprise  ...............................................................................................................................................    Section  1  L’objet  de  l’entreprise  :  une  entité  exerçant  une  activité  économique  .......................    Paragraphe  1er  Les  définitions  jurisprudentielles  ............................................................................    A  ∙  La  définition  de  l’entreprise  ............................................................................................................    1  ∙  Les  éléments  indifférents  ............................................................................................................    a  ∙  Le  statut  juridique  de  l’entité  ...............................................................................................    b  ∙  Le  mode  de  financement  ........................................................................................................    

B  ∙  Définition  de  l'activité  économique  .............................................................................................    1  ∙  Qu’est-­‐ce  qu’une  activité  économique  ...................................................................................    2  ∙  Conséquences  :  Application  des  règles  de  concurrence  à  toutes  les  activités  économiques  ...........................................................................................................................................    

Paragraphe  2e  Des  activités  soustraites  au  Droit  de  la  concurrence  ........................................    A  ∙  L’exclusion  des  activités  étrangères  à  la  sphère  des  échanges  économiques  ...........    1  ∙  Les  activités  purement  sociales  ................................................................................................    2  ∙  Les  activités  purement  corporatives  ......................................................................................    3  ∙  Les  activités  purement  sportives  :  une  jurisprudence…  troublante  *brrr*  ..........    

B  ∙  Les  activités  d’autorité  publique  :  le  problème  d’activité  de  puissance  publique  ...    1  ∙  Hypothèse  de  l’État  et  ses  extensions              où  les  missions  ne  sont  pas  considérées  comme  des  activités  économiques  ......................................................................    a  ∙  Exclusion  des  actes  manifestant  l’exercice  du  pouvoir  législatif  et  exécutif  ...    b  ∙  Exclusion  des  actes  par  lesquels  l’État  exerce  ses  missions  essentielles  .........    c  ∙  Exclusion  des  décisions  relatives  à  l’utilisation  du  domaine  public  mettant  en  œuvre  des  PPP  ...........................................................................................................................    d  ∙  Exclusion  des  actes  par  lesquels  l’Etat  délègue  un    service  public  ou  choisit  un  prestataire  ...................................................................................................................................    

2  ∙  La  difficulté  introduite  par  le  droit  français  (problème  de  la  compétence  juridictionnelle)  .....................................................................................................................................    

Section  2  L’organisation  de  l’entreprise  :  une  entité  autonome  ........................................................    Paragraphe  1er  Une  filiale    est-­‐elle  autonome  vis-­‐à-­‐vis  de  la  société  mère    ?  .......................    A  ∙  Les  enjeux  attachés  à  la  détermination  de  l’autonomie  de  la  filiale  ...............................    B  ∙  La  preuve  de  l’autonomie  de  la  filiale  ..........................................................................................    

Paragraphe  2e  Un  représentant  de  commerce  est–il  autonome  vis-­‐à-­‐vis  de  son  commettant  ?  ......................................................................................................................................................    Paragraphe  3e  Un  salarié  est-­‐il  indépendant  vis-­‐à-­‐vis  de  son  employeur  ?  ...........................    A  ∙  Sur  un  plan  national  ............................................................................................................................    B  ∙  Sur  un  plan  communautaire  ............................................................................................................    

Chapitre  II  Le  marché  pertinent  ............................................................................................................................    Section  1  Questions  et  remarques  préalables  ...........................................................................................    Paragraphe  1er  Pourquoi  définir  un  marché  de  référence  ?  .........................................................    Paragraphe  2e  Remarques  sur  le  marché  ..............................................................................................    Paragraphe  3e  La  délimitation  du  marché,  question  de  droit  ou  de  fait  ?  ...............................    

Section  2  Comment  définir  un  marché  de  référence  ..............................................................................    Paragraphe  1er  Le  marché  économique  ................................................................................................    A  ∙  Les  méthodes  qualitatives  permettant  d’apprécier  la  substituabilité  ..........................    B  ∙  Les  méthodes  quantitatives  .............................................................................................................    

Paragraphe  2e  Le  marché  géographique  ...............................................................................................    A  ∙  Sens  de  la  délimitation  du  marché  géographique  ..................................................................    B  ∙  Critère  de  délimitation  du  marché  géographique  ..................................................................    1  ∙  Les  critères  qualitatifs  ou  objectifs  de  délimitation  du  marché  géographique  ...    2  ∙  Le  critère  de  l’élasticité  de  la  demande  et  de  l’offre  ........................................................    Conclusion  ...............................................................................................................................................    

 TITRE  II  •  Le  champ  d’application  du  Droit  communautaire  de  la  concurrence  ......................    

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C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

Chapitre  I  Le  critère  d’application  du  Droit  communautaire  :    l’affectation  du  commerce  intracommunautaire  ...................................................................................................................................................    Section  1  La  condition  d’affectation  du  commerce  entre  États  membres  .....................................    Paragraphe  1er  Sens  de  la  notion  d’affectation  du  commerce  entre  État  membre  .............    A  ∙  Sens  du  mot  affecter  ...........................................................................................................................    B  ∙  Illustration  ...............................................................................................................................................    1  ∙  Des  accords  ou  abus  qui  couvrent  plusieurs  États  membres  ......................................    2  ∙  Des  accords  ou  abus  mis  en  œuvre  sur  le  territoire  d’un  seul  État  membre  voire  d’une  partie  de  l’État  membre  .............................................................................................    3  ∙  Des  pratiques  extracommunautaires  qui  déploient  leurs  effets  sur  le  territoire  communautaire  .................................................................................................................    

C  ∙  Précision  sur  les  Art.  101  et  102  et  par  les  lignes  directrices  ...........................................    Paragraphe  2e  Le  degré  de  compatibilité  de  l’affectation  du  commerce  entre  États  membres  ..............................................................................................................................................................    A  ∙  La  possibilité  d’effet  direct  ou  indirect  sur  le  commerce  entre  États  membres  .......    1  ∙  L’effet  direct  ......................................................................................................................................    2  ∙  L’effet  indirect  ..................................................................................................................................    

B  ∙  La  possibilité  d’effet  actuel  ou  potentiel  ....................................................................................    Section  2  Les  seuils  d’affectation  du  commerce  intracommunautaire  :  L’effet  sensible  ........    

1  ∙  Les  pratiques  entre  PME  non  susceptibles  d’affecter  de  manière  sensible  le  jeu  de  la  concurrence  ..........................................................................................................................    2  ∙  Les  accords  qui  n’affectent  pas  sensiblement  le  jeu  de  la  concurrence    lorsque  deux  conditions  sont  cumulativement  remplies  .....................................................................    a  ∙  La  part  de  marché  .....................................................................................................................    b  ∙  Le  chiffre  d’affaire  annuel  opéré  dans  la  Communauté  ...........................................    c  ∙  Accords  particuliers  .................................................................................................................    

Chapitre  II  Les  relations  entre  le  Droit  communautaire  et  les  États  tiers  ...........................................    Paragraphe  1er  L’application  du  Droit  communautaire  à  des  pratiques  anticoncurrentielles    présentant  des  éléments  d’extranéité  .........................................................    Paragraphe  2e  L’application  du  Droit  communautaire  aux  opérations  de  concentration    présentant  des  éléments  d’extranéité  ......................................................................    Paragraphe  3e  Critique  de  l’application  extraterritoriale  des  règles  de  la  concurrence  ..    

Chapitre  III  Les  relations  entre  le  Droit  communautaire        avec  les  droits  nationaux  de  la  concurrence  ....................................................................................................................................................................    Section  apéricub  •  Historique  du  Droit  français  .......................................................................................    Paragraphe  1er  L’ordonnance  du  30  juin  1945  et  ses  suites  ........................................................    Paragraphe  2e  L’ordonnance  du  1er  décembre  1986  .......................................................................    Paragraphe  3e  La  LME  du  4  août  2008,  l’ordonnance  du  13  novembre  2008    &  leurs  décrets  d’application  de  février  et  mars  2009  .....................................................................................    

Section  1  Les  organismes  de  contrôle  dans  les  deux  ordres  juridiques  .........................................    Paragraphe  1er  Rappel  sommaire  du  cadre  institutionnel  communautaire  .........................    A  ∙  La  Commission  ......................................................................................................................................    B  ∙  Le  TPIUE  et  la  CJUE  .............................................................................................................................    

Paragraphe  2e  Cadre  institutionnel  français  ........................................................................................    A  ∙  L’autorité  de  la  concurrence  et  ses  organes  de  contrôle  ....................................................    1  ∙  L’autorité  de  la  concurrence  ......................................................................................................    a  ∙  Composition  ................................................................................................................................    b  ∙  Compétence  .................................................................................................................................    

2  ∙  Les  organes  de  contrôle  de  l’autorité  de  la  concurrence  ...............................................    B  ∙  Les  juridictions  ......................................................................................................................................    C  ∙  Le  Ministre  chargé  de  l'économie  ..................................................................................................    

Section  2  L’application  du  Droit  de  la  concurrence  par  les  différentes  instances  .....................    Paragraphe  1er  La  concurrence  de  compétences  pour  appliquer  le  Droit  communautaire  de  la  concurrence  ...........................................................................................................    A  ∙  Des  compétences  parallèles  :  le  conflit  d’autorité  .................................................................    B  ∙  Le  principe  de  coopération  entre  les  différentes  instances  ...............................................    

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 1 06

1  ∙  Tout  d’abord  la  coopération  entre  autorités  de  la  concurrence  ................................    2  ∙  Soutiens  réciproques  ....................................................................................................................    

C  ∙  La  coopération  de  la  Commission  européenne  avec  les  juridictions  .............................    1  ∙  Eviter  les  conflits  de  décision  ....................................................................................................    a  ∙  La  juridiction  nationale  statue  en  premier,  ou  en  même  temps  que  la  Commission  .......................................................................................................................................    b  ∙  La  Commission  statue  la  première  ....................................................................................    

2  ∙  Aides  réciproques  ...........................................................................................................................    a  ∙  La  Commission  aide  les  juridictions  nationales  ...........................................................    b  ∙  Les  juridictions  aident  la  Commission  .............................................................................    

Paragraphe  2e  L’application  parallèle  du  Droit  communautaire  et  des  droits  nationaux  :    Le  conflit  de  normes  ..............................................................................................................    

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C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

PARTIE  II  •  Le  Droit  communautaire  de  la  concurrence    appliqué  aux  entreprises  ....    TITRE  I  •  Le  contrôle  des  comportements  :    les  pratiques  anticoncurrentielles  ......................    

Chapitre  I  Les  ententes  anticoncurrentielles  ...................................................................................................    Section  1  Les  conditions  de  la  prohibition  ..................................................................................................    Paragraphe  1er  Définition  de  l’entente  ..................................................................................................    A  ∙  Un  concours  de  volonté  .....................................................................................................................    1  ∙  La  volonté  individuelle  de  chacune  des  parties  à  l’entente  ..........................................    2  ∙  La  notion  d’entente  exclue  les  manifestations  de  volonté  unilatérale  ....................    

B  ∙  La  formalisation  du  concours  de  volontés  ................................................................................    1  ∙  Distinction  entre  les  différentes  formes  d’entente  ..........................................................    a  ∙  Les  accords  ...................................................................................................................................    b  ∙  Les  associations  d’entreprise  ..............................................................................................    c  ∙  Les  pratiques  concertées  .......................................................................................................    

2  ∙  L'hypothèse  d’une  infraction  complexe  ou  unique  et  continue  .................................    Paragraphe  2e  Un  objet  ou  un  effet  anticoncurrentiel  .....................................................................    A  ∙  Définition  de  l’atteinte  à  la  concurrence  et  exemples  ..........................................................    1  ∙  Définition  de  l’atteinte  à  la  concurrence  ..............................................................................    a  ∙  L’Art.  101  vise  aussi  bien  l’objet  que  l’effet  anticoncurrentiel  ..............................    b  ∙  Autres  remarques  sur  l’atteinte  à  la  concurrence  ......................................................    

2  ∙  Exemples  d’atteinte  à  la  concurrence  ....................................................................................    a  ∙  Le  pire,  le  cocktail  super  sucré  ............................................................................................    b  ∙  Les  ententes  tendant  à  fixer  ou  à  geler  les  prix,  un  peu  moins  sucrées,  on  les  sent  plus  passer  ........................................................................................................................    c  ∙  Les  ententes  tendant  à  une  répartition  des  marchés    ou  des  sources  d’approvisionnement  ou  encore  à  cloisonner  les  marchés  ..........................................    d  ∙  Ententes  tendant  à  limiter  l’accès  au  marché  ...............................................................    e  ∙  Autres  types  d’ententes  ..........................................................................................................    

B  ∙  Les  théories  perturbatrices  .............................................................................................................    1  ∙  La  règle  de  raison  ...........................................................................................................................    a  ∙  Made  in  Normandie  USA  ........................................................................................................    b  ∙  Réception  de  la  théorie  en  Droit  communautaire  et  remise  en  cause  ...............    

2  ∙  La  théorie  du  seuil  de  sensibilité  ou  théorie  de  minimis  ................................................    a  ∙  En  Droit  communautaire  .......................................................................................................    b  ∙  En  droit  interne  .........................................................................................................................    

3  ∙  La  théorie  de  l’effet  cumulatif  ...................................................................................................    Section  2  Les  mécanismes  d’exemption  .......................................................................................................    Paragraphe  1er  Les  exemptions  individuelles  ....................................................................................    A  ∙  La  compétence  en  matière  d’exemption  ....................................................................................    1  ∙  Compétence  sur  le  fondement  du  droit  national  ..............................................................    2  ∙  Compétence  sur  le  fondement  du  droit  communautaire  ..............................................    

B  ∙  Les  conditions  d’octroi  de  l’exemption  .......................................................................................    1  ∙  Conditions  de  fond  communes  à  l’exemption  individuelle  ..........................................    a  ∙  La  contribution  de  la  pratique  aux  progrès  économiques  ......................................    b  ∙  Une  partie  équitable  du  profit  doit  être  réservée  aux  utilisateurs  .....................    c  ∙  L’entente  ne  doit  pas  contenir  de  restriction  de  concurrence  injustifiée  .........    d  ∙  L’entente  ne  doit  pas  permettre  aux  parties  d’éliminer  la  concurrence  pour  une  partie  substantielle  des  produits  ou  services  en  cause  .........................................    

2  ∙  L’abandon  des  conditions  de  forme  .......................................................................................    a  ∙  Suppression  de  la  notification  .............................................................................................    b  ∙  Csqs  de  la  suppression  de  la  notification  en  Droit  communautaire  ...................    

Paragraphe  2e  Les  exemptions  collectives  ...........................................................................................    A  ∙  Le  mécanisme  des  règlements  d’exemption  :  la  révolution  de  1999  ............................    1  ∙  Avant  1999  ........................................................................................................................................    2  ∙  Depuis  1999  ......................................................................................................................................    a  ∙  Une  nouvelle  approche  des  règlements  d’exemption  ...............................................    

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Chapitre III · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles 1 08

b  ∙  Les  réformes  récentes  .............................................................................................................    B  ∙  Portée  des  règlements  d’exemption  ............................................................................................    

Chapitre  II  Les  abus  de  position  dominante  .....................................................................................................    Section  1  La  domination  d’une  entreprise  ..................................................................................................    Paragraphe  1er  Définition  et  critère  de  la  position  dominante  ...................................................    A  ∙  Définition  .................................................................................................................................................    B  ∙  Critères  .....................................................................................................................................................    1  ∙  La  position  sur  le  marché  de  l’entreprise  dominante  et  de  ses  concurrents  ........    2  ∙  Les  facteurs  complémentaires  ..................................................................................................    a  ∙  Les  barrières  à  l’entrée  ou  à  l’expansion  du  marché  .................................................    b  ∙  La  puissance  d’achat  compensatrice  ................................................................................    

C  ∙  Position  dominante  collective  .........................................................................................................    1  ∙  Il  doit  exister  entre  les  entreprises  des  liens  ou  une  configuration  de  marché  laissant  ces  entreprises  interdépendantes  ................................................................................    2  ∙  Il  faut  une  ligne  d’action  commune  sur  le  marché  des  entreprises  en  cause  doivent  se  présenter  sur  le  marché  comme  une  entreprise  ..............................................    

Section  2  L’abus  de  position  dominante  ......................................................................................................    Paragraphe  1er  Définition  &  illustration  de  l’abus  de  position  dominante  ............................    A  ∙  Définition  .................................................................................................................................................    

1 ·  L’abus  de  structure  .........................................................................................................................    2  ∙  L’abus  de  résultat  ...........................................................................................................................    

B  ∙  Exemples  d’abus  ...................................................................................................................................    1  ∙  Abus  d’éviction  ................................................................................................................................    a  ∙  Accords  d’exclusivité  ...............................................................................................................    b  ∙  Pratiques  de  vente  liée  ...........................................................................................................    c  ∙  Quant  à  la  prédation…  .............................................................................................................    d  ∙  Le  refus  d’accès  à  une  ressource  essentielle  .................................................................    

2  ∙  La  recherche  d’abus  d’exploitation  .........................................................................................    Paragraphe  2e  La  possibilité  donnée  à  l’entreprise  de  justifier  ses  comportements  .........    A  ∙  Les  justifications  traditionnelles  (mais  rarement  reçues)  .................................................    1  ∙  Le  principe  et  les  conditions  à  une  éventuelle  justification  .........................................    2  ∙  Quelques  exemples  ........................................................................................................................    

B  ∙  La  généralisation  de  la  possibilité  de  se  justifier  :  une  nécessité  objective  et  un  gain  d’efficacité  ............................................................................................................................................    

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C h a p i t r e I I I · La mise en œuvre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles

Chapitre  III  La  mise  en  œuvre  du  contrôle  des  pratiques  anticoncurrentielles  ...............................    Section  1  L’établissement  des  infractions  ...................................................................................................    Paragraphe  1er  La  saisine  ............................................................................................................................    A  ∙  L’autosaisine  ..........................................................................................................................................    B  ∙  La  saisine  par  les  tiers  ........................................................................................................................    1  ∙  Droit  européen  .................................................................................................................................    2  ∙  Droit  national  ...................................................................................................................................    

C  ∙  Prescription  du  droit  de  saisine  .....................................................................................................    Paragraphe  2e  La  procédure  d’instruction  ...........................................................................................    A  ∙  Phase  d’enquête  préalable  close  par  une  notification  .........................................................    1  ∙  Les  mesures  d’enquête  susceptibles  d’être  diligentées  .................................................    2  ∙  La  questions  des  droits  de  la  défense  pendant  cette  phase  .........................................    3  ∙  L’issue  de  la  procédure  préalable  ............................................................................................    

B  ∙  Notification  du  grief  ouvrant  la  phase  contradictoire  ..........................................................    Section  2  Typologie  des  décisions  ..................................................................................................................    Sous-­‐section  1  •  Les  décisions  susceptibles  d’être  prises  par  les  autorités  de  la  concurrence  ..............................................................................................................................................................    Paragraphe  1er  Le  rétablissement  de  l’ordre  concurrentiel,  les  décisions  avec  engagement  .........................................................................................................................................................    A  ∙  Fondement  juridique  ..........................................................................................................................    1  ∙  En  droit  européen  ..........................................................................................................................    2  ∙  En  droit  interne  ...............................................................................................................................    

B  ∙  Quand  la  procédure  d’engagement  est-­‐elle  appropriée  ?  ...................................................    C  ∙  La  procédure  d’engagement  proprement  dite  .........................................................................    1  ∙  L’autorité  de  concurrence  envoie  à  l’entreprise  une  évaluation  préliminaire  ....    2  ∙  Les  entreprises  peuvent  proposer  des  engagements  .....................................................    3  ∙  Négociation  .......................................................................................................................................    4  ∙  Le  test  de  marché  ............................................................................................................................    5  ∙  Adoption  de  la  décision  rendant  obligatoire  les  engagements  ...................................    

D  ∙  Effet  des  engagements  .......................................................................................................................    Paragraphe  2e  Les  injonctions  susceptibles  d’être  adoptées  par  les  juges  ............................    A  ∙  Les  injonctions  prononcées  dans  un  cadre  conservatoire  :  les  mesures  provisoires  .....................................................................................................................................................    B  ∙  Les  injonctions  dans  le  cadre  d’une  procédure  au  fond  ......................................................    C  ∙  Les  astreintes  .........................................................................................................................................    

Paragraphe  3e  Les  amendes  ........................................................................................................................    A  ∙  Les  amendes  susceptibles  d’être  prononcées  ..........................................................................    1  ∙  Montant  maximum  de  l’amende  encourue  ..........................................................................    a  ∙  La  méthode  de  fixation  des  amendes  en  Droit  européen  ........................................    b  ∙  La  méthode  de  fixation  des  amendes  en  Droit  français  ...........................................    c  ∙  Illustration  ....................................................................................................................................    

B  ∙  Les  règles  sur  la  clémence  ................................................................................................................    1  ∙  Conditions  pour  obtenir  la  clémence  .....................................................................................    a  ∙  Condition  pour  obtenir  une  immunité  totale  ................................................................    b  ∙  Conditions  pour  obtenir  une  immunité  partielle  ........................................................    

2  ∙  Les  étapes  de  la  procédure  .........................................................................................................    C  ∙  Les  autres  procédures  pouvant  avoir  une  incidence  sur  le  montant  de  l’amende  :    non-­‐contestation  de  griefs  et  transaction  ........................................................................................    1  ∙  La  procédure  française  de  non-­‐contestation  de  griefs  ...................................................    2  ∙  La  procédure  européenne  de  transaction  ............................................................................    3  ∙  Les  décisions  prises  par  les  autorités  judiciaires  {non  traité,  non  requis  aux  partiels}  .....................................................................................................................................................    

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