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UNIVERSITÉ PANTHÉON-ASSAS PARIS II Année universitaire 2006-2007 Travaux Dirigés - Master I DROIT PUBLIC DE L’ÉCONOMIE II Cours de Mme Martine LOMBARD, Professeur Distribution du 19 au 24 février 2007. Séance n° 3 EXISTE-T-IL DES LIMITES AUX PRIVATISATIONS ? I. BIBLIOGRAPHIE I.1 Sur les nationalisations FRANCK Claude et NGUYEN QUOC Vinh, note sous CC, 16 janvier 1982, JCP 1982.II.19788. RIVERO Jean, « Nationalisations : ni lu, ni compris ? », AJDA, numéro spécial nationalisations 1982, n° 4, p. 209. Numéro spécial de l’AJDA, Nationalisations, avril 1982, n° 4. I.2 Sur les privatisations BAUDEU Guy, « Le retour des entreprises publiques au droit privé », Rev. Dr. Bancaire et bourse 1993, n° 40, p. 230. BAZEX Michel, « La privatisation, stade suprême de l’interventionnisme ? », RFDA 1994, p. 285. CARREAU Dominique et TREUHOLD Robert, « La nouvelle loi de privatisation ou l’annonce prématurée de la mort de Colbert », D. 1993, chron., p. 231. DELION Alain, Droit des entreprises et participations publiques, LGDJ, Systèmes, 2003, 260 p. DENIS-JUDICIS Xavier et PETIT Jean-Pierre, Les privatisations, Paris, Clefs, Montchrestien, 1998, 160 p. DRAGO Roland (sous la direction de), Quel avenir pour les entreprises publiques ?, Cahier des sciences morales et politiques, Paris, PUF, 2001, 73 pp. DURUPTY Michel, Les privatisations en France, Paris, La Documentation française (coll. « Notes et Études Documentation »), 1988, n° 4857, 144 p. DURUPTY Michel, « La privatisation banalisée », AJDA 1993, p. 712. DURUPTY Michel, « Faut-il réaménager le contrôle de l’État sur les entreprises publiques ? », AJDA 1995, n° 1, p. 3. FRISON-ROCHE Marie-Anne, « Des champions nationaux aux opérateurs cruciaux », Revue de la concurrence et de la consommation, janvier 2006, n° 144, pp. 22-24. JEANNENEY Pierre-Alain, « Privatisation des aéroports », in Actualité du droit de la concurrence et de la régulation, AJDA, 25 septembre 2006, n° 31, pp. 1699-1700.

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UNIVERSITÉ PANTHÉON-ASSAS PARIS II

Année universitaire 2006-2007 Travaux Dirigés - Master I DROIT PUBLIC DE L’ÉCONOMIE II Cours de Mme Martine LOMBARD, Professeur Distribution du 19 au 24 février 2007. Séance n° 3

EXISTE-T-IL DES LIMITES AUX PRIVATISATIONS ?

I. BIBLIOGRAPHIE I.1 Sur les nationalisations FRANCK Claude et NGUYEN QUOC Vinh, note sous CC, 16 janvier 1982, JCP 1982.II.19788. RIVERO Jean, « Nationalisations : ni lu, ni compris ? », AJDA, numéro spécial nationalisations 1982, n° 4, p. 209. Numéro spécial de l’AJDA, Nationalisations, avril 1982, n° 4. I.2 Sur les privatisations BAUDEU Guy, « Le retour des entreprises publiques au droit privé », Rev. Dr. Bancaire et bourse

1993, n° 40, p. 230. BAZEX Michel, « La privatisation, stade suprême de l’interventionnisme ? », RFDA 1994, p. 285. CARREAU Dominique et TREUHOLD Robert, « La nouvelle loi de privatisation ou l’annonce prématurée de la mort de Colbert », D. 1993, chron., p. 231. DELION Alain, Droit des entreprises et participations publiques, LGDJ, Systèmes, 2003, 260 p. DENIS-JUDICIS Xavier et PETIT Jean-Pierre, Les privatisations, Paris, Clefs, Montchrestien, 1998, 160 p. DRAGO Roland (sous la direction de), Quel avenir pour les entreprises publiques ?, Cahier des sciences morales et politiques, Paris, PUF, 2001, 73 pp. DURUPTY Michel, Les privatisations en France, Paris, La Documentation française (coll. « Notes et Études Documentation »), 1988, n° 4857, 144 p. DURUPTY Michel, « La privatisation banalisée », AJDA 1993, p. 712. DURUPTY Michel, « Faut-il réaménager le contrôle de l’État sur les entreprises publiques ? », AJDA 1995, n° 1, p. 3. FRISON-ROCHE Marie-Anne, « Des champions nationaux aux opérateurs cruciaux », Revue de la

concurrence et de la consommation, janvier 2006, n° 144, pp. 22-24. JEANNENEY Pierre-Alain, « Privatisation des aéroports », in Actualité du droit de la concurrence et de la régulation, AJDA, 25 septembre 2006, n° 31, pp. 1699-1700.

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LOMBARD Martine, « Les limites constitutionnelles à la privatisation des entreprises dont l’activité a le caractère d’un monopole », in Mouvement du droit public. Du droit administratif au droit

constitutionnel. Du droit français aux autres droits, Mélanges en l’honneur de Franck MODERNE, Paris Dalloz, 2004, p. 673. MARCOU Gérard, « Que reste-t-il de l’alinéa 9 du Préambule de la Constitution de 1946 ? », Note sous CC, 30 novembre 2006, Loi relative au secteur de l’énergie, AJDA, 29 janvier 2007, n° 4, pp.192-198. MOLINA Pierre-Antoine, « Le Conseil constitutionnel précise les conditions de privatisation des services publics », RJEP, 2007, pp. 41-52. QUIOT Gérard, « Le Conseil d’État et la constitutionnalité de la privatisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes. Observations critiques à propos d’un récent avis du Conseil », AJDA, 11 septembre 2006, n° 29, pp. 1603-1606. THIRION Nicolas, « Les privatisations d’entreprises publiques dans une économie sociale de marché : aspects juridiques », LGDJ-Bruylant, 2002, 790 p. I.3 Sur les actions spécifiques BAZEX Michel et BLAZY Sophie, « Le caractère exorbitant de l’action spécifique de l’État au regard du principe de libre circulation des capitaux », Note sous CJCE, 28 septembre 2006, Commission c/

Pays-Bas, aff. C-282 et 283/04, Droit administratif, novembre 2006, n° 11, comm. N° 177, pp. 30-32. LOMBARD Martine, « Les pouvoirs attachés aux actions spécifiques créés lors de privatisations doivent être strictement encadrés », Droit administratif, 2002, n° 7, p. 21. LOMBARD Martine, « Les garanties accompagnant la privatisation d’Air France », AJDA, 2003, n° 21, p. 1100. LUBY Monique, Note sous CJCE, 13 mai 2003, Commission contre Royaume-Uni de Grande-

Bretagne et d'Irlande du Nord, aff. C-98/01 et Commission contre Royaume d'Espagne, aff. 463/00, JDI, 2004, n° 2, p. 601. MARIATTE Flavien, Observations sous CJCE, 28 septembre 2006, Commission c/ Pays-Bas, aff. C-282 et 283/04, Europe, novembre 2006, n° 11, pp. 14-15. MENJUCQ Michel, « Action spécifique (ou golden share): maintien du cap établi en 2002 », Bulletin

Joly Bourse et produits financiers, 2003, n° 6, p. 769. PARLEANI Gilbert, Note sous CJCE, 4 juin 2002, Commission contre République française, aff. C-483/99, Revue des sociétés, 2002, n° 3, p. 519. PIETRANCOSTA Alain, Note sous CJCE, 4 juin 2002, aff. C-367/98 (c. République portugaise) ; aff. C-503/99 (c. Royaume de Belgique) et aff. C-483/99 (c. République française), Revue de droit

bancaire et financier, 2002, n° 4, p. 208. RONTCHEVSKY Nicolas, « L'action spécifique (golden share) à l'épreuve des principes fondamentaux du droit communautaire », Bulletin Joly Bourse et produits financiers, 2002, n° 5, p. 411.

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II. DOCUMENTS Document n° 1 : CC, 16 janvier 1982, déc. n° 81-132 DC, Loi de nationalisation, Rec., p. 18 ; GDCC, 2003, 12ème édition, n° 31. Document n° 2 : Loi n° 86-912 du 6 août 1986, consolidée au 31 décembre 2006, relative aux modalités des privatisations. Document n° 3 : CC, 25 et 26 juin 1986, déc. n° 86-207 DC, Loi autorisant le Gouvernement à

prendre diverses mesures d’ordre économique et social, Rec., p. 61 ; GDCC, 2003, 12ème édition, n° 39. Document n° 4 : CJCE, 4 juin 2002, Commission des Communautés européennes contre République française, aff. C-483/99, Rec., I, p. 4781 ; Europe, octobre 2002, n° 10, pp.19-20, comm. L. Idot ; RDUE, 2003, nº 1, pp.39-86, comm. E. Gippini-Fournier et J.-A. Rodríguez Míguez ; JDI, 2003, pp.619-622, chron. M. Luby. Document n° 5 : CC, 5 août 2004, déc. n° 2004-501 DC, Service public de l'électricité et du gaz et entreprises électriques et gazières, Rec., p. 134 ; LPA, 13 décembre 2005, n° 247, pp. 4-6, chron. L. Janicot ; RFDC, 2005, n° 63, pp. 562-577, chron. V. Natale ; RDP, 2004, n° 6, pp. 1739-1760, note D. Chamussy. Document n° 6 : CC, 30 novembre 2006, déc. n° 2006-543 DC, Loi relative au secteur de l'énergie ; RFDA, 2006, n° 6, pp. 1163-1174, note R. de Bellescize ; AJDA, 2006, n° 44, pp. 2438-2440, note N. Charbit ; LPA, 4 janvier 2007, n° 4, pp. 3-8, note C. Clarenc. Document n° 7 : Loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie, JORF n° 284 du 8 décembre 2006, p. 18531 ; LPA, 7 décembre 2006, n° 244, pp. 3-23 et 8 décembre 2006, n° 245, pp. 16-21, comm. J.-E. Schoettl.

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Document n° 1 : CC, 16 janvier 1982, déc. n° 81-132 DC, Loi de nationalisation, Rec., p. 18 ; GDCC, 2003, 12ème édition, n° 31.

Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment les articles figurant au chapitre II du titre II de ladite ordonnance ; Ouï le rapporteur en son rapport ; I - Sur la procédure législative : En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance de

l'article 40 de la Constitution :

[…] 12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la loi de nationalisation a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution ; II – AU FOND :

Sur le principe des nationalisations :

13. Considérant que l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 proclame : Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression ; que l'article 17 de la même Déclaration proclame également : La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ; 14. Considérant que le peuple français, par le référendum du 5 mai 1946, a rejeté un projet de Constitution qui faisait précéder les dispositions relatives aux institutions de la République d'une nouvelle Déclaration des droits de l'homme comportant notamment l'énoncé de principes différant de ceux proclamés en 1789 par les articles 2 et 17 précités. […] 16. Considérant que, si postérieurement à 1789 et jusqu'à nos jours, les finalités et les conditions d'exercice du droit de propriété ont subi une évolution caractérisée à la fois par une notable extension de son champ d'application à des domaines individuels nouveaux et par des limitations exigées par l'intérêt général, les principes mêmes énoncés par la Déclaration des droits de l'homme ont pleine valeur constitutionnelle tant en ce qui concerne le caractère fondamental du droit de propriété dont la conservation constitue l'un des buts de la société politique et qui est mis au même rang que la liberté, la sûreté et la résistance à l'oppression, qu'en ce qui concerne les garanties données aux titulaires de ce droit et les prérogatives de la puissance publique ; que la liberté qui, aux termes de l'article 4 de la Déclaration, consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, ne saurait elle-même être préservée si des restrictions arbitraires ou abusives étaient apportées à la liberté d'entreprendre ; 17. Considérant que l'alinéa 9 du préambule de la Constitution de 1946 dispose : Tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public

national ou d'un monopole de fait doit devenir la propriété de la collectivité ; que cette disposition n'a ni pour objet ni pour effet de rendre inapplicables aux opérations de nationalisation les principes susrappelés de la Déclaration de 1789 ; 18. Considérant que, si l'article 34 de la Constitution place dans le domaine de la loi les nationalisations d'entreprises et les transferts d'entreprises du secteur public au secteur privé , cette disposition, tout comme celle qui confie à la loi la détermination des principes fondamentaux du régime de la propriété, ne saurait dispenser le législateur, dans l'exercice de sa compétence, du respect des principes et des règles de valeur constitutionnelle qui s'imposent à tous les organes de l'Etat. 19. Considérant qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel que le législateur a entendu fonder les nationalisations opérées par ladite loi sur le fait que ces nationalisations seraient nécessaires pour donner aux pouvoirs publics les moyens de faire face à la crise économique, de promouvoir la croissance et de combattre le chômage et procéderaient donc de la nécessité publique au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789 ; 20. Considérant que l'appréciation portée par le législateur sur la nécessité des nationalisations décidées par la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel ne saurait, en l'absence d'erreur manifeste, être récusée par celui-ci dès lors qu'il n'est pas établi que les transferts de biens et d'entreprises présentement opérés restreindraient le champ de la propriété privée et de la liberté d'entreprendre au point de méconnaître les dispositions précitées de la Déclaration de 1789 ;

Sur la désignation des sociétés faisant l'objet des

nationalisations et sur le respect du principe d'égalité :

21. Considérant que les dispositions des articles 1er et 27 de la loi qui désignent respectivement les cinq sociétés industrielles et les deux compagnies financières faisant l'objet de mesures de nationalisation ont été prises sur le fondement et dans la limite des pouvoirs qui, comme il vient d'être dit, appartiennent au législateur ; que les caractères spécifiques attachés à chacune de ces sociétés font obstacle à ce que le principe d'égalité puisse être utilement invoqué par comparaison avec la situation d'autres sociétés non visées par la loi de nationalisation ; qu'ainsi les articles 1er et 27 de la loi ne sont pas contraires à la Constitution ; 22. Considérant que, s'agissant de la nationalisation de banques, l'article 13 de la loi énonce en premier lieu dans son paragraphe I la règle générale selon laquelle sont désignées les sociétés tombant sous le coup de la nationalisation ainsi que les dérogations apportées à cette règle générale, puis, dans son paragraphe II, établit la liste des sociétés nationalisées. 23. Considérant qu'il est fait tout d'abord grief au législateur d'avoir, dans le paragraphe I de l'article 13, retenu comme critère général des nationalisations de

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banques la détention à la date du 2 janvier 1981 par les banques inscrites sur la liste du Conseil national du crédit d'un milliard de francs ou plus sous forme de dépôts à vue ou de placements liquides ou à court terme en francs ou devises au nom de résidents selon les définitions adoptées par le Conseil national du crédit ; qu'il est reproché à cette disposition de recourir à un critère non significatif et arbitraire ; 24. Considérant qu'il appartenait au législateur, en fonction de la nécessité publique constatée par lui, d'exclure de la nationalisation les banques les moins importantes ; que le critère retenu pour déterminer le seuil au-dessous duquel les banques échappent à la nationalisation n'est pas sans rapport avec son objet ; 25. Considérant que, d'autre part, l'article 13-I de la loi exclut de la nationalisation les banques ayant le statut de sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie fixé par l'ordonnance n° 67-837 du 28 septembre 1967 ou le statut de maison de réescompte fixé par le décret n° 60-439 du 12 février 1960 ; les banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des sociétés de caractère mutualiste ou coopératif ; les banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des personnes physiques ne résidant pas en France ou à des personnes morales n'ayant pas leur siège social en France ; 26. Considérant que, sur le principe même des dérogations ainsi apportées au critère général de la détermination des banques nationalisables, il est allégué que de telles dérogations, qui laissent hors du champ d'application de la loi des sociétés de banque non moins importantes que celles qu'il inclut, seraient la preuve que les nationalisations de banques n'étaient pas nécessaires à la réalisation des buts que le législateur a entendu poursuivre ; 27. Considérant que cette allégation ne saurait être retenue ; qu'en effet, le législateur avait le pouvoir d'apprécier quelle devait être l'étendue des nationalisations de banques pour la réalisation des objectifs qu'il assignait à ces nationalisations; 28. Considérant qu'il est, également, fait grief aux dérogations faisant l'objet des dispositions précitées de méconnaître le principe d'égalité ; 29. Considérant que le principe d'égalité n'est pas moins applicable entre les personnes morales qu'entre les personnes physiques, car, les personnes morales étant des groupements de personnes physiques, la méconnaissance du principe d'égalité entre celles-là équivaudrait nécessairement à une méconnaissance de l'égalité entre celles-ci ; 30. Considérant que le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce qu'une loi établisse des règles non identiques à l'égard de catégories de personnes se trouvant dans des situations différentes, mais qu'il ne peut en être ainsi que lorsque cette non-identité est justifiée par la différence de situation et n'est pas incompatible avec la finalité de la loi ; 31. Considérant que la dérogation visant les banques ayant le statut de sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie ou le statut de maison de réescompte n'est pas contraire au principe d'égalité, certains des éléments des statuts de ces établissements leur étant spécifiques. 32. Considérant que, si les banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des personnes physiques ne résidant pas en France ou à des personnes

morales n'ayant pas leur siège social en France ont le même statut juridique que les autres banques, le législateur a pu, sans méconnaître le principe d'égalité, les exclure de la nationalisation en prenant motif des risques de difficultés que la nationalisation de ces banques aurait pu entraîner sur le plan international et dont la réalisation aurait, à ses yeux, compromis l'intérêt général qui s'attache aux objectifs poursuivis par la loi de nationalisation ; 33. Considérant au contraire que la dérogation portée au profit des banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des sociétés de caractère mutualiste ou coopératif méconnaît le principe d'égalité ; qu'en effet, elle ne se justifie ni par des caractères spécifiques de leur statut ni par la nature de leur activité ni par des difficultés éventuelles dans l'application de la loi propres à contrarier les buts d'intérêt général que le législateur a entendu poursuivre ; 34. Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de déclarer non conformes à la Constitution les dispositions de l'article 13-1 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel ainsi conçues : Les banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des sociétés de caractère mutualiste ou coopératif.

[…] En ce qui concerne les règles relatives à la cession

éventuelle d'éléments d'actif des entreprises nationalisées

au secteur privé :

42. Considérant qu'il est fait grief à la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel de ne pas comporter de disposition réglant les conditions de la cession au secteur privé de certains éléments d'actif, notamment de filiales, qui, ne correspondant pas aux objectifs des nationalisations, devraient être rendus par les sociétés nationalisées au secteur privé ; 43. Considérant que, s'il résulte des travaux préparatoires que le législateur a envisagé que les sociétés nationalisées puissent ne pas conserver certains actifs, notamment dans des filiales, ne correspondant pas aux objectifs des nationalisations et puissent les céder au secteur privé, ces aliénations, à l'inverse de celles mentionnées aux articles 4, 16 et 30, ne sont pas prévues par la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel ; que, dès lors, le législateur a pu, sans méconnaître l'article 34 de la Constitution, ne pas édicter dans la présente loi les règles applicables à ces éventuelles cessions et qui pourront faire l'objet, en tant que de besoin, de dispositions législatives ultérieures ; qu'ainsi le grief susénoncé n'est pas fondé ;

Sur l'indemnisation :

44. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la privation du droit de propriété pour cause de nécessité publique requiert une juste et préalable indemnité ; 45. Considérant que, par l'effet des articles 2, 14 et 28 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel, la nationalisation des diverses sociétés visées par ladite loi s'opère par le transfert à l'Etat en toute propriété des actions représentant leur capital à la date de jouissance des

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obligations remises en échange ; que les articles 5, 17 et 31 de la loi déterminent la nature et le régime des obligations qui doivent être remises aux anciens actionnaires en vue d'assurer leur indemnisation ; que les articles 6, 18 et 32 de la loi fixent les règles selon lesquelles est déterminée la valeur d'échange des actions des diverses sociétés ; 46. Considérant qu'il convient d'examiner si ces dispositions répondent à la double exigence du caractère juste et du caractère préalable de l'indemnisation ;

En ce qui concerne le caractère juste de l'indemnisation :

47. Considérant que les actionnaires des sociétés visées par la loi de nationalisation ont droit à la compensation du préjudice subi par eux, évalué au jour du transfert de propriété, abstraction faite de l'influence que la perspective de la nationalisation a pu exercer sur la valeur de leurs titres ; 48. Considérant que les dispositions relatives à la valeur d'échange des actions inscrites à la cote officielle des agents de change, telles qu'elles résultent des article 6, 18-1 et 32 de la loi sont différentes de celles relatives à la valeur d'échange des actions des sociétés de banque non inscrites à la même cote à la date du 1er janvier 1978, qui résultent de l'article 18-2 de la loi ; qu'il convient donc d'examiner distinctement chacune de ces deux séries de dispositions ;

Quant à la valeur d'échange des actions inscrites à la cote

officielle des agents de change ;

49. Considérant que la détermination de la valeur des actions inscrites à la cote officielle des agents de change au jour de la dépossession ne pouvait se faire de façon directe, notamment du fait que leur cotation en bourse avait été nécessairement affectée et ceci depuis un temps assez long par la perspective même des nationalisations ; qu'il appartenait donc au législateur de déterminer des règles de calcul de la valeur d'échange propres à conduire, avec une approximation inévitable mais limitée, à des résultats comparables ; qu'il pouvait légitimement tenir compte des nécessités de simplicité et de rapidité du jeu des règles d'indemnisation, notamment en ce qui regarde le caractère préalable de l'indemnisation qui aurait été compromis si, pour l'essentiel de la valeur d'échange, la remise des obligations n'avait pu s'opérer au jour envisagé pour le transfert de propriété. 50. Considérant cependant que, quelle que fût leur force, ces nécessités pratiques ne pouvaient prévaloir sur l'exigence de la juste indemnité due à chacun des anciens propriétaires d'actions ; 51. Considérant que, sans doute, il était loisible au législateur de se référer, pour l'évaluation des actions, à une moyenne des cours de bourse pendant une certaine période, mais en assortissant cette méthode forfaitaire des aménagements propres à redresser les inégalités et les insuffisances substantielles qui pouvaient en découler ; 52. Considérant que la moyenne des cours de bourse entre le 1er janvier 1978 et le 31 décembre 1980 est composée de cotations exprimées en francs courants ; que si la dépréciation monétaire est vraisemblablement entrée en compte à la date où a eu lieu chaque cotation, il n'eût pas moins été nécessaire pour une application correcte de ce système que l'utilisation de cotations remontant loin dans le passé en vue d'exprimer la valeur des actions au 1er janvier 1982 fût affectée d'une

correction adéquate, qui n'est pas prévue par la loi dans les dispositions présentement examinées ; 53. Considérant, d'autre part, que l'utilisation uniforme d'une moyenne des cours de bourse sur une période aussi longue sans tenir compte de ce que le sens de l'évolution des cours a été différent et, en certains cas, opposé pour les diverses sociétés nationalisées, aboutit à des distorsions considérables en ce qui regarde ce qu'aurait pu être la valeur réelle des actions au moment de la dépossession ; 54. Considérant, il est vrai, que, selon les dispositions susvisées, la référence à la moyenne des cours de bourse des années 1978, 1979 et 1980 n'entre que pour 50 p. 100 dans le calcul de la valeur d'échange des actions et se trouve complétée pour 25 p. 100 par la référence à la situation comptable nette et pour 25 p. 100 par la référence au produit par 10 du bénéfice net moyen. 55. Considérant que l'appel à d'autres critères que celui de la moyenne des cours de bourse aurait dû précisément, selon l'intention du législateur, corriger les imperfections de la référence à la moyenne des cours de bourse, affectée des modalités ci-dessus relevées qui en altéraient la pertinence ; 56. Mais considérant que cette fin est inégalement atteinte par les dispositions présentement examinées ; qu'en particulier, la référence à la situation nette comptable sans prise en compte des actifs des filiales ainsi que la référence au bénéfice net moyen sans prise en compte des bénéfices des filiales conduisent pour les sociétés en cause à des résultats très différents déterminés non par la différence de données économiques et financières objectives mais par la diversité des techniques de gestion et des méthodes de présentation comptable suivies par les sociétés qui, en elle-même, ne devrait pas avoir d'influence sur l'évaluation des indemnités ; 57. Considérant, en outre, que les dispositions des articles présentement examinés ont pour effet nécessaire de priver les anciens actionnaires des dividendes qu'ils auraient perçus au titre de l'exercice 1981 et avec lesquels les intérêts que les obligations remises en échange produiront en 1982 ne font nullement double emploi ; 58. Considérant au total qu'en ce qui concerne les actions des sociétés cotées en bourse, la méthode de calcul de leur valeur d'échange conduit à des inégalités de traitement dont l'ampleur ne saurait être justifiée par les seules considérations pratiques de rapidité et de simplicité ; que ces inégalités de traitement se doublent, dans nombre de cas, d'une sous-estimation substantielle de ladite valeur d'échange ; qu'enfin, le refus de reconnaître aux anciens actionnaires le bénéfice des dividendes attachés à l'exercice 1981 ou de leur accorder, sous une forme appropriée, un avantage équivalent, ampute sans justification les indemnités auxquelles ont droit les anciens actionnaires ;

Quant à la valeur d'échange des actions des sociétés de

banque non cotées en bourse :

59. Considérant que l'article 18-2 de la loi détermine la valeur d'échange des actions des sociétés de banque autres que celles dont les actions étaient inscrites le 1er janvier 1978 à la cote officielle des agents de change ; que cette valeur d'échange est déterminée par référence, pour parts

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égales, à la situation nette comptable au 31 décembre 1980 et au produit par 10 du bénéfice net moyen des exercices 1978, 1979, 1980, définis l'une et l'autre dans des termes identiques à ceux retenus par l'article 18-1 pour la détermination de la valeur d'échange des actions cotées en bourse ; 60. Considérant que ces dispositions appellent une appréciation analogue à celle formulée plus haut concernant le recours, pour apprécier la valeur d'échange des actions cotées en bourse, à la situation nette comptable et au produit par 10 du bénéfice net moyen ; que cette appréciation est aggravée par le fait que le cours en bourse ne pouvant être pris en compte, les inégalités de traitement et les insuffisances d'évaluation pouvant résulter de ce mode de calcul produisent un plein effet ; qu'en outre, les observations relatives aux dividendes attachés à l'exercice 1981 s'appliquent également au cas présentement examiné ; Quant à l'ensemble des dispositions relatives à la valeur

d'échange des actions :

61. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les articles 6, 18 et 32 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel ne sont pas, en ce qui concerne le caractère juste de l'indemnité, conformes aux exigences de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; En ce qui concerne le caractère préalable de l'indemnisation :

62. Considérant au contraire que, sous réserve de ce qui vient d'être dit concernant l'exigence, à laquelle il n'est pas satisfait, du caractère juste de l'indemnisation, les modalités de règlement prévues pour celle-ci doivent être regardées comme en assurant suffisamment le caractère préalable ; 63. Considérant, en effet, que, si le règlement de l'indemnisation ne s'opère pas par la remise de numéraire, les actionnaires dépossédés doivent, selon les dispositions des articles 5, 17 et 31 de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel, recevoir, à la date de dépossession, en échange de leurs actions, des obligations portant jouissance à cette date et produisant un intérêt semestriel payable à terme échu ; que ces obligations sont inscrites à la cote officielle et donc immédiatement négociables. 64. Considérant que l'intérêt attaché à ces obligations est égal au taux de rendement des emprunts d'Etat dont le capital ou les intérêts ne sont pas indexés, émis à taux fixe et d'échéance finale supérieure à sept ans, constaté sur le marché secondaire de Paris par la caisse des dépôts et consignations durant les vingt-cinq premières semaines du semestre précédant sa fixation ; que ces dispositions tendent, d'une part, à permettre une négociation normale de ces titres sur le marché des obligations, d'autre part, à pallier les risques de dépréciation monétaire ; 65. Considérant, enfin, que le remboursement de ces obligations au pair se fera par voie de tirage au sort en quinze tranches annuelles sensiblement égales, ce qui fait apparaître une échéance moyenne de remboursement à sept ans et demi, durée qui n'est ni anormale ni excessive ; 66. Considérant ainsi qu'en eux-mêmes, les articles 5, 17 et 31 de la loi qui prévoient un mode d'indemnisation suffisamment équivalent à un paiement en numéraire, ne sont pas contraires à la Constitution ;

[…] En ce qui concerne la situation des actionnaires

minoritaires des filiales des sociétés nationalisées :

71. Considérant que, par l'effet de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel, certaines sociétés non directement visées par cette loi, dans lesquelles l'une des sociétés nationalisées était majoritaire, passent sous le contrôle majoritaire de l'Etat qui devient seul actionnaire de la société mère ; qu'il est allégué par les sénateurs auteurs de la saisine que, de ce fait, les actionnaires minoritaires au sein des filiales considérées subiront un important préjudice en raison de la baisse de valeur de leurs actions et de la probabilité d'une restriction ou d'une suppression dans l'avenir de la distribution de dividendes ; qu'ainsi l'absence de dispositions prévoyant l'indemnisation de ces actionnaires minoritaires serait contraire au principe d'égalité ; 72. Considérant que, dans le cas visé par les auteurs de la saisine, la situation juridique des actionnaires ne se trouverait pas modifiée en ce qui concerne leurs droits au regard du ou des actionnaires majoritaires ; que, d'ailleurs, le préjudice allégué est purement éventuel ; qu'ainsi le fait que la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel ne prévoit aucune indemnisation au profit desdits actionnaires n'est en rien contraire au principe d'égalité ; Sur l'ensemble de la loi soumise à l'examen du Conseil

constitutionnel :

73. Considérant que, pour les motifs ci-dessus énoncés, ne sont pas conformes à la Constitution : - Les articles 4, 16 et 30 relatifs à certains pouvoirs des administrateurs généraux et des conseils d'administration ; - Le membre de phrase de l'article 13-I ainsi conçu : Les banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des sociétés de caractère mutualiste ou coopératif ; - Les articles 6, 18 et 32 relatifs à la détermination de la valeur d'échange des actions ; Considérant que les autres articles de la loi ne sont pas contraires à la Constitution ; Considérant, toutefois, que les dispositions des articles 6, 18 et 32 sont inséparables de l'ensemble de la loi, Décide :

Art. 1er - Sont déclarées non conformes à la Constitution les dispositions des articles 4, 6, 16, 18, 30 et 32 de la loi de nationalisation, ainsi que celles énoncées, à l'article 13-I, par les mots : Les banques dont la majorité du capital social appartient directement ou indirectement à des sociétés de caractère mutualiste ou coopératif. Art. 2 - Les dispositions des articles 6, 18 et 32 de la loi de nationalisation ne sont pas séparables de l'ensemble de cette loi. Art. 3 - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

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Document n° 2 : Loi n° 86-912 du 6 août 1986, consolidée au 31 décembre 2006, relative aux modalités des privatisations.

Titre Ier : Dispositions communes.

Article 1

Modifié par Loi n°96-314 du 12 avril 1996 art. 50 I (JORF 13 avril 1996).

Les opérations mentionnées à l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993 et au II de l'article 7 de la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 autorisant le Gouvernement à prendre diverses mesures d'ordre économique et social, s'effectuent par cession de titres, cession ou émission de titres assortis d'options d'acquisition ou de souscription de titres, sous réserve que le transfert au secteur privé de la majorité du capital de l'entreprise ne puisse résulter de l'exercice de ces options d'acquisition ou de souscription, échange contre des actions de titres participatifs, certificats d'investissement ou certificats pétroliers, renonciation au droit préférentiel de souscription à une augmentation de capital ou vente d'un tel droit, augmentation de capital contre apport de titres ou d'actifs, fusion ou scission, émission de tous titres ou valeurs mobilières assortis ou non d'éléments donnant un droit sur le capital, dissolution ou liquidation d'entreprise ou par transferts de portefeuille tels que prévus aux articles L. 324-1 et suivants du code des assurances.

Article 1-1 Créé par Ordonnance n°2002-389 du 20 mars 2002 art. 1 (JORF 23 mars

2002).

Les dispositions de la présente loi, à l'exception des articles 14 à 17-1, sont applicables à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna, à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte pour les opérations mentionnées aux articles 2 et 20 de ladite loi.

Titre II : Des opérations mentionnées au 1° de l'article 5 de la loi n° 86- 793 du 2 juillet 1986 précitée et à l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993.

Article 2

Modifié par Loi n°2001-152 du 19 février 2001 art. 31 (JORF 20 février 2001).

Les dispositions du présent titre sont applicables aux opérations mentionnées au 1° de l'article 5 de la loi n° 86-793 du 2 jui llet 1986 précitée et à l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993. Toutefois : 1° Les prises de participation au capital d'une entreprise dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé et dont l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social peuvent être réalisées en application de l'article L. 443-5 du code du travail ou des articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce lorsqu'elles n'ont pas pour effet de transférer au secteur privé la majorité du capital de l'entreprise ; 2° Les opérations mentionnées au troisième alinéa du I de l'article 2 de la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 précitée peuvent également être réalisées en application des dispositions du code du travail ou du code de commerce mentionnées au 1°. Dans les cas prévus aux 1° et 2°, le ministre chargé de l'économie informe la commission des participations et des transferts de l'opération envisagée. La commission ne procède pas à l'évaluation de l'entreprise mais dispose d'un délai de dix jours pour s'opposer à l'opération si les conditions de celles-ci ne sont pas conformes aux intérêts patrimoniaux des personnes publiques. L'opposition de la commission est rendue publique.

Article 3 Modifié par Décret n°98-315 du 27 avril 1998 art. 1 (JORF 22 avril 1998). Il est créé une Commission des participations et des transferts chargée : 1° De déterminer la valeur des entreprises faisant l'objet des opérations mentionnées à l'article 2 et au dernier alinéa de l'article 20 ;

2° De se prononcer, pour les opérations hors marché, sur le choix de l'acquéreur dans les conditions prévues à l'article 4 ci-après. La Commission des participations et des transferts est composée de sept membres, dont un président, nommés par décret pour cinq ans et choisis en fonction de leur compétence et de leur expérience en matière économique, financière ou juridique. En cas de vacance pour quelque cause que ce soit, un remplaçant est nommé pour la durée restant à courir du mandat de son prédécesseur. Ses membres sont astreints au secret professionnel. Les fonctions de membre de la Commission des participations et des transferts sont incompatibles avec tout mandat de membre du conseil d'administration, du directoire ou du conseil de surveillance d'une société commerciale par actions ou toute activité rétribuée au service d'une telle société, de nature à les rendre dépendants des acquéreurs éventuels. Dès leur nomination et pendant la durée de leur mandat, les membres de la commission informent le président des activités professionnelles qu'ils exercent, des mandats sociaux qu'ils détiennent ou des intérêts qu'i ls représentent. Le membre de la commission qui a manqué aux obligations définies aux quatrième et cinquième alinéas du présent article est déclaré démissionnaire d'office par la commission statuant à la majorité de ses membres. En cas de partage égal des suffrages, la voix du président est prépondérante. Les membres de la Commission des participations et des transferts ne peuvent, sous peine de l'application des sanctions prévues par l'article 432-13 du code pénal, pendant un délai de cinq ans à compter de la cessation de leurs fonctions, devenir membres d'un conseil d'administration, d'un directoire ou d'un conseil de surveillance d'une entreprise qui s'est portée acquéreur de participations antérieurement détenues par l'Etat, ou d'une de ses fi liales, ou exercer une activité rétribuée par de telles entreprises. La Commission des participations et des transferts est saisie par le ministre chargé de l'économie à l'occasion de chacune des opérations mentionnées à l'article 2 et au dernier alinéa de l'article 20. Elle fixe la valeur de l'entreprise ou, s'il y a lieu, des éléments faisant l'objet de la cession. Toutefois, en cas de remise d'actifs en paiement des titres cédés ou d'augmentation de capital contre apport en nature, l'évaluation porte sur la parité ou le rapport d'échange. Ces évaluations sont rendues publiques. Ces évaluations sont conduites selon les méthodes objectives couramment pratiquées en matière de cession totale ou partielle d'actifs de sociétés en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur boursière des titres, le cas échéant, des éléments optionnels qui y sont attachés, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l'existence des filiales et des perspectives d'avenir. Les prix d'offre, les prix de cession ainsi que les parités d'échange sont arrêtés par le ministre chargé de l'économie sur avis de la Commission des participations et des transferts. L'acte fixant les conditions de l'opération ne peut dater de plus de trente jours après l'avis de la commission. Ces prix et parités, avant déduction de la valeur estimée des avantages consentis par l'Etat en vertu des articles 11 à 13 de la présente loi, ne peuvent être inférieurs à l'évaluation faite par la Commission des participations et des transferts. La Commission des participations et des transferts donne son avis sur les procédures de mise sur le marché. La Commission des participations et des transferts peut être consultée par le ministre chargé de l'économie sur toute opération visée aux articles 20 et 21 de la présente loi.

Article 3-1 Créé par Loi n°94-679 du 8 août 1994 art. 19 (JORF 10 août

1994).

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La commission de la privatisation peut demander aux commissaires aux comptes des entreprises faisant l'objet des opérations pour lesquelles elle est saisie tout renseignement sur l'activité et la situation financière desdites entreprises. Les commissaires aux comptes sont alors déliés à son égard du secret professionnel.

Article 4 Modifié par Loi n°93-923 du 19 juillet 1993 art. 1, art. 3 II, art. 5 (JORF 21

juillet 1993). Les cessions ou échanges de titres, les ventes de droits préférentiels ou les renonciations à de tels droits sont réalisés suivant les procédures du marché financier. Toutefois, le ministre chargé de l'économie peut décider de faire appel à des acquéreurs hors marché. Le choix du ou des acquéreurs et les conditions de cession sont arrêtés par le ministre chargé de l'économie, sur avis conforme de la commission de la privatisation. Un décret en Conseil d'Etat fixe notamment les règles de publicité auxquelles sont subordonnées ces décisions et les cas dans lesquels il est recouru à un appel d'offres.

Article 4-1 Créé par Loi n°93-923 du 19 juillet 1993 art. 1, art. 3 II, art. 6 (JORF 21

juillet 1993). I. - Les cessions mentionnées à l'article 4 peuvent faire l'objet d'un paiement échelonné dont les conditions sont fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie. II. - Pour les opérations réalisées selon les procédures du marché financier, les délais de paiement ne peuvent excéder trois ans. Lorsqu'un délai est accordé au porteur et à défaut de paiement d'une partie du prix à l'une des échéances fixées pour le paiement, l'Etat retrouve de plein droit la propriété des actions non intégralement payées. Il fait procéder à leur cession sur le marché financier. Après paiement à l'Etat des sommes restant dues, majorées des intérêts de retard et du règlement des frais de la cession, le solde du prix de cession est rétrocédé au porteur défaillant. Si, dans le trimestre qui suit la date d'échéance, la cession n'a pu être réalisée à des conditions permettant le règlement à l'Etat prévu à l'alinéa précédent, les titres sont conservés par l'Etat sans droit à indemnité pour le porteur défaillant. Les titres ainsi acquis par l'Etat seront vendus sur le marché financier. Les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions sont fixées par décret.

Article 5 Modifié par Loi n°93-923 du 19 juillet 1993 art. 1 (JORF 21 juillet 1993).

Lorsqu’il est recouru aux procédures du marché financier, les titres d’emprunt d’Etat ou les titres d’emprunt dont le service est pris en charge par l’Etat sont admis en paiement des actions détenues par l’Etat, à concurrence de 50 p 100 au plus du montant de chaque acquisition. Ces titres sont évalués, à la date d’échange, sur la base de la moyenne de leurs cours en bourse calculée sur une période comprenant les vingt jours de cotation précédant la mise sur le marché des actions offertes. Cette évaluation fait l’objet d’un arrêté du ministre chargé de l’économie.

Article 6 Modifié par Ordonnance n°2000-912 du 18 septembre 2000 art. 3 (JORF

21 septembre 2000). L'échange contre des actions ordinaires de certificats d'investissement ou de certificats pétroliers émis par les entreprises publiques s'opère par des offres publiques. La parité d'échange, fixée dans les conditions prévues à l'article 3, tient compte de la valeur du droit de vote et de la perte des avantages de priorité qui sont éventuellement attachés à ces certificats. Par dérogation aux dispositions du sixième alinéa de l'article L228-29 du code de commerce, il peut également être procédé, dans les mêmes conditions, à la cession des droits de vote créés à l'occasion de l'émission des certificats d'investissement. Cette cession ne peut être proposée qu'aux seuls porteurs de ces certificats et entraîne de plein droit la reconstitution d'actions ordinaires. Un an après le transfert de propriété de l'entreprise, les certificats de droits de vote non encore cédés ou échangés en vertu des deux alinéas précédents sont cédés à dire d'experts à l'entreprise concernée. L'exercice de leur droit de vote est alors suspendu. Leur cession ou leur échange ultérieur ne peut être réalisé qu'au profit des seuls détenteurs de certificats d'investissement.

[…]

Article 9 Modifié par Loi n°93-923 du 19 juillet 1993 art. 1 (JORF 21 juillet

1993).

Au moment de la cession des titres par l'Etat suivant les procédures du marché financier, un arrêté du ministre chargé de l'économie peut décider qu'aucune personne physique ou morale ne pourra acquérir, à l'occasion de cette opération, plus de 5 % des titres cédés.

Article 10 Modifié par Loi n°96-314 du 12 avril 1996 art. 49 (JORF 13 avril

1996). I. - Postérieurement au décret visé au premier alinéa du paragraphe II de l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993 et préalablement à la saisine de la commission de la privatisation, un décret détermine, pour chacune des entreprises mentionnées à l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993, si la protection des intérêts nationaux exige qu'une action ordinaire de l'Etat soit transformée en une action spécifique assortie de tout ou partie des droits définis ci-dessous. Dans l'affirmative, ledit décret prononce également cette transformation. Les droits pouvant être attachés à une action spécifique sont les suivants : 1° L'agrément préalable par le ministre chargé de l'économie pour le franchissement, par une personne agissant seule ou de concert, d'un ou plusieurs des seuils fixés dans le décret mentionné au premier alinéa ci-dessus et calculés en pourcentage du capital social ou des droits de vote ; 2° La nomination au conseil d'administration ou de surveillance, selon le cas, d'un ou deux représentants de l'Etat désignés par décret et sans voix délibérative ; 3° Le pouvoir de s'opposer, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, aux décisions de cession d'actifs ou de certains types d'actifs de la société ou de ses filiales ou d'affectation de ceux-ci à titre de garantie, qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts nationaux. L'institution de cette action produit ses effets de plein droit. Hormis les cas où l'indépendance nationale est en cause, l'action spécifique peut à tout moment être définitivement transformée en action ordinaire par décret. II. - Pour les entreprises visées au présent titre ou leurs filiales, dont l'activité principale relève des articles 55, 56 et 223 du traité instituant la Communauté européenne, les participations excédant 5 p. 100 prises par des personnes physiques ou morales étrangères ou sous contrôle étranger, au sens de l'article 355-1 de la loi n° 66-537 du 24 jui llet 1966 sur les sociétés commerciales, agissant seules ou de concert, sont soumises à l'agrément du ministre chargé de l'économie. III. - Lorsque des prises de participation ont été effectuées en méconnaissance des dispositions du 1° du I ou du II du présent article, le ou les détenteurs des participations acquises irrégulièrement ne peuvent pas exercer les droits de vote correspondants et doivent céder ces titres dans un délai de trois mois. Le ministre chargé de l'économie informe de ces prises de participation le président du conseil d'administration ou le président du directoire de l'entreprise, selon le cas, qui en informe la prochaine assemblée générale des actionnaires. Passé le délai de trois mois mentionné au premier alinéa du présent paragraphe, il est procédé à la vente forcée des titres dans les conditions fixées par décret. IV. - Les dispositions des paragraphes I à III s'appliquent également aux entreprises du secteur public mentionnées au premier alinéa de l'article 20 lors de leur transfert au secteur privé. […]

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Article 11 Modifié par Loi n°96-314 du 12 avril 1996 art. 49 (JORF 13 avril 1996).

En cas de cession d'une participation de l'Etat suivant les procédures du marché financier, des titres doivent être proposés aux salariés de l'entreprise, à ceux des filiales dans lesquelles elle détient, directement ou indirectement, la majorité du capital social, ainsi qu'à leurs mandataires exclusifs ou aux anciens salariés s'ils justifient d'un contrat d'une durée accomplie d'au moins cinq ans avec l'entreprise ou ses filiales. Leurs demandes doivent être intégralement servies, pour chaque opération, à concurrence de 10 p. 100 du montant de celle-ci. Chaque demande individuelle ne peut toutefois être servie que dans la limite de cinq fois le plafond annuel des cotisations de la sécurité sociale. Si ces demandes excèdent 10 %, un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe les conditions de leur réduction. Des conditions préférentielles d'acquisition peuvent être consenties sous forme de rabais et de délais de paiement ou, si des délais de paiement ont été consentis à tous les acquéreurs en application de l'article 4-1 de la présente loi, de délais supplémentaires de paiement. Le taux de rabais sur le prix de cession ne peut être supérieur à 20 % du prix le plus bas proposé au même moment aux autres souscripteurs de la même opération. Si un rabais a été consenti, les titres ainsi acquis ne peuvent être cédés avant deux ans, ni avant leur paiement intégral. Les délais totaux de paiement ne peuvent excéder trois ans. Les titres proposés par l'Etat sont cédés directement aux personnes mentionnées au premier alinéa ou, le cas échéant, à l'entreprise, à charge pour elle de les rétrocéder à ces mêmes personnes dans le délai d'un an sans modification du rabais et des délais de paiement éventuels. Lorsqu'un rabais a été prévu, il s'applique au cours de bourse au jour de la rétrocession. Durant ce délai, ces titres ne sont pas pris en compte pour déterminer le plafond de 10 % prévu par l'article 217-3 de la loi n° 66-537 du 24 jui llet 1966 précitée et les droits de vote des titres ainsi détenus par la société sont suspendus. Lorsque la somme des demandes des personnes mentionnées à l'alinéa premier et de l'entreprise est inférieure à 10 %, le ministre chargé de l'économie peut proposer à nouveau les titres non acquis, dans les six mois, aux personnes visées à l'alinéa premier aux mêmes conditions préférentielles. Lorsqu'un rabais a été prévu, il s'applique au cours de bourse au jour de la cession. Les titres non cédés après application des alinéas précédents sont vendus sur le marché. Les avantages et les modalités propres à chaque opération sont arrêtés par le ministre chargé de l'économie qui peut décider d'étendre les dispositions du présent article et de l'article 12 aux autres opérations soumises aux dispositions du présent titre.

Article 12 Modifié par Loi n°93-923 du 19 juillet 1993 art. 1, art. 3 II, art. 10 (JORF

21 juillet 1993).

Les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article 11 peuvent bénéficier d'une attribution gratuite d'actions qui ne saurait excéder une action par action acquise directement de l'Etat et conservée au moins un an à compter de la date à laquelle cette action s'est trouvée à la fois cessible et intégralement payée. En aucun cas, la valeur des actions ainsi attribuées à une personne, estimée sur la base du prix de cession par l'Etat, ne peut excéder la moitié du plafond mensuel de la sécurité sociale. Cette décision est prise par un arrêté du ministre chargé de l'économie, au moment de la mise sur le marché.

Article 13 Modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 art. 5 IX

(JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002). Pour les offres destinées aux personnes physiques de nationalité française ou résidentes, il peut être fixé un nombre de titres dans la limite duquel leurs demandes sont servies intégralement. Dans l'hypothèse où elles ne pourraient être satisfaites entièrement, les demandes sont réduites dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Les personnes visées à l'alinéa précédent peuvent bénéficier de délais supplémentaires de paiement sans que les délais totaux de paiement excèdent trois ans. Elles peuvent bénéficier d'une attribution gratuite d'actions qui ne saurait excéder une action pour dix actions acquises

directement de l'Etat et conservées au moins dix-huit mois après leur paiement intégral, dans la limite, pour ces dernières, d'une contre-valeur ne dépassant pas 4 575 euros. Les personnes physiques ayant la qualité de ressortissants de l'un des Etats membres de la Communauté européenne peuvent avoir accès à ces offres dans les mêmes conditions. Les avantages et les modalités propres à chaque opération sont arrêtés par le ministre chargé de l'économie. […]

Article 20 Modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 art. 5

IX (JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002). Les opérations de transfert au secteur privé de la propriété des entreprises mentionnées au premier alinéa du paragraphe II de l'article 7 de la loi n° 86-793 du 2 juillet 1986 précitée sont autorisées par décret lorsque les effectifs desdites entreprises augmentés de ceux des filiales dans lesquelles elles détiennent, directement ou indirectement, plus de 50 % du capital social, sont supérieurs à mille personnes au 31 décembre de l'année précédant le transfert ou lorsque le chiffre d'affaires consolidé de ces entreprises et de leurs filiales telles qu'elles viennent d'être définies, est supérieur à 150 millions d'euros à la date de clôture de l'exercice précédant le transfert. Les opérations de transfert mentionnées au présent article ne peuvent concerner des entreprises dont l'exploitation présente le caractère d'un service public national ou d'un monopole de fait. L'autorisation ne peut être donnée qu'au vu d'un dossier comprenant l'évaluation de la valeur de l'entreprise, compte tenu de l'incidence des charges qui, le cas échéant, demeurent pour le secteur public après la cession, ainsi que des actifs apportés éventuellement en échange, par des experts indépendants désignés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Ces évaluations sont conduites selon les méthodes objectives couramment pratiquées en matière de cession totale ou partielle d'actifs de sociétés, en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur boursière des titres, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l'existence des filiales et des perspectives d'avenir. L'autorisation ne peut être accordée si le prix d'offre ou le prix de cession est inférieur à la valeur fixée par les experts ou si les intérêts nationaux ne sont pas préservés. Pour les entreprises dont l'effectif dépasse 2 500 personnes ou le chiffre d'affaires 375 millions d'euros, compte tenu des règles énoncées à cet égard au premier alinéa, l'autorisation ne peut être accordée qu'après avis conforme de la Commission de la privatisation. Dans ce cas, la valeur mentionnée à l'alinéa précédent est celle fixée par la commission de la privatisation.

Article 21 Modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 art. 5

IX (JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002). Les opérations concernant des entreprises dont l'effectif ne dépasse pas mille personnes et le chiffre d'affaires 150 millions d'euros, compte tenu des règles énoncées à cet égard à l'article 20 donnent lieu à déclaration préalable au ministre chargé de l'économie ; elles sont réputées autorisées si le ministre ne s'est pas opposé, dans les dix jours de la réception de cette déclaration, à leur transfert pour un motif tiré de la méconnaissance de l'une des conditions énoncées à l'article 20. Les opérations concernant les entreprises dont l'effectif ne dépasse pas cinquante salariés et le chiffre d'affaires 7,5 millions d'euros sont dispensées de l'application de la procédure prévue à l'alinéa précédent. Elles sont déclarées, dans un délai de trente jours à compter de leur réalisation, au ministre chargé de l'économie.

Article 22 Modifié par Loi n°93-923 du 19 juillet 1993 art. 1 (JORF 21 juillet

1993). Toute opération de transfert au secteur privé n'ayant pas fait l'objet d'une autorisation dans les conditions prévues aux articles 20 et 21 est réputée nulle et de nul effet.

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Document n° 3 : CC, 25 et 26 juin 1986, déc. n° 86-207 DC, Loi autorisant le Gouvernement à prendre diverses mesures d’ordre économique et social, Rec., p. 61 ; GDCC, 2003, 12ème éd., n° 39

Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment les articles figurant au chapitre II du titre II de ladite ordonnance ; Vu l'ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social ; Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que la loi autorisant le Gouvernement à prendre diverses mesures d'ordre économique et social, soumise à l'examen du Conseil constitutionnel tend, en ce qui concerne la plupart de ses dispositions, à permettre au Gouvernement de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ; qu'elle fait référence à l'article 38 de la Constitution ; 2. Considérant que l'article 38 de la Constitution dispose : "Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre, par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi.- Les ordonnances sont prises en Conseil des Ministres après avis du Conseil d'Etat. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation.- A l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif." ; 3. Considérant que la Constitution ne soumet le recours à cette procédure à aucune autre condition que celles énoncées à l'article 38 précité et à l'article 13 aux termes duquel "le Président de la République signe les ordonnances et les décrets délibérés en Conseil des Ministres" ; 4. Considérant que les députés et les sénateurs auteurs de l'une et l'autre saisines contestent la conformité à la Constitution de la loi qu'ils défèrent au Conseil constitutionnel ; que leur contestation porte à la fois sur la procédure selon laquelle la loi a été votée et sur le fond des dispositions qu'elle porte ; - SUR LA PROCEDURE LEGISLATIVE : […] En ce qui concerne l'ensemble de la procédure législative : 12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel n'a pas été adoptée selon une procédure contraire à la Constitution ; - SUR LE FOND : 13. Considérant que, s'il est spécifié à l'alinéa 1er de l'article 38 de la Constitution précité que c'est pour l'exécution de son programme que le Gouvernement se voit attribuer la possibilité de demander au Parlement l'autorisation de prendre, par voie d'ordonnances pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi, ce texte doit être entendu comme faisant obligation au Gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement quelle est la finalité des mesures qu'il se propose de prendre et leurs domaines d'intervention ; 14. Considérant que les dispositions d'une loi d'habilitation ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le

Gouvernement, dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en application de l'article 38 de la Constitution, du respect des règles et principes de valeur constitutionnelle ; 15. Considérant qu'il appartient au Conseil constitutionnel, d'une part, de vérifier que la loi d'habilitation ne comporte aucune disposition qui permettrait de méconnaître ces règles et principes, d'autre part, de n'admettre la conformité à la Constitution de la loi d'habilitation que sous l'expresse condition qu'elle soit interprétée et appliquée dans le strict respect de la Constitution ; 16. Considérant que les auteurs de l'une et de l'autre saisine élèvent des griefs d'inconstitutionnalité à l'encontre de chacun des articles 1 à 7 de la loi ; […] En ce qui concerne les articles 4 et 5 de la loi et la liste

annexée à la loi : 47. Considérant que l'article 4 de la loi est ainsi conçu : "Sera transférée du secteur public au secteur privé, au plus tard le 1er mars 1991, la propriété des participations majoritaires détenues directement ou indirectement par l'Etat dans les entreprises figurant sur la liste annexée à la présente loi.- Ces transferts seront effectués par le Gouvernement conformément aux règles définies par les ordonnances mentionnées à l'article 5." ; 48. Considérant que l'article 5 de la loi dispose : "Le Gouvernement est habilité, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi et dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution :- 1° A fixer, pour le transfert des entreprises figurant sur la liste mentionnée à l'article 4 et pour la délivrance de l'autorisation administrative relative aux opérations mentionnées au second alinéa du paragraphe II de l'article 7 : - les règles d'évaluation des entreprises et de détermination des prix d'offre ; - les modalités juridiques et financières de transfert ou de cession et les conditions de paiement ; - les modifications des dispositions restreignant l'acquisition ou la cessibilité des droits tenus sur les entreprises concernées ; - les conditions de la protection des intérêts nationaux ; - les conditions de développement d'un actionnariat populaire et d'acquisition par le personnel de chaque société et de ses filiales d'une fraction du capital ; - le régime fiscal applicable à ces transferts et cessions ;- 2° A définir, pour les autres cas visés à l'article 7, les conditions de délivrance de l'autorisation administrative ;- 3° A définir les conditions de régularisation des opérations intervenues préalablement à l'entrée en vigueur de la présente loi." ; 49. Considérant que, sur la liste annexée à la loi et mentionnée à l'article 4 de celle-ci figurent soixante-cinq entreprises relevant du secteur public ; Quant au principe des transferts du secteur public au

secteur privé :

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50. Considérant que l'article 34 de la Constitution place dans le domaine de la loi "les règles concernant... les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé" ; 51. Considérant que, si cette disposition laisse au législateur l'appréciation de l'opportunité des transferts du secteur public au secteur privé et la détermination des biens ou des entreprises sur lesquels ces transferts doivent porter, elle ne saurait le dispenser, dans l'exercice de sa compétence, du respect des principes et des règles de valeur constitutionnelle qui s'imposent à tous les organes de l'Etat ; Quant à la détermination des entreprises visées par l'article 4 et

figurant sur la liste annexée à la loi :

52. Considérant que les députés auteurs de la première saisine soutiennent que les dispositions de l'article 4 et les énonciations de la liste d'entreprises annexée à la loi méconnaîtraient les dispositions du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 aux termes duquel "Tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité." ; qu'il suit de là que serait contraire à la Constitution le transfert du secteur public au secteur privé de certaines entreprises figurant sur la liste annexée à la loi et dont l'exploitation revêt les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait ; 53. Considérant que, si la nécessité de certains services publics nationaux découle de principes ou de règles de valeur constitutionnelle, la détermination des autres activités qui doivent être érigées en service public national est laissée à l'appréciation du législateur ou de l'autorité réglementaire selon les cas ; qu'il suit de là que le fait qu'une activité ait été érigée en service public par le législateur sans que la Constitution l'ait exigé ne fait pas obstacle à ce que cette activité fasse, comme l'entreprise qui en est chargée, l'objet d'un transfert au secteur privé ; 54. Considérant qu'aucune des entreprises qui figurent sur la liste mentionnée à l'article 4 de la loi ne peut être regardée comme exploitant un service public dont l'existence et le fonctionnement seraient exigés par la Constitution ; qu'en particulier, à supposer que le législateur ait, comme le font valoir les députés auteurs de la première saisine, entendu créer par la nationalisation de l'ensemble des banques, un service public du crédit, cette création qui ne procédait d'aucune exigence constitutionnelle n'a pu mettre obstacle à ce que certaines activités de crédit et les banques qui s'y livrent fassent, en vertu d'une nouvelle législation, retour au secteur privé ; 55. Considérant que la notion de monopole de fait visée dans le neuvième alinéa précité du Préambule de la Constitution de 1946 doit s'entendre compte tenu de l'ensemble du marché à l'intérieur duquel s'exercent les activités des entreprises ainsi que de la concurrence qu'elles affrontent dans ce marché de la part de l'ensemble des autres entreprises ; qu'on ne saurait prendre en compte les positions privilégiées que telle ou telle entreprise détient momentanément ou à l'égard d'une production qui ne représente qu'une partie de ses activités ; que, compte tenu de ces considérations, il n'est pas établi, en l'état, que ce soit par une erreur manifeste d'appréciation que les entreprises figurant sur la liste annexée à la loi ainsi que leurs filiales aient été regardées comme ne constituant pas des monopoles de fait ;

56. Considérant, dès lors, que la détermination des entreprises auxquelles s'appliquent les dispositions de l'article 4 de la loi conformément à la liste annexée à cette loi n'est pas contraire à la Constitution ;

Quant aux conditions et au prix auxquels seront

transférées au secteur privé les entreprises visées à

l'article 4 de la loi :

57. Considérant que les députés auteurs de la saisine font valoir qu'il serait inadmissible que les entreprises du secteur public devant être transférées au secteur privé fussent cédées à un prix inférieur à leur valeur réelle ; que la cession à un tel prix méconnaîtrait fondamentalement le principe d'égalité en procurant aux acquéreurs de ces entreprises un avantage injustifié au détriment de l'ensemble des citoyens ; que, cependant, aucune des dispositions de la loi d'habilitation n'apporte de garanties contre la cession à des prix insuffisants des entreprises visées par l'article 4 de la loi ; qu'en outre l'obligation inconditionnelle faite au Gouvernement de procéder au transfert de la totalité des participations majoritaires de l'Etat dans ces entreprises avant le 1er mars 1991 peut, si cet apport massif excède comme on peut le penser la capacité du marché, avoir pour effet la cession à vil prix de portions importantes du patrimoine national sans exclure la possibilité de transferts à des mains étrangères préjudiciables à l'indépendance nationale ; 58. Considérant que la Constitution s'oppose à ce que des biens ou des entreprises faisant partie de patrimoines publics soient cédés à des personnes poursuivant des fins d'intérêt privé pour des prix inférieurs à leur valeur ; que cette règle découle du principe d'égalité invoqué par les députés auteurs de la saisine ; qu'elle ne trouve pas moins un fondement dans les dispositions de la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 relatives au droit de propriété et à la protection qui lui est due ; que cette protection ne concerne pas seulement la propriété privée des particuliers mais aussi, à un titre égal, la propriété de l'Etat et des autres personnes publiques ; 59. Mais considérant que l'article 4 de la loi prévoit, dans son deuxième alinéa, que les transferts seront effectués par le Gouvernement conformément aux règles définies par les ordonnances mentionnées à l'article 5 ; que l'article 5 de la loi prévoit que, par voie d'ordonnance, seront fixées les règles d'évaluation des entreprises et la détermination des prix d'offre, ce qui interdit de transférer les entreprises visées à l'article 4 de la loi lorsque le prix auquel elles pourraient être cédées serait inférieur à leur valeur réelle ; qu'il résulte des travaux préparatoires que le Gouvernement s'est engagé à faire procéder à des évaluations par des experts indépendants et à ne pas céder les entreprises visées à l'article 4 de la loi à un prix inférieur à leur valeur ; que les garanties qui doivent préserver l'indépendance nationale résulteront également des ordonnances prévues par l'article 5 de la loi ; 60. Considérant qu'il ressort de ce qui précède que l'article 4 de la loi doit se comprendre comme ne prévoyant la date limite du 1er mars 1991 que pour la réalisation des transferts à un prix conforme aux intérêts patrimoniaux de l'Etat, et dans le respect de l'indépendance nationale, étant

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entendu que les transferts qui, à cette date, n'auraient pas été engagés ou terminés ne pourraient avoir lieu ou s'achever qu'en vertu d'une nouvelle disposition législative ; que toute autre interprétation serait contraire à la Constitution ; 61. Considérant, de même, que les dispositions de l'article 5 auxquelles renvoie le deuxième alinéa de l'article 4 doivent se comprendre comme imposant au Gouvernement de prendre par voie d'ordonnance des dispositions selon lesquelles l'évaluation de la valeur des entreprises à transférer sera faite par des experts compétents totalement indépendants des acquéreurs éventuels ; qu'elle sera conduite selon les méthodes objectives couramment pratiquées en matière de cession totale ou partielle d'actifs de sociétés en tenant compte, selon une pondération appropriée à chaque cas, de la valeur boursière des titres, de la valeur des actifs, des bénéfices réalisés, de l'existence des filiales et des perspectives d'avenir ; que, de même, l'ordonnance devra interdire le transfert dans le cas où le prix proposé par les acquéreurs ne serait pas supérieur ou au moins égal à cette évaluation ; que le choix des acquéreurs ne devra procéder d'aucun privilège ; que l'indépendance nationale devra être préservée ; que toute autre interprétation serait contraire à la Constitution ; Quant au grief tiré de ce que les transferts visés à l'article 4

pourraient être opérés sans que soient intervenues les

ordonnances qui devront être prises en vertu de l'article 5 :

62. Considérant que les sénateurs auteurs de la seconde saisine font valoir que, dans le cas où, pour une raison quelconque, les ordonnances qui doivent être prises en vertu de l'article 5 n'interviendraient pas en temps utile, les transferts visés à l'article 4 ne devraient pas moins intervenir en raison du caractère impératif de la date limite du 1er mars 1991 ; que cette situation dans laquelle les transferts seraient opérés sans qu'aucune règle préside à leur réalisation, notamment en ce qui concerne l'évaluation de la valeur des entreprises, serait contraire à la Constitution ; 63. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi "Ces transferts seront effectués par le Gouvernement conformément aux règles définies par les ordonnances mentionnées à l'article 5" ; qu'il suit de ces dispositions que le Gouvernement ne peut opérer aucun des transferts visés à l'article 4 sans que les ordonnances visées au 1° de l'article 5 aient été prises ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;

Quant au grief tiré de ce que la combinaison des articles 5 et 7

de la loi permettrait au Gouvernement de s'affranchir de la règle

constitutionnelle selon laquelle les transferts du secteur public

au secteur privé ne peuvent résulter que de la loi :

64. Considérant que ce grief formulé par les députés auteurs de la première saisine doit être réservé pour être joint à ceux concernant l'article 7 ; […] En ce qui concerne l'article 7 de la loi :

70. Considérant que l'article 7 de la loi présentement examinée dispose : "I.- Sont approuvés par la loi les transferts au secteur privé de la propriété : - des entreprises dont l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social ; - des entreprises qui sont entrées dans le secteur public en application d'une disposition législative.- II.- Les opérations ayant pour effet de

réaliser un transfert du secteur public au secteur privé de propriété d'entreprises autres que celles mentionnées au paragraphe I ci-dessus, sont soumises à l'approbation de l'autorité administrative, dans les conditions fixées par les ordonnances mentionnées à l'article 5.- Nonobstant toute disposition législative contraire, toute prise de participation du secteur privé au capital social d'une entreprise dont l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social et qui n'a pas pour effet de transférer sa propriété au secteur privé, est soumise aux conditions d'approbation mentionnées à l'alinéa précédent." ; 71. Considérant que les auteurs de l'une et de l'autre saisines font grief à l'article précité de méconnaître sous des formes diverses les dispositions de l'article 34 de la Constitution qui placent dans le domaine de la loi les règles concernant les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé ; 72. Considérant que l'article 34 de la Constitution n'impose pas que toute opération impliquant un transfert du secteur public au secteur privé soit directement décidée par le législateur ; qu'il appartient à celui-ci de poser des règles dont l'application incombera aux autorités ou aux organes désignés par lui ; qu'il ne lui est cependant pas loisible d'attribuer aux seuls organes des entreprises concernées un pouvoir discrétionnaire d'appréciation et de décision soustrait à tout contrôle et d'une étendue excessive ; 73. Considérant que les sénateurs auteurs de l'une des saisines font grief au législateur de n'avoir pas englobé dans le critère des transferts devant être déterminés cas par cas par la loi les participations indirectes de l'Etat et celles des personnes publiques autres que l'Etat ; 74. Considérant que ce grief ne saurait être retenu ; qu'en effet, s'il n'est pas permis au législateur d'exclure de telles participations dans la détermination des entreprises appartenant au secteur public au sens de l'article 34 de la Constitution, aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle ne lui impose de prévoir des modalités de transfert identiques entre les entreprises dans lesquelles l'Etat détient directement une partie du capital social et les autres entreprises y compris celles où la majorité des participations directes et indirectes appartient à l'Etat ou aux personnes publiques ; 75. Considérant que les députés auteurs de la première saisine font valoir que les dispositions de l'article 7 laissent le Gouvernement et même les entreprises maîtres de déterminer si le transfert de celles-ci au secteur privé relève ou non de la loi ; qu'à cet égard les entreprises dans lesquelles l'Etat détient la majorité du capital social et qui, à ce titre, ne pourraient être transférées que par l'effet d'une loi les visant individuellement comme le veut le paragraphe I de l'article 7, pourraient sans difficulté échapper à cette contrainte en cédant à d'autres personnes publiques un nombre suffisant de parts pour que l'Etat ne détienne plus directement la majorité du capital social, ce qui aurait pour effet de placer ces entreprises sous le régime du paragraphe II de l'article 7 et d'en permettre le transfert sous la seule condition d'une autorisation administrative ;

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76. Considérant que l'éventualité d'un détournement de procédure ou d'un abus dans l'application d'une loi ne saurait la faire regarder comme contraire à la Constitution ; que d'ailleurs, il appartiendrait aux juridictions compétentes de paralyser et, le cas échéant, de réprimer de telles pratiques ; 77. Considérant que les députés auteurs de la première saisine font valoir qu'en ne prenant pas le soin de déterminer lui-même la nature de l'autorité administrative devant approuver les opérations de transfert visées au paragraphe II de l'article 7, le législateur a opéré une subdélégation non permise par la Constitution ; 78. Considérant que ce grief ne saurait davantage être retenu ; qu'en effet, une loi d'habilitation a pour objet normal de confier à une ou plusieurs ordonnances le soin de poser des règles de compétence, de procédure ou de fond en vue de la réalisation des finalités qu'elle énonce ; que tel est précisément l'objet du 2° de l'article 5 de la loi qui prévoit que seront définies par voie d'ordonnance les conditions juridiques des transferts visés par le paragraphe II de l'article 7, ce qui implique nécessairement la détermination des autorités compétentes ; 79. Considérant qu'ainsi, les dispositions de l'article 7 de la loi présentement examinée ne sont pas contraires à la Constitution ; que, cependant, pour être conforme aux exigences de l'article 34 de la Constitution telles qu'elles ont été rappelées plus haut, l'ordonnance prévoyant les conditions de délivrance de l'autorisation administrative visée au paragraphe II de l'article 7 devra, non seulement respecter les prescriptions précédemment énoncées relatives aux conditions de transfert mais également comporter des dispositions qui, d'une part, tiendront compte de l'incidence sur le prix du transfert, des charges qui demeureront

pour le secteur public après la cession et, d'autre part, seront de nature à garantir un contrôle effectif de la régularité et de la finalité des transferts selon des procédures et par des autorités appropriées ; qu'en outre, pour les transferts qui concernent des entreprises dans lesquelles des collectivités territoriales ont des intérêts, les dispositions dont il s'agit devront respecter le principe de libre administration de ces collectivités posé par l'article 72 de la Constitution ; qu'enfin, devront être respectées les dispositions du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 relatives à la nationalisation des entreprises dont l'exploitation présente les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait ; - SUR LES AUTRES DISPOSITIONS DE LA LOI SOUMISE A L'EXAMEN DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL : 80. Considérant que les autres dispositions de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel ne sont pas contraires à la Constitution ; D E C I D E : Article premier. - Sous les strictes réserves d'interprétation énoncées plus haut la loi autorisant le Gouvernement à prendre diverses mesures d'ordre économique et social n'est pas contraire à la Constitution. Article 2. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans ses séances des 25 et 26 juin 1986.

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Document n° 5 : CJCE, 4 juin 2002, Commission des Communautés européennes contre République française, aff. C-483/99, Rec., I, p. 4781.

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 21 décembre 1999, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 226 CE, un recours visant à faire constater que, en maintenant en vigueur l'article 2, paragraphes 1 et 3, du décret n_ 93-1298, du 13 décembre 1993, instituant une action spécifique de l'État dans la Société nationale Elf-Aquitaine (JORF du 14 décembre 1993, p. 17354, ci-après le «décret n_ 93-1298»), selon lequel l'action spécifique de la République française dans ladite société est assortie des droits suivants: a) tout franchissement à la hausse des seuils de détention directe ou indirecte de titres du dixième, du cinquième ou du tiers du capital ou des droits de vote de la société par une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, doit être approuvé préalablement par le ministre de l'Économie (article 2, paragraphe 1, dudit décret); b) il peut être fait opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs figurant en annexe audit décret, à savoir la majorité du capital des quatre filiales de la compagnie mère que sont Elf-Aquitaine Production, Elf-Antar France, Elf-Gabon SA et Elf-Congo SA (article 2, paragraphe 3, dudit décret), et en n'ayant pas prévu des critères suffisamment précis et objectifs concernant l'approbation des opérations susmentionnées ou l'opposition à celles-ci, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE) à 58 du traité CE (devenu article 48 CE) ainsi que 73 B du traité CE (devenu article 56 CE). 2 Par requêtes déposées au greffe de la Cour respectivement les 13, 22 et 27 juin 2000, le royaume d'Espagne, le royaume de Danemark et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord ont demandé à intervenir dans l'affaire au soutien des conclusions de la République française. Par ordonnances du président de la Cour des 4, 7 et 12 juillet 2000, respectivement, ces États membres ont été admis à intervenir. Par lettre du 6 avril 2001, le royaume de Danemark s'est désisté de son intervention. Cadre juridique du litige Droit communautaire 3 L'article 73 B, paragraphe 1, du traité est libellé comme suit: «Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites.» 4 En vertu de l'article 73 D, paragraphe 1, sous b), du traité CE [devenu article 58, paragraphe 1, sous b), CE]: «L'article 73 B ne porte pas atteinte au droit qu'ont les États membres: [...] b) de prendre toutes les mesures indispensables pour faire échec aux infractions à leurs lois et règlements, notamment

en matière fiscale ou en matière de contrôle prudentiel des établissements financiers, de prévoir des procédures de déclaration des mouvements de capitaux à des fins d'information administrative ou statistique ou de prendre des mesures justifiées par des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique.» […] 8 L'article 222 du traité CE (devenu article 295 CE) dispose: «Le présent traité ne préjuge en rien le régime de la propriété dans les États membres.» Droit national 9 Le décret n_ 93-1298 prévoit à ses articles 1er et 2 : «Article premier Afin de protéger les intérêts nationaux, une action spécifique ordinaire de l'État dans la Société nationale Elf-Aquitaine est transformée en une action spécifique assortie des droits définis à l'article 2 ci-après. Article 2 I. Tout franchissement à la hausse des seuils de détention directe ou indirecte de titres, quelle qu'en soit la nature ou la forme juridique, du dixième, du cinquième ou du tiers du capital ou des droits de vote de la société par une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert, doit être approuvé préalablement par le ministre chargé de l'économie. Cette approbation doit être renouvelée si le bénéficiaire vient à agir de concert, à subir un changement de contrôle ou si l'identité d'un ou des membres du concert vient à changer. De même, tout seuil franchi à titre individuel par un membre du concert doit faire l'objet d'un agrément préalable. [...] II. Deux représentants de l'État nommés par décret siègent au conseil d'administration de la société sans voix délibérative. Un représentant est nommé sur proposition du ministre chargé de l'économie et un sur proposition du ministre chargé de l'énergie. III. Dans les conditions fixées par le décret n_ 93-1296 susvisé, il peut être fait opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs dont la liste figure en annexe au présent décret.»10 La liste figurant en annexe du décret n_ 93-1298 vise la majorité du capital d'Elf-Aquitaine Production, d'Elf-Antar France, d'Elf-Gabon SA et d'Elf-Congo SA. […] Moyens et arguments des parties 17 La Commission expose, à titre liminaire, que l'ampleur considérable des investissements intracommunautaires a amené certains États membres à prendre des mesures dans le souci de contrôler cette situation. Lesdites mesures, adoptées en grande partie dans le cadre de privatisations, risqueraient d'être incompatibles, dans certaines conditions, avec le droit communautaire. C'est pour cette raison qu'elle aurait adopté, le 19 juillet 1997, la communication concernant certains aspects juridiques

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touchant aux investissements intracommunautaires (JO C 220, p. 15, ci-après la «communication de 1997»). 18 Dans cette communication, la Commission aurait interprété en la matière les dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux et à la liberté d'établissement, notamment dans le cadre des procédures d'autorisation générale ou de droit de veto de la part des autorités publiques. 19 Le point 9 de la communication de 1997 est rédigé comme suit:«Il ressort de cet examen des mesures revêtant un caractère restrictif pour les investissements intracommunautaires que les mesures discriminatoires (c'est-à-dire celles qui s'appliquent exclusivement aux investisseurs ressortissants d'un autre État membre de l'Union européenne) seront jugées incompatibles avec les articles 73 B et 52 du traité relatifs à la libre circulation des capitaux et au droit d'établissement, à moins qu'elles ne rentrent dans le cadre de l'une des exceptions prévues par le traité. En ce qui concerne les mesures non discriminatoires (c'est-à-dire celles qui s'appliquent aux nationaux comme aux ressortissants d'un autre État membre de l'Union européenne), elles sont admises dans la mesure où elles se fondent sur une série de critères objectifs, stables et rendus publics et peuvent se justifier par des raisons impérieuses d'intérêt général. En tout état de cause, le principe de proportionnalité devra être respecté.» 20 Selon la Commission, la réglementation instituant une action spécifique en faveur de la République française dans la Société nationale Elf-Aquitaine, qui prévoit une autorisation préalable par cet État membre pour tout franchissement à la hausse de certains seuils de détention de titres ou de droits de vote ainsi qu'un droit d'opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie de la majorité du capital de quatre filiales de ladite société, ne respecte pas les conditions énoncées par la communication de 1997 et viole ainsi les articles 52 à 58 ainsi que 73 B du traité. 21 En effet, ces dispositions nationales, bien qu'indistinctement applicables, créeraient des obstacles au droit d'établissement des ressortissants d'autres États membres aussi bien qu'à la libre circulation des capitaux à l'intérieur de la Communauté dans la mesure où elles seraient susceptibles de gêner ou de rendre moins attrayant l'exercice de ces libertés. 22 Selon la Commission, les procédures d'autorisation ou d'opposition ne peuvent être jugées compatibles avec lesdites libertés que si elles sont couvertes par les exceptions visées aux articles 55 du traité CE (devenu article 45 CE), 56 du traité CE (devenu, après modification, article 46 CE) et 73 D du traité ou si elles sont justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général et assorties de critères objectifs, stables et rendus publics, de manière à limiter au minimum le pouvoir discrétionnaire des autorités nationales. 23 Or, les dispositions en cause ne répondraient à aucun de ces critères. Elles risqueraient par conséquent, par manque de transparence, d'introduire indirectement un élément de discrimination ainsi qu'une incertitude juridique. Par ailleurs, l'article 222 du traité ne saurait être invoqué de façon pertinente, puisqu'il ne s'agirait pas en l'espèce d'une détention d'une participation de contrôle dans le capital de

sociétés par l'État, mais du contrôle, par celui-ci, du partage de la propriété entre des personnes privées. 24 Si la continuité de l'approvisionnement en produits pétroliers en cas de crise pourrait relever, en principe, des raisons impérieuses d'intérêt général, il faudrait encore établir le caractère nécessaire et proportionné des mesures en question quant au but à atteindre. 25 En effet, le but visé pourrait être atteint de façon plus efficace par des mesures sectorielles, entrant en vigueur en temps de crise, assorties de critères techniques bien définis et ne portant pas sur le capital des sociétés en cause, mais sur l'utilisation des stocks. 26 Par ailleurs, l'objectif de l'approvisionnement en produits pétroliers en cas de crise serait déjà suffisamment assuré par les mesures prévues dans les cadres juridiques communautaires et internationaux. Ainsi, il existerait un cadre communautaire établissant une politique qui vise à garantir la sécurité des approvisionnements en produits pétroliers des États membres, dans le respect des règles du marché intérieur, à savoir certaines directives et décisions du Conseil. De même, sur le plan international, il existerait un mécanisme créé par l'Agence internationale de l'énergie, constitué par l'accord sur le programme international de l'énergie, auquel la République française aurait adhéré. Cet accord contiendrait des dispositions visant à assurer une répartition équitable du pétrole en cas de pénurie. Il compléterait ainsi les directives communautaires, qui ne concerneraient que la constitution de stocks et la restriction de la demande. 27 La République française conteste le manquement allégué. Selon elle, les éventuelles restrictions à la liberté d'établissement et à la libre circulation des capitaux résultant de la réglementation litigieuse sont, en tout état de cause, justifiées, d'une part, par l'exception de sécurité publique prévue aux articles 56 et 73 D, paragraphe 1, sous b), du traité et, d'autre part, par des raisons impérieuses d'intérêt général. Elles seraient, par ailleurs, proportionnées et adéquates quant à l'objectif qu'elles poursuivent. 28 En premier lieu, le gouvernement français fait valoir que l'approvisionnement en produits pétroliers en cas de crise, garanti, d'une part, par le droit à la réquisition des réserves en pétrole brut de la Société nationale Elf-Aquitaine à l'étranger et, d'autre part, par les procédures d'autorisation visant à maintenir en France le centre de décision de cette société, relève de la sécurité publique. Dans son arrêt du 10 juillet 1984, Campus Oil e.a. (72/83, Rec. p. 2727, point 34), la Cour aurait assimilé la sécurité des approvisionnements en produits pétroliers en cas de crise à la notion de sécurité intérieure. Cette conception trouverait pleinement application en l'espèce. 29 En deuxième lieu, le régime faisant l'objet du présent recours ne serait pas discriminatoire. L'exigence, formulée par la Commission, de critères précis, objectifs et stables, de manière à limiter au minimum le pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, ne trouverait pas de soutien dans la jurisprudence de la Cour et ne saurait donc être appliquée.

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30 En troisième lieu, les mesures en question répondraient aux critères de nécessité et de proportionnalité. Les produits pétroliers seraient fondamentaux pour l'existence d'un État dès lors que non seulement le fonctionnement de son économie mais surtout celui de ses institutions et de ses services publics essentiels et même la survie de sa population en dépendraient, comme cela serait le cas en France. Une interruption de l'approvisionnement en produits pétroliers et les risques qui en résultent pour l'existence de l'État pourraient dès lors gravement affecter sa sécurité publique, et ce d'autant plus que la France dépend grandement des importations dans ce secteur. 31 En effet, en cas de crise grave, la France ne pourrait valablement assurer la sécurité de ses approvisionnements en produits pétroliers qu'en réquisitionnant les réserves en pétrole brut de la Société nationale Elf-Aquitaine à l'étranger. Cela ne serait cependant possible que si le centre de décision de cette société est maintenu en France. 32 Le gouvernement français fait valoir qu'il n'existe pas de mesures nationales sectorielles qui permettraient d'assurer plus efficacement la sécurité des approvisionnements de la France en produits pétroliers en cas de crise grave, spécialement pas s'agissant de l'utilisation des stocks. Aucune mesure sectorielle ne pourrait être prise concernant l'approvisionnement en pétrole brut, faute de réserves pétrolières nationales significatives. 33 Selon le gouvernement français, la réglementation communautaire citée par la Commission ainsi que les mesures prises dans le cadre de l'Agence internationale de l'énergie ne sont pas suffisantes pour assurer la sécurité des approvisionnements en produits pétroliers en cas de crise grave, ce que la Cour aurait déjà admis aux points 28 à 31 de son arrêt Campus Oil e.a., précité. La Commission n'aurait donc pas établi, comme elle l'aurait dû, que les mesures en question ne satisfont pas au principe de proportionnalité. Les droits spéciaux faisant l'objet du présent recours constitueraient, en tout état de cause, un complément nécessaire aux mesures internationales. 34 Les États membres intervenants partagent pour l'essentiel le point de vue de la République française. Appréciation de la Cour Sur l'article 73 B du traité 35 Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que l'article 73 B, paragraphe 1, du traité met en oeuvre la libre circulation des capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers. À cet effet, il dispose, dans le cadre des dispositions du chapitre du traité intitulé «Les capitaux et les paiements», que toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites. […] 38 À la lumière de ces considérations, il convient d'examiner si la réglementation instituant une action spécifique en faveur de la République française dans la Société nationale Elf-Aquitaine, qui prévoit une autorisation préalable par cet État membre pour tout franchissement à la hausse de certains seuils de détention de titres ou de droits de vote ainsi qu'un droit d'opposition aux décisions de

cession ou d'affectation à titre de garantie de la majorité du capital de quatre filiales de ladite société, constitue une restriction aux mouvements de capitaux entre les États membres. 39 Le gouvernement français, tout en admettant en principe que les restrictions résultant de la réglementation en cause entrent dans le champ d'application de la libre circulation des capitaux, fait valoir que cette réglementation s'applique sans distinction aux actionnaires nationaux et aux actionnaires ressortissants d'autres États membres. Il ne s'agirait donc pas d'un traitement discriminatoire ou particulièrement restrictif en ce qui concerne les ressortissants d'autres États membres. 40 Cet argument ne peut être accueilli. En effet, l'article 73 B du traité interdit de façon générale les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres. Cette interdiction va au-delà de l'élimination d'un traitement inégal des opérateurs sur les marchés financiers en raison de leur nationalité. 41 La réglementation en cause, même si elle ne crée pas une inégalité de traitement, est susceptible d'empêcher l'acquisition d'actions dans les entreprises concernées et de dissuader les investisseurs d'autres États membres d'effectuer leurs placements dans le capital de ces entreprises. Elle est donc susceptible, de ce fait, de rendre illusoire la libre circulation des capitaux (voir, à cet égard, arrêts du 14 décembre 1995, Sanz de Lera e.a., C-163/94, C-165/94 et C-250/94, Rec. p. I-4821, point 25, et du 1er juin 1999, Konle, C-302/97, Rec. p. I-3099, point 44).42 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la réglementation en cause constitue une restriction aux mouvements des capitaux au sens de l'article 73 B du traité. Il convient donc d'examiner si et dans quelles conditions une justification de cette restriction peut être admise. 43 Ainsi qu'il ressort également de la communication de 1997, ne sauraient être niées les préoccupations pouvant, selon les circonstances, justifier que les États membres gardent une certaine influence dans les entreprises initialement publiques et ultérieurement privatisées, lorsque ces entreprises agissent dans les domaines des services d'intérêt général ou stratégiques (voir arrêts de ce jour, Commission/Portugal, C-367/98, non encore publié au Recueil, point 47, et Commission/Belgique, C-503/99, non encore publié au Recueil, point 43). 44 Ces préoccupations ne sauraient toutefois permettre aux États membres d'exciper de leurs régimes de propriété, tels que visés à l'article 222 du traité, pour justifier des entraves aux libertés prévues par le traité, qui résultent de privilèges dont ils assortissent leur position d'actionnaire dans une entreprise privatisée. En effet, ainsi qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour (arrêt Konle, précité, point 38), ledit article n'a pas pour effet de faire échapper les régimes de propriété existant dans les États membres aux règles fondamentales du traité. 45 La libre circulation des capitaux, en tant que principe fondamental du traité, ne peut être limitée par une réglementation nationale que si celle-ci est justifiée par des raisons visées à l'article 73 D, paragraphe 1, du traité ou par des raisons impérieuses d'intérêt général et

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s'appliquant à toute personne ou entreprise exerçant une activité sur le territoire de l'État membre d'accueil. En outre, afin d'être ainsi justifiée, la réglementation nationale doit être propre à garantir la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint, en vue de répondre au critère de proportionnalité (voir, en ce sens, arrêts Sanz de Lera e.a., précité, point 23, et du 14 mars 2000, Église de scientologie, C-54/99, Rec. p. I-1335, point 18). 46 S'agissant d'un régime d'autorisation administrative préalable tel que celui qui fait l'objet du reproche principal de la Commission, dans ses conclusions, sous a), relatif à l'article 2, paragraphe 1, du décret n_ 93-1298, la Cour a déjà jugé qu'il doit être proportionnel au but poursuivi, de manière telle que le même objectif ne saurait être atteint par des mesures moins restrictives, notamment par un système de déclarations a posteriori (voir, en ce sens, arrêts Sanz de Lera e.a., précité, points 23 à 28; Konle, précité, point 44, et du 20 février 2001, Analir e.a., C-205/99, Rec. p. I-1271, point 35). Un tel régime doit être fondé sur des critères objectifs, non discriminatoires et connus à l'avance des entreprises concernées, et toute personne frappée par une mesure restrictive de ce type doit pouvoir disposer d'une voie de recours (arrêt Analir e.a., précité, point 38). 47 En l'espèce, il ne saurait être nié que l'objectif poursuivi par la réglementation en cause, à savoir garantir la sécurité des approvisionnements en produits pétroliers en cas de crise, relève d'un intérêt public légitime. En effet, la Cour a déjà reconnu, parmi les raisons de sécurité publique qui peuvent justifier une entrave à la libre circulation des marchandises, l'objectif d'assurer, en tout temps, un approvisionnement minimal en produits pétroliers (arrêt Campus Oil e.a., précité, points 34 et 35). Le même raisonnement vaut pour les entraves à la libre circulation des capitaux, dans la mesure où la sécurité publique figure également parmi les raisons justificatives énoncées à l'article 73 D, paragraphe 1, sous b), du traité. 48 Cependant, la Cour a également jugé que les exigences de la sécurité publique doivent, notamment en tant que dérogation au principe fondamental de la libre circulation des capitaux, être entendues strictement, de sorte que leur portée ne saurait être déterminée unilatéralement par chacun des États membres sans contrôle des institutions de la Communauté. Ainsi, la sécurité publique ne saurait être invoquée qu'en cas de menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société (voir, notamment, arrêt Église de scientologie, précité, point 17). 49 Il convient donc de vérifier si les entraves résultant de la réglementation en cause permettent d'assurer dans l'État membre concerné, en cas de menace réelle et grave, un approvisionnement minimal en produits pétroliers et ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire à cette fin. 50 À cet égard, en ce qui concerne le reproche principal de la Commission, relatif à l'article 2, paragraphe 1, du décret n_ 93-1298, il convient de rappeler que le régime instauré par cette disposition prévoit que tout franchissement à la hausse de certains seuils de détention directe ou indirecte de titres, quelle qu'en soit la nature ou la forme juridique, doit être approuvé préalablement par le ministre de l'Économie pour chacune des personnes y participant. L'exercice de ce

droit n'est soumis, selon les textes applicables, à aucune condition, à l'exception d'une référence à la protection des intérêts nationaux, formulée de manière générale à l'article 1er dudit décret. Il n'est aucunement indiqué aux investisseurs concernés les circonstances spécifiques et objectives dans lesquelles une autorisation préalable sera accordée ou refusée. Une telle indétermination ne permet pas aux particuliers de connaître l'étendue de leurs droits et de leurs obligations découlant de l'article 73 B du traité, en sorte qu'un tel régime doit être considéré comme étant contraire au principe de sécurité juridique (voir arrêt Église de scientologie, précité, points 21 et 22). 51 Un pouvoir discrétionnaire aussi large constitue une atteinte grave à la libre circulation des capitaux, qui peut aboutir à l'exclusion de cette dernière. Le régime en cause va donc manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif invoqué par le gouvernement français, à savoir la prévention d'une atteinte à l'approvisionnement minimal en produits pétroliers en cas de menace effective. 52 En ce qui concerne le reproche de la Commission, relatif à l'article 2, paragraphe 3, du décret n_ 93-1298, qui prévoit un droit d'opposition à toute décision de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs de quatre filiales de la société nationale Elf-Aquitaine à l'étranger, les mêmes appréciations trouvent à s'appliquer. En effet, même s'il s'agit là non pas d'un régime d'autorisation préalable, mais d'un régime d'opposition a posteriori, il est toutefois constant que l'exercice de ce droit n'est, lui non plus, soumis à aucune condition limitant le large pouvoir discrétionnaire du ministre qui en est titulaire quant au contrôle de l'identité des détenteurs des actifs des sociétés filiales. Le régime va donc manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre le but invoqué par le gouvernement français, à savoir la prévention d'une atteinte à l'approvisionnement minimal en produits pétroliers en cas de menace effective. Au demeurant, les dispositions législatives françaises en cause ne reflètent pas une telle limitation. 53 Vu l'absence de critères objectifs et précis dans la structure du régime établi, la réglementation en cause va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre le but indiqué. 54 Il convient donc de constater que, en maintenant en vigueur la réglementation en cause, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 73 B du traité.Sur les articles 52 à 58 du traité 55 La Commission demande encore la constatation d'un manquement aux articles 52 à 58 du traité, à savoir aux règles de celui-ci relatives à la liberté d'établissement dans la mesure où elles concernent les entreprises. 56 À cet égard, il convient de relever que, dans la mesure où la réglementation en cause comporte des restrictions à la liberté d'établissement, de telles restrictions sont la conséquence directe des obstacles à la libre circulation des capitaux examinés ci-dessus, dont elles sont indissociables. Dès lors, une violation de l'article 73 B du traité ayant été constatée, il n'est pas nécessaire

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d'examiner séparément les mesures en cause à la lumière des règles du traité relatives à la liberté d'établissement. […] Par ces motifs, LA COUR déclare et arrête: 1) En maintenant en vigueur l'article 2, paragraphes 1 et 3, du décret n_ 93-1298, du 13 décembre 1993, instituant une action spécifique de l'État dans la Société nationale Elf-Aquitaine, selon lequel l'action spécifique de la République française dans ladite société est assortie des droits suivants: a) tout franchissement à la hausse des seuils de détention directe ou indirecte de titres du dixième, du cinquième ou du tiers du capital ou des droits de vote de la société par une personne physique ou morale, agissant seule ou de concert,

doit être approuvé préalablement par le ministre de l'Économie; b) il peut être fait opposition aux décisions de cession ou d'affectation à titre de garantie des actifs figurant en annexe audit décret, à savoir la majorité du capital des quatre filiales de ladite société que sont Elf-Aquitaine Production, Elf-Antar France, Elf-Gabon SA et Elf-Congo SA, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 73 B du traité CE (devenu article 56 CE). 2) La République française est condamnée aux dépens. 3) Le royaume d'Espagne et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord supportent leurs propres dépens

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Document n° 5 : CC, 5 août 2004, déc. n° 2004-501 DC, Service public de l'électricité et du gaz et entreprises électriques et gazières, Rec., p. 134 (JORF du 11 août 2004, p. 14337).

Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 modifiée sur la nationalisation de l'électricité et du gaz ; Vu la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public ; Vu la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 modifiée relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ; Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 modifiée relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ; Vu la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 modifiée relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie ; […] Sur les articles 6, 7, 9, 10 et 24 : 11. Considérant que l'article 6 de la loi déférée fixe les règles tendant à assurer l'indépendance des organes de direction des gestionnaires des réseaux de transport d'électricité et de gaz par rapport aux entreprises exerçant des activités de production ou de fourniture de ces énergies ; que l'article 7 confère au gestionnaire du réseau de transport d'électricité la forme de société anonyme dont le capital est détenu par l'Etat, par Electricité de France ou par d'autres entreprises ou organismes du secteur public ; que les articles 9 et 10 prévoient le transfert des ouvrages et des biens liés au transport d'électricité au gestionnaire du réseau ; que l'article 24 procède, quant à lui, à la transformation d'Electricité de France et de Gaz de France en sociétés dont l'Etat détient plus de 70 % du capital et qui sont régies par les lois applicables aux sociétés anonymes, sauf dispositions législatives contraires ; 12. Considérant que les auteurs des saisines soutiennent qu'Electricité de France et Gaz de France constituent des services publics nationaux au sens du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ; qu'ils font grief à la loi de ne comporter aucune garantie quant au maintien de ces entreprises dans le secteur public ; qu'ils estiment qu'elle abandonne aux organes dirigeants des réseaux de transport d'électricité ou de gaz le pouvoir de céder des actifs essentiels ; qu'ils affirment enfin que les articles concernant les transferts d'ouvrages et de biens méconnaissent les exigences de l'article

17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; 13. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 : « Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité » ; que l'article 34 de la Constitution confère au législateur compétence pour fixer « les règles concernant... les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé » ; 14. Considérant qu'en maintenant aux sociétés nouvellement créées les missions de service public antérieurement dévolues aux personnes morales de droit public Electricité de France et Gaz de France dans les conditions prévues par les lois du 8 avril 1946, du 10 février 2000 et du 3 janvier 2003 susvisées, le législateur a confirmé leur qualité de services publics nationaux ; qu'il a garanti, conformément au neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la participation majoritaire de l'Etat ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public dans le capital de ces sociétés ; que l'abandon de cette participation majoritaire ne pourrait résulter que d'une loi ultérieure ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des prescriptions constitutionnelles précitées ne saurait être accueilli ; 15. Considérant, en second lieu, que le réseau public de transport d'électricité, dont la consistance est déterminée par l'article 12 de la loi du 10 février 2000, est confié à un seul gestionnaire dont le capital appartient en totalité au secteur public ; qu'il résulte des articles 14 et 15 de la même loi que le gestionnaire devra entretenir et développer ce réseau et ne pourra céder des actifs ou des ouvrages qui seraient nécessaires à son bon fonctionnement, à sa sécurité ou à sa sûreté ; que le transfert d'ouvrages constitutifs de ce réseau à un seul gestionnaire n'est de nature à porter atteinte ni à la continuité du service public ni au patrimoine de l'Etat ; 16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que manquent en fait les griefs tirés de ce que la loi procéderait indirectement à une privatisation et conduirait à une spoliation de la collectivité nationale ;

[…] D É C I D E : […] Article 2.- Ne sont pas contraires à la Constitution les articles 1er, 4, 6, 7, 9, 10, 17 et 24 de ladite loi. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

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Document n° 6 : CC, Décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006, Loi relative au secteur de

l'énergie (JORF du 8 décembre 2006, p. 18544).

Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le traité instituant la Communauté européenne, notamment son article 86 ; Vu la directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 96/92/CE ; Vu la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 96/30/CE ; Vu la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 modifiée sur la nationalisation de l'électricité et du gaz ; Vu la loi n° 86-912 du 6 août 1986 modifiée relative aux modalités des privatisations, notamment son titre II ; Vu la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 de privatisation, notamment son article 2 ; Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 modifiée relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ; Vu la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie ; Vu la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2004-501 DC du 5 août 2004 ; Vu la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique ; Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 22 novembre 2006 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative au secteur de l'énergie ; qu'ils contestent la conformité à la Constitution de son article 39 ; qu'il y a également lieu pour le Conseil constitutionnel d'examiner son article 17 ;

Sur l’article 17 : 2. Considérant que l'article 17 de la loi déférée modifie l'article 66 de la loi du 13 juillet 2005 susvisée relatif aux tarifs réglementés de vente de l'électricité et y insère un article 66-1 ayant le même objet pour le gaz naturel ; que le I des articles 66 et 66-1 rend ces tarifs applicables, pour un site donné, aux consommateurs non domestiques si ceux-ci ou une autre personne n'ont pas, sur ce site, fait usage de leur liberté de choisir un fournisseur d'énergie ; que le II de ces mêmes articles rend les tarifs réglementés applicables aux consommateurs domestiques si ceux-ci n'ont pas eux-mêmes exercé leur liberté de choix sur le site concerné ; que le III de ces mêmes articles oblige notamment les opérateurs historiques qui fournissent, pour un site donné, l'une des deux sources d'énergie à proposer aux consommateurs, à l'exception des plus importants, une offre au tarif réglementé pour les deux sources d'énergie dans les conditions prévues par le I et le II ; qu'en particulier, cette offre doit être faite aux consommateurs domestiques pour l'alimentation de nouveaux sites de consommation ; que l'ensemble de ces obligations n'est pas limité dans le temps ; 3. Considérant que ces dispositions s'insèrent dans une loi ayant pour objet de transposer les directives du 26 juin 2003 susvisées concernant le marché intérieur de l'électricité ainsi que celui du gaz naturel ; […] 8. Considérant qu'en vertu du 1 des articles 3 des directives susvisées, les États membres doivent veiller à ce que les entreprises d'électricité ou de gaz naturel « soient exploitées en vue de réaliser un marché concurrentiel » ; qu'ils doivent s'abstenir de toute discrimination pour ce qui est des droits et des obligations de ces entreprises ; que, si le 2 des mêmes articles prévoit que les États membres peuvent imposer des obligations à ces entreprises dans l'intérêt économique général, notamment en matière tarifaire, ces obligations doivent se rattacher clairement à un objectif de service public, être non discriminatoires et garantir un égal accès aux consommateurs nationaux ; 9. Considérant que les dispositions de l'article 17 de la loi déférée concernent les tarifs réglementés, qui se distinguent des tarifs spéciaux institués à des fins sociales pour le gaz par l'article 14 de la même loi et pour l'électricité par l'article 4 de la loi du 10 février 2000 susvisée ; qu'elles ne se bornent pas à appliquer les tarifs réglementés aux contrats en cours mais imposent aux opérateurs historiques du secteur de l'énergie, et à eux seuls, des obligations tarifaires permanentes, générales et étrangères à la poursuite d'objectifs de service public ; qu'il s'ensuit qu'elles méconnaissent manifestement l'objectif d'ouverture des marchés concurrentiels de l'électricité et du gaz naturel fixé par les directives précitées, que le titre premier de la loi déférée a pour objet de transposer ; qu'il y a lieu, dès lors, de déclarer contraires à l'article 88-1 de la Constitution

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les II et III des nouveaux articles 66 et 66-1 de la loi du 13 juillet 2005 susvisée, ainsi que, par voie de conséquence, les mots « non domestique » figurant dans leur I concernant les contrats en cours ; Sur l'article 39 : […] 11. Considérant que les députés et sénateurs auteurs des recours estiment que cet article 39 serait contraire au neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et qu'il méconnaîtrait la libre administration des collectivités territoriales, la liberté contractuelle et la continuité du service public ; En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 : 12. Considérant que, selon les requérants, le neuvième alinéa du Préambule de 1946 fait obstacle au transfert de la société Gaz de France au secteur privé ; qu'ils font valoir, d'une part, que cette société conserve les caractéristiques d'un service public national en raison des missions qui lui sont confiées et notamment de l'obligation permanente qui lui est faite de fournir du gaz naturel à un tarif réglementé ; qu'ils estiment, d'autre part, que Gaz de France continue à bénéficier d'un monopole de fait tant en matière de transport que de distribution ; qu'ils soutiennent, à titre subsidiaire, que son transfert au secteur privé ne saurait en tout état de cause intervenir avant le 1er juillet 2007, date de l'ouverture à la concurrence du marché de la fourniture de gaz naturel aux clients domestiques ; 13. Considérant qu'aux termes du neuvième alinéa du Préambule de 1946 : « Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité » ; que l'article 34 de la Constitution confère au législateur compétence pour fixer « les règles concernant... les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé » ; - Quant à l'existence d'un service public national : 14. Considérant que, si la nécessité de certains services publics nationaux découle de principes ou de règles de valeur constitutionnelle, il appartient au législateur ou à l'autorité réglementaire, selon les cas, de déterminer les autres activités qui doivent être ainsi qualifiées, en fixant leur organisation au niveau national et en les confiant à une seule entreprise ; que le fait qu'une activité ait été érigée en service public national sans que la Constitution l'ait exigé ne fait pas obstacle au transfert au secteur privé de l'entreprise qui en est chargée ; que, toutefois, ce transfert suppose que le législateur prive ladite entreprise des caractéristiques qui en faisaient un service public national ; 15. Considérant que, par sa décision du 5 août 2004 susvisée, le Conseil constitutionnel a constaté que Gaz de France conservait la qualité d'un service public national par

détermination de la loi ; qu'en effet, le législateur avait maintenu à cette seule entreprise les missions de service public qui lui étaient antérieurement dévolues en ce qui concerne la fourniture de gaz naturel aux particuliers ; que le neuvième alinéa du Préambule de 1946 était respecté dès lors que la participation de l'État ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public restait majoritaire dans le capital de cette société ; que l'abandon de cette participation majoritaire ne pouvait résulter que d'une loi ultérieure privant Gaz de France de son caractère de service public national ; 16. Considérant, en premier lieu, que l'article 3 de la loi déférée, combiné avec son article 44, met fin, à compter du 1er juillet 2007, à l'exclusivité dont bénéficiait Gaz de France pour la fourniture de gaz naturel aux particuliers ; 17. Considérant, en deuxième lieu, que les obligations de service public définies par l'article 16 de la loi du 3 janvier 2003 susvisée s'imposent non seulement à Gaz de France, mais encore à l'ensemble des entreprises concurrentes intervenant dans le secteur du gaz naturel ; qu'il en est ainsi en ce qui concerne les obligations de service public fixées par la loi, au niveau national, sur chacun des segments de ce secteur d'activité ; 18. Considérant que, si l'article 29 de la loi déférée impose à Gaz de France des sujétions en termes de péréquation, en ce qui concerne les tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution, l'activité de distribution du gaz naturel constitue un service public local et non national ; qu'en outre, en vertu du même article, l'obligation de péréquation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution « à l'intérieur de la zone de desserte de chaque gestionnaire » s'impose non seulement à Gaz de France, mais aussi aux distributeurs non nationalisés ; 19. Considérant, enfin, que le grief tiré de ce que le législateur aurait conservé à Gaz de France son caractère de service public national en obligeant cette société à proposer à titre permanent un tarif réglementé de vente doit être écarté compte tenu de la censure des dispositions précitées de l'article 66-1 inséré dans la loi du 13 juillet 2005 susvisée par l'article 17 de la loi déférée ; 20. Considérant qu'il ressort de ce qui précède que la loi déférée fait perdre à Gaz de France, à compter du 1er juillet 2007, son caractère de service public national ; - Quant à l'existence d'un monopole de fait : 21. Considérant que la notion de monopole de fait mentionnée au neuvième alinéa du Préambule de 1946 doit s'entendre compte tenu de l'ensemble du marché à l'intérieur duquel s'exercent les activités des entreprises ainsi que de la concurrence qu'elles affrontent sur ce marché de la part de l'ensemble des autres entreprises ; qu'on ne saurait prendre en compte les positions privilégiées que telle ou telle entreprise détient momentanément ou à l'égard d'une production qui ne représente qu'une partie de ses activités ;

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22. Considérant que les activités de transport de gaz naturel ont été exclues de la nationalisation et ouvertes à tout opérateur par la loi du 2 août 1949 portant modification de la loi du 8 avril 1946 susvisée ; 23. Considérant que les activités de distribution ont été confiées non seulement à Gaz de France, mais aussi à des distributeurs non nationalisés par la loi du 8 avril 1946 ; que, depuis la loi du 13 juillet 2005 susvisée, ces activités sont ouvertes, en dehors des zones de desserte historique de ces opérateurs, à la concurrence de l'ensemble des entreprises agréées ; 24. Considérant, par ailleurs, qu'ont également été exclues de la nationalisation en 1949 les activités de production de gaz naturel ainsi que celles de stockage et d'exploitation d'installations de gaz naturel liquéfié ; que les monopoles d'importation et d'exportation du gaz naturel ont été supprimés par la loi du 3 janvier 2003 susvisée ; que, depuis le 1er juillet 2004, les utilisateurs de gaz autres que les clients domestiques peuvent s'adresser au fournisseur de leur choix ; que la loi déférée met fin, à compter du 1er juillet 2007, à tout monopole de fourniture de gaz, y compris pour les clients domestiques ; qu'enfin, le gaz naturel constitue une énergie substituable ; 25. Considérant, dans ces conditions, que la société Gaz de France ne peut être regardée comme une entreprise dont l'exploitation constitue un monopole de fait au sens du neuvième alinéa du Préambule de 1946 ; - Quant à la date du transfert au secteur privé de Gaz de France : 26. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, ce n'est qu'au 1er juillet 2007 que Gaz de France perdra sa qualité de service public national ; que, dès lors, le transfert effectif au secteur privé de cette entreprise ne pourra prendre effet avant cette date ; 27. Considérant que, sous la réserve énoncée au considérant précédent, le grief tiré de la violation du neuvième alinéa du Préambule de 1946 doit être écarté ; . En ce qui concerne les griefs tirés de l'atteinte à la libre administration des collectivités territoriales et à la liberté contractuelle : 28. Considérant que les requérants soutiennent qu'en maintenant de façon illimitée l'obligation, faite aux collectivités territoriales ayant concédé à Gaz de France la distribution publique de gaz naturel, de renouveler leur concession avec cette entreprise, tout en privant cette dernière de son caractère public, le législateur a porté à la libre administration de ces collectivités et à la liberté contractuelle une atteinte disproportionnée que ne justifie désormais aucun motif d'intérêt général ; 29. Considérant que, si le législateur peut, sur le fondement des articles 34 et 72 de la Constitution, assujettir les collectivités territoriales ou leurs groupements à des

obligations, c'est à la condition notamment que celles-ci concourent à des fins d'intérêt général ; qu'il peut aux mêmes fins déroger au principe de la liberté contractuelle, qui découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; 30. Considérant que le législateur n'a pas remis en cause l'exclusivité des concessions de distribution publique de gaz dont bénéficient Gaz de France et les distributeurs non nationalisés dans leur zone de desserte historique en vertu des dispositions combinées des articles 1er et 3 de la loi du 8 avril 1946 susvisée, ainsi que de l'article 25-1 de la loi du 3 janvier 2003 susvisée et du III de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ; que seules les communes ou leurs groupements qui, au 14 juillet 2005, ne disposaient pas d'un réseau public de distribution de gaz naturel ou dont les travaux de desserte n'étaient pas en cours de réalisation, peuvent concéder la distribution publique de gaz à une entreprise agréée de leur choix ; 31. Considérant, toutefois, que cette limitation de la libre administration des collectivités territoriales et de la liberté contractuelle trouve sa justification dans la nécessité d'assurer la cohérence du réseau des concessions actuellement géré par Gaz de France et de maintenir la péréquation des tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution ; que les griefs invoqués doivent, dès lors, être rejetés ; . En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance du principe de continuité du service public : 32. Considérant que les requérants soutiennent qu'en s'abstenant de prévoir les mécanismes de nature à empêcher Gaz de France, après son transfert au secteur privé, de céder les actifs stratégiques affectés à ses missions de service public, le législateur n'a pas garanti le respect des exigences constitutionnelles qui s'attachent à la continuité du service public ; 33. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 16 de la loi du 3 janvier 2003 susvisée, les diverses obligations de service public définies par le législateur et relatives notamment à la « continuité de la fourniture de gaz », à la « sécurité d'approvisionnement », à la « sécurité des personnes et des installations en amont du raccordement des consommateurs finals », au « développement équilibré du territoire » et à la « fourniture de gaz naturel au tarif spécial de solidarité » s'imposent à Gaz de France comme à l'ensemble des autres opérateurs du secteur gazier ; que le respect de ces obligations est garanti par les contrôles et les sanctions prévus notamment à l'article 31 de la loi du 3 janvier 2003 précitée ; 34. Considérant, en deuxième lieu, que l'article 24-1 inséré par l'article critiqué dans la loi du 9 août 2004 susvisée prévoit qu'afin de préserver « les intérêts essentiels de la France » dans le secteur de l'énergie, et notamment « la continuité et la sécurité d'approvisionnement en énergie », un décret prononcera la transformation d'une action ordinaire de l'État au capital de Gaz de France en une « action spécifique » ; que cette dernière sera régie, notamment en ce qui concerne les

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droits dont elle est assortie, par les dispositions de l'article 10 de la loi du 6 août 1986 susvisée ; que l'État pourra ainsi s'opposer, en particulier, « aux décisions de cession d'actifs ou de certains types d'actifs de la société ou de ses filiales ou d'affectation de ceux-ci à titre de garantie » qui seraient de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels de la Nation ; que seront notamment concernées les décisions de l'entreprise ou de ses filiales relatives aux canalisations de transport de gaz naturel, aux actifs liés à sa distribution, à son stockage souterrain, ainsi qu'aux installations de gaz naturel liquéfié ; 35. Considérant, enfin, qu'en cas de circonstances exceptionnelles, les autorités compétentes de l'État pourront, en tant que de besoin, procéder, dans le cadre de leurs pouvoirs de police administrative ou en vertu des dispositions du code de la défense, à toute réquisition de personnes, de biens et de services ; 36. Considérant, dès lors, que le principe de continuité du service public n'est pas méconnu par l'article 39 de la loi déférée ;

37. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sous la réserve énoncée au considérant 26, l'article 39 de la loi déférée n'est pas contraire à la Constitution ; 38. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution, D É C I D E : Article premier.- Sont déclarés contraires à la Constitution, à l'article 17 de la loi relative au secteur de l'énergie : les II et III du nouvel article 66 de la loi du 13 juillet 2005 susvisée, ainsi que les mots : « non domestique » figurant à son I, les II et III du nouvel article 66-1 de la même loi, ainsi que les mots : « non domestique » figurant à son I. Article 2.- Sont déclarés non contraires à la Constitution : le surplus de son article 17 ; sous la réserve énoncée au considérant 26, son article 39. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

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Document n° 7 : Loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie (JORF n° 284 du 8 décembre 2006, p. 18531)

Titre Ier : Ouverture des marchés et libre choix des consommateurs […] Article 14 I. - L'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par un V ainsi rédigé : « V. - Les clients domestiques ayant droit à la tarification spéciale "produit de première nécessité mentionnée à l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée bénéficient également, à leur demande, pour une part de leur consommation, d'un tarif spécial de solidarité applicable à la fourniture de gaz naturel et aux services qui lui sont liés. Les modalités d'application de la tarification spéciale "produit de première nécessité prévues au dernier alinéa du I du même article 4 sont applicables à la mise en place du tarif spécial de solidarité, notamment pour la transmission des fichiers aux fournisseurs de gaz naturel. Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent V, en particulier pour les clients domestiques résidant dans un immeuble d'habitation chauffé collectivement. » II. - Après le treizième alinéa de l'article 16 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « - la fourniture de gaz naturel au tarif spécial de solidarité mentionné au V de l'article 7 de la présente loi ; ». III. - Après l'article 16-1 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, il est inséré un article 16-2 ainsi rédigé : « Art. 16-2. - Les charges imputables aux obligations de service public assignées aux fournisseurs de gaz naturel portant sur la fourniture de gaz naturel à un tarif spécial de solidarité sont compensées selon les dispositions du présent article. Elles comprennent les pertes de recettes et les coûts supportés par les fournisseurs de gaz naturel en raison de la mise en oeuvre du tarif spécial de solidarité mentionné au V de l'article 7. « Les charges mentionnées au premier alinéa sont calculées sur la base d'une comptabilité tenue par les fournisseurs qui les supportent. Cette comptabilité, établie selon des règles définies par la Commission de régulation de l'énergie, est contrôlée aux frais des opérateurs qui supportent ces charges par leur commissaire aux comptes ou, pour les régies, par leur comptable public. La Commission de régulation de l'énergie peut, aux frais de l'opérateur, faire contrôler cette comptabilité par un organisme indépendant qu'elle choisit.

« La compensation de ces charges, au profit des opérateurs qui les supportent, est assurée par des contributions dues par les fournisseurs de gaz naturel. Le montant de ces contributions est calculé au prorata de la quantité de gaz naturel vendue par ces fournisseurs aux consommateurs finals. « Le montant de la contribution applicable à chaque kilowattheure est calculé de sorte que les contributions couvrent l'ensemble des charges visées au premier alinéa ainsi que les frais de gestion exposés par la Caisse des dépôts et consignations. Le ministre chargé de l'énergie arrête ce montant chaque année sur proposition de la Commission de régulation de l'énergie. A défaut d'entrée en vigueur d'un nouvel arrêté, le dernier montant fixé est applicable aux exercices suivants. « La contribution applicable à chaque kilowattheure ne peut dépasser 2 % du tarif réglementé de vente du kilowattheure, hors abonnement et hors taxes, applicable à un consommateur final domestique chauffé individuellement au gaz naturel. « Les fournisseurs, pour lesquels le montant de la contribution due est supérieur au coût des charges de service public mentionnées au premier alinéa qu'ils supportent, versent périodiquement à la Caisse des dépôts et consignations la différence entre cette contribution et ce coût. La Caisse des dépôts et consignations reverse, selon la même périodicité, aux fournisseurs pour lesquels le montant de la contribution due est inférieur au coût des charges de service public mentionnées au premier alinéa supportées, la différence entre ce coût et cette contribution. « Sans préjudice des sanctions prévues à l'article 31, en cas de défaut ou d'insuffisance de paiement de la différence devant être versée par un fournisseur dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle elle est due, la Commission de régulation de l'énergie adresse à ce fournisseur une lettre de rappel assortie d'une pénalité de retard dont le taux est fixé à 10 % du montant dû. « Lorsque le montant de la totalité des contributions dues par les fournisseurs ne correspond pas au montant constaté des charges de l'année mentionnées au premier alinéa qu'ils supportent, la régularisation intervient l'année suivante au titre des charges dues pour cette année. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées au cours de l'année, elles sont ajoutées au montant des charges de l'année suivante. « Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent article. »

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IV. - Dans le premier alinéa du II de l'article 31 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée, après la référence : « 16-1, », est insérée la référence : « 16-2, ». Article 15 I. - Après l'article 30 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, il est inséré un article 30-1 ainsi rédigé : « Art. 30-1. - I. - Tout consommateur final d'électricité bénéficie d'un tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché pour le ou les sites pour lesquels il en fait la demande écrite à son fournisseur avant le 1er juillet 2007. Ce tarif est applicable de plein droit pour une durée de deux ans à la consommation finale des sites pour lesquels la contribution prévue au I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée est acquittée. « Ce tarif s'applique de plein droit aux contrats en cours à compter de la date à laquelle la demande est formulée. Il s'applique également aux contrats conclus postérieurement à la demande écrite visée au premier alinéa du présent I, y compris avec un autre fournisseur. Dans tous les cas, la durée de fourniture au niveau du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché ne peut excéder deux ans à compter de la date de la première demande d'accès à ce tarif pour chacun des sites de consommation. « II. - Le tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché, qui ne peut être inférieur au tarif réglementé de vente hors taxes applicable à un site de consommation présentant les mêmes caractéristiques, est établi par arrêté du ministre chargé de l'énergie, pris au plus tard un mois après la publication de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie. Ce tarif ne peut être supérieur de plus de 25 % au tarif réglementé de vente hors taxes applicable à un site de consommation présentant les mêmes caractéristiques. » II. - Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 31 décembre 2008, un rapport sur la formation des prix sur le marché de l'électricité et dressant le bilan de l'application de la création du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché. Ce rapport analyse les effets de ce dispositif et envisage, s'il y a lieu, sa prolongation. […] Article 17 I. - L'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est ainsi rédigé : « Art. 66. - I. - Un consommateur final [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006] d'électricité bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés au premier

alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée pour la consommation d'un site pour lequel il n'use pas de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi, à la condition qu'il n'ait pas été fait précédemment usage de cette faculté, pour ce site, par ce consommateur ou par une autre personne. « II. - [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006.] « III. - [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006.] » II. - Après l'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée, il est inséré un article 66-1 ainsi rédigé : « Art. 66-1. - I. - Un consommateur final [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006] de gaz naturel bénéficie des tarifs réglementés de vente de gaz naturel mentionnés à l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie pour la consommation d'un site pour lequel il n'use pas de la faculté prévue à l'article 3 de la même loi, à la condition qu'il n'ait pas été fait précédemment usage de cette faculté, pour ce site, par ce consommateur ou par une autre personne. « II. - [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006.] « III. - [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006.] » III. - Le I de l'article 67 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 précitée est ainsi modifié : 1° Le premier alinéa est complété par les mots et trois phrases ainsi rédigées : « , telle que définie par le II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts. Une société industrielle peut demander à la Commission de régulation de l'énergie l'arrêt de la facturation de la contribution au service public de l'électricité, pour un ou plusieurs sites de consommation, dès lors que les prévisions de cette société montrent qu'elle aurait déjà acquitté au titre de l'année considérée un montant égal ou supérieur au montant total plafonné dû au titre de l'année précédente. La régularisation intervient, le cas échéant, lorsque la valeur ajoutée de l'année considérée est connue. Toutefois, si le montant de cette régularisation est supérieur à 20 % du montant total réellement dû pour l'année, la société est redevable de la pénalité de retard mentionnée au I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée. » ;

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2° Le second alinéa est ainsi rédigé : « Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent I, notamment les modalités de liquidation des droits par les services de la Commission de régulation de l'énergie. Ce décret entre en vigueur au 1er janvier 2006. » […] Titre II : Dispositions relatives à la distribution de l'électricité et du gaz […] Article 29 I. - Le premier alinéa du III de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les tarifs d'utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel autres que ceux concédés en application de l'article 25-1 de la présente loi sont péréqués à l'intérieur de la zone de desserte de chaque gestionnaire. » II. - Le I de l'article 26 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces réseaux appartiennent aux collectivités territoriales ou à leurs groupements, visés, en ce qui concerne le gaz, au sixième alinéa du I de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales. » Titre III : Dispositions relatives au capital de Gaz de France et au contrôle de l'État Article 39 I. - L'article 24 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi rédigé : « Art. 24. - Electricité de France et Gaz de France sont des sociétés anonymes. L'Etat détient plus de 70 % du capital d'Electricité de France et plus du tiers du capital de Gaz de France. »

II. - Après l'article 24 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée, sont insérés deux articles 24-1 et 24-2 ainsi rédigés : « Art. 24-1. - En vue de préserver les intérêts essentiels de la France dans le secteur de l'énergie, et notamment la continuité et la sécurité d'approvisionnement en énergie, un décret prononce la transformation d'une action ordinaire de l'Etat au capital de Gaz de France en une action spécifique régie, notamment en ce qui concerne les droits dont elle est assortie, par les dispositions de l'article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations. « Art. 24-2. - Le ministre chargé de l'énergie désigne auprès de Gaz de France ou de toute entité venant aux droits et obligations de Gaz de France et des sociétés issues de la séparation juridique imposée à Gaz de France par les articles 5 et 13 de la présente loi un commissaire du Gouvernement qui assiste, avec voix consultative, aux séances du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de la société, et de ses comités, et peut présenter des observations à toute assemblée générale. » III. - La liste annexée à la loi n° 93-923 du 19 juillet 1993 de privatisation est complétée par les mots : « Gaz de France SA ». Article 40 Le II de l'article 12 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 précitée est ainsi rédigé : « II. - La société gestionnaire de réseaux de transport de gaz naturel issue de la séparation juridique imposée à Gaz de France par l'article 5 est régie, sauf dispositions législatives contraires, par les lois applicables aux sociétés anonymes. Son capital ne peut être détenu que par Gaz de France, l'Etat ou des entreprises ou organismes du secteur public. » […] Titre V : Dispositions diverses et transitoires Article 44 Les dispositions (…) du I et du II de l'article 17 (…) entrent en vigueur le 1er juillet 2007.