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L’ACTION FRANÇAISE COLL COLL OQ OQ UE : UE : JACQ CQ UES B UES B AINVILLE, AINVILLE, JOURN JOURN ALISTE HIST ALISTE HIST ORIEN ORIEN p. 11 11 Sécurité Sécurité : Sar Sark o o est ar est ar ri ri vé... vé... PAGE 4 3:HIKLKJ=XUXUUU:?c@r@h@c@k; M 01093 - 2772 - F: 3,00 E Crise laitière Crise laitière : Quel modèle Quel modèle d'a d'ag ricultur ricultur e ? e ? PAGE 5 POLITIQUE POLITIQUE FRANCE FRANCE Musée Musée : Le temple Le temple de de Tintin et Her Tintin et Her PAGE 12 CUL CUL TURE TURE 3 s N° 2772 63 e année Du 4 au 17 juin 2009 Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois www.actionfrancaise.net 2 0 0 0 « Tout ce qui est national est nôtre » DU LUNDI AU DIMANCHE En 2004, un petit homme aussi épais de corps que d'esprit exerçait la fonction de Premier ministre. Il s'appelait – mais qui s'en souvient encore ? - Jean-Pierre Raffarin ; il avait imaginé d'enlever le lundi de Pentecôte du nombre des jours fériés annuels. C'était certes au nom d'une de ces bonnes intentions dont l'enfer est pavé : il s'agissait d'offrir une journée de travail en solidarité avec les per- sonnes âgées et dépendantes qui avaient souffert de la cani- cule de 2003. Outre le fait que cela rappelait trop l'institution de la vignette-auto par Paul Ramadier prétendument desti- née elle aussi à aider les per- sonnes âgées qui n'en virent jamais un sou, M. Raffarin n'avait pas songé une minute aux traditions profondément ancrées dans le cœur des Français que le choix de cette journée allait bousculer. Le lundi de Pentecôte est depuis toujours un jour de réunions familiales, mais aussi, souli- gnant la solennité de la fête de Pentecôte, un jour consacré par les catholiques à de gran- dioses pèlerinages, surtout entre Paris et Chartres. Il faut dire que nul ni à droite ni à gauche ne mit beaucoup de zèle à appliquer ou à faire appliquer la loi, qui tomba en désuétude en moins de trois ans. Ce que tout le monde ne semble pas savoir puisque Le Figaro du 29 mai s'est cru obligé de rappeler en première page que le lundi de Pentecôte « est redevenu férié ». Ainsi vont les lois de la répu- blique, toujours déconnectées des réalités profondes de la vie française. Il en sera de même si le malheur veut qu'une loi survienne autorisant le travail le dimanche. Mieux vaudrait donc y renoncer tout de suite. Nous y veillerons... M.F. O n disait naguère qu'en France on n'avait pas de pétrole, mais qu'on avait des idées. On en a encore certes mais, dans le monde artistique officiel du moins, les pires dépassent de beaucoup les meilleures. C'est ainsi qu'au ré- cent Festival de Cannes, notre pays s'est une fois de plus dis- tingué dans l'immonde, mais cette fois au-delà de tout ce que l'on peut imaginer. Insoutenable Charlotte Gainsbourg, qui n'est plus la petite et talentueuse Effrontée de 1985, a obtenu le prix d'interprétation féminine pour son rôle dans un film obs- cène dont le titre même est tout un programme, Antichrist. On l'y voit, dit-on, s'y livrer à tous les actes pornographiques, ac- couplements, torture, automu- tilation, avant d'émasculer son partenaire. Elle s'est d'ailleurs flattée d'avoir fait ce qui aurait choqué même son père (qui pourtant...). Le scénario est « juste ridi- cule », écrit Jean-Christophe Buisson dans Le Figaro-Magazine du 29 mai, ajoutant : « Certaines images sont insoutenables et son propos incompréhensible. » Il est évident que cette "œuvre" abondamment sifflée par les cri- tiques dont les plus complaisants éclataient de rire, tandis que les plus sensés, pris de nausée, quit- taient la salle, a été sciemment et gratuitement voulue par son réalisateur, Lars von Trier, comme une charge violente contre le christianisme, comme une insulte délibérée à la mo- rale même simplement natu- relle. Signe des temps... Le bonheur des détraqués Autre cas montrant que l'ima- gination dans les médias est réel- lement sans bornes : une grande campagne contre le viol a été lancée sur Internet et sur MTV. Le clip représente une femme très court vêtue qui repousse un homme trop entreprenant. Le plus effarant est que la femme jouant à l'effarouchée n'est autre que Clara Morgane, ancienne égérie du porno. Veut-on faire croire aux Français, plus spé- cialement aux jeunes, que la pornographie peut être une ga- rantie contre le viol ? Nul n'ignore pourtant que l'affichage de plus en plus intensif de re- vues ou de videos porno dans les kiosques offre en permanence à tous les détraqués invétérés ou intermittents l'occasion de fan- tasmer sur les diverses manières de "respecter" la femme. De là au crime sexuel, la distance est vite franchie. Une société qui s'enferre dans l'abject et le morbide est mûre pour sombrer dans l'animalité.. MICHEL FROMENTOUX SOCIÉTÉ Le porno conjurant le viol ? Le cinéma verse dans l'abject tandis que la publicité télévisée confie à une actrice X la mission de protéger les femmes... LES 6 ET 7 JUIN Se décider en fonction de la France P P A A GE 3 GE 3 © Hergé-Moulinsart 2009

DU LUNDI LES 6 ET 7 JUIN Se décider en fonction de la France...de Tintin et Hergé PAGE 12 CULTURE 3 s N 2772 63e année Du 4 au 17 juin 2009 Paraît provisoirement les premier et

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Page 1: DU LUNDI LES 6 ET 7 JUIN Se décider en fonction de la France...de Tintin et Hergé PAGE 12 CULTURE 3 s N 2772 63e année Du 4 au 17 juin 2009 Paraît provisoirement les premier et

L’ACTION FRANÇAISECOLLCOLLOQOQUE :UE : JJAACQCQUES BUES BAINVILLE,AINVILLE, JOURNJOURNALISTE HISTALISTE HISTORIENORIEN pp.. 1111

Sécur i téSécur i té ::

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■■ C U LC U L T U R ET U R E

3 s ❙ N° 2772 ❙ 63e année ❙ Du 4 au 17 juin 2009 ❙ Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois ❙ www.actionfrancaise.net

2000« To u t c e q u i e s t n a t i o n a l e s t n ô t re »

DU LUNDI AU DIMANCHEEn 2004, un petit homme aussiépais de corps que d'espritexerçait la fonction de Premierministre. Il s'appelait – maisqui s'en souvient encore ? -Jean-Pierre Raffarin ; il avaitimaginé d'enlever le lundi dePentecôte du nombre des joursfériés annuels.C'était certes au nom d'une deces bonnes intentions dontl'enfer est pavé : il s'agissaitd'offrir une journée de travailen solidarité avec les per-sonnes âgées et dépendantesqui avaient souffert de la cani-cule de 2003. Outre le fait quecela rappelait trop l'institutionde la vignette-auto par PaulRamadier prétendument desti-née elle aussi à aider les per-sonnes âgées qui n'en virentjamais un sou, M. Raffarinn'avait pas songé une minuteaux traditions profondémentancrées dans le cœur desFrançais que le choix de cettejournée allait bousculer. Lelundi de Pentecôte est depuistoujours un jour de réunionsfamiliales, mais aussi, souli-gnant la solennité de la fêtede Pentecôte, un jour consacrépar les catholiques à de gran-dioses pèlerinages, surtoutentre Paris et Chartres.Il faut dire que nul ni à droiteni à gauche ne mit beaucoupde zèle à appliquer ou à faireappliquer la loi, qui tomba endésuétude en moins de troisans. Ce que tout le monde nesemble pas savoir puisqueLe Figaro du 29 mai s'est cruobligé de rappeler en premièrepage que le lundi de Pentecôte« est redevenu férié ».Ainsi vont les lois de la répu-blique, toujours déconnectéesdes réalités profondes de la viefrançaise. Il en sera de mêmesi le malheur veut qu'une loisurvienne autorisant le travaille dimanche. Mieux vaudraitdonc y renoncer tout de suite.Nous y veillerons...

M.F.

On disait naguère qu'enFrance on n'avait pas depétrole, mais qu'on avait

des idées. On en a encore certesmais, dans le monde artistiqueofficiel du moins, les pires dépassent de beaucoup lesmeilleures. C'est ainsi qu'au ré-cent Festival de Cannes, notrepays s'est une fois de plus dis-tingué dans l'immonde, maiscette fois au-delà de tout ce quel'on peut imaginer.

Insoutenable

Charlotte Gainsbourg, quin'est plus la petite et talentueuseEffrontée de 1985, a obtenu le

prix d'interprétation fémininepour son rôle dans un film obs-cène dont le titre même est toutun programme, Antichrist. Onl'y voit, dit-on, s'y livrer à tousles actes pornographiques, ac-couplements, torture, automu-tilation, avant d'émasculer sonpartenaire. Elle s'est d'ailleursflattée d'avoir fait ce qui auraitchoqué même son père (quipourtant...).

Le scénario est « juste ridi-cule », écrit Jean-ChristopheBuisson dans Le Figaro-Magazinedu 29 mai, ajoutant : « Certainesimages sont insoutenables et sonpropos incompréhensible. » Ilest évident que cette "œuvre"

abondamment sifflée par les cri-tiques dont les plus complaisantséclataient de rire, tandis que lesplus sensés, pris de nausée, quit-taient la salle, a été sciemmentet gratuitement voulue par sonréalisateur, Lars von Trier,comme une charge violentecontre le christianisme, commeune insulte délibérée à la mo-rale même simplement natu-relle. Signe des temps...

Le bonheurdes détraqués

Autre cas montrant que l'ima-gination dans les médias est réel-lement sans bornes : une grande

campagne contre le viol a étélancée sur Internet et sur MTV.Le clip représente une femmetrès court vêtue qui repousse unhomme trop entreprenant. Leplus effarant est que la femmejouant à l'effarouchée n'est autreque Clara Morgane, ancienneégérie du porno. Veut-on fairecroire aux Français, plus spé-cialement aux jeunes, que lapornographie peut être une ga-rantie contre le viol ? Nuln'ignore pourtant que l'affichagede plus en plus intensif de re-vues ou de videos porno dans leskiosques offre en permanence àtous les détraqués invétérés ouintermittents l'occasion de fan-tasmer sur les diverses manièresde "respecter" la femme. De làau crime sexuel, la distance estvite franchie.

Une société qui s'enferre dansl'abject et le morbide est mûrepour sombrer dans l'animalité..

MICHEL FROMENTOUX

❏ SOCIÉTÉ

Le porno conjurant le viol ? Le cinéma verse dans l'abject tandis que la publicité télévisée confieà une actrice X la mission de protéger les femmes...

LES 6 ET 7 JUIN

Se décider en fonction

de la France

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2009

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La libéralisation des transportsvoulue et désormais imposéepar l'Union européenne n'est

pas toujours une bonne chose, loins'en faut, sans doute parce qu'elleest faite sans forcément en pré-voir les conséquences sociales...Dernières victimes en date : lestransporteurs routiers français qui,depuis le 1er mai, doivent faireface à l'ouverture du cabotage rou-tier à sept nouveaux pays de l'UE,principalement d'Europe centraleet orientale.

Cabotage

Le cabotage consiste à ache-miner des marchandises d'une villefrançaise à l'autre, et cela sur desparcours souvent mal ou pas des-servis par les trains de fret, par-fois en raison d'un surcoût d'ex-ploitation trop important maisaussi du simple fait qu'il n'existeaucune ligne de chemin de fer.Ainsi, le cabotage permet une"desserte fine" au sein du terri-toire français, et il est difficilede le remplacer dans de nombreuxcas. Mais cette libéralisation ac-crue risque d'avoir un effet per-vers : rendre le ferroutage ou letransport fluvial financièrementmoins attractif, et encombrer da-vantage les routes de France, déjàsurchargées.

Sur le plan social, la situationest encore plus inquiétante, carelle risque d'entraîner la mort denombreuses entreprises et la des-truction de milliers d'emplois . Ef-fectivement, les transporteursfrançais ne sont pas à égalité avecleurs collègues européens, pourla bonne (façon de parler...) et

simple raison que la législationcommunautaire se veut plus "li-bérale" que la nôtre, et qu'elleprivilégie la "liberté du travail"(chère aux constituants de 1791)au détriment des droits de ceuxqui travaillent (dans ce cas pré-cis mais aussi dans beaucoupd'autres).

"Dumping"

Comme le rapporte Le Figaro(2 et 3 mai 2009), « à la diffé-rence des autres pays européens,la France a en effet conservé salégislation du travail pour lesconducteurs de poids lourds. Le droit français comptabilisecomme temps de travail "tout letemps passé au service de l'em-ployeur", alors que la législationeuropéenne exclut les temps d'at-tente qui sont légion dans ce mé-tier. Du coup, un conducteur fran-

çais coûterait 1 000 à 1 200 eu-ros plus cher par mois qu'unconducteur d'un autre pays eu-ropéen. "Les prix des concurrentseuropéens sont 15 à 20 % moinschers que les nôtres dans un sec-teur où les marges sont de 1,5 %",explique Jean-Paul Deneuville,délégué général de la FNTR.Conséquence : les entreprisesfrançaises perdent des parts demarché sur leur sol et ne peu-vent même pas aller caboter àl'étranger puisqu'elles ne sont pascompétitives. »

On voit le problème posé parune législation qui "uniformisesans distinguer", au risque de re-venir sur des "droits sociaux ac-quis" qui, dans ce cas précis, n'ontrien d'injuste ou de choquantquand on connaît le travail deschauffeurs routiers. En somme,la législation de l'Union sembleniveler les droits particuliers, ac-

quis au sein des États qui, tous,ont une histoire sociale différentedans le temps comme dans les ap-plications, au seul motif d'un libre-échange et d'une libre concur-rence qui ne reconnaîtraient plus(ou avec mauvaise grâce) de droitscollectifs catégoriels.

Faisons d'une pierre deux coups !

Néanmoins, il n'y a pas de fa-talité à cette situation et la Francepeut encore, en arguant du prin-cipe de subsidiarité inscrit dansle traité de Maëstricht, légiférerpour protéger ses entreprises,comme le réclament les routiersfrançais. Cela peut aussi s'ac-compagner d'une stratégie visantà favoriser un meilleur et plus fré-quent recours au ferroutage, autransport fluvial et au merroutage,en échange d'un texte législatifprotecteur, ce qui aurait l'avan-tage de diminuer l'impact des ac-tivités de transport sur les réseauxroutiers et l'environnement : d'unepierre deux coups !

Par ailleurds, la France doitaussi savoir dire "non" à la Com-mission européenne quand celle-ci lui enjoint de libéraliser à toutcrin : toute libéralisation n'est pasforcément bonne en soi. Là en-core, ce n'est pas l'idéologie éco-nomique (dans un sens commedans l'autre, car l'étatisme et l'as-sistanat sont tout aussi néfastes)qui doit primer, mais la justeconciliation entre la raison éco-nomique et le cœur social.

JEAN-PHILIPPE CHAUVIN

jpchauvin.typepad.fr/

❚ ÉCONOMIE & MÉDIAS

❚ 2 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

Directeur de 1965 à 2007 : Pierre Pujo (✟)Directeur de la publication : M.G. PujoRédacteur en chef : Michel FromentouxRédacteur graphiste : Grégoire DubostPolitique : Guillaume Chatizel, Jean-Philippe Chauvin,Michel Fromentoux, Nicolas Hainaut,Stéphane PiolencÉtranger : Charles-Henri Brignac, Guy C. Menusier, Pascal NariÉconomie : Henri LetigreEnseignement, famille, société : Stéphane Blanchonnet, Jean-Pierre Dickès, Michel Fromentoux, Aristide Leucate, Frédéric WinclerCulture : Monique Beaumont, Anne Bernet, Renaud Dourges, Gaël Fons,Norbert Multeau, Jean d’Omiac,François Roberday, Alain WaelkensHistoire : Yves Lenormand, Laure Margaillan, René Pillorget, Francis VenantArt de vivre : Pierre ChaumeilChroniques : François Leger, Jean-Baptiste MorvanAbonnements, publicité, promotion : Monique Lainé

10 rue Croix-des-Petit10 rue Croix-des-Petits-Champs-Champs s 75001 Paris75001 Paris

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» COLMATAGE

Les Américains doutent-ils de lafiabilité du Quai d'Orsay ? Vin-cent Jauvert l'avait affirmé surson blog le 30 avril, quinze joursaprès que Le Canard Enchaînéeut publié l'extrait d'un télé-gramme confidentiel touchantaux sanctions contre l'Iran. Selonle collaborateur du Nouvel Ob-servateur, les responsables de ladiplomatie française seraient« apparemment convaincusd'être les cibles d'une opérationconcertée, et menée de l'inté-rieur de la maison, visant à pré-senter la diplomatie françaisecomme excessivement pro-israé-lienne, pour ne pas dire "néocon-servatrice" ». Récidive le 20 mai,où le journal satirique affirmaitque Paris et ses partenaires eu-ropéens n'exigeraient pas commepréalable au renforcement deleurs relations avec Israël la re-connaissance d'un État palesti-nien ou le gel des colonisationsen Cisjordanie. Le 29 mai, leporte-parole du ministère des Af-

faires étrangères a confirméqu'une plainte avait été déposéecontre X afin d'identifier lasource de ces fuites à répétition.

» ACCESSIBILITÉ

Attendu depuis l'adoption d'uneloi en 2005, le décret relatif àl'accessibilité aux handicapés dessites Internet publics est enfinparu au Journal Officiel le16 mai. L'État et les établisse-ments publics devront se confor-mer d'ici deux ans à un référen-tiel d'accessibilité ; les collecti-vités territoriales bénéficierontd'un sursis jusqu'à mai 2012. Lessites défaillants seront inscritsau bout de six mois sur une "listenoire". Une sanction dont la lé-gèreté ne semble pas indisposerla Halde, trop occupée à menerson combat idéologique.

» ROSELYNE TV

En Colombie, une "radio gay" aquitté ses locaux le 20 mai,après que son directeur eut été

menacé de mort. En France, Ca-nal Plus s'engage contre l'"ho-mophobie" avec la bénédictiondu gouvernement : dans le cadredu plan santé des jeunes pré-senté en février 2008, RoselyneBachelot avait lancé un concoursde synopsis ; les quatre scénarioslauréats ont été mis en imageset les premières diffusions inter-viendront les 26 et 27 juin.

» RADIO NUMÉRIQUE

La radio numérique terrestre(RNT) devrait être lancée à Pa-ris, Marseille et Nice en dé-cembre prochain. Selon leConseil supérieur de l'Audiovi-suel, « elle offrira aux auditeursune meilleure qualité d'écoute,l'accès à des données associéesqui complèteront les programmessonores, des possibilités d'enre-gistrement ou de retour en ar-rière dans l'écoute, etc. ». Elleapportera en outre une offre deprogrammes diversifiée. RadioCourtoisie espérait en profiter,mais seule une fréquence en Île

de France lui a été attribuée le26 mai. Déception égalementpour NextRadioTV : tandis queses concurrents pourrontlancer LCI Radio(TF1), RTL L'Équipe(Bertelsmann) et Eu-rope 1 Sport (Lagardère), legroupe devra renoncer dans l'im-médiat à RMC Sport et BFMBourse. Dénonçant une discrimi-nation, il a demandé au CSA dede réexaminer sa présélection.

» LA VOIX DU PAPE

Lancée par Pie XI en février1931, Radio Vatican s'ouvre au-jourd'hui à la publicité. Du6 juin au 27 septembre, elle dif-fusera en cinq langues des spotsdu producteur italien d'électri-cité Enel. D'autres annonceurssuivront. Cela devrait rapporterentre 100 000 et 200 000 eurospar an selon le père FedericoLombardi, directeur de la radioet porte-parole de Benoit XVI.

G.D.

PETAFLOP

L'Allemagne a inauguré le26 mai le supercalculateurle plus puissant d'Europe.Baptisé Jugene, il a été fi-nancé à parité par l'État fé-déral et le land de Rhéna-nie-du-Nord-Westphalie.Bâti autour de composantsIBM, il est exploité par unsystème Linux. Utilisée pourdes simulations scientifiques(étude du climat, recherchesur les batteries, débit depompes à sang...), la ma-chine serait capable d'effec-tuer un million de milliards(un petaflop) d'opérationspar seconde, ce qui la placeau troisième rang mondial.En France, l'ordinateur leplus puissant, implanté auCentre informatique natio-nal de l'Enseignement supé-rieur à Montpellier, stagne à147 000 milliards d'opéra-tions à la seconde. Cela motive ce commentaireagacé de Catoneo sur le fo-rum Vive le Roy : « Au sa-lon de Hanovre de mars2008, le président Sarkozyavait proposé à Angela Mer-kel [...] que la France etl'Allemagne mettent encommun des forces. [...]Faute de quoi les Européensallaient être définitivementdistancés par les Améri-cains, les Japonais et lesChinois. Les Allemands, las-sés du colbertisme gaul-liste, ont choisi d'avancerseuls et de ne pas se laisser,eux, distancer... »

G.D.

❏ SOCIAL

Les transporteurs routiers et l'UELes routiers français sont confrontés à la concurrence de sept nouveaux pays européens. Cela ne sera passans conséquences sociales, voire écologiques. Or, qu'elle soit libérale ou étatiste, ce n'est pas l'idéologieéconomique qui doit primer, mais la juste conciliation entre la raison économique et le cœur social.

Le droit français comptabilise comme temps de travail tout le temps passé au service de l'employeur...

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POLITIQUE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 3 ❚

Les élections européennes ap-prochent à grands pas, maissans beaucoup de bruit. Il se

confirme que ce dimanche 7 juin,l'abstention sera massive et les"européistes", qui depuis tant d'an-nées concoctent un machinfourre-tout, tatillon, sans âme ettotalement étranger aux préoc-cupations concrètes des Français,devront encaisser le coup.

Ce n'est pourtant pas que man-quent les candidats. Dans nos ruesl'affichage des partis en présenceest envahissant, mais la plupartde ceux-ci, sans que l'on sentetoujours les différences de l'un àl'autre, donnent plutôt l'impres-sion de profiter du scrutin pourrégler leurs comptes sur des su-jets de politique hexagonale,quand ce n'est pas de chamaille-rie entre rivaux. Où est le grandsouffle européen que l'on nousprédisait encore tout récemment ?

L'axe Sarkozy-Merkel

Nous le disions la semaine der-nière, un édifice que l'on construitsans respecter les fondations afort peu de chances de tenir. Ona voulu oublier que les vraies fon-dations de l'Europe sont les na-tions, on a même essayé de ligo-ter et d'humilier celles-ci. Pire,on a tenté de faire renoncer lesFrançais à la France en leur im-posant l'ouverture des frontièresà tout vent et un enseignementqui ne leur donne plus la fiertéde leur héritage. Faut-il s'éton-ner qu'en ces temps de crise économique et sociale, les Fran-çais soucieux de survivre consi-dèrent comme des vieilleries lesdiscours vantant un système sipeu réaliste ?

Pour tenter de réchauffer lesélecteurs, Nicolas Sarkozy a ren-contré deux fois en un mois lechancelier allemand Mme AngelaMerkel. Façon de se donner uneposture internationale. La répu-

blique a l'habitude de s'appuyersur l'étranger quand il lui faut re-dorer son blason...

Bien qu'en désaccord sur laconduuite à tenir face à la crise,ils ont tenu le 10 mai un meetingcommun à Berlin. Mme Merkel s'enest prise à ceux qui refusent letraité de Lisbonne, pourtant déjàbien oublié... et notre présidenta déclaré vouloir « une Europeavec des institutions dignes de cenom » avant d'ajouter : « L'Eu-rope ne peut pas continuer àchanger de président tous les sixmois, à se mettre d'accord sur leminimum alors que le monde at-tend qu'elle se mette d'accord surle maximum. » C'est bien là eneffet le vice congénital d'uneunion à dimension purement éco-nomique.

De son côté Mme Merkel n'apas jugé utile de venir à Paris s'af-ficher aux côtés de M. Sarkozy.Ils ont toutefois rédigé un texteparu conjointement le 31 maidans Le Journal du Dimanche etdans Die Welt. Les deux com-pères disent vouloir « une Europeforte » qui « ne signifie pas né-

cessairement toujours plus decompétences pour l'Union euro-péenne, toujours plus de légis-lation européenne ou toujoursplus de moyens financiers ». Pa-roles, paroles...

France souveraine

Puis ils annoncent une régu-lation sur le plan financier, avantde harceler une fois de plus lesIrlandais (« Nous [leur] faisonsconfiance pour faire le choix del'Europe ») puis de se poser envue du sommet mondial sur le cli-mat qui se tiendra en décembreà Copenhague. On est prié de ju-ger cela très emballant...

Un point reste flou. À les en-tendre Angela et Nicolas sontcontre l'entrée de la Turquie dansleur Europe, se prononçant seu-lement pour un partenariat pri-vilégié, ce qui est sage, mais dansleur article commun, ils secontentent de dire qu'« un élar-gissement illimité n'est pas pos-sible », sans nommer la Turquie.Il semble qu'à Bruxelles les négo-ciations d'adhésion vont bon train

depuis la présidence de l'Unioneuropéenne par Nicolas Sarkozy...Se moque-t-on des Français ? Ilsont le droit de savoir s'ils vont ounon devoir voisiner avec un paysqui a certes ses grandeurs maisqui se situe à l'opposé de nos tra-ditions religieuses et culturelles.

Cela n'incite guère les élec-teurs à regarder vers Bruxelles etStrasbourg... Que l'abstention do-mine le 7 juin n'est pas pour nousdéplaire. Maurras n'a toutefois ja-mais recommandé le refus de vo-ter, bien qu'il n'ait jamais non plusconsidéré la liturgie du scrutincomme sacrée... Jamais une op-tion électorale n'a été à l'Actionfrançaise un sujet essentiel. L'im-portant est que nous n'oublionspas la France, qui doit rester notresouci capital, au-dessus de nosidées personnelles, de nos hu-meurs, de nos goûts. C'est en cesens que Maurras parlait de laFrance seule, qui ne signifiait nul-lement la France isolée, mais appelait à tout considérer en fonc-tion de la France, de la protec-tion de son héritage, de son aver-nir, de sa place dans le monde.

N'oublions pas ce que fut l'ap-port de notre pays au vieux conti-nent chrétien contre les désé-quilibres impérialistes - un apportqu'il ne peut prolonger qu'en gar-dant les moyens de rester lui-même. Mgr le comte de Paris, ducde France, déclarait en 2007 :« Politiquement il est nécessaireque chaque nation, au sein del'Europe puisse développer sonidentité propre et conserver lesattributs essentiels de sa souve-raineté, qu'il faudra bien rené-gocier. Pour ce qui concerne laFrance, commençons par la languefrançaise qui doit redevenir lelangage vernaculaire des instancesde Bruxelles et de Strasbourg ainsiqu'il en était convenu par le traitéde Rome. Ce devrait être un im-pératif, un préalable au retourde la France dans la constructionde l'Europe. »

Le 7 juin, dans ou en dehorsdes urnes, faisons entendre la voixde la France qui veut vivre.

MICHEL FROMENTOUX

❏ LES 6 & 7 JUIN

Se décider en fonction de la FranceAnglea Merkel et Nicolas Sarkozy font campagne main dans la main, sans déclencher l'enthousiasme des électeurs. Où est le grand souffle européen que l'on nous prédisait encore tout récemment ? Les postures sécuritaires occupent le devant de la scène médiatique...

COMMUNIQUÉComme l'a expliqué OlivierPerceval, secrétaire général denotre mouvement, dans les co-lonnes de notre dernier nu-méro, l'Action française se féli-cite par avance du vraisem-blable record d'abstention quimarquera le prochain scrutineuropéen. Nous y voyons lesigne du peu d'intérêt du paysréel pour les institutions euro-péennes et une marque de larésistance des esprits au ma-traquage intellectuel perma-nent organisé par le pays légalen faveur de l'Europe deBruxelles.Cette position de principe nedoit cependant pas empêchernos sympathisants de soutenirpar tous les moyens, – mêmelégaux ! –, dans les circonscrip-tions où elles existent, les can-didatures amies, royalistes ounationalistes, qui utilisent lecontexte électoral pour faire lapromotion des idées de salutpublic que nous défendons.

STÉPHANE BLANCHONNET

Président du Comité directeur

de l'Action française

■ Merci à nos amis qui, cette se-maine encore, ont répondu ànotre appel. Ils sont, hélas, en-core trop peu nombreux pournous permettre de faire face,sans soucis, à nos engagementsde l'année.Ainsi, le redressement de nos fi-nances nous a amenés à étalerle remboursement de certainesdettes, calendrier que nousavions tenu jusqu'à maintenant.Le retard actuel de la souscrip-tion, si vous n'y répondez, va

nous obliger à décaler certaineséchéances. Ëtre d'AF, c'est adhérer à nosidées, à notre méthode de pen-sée... mais c'est aussi, par voiede conséquence, nous aider,d'abord en s'abonnant, ensuite,suivant vos moyens, en partici-pant à la souscription et nouspermettre ainsi de faire vivrele journal.Nous le répétons : si 100 amisd'AF nous envoyaient l'équivalentd'un euro par jour, nous serions

débarrassés de nos soucis finan-ciers. Pensez-y : demandez-nousun formulaire pour prélèvementautomatique, par exemple,chaque trimestre.

Merci d'avance.

MARIELLE PUJO

* Prière d’adresser vos dons àMme Geneviève Castelluccio, L'Ac-tion Française 2000, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris.

❚ NOTRE SOUSCRIPTION POUR L'AF

LISTE N° 5

100 euros pour l'A.F. : Mlle Ma-rie-Suzanne de Benque d'Agut, 100 ;

François Nénert, 100 ; Jean Foyard,100 ; P.A.A., « pour le journal plusnécessaire que jamais », 200.

Virements réguliers : Mme Fran-çoise le Groignec, 15,24 ; MmeYvonne Peyrerol, 15,24 ; Mlle AnniePaul, 15,24 ; François Favre (3mois), 60 ; Mme Françoise Bedel-Giroud, 30,49 ; Henri Morfin, 32.

Total de cette liste : 668,21 sListes précédentes : 3 120,03 s

Total : 3 788,24 sTotal en francs : 24 849,22 F

Il y a urgence

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❚ ASPECTS DE LA FRANCE

❚ 4 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

Là où Nicolas Sarkozy, boni-menteur né, est le plus àl'aise, c'est lorsqu'il peut re-

nouer avec le ton de ses discoursde campagne électorale. Unechance pour lui : à l'approche desélections européennes qui laissentles Français bien moroses, la ques-tion de la sécurité revient à l'ordredu jour. Or on sait que dans cedomaine-là il sait bomber le torseavec un réel talent qui lui valuten 2007 de réussir une OPA sur lesélecteurs du Front national.

Partition connue

Le fait qu'il puisse reprendrela même partition en haussant leton deux ans plus tard (si l'oncompte les années où il fut mi-nistre de l'Intérieur on pourraitmême dire sept ans plus tard !)ne prouve guère l'efficacité desmesures qu'il a si souvent annon-cées... Mais cette fois-ci, nousdit-on, il entend frapper fort :qu'il s'agisse de la violence desbandes dans les quartiers ou dela « barbarie » en milieu scolaire,il se dit « absolument déterminé »à en finir, « sans états d'âme, sansconcession, sans la moindre com-plaisance ».

Ainsi a-t-il parlé recevant à l'É-lysée à grand renfort de médias,ce jeudi 28 mai, sept cents invi-tés : préfets, procureurs géné-raux, directeurs de la sécurité pu-blique, commandants de gendar-merie, inspecteurs d'académie,directeurs des douanes et des ser-vices fiscaux. Au sujet de la cri-minalité dans certains quartiers« rongés par la délinquance », ila affirmé que celle-ci « résultede l'attrait de l'argent facile ». Ilveut donc multiplier les opéra-tions coup de poing, ordonner desfouilles minutieuses des im-meubles, des appartements, descages d'escaliers, des caves squat-tées, et frapper les délinquants« au portefeuille ».

On attendait surtout le chefde l'État sur les violences scolairesen ce lendemain de graves agres-sions de professeurs (voir le der-nier numéro de L'AF 2000). Il atrouvé des formules fortes : « Lesétablissements scolaires doiventêtre sanctuarisés. » Ce recours àun vocabulaire religieux au sujetd'établissements qui se font unegloire d'être sans Dieu ne manquepas de piquant...

Appel aux policiersretraités

On va donc « systématiser undispositif de policiers référentsdans les établissements », de-

mander au personnel de directionet d'encadrement de s'assurer queles élèves ne transportent pasd'armes, leur donner une « habi-litation spécifique » pour ouvrirles cartables et les sacs. On vaaussi accorder aux recteurs « uneéquipe mobile d'agents pour épau-ler les chefs d'établissement » etdemander à des policiers à la re-traite ou volontaires de venir sé-curiser les abords des établisse-ments scolaires. Quant à la pro-position très contestée du ministrede l'Éducation Xavier Darcos d'ins-taller des portiques de sécurité àl'entrée des établissements,M. Sarkozy dit, sans réellement lareprendre à son compte, qu'« il

est regrettable d'en arriver là »,mais qu'il « ne faut pas attendreque l'irréparable se produise ».

Dramatisationélectoraliste

Certes, dans ce fatras de pro-positions, beaucoup sont de na-ture à répondre à certaines at-tentes des Français, mais outrele fait que ce plan contre la vio-lence à l'école est le neuvièmedepuis 1993 avec les résultats quel'on constate (!)..., ce discours seressent trop d'une soudaine vo-lonté de dramatiser à outrancede récents faits divers afin deconvaincre les électeurs qu'ils

sont, ou plutôt seront..., bien pro-tégés. Or des mesures préconi-sant la lutte contre les effetsd'une situation perverse sans re-monter aux véritables causes de-meureront stériles.

En attendant, les effets per-vers de cette dramatisation semanifestent déjà : on a beaucoupparlé la semaine dernière d'un en-fant de huit ans, élève en CM 2dans le Val-d'Oise, entendu pen-dant vingt minutes par les gen-darmes parce qu'il s'était battuavec un camarade. La mère del'autre enfant, affolée de voir queni l'institutrice ni le directeur nesavait quoi que ce fût de cettebagarre, est allée se plaindre àla gendarmerie pour faire convo-quer et interroger le petit "mal-faiteur". En fait il s'agissait d'unbagarre sans méchanceté entregarçonnets comme il y en a tou-jours eu sur les cours de récréa-tion. Elles sont souvent l'amorced'une amitié qui dure à l'âgeadulte. Aujourd'hui c'est fini, etoubliant quelques bleus dans lesjambes de l'un ou de l'autre, lesdeux enfants parlent de s'inviterpour leurs anniversaires réci-proques...

Corde sécuritaire

La semaine dernière déjà,c'étaient deux enfants de six etdix ans de la région de Bordeauxqui étaient arrêtés à la sortie del'école par six policiers sortant dedeux voitures de police. Les pe-tits "délinquants" ont été emme-nés au commissariat et interrogéspendant deux heures suite à uneplainte d'un mère d'élève au su-jet d'un prétendu vol, ou emprunt,de bicyclette... Encore une affairequi pouvait se régler entre adultessans provoquer tant de bruit.

À force de vouloir jouer sur lacorde sécuritaire, on en arrive au-jourd'hui à considérer les enfantseux-mêmes comme des malfai-teurs en puissance ; que l'on peutfouiller à l'entrée ou interroger àla sortie de l'école. Le procédéest dangereux. Il risque de mar-quer profondément ces jeunes etde les monter contre les adultespour le reste de leur vie. Il té-moigne surtout du désarroi d'unesociété soixante-huitarde pas en-core réellement redevenue adulteet qui semble embarrassée de sajeunesse, passant avec elle dulaxisme insouciant à la répressionla plus stricte. Ce n'est pas ainsi,si l'en continue sur cette lancée,que l'on intégrera cette jeunesseà la nation.

Si aujourd'hui les voyous pul-lulent, les cambrioleurs se mul-tiplient et trop d'élèves se com-portent comme de petits bar-bares, n'assiste-t-on pas auxconséquences d'une immigrationmal contrôlée, de la démissiondes autorités morales et reli-gieuses comme de bien des pa-rents, d'un empoisonnement desmentalités par des idéologies li-bertaires et de la perte des vraiesfinalités de l'enseignement dansces collèges ou lycées où l'on en-tasse par pure démagogie desmasses d'enfants qui s'y ennuient ?La magie d'un discours ne sauraitaméliorer une telle situation.

MICHEL FROMENTOUX

❏ SOCIÉTÉ

Violences : Sarko est arrivé...Le président de la République veut « sanctuariser » les établissements scolaires. C'est le neuvième plancontre la violence à l'école depuis 1993... Il témoigne du désarroi d'une société soixante-huitardeembarrassée par sa jeunesse, qui passe du laxisme insouciant à la répression la plus stricte.

» RÉDUIRE LA PAUVRETÉ

Ce lundi 1er juin, le RSA, revenu de solida-rité active, a définitivement remplacé leRMI (revenu minimum d'insertion). LesRMIstes en bénéficieront d'office, mais aussiles travailleurs "pauvres", qui gagnent moinsde 880 euros par mois et qui peuvent deman-der à cumuler ainsi leur revenu faible etcette allocation pour un temps indéterminé.Cette aide, réservée aux plus de vingt-cinqans, est financée grâce à une nouvelle taxede 1,1 % sur les revenus du capital. C'estbien dans la logique républicaine de conce-voir la justice comme toujours un pas de plusvers l'égalisation des conditions...Selon le Haut Commissaire aux solidarités ac-tives, Martin Hirsch, on devrait aider ainsitrois millions de personnes et permettre à aumoins 70 000 personnes de passer au-dessusdu seuil de pauvreté. Rappelons que 7,9 millions de personnessont actuellement au-dessous de ce seuil,

mais M. Sarkozy se fait fort de réduire lapauvreté d'un tiers d'ici cinq ans...Une fois de plus le gouvernement compte surcet effet d'annonce pour rassurer la popula-tion. Beaucoup font toutefois remarquerqu'en pleine crise économique et sociale oùles emplois n'augmentent guère, le nouveausystème risque fort de multiplier les emploisprécaires à temps partiel.

» CAHIERS SAINT-RAPHAËL

La médecine a plus évolué en soixante ansque depuis le temps d'Hippocrate. Elle s'estspécialisée à outrance. Considérée comme unart depuis toujours, elle est devenue unetechnique de plus en plus anonyme et dépersonnalisée. L'homme est considéré désormais le plus sou-vent comme une simple machine que l'on ré-pare et qu'un jour il faut envoyer à la cassecomme une vieille voiture hors d'usage.La vie en tant que telle ne se définit plus

que par son efficacité économique ; sorted'objet dont on peut se débarrasser. D'où lesdérives que sont l'avortement et l'euthanasie. La médecine ne s'occupeplus que des corps, et sedésintéresse des âmes.Ainsi elle perd la naturede sa vocation. La méde-cine devrait s'occuper dela vie en tant que don deDieu. Mais quand on aperdu le sens de la vie, on a perdu le sensdes choses elles-mêmes. C'est ce que nous vi-vons actuellement par la crise économique et« sociétale » que nous connaissons.

JEAN-PIERRE DICKÈS

* Cahiers Saint-Raphaël, n° 94 : Quelle médecinepour demain ? Publication de l'Association catho-lique des infirmières et Médecins. Ce numéro :8 euros, à l'ACIM,18 villa Rachaert, 92390 Ville-neuve-la-Garenne.

On en arrive aujourd'hui à considérer les enfants eux-mêmes comme des malfaiteurs en puissance

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ASPECTS DE LA FRANCE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 5 ❚

Àchaque fois qu'ils se lèventle matin pour assurer latraite du troupeau, les pro-

ducteurs laitiers sont assurés deperdre de l'argent : selon les or-ganisations professionnelles, lescharges des exploitations sont es-timées au minimum à 260 eurospour 1 000 litres de lait produit,alors que le lait livré aux coopé-ratives ou aux industriels privésatteint un niveau historiquementbas, à 210 euros les 1 000 litres.Dans toute la France, les éleveurslaitiers sont mobilisés pour pro-tester contre un effondrement descours de 30 % en un an, et sensi-biliser les consommateurs à laquestion des marges des indus-triels et des distributeurs.

La dérégulationà l'origine de la crise

C'est un double problème eu-ropéen et national qui est à l'ori-gine de cet effondrement descours. Au niveau européen, l'Unioneuropéenne a engagé, depuis2004, le démantèlement pro-gressif des outils de régulation dusecteur. La taxe à l'importation,les restitutions à l'exportation etles aides à l'incorporation de laitécrémé dans les poudres animalesont peu à peu été supprimées.Même si la suppression de cesaides a été accompagnée d'uneaide directe laitière sous formede DPU (droits à paiementunique), elle n'a pas été intégra-lement compensée. Et la pers-pective d'une réforme de la poli-tique agricole commune a égale-ment été accompagnée d'unassouplissement des quotas lai-tiers qui augmenteront de 9 % surhuit ans, avant leur suppressiontotale prévue en 2015. Bien audelà de la crise française, la ques-tion du prix du lait concerne donc

l'ensemble des 100 000 produc-teurs de lait européens regroupésau sein de l'European milk board.

Organiserles marchés

Et à quelques jours des élec-tions européennes du 7 juin, leproblème embarrasse particuliè-rement Michel Barnier, qui con-serve sa double casquette de mi-nistre de l'Agriculture et de res-ponsable de la campagne euro-péenne de l'UMP. D'autant quec'est au cours de la présidencefrançaise de l'Union européennequ'a été décidée l'augmentation

progressive des quotas laitiers,même si le ministre déplore au-jourd'hui que le commissaire eu-ropéen à l'Agriculture, Mme Ma-riann Fischer Boel, refuse de re-venir sur le compromis négocié àl'époque et estime nécessaire de« préserver d'une manière oud'une autre » un système de maî-trise du prix du lait.

La crise du lait prend ainsiplace au cœur de la campagneeuropéenne et pour GerminalPeiro, secrétaire national PS àl'Agriculture, la crise du secteurlaitier est un des « exemples desdérives libérales de la politiqueeuropéenne cautionnée par Ni-

colas Sarkozy et Michel Barnier ».Mais pour le président du Mouve-ment démocrate, François Bay-rou, il serait injuste d'attribuer àl'Union européenne l'entière res-ponsabilité du problème. Le lea-der centriste dénonce la « déci-sion désastreuse » de la direc-tion générale de la concurrenceet de la consommation qui, enmai 2008, a enjoint l'interprofes-sion laitière de cesser toute re-

commandation d'évolution du prixdu lait, jugeant cette pratiqueanticoncurrentielle.

Avant cette intervention de laDGCCRF, producteurs et industrielsse mettaient d'accord pour lisserles effets des marchés sur douzemois, à la hausse comme à labaisse, pour éviter les à-coups ducours des marchés mondiaux. «Si l'on veut sauvegarder pas seu-lement les productions mais lesproducteurs, pas seulement desvolumes de lait mais les exploi-tations qui les produisent, il fautque la France défende activementl'idée d'une organisation des mar-chés. Je suis pour, à l'échelon eu-ropéen, le maintien des quotaslaitiers et à l'échelon national lareprise du travail sérieux qui étaitconduit depuis des décennies etpermettait de définir des prix deréférence : ils étaient un atoutpour les industriels parce qu'ilseffaçaient les prix hauts du mar-ché et un atout pour les produc-teurs parce qu'ils effaçaient lesprix bas, ce qui a sauvé le mé-tier de producteur laitier, les ex-ploitations » a déclaré FrançoisBayrou.

Seulementdes fermes-usines ?

Si une solution n'est pas trou-vée, c'est le modèle français desexploitations familiales qui pour-rait se trouver menacé alors que,dans le monde entier, se déve-loppent des fermes usines ras-semblant plusieurs milliers de bo-vins. Face à la hausse du prix dulait « plusieurs leviers peuventêtre actionnés et notamment ledéveloppement de fermes géantes» estime le groupe Danone qui,en Arabie Saoudite, a contribuéà installer tout près de ses usinesla plus grande ferme du monde,qui compte 30 000 vaches. Resteà savoir si, en France, c'est cemodèle de développement quesouhaitent les citoyens...

GUILLAUME CHATIZEL

❏ CRISE DU LAIT

Choisir un modèle d'agricultureLa crise des producteurs laitiers préfigure celle qui guette l'ensemble de l'agriculture. La dérégulation et le libéralisme ne permettront pas la survie du modèle paysan de nos exploitations familiales alors queles grands groupes s'organisent déjà pour industrialiser la production de matières premières agricoles.

LA BATAILLE DU DIMANCHE Le site du Salon Beige reproduitdes propos fort intéressants deChristian Vanneste tenus dansFamille Chrétienne à propos duprojet de loi sur le travail domi-nical. Nous en tirons quelqueslarges extraits :

« Plus que jamais, je crois quenotre société doit se construireautour du pivot qu'est la fa-mille. Eh bien, pour le bien detoute famille, le repos hebdo-madaire, le dimanche est essen-tiel depuis 1906. À nous de sa-voir si nous voulons que laFrance reste un pays humaniste.[...] De toute façon, soyonsclairs, la bataille est perdue,puisque le noyau de députés dela majorité qui ne voulaient passigner ce texte s'est rallié àcette dernière proposition deloi. Mais je dis à tous ceux quipensent que notre société doitavant tout s'appuyer sur des valeurs humanistes et spiri-tuelles de réfléchir...

Ils sont en train d'ouvrir laporte au Cheval de Troie. Car,sous l'apparence d'une petiteavancée c'est bel et bien la vic-toire de ceux qui veulent nousfaire travailler le dimanche.D'autre part, les argumentsavancés sont irrecevables : onnous dit que c'est un gain éco-nomique, qu'on m'explique com-ment le travail du dimanche vaaugmenter le pouvoir d'achatdes Français ? Sans parler desconséquences redoutables pourle commerce de proximité. [...]Autre point problématique : lerespect du droit du travail. Onprétend à ce sujet que l'on varespecter la volonté des sala-riés. C'est complètement faux !Comment voulez-vous savoir siun salarié sera pris ou ne serapas pris en fonction de son ac-ceptation de travailler le di-manche ? Il faut être naïf pour croire qu'il aura le choix de refuser ! »

M. Vanneste dit que la batailleest perdue. Ce n'est pas sûr du tout...

Avec Sarah Blanchonnet,Stéphane Blanchonnet,Grégoire Dubost, Michel Fromentoux, Vincent Gaillère, Pierre Lafarge, Aristide Leucate, Alain Raison, Francis Venant

Depuis sa fondation en 1899,l'école d'Action française aproduit un nombre considérabled'ouvrages de critique historique,politique, littéraire, qui,ensemble, constituent un trésor. Trente et un de ces ouvrages ontété sélectionnés pour faire

l'objet d'articles publiés dansL'Action Française 2000 en 2004et 2005. Ont été privilégiés ceuxqui permettent d'approfondir lapensée politique de l'Actionfrançaise en soulignant leuractualité.

À travers les études rassembléesdans ce recueil, le lecteur sefamiliarisera avec JacquesBainville, Augustin Cochin, LéonDaudet, Pierre Gaxotte, PierreLasserre, Charles Maurras, Léonde Montesquiou, Maurice Pujo, lemarquis de Roux, Henri Vaugeois,découvrant ainsi l'originalité dela pensée d'AF.

* Éditions de l’Âge d’homme, 138 p., 20 euros. Disponible à nosbureaux : 22,11 euros franco (chèqueà l’ordre de la PRIEP)

❏ LIVRE

LE TRÉSOR DE L'ACTION FRANÇAISE

Sous la direction de Pierre Pujo

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❚ UNION EUROPÉENNE

❚ 6 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

Quelle que soit l'issue desélections, quelques chan-gements sont déjà annon-

cés à Strasbourg et Bruxelles.L'euroscepticisme devrait béné-ficier d'une visibilité inédite. À lafin de la législature 1999-2004,les conservateurs britanniquesavaient obtenu un "droit de ten-dance" au sein de leur groupe,qui les autorisait à se désolidari-ser de leurs collègues plus fédé-ralistes dans les discussions por-tant sur l'avenir institutionnel del'Union. Désormais, les Tories sontrésolus à quitter le PPE-DE, oùsiègent notamment les députésUMP ; suivis par les Tchèques del'ODS, ils devraient former aveceux le "noyau dur" d'un nouveaugroupe politique.

Arrangementtechnique

Seront-il rejoints par des sou-verainistes plus marginalisés ? Entout cas, les "petits partis" souf-friront d'une réforme du règle-ment intérieur de l'assembléeadoptée en juillet dernier : pourconstituer un groupe, il faudra ré-unir au moins vingt-cinq députésissus de sept États membres,contre vingt issus de six pays au-jourd'hui.

Le Parlement européen de-meurera gouverné par le "consen-sus" des formations majoritaires,qui en partagent la présidence envertu d'un "arrangement tech-nique". Rappelons ce chiffres agitéau cours la campagne, du NPA jus-qu'au Front national : lors des 535

votes finaux par appel nominal in-tervenus en 2008, droite et gauchese seraient exprimées à l'unissondans 97 % des cas. « Un scoredigne de la Douma de l'ex-Unionsoviétique » commente L'Obser-vatoire de l'Europe ! Prenant encompte le vote des amendements,Jean Quatremer dessine une réa-lité plus complexe : « Le PPE etle PSE ne votent au final ensembleque dans 69,70 % des cas (maisseulement 56 % dans les affairessociales et 52,5 % dans le domaine

économique). Les villiéristes vo-tent avec les socialistes dans 40 %des cas alors que les communistesvotent avec le PPE dans 42 % descas et avec les villiéristes dans40,90 % des cas... » 2

Apolitisme ?

Des subtilités qui ne sauraientgommer une caractéristique es-sentielle du Parlement européen,« condamné à gouverner aucentre » selon Paul Magnette 1.

Aucune majorité suffisante ne sedégage dans cette assemblée fa-çonnée par la diversité des pay-sages politiques nationaux. La fré-quence des votes techniques etles incursions limitées de l'Uniondans les politiques de redistribu-tion sociale tempèrent la pré-gnance du clivage gauche-droite,mêlé aux divergences nationaleset institutionnelles.

Négociation

L'obtention du consensus se-rait même facilitée par l'examenpréalable des textes dans lesgroupes politiques, où ils font déjàl'objet d'un compromis. À la dif-férence des partis nationaux,maîtres des investitures, lesgroupes européens n'ont pas lesmoyens d'exercer une forte pres-sion sur leurs membres. Les con-signes de vote sont donc le fruitd'une négociation, dont les dé-putés seraient enclins à respec-ter les conclusions dans la mesureoù ils y participent.

L'entrée en vigueur du traitéde Lisbonne changerait-elle ladonne ? L'accroissement des pou-voirs du Parlement européen don-nerait au "réflexe majoritaire" denouvelles occasions de s'exprimer.C'est en tout cas l'espoir des eu-ropéistes, ravis de combler un "dé-ficit démocratique" au détrimentdes exécutifs. D'autres institu-tions, telles la Commission et laCour de Justice des Communau-tés européennes (CJCE), ont aumoins le mérite de veiller au res-pect réciproque des enga-

❏ PERSPECTIVES

Quels changements au Parlement ?Un nouveau groupe eurosceptique va se former à Strasbourg. Le Parlement européen n'en restera pas moins une "assemblée de consensus", dont les partis majoritaires continueront de se partager la présidence...

Ségolène Royal ressort du pla-card les veilles utopies eu-ropéistes. Le 27 mai, lors

d'une réunion publique scellantsa réconciliation avec Martine Au-bry, elle a lancé cet appel aux fu-turs élus socialistes : « À vous [...]de laisser envahir d'espoir les tra-vées du Parlement européen. Àvous de décider que nos pro-chaines listes seront transnatio-nales, à vous de décider que nousélirons un président de l'Europe,et surtout, à vous de décider quele moment est venu de créer lesÉtats-Unis d'Europe ! [...] N'écou-tez pas [...] ceux qui vous diraientque ce n'est pas votre mandat.Les délégués des états générauxn'avaient pas non plus reçu lemandat de décréter les droits del'homme, et pourtant il l'ont fait ;

et qui songerait aujourd'hui à [le]leur reprocher ? » Les royalistes,les vrais ! Comment peut-onl'ignorer avec un nom pareil ?

Une bicyclette anxiogène

Considérant que l'Union euro-péenne « ne pourra pas éternel-lement rester au milieu du gué »,Bernard Guetta s'est félicité surFrance Inter de la relance du dé-bat opposant, de façon schéma-tique, souverainisme et fédéra-lisme : « À tant vouloir concilierces deux visions si diamétrale-ment opposées, on a fini par avan-cer comme le voyageur égaré quine sait plus où ses pas le mènent,à avancer pour avancer, et les Eu-ropéens ne suivent plus comme

le taux d'abstention ne le mon-trera que trop bien. [...] Il fautque ça bouge... » (29/5/09)

Analysant en 2005 l'échec duréférendum sur le Traité établis-sant une constitution pour l'Eu-rope, Hubert Védrine avait pris leparti inverse – qui n'est pas toutà fait celui des souverainistes :« Il est urgent d'abandonner ex-plicitement la logomachie déres-ponsabilisante et anxiogène del'intégration européenne sans fin.Comme la métaphore de la bicy-clette qui doit toujours avancerfaute de tomber, l'annonce per-manente d'un nouveau traité, les"ce n'est qu'une étape", le vieuxmythe des "États-Unis d'Europe"qui seraient seuls à même de fairele poids... Il faut revenir à la justeformule de Jacques Delors - fé-

dération d'États-nations, dans la-quelle chaque mot compte -, sta-biliser cette réalité originale etéquilibrée, la faire vivre et rayon-ner. En redisant que les peupleset les États-nations ne [...] sontni dépassés, ni ringards. Qu'ilssont ouverts, modernes, associéset unis par des liens fédérauxdans quelques domaines précis. »(Le Monde, 09/06/05)

G.D.

❏ RINGARDITUDE

Des États-Unis d'Europe ?Non contente d'offrir une "femme debout" à Martine Aubry, Ségolène Royal aérigé le parlement européen en Assemblée constituante... Morceaux choisis.

La dernière nuitde Jeanne d'ArcDE MARIE PISTEKOVA

Samedi 6 juin 2009 à Rouen,à 21 heures, église SainteJeanne d'Arc, Place du VieuxMarché. Spectacle présentépar la compagnie Radost, laparoisse Notre-Dame de RouenEntrée libre. Quête à la fin dela représentation.

MARIE PISTEKOVA

Originaire de Moravie en Tché-coslovaquie, au temps du tota-litarisme, Marie PISTEKOWA dé-couvre le personnage deJeanne d'Arc à l'âge de treizeans. À travers les malheurs deson peuple asservi, elle voitune figure symbolique, unexemple offert à tous ceux quimeurent pour la Vérité et la Li-berté : « J'ai mené des étudesd'art dramatique avec le projetde faire vivre Jeanne authéâtre et je l'ai jouée clan-destinement dans tout le pays.Jeanne d'Arc a redonné espoiret courage aux Tchèques. Ellesymbolisait pour eux la libertéet la pureté. »Et, tantôt dans un grenier, tan-tôt dans une cave, tantôt dansune église, partout où ellepeut être accueillie et écou-tée, elle joue la pièce de sacomposition : La dernière nuitde Jeanne d'Arc. C'est une mé-ditation de Jeanne à la veillede son supplice, durant la nuitdu 29 au 30 mai 1431. Elle n'aque dix-neuf ans ! La premièrereprésentation a lieu en 1979.Aujourd'hui, c'est en françaisqu'elle présente le plus sou-vent ce spectacle. Toujours au-tant habitée par son person-nage, elle interprète seule surscène Jeanne d'Arc : à la veillede son exécution, le 30 mai1431, la petite bergère deDomrémy voit défiler toute savie. « Ami, je te prie, fais-toientendre ! », implore-t-elle leCiel. À cette bouleversanteprestation, il faut ajouterl'énorme travail de bruitage(vent qui hurle dans les arbres,chevaux lancés au galop,chants d'oiseau ou feu du bû-cher) ainsi que les musiques deBach et Carl Orff, qui donnentune amplitude nouvelle autexte et permettent de tou-cher un plus jeune public :« Cette petite Jeanne qui ren-verse des montagnes auMoyen-Âge, qui soulève l'en-thousiasme d'un peuple op-primé au XXe siècle, mesemble capable de parler en-core aux jeunes de ce XXIesiècle naissant ainsi qu'à tousceux qui refusent la désespé-rance... » souligne l'artiste.Et elle ajoute : « J'aime sonfameux bon sens. J'aime sasimplicité, sa proximité avecla nature, son sens de l'amitié,ainsi que l'amour de son payset sa foi. Aucune trace dehaine ni d'agressivité ».

»»»

Le bâtiment Paul-Henri Spaak, annexe du Parlement européen à Bruxelles

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L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 7 ❚

gements souscrits par lesÉtats. Or, aux yeux des gouver-nements, que peut représenterun rassemblement internationalde parlementaires, sinon un pou-voir de nuisance ?

Nouveau statut

Le traité modificatif affectele statut des députés, qui ne se-raient plus censés représenter les« peuples des États réunis dans laCommunauté », mais les « ci-toyens de l'Union ». Corolaire sym-bolique des nouvelles modalitésd'indemnisation appliquées dèsjuillet, conformément à une dé-cision remontant à septembre2005. « Jusqu'à présent, chaqueeurodéputé était rémunéré parson assemblée ou son gouverne-ment en fonction du salaire desdéputés nationaux », explique Cé-lia Sampol 3. « D'où les grandesdiversités existant entre un Bul-gare qui gagnait à peine plus de9 000 euros par an, pendant qu'un

Italien touchait 134 000 euros an-nuels. Le nouveau statut met unterme à ces disparités et prévoitun salaire mensuel égal pour tousde 7 412,69 euros avant impôts,soit 5 607,24 euros nets. Ce quicorrespond à 38,5 % du traitementde base d'un juge de la Cour deJustice européenne. Le finance-ment des rémunérations sera as-suré par le budget de l'UE et nonplus par les budgets nationaux. »

Imbroglio

Les députés réélus cette an-née pourront conserver définiti-vement leur indemnité nationales'ils le souhaitent, de façon à nepas perdre au change... Quantaux États, ils pourront imposer lestatu quo à leurs élus pendantdeux ans, craignant peut-être undécalage avec la moyenne des ré-munérations nationales.

Organisées sous l'égide dutraité de Nice, les élections eu-ropéennes désigneront cette an-

née 736 députés, Un nombre quiserait porté à 750 plus le prési-dent avec l'application de Lis-bonne... et même 754 dans unephase transitoire. Les sièges ré-servés aux Allemands étant réduitsde 99 à 96, il serait paraît-il dé-licat de renvoyer au pays les troisélus en surnombre. Mais il faudraégalement désigner dix-huit nou-veaux députés, dont deux pour laFrance. On ignore encore par quel"micmac institutionnel" sera ré-solu cet imbroglio juridique.

GRÉGOIRE DUBOST

1 – Paul Magnette : Le Régime poli-tique de l'Union européenne. Pressesde Sciences Po, 310 pages, sept.2006,15 euros.2 – Jean Quatremer : « Parlement eu-ropéen : des alliances politiques sur-prenantes » Coulisses de Bruxelles,22 mai 2008. (D'après les statistiquesde votewatch.eu)3 – Europolitique, supplément au n°3749, 8 mai 2009.

» BON PLAN

Bête noire des souverainistes, la"concurrence libre et non faus-sée" pourrait présenter à leursyeux une vertu insoupçonnée. Ac-cusant Intel d'en avoir violé lesrègles, la Commission a infligé aufondeur américain une amendes'élevant à 1,06 milliardsd'euros. Que deviendra cet ar-gent si la condamnation seconfirme ? Jean Quatremer révèle(sur le ton du regret) qu'il alimen-tera le budget de l'Union, maissans l'augmenter : « Il permetsimplement de diminuer lacontribution de chaque Étatmembre. » (Coulisses deBruxelles, 21/5/09)

» UE & PME

L'Assemblée nationale s'immiscetimidement dans les affaires eu-ropéennes. Une conséquence dela révision constitutionnelle dejuillet 2008 soulignée par PatrickRoger (Le Monde, 2/6/09). Le 28mai, les députés ont discutéd'une proposition de résolution

soutenue par Marc Dolez (Parti degauche) et des parlementaires dela Gauche démocrate et républi-caine (où siègent les Verts et lescommunistes). Le jour-même, laprésidence tchèque devait pré-senter au Conseil les avancées duprojet de "société privée euro-péenne", censé faciliter le déve-loppement des PME dans l'Union.Or M. Dolez s'inquiète des consé-quences sociales. Aussi demande-t-il, entre autres, « que le statut de SPE empêche les entreprisesde contourner les législations na-tionales les plus protectrices ». Quoi qu'il en soit, son adoption

n'est pas encore à l'ordre dujour : elle requiert l'unanimitédes Vingt-Sept, qui peinent às'accorder : « Un point en parti-culier pose problème, celui de laparticipation des travailleursdans l'organisation de l'entre-prise. [...] Le projet de la Com-mission prévoit que dans lesÉtats membres où cette coges-tion caractérise le fonctionne-ment des entreprises, le droitnational prime. Mais certainspays, comme l'Allemagne et l'Au-triche, considèrent que cettemention n'est pas suffisante... »(Euractiv, 18/5/09)

» ROYALISTES

L'Alliance royale présente descandidats aux élections euro-péennes dans six circonscrip-

tions françaises (sur un total dehuit) : Est, Île de France, Mas-sif-central et Centre, Ouest,Outre-mer, Sud-Est. Toutefois,aucun bureau de vote ne seraenvahi par des bulletins fleur-delisés : ceux-ci devront êtreimprimés à partir d'un fichierdisponible sur Internet. Malgré ses ressources modestes,le "parti royaliste" se distinguepar un clip de campagne desplus honorables. Tourné dans lequartier de la Défense, il intro-duit la perspective d'une restau-ration par une formule bienchoisie : « Un président est unchef de parti qui pense à laprochaine élection. Un roi estun chef d'état qui pense à laprochaine génération. » Sansdémagogie superflue ni matra-quage outrancier, il se préservedes allures de parodie affublantrégulièrement les images de lacampagne officielle.

» AMATEURISME ?

Dans un entretien audio diffusépar Novopress (20/5/09), Jé-rôme Rivière, directeur de cam-pagne de Libertas France, s'in-surge contre le projet de règle-ment européen autorisant laproduction de vin rosé parcoupage de blanc et de rouge :la Commission voudrait réviserles pratiques œnologiques« pour que demain on puisseimporter les vins d'Australie, deNouvelle-Zélande et d'Afriquedu Sud ». Or, selon le rapportdu sénateur Gérard César (voirnotre précédent numéro), lesvins coupés australiens seraientdéjà sur le marché européen,sans indication sur les éti-quettes ! Étant donné l'intérêtdu dossier pour la campagne dessouverainistes, une argumenta-tion plus rigoureuse aurait étéla bienvenue.

» DIVERSITÉ

Entamant sa conférence depresse le 8 mai, Dieudonné adéclaré avec ironie qu'il n'yavait parmi ses colistiers « abso-lument aucun antisémite ». Onveut bien le croire, étant donnéla définition proposée par Gi-nette Hess-Skandrani, unmembre fondateur des Vertspour qui l'antisémitisme consisteà « rejeter tout ce qui est sé-mite, c'est à dire les arabes etles juifs ». Parmi les autres can-didats "antisionistes" présentésen Île de France : une femme

dont seul le visage n'est pas re-couvert par son voile ; un « na-tionaliste catholique » œuvrantpour « le règne social duChrist » ; un membre du Renou-veau français ; le président deFraternité franco-serbe ; un an-cien secrétaire général du FNJen Rhône-Alpes ; un « militantde la paix, de l'amour et de laliberté », accusant des « gang-sters » de prétendre « gouver-ner la planète entière [...] àcoup de guerres bactériolo-giques », ce dont témoigneraitla « fausse grippe » porcine.Sans commentaire.

» TRACTATIONS

La France convoiterait le postede commissaire au marché in-térieur. Selon Jean Quatremer,« en ces temps de remise encause du laissez-faire; Nicolas

Sarkozy estime donc qu'il fautremettre un peu de "frenchtouch" dans le marché intérieur,entendez davantage de régula-tion » .(Coulisses de Bruxelles,29/5/09) Un coup de com' ?Quoi qu'il en soit, jamais cetteresponsabilité n'a été confiéeà un Français.

» DIPLOMATIE

La diplomatie est-elle l'otagedes préoccupationsélectorales ? Le président de laRépublique a annulé sa visiteprévue en Suède le 2 juin, offi-ciellement pour cause d'agendasurchargé, officieusement enraison d'un différend sur la Tur-quie (selon Arnaud Leparmen-tier, Le Monde, 29/5/09). Stockholm appuierait trop ou-vertement l'adhésion d'Ankara àl'Union européenne. Le ministresuédois des Affaires étrangères,Carl Bildt,a même étalé ses di-vergences avec la France dansLe Figaro du 25 mai.

Dans ces conditions, Nicolas Sar-kozy n'aura pas voulu s'affichertout sourire aux côtés des diri-geants suédois, d'autant qu'onl'accuse déjà de considérer dif-féremment la candidatureturque selon qu'il se trouve enFrance ou à l'étranger...

»»»

SIÈGE DU PARLEMENT À STRASBOURGQue peut représenter un rassemblement international de parlementaires,

sinon un pouvoir de nuisance ?

La Commission européenne

Stockholm

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❚ ASPECTS DU MONDE

❚ 8 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

LES AMÉRICAINS EN SERBIE

M. BIDEN, vice-président desÉtats-Unis, a visité la Bosnie-Herzégovine, la Serbie et laprovince serbe de Kosovo-Meto-hija les 18, 19 et 20 mai. Ils'agissait pour Washington de pré-senter sa nouvelle politique, etce avec l'acceptation tacite desautorités serbes... Pragmatiques, les Américains ontpris acte de leur détermination àne pas accepter l'indépendancedu Kosovo. L'échec relatif de sareconnaissance (par quarante etun pays sur cent quatre-vingtdouze), son illégalité internatio-nale, la menace des vétos russeet chinois au Conseil de sécurité

de l'ONU, ainsi que les affaires deTransnistrie-Ossétie du sud, Ab-khazie, Haut-Karabagh ont étéprises en compte par l'administra-tion Obama. Le gouvernement serbe s'est en-gagé à ne pas intervenir autre-ment qu'ouvertement, obtenirl'aval des États-Unis pour se main-tenir au pouvoir et conserver lesbénéfices des vols et autres fruitsde la corruption. Au passage, lesAméricains se sont proposéscomme intermédiaire bienveillantauprès de l'Union européenne àlaquelle voudrait adhérer la Ser-bie. Comme les interventions deBush et Obama en faveur de lacandidature turque, cette propo-sition est déplacée et devraitfaire l'objet d'une mise au pointde la présidence et de la Commis-sion européenne. Toute cette po-litique a fait l'objet d'une mise enscène à Sarajevo, Belgrade etPristina qui ne peut tromper queceux qui désirent l'être.

GÉRALD BEIGBEDER

» DANEMARK

La "parité" s'impose progressi-vement dans les monarchieseuropéennes. Le 7 juin, lesDanois seront appelés à élireleurs représentants au Parle-ment européen, mais aussi àapprouver par référendum larévision des lois de succession.Si le "oui" l'emporte, la cou-ronne sera transmise à l'aînédes enfants du souverain,prince ou princesse.

» ALÉAS DE LA GLOIRE

Une fois de plus la perversiondes médias se sera affichéeau grand jour.

Début avril, sur la télévisionanglaise, lors d'une émissionintitulée Britain's Got Talent,une certaine Susan Boyle,vieille fille écossaise de qua-rante-huit ans au physique in-grat, accoutrée comme unegrand'mère, est passée enquelques minutes de l'anony-mat à la célébrité. Il est vraique tous ceux qui la regar-daient en retenant leurs riresmoqueurs se sont soudain trou-vés subjugués par la voix d'orde cette inconnue qui chantaI Dreamed a Dream de la co-médie musicale Les Misérablescomme personne ne l'avaitchanté jusqu'alors. Aussitôtl'engouement des foules futsans limites. Sa chanson auraitété téléchargée deux centsmillions de fois ! La voici de-venue une star !Soudain patatras ! Après avoirvécu quelques semaines, selonle présentateur de l'émissioncomme « un lapin aveuglé parles phares d'une voiture »,alors qu'elle rêvait de pouvoirchanter devant le reine, lavoici ce samedi soir 30 mai,lors de la finale de l'émission,deuxième derrière une groupede danseurs. L'étoile montéetrop vite est retombée, ons'est remis à parler de son phy-sique ingrat, ses nerfs ont cra-qué et la dame est pourquelques jours à l'hôpital àLondres épuisée physiquementet moralement. Certes elle ne semble pas vrai-ment à plaindre, car elle passepour courageuse et continuerad'être sollicitée de toutesparts. Mais cette affaireillustre bien l'inhumanité de cemonde médiatique qui traiteles personnes comme desjouets et qui, comme l'a dit lechef du gouvernement écos-sais, « n'aime rien moins quefabriquer des vedettes pourles enfoncer ensuite »...

En ce début juin s'ouvriraplace Royale à Bruxelles leplus important musée Ma-

gritte au monde. L'événement estsymbolique car plus que jamais,en cette veille d'élections régio-nales et européennes, le surréa-lisme caractérise la Belgique. Onn'entend parler que de sa possibledisparition mais à Baïkonour, auKazakhstan, c'est un Belge, unGantois, Frank De Winne, qui s'estembarqué dans la capsule Soyouzvers la station spatiale interna-tionale en compagnie d'un Russeet d'un Canadien. Ils y resterontsix mois en apesanteur. Succes-seur, quarante-huit ans plus tard,de Youri Gagarine, le Belge serale premier Européen à comman-der la station.

Guerre lingustique

Pendant ce temps-là, le gou-verneur du Brabant flamand en-voie la police du bourgmestre(maire) de Kraaïnem enquêter sur"sa moralité". De quoi Arnoldd'Oreye de Lantremange, est-ilcoupable ? Sa commune de la pé-riphérie bruxelloise, peuplée d'unemajorité de francophones mais si-tuée en territoire flamand, aadressé des convocations en fran-çais à ses administrés franco-phones. Ce qui est aussi le caspour les bourgmestres de deuxautres communes. La guerre lin-guistique autour de Bruxelles re-prend de plus belle et trouveraun nouveau souffle après les ré-gionales. Les élections belges sontcomme une partie de billard àtrois bandes. Il y a les euro-péennes. Tout à fait oubliées. À

Strasbourg il y aura deux Belgesde moins ; de vingt-quatre ils pas-seront à vingt-deux. Ce qui feraun élu de plus pour les Flamands,soit quatorze, et un de moins pourles francophones, c'est-à-dire huit,et un élu garanti pour les germa-nophobes. À quelques jours duscrutin, personne n'en parle.

Tout autre chose en est à pro-pos des régionales. Les panneauxd'affichage se bariolent d'une pro-

pagande multicolore de candidatstout sourire et prodigues de pro-messes. Mais le vrai jeu estailleurs. La troisième bande dubillard nous amène sur le terrainfédéral. Du résultat des électionsdépendra la survie du gouverne-ment Van Rompuy.

En Flandre, l'époque de la pré-dominance démocrate-chrétienneappartient à un passé lointain etrévolu. Dans la partie franco-

phone, à Bruxelles et surtout enWallonie, une lutte sans merci op-pose libéraux et socialistes. C'està qui décrochera – de justesse –le titre de premier parti. Dans lafoulée, les écologistes s'apprêtentà ramasser la mise. On parle déjàde raz-de-marée... D'où les com-binaisons échafaudées par les stra-tèges "plombés" par les "affaires".

Scandale

Les socialistes tiendront-ils lechoc ? Il faut avouer qu'ils ontfait fort. Leur président Elio DiRupo, le nœud papillon en ba-taille, croyait avoir fait le mé-nage. Erreur : le balai avait lecrin trop mou. Le ministre wal-lon à la Santé et l'Action socialeDidier Donfut a dû démissionnerpour cause de cumuls rémunérés.Les remous étaient toujours vifslorsqu'on a appris les penchantscoupables de l'échevin socialistede l'urbanisme de Mons, la villed'Elio Di Rupo. Il est inculpé pourdétention de nombreuses imagesà caractère pédopornographique.Le PS s'est dit « saisi d'effroi » ;on le comprend.

Quelle alliance ?

Sera-t-il sanctionné pour lesfautes commises par trop dessiens ? S'il en était ainsi, il de-vrait sortir du gouvernement etles écologistes prendraient leurplace. Mais avec qui ? Avec leslibéraux et les démocrates-chré-tiens pour former une alliance"jamaïquaine", expression reprisede la politique allemande signi-fiant l'alliance du noir (les chré-tiens-démocrates), du jaune (li-béraux) et du vert (écologistes).Sauf qu'en Belgique, les couleurssont différentes, soit l'orange pourles premiers, le bleu pour les li-béraux, seul le vert étant valablepartout pour les écologistes. Bref,encore une histoire belge c'est-à-dire surréaliste. Quoiqu'il ensoit, faites vos jeux. Les élec-teurs votent, les partis décident.

CHARLES-HENRI BRIGNAC

❏ BELGIQUE

Un billard à trois bandesLe Belgique se désintéresse du scrutin européen, éclipsé par les régionales.Eclaboussées par des scandales, les forces politiques devraient voir leuréquilibre modifié. Le gouvernement fédéral y survivra-t-il ?

QUI SÈME LE CRIME...

NUL NE PEUT approuver l'assas-sinat par un militant pro-vie,dans une église luthérienne duKansas, de George Tiller, méde-cin spécialisé dans la pratiquedes avortements dits tardifs. Lesdéfenseurs des meilleures causesdesservent celles-ci quand ils selaissent gagner par la haine.Toutefois on nous permettra dene pas éprouver pour ce praticien

la même compassion que pour sesmultiples petites victimes inno-centes. De toutes les violences,l'avortement est la pire puis-qu'elle s'exerce sur les êtres lesplus petits et les plus démunis etqu'elle habitue, comme le disaitmère Teresa, les hommes à se li-vrer à la violence pour réglerleurs différends. Qui sème lecrime récolte le crime...En tout cas, c'est là un coup desemonce pour l'angélisme du pré-sident Barack Obama qui, di-manche 17 mai, prêchait à l'uni-versité catholique Notre-Dame àSouth Bend, pour une ententeentre les pro et les anti avorte-ment, tandis qu'à l'extérieur lesdéfenseurs de la vie, y comprisdes prêtres, étaient tabassés. Reste à voir si les opposants aumeurtre prénatal ne vont pas su-bir des représailles au moment oùSonia Sotomayor, favorable àl'avortement, vient d'être nomméepar Barack Obama juge à la Coursuprême des États-Unis.

M.F.

Les écologistes pourraient rafler la mise.

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ASPECTS DU MONDE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 9 ❚

Depuis des années, la Soma-lie est livrée à l'anarchie,aux guerres de clans et aux

trafiquants. Ce pays n'a plus d'É-tat. L'autorité installée par l'ar-mée éthiopienne à Mogadiscio,avec le soutien actif des Améri-cains, n'a jamais été effective.On a cru pendant un moment queles islamistes, après avoir pris lecontrôle de la quasi-totalité dupays, avaient été éloignés, sinonchassés du pouvoir. Illusion. L'ar-mée éthiopienne est partie. PourWashington, la Somalie n'est plusune "priorité". Les millions de dol-lars versés par les uns et lesautres n'ont servi et ne serventplus à rien.

Figuration

Les islamistes ultraradicaux,menés par le cheikh Hassan Da-tin Aweys, ont pratiquement re-pris le contrôle du pays et mêmela majeure partie de la capitale.Ils sont en train d'installer un nou-vel "État" du type taliban, oumême pire, à Mogadiscio. Qui lessoutient ? Bien que sunnites, ilsrecevraient des armes des aya-

tollahs chiites leur parvenant parl'Érythrée, ainsi qu'une aide fi-nancière des services spéciaux oc-cidentaux et égyptiens. Les isla-mistes prélèvent également une

part importante des rançons ob-tenues par les pirates qui écu-ment la mer Rouge et le golfed'Aden. Tout cela fait beaucoup.Les quatre mille soldats de la

force d'intervention africaine ins-tallés sur place ne sont ni conve-nablement armés, ni homogènes,ni surtout véritablement com-mandés ; ils font à peine de lafiguration. Les Éthiopiens sontpartis en janvier dernier sans avoirobtenu de résultat convaincant.Ils n'ont pas l'intention de reve-nir et l'Amérique d'Obama ne lessoutient pas.

On ne saurait nier qu'une par-tie de la population semble fa-vorable au retour des islamistesau pouvoir. Pas tellement parconviction religieuse – tout lemonde est musulman dans cepays – mais par lassitude. On pré-fère parfois la barbarie islamisteau désordre et à l'anarchie !

L'Afrique orientaleen danger

Qu'on regarde la carte : lamainmise totale des islamistes se-rait un danger pour toute une par-tie de l'Afrique orientale, pour l'É-thiopie, pour Djibouti, dont l'im-portance stratégique n'a pas à êtrerappelée. Les pirates seront en-core plus en sécurité, et les ter-roristes, qui bénéficient déjà depoints de chute bien à l'abri, pro-tégés plus efficacement. Ne par-lons pas de non-respect des droitsde l'homme : personne ne s'y in-téresse, sauf lorsqu'il s'agit de dé-stabiliser un pays ami ou allié del'Occident ! Il serait donc irres-ponsable de feindre d'ignorer lagravité de la situation somalienne.

PASCAL NARI

❏ SOMALIE

Nouveau sanctuaire islamiste ?L'aide internationale n'a pas suffi à consolider le semblant d'État somalien. Le pays se trouve confronté à une nouvelle offensive islamiste. Un moindre mal aux yeux d'une partie de la population, lassée par l'anarchie...

Deux essais nucléaires sou-terrains et six tirs de mis-siles en moins d'une se-

maine. La dictature staliniennede Corée du Nord et son "cher lea-der" Kim Jong-il viennent de pro-céder à un véritable coup deforce, ou de lancer un défi. Leurdiplomatie a même eu "l'élégance"d'avertir par avance les Améri-cains de ses essais nucléaires.

Une succession délicate

Voici donc confirmées, si be-soin était, leurs capacités mili-taires. Ils possèdent des missilessusceptibles de frapper la Coréedu Sud et le Japon. Ils finirontrapidement de miniaturiser leursbombes et, éventuellement, ac-querront auprès des ayatollahsde Téhéran des missiles à pluslongue portée. Le régime de Kimest abject, indéfendable. Mais sesdirigeants, aveuglés par un na-tional-communisme d'un autreâge, responsable de tant decrimes, ne sont pas fous. Onn'imagine guère qu'ils se serventde cette puissance destructricepour frapper leurs voisins "capi-talistes", dont l'inquiétude est

pourtant bien justifiée sur le planpolitique, puisque la nouvelledonne stratégique modifie l'équi-libre régional et les rend dépen-dants des États-Unis.

Chantage

Cette démonstration de force,ou cette gesticulation, a biend'autres raisons. Dans ses négo-ciations avec Washington, Pyon-gyang n'a pas réussi à obtenir ce

qu'il cherchait : aide financièremassive et sans condition, pétroleet... considération politique. Au-trement dit, l'assurance de sa sur-vie. Le régime se livre donc auchantage nucléaire pour des rai-sons intérieures.

Barack Obama avait prati-quement exclu la Corée du Nordde ses priorités diplomatiques.Par sa démonstration spectacu-laire, Kim Jong-il se rappelle aubon souvenir du président des

États-Unis. Il vient de réussir surce point : on va de nouveau né-gocier avec lui. Il n'est pas excluque, traversant une phase déli-cate – la succession de Kim, ma-lade –, la direction nord-coréenneait voulu adresser un avertisse-ment à Washington, Tokyo et Séoulpour les dissuader d'intervenir. Onrevient à l'explication fondamen-tale : l'assurance de survie.

Des sanctionsde papier

Les discours "musclés" des di-rigeants occidentaux face à la dic-tature sanguinaire de Pyongyangn'ont pas d'effet. On ne les consi-dère pas crédibles. On voit diffi-cilement quelles nouvelles sanc-tions – parfois sur papier unique-ment – ils pourraient prononcer.Il faudra donc reprendre la né-gociation avec le régime nord-co-réen et s'en remettre à une évo-lution plus lente de la situationinterne du pays.

P.N.

❏ NUCLÉAIRE

Assurance nord-coréennePar sa nouvelle démonstration de force, Pyongyang veut s'imposer sur la scènediplomatique mondiale... et assurer la survie d'un régime stalinien.

Le régime de Kim est abject.

» AFGHANISTAN

Un caporal-chef français estmort à l'hôpital militaire deBragram le 24 mai, après avoirété touché à la tête par uneballe tirée par son arme deservice. On ignore s'il s'agitd'un accident ou d'un suicide.Deux jours plus tard, Jean-Do-minique Merchet confirmait surson blog que 150 gendarmesseraient envoyés en Afghanis-tan à l'automne.

» RAFALE

Revenu d'Abou Dhabi où il ainauguré une base militairefrançaise, le président de laRépublique n'a pas pu confir-

mer la commande de soixanteRafale par les Émirats arabesunis. Ce n'est pas unesurprise : la définition des ca-ractéristiques des appareilsfait toujours l'objet de discus-sions. Confrontés à la menacede l'Iran, située à à 225 kilo-mètres de leurs côtes, les Émi-rats exigent le meilleur de latechnologie : par rapport à laversion française du Rafale, ilsréclament entre autres unnouveau radar et davantage defurtivité. Rappelons que cesavions doivent remplacer desMirage 2000 plus sophistiquésque ceux équipant l'arméefrançaise... (cf http://secret-defense.blogs.liberation.fr)

» GAFFE DIPLOMATIQUE

Nouvelle gaffe de Nicolas Sar-kozy : il n'avait pas invité lareine Elizabeth II aux céré-monies du soixante-cin-quième anniversaire du dé-barquement en Normandie.L'Angleterre a pourtant parti-cipé activement à cet événe-ment et la souveraine est ledernier chef d’État encore envie à avoir porté l’uniformependant la Seconde Guerremondiale. Un porte-parole dupalais de Buckingham avaitrapporté qu'en réponse à cet"oubli" aucun membre de la fa-mille royale ne ferait le dépla-cement. C'est finalement Wa-shington qui s'est chargé derectifier le tir : le princeCharles sera invité.Qu'une grande puissance seprononce sur la participationd’une autre à un événementinternational, c'est plutôt inha-bituel. L’initiative a cependantété accueillie favorablementpar la reine. Elle l’a qualifiéed’utile. Une affaire qui negrandit guère Nicolas Sarkozy,lequel voulait parader seul auxcôtés du super-grand BarackObama...

Page 10: DU LUNDI LES 6 ET 7 JUIN Se décider en fonction de la France...de Tintin et Hergé PAGE 12 CULTURE 3 s N 2772 63e année Du 4 au 17 juin 2009 Paraît provisoirement les premier et

Cette année-là, la neuvièmede son règne effectif, Ro-bert II, trente et un ans,

ayant non sans déchirements (voirL'AF 2000 du 21 mai) surmonté lestumultes de son cœur trop tendre,venait de contracter un mariageparfaitement légitime mais, nousl'avons laissé entendre, la joliefille de Guillaume Taillefer comtede Provence, Constance d'Arles,dix-sept ans, allait être le pur-gatoire de son mari.

Épouseextravagante

Figurons-nous la situation.Alors qu'à Paris, les Capétiens me-naient une vie humble et pieuse,voilà que cette extravagante lais-sait arriver dans son sillage deshommes du Midi. Ils étaient « rem-plis de légèreté et de vanité, met-tant un luxe extrême dans leursarmes et dans les harnais de leurschevaux, avec des cheveux cou-pés à mi hauteur de la tête, labarbe rasée comme des histrions,portant des chausses inconve-nantes, privés de bonne foi et durespect de la foi jurée »... Dumoins selon le moine chroniqueurRaoul Glaber !

Il fallait toutefois que Robertfît contre mauvaise fortune boncœur, effort d'autant plus méri-toire que, cousine germaine deFoulque Nera, le terrible et pour-tant pieux comte d'Anjou, Con-stance imposait à la cour l'in-

fluence angevine, au détrimentdu comte de Blois, Eudes II, filsde Berthe, l'épouse congédiée !

Un mendiant sous la table du roi

Robert allait alors être un mo-dèle de charité. Car autant sonancien maître, le pape Sylvestre II,était un politique, le roi de Franceapparaissait à tous comme unsaint. Richer, autre moine chro-niqueur, le décrivait comme grand,possédant une belle chevelure, unregard modeste, une barbe im-posante et toujours bien peignée,

« une bouche suave et douce pourdonner le baiser de la saintepaix ». On lui doit les paroles etla musique de nombreux hymnesliturgiques, qu'il chantait lui-mêmedans le chœur, manière sans douted'invoquer Dieu pour qu'Il l'aidâtà supporter sa femme. On connaîtmaint récit de ses actes de cha-rité, comme le dîner d'un soir àÉtampes où il nourrissait un men-diant sous la table en cachette deConstance... tandis que le pauvrehomme, tout en mangeant, dé-coupait un ornement d'or qui pen-dait du vêtement royal, avant des'esbigner sans être inquiété...

Robert n'en devait pas moinsconfier à Constance la gestion desdeniers publics, en somme la di-rection d'un ménage qui s'éten-dait au royaume entier. La mo-narchie capétienne ne fut jamaismisogyne...

Prestige

Ce roi resté pour toujours "LePieux", fut aussi, dit Frank Funck-Brentano « toujours en guerre,assiégeant les châteaux, s'effor-çant, la lance au poing, de fairerégner la paix et la justice », caril devait guerroyer contre des féo-daux souvent sans foi ni loi qui,pour certains, avaient servi les Ca-rolingiens quelques années plustôt et se croyaient autorisés àmanquer de respect au filsd'Hugues Capet. Les maisons ri-vales, déjà citées, d'Anjou et deBlois commençaient à agrandirleurs domaines dangereusement.Toutefois Robert par son sens dela dignité royale, par sa justice etsa loyauté, en imposait à plus d'un.Dans ces années où les légendairesterreurs de l'an Mil mettaient lepeuple en ébullition de ci de là,s'imposa déjà, grâce au soutiendu roi, la "paix de Dieu", qu'on al-lait appeler plus tard la "trêve deDieu", qui permit aux évêques demoraliser l'exercice de la guerre.

En même temps, Robert ac-crut le prestige français sur leplan européen, s'entretenant en1023 avec l'empereur romain ger-

manique Henri II, qui, lui, allaitêtre canonisé, des réformes né-cessaires à l'Église en crise.

En dépit de la venimeuseConstance, qui allait vers 1030tenter de dresser ses fils contrelui, Robert II fit grandir en pres-tige la jeune monarchie capé-tienne. Il devait mourir le20 juillet 1031 à Melun, à soixanteet un an. Comme le dit le duc deLevis-Mirepoix, « dès sa généra-tion, la dynastie n'est plus contes-tée dans sa légitimité de prin-cipe. Les plus humbles s'y recon-naissent. Une espèce de candeurévangélique en dépit des troublesdu temps plane sur elle. » L'aven-ture entamée à Senlis en 987 au-rait un avenir.

Constance, quant à elle, al-lait survivre deux ans à Robert,trouvant encore le moyen d'atti-ser la jalousie de ses fils cadetscontre l'aîné et successeurHenri 1er (que Robert avait eu lasagesse de faire sacrer en 1027,à dixneuf ans). Sans doute a-t-elle sauvé son âme en construi-sant un oratoire à Étampes et enfaisant édifier un monastère dechanoines à Poissy...

Nous avons déjà conté la ma-nière dont Henri 1er échapperaitaux difficultés de son père avecles femmes en allant prendre lasienne... en Ukraine (L'AF 2000du 18 septembre 2008).

MICHEL FROMENTOUX

❚ HISTOIRE

❚ 10 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

❏ CETTE ANNÉE-LÀ

1003 : Un modèle de roi chrétienMarié à Constance d'Arles, qui assure la gestion des deniers publics, Robert II fait contre mauvaise fortune bon cœur. Bravant les terreurs de l'an Mil, guerroyant contre des féodaux souvent sans foi ni loi, il en impose à plus d'un par son sens de la dignité royale, par sa justice et sa loyauté.

LYAUTEY PILONNÉPAR LA RÉPUBLIQUE

VOICI UN OUVRAGE d'autant plusintéressant qu'il traite d'un sujetoublié de la plupart des Fran-çais, la guerre du Rif, qui se-coua le Maroc de 1923 à 1926.

Certes, depuis lors, la SecondeGuerre mondiale et ses séquellesont éclipsé cet évènement dontle caractère "colonialiste" suffiraità le faire honnir aujourd'hui.Les auteurs se sont livrés à uneétude minutieuse des opérationsmilitaires tant espagnoles quefrançaises et, bien sûr, rifaines.Peu de détails manquent à cetteremarquable histoire de la guerredu Rif qui fut, dans une largemesure, une conséquence destractations ayant mené au traitéde protectorat du 30 mars 1912 ;

la zone du Rif entourant d'ouesten est les "presidios" de Ceuta et de Melilla est depuis demeu-rée espagnole.Ce massif inhospitalier, peuplé detribus berbères farouchement in-dépendantes, créait une difficultémajeure à une Espagne relative-ment arriérée, à la politique in-stable et aux forces militaires in-suffisantes malgré des unitésd'élite comme le "Tercio", légionétrangère de Millan-Astray etFranco. Le désastre de juillet1921 stimula l'ambition d'Abdel-krim, qui se heurta aux Français ;déterminé à fêter l'Aïd el Kebir le3 juillet 1925 à Fez, le chef de laRépublique du Rif devint celui duMaroc lui-même.

PRIS PRIS AU DÉPOURAU DÉPOURVUVU

L'ouvrage de MM. Courcelle-La-brousse et Marmié expose l'incer-titude des politiques, même dumaréchal Lyautey, pris au dé-pourvu dans son projet de pacifi-cation considérant les adversairesnon comme des ennemis à dé-truire mais des opposants à ral-lier. Il ne prévoyait aucune actionconjointe avec les Espagnols, qu'ilestimait peu, d'autant que le gé-néral Primo de Rivera, chef du

gouvernement, pensait même,dans un premier temps, abandon-ner le Maroc, à l'exception des"presidios". Lyautey n'entendaitpas combattre un champion del'indépendance, mais ramener Ab-delkrim dans le giron du Maghzen.Les événements allaient en déci-der autrement. Fez fut sauvée,mais les demandes de renforts dumaréchal ne furent qu'imparfaite-ment satisfaites ; le gouverne-ment trouvait l'occasion de se dé-faire de cet homme encombrant,trop personnel et trop glorieuxpour la République. Comme le re-latent les auteurs, Abdelkrim at-taqua le protectorat français, etles socialistes pilonnèrent Lyau-tey, qui avait plusieurs fois mis engarde le gouvernement contreune attaque rifaine, notammentle 14 avril 1925.L'instrument de cette politiquefut le maréchal Pétain, à qui lecommandement militaire fut dé-volu avec de très importantsmoyens, dont n'avait jamais bé-néficié le résident général. L'ac-cord avec le gouvernement espa-gnol pour une offensive en te-naille eut définitivement raison,à la fois, d'AbdelKrim - qui serendit aux Français et fut envoyéen exil à la Réunion - et du maré-

chal Lyautey - acculé à donner sadémission le 24 septembre 1925.Grâce soit rendue aux auteurspour avoir accompli la reconstitu-tion d'une période marquée par laréussite de l'épopée colonialefrançaise au Maroc sous l'égide deLyautey, et par l'incarnationconcrète des futurs désirs d'indé-pendance, d'ailleurs anticipés parle maréchal, en la personne d'Abdelkrim.

GENTILHOMMIÈREGENTILHOMMIÈRE

Signalons enfin, avec un pince-ment de cœur, que le gouverne-

ment de la République avait pré-paré pour lui, avant qu'il nes'évade vers l'Égypte du bateauqui le transportait en 1947, unegentilhommière à Villeneuve-Lou-bet, à peu de distance de la mai-son de son vainqueur, le maréchalPétain, qui, lui, finissait ses joursdans une cellule au fort Pierre-Levée à l'île d'Yeu...

ANDRÉ PERTUZIO

* Vincent Courcelle-Labrousse & Ni-colas Marmié : La Guerre du Rif. PointsHistoire, mai 2009, 11 euros (réédi-tion en poche).

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Marié à une femme insupportable, Robert II apparaissait à tous comme un saint

Le donjon de Montbazon vestiges de la fin du Xe sicèle

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Le colloque « Jacques Bain-ville : profils et récep-tions », qui s'est déroulé à

Metz les 13 et 14 mai dans uneambiance fort sympathique, étaitorganisé comme les précédentspar Michel Grunewald, directeurdu Centre d'études germaniquesinterculturelles de Lorraine, Oli-vier Dard, directeur du Centre ré-gional universitaire lorrain d'his-toire, et Michel Leymarie, pro-fesseur à Lille III. Dans sonintroduction, Olivier Dard rappelaqu'il s'inscrivait dans un cycled'étude des droites nationalistes,focalisé sur l'Action françaiseparce qu'elle constitua, avantguerre, un laboratoire d'idées.

Succès en librairie

Mais pourquoi s'intéresser spé-cialement à Bainville, nonobstantsa valeur personnelle ? D'abordparce que certains de ses livresont connu chez nous un succèsconsidérable : son Histoire deFrance s'est vendue à plus de300 000 exemplaires, son Napo-léon à plus de 200 000. Ensuiteparce que plusieurs de ses œuvresont été traduites en anglais, enallemand, en espagnol, en portu-gais et, plus étonnant encore, enturc, en finlandais, en japonais,en chinois. Des dirigeants de l'AF,il était le seul qui vivait de saplume. Enfin, il y a aujourd'hui unrenouveau d'intérêt pour Bainvillecomme en témoigne les rééditionsdes Conséquences politiques dela paix, son maître livre, et deson Histoire de France. En 2004,Christophe Dickès a soutenu unethèse remarquée et remarquablesur cet historien. Alain Griotteraylui avait dédicacé après la chutedu mur de Berlin son Voyage aubout de l'Allemagne, et il est citéen référence par les souverainis-tés, par Paul-Marie Coûtaux etPierre Hillard notamment.

Comme le souligna GuillaumeGros, « entre histoire et journa-lisme », la postérité a surtout re-tenu de Bainville sa réhabilitationde l'Ancien Régime et sa visionprophétique de l'Europe après1918. Fondateur de l'école "ca-pétienne", Bainville, se situantentre Michelet et les Annales, afait aimer l'histoire au grand pu-blic. Le succès de son Histoire deFrance publiée en 1924 chezFayard excita la jalousie des uni-versitaires. Avec son Histoire dela IIIe République, il se fit histo-rien de l'immédiat. Ainsi a-t-il ou-vert des pistes nouvelles.

Son talent de vulgarisateur semanifesta particulièrement dansles domaines économique et fi-nancier, comme l'a montré OlivierDard. Bien qu'autodidacte en cesmatières, il écrivait dans L'ActionFrançaise mais aussi dans Le Ca-pital et La Liberté, des journauxspécialisés, et dans Le Petit Pa-

risien, qui tirait chaque jour à unmillion et demi d'exemplaires. Rai-sonnant en historien, Bainvilleconsidérait qu'il n'y avait rien denouveau sous le soleil. Le soclede la richesse était l'épargne ;aussi était-il pour l'équilibre bud-gétaire, contre l'intervention del'État et le développement du cré-dit : c'était un disciple des phy-siocrates et un antikeynésien. Sesidées furent assez mal reçues parles maurrassiens car il était étran-ger au corporatisme. En revanche,il était apprécié des milieux fi-nanciers et patronaux. Pour Gi-gnoux, professeur d'économie po-litique, Bainville était un maître.En fait, c'était un néolibéral ; un"petit bourgeois radical" qui n'avaitpas compris les changements éco-nomiques apportés par la guerreet la crise de 1929, d'où ses di-vergences avec la nouvelle droiteet les jeunes générations.

Géopolitique

Selon Christophe Dickès, il n'enfut pas moins un géopoliticien degénie. Pour lui, la politique étran-gère obéissait à une loi de dé-pendance : les mêmes causes pro-duisent les mêmes conséquences,le passé commande l'avenir ; lanature humaine ne change pas,seuls changent les opinions et lessentiments. Bainville admirait legénie de Richelieu et les traitésde Westphalie qui, en morcelantl'Allemagne, assurèrent jusqu'à laRévolution la sécurité de laFrance. Depuis, celle-ci connutcinq invasions. La victoire de 1918permettait d'établir un nouveléquilibre européen. Les traités depaix ont tout gâché en renforçant

l'Allemagne. En introduisant la dé-mocratie dans ce pays, les vain-queurs ont même préparé l'al-liance du nationalisme et du so-cialisme.

Orient

Jacques Bainville porta éga-lement son regard vers l'Orient,ce dont a rendu compte PierreBehar. À ses yeux, l'empire turcétait le meilleur gardien des dé-troits et sa disparition fut un mal-heur pour la France. Face à laRussie des Soviets continuant icila politique des tsars, un pouvoirfort était nécessaire à Constanti-nople. C'est pourquoi Bainville ap-prouva Mustapha Kemal. Dès 1920,il avait prévu que la judaïsationde la Palestine réaliserait l'uniondes Arabes contre les sionistes et

l'Occident, conduisant à uneguerre des civilisations. C'étaitaussi le sentiment de Roger Lam-belin, autre rédacteur de L'ActionFrançaise, qui fut ainsi le premierjournal à prendre position en fa-veur des Palestiniens. Pour Bain-ville, l'Ouest s'étendait jusqu'à laChine, qui l'inquiétait beaucoup.Unique rempart contre l'anarchie,le Japon se trouvait en concur-rence avec les États-Unis. Pous-sés par les Soviets, les Chinois serévolteraient contre les Occiden-taux, dont l'avenir en Extrême-Orient apparaissait bien sombre.

Jacques Bainville fut conscientde la responsabilité de tous lesbelligérants dans le déclenche-ment du premier conflit mondial :il incrimina la République fran-çaise (coupable d'avoir refusé l'al-liance autrichienne), le principe

révolutionnaire des nationalitéset l'Allemagne, ce dont témoigneson journal étudié par Mme YaelDagan. Curieusement, celle-ci n'apratiquement pas parlé du voyagede Bainville en Russie, entreprisen 1916 à la demande du gou-vernement français, ce qui étaitassez extraordinaire et aurait mé-rité qu'on s'y arrêtât.

Le cas échéant, peut-êtren'aurait-elle pas affirmé que « laguerre [avait] fait plus pour Bain-ville que Bainville pour laguerre », ni qualifié celui-ci,« d'une certaine manière », de« profiteur de guerre », ce quiest pure médisance.

Hommages

Bainville est mort le 9 février1936. En raison des oukases pon-tificales contre l'Action française,il n'eut droit qu'à des obsèquesciviles le 13 février, pendant les-quels un incident se produisit : savoiture ayant voulu couper le cor-tège, Léon Blum fut pris à partiepar des provocateurs ; il ne dutson salut qu'à Pierre Juhel, chefdu service d'ordre des camelotsdu Roi, qui monta sur le marche-pied du véhicule et donna l'ordre,revolver au poing, de le laisserpasser. Il n'empêche que le gou-vernement en profita pour dis-soudre les ligues.

Le 1er mars suivant, La RevueUniverselle consacra la majeurepartie de sa livraison à son fon-dateur. On y trouvait une cin-quantaine d'hommages finementanalysés par Michel Leymarie. Onremarque des articles de Mauriac,Gillet, Valery. Ces académicienss'abstinrent d'écrire deux ans plustard dans le numéro consacré àMaurras, preuve que Bainvilleétait un esprit consensuel. On sa-lua son bon sens, sa culture, samaîtrise de la langue, son in-comparable talent de journaliste.On l'appelait « le sage de la fi-nance ». On louait en lui l'histo-rien hors pair qui cherchait desconstantes dans la vie des peuplestout en laissant place à l'impré-visible. Mauriac se demanda pour-quoi cette « vigie debout pendanttant d'années à la proue de laFrance » vit ses avis « se perdredans le vent ». Tout simplementparce qu'on était en républiqueet que la république, c'est lafemme sans tête.

YVES LENORMAND

Parfaitement justifié dans lespages et comportant une foulede faits chronologiques mar-quants de son histoire et cellede la France de 1859 à nosjours, le sous-titre précise : Le Grand Siècle de l'Actionfrançaise.

Ce très important volume(484 pages) est une œuvre d'im-portance, synthétique, claire,précise et de référence; l'ou-vrage contient une quantité defaits historiques oubliés, mécon-nus ou occultés. On trouve dans

les pages de l'ouvrage des infor-mations que l'on n'a pas relevées par ailleurs.Comme dans toutes ses œuvres,l'auteur a le talent de présenterles textes les plus essentiels àconserver et les citations fortesle plus marquantes.Ce travail essentiel doit avoir saplace dans toutes nos biblio-thèques. Il doit rester à portéede la main de ceux qui s'inté-ressent à l'histoire des idées etdes événements qui ont marquénotre histoire.

JEAN-MARIE CUNY

* François-Marie Algoud : Actualitéet présence de Charles Maurras. Préface de Michel Fromentoux.484 pages, format 21 x 24 cm. Illus-tré de documents divers 60 euros.En vente aux Éditions de Chiré.BP n° 1 86190 Chiré-en-Montreuil.

HISTOIRE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 11 ❚

❏ UNE ŒUVRE REMARQUABLE

Actualité et présence de Charles Maurras (1868-1954) PU

BLIC

ITÉ

❏ COLLOQUE

Jacques Bainville, journaliste historienVulgarisateur talentueux, Jacques Bainville signa des ouvrages historiques largement diffusés. Journaliste, il traitait de géopolitique mais aussi d'économie... Cette personnalité éclectique suscite un intérêt renouvelé, ce dont témoigne le colloque universitaire qui lui fut consacré le mois dernier.

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EN PAGE 11

❚ CULTURE

❚ 12 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

COMMUNICATIONSPIRITUELLE

JEAN-BAPTISTE MAILLARD, jeuneinformaticien, s'afflige et s'in-quiète à juste titre de l'atmo-sphère intellectuelle et moraledans laquelle ne vivent que tropde Français : déchristianisation,montée de la dictature de l'ar-gent, du sexe, de la drogue et dela violence (dont celle de l'avor-tement), menace de l'instaurationdu travail le dimanche. Bien plusqu'en 1943, comme le disait letitre d'un livre célèbre, la Franceest un pays de mission.Croyant, comme le sont encorebeaucoup de nos compatriotes,M. Maillard est convaincu que l'É-glise est le plus court chemin versDieu. Qu'il faut la servir par tousles moyens, du plus simple auplus sophistiqué ; qu'il faut prati-

quer, comme l'a dit Jean-Paul IIen 1979, une « nouvelle évangéli-sation ». De nombreux exemplesen sont ici présentés.

THÉOLOGIE

L'Évangile lui-même se racontait :la foi juive aussi était ainsi trans-mise, même si la Bible était lelivre par excellence. Évangéliser,selon la formule de Mgr Vingt-Trois, archevêque de Paris, « c'estpermettre à la liberté humainede s'exercer en lui donnant toutsimplement à voir comment lapuissance de Dieu peut transfor-mer les existences humaines ».Mgr Barbarin, archevêque de Lyon,Mgr Cattenoz, archevêque d'Avi-gnon - qui tous deux ont beau-coup œuvré outre-mer, l'un à Ma-dagascar, l'autre au Tchad -,Mgr Rey, évêque de Fréjus-Toulon,abondent dans ce sens, le dernierprécisant que « l'Évangile n'estpas une question de sentiments,mais de cohérence : nous sommesfaits pour évangéliser ». Et Benoît XVI de préciser que « lanouvelle évangélisation part de laconversion des catholiques ».Dans ce travail où les formulessont très variées, la théologie

doit jouer un rôle important, si-non c'est le règne des sentiments.Jean-Baptiste Maillard procède àun inventaire de ce qu'il y a deplus original, de plus neuf, en ma-tière de techniques d'évangélisa-tion. Sont évoquées des organisa-tions connues : la Communauté del'Emmanuel, l'Opus Dei, avec letémoignage d'une convertie, lec-trice des Pensées de Pascal et duCatéchisme de l'Église catholique,ces deux ouvrages s'épaulant.

SORTIE EN BOÎTE

La véritable crise que nous vivonsétant une crise de la vérité et dusentiment profond de notre exis-tence, « l'apostolat ordinaire »ne peut pas se permettre le luxede la superficialité. Si la viecontemplative peut être aussiévangélisatrice, d'autres aspectsplus contemporains sont apparus :groupes de jeunes, pratique duporte à porte, réunions en rela-tion avec la paroisse, initiativesdans le milieu professionnel, ac-tions en plein air avec les mo-tards de la Saint-Jean, ou sur laplage, et pourquoi pas dans lesboîtes de nuit ? À Paray-le-Moniala été créée une école d'évangéli-

sation. Dans la vie quotidienne,les chrétiens peuvent êtreconfrontés aux couples désunis,en voie de séparation. LesÉquipes Notre-Dame, les maisonsde l'Alliance, les fraternités Cana,les maisons de l'Emmanuel sontalors d'un vrai secours.

UN PRIVILÈGE URBAIN

Il semble possible d'évangéliserles musulmans et l'auteur pensequ'il y a des restes de christia-nisme en Kabylie. Il raconte laconversion d'un juif orthodoxe,grand lecteur de saint Jean de laCroix, témoignant affectueusesympathie à la Vierge Marie, etdistinguant la Trinité dans le livrede la Genèse. Peut-on aussi évan-géliser les Évangéliques ?Cet ouvrage bien documenté nousfait pressentir que « Dieu est deretour ». Mais l'environnement ur-bain est sans doute, dans ce do-maine, privilégié par rapport auxcampagnes.

RENÉ PILLORGET

* Jean-Baptiste Maillard : Dieu est deretour - La nouvelle évangélisation dela France. Éd. de L'Œuvre, mai 2009,381 pages, 20 euros.

Biscornu et aérien. Voilà lesdeux mots qui résument àmes yeux le musée Hergé

inauguré il y a quelques jours enBelgique, à Louvain-la-Neuve 1. LeHergé auquel il fait songer est ce-lui de son album inachevé L'Alph-Art. Vers la fin de sa vie, Hergéétait de plus en plus passionné parles arts modernes. Andy Warholfit son portrait. Il aurait sans douteaimé l'architecture donnée parChristian de Portzamparc au mu-sée consacré à sa vie et à sonœuvre. L'originalité réside dansses cubes en quinconce qui dan-sent suspendus dans l'air au mi-lieu des arbres.

Clameurs

Il aura fallu du temps, de lavolonté, de l'imagination à Fannyet Nick Rodwell pour qu'aboutisseleur dessein. Ils ont réussi. Mêmesi le vernissage pour la presse asuscité cris, fureurs et tumultes.Il n'était pas prévu que les œuvresexposées soient filmées. Des jour-nalistes de la presse étrangère s'ensont indignés. Leurs clameurs au-raient fait paraître timides etternes les colères du capitaineHaddock. Qu'à cela ne tienne millesabords ! La polémique, l'éclat sur-venu ont avivé la lumière des feuxde la rampe. L'aurait-on fait ex-près qu'on n'eût pas mieux réussi...

Trêve d'ironie. Ce ne sont làque péripéties, l'écume des agi-tations médiatiques. Ce qui est àretenir est ailleurs. L'auteur du

Temple du Soleil a désormais sontemple à lui. C'est son chemin devie qu'on y découvre et la genèsede son œuvre. Hergé s'expliqueet se révèle : « Je suis un hommed'ordre, même dans le dessin. »« Chaque album porte la traced'une époque », relève-t-il.

C'est à Pol Vandromme, l'amibelge de Blondin et de Nimier,que l'on doit Le Monde de Tintin,

paru il y a longtemps, mais ja-mais oublié. De ce monde, de"son" monde, Hergé écrit : « Tin-tin (et tous les autres) c'est moi,exactement comme Flaubert di-sait "Madame Bovary, c'est moi" !Ce sont mes yeux, mes poumons,mes tripes... »

Ce qui explique qu'il n'y auraplus d'album de Tintin après samort. Tintin est mort avec lui.

Fanny, en cela, a respecté sa vo-lonté lorsqu'il écrivait à proposde son héros : « Le donner àquelqu'un d'autre, c'est trahir Tin-tin et les lecteurs... »

Tintin c'est moi

Exprimer ce sentiment si fort,venu du fond de son âme, de sonesprit, de son cœur ne revenaiten rien à se défier de ses colla-borateurs les plus proches commepar exemple, l'excellent et ta-lentueux Bob Demoor. « Ils ontfait des choses beaucoup mieuxque j'aurais pu les faire mais, dansl'ensemble, Tintin c'est moi. »Tout est dit. Comme tout l'est,superbement illustré et commentédans le catalogue édité et mis envente par les éditions Moulinsart 2.C'est le complément à la visite dumusée, ce "Temple de Louvain-la-Neuve". Il mérite de figurer dansla bibliothèque de tout tintino-logue et de tous ceux qui aspi-rent à le devenir.

LUC BEYER DE RYKE

1 - Ouvert du mardi au dimanche de10 heures à 18 heures (fermeture descaisses à 17 heures). http://www.mu-seeherge.com ; 32 (0)2 62 62 421.2 - « En feuilletant l'ouvrage, on sui-vra la progression conçue pour leshuit salles du musée : salle 1, Par-cours d'une vie ; salle 2, Créationsmultiples ; salle 3, Une famille depapier ; salle 4, Cinéma ! ; salle 5,Le laboratoire ; salle 6, Rêves devoyages ; salle 7, Studios Hergé ;salle 8, La gloire d'Hergé. Chaque cha-pitre s'ouvre sur le texte de Domi-nique Maricq, archiviste des StudiosHergé, présenté en trois langues [...].Chaque document est reproduit dansson intégralité. Les chapitres sontponctués de citations d'Hergé, par-fois inconnues, qui expriment le ca-ractère extrêmement personnel d'une œuvre devenue universelle... »(39,50 euros à la librairie du musée)

❏ BELGIQUE

Le temple de Tintin et HergéLe musée Hergé ouvre ses portes à trente kilomètres de Bruxelles. Dotées d'une architecture originale, construites « au sein d'un écrin de verdure », ses huit salles retracent le chemin de vie du créateur de Tintin.

LA MORT D'UN "HUSSARD"LA BELGIQUE vient de perdrele plus doué peut-être de sesécrivains, Pol Vandromme.

L'Action française connaissaitet appréciait cet ami de Blon-din et de Nimier, compagnonde chevauchée des Hussards.Leurs plumes étincelaientcomme une lame et les motsétaient chamarrés semblablesau dolmen, attribut de ceschevau-légers des Lettres.Si on devait un reproche à PolVandromme, c'est de se laisserparfois emporter par la facilitéet la brillance. Mais quel plai-sir pour le lecteur subjuguépar l'ivresse des mots... Toutsauf l'ennui ! Vandromme sa-vait identifier ses maîtres.« La droite songeuse et cabrio-lante, selon le Dumas desMousquetaires, a mieux entêtémon imaginaire que la gauchesentimentale selon le Hugodes Misérables. »Hussard ou Mousquetaire, PolVandromme, tout au long de savie, tira l'épée et croisa le fer.Il n'a pas craint de consacrerdes études, des critiques, desanalyses aux écrivainsmaudits : Brasillach, Drieu, Cé-line. Dans ses biographies, sonMaurras, l'Église de l'Ordre mé-rite une mention particulière. La droite était sa famille d'es-prit mais lorsqu'elle buisson-nait et s'égarait, il la fustigeaitavec la cruauté du talent.Ainsi en fut-il du « Loup aucou de chien, Degrelle au ser-vice d'Hitler ». Au milieu d'uneœuvre riche, foisonnante, unlivre garde une originalité sanspareille : c'est en 1959 chezGallimard que fut publié soussa plume le premier essaiconsacré à Tintin.C'est avec émotion que l'on re-lève la concomitance de cesdeux événements. Le muséeHergé est inauguré à Louvain-la-neuve, Pol Vandromme, au-teur du Monde de Tintin, s'enest allé retrouver Hergé.Adieu l'Ami.

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CULTURE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 13 ❚

En Suède où Ake Edwardsonimpose depuis une dizained'années, à travers le com-

missaire Erik Winter et son équipede la police criminelle de Göte-borg, un style épuré, qui, sansrien concéder quant à la construc-tion de l'intrigue, impeccablementmenée, fait la part belle à l'étudepsychologique et à une dissectionimpitoyable des maux qui rongentl'Europe, et la Scandinavie. Dé-sormais quadragénaire, marié,père de deux fillettes, Wintervieillit mais, s'il a perdu l'essen-tiel de ses illusions sur l'huma-nité, et ne croit plus possible deguérir une société déboussolée,il ne renonce pas à trouver l'ex-plication, et les coupables, deshorreurs dont il est témoin.

Enquêtes au-dessusdes fjords

Voile de pierre : c'est à quoiressemble le ciel au-dessus desfjords, qui pèse sur les îliens.Lorsque Johanna Oswald, unamour d'adolescence, débarquede son archipel dans le bureau deWinter pour signaler la disparitionde son père à Édimbourg, il re-fuse de prendre la chose au sé-rieux, malgré des lettres anonymespromettant à Oswald des révéla-tions au sujet du naufrage du cha-lutier paternel, au large de l'É-cosse en 1940. La découverte d'uncadavre sur les rives du Loch Nessva pourtant obliger Erik à s'inter-roger sur ce drame et les silencesde certains patrons pêcheurs. Enparallèle, Edwardson suit les re-cherches de l'inspectrice Djanali,qu'une affaire de violences conju-gales met sur la piste de gensétranges, et dangereux.

Chambre n°10, hôtel Revy, unétablissement mal famé près dela gare : c'est là que, voilà dix-huit ans, Ellen Börge passa unenuit avant de disparaître. Wintern'a jamais oublié, car c'était sapremière enquête, et son premieréchec. Lorsque, dans cette mêmechambre, on découvre le corps

d'une jeune femme, le commis-saire ne peut s'empêcher d'éta-blir un rapport entre les deux af-faires. Pure absurdité puisquerien, après tant d'années, ne pa-raît relier Ellen, la disparue, à Paula, l'assassinée. Malgré le silence incompréhensible desproches de celle-ci, Winter s'ac-croche à son intuition, comme sirésoudre ce crime devait l'aiderà réparer ses erreurs de jeunesse.

Terre promise ?

Ce doux pays : Erik n'est paspersuadé que la Suède mérite en-core ce nom. Pourtant, elle at-tire des milliers d'immigrés clan-destins en quête d'une improbableterre promise. Le fait est qu'ellen'a pas réussi à Jimmy Foro, épi-cier africain d'une banlieue diffi-cile, à son commis et à l'un deleurs clients, massacrés à l'armelourde dans la boutique ouvertetoute la nuit. S'agit-il d'un bra-quage qui aurait mal tourné ? Lesympathique Jimmy ne l'était-ilpas tant que cela ? À moins que

son vendeur kurde ait trempé dansune histoire douteuse ? L'on n'aimeguère la police dans ces cités peu-plées d'étrangers, et l'on a encoremoins envie de parler quand destueurs rôdent dans le coin.

Désenchanté

Le monde d'Edwardson est ter-rible, à l'image de la réalité, maischez lui, l'horreur, omniprésente,est minimaliste, ce qui n'est passon moindre agrément dans ungenre devenu parfois insuppor-table de violence complaisante etde sadisme. Il y a là un peu deMac Bain, un peu de Simenon, etautre chose, qui est la patte duromancier suédois, parvenu à unetelle maîtrise qu'il peut tout sepermettre, même d'imbriquer sesintrigues les unes dans les autres,même d'alterner retours en ar-rière et récit au présent, sans que le lecteur, haletant, envisagede le lâcher.

L'Écossais Ian Rankin a plusd'un trait commun avec lui, etd'abord le regard désenchanté

qu'ils portent sur leur époque etleurs villes respectives. Cepen-dant, John Rebus, le héros ré-current de Rankin, ne ressembleguère au riche et séduisant Win-ter. Divorcé, incapable de re-construire sa vie, à la limite del'alcoolisme, souvent en frictionavec sa hiérarchie, Rebus, parcequ'il est lui-même un paumé, pos-sède une faculté d'empathie quilui permet de s'identifier aux vic-times, et parfois aux coupables.

Univers glauque

Le Fond de l'enfer renvoie en1990, lorsque Rebus vient d'êtrepromu inspecteur. Édimbourg de-vient un endroit à la mode maisceux qui s'y installent, s'ils ap-portent la prospérité, introdui-sent des mœurs que les indigènesne soupçonnaient point. Chargéd'enquêter sur la mort d'un jeunetoxicomane, persuadé, au granddam de ses supérieurs, qu'il s'agitd'un meurtre, Rebus néglige lesoccasions offertes de se frotterau "beau monde", celui des puis-

sants hommes d'affaires, au nomde la justice. Avant de découvrirqu'entre un drogué prostitué etles messieurs qui fréquentent lesrestaurants branchés, il existe cer-tains liens et que l'argent peuttout acheter. Sauf la conscienced'un flic honnête. Il faut entrerdans l'univers glauque de Rankin,apprendre à apprécier ses atmo-sphères, son rythme. On ne le re-grette pas.

Un assassin chez les écrivains

Pour tromper l'ennui du York-shire, la gazette locale organiseun concours de nouvelles, sansimaginer qu'elle va fournir unetribune inespérée au Logophile,auteur de Dialogues des mortsdans lesquels il se vante, avectrop de détails pour n'être pascrédible, d'une série de meurtres.Mais quel tueur en série inscriraitpêle-mêle à son palmarès un dé-panneur automobile noyé dans unruisseau, un joueur de bouzoukirenversé par un chauffard, unejournaliste de la chaîne de télé-vision locale poignardée, un élumunicipal trucidé à coups de bu-rin, et un universitaire empoi-sonné ? Devant cette absence demobile et ce modus operandi in-existant, l'inspecteur Dalziel, ditle Gros, qui aime cultiver sonimage de brute épaisse, croit de-venir fou, d'autant que, pour tra-quer un malade mental enivré desa propre prose, il faut s'aventu-rer dans le monde feutré des gensde Lettres, lexicographes, ensei-gnants et bibliothécaires, si dif-ficiles à imaginer en assassins...

Reginald Hill a rencontré lesuccès grâce au duo improbableque forment les inspecteurs Dal-ziell et Pascoe, ses héros ; il sejoue ici, avec un art consommé,de toutes les lois du genre pourdonner un roman raffiné, tordu,riche en fausses pistes, dont ledénouement se révèle aussi in-quiétant qu'inattendu.

ANNE BERNET

* Ake Edwardson : Voile de pierre ;Lattès, 525 pages, 21,50 euros.Chambre n°10 ; Lattès, 502 pages,21,50 euros ; également disponiblechez 10-18, 8,60 euros. Ce doux pays ;Lattès, 378 pages, 20 euros.* Ian Rankin : Le Fond de l'enfer ;Le livre de poche, 315 p., 6 euros.* Reginald Hill : Dialogues des morts ;Le Masque, 500 p., 21,50 euros.

❏ CHRONIQUE DES LIVRES

Romans policiers : crimes internationauxLongtemps spécialité anglo-saxonne, le roman policier s'est internationalisé et ses meilleurs auteurs se trouvent parfois là où on ne les attend pas : suédois, irlandais ou israéliens, ils nous entrainent à Göteborg ou Édimbourg, parmi les hommes d'affaires et les gens de Lettres...

» UN GOÛT DE CENDRE

COUP DUR POUR Me Delcroix, le fameuxavocat tourangeau et royaliste : on vientde retrouver en pleine brousse les restesde son ami Djerbitskine,Machin pour les intimes.Mais, à peine arrivé àNouméa, Delcroix com-prend que rien n'est clairdans cette histoire. Journaliste grandegueule, Machin s'était fait beaucoup d'en-nemis sur le Caillou, ce qui pourrait justi-fier un assassinat. Pourtant, certains dé-tails l'incitent à douter de cette mort, àcommencer par un manuscrit où Djerbists-kine donnait, de l'affaire qui l'obligea, en1981, à quitter Tours pour la Nouvelle-Ca-

lédonie, une version sans rapport avec laréalité ; dans ces pages, Serguei se lais-sait aller à des confidences scabreusesconcernant ses mœurs, ses choix poli-tiques, ses engagements. Qui était-il vraiment ? Delcroix n'a pas très envie de le savoir...Avec J'ai déjà donné..., roman posthumehélas, le regretté ADG mettait un termeaux aventures savoureuses du duo Machin-Delcroix, et le faisait d'étrange manière,cassant les codes, détruisant le person-nage que ses lecteurs avaient appris à ai-mer, qui ressemblait tant à certaines tru-culentes figures de la presse nationale. Lalangue garde la même virtuosité, les opi-nions demeurent aux antipodes du politi-quement correct, certaines scènes, tellela virée chez les aliénés aux commence-

ments de l'ère mitterrandienne, sontdignes de figurer dans une anthologie ; iln'empêche qu'entre deux fous rires, ledernier ADG laisse un goût de cendre...

» HUMOUR & NOIRCEUR

PERSONNE n'a revu la petite Yeara de-puis son enlèvement, voilà deux ans.Aussi, quand sa mère vient réclamer l'aidede Josh Shirman, ancien flic devenu dé-tective privé, sa première réaction est derefuser. Il change d'avis en consultant ledossier. Car, avant Yeara, cinq fillettes dumême âge, qui se ressemblaient étrange-ment, ont disparu dans les mêmes circons-tances, un 10 août, à deux ans d'inter-valle. Les corps de quatre d'entre ellesont été retrouvés, la veille d'un nouveau

rapt. Sherman se prend à penser queYeara est encore en vie. Mais pas pourlongtemps : on est le 5 août.Avec La Sixième Énigme, le romancier is-raélien Yaïr Lapid choisit un sujet clas-sique, l'enlèvement d'enfant et la piste dutueur en série pour entraîner son lecteurdans une enquête échevelée, croisant lescomparses les plus inattendus, et menant,non sans humour, au coupable le moinsprévisible. C'est très bien fait, très noir,très humain et pourtant souvent d'unerare drôlerie.

A.B.

* ADG : J'ai déjà donné... ; Babel noir,290 p., 8,50 euros.* Yaïr Lapid : La Sixième Énigme ; Fayard,295 p., 20 euros.

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❚ COMBAT DES IDÉES

❚ 14 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009

LES GRANDS LES GRANDS TEXTES POLITIQUESTEXTES POLITIQUES

AMOURETTI ET L'ENQUÊTE...Lisons aujourd'hui un extrait, précisé-ment la fin, de la réponse de FrédéricAmouretti à l'Enquête sur la Monarchie.

Et je dis au roi : « Roi, mon maître,parmi la série de vos ancêtres, ne regar-dez ni saint Louis, ni Henri IV, niLouis XIV. Regardez le bon roi Louis VI. Ilabattit les barons brigands, il transformales bons barons en prévôts qui proté-geaient sérieusement le petit peuple deFrance, paysans et artisans, et il donnaaux bourgeois des libertés sérieuses etétendues, mais précises et réglées. Ce futla besogne indispensable : elle rendit pos-sible les gloires séculaires. »

Commentaire de Charles Maurras : « Il n'ya rien à écrire en marge de cette lettreque bene, recte, optime. » Oserions- nous

contredire Maurras et commenter ? Si nous considérons le délabrement del'enseignement de l'histoire sous la Ve Ré-publique, il convient peut-être de diredeux mots sur Louis VI (1081-1137), cin-quième capétien direct, fils de Philippe Ier

et de sa première épouse Berthe de Hol-lande, roi en 1108. Il passa sa vie à ba-tailler contre les féodaux qui abusaientde leur pouvoir, rendit la justice, octroyades chartes communales. En août 1114, ilconvoqua ses vassaux autour de l'ori-flamme de Saint-Denis ; l'empereur ger-manique Henri V, qui s'était avancé jus-qu'à Reims, refusa la bataille et fit demi-tour. Louis VI eut pour conseiller Suger, lesage abbé de Saint-Denis.Nous reviendrons sur la lettre remar-quable de Frédéric Amouretti, personna-lité des plus importantes dans l'histoire del'Action française(1863-1903). Dans l'édi-tion définitive Maurras ajoute après salettre qui clôt l'Enquête : « Nous avonsperdu Frédéric Amouretti le 26 août 1903.Ceux qui auront su lire cette admirable

lettre sauront comme nous que sa mort aété une grande perte pour le pays. Sonsouvenir mérite de rester vivant et vé-néré à l'Action française, car personnen'eut plus de part que Frédéric Amourettià l'élaboration de ce corps de doctrine, le"nationalisme intégral". À l'Institut d'Ac-tion française, une chaire porte son nom.L'auteur de l'Enquête espère rendre unjour un complet témoignage à la mémoirede l'ami dont il a partagé dix années lesétudes et la réflexion. »

FÉLIBRÉEN

Amouretti avait fondé à Cannes, trèsjeune, le Réveil de la Provence et devintcinq ans plus tard secrétaire et collabora-teur de Maurice Barrès. Disciple de Mis-tral, il fut affilié très tôt aux groupes dufélibrige fédéraliste. Il avait étudié deprès le système départemental, en avaitexposé les vices et avait proposé une ré-organisation du territoire dans une pers-pective de décentralisation dans le cadre

des provinces. Ayant étudié l'économie li-bérale et le marxisme, il avait adopté laposition de Le Play et de La Tour du Pin. Iltraita de politique étrangère dans plu-sieurs journaux (le Soleil, l'Express duMidi, Paris-Nouvelles dont il fut le sous-directeur). Ses études du système poli-tique des Etats-Unis d'Amérique retinrentl'attention d'André Buffet, le prestigieuxinterlocuteur de Maurras au premierlivre de l'Enquête. Il collabora à La Co-carde de Maurice Barrès et fut égalementl'un des premiers rédacteurs de la Revued'Action française avant de mourir préma-turément.

GÉRARD BAUDIN

* Frédéric Amouretti et Charles Maurras : LaDéclaration des Félibres fédéralistes ; 1892,Paris ; réédité au Pigeonnier, Saint-Félicien enVivarais, en 1942.* André Cottez : Un précurseur du nationalismeintégral : Frédéric Amouretti (1863-1903), es-sai de biographie et bibliographie de ses ar-ticles ; Plon, Paris, 1937.

Il existe déjà des dictionnairesdes prénoms, toujours fasci-nants pour les curieux, mais

quand Alain de Benoist s'attacheà un tel sujet avec sa remar-quable puissance de travail, saprodigieuse érudition, son regardpassionné sur l'évolution desmœurs d'âge en âge et l'élégancede sa plume, il livre beaucoupplus qu'un catalogue à feuilleterpour se distraire.

Prudence !

Son Dictionnaire des prénomsd'hier et d'aujourd'hui, d'ici etd'ailleurs 1 est une véritablesomme renseignant le lecteur, àpropos de plus d'un millier de pré-noms et de leurs dérivés, sur leurorigine, leur étymologie, leur his-toire, leur fréquence selon lesépoques... Au-delà de ce que l'ontrouve dans ces pages d'instruc-tif, d'inédit, voire d'insolite, uneprofonde réflexion est toujoursprésente et devrait inciter les pa-rents à la prudence. « Choisir unprénom, écrit Alain de Benoistévoquant les sociétés tradition-nelles, c'est indiquer une direc-tion à suivre, un idéal à atteindre.La croyance la plus fréquente estque le prénom possède une in-fluence qui s'attache à l'âme et àla personnalité de celui qui leporte [... ] Il rattache l'enfant àsa famille, à sa lignée, à sa ré-gion ou à son pays d'origine [... Ilest] un marqueur culturel et so-cial, qui renvoie à des croyancesreligieuses aussi bien qu'à des sen-sibilités régionales ou nationales,à des logiques familiales, à desmodes de vie, à des façons diffé-renciées d'apprécier l'existence. »

C'est dire combien l'histoiredes prénoms est liée à l'histoiredes peuples, des croyances et desmentalités. C'est dire aussi, nous

semble-t-il, combien notre tempsapparaîtra aux historiens futurspauvre et déraciné avec les pré-noms qui se répandent au gré desengouements superficiels et quine portent parfois en eux aucunetradition...

De la filiation...

Alain de Benoist évoque lestemps anciens, notamment Romeoù le praenomen et le nomen setransmettaient héréditairement,suivis du cognomen plus propre àla personne et parfois d'un sur-nom : l'agnomen. En Grèce, pré-nom et nom marquaient l'appar-tenance à un clan ou à une li-gnée. En Gaule, nous ne savonspas grand chose jusqu'à l'appari-tion, au temps des invasions, desnoms germaniques aux originesbien souvent guerrières et mar-quant la filiation.

C'est avec le christianismequ'apparut la coutume de donneraux enfants des noms de baptêmepris en dehors de la parenté bio-logique. Les noms de saints si-gnifiaient une parenté spirituelle,un patronage particulier, un mo-dèle à suivre. Il s'ensuivit une di-minution des noms à choisir. Il fal-lut alors ajouter aux noms de bap-tême des surnoms qui devinrentles noms de famille. Le premierregistre des noms de baptêmeconnu en France date de 1411.Tous des prénoms chrétiens ouchristianisés par le truchementd'un saint patron. Face au pro-testantisme qui favorisait la dif-fusion de prénoms d'origine bi-blique, l'Église catholique pres-crivit que les noms de baptêmesoient toujours choisis parmi lessaints, afin d'éliminer les nomspaïens qui subsistaient encore encertains lieux. Décision qui ne

semble pas beaucoup plaire aumaître de la Nouvelle Droite, quicite Jacques Gélis parlant de « vo-lonté tenace d'élimination desvieilles solidarités » pour « fa-voriser l'émergence de l'indi-vidu ». Nous ne voyons pas, pournotre part, en quoi le fait de re-lier l'homme spirituellement à unsaint patron pouvait porter at-teinte aux solidarités temporelles,que l'Église s'est toujours atta-chée à consolider, ne serait-cequ'au niveau des paroisses...

En revanche, la Révolution,avec son "calendrier républicain"manifesta, elle, une volonté fa-rouche de rompre avec tout lepassé chrétien. On vit des enfantss'appeler Liberté, Floréal, Brutus,Citrouille, Pissenlit, Potiron, Té-légraphine, Sans-Culotte, Pomme,Giroflée, Cerfeuil, Asperge...,mais heureusement cette foliene survécut pas à la chute de Ro-bespierre.

... à la dispersion

Sur la fréquence d'attributiondes prénoms, reflet des influencesculturelles et religieuses, maisaussi des mentalité et des dépla-cements de populations, Alain deBenoist trouve de quoi intéresservivement chacun de nous. Sait-on qu'à la fin du XIXe siècle lesLouis, Pierre, Joseph, Marie,Jeanne, Marguerite dominaient,que les bacheliers de 1948 s'ap-pelaient surtout, dans l'ordre,Jean, Jacques, Michel, Pierre,Bernard, Claude, André, Françoiset Guy, que vers 1970 surgirentles Christophe, Stéphane, Gui-llaume, Nicolas, David, Sandrine,Frédéric, Nathalie, Olivier, Sté-phanie, Christelle, tandis que lesprénoms autrefois courants dis-paraissaient presque devant lamontée de prénoms nordiques ou

germaniques (Ingrid, Astrid, Ma-thilde, Clotilde, Eric) ou médié-vaux (Guillaume, Arnaud, Hugues,Thibault, Amaury, Ludovic...) ?

Exotisme

Plus récemment voici une floraison de Kevin, Thomas,Alexandre, Florian, Quentin, An-toine, Manon, Sarah, Laura, Ju-lie, Océane, Mattéo, Clara, Inès,Lisa, Chloé, Raphaël, Axel, Char-lotte, Morgane, sans parler desprénoms anglo-saxons, ou d'autresencore plus exotiques... Ce nesont là que des exemples pris auhasard, mais aujourd'hui on as-siste à un vaste éparpillement desprénoms et la liste des plus attri-bués change très vite, preuve queces nouveaux prénoms se démo-dent aussi vite qu'ils apparaissent.Une chance pour les plus anciensde redevenir bientôt à la mode etde paraître soudain originaux...

Cette étude passionnante, àlaquelle l'auteur ajoute des con-seils judicieux aux parents et desrenseignements sur les disposi-tions de l'état civil, pousse à mé-dier sur l'éparpillement de notresociété où l'idée même de trans-mission semble exclue...

MICHEL FROMENTOUX

1 - Alain de Benoist : Dictionnaire desprénoms d'hier et d'aujourd'hui, d'iciet d'ailleurs. Éditions Jean Picollec.512 pages, 35 euros.

❏ SOCIÉTÉS

Savoir donner son prénom à un enfantVoyage dans l'antiquité, révolution du christianisme, dispositions de l'état civil... Alain de Benoist retrace l'histoire des prénoms. C'est aussi celle des peuples, des croyances et des mentalités. Aperçu d'un dictionnaire passionnant, qui n'a rien d'un vulgaire catalogue.

Choisir un prénom, Choisir un prénom, c'est indiquerc'est indiquer

une direction à suivre, une direction à suivre, un idéal à atteindre.un idéal à atteindre.

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L'AF EN MOUVEMENT ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2772 – du 4 au 17 juin 2009 15 ❚

» MARIAGE

Le docteur Henri HENNET etMme sont heureux de vousannoncer le mariage de leurfils Benoît avec Mlle EvaDAVERDON.La cérémonie religieuse seracélébrée par M. l'AbbéBluecher, le samedi 4 juillet, à15 heures, en l'église Saint-Pierre-aux-Liens de Pannes(Loiret).Nous adressons nos vivesfélicitations à nos amis etfidèles abonnés, parents deBenoît ainsi qu'à la grand-mèreet aux parents de la jeunemariée, et nos vœux debonheur aux futurs époux.

» DÉCÈS

Nous apprenons avec tristessele décès du comte Hubert deDavid Beauregard le 29 mai2009 dans sa soixante-treizième année.Ancien conseiller municipal(1985-1995) d'Hyères-LesPalmiers , il était le petit-filsdu président de la fédérationdépartementale du Var del'Action française dans lesannées trente.Il accomplit un remarquabletravail lors du retour desrepliés d'Algérie en 1962,créant une association pourvenir en d'aide aux orphelinsrevenus d'Algérie qu'il recueillitdans sa propriété, avant de lesplacer dans des famillesmétropolitaines.La messe des funérailles a étécélébrée le mercredi 3 juin enl'église Saint-Louis d'Hyères-Les Palmiers, suivie del'inhumation dans le caveau dela chapelle familiale. L'Actionfrançaise était représentée parDanièle Wilkin. Nous présentons nos trèssincères condoléances à sonépouse Hélène, à ses quatreenfants et plusparticulièrement à notre amiPhilippe de David Beauregard,conseiller régional PACA.

» ÎLE DE FRANCE

❏ PParisaris - Permanence tous lesjours, 10 rue du Pélican, de18 heures à 20 h 30 ; le lundi

de 16 à 20 heures. Collages or-ganisés tous les mardis. Trac-tages les mercredis et vendre-dis matin. Conférence le ven-dredi à 19 h 30 .

❏ Cercle lycéenCercle lycéen - Chaquemercredi à 18 heures au Lucer-naire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs, Paris 6e.

JEANNE-D'ARC HONORÉEDANS LE SUD-OUEST

■ Comme chaque année à pa-reille époque, la fédération Aqui-taine-Grand Sud-Ouest a honoré,sous la présidence de ses dyna-miques responsables, la sainte dela Patrie dans les pôles princi-paux de ses activités. Toulouse arenoué cette année avec cettehonorable habitude.

Le 10 mai, malgré la pluie bat-tante, une jeune fille royaliste deBordeaux a offert à Jeanne la su-perbe gerbe de lys de la fédéra-tion. Le délégué régional de l'AFVincent Gaillère a ensuite pro-noncé un discours politique rem-pli de l'espérance qui animait nosmaîtres. La présence de jeunesréjouissait les cœurs des aînés. Àla fin, La Royale et La Marseillaiseont été entonnées avec enthou-siasme par l'assistance.Pendant ce temps, à Bayonne, lasection Béarn, Bigorre, Paysbasque, Landes, conduite par sondélégué dynamique, Philippe For-tabat-Labatut, avait réuni nos

amis au pied de la statue deJeanne au bûcher, due à MaximeRéal del Sarte, fondateur des ca-melots du Roi. Fervent témoi-gnage de foi en l'avenir, c'est làaussi une jeune fille royaliste quieffectua le dépôt de la gerbe.Dans son allocution, Philippe For-tabat-Labatut a souligné le ca-ractère symbolique de la mani-

festation devant une statue, dansla défense de laquelle la section,avec Pierre Pujo et L'AF 2000, aété en pointe, voici six ans.Contre les séparatistes et les am-bitieux de tous poils, l'AF conti-nuera donc d'agir où elle veut etcomme elle veut !Pour une raison indépendante denotre volonté, ce n'est que le

27 mai qu'a eu lieu, pour la pre-mière fois depuis plus de dix ans,la fête traditionnelle de Jeanne-d'Arc à Toulouse. Elle sera réta-blie à sa date légale l'an prochain.Le délégué régional a présentéune gerbe tricolore à la belle sta-tue équestre et a prononcé undiscours très attendu par nos amistoulousains sur l'« abstention an-tidémocratique » aux électionseuropéennes. L'AF n'a aucun in-térêt à accentuer les divisions despatriotes. Il a mis en garde l'au-ditoire contre la conception ra-ciste de la nation des identita-ristes, qui se diffuse actuellementdans les milieux catholiques, uneimpasse dangereuse qu'il convientd'éviter. Défendre les racines chré-tiennes de la France, d'ailleursplurielle comme aux Antilles ou àMayotte, ne doit pas aboutir à l'in-humaine Europe blanche.

Le bilan de l'année politique 2008-2009 est donc cette fois encorepositif et fait de la fédération unensemble militant des plus actifs.

AF GRAND SUD-OUEST

Collage à Reims le 2 juin. Certains lecteurs reconnaîtront peut-êtrenotre ami Jean-Philippe Chauvin !

POUR POUR TRTROUVER L'AF 2000 PRÈS DE CHEZ OUVER L'AF 2000 PRÈS DE CHEZ VVOUS :OUS :wwwwww.tr.trouvouverer lalaprpresseesse.com.com

» COTISATION AU CRAF

Faire adhérer autour de soi est un acte militant. Lescotisations sont la principaleressource du Centre royalisted'Action française. Réglez sans tarder votre cotisation2009, soit à votre délégué local,soit directement au siège, 10 rueCroix-des-Petits-Champs, 75001Paris. Membres actifs : 32 euros ;étudiants et chômeurs : 16 euros(chèques à l'ordre du CRAF).

» BOUTIQUE ROYALISTE

Des cravates en soiefleurdelisées sont disponibles auprix de 60 euros l'unité.Commandes à adresser au CRAF,10 rue Croix-des-Petits-Champs,75001 Paris (chèques à l'ordre du CRAF). Un nouveau numéro d'Insurrection est paru. Pour le découvrir,

rendez-vous sur insurrection.actionfrancaise.net

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❚ MÉMOIRE

Édité par PRIEP S.A. au capital de 59 880 euros – 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Imprimerie RPN – 93150 Le Blanc-MesnilNuméro de commission paritaire 0410I86761 – Directeur de la publication : M.-G. Pujo

Dans le courant de l'hiver1790-1791, conscient de sonabaissement politique, mis

dans l'impossibilité d'influer surle cours des événements, de s'op-poser aux mesures qui, telle laconstitution civile du clergé, lescandalisent, Louis XVI envisagede s'évader. Un projet de fuites'élabore concrétisé au soir du20 juin 1791 lorsque la familleroyale quitte les Tuileries et partvers l'est.

Franchise

Cependant, avant de quitterParis, le roi souhaite justifier sonchoix, exposer son opinion sur laRévolution. Il entend que ce textesoit rendu public aussitôt. Évi-demment, dans son esprit, cettepublication doit concorder avecla réussite de son projet d'éva-sion. Il s'agit de condamnerl'œuvre révolutionnaire dans sesexcès, et de rassurer une popu-lation parisienne encline à re-douter d'éventuelles représailles,avant le retour du monarque ré-tabli dans la plénitude de ses pré-rogatives, à la tête de troupes fi-dèles. Trop assuré du succès deses plans, Louis XVI, au fil desseize feuillets in quarto rédigésen secret, se montre d'une grandefranchise : non, il n'accepte pasl'abaissement de son pouvoir, lesatteintes « à la dignité de la cou-ronne de France », « le despo-tisme » des comités de la Consti-tuante, « plus barbare et insup-portable qu'aucun de ceux dontl'Histoire ait jamais fait men-tion », les restrictions à son droitde veto, la suppression de sondroit de grâce... C'est pour cela

qu'il s'en va. En raison, aussi, desoutrages constants infligés auxsiens, dont son frère, le comte deProvence, qui est, à la dernièreminute, appelé à témoigner parune lettre jointe, destinée dansl'esprit de Louis XVI, en compro-mettant son cadet, à l'obliger àpartir avec lui.

Concessions

En contrepoint de ces plaintes,le roi, cependant, fait d'impor-tantes concessions à l'opinion pu-blique, ou ce qui paraît tel, ac-ceptant de nombreux acquis de laRévolution, entre autres l'égalitécivile et l'abrogation des ordres,

ce qui représente, de sa part, uneprofonde évolution. S'il part, c'estpour se donner les moyens à sonretour d'offrir aux Français unevéritable constitution, conformeà leurs vœux, dans le respect ducatholicisme, de la monarchie etdes droits de chacun pour le plusgrand bien de la France.

Hélas, l'arrestation de Va-rennes, en mettant fin à la ten-tative royale, transforme ce pro-gramme politique plutôt ouvert etacquis aux réformes en acte d'ac-cusation contre Louis XVI. Puisque,dans ce document officiel, remisau matin du 21 juin au présidentde l'Assemblée, Alexandre deBeauharnais, le roi critique ou-

vertement, et condamne, des me-sures qu'il a lui-même acceptéesauparavant, il faut y voir la preuved'une intolérable duplicité de lapart du monarque qui n'a pas voulujouer honnêtement le jeu consti-tutionnel... Que le pouvoir révo-lutionnaire ait fait en sorte derendre sa position intenablen'entre évidemment pas en lignede compte.

La main du roi

Ces seize feuillets manuscrits,écrits et signés par Louis XVI, fontdésormais figure de pièces àconviction. Ils pèseront terrible-ment lourd en janvier 1793, quand

ils seront présentés comme des-tinés « à plonger la France dansles horreurs de la guerre civile ».Versé au dossier du procès, com-menté d'abondance par des ac-cusateurs décidés à noircir les in-tentions royales, le document,malgré son importance, disparaîtdes archives à une date indéter-minée, sans doute pendant la Ter-reur. Considéré comme définiti-vement perdu, il n'est plus connuqu'à travers les copies des archivesparlementaires.

Une mystérieusedisparition

Qui s'en est emparé ? Pour-quoi ? Nul ne le sait. Des rumeurs,parfois, le disent dans quelquecollection privée, Charavay ouFeuillet de Conches. En 1950, ilest signalé lors d'une vente Hen-nessy. Par quelle voie ce "testa-ment politique", qui en fait n'enfut jamais un dans l'esprit de sonauteur, a-t-il traversé l'Atlan-tique ? La seule certitude est qu'ilvient d'être retrouvé dans une col-lection américaine, accompagnédu texte que Louis XVI avait ré-clamé au comte de Provence, le-quel allait beaucoup plus loin queson aîné dans ses critiques de laRévolution.

Authentifié comme étant biende la main de Louis XVI, ce qu'at-teste entre autres le paraphe duvicomte de Beauharnais porté surl'original, le document vient d'êtreacquis par un collectionneur fran-çais, Gérard Lhéritier, présidentd'Aristophile, société spécialiséedans le rachat d'autographes etde manuscrits.

S'il n'apporte aucune informa-tion supplémentaire aux cher-cheurs, son contenu étant par-faitement connu, ce documentretrouvé a le double mérite derendre à la France une part deson passé, et d'attirer une fois en-core l'attention du public sur lapersonnalité de Louis XVI et lestragiques circonstances qui lepoussèrent à rédiger ce texte.

ANNE BERNET

❏ DOCUMENT

Louis XVI : seize pages assassinesLe "testament politique" de Louis XVI vient d'être retrouvé aux États-Unis. Ce manuscrit de seize pages, qui passait pour perdu, a fortement contribué à la condamnation du roi, qui exposait ses critiques contre la Révolution et les motifs de son départ de Paris.

LES FRANÇAIS AU TEMPS DE LOUIS XVIRÉÉDITÉ en mars, après avoir été publiéil y a dix-neuf ans, ce livre garde la fraî-cheur de tout ce qui mérite d'être clas-sique. François Bluche signale dans sonavant-propos que seule-ment cinq ou six généra-tions séparent nos com-patriotes du décollagedes montgolfières et descoiffures à la BellePoule... Nous rencon-trons chaque jour desvestiges datant de Louis XVI : maisons desvilles, fermes, mobilier de salon, armoi-ries rustiques, argenterie, plaques de che-minée, linteaux de porte. « Des plusluxueux aux plus humbles, ils marquentet font connaître une civilisation évoluée,dynamique, riche et jeune. »La France de Louis XVI était un pays pi-lote. Sénac de Meilhan déclare : « C'est àcette époque que nos mœurs étaient lesplus douces, que la société avait le plusde charmes, que toutes les classes qui lacomposent jouissaient le plus de la li-berté que comporte un État

monarchique. » L'abbé de Véri écrit : « LaFrance est le pays le plus riche et le plusnombreux de l'Europe. »En janvier 1783, la Correspondance litté-raire annonce un événement dont l'abbéde Mably est le héros envié : « MM. Frank-lin et Adams l'ont requis, au nom ducongrès des États-Unis, de vouloir bien ré-diger un projet de constitution pour lanouvelle république. » Citant Alexandrede Tilly, François Bluche relève un para-doxe : « Nos écrivains [...] pour cosmopo-lites qu'ils se croient, sont en réalitébien français, recherchant tout ce qui estloin de nous, exaltant tout ce que nousn'avons pas et (l'antithèse complète desautres nations) dépréciant tout ce quenous possédons. »

PROPAGANDE & UTOPIE

L'abbé de Véri, dont François Bluche saluela grande et rare intelligence, saisit « àquel point la propagande et l'utopie em-bellissent l'idée démocratique ». Il écriten effet : « Dans les histoires connues jene trouve aucune république un peu éten-due qui me paraisse préférable à notre"monarchie modérée". Je vois dans les ré-

publiques grecque, romaine, italienne,anciennes et modernes, plus de sourcesde despotisme et d'injustice envers legrand nombre des individus que dans lesmonarchies modérées. »

LA RÉPUBLIQUE DES SAVANTS

L'illusion accable les milieux philoso-phiques de l'époque, où « il est de bonton d'admirer les despotes éclairés et demépriser la France. En réalité tous lesdespotes éclairés de l'Europe imitent leroi de Prusse Frédéric II ; et ce dernier apris Louis XIV pour modèle. Dès lors, sansy voir malice, nos écrivains admirent laFrance de la monarchie absolue, et plusprécisément les institutions de Louis XIV,par Frédéric II interposé. »Fondée en 1666 par Louis XIV et Colbert,l'Académie des Sciences est une des plusimportantes du monde. « Un des carac-tères de ce monde de la science est lajeunesse. Plus du quart des académiciensde province a été reçu à moins de trenteans. » François Bluche évoque Lavoisier :« On ne sait qu'admirer surtout de l'im-portance de ses trouvailles – théorie de lachaleur, appareils à glace, respiration, hy-

giène hospitalière, nomenclature desgaz, grande expérience de 1785 sur lescomposantes de l'eau – ou de sa puissancede travail [...] car Lavoisier est égale-ment fermier général du roi, et régisseurgénéral des poudres et salpêtre, c'est-à-dire très haut fonctionnaire. » En 1776,Louis XVI crée l'Académie de médecine.

RETOUR DES VICTOIRES

On oublie souvent de rappeler queLouis XVI fut vainqueur de l'Angleterre,conséquence d'une volonté soutenue dedéveloppement de la marine. FrançoisBluche évoque Choiseul qui avait amorcéce redressement. Il montre que Louis XVIet ses grands ministres (Sartine de 1774 à1780, le maréchal de Castries de 1780 à1787) la conduisirent à son apogée.En faisant revivre cette période, FrançoisBluche nous restitue en quelque sortenotre bien commun, obscurci encore pluspar l'ignorance et les erreurs que par lamauvaise foi la plus partisane.

PERCEVAL

1 – François Bluche : Les Français au temps deLouis XVI. Hachette Pluriel, 396 p., 8 euros.

Louis XVI en compagnie de LapérousePar Nicolas Monsiau, 1817