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Idées Jacques Julliard p. 9 Belgique L'État disloqué p. 6-7 DU 6 OCTOBRE AU 19 OCTOBRE 2008 - 38 e année - Numéro 932 - 3,20 e 26 septembre, de- vant les militants de l’UMP, François Fillon a lancé un appel à « l’unité nationale ». Deux jours après, le discours était oublié. Pourquoi ce pitoyable loupé ? Un facteur personnel : Pre- mier ministre en sursis, aussi fascinant qu’une pizza congelée, l’homme est tout le contraire du Churchill que tous les politiciens vou- draient être face à une situa- tion dramatique. Une contradiction politi- que : on ne peut appeler à l’unité quand on sert exclusi- vement les intérêts des grou- pes sociaux dominants ; on ne peut invoquer la nation quand on laisse détruire sa puissance industrielle. Une inconséquence : le 18 août, François Fillon avait déclaré que la France n’a- vait « pas besoin de plan de relance » alors que la situa- tion aux États-Unis et en Europe de l’Ouest ne cesse de s’aggraver depuis un an. Un mois après avoir démo- bilisé en prêchant le laisser- faire, on sonne la mobilisa- tion générale. Mais le bruit et le chaos sont tels que les trompettes de la gouver- nance ne peuvent être entendues. Unité ? L CIBLE OLIGARQUES Ils refusent d'agir

e 26 septembre, de- refusent d'agir · (Abkhazie, Ossétie du Sud) était prévisible et la reconnais-sance de l’indépendance du Kosovo par plusieurs grandes puissances créait

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Idées

JacquesJulliard

p. 9

Belgique

L'Étatdisloqué

p. 6-7

DU 6 OCTOBRE AU 19 OCTOBRE 2008 - 38e année - Numéro 932 - 3,20 €

e 26 septembre, de-vant les militantsd e l ’ U M P ,François Fillon a

lancé un appel à « l’uniténat iona le » . Deux joursa p r è s , l e d i s c o u r s é t a i toublié. Pourquoi ce pitoyableloupé ?

Un facteur personnel : Pre-mier ministre en sursis, aussif a s c i n a n t q u ’ u n e p i z z acongelée, l’homme est tout lecontraire du Churchill quetous les pol i t ic iens vou-draient être face à une situa-tion dramatique.

Une contradiction politi-que : on ne peut appeler àl’unité quand on sert exclusi-vement les intérêts des grou-pes sociaux dominants ; onne peut invoquer la nationquand on laisse détruire sapuissance industrielle.

Une inconséquence : le 18août, François Fillon avaitdéclaré que la France n’a-vait « pas besoin de plan derelance » alors que la situa-tion aux États-Unis et enEurope de l’Ouest ne cessede s’aggraver depuis un an.

Un mois après avoir démo-bilisé en prêchant le laisser-faire, on sonne la mobilisa-tion générale. Mais le bruitet le chaos sont tels que lestrompettes de la gouver-n a n c e n e p e u v e n t ê t r eentendues.

Unité ?

L

CIBLE OLIGARQUES

Ilsrefusentd'agir

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RÉDACTION-ADMINISTRATION17, rue des Petits-Champs, 75001 Paris

Téléphone : 01.42.97.42.57Télécopie : 01.42.96.99.20

Dir. publication : Yvan AUMONTCom. paritaire 0509 G 84801

ISSN 0151-5772

SOMMAIRE : p.2 : Vérités et mensonges -p.3 : Des horreurs en macro - Front degauche - p.4 : Darrois ou le désarroi desnotaires... - p.5 : Fracture juridique Nord-Sud - p.6/7 : La tentation de Nuremberg -p.8 : Terreur et martyre - p.9 : Le triocatholique de Julliard - p.10 : Faillite -Kamikase d'été - p.11 : Action royaliste -p. 12 : Éditorial : Leur inertie.

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ROYALISTE, 17, rue des Petits-Champs, 75001 PARIS

Ossétie du Sud

Vérités et mensonges

L’hostilité systématique des médias à l’égard de la Russie est connue. Laguerre en Ossétie du Sud a été l’occasion d’un déluge de commentaires

absurdes et de contrevérités qu’il importe de souligner.a guerre d’Ossét ieaurait pu être évitée. Ledurcissement entre lepouvoir central géor-gien et les régions sé-c e s s i o n n i s t e s

(Abkhazie, Ossétie du Sud)était prévisible et la reconnais-sance de l’indépendance duKosovo par plusieurs grandespuissances créait un dange-reux précédent. Par ailleurs,les manœuvres au début del’été en Russie (Kavkaz-2) eten Géorgie (Immediate res-ponse 2008, coordonnées parles Américains) et divers inci-dents créaient dans cette partiedu Caucase un réel climat detension. Mais Dimitri Medve-dev et Vladimir Poutine nesouhaitaient ni la guerre avecla Géorgie ni l’annexion del’Abkhazie et de l’Ossétie duSud : les déclarations et lecomportement des dirigeantsrusses sont clairs sur ce pointet il est significatif que leprécédent du Kosovo n’a pasété exploité par la diplomatierusse.

Ces éléments d’appréciation,en tous points vérifiables, ontété masqués par la presse oc-

cidentale - par les médias etles in te l lectuels f rançaissingulièrement. Relayant lesthèses américaines, les médiasfrançais ont cherché à recréerun climat de guerre froide etréclamé que la France s’alignede plus en plus complètementsur ce qui est supposé être lecamp du Bien.

Avant la publication par Jac-ques Sapir d’une analysecomplète des opérations mili-taires et des conséquencesgéopolitiques du conflit, ilnous paraît utile de rétablirquelques vérités :

1) Les dirigeants géorgienssont les agresseurs. IrakliOkrouachvili, ancien ministregéorgien de la Défense ,aujourd’hui en exil à Paris, adéclaré que l’invasion mili-taire de l’Ossétie du Sud et del’Abkhazie avait été planifiéedès 2005. Les autorités géor-giennes ne sont pas tombéesdans un piège tendu par lesRusses : ceux-ci ont fait savoirqu’ils ne toléreraient pas uneoffensive contre les deux ré-gions autonomes. Le présidentSaakashvili n’a pas décidé

d’agir parce qu’il était en si-tuation de légitime défense :l’entrée de ses troupes sur leterritoire ossète le 7 août avaitpour but la conquête du payse t l e b o m b a r d e m e n t d eTskhinvali a frappé les popu-lations civiles. Un millier depersonnes ont été tuées et lesphotos prise par les satellitescivils et militaires montrentl’ampleur des destructionscommises par les missilesgéorgiens.

En bombardant une popula-tion qu’il dit être géorgienne,le président Saakashvili vou-lait lui faire quitter la villeafin que les colonnes de réfu-giés bloquent le tunnel deRoki par lequel les troupesrusses devaient nécessaire-ment passer. Cette tactique,qui impliquait un nettoyageethnique, a échoué. Mais lessuccès obtenus par les Géor-giens dans les premières heu-res de leur attaque montrentque les troupes russes étaientpeu présentes sur le territoireossète et que l’état-majorrusse ne s’attendait pas à uneoffensive de cette ampleur.

D’où la violence de la contre-attaque et des combats qui sesont terminés par la mise endéroute des t roupesgéorgiennes.

2) La complic i té desAméricains est certaine. Plusd’une centaine de militairesaméricains ont participé auxmanœuvres Immediate res-ponse 2008 et leur rôle pré-pondérant dans l’armée etauprès du gouvernement géor-gien ne permet pas de croirequ’ils ignoraient la décisiondu président Saakashvili. Deplus, il est prouvé que desconseillers militaires améri-cains se trouvaient dans lesunités combattantes et que lesRusses ont refusé de les captu-rer afin de ne pas durcir las i tuat ion sur le p landiplomatique.

3) Les Russes n’ont pas devisées impérialistes sur lespays naguère soviétisés. Ilsne sont pas entrés à Gori etn’ont pas brûlé la ville con-trairement aux assertions deBernard-Henri Lévy. Ils n’ontpas pris Tbilissi qui était sansdéfense. Ils ne veulent pas re-conquérir les pays baltes nimême, semble-t-i l , agitersérieusement la question de laMoldavie, toujours divisée en-tre russophones et rouma-nophones.

Il est stupide d’être anti-russe. Il serait absurde de seproclamer prorusse : il fautsimplement cesser de regardercette puissance européennepost-impériale comme si nousétions en 1950 et plutôt laconsidérer comme un facteurdécisif de stabilisation de lagrande Europe...

Annette DELRANCK

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Bayrounomics

Des horreursen macro

Socialistes

Frontde gauche

Quand on voit Jean Peyrelevade, on se dit quec’est un homme sérieux, compétent et tout.

Comme il n’est pas gentil avec Nicolas Sarkozy,on a tendance à le trouver sympathique. Ses idées

ne le sont pas.

Celles et ceux qui militent à l’aile gauche duParti socialiste se sont rassemblés sur un textecommun qui présente des faiblesses mais qui

permettra aux véritables socialistes de secompter.

homme a vraiment toutpour plaire. Directeuradjoint du cabinet dePierre Mauroy, il in-carne la gauchetraditionnelle. Partisan

du tournant de la rigueur, il estune des figures de ce socia-lisme réaliste qui rassurait ladroite. Comme il est aujour-d’hui vice-président de laBanca Leonardo, une banqued’affaires italienne, aprèsavoir prés idé le Crédi tlyonnais , on le supposecompétent. Enfin, pompon surla pomponnette, il s’est inscritau Modem et il est devenu leconseil ler économique deFrançois Bayrou.

Cela signifie que ce centristeparfaitement équilibré (cœur àgauche, portefeuille à droite)sera ministre de l’Économieou Premier ministre si l’ancienet futur candidat réussit sonpari.

Il faut donc prêter de tempsà autre attention aux proposqu’il répand avec une belle as-surance dans les médias. As-surance d’autant plus grandeque Jean Peyrelevade n’estpas tendre avec NicolasSarkozy qui aurait commis se-lon lui une erreur historique.Chic ! se dit-on : les ennemisde nos ennemis ne sont-ils pasnos amis ?

Non ! D’abord parce quecette maxime est douteuse, en-suite parce que l’éminent ban-quier es t l ’ami de nosennemis. Pourquoi ?

Relevons d’abord que le dé-nommé Peyrelevade admireValéry Giscard d’Estaing

parce qu’il avait une vraie cul-ture macro-économique - cequi ne l’a pas empêché d’ac-cumuler les erreurs et de pro-fesser maintes âner ies .L’homme de la Banca Leo-nardo devrait savoir que Char-les de Gaulle, qui n’avait pasde culture macro, présida auredressement de l’économienationale.

Observons surtout que leconseiller de François Bayroureproche à Nicolas Sarkozy dene pas mesurer la gravité de lasituation budgétaire et de laperte de compétitivité desentreprises. Telle est l’erreurde diagnostic qui est consi-gnée par un moliéresquemédicastre : or le déficit pu-blic est modéré et supportable,et l’appareil productif souffremoins de manque de compéti-tivité que de destruction ac-célérée à cause du système ul-tra-concurrentiel que Jeannot-La-Science ne remet pas enquestion.

Fidèle à la vulgate ultra-libérale, ce bayroutiste dechoc propose de revenir à l’é-quilibre budgétaire en troisans (c’est dément, en périodede crise) et de privilégier l'ap-pareil productif au détrimentdes ménages, autrement dit deréduire encore les salaires.

Voilà qui plaira aux ban-quiers privés, au patronat, àJean-Claude Trichet et à laCommission européenne. Maisqu’on se le dise : c’est del’horreur économique - etmême macro-économique -qu’on nous fourgue là.

Sylvie FERNOY

ors des guerres picro-chol ines de La Ro-chelle, qui opposaientles membres de l’oli-garchie rose, on avaitoublié qu’il existait au

sein du Parti socialiste uneforte tendance... socialiste- peu visible parce que depuislongtemps éclatée en diversgroupes.

Cette tendance a réussi à serassembler : les sept contribu-t ions s ignées par Benoî tHamon, Gérard Filoche, Marie-Noël le Lienemann, Henr iEmmanuel l i , Jean-LucMélenchon, Marc Dolez, Jac-ques Fleury et Pierre Larroutu-rou se sont fondues en uneseule motion.

À juste titre, la nouvelle gau-che socialiste dénonce l’échecdes dirigeants d’un parti qui« n’a plus gagné d’électionprésidentielle depuis vingt ansni de législative depuis onzeans » et refuse les synthèsesmolles et les scénarios impro-bables produits par l’aile droitede l’appareil.

Les animateurs des tendancesde gauche se sont mis d’accordsur six priorités :

- « Construire un nouveaupacte européen, redistribuer lesrichesses, réguler le l ibreéchange, affirmer le rôle éco-nomique de la puissancepublique, promouvoir une poli-tique étrangère de gauche, agirpour une société de progres-sion des droits et de l'égalité.Nous proposons de construireun grand parti de la gauche, àla fois social, écologiste, laïqueet populaire ». Ils vont militerpour un Smic à 1 500 €, laSécurité sociale pour tous, la

retraite à 60 ans à taux plein, larestauration d’un droit du tra-vail réellement protecteur, desservices publics rétablis etélargis , une f i scal i téredistributive.

Selon leur mauvaise habitude,les médias vont passer leurtemps à s’interroger sur lesquestions tactiques et stratégi-ques : poids réel de la gauchesocialiste, incidences de ce ras-semblement sur les bataillesentre les oligarques du centre etde la droite du Parti socialiste.

Il nous paraît plus intéressantde mettre en débat les proposi-tions de la gauche socialiste -ce que nous avions déjà fait

avec Gérard Filoche. Plusieurspropositions rejoignent lesnôtres : augmentation massivedes salaires, politique des reve-nus assurant une juste réparti-tion du revenu national, natio-nalisations - à commencer parle crédit - renforcement dudroit du travail, généralisationet développement de la protec-tion sociale...

Nous nous posons des ques-tions sur le nouveau pacteeuropéen en raison des orienta-tions fédéralistes de la gauchesocialiste et nous aurions be-soin de précisions sur la natureet les orientations d’une politi-que étrangère de gauche.

D’une manière générale, l’es-quisse du programme est ti-mide : il ne suffit pas de régu-ler le libre échange, il faut pro-téger l’économie européenne.Mais on peut espérer que cettenouvelle gauche s’affirmeradans le combat.

Yves LANDEVENNEC

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Affairisme

Darrois oule désarroi des notaires...

Afghanistan, Ossétie, panique boursière et crise immobilière, sans compterle gazon de Jacquouille et les égouts de la belle-mère, on aurait pu croire

que notre vibrionnant Président aurait de quoi s’occuper utilementpendant qu’il dirigeait l’Union européenne...

était mal le connaître !Une case demeurantvierge sur l’agenda,elle fut aussitôt attri-buée à quelques vieuxamis, et consacrée à la

disparition des notaires...Si nombre de ces placides

officiers publics ont assez can-didement apporté leurs suffra-ges à leur bourreau, ils peu-vent difficilement prétendren’avoir rien vu venir : dèsavant le premier tour de 2007,l’aimable Me Devedjian, avo-cat promis au ministère de laJustice, avait ouvertementprôné leur suppres-sion… Melle Dati se voyant fi-nalement nommée, quelquesmois furent gagnés, avantqu’Attali n’attilase : après luile notariat ne repousserait pas.Lâché sur les notaires tel lepit-bull sur la grand-mère, ilprôna tout à la fois leur multi-plication et leur ruine (avec lasuggestion désopilante de li-béraliser leurs honoraires,mais... seulement en cas dediminution !). Las, les munici-pales approchant e ts’annonçant désastreuses, lerapport s’en alla rejoindrequelques piles d’autres sous lepied d’une armoire, et les no-taires se rendormirent, bercéstant par de flatteuses parolesde Melle Dati - oubliant ainsiqu’elle ne décide de rien -,que par une soudaine pro-messe d’a t t r ibut ion desdivorces, qu’ils n’avaient ja-mais réclamée...

Fureur des avocats, affoléspar cette perspective ajoutée àcelle d’une réduction de lacoûteuse aide juridictionnelle,et contre-attaque foudroyante :non seulement le divorce an-noncé repartit avant même

d’être arrivé, mais on annonçaaux notaires éberlués leur pro-chaine absorption par les avo-cats ! Et c’est ainsi que naquitla commission Darrois, mer-veille de casuistique et cau-chemar de l’officier public...

Quelle mission pour son pré-sident ? Sauver les avocats,qui crient famine. Il est vraiqu’ils foisonnent, et s’aggluti-nent dans les v i l lesimportantes, où le client se faitrare. Mais aussi, sans qu’onvoie bien le rapport, luttercontre l’invasion des cabinetsanglo-saxons... et, pour cefaire, constituer une grandeprofession du droit... Ce ma-riage de la carpe et du lapincache quelque arrière-pensée,qu’il convient de dévoiler.

1) Rappelons tout d’abordque le notariat existe dans laquasi-totalité des pays de l’U-nion européenne. Si les notai-res français sont parmi lesseuls à devoir acheter leur of-fice (ce qui imposera de lesindemniser, alors même queles caisses sont vides), le nota-riat se voit généralement attri-buer deux compétences : lacertification et la publicationau fichier immobilier. Il s’agittout simplement d’une missionde service public, terme honnide la vulgate sarkozienne.

On ne voit guère ce quel’État aurait à gagner à laisserde grands cabinets d’avocatsétrangers contrôler depuisLondres ou Pékin la certifica-tion comme la publication desactes de vente... On imaginevolontiers l’ardeur que mettraun cabinet moscovite à véri-fier la transparence du finan-cement lors de l’acquisitiond’une villa tropézienne...

2) Rappelons ensuite que lesnota ires sont contrôlésannuellement, avec transmis-sion du rapport au Procureurde la République, alors que lesavocats ne le sontjamais... Quelles belles affai-res en perspective lorsque lestransactions pourront se faireen toute liberté, sans qu’aucunmagistrat mal intentionnévienne y pointer le nez !

3) Rappelons enfin qu’ilexiste environ 45 000 avocatsen France, contre 8 600notaires . La nouvel leprofession, à laquelle s’ajoute-ront les avoués, compteradonc à peu près 54 000membres, qui se partagerontles actes précédemment réa-lisés par 8 600 d’entre eux,tandis que les notaires pren-dront eux-mêmes une part dugâteau antérieur des avocats :croit-on sérieusement que lesavocats y gagneront ?

Alors, pourquoi ? Pour agitéque soit notre Président, iln’est pour autant pas totale-ment innocent... quelles moti-vations à ce sacrifice coûteuxautant qu’inutile de quelquesmilliers de ses fidèles élec-teurs ?

La réponse es t dans laquestion, comme le diabledans les détails : Me Darrois,président de la commissionéponyme, es t avocatd’affaire... comme le présidentde la République. Secteurd’act iv i té où, s i l ’on fai tfortune, on est autant concur-rencé par les Anglo-saxonsque par quelques notairesparisiens, en outre bénéficiai-res du monopole de la publi-cat ion des actesimmobiliers... L’étranger ne

pouvant croquer tout le béné-fice de la fusion, il en resterabien quelques juteuses miettespour les grands cabinetsfrançais !

On l’aura compris, l’objectifde la fusion n’est en rien devenir au secours de l’avocatde province : lui permettre deréal iser quelques actessurnuméraires, sans disposerni du personnel ad hoc ni ducoûteux matériel permettantde les publ ier en l igne(innovation imposée par Bercypour supprimer des postes aufichier immobilier) ne le sau-vera en rien des effets de lasurpopulation judiciaire, alorsmême que le recours généra-lisé à la médiation tarit le flotdes aides juridictionnelles, es-sentielles à la survie de nom-breux cabinets.

Il s’agit, cette fois encore, decomplaire à quelques copains,dont on veut arrondir la ga-lette : le bling-bling n’est ja-mais lo in sous l 'omni-présidence. Et qui aura payécette galette en finançant parl’impôt l’indemnisation rui-neuse des notaires ?

En outre, ce n’est pas tout.Si les notaires ont vocation àêtre neutres, ce n’est en rien lecas des avocats : chaque partieaura le sien, facteur de lenteurcomme de coût. Sans compterla rapide disparition du conseilgratuit, tradition séculaire dunotariat, dont feront les fraisles petits clients désargentés.

Certes, le notariat n’est pointparfait, et des réformes y se-raient bienvenues ; on pourraitmême songer, comme en Alle-magne ou en Suisse, à autori-ser d’être à la fois (mais ja-mais en même temps) notaireet avocat. Mais supprimer uneprofess ion à laquel le lesFrançais sont attachés au nomd’un secours illusoire à uneautre affamée par sa crois-sance délirante, le tout pourenrichir quelques riches affai-ristes parisiens n’est r iend’autre qu’un nouveausymptôme de l’épilepsie poli-t ique dont notre pays es tfrappé depuis un an. À chaquenouveau coup porté, nousass is tons , impuissants e tnavrés, à la mise à bas de nosfondements sociaux, bazardéspour faire du neuf, comme ja-dis le meuble authentiquebradé pour le Formica : le tocnous gouverne, et nous détruità grands coups de Kärcher...

Franz QUATREBOEUFS

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MAROC – Devant le Conseilsupérieur des oulémas (théologiens),le roi Mohammed VI a annoncé unplan de réforme des institutions reli-gieuses du royaume. Le premier axede la réforme concerne la prochainecréation des Conseils locaux desoulémas dans chaque région. « Noustenons à ce que les oulémas (...)apportent leur concours au renforce-ment de la sécurité spirituelle de lanation en veillant à la préservationde sa doctrine religieuse qui se ré-clame d'un islam sunnite tolérant »a-t-il déclaré, ajoutant qu’il fallaitprocéder à « une mise à niveau desimams » et que les théologiens ont le« devoir » de « guider les gens etcombattre les allégations mystifica-trices colportées par les tenants del'extrémisme ». AUSTRALIE – Selon un sondagepublié par l’Institut Nielsen, 52 %des Australiens serait maintenant fa-vorables à l’instauration d’une répu-blique et, pour la première fois del’histoire du pays, le gouvernementtravailliste de Kevin Rudd et l'oppo-sition conservatrice sont tous deuxdirigés par des républicains. En1999, un référendum sur la questionde la monarchie avait vu la défaitedes républicains et le débat était re-tombé en raison de la popularité dela reine Elizabeth. GRANDE-BRETAGNE – Lequotidien The Guardian a relancé ledébat concernant la modification desrègles de succession au trône (voirRoyaliste n° 925 et 926) en affirmantque le gouvernement travailliste duPremier ministre Gordon Brownprévoyait de proposer une loi en cesens si le Labour remportait les pro-chaines é lect ions légis la t ives ,prévues d'ici mai 2010. De fait, ledéputé Mike Bryant a remis le rap-port que le Premier ministre lui avaitdemandé sur le sujet. Ce rapportprévoit de retirer de la Constitutionla clause qui exclut les catholiques dela succession et de mettre un terme àla primogéniture masculine ce quipermettrait à une fille aînée d'êtrereine même en présence d'un frèrecadet. Aujourd’hui, lors de son ac-cession au trône, le monarque esttenu de faire une déclaration devantle Parlement rejetant le catholicismeet ne peut être marié à un catholique.Les textes, remontant à 1688, stipu-lent explicitement que le souveraindoit être protestant. La publication del’article du Guardian a embarrasséDowning Street dont le porte-parolea tenu à rappeler que ce « serait uneentreprise complexe impliquant lamodification ou l'abrogation d'uncertain nombre de points de la Cons-titution ainsi que de requérir le con-sentement des gouvernements despays membres du Commonwealth ». ITALIE - Le prince Aymone deSavoie-Aoste, fils du duc d'Aoste etde la princesse Claude de Francevient d’épouser la princesse Olga deGrèce, fille du prince Michel deGrèce et de Marina Karella. Plusieursfois cousins, Aymone et Olga ontpour arrière-grands-parents com-muns le prince Jean d'Orléans, ducde Guise et son épouse Isabelle, ainsique le premier roi de Grèce GeorgeIer. Pour les Italiens qui soutiennentle duc d’Aoste dans sa querelle dy-nastique avec Victor-Emmanuel deSavoie, le prince Aymone est le futurprince héritier.

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Légalisme

Fracture juridiqueNord-Sud

epuis plusieurs mois, iln’est aucune enceintein ternat ionale où lepoint de vue défendupar les Occidentaux nepeine à être adopté. La

Commission européenne a es-suyé un échec dans son projetd’accords de coopération éco-nomique supposés remplacerles conventions douanières de-venues illégales depuis l’entréeen vigueur des règles de l’Or-ganisat ion mondiale ducommerce. Les affrontementssont incessants à Genève ausein du Conseil des droits del’homme dont on avait salué lacréation comme un progrès.Même déconvenue avec laCour pénale internationale sou-tenue par les pays du Sud etnon ratifiée par les Puissants,États-Unis, Chine, Russie,Inde, et qui est aujourd’hui re-je tée par les premierssignataires. Désaccords encoredans l’analyse des conflits et deleur règlement, que ceux-cisoient en Afrique (Zimbabwe,Darfour), en Asie (Birmanie)ou en Amérique latine (Bolivie,Venezuela).

La proposition de M. Sarkozyde transformer le G 8 en G 13(ou 14) ou celle d’augmenter lenombre des membres perma-nent du Conseil de sécurité,sont bien intentionnées maisn’apportent pas en soi de ré-ponse à cette incompréhensiongrandissante. Le problème n’estpas que procédural ou formel.Pour autant, ce n’est pas unretour en force du tiers-mon-disme ou du non-alignement, cequi laisserait supposer que noussoyons revenus à une logiquede blocs. La nouvelle confianceen soi que démontre l’attitudedes pays du Sud dans les ins-tances internationales trouve

peut-être un soutien dans l’af-firmation de la Chine ou dequelques pays phares commel’Iran, le Venezuela, l’Afriquedu Sud ou l’Indonésie. Maiselle a son origine dans uneprise de conscience authentiquede l’identité de chacun. On aencouragé les pays du Sud às’organiser, à créer des regrou-pements régionaux et on s’é-tonne ensuite qu’ils agissent engroupe et tiennent à régler eux-mêmes leurs propres affairessans interférence extérieure.C’est ce qu’on leur demandaitde faire. Or la manière dont ilss’y prennent ne nous plaît pas.Soit. Et alors ?

Contrairement à la périodeprécédente, où chacun se récla-mait de valeurs propres, asiati-ques ou islamiques, rejetantl ’universal i té des valeursoccidentales, les pays du Sudaujourd’hui ne contestent plusl’existence de normes interna-tionales valables pour tousmais se réservent le soin de lesappliquer dans leur environne-ment régional comme i l sl’entendent. Ils ont comprisqu’ils peuvent ainsi parlerd’égal à égal dans les enceintesinternationales. Revendiquerune exception culturelle vousplace dans une position defaiblesse. Accepter la normecommune vous permet d’exigerson respect par tous. Les droitsde l’homme s’imposent ainsiaux pays du Nord :immigration, fonctionnementde la justice, liberté religieu-se…

Si désormais les valeurs nesont plus fondamentalement encause, il nous faut atteindre àune vér i table jus t iceuniverselle. La justice dans lespays du Sud est l’un des sec-teurs les plus durablement in-

fluencés par l’Occident, qu’ils’agisse du droit romano-ger-manique ou de la CommonLaw. Il faut lui donner lesmoyens nécessaires au lieu dela décrédibiliser comme auTchad dans l’affaire de l’Archede Zoé, mais aussi en Asie dansla répress ion du t raf ic dedrogue. Tout se passe ensuitecomme si, nommés dans lescours internationales, ces jugesissus du Sud, f rus t résnationalement, devaient adhérerd’autant mieux aux pratiquesdes justices du Nord que celasert de critère pour juger deleur objectivité sinon de leurcompétence. Isolés, ils sont dèslors perdus pour le Sud et re-jetés par les leurs. La difficultén’est pas que des magistrats duSud soient admis au Nord - desuniversités duquel ils sortentavec les mêmes diplômes queleurs confrères du Nord -, maisqu’ils le soient dans leurs pro-pres pays et que les législationsévoluent en conséquence ici etlà. Alors la subsidiarité pourra-t-elle jouer à plein.

La justice doit passer. Maisoù passe la justice ? Depuisquatorze ans, le tribunal pénalinternational d’Arusha pour leRwanda n’a visiblement pasencore rendu son verdict final,pas plus que celui de La Hayesur l’ex-Yougoslavie. La Courpénale internationale a dix anset n’a inculpé personne. Lesseuls accusés – quatre - sonttous Africains et Noirs. AucunAméricain n’y sera jamaissoumis. Et Guantanamo de-meurera le plus parfait déni detoute justice. Comment, dansces conditions, peut-on s’éton-ner que les décisions de laCour suprême des États-Unis,l’instance juridictionnelle sansdoute la plus prestigieuse dumonde, fassent de moins enmoins référence internationale-ment ?

Yves LA MARCK

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BRÈVES

L’Occident connaît une crise de légitimité dans lereste du monde. La notion contestée de

communauté internationale a vécu.

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es forces centrifuges qui agitent la Belgique ont étérégulièrement évoquées dans Royaliste. Elles connais-sent une croissance exponentielle depuis les électionsfédérales du 10 juin 2007, empêchant la mise en placed’un gouvernement fédéral digne de ce nom, c’est-à-dire capable d’affronter la conjoncture intérieure et

internationale pendant une mandature de quatre ans avec unminimum d’efficacité. Nous avons demandé à un Belge de nos amisde nous décrire la situation.

l ne faut pas que lespectacle du devant descène - la dislocationd’un État - masque lesdommages collatérauxredoutables : l’avenir

probable des fragments de l’É-tat si le divorce est consommé.

À cet égard, la Région deFlandre émet à jet continu desmessages d’avertissements deplus en plus inquiétants.

Au niveau de la Région, leCode du Logement élève desobstacles à l’accès du loge-ment en Flandre aux person-nes ne prat iquant pas lenéerlandais. Des plaintes ayantété envoyées au Conseil del’Europe, cette organisationa délégué en Belgique unecommission d’enquête(1)- démarche déjà humiliante ensoi, rapprochant la Belgiquedu niveau de respectabilité po-litique du Zimbabwe - quiaprès avoir étudié le problèmeet entendu les responsablespolitiques flamands et lesplaignants, a rendu un rapportaccablant sur l’incompatibilitéentre ces discriminations et lesconventions internationalesque la Belgique a ratifiées.

Dans les six communes for-mant la couronne de la Régionde Bruxelles, mais constitu-tionnellement parties de la Ré-gion Flandre, dans lesquellesles francophones bénéficientde facilités depuis un accordpolitique abscons de 1962, cesderniers font l’objet de discri-minations d’un autre âge oud’un autre pays, mais hélas,comme l’image d’une photo-graphie argentique apparaîtpeu à peu dans le bainrévélateur, la source d’inspira-t ion es t de plus en plusévidente.

Dans ces six communes, lesélections et la langue des do-cuments officiels (naissances,cartes d’identité, permis deconduire, mariages) démon-trent que les francophonessont majoritaires (entre 60 %et 90 % de la population). Or,le monde politique flamandprésente ces francophonescomme des occu-pants - indésirables - du sol dela Région Flandre, alors quec’es t sociologiquementl’inverse, ce sont eux qui sontoccupés par l ’ imper iumflamand, en dépit de toute lo-

gique arithmétique et de toutrespect du Droit.

Dans trois de ces six com-munes les élections municipa-les du 8 octobre 2006 ontporté à la fonction de mairesdes francophones résistants,au grand dam du Gouverne-ment de la Région Flandre,qui par mesure de représailles,ne les a pas nommés, préférantoutrager le suffrage universelque constater (cette nomina-tion est un acte de notaire) lapuissance numérique de la po-pulation francophone, et sur-tout sa capacité à dire non autotalitarisme linguistique.

Au niveau de l’autonomiemunicipale, le déchaînementd’hostilités est constant.

À Zaventem, le conseil mu-nicipal a adopté un règlementprohibant la vente de terrainsà bâtir municipaux aux candi-dats ne pra t iquant pas lenéerlandais.

L’hôtel municipal a affichéun avis selon lequel tout habi-tant ne maîtrisant pas très bienle néerlandais ne serait reçuqu’accompagné d’uninterprète.

À Overijse, le maire a en-voyé aux commerçants une in-jonction de ne faire aucunepublicité dans une langueautre que le néerlandais et detraduire en néerlandais les en-seignes rédigées dans uneautre langue, injonction assor-tie de menaces. Un bureau desdénonciations a été ouvertpour recevoir les mouchards.

À Linkebeek, nuitamment, laporte de l’hôtel municipal aété murée et des inscriptionshaineuses ont été peintes surles murs. Les auteurs n’ontpas été identifiés, ce qui secomprend puisque aucune ins-truction n’a été ouverte.

À Liedekerke, l’accès à l’es-pace de jeux pour enfants aété refusé aux enfants ne com-prenant pas le néerlandais.

À Grammont, l’autorité mu-nicipale a décidé de lier l’oc-troi ou le maintien du R.M.I.aux indigents démontrant leurpratique du néerlandais.

À Vilvoorde, le droit d’ac-quérir une maison de gré à gréest désormais limité aux ache-teurs pratiquant le néerlandais.

À Wemmel, la maison d’unadjoint au maire francophone,élu au suffrage universel parles habitants de la commune, aété souillée par des slogans,peints sur les murs et la porte,l ’ invi tant à se ta i re ou àdéménager.

À la Panne, ultime stationbalnéaire avant la frontièrefrançaise, et donc accueillantde nombreux touristes deFrance, une manifestation hos-

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Belgique du Nord

La tentationde Nuremberg

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tile de nationalistes a reprochéavec véhémence aux restaura-teurs de parler le français avecleurs clients. Cette manifesta-tion ne fut ni interdite ni dis-persée par la police locale.

À Lennik, le maire a faitretirer les drapeaux belges del’hôtel municipal et les a faitremplacer par des drapeaux dela région Flandre.

La liste est interminable.Discr iminat ions tous

azimuts , in terdict ions derésidence, ghettoïsation desgroupes c ibles (Wallons ,Bruxellois, fonctionnairesinternationaux, immigrés), in-terdictions de fréquenter deslieux récréatifs publics, inter-diction de parler le françaisdans des re la t ionscommerciales, promotion im-plicite d’une race supérieure(les Flamands de souche),sont-ils des souvenirs inertes ?Faut-il des nuits de cristal etl’apparition d’étoiles jaunespour y voir clair ?

La Région Flandre disposed’un monde politique à nom-breuses composantes, mais lanaissance, puis la montée enpuissance d’un parti d’extrêmedroite sans aucun complexe,qui recueille des scores électo-raux dont Jean-Marie Le Penn’a pas osé rêver, y a profon-dément perver t i le jeupolit ique. Au début de cemouvement d’adhésion d’uncinquième - localement d’unquar t - de l ’é lectorat àl’extrême droite, les vieux par-tis traditionnels (chrétien,socialiste, libéral) ont décrétéla main sur le cœur qu’ils éta-blissaient un cordon sanitaireautour du parti d’extrêmedroite. Hélas, ce cordon achangé son pér imètre , e td’élections en élections, voicique les vieux partis ont connudes schismes, qu’ils ont perdudes fractions ultra-droitières,devenues des partis virulents- des tumeurs pour la démo-cratie - et que les thèses del’extrême droite, si nous lesplaçons du côté négatif ducordon, sont majoritaires,aujourd’hui, en Flandre. End’autres termes, le cordon sa-ni ta ire fa i t désormaisapparaître qu’il y a davantagede gens contaminés que degens bien portants.

Un nationalisme exacerbé,l’obsession de la flandrité dusol, des habitants, des mœurs,de la langue écrite, parlée

(pensée, un jour ?) a conduitla Flandre , en moins de20 ans, à un micro-État endevenir, promulguant des loisde discriminations et de pro-tection flagrante et brutale dela pureté ethnique, inspiréesdirectement et sans vergognede celles de Nuremberg pourle Reich, et de celles de sondomestique le Gouvernementde Vichy, pour la France enguerre. Hideuses filiations !

Il importe que mes amisfrançais, dont les médias sontsi redoutablement vigilantspour fustiger les comporte-ments fascistes qui ont ensan-glanté la dislocation de laYougoslavie, et pour ranimerles souvenirs de Milosevic, deKaradzic et de Mladic, quandce n’es t pas celui d’AntePavelic, réalisent qu’un cato-blépas de même nature est entrain de naître, non point dansles Balkans, qui semblent silointains, et d’une rassurantepauvreté, mais en face deLille.

Si, sur les décombres de ladémocratie belge, la Flandreproclame unilatéralement sonindépendance comme la Rho-désie du Sud le fit en 1965, lesgentils et candides ch’tis duconvivial Dany Boon vont dé-couvrir un État souverain, pié-tinant la déclaration univer-selle des droits de l’homme etla convention européenne desauvegarde des droi ts del’homme et des l iber tésfondamentales, mais égale-ment un État riche, homogène,puissant, arrogant, sûr de lui etdominateur, non pas dans la« partie sauvage du Monde »mais à quelques kilomètresd’eux-mêmes, et non pas dansune génération, mais demain.

La France, phare de la Li-berté pour le Monde, déses-pérément indif férentejusqu’ici, aurait-elle les yeuxclos ou toujours détournésvers le lointain ailleurs ?

Il n’existe pas qu’un seul Ti-bet sur la Terre.

Le Général qui , depuisMontréal, ouvrit les yeuxensommeillés, serait-il, lui,resté muet ?

Henry BARVAUX

(1) Composée de Michel Guégan,français e t de DobricaMilovanovic, serbe.

Paroles royalesJe pense que les difficultés vécues comportent pour chacun

des enseignements pour l’avenir. Je voudrais en partagerquelques-uns avec vous.

1. Pour commencer, il est indispensable de développer et derenforcer les contacts et les échanges entre responsables danstous les domaines, issus de Communautés et Régionsdifférentes. On a parfois l’impression que nos relations sontplus organisées et plus structurées avec les pays étrangers,qu’elles ne le sont à l’intérieur de notre propre pays. Dans unindispensable esprit d’ouverture, de respect mutuel et detolérance, n’oublions pas nos voisins immédiats, citoyensd’un même pays. Encourageons entre eux le dialogueconstructif. Il aidera chacun à écouter et à comprendre lessensibilités des uns et des autres et à progresser ensemble.

2. Je l’ai déjà souvent dit mais je voudrais à nouveau insisteravec force : il est nécessaire, surtout pour nos jeunes, de bienconnaître la langue des autres communautés. C’est une formede civisme que l’on a trop longtemps négligée. Et pourtant,c’est à l’évidence une condition première pour se comprendreet s’apprécier entre citoyens de communautés différentes. [...]

3. L’effort de rapprochement nécessite aussi une forme deréconciliation entre communautés. Dans notre histoire il y eutcertainement des injustices collectives. Il importe de surmon-ter ces blessures et de tout faire pour favoriser l’entente afinde construire ensemble un avenir commun. Cet objectif n’estpas utopique. Après tout, la construction européenne elle-même n’est-elle pas basée sur une volonté de réconciliation ?

4. Enfin, je pense que nous devons tous ensemble nousengager dans la réalisation de projets mobilisateurs. Toutd’abord, il me semble possible de devenir, au sein de l’Eu-rope en marche, un exemple de société où diverses culturesvivent harmonieusement ensemble dans une même entité, ets’y enrichissent mutuellement. Cela n’est pas un rêveimpossible. [...] Être attaché à son identité régionale oucommunautaire, promouvoir l’entente au sein de son pays, etœuvrer à l’Europe de demain sont des objectifs parfaitementcompatibles. [...] Sur le plan du développement, la Belgiquepeut contribuer à améliorer les conditions de vie des popula-tions du tiers-monde et en particulier celles des habitants del’Afrique Centrale qui furent déjà tellement éprouvés. Maisaussi dans notre propre pays, tout en dynamisant notreéconomie, il est nécessaire de lutter plus efficacement contrela pauvreté. En effet, celle-ci se développe sous des formesparfois nouvelles et préoccupantes, et nous devons renforceret adapter nos moyens pour la combattre.

Extraits du discours de Noël 2007 du roi Albert II

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Grands Récits

Terreur et martyre

Depuis les attentats du 11 septembre, le discours sur la Terreur islamiste etl’exaltation du Martyre des purs musulmans inventent un monde

idéalement manichéen mais pétri de très réelles et violentes contradictions.Est-il possible de sortir de ce mauvais scénario ?

omme Jacques Chiracet Dominique de Ville-pin avaient refusé departiciper à l’invasionde l’Irak, comme l’ar-

mée française était jusqu’à cesderniers mois discrètementprésente sur le théâtre afghan,comme il n’y a pas eu d’atten-tats spectaculaires sur le terri-toire national depuis 1995,beaucoup de Français ont re-gardé de fort loin la confronta-tion entre George W. Bush etOussama Ben Laden.

La décision de réintégrercomplètement l’Otan et la re-prise du discours antiterroristepar Nicolas Sarkozy pour jus-tifier un renforcement de notreaction militaire en Afghanis-tan obligent à reprendre toutel’histoire de la bataille que selivrent les Américains, hérautsde la pré tendue famil leoccidentale, et les diversesfract ions extrémistes del’Islam.

Universitaire, chercheurreconnu, auteur de nombreuxouvrages qui font autorité,Gilles Kepel souligne dans unrécent ouvrage (1) la portéedes deux Grands Récits qui,après la f in de la Guerrefroide, ont forgé une partie del’imaginaire mondial et engen-dré divers types d’actionsviolentes.

Bien entendu, le monden’est toujours pas divisé endeux camps, contrairement àce que voudraient nous fairecroire les concepteurs du scé-nario hollywoodien qui se

déroule depuis le 11 septem-bre grâce à deux metteurs enscène de talent : George W.Bush, d’une intelligence limi-tée mais qui bénéficie du con-cours efficace des néo-conser-vateurs ; Oussama Ben Laden,diable idéal qui dirige plus oumoins Al-Qaïda. En effet, plu-sieurs grandes puissances(Chine, Russie) ne participentpas à la croisade américainepour le triomphe du Bien etles différentes fractions isla-miques se livrent à des guerressans merci.

Bien entendu, comme danstout schéma manichéen, lesdeux rivaux sont complices etse dés ignent l ’un l ’autrecomme Héros absolus, commeparfaites figurations du Bienou du Mal. Dans cette lutte àmort, il faut que l’adversairesoit fantasmatiquement ren-forcé au point de représenter,dans son monde, la Toute-Puissance qui sera vaincue parune Puissance encore plusgrande. Un jour, la Terreur is-lamiste sera vaincue par laDémocratie américaine. Unjour, le Martyre de ceux quicombattent et se suicident aunom d’Allah entraînera laperte des États-Unis et deleurs alliés – à commencer parIsraël...

Ce type de récit est vieuxcomme le monde et, une foisde plus, nous constatons avecGil les Kepel l ’échec desprotagonistes.

Échec militaire des Améri-cains en Irak et en Afgha-

nistan, échec de leur projet po-litique au Proche-Orient oùleur adversaire iranien a mar-qué de nombreux points grâceaux chiites irakiens, grâce auHezbollah sur le territoirelibanais... Effondrement deleur discours sur les valeurs,systématiquement niées dansla prison de Guantanamo etdans les centres de torture dela CIA.

Échec des j ihadistes quin’ont pas rassemblé autour deleurs suicidés les vraiscroyants pour les mener à laconquête du monde : la guerrefai t rage entre chi i tes e tsunnites, entre Palestiniens (leHamas et le Fatah) et les ré-seaux terroristes sont en proieà de vives disputes sur la tacti-que et la stratégie...

En théor ie comme enpratique, les deux récits de laTerreur et du Martyre sontintrinsèquement nihilistes etont engendré des cycles dedestruct ion de l ’autre e td’autodestruction de soi dontles peuples pris dans l’étau dela violence mimétique vou-draient bien sortir. Mais com-ment ?

Gilles Kepel pense que leVieux continent pourrait tracerune nouvelle voie. Plusieurspays ont été victimes du terro-risme jihadiste (l’Angleterre,la Hollande où a été commisle meurtre de Théo Van Gogh)mais l’Europe n’a pas sombrédans la violence et les émeutesde 2005 en France n’ont pas

pu ê tre inscr i tes dans lesGrands Récits antagonistes.Au contra i re , les enfantsfrançais d’immigrés se mêlentde plus en plus aux autres ci-toyens – malgré la crise éco-nomique et sociale qui ralentitl’intégration – et, en Europe,la Turquie ne cesse de s’euro-péaniser sous l’égide d’isla-mistes démocratisés...

C’est ce processus complexequ’il faudrait accélérer. GillesKepel propose de construireautour de la Méditerranée unegrande région qui s’étendrait« de la mer du Nord aux eauxdu Golfe, dans une triangula-tion entre l’Europe riche deson t issu industr ie l e ttechnologique, de ses atoutsuniversitaires et scientifiques,le Golfe doté de ses ressour-ces en hydrocarbures et de sapuissance financière, et le Le-vant et l’Afrique du Nord,dont le développement humainest un atout majeur pour de-main ».

Le projet mérite une discus-sion approfondie (quelle partprendrait la Russie, puissanceeuropéenne, dans cette cons-truction ?) et suppose des con-ditions politiques qui ne sontpas réunies : l’Union euro-péenne ne s’est pas créée« par l’adhésion mutuelle deses membres » mais à la suited’une catastrophe (la SecondeGuerre mondiale), puis dans lapeur du communisme soviéti-que avant d’être soumise au« despotisme éclairé » que dé-nonce Hubert Védrine.

Quelle serait la puissanceagissante, rassembleuse, dyna-misante ? La France seraitbien placée, si son gouverne-ment proposait à l’ensembledu peuple un projet pour cettepartie du monde. Cela suppo-serait qu’elle développe à nou-veau son économie (elle lepeut) et mobilise sa finance(elle le doit, par la nationalisa-tion du crédit) selon des ob-jectifs politiques...

Maria DA SILVA

(1) Gilles Kepel – « Terreuret Martyre, Relever le défi de ci-vilisation », Flammarion, prixfranco : 24 €.

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e trio-là, incontestablement, nous l’avons en com-mun ! Péguy, Bernanos, Claudel, ce sont les plusgrands des croyants inspirés de la littérature françaisecontemporaine. Trois prophètes, incommodes, sou-vent colériques, désaccordés par rapport à leur temps,

incantateurs à qui il est tout permis, pourcause de génie. Jacques Julliard nous offreà leurs propos, un de ses meilleurs livres,transporté lui-même par ce que les trois ontd’exceptionnel et permettent d’échapper ausuivisme moderne. « À une époque où lamodernité n’est capable d’exprimer quedes vieilleries et que la montée de l’insi-gnifiance menace de nous étouffer, leursprophéties teintées de passéisme prend desaccents résolument futuristes. Lorsques’éloignent le socialisme et la révolution,qui furent longtemps le véhicule de larévolte des hommes, de leur quête de senset de dignité, nous découvrons que cesmagiciens du verbe se sont remis à nousparler. Ils ont compris avant tout le mondeque l’idéal révolutionnaire n’a de sens quedans la défense acharnée, sans esprit derecul, de l’individu contre les entreprisessournoises du monde moderne. » Je suis allé tout droit à laconclusion, mais elle n’est évidemment légitimée que par ceque tout ce qui la précède, c’est-à-dire la lecture plusqu’attentive, passionnée de Péguy, Bernanos et Claudel parJacques Julliard depuis sa prime jeunesse.

J’avais gardé souvenir de chroniques incandescentes duNouvel Observateur, lorsque Julliard confiait son enthou-siasme de la représentation du Soulier de Satin à Avignon,dans la mise en scène d’Antoine Vitez, la sublime LudmilaMikaël jouant Prouhèze de façon inoubliable. Car notrehistorien, journaliste, syndicaliste, est d’abord un humanisteau sens premier du mot, c’est-à-dire un homme de culturequi a pour interlocuteur les plus grands, et dont le christia-nisme exigeant appelle les requêtes de l’intelligencesupérieure. Ce qui dans le langage de Benoît XVI renvoie àl’interpellation sans fin de la raison et de la foi. Péguy,Bernanos et Claudel sont donc toujours à portée de lui, etson premier mérite est de faire comprendre ce qu’il a retenude ses lectures, à partir des deux ou trois choses essentiellesqu’il se rappelle de chacun d’eux. Claudel donc, avec cettefoi à l’état quasi sauvage, forgée à partir de Rimbaud. Quelétonnant personnage que celui de cet ambassadeur, joyeuse-ment insulté par Bernanos (l’âme plus noire que Turelure,plus décoré que Goering). Mais c’est le paradoxe vivant duserviteur briandiste de la IIIe République associé au plussubversif des poètes de l’amour – le surréalisme tout entierà côté de lui suinte de fadeur – qui fait son intérêt. Claudelest un compromis, instable toujours, qui oscille entre lesdeux parties de lui-même, sage et fou.

C

IdéesEt Péguy, cet étrange socialiste, ce converti qui demeurera

jusqu’à la mort chrétien du porche ? Julliard le connaît aussisur le bout des doigts, d’autant plus qu’il est emblématiquede la période qu’en historien il a le mieux explorée. Mais ledirecteur des Cahiers de la quinzaine lui a aussi appris lejournalisme, déjà transcendantal avant Maurice Clavel, maisaussi voué à une éthique de vérité, sans échappatoirepossible. « C’est un métier risqué. C’est aussi un métier quirequiert l’humilité. Que Péguy ait mis à la fois sa pensée,son écriture et son génie dans un ordre aussi modeste etaussi contraignant que celui du périodique me le rend cheret me le rend proche. » Sans compter que cette modestie n’ajamais freiné les ambitions de l’esprit. La matière donts’empare l’homme des Cahiers fait jaillir un flot de lumièrequi nous éblouit encore. L’insistance sur la fameuse antino-mie du politique et du mystique nous pose une questiontragique, dès lors que pour Péguy le moderne marquel’avènement de la toute puissance de l’Argent, en contradic-tion avec les civilisations de tous ordres qui avaient précédé

et qui étaient toutes armées intérieurementd’une substance, d’une instance, commed’une moelle du spirituel.

Et notre Bernanos, à présent au centred’une querelle dont Julliard est en partieresponsable, sans qu’on ait retenu le cœuren fusion de son œuvre qui résulte de lafission du couple désespoir-espérance ?Cher Jacques Julliard, où avez-vous étécherché que ce royaliste indéfectible seserait rallié – par réalisme ? – à la Républi-que parlementaire ? C’était simplement im-possible à cet irréductible qui riait à gorgedéployée de se voir consacré par de bravesjournalistes américains comme dernier dé-fenseur de la démocratie en péril ? Mais ilest vrai que la politique, selon l’auteur deDialogue des carmélites demeure large-ment problématique, car il lui est quasi-ment impossible de se démarquer de l’au-

gustinienne Cité de Dieu, l’ idéal évangélique nontransgressible. Comme Péguy, Bernanos est du côté del’intransigeance mystique. C’est difficile à admettre, lorsquela politique vous fait forcément traverser les pires impuretés,celles des passions d’un Drumont, singulièrement inadéqua-tes à l’idéal. Heureusement, Philippe Lançon dans Libéra-tion a su rendre justice à l’écrivain en montrant que sagrandeur consistait à avoir été supérieur à ses faiblesses.

J’aurais aimé discuter la conclusion de Jacques Julliard,dont j’approuve la chute sans être entièrement d’accord avecl’analyse qui la précède. Elle est pourtant exceptionnelle-ment brillante, mais elle met en jeu tant de paramètres et dejugements sur le destin du christianisme à l’âge modernequ’ i l faudrai t prendre le temps d’une t rès longuecontroverse. En quoi une réconciliation des chrétiens avec lemoderne était-elle souhaitable et possible, en quoi elle nel’était pas ? Je pense pour ma part que le compromisimaginé par Jacques Maritain avant-guerre, et auquel s’étaitrallié le catholicisme français, s’est effondré dans les années60-70. Ce qui, d’ailleurs, renforce la lucidité de nos troiscompères en état de fureur permanente. Il nous faudra enreparler.

Jacques Julliard - « L’Argent, Dieu et le Diable – Péguy,Bernanos, Claudel face au monde moderne », Flammarion, prixfranco : 20 €.

Le triocatholiquede Julliard

par Gérard Leclerc

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Revue

Faillite

Narration

Kamikaze d’été

Avec Kamikaze d’été, Stéphane Giocanti poursuitune œuvre originale et variée. On savait cet

auteur d’un essai inspiré de la pensée de PierreBoutang, Les Enfants de l’utopie (1) également

félibre et biographe de Maurras (2). On leconnaissait encore comme spécialiste de

littérature anglo-saxonne (3). Le voici publiant sonpremier roman qui témoigne de sa passion pourun pays lointain et trop méconnu des Français :

le Japon (4).

est une revue relative-ment nouvelle, qu’ontrouve sur lesprésentoirs . Onl’achète pour unesomme modique s i

l’on parvient à surmonter deuxobstacles : la longueur des ar-ticles publiés en grand formatet sans aucune concession à lalisibilité ; la nature de la revuequi se présente comme une re-vue de gauche (une gaucheradicale) et plus précisémentcomme « l’espace d’une poli-tique démocratique des sa-voirs et de l’intellectualité » !Mais comme Le Figaro lit-téraire proclame que la publi-cation est de bonne qualité (ily a une citation au dos de larevue) on se dit que l’aventuremérite d’être tentée.

De fait, on peine à lire maisce qu’on lit vaut la peine.Ainsi l’étude de Yann Mou-lier-Boutang, d’une pleine ac-tualité : « Le prisme de lacrise des subprimes : la se-conde mort de Milton Fried-mann » est une analyse criti-que et savante de plusieursouvrages consacrés à lamondialisation.

Beaucoup d’auteurs étran-gers participent à cette revueeffectivement internationale :les pages consacrées àl’Amérique latine méritent at-tention - aussi bien l’article deGiuseppe Cocco Le labora-toire sud-américain que l’en-t re t ien avec Émile SaderConstruire une nouvel lehégémonie. Très intéressanteétude de Bruce Robbins surles ONG et l’idéologie del’humanitaire.

Jacques BLANGY (1) La Revue internationaledes livres et des idées, septembre-octobre, 2008, no 7, prix : 5 €dans les kiosques.

e rapprochement aussioriginal que bienvenuentre Maurras e tMishima qu’il avait ef-fectué dans sa biogra-phie du maître de l’Ac-

tion française révélait déjàcombien Stéphane Giocantiaimait et connaissait la littéra-ture japonaise. Avec Kamikazed’été, et au travers d’une écri-ture dont on appréciera, no-tamment dans les descriptions,l’exactitude poétique, il seprésente comme un connais-seur lucide de cette civilisa-tion qui prit, à partir de la findu XIXe siècle, et sous la pres-sion occidentale, des tournantsqui ne laissèrent pas d’influersur le reste du monde maisdont Stéphane Giocanti inter-roge les conséquences pour lajeunesse japonaise elle-même,à deux époques différentes.

En un ricochet à deux re-bonds aussi uniques qu’essen-tiels pour comprendre les in-ter rogat ions du Japond’aujourd’hui, il décrit unpays partagé entre l’imitationde l’Occident - que, suprêmerevanche, il finit par inspireren le forçant à se caricaturerlui-même - et le refus de sedissoudre dans cette carica-ture - si bien que l’Occidenttoujours prêt à donner desleçons de morale ne comprendrien à l’attitude complexe, tropsommairement qualifiée denationaliste, du Japon face àson histoire.

Or le mérite du livre de Gio-canti est de n’écarter aucunequestion : entre l’image d’unpère patr io te mais nonfanatique, mourant en kami-kaze pour sa patrie déjà vain-cue à l’été 45, et celle du filsétouffé par le culte que samère rend à son mari mortavant d’avoir su qu’il avaitdonné la vie, le livre nousrévèle les différentes facettesd’un Japon qui n’avait pasfini, à la fin des années 60 etau début des années 70, derégler ses comptes avec sonpassé.

Celui-ci, plus grave encoreque la défaite militaire, n’a-vait-il pas vu les Américains,en purs vainqueurs de l’âged’homme, déposer la divinitéde l’empereur et commettreainsi « cette forfaiture » qui« avait dégradé les kamikazes,nié leur destinée divine, vidéleur don héroïque de toutsens » ? Et aux yeux deAsuka, la mère de Naoki, sonfils indifférent à l’image deson père e t , de plus ,homosexuel, n’est-il pas leproduit de ce Japon victime decette trahison ?

Le seppuku de Mishima, denovembre 70, joue alors unrôle central dans la découvertepar le fils de la figure d’unpère qui lu i semblai t , àl’origine, l’étranger absolu.Peut-être parce que la mortvolontaire, pour une certaine

conception du Japon, d’unMishima lu i aussihomosexuel, n’est pas plus unsuicide que celle, tout aussivolontaire, vingt-cinq ans plustôt, de ce père à la rencontreduquel part Naoki. L’un etl’autre ne combinent-ils pasdans leurs différences commedans l’analogie de leur démar-che les incertitudes et les at-tentes du jeune homme ?

Celui-ci, enfin apaisé pouravoir trouvé, au travers de lafigure recouvrée de son père,le chemin d’une traditionvivante , conduit soncompagnon, et sa mère, qu’ilaidera, par cette réconciliation,à prendre la mesure de lacomplexi té des choses , àKamakura, « sol foulé par lesdieux », dont l’existence destemples, « plus que millénairefaisait souffler sur ses pro-ches un vent de consolation oùl’âme de son père défunt leuroffrait le sillage d’une vienouvelle. » C’est qu’entretemps il avait appris la leçonde celui qui, face à l’ineptie,« méprisai t le mépris dumonde ».

Axel TISSERAND

(1) Stéphane Giocanti – « Lesenfants de l ’utopie », Âged’Homme/Les Provinciales, 1998,prix franco : 19 €. (2) Stéphane Giocant i –« Charles Maurras félibre », chezl’auteur, 1995,

et « Maurras, le chaos et l’or-dre », Flammarion, 2006, prixfranco : 28,50 €. Voir Royalisten° 888. (3) Stéphane Giocanti – « T.S.Eliot ou le monde en poussières »,J.-C. Lattès, 2002, prix franco :23 €. Voir Royaliste n° 802.

(4) Stéphane Giocant i -« Kamikaze d’été », Éd. du

Rocher , 201 pages , pr ixfranco : 14 €.

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A Paris, chaque mercredi, nousaccueillons nos sympathisants dansnos locaux (17, rue des Petits-Champs, Paris 1er, 4e étage) pour undébat avec un conférencier, person-nalité politique ou écrivain. La conférence commence à 20heures très précises (accueil à par-tir de 19 h 45 - Entrée libre, uneparticipation aux frais de 1,50 € estdemandée), elle s’achève à 22 h.Une carte d’"abonné des mercredis"annuelle (8 €) permet d’assistergratuitement à toutes les conféren-ces et de recevoir chaque mois leprogramme à domicile. A p r è s l a c o n f é r e n c e , à 2 2heures, un repas amical est servipour ceux qui désirent poursuivreles discussions (participation auxfrais du dîner 5 €).

MERCREDIS DE LA NAR

Communiquer avec la N.A.R. Adresse postale : 17, rue des Petits-Champs,

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que et militaire de la France...Voici, grâce à la nouvelle

biographie de notre invité, unepassionnante redécouverte.

Mercredi 15 octobre - Lapublication du Livre blanc surla défense, l’envoi de nouvel-les troupes en Afghanistan,l’annonce de la réintégrationcomplète dans l’Otan ainsique les manifestations fré-quentes du mépris que Nico-las Sarkozy manifeste aux sol-dats et aux Anciens combat-tants provoquent une profonde« C r i s e d a n s l ’ a r m é efrançaise » qui s’est notam-ment exprimée par les vivescritiques du Livre blanc pu-bliées dans la presse par desofficiers supérieurs.

Pour apprécier l’ampleur decette crise, pour en mesurer laportée, nous avons fait appel àJ e a n - D o m i n i q u e M E R -CHET : ce journaliste à Li-bération depuis les années1990, auditeur à l’Institut desHautes Études de Défensenationale, est depuis toujourspassionné par les questionsmilitaires. Il anime le blogueSecret-défense, très fréquenté

par les internautes en raisonde la qualité des informationset des commentaires qui ysont régulièrement publiés etqui fait désormais référence.

Mercredi 22 octobre - Al’occasion de la publicationde son précédent livre, Si-mon EPSTEIN nous avaitrévélé le destin des nombreuxantidreyfusards qui devinrentCollaborateurs entre 1940 et1 9 4 4 . É l a r g i s s a n t s o nenquête, notre invité montredans une nouvelle étude quebeaucoup de militants de lagauche antiraciste ont struc-turé la Collaboration alorsqu’un nombre significatif demilitants de la droite antisé-mite ont joué un rôle impor-tant dans la Résistance. Il ya l à u n « P a r a d o x ef r a n ç a i s » q u i r u i n e l alégende d’une gauche quiaurait toujours été impeccablequant à la défense des droitsd e l ’ h o m m e e t d e l adémocratie. Simon Epstein,économiste et historien quivit et enseigne à Jérusalemdepuis 1974, nous permettrade comprendre les processusd e l a t r a h i s o n e t l aredécouverte, aux heurestragiques, d’un patriotismedélivré de ses pulsions racis-tes et xénophobes. Mercredis 29 octobre et 5novembre – Pas de con-férence en raison des vacan-ces de la Toussaint.

Pour recevoirrégulièrement leprogramme des

« mercredis » et avoirl’accès gratuit à toutes

les réunions, prenez une"carte d’abonné" (8 €

pour l’année)

Quelques changementsdans l'organisation des

"Mercredis".

Afin d'améliorer la qualitéde nos "Mercredis" deuxmodifications notables :1/ La porte sera irrévoca-blement fermée à partir de20h15 et nous n'accepte-rons plus personne ensuite.2/ Les personnes désireu-ses de participer au repassont priées de s'inscriredès leur arrivée. Nous pren-drons les inscriptions dansla l imite des placesdisponibles.

Mercredi 8 octobre - Pournotre réunion de rentrée, nousavons le plaisir de recevoir uninvité qui est un familier denos soirées depuis de trèsnombreuses années. Historien,spécialiste des XVIIe et XVIIIe

siècles, Jean-Christian PE-TITFILS nous a présenté,entre autres ouvrages, ses bio-g r a p h i e s d u R é g e n t , d eLouis XIV et de Louis XVIqui ont été distinguées par desprix et qui ont eu la faveur dupublic.

Il revient parmi nous pourrendre justice à « Louis XIII,roi méconnu » qui est d’ordi-naire présenté comme un mo-narque faible, maladif, soumisa u C a r d i n a l . L e p è r e d eLouis XIV avait certes degrands défauts, mais Jean-Christian Petitfils montre qu’ilfut un rude roi de guerre, trèssoucieux de son autorité maisq u i a r e n d u p o s s i b l eRichelieu. Complémentaires,ces deux serviteurs de l’Étatont fondé la monarchie admi-nistrative moderne, confortél’unité du royaume en respec-tant la liberté de conscience,assuré la puissance diplomati-

Royaliste ne doit compterque sur ses lecteurs pour tou-cher de nouvelles personnes.Pour cela, quel meilleur am-bassadeur que le journal lui-même ? Ouvrez donc votrecarnet d’adresses et envoyez-nous les noms et coordonnéesde ceux de vos amis suscepti-bles d’ê tre in téressés parRoyaliste. Nous leur ferons unabonnement d’essai pendanttrois mois. Prix de chaqueabonnement : 3,80 €.

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Page 12: e 26 septembre, de- refusent d'agir · (Abkhazie, Ossétie du Sud) était prévisible et la reconnais-sance de l’indépendance du Kosovo par plusieurs grandes puissances créait

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Leur inertie

Nous ne nous réjouissonspas de l’échec patent ducapitalisme financier. Il

s’était construit sur le vol et surl’exploitation et il engendrait,dans sa phase triomphale, d’in-nombrables souffrances. L’effon-drement de ce système sera ca-tastrophique pour les économiesnationales et pour des dizaines demillions de citoyens aux États-Unis et en Europe de l’Ouest.

Grâce à plusieurs chercheurs,grâce aux documents qu’ils noustransmettaient, nous avons bienanticipé cette crise systémique etnous souhaitions que le chef del’État et le gouvernement réagis-sent avec vigueur en France et ausein de l’Union européenne.Comme cette crise financière ve-nait s’ajouter aux désastres en-gendrés par la politique de laBanque centrale européenne etpar l’ultra-concurrence, nousréclamions, avec d’autres, la rup-ture immédiate avec l’ultra-li-béralisme : augmentation dessalaires, nationalisation du crédit,protect ion de l ’économieeuropéenne, réforme des statutsde la BCE...

Tel é ta i t le programmeminimum, dont on trouve deséléments dans divers discours deNicolas Sarkozy, qui pouvait ras-sembler les principales forces po-litiques françaises et une largemajorité de citoyens dans un sur-saut national – exemplaire pourd’autres gouvernements e td’autres peuples européens. Ceprogramme nous aurait permis derésister sur tous les fronts –financier, monétaire, industriel,commercial – tout en préparantune réforme radicale du systèmemonétaire international et uneréorganisat ion des échangesinternationaux.

Rien de tout cela n’a été tenténi même envisagé. Malgré lesanalyses dont elle disposait, la« gouvernance » a continué detenir des discours contradictoiresqui masquaient son inaction. Enoctobre 2007, il était clair que lacrise du crédit hypothécaire auxÉtats-Unis aurait des conséquen-ces gravissimes en Europe del’Ouest – tout particulièrement enGrande-Bretagne, en Espagne eten Allemagne mais aussi enFrance. Pourtant , en janvierdernier, Christine Lagarde affir-

mait que la purge boursière étaitnécessaire, François Fillon répé-tait que les fondamentaux étaientbons et Nicolas Sarkozy évoquaitune crise américaine. Au mêmemoment, le supposé présidentclamait que le capitalisme mar-chait sur la tête et demandait dessanctions contre les dirigeants dela Société générale.

Aujourd’hui, le gouvernementadmet que la crise est systémiqueet reconnaît que la France est etsera durement touchée. MaisFrançois Fillon avait annoncé enaoût dernier que le gouvernementne réagirait pas à la catastropheultra-libérale et... poursuivrait lesréformes ultra-libérales. Noussommes toujours pris au piège dece double langage et de cette ges-

tion chaotique. Dans les discoursqu’il a prononcés en septembre àNew York puis à Toulon, NicolasSarkozy a de nouveau dénoncéles responsables du « désastre »et réclamé des sanctions contreceux-ci. Après avoir déclaré qu’ilfallait opposer au capitalisme fi-nancier le « capitalisme des en-trepreneurs », annoncé qu’il se-rait mis fin aux « abus et auxscandales » (les fameux parachu-tes dorés), déclaré qu’il fallait« réglementer » les banques et« remettre à plat » le systèmemonéta i re e t f inancierinternational, l’orateur a affirméqu’i l ne changerai t pas unepolitique... inspirée par l’orthodo-xie libérale.

Au ministère de la parole, Nico-las Sarkozy ferait un chroniqueurtout à fait acceptable. Dans unmême texte, il peut aligner plu-sieurs séries de propositions con-tradictoires qui permettent de ras-surer ou de satisfaire tout lemonde. Efficace en campagneélectorale, le procédé ne résistepas une seconde à l’examen. Par-tisan du crédit hypothécaire en2007, Nicolas Sarkozy a annoncéà plusieurs reprises qu’on allaiten finir avec les privilèges despatrons e t les fol ies desfinanciers. Mais rien n’a été faitet Bernard Tapie bénéficie d’unarrangement qui fait scandale...

Nicolas Sarkozy préside depuisle 1er juillet le Conseil euro-péen et déclare à Toulon que « laconcurrence est un moyen, pasune fin en soi » ou encore que« l’autorégulation ne fonctionneplus » mais l’Eurogroupe a dé-cidé le 12 septembre de laisserjouer les « stabilisateurs automa-tiques » et la Commission euro-péenne a refusé le 25 septembretout p lan de sauvetage desbanques.

Les peuples et les nations del’Union européenne paieront trèscher ces inconséquences et cetteinertie.

Bertrand RENOUVIN

Éditorial