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MeganHarold

TOUTPOURLUI

Volume3

1.Douloureuxréveil

Matêtemefaithorriblementmal…J’ail’impressiondevivreuncauchemar.J’entendsdesbruits,descris,maistoutmesemblevenirdetellementloin…Jenesaispassijepeuxbouger,jenevoispasgrand-chose…Ma tête reposesur levolant,entremesmains. Jemeredresseetportemesdoigtsàmonfront.Dusang…J’aidûmecognerfortsurlevolant.

J’aimal…

Je regarde autour demoi. La rue est jonchée de blocs de pierres, de verre brisé… Il y a de lafumée aussi, la route se soulève par endroits. Tout est encore flou, j’ai du mal à retrouver mesesprits…Lasoiréecaritative, je revoisPaulmeserrant lebras…Le regard froidet inquisiteurdeLorraine…EtAdam…Oui,jemesouviens…Adamn'apasbougé…

Oh,matête!

Jemerappelleavoirroulépuisperdulecontrôledelavoiture…Untremblementdeterre…MonDieu!Moncœurs’accélère.

Ilnefautpasquejeperdemonsang-froid.Lessecoursvontvenir,jenevaispasresterlà…Jenesuispassousdesdécombres…Onpeutmevoiretjevaissortirdelàetpuis…

Laterretrembleànouveau.Jem’accrocheauvolant.

Jedoissortirdelà,m’abriter,ilfautqueJESORTE!

Une douleur effroyable dans le bas du dos m’arrache un cri de douleur…Mes jambes…mesjambesnebougentplus !La terre continuede trembler, je suisbloquéedansmavoiture, j’entendsencoredeschocssurlaroute.

Qu’est-cequejepeuxfaire?Montéléphone!Làsurlesol…Ilvibre!Ah,siseulementjepouvaisdécrocheràdistance!

Mes yeux s’embuent de larmes, je ne sais pas quoi faire, j’entends toujours des choses tomberautour demoi. Je ne suis pas à l’abri dans cette voiture ! Clairem’appelle, je veux lui parler, jepleure,jecrie…Jeperdsmonsang-froid,jehurle, jeveuxqueClairem’entende!Adam,ADAM!Est-ce qu'il est sous les décombres ? Adam… Où est-il ? Une image de lui enseveli s'imposebrutalementàmoi…Jerevoisdesimagesdevoituresécraséesparlesmaisons,jevaismourir…Mesjambesnerépondentplus…

Papa…Jen’aimêmepaseuletempsdet’appeler,tuauraisétésifierdemoi…

Jesuisagrippéeauvolant,sursautantàchaquebruit,àchaquecraquement.

Jeneseraidoncjamaisunegrandevioloniste?Ryan,jenet’aipasditaurevoiràNewYork…

Un gros bruit sourd, quelque chose vient de tomber sur la voiture. Jeme jette sur le siège dupassager,maisceréflexeréveilleunedouleurfulgurantedansmondos.Jem’évanouis.

–Mademoiselle!Mademoiselle!

J’entends du bruit…C’est moi qu’on appelle ? Unemain surmon front, des doigts dansmoncou…

–C’estbonj’aiunpouls,elleestenvie,lesgars!Mademoiselle,vousm’entendez?

J’entends…Matête,j’aimal…Mesjambes?

J’ouvre les yeux, le ciel est teinté de rose…Ce n’est plus la nuit ?Onme porte…Un hommedevant moi… Son visage est crispé… Il parle à son collègue, je n’entends pas ses mots…L’ambulance, je vois le gyrophare. On me glisse dedans, ma tête ne bouge pas… Cette lumièreaveuglante…Adam…oùestAdam?

Ons’agiteautourdemoi.

–Ellen’arrêtepasdes’évanouir.Lepoulsestfaible!OK,onl’emmène.

J’ailetempsdevoirunhomme,enbleu.Unmédecin.Mespaupièressonttellementlourdes…

Jeme réveille.La lumièreme fait clignerdesyeux. J’ai peurd’avoir denouveaumal à la tête,maisrien,jenesensrien.Jelèvelamain,j’aiunpansement.Mesyeuxs’habituentpetitàpetit,jesuisdansunechambre…

Jene suispasà l’hôpital?Oùest-cequ'onm'aemmenée?Çane ressemblepasàunechambred’hôpital…

Toutestcalme.Lebiprégulierd’unemachinederrièremoiestleseulsonquejepeuxentendre.

Maisoùsuis-je?Onadûmedonnerunmédicamentassezfort,jemesensétrangementbien.

Jetournelatête.Cettetêtebaissée,cescheveuxbruns…Adam?

–Adam?

Mavoixestfaible,jesensmagorgesèche…Jebougemamain,jevoisAdamsursauteretaussitôt,satêteserelève.

MonDieu!Quelletête!Ilal’airdévasté!

Ilapleuré,sesyeuxsontrouges,sesjouesbrillent.Sonregardsurmoipassedel’étonnementauplusprofondsoulagement.Ilagrippemamainetlacollesursonvisage.

–Éléa,enfin,tuteréveilles!

Adamsoupire,fermelesyeuxetlesrouvreaussitôt:

–Commenttesens-tu?–J’ai…soif…–Attends…

Ilattrapefébrilementunverreposéàcôtédemoietmesertdel’eau…J’essaiedemeredresser,maisj’aiunpoidsàlaplacedesjambes.

Mesjambes,jemesouviens!Mesjambes,jenepouvaispluslesbouger!Oh,monDieu,non!

Moneffroidoitseliresurmonvisage,Adamm’attrapepourm'aideràm’asseoir,dansungestetendre.

–Lemédecinpasseratevoirplustard.Boisunpeuavant…

Adamme donne à boire,mes yeux ne se détachent pas demes jambes. J’essaie de bougermesorteils, j’ordonneaupoucedebouger,maisrien…Leliquidemefaitdubien, je lesensdescendredansmoncorps,ilmeréveilleaussi,mesortdemabrume.Mesidéesseremettentenplace,jerevoislesévénements,etmeslarmescoulentànouveau…

Adams’assoitsurleborddemonlit,sonvisageachangé.Sonregardesttoujoursinquietmaisilessaiedeprendreunemineréconfortante.Ilposemonverreetmecaresselajoue.

–Tuassubiungroschoc,toutvabienmaintenant.

J’éclateensanglotsetAdammeserrecontrelui.Jeretrouvesonodeur,ellemefaittellementdebien.J’étaissiseuledansmavoiture!J’aieusipeur!Adamestlàmaintenant,etàcetinstantjemerepose complètement sur lui… D'un geste tendre il essuie mes larmes. Ses gestes sont doux.J’aimeraisqu’ilmegardelongtempscommeça,maislaréalitém’enempêche.Jemereculedelui,monventresecrispe:

–Ettoi,tuesindemne?Tun'asrien?EtClaire?–Clairevabien.L’hôtelSt.Regisn’apaseudedégâts,justequelquesverrescassésmaisriende

grave.Jel’aiprévenuequetueslà,ellearrivedèsqu’ellepeut.Etmoijevaisbien,net'inquiètepas.

Jesuissoulagée,Clairevabien.Adamvabien,ilestentier,etjesuisdanssesbras.Jesavourecemoment,çafaittellementdebien!

–Onestoù,ici?

Jeparcours lachambreduregard.Celaneressembleenrienàunechambred’hôpital.Unécranplatgigantesqueestaccrochéaumurenfacedemoi,unpetitcanapéestinstallédevantuneimmensebaie vitrée, les rideaux sont d’un blanc immaculé. Une commode, des livres, des magazines, j’ail’impressiond’êtrecommeàlamaison.Laporteestouverte,etjepeuxapercevoirunautrecanapé,

plus loin…Je suisdansunappartement?une suited’hôtel ? Jen’entendsaucunbruitvenantde larue…

–Oh ! c’est une clinique privée, en dehors de San Francisco. Tu verras, lesmédecins ici sontexcellents.Etpuis,j’aipenséqu’iltefallaitducalmepourteremettrede…detoutescesémotions…

–C’esttoiquim’asamenéeici?–Non,tuesvenueenhélicoptère,jesuisvenuaussivitequej’aipu…

Enhélicoptère?J’aiprisunhélicoptère!

–Maiscommentest-cepossible?Jenemesouviensderien.Commentas-tufait?–Tunerépondaispasautéléphone,j’aicomprisqu’ilt’étaitarrivéquelquechose…

Savoixs’éraille,sesyeuxsontrouges…Adamsemblebouleversé…

–Hum…Alors,j’aidemandéàtousmesassistantsd’appelerleshôpitaux,lessecours,lapolice,tout lemonde,nousavonsappelépartout.Lespompiersnousontavertisquand ils t’ont trouvée,etl’hélicoptèreetlesmédecinsiciontfaitlereste.

J'aiprisl'hélicoptère?!

–Etcommentvalaville?–Deux,troisquartiersontétébientouchés,maisçava.Cen’estpastropcatastrophique.–Desmorts?–Quelques-uns,oui.Maistuesavecmoi,bienvivante.Jesuistellementsoulagé.Jenesaispasce

quej'auraisfaitsi…si…

Denouveau,meslarmescoulent.Lebruit,lesimagesmereviennent…Jemesouviensd'unepetitefillequihurlait…

MonDieu,quellehorreur!

Jepleuredanslesbrasd’Adam.

–Éléa,j’aieusipeur…Quandj’aivuquetunerépondaispasautéléphone…Claireetmoi,nousétionstellementinquiets!Jem’enveux,situsavais!Sij’étaisintervenu,sijevousavaissuivis,Paulet toi, j’auraisputeretenir, tuseraisrestéeavecnous,à l’abri…Maisjen’airienfait!Jen’aipasbougé!

Je sensAdam s’agiter contremoi. Sa voix est pleine de colère contre lui-même. J’avais oubliéPaul,lafête…Lessouvenirsmereviennent,j’ail’impressionquetoutestloinalorsquec’étaitilyaquelquesheuresseulement…

Je le serre contre moi, j’ai l’impression que les rôles se sont inversés, que c’est à moi de leréconforteretdeluidirequetoutvabien…Maistoutnevapasbien…Mesorteilsrefusenttoujoursdemerépondre!

Adams’éloignedemoi, se lève,enfonce lespoingsdanssespoches. Ilvibred’une ragesourdequ’ilessaietantbienquemaldecontenir.Jenepeuxm’empêcherdesourire,mêmeavecdescernesetuneminefatiguée,ilrestetrèssexy.Adamarriveàêtrebeaudanstouteslessituationsetenplus,c’estpourmoiqu’ils’inquiète.Adam…

–S’ilt’étaitarrivéquelquechose,Éléa,jamaisjenemeleseraispardonné!J’aiétélâcheetj’aifailli te perdre.Quand je revois sa tête quand il est revenumevoir ! Il a eude la chance, si nousavionsétéseuls…Ilauraitdûêtreàtaplacedanscettevoiture…Aulieudeça,iln'arien,lui.

–Adam,c’estfini.Jesuislà.Laisse-le.Cen’estpas…important.

J’essaieànouveaudemeredresser,maisjen’aipasencoreassezdeforcepourrelevermesdeuxjambesinertes…J’aisoudainhâtedevoirlemédecin,jeveuxsavoir…

–Adam,tusaisquelquechose…pourmesjambes?

Sacolèreretombed’uncoupetsonregards’assombrit.

Ohnon!Jen’aimepasdutoutceregard.Jenesuispasdutoutrassuréedevantcesyeux-là.

-Jel’aivutoutàl’heure.Tuaspassédesexamens,leDrLaurensviendratevoirdèsqu’ilauralesrésultats.

-Maisilnet’arienditdeplus?Tuessûr?

-Non,pourlemoment,ilfautattendrelesrésultatsdesexamens.

Ilsoupire.C’estbienlapremièrefoisquejevoisAdamaussiimpuissant.Jefermelesyeux.Etsijerestaisparalysée?

–Parcontre,jepeuxtedirequetuasunemineaffreuse!

Letonsoudainenjouéd’Adammefaitreleverlatêteverslui.Jesaluesatentativedemeremonterunpeulemoralavecunsouriretaquin.

–J’ail’aird’avoirunsacrépansement!–Etunebellebosse!Jevaistechercherunmiroir.

Jenesuispassûrequevoirmatêtemeréjouissetantqueça…Adamrevientdelasalledebains,quial’airaussiimmensequelachambre.J’aientraperçulabaignoire,elleestgigantesque!

–Tiens,regarde-toi.

Effectivement,unelargebandeentourematête.Quelqueségratignuressurlenez,desbleussurlespommettes,maisrienquinepuisselaisserdescicatrices.Jenesaispaspourquoi,jemesensunpeusoulagée que cette partie de mon corps soit presque indemne. Mes mains ne sont pas non plusabîmées,mesdoigtssonttoujoursmobiles.Jesuissoulagée,jepourraicontinueràjouerduviolon…Enrevanche,plusmoncorpsseréveilleetplusjelesensmeurtri,surtoutauniveaudescôtes.

Adams’assoitdenouveausurleborddemonlit.Sonregardesttendre,plusapaisé.Jecroisquenous sommes tous les deux contents de nous retrouver, après ce qu’il vient de se passer. SanFranciscon’apasconnudetremblementsdeterresérieuxdepuisdenombreusesannées.Maisonsaittousquec’estunepossibilité,quecelapouvaitarriver…Adamm’embrasse,metiredemespensées.Sonbaiserestdoux,chaud.Ilmeserreunpeuplusfortcontreluietjenepeuxm’empêcherd’émettreunpetitcri.Unedemescôtesn’appréciepascetélandetendresse.Nousnoussourions.

–Bon,jecroisquejevaistetraitercommeunepoupéedeporcelaine!–Ohoui!Mêmemoi,j’aipeurdebouger.–Tuasfaim,tuasbesoindequelquechose?–Non,çava.Tusaisoùsontmontéléphone,monsac,mesaffaires?

Jesoulèveledrapetaulieudel’habituelletenuedeshôpitaux,jemetrouveenchemisedenuit,unjolimodèlegrisensatintrèsdoux.

–Quandtuserasremise,tutrouverasd’autresdéshabillésplussexydansletiroir,là-bas.

Jerabatsledrapsurmoietjerougisdevantleclind’œild’Adam.J’aibeaucoupdemalàmefaireàl’idéequedanscetteclinique,onpuisseenvisagercegenredechoses…Maispourquoipas?

–Tontéléphoneestdanslesalon,jenevoulaispasqu’ilteréveille.Jecroisquetuaseuquelquesappels,jevaistelechercher.

Adam disparaît quelques instants. J’ai hâte de pouvoir visiter cette suite ! Une clinique quiressembleàunpetithôtelparticulier,c’estunconceptnouveaupourmoi.Oùsontlesmédicaments?Où est la petite sonnette pour appeler l’infirmière ?Mêmemaperfusion est discrètement installéedansuncompartimentderrièrelelit…

Jeprendsletéléphonequ’Adammetend.J’ai52appelsenabsenceetunetrentainedeSMS.ClaireetRyanpourlamajoritéd’entreeux,etd’autresprovenantdemesancienscamaradesdel’académie.Mesparentsontappeléaussi,plusieursfois…Ilfautquejelesrappellepourlesprévenir…Quejerassuretoutlemonde.Adamm’épie.

–Situveux,jepeuxdemanderàConradderassurertoutlemonde.Aumoinspourdirequetoutvabien.Tuappellerasplustard.

Adamaencoreunefoisludansmespensées.J’hésite.Jemesensfatiguée,jen’aipasencoreenviedediscuterdetoutça…J’aimeraistellementvoirlemédecin.

Maisqu’est-cequ’ilfait?!

–D’accord,surtoutmesparentsetRyan.Qu’illeurdisebienqueçava,pasunmotsurmesjambesparcontre.Jeleurdiraiplustard.Tum’asditqueClairevenait?

–Oui,elledevaitpasserchezvouspourvoirs’ilyavaitdesdégâtsavant.Tuvasbien?Jetesensfatiguéetoutàcoup…

–J’aimeraisfermerunpeulesyeuxoui…Turestesici?–Jenebougepas.Repose-toi.JevaisàcôtéprévenirConradetjereviens.

Adamm'embrasse sur le front etquitte la chambre. Je tentedem’installerplus confortablementdanslescoussins.Jefermelesyeuxetsombrerapidementdansunsommeillourd,sansrêves…

Jenesaispascombiendetempsj’aipudormirainsi.Jesuisréveilléeparlavoixd’Adametd’unautrehomme.J’ouvrepéniblementlesyeuxetjem’aperçoisquejesuisobservée.L’hommeporteuneblouseblanche,c’estsûrementleDrLaurens.Jemeréveilletoutàfait,etmeredressetantbienquemal.

Leverdict!Jevaisenfinsavoir!

2.Espoiretrévélations

–MademoiselleHaydensen!Jesuisravidevousvoiréveillée.Commentvoussentez-vous?

LeDrLaurensestunhommed'unequarantained'années,grand,plutôt athlétique. Il aun regarddouxetunaircompatissant.

–Bonjour,docteur.Unpeufatiguée…–C’estnormal,nousvousavonsdonnéquelquesmédicamentspourquevoscontusionsnevous

fassentpastropsouffrir.–Vousm’avezfaitsubirdesexamens?–Oui,eneffet.Vousêtesarrivéeavecunesévèreplaieàlatête.Maisheureusement,vousn’avez

qu’unelégèrecommotion.Vousnedevriezpasgarderdecicatrices,nousavonsfaitquelquespointsmaisdansvoscheveux,personnenelesverra.

–Et…mesjambes?–MademoiselleHaydensen,avantdeparlerdevos jambes,vousdevezsavoirquevousavezeu

beaucoupdechancehiersoir.

Pourquoiest-cequ’ilcontournemaquestion?C’estsigravequeça?

Mesmainssecrispentsurledrap…Delachance,çaveutdirequ’ilfautquejem’attendeaupire?Adammerejointets’assoitsurleborddulit.Jelesensanxieuxluiaussi,sonregardfixelemédecin.

– Vous avez effectivement perdu l’usage de vos jambes, mais nous pensons que ce n’est quetemporaire.Tousvosexamenssontbons,votremoelleépinièren’asubiaucunelésion.

–Ellepourraremarcher?

Adamaétéplusrapidequemoipourposerlaquestionquimebrûleleslèvres.

Temporaire,iladittemporaire.

–Biensûr.Lesnerfsontététroplongtempscompressésetaveclestressengendréparlasituation,lesjambesdeMlleHaydensensontfortementengourdies.Toutcecidevraitrentrerdansl’ordreavecuntraitementetdesexercicesappropriés.

–Quandpourrai-jeremarcher?–Oh,jenevousdispasquevousallezcourirlemarathondèsdemain,ilvousfaudrasansdoute

attendrequelques jours…Unkinévavousprendreenchargeetmettreenplacequelquesexercicesavecvous.

Ouf,jesuissoulagée!

– En revanche, je vous déconseille de vouloir aller trop vite ! Vous ne feriez qu’empirer leschoses. Prenez votremal en patience, procédez étape par étape et vous sortirez d’ici sur vos deuxjambes!

Delapatience…Est-cequej’ailechoix,detoutefaçon?

–Vousavezégalement subiunchocpsychologiquehier soir,mademoiselleHaydensen.Sivousressentezlebesoind’enparler,jevousconseillevivementdediscuteravecunedenospsychologues.Les victimes de telles catastrophes ont besoin d’évacuer un ressenti, des images. Cela pourracontribueraurétablissementdevosjambes.

Allervoirunpsy?Jevoudraisd’aborddormir…

–Bon,jevouslaissevousreposer.L’infirmièreestàvotredisposition,n’hésitezpasàm’appelersivousavezlamoindrequestion.Lekinéviendravousvoirdanslasoirée,pourunpremiersoin.Ilnefautpaslaisserletempsàvosjambesdeperdrel’habitudedebouger!

–Trèsbiendocteur.–Àbientôt,mademoiselleHaydensen.MonsieurRitcher.

Adam se lève et raccompagne le Dr Laurens. Je les entends chuchoter, mais impossible decomprendre ce qu’ils disent. Je suis soulagée, je respire enfin. Je n’ai rien de grave ! Je sauteraismême de joie si je le pouvais.Mais je ne le peux pas, et jeme sens tellement fatiguée… Je veuxdormirencoreunpeu…Jefermelesyeuxetn’attendspasqu’Adamrevienne,jelevoudraismaisjen'enaipaslaforce.Lesommeilm’emporteimmédiatement.

Mon ventre grogne. Je ne sais pas combien de temps j’ai dormi, mais la faimme réveille. Jepourraismangerunbœuf.J’ouvrelesyeuxetpersonnen’estdansmachambre.Bon.J’aiaussiuneenviepressante.J’aileréflexedemelevertouteseulemaislepoidsdemesjambesinterromptmonélan.

Ahoui,mesjambes…Mince,jefaiscomment?

Maisoùestleboutonpourappelerl’infirmière?Jeregardepartoutautourdemoi,rien.Bonsang,dansleursoucidediscrétion,ilsontvraimentbientoutcaché!Riensurlestablesdechevet,àpartletéléphone…Letéléphone…Jenesuisquandmêmepasdansunhôtel…J’aibesoind’uneinfirmière,pasduroomservice…JemerésousàappelerAdam.

Alorsçavaêtreça,macondition,cesprochainsjours?Attendredel’aidedesautres?

–Adam?

J’entendsdubruitdanslapièceàcôtéetAdamarrive,lamineinquiète:

–Tuesréveillée,monange!Tuasbesoindequelquechose?–Oui,tupeuxappelerl’infirmière?–Çanevapas?Tunetesenspasbien?

Jevaiséviterd’entrerdansledétail…

– Si, si tout va bien… j’ai juste besoin de l’infirmière… Je ne trouve pas le bouton pourl’appeler…

–Lebouton?C’estletéléphone.Attends,jevaislefaire.

Letéléphone…Sij’avaispousséplusloinlacuriosité…

L’infirmièrearriveinstantanément.Pasdedoute,jenesuispasdansunhôpitaltraditionnelAdamalaprésenced’espritdes’éclipser.Ouf,jen’auraipasdroitàunedélicateexposition…L’infirmièreestdouce dans ses gestes, elleme sourit etme demande si tout va bien. Je lui avouema faim et ellem’explique qu’il faut que je prenne lemenupuis que j’appelle le numéro inscrit sur la carte.Elleétouffeunpetitriredevantmamineétonnée.Cettecliniqueestpleinederessources!

Adamentredanslapièceunefoisl’infirmièresortie.

–Toutvabien,monange?Ah,tuaslacarte,tuasfaim?–Oui,oui,toutvabien.Ouij’aifaim…Ilparaîtquejepeuxchoisircequejeveuxmanger?Ilsne

serventpasdeplateaux-repasdanscetteclinique?–Ehnon,disonsquecelafaitpartiedessoins.Unbonrepast’aideraàallermieux.Dis-moiceque

tuveux.Aufait,Clairearrive.

Clairearrive!Jesuisravie!

–Jevaisprofiterdesaprésencepourretourneraubureau.Quelquespetiteschosesàrégler.–Tufaiscommentpourterendreenville?Lesroutesdoiventêtreendommagées.–L’hélicoptère.

L’hélicoptère,suis-jebête…

–Clairearriveenhélicoptèreaussi?–Biensûr,c’estplussimple.

Biensûr.

Adamprendletéléphone,l’appelestbref.Onlesenthabituéàcegenredeservices…Onfrappeàlaporte.Cen’estquandmêmepasdéjàlerepas!Adamrepart.Mêmesijedoisavouerqu'ilestbienagréabledevoirAdamsi tendrementprendre soindemoi, cette sensationdedépendancemepèse.J’espèrequetoutcecinedurerapastroplongtemps.J’entendslavoixdeClaire.Oh,commeçafaitdubien!

Ellese tientdevant laporte,meregardeuninstant.Je ladévisageaussi,rassuréedevoirqu’ellen’arien,ellenonplus.Etpuiselleseprécipitesurmoi,m’attrapedanssesbras.Mescôtesnesonttoujourspasd’accord,maisc’esttellementbon!Nouspleuronstouteslesdeux.Dejoie,sansdoute.Jemesouviensd’avoireupeurdelaperdre,hiersoir,danslavoiture.J’aieusipeurdenejamaislarevoir.

–Nemerefaisplusjamaisunepeurpareille!–Jen’aipasl’intentionderevivreçanonplus,tusais!–Commenttutesens?Adamm’aditpourtesjambes.–Cen’estpassigrave,ledocteuraditquec’étaitjusteunequestiondetempsetd’exercicesavec

lekiné.–Hum…

Claireetmoitournonslatêted’unmêmemouvementversAdam.

–Jepars.Appelle-moi si tuasbesoin. Je reviensvitede toute façon, le tempsde faireunaller-retour.

Adamm’embrasse sur le front. Je crois que c’est bien la première fois qu’il a un geste tendreenversmoienpublic.Jeleregardes’éloigner,jenepeuxpasm’empêcherd’angoisseràl’idéedelevoirpartir,retourneràSanFrancisco…

–Ne t'inquiète pas pour Adam, essaie deme rassurer Claire, le trajet en hélicoptère est hyperrapide.Tu te rends compte ! Il aura fallu un tremblement de terre pour que je fassemonbaptêmed’hélicoptère!

–Oui,pareilpourmoi.Saufquejen’enaiaucunsouvenir!

Claireposesesaffairessurlecanapéetregardeautourd’elle.

–Ehben!Jen’aijamaisvuunhôpitalpareil!Tuverraislejardin!Etlehall!Onsecroiraitdansunhôteldeluxependantunséminairedemédecins.

–Etencore,tun’aspastoutvu!J’aichoisimonrepascommeauresto,àlacarte!–C’estça,desortiravecunmilliardaire!

Aumêmemoment,onfrappeàlaporte.

–TupeuxouvrirClaire?Jenepeuxpasbougerdelà.–Àvotreservice,madame!

Clairemefaitlarévérence.Quec’estbondel’avoir…Unserveurvientm’apporterunimmenseplateau,qu’ilplace rapidement sur la tabletteàmescôtés. Ilne s’attardepas,neme regardepasets’éclipse dans un très discret «Bon appétit,madame. »Claire etmoi échangeons un regard aussisurpris.Jesoulèvelacloche,monassiettesentdivinementbon.

–Çanetegênepasquejemangedevanttoi?Jemeursdefaim!–Nonvas-y,jevaismeserviruncafé,ilyatoutcequ’ilfautàcôté.

Nousnousinstallonstouteslesdeuxconfortablement,Clairedansunfauteuiletmoidansmonlit.Jedévoremonrepassouslesyeuxattendrisdemonamie.

–Ehbien,quelappétit!–Jen’aipasmangédepuis…Jenesaisplus…Ils’estpassétellementdechosesenpeudetemps!

NewYork,l’incendie,leretour,tasoiréeetpuis…ça…Toutaétésivite!–Cen’estpasl’impressionquej’aieue!Depuistondéparthiersoir,j'aitrouvéletempslongau

contraire!

Jerepousselatabletteloindemoi,Clairem’aideetlafaitroulerverslaporte.

–Tutesouviensdetonaccident?–Àpeuprès…Laterreatremblé,mavoitureaglissé,jemesuiscognée…Lesgenscriaient…

Les lames me montent aux yeux au fil des souvenirs qui me reviennent. Claire doit sentir madétresse.

–OK,OK.L’essentiel,c’estquetusoislà.Maisquellefrayeur!Tuauraisvul’étatd’Adam!Déjàqu’il n’apas apprécié le showdePaul avec toi,mais alors, lapremière secousse amis le feuauxpoudres.Tupeuxêtrerassurée,Adamtientàtoi,pasdedoutelà-dessus.

–Qu’est-cequ’ilafait?–Onnes’estquasimentpasquittés.Ilétaithypertendu,maisilaréussiàgardersonsang-froid.Il

aappelétoutlemonde,iladûremuercieletterrepourteretrouver!Maisquellefrayeur!

Jebaisselesyeuxsurmesjambes.Quellefrayeur,oui…Cesbruits,cescris,cetteterrequiauraitpum’avaler,ces immeublesquiauraientpus’écrouler surmoi…Maisbonsang,oùestmabonneétoile?Leslettresdemenaces,l’agression,l’incendie,cetremblementdeterre,mesjambes…EtcePaul…Est-cequejenepourraispasavoirunpeuderépit?Moncœurs’accélère,jesensl’angoissemonter. Je me sens si lasse, si injustement malmenée ces derniers temps. Pourquoi ? Les larmescoulent à nouveau, j’éclate en sanglots. Je suffoquepresque,Claire seprécipite àmonchevet, unemachinederrièremoisemetàbiper…Uneinfirmièrearrive,medemandederespirer,dereprendremonsouffle…Jemesenssifatiguée…

Leregarddel’infirmièreestinquietetellesetourneversClaire.

–MademoiselleHaydensenabesoinderepos.–Biensûr.Jevaistelaisser,Éléa.Repose-toi,d’accord?Toutvabienmaintenant,tuesentrede

bonnesmains, retape toi ! Jevaisdonnerdesnouvellesà tesparentsetRyan,ne t’inquiètede rien.Penseàteremettred’aplomb!D’accord?!

Elleaussim’embrassesurlefront.Décidément,j’aidroitàlamêmemarqued’affectiondelapartdetoutlemonde!Jeveuxqu’ellereste,maisjenemesenspaslaforcedelaretenir.J'aitellementbesoindedormir…

J’ailongtempsdormi,encore.Quandj’ouvrelesyeux,l’horlogeàmescôtésindique9heuresdumatin.Jen’airienentendudepuisledépartdeClaire,j’ailargementfaitletourducadran.Etlekiné?Dansma chambre, pas un bruit. Est-ce que je suis seule ? Est-ce qu’Adam est revenu ? J’appellel’infirmière,pourqu’ellem’aide.Maispourquoin’ai-jepasdefauteuilprèsdemonlit?Surmatabledenuit,j’aiunelettre,jel’ouvre:

«Je suis reparti àmonbureaucematin, jen’ai pasosé te réveiller.Onm’aparléde l’incidentd’hier.Repose-toi!J’aidemandéàtesparentsdenepasvenirtoutdesuitepourtelaisserdutemps.Jetelaisseauxsoinsdel’infirmière.Unkinédoitpasseraprèstonréveilpourcommencertessoins.Appelle-moisituasbesoin,jeseraideretourpourmidi.

Jet’embrasse,

Adam

PS:Tonviolonestdanslesalon,tupeuxjouerautantquetuveuxici.»

Doncjesuisseule.Etj’aimonviolon!Ilmefautunfauteuilpoursortirdecelit!

L’infirmière arrive, justement.Elle est toujours aussi bienveillante avecmoi.C’est réconfortant.Ellem’apprendquelekinéarriveraplustard,avecunfauteuil,pourm’apprendreàmesortirdulit.Jerêvedecedébutd’autonomie!Aprèsunrapidemaiscopieuxpetitdéjeuner,lekinéfrappeàlaporte.C’estunefemme,plutôtjeune,blondeavecunequeue-de-cheval,trèsathlétique.Ellesemontretoutdesuitetrèsimpliquéeetsonattitudeenjouéearriveunpeuàmedétendre.

Sielledoitmesoulever,ilfautqu’elleaitdesmuscles!

Elle commence par me plier les jambes, puis me les masse. Adam est plus doux dans sesmassages!Cen’estpasdouloureux,maiscen’estpasagréablenonplus.Jen’aimepasmapassivité,j’ai l’impressionque jenepeux rien faire. J’écoutecependant,bonneélève, tous lesconseilsde lakiné.Lapiscinem’attend,lesmassages,puislesbarresetencorelesmassages.Elleneveutpasmemettresurmesdeuxpiedstoutdesuite.

Maisceseraitpeut-êtrelasolution,non?

Grâceàelle,j’aitoutdemêmegagnéenautonomie.Jepeuxsortirdemonlit,m’«extirper»estlemotleplusjuste,etm’asseoirdanslefauteuil.L’effortestdifficile,etjehaisencoreplusmeskilosentrop dans ces moments-là. Mais je peux bouger, visiter la chambre, changer d’air. Adam aeffectivementdéposémonviolonsurlatablebasse.Jel’attrape,regardeautourdemoi,etdécidequelameilleureplacepourjouerestdevantlabaievitrée.Lavuesurleparcàl’extérieurestpaisibleetbelle.J’aiunpeudemalàmeredresserettenirlapositionavecmonviolon.Maisjemefaisunpeuviolence,justepoursortirquelquesnotes.C’esttellementbon…

Mon regard s’attarde sur le parc. Deux hommes attirent mon attention. Je reconnaisimmédiatementlasilhouetted’Adam.Mesmainssecrispentsurlesaccoudoirsdemonfauteuil.Ohnon,pasencore!C’estPaul…Encorelui!Leurdiscussionsemblehouleuse…

QuefaitPaulici?Ilnepeutdoncpasmelaissertranquille?

SoudainAdampoussePauletcelui-ci tombebrutalementsurlesol.L’affrontrisqued’êtreduràdigérer… Je suis impuissante, derrière la fenêtre, dans mon fauteuil… Je voudrais leur crierd’arrêter. Que tout cela cesse… Paul se relève et pointe le doigt vers Adam dans un geste trèsmenaçant. Il jetteunœilvers laclinique, jenepeuxpasm’empêcherdereculer,par réflexe.Adamremontel’allée,Pauls’envadesoncôté.Jerespire…

J’entendsAdampousserlaporte.Ilm’aperçoitdevantlafenêtreetcomprendquej’aitoutvu.Maisilneditrien,ilsembleaucontraireêtreencolèrecontremoiaussi.

Maisqu'est-cequej'aifait?!

–Éléa!Tuessortiedetonlit!Tudoistereposer!Lemédecint’ademandédenepasbrûlerles

étapes!

Jen’aimepasceton!

–C’est la kinéquim’a conseillé au contraire de sortir du lit !Arrête devouloir tout contrôlercommeça!Jedoisaussitedemanderl’autorisationdepouvoirallerauxtoilettes?DéjàqueTUasdécidédenefairevenirpersonneici,jepeuxquandmêmesortirdemonlitsij’enaienvie!

Adamaunmouvementderecul,surprissansdoutedemonagacement.

Est-cequ’ilsemetseulementdeuxminutesàmaplace,luiquialedroitd’alleretvenircommeilleveut?

Sestraitss’adoucissent,ils’approcheetmetlegenouàterre,devantmoi…Dansunautrecontexte,j’auraispucroireàunedéclaration!

– Excuse-moi, Éléa, j’ai tellement besoin dem’occuper de toi, de savoir que tu vas bien…Tusais…Mamèreestmortedansunaccidentdevoiture…J’aivraimenteupeurdeteperdreaussi,delamêmefaçon…

–Oh!Jenesavaispas…

Samèreestmorte?Dansunaccidentdevoiture?C'estsansdoutelaraisonpourlaquelle ilmecouveautant…Toutceciadûluirappelerdetrèsmauvaissouvenirs…MonpauvreAdam!

Jebrûled'envied'ensavoirplussursamère,surcetaccident,maisquelquechosemeretient.Ilal'air plongédans ses souvenirs, il s'est crispé en évoquant samère…Cen'est peut-être pas le bonmoment,aveccequ'ilvientdesepasseravecPaul…

Ilmecaresselajoue,m’embrasse.Sonvisageestfraisetsonparfumchassemarécenteangoisse.Je le retrouve encore une fois désarmé, le visage si triste… Il colle son front contre lemien,mecaresselevisage.Jesensqu’ilabesoindecepetitmomentdecalmepours’apaiserluiaussi.

–Tuvasbien,monange?

Savoixestdouce,chaude.Ilm’attrapelementon,approchemonvisagedusienetposeseslèvressur les miennes, doucement puis avec plus d’ardeur. Mon corps n’attendait que ça, et en laissantpassersalangueentremeslèvres,jetendstoutmoncorpsverslui…Samainglissesurmonépaule,descenddoucementsurmescôtesets’arrêtesurmataille.J’aienviedemepressercontre luietdesentir son corps tout entier contre le mien. Mais mes jambes, ce fauteuil, cette position assiseimposée,mefrustrent.

–Nousseronsmieuxsurtonlit…

Adampoussemonfauteuiletm’aideàm’installer,ledoscallédanslescoussins.Ils’allongeàmescôtés,maisjenesaispasvraimentcommentmemettre.Mescôtesdouloureusesserappellentàmoiàchaquemouvement.Adamseredresse,setourneversmoietposelatêtesursamain,luiaussicalédanslescoussins.Ilestlà,contremoi,jesenssachaleur,etsesyeuxsiintensesmefontchavirer.Il

passesamainsousmonchemisier,sesdoigtsviennenteffleurermoncorpsmeurtri.Maisjen’aiplusmal : Adam m’embrasse avec fougue et c’est le désir qui vient éveiller mon corps. Ses mainsatteignentmesseins,toujoursendouceur.Jefondslittéralementsouscettetendresse,enveloppéedesonregardbrûlant.Adamn’estpasmédecin,mais ila trouvé lameilleurefaçondemesoigner,auplusprofonddemonêtre.Sabouchedescenddansmoncoumaisilnevapasplusloin…Ilposesamain sur mon ventre, et sa tête vient se nicher contre moi. La fatigue et un profond bien-êtrem’emportentencoreunefoisetjem'endors,danslesbrasdemonamant.

3.SurpriseàAspen

Bon,jepassemontempsàdormirici…Ilfautquej’enparleaumédecin,cen’estpaspossible!J’aijustel’impressiond’êtreunelarvedansunlit.Ilseraitpeut-êtretempsquejemesecoue.Unefoisdeplus,Adams’estéclipsésansque jene l’entende.Cette fois, jedécidedesortirdemon litmoi-mêmeetdem’occupertouteseuledececorpsunpeulourd…

JeprometsdeneplusmangerautantdemacaronsdeChezFrançois!

Mon fauteuil est désormais mon fidèle compagnon et il ne me fait pas défaut quand j’atterrisdedansunpeubrusquement.Jen’aipasencorelabonneméthodepourbougeravecgrâce,avecdeuxpoidsàlaplacedesjambes…Jemedirigeverslesalon,maisdesvoixm’arrêtent.Jereconnaiscelled’Adam,maisl’autre,celled’unefemme,m’estinconnue.

–Tunepeuxpaspassertontempsdanscettecliniqueaveccettefille,Adam!Tuasunesociétéàfairetourner,desinvestisseursàrassurer.Pluspersonnenesaitoùtues,nicequetufais!Cen’estpasdutoutsérieuxpourlesaffaires!

–Tusaistrèsbienpourquoijem’inquiètepourÉléa.Etjesuistoujourslà,présent,quoiquetuenpenses!

–Maiscen’estpassuffisantAdam,tuasannulétoustesrendez-vous!Montéléphonen’arrêtepasdesonner!Laissecettefille,tuasdéjàfaitbeaucouppourelle!

Je comprends qui est cette femme, je n’ai pas besoin de la voir pour la reconnaître.Cette voixsèche,froide,colleparfaitementàcequej’aipuvoirdeLorraineHill,latanted’Adam,lamèredePaul…

–Maisàquoias-tupenséquandtul’asamenéeici,Adam?Lapresseestdéjàdanslehall,j’aivudesjournalistes,ilyadesvoituresdephotographesdehors.FaisbienattentionAdam,jenetoléreraipasqu’ontevoieavecelle,c’esthorsdequestion!

–Maisoùestlemal?Quandcesseras-tudevouloirtoutcontrôlerdansmavie?!–Quandtuferaslesbonschoix,cequin’estpasencorelecas!–Jefaislesbonschoixpourmoi!Jesuisdésoléqu’ilsneteconviennentpas!–Jenesaispascequecette filleapu temettredans la têteAdam,maisméfie-toi !Elleenveut

surtoutàtonargent.–Éléan’estpascommeça!–TuasuneréputationàpréserverAdam!Situcontinuessurcechemin,Paulprendrataplace!–Paul?Tusaistrèsbienqu’ilenestincapable.–S’illefaut,jeleferaiAdam,nel’oubliepas.Jenelaisseraipascettefilletoutdétruire!Réfléchis

bien.

La porte claque, le bruit sourd résonne dans le silence.Quelle famille !AvecPaul etLorraine,Adamestmalentouré…

Ilaprismadéfense…Illuiatenutête…Maiscettefemmeal’airdur,méprisant…Jen’aimeraispasêtreseuleentêteàtêteavecelle…Ah,maissielleessayaitdemeconnaître,ellesauraitàquelpointjem'enfichedel’argent!

Jepousselaporte,Adamsetientdeboutaumilieudelapièce,visiblementtrèsénervé.

–Paulcematin,Lorrainecesoir…Tafamillet’enveut…àcausedemoi…

Adamseretourneetfaitquelquespasversmoi.Sonvisageestcrispé,samâchoireserrée.Adamirradiedecolère.Ilabeautenterdelacontenir,jesensqu'ilbouillonnedel'intérieur.

Maispourquoileurrelationest-ellesitendue?

–Noust’avonsréveillée,monange?Jesuisdésoléquetuaiesassistéàça…Mafamilleesttrès…compliquée…Maisnet'inquiètepas.

–Tudisçaparcequetuneconnaispasmesparents!Dansleurgenre…–Jesuispersuadéqueçan’arienàvoir.Viens,tuasunrepasquit’attend.

Jebougemonfauteuilverslatabledusalon.Adamadûchoisirpourmoi.Heureusementqu’ilabongoût.Parcontre,jeneluiaipasfaitpartdemonbesoinderégime.CettetarteTatinavecsapetitecrèmerisquentdem’alourdirencoreunpeuplus…

Adamest soucieux, il reste silencieux,derrière sonécran. Ildevrait être à sonbureau,pasavecmoi…

–Tusais,situdoisalleràtonbureau,netegênepaspourmoi…–Horsdequestion,jeresteicipourm’occuperdetoi.–Maistunepeuxrienfairedeplusqu’attendre.–Ehbienj’attendsici,netesouciepasdecequematanteapudire.

Danslegenrebuté,luiaussi…

Lakinéfrappeà laporte.C’est l’heuredemaséanceavecelle,cette foisà lapiscine.Le travaildans l’eaume fait du bien, je n’ai pas cette sensation de lourdeur. Je croise leDrLaurens àmonretour,ilsemblevisiblementsatisfaitdecequeluirapportelakinésurmesrésultats.Peut-êtrequejepeuxespérerremarcherplusrapidement?

Adamn’apasbougé.Maissamineestplusdétendue.

–Ças’estbienpassé?–Oui,j’adorelapiscine!–Çatombeplutôtbien,onpartpourAspen!–Pardon?–Oui, j’ai enviededistanceavecSanFrancisco. Jeconnaisuncentrede thalassooù tupourras

continuertessoins.–MaisleColorado,c’estloin!–Tuvasadorer!Etnousneseronsquetouslesdeux!

Cechangementdeprogrammeestunpeudéstabilisant,maispasserdutempsavecAdamentêteàtêtenemefaitpasdouter.Notredernièreescapadeàdeuxétaitplutôtréussie…

–Tuveuxpartirquand?–Cesoir.–Ilfautquej’enparleauDrLaurens…–Ilestprévenu.C’estmêmeluiquim’aencouragéàt’emmenerlà-bas.Ilconnaîtlecentreetsait

queceseraparfaitpourtarééducation.

Adamaencoreunefoistoutprévu.Iln’yauraplusdePaul,nideLorraine,nidetremblementdeterrelà-bas.JusteAdametmoi.Despetitesvacancesloindetout.

Hélicoptère,jetprivé,levoyageestrapide.Jesuistraitéecommeunepoupéedeporcelaine,toutlemondeestauxpetitssoinspourmoi,Adamlepremier.Jeleretrouvejoyeux,excitéparcevoyage,commeunenfant.Adammeparledesonamourpourlamontagne,leski,laneige.Jeluiavouequeles sports de glisse et moi, ce n’est pas l’amour fou.Mais de toute façon, en fauteuil et en cettepériodedel’année…

C’estdenuitquenousarrivonsauSt.RegisResortHotel, l’undeshôtels lesplus luxueuxde larégion. On nous conduit directement à notre suite, mais dans mon fauteuil, j’ai tout le tempsd’admirer les immenses boiseries, les miroirs gigantesques, les lustres de cristal. Si je pouvaisprendretoutçaenphotoetlemontreràClaire!

Notresuite,laResidenceClub,disposed’unpetitsaloncosy,habillédefauteuilsencuir,depetitestables en bois et d’un immense canapé.L’hôtel a été prévenu demon fauteuil, lesmeubles ont étépousséspourmepermettredemeplacerconfortablementdevantlacheminéeenpierre.Lachambreesttoutaussimagique,avecuneautrecheminéedansuncoin.Dormirdanscegrandlit,nue,colléeàAdam, devant un feu de cheminée… J’en soupire d’avance. Mais mes fantasmes sont rapidementrattrapésparlaréalité.Toutuncôtédulitestéquipéd’unebarredemaintien,pourm’aiderdansmesmouvements.Tantpis,jepeuxaussimecontenterdedormiràsescôtés…D’ailleurs,levoyagem’aépuisée.Adamestlepremieràleremarqueretm’aideàmeglissersouslesdraps.Lelitestmeilleurqu’àlaclinique,mêmesijenepensaispascelapossible!Jem’endorslesourireauxlèvres,heureusedecettepetiteparenthèse.

Leprogrammede lamatinéeestchargépourmoi.Jecroisfinalementqueceséjourneserapasidyllique.Adamm’aconfiéauxmainsd’unnouveaukiné,quiaprisletempsd’étudiermondossiermédical.Iln'estpasdutoutpareilàlakinédelaclinique.Lacinquantaine,grisonnant,ilnem'apaslâché un seul sourire depuis mon arrivée. Je sens que je vais regretter la bonne humeur de maprécédentekiné!Ilal'airtoutdemêmetrèsprofessionnelets’investit.Ilprendmarééducationtrèsausérieux.Tantmieux,celairapeut-êtreplusvite?

Mevoilàdoncdanslapiscine,chaude,privée,encompagniedeceluiquidevraitmepermettrederécupérerl’usagedemesjambes.Adamn’apassouhaitévenir.Jelesenscontrarié,mêmes’iln’enlaisserienparaître.Lekinén’estpastendre,maislecadreestmagnifique.

Après la piscine avec vue sur les montagnes boisées, le salon de massage respire la sérénité.

Musiquezen,odeurdouce, j’aimêmedroitàuncocktaildefruits frais.J'ai l'impressiond'êtreuneprincesse!Bon,certes,uneprincesseenfauteuil,maisuneprincessequandmême.Toutestprivatisé,je ne croise personne, cette solitude commence àme peser. Le kiné n’est pas bavard. Son travailn’inclutpasladiscussion,apparemment…Jelequittepourledéjeuner.Ilmedemandedemereposer.Ce soir, il aimerait essayer lesbarres latérales.Nonpaspourunexercicedegym,maispourvoircommentmesjambesrépondent.J’aihâte!

Adamm’attendà la terrassedurestaurant.Lecalmedeslieux, lesoleil, lebruitduventdanslesarbres,l’airpur,jesensquetoutmefaitdubien,nonseulementpourmoncorpsmeurtrimaisaussipour mes nerfs trop sollicités ces derniers temps. Adam se penche vers moi et m’embrasse. Cefauteuilnousfrustretouslesdeux,mêmesilanuitpasséeavecluiaététendre.Ilestsiattentionné,siattentif àmes désirs. Je repense à samère, à ce qu’ilm’a dit hier. Je ne sais pas à quel âge il l’aperdue,maisçan’apasdûêtresimpleàvivre…

–Alors,cessoins?Commentçasepasse,monange?–Bien!Cesoir,lekinéveutessayerdememettredebout.–Cen’estpasunpeutroptôt?–Ildoitsentirquec’estpossible…Jenevaispasresteréternellementdanscefauteuil!

Adamsoupire.

–Jesais…etaprès,tun’aurasplusbesoindemoi…–Tusaisquejen’aimepascettesituation,j’ail’impressiond’êtreunpoidspourtoi.Jedépendsde

toutlemondepourtout.–Tun’espasunpoids.Etj’aimem’occuperdetoi.–J’aimeaussiquetut’occupesdemoi,maisjepréfèrequandlefauteuiln’estpaslà.

Leregardd’Adams’allume.

–C’estvrai,vusouscetangle,j’aihâteaussiqu’ilnesoitplusunobstacleentrenous!Maisquandmême,nevapastropvitedanstarééducation.Jeseraipatient.

Adammecaresselamain.

Etmoi, jesuisdemoinsenmoinspatiente.Onestseulsaumondeicietonnepeutmêmepasenprofiter!

–J’aiunemauvaisenouvelleparcontre,jevaisdevoirrentrer.

Ohnon!

–Quand?–Cetaprès-midi.JeveuxvoirConradetsavoircequ’ilsetrameavecmatante.–Oh!…–Maistupeuxrester!Tuserasbienicipourteremettresurpied.–Oui,maisseule…–JesaisÉléa,jesuisdésolé,maisjenesaispascequipeutsepasserdanslatêtedematanteence

moment.Jepréféreraismillefoisresterici…–Jecomprends…

Je comprends, oui, mais Adam me laisse ici toute seule, loin de tout, de tout le monde. Superperspective…

Adampasseledébutdel’après-midiavecmoi,allongéàmescôtésdanslelit.Jevaism’yperdretouteseulededans!Saproximité,lachaleurdesoncorps,sesmainssidoucessurlemien,sesbaiserstendres…Jemesouviensdenosétreintesplusanimées, j’aimeraisquesamainseglissesousmesdessous…Ledésirs’éveilleaufonddemoi.Ah,siseulement!

Je n’ai pas du tout envie de dormir après son départ.Mes sens sont en éveil, une chaleur s'estalluméedanslebasdemonventre.Jeconnaiscettesensationmaintenant.Cesontlesprémicesd'unembrasement…MaisAdamestparti…Quellefrustration!Jedoispenseràautrechose…

Tiens, Claire ! Jeme demande ce qu’elle est en train de faire… J'attrapemon téléphone et luienvoieunpremierSMS.

[Salut,tufaisquoi?][Hey!Jetriedespapiers.C’estunpeulesoukaubureau.Ettoi?Aspen?][Touteseule!Adamestparti:/][Ettesjambes?][J’essaiedemarchercesoir.][Cool.Profites-enpourapprendreàcourir:p][Pfff.Méfie-toi,jepeuxdemanderlesjambesdeSuperJaimie!][AHAH.Jetelaisse,monchefm’appelle.@+]

SiseulementRyanetClairepouvaientêtrelà…Onpasseraitdebonnessoirées!

Mavie est pleinede« si seulement».On frappe à la porte.Uncoursierme livredes fleurs. JedoutequecesoitAdam,parti ilyaseulementquelquesheures.Cebouquetnem’enflammepas,nesuscite aucune émotion. Comme si d’instinct je savais qu’il n’allait pas me plaire. Il y a un mot,évidemment.

Jepeuxpeut-êtrel’ignorer?Demanderàcequ’onmel’enlève?Quipeutm’envoyerdesfleurs?QuisaitquejesuisàAspen?

J’ouvrel’enveloppe,onnesaitjamais…

«ChèreÉléa,j’espèredetoutcœurquevotrerééducationàAspensepassebien.J’aihâtedevousretrouverauxrépétitions.Prenezsoindevous,Paul.»

J’aicruuninstantqueM.Glenm’envoyaitdesfleurs.Maislesquatredernièreslettresnefontpasillusion. Paul est toujours là. Il sait encore une fois où je suis. Mais pourquoi est-ce que je lecroiseraisauxrépétitions?Quelquechosem’échappe.Jefroisselepapieretlejettedanslacorbeille.

Non,pasdequestions,jeneveuxpaspenseràPaul.Jenesuispaslàpourm’angoisser,jesuislà

pourretrouvermesjambes!

La séance avec le kiné ne se passe pas aussi bien que prévu. Le « lève-toi etmarche » n’a pasfonctionnécommejel’auraissouhaité.Simatêteestprêteàmarcher,moncorpsabesoindeplusdetemps. Pourme remettre de ce qui est àmes yeux un échec, une étape pourmon kiné, ce dernierm’emmèneauspadel’hôtel.Jeprofitedecemomentcalmeetreposant.Jemedétendsausond’unemusiquezen…Etjemeprometsquelaprochainefois,mesjambesmeporteront!

Jemesensbienquandjeremontedansmachambre,maisl’idéedepasserlasoiréeseulememineaufuretàmesurequejem’approchedemaporte.Maisilyadubruitdansmachambre.Desvoixquichuchotent… Je fais doucement rouler mon fauteuil, je crains une mauvaise surprise. Mais jereconnaisledosdemonpèreetlavoixdemamère.

–Papa,maman,qu’est-cequevousfaiteslà?!–Machérie!

Mamèreseprécipitesurmoi,meregarded’unairdésolédansmonfauteuil,essuieunelarmeetmepresselesmains.Untourbillon.Puisellem’attrapedanssesbrasetmeserrecontreelle.

–Machérie,quelmalheur!

Mon père, toujours réservé, vient m’embrasser sur la joue. Son sourire est bienveillant, il estcontentdemevoir,moiaussi.

–Bonsoir,mapuce.–Maisqu’est-cequevousfaiteslà?

Mamèreprendlaparole,commed’habitude.

–Adam,ton…ami,nousagentimentinvitésàvenirici.Tuauraispunousappeler,quandmême.HeureusementqueClairenousadonnédetesnouvelles!

C’estpartipourlesreproches.

–Moiaussijesuiscontentedetevoirmaman…Vousnevoulezpasvousasseoir?–Tunenousavaismêmepasditquetuavaisrencontréquelqu’un…Imaginel’airbêtequej’aieu

quandcetAdamnousaappelés.–Ils’estpassétellementdechosesensipeudetemps,maman…–DoncAdamRitcherettoi…?Maiscommentest-cepossible?Jeveuxdire,vousn’êtespasdu

toutpareils,ilestsibeau,siriche…–Etmoi,jesuispauvre,mocheetgrosse?–Non,cen’estpascequejeveuxdire,maisvousn’êtespastrèsassortis…

Jeregrettemasolitude…Matrèschèremère…

–Maggie,cen’estpasleplusimportant.Commenttuvas,Éléa?

Mercipapa!

–Çavamieux.Cen’estqu’unequestionde tempspourmes jambes.Est-cequevoussavezpourNewYork?J’aiétéprisedansl’Orchestrephilharmonique…

–Oui,oui…C’estbien.Tuterendscompte?Adamnousafaitvenirdansundesesjets.Onaététraitéscommedesrois.Sijem’attendaisàçavenantdetoi…

Jeglisseunregardversmonpère.Ilhausselesépaules, impuissantdevantlavervedemamère.Rienn’achangédeleurcôté.Mamèreesttoujoursaussipeuintéresséeparmacarrière.Iln’yaquemarelationavecAdamquil’intéresse.JenesavaispasquesonnométaitaussiconnuaufinfondduCanada.

–Vousrestezcombiendetempsici?–Paslongtemps,nousavonslaissélemagasinànotreemployé,maisjenesuispastrèsconfiant.

Nousvoulionssurtoutnousassurerquetuallaisbien.

Lesjetsetleconfortluxueuxnefontpasrêvermonpère.Sasimplicitéestrevigorante.Ildoitêtremalàl’aisedanscetenvironnement.

Leséjourdemesparentsesteneffettrèscourt.Entremesséancesquicommencentàporterleursfruitsetleurenviedevisiterlastation,lesdeuxjoursquenouspassonsensemblefilentrapidement.Jen’aiaucunregretdelesvoirpartir,mamèrenemelaissantaucunrépitquantàmaligne,mesrepas,etmedemandantsanscessecommentAdamRitcherpeuts’intéresseràmoi…Mamèreestcharmante,jenepeuxpaslachanger.Jenedoutepasdesonaffectionpourmoi,maiselleaunedrôledefaçondeme montrer son amour. Mon père, en revanche, m’a glissé être fier de moi. Je leur ai joué unmorceau,ilenaeuleslarmesauxyeux.

–RentrezbienàKelowna!–Tu remercierasbienAdamdenotrepart.Etvenezà lamaisonà l’occasion.Etdépêche-toide

sortirdecefauteuil!

Cequisignifie,pourmaman:«Rétablis-toivite,mapuce.»

Jepréfèreleprendrecommeça.Jesuisémuedelesvoirpartir,c’estvraiquejenelesvoisplustrèssouvent.

–Appelle-nousquandtuseraschezAdam!–ChezAdam?–Oui,chezAdam,enfin,demain,turentreschezlui,c'estcequ'ilnousadit.Tuesaucourant,bien

sûr?–Oui,oui,biensûr,çam’étaitsortidelatête.

Jenesuisabsolumentpasaucourantnon!

Letaxiemportemesparents.Jeleurcachemonagacementavecbrio,maisunefoisarrivéedansmachambre,j’explose.

Jenerentrepaschezmoi?!Etpourquoiest-cequ’Adamnem’ariendit?Ils’estencorepermisdedéciderpourmoi !Et si jen’enavaispas envie?Êtreavec lui est unbonheur,mais je veuxaussirentrerchezmoi,retrouverClaire,maviequoi!

Jefulmine,maisilesttrèsdifficiledefairelescentpasenfauteuil.J’appellelekinéetluidemandedefaireunenouvelleséancedanslapiscine.Cetravailphysiquedevraitm’aideràévacuermacolère.Le kiné est d’ailleurs surpris, ilm’a rarement vue aussi déterminée. J’insiste pour continuer, pourallerplusloin.

Jeneveuxplusdecefauteuil!Jeveuxmedébrouillertouteseuleetretrouvermonautonomie.

J’insistepourtravailleraveclesbarreslatérales.Lekinémesuit,iln’apaslechoix.Jelefaissansluis’ilnem’accompagnepas,ilestprévenu!Jemelèvedufauteuil,etplacelesbarressousmesbras.Jememetsdeboutetposetoutlepoidsdemoncorpssurl’appareil.Puis,jelerelâchepetitàpetitsurmesjambes.Jemeconcentrepourfaireunpas.Monpiedselève,jesensunepetitedéchargedansmajambe.Unpas,jefaisunpas!Jesue,j’aichaud,l’effortestgrand,maisj’aifaitunpas!Jeregardelekiné,victorieuse.Ilm’encouraged’unsignedelatête:

–Onessaieledeuxième,maisnelâchezpaslesbarres!

Monpieddroit se lèveet fait à son tourunpas. Jenemarchepasencore,maismes jambesontdécidédes’yremettre!

4.Danssonunivers

MesprogrèsàAspennevontpasplusloin.Lekinéestplutôtsatisfait,maisjesuisunpeudéçue.J’airêvédequitterAspenavecunecanneplutôtqu’unfauteuil…Tantpis!C’estencoreunefoislemoment de partir. Je sais que je rentre à San Francisco, je n’ai pas d’appréhension à l’idée deretrouverlaville.Aucontraire, j’aivraimenthâtederevoirAdam.Jenesuisplusencolèrecontrelui.Jesuismêmeimpatientededécouvrirsamaison,làoùilvit.Ilm’invitedanssonintimité,danssonmonde,c’estungrandpas!MêmeClairen’enrevenaitpasquandjeluiaiappris.Elleestdéçued’ailleurs,ellem’attenddepiedfermeàlamaison.Adamaencoreétéintraitable:lessoinsseferontchezlui.

J’espèreaumoinsquejenevivraipasenfermée!

L’undeschauffeursd’Adammerécupèreàl’aéroport.Ilmesoutientpourpasserdufauteuilàlabanquettearrière.Est-cequ’ilaétéformépourplierunfauteuil,d’ailleurs?Jenesaispasmais,entout cas, il ne tarde pas à retrouver sa place derrière le volant. Je le félicite intérieurement. Lechauffeurd’Aspenaeuunpeuplusdemal…

Derrièrelavitre,j’observelesruesdeSanFrancisco.Letremblementdeterreaeulieuilyaunesemaineetilenresteencoredestraces.Certainsbâtimentssontfissurés,touteslesvitrinesnesontpasréparées,maiscetristeépisodesembleêtremalgrétoutdel’histoireancienne.Tantmieux,j’aihâtemoiaussidesortirànouveautranquillementetderetrouverunevienormale.

Enfin,jenesaispassijepeuxespéreravoirunevie«normale»encompagnied’Adam…

Jemedemandebienàquoipeutressemblersamaison…OnquitteSanFrancisco,ondépasse leGoldenGateBridgeetons’élèvesurleshauteurs.Entrelesarbres,onpeutapercevoirlabaiedeSanFrancisco.

Adamvitvraimentici?Jel’auraisplusimaginéencentre-ville.Jecomprendspourquoiilmedisaitl’autrefoisquesasuiteàl’hôtelMandarinétaitunpeucommechezlui…Ilnedoitpasrentrertouslessoirsici,c'esttellementexcentré!

Lechauffeurs’arrêtedevantuneimmensemaisond'architecte,magnifique.Leblancimmaculédesa façade se détache sur le bleu profond du ciel. Mais l'essentiel de cette maison se compose defenêtres etdebaiesvitrées encadréespardegrandsmontantsnoirs,harmonieusement intégrésauxlignescarréesdecettedemeure.Commesichaquefenêtreétaituncadre,avecvuesurl'extérieur,oul'intérieur. Sur lesmarches d'un perron délimité par deux piliers blancs,Adam a fait installer unepentepourlefauteuil.

Délicateattention.

Le chauffeurme pousse etme laisse auxmains d’un homme. Unmajordome ? Il me regarde,

souriant.Jenesaispass’ilsaitquijesuis…

–Bonjour.JesuisÉléa…– Bonjour, mademoiselle Haydensen, nous vous attendions. M. Ritcher est en communication

actuellement,puis-jevousconduiresurlaterrasseprendreunrafraîchissement?–Oui,biensûr…–Suivez-moi.Aufait,jem'appelleJohn,n'hésitezpasàvousadresseràmoisivousavezbesoinde

quoiquecesoit.

JeremercieJohnetlelaisseprendrelecontrôledemonfauteuil.Jedétaillelemoindrerecoindelamaison. L’entrée est immense, très lumineuse.Une grande baie vitrée inonde la pièce de soleil.L’escalier, blanc, donne l’impression de léviter au-dessus du sol tant son design est aérien. Ladécorationestsommairemaissoignée:làuntableausigné,iciunvasedefleursouunemagnifiquepiècedeporcelaine.Lesalonestluiaussitrèsgrand,maisilauncôtéchaleureuxmalgrélahauteurduplafond.Deuxgrandscanapésencuirblancsefontface,leparquetestdeboisclair.Cettemaisonest un puits de lumière, très ouverte sur l’extérieur. John m’arrête sur la terrasse et je ne peuxréprimerunpetitcridesurprise.LabaiedeSanFranciscos’étaleàmespieds,l’horizonestdégagé.Entrelebleudelameretceluiduciel,levertdelavégétationenvironnanteetcetteterrasseenboisexotiquefoncéauxrefletsbordeaux,lelieuesttoutsimplementsublime.

–C’estmagnifique!–Oui,nousavonslachancedevivredanscecadre.Etc’estencoreplusbeauàlatombéedelanuit.

M.Ritchernedevraitplustarder.Sivousavezbesoindemoi,vousavezuninterphonedececôté-là.

Je suis son doigt du regard. Mais je ne vais pas jusqu’au bout. En contrebas, une piscine àdébordement attiremonattention. Jepoussemon fauteuilpourm’approcherdubord.Autourde lapiscine,desbainsdesoleilsontsoigneusementalignés,delamêmeessencedeboisquelaterrasse.Lapiscine s'étend vers l'horizon, à tel point qu'elle et le ciel ne font plus qu'un… Rien ne vientinterromprelavue.Jen'aijamaisrienvud'aussibeau,soignéetimpressionnant.Surlapelouse,unpetitcheminmèneàuneautreterrasse,oùunpetitsalonestinstallé.Lesfauteuilssontagrémentésdecoussinscolorésetabritésdusoleilparunetoilesuspendue.Jesuissûrequelavued'enbassur lamaisondoitaussicouperlesouffle.

L’endroit est paisible,mais immense !Adamvit tout seul ici ? Jeparcours la terrassemaisunevoléedemarchesarrêtemaprogression.

–Jefaisinstallerdespentespourquetupuissestepromener,maisilfautquetusoispatiente,cettemaisonestpleinedepetitsescaliers!

Adam!

Il est là, beau, dans une tenue très décontractée : un jean, une chemise à carreaux, des tennisblanches…Et sonsourire toujours ravageur, sa tignassedomptéecette foisavecplusoumoinsdesuccès…Danscette tenue, il faitbiensonâge.Luiquia l'air si sérieuxd'habitude ! Je tournemonfauteuilverslui,j’aimeraismeleveretluimontrermesprogrès,maisilestplusrapidequemoietsetientdéjààgenouxdevantmoi.Ilm'embrasse.Ah,quec'estbondeleretrouver!

Jeremarcheraiicietnousnousenlaceronspourdevrai!

–Viens,jetefaisvisiter.Jesuisheureuxdetevoir.Ondiraitbien,mademoiselleHaydensen,quevousm’avezmanqué!

Jerougis,j’aidenouveaul’impressiondeperdremesmoyensdevantAdam.

–Tamaisonestmagnifique!Etimmense!Jenet’imaginaispasdansuntelendroit.–Ah,ettum’imaginaisoù?–Plutôtdansunappartencentre-ville.–Enville,j’ail’hôtel.Ici,c’estmoncoinreculé,tranquille.–Lemonsieurquim'aaccueillie,John,c'esttonmajordome?– Oui. Lui et sa femmeGloria s’occupent de l’intendance de lamaison. Viens, je vais te faire

visiter.

Adamm’entraîneànouveaudanslamaison.Aprèslesalon,ilmepoussedanslacuisine,oùunefemme, Gloria sans doute, la cinquantaine, s’agite derrière les placards. Adam me présente, et,commesonmari,Gloriam’offreunsourirepleindegentillesse.Ellepourraittrèsbienêtrelagrand-mèred’Adam.

–Bonjour,mademoiselle.M.Ritcherm’adéjàparlédevous.Sivousavezuneenvieparticulièrepourvosrepas,n’hésitezpas.

–Et tu peux lui faire confiance,Gloria est une sacrée cuisinière !Heureusement que je fais dusport,s’esclaffeAdam,lesmainssurleventre.

Jesourisdevantlascène.Jenem’imaginaispasdutoutAdamdanscecontexte.Maisplutôtdansununiversfroid,plusrigide.Misàpartl’immensitédeslieux,l’ambianceiciestchaleureuse.

–Jenousai installésdanslachambredurez-de-chaussée.Jedorsenhautd’habitude,mais tunepeuxpasmonterl’escalier.

Adammefaitvisiterlachambre,lasalledebains.C’estbeau,commetoutlerestedelamaison,maiscen’estpascequim’impressionneleplus.Non,jeviensd’apercevoirlaterrassedelachambre,et sur cette terrasse, un jacuzzi en plein air, avec vue sur la ville. Si Adam me demandaitd’emménageraveclui,jen’hésiteraispasuneseuleseconde!Jem’imaginedéjàjouerduviolon,surcetteterrassesurplombantlabaie…

–Quedis-tud’unepetiteséancedepiscine?Nouspourronsdînerensuiteenbas,c’estunebellesoiréequis’annonce,autantenprofiter.

–Tutesouviensquejenenagepasencorecommeunesirène…–Maisoui,etjesaisaussiquedansl’eau,tutesenspluslégère,pluslibredetesmouvements,etje

meursd’enviedeteserrercontremoi.

Etmoidonc…

J’aiheureusementacquisunevraieautonomieàAspen,jepeuxenfilermonmaillotdebainsansavoir à demanderde l’aide àAdam. Je le retrouve sur la terrasse, prêt àmeguider et à retenir le

fauteuilsurcettepentenouvellementaménagée.

–Pourtesexercices,plustard,tudemanderasàJohnouaukinédet’aideràdescendreàlapiscine,c’estunpeuraide.

–Ouipapa…Tuastrouvéunkiné?–Biensûr.–J’auraispuallerdansuncentre,enville,non?–Lestrajetst’auraientfatiguée…Etpuis,onestensemblecommeça…

Argumentimparable…

Maisilfaudratoutdemêmequejereprenneuneviesociale!

Delapiscine, lamaisonserévèletrèsimposante.Sespierresnaturellesressortentsurlebleuduciel.Ondiraitunemaisondefamilleplusquecelled’uncélibataire…

J’enclenchelesfreinsdemonfauteuiletjen’aimêmepasletempsdemedemandercommentjevaisbienpouvoirmeglisserdanslapiscinequ’Adamm’attrape.

–Attention,jesuislourde!

Adamsouritcommesij'avaisditquelquechosed'incongru.Jem’agrippeàsoncou.J’aipeurpoursondos,maisjesavouredemefaireportercommeuneprincesse.C’estunegrandepremière!Adamdescendlesmarchesdesapiscinetoutenmeserrantcontrelui.Ilfinitpars’asseoiretmegardesursesgenoux.Jedoisêtremoinslourdecommeça!Ilm’embrasselescheveux,inspiremonodeur.JesuisavecAdam,chezlui,lepaysageestmagnifique,lesoleilestentraindesecouchersurlabaie.LesinstantsavecAdamsonttoujoursmagiques,àpart,commes’ilarrivaitàchaquefoisàcréerunebulle de paix entre nous.Nous regardons tous les deux le soleil se coucher. Jeme demande biencommentseraitlavieavecAdamàmescôtés…

Johnavaitraison,lavuesurlabaiedeSanFranciscoestencoreplusmagnifiqueàlanuittombée.Toutesleslumièresdelavillescintillentetsereflètentsurlamer.Ilyaautantd’étoilessurterrequedans leciel…Lecadreestmagique. Jecomprendsqu’Adamviennese ressourcer ici, loinde tout.Quinerêveraitpasdevivreici?

Ah ! si seulement la vie avec lui pouvait être plus simple… Si seulement Adam ne m’avait pasinvitéechez lui justeparceque je suisen fauteuil.Est-cequemaparalysieaaccéléré leschoses?M’aurait-ilinvitée,autrement?

Jenesaispas,jenepeuxpasm'empêcherdemeposerlaquestion…Ilestsiattentionné,siprésentdepuis ce tremblement de terre. Comme si nous formions un vrai couple…Mais est-ce que c’estpossibled’envisagerunerelationàlongtermeavecunhommecommeAdam?

LekinéengagéparAdamressembleàceluid’Aspen:lamêmecinquantaine,lesmêmescheveuxgrisonnants,àladifférenceprèsqu'ilserévèleêtreplusbavardetqu'ilalesourirefacile.Maisencequiconcernemesexercices,lemêmesérieuxl'habite.Jenesaispass’ilestimpressionnédetravaillerici,maisilmefaitfairemesmouvementtrèsconsciencieusement.Ilnetaritpasd'encouragementset

m’aideàpositiver.

Jediscuteavec luiavantmaséanceet luidemandes’ilestpossibled’allerplusvite.Mesjambesrépondentbien,jepeuxpeut-êtreessayerdemarcherquelquespassansmetenir?Jesenssaréticence,iltientàvoircommentmoncorpsréagitaveclesbarres.Etmoi,jeveuxvoirsijepeuxtenirdebouttoute seule. Il blêmit quand ilme voit lever les bras des barres. Et je lui souris, victorieuse.Mesjambesmetiennent,sansque jevacille trop.Mes jambesmeportentetc’estmerveilleux!J’oseunpas,lekinémedemanded’arrêter,c’estassezpouraujourd’hui.Monpremierpasestencourageant,paslesecond.Jemerattrapeauxbarres.Tantpis,jesuisheureuse.Mesjambessontbienlà.Jevisedésormaislabéquille,lacanne,unbâtonderandonneurs’illefaut,maisjeveuxmetenirdeboutetneplusêtredanscefauteuil!

Mesprogrèsmemotivent.Etlaprésenced’Adam,danssonbureauàl’étageau-dessus,estunautrebonheur.Jenesuisplusseule,mêmes’ilesttrèsaccaparé.

Jepourraispeut-être luidemanderd’inviterClaire? Il fautqu’ellevoiecettemaison, lavue, lapiscine!

Danslesalon,monviolonm’appelle.Jedécidedeprendreunerapidedouchepourmerafraîchir.La soirée s'annoncebelle, je peux enfiler l'un des déshabillés dontm'avait parléAdamà l’hôpital.J'opte pour un pantalon de soie et un caraco au décolleté plongeant serti de dentelle noire.Adamdevraitapprécier…J’attrapemonviolonetmedirigeverslaterrasse.Jejouelemêmemorceauquecesoir-là,àl’académie,oùl’ambianceétaitchargéed’ondespositives.Jejoueenmeremémorantcesdélicieuxsouvenirs.Jejoue,lesyeuxfixéssurlabaie.Lesnotesprofondesrépondentàd'autrespluslégères,joyeusesetenlevées.Lamusiquem'emporte,meprenddel'intérieur.Jem'envoleavecelle,jenesuisplusdanscefauteuil,jesuisloin,dansunailleursoùletempsn'existepas.Àladernièrenote,jeprendsunegrandeinspirationet…

Desapplaudissementsmesortentdemespensées.Adamadûm’entendre.Jetournemonfauteuilvers lui, souriante.Mais je me fige, je me glace même : ce n’est pas Adam. Je n’ai pas entenduarriver, dansmon dos, Paul et Lorraine. Ils se tiennent debout, devantmoi. Le premier affiche unlargesourire,c’estluid’ailleursquivientdem’applaudir.Lasecondeesttoujoursaussiméprisante,froide.Jen’aiaucunesolutionderepli…

–Éléa,jesuisheureuxdeconstaterquevotreparalysienegâchepasvotretalent!

Paulestaffable,souriant.Lorraineelle,neditrien.Pasbesoindeparler,sonregardenditlong…

Sij’avaispupenseràprendreungiletpourmecouvrir…Jenesuispasnue,maisjemesenstoutcomme!

–Paul,madameHill,jenevousaipasentendus.

Mavoixestfaible.Jeserrelespoingssurmesgenoux.Jen’aimepasleregardqueposesurmoicettefemme.

Maispourquoimeméprise-t-elleautant?

–Tantmieux,nousavonspuassisteràl’undevosadmirablesmorceaux.DuBach,n’est-cepas?–Oui,laSonatepourviolon.–Ah!vousvoyez,nousavonslamusiquepourpointcommun.

Super,j’essaieraidem’enrappeler!

–N’est-cepasmagnifique?

Cettefois,Pauls’adresseàsamère.Jenesaispaspourquoi,jesensqu’ellenepartagepastoutàfaitsonavis.

– Çamanque de technique. Je pensais que le Philharmonique de NewYork visait un plus hautniveau.

Argh!Heureusement,j'ail’habitude,avecmamère:jepeuxencaissertrèsfacilementcegenrederéflexion.Mêmepasmal!

L’échanges’interrompt.Adamarrive.

Charmant,onsefaitunpetitrèglementdecomptestoutdesuite?Onmedemandedepartir?C’estquoileprogrammedujour?

Jesuisbiendécidéeàcequ’aujourd’hui,personnenememarchesurlespieds!

–Paul,Lorraine!Vousnem’avezpasprévenudevotrevisite!–Etcommentfaire,moncherAdam,tun’espasàtonbureau,tonassistantenenousditrien.

Etc’estrepartipourlesreproches.Jem’éclipsetoutdesuiteouj’attends?

–Jetravailleici.Tupouvaism’appeler.

Adamestcrispé.Paulregardelajouteentresamèreetsoncousind’unairsatisfait.

Jepourraispeut-êtreluiroulersurlespieds…

–Jet’aiprévenu,Adam.Tudoisarrêterdeperdretontempsetreveniràtesaffaires.Cettefillenetecausequedesennuis!

Sympa!Eh,«cettefille»estlà,paslapeinedeparlerdemoicommesij'étaisabsente!

Adammejetteunbrefregard.Jegardemoncalme,jemesensàdeuxdoigtsd’imploseretdediremesquatrevéritésàcettefamilledemalades.

–Jesuisaussiefficaceiciqu’àmonbureauettulesais.LaisseÉléaendehorsdeça.–Tum’obligesàrevenirtravailler,commesiàmonâgelemondedesaffairesm’étaitconseillé.

Tuasététropabsent,Pauletmoidevonsessuyerlesconséquencesdetanégligence.–Tun’aspasledroitdefaireça!–Alorsvaàtonbureau!

L’ordredeLorraineestcinglant.Unegifle.Adamneréagitpas,neditplus rien,mais je lesensprêtàexploser.Qu’estcequilelieautantàLorrainepourqu’illuiobéissetant?Pourquoiest-cequ’ilneluiclouepaslebec,àcetteviellemégère?!Paularboreunsourirevictorieux.Ilmefixe,ravi.

Maispourquoiest-cequ’Adamnelesmetpasà laporte?Pourquoiest-cequepersonnenenouslaissetranquilles!?

–C’estmondernieravertissement,Adam.Situnerevienspas,nousprenonsleschosesenmain!ViensPaul,partons.

Paul obéit, commeunpetit chien.Son attitude est encore plus abjecte. Jeméprise cet homme etcettefemme.

Oh,jeleshais!Sij’avaisétéchezmoi,jelesauraispersonnellementmisàlaporte.

Jeserrelesdentsdevantlaretenued’Adam.

Pourquoiest-cequ’ilneréagitpas?

Jefulmine,j’enaiassez.C’estlagoutted’eau.Jenepeuxplusensupporterd’avantage.J’attendsd’êtresûrequeLorraineetPaulsoientpartispourlibérermestensions.

–JevaispartirAdam,jerentrechezmoi.–Commentça?–J’enaiassezdetoutesceshistoires!Jamaisnousn’avonsunmomentànous.Ilssonttoujourslà.

Quandcen’est pasPaulquimeharcèlede fleursoudeSMS, c’est ta tantequime juge comme sij’étaisladernièredesdemeurées!Çasuffit.Jen’airiendemandédetoutça.J’aidéjàbienàfaireavecmesjambes.Jetiensàtoi,maisjen’aipasméritéça,Adam!

–Cen’estrien,ilsvontsecalmer!–NonAdam,çasuffit.Toutvade traversdansmaviedepuisquenoussommesensemble !Les

lettresdemenaces,l’agression…–Quoi?!– Oui, le jour de notre déjeuner à Forbes Island, j’ai reçu des lettres de menaces, des appels

téléphoniques ! Jeme suis fait agresserAdam ! Par un homme ignoble ! Tous, ilsme demandentd’arrêtercetterelation.J’enaiassez!

Jevidemonsac,j’enaiassezdetoutça,detoutecettetension!

–Maispourquoiest-cequetunemel’aspasdit?!

Lesyeuxd'Adambrillentdecolère:contremoioucontreceuxquiontcherchéàmefairedumal?

–Pournepast’inquiéter,pournepastemettreàdostafamille!J’aipensénaïvementqueçasetasserait.Etjet’avouequej’aid’autresprioritésencemoment!Çasuffit,Adam.Jeveuxretrouverducalme,delapaix.Jerentrechezmoi,ceseramieuxpournousdeux.

–Tumequittes,Éléa?

Adam est blême à présent, et sa question est imprégnée d’angoisse. Elle me va droit au cœur,commeuneflèche.

–JenesaispasAdam,je tiensà toiAdam,mais je…J’ai…besoindeprendredureculsur toutça…

Adams’écarteetme laissepasser.Sansunmot.Sesyeuxsont rivésausol. Ilencaisse. Jesuisàfleurdepeau,jeneveuxpaspleurerdevantlui.Partirestlameilleuresolution.Jenesupporteraipasqu’ilfasseencoreunefoiscequesatanteluidemande,qu’ilmelaisseseuleànouveau.J’aiunevie.Etjelavivaistrèsbiensansluijusqu’àprésent.

Jeretournedanslachambre,j’aibesoindemeposerunpeu,deréfléchir.Jen’arrivepasàoublierleregardméprisantdeLorraine.Partir,c’estlameilleuresolutionmaisc'estaussilaplusdifficileàprendre. Jem’habille, jemedébrouillepour réunirmesaffaires. Jamaismonfauteuiln’aétéaussiencombrant.Mavaliseestprête.Maisjesuisincapabledeladélogerdulit.Jesoupired’agacement,jedoisdemanderdel’aideàAdam.Etaussipourrentrer.

Jeleretrouvedanslesalon.Assissurlecanapé,ilsetientlatêteentrelesmains…Moncœurseserre. Si seulement il n’avait pas été Adam Ritcher ! Quel combat intérieur ! Une petite voix mesoufflederester…Maiscen’estpaspossible,pasdanscesconditions…

–J’aibesoind’aidepourmavalise…

Adamselèved’unbondetsetourneversmoi…Jelesenssianxieux.

–Éléa,tuessûre?

Sesyeuxsonttristes…sitristes.Adamaperdudesafièreallure,ilalesépaulesbasses.Unevaguedelassitudevientdel'emporter.

–C’estmieuxcommeça…–Jecomprends…Jen’arrivepasàbienm’occuperdetoi…

Non!Nemeparlepascommeça!Çanem'aiderapasàpartir!

–Tusaisbienquecen’estpasça…–Oui…Tuauraisdûmeparlerdecequit’estarrivé…jet’auraisprotégée…–Tunepeuxpastoutcontrôler.C’estarrivé.Ilfautpasseràautrechose.– Je tiens à toi,mais si tu sens que c’estmieux pour toi, je n'ai pas le droit de te retenir ni de

t'enfermerici,mêmesicen’estpasl’enviequimemanque.–Jenesaispas,jeveuxjuste…rentrer,retrouvermeshabitudes…Marcher.Après…

Adamsetientdeboutdevantmoi.

Commentest-cequejepeuxlaisserunhommeaussiattirant,aussisexy?Ilm’aprouvécesderniersjoursqu’iltenaitàmoi…

Adam m’embrasse avec l’énergie du désespoir. Un baiser fougueux, auquel je ne peuxm’empêcherderépondre.Adamserecule,sesyeuxsontallumésparledésir.Jesensquelquechoseremueraufonddemoi…Ilm’embrasseànouveau,mesmainsglissentdanssescheveux.Nosadieuxneseferontpassurlepasdelaporte.

Adammeporteverscequifutnotrechambre.Maisjen’aiaucuneenviederesterenfermée…jepenseauxcoussins,àcebaindesoleilsurlaterrasse.Fairel’amoursouslesétoiles,aveclalégèrebrise du soir caressant nos corps nus…L’idéem’enflamme. Je chuchote quelquesmots à l’oreilled’Adam,qui,toutdesuite,changedechemin.Ilarboreunpetitsourire:monidéen’estpaspourluidéplaire.

Adammeposesurlalonguebanquette.Ils’assoitsurleborddusiège,etpassedélicatementmajambegauchedel’autrecôtédesataille.Jesuisassisesurlui,dansunepositionplutôtconfortable.J’enprofitepourpassermesmainssoussachemise.J’aiunbesoinpresquevitaldesentirsapeau.Jenel’aipastouchédepuislongtemps,jeveuxledévorer,etqu’ilmepénètreauplusprofonddemoi.Jesuisenmanque.Adamm’afaitdécouvrirl’amourcharnel;moncorpsetmatêteleréclament.

Jeluienlèvesachemise,arrachesesboutonsplusquejenelesdéfais.Adamestfébrile,luiaussi.Ilm’enlèveavecempressementmoncaracoetmonsoutien-gorge.Alorsquemes seins jaillissent, jejettesachemisederrièrelui.Adamrelèvelégèrementlesgenoux,defaçonquejepuissemecambrerenarrière.Ilveutmesseins,illesprendsansattendre,avecsaboucheetsesmains.Cecontactpeauàpeau est électrique. Je sensmon sexe s’humidifier contre le sien, qui durcit. Je veuxAdam, je ledésire.Jeleveuxenmoi!

–Adam...

Jeprononcesonnomdansunsoupirdeplaisir,marespirations'accélère.

–Eléa,jenepensequ’àçadepuisquetuesici...

Adamlèchemestétons,lestitilleavecsalangue.Jegémis.Jesensquelemoindrecontactpeutmefaire jouir tellementmon corps est en attente de ses caresses appuyées. Je veux sentirAdam, toutentier,contremoi.Etnousn’avonspasd’autresolutionquedenousallongertouslesdeux.Adamserelèveetmeguide.Jesensquemoncorpsestultra-sensible,jevaisgémiraumoindreeffleurement.Adamm’allongeetfaitglissermajupesurmeschevilles.Puismaculotte.Ilestleseulmaîtreàbord,jenepourraipaslechevaucheràmontouretenfoncersonsexedanslemien.C’estàluiquerevientceplaisir.

Maisuneidéemevient.Ils’estdéshabillé,ilestnu,sonsexeestdressé.Jemeredresse,avantqu’ilnes’allongesurmoi.Jeleguideversmoi,sesjambessetiennentdechaquecôtédutransat.Sonsexeest à quelques centimètres demonvisage,majestueux, dur. Je peux le lécher, je peux le prendre àpleineboucheetattrapersesfessesavecmesmains.Jepeuxavoircepouvoirsurlui.Jefaisvenirmabouched’avantenarrière,lentement,jemedélectedesonsexe,desongoût.Adamgémitau-dessusdemoi,sesmainss’agrippentàmatêteetmetirentlescheveux.Ilenveutencoreplus,etjeveuxleluidonner.J’accélèrelemouvementdemalangue,lapressiondemabouche,jelesensfléchirsursesjambes.Sesfessessontfermes,musclées,jedescendsmesmainssursescuisses…

Adamgémitplusfort.Jesensqu’illuttepourgarderlecontrôledelui-même.C’estsibondeluidonnerceplaisir.

–Arrête,tuvasmefairejouir,Eléa.Etjeneveuxpasm’arrêterlà…

Adam s’écarte de moi. Je peux reposer mon dos sur le siège relevé du bain de soleil. Adams’approchedélicatementdemoi,m’embrasse le cou,memord lapeau.Lamorsureme fait gémir,Adamdescendencore,embrassemonventre…Jefermelesyeux,jesaisoùilveutarriver.Jesenslemouvement de sa jambepasser au-dessus demoi.Le voilà accroupi.Et ce n’est pas sa langue quivientseposersurmonsexe,maissamainetsesdoigtsavertisquim’écartentlégèrementlescuisses.

–Eléa,tuestrèsaccueillante…–J'aitellementenviedetoi...

Çafaittellementlongtempsquej'attendsça...

Monsexeest trempémaintenant.Samainseglisseplus loinentremes jambes,commençantsonva-et-vientsurmonsexe.Monclitorissegonfle.Àchaquepassagedesamain,jelesenss’électriser,etcettesensationdivinem’arracheunpetitcri.

–Écarte-moiunpeupluslesjambes…

Mavoixestrauque,jeveuxallerplusloindansleplaisir,jeveuxm'offrirtotalementàlui.

Adamrépondsansattendre.Jenepeuxpasmecambrerpourluilaisserplusdeplace,pourouvrirmonsexeencore…MaisAdamanticipeetattrapedesamainlibrelecoussindusièged’àcôté.Illeplacesousmesreins,ouvrantmesjambes,justecequ’ilfautpourque,dèsleretourdesamainsurmonsexe,unplaisirfulgurantm’assaille.Jenem’yattendaispas,jepousseuncri.

–Jecroisqu’onatrouvélabonneposition…

Sarespirationestsaccadée,Adamprendduplaisirenm'endonnantetillaisseluiaussiéchapperquelquesgémissements,d’unevoixgravequim'exciteterriblement.

Adamenfonceundoigtdansmonsexeetlaissesapaumemecaresserleclitoris.C’esttellementbon. Il va et vient, je gémis de plus en plus fort. Sous les étoiles, je peux crier, je peux vivrepleinementmon plaisir. Je n’ai aucune envie de le réprimer,mes jambesme frustrent bien assez.Adamcontinue,deplusenplusvite. Je sens l’orgasmemonter, je le sensvenirde loin, j’appréciechaque seconde de samontée, il est là, il vient, fort, intense. Je crie et lemouvement de samainm’accompagnepourlefairedurerquelquesinstantssupplémentaires…

Ah comme j’aimerais à cet instant pousser Adam sur l’autre siège pour le chevaucher ! Pourenfoncersonsexedanslemien,etprolongercettevaguedeplaisir…

–Viens…s’ilteplaît…

Adamm’embrasseleventre,melècheleclitoris,tenduetextrêmementsensible.J’aienviedeson

corps contre le mien, de son sexe entre mes jambes, de sa langue dans ma bouche. J’ai envied’agrippersesfesses,delespresser,deserrersonbassincontrelemien.MaisAdamnebougepas,continuelapercéedesalanguesurmonsexe…Jemeredresseetleregarde.Unepointed’effronterieagite son regard…Il joueavecmoi, avecmonplaisir.Àmoinsqu’ilne réfléchisseà lameilleurefaçondemeprendre,demepénétrer,d'enfoncersonsexedanslemien…

Cetteimagemerendfolleetjenepeuxpasm’empêcherdel’appelerencore.

–Viens!

Adamseredressedevantmoi,sonsexeesttoujoursvaillant.Justeau-dessusdemoi,ilcommenceàtouchersonsexe,àlecaresser.Levoirsedonnerduplaisirmerendfolle,sonregardaguicheurmemet dans tous mes états. Je me redresse pour l’embrasser à nouveau, pour le reprendre dans mabouche,maisilmerepoussedélicatement…

–Pascommeça,Eléa...

Savoixn'estplusqu'unsouffle,unsoufflededésirardent.

Adamfléchitlesgenoux,sonsexetouchemabouche,puisdescendlentement,versmesseins…Ilse frotte contre eux, les caresse l’unaprès l’autre, s’attarde surmes tétons.Lecontactde son sexeavec le bout demes seinsme fait gémir encoreplus fort, c’est un supplice !Adamsourit,mais ilhalète de plaisir. Puis il revient jouer avec mes seins avant de descendre sur mon ventre…doucement… Il semble s’amuser avec mes sensations, il esquive mes mains quand elles veulents’agripperàluietleforceràvenircontremoi.Adamseplaceàcalifourchonau-dessusdemoi,posesesgenouxsurlematelasdubaindesoleil.Ils’allonge,enfin,etmedominedetoutsoncorps.Maispourquoiest-cequ’ilnemetouchepas?

–Adam,s’ilteplaît!

Jen’ytiensplus,jel’attrapeetneluilaissepluslechoix.Monbassintoujourscambré,grâceaucoussin,etmesjambesécartéesluiouvrentlavoie.Sonsexetouchelemienetjelepresseplusfortcontemoienprenantsesfessesàpleinesmains.Ceseulcontactpourraitmefairejouirtellementjebrûlededésir!Adamm’embrasse, lentement, langoureusement,maismonespritresterivésurnosdeuxsexes.Jeveuxqu’ilvienneenmoi,maintenant!Ils’écarteetmelaisseseuleuninstant.Lebruitdel’emballagequ’ondéchirem’estdésormaisfamilier.

Adamse redresse légèrement etplonge sesyeuxdans lesmiens. Jem’accrocheà son regardetsenssonsexemepénétrer.Ilsemetàbouger,donnedescoupsdebassinetmeregardeintensément,commes’ilscrutaitchacunedemesréactions.Sesmouvementsprovoquentunevaguedechaleurenmoietsonregard,brûlant,mefaittotalementchavirer.JebasculelatêteenarrièreetAdamcontinue,deplusenplusfort,deplusenplusloin.Sonmouvementsefaitplusrythmé,plusrapide.Ilgémitluiaussi,d’unevoixrauque, ilprononceplusieursfoismonprénom.Puis ils’arrête.Jene lesenspasencoreprêtàjouiralorsquemondeuxièmeorgasmeestprêtàéclater.

–Non,net'arrêtepas!Adam!Continue...–Attends,Eléa...

Adamrecule,ilattrapedoucementchacunedemesjambesetlesplaceautourdesataille.Etilmepénètreànouveau,sansdétour.Sonsexevaplusloin,ils’enfonceplusprofondémentàchaqueva-et-vient.Adamgémit,ilprendduplaisiretilm’endonneautant.Ilfermelesyeuxetaccélèrelerythme,ilvadeplusenplusvite.Sarespirationesthaletante,lamienneaussi.

Jesensmonorgasme, ilest là, ilarrive,fort,violent.Jemeconcentresur lesexed’Adam,je lesens atteindre des zones lointaines, sensibles. Je jouis encore une fois et je me délecte de cettesensation si chaude, si enveloppante. Adam sourit, son regard toujours plongé dans le mien, etcontinuesursonrythmeeffréné.Ilposesamainàlabasedemonsexe,sondoigtpressemonclitoris.Puisjesenssonsexequisegonfleetexploseenmoi,unevaguedechaleurm’inonde.Adamgémitenprononçantmon nom.Nous sommes tous les deux submergés par le plaisir, vaincus par sa force,haletantl’uncontrel’autre.

Adamreposemesjambesdélicatement,ets’allongesurl’autrebaindesoleilqu’ilvientdecolleraumien.Soncorpsestmagnifiquesouscette lumière, sesmusclessedessinent, sonsexe trouve lerepos.Nousvenonsdepasserundesmomentslesplusintimesetlesplusfortsdenotrerelation.Jeveuxprofiterdecetinstantdegrâce,decemomentcharnelinattendu.Jenechangeraipasd’avisquantàmondépart.Adamlesait.Maisjepréfèremelaisserbercerparcettepureplénitudeetoubliertoutlereste.

5.Coupdemassue

Qu'ilestdifficiledequitterAdamaprèsuntelmomentdecomplicitécharnelle!Noscorpsn'ontjamaisétéaussivivants,est-ceparcequ'ils'agissaitpeut-êtredenotredernièrefois?C'étaittellementbon, tellement enivrant. Adam connaît et répond à tous mes désirs, il sait exactement commentdécupler mon plaisir. Je lui ai demandé de ne pas m’accompagner chez moi. Après ces derniersinstantspassésensacompagnie, jepourrais flancheretchangerd’avismais jedoisme teniràmadécision.Jeveuxmettrede ladistanceentrenous.Meconcentrersurmes jambes.Et tantpissi j’ail’impressionqu’unétaumeserrelecœuretquej’aimalauventre.TantpissijesensAdamluiaussitrèsattristédemadécision.Maisilcomprend.CettedernièrerencontreavecPauletsatanteétaitdetrop.Aumomentdepartir,danslavoiture,laséparationestdifficile…

–Prendssoindetoi,monange.

Adammecouveduregard.Jelesensprêtàmeretenirmaisilseretient.

J’aimetantquandilm'appelle«monange»…Bonsang,quec'estdur!

–Toiaussi…

Mavoixsebrise.

Jenesaispasquoidire,niquoiajouter.

«Ons'appelleetonsedonnedesnouvelles?»Non,çanefonctionnepascommeça…

–Situasbesoindemoi…–Oui,jesais…

Adam se pencheversmoi etm'embrasse tendrement.Nous soupirons, je retiensmes larmes. Jesuis à deux doigts de lui crier deme ramener chez lui ! Adam se redresse,m'adresse un derniersourireempreintde tristesseet fermelaportièrede lavoiture.Çayest,c'est terminé, lavoituresemetenroute.Jefixemesgenoux,meslarmescoulent,jeserrelesdents.

Çafaittellementmal!

Clairem’attend,jel’aiprévenue.Lechauffeurd’Adamareçusesordres.Ildoitmeporterenhautdesmarches, notremaison n’a pas d’accès pour un fauteuil.Raison de plus pourme remettre surpied!MaisClaireaeulabonneidéedemelaisserlachambredurez-de-chausséeàl’époque.Silechauffeurmetrouvelourde,iln’enlaisserienparaître.Ilmedéposesurlecanapéetrepartchercherlefauteuil.Claireattenddefermerlaportederrièreluipourmedemanderpourquoijerentreaussivite.Jefondsenlarmes.Devantelle,jepeuxmelaisseraller.Entredeuxsanglots,jeluiracontetout:leslettres,l’agression,Paul,satante,sesordres,masolitudedecesderniersjours…Tout.EtClairem’écoute,jusqu’aubout,sansm’interrompre.

–Mapauvre…Maispourquoitunem’asrienditdetoutça?–Pournepast’inquiéter.Ettoutestallésivite!–Jesentaisquetumecachaisdeschoses,maispasautantqueça!Tul’asvraimentquitté?–Jenesaispas…Jeveuxjuste…Jeveuxremarcher,après,jeverrai.–LaprochainefoisquejevoisPauls’approcherdetoi,jetejure,jeluiarrachelesyeux!–J’espèrequ’iln’yaurapasdeprochainefois…Ilsontgagné…–Adamt’alaisséepartir?Iln’ariendit?!–Ilm’aditqu’ilcomprenait…C’estpeut-êtremieuxcommeçapourluiaussi…Tuauraisvusa

tante,elleesttellement…froide!–Bon, priorité à tes jambes alors.Adam et toi, vous vous retrouverez.Vous avez des choses à

réglerchacundevotrecôté.Dis-moicommentjepeuxt’aider!

RetrouverClaire,mamaison,monchez-moi,apaiseunpeumapeine.MaisilsuffitquejerepenseàAdampourme remettre à pleurer.Claire se plie en quatre pourmoi,mais elle n’a pas la forced’Adam.Sesmaladressesaveclefauteuil,sabonnevolontéetsesgrimacesnousfontpartirdansunénormefourire.Pasdedoute,c’esticiquej’irai lemieux,et tantpissic’estsansAdam…Pourlemoment…

Claireapuprendresajournée.Jecroisqu’elleaététrèsfrustréedenepaspouvoirs’occuperdemoi. Je lui ai tout raconté : lavisitedemesparents, l’hôtelde luxed’Aspenet lamaisond’Adam.Maisjeneracontepasnotredernièreétreintesouslesétoiles…Montéléphonevibre.

[J’espèrequetuaspasséunebonnenuit.Lamaisonestvidesanstoi.Adam]

JemontrelemessageàClaire.

–Jesuispersuadéequetoutn’estpasfinientrevous…Bonallez,netelaissepasaller.Àquelleheureesttaséance?

Adamm’a laissée partir hiermais à condition de continuer à s’occuper demes soins,même àdistance.Une voiture doit venirme chercher pourme conduire dans un centre, en ville. Je dois yretrouver lekinéquim’asoignéechezlui.Etc’estunetrèsbonnechose, ilsaitexactementoùj’ensuis.

Lavoiture est à l’heure ; et le centre, à la hauteurde tout cequem’aoffertAdamcesderniersjours.Immense,trèsluxueux,unéquipementdederniercri,unepiscinechauffée,unbainàremous,unspa…Claireestimpressionnée,maisravie.Lekinéluiproposedeprofiterdelapiscinependantmesexercices,mais,mêmesielleesttentéeetmalgrémesencouragements,ellepréfèreresteràmescôtés…

Nous reprenons lesexercices làoùnous lesavons laissés laveille. Je tiensdebout,mes jambessaventmeporter.Jen’airienperdudecetteévolution.Claireestanxieuse,elleneditrien,assisesursonfauteuil,àm’observer.Maisjelasenstendue…

Jenevaispasm’effondrerdevantmacopine,ilfautquejerestedebout!

Jerecommence:unpas,c’estbon.Deuxpas,c’estbonaussi.Jeprogressetrèslentement,lekiné

medemanded’yallerdoucement.Jem’arrête,jepeuxrespirer.Jenesensaucunedouleur.Justeunecertainelourdeurdanslesjambes,maisj’avanceencoreunpeu.Jesuisravie,etj’interrogelekiné.Jenemesenspasd’allerplusvite,commentfairepourfranchiruneautreétape?

–Vousavezfaitleplusdifficile,Éléa,félicitations.Vosjambessontassezsolidespourvousporter.Jevaisvousdonnerunecanne.Vousallezmarcher avec, fairequelquespetitspas chezvous.Maisattention,ne forcezpas !Essayezquelquespaspuis repos.Gardez encorevotre fauteuil, surtout sivousdevez fairedescourses.Marchez régulièrement,pourdéliervos jambes.Maissurtout,pasdeprécipitation!

Quandlekinémetendunecanne, j’ai l’impressiond’êtreuneenfantdevantsoncadeaudeNoël.L’objetn’estpourtantpas trèsglamour,mais il signifie tellement !Quelle joie !Quel soulagementd’entendrequeleplusdurestderrièremoi!Claireestraviemaispromettrèssérieusementaukinédemesurveillerdeprès.

Claire décide de m’inviter au restaurant pour fêter ça, dans notre cantine habituelle. J’ail’impressionderevivre,jen’aimêmeplusbesoinqu’onmeportepoursortirdemonfauteuil.

–Allezmémé,quetuesbelleavectacanne!C’estlemomentdeprendrelebusàl’heuredepointe,tuastaplaceassurée!

Clairemetaquine,nousrionscommedesados.Toutçam’avaittellementmanqué!

Nousrentronspeuaprèsledéjeuner,Clairetientàcequejemerepose…Ellem’aideàmonterlesmarches de la maison, quel bonheur d’être moins dépendante ! Par contre, elle m’assoit dans lefauteuilpourmeconduireàmachambre.

–Tuasassezmarchépourlemoment.Onrecommenceracesoir.Etnediscutepasoùjecachetacanne!

Clairesorthilaredemachambre…C’estvraiqueçapourraitêtreunetrèsmauvaiseblague.

Est-cequej’enparleàAdam?C’estunpeugrâceàlui…Justeunpetitmessage…

[Lekiném’adonnéunecanne.Jepeuxmarcherunpeu.Merci,c’estbeaucoupgrâceàtoi.Éléa.]

Jesoupire…

Sinousavionsétéuncouplenormal,jel’auraisappelé,j’auraispuentendresavoix.Nousaurionsétéheureuxtouslesdeux,onauraitmêmepufêterça…

Maisvoilà.Jenesaismêmepassinousseronsdenouveauensembleunjour…

Jesuistropénervéepourdormiretjenemesensd’ailleurspasfatiguée,quoiqu’endiseClaire.Jedécided’allumermonordinateuretderegardermese-mails.Etjefaisbien,puisqu’unmessagedeM.Glenm’attend,envoyéhier.

De:M.GlenÀ:MlleHaydensenObjet:ReprisedesrépétitionsBonjourMademoiselleHaydensen,J’aiété informédevotreaccidentet j’espèrequevousavezpuvousremettresurpied.Denotrecôté,notre installationaétéquelquepeuperturbéepar le récentséisme,maisnousn’avonssubiaucundégât.Heureusement,nousaurionsfiniparcroirequenousétionsmaudits!Nous allonsdoncpouvoir reprendrenotre activité.Nousvous attendons jeudi à 11heures pourcommencerlesrépétitions.NotrenouvellemaisonestleNouveauConservatoiresurlaVanNessAvenue.Àjeudi,M.Glen

Jeudi!C’estdemain!Jevaisenfintravailler!

Mapremièrerépétitionavecl’ensembledesmusiciens!Etc’estencoreunefoisgrâceàAdam…JemejettedanslefauteuilpourprévenirClaire.

–Claire!

Claireaccourt.

–Quoi,unproblème?Çanevapas?–Si,toutvabien!Jecommencelesrépétitionsdemain!–Génial!

Lanuit est très courte !Entremes jambes, la petite soirée organisée parClaire pour fêtermonnouveaujobetlespremièresrépétitions,jesuistropexcitéepourtrouverlesommeil.Aussi,quandleréveilsonnecematin,j’aidumalàouvrirlesyeux.Maisl’adrénalinemedonnedel’énergieetjemehâte.Jesaisqu’avecmamobilitéréduite,jemetsplusdetempsàmepréparer,etcen’estvraimentpaslejouroùjedoisêtreenretard!

Aprèsladouche,jepréparemonsac,monviolon.Surmontéléphone,j’aicinqappelsenabsence.Unseulnuméro,c’estceluid’Adam.

Qu’est-cequ’ilsepasse?

Montéléphonevibreànouveau,jedécroche.

–Allô?Adam?Toutvabien?–Bonjourmonange.Çava?–Oui,jecrois…ettoi?

Entendredenouveausavoixtransformemoncœurenguimauve.Ilmemanque,jenepeuxpaslenier…

–Jesuiscontentpourtesjambes.J’auraisaiméêtrelàpourvoirça…–Oui,jemarcheunpeu.Pasencorecomplètement,maisilyaduprogrès…–Éléa,jedoisteprévenir.JesaisquetucommenceslesrépétitionsauPhilharmoniquecematin.Il

fautquetusaches…Paulenaprislescommandes.–Paul?!–Oui, tu risques de le croiser,méfie-toi. Je le soupçonnede vouloir chercher à garder contact

avectoi.Jenecomprendspascequ'iltrame…–Mais,commenta-t-ilpu…?–Quandtuaseutonaccident…Jen’aipaseuletempsdem’occuperdel’arrivéedetoutlestaff,

del’installation…Paulaprislesdevants.Ilatoutgéré…Jesuisdésolé,jesaisqu’ilvachercheràtecroiser.

–Oh!…

Monenthousiasmeesttombéd’uncoup.Çanes’arrêteradoncjamais…

–Jen'airienpufairepourempêchercela…jem'enveux,Éléa…Pardon…–Net’inquiètepas,çavaaller.Jeferaiattentiondenepasmetrouverseuleaveclui.–Jesuisdésolédet’imposerça,mêmeloindemoi,jen’arrivepasàtepréserver…–Cen’estpastafaute.Tafamilleestunpeu…particulière…–Faisattentionàtoi,jet’appelleplustard.

Moiquimefaisaisunejoiederetrouverlamusique…

Oh,mais jene vaispas laisser ce type influencer le coursdemavie, bon sang !S’ilme toucheencore,uncoupdecanne!

LetaximedéposedevantleNouveauConservatoire.Lebâtimentestmoderne,trèscontemporaindans son architecture.Ma démarche est peu assurée,mais il est hors de question deme présenterdevantPaulenfauteuil.Non,jeseraidebouts’ilmeparle!Claireneseraitpascontente,ellem’afaitpromettre de l’appeler si je ne tenais pas le coupphysiquement.Elle est prête à arriver, avecmonfauteuildanslecoffredesavoiture.

J’apprendsquelesrépétitionsnecommencerontqu’aprèsledéjeuner.Cematin,nousavonsdroitàune réunion, sans doute pour nous faire part de la nouvelle organisation et de ce qu’implique lechangementdevillepourlePhilharmonique.C’estsanssurprisequejevoisdébarquerPaulauxcôtésdeM.Glen.Jesuisentouréedesautresmusiciensetdetoutel’équipetechnique,jemefondsdanslegroupe,j'aimeraismecachermaisjenepeuxpas.Lesecrétaireremercietoutlemonde.Mamainsecrispesurl’étuidemonviolonquandjel’entendsfairel’élogedePaul.PasunmotpourAdam,alorsque c’est lui qui a eu l’idée… Paul est fier, il rit à gorge déployée…Mais quel manipulateur !J’applaudiscommetoutlemonde,pournepasmefaireremarquer,maisjehaiscethomme!

Auboutd’unlongdiscoursquej’écouteàpeine,M.Glennouslibèreetnousdonnerendez-vousen début d’après-midi pour débuter les choses sérieuses. Si je pouvaisme glisser dans le flot desmusiciens pour quitter les lieux…Mais je ne suis pas très rapide…Dans le hall,M.Glen et Paulserrent lesmainsde tout lemonde. J’essaiedem’esquivermaisM.Glenmeremarqueet sedirigeversmoi.SuividePaul,lesourireauxlèvres.

Siseulementjepouvaismarcherunpeuplusvite!

–MademoiselleHaydensen.Jesuisravidevousvoirsurvosdeuxjambes!–MonsieurGlen!Oui,larééducationportesesfruits.–Tantmieux!Surtout,neforcezpaspendantlesrépétitions.Nousnevousforceronspasàrester

deboutsivousressentezdelafatigue!N’est-cepas,monsieurHill?–Biensûr,Éléaaencorebesoinde tempspour se remettrecomplètement.Le traumatismeaété

terrible!

Jenesaispascequiestleplusterrible,l’accidentoudevoirfairebonnefiguredevantPaul.

–MonsieurGlen,jevousretrouvetoutàl’heure.J’emmèneÉléadéjeuner.

Pardon?Maisnon!

–Biensûr,jevouslaisse.Àtoutàl’heure.

Etvoilà,toutcequejeveuxéviterarrive.JemeretrouveseuleavecPaul.

–J’aidéjàquelquechosedeprévu,jenepeuxpasdéjeuneravecvous.–Éléa,j’insiste.Etdansvotreétat,vousnepouvezpasvousenfuir.Allez,venez,j’airéservéune

tableenface.

Paulm’agrippelebras.Jeneveuxpasdesonaide!

–Jepeuxmarchertouteseule.

Jemesenspiégée.Jen’aiaucuneissuedesecours.Aucuntaxin’estenvueetjen’aipersonnepourpasser me prendre… Je suis Paul les dents serrées. Si seulement j’avais su que nous aurions cedéjeunerdelibre!

Jem’installepéniblementàtable,jen’aipasdutoutenvied’êtrelàetmesjambessemblentl’avoircompris.Jenedesserrepaslesdents.Jen’aipasfaim.

– Jevous sens tendue,Éléa.Nous sommespartis surdemauvaisesbases. J’espèrevraimentquecettenouvellecollaborationchangeratoutça.

Nouvellecollaboration?Ilvaêtrelàtoutletemps?

–Jesuistrèsheureuxdevousrevoirsurvosdeuxjambes.J’aiétéinquietvoussavez.EtAdamquivousacouvécommeunbébé!

–Ils’estplutôtbienoccupédemoi.C’estgrâceàluiquejeremarcheaussivite.–Éléa,onpeuttoutfaireavecdel’argent.J’aiaussidegrandsdesseinspourvous.–Pardon?–Oui,vousnepouvezpasgâchervotretalentauPhilharmonique.Vousapprendrezlesbasesavec

eux,etpuisd’iciàquelquesmois,vousferezvospropresconcerts.–Mesconcerts?

–Biensûr,vousêtesunesoliste.Jecroisquejeconnaisunbonagentpourvousaccompagner.

Maisonfrôleledélire,là!Paulveutgérermacarrière?

–Jecroisquej’ailetempsdepenseràtoutça,Paul.–JecroisenvousÉléa,mamèreetmoi…–Votremère?J’endoute…–Ohnon,necroyezpasça!Soussesairsrevêches,elleapprécievotretalent.

Maiscommentjevaismesortirdelà?IlesthorsdequestionquePauls’occupedemoi!Onestdanslaquatrièmedimension,cen’estpaspossible!

J’observePaul,plongédanssacarte.Sonsourirene lequittepas, ilneseposeaucunequestion,comme si tout était déjà évident pour lui. S’il s’imagine que je suis unobjet ! Il relève la tête.Ceregardqu’ilposesurmoimedonnelanausée!Soudain,sesyeuxseportentplusloinderrièremoi.Ilselève.

–Emy!Quefais-tulà?!–Oh!Paul,commentvas-tu?

Jen’en crois pasmesyeux. Je rêve.La femmequi se tient devantmoin’est autre que celle quiaccompagne toujoursAdam. Je la revoisdeboutprèsd'Adamà la soiréedesLorrighton,puis à lasoiréecaritative.Pasdedoute,c'estbienelle!Jenemelèvepas,cen’estdetoutefaçonpaslapeine,j’ail’impressiond’êtreinvisible.Ellenedaignemêmepasm’accorderunregard.

–C’estplutôtàmoidetedemanderça.–Trèsnauséeusecesdernierstemps,maisc’estplutôtnormalvumonétat.

CetteEmyposesesmainssursonventre…

–TuenasparléàAdam?

ParleràAdam,dequoi?Messenssontenalerte.

–Non,pasencore.Maisjelevoiscesoir,jeluiannoncerailagrandenouvelle.

Lanouvelle?EllevoitAdamcesoir?Maisilsepassequoi,là?

–JetelaissePaul,monrendez-vousm’attend.Embrassetamère.

Emys'éloignesansunregardniunsourirepourmoi,jen'existepas.Paulserassoitetmeregarde.Jenesaispass’iljouelacomédie,maissonvisagesedécomposesoudain.

–OhÉléa,jesuisdésoléequevousl’appreniezcommeça!

Quej’apprennequoi!Cettefemmeseraitenceinted’Adam?!

Jesuissouslechoc.Laterres'ouvreànouveau,maisellem'engloutitcomplètementcettefois.

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