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IUFM DE BOURGOGNE Professeur des écoles EDUCATION PHYSIQUE ET SPORTIVE ET MAITRISE DU LANGAGE ET DE LA LANGUE FRANCAISE GARNIER Fabrice DIRECTEUR DE MEMOIRE : M. PETIT ANNEE : 2007 Numéro de dossier : 0500782D

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IUFM DE BOURGOGNE

Professeur des écoles

EDUCATION PHYSIQUE ET SPORTIVE ET MAITRISE DU LANGAGE

ET DE LA LANGUE FRANCAISE

GARNIER Fabrice

DIRECTEUR DE MEMOIRE : M. PETIT ANNEE : 2007 Numéro de dossier : 0500782D

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SOMMAIRE Introduction……………………………………………………………………..3 I - Quelques apports théoriques........................................................................... 5

1 ) Qu’est-ce que le langage ? ................................................................................................ 5 a. Quelques aspects historiques...................................................................................... 5 b. Le langage au cœur des apprentissages...................................................................... 6 c. Distinction entre langue et langage ............................................................................ 7 d. Les différents types de langage .................................................................................. 7 e. Le langage, instrument de la pensée........................................................................... 8 f. Priorité du « parler – lire – écrire » ............................................................................ 8

2 ) L’E.P.S.............................................................................................................................. 9

a. Les objectifs de l’enseignement de l’E.P.S. ............................................................... 9 b. Les finalités de l’E.P.S. .............................................................................................. 9 c. Les compétences développées en E.P.S. .................................................................... 9 d. Les différentes ressources en E.P.S............................................................................ 9 e. Les étapes de l’apprentissage moteur chez FITTS..................................................... 9

3 ) Interaction entre l’E.P.S. et la maîtrise du langage et de la langue française ................ 10

a. Le langage est également au cœur des apprentissages en E.P.S .............................. 10 b. Les programmes de l’éducation nationale................................................................ 10 c. Le bulletin officiel du 14 février 2002 ..................................................................... 11 d. Les documents d’application.................................................................................... 11 e. Que pensent les auteurs qui ont écrit sur le sujet ?................................................... 12

II - Mise en œuvre d’une unité d’apprentissage de jeu collectif ......................13

1 ) Présentation du projet ..................................................................................................... 13

2 ) Synopsis .......................................................................................................................... 14

3 ) Une entrée dans l’activité : « les gendarmes et les voleurs ».......................................... 15

4 ) Une situation d’apprentissage : « le drapeau » ............................................................... 16 a. Introduction du jeu par la lecture de la règle............................................................ 16 b. Explicitation des règles à l’oral ................................................................................ 16 c. 1ère séance d’E.P.S.................................................................................................... 17 d. Présentation du préfixe « dé ».................................................................................. 17 e. Utilisation du tableau à double entrée ...................................................................... 17 f. Apprendre à remplir une fiche d’observation .......................................................... 18 g. 2ème séance d’E.P.S................................................................................................... 18 h. A l’oral, élaboration de stratégies pour construire progressivement des règles d’action............................................................................................................................. 19 i. 3ème séance d’E.P.S................................................................................................... 19 j. 4ème séance d’E.P.S................................................................................................... 20 k. Production d’écrit à propos des stratégies pour gagner............................................ 20

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III - Les constats et conclusions de cette pratique professionnelle..................21

1 ) Les compétences en maîtrise de la langue utilisées en Education Physique et Sportive lors de ma pratique professionnelle...................................................................................... 21

a. Dire........................................................................................................................... 21 b. Lire ........................................................................................................................... 22 c. Ecrire ........................................................................................................................ 22

2 ) Les apports de la maîtrise du langage et de la langue française en Education Physique et Sportive ................................................................................................................................ 22

Conclusion……………………………………………………………………..24 Bibliographie………………………………………………………………..…25 Annexes……………………………………...…………………………………26

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Introduction Lors de mon stage filé, dans une classe de CE1-CE2 au Creusot, je devais intégrer l’Education Physique et Sportive à mon emploi du temps. Dès septembre, j’ai ressenti une réelle motivation de la part des élèves de pratiquer. Paradoxalement, j’ai pu constater qu’il n’y avait que très peu de jeux collectifs qui s’organisaient dans la cour d’école, lors des récréations. Pour cette raison, je me suis intéressé à ce sujet. De plus, l’Education Physique et Sportive est porteuse de certaines valeurs qui me sont chères. Ainsi, les activités physiques et sportives intenses permettent de développer la volonté, le goût de l’effort nécessaire pour réussir à l’école mais également sa vie dans une société où rien est acquis. Il est nécessaire de savoir pour agir et bien réussir ce que l’on entreprend. C’est ce qu’on appelle l’intelligence motrice c’est-à-dire une des finalités de l’E.P.S. Celle-ci est bien entendu perceptive et évaluée durant les cours mais est-ce vraiment le plus important ? A mon sens, si cette discipline occupe une place de plus en plus grande dans les programmes scolaires, c’est que sa pratique sort du champ scolaire et s’élargit à la vie de tous les jours. Par exemple, au niveau de la sécurité routière, un enfant qui aura à traverser un passage piéton en ville aura à intégrer et traiter dans un temps très court un volume d’informations. On retrouve cette prise d’informations notamment dans un jeu comme « la rivière au crocodile » au moment où il faut prendre le risque de traverser la rivière sans se faire toucher. Par ailleurs, je devais également enseigner l’orthographe à la classe, discipline essentiellement basée sur la révision de sons (en début d’année). Généralement, la consigne est de retrouver un son dans un texte, de le travailler : recherche de mots contenant le son, observation des différentes manières de l’écrire, structuration du savoir pour terminer sur une dictée. Ce type d’exercices peut être rébarbatif pour certains au niveau de la méthode et je voulais montrer qu’il y avait une autre façon d’enseigner le français. De plus, j’ai constaté qu’un certain nombre d’élèves rencontraient des difficultés à entrer dans des activités de français en tant que langue écrite et de ce fait, n’étaient pas intéressés. Je me suis alors posé la question : Comment leur donner l’envie de progresser dans cette discipline et quels sont les efforts qu’ils devront fournir ? J’ai donc pensé que l’Education Physique et Sportive pour laquelle ils étaient motivés pouvait servir de support. Je me suis donc interrogé : Dans quelle mesure l’Education Physique et Sportive peut-elle permettre le développement de la maîtrise du langage et de la langue française? Et inversement, que peut apporter la maîtrise du langage et de la langue française au niveau de l’Education Physique et Sportive ?

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Sous forme schématique, nous pouvons résumer la problématique de ce mémoire de la façon suivante :

Tout d’abord, nous réfléchirons sur les données théoriques concernant la langue, le langage et l’E.P.S. et nous étudierons les liens qui les unissent à travers différents auteurs (de Saussure, Chomsky, Bruner, Piaget, Michaud, Fitts, …) et programmes officiels (les programmes de l’école primaire de 2002, les documents d’application, le bulletin officiel du 14 février 2002). Ensuite, nous présenterons les différentes situations vécues par les élèves dans une unité d’apprentissage d’un jeu collectif : « le drapeau ». Enfin, nous terminerons par les constats et conclusions de ma pratique professionnelle au niveau : - d’une part, des apports de la maîtrise du langage et de la langue française à l’E.P.S. - d’autre part, des compétences qui sont développées en maîtrise du langage et de la langue française lors de séances d’E.P.S.

EDUCATION PHYSIQUE ET

SPORTIVE

MAÎTRISE DU LANGAGE ET DE LA LANGUE FRANCAISE

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I - Quelques apports théoriques

1 ) Qu’est-ce que le langage ?

a. Quelques aspects historiques Objet complexe, le langage peut être abordé « comme faculté humaine, comme phénomène social, comme mode d’inscription des textes ou comme matière à applications techniques ». Il est donc l’objet d’étude pour de nombreuses disciplines. D’ailleurs, la linguistique est la science qui a pour objet l’étude du langage et des langues. C’est Ferdinand de SAUSSURE qui a fondé la linguistique moderne en définissant son objet : la langue qu’il oppose à la parole. Pour lui, la langue est une construction intellectuelle. Dans les années 60, Noam CHOMSKY (Américain, professeur de linguistique) avec « la grammaire universelle » défend l’idée d’un « organe de langage » composé de connaissances linguistiques innées. Cet organe permettrait de comprendre des règles fondamentales de la langue maternelle. Il explique cette conception de l’inné par l’existence de zones cérébrales destinées au langage. Jérôme BRUNER (professeur de psychologie), en 1987, défend l’idée selon laquelle un enfant développe simultanément des compétences dans les domaines de la syntaxe, de la sémantique et de la pragmatique. Une étude de Mac WHINNEY et SNOW en 1991 montre une relation entre le milieu socioculturel d’un enfant et le nombre de mots qu’il emploie : plus le milieu socioculturel est élevé, plus ce nombre de mots est important. Ceci démontre la fausseté de la conception innéiste de CHOMSKY. Pour Jean PIAGET, il ne va pas de soi que l’enfant parle pour communiquer sa pensée, au contraire de l’adulte. Pour le montrer, il utilise une méthode nouvelle pour l’époque : il enregistre l’intégralité des propos tenus par deux enfants de six ans durant un mois à certains moments de la journée. PIAGET propose de classer les propos tenus en deux grands groupes qu’il appelle : le langage égocentrique et le langage socialisé. Le langage égocentrique rassemble les propos tenus par l’enfant lorsqu’il ne s’occupe pas de savoir à qui il parle et s’il est écouté. PIAGET y regroupe la répétition, le monologue (l’enfant est en quelque sorte obligé de parler en agissant, comme pour accompagner et commenter son action), le monologue collectif (conduite extrêmement fréquente et aisément observable en maternelle : chaque enfant parle, mais pour lui, sans s’adresser aux autres et sans attendre de réponse). Les propos sont ici des commentaires de l’action engendrée par la présence des autres. Le langage socialisé est l’inverse du langage égocentrique. PIAGET distingue l’information adaptée (l’enfant parvient à se faire entendre de l’interlocuteur qui lui répond, il se place donc à son point de vue), la critique et la moquerie, les ordres, les questions et les réponses, les menaces, les prières. Ce qui est intéressant de remarquer, c’est la fréquence de langage égocentrique par rapport au langage spontané. Il représente de 47 à 43 % pour chacun des enfants observés. Le langage égocentrique constitue donc la moitié du langage spontané des enfants de six ans.

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Ces nombres sont surprenants dans la mesure où les enfants semblent davantage parler que les adultes de ce qu’ils font lorsqu’ils travaillent ou jouent ensemble. Cependant, si l’adulte parle moins, c’est que sa pensée est plus intime. A l’inverse, l’enfant ne connaît pas d’intimité de la pensée. La parole n’a pas pour fonction de socialiser la pensée, mais plutôt d’accompagner l’action. L’enfant, bien que parlant à ses voisins, ne se place pas de leur point de vue. Il ne fait que monologuer collectivement. En résumé, nous pouvons dire que l’adulte pense socialement même lorsqu’il est solitaire et que l’enfant en dessous de sept ans pense et parle de manière égocentrique même lorsqu’il est en société. PIAGET propose deux raisons à ce constat. La première, discutable aujourd’hui, est qu’il n’y a pas de vie sociale durable entre enfants en dessous de sept ans. La seconde, plus sérieuse, est que le langage employé dans l’activité fondamentale de l’enfant qui est le jeu est un langage essentiellement non verbal qui passe par des gestes, les mimiques et mouvements. Vers sept – huit ans, lorsque apparaît la collaboration dans le travail, le langage égocentrique diminue. PIAGET prend l’exemple d’un phénomène observable lorsqu’un enfant raconte ou explique quelque chose à un camarade. La technique consiste à demander à l’enfant d’expliquer le fonctionnement d’un dispositif (à partir d’un dessin) à un camarade. Il apparaît que les enfants ne se comprennent pas mieux entre eux qu’ils ne comprennent les adultes. Les paroles prononcées ne sont pas conçues du point de vue de l’interlocuteur, et celui-ci les déforme en fonction de ses conceptions antérieures. De fait, selon PIAGET, les enfants croient comprendre et se croient compris. En effet, les demandes d’informations ou les protestations d’incompréhension du récepteur sont extrêmement rares. Ainsi, si les enfants se comprennent mal entre eux, c’est qu’ils croient se comprendre. Ceci proviendrait de ce que les enfants vivent entourés d’adultes qui savent plus de choses qu’eux et qui sur-interprètent en permanence les messages des enfants afin de rendre la communication possible.

b. Le langage au cœur des apprentissages Les programmes de 2002 de l’école primaire, qui ont fait l’objet d’une concertation longue et complexe entre les enseignants et le ministère de l’éducation nationale, apportent des changements notables dans la discipline « français ». Le changement le plus remarquable, pour l’enseignement élémentaire, est sans doute la disparition d’une organisation traditionnelle des enseignements en disciplines (telles que français, mathématiques, sciences et technologie, histoire et géographie, éducation civique, éducation artistique,éducation physique et sportive) au profit d’une organisation en domaines d’activités, jusque-là réservée à l’école maternelle. Désormais, le rôle occupé par le langage est nettement plus important. Il suffit de citer le Bulletin Officiel du 14 février 2002 pour comprendre toute l’importance du langage à l’école : « Dans l’appropriation active du langage oral se développent des compétences décisives pour tous les apprentissages : comprendre la parole de l’autre et se faire comprendre, se construire et se protéger, agir dans le monde physique et humain, explorer les univers imaginaires…en s’ouvrant ainsi aux usages et fonctions du langage, l’enfant acquiert une langue, le français, qui lui permet non seulement de communiquer avec ceux qui l’entourent, mais aussi d’accéder à la culture dont la langue nationale est le vecteur, une langue qui lui permet d’apprendre et de comprendre le monde dans lequel il vit ».

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Il est alors logique de retrouver le langage comme le premier domaine d’activités de l’école maternelle. Au cycle des apprentissages fondamentaux, « la maîtrise du langage et de la langue française » constitue également un grand domaine qui met en valeur la maîtrise du langage oral avant l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. Au cycle des approfondissements, « la maîtrise du langage et de la langue » devient un domaine transversal qui a un volume horaire quantifié soit 13 heures réparties dans tous les champs disciplinaires, dont une part importante concerne le langage oral. On en conclut que le langage s’apprend dans les trois cycles. Même si certaines capacités naturelles rendent l’enfant particulièrement « apte à recevoir l’héritage du langage », un simple contact avec des locuteurs de sa langue n’est pas suffisant. Il a absolument besoin du support et de l’aide de l’adulte pour apprendre le langage.

c. Distinction entre langue et langage La langue et le langage sont des mots de sens assez proche, mais il convient de les distinguer. La définition de « langage » donnée par le Grand Larousse de la langue française est la suivante : « Faculté propre à l’homme d’exprimer et de communiquer sa pensée au moyen d’un système de signes vocaux ou graphiques ». Ainsi défini, le langage comme activité d’expression et de communication en lien avec la pensée se distingue du moyen dont il se sert, la langue.

d. Les différents types de langage De plus, parce qu’il utilise aussi bien « le système de signes graphiques » que celui « de signes vocaux », le langage ne se réduit pas au langage oral et inclut le langage écrit. Le langage peut prendre quatre formes : - Le langage de communication : Avant d’entrer à l’école, l’enfant possède un bagage langagier issu de son milieu familial. L’école maternelle provoque des bouleversements importants avec l’apparition de nouveaux et nombreux interlocuteurs et la confrontation à des situations d’interaction plus complexes. Il importe donc que l’enfant comprenne bien ce qui se passe autour de lui et se fasse comprendre grâce à l’établissement d’une bonne communication avec ses pairs et avec les adultes. Ces compétences de communication constituent une sorte de cadre dans lequel toute la pédagogie du langage peut se déployer. - Le langage en situation : Il est lié à l’expérience immédiate, c’est-à-dire « directement articulé avec l’action ou l’événement en cours ». Il s’appuie donc sur des situations qui ont du sens pour l’enfant et pour lesquelles il est l’un des protagonistes. Pour développer ces compétences, l’enseignant peut inciter les élèves à verbaliser l’action en cours. - Le langage d’évocation : Il devient possible à partir de l’âge de trois ans et permet à l’enfant « d’évoquer des situations ou des événements qu’il n’est pas en train de vivre » comme le rappel d’un événement passé ou l’évocation d’une situation à venir. Mais ce nouveau langage est plus exigeant, plus difficile. Il requiert un lexique plus précis et une syntaxe nouvelle parce que les énoncés deviennent plus longs et plus articulés entre eux. L’adulte a donc un rôle important à jouer pour aider l’enfant à construire des formulations adaptées.

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- Le langage écrit : Le langage oral permet l’accès au langage de l’écrit notamment par le truchement du langage d’évocation qui installe le locuteur dans l’énonciation du récit et qui s’appuie sur des supports de la culture écrite. C’est aussi par la médiation de la parole que les élèves vont aborder la culture de l’écrit et tous ses codes. En retour, le contact avec l’écrit va modifier les rapports de l’élève au langage ; il va lui rendre plus concret les phénomènes liés à la production langagière.

e. Le langage, instrument de la pensée Le langage n’est pas seulement cet outil au service de la communication et de l’échange, c’est aussi un outil pour penser, personnel, intime, toujours en action même quand il n’y a pas la parole. Cet outil est tellement essentiel qu’on ne peut pas séparer le développement de la pensée du développement du langage. Aussi, à l’école, il serait abusif de restreindre le langage dans des situations où il ne servirait qu’à accompagner et verbaliser l’action en train de se faire. Au contraire, il est utile et nécessaire d’employer le langage lorsque l’action n’est pas prégnante et où il n’est pas lui-même outil de l’action, par exemple : pour formuler des hypothèses, pour anticiper une action, pour envisager des conséquences, pour élaborer un projet. Au cours de ces activités, des modes de pensée s’échangent et se modélisent pour s’intérioriser : l’enfant peut être amené à déduire quelque chose d’une observation, produire une hypothèse, comparer, … Le langage va permettre à l’enfant de devenir capable d’explorer le réel par le pouvoir des mots qui nomment, qui classent, qui catégorisent. C’est grâce au langage notamment que l’enfant va pouvoir produire des récits, c’est-à-dire transformer des faits réels en événements transmissibles.

f. Priorité du « parler – lire – écrire » La place des mots dans la formulation des objectifs a toute son importance. Mettre en premier la notion de langage, avant la notion de langue, même au cycle 3, par la reconnaissance d’un domaine transversal prioritaire : « maîtrise du langage et de la langue française », montre clairement la priorité du langage, c’est-à-dire de la pratique de la langue, de l’activité langagière des élèves qui parlent, lisent, écrivent. Les raisons de cette priorité finalement accordée au langage sont multiples : Les textes officiels et les textes théoriques de référence insistent sur le rôle du sujet apprenant. On sait maintenant que, sans son adhésion à la tâche proposée, sans son activité mentale, la construction des connaissances est compromise voire impossible. C’est pourquoi son expérience, ses conceptions initiales, ses représentations deviennent primordiales et ne peuvent pas être ignorées. Or en ce qui concerne plus précisément son rapport au langage et à la langue, l’expérience première de l’enfant est bien celle du langage. En effet, dès son plus jeune âge, l’enfant est baigné dans l’univers de la communication et de la parole par les voix de sa famille. Poser le langage avant la langue, c’est peut-être tout simplement reconnaître la réalité du développement de l’être humain. Et ce qui semble évident pour le langage oral l’est aussi pour le langage écrit. Lire ne consiste pas en recevoir passivement un texte mais à en construire le sens avec son expérience de la vie, des textes, de la culture et de la langue. La lecture, c’est une interaction dans laquelle un auteur veut dire quelque chose à un lecteur. Le texte est un message qui utilise un code qu’il faut apprendre à maîtriser. En classe, il est nécessaire d’aller du message vers le code plutôt que l’inverse afin de préserver la nécessité du sens.

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De même, écrire ce n’est pas simplement appliquer des savoirs et des règles, mais c’est produire du langage et du sens dans un processus de communication dans lequel l’élève n’est pas simple scripteur mais sujet écrivain ayant à gérer un rapport cognitif mais aussi personnel à la lecture et à la langue. L’apparition du champ disciplinaire « littérature (dire, lire, écrire) » au cycle 3 vient confirmer cette focalisation sur les pratiques langagières de l’élève : lecture de dix œuvres minimum, débat d’une demi-heure par semaine, importance de l’interprétation, …

2 ) L’E.P.S.

a. Les objectifs de l’enseignement de l’E.P.S. Les objectifs visés sont les mêmes pour les trois cycles, à savoir : - favoriser la construction des actions motrices fondamentales (locomotion, équilibres, manipulations, projections et réceptions d’objets) - permettre une première prise de contact avec les diverses activités physiques (pratiques sociales de référence) - faire acquérir les compétences et connaissances utiles pour mieux connaître son corps, le respecter et le garder en bonne santé.

b. Les finalités de l’E.P.S. Les finalités de l’Education Physique et Sportive sont en adéquation avec celles de l’Education Nationale, c’est-à-dire l’éducation à la santé, à la sécurité, à l’autonomie, à la responsabilité. En bref, l’E.P.S. fait partie intégrante de la formation du citoyen.

c. Les compétences développées en E.P.S. L’E.P.S. fait acquérir aux élèves des compétences spécifiques (réaliser une performance mesurée, adapter ses déplacements à différents types d’environnement, s’affronter individuellement ou collectivement, concevoir et réaliser des actions à visée artistique, esthétique ou expressive) ainsi que des compétences transversales (s’engager lucidement dans l’action, construire un projet d’action, mesurer et apprécier les effets de l’activité, appliquer des règles de vie collective).

d. Les différentes ressources en E.P.S. L’E.P.S. demande des qualités diverses. Il faut évidemment des qualités physiques, mais également cognitives, socio affectives, … Selon les caractéristiques des activités physiques et sportives, les unes et les autres sont plus ou moins sollicitées. Par exemple, la stratégie, qui m’intéresse particulièrement dans ce mémoire, fait appel aux ressources cognitives et la motivation met en jeu des ressources affectives. Une stratégie se caractérise par un but à atteindre, des contraintes et des moyens à disposition. De plus, j’ai pu remarquer que les résultats sportifs sont souvent liés aux résultats scolaires. Pour les jeux collectifs, ce n’est pas forcément celui qui court le plus vite qui réussit le mieux.

e. Les étapes de l’apprentissage moteur chez FITTS Il distingue trois stades : - le stade cognitif : L’apprenant doit comprendre ce qu’il faut qu’il fasse, le but à atteindre, les

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moyens à mettre en œuvre. L’élève a donc recours à une activité cognitive intense. Il va utiliser plusieurs solutions. La performance va donc être très souvent inconstante, accompagnée de commentaires verbaux. Cette verbalisation est souvent une aide à la « conceptualisation » de la stratégie de réussite de l’action. - le stade associatif : L’apprenant a choisi la meilleure stratégie et commence à effectuer des ajustements plus fins, entraînant une performance supérieure. L’aide verbale s’estompe au profit d’autres informations rétroactives. Le comportement conscient du début devient petit à petit automatique et commence à s’adapter aux diverses situations rencontrées. - le stade autonome : L’habileté s’est automatisée, ce qui implique une réduction de l’attention requise. Cette attention peut donc se tourner vers d’autres tâches et / ou sur l’élaboration de stratégies de réponses plus fines.

3 ) Interaction entre l’E.P.S. et la maîtrise du langage et de la langue française Après avoir présenté le cadre général, je serai plus précis en m’intéressant aux relations entre l'éducation physique et sportive et la maîtrise du langage et de la langue française.

a. Le langage est également au cœur des apprentissages en E.P.S Comme nous l’avons vu précédemment, le langage est au coeur des apprentissages. C’est évidemment le cas en Education Physique et Sportive. Le domaine agir et s'exprimer avec son corps est un domaine privilégié pour appréhender cette volonté de placer la maîtrise du langage et de la langue française au centre des apprentissages. Mais commençons par différencier ce qui est du domaine de la langue en tant qu'outil de ce qui est du domaine de la langue en tant qu'objet d'apprentissages. La langue outil concerne les compétences que l'élève utilise, réinvestit dans une séance d'éducation physique et sportive (temps de verbalisation, de synthèse pendant lesquelles il restitue, argumente, s'exprime, écoute, répond,…) La langue en tant qu'objet d'apprentissages concerne les compétences que l'élève va acquérir lors de séances ou d'ateliers décrochés de la séance d'E.P.S. (apprendre à restituer, à rappeler un évènement, à argumenter, ...) Mais attention, si le langage est au coeur des apprentissages, il ne doit pas remplacer l'action, l'expérimentation de l'élève. En E.P.S., le temps où l'élève est actif doit être plus important que le temps de verbalisation. Les activités de verbalisation, de lecture et d'écritures devront se dérouler pour leur plus grande part dans la classe, en amont et en aval des séances d'Education Physique et Sportive. En résumé, nous pouvons souligner qu’en E.P.S., l’action reste première.

b. Les programmes de l’éducation nationale En 2002, les nouveaux programmes ont tenu à mettre le langage au cœur des apprentissages et à revaloriser la place de l’E.P.S. à l’école. Ainsi, les trois axes « dire - lire – écrire » sont développés de la manière suivante : « Parler : - utiliser le lexique spécifique de l’Education Physique et Sportive dans les différentes situations didactiques mises en jeu, - participer à l’élaboration d’un projet d’activité, - expliciter les difficultés que l’on rencontre dans une activité.

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Lire : - lire une règle de jeu, une fiche technique et les mettre en œuvre, - trouver sur la toile des informations concernant les activités sportives de référence des activités pratiquées. Ecrire : - rédiger une fiche technique permettant de réaliser un jeu (matériel nécessaire, durée, lieu…), - noter les performances réalisées et les présenter de manière à réutiliser l’information dans les prochaines séances, - rendre compte d’un événement sportif auquel la classe a participé (dans le cadre de l’U.S.E.P. par exemple) ».

c. Le bulletin officiel du 14 février 2002 « L'action physique procure des sensations, des émotions diverses, intenses. Les exprimer verbalement, c’est pouvoir mettre des mots sur ces émotions ressenties, échanger des impressions, mieux comprendre ce qui a été vécu et ce qu'il faut faire. Il faut donc offrir aux enfants l'occasion de parler de leur activité : dire ce qu'on a envie de faire, nommer les actions, se situer dans l'espace et le temps, formuler une question, exprimer ses émotions, communiquer avec les autres pour élaborer un jeu, donner son avis. Le dessin peut être un relais important dans la mesure où il permet d'identifier et d'ordonner des gestes, des événements dans le cours continu de l'action. Il est important de préciser que ces moments de verbalisation éventuellement reliés par un écrit de l'adulte doivent se dérouler pour leur plus grande part dans la classe, en amont et en aval de la séance d'activités physiques dont l'objectif premier est resté l'action motrice. La maîtrise du langage et de la langue française est, en effet, inséparable de l'acquisition des multiples facettes d'une culture : littéraire, historique et géographique, scientifique et technique, corporelle, artistique. Il n'y a pas opposition entre les objectifs fondamentaux de l'école (parler, lire, écrire, compter) et des savoirs solides et différenciés. C'est dans une même dynamique qu'ils se construisent et se consolident réciproquement ». Il est également intéressant que les élèves découvrent d’autres activités physiques et sportives pratiquées dans des pays étrangers. Un jeu extrêmement répandu au Canada, le Kinball, se développe en France et notamment à l’école. Notre formation à l’I.U.F.M. nous a d’ailleurs permis de le connaître. « Par les situations riches en sensations et émotions qu'elle fait vivre, l'éducation physique et sportive est un support privilégié pour permettre aux élèves de parler de leurs pratiques (nommer, exprimer, communiquer…). En outre, l'intérêt des enfants de cette tranche d'âge pour l'activité physique est une source de motivation supplémentaire pour donner envie de lire et écrire des textes divers (fiche, règles de jeu, récit…) ».

d. Les documents d’application « Si l’éducation physique et sportive vise en priorité l’aspect moteur du développement des élèves de l’école primaire, l’un de ses objectifs est aussi, à côté des autres disciplines, de contribuer au développement des compétences dans le domaine de la langue orale et écrite. C'est particulièrement important au cycle des apprentissages où se construisent les éléments fondamentaux de la lecture et de l'écriture. Cette contribution de l'Education Physique et Sportive présente un aspect particulier : la pratique physique, avec ses sensations, ses émotions de natures diverses, et souvent profondes, est un support d'expression extrêmement intéressant pour les élèves. En effet, dire,

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écrire, voire dessiner, permet souvent de prendre de la distance avec l’émotion ressentie, mais aussi de mieux comprendre les raisons de la réussite ou de l'échec de ses actions, qu'elles soient individuelles ou collectives. En éducation physique et sportive, la lecture est souvent une activité de « recherche d'une information », que ce soit pour aller chercher dans une fiche un complément à des consignes données oralement, on pourra rechercher des éléments de connaissance ». Les documents d’application présentent quelques exemples de situation concrète : « Parler : dire ce qu'on sait sur une activité, nommer les actions à réaliser, exprimer ce qu'on a ressenti, se poser des questions sur les façons de s'y prendre, communiquer avec les autres pour élaborer un jeu, préparer un spectacle, donner son avis sur l'action d'un camarade, arbitrer un jeu de lutte ou un jeu collectif, ... Lire : des fiches descriptives d'une situation d'apprentissage, des histoires (récit mettant en scène des enfants autour de pratique physique ou sportive, récit d'aventure, compte relatant des exploits,…) Ecrire : remplir une fiche d'observation, décrire des actions à faire (fiche individuelle, affiche, ...), raconter son vécu dans un court texte, écrire les règles d'un jeu,… Il est important de préciser que ces activités de verbalisation, de lecture et d'écriture doivent se dérouler pour leur plus grande part dans la classe, en amont et en aval des séances d'éducation physique et sportive. En effet, il s'agit de garder à l'éducation physique et sportive son objectif central, à savoir l'apprentissage d'actions motrices, et de ne pas la réduire à un simple prétexte, même si des moments d'expression orale peuvent trouver leur place au cours de ces séances ». Les compétences à développer sont les suivantes : « - Se conduire dans le groupe en fonction de règles, que l'on connaît, que l'on comprend et que l'on respecte et que l'on fait respecter. - Coopérer, adapter les attitudes d'écoute, d'aide, de tolérance et de respect des autres pour agir ensemble pour élaborer en commun des projets. - Connaître et assurer plusieurs rôles dans les différentes activités ». Nous pouvons noter des exemples de mise en oeuvre dans les activités suivantes : � Au niveau des règles de jeu : « - L'adversaire doit toujours être respecté (pas de paroles ou d'actes agressifs) ». � Au niveau des règles de vie collective : « - Tout le monde a le droit d'exprimer ses idées ou de proposer des solutions … - Règles simples de sécurité (y compris la sécurité routière, dans des activités de pilotage, par exemple), de respect de l'environnement, d'hygiène, de prise en compte de sa santé et de celle des autres… » Les projets communs peuvent amener des enfants à s’aider mutuellement, par exemple : « - aider un camarade à réaliser son projet personnel en lui donnant des idées, des conseils se mettre à plusieurs pour aider un autre enfant à réaliser une action difficile - encourager verbalement ses partenaires … et ses adversaires ! »

e. Que pensent les auteurs qui ont écrit sur le sujet ? Roland MICHAUD a beaucoup écrit sur l’importance et la pertinence des relations entre l’E.P.S. et la maîtrise du langage et de la langue française. Selon lui, « les activités corporelles constituent un support signifiant pour motiver l’élève à s’exprimer, à communiquer sur ses conduites motrices (performances, résultats, sensations). Cette interaction continuelle entre

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activité motrice et activité langagière à propos de son vécu est source de progrès pour l’élève tant sur le plan de la clarté de l’expression que sur celui de l’efficacité des conduites motrices ». Cette citation nous montre que les élèves arrivent plus facilement à s’exprimer s’ils s’appuient sur des expériences vécues corporellement car ils ont une idée précise et concrète de ce qu’ils veulent dire à partir de ce qu’ils ont ressenti corporellement. Il ajoute : « Cette mise en relation entre le domaine de l’E.P.S. et celui de la maîtrise de la langue doit s’inscrire dans un cadre social qui permette aux élèves de comprendre et d’utiliser les règles et les codes pour vivre ensemble ». Ainsi, cet auteur met en évidence la relation nécessaire entre l’E.P.S., la maîtrise du langage et l’éducation civique (« vivre ensemble ») D’autres chercheurs en E.P.S. se sont interrogé sur les apprentissages moteurs liés aux activités physiques et sportives : Pour J-F. GREHAIGNE et M. CADOPI , « L’enjeu de la formation scolaire est pour les élèves d’apprendre à réfléchir, à élaborer consciemment des réponses aux problèmes qu’on leur pose, qu’elle que soit l’activité proposée ». « Le but de l’apprentissage est la constitution de savoirs et de pouvoirs moteurs dans lesquels la composante mentale – représentations, planifications et stratégies de l’action motrice – est essentielle. » M. REUCHLIN a essayé de définir l’apprentissage : « Il y a apprentissage lorsqu’un organisme, placé plusieurs fois dans la même situation, modifie sa conduite de façon systématique et relativement durable ». En accord avec ceci, E.I. FLEISHMAN approfondit : « L’apprentissage est le processus neurologique interne supposé intervenir chaque fois que se manifeste dans les performances un changement qui n’est dû ni à la croissance ni à la fatigue ». M. PIERON va même jusqu’à parler d’ « intelligence motrice ».

II - Mise en œuvre d’une unité d’apprentissage de jeu collectif

1 ) Présentation du projet Ce projet a été réalisé lors de mon stage filé à l’école Raymond Rochette au Creusot, le lundi, dans une classe à double niveau à cheval sur les cycles 2 et 3 durant les périodes 3 et 4. En effet, les élèves se répartissent de la façon suivante : 14 CE1 et 13 CE2. Les effectifs sont donc relativement chargés ce qui demande une organisation rigoureuse et un suivi individuel de manière à ce qu’aucun ne soit oublié et défavorisé par rapport aux autres. J’ai donc attribué à chacun un rôle bien précis de façon à ce qu’il se sente bien impliqué. Cette méthode a permis de canaliser une classe qui est relativement agitée. D’autre part, Le Creusot a une particularité concernant l’éducation physique et sportive : ce sont des intervenants extérieurs qui assurent les cours sur deux autres plages horaires dans la semaine (cyclisme, football, natation, …). Je voulais aussi montrer aux élèves que l’E.P.S. n’est pas une matière à part (« de loisirs ») mais qu’elle s’insère pleinement à d’autres contenus d’enseignement.

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2 ) Synopsis

E.P.S.

Maîtrise de la langue

Observation Réfléchie de la Langue

Entrée dans le jeu par lecture de la règle et compréhension

Le préfixe « dé »

Lecture d’un tableau à double entrée

Elaboration de stratégies à l’oral

Production d’un écrit sur les stratégies mises en place pour gagner

Le drapeau Séance 2

Situation d’apprentissage : Le drapeau Séance 1

Les gendarmes et les voleurs Séance 2

Entrée dans l’unité d’apprentissage : Les gendarmes et les voleurs Séance 1

Le drapeau Séance 3

Le drapeau Séance 4

Reformulation de la règle à l’oral

Comprendre une fiche d’observation

Evaluation

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3 ) Une entrée dans l’activité : « les gendarmes et les voleurs » Le drapeau est un jeu relativement complexe notamment au niveau des rôles de chaque élève, des stratégies, … Pour ces raisons, il est plus adapté à des élèves de cycle 3. Avec des élèves de CE1 et de CE2, il a donc fallu entrer dans ce module par un jeu plus simple. De plus, une séquence d’entrée dans l’activité est source de situations ouvertes, ludiques. Celle-ci permet d’engager l’enfant dans une approche globale de l’activité proposée et de découvrir un jeu collectif. J’ai donc décidé de commencer par le jeu des gendarmes et des voleurs qui était connu par la plupart des élèves. La règle a été rappelée collectivement avant l’activité et peut être résumée de la façon suivante : - deux équipes s’affrontent sur le terrain. - les voleurs et les gendarmes ont chacun leur camp. - les gendarmes doivent attraper les voleurs. - quand un voleur est attrapé, il est prisonnier dans le camp des gendarmes. - les voleurs peuvent faire une chaîne et sont délivrés si un autre voleur parvient à toucher la chaîne de prisonniers. - la partie se termine quand tous les voleurs sont prisonniers. - si les gendarmes n’arrivent pas à attraper tous les voleurs au bout de 10 minutes, la manche est terminée et on compte le nombre de voleurs prisonniers. Les élèves, pour la première séance, ont été répartis en trois équipes qui s’affrontaient à tour de rôle. Par exemple, l’équipe 1 devait être tout d’abord voleur puis gendarme contre l’équipe 2. Puis elle jouait contre l’équipe 3. Enfin, l’équipe 2 affrontait l’équipe 3. Les CE1 et les CE2 ont très rapidement compris les stratégies permettant de gagner. A la fin de la séance, chaque élève était capable de prendre des informations sur la position de ses partenaires et de ses adversaires, d’élaborer des stratégies individuelles ou collectives pour attraper un voleur ou pour ne pas se faire attraper par un gendarme. La séance suivante a été l’occasion d’adapter la règle et de la complexifier. En effet, un nouveau paramètre devait être pris en compte par les élèves : la prise d’objets dans l’aire de jeu. En effet, les voleurs avaient pour objectif de récupérer et rapporter dans leur camp des trésors dispersés sur le terrain tandis que les gendarmes devaient protéger ces trésors. La tâche des élèves a donc évolué et le rôle de chacun a changé Ainsi les gendarmes avaient à la première séance deux rôles, à savoir : - attraper les voleurs, - surveiller ceux qui étaient déjà prisonniers. A la deuxième séance, ils devaient en plus : - protéger les trésors De même, les rôles des voleurs étaient tout d’abord de : - esquiver les attaques des gendarmes, - délivrer leurs compères prisonniers. Puis : - rapporter les trésors dans leur camp. Grâce à cette entrée, j’ai pu tester, observer les rapports entre élèves, étudier le rôle de chacun. Mais cela a également permis de préparer l’introduction du jeu du drapeau. En effet, les élèves ne doivent plus récupérer plusieurs objets (les trésors) mais un seul (le drapeau).

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4 ) Une situation d’apprentissage : « le drapeau »

a. Introduction du jeu par la lecture de la règle Je me suis longuement interrogé sur la manière d’introduire le jeu du drapeau dans ma classe. En effet, je craignais, au vu de la complexité de ce jeu, un manque de compréhension des élèves et notamment des CE1. J’ai donc abordé ce jeu nouveau pour eux par la découverte de la règle. La règle de jeu adaptée du livre Vivre l’EPS a été distribuée individuellement face cachée. La consigne était : « Maintenant que vous avez tout compris au jeu « les gendarmes et les voleurs » et que vous êtes vraiment forts, on va en découvrir un autre ensemble. Mais ce nouveau jeu est compliqué donc on va faire un petit travail de Français sur les règles du jeu pour pouvoir y jouer dès cet après-midi. Au signal, vous allez retourner votre feuille et commencer de lire le texte dans votre tête. » Un groupe de quatre élèves de CE1 en difficulté au niveau de la lecture a été pris à part, au fond de la classe, pour une lecture collective avec le maître. Pour me permettre de voir si les règles étaient bien comprises, les élèves avaient à remplir un questionnaire. Pour les aider, un dessin leur était fourni. D’ailleurs, les premières questions portaient sur la compréhension de ce dessin. Les enfants devaient repérer l’équipe d’attaquants en les coloriant en bleu et l’équipe de défenseurs en les coloriant en vert. Le cavalier était quant à lui colorié en rouge afin d’être bien identifié par les élèves car il a un rôle très stratégique. Cette première prise de contact avec le jeu a été très bien vécue par les élèves et j’ai ressenti une réelle motivation de leur part pour apprendre les règles du jeu et par conséquent pour la lecture du texte et l’analyse du dessin. Je pense que le fait de jouer directement l’après-midi a renforcé leur volonté de comprendre la règle rapidement. On peut remarquer que les voleurs dans « les gendarmes et les voleurs » sont devenus défenseurs dans « le drapeau » tandis que les gendarmes sont appelés attaquants. Ceci a été réfléchi au préalable car je voulais marquer une coupure entre les deux jeux. De plus, je peux justifier ce choix par la volonté de ma part de faire apprendre un vocabulaire nouveau qui se rapproche de celui des jeux collectifs et qui s’éloigne de celui des jeux traditionnels.

b. Explicitation des règles à l’oral Dans le questionnaire, je demandais aux élèves quels mots de la règle ils n’avaient pas compris. Antonin, un élève de CE2, a répondu qu’il ne comprenait pas le mot « délimité » dans l’expression « le terrain est délimité par des plots ». Certains ont expliqué que cela signifiait : « ligne à ne pas dépasser ». D’autres ont décomposé le mot : dé / limité. Un autre a ajouté que « dé » exprimait le contraire. A ce moment, je suis intervenu et j’ai dit que l’on en discuterait plus tard dans une autre leçon. Un autre élève ne connaissait pas le sens du mot défenseur. De suite, un CE2 est intervenu : « comme défendre ». Ensemble, les élèves en ont conclu : « il faut que les défenseurs défendent, protègent le drapeau pour ne pas que les attaquants l’attrapent ». Ensuite, j’ai interrogé de nouveau les élèves sur une autre question du questionnaire qui était la suivante : « si on va au terrain cet après-midi, est-ce que vous pourrez jouer, est-ce que

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vous avez tout compris ?» En grande majorité, les élèves ont répondu par l’affirmative et cela s’est vérifié en fin de journée. Enfin, j’ai demandé de résumer les règles du jeu rapidement. Collectivement, on a abouti : « Il y a un drapeau. Les attaquants doivent le prendre sans se faire toucher. Le cavalier est intouchable. Les attaquants doivent amener le drapeau dans le camp. Le cavalier attaque les défenseurs. Quand on est touché, on est prisonnier et on se met sur le bord du terrain. » Là, un problème a été soulevé : avec des équipes de 7 à 10 joueurs, comment faire pour jouer ? Les propositions ont été diverses : « Y’en a qui joue pas », « 3 équipes de 7 et une de 6 », « on peut séparer le terrain », « 3 équipes de 9 ». Cette dernière solution a été retenue pour la première séance d’E.P.S.

c. 1ère séance d’E.P.S. Les élèves sont entrés dans le jeu sans réelle difficulté. J’ai juste remarqué à deux reprises qu’un défenseur s’est emparé du drapeau. Ces coéquipiers sont alors très vite intervenus pour lui expliquer : « tu ne dois pas prendre le drapeau ». Je n’ai pas observé de stratégies particulières. Tous les attaquants essayaient d’attraper le drapeau sans se soucier ni du rôle du cavalier, ni de celui des défenseurs.

d. Présentation du préfixe « dé » J’ai commencé cette leçon d’Observation Réfléchie de la Langue en dressant à la classe un bref résumé de la séance précédente. Ainsi, j’ai dit : « Antonin s’était demandé la semaine dernière ce que le mot délimité voulait dire. Un élève avait répondu : dans délimité, on a « dé » et « limité » et « dé », ça veut dire « le contraire de ». Sur votre ardoise, vous allez chercher des mots qui commencent par « dé ». » Une fois ce travail individuel effectué, nous avons mis en commun au tableau. Les mots sont alors répertoriés et classés en deux colonnes sans donner d’explication. Dans la première, les élèves ont proposé : « détruire, débattre, défenseur, démarrer, … » et dans la deuxième : « décontracter, déconcentrer, défaire, découdre, … » Par la suite, la consigne était : « Ensemble, on va essayer de voir pourquoi j’ai classé les mots en deux colonnes. » Très rapidement, les élèves ont vu que les mots de la deuxième colonne étaient décomposables : un verbe, qui utilisé seul, a un sens et le préfixe « dé ». Par un exemple, nous avons essayé de trouver la signification du préfixe. Les élèves ont déduit que « défaire », c’était le contraire de « faire », d’où « dé » exprime l’opposition. Je leur ai demandé alors s’il fallait placer « délimité » dans la première ou dans la deuxième colonne. La première réponse des élèves a été de le placer dans la colonne des mots composés du préfixe « dé ». En effet, à première vue, « limité », utilisé seul, a un sens. Cependant, je suis intervenu pour savoir si « délimité » était le contraire de « limité ». Les élèves m’ont dit que non donc que « délimité » se situait plutôt dans la première colonne. Après avoir vérifié la définition de « délimité » dans le dictionnaire, nous avons construit une fiche outil sur le préfixe « dé ».

e. Utilisation du tableau à double entrée Pour impliquer davantage les élèves dans l’activité, j’ai décidé d’organiser un championnat. Pour pouvoir conserver les résultats des matchs d’une séance à l’autre, j’ai employé un

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tableau à double entrée. Les élèves avaient déjà acquis, dans leur scolarité antérieure, le fonctionnement de ce type de tableau. Pourtant, ils n’imaginaient pas qu’il puisse être utile en Education Physique et Sportive. Un élève est venu au tableau et nous lui avons demandé de compléter le tableau en écrivant le résultat du match opposant l’équipe 1 à l’équipe 2, ceci dans le soucis de voir si tout était bien compris. Il n’y a pas eu de problème. Désormais, après chaque rencontre, l’arbitre viendra noter le résultat dans le tableau sur l’affiche. Le tableau à double entrée est présenté en annexe.

f. Apprendre à remplir une fiche d’observation « Le drapeau » est un jeu où s’opposent deux équipes composées de 7 à 10 joueurs. Tous les élèves de la classe ne pouvaient pas être en même temps en activité. Pour éviter le chahut sur le bord du terrain et pour que tous soient concernés, j’ai construit une fiche d’observation que je leur ai communiquée. Ainsi, il n’y a pas de temps mort durant la séance. Le problème auquel je me suis heurté pour l’élaboration de la fiche concerne les différents rôles occupés par les élèves pendant le jeu. En effet, au cours d’une partie, un joueur peut être tout d’abord attaquant ou cavalier puis défenseur. J’ai donc décidé de partager la feuille en trois parties correspondant à chacun des rôles. D’habitude, les élèves ne remplissent pas de fiches d’observation en Education Physique et Sportive. Celles-ci ont été introduites lors de la deuxième séance et les compléter à poser problème à beaucoup d’élèves. Mais, je dois dire que j’ai été surpris de la vitesse à laquelle ils ont réussi à s’approprier ce nouvel outil. En effet, lors de la deuxième séance, je devais passer vers chacun afin de vérifier que la grille était bien remplie et souvent, il manquait une manche ou deux. Au contraire à la quatrième séance, les observateurs se dirigeaient directement vers l’arbitre pour recueillir les informations sur le nombre de drapeaux rapportés et sur le temps de partie. J’ai même pu observer des observateurs questionner directement les joueurs observés pendant l’activité pour savoir s’ils avaient été touchés par exemple. Une fiche d’observation complétée par un élève est en annexe.

g. 2ème séance d’E.P.S. Cette séance a constitué les premiers matchs du championnat. Pour permettre à chaque joueur d’être observé, nous avons constitué quatre équipes. Ainsi, quand deux équipes s’affrontent, les deux qui ne jouent pas observent. J’ai assisté à des matchs où on commençait à voir apparaître inconsciemment les premières stratégies. Par exemple, les attaquants ne sortent que lorsque le cavalier est en place. Au niveau du vocabulaire employé, je n’ai rien relevé concernant les stratégies collectives. D’ailleurs, les élèves n’ont pas beaucoup communiqué. J’ai juste relevé des phrases courtes voire des phrases sans complément, sans sujet : « touché », « on y va », « c’est parti », « alors, vous sortez ». Par contre, quand le drapeau est rapporté, les élèves communiquent en criant. A l’occasion de cette séance, j’ai occupé les fonctions d’arbitre pour la dernière fois. Pour les prochaines séances, c’est un élève qui tiendra ce rôle. En effet, à la fin de cette séance, les élèves ont désormais tous bien intégré les règles et n’ont plus besoin d’un intervenant extérieur. Ils peuvent s’autogérer.

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h. A l’oral, élaboration de stratégies pour construire progressivement des règles d’action Avant d’engager la troisième séance d’E.P.S., j’ai tenu à ce que les stratégies émergent collectivement à l’oral. Pour mener cette activité, j’ai aménagé un dispositif particulier, à savoir : je circulais dans la classe avec un dictaphone et interviewais les élèves qui désiraient répondre à la question : « Quelles stratégies, quelles méthodes pourriez-vous utiliser pour gagner au jeu « du drapeau » ? » Chacun avait la possibilité de réagir aux affirmations de son camarade. Un mini-débat a ainsi pu s’organiser. Voici ce qui a été enregistré : Elève : « Courir pour attraper le drapeau. E : - Prendre le drapeau. Maître :- D’accord. Mais,ce n’est pas vraiment des stratégies. Une stratégie, c’est comme un plan, une manière de jouer. En fait, il faut que vous imaginiez un plan qui vous permettra de gagner tout à l’heure. E : - Courir en évitant les autres. M : - Oui. E : - Si le cavalier est avec nous, il touche tous les autres et on peut attraper le drapeau. M : - Tu peux répéter s’il te plaît. E : - Si le cavalier est avec une équipe, il touchera tous les autres et les autres, ils pourront ramasser tous les drapeaux. M : - Dans ta phrase, tu as utilisé deux fois les autres. J’aimerais que tu remplaces les autres par les termes défenseurs ou attaquants. E : - Si le cavalier est avec une équipe, il touchera les défenseurs et les attaquants, ils pourront ramasser le drapeau. M : - D’accord, très bien. E : - Le cavalier doit attraper tous les défenseurs pour qu’on aille attraper le drapeau. E : - On reste derrière le cavalier comme ça, après, le temps qu’on aille chercher le drapeau, il va toucher ceux qui sont devant nous, qui nous gênent. E : - J’attends que le cavalier touche quelqu’un, puis après j’en touche un autre. E : - Il faut rester derrière le cavalier pour attraper, pour prendre le drapeau. M : - Qui reste derrière le cavalier ? E : - Les attaquants. E : - Jouer en groupe pour pouvoir ramener plus facilement le drapeau. M : - Vous avez trouvé des stratégies intéressantes. Maintenant, nous allons aller sous le préau et voir si vous utilisez ces stratégies pour gagner ».

i. 3ème séance d’E.P.S. Le championnat s’est poursuivi et nous avons pu voir les premières stratégies se mettre réellement en place. Ceci s’est matérialisé par des paroles : « coince-la », « attrape-la », au cavalier : « protège-nous », « mets-toi devant nous ». Durant cette séance, j’ai particulièrement observé le comportement des élèves au cours du jeu car l’arbitrage et le chronométrage étaient confiés à un élève dispensé. Ainsi, j’ai pu percevoir des comportements typiques d’attaquants : - l’élève fuyard ou paralysé : il est assailli par les informations et n’arrive pas à les traiter. Il n’essaie pas de rapporter le drapeau. Le « paralysé » reste immobile, ne sachant que faire ni où aller. Le « fuyard » court dès qu’il est approché par un autre élève. C’est le plus faible niveau.

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- l’élève fonceur ou hésitant : il n’arrive pas à prendre en compte toutes les informations. Il a également des difficultés dans la prise de risques. Le « fonceur » n’évalue pas le danger et se fait toucher rapidement. L’ « hésitant » va avoir peur de s’engager. - l’élève opportuniste : il commence à traiter les informations, arrive à rapporter le drapeau mais sans réelles stratégies conscientes. - l’élève feinteur stratège : il est capable de traiter les informations, d’évaluer les risques, d’agir en fonction du placement des adversaires, de les feinter, d’élaborer des stratégies et de les utiliser dans le jeu. Il ramène fréquemment le drapeau et est rarement prisonnier. C’est le niveau le plus élevé. Par ailleurs, j’ai constaté que, sur deux séances, une fille de CE2 avait ramené cinq fois le drapeau. J’ai trouvé intéressant de l’interviewer avec le dispositif précédemment cité. Voici ce qu’elle m’a répondu : M : « Est-ce que tu peux expliquer comment tu as fait pour ramener cinq drapeaux ? E : - Parce que le cavalier nous protégeait. Il touchait les défenseurs pendant que moi, je prenais le drapeau. M : - Toutes les fois, tu as fait comme ça ? E : - Oui. Des fois, je faisais croire aux défenseurs que je partais d’un côté et puis j’allais de l’autre pour prendre le drapeau. M : - Et où était le cavalier ? E : - Devant moi. M : - Comment faisais-tu alors pour prendre le drapeau ? E : - Je contournais le cavalier ». A la suite, j’ai questionné l’arbitre qui m’avait fait remarquer une stratégie pendant l’activité : M : « Pierre-Louis, qui était arbitre tout à l’heure, m’a fait remarquer quelque chose concernant le cavalier. Peux-tu expliquer aux autres ? E : - Pour le cavalier, il faut quelqu’un qui court assez vite. M : - Pourquoi ? E : - Ben… Parce que sinon les défenseurs vont plus toucher les attaquants. M : - Refais la phrase mais sans commencer par « ben…» E : - Parce que sinon les défenseurs vont plus toucher les attaquants ».

j. 4ème séance d’E.P.S. Elle s’est déroulée dans le prolongement de la séance précédente. Celle-ci a été intéressante surtout du point de vue de la compétition. En effet, s’affrontaient les deux équipes qui avaient perdu leurs deux premiers matchs et surtout les deux équipes qui les avaient remportés. Il y a eu un véritable engagement de part et d’autre. Au niveau stratégique, outre le langage approprié et déjà relevé, j’ai observé de véritables comportements collectifs : des équipes entières d’attaquants se protégeaient derrière le cavalier ; certains attaquants commençaient à sortir une fois que le cavalier avait touché de nombreux défenseurs ; les défenseurs, par des leurres, essayaient d’attirer le cavalier afin de pouvoir toucher des attaquants. La totalité des élèves n’étaient plus « fuyards » ni « paralysés ». La grande majorité se situaient dans une des catégories suivantes : « fonceurs », « hésitants » voire « opportunistes ». Quelques-uns sont devenus des feinteurs stratèges.

k. Production d’écrit à propos des stratégies pour gagner La séquence s’est terminée par une production d’écrit. J’ai distribué à chaque élève une feuille vierge et j’ai demandé de m’écrire un texte de 10 lignes aux CE2 et de 5 lignes aux CE1 sur

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les stratégies permettant de gagner. Pour expliquer ce qu’ils avaient écrit, ils pouvaient faire un schéma. Lorsque j’ai analysé ces productions, je les ai classées en 2 paquets : d’un côté, les écrits qui réexpliquaient la règle (exemple : pour gagner, il faut attraper le drapeau sans se faire toucher) et de l’autre, des écrits plus intéressants d’où se dégageaient de véritables stratégies d’équipe. J’ai mis certains de ces textes en annexe. Ceux-ci pourront être retravaillés en Observation Réfléchie de la Langue car il s’agit de premiers jets.

III - Les constats et conclusions de cette pratique professionnelle

1 ) Les compétences en maîtrise de la langue utilisées en Education Physique et Sportive lors de ma pratique professionnelle De nombreuses compétences en maîtrise de la langue sont susceptibles d'être développées en Education Physique et Sportive lors des différentes activités qui ont pu être mises en oeuvre.

a. Dire Le langage de communication Il est traduit lorsque l'élève : - répond à mes sollicitations lors de la verbalisation, de l'analyse du jeu, - prend l’initiative d'un échange lors d'un jeu en équipe, lors de l'explication au groupe d'une règle. - participe à un échange collectif en acceptant d'écouter les autres lors de la phase de verbalisation, lors de la modification d'une règle d'un jeu, lors des rappels de début de séance, de bilans. Le langage en situation Pendant l'activité, l'élève est capable de : - comprendre les consignes ordinaires de la classe lors de la mise en place du terrain, de la préparation du matériel, de la répartition dans les équipes, - dire ce que l'on fait ou ce que fait un camarade pour décrire une action motrice (exemple : « je me protège derrière le cavalier »), - expliquer ces procédures de réussite dans le jeu, sur une action précise. Le langage d’évocation Le langage d’évocation n'a pas lieu directement pendant l'activité. Durant ce temps d'échanges, l'élève peut : - rappeler ce qui a été vécu en se faisant comprendre lors d'une rencontre sportive, d'une séance précédente (évocation lointaine) ou lors du retour en classe après la séance (évocation proche), - remémorer à la classe les règles d’action permettant la réussite.

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b. Lire Durant la mise en place de la situation d’apprentissage, nous pouvons dire que la lecture est nécessaire afin de : - comprendre une règle du jeu (annexe 1), - lire un dessin explicatif du jeu (annexe 1), - se repérer dans un tableau à double entrée pour noter les scores du championnat (annexe 8).

c. Ecrire L’écrit permet à l’élève de garder une trace et à l’enseignant de vérifier la compréhension des élèves. Ainsi, l’élève est en situation d’écriture pour : - compléter une fiche d’observation (annexe 3), - répondre à un questionnaire (annexe 2), - faire un schéma représentatif d’une situation concrète (annexes 4, 6 et 7), - produire un écrit d’une dizaine de lignes (annexes 4, 5, 6 et 7). Pour conclure ce chapitre, nous pouvons dire que le professeur des écoles doit varier ses situations pédagogiques de façon à ce que les élèves développent ces compétences et arrivent à améliorer les trois axes de la maîtrise de la langue : parler, lire et écrire.

2 ) Les apports de la maîtrise du langage et de la langue française en Education Physique et Sportive Lors de la phase orale, les élèves ont mis en avant les stratégies suivantes : � lorsque l’équipe attaque : - se placer derrière le cavalier afin d’être protégé, - effectuer des feintes afin de piéger les défenseurs, - le cavalier touche les défenseurs qui empêchent d’attraper le drapeau, - avant de sortir, les attaquants attendent que le cavalier touche tous les défenseurs, - choisir un cavalier qui court vite afin qu’il touche le plus grand nombre de défenseurs. � lorsque l’équipe défend : Aucune stratégie défensive n’a été communiquée par les élèves. Plusieurs raisons peuvent expliquer ceci : - pour gagner, ils ont privilégié le fait d’attraper le drapeau et donc d’être attaquants, - le fait de jouer en tant que défenseur est peut être moins intéressant pour eux du point de vue affectif. Les productions écrites ont révélé d’autres stratégies dont nous n’avions pas parlé à l’oral en groupe classe : - les défenseurs se dispersent afin que le cavalier ne sache plus où aller, ceci permettant aux défenseurs de toucher les attaquants, - le cavalier touche les défenseurs qui courent vite. L’émergence de nouvelles stratégies à l’écrit peut s’expliquer. En effet, le fait d’être seuls face à leur feuille permet à certains élèves qui n’osent pas prendre la parole en groupe de le faire. Mais, les élèves qui ont du mal avec l’écrit peuvent avoir des difficultés à débuter leur texte. Par ailleurs, j’ai constaté que l’arbitre (un élève dispensé), qui avait un regard extérieur sur l’activité, a mis en évidence des stratégies que les joueurs n’avaient pas repérées. Celui-ci,

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étant moins préoccupé par la victoire et occupant un poste permettant la vision de tout le terrain, a pu observer les comportements individuels et collectifs. Pour terminer, je dirais que les conduites motrices des élèves ont évolué du fait de leur compréhension des stratégies mises en évidence lors de l’oral et de l’écrit. La maîtrise du langage et de la langue française a permis à la motricité spontanée de devenir une motricité réfléchie grâce aux ressources cognitives. Et devinez qui a remporté le championnat ? C’est l’équipe comportant les joueurs qui ont perçu le plus rapidement les enjeux des diverses stratégies.

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Conclusion La réflexion menée dans ce mémoire m’a permis d’étudier l’interaction entre l’Education Physique et Sportive et la maîtrise du langage et de la langue française. J’ai pu constater que ces deux disciplines pouvaient être au service l’une de l’autre. Ainsi, l’E.P.S. permet de travailler les trois pôles de la maîtrise du langage et de la langue : dire (langage de situation, langage d’évocation, langage de communication), lire (une règle de jeu, un dessin explicatif, un tableau à double entrée), écrire (une fiche d’observation, un schéma, une production d’écrit, un questionnaire). De même, la maîtrise du langage et de la langue française permet l’émergence de stratégies pour construire progressivement des règles d’action. Dans un jeu collectif (« le drapeau »), elle a permis aux élèves de passer d’une motricité spontanée à une motricité réfléchie grâce aux ressources cognitives. Par ailleurs, j’ai constaté que l’enseignement transversal de la maîtrise du langage et de la langue française préconisé dans les Instructions Officielles est très pertinente parce qu’il permet d’améliorer les conduites motrices. Bien que nous puissions aborder la maîtrise du langage et de la langue française en E.P.S., il faut absolument garder à l’esprit la fonction première c’est-à-dire développer des compétences motrices. La principale difficulté pour la mise en œuvre de l’unité d’apprentissage fut le manque de temps. En effet, je ne voyais les élèves qu’un jour dans la semaine. Il fallait donc mener de front les séances d’E.P.S. et les activités de français afin que les élèves aient bien en mémoire les situations. Ajoutées à cela, les conditions climatiques n’ont pas été très bonnes ce qui a retardé ma progression. Une des conséquences de ce manque de temps est que je n’ai pas pu traiter l’ensemble de ce que je voulais faire. Par exemple, j’aurais également souhaité leur transmettre la retranscription tapée à l’ordinateur de la phase orale. Puis, en collectif, nous aurions pu reformuler le texte par une dictée à l’adulte afin de faire prendre conscience aux élèves que le langage écrit est différent du langage oral. En prolongement, un jeu comme « le double drapeau » aurait pu être proposé aux élèves. Nous aurions pu également aboutir sur un sport codifié : le rugby puisque, dans celui-ci, il faut emmener un objet (un ballon) dans le camp adverse, de l’autre côté du terrain, sans se le faire prendre.

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Bibliographie • Association des Enseignants d’Education Physique et Sportive, Le guide de l’enseignant tome 1 : Comment enseigner l’EPS aux enfants : compétences et savoirs de l’enseignant, Coédition AEEPS – Editions Revue EPS, 1995. • Beltrami Daniel et alii, Lire et écrire au cycle 3, document d’accompagnement des programmes, Ministère de l’Education Nationale, 2002. • CRDP de Dijon, EPS en primaire : apprentissages transversaux et pédagogie des intentions, Edition Réseau, 2000. • Le groupe d’experts, Education physique et sportive : Ecole maternelle, Cycle des apprentissages fondamentaux, Cycle des approfondissements, document d’accompagnement des programmes, Ministère de l’Education Nationale, 2002. • Méard Jacques, Bertone Stefano, L’autonomie de l’élève et l’intégration des règles en éducation physique, PUF, 1998. • Piaget Jean, Biologie et connaissances, Gallimard, 1967. • Queva Régine, Les programmes de l’école : Le cycle des approfondissements, Hachette Education, 2004. • Target Christian, Cathelineau Jacques, Pédagogie sportive : modules de formation et méthode d’enseignement des standards, Editions Vigot, 1994.

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Annexe 1 : Règles du jeu Annexe 2 : Questionnaire Annexe 3 : Fiche d’observation Annexe 4 : Production d’écrit (CE1) Annexe 5 : Production d’écrit (CE2) Annexe 6 : Production d’écrit (CE2) Annexe 7 : Production d’écrit (CE2) Annexe 8 : Tableau de résultats du championnat

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ANNEXE 1

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ANNEXE 2

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ANNEXE 3

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ANNEXE 4

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ANNEXE 5

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ANNEXE 6

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ANNEXE 7

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ANNEXE 8

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RESUME : Ce mémoire présente des situations d’apprentissage lors d’un jeu collectif prouvant que l’Education Physique et Sportive et la maîtrise du langage et de la langue française peuvent être au service l’une de l’autre. MOTS CLES : Education Physique et Sportive, maîtrise du langage et de la langue française, transversalité, apprentissage moteur, stratégies