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ÉVANGILE À LA MAISONAprès Marc et Luc, c’est au
tour des Actes des Apôtres
d’être discutés entre amis. PAGE 7
CANONISATIONJean XXIII et Jean-Paul II
vont être inscrits sur la liste
offi cielle des saints.
Décodage. PAGE 8
MÉTIER D’EGLISERoland Muggli est diacre au
sein de l’UP La Venoge-
L’Aubonne. Portrait.
PAGE 9
La résurrection aujourd’huiA la suite du Christ, et comme pour les témoins d’Emmaüs, des traces de résurrection sont présentes ici et maintenant. Un médecin, deux théologiens
et un philosophe en témoignent. PAGES 2 - 5 ET 12
Avril 2014 NO
02 www.cath-vd.ch
JAB1300 Eclépens CC Dépôt
Annette Mayer, responsable du Département Santé, avec la doctoresse Pascale Gabet Henry. Jean-Brice Willemin
2
Après une
petite hé-
s i ta t ion,
la doctoresse
Pascale Ga bet
Henry a volon-
tiers accepté de
se laisser « exa-
miner », de se
confi er au jour-
naliste désireux
de connaître
com ment elle vit
la ré surrection
pascale au quo-
tidien.
« Née un mardi
d’avant Pâques
à Lyon, j’ai natu-
rellement hérité
du prénom de
Pascale. Et j’ai été éduquée
dans la confi ance en un Dieu
d’amour plutôt que punitif. Plus
tard, j’ai grandi dans la foi par la
musique et grâce à mon mari ré-
formé, Vaudois de l’Eglise libre,
avec qui j’ai approfondi ma foi ;
nous allions ensemble au culte
ou à la messe. »
Au diapason du ciel par la musiquePascale Gabet Henry est restée
dans l’Eglise grâce à la musique.
Cette ancienne organiste de la
paroisse Saint-Maurice de Pully
a été initiée à l’orgue liturgique
par le prêtre lyonnais Marcel
Godard, « l’un des acteurs du re-
nouveau de la musique liturgique
après Vatican II », compositeur
de certaines hymnes du fi lm Des
hommes et des dieux. « Par la
musique, je prie et me mets au
diapason du ciel », confi e-t-elle.
« C’est un sentiment de joie,
semblable à celle ressentie à
contempler des fl eurs ou rece-
voir un appel téléphonique ami-
cal. »
Deux témoins de résurrections se dévoilentDOSSIER Quelques jours après la résurrection pascale, voici venu le temps d’entendre les disciples d’Emmaüs dimanche prochain à la messe. Une médecin et une théologienne engagée dans les milieux de la santé nous ont raconté les résurrections quotidiennes dont elles sont les témoins ; autant dans leur propre vie que dans les rencontres de leur engagement professionnel.
Se relever. Se remettre de-bout dans son être profond. Après une chute, une mala-die, un deuil, il est possible de se relever. Après le mal subi, il est possible de se remettre debout au travers du long processus de libération de la rage et de la vengeance. Même après le mal commis, il est possible d’être relevé par la réception de la miséricorde venue de plus loin.Un jour ou l’autre, la vie nous fait traverser des moments de relèvement. Alors nous perce-vons que des forces venues de plus loin que nous sont à l’œuvre. Elles nous sont données par ceux qui nous entourent, mais aussi par la Source de la vie, de l’amour, de l’unité.Se relever d’entre les morts. C’est l’expression utilisée par le Nouveau Testament pour parler de la Résurrection, celle du Christ. Et avec Lui, la nôtre.Il est fascinant de voir que c’est le même mot que pour les relèvements du quotidien. La résurrection, bien qu’elle garde une part fondamen-tale de mystère, se présente comme le moment plénier, où nous sommes relevés de tout au-delà du voile de la mort. « Il n’y a plus ni larmes, ni douleur, ni peine, ni irrespect, ni désa-veu de l’amour », dit le livre de l’Apocalypse. Mais joie, paix, lumière, concorde, unité.J’aime cette parenté de voca-bulaire entre se relever et res-susciter. Elle nous donne un appui pour la foi en la résur-rection.Car la résurrection est déjà commencée en nous lorsque nous nous relevons, accom-pagnés de forces plus grandes que nous. Pour dire vrai, elle est à l’œuvre en nous depuis notre baptême et même notre naissance. Nous vivons déjà des bribes d’expérience du relèvement d’entre les morts. Alléluia !
Ce sont des repères de vie qui
ont aidé Pascale Gabet Henry
à revivre, à ressusciter après le
décès subit de son cher mari.
« Se sachant malade, il s’était
préparé à partir. Je ne suis pas
tombée grâce à ma foi, au sou-
tien de mes proches et à la force
transmise par mon mari. Il n’avait
pas peur de la mort.
L’amour toujours Deux heures avant, par un mer-
veilleux dimanche d’été, il disait
n’avoir jamais été aussi heureux
et en paix. Dans le faire-part, j’ai
re-pris ces mots de l’écrivain et
philosophe chrétien Louis Evely :
« L’amour permet d’envisager la
mort, car lorsqu’on aime profon-
dément, on sait qu’on a atteint
une valeur que la mort ne peut
détruire. » Et l’amour perdure.
« J’ai l’impression de vivre tou-
jours avec lui, différente. »
« Révéler à mes patients leurs capacités d’auto-guérison »Ce nouveau chemin de vie, Pas-
cale Gabet Henry le parcourt
par la prière et la confi ance en
Dieu. C’est ce qu’elle essaye de
transmettre à ses patients. « Je
soigne d’abord leurs symptômes
physiques et cherche à voir ce
qu’il y a en-dessous, les origines
émotionnelles et spirituelles. En
en parlant ensemble, ils voient
plus clair en eux, peuvent recon-
naître et utiliser leurs potentiali-
tés. Cela les aidera à se soigner
eux-mêmes. » Et avec les pa-
tients indifférents ou incroyants ?
« Je les incite à s’adresser à
une force universelle, une force
de vie, un ange-gardien. » A
condition d’accepter la transcen-
dance ?
« C’est fondamental. Mes
malades ne se sentent alors
plus tous seuls. Ils accepteront
d’ouvrir leurs volets pour que la
lumière entre à fl ots en eux. Et
ils sont amenés peu à peu à un
chemin de pardon pour trouver
l’harmonie avec eux-mêmes et
leur entourage ».
Jean-Brice Willemin
Edito
Marc Donzé,vicaire épiscopal
Traces de Résurrection
La doctoresse Pascale Gabet Henry dans son cabinet.
« Ressuscitée malgré la mort »
Jean-Brice Willemin
3
Deux témoins de résurrections se dévoilent
Annette Mayer, responsable du Département Santé, se confi e à Olivier Schöpfer.
« Vivre la résurrection se passe dans la relation »
Pour Annette Mayer, res-
ponsable du Département
de la Santé de l’Eglise
catholique dans le canton de
Vaud, la question fondamentale
est : « Qu’est-ce qui se passe,
au plus intime de la personne,
qui a besoin de ressusciter,
d’être animée pour retourner à
la vie ? La résurrection ne prend
son sens que si, dans un mou-
vement d’humilité, je peux des-
cendre dans les profondeurs, me
confronter à ces zones de mort
et les identifi er, les nommer. Si
l’on reste dans une posture d’au-
tosatisfaction ou de suffi sance, il
est diffi cile de vivre l’expérience
de la résurrection. » La résurrec-
tion n’arrive donc pas n’importe
où, elle se passe là où il y a une
prise de conscience de sa fragi-
lité, de ses limites et de ses bles-
sures.
La personne se retrouve d’abord
avec elle-même. « Croire en la
réalité de la résurrection, croire
en la force du Christ ressuscité
dans ma vie, c’est moins un fait
d’annonce que d’expérience vi-
vante. Ce n’est qu’après que l’on
peut mettre des mots dessus,
la nommer. Vivre des bouts de
résurrection se passe toujours
dans la relation interpersonnelle.
Pour la croyante que je suis, cela
ne peux pas se passer hors de
ce lien au Christ vainqueur de la
mort, de toute mort. »
Ici et maintenantLa résurrection se pose en terme
d’ici et de maintenant. « Si on relit
le récit de la résurrection de La-
zare, on voit Marthe dire, un peu
en « bonne élève », à l’annonce
de la mort de son frère : Je sais,
je sais, il va ressusciter au der-
nier jour. Mais la foi de Marthe
en la résurrection, Jésus la sort
de la temporalité en disant : ‘Je
suis la résurrection et la vie’. Si je
m’attache à Celui qui est la vie,
c’est à n’importe quel moment de
l’existence que je peux faire l’ex-
périence que Dieu relève, qu’il
met debout, qu’il adresse sans
cesse ce ‘Sors de ton tombeau’
PRIÈRE
Toi qui es CheminDonne-nous de croire
qu’en toute impasse
s’offre un passage
Toi qui es VéritéDonne-nous de croire
que de toute errance
nous pouvons nous réveiller
Toi qui es VieDonne-nous de croire
que de toute mort
tu viens nous relever
Montre-nous le Père,Qui n’est pas ailleurs,
mais au cœur
de notre humanité,
quand nous marchons,
quand nous veillons,
quand nous vivons.
(Francine Carrillo)
dans l’ici et le maintenant. »
« Ce qui donne particulièrement
sens au travail d’aumônerie, à
l’hôpital ou dans les EMS, c’est
de comprendre, dans la ren-
contre avec les patients et les
personnes âgées, la différence
entre l’idée du corps abimé et
une perspective du corps blessé,
poursuit Annette Mayer. La pre-
mière s’inscrit dans une logique
de réparation, pour retourner à
l’état antérieur. Pour le second,
c’est la conscience de notre vul-
nérabilité existentielle qui invite à
intégrer la blessure et à marcher
avec. D’ailleurs, le corps ressus-
cité du Christ garde les traces
de son martyre, ce n’est pas
un corps idéalisé. Le travail de
l’aumônier que je suis consiste
à accompagner le patient sur le
chemin de l’intégration des ef-
fets de la maladie, de l’accident,
pour pouvoir avancer dans son
histoire d’homme ou de femme
debout. »
La réalité du Vendredi-Saint et du Samedi-SaintDe son expérience personnelle,
Annette tire encore un lien entre
ce qu’elle vit et les jours qui
précèdent la Résurrection du
dimanche de Pâques : « Le Ven-
dredi-Saint, c’est la confrontation
dure à la souffrance et à la mort.
C’est ce jour qui nous pousse à
nous demander ce qui doit être
ressuscité en nous. Mais le pas-
sage à la vie nous met dans les
conditions du Samedi-Saint. Il
nous met devant l’expérience de
l’absence, du vide qui est à tra-
verser. Une expérience qui peut
nous hanter. C’est spécialement
marquant en gériatrie. Annon-
cer, parler de la résurrection doit
s’accompagner d’une attention
fi ne et fi dèle à l’expérience du
vide et de l’absence d’espoir que
beaucoup de personnes vivent
face à leur dépendance crois-
sante. Sinon, ce ne sont que des
paroles creuses. Tenir le Same-
di-Saint, c’est porteur de vie, et
la traversée de ce vide est déjà
prémisses de résurrection. »
Olivier Schöpfer
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Ils cheminent. Sur la route entre
Emmaüs, où ils vont, et Jéru-
salem d’où ils viennent. Deux
heures de marche. C’est la fi n de
la journée. Tous deux viennent
de vivre les événements effroy-
ables d’une condamnation à mort
et d’une crucifi xion ; d’un homme
qui promettait aux foules et à ses
proches la venue du Royaume.
Ils n’y comprennent rien et sont
dévastés par la tristesse et la
déception.
L’Evangile parle en effet de
visages sombres : alors, ce
Royaume ? Qu’est-ce que ça
voulait dire ? Les propos d’un
mythomane, d’un prétentieux,
d’un imposteur ?
Jésus vivant ?Survient un autre marcheur. Qui
les interroge : « De quoi par-
lez-vous ? » Eux sont d’emblée
passablement agacés : quoi, tu
ne sais pas ce qui s’est passé
à Jérusalem ? De quoi d’autre
pourrions-nous parler ? Et ils
expliquent à Jésus, Fils du Dieu
Vivant relevé d’entre les morts –
car c’est Lui – ce que Lui, préci-
sément, vient de vivre : Son juge-
ment, Sa condamnation, Sa mise
à mort.
Les deux compagnons sont dé-
faits. Il y a bien sûr ces femmes
qui ont vu le tombeau vide et qui
évoquent des Anges, affi rmant
que l’Homme est vivant.... C’est
vrai, le corps n’est plus là. Mais
c’est tellement farfelu.
Benêts de Vaudois ?A ce moment, Jésus se lâche,
comme on dit aujourd’hui. En
Vaudois ça donnerait à peu près
ceci : « Vous êtes des benêts
ou bien ? Et ce qu’ont annoncé
les prophètes : Vous en faites
quoi, bon sang de bon sang ? ! » Il commence par leur dire qu’ils sont sans intelligence et lents à croire.
Ah bon ? L’intelligence aurait donc quelque chose à voir avec la rapidité à faire confi ance ? Et il se lance dans un long exposé sur ce qui est dit de Lui dans les Ecritures. En arrivant chez eux à Emmaüs, ils invitent Jésus – ne sachant toujours pas qui Il est – à souper. Le soir tombe, il faut se sustenter. Alors leur invité prend du pain, le bénit, le rompt et le leur donne. Et là, leurs yeux s’ouvrent, ils le reconnaissent... mais Il a déjà disparu.
Il est vivant !Du coup, ils se lèvent de table, et repartent dans le sens inverse, vers Jérusalem. Il fait nuit désor-mais, il faudra remarcher deux heures dans l’obscurité. Mais il n’y a pas une minute à perdre pour raconter ce qu’ils viennent de vivre, et annoncer ce qui depuis 2000 ans aujourd’hui ne cesse de bouleverser et de dé-ranger la donne du monde : Oui, Il a vraiment été relevé d’entre les morts.
DOSSIER Chrétienne à la foi profonde, la journaliste et essayiste* Aline Viredaz témoigne combien le récit des disciples d’Emmaüs, que nous entendrons à l’évangile de ce dimanche 4 mai, reste un message renversant pour les croyants, et les incroyants, de XXIe siècle. (Réd.)
Le message fou des disciples d’Emmaüs
C’est ce que les disciples devaient se dire, calfeutrés dans la maison après la mort de Jésus.
« Fichez-nous la paix. On y croyait, on lui faisait con-fi ance, et il est mort. Alors maintenant, on préfère s’en-fermer, par peur d’être déçu à nouveau. »
Et quelque chose d’inattendu se passe. Il surgit de nulle part. Comment il a fait pour passer les murs, pour s’arracher aux griffes de la mort, ce n’est pas la question. Il est là. « Fichez- nous la paix », se disaient les disciples quelques secondes avant. « La paix est avec vous », leur répond le Christ. Et ce n’est pas une parole en l’air, non. Cette paix, ils la ressentent, ils la reçoivent, comme un souffl e qui les traverse, comme un frisson qui change tout. C’est une paix qui est d’un autre ordre que celle à laquelle les disciples aspiraient, quand ils voulaient qu’on leur fi che la paix.
La paix que le Christ apporte est une paix qui rend libre… elle nous ouvre aux pos-sibles, elle nous délivre de la peur : peur de l’autre et de ses jugements, peur de l’échec et de notre culpabilité.Et si c’était ça, la ré-surrection ? Et si elle n’était pas seulement pour après la mort, mais déjà pour maintenant ? Comme des « mini résurrections » que l’on peut vivre au quotidien : se relever d’une chute, goûter à la chaleur du soleil après une période de ténèbres… Se sentir en paix, avec soi, avec les autres. Ô Christ, donne-nous ta paix !
La parole à :
PasteureAnouk Troyon,Aumônerie UNIL
On imagine les deux compères complètement excités sur le tra-jet du retour. Quand ils arrivent à Jérusalem auprès des disciples et de leurs amis tous réunis, ils n’ont qu’un mot à la bouche : C’est bien vrai ! Le Seigneur s’est réellement réveillé.
Mystère de la FoiLes chrétiens convaincus sont des fous de Pâques, ce vent de force 7, 8, 9... Incommen-surable. Quelle joie immense d’avoir reçu la capacité de se laisser décoiffer l’âme !Pourquoi moi, pourquoi pas ce-lui-ci, ou celle-là ?
Mystère de ce don. Et comme je voudrais que tous ceux que j’aime soient pris dans ce maels-tröm défi nitif. Allons, Seigneur Jésus, Fils du Dieu Vivant relevé d’entre les morts, un p’tit coup d’pouce ! Faites-les trembler, que diable ! Heu... pardon.
Aline Viredaz
La journaliste Aline Viredaz avec son compagnon à quatre pattes.
* « Là où je vais », Aline Viredaz (Editions Labor et Fides), 2008
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lité avant la votation fédérale
sur le salaire minimal du 18 mai
prochain. Savoir s’il appartient à
l’Etat de le fixer et quel doit être
le niveau de ce minimum est
controversé. Mais la question du
salaire équitable est cruciale. Le
Conseil de la Pastorale œcumé-
nique dans le monde du travail
a repris les réflexions du concile
Vatican II (Gaudium et Spes 67) :
Un salaire équitable doit naturel-
lement se justifier par « les fonc-
tions et la productivité de cha-
cun » ; il doit aussi tenir compte
« de la situation de l’entreprise
et du bien commun. » L’équilibre
économique de l’entreprise est
important. L’équilibre de la société
dans laquelle elle se trouve aussi.
Les rémunérations qu’elle distri-
bue doit y contribuer.
Les hommes et les femmes que
nous rencontrons sont blessés
par le chômage et l’exclusion. Si
nous pouvons les aider à se rele-
ver, nous avons témoigné de la
résurrection. Mais nous sommes
aussi appelés à agir sur les struc-
tures sociales et économiques
quand elles sont blessantes.
Sans cela, nous admettrions que
la violence a le dernier mot. Or,
après Pâques, nous savons qu’il
n’en est rien !
Jean-Claude Huot
La résurrection face aux personnes démuniesDOSSIER Rendre compte de la joie de la Résurrection à des personnes qui risquent sans cesse de se retrouver sans revenu ? Pas évident ! Quelle bonne nouvelle apporter quand l’impasse matérielle domine et qu’aucune solution n’apparaît ? L’aumônier de la Pastorale du monde du travail, Jean-Claude Huot, propose d’y réfl échir à l’occasion de la fête du 1er mai.
Dans la pastorale du monde
du travail, je rencontre
des personnes qui vivent
dans l’extrême précarité. Au chô-
mage depuis longtemps, elles
dépendent de l’aide sociale. Mi-
grantes, certaines ne bénéficient
même pas de cette aide. Alors
quand vient une offre de travail,
le soulagement est intense… et la
désillusion parfois brutale.
Pour 28 heures hebdomadaires
on a proposé à une mère de
famille 1 000 francs de salaire
mensuel, moins de 9 francs par
heure pour garder des enfants et
faire le ménage. Ou encore, pour
un homme qui a dix ans d’expé-
rience, un emploi à mi-temps
payé 1 750 francs (le plein temps
serait à 3 500 francs) pour faire
la vaisselle dans la cuisine d’un
hôtel.
Cette réalité est observée par-
tout dans le Canton, tant par les
aumôniers de l’Eglise que par les
assistants sociaux de Caritas.
Certains salaires sont si bas qu’ils
ne permettent pas de vivre de
manière autonome.
Comme au XIXe siècleCette violence n’est pas nouvelle.
En 1891, le Pape Léon XIII écri-
vait déjà : « Si, contraint par la né-
cessité ou poussé par la crainte
d’un mal plus grand, l’ouvrier
accepte des conditions dures,
que d’ailleurs il ne peut refuser
parce qu’elles lui sont imposées
par le patron ou par celui qui fait
l’offre du travail, il subit une vio-
lence contre laquelle la justice
proteste. » (Encyclique Rerum
Novarum 34.4)
Dès lors, les papes rappelleront
sans cesse l’impératif de la digni-
té humaine dans l’aménagement
des conditions de travail. Pour
l’enseignement social de l’Eglise,
le salaire doit permettre au travail-
leur et à sa famille de mener une
vie digne, pas seulement se nour-
rir, se vêtir et se loger, mais aussi
participer à des activités sociales,
culturelles ou religieuses.
Enseignement social en pratiqueCet enseignement reste d’actua-
Les épiceries Caritas vendent des produits alimentaires à des prix très bas aux
personnes dans le besoin.
Depuis septembre 2013, je suis
plongé dans le Département
Solidarités.
Pastorale œcuménique dans le
monde du travail : la réalité de la
migration me saute au visage.
Les personnes que je rencontre
viennent de loin parfois, ne
savent pas toujours le français.
Elles cherchent de quoi vivre,
n’ont plus rien ailleurs. Que leur
proposer ? L’écoute ne suffi t
pas. Elles veulent travailler et
ne trouvent rien. Les solutions
restent rares. J’admire la force
de ces personnes sans loge-
ment et sans revenu ; mais je
suis indigné face à l’injustice qui
les frappe !
Le Département : une quinzaine
de personnes engagées corps
et âme avec les plus précarisés,
en prison, dans la rue. Un dyna-
misme extraordinaire. A chaque
réunion nous échangeons sur
notre vécu. Ensemble, nous
portons les souffrances parta-
gées dans l’eucharistie. Foi et
vie indissociée ! L’indignation
devient espérance.
Et nous pourrions faire mieux.
Le Pape François demande
de mettre en œuvre l’Evangile
pour transformer la société. A
Renens, les acteurs du Dépar-
tement travaillent avec la pa-
roisse, avec les communautés
linguistiques. Ces liens peuvent
se renforcer, non seulement
dans l’Ouest lausannois, mais
dans tout le Canton. Les Di-
manches solidaires ou les per-
manences Accueil en sont des
exemples. Pour une Eglise
« qui entend la clameur pour
la justice et veut y répondre de
toutes ses forces ». Alors la joie
de l’Evangile rayonnera !
Regard neufsur l’Eglisedans le Canton :
Jean-ClaudeHuot, agent pastoral
au Département
Solidarités
A l’occasion de la fête du travail, jeudi 1er mai, la Pastorale œcu-
ménique dans le monde du travail organise une soirée à l’église
Saint-Laurent à Lausanne. Une célébration œcuménique aura lieu
à 18h30, suivie d’une collation avant un éclairage éthique sur l’ini-
tiative pour un salaire minimum.
La soirée sera l’occasion d’aller au-delà de la votation sur l’initiative
sur les salaires équitables. La célébration rendra grâce pour ce
don qui nous est fait de contribuer à la Création.
Un débat suivra sur les enjeux éthiques du salaire minimal. Avec
Pierre-Alain Praz, directeur de Caritas-Vaud et Pierre Bühler, pro-
fesseur de théologie systématique à l’Université de Zurich.
Infos : www.cath-vd.ch/mondedutravail
Le travail mis en valeur
Carita
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Les deux sociologues vau-
dois de l’UNIL, René Knü-
sel et Hakim Ben Salah,
relèvent que le dimanche vécu
aujourd’hui par les chefs de
famille est bien différent d’il y
a cinquante ans. Les priorités
ont changé. Repos et vie spi-
rituelle communautaire ont été
remplacés par tout ce qui n’a
pu être fait pendant la semaine :
prendre du temps avec ses en-
fants ou ses vieux parents, faire
du sport, terminer ses tâches
domestiques ou même préparer
le travail du lundi. Le choix pour
l’organiser n’est plus collectif,
mais très largement individuel.
La pratique religieuse est dès
lors passée au second plan,
favorisée par des modes de vie
urbains et individualistes.
Le jour du Seigneur est vécu bien différemment aujourd’hui qu’il y a cinquante ans, que ce soit pour la messe dominicale, en famille ou en termes de loisirs. Pour y réfl échir, Mgr Charles Morerod a notamment invité trois sociologues pour en débattre avec les agents pastoraux du diocèse. Et le vicaire épiscopal du canton de Vaud, l’abbé Marc Donzé, a prolongé la discussion lors de la récente assemblée cantonale de la Pastorale. Etat des lieux.
Les 400 agents pastoraux réunis à l’Université de Fribourg lèvent des cartons coloriés pour donner leurs réponses au questionnaire des sociologues. Ceux-ci en ont
tiré les conclusions quelques minutes après la fi n de ce sondage « in vivo ».
Réfl exions collectives sur le sens du dimanche
Les sociologues ont vu leurs hy-pothèses confi rmées par les 420 agents pastoraux du diocèse réunis en session de l’automne dernier. Dans le passé, disent 64% d’entre eux, « on profi -tait de reprendre des forces ». Aujourd’hui, pour 81% des interviewés, « on gère d’abord des occupations sociales et sportives, à concilier avec des contraintes professionnelles. »
Et la messe du dimanche ?Dès lors, pour les Eglises, il s’agit d’investir ces nouveaux espaces de la culture, du sport et des loisirs, d’être là où les gens continuent de se rencon-trer. En effet, commentent les sociologues de la session, « les services religieux ne constituent
plus une activité structurante pour les familles. Si certains parents et enfants sont encore attachés à une vie spirituelle, c’est de plus en plus hors des cadres institutionnels, notam-ment chez les jeunes marqués par une certaine indifférence au pouvoir d’autorité, de transmis-sion et de transcendance. » Le repos dominical est en priorité familial et laïc !
Un jour encore sacré ?La société de consommation n’a pas encore réussi à faire ou-vrir massivement les portes des magasins le dimanche, relèvent ces analystes de nos pratiques de vie. Mais le jour du Sei-gneur – c’est le sens du terme dimanche – restera-t-il marqué
par la visite de Dieu parmi les hommes ? Il reste encore sacré pour nombre de migrants et de seniors.
Comment rejoindre les familles ?Et pour les familles, pour les jeunes qui font bande à part ? Les forces vives des Eglises sont appelées à les rejoindre, si elles veulent encore offrir du sacré le dimanche à l’ensemble de la société dans les lieux de culture, de divertissement, de sport ; là où les gens se ren-contrent le dimanche. C’est un sacré défi que les communau-tés catholiques sont appelées à relever ces prochaines années.
Jean-Brice Willemin
Diocèse LGF
7
Le groupe genevois P.U.S.H. invité pour fêter l’Evangile à la maison.
Plus de 80 agents pasto-raux et bénévoles ont réfl échi à la manière de donner un nouveau sens au dimanche dans le cadre de l’assemblée de la Pastorale du 12 mars dernier. L’assemblée a discuté d’exemples vécus.
Comment peut ainsi se vivre de manière plus vivante nos rassemblements communau-taires ? Trois grands témoins ont raconté comment ils ont organi-sé et participé à des moments festifs en Eglise.
Messes multiculturellesMarie a raconté avec enthou-siasme l’animation à la basi-lique Notre-Dame de Lausanne, en équipe, des cinq messes du dimanche de la Mission uni-verselle en octobre dernier. « Nous étions une trentaine de personnes de diverses natio-nalités. Nous avons collaboré, cheminé ensemble dans un dia-logue et un respect de toutes les cultures. Je relève cette réac-
tion entendue de fi dèles : Vous étiez dans la lumière. » Deux autres témoins d’origine étrangère ont raconté avec enthousiasme leur participa-tion à la crèche vivante de Noël de la paroisse St-Amédée de Lausanne. « Des personnes d’autres religions ont joyeuse-ment participé à la fête de la naissance de Jésus. »
Accueillir les inconnusParmi les participants, on rele-vait l’importance de se sentir ac-cueilli et reconnu pour établir des liens en communauté. « Il faut soigner l’accueil au début des offi ces et faciliter les rencontres avec de nouveaux paroissiens, par exemple en organisant des apéritifs sur le parvis et en allant à la rencontre des personnes inconnues ; il y a une conver-sion intérieure à entreprendre pour se rendre disponible. Cela permet de mieux se rassembler pour prier ensemble », ont rele-vé des participants.
JBW
Plus de 80 personnes ont participé à l’Assemblée de la Pastorale à La Longeraie
à Morges.
La lecture en groupe des Evan-giles à la maison a débuté en automne 2011 dans le canton de Vaud. Après Marc et Luc, c’est au tour des Actes des Apôtres d’être discutés entre amis. Pour fêter le démarrage de ce nouveau cha-pitre du Nouveau Testament, ils sont invités à une grande fête vendredi 6 juin à l’église St-Amé-dée de Bellevaux à Lausanne. L’intuition fondatrice de l’Evan-gile à la maison, c’est de convier et rassembler chez soi quelques voisins, amis ou proches, pour un temps de lecture et de par-tage de la Bible. Avec le souhait de s’ouvrir à des interlocuteurs éloignés de l’Eglise. Depuis décembre 2011, de nombreux groupes se sont ainsi réunis chez des particuliers pour lire un Evangile et vivre un temps de partage. Le propos n’est pas de « convaincre », mais de se mettre, ensemble, à l’écoute de textes qui sont toujours à rece-voir à neuf, quels que soient ses croyances, expériences ou degrés d’engagement dans une Eglise.
Histoire œcuméniqueAprès un premier parcours sur l’Evangile selon Marc en 2011-12, la lecture de l’Evangile selon Luc a été l’occasion, dès l’au-
tomne 2012, d’une riche collabo-ration œcuménique entre Eglises catholique et réformée du canton de Vaud. De nouveaux groupes ont alors été créés, mixtes et diversifi és. La célébration de vendredi 6 juin à 18 heures, avant-veille de la Pentecôte, marque le lancement offi ciel de la lecture des Actes des Apôtres. Elle intègrera un groupe de jeunes encadrés par deux professionnels chrétiens du monde du spectacle. La partie son et lumière de la célébration est ainsi confi ée à Fabrice Kas-par, leader du groupe rock chré-tien P.U.S.H. Fondé à Genève en 2002, le groupe collabore avec des chrétiens de tous horizons, des croyants d’autres religions et aussi des personnes agnos-tiques. Et c’est Fabien Moulin, metteur en scène et directeur de troupe valaisan, qui prêtera sa voix à la lecture de textes choisis du livre des Actes. A la fi n de cette rencontre, il sera possible de se renseigner sur la manière de constituer un nou-veau groupe ou de rejoindre un groupe existant, mais aussi et surtout de partager une sympa-thique agape offerte à tous.
Sr Isabelle Donegani
et Béatrice Vaucher
Evangile à la maison à fêter à Lausanne
exions collectives sur le sens du dimancheAssemblée de la Pastorale à la Longeraie
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Pourquoi canoniser quelqu’un ?La canonisation désigne l’acte par lequel le pape inscrit une personne sur la liste officielle des saints. Elle a pour but de
proposer en exemple au peuple
chrétien le témoignage d’un des
membres défunts de l’Eglise et
d’autoriser ou de prescrire un
culte public en son honneur.
Ce culte public se traduit par
l’attribution d’un jour de fête au
calendrier et par la possibilité
d’exposer des images et des
reliques dans les églises.
A quand remonte la procédure ?La première déclaration offi-
cielle de la part de l’Eglise de
la sainteté d’une personne est
la bulle pontificale envoyée par
Jean XV en 993 aux évêques
de France et de Germanie, pour
leur signaler qu’Ulrich, évêque
d’Augsbourg, devait être consi-
déré comme saint. Mais dès les
premiers siècles, les évêques
s’étaient réservé le droit de dé-
clarer qui pouvait être reconnu
comme saint, tant les martyrs et
les saints étaient populaires. Au
XIIe siècle, le pape Alexandre III
a restreint ce droit au seul sou-
verain pontife. Un siècle plus
tard, Innocent III en a défini
les règles. Il y eut plusieurs ré-
formes à travers les siècles, la
dernière ayant été apportée par
Jean-Paul II avec la Constitution
apostolique du 25 janvier 1983
(Divinus Perfectionis Magister),
destinée à simplifier la procé-
dure et à y associer davantage
les évêques.
Quels sont les critères ?Pour être reconnue comme
sainte, une personne doit rem-
plir plusieurs conditions. Elle doit
avoir un rayonnement spirituel
après sa mort, signe de sa par-
ticipation à la sainteté de Dieu
et assurance que son exemple
est accessible et bienfaisant au
peuple chrétien. Les miracles
qui peuvent lui être attribués re-
vêtent à ce titre une grande im-
portance ; ils sont considérés par
l’Eglise comme un signe de Dieu
pour confirmer la sainteté de la
personne. La seconde condi-
tion est le martyre, ou les vertus
chrétiennes, marque d’une fois
vivante et démonstration que la
sainteté n’est pas inaccessible à
l’homme.
Quelle est la procédure ?La procédure se présente
comme celle d’un procès cano-
nique. Le postulateur de la cause
doit adresser une requête écrite
à l’évêque du diocèse où est
mort le candidat à la sainteté. Le
dossier comprend une biogra-
phie, une copie de l’ensemble de
son œuvre, une liste de témoins
pour les causes récentes, l’avis
d’experts, les résultats de l’en-
quête, véritable instruction judi-
ciaire.
C’est alors la Congrégation
pour la causes des saints (ins-
tituée par Paul VI en 1965 ;
DÉCODAGE Le di-manche 27 avril 2014, Jean XXIII et Jean-Paul II seront canonisés, c’est-à-dire qu’ils seront in-scrits au catalogue des saints. Décryptage d’une pratique millénaire.
La canonisation, c’est quoi ?
auparavant, ces questions rele-
vaient de la Congrégation des
rites) qui va mener à son terme
l’examen de la cause. Cette
Congrégation présidée par un
préfet est constituée de cardi-
naux, d’évêques, d’historiens,
de théologiens, de médecins
(s’il y a miracles). Dans le cours
de la procédure intervient le pro-
moteur de la foi, sorte d’avocat
général dont la mission est de
rien laisser dans l’ombre, même
les choses négatives (d’où l’ap-
pellation d’ « avocat du diable »,
qui est passée dans le langage
courant).
Si les délibérations de la
Congrégation sont positives, le
dossier est alors remis au pape,
à qui revient l’ultime décision.
Olivier Schöpfer
avait pris place parmi les jeunes
évêques qui déclenchaient des
applaudissements, remplissant
peu à peu toute l’aula. Beau sym-
bole de l’aggiornamento qu’avait
voulu Jean XXIII : un Concile qui
renouvelle « la rencontre avec
Jésus ressuscité, rayonnant dans
l’Eglise entière, pour le salut, la
joie et les splendeurs de tous les
peuples humains ». Plus tard,
Jean-Paul II fera maintes fois réfé-
rence dans ses messages du 1er
janvier à l’encyclique Pacem in ter-
ris de Jean XXIII.
Comment Jean–Paul II a-t-il intégré le souffl e du Concile ?Vatican II voulait renforcer la com-
munion dans la diversité, par la
Quelle fi liation entre ces deux papes ?Elle était visible pendant le concile.
Karol Wojtyla, nommé évêque en
1958 par Pie XII, a participé à la 1re
session de fi n 1962, qui a eu une
infl uence décisive pour faire entrer
Vatican II, programmé par la Curie,
dans une Eglise peuple de Dieu. Il
Trois questions à :
Abbé Jean-Marie Pasquier, ancien curé du Saint-
Rédempteur
collégialité épiscopale, et en pro-
mouvant les Eglises locales. Qu’en
est-il advenu sous Jean-Paul II ?
On en attendait davantage ;
il s’est efforcé de promouvoir
l’œcuménisme, surtout avec les
orthodoxes, et aussi le dialogue
interreligieux. Qu’on pense à la
rencontre d’Assise où pour la pre-
mière fois des croyants du monde
entier prièrent côte à côte ! Sur un
autre plan, l’Europe de l’Est lui doit
beaucoup pour la chute du mur de
Berlin. Par contre, sa lutte contre
le communisme l’a marqué néga-
tivement pour comprendre la théo-
logie de la libération et soutenir
l’engagement des communautés
latino-américaines qui s’y réfé-
raient.
Va-t-on fêter ensemble Jean XXIII et Jean-Paul II ? Dieu merci, le pape François cé-
lèbre le même jour cette double
canonisation. Mais ces saints
demeurent si différents dans leur
manière d’incarner l’Evangile – en
particulier leur attitude à l’égard
des faibles et des exclus de ce
monde et au sein de l’Eglise – qu’il
vaut mieux, selon moi, respec-
ter cette distance, jusque dans le
calendrier. Jean-Paul II a écrit une
magnifi que encyclique sur Dieu
riche en miséricorde, mais com-
ment en a-t-il témoigné à l’égard
des divorcés remariés ou des
prêtres désireux de se marier reli-
gieusement ? Qui ouvrira un jour
ces portes si longtemps fermées ?
Le pape François ?
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Mécanicien-électricien de profession, Roland Mug-gli a senti très tôt l’appel à une vocation de service dans l’Eglise. De mère protestante, élevé dans cette confession, il choisit à 22 ans d’entreprendre une formation pour devenir diacre. Il effectue divers stages, en Suisse, en Allemagne et en France, à Taizé. « Mes premiers contacts avec Taizé remontent
à 1964. C’était la période du
concile Vatican II, et on ressen-
tait une effervescence réelle.
Elle s’est traduite, au fil des
années et jusqu’à aujourd’hui,
par un œcuménisme plus grand.
C’est encore plus vrai avec le
pape François. »
Il se marie à 35 ans – avec son
épouse, ils ont eu trois enfants
– et est consacré diacre dans
l’Eglise protestante vaudoise.
Durant quelques années, il a
travaillé comme infirmier chef,
puis directeur dans un EMS
Roland Muggli a très tôt entendu l’appel du Christ.
de la région lausannoise. Au
fil du temps, il acquiert la certi-
tude que l’Eglise protestante ne
répondait pas pleinement à sa
vision d’Eglise, spécialement
le fait de ne pas reconnaître la
présence réelle du Christ dans
l’eucharistie.
Ordonné en 2009« A ma retraite, j’ai demandé
mon entrée dans la pleine com-
munion de l’Eglise catholique.
Ca n’a pas été facile pour mon
épouse, mais elle l’a accepté.
Je ne parle pas de conversion,
mais plutôt d’une prolongation
de mon ministère de diacre. »
En 2009, il est ordonné diacre
par Mgr Genoud à Morges. « Ce
fut une journée magnifique »,
dit-il, les yeux encore emplis de
lumière.
Roland Muggli conçoit son rôle
actuel comme étant au service
du Christ et de l’Eglise. « Je
coordonne la préparation des
liturgies, pour les rendre plus
vivantes. Je préside aussi la
célébration de baptêmes et de
services funèbres, ainsi que
quelques mariages. »
Un service de charitéOutre la liturgie et la parole, son
service est également axé sur
la charité, notamment dans le
cadre de la Conférence Saint
Vincent de Paul. « J’en suis le
président depuis cinq ans. Il
y a deux ans, l’Association St
Vincent de Paul de la région
morgienne est devenue œcu-
ménique. Il est important que
nous travaillions ensemble pour
tout ce qui est social. Nous
avons une bonne collaboration
avec l’Armée du Salut et les
Eglises évangéliques de Morges
et de Lonay. Nous aidons les
plus pauvres, et notamment les
MÉTIER D’EGLISE Roland Muggli est diacre au sein de l’UP La Venoge-L’Aubonne. Son riche parcours de vie trace en fi ligrane l’évolution ecclésiale du Canton.Portrait.
Plus de 70 ans à l’écoute du Christ
eu un grand choc émotionnel. Et
entre le Christ que je fréquente et
moi, il y a encore une table percée,
où la fl amme des petits lumignons
vacille au moindre courant d’air.
Ils ont refait le chauffage dans
l’église, mais j’y ai toujours froid.
Peut-être parce que j’y vais rare-
ment pour remercier, mais plutôt
quand je vais mal, quand le froid
est à l’intérieur de moi. Il m’est
plus facile de remercier à genoux
devant un pré de violettes le nez
dans l’herbe, qu’à genoux sur un
banc. Mes genoux ne sont plus
ce qu’ils étaient de toute façon.
Comme mon cœur, ils sont désen-
chantés. Une bougie pour mes
enfants, « Seigneur, garde-les en
vie... » Je pourrais tout affronter,
personnes qui ont des difficultés
financières. Nous ne donnons
pas d’argent, mais du soutien et
des aides matérielles, en payant
certaines factures et en donnant
des bons Caritas et Migros. Il y
a une grosse augmentation des
demandes, et il n’est pas tou-
jours facile de discerner qui est
vraiment dans le besoin. »
A 76 ans, et tant qu’il en a la
force, Roland Muggli continue
d’être un beau serviteur de
l’Eglise.
Olivier Schöpfer
Le Jésus que je fréquente est en
plâtre creux. Je le sais bien, je ne
suis pas dupe. Il est cloué sur une
croix de bois qui tient au mur avec
des vis et des boulons. A ses pieds,
dans des vases en cristal épais,
des chrysanthèmes rose pâle à
l’odeur tenace baignent dans l’eau
jaunie, des étoiles de Noël rouge
napperon, des azalées en pot qui
perdent toutes leurs feuilles d’un
seul coup, comme si elles avaient
Pour vous, qui est Jésus ?
La réponse de
Claude-IngaBarbey, comédienne
mais pas ça.
Ce matin, sur le prie-Dieu voisin,
un homme africain pleure. Il prie et
il pleure, devant le Jésus en plâtre.
J’essaye de dire le Notre Père,
mais je n’arrive pas à me concen-
trer. Je voudrais toucher l’épaule
de cet homme, lui dire que s’il a
besoin d’aide, je peux peut-être
faire quelque chose. Mais je n’ose
pas. J’ai peur. Peur d’aller vers
cet homme et qu’il me demande
de l’argent, ou une autre chose
impossible. Au moment de m’en
aller je tourne enfi n la tête et je le
regarde vraiment. Il a la tête bais-
sée, il murmure pour la centième
fois la même prière. Je le regarde,
mais il ne me voit pas. J’envie sa
foi, mon sac de courses au bout du
bras. J’envie sa ferveur.
D’habitude, à cette heure-là,
l’église est vide, et j’aime transgres-
ser la distance sacrée qui nous sé-
pare et aller coller mon front contre
la jambe du Christ qui est juste à la
bonne hauteur. Comme un enfant
fi évreux, je trouve un apaisement
dans ce contact pierreux. J’y puise
de la force. Mais ce matin, je n’ose
pas, mon Jésus de plâtre est déjà
pris, il est en consultation. Et le
cas semble grave, plus grave que
le mien.
Lorsque je sors de l’église, la lu-
mière est vive. S’il m’avait rendu
mon regard, je lui aurais parlé. Que
Dieu me pardonne de n’avoir pas
touché son épaule, mais il y a des
moments où je me sens comme le
Jésus en plâtre, peinte, creuse et
immobilisée contre le mur par des
vis et des boulons.
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Adresses utilesMission de langue allemande, avenue Vinet 27, 1004 Lausanne, tél. 021 648 41 50Mission de langue portugaise, avenue de Morges 60, 1004 Lausanne, tél. 021 323 14 58
DÉPARTEMENTSDépartement 0-15 ans, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 53Département 15-25 ans, boulevard de Grancy 29, 1006 Lausanne, tél. 021 612 61 30Département Adultes, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 33Département Santé, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 67Département Solidarités, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 88
Support informatique, 021 613 23 20 et 079 126 72 47Support AVEC, 021 613 23 15Support www.cath-vd.ch, 021 613 23 26
UP Nyon - Terre Sainte, rue de la Colombière 18, 1260 Nyon, tél. 021 635 45 80 UP Prilly - Prélaz, avenue de Morges 66, 1004 Lausanne, tél. 021 624 45 55UP Renens - Bussigny, avenue de l’Eglise-catholique 2b, 1020 Renens,tél. 021 634 01 44UP Riviera, avenue des Planches 27, 1820 Montreux, tél. 021 963 37 08UP Notre-Dame de Tours, Chemin des Rites 2, 1566 St-Aubin (FR), tél. 026 677 11 42UP St-Barnabé, rue Guillermaux 17, 1530 Payerne, tél. 026 660 21 96UP St-Pierre les Roches, rue de l’Eglise 17, 1670 Ursy, tél. 021 909 50 37Décanat d’Aigle, rue du Rhône 4, 1860 Aigle, tél. 024 466 23 88
MISSIONS LINGUISTIQUESMission de langue espagnole, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 73Mission de langue italienne, rue Orient-Ville 16, 1005 Lausanne, tél. 021 323 14 58Mission de langue anglaise, avenue de Béthusy 54, 1012 Lausanne
DIRECTIONVicariat épiscopal, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 43FEDEC-VD, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne, tél. 021 613 23 13
UNITES PASTORALESUP Chasseron-Lac, rue Maison-Rouge 14, 1400 Yverdon-les-Bains, tél. 024 424 20 50UP Dent-de-Vaulion, chemin de la Dame 1, 1350 Orbe, tél. 021 441 32 90UP Grand-Vevey, rue des Chenevières 4, 1800 Vevey, tél. 021 944 14 14UP Gros-de-Vaud, rue St-Jean 7, 1040 Echallens, tél. 021 882 22 52UP La Venoge - L’Aubonne, rue du Rond-Point 2, 1110 Morges, tél. 021 811 40 10UP Lausanne Lac, chemin de Beau-Rivage 3, 1006 Lausanne, tél. 021 616 51 43UP Lausanne Nord, avenue de Chailly 38, 1012 Lausanne, tél. 021 652 37 32UP L’Orient, avenue des Collèges 29, 1009 Pully, tél. 021 728 15 57UP Notre-Dame Lausanne, rue du Valentin 3, 1004 Lausanne, tél. 021 318 82 00
ImpressumEditeur : FEDEC-VD.Adresse : chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne.Directeur de la publication : abbé Marc Donzé, vicaire épiscopal.Comité éditorial : abbés Marc Donzé, et Thierry Schelling, François Rouiller, Olivier Schöpfer et Jean-Brice Willemin.Rédacteur responsable : Jean-Brice Willemin.Mise en page : Eva Mikulski.Ont aussi collaboré à ce numéro : Textes : Sr Isabelle Donegani, Jean-Claude Huot, Béatrice Vaucher, Aline Viredaz et Maria Zufferey.Photos : Internet, Caritas et Jean-Brice Willemin. Relecture : Pierre-André Werlen.Tél. : 021 613 23 23 Fax : 021 613 23 24E-mail : [email protected] Internet : www.cath-vd.chrelais, journal de réfl exions et d’informations de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud, est un trimestriel gratuit, tiré à 4 100 ex. Prochaine parution : 1er juillet 2014.
Conférence-débatsur cinquante ansde vie catholique
La Fédération ecclésiastique catholique romaine du canton de Vaud (FEDEC-VD) fête en 2014 son 50ème anniver-saire. A cette occasion, elle organise plusieurs manifesta-tions tout au long de l’année. Le prochain rendez-vous, une conférence-débat sur les catholiques dans le canton de Vaud ces 50 dernières an-nées, aura lieu mardi 20 mai 2014 à 18h30 à l’Université de Lausanne-Dorigny (bâti-ment Anthropole, salle 1129).Le professeur René Knüsel fera un exposé historico-so-ciologique sur l’évolution de la communauté catholique du-rant ces cinquante dernières ans (« De la discrimination à l’intégration ? »). Ensuite, une table ronde sera animée par M. Justin Favrod, journaliste à 24 Heures, avec la parti-cipation de quatre person-nalités catholiques (Ariane Dayer, Ada Marra, Bruno de Kalbermatten, Jean-Jacques Schwaab) et d’une person-nalité réformée (Jean-Paul Perrin).
« L’argent trompeur » d’Yvan Mudry
Rivtél
La démonstration de l’essayistelausannois repose sur le constat que nos sociétés occidentales fonctionnent sur les principes de l’économie libérale. Yvan Mudry les a bien compris, lorsqu’il tra-vaillait comme journaliste écono-
mique à L’Agefi et au Journal de Genève. « Appliqués à la lettre, ces principes libéraux amènent à considérer chaque individu comme autonome, sans dette existentielle, sans obligation puisqu’il ne doit rien à personne et qu’il peut donc poursuivre égo-ïstement son intérêt personnel. Ce credo économique est dépas-sé, anti-écologique et contraire à notre conception spirituelle dans l’Eglise catholique, selon laquelle tout vient de Dieu et retourne à
LIVRES Le théologien Yvan Mudry, devenu journaliste économique puis chroniqueur religieux, vient de publier L’argent trompeur. Un titre provocateur pour expliquer comment l’argent peut pervertir les relations entre les hommes s’il devient sacré, honoré comme le veau d’or des anciens.
lui, si bien que l’homme ne peut pas refermer la main sur ses ri-chesses. »
Don et contre-donPour Yvan Mudry, les hommes de nos sociétés prospères sont invités à changer de conception de vie, à cesser de croire qu’ils se suffi sent à eux-mêmes pour se comprendre comme individus insérés dans une histoire collec-tive, dans une communauté. « Le rapport à l’argent devient alors tout autre. L’argent acquis, nous sommes amenés à le considérer comme un cadeau, c’est-à-dire invités à le redonner sous une forme que nous allons imaginer au contact d’autrui. »C’est ainsi qu’Yvan Mudry conçoit l’homme dans une com-munauté, soignant son rapport au Dieu-amour par la prise de risques dans ses relations ma-térielles, en valorisant le don. Il l’explicite ainsi : « Pour se libérer de l’emprise de l’argent, il faut être intimement convaincu que celui que nous possédons ne nous appartient pas. »
Jean-Brice Willemin
« L’argent trompeur », Yvan Mudry
(Editions Saint-Augustin)
Sur la photo ci-contre, Yvan Mudry,
auteur du livre, dont la couverture est
en illustration ci-dessus.
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Courrier des lecteurs
Votre avis nous intéresse. Faites-le nous connaître à l’adresse suivante : Jean-Brice Willemin, Service de l’information, chemin des Mouettes 4, CP 600, 1001 Lausanne ou par mail : [email protected].
Merci pour vos efforts pour offrir une revue « catholique » dans le Canton. Cependant, je vais rompre le consensus de louanges qui fi gure régulière-ment dans le courrier des lec-
teurs.
J’ai lu plusieurs numéros de
relais, mais de véritablement
catholique je ne trouve rien.
Un journal « catholique » devrait
expliquer, éclairer, commenter,
enseigner la doctrine catho-
lique. Il devrait démontrer sa
cohérence, sa logique et son
équilibre. Il devrait être un relais
entre ce qu’enseigne l’Eglise
catholique romaine et les per-
sonnes. Il devrait faire aimer
l’Eglise.
Quant au questionnaire sur
la famille, faut-il s’étonner de
tels résultats quand on sait par
d’autres sondages que de très
nombreux catholiques ne croient
plus ni à la Présence réelle, ni
à la résurrection du Christ, ni à
l’enfer et ne comprennent plus
le sens du sacerdoce ministériel
tant la confusion entre prêtres
sécularisés et laïcs cléricalisés
est à son comble.
Dans ce diocèse, vivent des
catholiques romains ! Parfois, ils sont traditionalistes. Le manque de sensibilité et de charité de certains prêtres font qu’ils sont « confi nés » dans des chapelles. Ils ne font aucun bruit et vivent leur foi de manière décom-plexée, joyeuse et lumineuse sans vouloir faire la révolution. Ils ne font pas de compromis avec le magistère, les dogmes, le catéchisme offi ciel. Ils confor-ment leurs vies et leurs actes aux enseignements et aux vérités que l’Eglise enseigne. Ils passent par la porte étroite ! L’Amour est aussi exigence !
Une suggestion, si humblement vous me la permettez, au lieu de nous présenter une Eglise catholique résolument moder-
niste, en décalage avec Rome, laissez de la place au catholi-cisme ! Pour répondre au sou-hait de réformes en accord avec les idées du monde, il y a des communautés réformées. Là, pas de dogmes, pas de lignes de conduite, une totale liberté de pensée. Mais si le sel de la terre s’affadit, que se passe-t-il ? Si le phare cesse d’éclairer la mer en ne montrant pas les écueils, que devient le navire ?
Parce que le monde est devenu relativiste, faut-il répudier l’héri-tage que d’autres nous ont lais-sé ? Nous avons à le transmettre intégralement ; aux hommes de choisir ! Là est la vraie liberté. Franco Amoroso,
La Tour-de-Peilz
Le père Emonet interpelléMerci pour le dernier relais. Je ne l’ai pas encore lu en entier, mais je suis tombé sur une phrase du père Emonet, en page 5 : « Cette encyclique donne la priorité à la procréa-tion, plutôt qu’à l’amour, dans la sexualité du couple.... » C’est faux et c’est une calomnie. C’est un scandale d’écrire une chose pareille et en plus de la publier ! Certes, l’encyclique a posé et pose des problèmes, mais ce commentaire est déplacé, et c’est le moins que l’on puisse
dire.Nous sommes mariés depuis 1961 et nous savons de ce que nous parlons, notre mariage étant presque contemporain de cette encyclique ! Je ne veux pas en dire plus ici. Il est impor-tant surtout que je vous aie dit ma totale opposition à cette dé-claration du père Emonet.Jean-Pierre et Mireille Jolliet,
Saint-Légier
Réponse du père EmonetJe suis totalement d’accord avec ces remarques, même si je trouve le ton un peu trop agres-sif et passionné. La formulation de mon propos n’est pas très heureuse, je le reconnais. Je ne prétendais pas porter un juge-ment sur l’encyclique Humanae Vitae ni dire mon propre senti-ment, mais seulement rappeler comment elle avait été reçue et perçue dans le grand public.Pierre Emonet, sj, Genève
L’image d’une Eglise joyeuseJe viens de lire avec grand inté-rêt les deux derniers numéros de relais. J’ai noté que votre journal se veut simultanément de réfl exions et d’informations, deux objectifs forts pertinents et jusqu’ici bien remplis. Les réfl exions donnent l’image d’une Eglise joyeuse et proche des préoccupations de chacun, leurs auteurs évitant le langage souvent abscons et confus de certaines homélies, le discours moralisateur et dogmatique, mais aussi les exposés théolo-giques qui ont leur place, non pas ici, mais dans des revues spécialisées et elles sont nom-breuses. Les informations ap-portent un excellent éclairage sur les évènements religieux, culturels et administratifs, qui peuvent intéresser l’ensemble des catholiques vaudois. Je me réjouis de découvrir les pro-chains numéros.Joseph Frund, Corseaux
Un relais vraiment catholique ?
Un idéal essentiellement évangéliqueMerci pour votre journal qui me permet de sentir vibrer un peu l’Eglise catholique en terre vau-doise. Un relais de réfl exions et d’informations, c’est ce qu’il se veut. Puis-je exprimer le sou-hait d’y trouver des réfl exions plus approfondies sur le plan théologique ou spirituel (et pas seulement sociologique) et des informations plus largement ou-vertes sur les autres chrétiens, les autres religions ou courants spirituels ? On ne peut être ca-tholique juste entre soi, il y a né-cessité d’ouverture, de décloi-sonnement et d’un regard plus vaste. Ne réduisez pas l’Eglise catholique dans le canton de Vaud à n’être qu’une petite épi-cerie de quartier !
Dans le dernier numéro de relais, vous donnez la parole à deux témoins « en lisière de l’idéal catholique. » S’il y a un idéal pour un chrétien, il n’est
ni catholique, ni même romain, il est essentiellement évangé-lique. Et ce n’est pas celui d’une perfection, encore moins d’une règle disciplinaire suivie à la lettre ! Mais c’est l’ouverture d’un cœur bienveillant et com-patissant. Celle que Jésus nous montre lorsqu’il s’assied sur la margelle de nos puits d’attente, d’égarements et de solitudes. Celle du Pape François qui dit : « Qui suis- je, pour me permettre de juger ? »Merci encore pour votre travail et votre engagement !Antoinette Bochatay Royer,
Chamoson
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DOSSIER L’aumônerie de l’EPFL a invité Fabrice Hadjadj sur le campus d’Ecublens pour une confé-rence aux étudiants. L’écrivain et philosophe français, directeur de l’Institut Européen « Philanthropos » à Bourguillon-Fribourg, a livré à relais quelques réfl exions et confi dences sur le sens de la résurrection du Christ. Interview.
Fabrice Hadjadj : « La gloire présuppose la croix »
Vous avez des origines juives, des racines arabes et une identité de catho-lique français. Que veut dire concrètement dans votre vie la résurrection du Christ ?Ce qu’il y a de très bon dans cette question, c’est son ad-verbe : « concrètement. » La foi en la résurrection ne doit pas être abstraction ni une évasion. Son au-delà ne saurait nous pousser à déserter l’ici-bas. C’est pourquoi on ne dit pas « je crois en la résurrection » – c’est à dire en un concept ou un état général – mais « je crois en Jésus crucifi é sous Ponce Pilate et ressuscité le troisième jour », une personne concrète inscrite dans un événement historique. C’est là, peut-être, que le juif que je suis rejoint le chrétien que je suis devenu, et le rend attentif au danger d’une espèce de « résurrectionnisme » éthé-ré qui nous sortirait de la chair et du temps.
Que fait d’ailleurs Jésus ressus-cité ? Son corps glorieux pour-rait constituer un objet de fasci-nation et d’extase, et les fi dèles tomber sous hypnose. Mais Jé-sus les ramène à la réalité. Avec les disciples d’Emmaüs, avec les apôtres au Cénacle ou sur les bords du lac de Tibériade, il mange, il commente les écri-tures, il réinscrit le miracle dans l’histoire du Salut, comme n’im-porte quel rabbin, et puis il les envoie en mission, il les pousse à le reconnaître et à le mani-fester, non pas dans son corps splendide, mais dans n’importe quel visage ordinaire. Le témoin de la résurrection est avant tout un envoyé au quotidien : le signe qu’il a connu la gloire, c’est qu’il est capable d’aimer l’individu le
plus terne. Voilà le concret. Est-ce que j’y arrive ?Il y a encore autre chose. La résurrection n’est pas la même chose que l’immortalité. Pour faire un bon ressuscité, il faut d’abord un bon mort. Il n’y a pas ici de fuite devant le tragique de notre condition mortelle. Tout au contraire. Le ressuscité est le même que le crucifi é, la gloire présuppose la croix. C’est donc le corps en tant que vulnérable et livré dans l’amour qui est en jeu, et non quelque fantasme de superpuissance impassible et dominatrice.
Doit-on mourir pour res-susciter ou le sommes-nous déjà un peu… ressus-cités ?Nous sommes déjà entièrement ressuscités… mais en espé-rance, dans le Christ. Notre condition terrestre et notre condition glorieuse partagent une seule et même vie, qui est celle de la charité. À cette heure, la charité est comme la graine enfouie, qui, de sa tige naissante peine à percer l’obs-curité du sol ; là-bas, on la verra fl eurir de toutes ses fl eurs mul-ticolores, et ployer sous l’abon-dance de ses fruits. La condition de ressuscité apparaît donc déjà dans l’amour du prochain, diffi cile et obscur sur la terre, heureux et lumineux dans le ciel.
Elle se manifeste aussi dans le fait d’assumer notre condition charnelle. C’est très important aujourd’hui, où l’on rêve de devenir un cyborg. Si l’on croit que le Verbe a assumé et sauvé notre chair vulnérable et mor-telle, alors on doit aimer cette chair vulnérable et mortelle, et comprendre qu’il y a plus de
grâce dans un enfant trisomique ou une vieille dévote voûtée sur son chapelet, que dans un Ro-bocop suréquipé ou une blindée Superwoman.
Qu’est-ce qu’une Pâque chrétienne peut apporter dans un monde qui sacra-lise moins Dieu et plus l’in-dividu ?Cette manière de s’exprimer est victime d’une vision concur-rentielle des choses : moins on sacralise Dieu, plus on sacralise l’individu, ou inversement. C’est ce que croient les fondamenta-listes religieux aussi bien que les fondamentalistes athées. Les premiers disent : Il faut plus de Dieu, et donc écraser l’hu-main. Les seconds : Il faut plus d’humanité, et donc éliminer Dieu. Mais cela ne marche pas comme ça, parce qu’on ne peut aimer le Créateur sans aimer sa créature, ni la créature sans son Créateur. On ne peut reje-ter Dieu sans rejeter l’humain. Et c’est bien ce que l’on voit aujourd’hui, où l’exploitation de l’humain est extrême, jusqu’à
faire de lui un cobaye, que ce soit comme objet de la Charia ou comme matériel pour la tech-noscience. La Pâque vient nous rappeler l’unité de l’humain et du divin jusque dans la mort, et que Dieu a voulu qu’on le recon-naisse sous les traits du faible, du malfaiteur, du blasphémateur même…
Comment croire encore à la résurrection de la chair ?Si on pouvait répondre au com-ment, on ferait de la foi le résul-tat d’une recette. Or elle n’est justement pas le résultat d’une recette, mais le donné d’une rencontre. Elle ne relève pas de la technique, mais de l’évé-nement. De toute façon, nous croyons toujours déjà un peu en la résurrection de la chair, dès lors que nous avons de la ten-dresse pour les personnes dans leur corps, devinant dans leur visage une singularité qui ne veut pas disparaître.
Propos recueillis par
Maria Zuffrey,
aumônier UNIL-EPFL
Maria Zufferey, aumônier à l’EPFL, questionne Fabrice Hadjadj.
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