14
102 a) b) c) Figure III.32 : Faciès de rupture de composites SiC/Cpyr/Si 3 N 4 de type “B” (Cpyr 200 nm, frittage 1550°C) : a) Allure générale ; b) Détail des fibres extraites avec le revêtement de carbone ; c) Détail de la base de fibres extraites. 40 μm 5 μm 10 μm

Elaboration et étude du comportement mécanique de

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102

a)

b)

c)

Figure III.32 : Faciès de rupture de composites SiC/Cpyr/Si3N4 de type “B” (Cpyr 200 nm,frittage 1550°C) : a) Allure générale ; b) Détail des fibres extraites avec le revêtement de

carbone ; c) Détail de la base de fibres extraites.

40 µm

5 µm

10 µm

Page 2: Elaboration et étude du comportement mécanique de

103

IV.3) Dispersion des résultats

Les comportements mécaniques mesurés sur les composites renforcés par des fibres decarbone sont homogènes. Seule la contrainte à rupture varie de façon appréciable (de 300 à 450MPa) pour une même température de frittage ce que nous pouvons attribuer à la qualité deséchantillons testés. En effet, nous avons signalé au chapitre II (§ IV.1) que les matériauxdensifiés présentent une perte de masse atteignant 6 % qui provient de la dégradation des fibressur les contours des plaques frittées. Ainsi, pour des échantillons découpés près des bords de cesplaques, il est probable que les propriétés mécaniques d’un certain pourcentage de fibres aientété fortement modifiées. Ceci a pour conséquence d’augmenter la dispersion des contraintes derupture.

Pour les composites renforcés par des fibres de SiC, la dispersion des résultats est un peu plusimportante et s’observe à tous les stades du comportement mécanique sous traction. Dans le casdes composites pour lesquels la rupture se produit dans le domaine élastique linéaire (interphasede PyC inférieure ou égale à 100 nm), la distribution des niveaux de contraintes à rupture estsimplement attribuée à la nature fragile de la matrice : la (ou les) première(s) fissure(s)matricielle(s) entraîne(nt) la rupture du composite. Dans le cas des composites qui présentent uncomportement mécanique non fragile et pour lesquels la fissuration matricielle atteint un stadede saturation, la dispersion observée entre les échantillons issus d’une même plaque estrelativement faible. Celle-ci est alors attribuée à des variations locales du volume de fibres etéventuellement à des fluctuations de la densité de la matrice.

Enfin, il nous semble important de mettre ici en évidence l’influence de la reproductibilitédes paramètres d’élaboration sur les propriétés finales des composites. La figure III.1 présenteles comportements en traction monotone de deux matériaux SiC/PyC/Si3N4 issus de deuxplaques différentes mais fabriquées de façon identique. Dans les deux cas, une interphase de 200nm de pyrocarbone (type “A”) a été déposée sur les fibres dans des conditions similaires et latempérature de densification est de 1550°C. Précisons dès à présent que les faibles propriétésmécaniques mesurées sur les composites n°2 constituent un cas isolé dans le cadre de ce travail.Par conséquent, ces matériaux ne font l’objet d’aucune étude complémentaire et leurscaractéristiques mécaniques ne sont pas incluses dans la récapitulation finale des résultatsprésentée au paragraphe IV.4. La comparaison des comportements mécaniques des compositesn°1 et 2 permet de faire trois remarques. Pour les matériaux n°2 :

- les contraintes de microfissuration de la matrice et de rupture du matériau sont nettementinférieures,

- la pente de la courbe (σz - εz) au-delà de la microfissuration matricielle est plus faible,- l’allongement à la rupture est supérieur.

L’observation par microscopie électronique à balayage des coupes transversales pratiquéesaprès rupture sur les échantillons concernés nous a permis d’apporter deux éléments de réponsesà de telles différences de comportement. Dans le cas du composite n°1, le volume de fibresmesuré est proche de 34 % et celles-ci sont uniformément revêtues de pyrocarbone. Par contre,les observations faites sur les composites n°2 montrent un volume de fibres légèrement inférieur(∼ 31 %) dont environ 15 % ne sont pas revêtues. Si cette différence permet de comprendre lalarge dispersion observée en termes de contraintes à rupture de la matrice et des composites, ellen’explique pas le fait que la déformation à rupture des échantillons n°2 soit toujours supérieure àcelle des composites n°1.

Page 3: Elaboration et étude du comportement mécanique de

104

Figure III.33 : Cas extrême de la dispersion observée sur les comportements mécaniques decomposites SiC/Si3N4 (PyC 200 nm, Frittage 1550°C).

Figure III.34 : Distribution des contraintes à rupture de composites SiC/PyC/Si3N4 de type “A”et possédant un comportement non fragile.

0

150

300

450

600

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8

Déformation (%)

Co

ntr

ain

te (

MP

a)

.

vf < 30 %

vf = 34 %1

2

-2.5

-1.5

-0.5

0.5

6.4 6.5 6.6 6.7

LN (σ r)

LN (

LN (

1/(1

-Pr)

))

m = 11

pente = 10

Page 4: Elaboration et étude du comportement mécanique de

105

Ce phénomène pourrait être attribué à des variations des propriétés de la matrice d’une plaqueà l’autre, attribuées à une mauvaise homogénéité en épaisseur du corps en cru et donc à unepression appliquée lors de la densification sous charge mal répartie. Les propriétés de la matricepeuvent en effet avoir un effet conséquent sur l’allure des courbes (σz - εz) [LISS 94]. Ainsi ladiminution de la contrainte à rupture σm

r ou l’augmentation du module de Weibull mm de lamatrice entraîne la diminution de la contrainte à rupture du composite et l’augmentation de ladéformation à rupture (cf. Figure I.13). Ces observations expérimentales n’ont pas fait l’objetd’études plus approfondies. Nous désirons seulement souligner ici l’importance de l’influencede la reproductibilité des paramètres d’élaboration utilisés afin de limiter la dispersion despropriétés mécaniques des composites fabriqués (homogénéité de l’interphase de pyrocarbone,parallélisme entre les différentes faces des corps en cru, etc.).

A l’exception des composites que nous venons d’évoquer et de ceux dont le revêtement depyrocarbone est de type “B”, l’examen du tableau III.4 (cf. § IV.4) montre que la contrainte àrupture de l’ensemble des composites SiC/Si3N4 pour lesquels le comportement mécanique estnon fragile est, à priori, indépendante des conditions de fabrication. A partir de cetteobservation, nous pouvons donc tracer la distribution des contraintes à rupture (Figure III.2).Celle-ci est similaire à la distribution des déformations à rupture. Enfin, signalons que ce typed’analyse n’a pas été développé pour la répartition des contraintes à rupture de la matrice. Eneffet, celles-ci dépendent visiblement des conditions d’élaboration et le nombre d’échantillonsétudiés dans chaque cas est trop faible pour justifier une telle étude.

IV.4) Récapitulation des résultats

Pour plus de clarté, l’ensemble des résultats principaux est repris dans les tableaux III.1(C/Si3N4) et III.2 (SiC/Si3N4) (σmc : limite élastique ; σs : contrainte de saturation de lafissuration matricielle ; σr : contrainte à rupture (/ε : déformations associées).

Frittage

(°C)

Ec

(GPa)

σmc (MPa)

εmc (%)

σs (MPa) σr (MPa)

εr (%)

<ds>

(µm)

<lp>

(µm)

νzy

1650 200 ± 10 80 ± 15

0,04 ± 0,01

175 ± 25 380 ± 40

0,85 ± 0.1

170 ± 50 < 30 0,24 ± 0,02

1700 200 ± 15 140 ± 20

0,07 ± 0,02

180 ± 30 430 ± 20

0,9 ± 0,1

185 ± 50 < 30 -

Tableau III.3 : Caractéristiques mécaniques des composites C/Si3N4.

Page 5: Elaboration et étude du comportement mécanique de

106

PyC

(nm)

Frittage

(°C)

Ec

(GPa)

σmc

(MPa)

σs (MPa) σr (MPa)

εr (%)

<ds>

(µm)

<lp>

(µm)

νzy

0 1600 300 ± 10 - - 175 ± 15

0,06 ± 0,01

- 0 -

100

“A”

1550 285 ± 15 - - 250 ± 70

0,08 ± 0,02

- < 20 0,21 ± 0,02

1600 290 ± 5 - - 360 ± 70

0,12 ± 0,03

- < 20 0,21 ± 0,02

200

“A”

1550 270 ± 20 395 ± 40

0,14 ± 0,02

580 ± 50 700 ± 60

0,75 ± 0,12

110 ± 40 130 ± 90 0,24 ± 0,02

1600 285 ± 5 420 ± 30

0,15 ± 0,03

- 430 ± 50

0,17 ± 0,06

- 35 ± 20 0,22 ± 0,02

200

“B” 1550

280 ± 10 395 ± 10

0,14 ± 0,01

- 430 ± 20

0,26 ± 0,02

- 500 à 1000 0,24 ± 0,02

420 ± 10

0,15 ± 0,01

500 ± 20 630 ± 10

0,73 ± 0,03

200 ± 50 200 ± 100

400

“A”

1550 250 ± 10 350 ± 30

0,15 ± 0,02

520 ± 30 740 ± 30

0,73 ± 0,06

145 ± 50 240 ± 160 0,20 ± 0,04

1600 290 ± 10 440 ± 30

0,17 ± 0,02

560 ± 40 745 ± 50

0,72 ± 0,04

120 ± 35 130 ± 90 0,20 ± 0,04

Tableau III.4 : Caractéristiques mécaniques des composites SiC/Si3N4.

IV.5) Interprétation des résultats expérimentaux

A partir de nos résultats expérimentaux, il est d’ores et déjà possible de faire une premièreanalyse du comportement mécanique de l’ensemble des composites C/Si3N4 et SiC/Si3N4. Nousavons vu qu’une grande variété de comportements a été obtenue en fonction de la nature desconstituants utilisés et des conditions d’élaboration. C’est pourquoi, notre objectif estmaintenant de déterminer quels sont les mécanismes microstructuraux qui sont à l’origine ducomportement des composites à matrice Si3N4 et de quelle façon ces derniers peuvent êtreinfluencés par les paramètres d’élaboration. Les tendances principales sont résumées dans letableau III.5 dans la conclusion de ce chapitre.

IV.5.1) Influence de la nature du renfort

A partir des tableaux III.3 et III.4, il est facile de constater que les composites renforcés pardes fibres de carbone (P25) présentent, en termes de contraintes, des propriétés mécaniquesinférieures à ceux renforcés par des fibres SiC (Hi-Nicalon) revêtues (PyC > 200 nm). Si ladifférence de contraintes à rupture entre les deux matériaux s’explique directement par larésistance mécanique propre à chaque type de renfort (cf. Chapitre II : σr

f (P25) < σrf (Hi-Ni)), la

grande variation observée au niveau de la contrainte de première fissuration de la matrice (∼ 80

Page 6: Elaboration et étude du comportement mécanique de

107

MPa (εmc = 0,04 ± 0,01 %) pour les C/Si3N4 et ∼ 390 MPa (εmc = 0,15 ± 0,03 %) pour lesSiC/Si3N4) fait intervenir un autre paramètre. Cette différence est d’autant plus surprenante quela température de densification des composites C/Si3N4 est supérieure à celle des SiC/Si3N4.L’explication de ce phénomène réside dans l’état de contraintes thermiques résiduelles danslequel se trouvent les matériaux frittés (cf. § III) [PAAR 97]. En effet, dans le cas d’un renfort defibres de carbone, la matrice, avant même l’application d’une sollicitation extérieure, est déjàsoumise à une contrainte de traction longitudinale d’environ 300 MPa (εm

T = 0,1 %) qui diminueconsidérablement sa résistance. Par opposition, dans le cas d’un renfort de fibres de carbure desilicium, la matrice se trouve en compression longitudinale d’environ 100 MPa (εm

T = -0,033 %)ce qui contribue à retarder l’apparition des fissures matricielles. Si nous supposons maintenantque les composites sont libres de toute contrainte résiduelle, la déformation théorique à rupturede la matrice dans le cas des composites C/Si3N4 devient εm

r = 0,14 % ( = εmc + εmT). De même

dans le cas des composites SiC/Si3N4, la déformation théorique de fissuration de la matrice εmr

est égale à 0,117 % ( = εmc - εmT). Cette dernière est plus grande dans le cas des composites

C/Si3N4 : cette tendance s’explique logiquement par le fait que la température de frittage descomposites C/Si3N4 est plus élevée que celle des composites SiC/Si3N4.

IV.5.2) Influence de l'épaisseur de l'interphase dans le cas des composites SiC/Si3N4

Les composites SiC/Si3N4 élaborés sans interphase de pyrocarbone présentent uncomportement linéaire élastique fragile semblable à celui des céramiques monolithiques (FigureIII.13). L'observation des surfaces de rupture montrent que la fissure matricielle se propage àtravers le matériau comme si celui-ci était homogène. Les fibres sont rompues au droit de lafissure et aucune décohésion n'est visible à l'interface fibre-matrice. Ces deux résultats suggèrentune liaison interfaciale très forte dont l'énergie de rupture ne respecte pas le critère de Budianski[BUDI 86] (cf. Chapitre I, équation I.10). Ainsi, la rupture des fibres prédomine largement sur ledécollement de l'interface et le renfort fibreux devient inefficace.

Dans le but de réduire les forces d'adhésion entre la fibre et la matrice et d'optimiser ainsi lespropriétés de l'interface, un dépôt de carbone pyrolytique a été déposé sur les fibres SiC avantleur incorporation dans la matrice. Rappelons que le revêtement a été réalisé par C.V.D. aulaboratoire de Physico-Chimie Minérale de l'Université de Lyon I. Les différentes épaisseursutilisées sont 100, 200 et 400 nm et les résultats associés à chacune d'elles sont rapportés dans letableau III.4. Précisons que, dans cette section, l'influence de l'épaisseur de l'interphase sur lecomportement mécanique des composites est uniquement étudiée dans le cas des dépôts decarbone de type "A" (cf. Chapitre II). De plus, notre interprétation repose sur la comparaison decomposites frittés à une température identique.

Dans ces conditions, l'augmentation de l'épaisseur de pyrocarbone se traduit tout d'abord par(Figure III.13) :

• l’augmentation de la contrainte (σcr) et de la déformation (εc

r) à rupture ;• l’augmentation de la longueur d’extraction des fibres rompues (Figure III.23) ;• le passage d'un comportement mécanique de type fragile à un comportement “pseudo-

plastique” à partir d'une épaisseur de 200 nm.

Pour une épaisseur de 100 nm, le comportement mécanique des composites reste fragile.Cependant, l'observation des surfaces de rupture montre que la décohésion interfaciale a étéamorcée et que les fibres de SiC sont extraites sur de très faibles longueurs (< 20 µm). Ce

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108

résultat suggère qu'en de nombreux endroits, l'interface fibre-matrice est toujours trop forte pourpermettre la poursuite des mécanismes de déviation de fissures et de transfert de charge. Cetteconclusion est également en accord avec les analyses de l'interface effectuées par microscopieélectronique à transmission (cf. Chapitre II, § V.5) qui révèlent que le pyrocarbone estfréquemment absent et que l’interface est alors similaire à celle observée sur les composites sansinterphase. Ainsi, toute disparition du revêtement génère des points d'attache de la matrice à lafibre dont la fréquence est suffisante pour qu'une fissure matricielle entraîne la ruptureimmédiate du renfort fibreux. Deux raisons principales peuvent être invoquées pour expliquerl'absence du dépôt de carbone : l'inhomogénéité du revêtement obtenu par C.V.D. d'une part et ladisparition d'une partie du carbone lors du frittage d'autre part. La validité de ces deux hypothèseest renforcée par l'ensemble des observations faites au chapitre II qui indiquent des variationsimportantes de l'épaisseur du dépôt pour un même échantillon ainsi qu'une épaisseur réelletoujours inférieure à celle annoncée par ses fabricants (Figures II.13 et II.14).

Une analyse identique peut être évoquée ici pour expliquer la rupture au cours de lamultifissuration matricielle des composites fabriqués avec un revêtement de 200 nm et frittés à1600°C (Figure III.14) (cf. § IV.5.3).

Lorsque les matériaux présentent une rupture différée située au-delà du plateau de fissurationmatricielle, l'augmentation de l'épaisseur de l'interphase de 200 nm à 400 nm (pour un frittage à1550°C) entraîne (Figures III.14, III.16 et III.20-22) :

• une diminution du module élastique (Ec) ;• une diminution de la contrainte de première fissuration matricielle (la déformation à la

première rupture matricielle est identique quelque soit l’épaisseur de l’interphase) ;• une augmentation de la distance interfissures moyenne à saturation (Figure III.25) ;• une augmentation de la longueur d'extraction des fibres rompues (Figure III.27).

L'ensemble de ces observations montre que le rôle principal de l'interphase depyrocarbone est de réduire les forces d’adhésion entre la fibre et la matrice et depromouvoir ainsi les mécanismes d’augmentation de la ténacité tels que la décohésioninterfaciale, le transfert de charge, la multifissuration matricielle et l’extraction de fibres.L’augmentation de l’épaisseur du revêtement de carbone à 200 nm permet donc tout d’abordd’obtenir une rupture non fragile des composites. La réduction de la contrainte interfaciale decisaillement par un accroissement supplémentaire à 400 nm, entraîne, conformément auxprédictions théoriques (cf. Equations I.17 et I.26), une fissuration matricielle moins dense et deslongueurs d’extraction des fibres rompues plus élevées. Enfin, les contraintes et déformations àrupture des composites évoluent peu avec l'épaisseur du pyrocarbone. Nos résultats indiquentune faible augmentation de la contrainte à rupture lorsque le pyrocarbone est plus épais : celle-cipeut être due à une meilleure protection des fibres lors du frittage et à la garantie d'un revêtementprésent de manière plus continue à l'interface.

IV.5.3) Influence des conditions de frittage

Evolution des propriétés matricielles

La caractérisation microstructurale des composites nous a montré que l’augmentation de latempérature de frittage favorise la transformation de phases α-Si3N4 → β-Si3N4 ainsi que ladisparition progressive de la porosité résiduelle (cf. Chapitre II). Nous pouvons donc nous

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109

attendre à observer une influence de ces modifications microstructurales sur le comportementmécanique des matériaux.

L’influence de la température de frittage est examinée ici en comparant les résultats obtenuspour les composites C/Si3N4 frittés à 1650°C et 1700°C d’une part, et les composites SiC/PyC(400 nm)/Si3N4 frittés à 1550°C et 1600°C d’autre part. Pour ces matériaux, l’augmentation dela température de frittage se manifeste principalement par (Figures III.8 et III.16) :

• une légère augmentation du module d’élasticité, dans le cas particulier des compositesSiC/PyC (400 nm)/Si3N4 frittés à 1600°C. Celle-ci est attribuée à la diminution du taux deporosité résiduelle et à la disparition de petites fissures détectées après élaboration le plussouvent dans le cas d’une température de densification de 1550°C ;

• une augmentation de la limite d’élasticité (σmc évolue de 80 à 140 MPa (εmc de 0,04 à 0,07%) dans le cas des composites C/Si3N4 et de 350 à 440 MPa (εmc de 0,15 à 0,17 %) dans lecas des composites SiC/Si3N4) ;

• un accroissement du niveau de contrainte supporté par le composite pendant le stade demultifissuration matricielle ainsi qu’une accentuation de l’effet “plateau” (plateau plushorizontal) sur le diagramme (σz - εz) (cf. également § V.3.2).

D’après ces observations, on retiendra surtout l’amélioration des propriétés mécaniques dela matrice par l’augmentation de la température de frittage. En définitive, il semble qu’unetempérature de densification plus élevée entraîne non seulement la diminution du nombre et dela taille des défauts (σmr plus élevée) mais également une distribution plus étroite de leur degréde sévérité (m plus élevé) [LISS 94] (Figure I.13). D’après les observations expérimentales deSabouret [SABO 96] sur des composites C/Si3N4 et l’analyse théorique de Zok [ZOK 92] (cf.Chapitre I, équation I.17), l’augmentation des propriétés mécaniques de la matrice, dansl’hypothèse de propriétés interfaciales identiques, conduit à l’accroissement du pas de fissurationmatricielle à saturation. Ce résultat est bien observé pour les composites C/Si3N4 (cf. TableauIII.3 et Figure III.11) où la distance interfissures moyenne passe de 170 à 185 µm pour uneaugmentation de la température de frittage de 50°C. Un phénomène inverse est pourtant obtenupour les composites SiC/Si3N4 (cf. Tableau III.4 et Figure III.25) pour lesquels la distanceinterfissures moyenne diminue de 150 à 120 µm pour une augmentation équivalente de latempérature de frittage. Cette apparente contradiction peut cependant s’expliquer par uneévolution des propriétés interfaciales du fait de la sensibilité de l’interphase de pyrocarbone auxconditions de densification comme nous allons le détailler maintenant.

Evolution des propriétés interfaciales

L’examen des résultats obtenus dans le cas de matériaux SiC/Si3N4 fabriqués avec uneinterphase d’épaisseur identique et frittés à 1550°C et 1600°C met en évidence l’influence de latempérature de densification sur les propriétés interfaciales. Pour une épaisseur de 200 nm, ladiminution de la température de frittage permet au mécanisme de fissuration matricielled’atteindre la saturation, repousse la contrainte à rupture de près de 250 MPa et résulte en uneaugmentation considérable des longueurs d’extraction des fibres rompues (Tableau III.4 etFigure III.14). Pour une épaisseur de 400 nm, les contraintes et déformations à rupture des deuxcomposites sont similaires. Cependant, la diminution de la température de frittage entraîneégalement l’augmentation de la distance interfissures à saturation (Figure III.25) et uneaugmentation de la longueur d’extraction des fibres rompues (Figure III.27).

Page 9: Elaboration et étude du comportement mécanique de

110

L’ensemble de ces résultats suggère la diminution des propriétés interfaciales avec unebaisse de la température d’élaboration. Une telle observation a déjà été faite sur descomposites SiC (Hi-Nicalon) / PyC / Si3N4 par Kamiya et al. [KAMI 94] lors d’essais de flexion3-points. Dans le paragraphe précédent, nous avons évoqué l’effet majeur de l’épaisseur durevêtement de pyrocarbone et de son homogénéité sur les propriétés mécaniques des composites.A partir de ces résultats et des observations de l’interface fibre-matrice par microscopieélectronique en transmission (cf. Chapitre II), nous pouvons à présent établir un lien entre latempérature de densification et les caractéristiques de l’interface. En effet, l’étape de frittage descomposites est susceptible d’entraîner une disparition partielle du dépôt de carbone et, parconséquent, l’apparition de “points d’attache” entre la fibre et la matrice qui peuvent empêcherles mécanismes de décohésion interfaciale et de transfert de charge d’opérer. Ces “pointsd’attache” constituent alors des défauts critiques du matériau et, à partir des propriétésmécaniques obtenues pour les composites SiC/Si3N4 fabriqués avec des fibres non revêtues qui,rappelons le, présentent un comportement fragile, nous pouvons supposer que la rupture desfibres se produit en ces points précis. Par ailleurs, il est raisonnable d’envisager que ladisparition partielle du carbone est favorisée par une température de frittage plus élevée. Onexplique ainsi la diminution des propriétés interfaciales moyennes pour une température defrittage plus faible.

IV.5.4) Influence des conditions de dépôt du pyrocarbone

Rappelons ici que le dépôt C.V.D. de type “B” a été réalisé dans des conditions telles que lesgaz de réaction et les fibres circulent dans le même sens à l’intérieur du réacteur (cf. Chapitre II,§ IV.2). Pour des paramètres de fabrication identiques (PyC 200 nm, Frittage 1550°C),l’utilisation d’un revêtement de pyrocarbone de type “B” par rapport à un revêtement de type“A” entraîne (Tableau III.4 et Figures III.18-19, III.30-31) :

- soit l’observation d’une rupture antérieure à la saturation de la fissuration matricielleaccompagnée de longueurs d’extraction de fibres rompues près de dix fois plus grandes quecelles mesurées sur les composites de type “A” ;

- soit un comportement mécanique similaire à celui des composites de type “A” avec toutefoisles variations suivantes :

• une légère diminution de la contrainte à rupture ;• une accentuation de l’effet “plateau” sur le diagramme (σz - εz) lors de la multifissuration

matricielle (plateau plus horizontal) ;• une augmentation de la déformation observée en fin de multifissuration matricielle ;• une augmentation du pas de fissuration moyen à saturation ;• une augmentation des longueurs d’extraction des fibres rompues.

L’ensemble de ces résultats indique une diminution importante des propriétésinterfaciales dans le cas des composites de type “B” [VAGA 95] (Figure I.12). Cette dernièreest confirmée par les études microstructurales de l’interface par microscopie électronique àtransmission (cf. Chapitre II) qui montrent un décollement et une perte de contact fréquents auxinterfaces fibre-interphase et interphase-matrice ainsi que des surfaces de fibres très lisses. Cettemicrostructure n’est pas souhaitable puisqu’elle conduit à un transfert de charge moins efficacecomme nous le démontrerons au cours du chapitre IV. Ainsi, plus le coefficient de frottementinterfacial est faible, plus la charge supportée par le renfort fibreux après la fissuration de la

Page 10: Elaboration et étude du comportement mécanique de

111

matrice est importante. Dans le cas extrême où les fibres ne peuvent pas supporter cetaccroissement de contrainte, le composite se rompt. La surface de rupture montre alors uneextraction de fibres importante. Remarquons que, du fait de la très faible valeur probable de lacontrainte de cisaillement interfaciale (τ), ce dernier phénomène est de toute façon peuconsommateur d’énergie.

Par ailleurs, rappelons que la valeur atteinte par la déformation transversale en fin d’essai estplus grande dans le cas des composites “B” (εy

R > 0) que dans le cas des composites “A” (εy R ≤

0). D’après le modèle analytique développé par Vanswijgenhoven [VANS 97] (cf. Chapitre I, §III.5), le déplacement de la déformation transversale à rupture vers des valeurs positives peutprincipalement être attribué à deux facteurs : la diminution de la contrainte de frottementinterfacial ou de la densité de fissures à saturation (Figure I.18). Or, nos mesures montrentclairement que le pas moyen de fissuration moyen après saturation augmente dans le cas descomposites “B”. Par conséquent, les indications fournies par l’évolution de la déformationtransversale confirment l’hypothèse, formulée dans ce paragraphe, d’une diminution despropriétés interfaciales par l’utilisation des conditions de dépôt C.V.D. de type “B”. En effet,dans l’hypothèse d’une rugosité de l’interface équivalente pour les composites “A” et “B”, plusla contrainte de frottement interfacial est faible, plus les déplacements relatifs fibre-matrice sontimportants et donc plus la dilatation radiale est grande (Figure I.15).

V) Evolution des matériaux en cours d’essai

Deux méthodes complémentaires ont été utilisées pour suivre et caractériser l’étatd’endommagement des composites au cours d’une sollicitation de traction monotone.L’évolution du comportement mécanique a tout d’abord été étudiée en réalisant plusieurs essaisinterrompus régulièrement par un cycle de déchargement et de rechargement de l’éprouvette.Parallèlement, la progression de l’endommagement a été suivie au niveau microstructural enévaluant, à différents niveaux de contraintes, le pas de fissuration de la matrice. Ces mesures ontété faites à partir de la prise de répliques de la surface de l’échantillon, à charge constante,comme cela a été expliqué au paragraphe II.2.5.

Précisons que l’ensemble de ces essais a uniquement été réalisé pour les composites possédantun comportement mécanique non fragile ainsi qu’une rupture différée située au-delà du plateaude fissuration matricielle. Les tendances principales observées pour chaque type de compositesont résumées dans le tableau III.5 en conclusion de ce chapitre.

V.1) Remarques générales sur l’évolution du comportement mécanique

Lors d’un cycle charge-décharge, le comportement des composites se traduit par la créationd’une boucle d’hystérésis sur le diagramme (σz - εz). Les caractéristiques de cette boucledépendent non seulement des propriétés micromécaniques des matériaux étudiés mais égalementde leur état d’endommagement à la contrainte maximale à laquelle la décharge est amorcée.Dans l’optique d’une analyse quantitative des phénomènes d’évolution (cf. Chapitre IV), nousindiquons ici l’ensemble des paramètres nécessaires à la caractérisation complète de la positionet de la forme générale de la boucle d’hystérésis (d’après la terminologie proposée par Reynaud[REYN 92]) (Figure III.3) :

Page 11: Elaboration et étude du comportement mécanique de

112

Figure III.35 : Paramétrage des boucles d’hystérésis [REYN 92].

avec :- εmax et σmax (ou S) sont respectivement la déformation et la contrainte maximales ;- εmin et σmin sont respectivement la déformation et la contrainte minimales ;- Ea est le module élastique apparent (Ea = (σmax-σmin)/(εmax-εmin)) ;- εres app est la déformation résiduelle apparente (si σmin = 0, εmin = εres) ;- ∆W est l’aire de la surface intérieure de la boucle ;- WE est la variation d’énergie élastique pendant le cycle (WE = ½ S2 / Ea) ;- Eij sont les modules élastiques tangents à la boucle : en début de décharge (Edd), en finde décharge (Efd), en début de recharge (Edc) et en fin de recharge (Efc) ;- ∆L et ∆H sont respectivement la largeur et la hauteur de la boucle à mi-hauteur (σ =(σmax + σmin)/2).

Ces essais nous ont tout d’abord permis de faire quelques observations générales communesaux deux composites étudiés (C/Si3N4 et SiC/PyC/Si3N4). Ainsi, dans le domaine élastiquelinéaire, les boucles d’hystérésis sont fermées (∆W = 0) et parfaitement superposées à la droitede traction initiale. Le matériau n’est pas endommagé et ses propriétés mécaniques ne sont pasmodifiées. Par contre, dès que le comportement du composite devient non linéaire, le tracé d’uncycle décharge-recharge indique qu’une évolution irréversible de son état a eu lieu. Cettedernière se traduit par une diminution progressive du module élastique apparent accompagnéed’un élargissement des boucles d’hystérésis à mesure que la charge maximale appliquée (S)augmente. Par ailleurs, une déformation résiduelle de plus en plus grande est égalementenregistrée. Au-delà du “plateau” observé sur les diagrammes (σz - εz) de traction monotone (cf.§ IV) et alors que le comportement du matériau redevient quasi linéaire, l’évolution des cyclesest nettement ralentie et l’ensemble des paramètres évoqués précédemment évolue vers unevaleur limite.

Nous allons maintenant examiner en détail l’évolution du comportement mécanique et del’état microstructural de chaque type de composites au cours d’un essai de traction.

Contrainte (σ)

Déformation (%)

Edd

Efc

Edc

Efd

εres app εMax

σmax (ou S)

σmin

εmin

∆L

∆H

Ea

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113

V.2) Composites C/Si3N4

V.2.1) Evolution du comportement mécanique

En raison du nombre limité de composites C/Si3N4 disponibles, seuls les matériaux élaborés à1650°C ont fait l’objet de cette étude. Les diagrammes (σz - εz) obtenus en traction cyclée sontprésentés sur la figure III.4 (pour des raisons de présentation, les figures III.36a et III.36b sontissues de deux échantillons différents mais sont cependant représentatives du comportement del’ensemble des composites testés).

L’évolution générale des cycles charge-décharge dans la direction longitudinale est conformeà celle décrite précédemment. En effet, dans le domaine élastique linéaire, les bouclesd’hytérésis sont fermées (∆W = 0) et superposées à la droite de traction initiale. L’apparition dela non-linéarité entraîne une diminution du module apparent ainsi qu’une augmentationprogressive de l’aire relative (∆W / WE) des boucles et de la déformation résiduelle. Le retour àun régime linéaire se traduit cependant par la stabilisation de l’ensemble de ces paramètres(Figures III.5 et III.6).

Quelques remarques particulières peuvent être faites sur l’allure des boucles d’hystérésis(Figure III.36a). Tout d’abord, signalons qu’en fin de recharge, l’ensemble des cycles tracés sereferment pour une contrainte similaire à celle à partir de laquelle la décharge est amorcée. Cetteobservation implique qu’aucune modification supplémentaire n’est induite au sein du matériaupar l’opération de déchargement-rechargement. Un léger décalage au sommet de la boucle estpourtant détecté pour un niveau de contrainte maximale élevé et situé dans le domaine élastiquelinéaire précédant la rupture finale de l’éprouvette.

Par ailleurs la forme des cycles d’hystérésis évolue avec la contrainte maximale appliquée.Pour des niveaux de charge faibles et situés dans le domaine non linéaire, les boucles de chargeet de décharge sont quasi-paraboliques et symétriques entre elles par rapport à la droite médianeEa (E

dd ≈ Edc et Efd ≈ Efc : Figure III.37). L’augmentation de la contrainte appliquée après uncycle s’accompagne d’une rupture de pente très nette sur le diagramme (σz - εz) indiquant unereprise immédiate du processus de dégradation du composite. Par contre, pour des niveaux decharge plus élevés et situés dans le domaine linéaire après la saturation matricielle, la symétrieentre les courbes de charge et de décharge est moins définie et, en fin de cycle, la courbe derecharge est linéaire. Enfin, le changement de pente lors de la reprise de l’essai de traction est deplus en plus faible.

Enfin, les courbes de décharge et de recharge, tracées sur le diagramme (σz - εy) (FigureIII.36b), sont aussi paraboliques et symétriques entre elles jusqu’à la rupture de l’échantillon.L’aire, ainsi que le module apparent des boucles d’hystérésis, augmentent à mesure quel’endommagement se propage pour se stabiliser lorsque le comportement du matériau retrouveun régime linéaire.

V.2.2) Evolution de la densité de fissures

La densité de fissures augmente rapidement à partir de la limite élastique du composite pourse stabiliser après le “plateau” de fissuration lorsque le comportement mécanique du matériauredevient linéaire (Figure III.7).

Page 13: Elaboration et étude du comportement mécanique de

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(a) Evolution de la déformation longitudinale.

(b) Evolution de la déformation transversale.

Figure III.36 : Diagrammes (σ -ε) obtenus en traction cyclée sur des composites C/Si3N4

frittés à 1650°C.

0

100

200

300

400

0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9

Déformation (%)

Con

trai

nte

(MP

a)

.

-50

50

150

250

350

450

-0.02 -0.01 0 0.01 0.02 0.03 0.04 0.05

Déformation transversale (%)

Con

trai

nte

axia

le (

MP

a)

.

Page 14: Elaboration et étude du comportement mécanique de

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Figure III.37 : Evolution des modules élastiques tangents (rapportés au module d’Young initial)avec la charge maximale appliquée pour un composite C/Si3N4 (fritté à 1650°C).

Figure III.38 : Evolution de l’ouverture des boucles d’hystérésis avec la charge maximaleappliquée dans le cas d’un composite C/Si3N4 (fritté à 1650°C).

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

1.2

50 100 150 200 250 300

Contrainte appliquée (MPa)

Mod

ules

éla

stiq

ues

tang

ents

(G

Pa)

.

Edd

Efd

Ea

Edc

Efc

0.0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

50 100 150 200 250 300

Contrainte appliquée (MPa)

∆W

/WE

.

0

2

4

6

8

10

∆W

.

Delta W/WE

Delta W