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BUREAU DE RECHERCHES GÉOLOGIQUES ET MINIÈRES SERVICE GÉOLOGIQUE NATIONAL B.P. 6009 - 45060 Orléans Cedex - Tél.: (38) 64.34.34 ELEMENTS D'APPROCHE DES MILIEUX ROCHEUX FRACTURÉS DU POINT DE VUE DE L'HYDRAULIQUE SOUTERRAINE par B. FEUGA Département génie géologique B.P. 6009 - 45060 Orléans Cedex - Tél.: (38) 64.34.34 Rapport du B.R.G.M. 84 SGN 128 GEG Réalisation : Département Applications Graphiques

ELEMENTS D'APPROCHE DES MILIEUX ROCHEUX ...infoterre.brgm.fr/rapports/84-SGN-128-GEG.pdfDans l'essai triaxial, l'éprouvette se voit en outre appliquer, sur sa périphérie, une pression

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BUREAU DE RECHERCHES GÉOLOGIQUES ET MINIÈRES

SERVICE GÉOLOGIQUE NATIONAL

B.P. 6009 - 45060 Orléans Cedex - Tél.: (38) 64.34.34

ELEMENTS D'APPROCHEDES MILIEUX ROCHEUX FRACTURÉS

DU POINT DE VUE DE L'HYDRAULIQUE SOUTERRAINE

par

B. FEUGA

Département génie géologique

B.P. 6009 - 45060 Orléans Cedex - Tél.: (38) 64.34.34

Rapport du B.R.G.M.

84 SGN 128 GEG

Réalisation : Département Applications Graphiques

ílXGM • SQN/GEG

R E S U M E

Le présent rapport fait, de manière simplifiée, le point desconnaissances actuelles sur les milieux rocheux fracturés considérés dupoint de vue de l'hydraulique souterraine.

Il décrit les mécanismes de base de la fracturation, au labo-ratoire, et la façon dont ces mécanismes, in situ, donnent lieu au déve-loppement des discontinuités telles qu'on peut les observer dans lanature.

Il rappelle les termes de base relatifs a la description de lafracturation et donne des exemples de distribution de différents paramè-tres caractérisant cette dernière.

Enfin, il résume les lois d'écoulement dans les milieux frac-turés et souligne la dépendance de ces dernières vis-à-vis des contrain-tes mécaniques.

BRGM . SGN/GEG

S O M M A I R E

PREAMBULEINTRODUCTION

1 - MECANISMES DE BASE DE LA FRACTURATION 1

1.1 - La rupture des roches en laboratoire 11.2 - Rôle de 1'anisotropie de la matrice rocheuse 41.3 - Rôle de l'eau 61.4 - Rôle de la température 7

2 - DEVELOPPEMENT DE LA FRACTURATION DES MASSIFS ROCHEUX 9

2.1 - Rôle des hétérogénéités 92.2 - Rôle de la nature pétrographique des roches 102.3 - Le dépôt ou la mise en place des roches : les

discontinuités syngénëtiques ou précoces 122.4 - Rôle des premières phases tectoniques 122.5 - Le cisaillement des discontinuités des roches.

La dilatance 172.6 - L'érosion - La décompression des terrains 192.7 - L'influence du relief 202.8 - Relations des fractures avec les plis 20

3 - CLASSIFICATION DES DISCONTINUITES DES MASSIFS ROCHEUX 21

4 - DESCRIPTION DE LA FRACTURATION 23

4.1 - Les échelles d'étude 234.2 - Les paramètres descriptifs de la fracturation à

l'échelle de l'affleurement 244.3 - L'orientation des fractures 254.4 - Les dimensions des fractures 284.5 - La densité de fracturation 314.6 - Relations mutuelles des différents paramètres 0

caractérisant les fractures 324.7 - Organisation spatiale de la fracturation 32

5 - LES LOIS D'ECOULEMENT DANS LES MILIEUX FRACTURES 375.1 - Rappels d'hydraulique5.2 - Lois d'écoulement dans une fracture 385.3 - Ecoulements dans un système de fractures : le milieu

continu équivalent 415.4 - Détermination du tenseur des perméabilités du milieu

continu équivalent à partir des caractéristiques de lafracturation. Approche simplifiée et premières appli-cations 42

5.5 - Influence de la perméabilité de la matrice 505.6 - Influence de la non continuité des fractures 515.7 - Coefficient d'emmagasinement en milieu fracturé 53

6 - COMPORTEMENT HYDRO-MECANIQUE DU MILIEU FRACTURE 54

Bibliographie 61

3RGM • SGN/GEG

P R E A M B U L E

Ce rapport constitue, à peu de choses près, la première versiond'un chapitre du manuel "Prospection et exploitation d'eau souterraine enroches fissurées", à paraître dans la série "Manuels et méthodes" auxEditions du B.R.G.M.

Le texte qui sera effectivement publié dans cet ouvrage ayantdû être raccourci, il est apparu intéressant de publier, avec Un minimumde retouches, le texte initial sous la forme de ce rapport méthodologique.

L'auteur de ce texte tient à remercier J.L. BLES et P. DLJFFAUTpour les nombreuses et judicieuses remarques qu'ils lui ont faites et quiont permis d'en améliorer le contenu et la forme.

BRGM - SGN/GEG

I N T R O D U C T I O N

C'est à la suite de la reconnaissance du rôle essentiel jouédans de nombreux domaines par les surfaces de discontinuité qui recoupentles roches qu'est apparue la notion de maA&Á.fc KocheWi. Le massif rocheuxse caractérise donc par le fait qu'il est d¿6continu. Il se distingueen cela de la mcL&u.c& fLOCAZUÁZ, qui peut être poreuse [grès peu cimenté],ou fissurée [granite), ou les deux à la fois, mais qui, globalement, peutêtre considérée comme continue à l'échelle envisagée habituellement parles hydrogéologues et les géotechniciens.

Les discontinuités qui recoupent un massif rocheux peuvent êtred'origines diverses, essentiellement syngénétique (joints de stratifica-tion, fissures de retrait, etc..) ou tectonique Cfailles, diaclases, etc.),voire tardive (décompression).

Les propriétés d'un massif rocheux, discontinu, sont bien souventtout à fait différentes de celles de la matrice rocheuse, continue. Ceciest particulièrement évident pour ce qui est des transferts de matière ausein du massif'( circulations d'eau, de fluides hydrothermaux, de gaz, etc.),mais également pour ce qui est de ses caractéristiques mécaniques ou ther-miques, lesquelles, comme on le verra, ne sont pas sans influence sur sescaractéristiques hydrodynamiques.

Ceci explique que, pour la résolution des problèmes liés à l'eauen milieu rocheux, entre autres, la connaissance des discontinuités du mas-sif soit plus importante que celle de la nature pétrographique de la roche.La façon dont se sont formées ces discontinuités, leur morphologie, leurorientation, etc., ne sont cependant pas du tout indépendantes de cettedernière, et cette question fera l'objet d'un paragraphe de ce rapport.

Au préalable, il semble utile d'examiner comment apparaissentles discontinuités dans un massif rocheux.

BROM - SGN/GEG

1 - MECANISMES DE BASE DE LA FRACTURATION

Mis à part les joints de stratification, dont l'origine est àchercher dans le mode de dépôt des sédiments, et les conduits de disso-lution, qui, notons-le au passage, se développent très souvent à la fa-veur des discontinuités préexistantes suivant lesquelles peuvent s'éta-blir des circulations d'eau, toutes les discontinuités recoupant lesmassifs rocheux ont une origine mécanique plus ou moins directe.

L'étude de la rupture des roches en laboratoire constitue unebonne introduction à l'examen de leurs conditions de formation et à leurclassification.

1.1 - La rupture des roches en laboratoire

Le présent paragraphe fait appel à des notions élémentaires demécanique des roches décrites, entre autres, dans l'ouvrage de J.L. BLESet B. FEUGA, "La fracturation des roches", éd. BRGM, 1961.

Les roches peuvent se rompre soit par traction, soit par cisail-lement.

Ces deux modes de rupture correspondent à des types de sollici-tation mécanique différents.

La rupture par t/ULct-Lon est illustrée de manière élémentairepar l'essai de traction directe [fig. 1], au cours duquel une éprouvettecylindrique est soumise à un effort de traction orienté suivant son axe,et d'intensité croissante, jusqu'à la rupture.

t

Plan de Mohr*

Figure 1 - Essais de traction directe

* En géomécanique, on a coutume de compter positivement les contraintesde compression et négativement les contraintes de traction.

- 2 -BUG». SGN/GEG

Dans un matériau isotrope, celle-ci se produit sur des facettesperpendiculaires à la direction de l'effort exercé.

matériauCet essai permet de définir la résistance à la traction du

[F = valeur de la force appliquée,

S = section de l'éprouvette au moment de la rupture].

Très utilisé en métallurgie, il ne l'est que très rarement enmécanique des roches où on lui préfère un essai de traction indirecte,l'essai brésilien.

•Cet essai, schématisé sur la figure 2, consiste à écraser entreles plateaux d'une presse une éprouvette cylindrique en contact avec cesplateaux par deux génératrices opposées. Ce type de sollicitations se tra-duit, au centre de l'éprouvette, et dans l'hypothèse d'un comportement élas-tique et isotrope du matériau, par l'apparition d'une contrainte de compres-sion sur le plan perpendiculaire à la direction de l'effort appliqué, et parune contrainte de traction trois fois moins forte sur le plan passant par lesdeux génératrices de contact.

Plan se l

Figure 2 - Essai brésilien [essai de traction indirecte]

C'est cette contrainte de traction qui donne naissance au centrede l'éprouvette à une fissure qui, en se propageant vers ses extrémités,provoque la rupture.

Il est intéressant de noter, à propos de cet essai, que dans cer-taines circonstances des efforts de compression peuvent donner naissanceà des contraintes de traction, perpendiculaires à la direction suivant la-quelle s'exerce la compression.

D'une manière générale, toute compression donne naissance à unedéformation en e.xtznM.on perpendiculaire à la direction d'application del'effort ; si cette extension - qu'elle soit ou non due à une traction -devient trop grande, elle entraîne la rupture.

Bien que ce type d'essai soit très peu pratiqué sur les rochesen raison de leur rigidité élevée, nous commencerons par illustrer larupture par cisaillement à l'aide de l'essai de cisaillement rectiligns.

MGM - S0N/G6G

- 3 "

dont le principe permet de bien comprendre le mécanisme du cisaillementCfig. 3] : l'échantillon à tester est placé dans deux demi-boîtes, l'unefixe, l'autre mobile. La rupture par cisaillement, suivant le plan quisépare les deux demi-boîtes, est obtenue par déplacement de la demi-boîtemobile, sur laquelle est appliqué par ailleurs un effort normal, réglableà volonté.

T

i

1l

1i

Nr

1as

1J

Demi-boite mobile

Demi boite fixe

Plan de cisaillement(imposé]

Figure 3 - Essai de cisaillement rectiligne (ou à la boîte]io% O"3 = contraintes principales]

Pour un effort normal donné N (correspondant à une contrainteN

normale a « •=• , S étant la surface du plan de rupture], l'éprouvette se

rompt pour un effort tangent T permettant de calculer la résistance au

cisaillement x = r .

La courbe T-o" s'appelle la courbe intrinsèque du matériau.

Le type le plus simple de courbe intrinsèque est la droite.Dans ce cas, la rupture par cisaillement obéit à la loi de Coulomb, quis'écrit : x m a x = c + a.tg$.

Les deux paramètres c (cohésion] et <j> (angle de frottement inter-ne] sont caractéristiques d'un matériau donné. La loi de Coulomb est derègle dans les sols. C'est elle aussi qui régit le frottement et le ci-saillement des discontinuités rocheuses.

Les courbes intrinsèques caractéristiques des matrices rocheusesne sont pas des droites et ont des allures de paraboles (sauf pour lescontraintes très élevées où dans le cas des roches à forte porosité sus-ceptibles d'écrasement , elles ont tendance à se refermer].

- 4 -BRGM - SGN/GEG

La rupture par cisaillement intervient également dans l'essaide compression simple ou dans l'essai triaxial, qui sont deux essais trèsrépandus en mécanique des roches (figure 4).

Dans les deux cas, une éprouvette cylindrique placée entre lesplateaux d'une presse est soumise de la part de celle-ci à un effort axialcroissant jusqu'à la rupture.

Dans l'essai triaxial, l'éprouvette se voit en outre appliquer,sur sa périphérie, une pression hydrostatique p constante, appelée pres-sion de confinement.

Il est à noter que parmi les essais de laboratoire classiques,c'est l'essai triaxial qui reproduit le mieux les conditions de contraintesauxquelles sont soumises les roches au sein des massifs. Encore faut-ilremarquer que, dans cet essai, la contrainte dans le plan perpendiculaireà l'axe de l'éprouvette est isotrope. Les essais dans lesquels les con-traintes appliquées suivant les trois directions de l'espace sont toutestrois différentes, ne sont pas de pratique courante et nécessitent un ap-pareillage spécifique.

Dans les essais de compression simple ou triaxiale, la rupturese produit par cisaillement suivant deux plans conjugués* (symétriquespar rapport a la direction de l'effort appliqué, pour un matériau isotro-pe]. Dans le cas d'un matériau parfaitement homogène, et pour des condi-tions d'essai idéales, cette rupture se produirait en tout point au mêmeinstant, et l'éprouvette se romprait "en masse" sans qu'apparaissent unou plusieurs plans de rupture bien individualisés. En pratique, il en vatrès rarement ainsi, et la rupture se produit par apparition de surfacesde rupture recoupant toute l'éprouvette. Très souvent, la contrainte dansle plan perpendiculaire à l'effort étant isotrope, on obtient une série decassures tangentes à deux cônes opposés dont les pointes s'écrasent.

L'essai de compression simple permet de définir une résistanceen compression simple, Rç, qui est nettement plus élevée que la résistancea la traction, mais il est important de se rappeler que le mode de rupturecorrespondant à la compression simple est le cisaillement. Il faut enfinnoter que plus le confinement auquel est soumise une roche est élevé, plussa résistance à la rupture est élevée (cf. fig. 4b).

1.2 - Rôle de Tanisotropie de la matrice rocheuse

L'anisotropie de la matrice, qui est de règle pour un grand nombrede roches, complique les mécanismes de rupture, dont la description vientd'être faite pour des matériaux isotropes.

Son effet est double : d'une part l'anisotropie de déformabilitémodifie la répartition des contraintes dans la roche, et donc l'orientationdes plans de cisaillement maximum ; d'autre part, la résistance à la rup-ture elle-même est anisotrope, aussi bien en traction, où, pour un matériauschisteux, elle est beaucoup plus faible dans la direction perpendiculaireà la schistosité que dans les autres, qu'en cisaillement, où elle est mini-male suivant le plan de schistosité.

* Ceci n'est vrai en toute rigueur que pour les champs de contrainte plans.En symétrie de révolution (cas des essais de laboratoire), et dans un ma-tériau homogène, il y a une infinité de plans de cisaillement, tangentsà un cône d'axe parallèle à l'axe de symétrie.

- 5 -

Compression simple

a) Principe de l'essai

Compression trioxiole

Rupture en compressionsimple

Rupture en compressiontriaxiole

D) Représentation des modes de rupture dans le plan de Mahr

Compression simple

e

Orientation das directionsconstruction es la -fis. -t'i

Compression trioxiate

e

2 cisaillement ¡angles zéouits ce 1=

Essais CU cor-nressien simple 9t triaxiale

BRGM - SGN/GEG

- 6 -

Cette anisotropie de résistance est illustrée par la figure 5.

10 20 Rc (MPo)

Figure 5 - Anisotropie de résistance en compression simple desmarnes de Sisteron [d'après Ph. MASURE, 1970]

I = rupture par "extension anisotrope"

II = rupture par cisaillement suivant les plans d1anisotropie

III = rupture par "extension isotrope"

Elle se traduit en pratique par le fait que, très souvent, larupture ne se produit pas suivant le plan sur lequel s'exerce la tractionou le cisaillement maximaux, mais suivant la direction de faiblesse quiest à l'origine de 1'anisotropie du matériau, ou suivant une surface inter-médiaire entre les deux

1.3 - Rôle de Veau

L'eau présente au sein des massifs rocheux, à une pression u,que les géomécaniciens qualifient de pression interstitielle, joue un rôlemécanique très important.

En effet, si l'ensemble des efforts s'exerçant sur un massifdonne lieu à une contrainte, dite coni/uú-nte. toiüZs., de composantes norma-les 0" et tangentielle (ou de cisaillement) T sur une facette donnée au seindu massif, la contrainte qui s'exerce effectivement sur le milieu rocheuxet qui détermine son comportement, a pour composantes :

a1 = a - Xu

T' = T

- 7 -BftGM • S G N / G E G

avec 0 < X < 1, X étant égal à 1 dans les roches perméables. Cette con-trainte s'appelle la conÜuUnte. elective. On voit que si la pression del'eau augmente, la contrainte totale restant inchangée, la contrainte ef-fective normale a' diminue. Cette diminution entraîne une réduction dela résistance au cisaillement et favorise ce mode de rupture, comme celaest illustré sur la figure 6.

AIL

Figure 6 - Mécanisme d'une rupture par cisaillement due à unaccroissement de pression interstitielle.(Un accroissement de pression interstitielle Au,sans changer le diamètre du cercle de Mohr, le dé-place vers la gauche et peut l'amener à recouper lacourbe intrinsèque, ce qui provoque la rupture].

Il peut même arriver que l'accroissement de la pression intersti-tielle soit telle que a' devienne négative (apparition d'une traction) etexcède en valeur absolue la résistance à la traction de la roche, ce quientraine une rupture par traction. C'est ce principe qui est à la base dela technique de fafiactu/uvtLon hydnjajuLLquz, utilisée pour la stimulation deréservoirs (surtout pétroliers, mais son application au domaine de l'eaune pose aucun problème de principe) par création de fractures nouvellessous l'effet d'une injection d'eau sous pression.

On peut par ailleurs se demander si l'origine des diaclases(cassures sans traces de mouvement tangentiel), ou du moins de certainesd'entre elles, n'est pas à rechercher dans des mécanismes de fracturationhydraulique naturelle.

1.4 - Rule de la température

La température, ou plus précisément ses variations, jouent égale-ment un role important dans l'équilibre mécanique des massifs rocheux.

Les différents types de roche connaissent au cours de leur his-toire des variations de température importantes. Les roches volcaniqueset magmatiques se solidifient à une température élevée puis se refroidis-sement ; elles échangent aussi de la chaleur avec leurs voisines. Les ro-ches sédimentaires, elles, sont réchauffées en profondeur pendant les pé-riodes de subsidence, alors que l'érosion permet leur refroidissement ul-térieur. Compte tenu des faibles conductivités thermiques des roches,l'équilibre thermique n'est probablement jamais atteint dans la croûte ter-restre. Il peut en résulter des variations de contrainte responsables del'apparition de cassures.

- 8 -BRGM . SGN/GEG

Sous une forme matricielle, qui présente l'avantage de la simpli-cité, le comportement d'un massif élastique est régi par une équation dutype :

a = E Ce - e0] + a0

avec G = contraintes dans le massif

E = rigidité du massif

e = déformations réelles

eo= déformations "potentielles"

ao= contraintes initiales

Différentes simplifications permettent de mieux comprendre lasignification de ces termes.

Si le massif n'est soumis à aucune contrainte initiale et n'as"tle siège d'aucune déformation potentielle, on retrouve la formule de basede l'élasticité :

a = Ee

Un effort extérieur appliqué au massif entraîne des déformationse qui se traduisent par l'apparition de contraintes a assurant le maintiende son équilibre.

Si ce massif est déjà soumis à des contraintes initiales o0 (cequi est toujours le cas des massifs réels, ne serait-ce que du seul faitde la pesanteur], des déformations e dues à un effort extérieur modifie-ront l'état de contraintes qui deviendra : a = Ee + a0.

Si aucun effort extérieur n'est appliqué, il n'y a pas de défor-mations, et bien sûr a = a0.

Supposons maintenant que le massif soit le siège de déformationspotentielles e0. S'il est libre de se déformer, ces déformations poten-tielles deviennent réelles : e = z0, et dans ce cas, aucune contraintenouvelle n'apparaît : a = E (e0 - e0) + 0"0 = oo.

S'il n'est pas libre de se déformer Ce = o) les déformationspotentielles donnent lieu à l'apparition de contraintes nouvelles égalesà -Ee0 :

a = -Ee0 + a0.

Or, dans un massif rocheux, les variations de température cons-tituent la principale source de déformations potentielles. Celles-ci sontégales à :

e0 = -a.AT

a = coefficient de dilatation thermique

AT = variation de température

- 9 -BRGM - SGN/GEG

L'équation décrivant le comportement du massif s'écrit dans cecas :

a = E(e + a.AT) + a0.*

C'est à partir de cette équation que l'on peut expliquer les frac-tures dites "de retrait", comme celles qui apparaissent aux derniers stadesde la mise en place des granites (ces fractures syngénétiques sont en gé-néral qualifiées de précoces, par opposition à celles qui apparaîtront plustard du fait de la tectonique).

Une fois mis en place, un batholite de granite cesse de se défor-mer Ce = 0), et il se refroidit.

Du fait de ce refroidissement (-AT), les contraintes en son seindeviennent :

a = -Ea.AT + a0,

expression qui, pour AT suffisamment important, est négative (contraintesde traction), ce qui entraîne la création de fractures de traction. Ilest à noter que ces fractures ouvertes sont fréquemment injectées de solu-tions magmatiques tardives donnant naissance à des filons d'aplite ou depegmatite.

2 - DEVELOPPEMENT DE LA FRACTURATION DES MASSIFS ROCHEUX

Les mécanismes décrits au paragraphe précédent sont ceux qui ex-pliquent l'apparition et le développement des cassures affectant un massifà toute échelle. Ils interviennent à différents stades de la vie de celui-ci et déterminent la physionomie de sa fracturation telle que nous l'obser-vons aujourd'hui.

Mais, avant de décrire ces différents stades, il convient de pré-ciser ce qui différencie le comportement d'éprouvettes de laboratoire idéa-les de celui de grandes masses rocheuses : la présence d'hétérogénéités.

2.1 - R51e des hétérogène'»tés

Dans une éprouvette de laboratoire idéale, soumise à un champ decontraintes uniforme, les conditions de rupture se trouvent atteintes simul-tanément en tout point et 1'éprouvette est pulvérisée. En réalité, cecise passe très rarement, en laboratoire, et jamais dans la nature. L'expli-cation de ce phénomène réside dans le fait que les roches ne sont pas desmatériaux idéaux et qu'elles comportent des hétérogénéités qui entraînentsoit des concentrations de contraintes locales, soit des diminutions lo-cales de résistance à la rupture.

C'est en ces points que les cassures prennent naissance et c'està partir d'eux qu'elles commencent à se propager.

* Si on retient les valeurs numériques suivantes : E = 6.101* MPa,a = 8.10--6 »c"1, correspondant à un granite moyen, le terme Ea est égalà 0,48 MPa/°c et il suffit d'une augmentation de température de 200°cpour que se développe en compression simple une contrainte de 96 MPa, de1 ordre de grandeur de la résistance en compression simple du matériau.Cette application numérique donne la mesure de l'importance du rôle dela température sur le comportement mécanique des roches.

- 10 -BRGM . SGN/GEG

L'apparition d'une fissure ayant pour effet de relâcher lescontraintes de part et d'autre du plan dans lequel elle est située, sonvoisinage ne se trouve plus en état de rupture potentielle et aucune fis-sure nouvelle n'y apparaît, la première fissure apparue continuant à sepropager dans son plan jusqu'à ce qu'un nouvel équilibre soit atteint.

En fait, la rupture ne se traduit par l'apparition de cassuresfranches que pour certains types de roches, dont le comportement est dit"fragile". Comme on l'a dit au début de ce chapitre, leur nature pétrD-graphique n'est donc pas sans influence sur leur aptitude à se fracturer,et il est utile de préciser un peu ce point.

2.2 - Rôle de la nature pétrographique des roches

Les roches que les géologues qualifient de compétentes ont uncomportement fragile et se fracturent dès que leur limite de résistance estatteinte. Ces roches ont par ailleurs très souvent une résistance méca-nique et un module de déformabilité élevés, ainsi qu'une porosité faible.Parmi elles, on peut ranger les granites et la plupart des roches magma-tiques, les marbres, une bonne partie des calcaires et des grès.

Les roches incompétentes se caractérisent par un comportementplastique : une fois atteinte leur résistance au cisaillement, elles sontsusceptibles de connaître des déformations importantes sans apparitionde cassure. Ces déformations traduisent évidemment une désorganisationde la structure de la roche, et se font à contrainte constante ou du moinspeu variable. Les argiles constituent l'exemple le plus connu de rochesplastiques.

Ceci dit, le caractère - plastique ou non - d'une roche, n'estpas indépendant des conditions de température et de pression dans les-quelles elle se trouve, et son comportement à l'affleurement, ou dans descouches peu profondes, peut être très différent de celui qu'elle a puavoir, à grande profondeur Ce1est-à-dire sous contrainte et températureélevées), à certaines périodes de son histoire. Certaines roches, compé-tentes en surface, comme les calcaires, deviennent en profondeur moinscassantes que des roches plus plastiques en surface, comme les argilites.

C'est ainsi que même des argiles franches et très plastiques peu-vent être le siège de fractures.*

Il est donc important de garder à l'esprit, quand on étudie lafracturation d'un massif, que celle-ci a pu apparaître pour l'essentieldans des conditions très différentes de celles dans lesquelles elle s'of-fre de nos jours à l'observation.

L'évaluation du caractère plastique d'une roche nécessite égale-ment que soit prise en compte la notion d'effet d'échelle. A l'occasionde travaux souterrains profonds, on a pu maintes fois constater que desroches fragiles comme le granite pouvaient exhiber un comportement enmasse de type plastique se traduisant par de grandes déformations [conver-gences importantes en galeries). A y regarder de plus près, on constatetoutefois que ce comportement est dû à une désorganisation du matériaucausée par l'apparition d'une "micro"-fracturation très dense. Un compor-

* II convient d'ajouter que le caractère plastique d'un matériau n'empêchepas qu'y apparaissent des fractures. C'est le cas notamment des frac-tures hydrauliques dans les argiles, qui n'ont rien à voir avec la fra-gilité.

- 11 -BRGM - SGN/GEG

tement plastique en masse ne signifie donc pas nécessairement absence defracturation, mais bien souvent, au contraire, développement d'un grandnombre de très petites fractures de toutes orientations sur des volumesimportants.

On peut s'interroger à propos de l'influence de la nature pétro-graphique des roches sur la densité et les directions de la fracturationqui les recoupe.

En ce qui concerne les directions, cette influence ne fait aucundoute : l'orientation des plans de cassure apparaissant dans une roche sousun état de contraintes donné est fonction des caractéristiques intrinsèquesde la roche (d'une manière simplifiée de sa cohésion et de son angle defrottement internes) ; ces caractéristiques varient d'une roche à une autre,et, surtout, d'un type de roche à un autre type de roche. Ceci dit, cettedifférence de comportement ne se traduit clairement sur le terrain que pourdes roches nettement différentes.

Plusieurs auteurs ont pu observer que dans des granites différentsdu point de vue de leur composition et de leur granulométrie, on retrouvait,dans une même zone géographique, les mêmes directions de fractures, et ce àtoutes les échelles (DUTARTRE, 1981 ; BLES et al. 1983).

Ceci dit, Ph. DUTARTRE a constaté que généralement les fracturesétaient légèrement déviées Cde 20° au maximum) en franchissant l'interfaceentre deux types de granites différents.

En ce qui concerne la densité de fracturation (exprimée par exem-ple en nombre de fractures au mètre, ou en longueur cumulée de fracturespar unité de surface), elle est également fonction de la nature pétrogra-phique de la roche, les roches compétentes étant en général, sur un mêmesite, plus fracturées que les roches à comportement plus plastique. Pourles roches de même famille, on sait depuis longtemps que la dimension desgrains joue un rôle : Ph. DUTARTRE a pu le vérifier en Lozère où des grani-tes à grains fins de la Margeride présentent une densité de fracturationplus élevée que des granités à grain grossier, ceci étant d'autant plus netque le contraste de granulométrie est plus marqué. Pour terminer, nousajouterons quelques compléments à propos de l'anisotropie, déjà évoquée auchapitre 1.

Cette anisotropie peut trouver son origine dans les conditionsde formation, pour les roches sédimentaires (dipßt en couches horizontales,dont le matériau constitutif peut différer de façon plus ou moins importan-te d'une couche à l'autre] ; dans les phénomènes de consolidation subispostérieurement au dépôt (litage des formations argileuses de type "shale") jdans le métamorphisme régional qui entraîne des recristallisations de miné-raux dans les plans de schistosité, ce phénomène pouvant aller jusqu'à laconstitution de lits alternés dans lesquels la proportion de minéraux phyl-liteux est très variable, etc..

Ces différents phénomènes peuvent se succéder dans le temps, leurseffets se superposant et donnant lieu à des structures complexes qui influen-cent très fortement le comportement à la rupture du matériau rocheux ; parrapport aux directions qu'elles prendraient dans une roche isotrope, pourune même sollicitation, les cassures dans une roche anisotrope tendent à serapprocher des directions de discontinuités. Des essais réalisés sur lesschistes du Cheylas (Grésivaudan) par Ph. MASURE (197G) tendent à montrer

- 12 -BRGM - SQN/QEG

que, parmi celles-ci, c'est la direction de discontinuité la plus récem-ment acquise par la roche qui joue le rôle prépondérant (dans le cas évo-qué, la schistosité prend le pas sur la stratification].

A l'issue de ce paragraphe, on vérifie que, pratiquement tousles types de roche étant susceptibles de se fracturer, ce ne peut pasêtre la nature pétrographique du matériau qui détermine la qualificationde "roche fracturée" au sens des hydrogéologues. La définition de ces"roches fracturées" requiert la prise en compte d'autres éléments, quiseront abordés plus loin. C'est pourquoi, contrairement à l'usage, ellene sera donnée qu'à la fin du rapport.

2.3 - Le dépôt ou la mise en place des roches : les discontinuitéssyngénetiques ou precoces

Signalons pour commencer que les joints de stratification nesont pas les seules discontinuités syngénetiques susceptibles d'affecterles roches sédimentaires. Certaines argilites ou évaporites gardent eneffet la trace de fissures de retrait perpendiculaires aux bancs et cons-tituant des réseaux à mailles polygonales, dues à une dessication posté-rieure de très peu à leur dépôt.

Les roches magmatiques intrusives gardent souvent un vestige deleur mode de mise en place sous forme d'une fluidalité (allongement descristaux et des inclusions fluides dans un plan et parfois dans une direc-tion donnée] qui peut induire une anisotropie mécanique. Mais l'élémentle plus marquant est qu'elles sont presque toujours affectées de petitesfractures, dites précoces, assez dispersées en orientation tout en s'orga-nisant en général autour d'une direction préférentielle liée très proba-blement au champ de contraintes existant au moment de la mise en place(et modifié par cette dernière]. Ces fractures, souvent injectées de ve-nues magmatiques tardives (aplites, pegmatites, quartz pour les granites]sont des fractures de traction et peuvent sans doute être interprétéescomme résultant du retrait dû au refroidissement (cf. chapitre 1].

A noter que les fractures incontestablement liées au retraitthermique se rencontrent sous un aspect souvent spectaculaire dans lesroches effusives ("orgues" de basalte, phonolite, etc.).

2.4 - R51e des premières phases tectoniques

Une fois mis en place, un massif est généralement soumis auxefforts tectoniques qui affectent l'ensemble de la croûte et qui, en unpoint donné de celle-ci, correspondent à une succession de phases compres-sives et distensives. Dans la plaque ouest-européenne, depuis le Permien,sept épisodes tectoniques majeurs se sont succédés, avec des durées allantde 4 à 40 millions d'années (GROS, 1983]. Ces phases tectoniques sont àl'origine de l'apparition de nouvelles fractures ou du rejeu de fracturespréexistantes. D'une manière générale, il est démontré que l'essentielde la facturation d'un massif est acquis au terme des premières phasestectoniques (rarement plus de deux] auxquelles il est soumis. Néanmoins,le rejeu des fractures au cours des épisodes ultérieurs, sous l'effet demécanismes différents de ceux qui leur ont donné naissance, modifie engénéral leurs caractéristiques morphologiques, leurs relations avec lesautres fractures, etc., et donc leur rôle hydraulique.

BRGM - SGN/GEG

- 13 -

Les mécanismes de formation des fractures dans les massifs sontdécrits, parmi d'autres ouvrages, dans celui de BLES et FEUGA (1981). Leslignes qui suivent ne donnent qu'un aperçu sommaire de la question.

Une phase de distension* se traduira schématiquement dans un mas-sif rocheux par un état de contrainte tel que celui représenté figure 7.

Coupe verticale Ai

°fr

Traction compression-

Figure 7 - Distribution schématique des contraintes dans lesterrains lors d'une phase distensive.

a-t = contrainte tectonique de traction (une telle contrainte nepeut en réalité être individualisée) •

cr = contrainte "résiduelle"

p = masse volumique des terrains

g = accélération de la pesanteur

K. = rapport entre contrainte verticale et contrainte horizontalerésultant de la seule action de la pesanteur

Si la traction a-¿ augmente, il viendra un moment où la contraintede traction at - ar au niveau du sol excédera la résistance à la tractionde la roche, ce qui provoquera l'apparition, en un point de faiblesse dumassif, d'une cassure verticale perpendiculaire à la direction de disten-sion.

Si la traction continue de s'accroître, la cassure se propagevers le bas, mais en faisant cette fois un angle non nul avec la verticaledans le cas général, cet angle aura tendance à s'accroître avec la profon-deur, sans toutefois excéder 45°. Dans le cas où la courbe intrinsèque de

Le terme "distension" utilisé dans un sens assez vague par les tectoni-ciens, peut correspondre, pour le mécanicien des roches, à deux phéno-mènes différents, décrits au chapitre 1 : la traction (contrainte méca-nique) et l'extension (déformation), cette dernière pouvant apparaîtremême en l'absence de traction. Dans l'illustration présentée ci-dessus,on suppose que la phase distensive évoquée est caractérisée par l'appa-rition effective de contraintes de traction.

BRGM • SGN/GEG- 14 -

la matrice rocheuse serait une droite caractérisée par un angle de frotte-ment interne <j>, la fracture se développerait en première approximationavec un angle constant de 45° - <J)/2 par rapport à la verticale.

Très souvent, les cassures dues à ce mécanisme n'apparaissentpas suivant une seule direction, mais suivant deux directions conjuguées[symétriques par rapport à la verticale dans un massif isotrope dans leplan horizontal).

Dès l'apparition des cassures, des mouvements relatifs des blocsont tendance à se produire. Ces mouvements peuvent être infimes et leurseffets non perceptibles à l'observation : c'est ainsi que l'on peut s'ex-pliquer la genèse des diaclases dont l'origine tectonique ne fait danscertains cas aucun doute (BOUSQUET et PHILIP, 1976), et qui peuvent appa-raître aussi bien sous l'effet de compressions que de distensions. Souvent,toutefois, la seule apparition d'une cassure ne suffit pas à assurer une re-distribution des contraintes correspondant à l'équilibre, il y faut en plusun certain déplacement, et l'on passe alors des fractures ou diaclases aupetites failles.

Dans le cas envisagé, qui est celui d'une distension, les cassuresjouent en failles directes. Si au contraire on considère une phase de com-pression donnant lieu à un état de contraintes représenté schématiquementfigure 6, les cassures qui apparaîtront seront soit des décrochements, soitdes failles inverses.

Plan

8

A A'

Co'JDes vertí

1

}1

/A-

r

csies

B'

B B'//S. •*•// "»

Figure 8 - Distribution schématique des contraintes dans lesterrains lors d'une phase compressive [le facteur X,inférieur à 1, traduit l'influence de la compressionac dans la direction horizontale perpendiculaire àcelle suivant laquelle elle s'exercs ; pour la signi-fication des autres notations, voir figure 7).

BftGM • SGN/GEG

- 15 -

Dans le cas représenté figure 8, si la compression ac augmente,une faille inverse s'amorcera en surface par apparition d'une cassureoblique faisant un angle inférieur à 45° avec l'horizontale et de direc-tion perpendiculaire à celle de la compression. Des cassures sont égale-ment susceptibles d'apparaître suivant la direction conjuguée. Avec laprofondeur, l'angle de ces failles inverses sur la verticale a tendance àse rapprocher de 45°. Des décrochements (failles verticales à déplacementhorizontal) ne peuvent apparaître que si la contrainte mineure horizontaleest inférieure au poids des terrains. Ceci n'est possible en surface quesi une traction s'exerce perpendiculairement à la direction compressive.

Par contre, comme on le voit sur la figure 8, c'est très souventle cas en profondeur et il n'est pas exclu qu'un même état de contraintedonne lieu dans les couches superficielles à des failles inverses et plusen profondeur à des décrochements, lesquels, du fait de la modification duchamp de contrainte qu'ils entraînent, peuvent ensuite affecter les ter-rains jusqu'à la surface du sol. C'est ainsi qu'ont été interprétées depetites failles inverses et des décrochements apparus vraisemblablementau cours d'une même phase de compression E-W dans le granite de Bassiès(Ariège) (BLES et GROS, 1980]. Les contraintes de cisaillement auxquellessont soumis les massifs rocheux ne donnent pas toujours lieu à l'apparitionde failles. Celles-ci sont en effet parfois précédées de l'ouverture defentes d'extension (ou de traction], disposées en échelon, et si l'étatde contraintes dans le massif cesse d'augmenter, ces dernières subsistentsans que se crée une faille proprement dite.

Le mécanisme qui préside à l'apparition de ces fentes en échelonest représenté figure 9.

Comnrsssion ]

O3 (traction]

direction ducisaillement

Fente de traction

Figure 9 - Mécanisme d'apparition des fentes ae traction sousl'effet d'un cisaillement [a : contrainte normale ¡T : contrainte de cisaillement]

II ne peut intervenir que si la contrainte normale sur le plan decisaillement Dotentiel est faible.

Ces fentes de traction apparaissent fréquemment dans les terrainscalcaires. Elles sont alors presque toujours remplies de calcite provenantde la dissolution du carbonate de calcium qui se produit dans les jointsstylolithiques associés à ces fentes.

- 16 -BRGM - SGN/GEG

Entre l'échelle de l'éprouvette de laboratoire, qui a été abor-dée au chapitre 1, et celle du massif, qui fait l'objet des lignes qui pré-cèdent, il existe tous les intermédiaires, et les mécanismes de ruptureévoqués peuvent se produire à tous les niveaux. C'est ainsi par exemplequ'il existe des failles à toute échelle, depuis les grandes failles carto-graphiables dont les rejets se comptent en centaines de mètres, et parfoismême en Kilomètres, jusqu'aux microfailles que constituent les glissementssuivant les joints de grains, en passant par les innombrables petites fail-les décimétriques à décamétriques, dont les rejets peuvent ne pas dépasserquelques centimètres et qui sont la marque des déformations subies par unmassif.

Il est bien connu que les grands accidents sont accompagnés d'unefrange où la petite fracturation* est nettement plus dense qu'en des pointsqui leur sont éloignés. En outre, l'orientation prépondérante de celle-ciest celle de la structure majeure qu'elle avoisine. Des études récentes(BLES et al., 1982 et 1983) tendent à montrer qu'au moins dans certains cas,cette petite fracturation apparaît avant les grandes cassures, et que celles-ci se développent préférentiellement dans des zones à forte densité de frac-tures préexistantes d'échelle inférieure. La mécanique des roches vient àl'appui de cette hypothèse ; il y a en effet tout lieu de penser que, sousl'effet d'un champ de contraintes qui n'évolue que très lentement, un mas-sif a tendance à s'"adapter" en tout point, cette adaptation se traduisantpar le développement de petites cassures qui ne modifient pas significati-vement la distribution des contraintes.

Ce n'est qu'une fois cette "préfacturation" réalisée que, sousl'effet d'un champ de contraintes global n'ayant que peu varié, et donc àdirection de cisaillement maximal inchangée**, de grands accidents pourrontapparaître à la faveur de zones affaiblies, et parallèlement à la directiondes petites fractures. Cette chronologie paraît plus satisfaisante quecelle qui consisterait à supposer que c'est la création des grands accidents

qui engendre la petite fracturation qui les accompagne. Ces grands acci-dents modifient en effet sensiblement le champ de contraintes dans leur voi-sinage, et les fractures de deuxième ordre qu'ils génèrent ne leur sont pasparallèles. Ceci dit, les grandes failles peuvent avoir des épaisseurs deplusieurs dizaines de mètres et à l'intérieur même de ces failles, la peti-te fracturation est extrêmement développée [couloirs de fracturation].

* Les géologues ont pris l'habitude de qualifier de "petite fracturation"celle qu'ils observent à l'échelle de l'affleurement. La petite frac-turation se distingue de la "grande fracturation", qui relève des échel-les cartographiques, et de la microfracturation, qui s'étudie à l'échel-le de l'échantillon et de la lame mince.

* * En fait, La contrainte de cisaillement dans une direction donnée s'exprimepar une formule en sinus du double de l'angle entre cette direction etcelle de la contrainte majeure. Elle varie donc peu autour du maximum,correspondant à 45°. Une rotation de 15° ne diminue sa valeur que de13%. La direction de cisaillement maximal peut donc, compte tenu deshétérogénéités du milieu, être assimilée à un secteur angulaire assezouvert. Cette observation peut expliquer la dispersion - qui est toujoursde règle - des orientations de fractures d'une même famille (c'est-à-dire apparues Lors de la même phase tectonique) et le rejeu de ces frac-tures lors d'une phase ultérieure au cours de laquelle l'orientation descontraintes est quelque peu différente.

- 17 -BRGM - SGN/GEG

Comme on l'a dit, l'essentiel de la fracturation d'un massifapparaît lors de sa mise en place et des premières phases tectoniques aux-quelles il est soumis. La façon dont se fracture un massif déjà fracturésous l'effet d'un épisode tectonique nouveau est en effet très influencéepar la fracturation préexistante, dont on pourrait rapprocher le rôle decelui de 1'anisotropie de la matrice rocheuse. Cette influence se traduitpar le fait que l'essentiel des déformations du massif se produit par re-mise en mouvement des discontinuités préexistantes ; ce n'est que dans desconditions particulières d'orientation du champ de contraintes par rapportaux directions de ces discontinuités que de nouvelles cassures peuvent ap-paraître. A l'issue d'un petit nombre de phases tectoniques, il existedans le massif une variété de directions de discontinuités telle que cesconditions ne peuvent plus se produire. Aucune fracture nouvelle n'appa-raît plus, et les épisodes tectoniques ultérieures font simplement rejouercelles qui existent déjà.

Les mécanismes qui interviennent lors du rejeu des discontinuitésne sont pas sans influence sur leurs caractéristiques hydrauliques. L'und'eux, le cisaillement, fait l'objet du paragraphe suivant.

2.5 - Le cisaillement des discontinuités des roches. La dilatance

Les parois rocheuses constituant les deux faces d'une disconti-nuité sont très rarement planes sur de grandes distances et, en outre, leurétat de surface peut être très variable : les fractures de traction sont engénéral rugueuses, cette rugosité pouvant se trouver renforcée par des cris-tallisations partielles. Les plans de failles sont en général plus lissesdu fait du frottement qui les a rabotés, mais ils présentent parfois desstries [indiquant la direction du mouvement et introduisant une anisotropiedans leur plan), des marques d'arrachement (permettant d'identifier le sensdu mouvement) ainsi que des accumulations de roche broyée. La morphologiedes discontinuités telle qu'on l'observe actuellement ne dépend que trèspeu du mécanisme qui leur a donné naissance ; elle est plutôt marquée par ledernier mode de fonctionnement (traction ou cisaillement) qu'elles ont connuet qui très souvent efface les traces qu'ont laissées les précédents.

Encore convient-il d'ajouter que les phénomènes de dissolution,recristallisation, altération occultent souvent ces vestiges d'origine méca-nique. (Plus rarement, il arrive au contraire que ces vestiges soient "fos-silisés", par exemple par des recristallisations).

Pour qu'un déplacement relatif suivant une discontinuité puisseintervenir, il faut que l'effort de cisaillement qui lui est appliqué excè-de sa résistance au cisaillement, caractérisée par un terme constant, lacohésion, et un terme proportionnel à l'effort normal, qui traduit l'in-fluence du frottement, et donc des irrégularités de surface.

On peut schématiser ces aspérités, quelle qu'en soit la dimension,grains monocristallins ou larges ondulations, à l'aide du modèle "en dentsde scie" représenté figure 10.

Il faut savoir qu'une fracture n'est presque jamais totalementfermée. Même si elle n'a été soumise à aucun cisaillement, son apparitiona modifié l'état de contraintes préexistant, et sous l'effet de cette modi-

- 18 -BKGM • SOH/OÏO

Jeu dextre dilatant Jeu sénestre contractant Joinx stylolithique

Figure 10 - Schématisation des phénomènes de dilatance-contractance lors du cisaillement d'unediscontinuité rocheuse

fication, ses deux lèvres se sont déformées différemment l'une de l'autreet ne sont plus en contact sur la totalité de leur surface comme on levoit sur la figure 11. C'est cette morphologie qui est schématisée surla figure 10. On voit sur cette figure que deux modes de fonctionnementde la fracture sont possibles en cisaillement : soit le glissement desaspérités les unes sur les autres tend à écarter les deux lèvres, donnantlieu à une dilance, soit au contraire il tend à les rapprocher : c'est lephénomène de contractance.

Figure 11 - Exemples de profils de diaclases dans le graniteà grains fins de Maupuy [Creuse] [d'après BILLAUXet al, 19B4). On constate que le nombre de pointsde contact est très limité.

8RGM - SGN/GEG

- 19 -

Ces déplacements perpendiculaires au plan de la fracture lors descisaillements ont une incidence sur la conductivité hydraulique de cettedernière.

Les phénomènes de dilatance-contractance ne sont possibles quepour autant que les aspérités elles-mêmes ne sont pas cisaillées ; cetterupture des aspérités se produit d'autant plus facilement que la contraintenormale à la fracture est plus élevée.

2.6 - L'érosion - La décompression des terrains

L'érosion, en éliminant dans des temps parfois très courts desépaisseurs considérables de terrain, peut modifier très considérablementl'état de contraintes en un point. Cette modification peut se traduirepar l'apparition de fractures nouvelles, dites de décompression, suivantle processus schématisé figure 12.

ta

Érosion S*/1

A

Figure 12 - Mécanisme d'apparition de fractures de décompressiondues à l'érosion

L'érosion a pour effet de réduire rapidement, à l'échelle destemps géologiques, la contrainte verticale av en un point, cependant que,la relaxation des contraintes horizontales pouvant nécessiter des duréestrès longues, celles-ci ne se trouvent que très peu réduites. Le cerclede Mohr représentatif de l'état de contraintes en un point se trouve doncdéplacé vers la gauche au fur et à mesure que l'érosion progresse, et cejusqu'à toucher la courbe intrinsèque. Il apparaît alors au point consi-déré une fracture oblique (ou deux fractures conjuguées) inclinée à moinsde 45° sur l'horizontale. Plus le point considéré se trouvera proche dela surface, plus la fracture sera proche de l'horizontale. Cette descrip-tion correspond au cas d'un massif qui ne comporterait pas de fracturesobliques ou subhorizontales préexistantes. Si de telles fractures exis-tent, elles sont simplement remobilisées ou réouvertes du fait de l'érosion.

- 20 -BRGM - SQN/OEG

2.7 - L'influence du relief

L'érosion n'aboutit que rarement à la constitution de vastesétendues parfaitement planes. Elle imprime au contraire à la surface de laterre un relief qui peut Être très accentué et est à l'origine de distri-butions de contraintes particulières.

C'est ainsi que sur les sommets peuvent apparaître des contrain-tes de traction subhorizontales provoquant l'apparition de fractures detraction subverticales ou l'ouverture de celles qui existent déjà, cepen-dant que les points bas sont le siège de concentrations de contraintes decompression qui ont tendance à refermer les fractures existantes.

Ces mécanismes sont schématisés figure 13.

tures nouvelles ou ouver-ture de celles qui existent

Compressionxermetur9 des fractures

existantes

Figure 13 - Influence du relief sur la distribution descontraintes et sur la fracturation

2.8 - Relations des fractures avec les plis

Les plissements qui affectent les matériaux de l'écorce terrestre,et qui sont le mode de déformation prédominant dans le niveau structuralmoyen, c'est-à-dire à une certaine profondeur Cla fracturation caractéri-sant plutôt, elle, le niveau supérieur, c'est-à-dire la surface], s'accompa-gnent en général d'une fracturation plus ou moins intense qui peut leur Êtreantérieure, contemporaine ou postérieure.

Le présent paragraphe n'a d'autre but que de mentionner cette re-lation, en l'illustrant par deux exemples classiques de types de fracturescontemporaines de la formation de plis isopaques [figures 14 et 15]

- 21 -BRGM - SON/GEG

Figure 14 - Développement de fracturesde traction et de faillesinverses dans une charnièrede pli isopaque[d'après BLES et FEUGA. 1981)

Figure 15 - Développement de fracturesde traction avec glissementbanc sur banc dans lesflancs d'un pli isopaque(voir aussi figure 9)(d'après BLES et FEUGA. 1961)

3 - CLASSIFICATION DES DISCONTINUITES DES MASSIFS ROCHEUX

C'est à dessein que ce chapitre est placé après ceux qui trai-tent du mode de formation et de rejeu des discontinuités. La classifica-tion adoptée, qui n'a pas d'autre but que de rappeler d'une manière logiquela définition d'un certain nombre de termes fondamentaux, s'appuie en effetessentiellement sur les conditions d'apparition et surtout les mouvementsdes discontinuités, qu'il a donc paru utile de décrire au préalable.

Nombreux sont les termes cités ci-après qui ont été utilisés pardifférents auteurs dans des acceptions plus ou moins différentes.

Les définitions retenues ici s'inspirent en particulier de cellesdonnées par HATTAUER (19 73), FOUCAULT et RAOULT (1980) et BLES ET FEUGA(1981), et qui sont sensiblement équivalentes.

Avant de donner les éléments de base de la classification retenue,il convient de s'arrêter un instant à quelques termes très généraux.

D'après le petit Robert, une CR&6UA.Z est une "solution de conti-nuité", un "endroit où un objet a été cassé". Il s'agit du terme le plus gé-néral qui soit. Toujours d'après le petit Robert, une (¡fia.cXuA.Q., en géologie,est une "cassure de l'écorce terrestre". FOUCAULT et RAOULT précisent quecette cassure peut ou non présenter un rejet. Ils introduisent égalementdans leur dictionnaire, en tant que synonyme de fracture, le terme LLZhocÙlie.,proposé par M.A. DAUBREE. En anticipant quelque peu sur les lignes qui sui-vent, on peut constater que, si toutes les failles sont des fractures, tousles joints n'en sont pas, puisque les joints de stratification échappent àla définition de ce terme. L'habitude a néanmoins été prise d'englober sousl'expression générale d'"étude de la fracturation" celle de l'ensemble desdiscontinuités qui recoupent les massifs rocheux.

Quant aux ^-¿¿¿ote¿, ce sont des discontinuités de petite taille,d'extension limitée, ne recoupant souvent aucuns autre discontinuité, et dontle rôle hydraulique est généralement mineur. Ainsi, c'est tout-à-fait abusi-vement que l'on parle de roches ou milieux "fissurés" en hydrogéologie. L'em-ploi de l'adjectif "fracturé" serait très préférable.

- 22 -BRGM - SGN/GEG

a) - Les discontinuités autres que les fractures : joints* destratification, d'origine syngénétique, et joints de schistosité, d'ori-gine tectonique. Ces joints de schistosité sont les joints résultant dudébit des roches affectées par une schistosité.

b) - Les fractures ne présentant pas de trace de mouvement :les diaclases.

Les diaclases peuvent être qualifiées de joints (mécaniques]puisqu'elles se caractérisent par une absence de déplacement relatif desdeux compartiments rocheux qu'elles séparent. Mais, si leur origine tec-tonique ne fait la plupart du temps pas de doute, il n'est pas possiblede se prononcer sur leur mode de formation car des mécanismes de tractionaussi bien que de cisaillement peuvent rendre compte de leur apparition.

c) - Les fractures ouvertes par traction

Ne sont rangées dans cette famille que les fractures créées partraction et qui sont ouvertes et éventuellement remplies.

On peut parler à leur sujet de joints de tension (ou traction,ou extension] : {¡<L¿¿>uA.U ou. h&wtu do. tKaxiXLon s'il s'agit de discontinuitésde petites dimensions et ne recoupant pas le volume rocheux considéré depart en part, {¡suicAuA&à de &ULC£LOYI dans le cas contraire.

Les joints de tension peuvent soit avoir été réinjectés par desfluides d'origine magmatique, soit avoir fait l'objet de recristallisationspartielles ou totales : dans ces cas on parle de veines, filonnets, filons**,dykes, etc...

d) - Les fractures avec traces de mouvement tangentiel : les failles

Le terme de faille ne se réfère pas au mode de formation de la cas-sure qu'il désigne ¡ en effet, toute cassure, quelle que soit son origine(cisaillement ou non], dès lors qu'elle connaît un mouvement tangentiel desdeux parties de roche qu'elle sépare, peut être qualifiée de faille (une ex-ception étant à faire toutefois pour les joints de stratification qui conser-vent cette appellation, même s'ils sont le siège de glissements banc surbanc].

On peut parler de failles à toutes les échelles. Néanmoins, pourles failles de très petites dimensions, on préfère parler de p¿a.ní> de, g¿¿6-6<¿yn<LYit (glissements grain sur grain, glissements intracristallinsJ.

* Le terme "joint" désigne toute discontinuité ne présentant pas de trace demouvement tangentiel. On distingue les joints syngénétiques (stratifica-tion) des joints tectoniques ou structuraux (joints de schistosité, jointsde tension, joints stylolithiques). A noter que les interfaces entregrains monominéraux sont qualifiés de "joints de grains".

** Le terme "filon" s'applique d'une manière générale au résultat du remplis-sage d'une discontinuité plane, quelle que soit son origine (joint detension, diaclase, faille ou même schistosité).

- 23 -BRGM - SGN/GEG

II est souhaitable d'éviter l'utilisation du mot "cisaillement"comme synonyme de faille, et de limiter son usage à la désignation duprocessus mécanique qui porte son nom (exemple : rupture par cisaillement).

e) - Les fractures avec rapprochement et interpénétration desdeux compartiments : les joints stylolithiques.

Résultant de phénomènes de dissolution-recristallisation liés àdes gradients de contraintes élevés, il ne se rencontrent que dans desroches solubles : calcaires et, à un degré bien moindre, grès.

4 - DESCRIPTION DE LA FRACTURATION

4.1 - Les échelles d'étude

La première étape d'une étude de la fracturation consiste en sonobservation et en sa description partout où cela est possible.

Cette approche peut être effectuée, aux trois échelles suivantes i

- aux é.dneJULsJ> c.aAtogKaphijquißJ> : étude des cartes géologiques et géophysi-ques (gravimétrie, etc..) et étude des cartes d'interprétation des photo-graphies aériennes classiques ou des images de satellites.

- à VtoheJUÜL de. V'OLllte.uAemtnZ : étude par observation directe des affleu-rements de surface naturels ou artificiels (carrières, talus de routes)et des "affleurements" de subsurface, tels que les galeries de mine oules carottes de sondage orientées.

- à UzchflZXJL mi.CAOicopLquui : étude de lames minces au microscope optique etde sections polies au microscope électronique.

Suivant l'échelle d'étude, la nature et la dimension des fracturesvarient de la manière suivante :

- les fractures étudiées aux échelles cartographiques sont essentiellementdes failles ou des filons de longueur hectométrique à plurikilométrique.

- à l'échelle de l'affleurement, il est possible d'étudier non seulement lapetite fracturation - petites failles, diaclases, fractures de traction,petits filons, joints stylolithiques - de dimensions centimétriques à dé-camétriques, mais aussi les grandes failles cartographiables, lorsqu'ellessont mises au jour à la faveur de déblais frais.

- à l'échelle microscopique on peut étudier les joints et les microfracturesinter et intra-granulaires.

Les études effectuées à l'échelle cartographique donnent une visiond'ensemble du tracé des grandes failles et filons mais, sauf cas exception-nels, elles ne fournissent des renseignements précis que sur la direction deces fractures et non sur leur pendage.

L'étude des affleurements permet d'étudier les fractures en troisdimensions puisqu'il est possible de mesurer la dJjizctLon eX tu pe.nda.ge. desplans de discontinuités. En outre, c'est à l'échelle de l'affleurement quel'on peut faire les observations les plus complètes (études géométrique,cinématique et chronologique).

- 24 -BRGM - SGN/GEG

Les études au microscope sont effectuées sur des échantillonsprélevés sur les affleurements. Elles sont utilisées pour préciser àune échelle plus fine les observations de terrain.

En résumé, l'observation de la fracturation aux fins d'analysestructurale s'exerce pour l'essentiel à l'échelle de l'affleurement, maiselle doit être reliée constamment à l'étude structurale cartographiquequi généralement la précède.

4.2 - Les paramètres descriptifs de la fracturation à l'échelle de Vaf-fleuremenT

En plus des données permettant la localisation géographique etgéologique des observations [situation, type de roche affectée et orienta-tion des "affleurements"], il est possible de caractériser chaque disconti-nuité par les éléments suivants :

- la nature de la discontinuité (cf. classification du chapitre 3],

- son orientation : direction et pendage,

- ses relations avec les autres discontinuités [rapports de chronologie :décalages et rejeux),

- la direction et le sens d'un éventuel mouvement, matérialisés par desstries sur les plans de faille ou par l'orientation des cristaux de rem-plissage des fentes et fractures ouvertes (aspect cinématique),

- la planéité et la rugosité qui caractérisent la morphologie des plans dediscontinuités et découlent de leur histoire cinématique (création, jeuet rejeu possible),

- la longueur et éventuellement la terminaison (dans la roche ou contre uneautre discontinuité),

- la continuité, une fracture pouvant ne pas être continue sur la totalitéde son étendue (existence de ponts de matière, fissures en échelon, enrelais, etc..),

- l'épaisseur, et éventuellement le remplissage et l'ouverture libre (la si-gnification de ces termes est donnée figure 16),

- le degré de séparation, rapport de la surface ouverte sur la surfacetotale de la fracture,

- une évaluation de la décompression qu'a pu connaître la discontinuité obser-vée du fait du mécanisme qui l'a amenée à l'affleurement j très souvent,en effet, l'épaisseur observée est beaucoup plus importante que l'épais-seur en milieu vierge, du fait de cette décompression,

- la présence d'eau, en quantité plus ou moins importante, dans le plan delàdiscontinuité ; cette eau a pu, entre autres, provoquer un décolmatage,si la discontinuité était remplie d'un matériau meuble et non cohérent,

- l'écartement entre la discontinuité considérée et la discontinuité suivantede même orientation.

- 25 -BRGM SGN/GEC

Remplissege

Lèvres

ecoite

eponte

Figure 16 - Epaisseur et ouverture d'une fracture

4.3 - L'orientation des fractures

L'orientation des fractures dans une zone donnée n'est pas quel-conque, puisque, comme on l'a vu au chapitre 2 , un mécanisme générateur defractures provoque l'apparition de celles-ci dans des directions bien pré-cises, l'hétérogénéité du matériau rocheux entraînant toutefois une cer-taine dispersion autour de ces directions.

Dans la très grande majorité des cas, les fractures s'organisentautour d'un certain nombre de directions moyennes, que l'on peut mettre enévidence au moyen de diagrammes stéréographiques.

Ces diagrammes sont établis à partir d'un hémisphère par le cen-tre duquel on fait passer toutes les directions de fractures relevées. Lanormale à chaque fracture passant par ce centre recoupe l'hémisphère en unpoint qualifié de pôle, qui est projeté sur un plan. On obtient ainsi unereprésentation plane de toutes les directions de fractures observées.

En pratique, deux types de projection sont utilisés : le projec-tion de Schmidt, qui conserve les surfaces et peut donc être utilisée pourdes évaluations de densités de pôles, et la projection de Wulff, qui con-serve les angles et est utilisée pour les constructions géométriques[figure 17).

Pion

Pôle du pionPôle

SCHMIDT Projection du pôle WULFF Projection du pôle

Figure 17 - Principe des projections de Schmidt et de Wulff

BRGM - SGN/GEG- 26 -

La figure 18 présente un exemple de report sur diagramme de Schmidtdes directions de discontinuités relevées dans une carrière

Figure 16 - Report sur diagramme de Schmidt [hémisphère inférieur]des directions de discontinuités relevées dans lesmicaschistes de Montredon-Labessonnié (Tarn] (rec-tangles : joints de schistosité, croix : fractures].

- 27 -BRGM . SGN/GEG

On voit très clairement sur ce diagramme que les joints de schis-tosité se regroupent en deux familles directionnelles assez concentrées,cependant que les fractures, quoique plus dispersées, s'organisent néanmoinsnettement en trois familles dont l'une, de direction moyenne N 135°E et dependage moyen 75°W, est nettement plus importante que les deux autres.

Cette approche descriptive grossière gagne à être complétée parune approche plus fine, que J.L. BLES a proposé de qualifier ú'appKOCke.mofLphocA.nejncuU.qae..

Elle correspond à l'étude de la morphologie des plans de fractu-res [plans striés, fractures ouvertes...) et à l'interprétation des mouve-ments et des contraintes qui leur ont donné naissance ou qui les ont faitrejouer.

Par rapport à la démarche descriptive, elle permet une meilleureidentification des familles. En effet, une famille directionnelle définieà partir de la seule analyse des directions [information synthétisée surles diagrammes circulaires) peut être constituée de deux [ou trois) famillesmorphocinématiques ou ^OJfùJUiQJi \)MJLQJ>, c'est-à-dire apparues du fait d'unseul et marne mécanisme.

Cela peut être le cas des petites failles de décrochement dextreset senestres qui font entre elles un angle faible. Ces fractures sont sub-verticales et on peut rencontrer par exemple une famille de failles dextresde direction moyenne N 70°E variant de N 5D°E à N 90°E et une famille defailles senestres de direction moyenne IM 100°E variant de N 7D°E à N 12DCE.Si l'on ne tient pas compte du sens de mouvement de ces familles vraies,on obtient par addition de tous les plans une seule famille directionnellede direction moyenne N 80°E variant de N 5D°E à N 120°E.

Jointe à l'étude des relations des fractures entre elles, l'appro-che morphocinématique permet aussi :

- un tri et un regroupement des familles vraies en systèmes apparus au coursde phases de déformations distinctes,

- la définition de la succession chronologique de ces phases, cette succes-sion ayant abouti à l'état actuel du massif rocheux considéré.

Il est ensuite possible de préciser le mouvement originel et lesrejeux ultérieurs des failles cartographiables et d'interpréter la morpho-logie de leur tracé.

Cette phase est fondamentale pour l'interprétation des modalitésde circulation des fluides et du remplissage des zones perméables par desminéralisations ou des produits d'altération.

La réussite de l'étude morphocinématique dépend évidemment du nom-bre et de la qualité des affleurements, mais aussi de la nature des terrainsétudiés (études faciles dans les séries carbonatées, plus difficiles dansles terrains granitiques, gneissiques ou gréseux et dans les schistes ardoi-siers ; études difficiles dans les séries schisteuses s.l.)

BRGM - SGN/GEG

- 28 -

4.4 - Les dimensions des fractures

Sauf exception, l'observation ne permet pas de déterminer toutesles dimensions d'une fracture.

S'il est possible d'accéder par l'observation, avec les restric-tions émises précédemment, à la connaissance de son épaisseur et/ou de sonouverture libre, par contre son étendue dans son plan n'est pas détermina-ble. Seule est mesurable, dans le meilleur des cas, la longueur de sa tra-ce sur la surface d'observation. Cette longueur constitue très générale-ment une limite inférieure de sa plus grande dimension, en raison d'unepart de la taille limitée de la surface d'observation qui très souvent necontient pas les deux extrémités de la trace de la fracture Ccette res-triction ne s'applique pas aux photos aériennes j mais dans ce cas, un au-tre facteur, jouant dans le même sens, intervient très souvent : les frac-tures ne sont visibles en photo aérienne-que sur de petites parties de leurtracé), et d'autre part du fait que, sauf exception, la surface d'observa-tion ne recoupe pas les fractures suivant leur plus grande dimension.

Cette difficulté ne retire aucunement leur intérêt aux études por-tant sur les longueurs des traces de fractures, seule méthode d'approche deleurs dimensions réelles.

La figure 19 présente un exemple de distribution de ces longueursde traces de fractures.

0,10

1,60

mitres

•iSS fractures

Figure 19 - Distribution des longueurs de traces des xracturesde toutes directions identifiées sur photographiesaériennes dans le granite de la Tonara (Corse) -(d'après BLES, DELPONT et al., 1963).

BRGM • SGN/GEG

- 29 -

Des études théoriques sont en cours en vue de permettre le passagede distributions de ce type aux distributions des dimensions réelles.

L'observation permet également d'établir des distributions desépaisseurs ou des ouvertures libres (figure 20).

(

0-0,2

0.2-0,5

Q5-Í

1.2

2.5

5.10

40.20

mm

y40 20 30 kO SO 60 10 80 SO 400

~ -

52

Xfrocturts o¿»¿erv*'tt

Figure 20 - Distribution des épaisseurs des fractures de toutesorientations relevées dans une galerie de la mine deFanay-Augères, granite de Saint-Sylvestre (Haute-Vienne) (d'après D. LASSAGNE, 1963).

L'évaluation de ces paramètres par observation directe est toute-fois, comme on l'a dit, sujette à caution, et seules des méthodes d'approcheindirectes ne perturbant pas le milieu, comme des essais à l'eau sur frac-tures en sondage, permettent d'établir des distributions représentativesd'"ouvertures hydrauliques équivalentes". Un tel paramètre rend compte nonseulement de l'ouverture libre des fractures, mais également de leur conti-nuité, de leur degré de séparation, de leur rugosité, etc..., tous facteursqui influencent la valeur de leur conductivité hydraulique (cf. chapitre 5).

Les suédois CARLSSON et OLSSDN (1980) ont effectué des détermina-tions de ce paramètre à l'aide d'essais hydrauliques dans des granites gneis-siques sur le site de la centrale de Forsmark. (Suède). Les paramètres de ladistribution des ouvertures libres qu'ils ont calculés pour une populationde 317 fractures sont les suivants :

MoyenneMaximumMinimumEcart-typeMédiane

71 ym1 100 um

3 ymS2 ym4 7 ym

- 30 -8RGM - SGN/GEG

Le calcul de l1"ouverture hydraulique équivalente" à partir d'es-sais à l'eau repose sur les hypothèses que la fracture possède une ouver-ture constante, et qu'elle est ouverte sur toute l'étendue de son plan.

Ces hypothèses ne sont en général pas vérifiées dans la pratique :les profils de fractures de la figure 11 donnent une idée de la variabilitépossible de l'ouverture libre. La distribution de ce paramètre, déterminéedirectement en laboratoire, pour les mêmes fractures, est illustrée figure21.

Fréquences cumulées

Ouverture en mm

0,2 0,3

Figure 21 - Distribution des valeurs de l'ouverture d'une frac-ture dans le granite de Maupuy CCreuse!)(d'après BILLAUX et al, 1984, modifié]

Toutefois, pour ce même type de fracture, on peut constater surla figure 11 qu'il n'existe pas de dérive de l'ouverture, et qu'il est doncpossible de définir une ouverture moyenne valable pour l'ensemble de lafracture.

Ceci est néanmoins loin d'être toujours le cas. En ce qui concer-ne la seconde hypothèse mentionnée plus haut, on peut observer, sur lafigure 21, que les points de contact entre les deux lèvres de la fracturene représentent que 15 % de la surface de celle-ci, et que l'hypothèse sui-vant laquelle elle est totalement ouverte n'est pas éloignée de la réalité.

BROM • SGN/GEG

- 31 -

Hais encore une fois, cette situation ne constitue pas la règlegénérale. B. FEUGA C1983] a pu montrer que dans une fracture recoupantdes schistes volcanosédimentaires du Portugal et ayant fait l'objet de re-cristallisations partielles de calcite, le degré de séparation (rapport dela surface offerte à l'écoulement sur la surface totale de la fracture) nedépassait pas 5 %.

4.5 - La densité de fracturation

La densité de fracturation peut être définie à une, deux ou troisdimensions, la signification physique de ce paramètre étant exactement lamême dans ces trois cas.

A une dimension, la densité de fracturation s'exprime par le nom-bre de fractures par unité de longueur ; à deux dimensions, par la longueurcumulée de fractures par unité de surface, et à trois, par la surface cumu-lée de fractures par unité de volume : la dimension est donc toujours cellede l'inverse d'une longueur.

On peut définir des densités de fracturation toutes familles di-rectionnelles confondues, ou par famille. Dans cette dernière situation,et pour le cas monodimensionnel, on parle souvent de fréquence. Cette fré-quence peut être vraie, si les fractures sont dénombrées suivant une direc-tion perpendiculaire à celle du plan moyen de leur famille, ou apparente,dans le cas contraire. On montre que la densité superficielle ou volumi-que de fracturation est la somme des fréquences (vraies) de chaque famillede fractures.

Par ailleurs la fréquence vraie d'une famille est égale à l'inversede l'écartement (ou espacement) moyen des fractures de cette famille.

Ce paramètre écartement peut faire, au même titre que les autres(longueur, ouverture, etc.), l'objet d'études statistiques (figure 22).

icär'sments im)

40 20 30 UO SO tfO ?O 80 âo

Figure 22 - Distribution des écartements d'une famille de fracturesrelevés dans une galerie de la mine de Fanay-Augères(granite de Saint Sylvestre, Haute Vienne),(d'après D. LASSAGNE, 1983).

- 32 -BRGM - SCN/GEG

4.6 - Relations mutuelles des différents paramètres caractérisant lesfractures"

Dn peut penser que les différents paramètres qui ont été décritsprécédemment ne sont pas indépendants les uns des autres.

Des études récentes CD. LASSAGNE, 1983] ont été menées sur lesrelations entre longueurs, épaisseurs et écartements dans un massif grani-tique. Ces études ont montré qu'il existait une corrélation nette entreépaisseur et longueur des fractures. Aucune relation, par contre, n'aété mise en évidence entre l'écartement et les deux autres paramètres, ceciétant semble-t-il imputable au fait qu'a été pris en compte dans les étudesréalisées l'écartement entre fractures consécutives, alors que l'écartemententre fractures de même classe de dimensions eut sans doute été plus signi-ficatif. Cette question a un rapport direct avec celle de l'organisationspatiale de la fracturation, qui sera abordée au paragraphe suivant.

Il est intéressant de noter, par ailleurs, qu'on montre très fa-cilement que, pour une famille directionnelle donnée, il existe entre lenombre de fractures par unité de surface ou de volume, n, l'écartement moyendes fractures, e, et leur dimension moyenne a [longueur ou surface suivantles cas], la relation :

n a e = 1

Cette formule, si l'on s'intéresse comme c'est le cas très généra-lement aux écartements entre fractures consécutives, conduirait à rechercherune corrélation entre longueur et inverse de l'espacement. L'existenced'une telle corrélation témoignerait de la constance du nombre de fracturespar unité de surface dans la zone étudiée.

La conductivité hydraulique d'un milieu rocheux fracturé dépendnon seulement du nombre de fractures qui le recoupent, mais également deleur degré d'interconnexion.

Ce degré d'interconnexion est fonction des orientations des diffé-rentes familles de fractures, mais également des longueurs et des écarte-ments caractéristiques de chacune d'elles.

Il s'accroît si la dimension des fractures augmente, et si leurécartement diminue, c'est-à-dire si le facteur .5. augmente [a et e étant sup-

eposés les mêmes pour toutes les familles dans ce raisonnement simplifié]. Dnpeut remarquer que, à nombre de fractures constant, ce facteur est inverse-ment proportionnel au carré de l'écartement moyen d'une famille.

4.7 - Organisation spatiale de la facturation

Que l'on considère une seule famille directionnelle ou au contrairetoutes les directions de fractures, on s'aperçoit en général que la fractura-tion n'est pas distribuée dans l'espace de façon aléatoire, mais qu'elle pré-sente un certain degré d'ordre que les géostatisticiens mettent en évidencesous le nom de "régionalisation" [figure 23]

Cette régionalisation entraîne par exemple que les observationseffectuées ou les essais réalisés sur une zone donnée ne peuvent être éten-dus, au-delà d'une certaine distance de cette zone.

Nombre de fractures

par section de 5 m de galerie

12

10

2mOm -Wl-r

Om 10 20 40 50 60 70 80 90 100 m

Fig. 23 - Exemple de régionalisation de la fracturation. Représentation de toutes les fractures d'unefamille donnée observées sur un parement de galerie dans la mine de Fanay-Augères (Haute Vienne),dans le massif granitique de Saint-Sylvestre. On voit apparaître une certaine structuration, lesfractures ayant tendance à se regrouper en "couloirs".

- 34 -BRGM - SGN/GEG

En ce qui concerne la petite fracturation, la question de savoirà partir de quelle distance les résultats obtenus dans une station de me-sure ne sont plus valables a pu trouver un élément de réponse dans le gra-nite de Bassiès (Pyrénées ariégeoises) à partir de comparaisons réaliséespar BLES, DUTARTRE et GROS (1982] entre les fréquences des familles direc-tionnelles de la petite fracturation et celles des failles hectométriquesde même orientation définies à l'échelle cartographique :

Pour une famille donnée, les faibles densités de la petite frac-turation (écartement supérieur à 2 m] ne s'observent que dans les secteursoù les failles hectométriques montrent également des densités faibles àmoyennes, alors que dans les secteurs où les grandes fractures montrentdes densités fortes, on n'observe que des densités fortes de la petite frac-turation (écartements très inférieurs à 2 m ] . Par contre, les fortes den-sités de la petite fracturation peuvent être rencontrées partout, quelleque soit la densité des fractures hectométriques.

Il faut préciser toutefois que cette étude comparative a pu êtrefaite dans le granite de Bassiès en raison de l'abondance de failles de lon-gueur hectométrique à plurikilométrique bien visibles sur les photographiesaériennes.

Ces conditions favorables ne se présentent que rarement dans lapratique.

Les observations de BLES, DUTARTRE et GROS trouvent une confirma-tion dans les résultats d'une étude géostatistique réalisée sur le granitede Saint Sylvestre (Haute Vienne) (BERTRAND et al., 1982].

Cette étude a montré que la fracturation présentait une organisa-tion en structures emboîtées, l'échelle d'observation retenue faisant ap-paraître l'une ou l'autre de ces structures (figure 24).

On voit sur cette figure que le variogramme de la densité de lapetite fracturation présente une portée de l'ordre de 500 m, alors que pourla grande fracturation, cette portée est voisine de 2.000 m. (La portée d'unvariogramme représente la distance entre deux points au-delà de laquelle iln'y a plus de relation statistique entre les valeurs d'un paramètre donné ences deux points).

Chacun des niveaux de structure identifiés a tendance à occulterles structures de niveau inférieur.

Une telle organisation est schématisée figure 25.

Les conséquences de ce mode d'organisation au plan des études deressources en eau en milieu fracturé sont nombreuses. L'une d'entre ellesest que, le milieu fracturé étant beaucoup plus complexe que la plupart desmilieux poreux, les reconnaissances et essais préliminaires doivent être plusnombreux et plus approfondis dans le premier que dans les seconds, et queleurs résultats gagnent à être interprétés d'un point de vue statistique.

Ceci s'impose du fait de la faible représentativité spatiale desessais, d'une part, et de la nécessité de bien connaître la fracturationdu volume de terrain qu'ils affectent pour les interpréter correctement,d'autre part. Un essai en milieu fracturé, par ailleurs, n'aura de signi-fication que s'il intéresse un nombre statistiquement représentatif de frac-

- 35 -8RGM - SGN/GEG

4-0

/

o

¿il ,o o

o

O "Petits" fraczuration

_._._. A "Granae" fracturation

h (km)

Figure 24 - Variogrammes des densités de la "grande" (photosI aériennes) et de la "petite" (affleurements) frac-

turation. Granite de Saint-Sylvestre (Haute Vienne)(d'après BERTRAND et al., 1983)

tures. Ce nombre, et donc la longueur des sondages d'essai, ne peut êtreévalué convenablement qu'après une étude assez poussée de la fracturation.

Enfin, c'est cette étude, appuyée au besoin par la géostatistique,qui doit permettre de localiser au mieux les forages d'essai, puis ceuxd'exploitation, sur la base d'une modélisation* du milieu.

* II s'agit d'une modélisation au sens conceptuel, et non pas forcémentnumérique.

- 36 -BHGM - SQN/GEG

Figure 25 - Exemple de structures emboîtées dans un granite(d'après BLES et al., 1963, modifié]

- 37 -BRGM . SGN/GEG

5 - LES LOIS D'ECOULEMENT DANS LES MILIEUX FRACTURES

5.1 - Rappels d'hydraulique

Une loi d'écoulement s'exprime fondamentalement par une relationentre perte de charge et vitesse d'écoulement. Rappelons que la chargehydraulique, qui représente l'énergie d'un filet liquide est égale, pardéfinition, à :

p v2à = z + — r — + •=—V Pg 2g

Le terme z [cote) représente l'énergie potentielle, le terme —

(avec p : pression et p : masse volumique du fluide) l'énergie de pression et

le terme — (v : vitesse) l'énergie cinétique.

Depuis les travaux de NIKURADSE, on exprime les lois d'écoulementdans les conduits en charge par une relation entre deux grandeurs sans di-mension :

- Le nombnjt dz RzynoZd¿, Re = — - , Dn, diamètre hydraulique étant

égal à Dn = 4 — (S : surface, P : périmètre du conduit) ; ce nombre représen-te la vitesse de l'écoulement ; v est la viscosité cinématique du fluide*.

- Le. cozi{yicÁznt de. pznZz dz ckoJigz, A = - ¿ ^ — , rapport de la pertev /2g

de charge unitaire à l'énergie cinétique de l'écoulement (J : gradient decharge hydraulique).

On distingue deux types d'écoulement : VzcouZzmznt icmLnoJüie., danslequel les filets liquides gardent leur individualité ¡ Vtc.oiU.zme.nt tu/ibu-Zznt, dans lequel les filets liquides exercent les uns sur les autres uneinteraction qui a pour effet de niveler leurs vitesses.

Aux deux paramètres A et Re définis ci-dessus, il convient, pourles conduits rugueux [ce qui est le cas des fractures dans les roches), d'enadjoindre un troisième, la HÁXQO&<L£Í nsJLxjJÛMZ JL C k : hauteur des aspérités ;

Dhcette rugosité relative a été définie initialement par NIKURADSE pour desconduits sur les parois desquels étaient collés des grains de sable ; lesrugosités naturelles ne sont pas forcément réductibles à ce schéma théori-que et dans la plupart des cas il faudra parler de rugosité équivalente).

On distingue classiquement trois régimes d'écoulement :

- le régime kyd/iouLLquiZmznt LLt>&z, pour lequel la loi d'écoulementest de la forme A = f (Re)

- le régime compZztzmznt iw.Q\xzuxt pour lequel A = f (—)k n

- un régime intermédiaire, pour lequel A = f (Re, — )"h

Le passage de l'écoulement laminaire à l'écoulement turbulent alieu, pour les faibles rugosités, pour un nombre de Reynolds critique égalà 2 300.

* Pour l'eau, v = 1,3.10~6 m2/s à 10°C et 1,0.10~6 m2/s à 20°C.

- 38 -BUG M . SGN/GEG

5.2 - Lois d'écoulement dans une fracture

Les auteurs qui ont étudié les écoulements dans les fractures, enparticulier LONIZE (1951] et LOUIS (1967), ont montré que les résultatsclassiques rappelés ci-dessus n'étaient plus valables pour les rugosités re-latives élevées.

Ils ont été amenés à limiter leur validité au domaine des écoule-

ments pahoJLWÜlA, pour lesquels — < 0,033, les écoulements non poJuxlWülÁ,K

pour lesquels — > 0,033, obéissant à des lois différentes, établies parLOUIS (1967). °n

Pour les écoulements non parallèles en particulier, le nombre deReynolds critique définissant le passage entre écoulement laminaire et écou-lement turbulent dépend de la rugosité relative et peut décroître jusqu'àdes valeurs de l'ordre de 100, pour des rugosités relatives voisines de 1.

La figure 26 définit les domaines de validité des différents régi-mes et lois d'écoulements dans les fractures.

Ces lois sont présentées sur le classique diagramme bi-logarithmi-que R , À sur la figure 27.

Si la formulation en X, Re présente le mérite de la généralité,et permet une présentation synthétique des lois d'écoulement, il est commo-de, pour les applications pratiques, de revenir à la formulation flux-gra-dient, qui est celle, par exemple, sous laquelle on présente classiquementla loi de Darcy.

La loi de Poiseuille (correspondant à un écoulement laminaire)s'écrit dès lors, si l'on remarque que dans une lame mince Dn 1 2e (e :ouverture) :

Toujours en régime laminaire, si l'on tient compte du fait qu'unefracture peut ne pas être ouverte sur la totalité de sa surface, la loi d'é-coulement en fracture s'écrit :

v = Kf J (LOUIS, 1967)

Cette formule définit la conductivité hydraulique laminaire dela fracture :

Kf = ifvC

T étant le degré de séparation de la fracture

et C étant un coefficient égal à 1 si — < 0,033

et à 1 + B.fl (k/Dh)1'5 si — > 0,033uh

On voit donc qu'en régime laminaire, ta. v¿te¿¿e moyenne. d'écoate-ment dam, une njxtXixKo, <u>t pn.oponXÀ.onnette au cjxroie de V owjznXuJie de cette{¡ftCLCtuAZ, le débit transitant dans celle-ci étant, lui, proportionnel aucube de cette ouverture. (Le débit dans la fracture est égal à la vitessemoyenne multipliée par la section offerte à l'écoulement, c'est-à-dire parle produit de l'ouverture par la largeur de fracture considérée, pour unefracture totalement ouverte)..

. 39 _BRGM - SGN/GEG

JLÍ

0,3

0,2

0,1

0,01

0,001

i Rugosité relative

X

i

¡

ii i

\

i .

| ;

\\

; ! \

1 i i : \ :

e h U) ^I . ,

t

i

96

Re (1)

!

ii

i i

Hydrau

i

!

I. lisse -

¡

j

! ' ! i '

Laminaire

\

\

\

i

i

1

Ii

^ "fX1" 1,9 ( 5 )

S n 1

1 \\ \1 ® X= 0,316 R e ' '*

¡2)¡

Tui

rbulent

1

= = - 2 logk/D

3,7

1 1

h

(3)

TI pi et. rugueux-

i

i

IN\

i iS

i

Í! y

Ii

i ('i

í 1r

-j j.

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1

títí

5

i"'1 -;3 }

V

3 /

1;

J

Ir,102 103 Re e = 2 300 10¿

limite laminaire-turbulent

limite écoulement parallèle-non parallèle

Jimite régimes hydrauliquement lisse-complètement rugueux

• CI) Lois de Poiseuille[II] Blasius(III] Nikuradse(IV et (V) Louis

105 Re

Figure 26 - Domaines de validité des lois d'écoulement dans lesfractures (d'après LOUIS, 1976)

tauao<u

- d

a.

OU

A

1.0

0.8

0.6

0.5

0,3

0,2

0,10

0,08

0.06

0.05

0.04

0,03

0,02

0 01

1

- - - - - - - 1\1

\

\

I*--. 9fi . k 1 5g) \ = £- 1+8,8(-£-)'s Re D h '

LOUIS U

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1

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Rugosité rL

i /Ançtr /

1

\

elative

h '

- 0.25

- q20

- 0.14

- qio

- 0.06

C\(\L

- 0,033

- 0,033

- qo2

— qoi- 0.006- 0.004

^ 0.002

- qooi- 0.0004

A 5 6 7 8 9103 5 6 7 8 910* 5 6 7 89105 2 3 4 5 6 7 8 9

Re

Nombre de Reynolds

Figure 27 - Lois d'écoulement proposées pour les écoulements dans les fractures

(d'après LOUIS, 1976)

- 41 -BRGM • SGN/GEG

C'est ainsi que, toutes choses égales par ailleurs, le débittransitant dans une fracture d'ouverture 2e sera 8 fois plus élevé quecelui transitant dans une fracture d'ouverture e. Cette observation depremière importance amène à souligner le rSle fondamental des fracturesd'ouverture importante dans le rendement des ouvrages de captage, et ce-lui des variations d'ouverture sur les modifications de la perméabilitéglobale du milieu fracturé.

En régime turbulent

v = k'f Ja

L'exposant a, inférieur à 1, caractérise le degré de non linéa-rité de l'écoulement. Il est égal à 0,5 pour un écoulement turbulent com-plètement rugueux.

Dans ce cas, la conductivité hydraulique turbulente de la fractureest égale à :

K'f = 4 T /gë log -l^- (LOUIS, 1967)

Avant de passer à la suite, il convient de mentionner que, si unefracture est entièrement colmatée par un matériau de remplissage, l'écoule-ment dans cette fracture est régi par la loi de Darcy, la valeur de la per-méabilité à prendre en compte étant celle du matériau de remplissage.

5.3 - Ecoulements dans un système de fractures : le milieu continu équivalent

Les lois d'écoulement dans les fractures individuelles ne reçoi-vent pas actuellement d'application directe aux problèmes de ressources eneau, pour lesquels l'échelle considérée conduit à assimiler le milieu frac-turé à un m¿LLe.u coni¿nu é.qu¿vaZtnt. Cette assimilation ne va toutefois pasde soi, et présente un certain nombre de difficultés dont certaines ont étéexposées par FEUGA (1983).

On ne s'attardera pas ici sur ces difficultés, et on considéreraque le milieu continu équivalent peut être défini, dès lors que l'on prenden compte un volume de terrain supérieur à un volume minimal nommé voZume.íZme.nUÚA.e. KtpfitiiiLnXaZi^, dont la taille dépend des caractéristiques dela fracturation du massif rocheux.

L'utilité du milieu continu équivalent repose sur le fait que larelation flux-gradient de charge est linéaire aussi bien dans un milieucontinu que dans un milieu fracturé (en régime laminaire), ce qui rend pos-sible son utilisation pour les calculs de distribution des charges hydrau-liques et des débits moyens en milieu fracturé avec les méthodes mises aupoint pour les milieux continus.

Il va de soi que le recours au milieu continu équivalent ne per-met pas de résoudre tous les problèmes, et en particulier pas celui de ladétermination des vitesses réelles d'écoulement dans les fractures, puis-que les vitesses considérées en milieu continu sont des vitesses dites"de filtration" qui correspondent à des flux et non à des vitesses réelles ;si l'on voulait connaître ces vitesses réelles, il serait nécessaire de re-courir à des calculs prenant en compte des lois d'écoulement réelles dansles fractures, rien n'interdisant d'ailleurs de coupler les deux modes decalcul ou d'appuyer l'un sur l'autre.

- 42 -BRGM • SGN/GEG

Par ailleurs si, comme on l'a dit, l'utilisation de la notion demilieu continu équivalent pour les études de ressources en eau est justi-fiée compte tenu de la taille des domaines considérés, il peut néanmoinsêtre nécessaire, dans certains cas, d'individualiser, dans un éventuel mo-dèle, les grands accidents structuraux tels que les failles, qu'ils consti-tuent des barrières ou au contraire des drains.

L'écoulement de l'eau dans un milieu continu est régi par l'équa-tion de diffusité

div Cit. grad 4>) = S s . ||

<j) représentant la charge hydraulique

Ss 1'emmagasinement spécifique du milieu, et

- > •

K le tenseur de perméabilité

Ce tenseur est caractérisé en tout point de l'espace par troisdirections perpendiculaires [les directions principales de perméabilitédans le cas présent) auxquelles correspondent trois grandeurs numériques,les perméabilités principales. Les directions principales sont les troisseules directions de l'espace telles que la vitesse d'écoulement ait lamême direction que le gradient de charge hydraulique, les facteurs de pro-portionnalité entre les deux n'étant autres que les perméabilités princi-pales.

Dans le milieu continu équivalent à un milieu fracturé réel, donton supposera que la matrice est imperméable, le module, la forme et l'orien-tation du tenseur de perméabilité seront bien évidemment fonction des carac-téristiques du champ de fractures.

5.4 - Détermination du tenseur des perméabilités du milieu continu équiva-lent à partir des caractéristiques de la fracturation.Approche simplifiée et premières applications

Considérons tout d'abord une fracture individuelle de conducti-vité hydraulique k, définie par la relation

v = — k. grad¿> (2) (régime laminaire)

v = vitesse moyenne d'écoulement

<j> = charge hydraulique (dans la formule ci-dessus, grad <t> repré-sente en fait la projection du gradient sur le plan de lafracture).

On suppose dans cette première approche que la matrice rocheuseest totalement imperméable.

Soit un repère Oxyz lié à la fracture, tel que Oxy soit dans leplan de celle-ci, Gx étant horizontal (fig. 28)

BRSM - SON/GEC

- 43 -

plan de lafracture

X (horizontale]

Figure 28

Dans ce repère, l'équation (23 s'écrit, sous forme matricielle :

(3)

k

D

D

D

k

0

0

0

0

9*

lî87

Soit maintenant un volume de référence du milieu rocheux fracturé,de forme cubique et de côté t. (figure 23]

MILIEU FRACTURE(une fracture]

MILIEU CONTINU EQUIVALES

Figure 29

BRGM - SGN/GEG

- 44 -

Supposons que ce volume soit choisi de telle façon qu'il contiennela fracture considérée et que celle-ci soit parallèle à l'une de ses faces.

Considérons également le même volume du milieu continu équivalent.

Le débit traversant la fracture est égal à

0 = v. £. e. = t e k | grad 4>| (4] (e = ouverture libre de la fracture]

Un même débit doit traverser le volume du milieu continu équiva-lent, pour lequel on a donc :

ri r\

t>l (5)

K.eq étant la perméabilité du milieu continu équivalent dans ladirection du plan de la fracture (cette perméabilité est nulle dans la direction perpendiculaire].

Le rapprochement de (4] et (5) donne

eq Í6)

Cette formule peut encore se mettre sous la forme,3

Keq

ce qui permet de constater que la perméabilité du milieu continu équivalentà un milieu fracturé recoupé par une famille de fractures parallèles, dansla direction de cette famille, est proportionnelle au cube de l'ouverture etinversement proportionnelle à l'espacement des fractures.

La matrice représentant, dans le repère Oxyz, le tenseur de perméa-bilité du milieu continu équivalent au volume du milieu fracturé contenantla fracture considérée s'écrit :

e

I10

0

01

0

00

0

(7]

Considérons maintenant un repère OXYZ correspondant aux coordonnéesgéographiques : OX est orienté vers l'est, OY vers le nord et 02 suivant laverticale (figure 30).

L'orientation du plan de fracture est définie par sa direction dpar rapport au nord (convention de pendage à main droite] et par son pen-dage p.

- 45 -BRGM • SGN/GtG

Plan de la fracture

Figure 30

La matrice de passage du repère Oxyz dans le repère géographiqueOXYZ s'écrit :

(S]

Dans le repère géographique OXYZ, la matrice représentant le ten-seur de perméabilité du milieu continu équivalent au volume du milieu frac-turé contenant la fracture considérée s'écrit :

sin

-cos

COS

d

d.

d.

cos

sin

P

P

cos

sin

-sin

d

d.

d.

cos

sin

P

P

0

sin

cos

p

p

ou encore, après développement des calculs

eK'eq I K R

C9)

(10]

avec.2-11 - cos d.sin p •=• sin 2d.sin¿p - -= sin 2p. cos d

j sin 2d.sin2p, 7 1

1 - sin^d.sin^p •=• sin 2p. sin d

-•=• sin 2p. cos d -^ sin 2p. sin d sin2p

(11)

Si on suppose maintenant que le volume de référence du milieufracturé est recoupé non par une, mais par N fractures de conductivitéhydraulique Kj_, épaisseur e±, direction d± et pendage pj_, i variant de 1à N, le tenseur de perméabilité résultant du milieu continu équivalent

- 46 -BRGM - SGN/GEG

sera représenté, dans les coordonnées géographiques, par la somme des matri-ces correspondant aux différentes fractures individuelles. Cette sommationest justifiée par la linéarité de la loi liant le flux au gradient de charge*.

N N

K ' = K • - _L o k R M7"le°.res i=1 ea.i £ i=1 1 1 1

II est possible d'extraire les valeurs propres et les vecteurspropres de cette matrice, qui représenteront d'une part les perméabilitésprincipales du milieu continu équivalent et, d'autre part, les directionsde ces perméabilités principales.

Les applications pratiques de cette méthode sont limitées par lefait qu'il n'est en général pas possible de connaître les ouvertures vraiesdes fractures, sauf à pratiquer un grand nombre d'essais a l'eau sur desfractures individuelles, ce qui est très coûteux, et par celui que les frac-tures réelles ne sont pas continues, comme on en a fait l'hypothèse.

Cette méthode peut néanmoins Être compliquée pour prendre en comptel'ensemble des paramètres du champ de fractures [et non plus seulement lesdirections, les ouvertures et les fréquences). Telle qu'elle a été exposée,elle présente toutefois un intérêt pédagogique et va être utilisée pour met-tre en évidence les directions principales de la perméabilité dans un cer-tain nombre de cas simples, en supposant que toutes les fractures ont lamême conductivité hydraulique.

a) Cas de trois familles de fractures orthogonales.,

Pour simplifier les calculs, ces trois familles sont supposées

être parallèles aux axes de coordonnées (figure 31).

La famille 1, de fréquence n-], est verticale et de directionnord-sud [0°).

La famille 2, de fréquence n2, est verticale et de directionest-ouest [90°)

La famille 3, de fréquence n3, est horizontale.

On suppose N assez grand pour que le calcul ait une valeur statistiqueet que l'influence de l'hypothèse faite sur la forme du volume de réfé-rence et le parallélisme de la fracture avec une de ses faces ne joueplus ; t devient dès lors, dans la formule (12), une simple longueur deréférence dont la valeur n'a pas d'importance pratique, puisque l'effetde ses variations est très exactement compensé par celui des variationsde N (dans l'hypothèse où la distribution spatiale de la fracturation,en densité et orientation, est la même en tout point, ce que nous ad-mettons) .

- 47 -BRGM . SGN/GEG

N

Figure 31 - Cas de trois familles de fractures orthogonales

La matrice représentant le tenseur du milieu poreux équivalent àl'ensemble du milieu fracturé est égale, à un facteur près, à

= K leq "eq

n2 + n,

0

0

0 0

0

n, +

On voit que, dans tous les cas, les trois axes de coordonnées sontdirections principales, les perméabilités étant égales, dans la directionest-ouest à n2 + n3, dans la direction nord-sud à n, + n2, et suivant la ver-ticale, à n¡ + n2 .

Examinons quelques cas particuliers

Si nï = n2

on trouve K

= H i = n ,

= 2 n

1 0 D

D 1 0

0 0 1

le milieu continu équivalent est isotrope, ce qui était au demeurant évident.

Si nj = n2 = n et n3 = 0 [pas de famille horizontale),

on trouve K = n

1 D 0

0 1 0

0 0 2

le plan horizontal est isotrope du point de vue de la perméabilité, et cetteperméabilité est deux fois plus faible que la perméabilité verticale (figu-re 32]

BRGM - SGN/GEG

- 48 -

N

Figure 32 - Représentation de la perméabilité du milieu continuéquivalent dans le cas de deux familles de fracturesverticales orthogonales et d'égale fréquence

D'une manière générale, s'il n'y a que deux familles verticales,de fréquence différente, par exemple

n^ = a.n, n2 = n, (n3 = 0), on a

1 0 0

= n 0 a 0

0 0 1 + a

la perméabilité maximale est verticale (et proportionnelle à 1 + a], maisbien évidemment les perméabilités horizontales ne sont pas nulles.

b} Cas de deux familles verticales non orthogonales et d'une famillehorizontale (figure 33].

Pour simplifier les calculs, on supposera les deux familles vertica-les symétriques par rapport à la direction 45° (nord-est - sud-ouest].

N

Figure 33 - Cas de deux familles verticales non orthogonales etd'une famille horizontale

BRGM - S6N/GEG- 49 -

Pour la famille n° 1 on a

et pour la famille n° 2

d = a

p = 90°

d = 90° - a

[p = 90°L'application des formules établies précédemment donne :

n,(1-cos2a) + n,(1-sin2a) * n, •=• sin2a [ru + n.

— sin2a nl[1-sin2a)+n2(1-cos

2a]+n3

n i + n 2 "

On remarque que si a = 0° ou 90°, on retrouve la formule établiepour trois familles orthogonales. On note également que la direction verti-cale est toujours une direction principale comme le laissait prévoir la sy-métrie de la structure.

Supposons maintenant que n1 = n2 ni = n

on a alors

2

sin2a

0

sin2a

2

0

0

0

2

Les valeurs propres et vecteurs propres de ce tenseur sont :

Valeurs propres Vecteurs propres

2-sin2ct

2+sin2a

1 suivant E-W

-1 suivant IM-S

0 suivant la verticale

1 suivant E-W

1 suivant N-S

0 suivant la verticale

0 suivant E-W

0 suivant N-S

1 suivant la verticale.

c'est à dire que les directions principales de perméabilité, dansle plan horizontal, sont constituées par les bissectrices des axes E-W etN-S, qui sont également celles des deux familles de plans verticaux.

BRGM - S6N/GEG

- 50 -

c) Cas d'une structure symétrique par rapport au plan horizontal[figure 34]

Figure 34 - Cas d'une structure symétrique par rapport au planhorizontal

Une telle structure peut être constituée de trois familles

d = 0e

d = 180e

la famille 1, pour laquelle

la famille 2, pour laquelle

et la famille 3 horizontale.

Si on suppose que n1 = n2 = n3 = n, on trouve que :

i + Ko + Kq = nLeq ¿eq Jeq

3-2sin2a D 0

0 3 0

0 0 2sin2a

Les perméabilités principales sont dans tous les cas orientées sui-vant les directions E-W, N-S et verticale.

5-5 - Influence de la perméabilité de la matrice

On montre très facilement, en utilisant le même raisonnement, quela formule (6) établie au sous-paragraphe précédent dans le cas où la matricerocheuse est supposée imperméable, devient, si on suppose qu'elle est dotéed'une perméabilité K m :

eK c = — k + Y ._

Très souvent, la perméabilité de la matrice est négligeable par

rapport à la perméabilité de fractures.

BRGM . SGN/OEG- 51 -

Par exemple, il suffit d'une fracture continue et peu rugueuse de0,1 mm d'ouverture tous les mètres pour que la perméabilité en grand attei-gne 0,6.10~6 m/s suivant la direction de cette fracture, alors que la per-méabilité de matrice d'un granite sain dépasse rarement 10"9 m/s.

La prise en compte de la perméabilité de la matrice ne s'imposedonc que si celle-ci est très perméable, ou si les fractures sont très peunombreuses et très minces.

5.6 - Influence de la non continuité des fractures

Les développements qui précèdent supposent la continuité des frac-tures dans leur plan. Les perméabilités équivalentes qu'ils permettent decalculer sont en général beaucoup plus grandes que celles qui peuvent êtredéterminées in situ par essais à l'eau.

Ceci est dû essentiellement à deux facteurs : le premier, déjàmentionné, consiste dans le fait que les ouvertures de fractures déduitesd'observations directes sont très généralement surestimées ; le second ré-side dans la non-continuité des fractures. Cette non-continuité peut cor-respondre à deux situations très différentes, schématisées figure 35.

a - Existence de "ponts de matière"dans le plan de la fracture

b - Existence de plages ouvertesmais isolées les unes des autresdans le plan de la fracture

Figure 35 - Différents types de non-continuité de fractures

Dans un cas, la fracture n'est que partiellement ouverte, du faitde l'existence de "ponts de matière" entre ses lèvres, mais ces surfaces decontact n'interrompent pas la circulation de l'eau. Cette non-continuité estprise en compte par l'introduction du degré de séparation, T, dans l'expres-sion de la conductivité hydraulique de la fracture.

Dans l'autre cas, les ponts de matière sont très étendus et lesplages ouvertes dans le plan de la fracture sont isolées les unes des autres.Elles constituent des zones à potentiel hydraulique constant entre lesquelsles écoulements ne peuvent se faire qu'à travers la matrice rocheuse.

Le problème de l'évaluation de la perméabilité équivalente d'unmilieu recoupé par une famille de fractures de ce type a été étudié numéri-quement par LOUIS (1967).

- 52 -SON/OES

Dans le cas représenté figure 36, il a été établi que la perméabilitééquivalente K.eq suivant la direction des fractures s'exprimait par la relationapprochée :

eq 2: Km [1 * y l— - £)] .

acceptable pour 3 < — < S .D

(Km, perméabilité de la matrice ; voir figure 36 la signification des autressymboles]

Figure 36 - Schématisation d'une famille de fractures discontinues[d'après LOUIS, 1976] .

La prise en compte d'une seule famille de fractures discontinuesde ce type ne rend toutefois pas bien compte en général de la réalité : laplupart du temps, en effet.- ces familles sont recoupées par d'autres, de di-rections différentes, qui établissent des communications de conductivité hy-draulique plus élevée que celles qui se font par percolation à travers lamatrice rocheuse.

Un exemple en est fourni par la figure 37.

Si on suppose que les fractures représentées sur cette figure sontcontinues dans la direction perpendiculaire au plan de cette dernière, uncalcul très simple montre que les interconnexions créées par l'intersectiondes deux familles 1 et 2 se traduisent par l'apparition, suivant la direction1, d'une perméabilité équivalente égale à

K., b'L+b .K

(en supposant que toutes les fractures ont une ouverture e et une conducti-vité K].

Dans le cas d'une matrice peu perméable, cette perméabilité estbeaucoup plus élevée que celle de la seule famille 1, donnée par une formuledu type de la précédente.

- 53 -MGM • SGN/GEG

I 1

Famille 1Famille 2

Intersection desfamilles 1 et 2

Figure 37 - Exemple de création de conduits continus par inter-section de familles de fractures discontinues.

5.7 - Coefficient d'emmagasinement en milieu fracturé

La distinction qui est faite en milieu continu entre coefficientd'emmagasinement en nappe libre et coefficient d'emmagasinement en nappecaptive peut également être faite en milieu fracturé.

Dans le cas d'une nappe libre, la quantité d'eau fournie pour unebaisse donnée de la surface libre par un milieu fracturé correspond, dansun premier temps, à la vidange des fractures dans la zone dénoyée.

On peut admettre que le coefficient d'emmagasinement correspondantà cette vidange est très exactement égal à la porosité de fractures.

Dans le cas d'une famille de fractures distantes de 1 m les unesdes autres et d'ouverture égale à 0,1 mm, évoqué plus haut à propos de laperméabilité, cette porosité est égale à 10"1*. Une telle valeur est trèsfaible, même si on la compare à la porosité de matrice de roches très peu po-reuses, rarement inférieure à 1G~2.

- 54 -BRGM • SGN/GEG

Bien que le coefficient d'emmagasinement en nappe libre d'une rochesoit souvent notoirement inférieur à sa porosité, il n'en demeure pas moinsque, dans la plupart des cas, en milieu fracturé, l'essentiel de l'eau four-nie à l'occasion d'une baisse de surface libre proviendra non pas du réseaude fractures, mais de la matrice.

On constate donc que si, comme on l'a vu, l'influence de cette der-nière est la plupart du temps négligeable pour ce qui est de la perméabilité,et donc du rendement des ouvrages de captage, son influence sur le coefficientd'emmagasinement en nappe libre, et donc sur la ressource, est fondamentale.

Les observations qui précèdent sont à l'origine de l'usage des mo-dèles dits "à double porosité", qui font intervenir à la fois le réseau defractures, de conductivité hydraulique élevée et de coefficient d'emmagasi-nement très faible, et la matrice rocheuse, de faible perméabilité, mais decoefficient d'emmagasinement plus élevé.

En nappe captive, la situation est sensiblement la même. L'emma-gasinement spécifique est dans ce cas égal à

Ss = pg ta + nß)*

avec p : masse volumique du fluide

n : porosité vraie

ß : compressibilité volumique du fluide

a : compressibilité volumique du squelette

Comme on l'a vu, la porosité de fractures est en général beaucoupplus faible que la porosité de la matrice. En outre, la compressibilitévolumique d'un réseau de fractures est elle-même plus faible que celle desblocs constitutifs du massif, même si la déformabilité normale des fracturesest nettement plus élevée que la déformabilité linéaire de la matrice (cf.chapitre 6], II résulte de ceci que la part du coefficient d'emmagasinementen nappe captive due au réseau de fractures est elle aussi, en général, beau-coup plus faible que celle due à la matrice.

6 - COMPORTEMENT HYDRO-MECANIQUE DU MILIEU FRACTURE

Le présent paragraphe, qui servira de conclusion à ce chapitre, apour objet de souligner une des originalités, trop souvent passée sous silence,du milieu fracturé, et d'en parachever par là même la définition.

On a vu, en effet, que la nature pétrographique de la roche ne per-mettait pas de définir clairement les limites de ce qu'il convenait d'appeler"milieu fracturé". Tout au plus permet-elle d'exclure du champ de cette défi-nition un certain nombre de formations comme les alluvions, les argiles plas-tiques ou le sel. Par contre, elle n'autorise pas à éliminer les calcaires,sauf dans le cas - fréquent il est vrai- où ils sont karstifiés (la perméa-bilité en grand due à des conduits de dissolution est en général supérieure deplusieurs ordres de grandeur à celle due au réseau de fractures).

* Dimension de S. : L"1 ; le coefficient d'emmagasinement en nappe libres.est sans dimension.

- 55 -BRGM • SGN/GEG

On a vu également que le milieu fracturé se caractérisait par lefait que l'essentiel de sa perméabilité en grand était dû au réseau de frac-tures interconnectées recoupant une matrice rocheuse peu perméable, mais assu-rant par contre de façon prépondérante le rôle d'emmagasinement d'eau.

Ce qu'on ignore très souvent, par contre, c'est que le milieu frac-turé est déformable, ce qui peut avoir des conséquences très importantes surson comportement hydraulique.

Cette déformabilité est due à la compressibilité de la matrice, maisaussi et surtout à celle, beaucoup plus grande, des fractures. Cette déforma-bilité des fractures, dont la conductivité hydraulique est, comme on l'a vuau chapitre 5, proportionnelle au carré de l'ouverture, entraîne une extremesensibilité de la perméabilité globale du milieu fracturé aux déformationsCou aux variations de contraintes) qu'il subit. Le milieu fracturé se dis-tingue fondamentalement en ceci des milieux continus (ou poreux) naturelsqui, s'ils sont parfois eux aussi très déformables, ne connaissent jamaisdes variations de perméabilité très importantes comme il peut s'en produiredans les roches fracturées.

La déformabilité en compression d'une fracture dans un granite estillustrée par la figure 38.

L'ouverture moyenne de la fracture qui fait l'objet de cette figureest de 0,107 mm sous contrainte nulle ; si cette fracture est soumise à unecontrainte normale de 10 PPa, qui correspond au poids des terrains à une pro-fondeur de l'ordre de 400 m, son ouverture se trouve diminuée de 0,015 mm, etsa conductivité hydraulique se trouve multipliée par un facte-ur égal à :

(—— vn-' ) = 0,74 ; la perméabilité du milieu continu équivalent se trou-- f0,107 - 0,015,3

ve multipliée, elle, par un facteur 1 ö~W7 ~ u'b4"

II est à noter que la nature des minéraux du granite fait que lesfractures non altérées qui recoupent ce type de roche sont peu déformables.Dans d'autres roches, constituées de minéraux plus déformables, ou altérées,les fractures peuvent s'écraser beaucoup plus sous l'effet des accroissementsde contraintes de compression auxquelles elles sont soumises, et connaîtredes réductions de conductivité notoirement plus importantes que dans l'exem-ple ci-dessus.

Quoi qu'il en soit, c'est le phénomène qui vient d'être décrit quiexplique dans la grande majorité des cas la diminution avec la profondeurde la perméabilité des milieux fracturés. Cette diminution constitue la rè-gle quasi générale, vérifiée à l'occasion de la plupart des campagnes de me-sure de perméabilité en sondages profonds (figure 39), et sans que ceci puisseêtre relié à une diminution de la densité de fracturation avec la profondeurou à des changements dans la nature pétrographique de la roche.

En présence d'eau, la contrainte qui détermine le comportement d'unefracture n'est évidemment pas la contrainte totale, mais la contrainte effec-tive a' définie au chapitre 1.

Comme on l'a vu, cette contrainte effective s'accroit quand la pres-sion interstitielle du fluide diminue. Un pompage en milieu fracturé, qui en-traîne un rabattement du niveau piézométrique, et donc une réduction de la

- 56 -

Contrainte normale

75-

50-

25

A.0--

\

Tmesure de l'écrasementde la fracture

0,04 0,01 0,03

2o-

45-

do..

5 ••

200 m m

(EGranite vier= 64000 r

Déformation (10 )

Ecrasement ae la fracture (mm)

g. 38 - Comportement sn compression d'une -raclure cans is ^rGuéret, carrière de Maupuy [Creusel(d'après 3ILLAUX et al, 1964)

rs de

- 57 -

So 400 S0L looI

5A&(yfo~a m/s)

300

So-

/loo-

Schistes siliceux

Faille

Schiste

Tuffiies et schistes

2oo-

CD Schistes

Schistes et grauwakes

3o&-

[m)

Fig. 39 - ExemDÎe je nrofil ce Dernés^ilité en soncaes cans ess

terrains volcano-séaimentairss ce l'-Iertsjc '-crtugei,1

Í2' après BERTRAND, DURAND si FEUGA, 'Zd2''

- 58 -BRGM - SGN/GEG

pression interstitielle, provoque donc un accroissement de la contrainte ef-fective s'exerçant sur les fractures, ce qui tend à les refermer. L'inversese produit quand, au lieu de pomper, on injecte de l'eau dans le milieu frac-turé. C'est ainsi qu'on peut expliquer que, bien souvent, les perméabilitésdéduites de pompages soient inférieures à celles que l'on détermine à l'occa-sion d'injections.

En injection, il peut même arriver que la pression d'eau excède lacontrainte normale s'exercant sur une fracture : celle-ci a alors tendanceà s'ouvrir, et sa réponse hydraulique s'en trouve très considérablement modi-fiée [figure 40]. D'une manière générale, la déformabilité des fracturesentraine un comportement hydraulique du milieu fracturé qui s'éloigne trèssouvent de celui du milieu continu ; les schémas de base et les lois établiespour ce dernier ne peuvent par conséquent pas toujours s'appliquer dans unmassif fracturé.

Un dernier exemple de cette différence entre les deux types demilieu est fourni par le fait que bien couvent une injection en milieu frac-turé provoque non pas une augmentation, mais au contraire une baisse de pres-sion dans certains piézomètres d'observation.

L'explication de ce phénomène a été fournie par LESSI et SARDAC19B1). Elle repose sur le fait qu'un accroissement de pression dans unefracture entraîne une modification de la distribution des contraintes méca-niques aux alentours (figure 41].

Dans une partie de l'espace, la contrainte moyenne augmente, dansune autre, elle diminue ; dans cette dernière zone, la diminution des con-traintes se traduit par une ouverture des fractures existantes, et par un"appel de fluide" qui entraîne une baisse de niveau dans les piézomètres.

Ce phénomène, contrairement à un phénomène qui serait purementhydraulique, est quasi instantané.

a - Comportement linéaire et réversible du milieufracturé

Débit A(1/min.if

80-

30-

lo-

Ao-

Profondeur 2fJ m

Pression d'eau ÍMPa)

0,05 0,40 0,t$ 0,25

b - Comportement non linéaire et réversible du milieufracturé correspondant à l'ouverture d'une fracture

Débi hf1/min.

to-

30-

20-

A0~

I

Profofirieur GO in

Ouverture d'uriR Fi v-icl.ui'R

Pression d'eau

0,50 0fS5 0,fo 0,65

Fig. 40 - Exemples de comportement du milieu fracturé lors d'injections d'essais (granite de Fougères)(d'après BERTRAND, DURAND, FEUGA, 1982)

O)

Fig. 41 - Variation!-, do In unntrfiinta ttmyminn ^

pi-BBFîion p dans iinn fJ;;r,urR nu mi II nil'

(d'sprñs Lnssr et SARDA, 1H011

v1 sous l'erret CÍB 1'application d'une

- 61 -

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POUR EN SAVOIR PLUS (Travaux non cités par ailleurs)

HUDSON J .A . , PRIEST S .D. (1979) - Discontinuities and rock mass geometry.Int. J.. Rock Mech. Min. Se. Vol. 16, pages 339 à 362, 1979.

MATTAUER M . (1973) - Les déformations des matériaux de l'écorce terrestre.Hermann éd., Paris.

GOGUEL J. (1983) - Etude mécanique des déformations géologiques.Ed. BRGM, Série Manuels et méthodes. n° 6.