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Synthèse de la 162 ème session d’études de l’APASP 1 *** 162 ème SESSION D’ETUDES DE L’APASP Le contentieux de l'exécution des marchés publics de travaux 25 et 26 novembre 2013 *** Ouverture par JeanMarc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences Avocat à la Cour I – INVENTAIRE DES CONTENTIEUX LIES A L'EXECUTION DES MARCHES PUBLICS DE TRAVAUX Daniel GUILMAIN, Avocat au Barreau de Lille I Les caractères des contentieux en matière d’exécution de marchés de travaux : Contentieux qui trouvent toujours leur origine dans les chantiers où s’exécutent les marchés publics. A ce titre, les contentieux font parfois référence à des périodes d’exécution de travaux relativement anciennes. Il s’agit donc bien souvent d’essayer de reconstituer ce qu’il s’est passé durant ces périodes d’exécution, ce qui n’est pas toujours évident. Contentieux qui poursuivent toujours une finalité indemnitaire. Contentieux souvent complexes demandant des investigations importantes eu égard à l’importance de l’ouvrage à construire et aux sommes engagées. Beaucoup de gros chantiers (réalisation du zénith, d’université, etc) débouchant bien souvent sur des contentieux indemnitaires à l’issue de la phase de réalisation des travaux. De ce fait, un contentieux de l’exécution risque d’être beaucoup plus onéreux pour la personne publique qu’un contentieux de la passation, notamment s’il est établi qu’elle a commis des fautes dans la réalisation de l’exécution d’un marché de travaux. Ce sont des contentieux qui sont souvent très longs : 5, 6, voire 7 ans. Ce sont des contentieux indemnitaires donc le juge considère qu’il n’y a pas d’urgence. Ce sont des contentieux qui s’accompagnent très souvent d’une phase d’expertise, qui peut aussi durer un certain temps Ce sont des contentieux contractuels, reposant sur l’analyse des différents contrats faisant intervenir les différents intervenants à l’opération de construction (maître d’ouvrage, maître d’œuvre, architecte, l’OPC et les différentes entreprises liées au maître d’ouvrage) Contentieux dans lesquels les pièges procéduraux sont parfois redoutables : article 50 et suivants du CCAG travaux sur les dispositions relatives aux règlements des litiges et différends. (CCAG travaux de 1976 applicable aux marchés de travaux antérieurs à 2009) Les dispositions ne sont pas toujours aisées à comprendre Ces contentieux d’exécution de marchés de travaux (notamment sur l’allongement de la durée, les travaux supplémentaires, ou les litiges tenant à la garantie décennale) sont des contentieux où chacun cherche à se défausser sur l’autre : « règle du ce n’est pas moi, c’est l’autre ! » II Les principales sources de contentieux : L’allongement de la durée d’exécution des travaux La durée d’exécution des travaux, et surtout si ceuxci sont importants (s’ils sont longs) est rarement respecté. Ces dépassements dans le temps donnent bien souvent lieu à des réclamations indemnitaires. En principe la durée des relations contractuelles, pour les entreprises, part de l’ordre

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Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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* * * 162ème SESSION D’ETUDES DE L’APASP 

Le contentieux de l'exécution des marchés publics de travaux 25 et 26 novembre  2013 

* * * 

 Ouverture par Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour  

I  –  INVENTAIRE  DES  CONTENTIEUX  LIES  A  L'EXECUTION  DES  MARCHES PUBLICS DE TRAVAUX Daniel GUILMAIN, Avocat au Barreau de Lille  

I ‐ Les caractères des contentieux en matière d’exécution de marchés de travaux : 

‐ Contentieux qui trouvent toujours leur origine dans les chantiers où s’exécutent les marchés publics.  A  ce  titre,  les  contentieux  font  parfois  référence  à  des  périodes  d’exécution  de travaux relativement anciennes. Il s’agit donc bien souvent d’essayer de reconstituer ce qu’il s’est passé durant ces périodes d’exécution, ce qui n’est pas toujours évident. 

‐ Contentieux  qui  poursuivent  toujours  une  finalité  indemnitaire.  Contentieux  souvent complexes demandant des investigations importantes eu égard à l’importance de l’ouvrage à construire  et  aux  sommes  engagées.  Beaucoup  de  gros  chantiers  (réalisation  du  zénith, d’université, etc) débouchant bien souvent sur des contentieux  indemnitaires à  l’issue de  la phase  de  réalisation  des  travaux.  De  ce  fait,  un  contentieux  de  l’exécution  risque  d’être beaucoup  plus  onéreux  pour  la  personne  publique  qu’un  contentieux  de  la  passation, notamment s’il est établi qu’elle a commis des fautes dans la réalisation de l’exécution d’un marché de travaux. 

‐ Ce  sont  des  contentieux  qui  sont  souvent  très  longs :  5,  6,  voire  7  ans.  Ce  sont  des contentieux indemnitaires donc le juge considère qu’il n’y a pas d’urgence. 

‐ Ce sont des contentieux qui s’accompagnent très souvent d’une phase d’expertise, qui peut aussi durer un certain temps 

‐ Ce sont des contentieux contractuels,  reposant sur  l’analyse des différents contrats  faisant intervenir les différents intervenants à l’opération de construction (maître d’ouvrage, maître d’œuvre, architecte, l’OPC et les différentes entreprises liées au maître d’ouvrage) 

‐ Contentieux  dans  lesquels  les  pièges  procéduraux  sont  parfois  redoutables :  article  50  et suivants  du  CCAG  travaux  sur  les  dispositions  relatives  aux  règlements  des  litiges  et différends. (CCAG travaux de 1976 applicable aux marchés de travaux antérieurs à 2009) Les dispositions ne sont pas toujours aisées à comprendre 

‐ Ces  contentieux  d’exécution  de marchés  de  travaux  (notamment  sur  l’allongement  de  la durée,  les  travaux  supplémentaires, ou  les  litiges  tenant à  la garantie décennale)  sont des contentieux où chacun cherche à se défausser sur  l’autre : « règle du ce n’est pas moi, c’est l’autre ! » 

II ‐ Les principales sources de contentieux : 

‐ L’allongement de la durée d’exécution des travaux La durée d’exécution des travaux, et surtout si ceux‐ci sont importants (s’ils sont longs) est rarement respecté.  Ces  dépassements  dans  le  temps  donnent  bien  souvent  lieu  à  des  réclamations indemnitaires. En principe la durée des relations contractuelles, pour les entreprises, part de l’ordre 

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de service (OS) de démarrage du chantier  jusqu’à  la réception et plus précisément  jusqu’à  la phase d’établissement du décompte général. Les entreprises considèrent que l’allongement de la durée du chantier lui a causé un ou plusieurs préjudices tenant par exemple à la mobilisation de son personnel pendant  une  durée  plus  longue  ou  à  la  nécessité  d’avoir  loué  des  équipements  pendant  plus longtemps que prévu etc. Le contentieux va d’abord se placer sur le terrain de la recherche des causes de l’allongement. Elles peuvent être multiples :  Elles peuvent résulter du fait de la maîtrise d’ouvrage elle‐même  Elles peuvent résulter du fait d’entreprises ; d’autres entreprises ayant participé à l’exécution 

et notamment de l’entreprise de gros œuvre. Le droit à  indemnisation en matière de sujétions techniques  imprévues est subordonné au point de savoir  si  les  difficultés  rencontrées  lors  de  l’exécution  du  contrat  présentent  un  caractère exceptionnel, imprévisible au moment de la conclusion du contrat, et sont extérieures aux parties. Particularité : le marché d’une entreprise participant à une opération de construction peut connaître un retard dû par exemple au retard d’exécution d’un autre  lot de  l’opération mais sans  forcément connaitre une durée différente de ce qui était prévu. Il arrive qu’il y ait un décalage dans le temps de l’intervention de l’entreprise mais la durée même de son contrat n’est pas perturbé (elle effectuera toujours dans un délai contractuel de 12 mois par exemple mais en commençant le 1er juin au lieu du 1er  février  par  exemple).  Ce  cas  de  figure  est  fréquent  et  lorsqu’on  arrive  à  démontrer  que l’allongement  de  la  durée  d’exécution  du  contrat  ne  s’est  traduite  par  l’entreprise  qui  demande indemnisation que par un simple décalage dans le temps de ses interventions, la possibilité d’obtenir indemnisation pour l’entreprise est plus difficile.   

‐ Les travaux supplémentaires Aujourd’hui,  il n’existe aucune opération de  travaux publics qui ne connaît pas de  réclamations au titre  de  travaux  supplémentaires.  Le  traitement  de  ce  type  de  contentieux  repose  sur  plusieurs considérations :  Les travaux supplémentaires ordonnés par avenant ou ordre de service sont régulièrement 

payés.   Mais il peut y avoir des problèmes liés au caractère irrégulier des ordres de service.  

Hypothèse  également  où  les  travaux  exécutés  sans  ordre  de  service  ni  accord  du maître d’ouvrage.  Le principe est  le  suivant :  ces  travaux  réalisés  sans « commande » ne donnent pas  lieu  à  paiement, même  s’ils  sont  utiles  à  l’ouvrage.  En  revanche,  lorsque  les  travaux réalisés  sans  commande  sont  considérés  comme  étant  indispensables  à  l’ouvrage, l’entreprise qui les a effectué a le droit d’être indemnisée, et ce en dépit de l’article 15.4.1 du CCAG travaux de 2009 (« … Les travaux qui sont exécutés au‐delà du montant contractuel ne sont  pas  payés. »).  La  charge  de  la  preuve  du  caractère  indispensable  des  travaux supplémentaires repose sur l’entreprise. 

La  règle de  l’indemnisation des  travaux  supplémentaires non  commandés  s’applique dans tous les marchés, y compris dans les marchés à forfait.  

Le droit au paiement des travaux supplémentaires non commandés bénéficie également au sous‐traitant : arrêt CE 10 février 1997, n°65377. 

 ‐ Le périmètre du prix global et forfaitaire 

L’article  10.2  du  CCAG  travaux  de  2009  définit  le  prix  forfaitaire  comme  étant  « tout  prix  qui rémunère  le  titulaire  pour  un  ouvrage,  une  partie  d'ouvrage  ou  un  ensemble  déterminé  de prestations défini par  le marché  et qui,  soit  est mentionné  explicitement  dans  le marché  comme étant forfaitaire, soit ne s'applique dans le marché qu'à un ensemble de prestations qui n'est pas de nature à être répété. ». Le prix forfaitaire est censé comprendre et rémunérer l’ensemble des travaux nécessaires à la réalisation du marché.  Le  caractère  global  du  prix  ne  constitue  pas  un  obstacle  à  la  rémunération  des  travaux supplémentaires  indispensables  ou  des  travaux  dus  pour  sujétions  imprévues.  Toutefois  le  prix 

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perdra son caractère forfaitaire et global. Ce qui excède  le prix forfaitaire doit être contenu dans  le décompte général  

‐ La réception des travaux Les opérations de réception sont un moment  important d’un marché de travaux dans  la mesure où elles mettent  fin  aux  relations  contractuelles.  Sous  réserve  des  dispositions  financières,  toute  la phase  du  décompte  général  se  fait  après  la  réception  des  opérations.  La  réception  peut  être prononcée de façon expresse ou tacite (art. 41.1.1 à 41.1.3 du CCAG travaux). Les litiges à propos de la réception sont nombreux et peuvent être issus de:  La prise de possession de l’ouvrage avant réception  Du  refus de prononcer  la  réception et  les  conséquences  financières de  l’établissement du 

décompte et la levée de la caution bancaire  Des modalités pratiques et juridiques des opérations de réception  Du caractère partiel ou total de la réception  La date effective de départ des garanties  La levée ou non des réserves  Du maintien de l’obligation de la mission de conseil du maître d’œuvre après la réception 

 ‐ La gestion des garanties post‐contractuelles 

Ces garanties sont déclenchées par les opérations de réception.  L’opération de réception va d’abord déclencher  la garantie de parfait achèvement. Celle‐ci dure un an et vise à la réparation… C’est une garantie contractuelle. Il y a ensuite le déclenchement de garanties post‐contractuelles :  La garantie biennale de bon fonctionnement des équipements  La  garantie  décennale  pour  les malfaçons mettant  en  jeu  la  solidité  de  l’ouvrage  ou  qui 

seraient de nature à  rendre  l’ouvrage  impropre à  sa destination. Elle  s’accompagne d’une expertise  

 ‐ Le contentieux de la résiliation sans reprise des relations contractuelles 

Il existe plusieurs hypothèses de résiliation. Le débat porte généralement sur le volet indemnitaire et sur  le  caractère bien ou mal  fondé de  la  résiliation notamment  lorsqu’il  s’agit de  résiliation pour faute ou de résiliation pour motif d’intérêt général : articles 45 et suivants du CCAG travaux).  III ‐ Actualité jurisprudentielle 

‐ La  contestation de  la décision de  résiliation d‘un  contrat dans une optique de  reprise des relations contractuelles :  les décisions  rendues depuis  l’arrêt du Conseil d’Etat du 21 mars 2011, Commune de Béziers II, n°304806 

Cette jurisprudence  institue un recours en reprise des relations contractuelles après résiliation d’un contrat administratif. Il s’agit du 3ème grand arrêt du Conseil d’Etat venant remodeler le contentieux des contrats administratifs ainsi que l’office du juge. Le  1er  arrêt :  17  juillet  2007,  Société  Tropic  travaux  Signalisation,  ne  concerne  que  le  concurrent évincé Le  2ème  arrêt :  28  décembre  1999,  Béziers  I :  pose  le  principe  de  la  loyauté  des  relations contractuelles.  Il  consiste  à  apprécier,  pour  le  juge,  la  gravité  des  irrégularités  intrinsèques éventuellement commises à propos du contrat ou des  irrégularités se rapportant à sa passation, au regard de  la  recherche du maintien du  lien contractuel. L’objectif est de privilégier  le maintien du contrat malgré  les  irrégularités  qui  peuvent  le  frapper.  C’est  en  considération  de  la  gravité  des illégalités  que  le  contrat  sera  annulé  à  la  demande  de  l’une  ou  l’autre  partie.  Recours  ouvert seulement aux parties. Le 3ème arrêt : 21 mars 2011, Béziers  II : cet arrêt porte sur  la résiliation, quelque soit  les motifs de celle‐ci.  Il  s’agit d’un  recours de plein  contentieux ouvert au  cocontractant de  l’administration.  Le 

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juge  requalifie  ce  recours  en  une  demande  de  reprise  des  relations  contractuelles.  Le  juge  se reconnaît  la capacité de  faire  revivre un contrat  résilié. La  reprise des  relations contractuelles sera fonction des motifs et de  la  légalité du caractère  régulier de  la  résiliation. La  reprise des  relations contractuelles sera également fonction de l’intérêt public qu’il peut y avoir à faire renaître le contrat. Le juge définit lui‐même les modalités du recours :  Le  recours  doit  être  exercé  par  le  cocontractant  dans  les  deux  mois  à  compter  de  la 

notification de la décision de résiliation, y compris s’il s’agit de travaux publics  La décision de résiliation n’a pas à mentionner le délai et les voies de recours. Le délai court 

donc même s’il n’est pas mentionné  L’exercice  d’un  recours  gracieux  auprès  de  l’administration  n’interrompt  pas  le  délai  de 

recours  Exemples de décisions rendues en application de la jurisprudence Béziers II : Conseil d’Etat, 23 mai 2011, n° 328525, Etablissement public pour l’aménagement de la région de la Défense :  confirme que  l’entreprise  peut, de  façon  cumulative, demander  la  reprise des  relations contractuelles du contrat résilié et une indemnisation au titre de la période transitoire entre la date d’effet de la résiliation et la reprise des relations contractuelles ordonnée par le juge.  CAA Douai, 23 décembre 2011, n° 10DA00763, GFD Suez Energie : Cet arrêt précise  le rôle du  juge en matière  de  reprise  des  relations  contractuelles.  Selon  la  Cour,  il  incombe  au  juge  du  contrat d’apprécier,  eu  égard  à  la  gravité des  vices  constatés  affectant  la décision de  résiliation  et  le  cas échéant, à  celle des manquements du  requérant à  ses obligations  contractuelles,  si  la  reprise des relations contractuelles n’est pas de nature à porter une atteinte excessive à l’intérêt général ou aux intérêts  éventuels  d’un  tiers  (qui  aurait  pu  conclure  un  contrat  avec  la  personne  publique  en remplacement du contrat résilié). CAA Douai, 2 mai 2013, n° 12DA01577 Société Orange France Reprise  du  contrat  ordonnée  entre  un  CROUS  et  un  opérateur  de  téléphonie  dès  lors  que  la résiliation a porté atteinte à l’intérêt général d’une bonne desserte en téléphonie mobile. L’atteinte  à  un des  grands principes du  service public  (principe d’universalité du  service  public)  a justifié la reprise des relations contractuelles. CAA Nancy, 28 mars 2013, n° 12NC01362, Commune d’Aubigny‐les‐Pothées La  reprise  des  relations  contractuelles  a  été  ordonnée  par  le  juge  entre  une  communauté d’agglomération et une commune dès lors qu’était en jeu un captage d’eau permettant d’alimenter plus du tiers de la population concernée. Ici le motif d’intérêt général a permis au juge de légitimer la reprise du contrat. Toutefois,  le  caractère  gravement  illégal  du  contrat  résilié  peut  faire  obstacle  à  la  reprise  des relations contractuelles : Conseil d’Etat, 1er octobre 2013, n°349099 : la Haute Juridiction a considéré que  le  contrat  résilié  était  affecté  d'un  vice  grave  le  rendant  irrégulier  par  nature  :  une  clause prévoyait la renonciation de l'acheteur public à l'exercice de son pouvoir de résiliation unilatérale. La reprise des relations contractuelles est donc jugée impossible. CAA Bordeaux, 16 juillet 2013, n° 12BX00161, Association CDAS 33 

Nonobstant l’illégalité de la décision de résiliation, l’une des causes qui peut conduire le juge à ne pas ordonner  la  reprise des  relations  contractuelles,  ce  sont  justement  l’état des  relations.  Lorsque  le juge  constate  une  détérioration  manifeste  des  relations,  il  s’abstient  d’ordonner  la  reprise  du contrat. La reprise des relations contractuelles doit être possible : ce n’est pas le cas lorsque, au moment où le juge se prononce,  le contrat a épuisé ses effets : Conseil d’Etat, 23 mai 2011, n°323468,   Société d’Aménagement d’Isola 2000.  Comme dans le recours Tropic, le Conseil d’Etat indique dans l’arrêt Béziers II que, le cas échéant, le recours en  reprise des  relations contractuelles peut être accompagné d’un  référé suspension pour suspendre  la  décision  de  résiliation.  Toutefois,  la  pratique  atteste  que  les  conditions  pour  tenter 

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d’obtenir  la suspension sont difficiles à réunir (pareil que dans  le cadre d’un recours Tropic).  Il faut démontrer qu’il y a urgence à suspendre puis un doute sérieux quant à la légalité de la décision dont on demande suspension. Pour ce qui est de la suspension dans le cadre d’un recours Béziers II, un arrêt du Conseil d’Etat du 9 mai 2012, Région Champagne‐Ardennes, n°356209, vient enserrer  les  conditions pour  l’obtention d’une suspension.   A propos de  l’urgence,  le  juge doit d’une part apprécier  les atteintes graves et  immédiates 

que  la  résiliation  porte  à  un  intérêt  public,  ou  aux  intérêts  du  requérant,  l’entreprise,  au regard de  sa  situation  financière  (la  résiliation prive  l’entreprise d’une part  significative de chiffre d’affaires voire de  l’exercice même de  son activité, de  sa pérennité). Ces éléments vont être mis en balance par  le  juge avec  l’intérêt général.  Ils vont également être mis en balance  par  rapport  aux  droits  des  tiers  et  notamment  à  ceux  d’un  éventuel  nouveau contractant  de  l’administration.  Conception  étroite  de  l’urgence  qui  peut  justifier  la suspension d’une mesure de résiliation : aucune jurisprudence à ce jour à la connaissance de l’intervenant ayant suspendu une mesure de résiliation 

A  propos  du  doute  sérieux :  confirmation  par  un  arrêt  du  Conseil  d’Etat  du  7 mai  2013, Société Auxiliaire de Parc de  la Région Parisienne, n°365043 : ne  constitue pas un doute sérieux sur la légalité de la décision de résiliation le fait que la résiliation soit due à la volonté de  relancer  une mise  en  concurrence  d’une  DSP  dont  la  durée  excède  la  durée  légale. Conception assez étroite du doute sérieux de la part du juge. 

 ‐ L’extension  de  la  jurisprudence  Commune  de  Béziers  aux  mesures  de  modifications 

unilatérales des contrats Un nouveau recours en annulation des modifications unilatérales du contrat? Le  recours  institué  par  la  décision  du  Conseil  d'Etat  "Béziers  II"  donne  la  possibilité  pour  le cocontractant de l'administration de demander l'annulation d'une mesure de résiliation qu'il estime illégale, en vue de la reprise des relations contractuelles. Un jugement du TA de Lille du 20 février 2013, Lyonnaise des Eaux France et Eaux Nord, a semblé étendre  cette  jurisprudence  aux  autres mesures  prises  par  la  personne  publique,  telles  que  les modifications unilatérales du  contrat. Dans  cette affaire, une  convention de délégation de  service public  (DSP) en matière d’eau potable et d’assainissement avait été conclue entre  la communauté urbaine de Lille et  la Lyonnaise des Eaux et  sa  filiale  locale,  la  société des Eaux du Nord. Pendant l'exécution  de  la  convention,  la  communauté  urbaine  a  pris  de  façon  unilatérale  deux  décisions (révision du prix de l'eau, reversement de provisions). Saisi du litige, le TA de Lille, a annulé les deux décisions et a ordonné la remise en état initiale du contrat. Les parties ayant conclu une transaction, l'affaire n'a donc pas été portée devant les juridictions supérieures. Selon  Daniel  Guilmain,  ce  jugement  peut  être  rapproché  avec  l'arrêt  du  21 mars  2011,  dans  la mesure où le juge adopte un raisonnement similaire: "au nom de l’intérêt du cocontractant, le juge du contrat est fondé à rétablir une situation antérieure". Pour  l'intervenant,  il s'agirait d'un recours en restitution d’un contrat dans son état initial, le contrat n'ayant pas été résilié, et non d'un recours en  reprise des  relations contractuelles. Toutefois, comme dans Béziers  II,  le  juge du TA annule  les modifications  prises  par  la  personne  publique  et  ordonne  la  remise  du  contrat  en  l’état  où  il  se trouvait  avant  les  modifications,  précise  Daniel  Guilmain.  Le  juge  semble  ainsi  contourner l'impossibilité  de  principe  pour  le  cocontractant  de  l'administration  de  contester  devant  lui  une décision d'exécution du contrat.  L'impossibilité pour le juge d'annuler une mesure d'exécution d'un contrat public Le juge peut‐il annuler d'autres mesures d'exécution du contrat, autre que la décision de le résilier? L'arrêt du 21 mars 2011 (Béziers II) ne le précise pas. Le rapporteur public avait alors laissé la porte ouverte  à  une  évolution  future  de  la  jurisprudence  en matière  de modifications  unilatérales  du contrat. 

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Selon Daniel Guilmain,  la  question  restait  posée  jusqu’à  l’intervention  récente  d’une  décision  du Conseil  d’Etat  du  25  octobre  2013.  En  effet,  par  cet  arrêt,  le  Conseil  d'Etat  est  venu  clore définitivement  le débat. "Une mesure d'exécution  (en  l'occurrence,  la décision d'interrompre  l'une des prestations prévues par un marché à bons de commande) d'un contrat n'ayant ni pour objet ni pour  effet  de  mettre  fin  aux  relations  contractuelles  n'est  pas  au  nombre  de  celles  dont  le cocontractant de  l'administration  est  recevable  à  demander  l'annulation  au  juge du  contrat  et  sa suspension au  juge des référés. Seul est ouvert un droit à  indemnisation", précise  l'arrêt. Cet arrêt confirme que  la  jurisprudence Béziers II ne vaut que pour  la décision de résiliation. Le  jugement du TA de Lille restera donc isolé, a commenté l'intervenant.  En  l'occurrence,  il  s'agissait d'un marché  à bons de  commande  sans minimum ni maximum passé entre  la  région  Languedoc‐Roussillon  et  une  association  pour  les  années  2011  et  2012,  pour  des actions de formation concernant  le brevet professionnel de  la  jeunesse, de  l'éducation populaire et des  sports.  Le  marché  est  reconduit  pour  la  période  2013‐2014.  Toutefois,  ayant  relevé  des manquements de  l'association à ses obligations contractuelles,  la région a mis fin à  la prestation de formation, objet du bon  de  commande. Contestant  cette mesure,  l'association  a  saisi  le  juge des référés du tribunal administratif pour demander  l'annulation ainsi que  la suspension de  l'exécution de la décision d'interruption du bon de commande. Le tribunal a fait droit à sa demande se fondant sur la circonstance selon laquelle cette décision aurait causé un préjudice financier  trop important à l'association. La région forme alors un pourvoi devant le Conseil d'Etat. La Haute juridiction rappelle d'abord le principe selon lequel "les parties à un contrat ne peuvent pas demander  au  juge  l'annulation  d'une  mesure  d'exécution  de  ce  contrat,  mais  seulement  une indemnisation du préjudice qu'une telle mesure leur a causé".  Une telle  interruption constitue « une simple mesure d'exécution du contrat », considère  le Conseil d'Etat.  En  effet  et  comme  l'avait  relevé  le  tribunal  administratif,  "la  décision  attaquée  avait  pour objet non de résilier  le marché à bons de commande conclu avec cette association mais seulement d'interrompre  l'exécution  de  l'une  des  prestations  prévues  par  un  bon  de  commande".  Le  juge n'ayant pas pris en compte  les conséquences de cette constatation a commis une erreur de droit, puisqu'une telle mesure n'est pas "au nombre de celles dont le cocontractant de l'administration est recevable  à demander  l'annulation  au  juge du  contrat  et  la  suspension de  l'exécution  au  juge du référé".  L'association  n'était  donc  pas  recevable  à  demander  l'annulation  de  la  décision d'interrompre l'une des prestations prévues au marché. L'ordonnance du juge des référés a donc été annulée.  

‐ La modulation des pénalités de  retard :  les décisions  rendues  en  application de  l’arrêt du Conseil d’Etat du 29 décembre 2008, OPHLM de Puteaux, n°296930 

Depuis cet arrêt, le JA, comme le JJ, se reconnaît désormais compétent pour apprécier les pénalités de façon générale et notamment les pénalités de retard en matière de marchés publics. Auparavant, au nom de  la  liberté  contractuelle des parties,  le  juge  administratif  considérait qu’il n’avait pas  à interférer dans  l’application des clauses de pénalité. Renversement de jurisprudence avec  l’arrêt du 29 décembre 2009.  Le juge va apprécier les pénalités infligées et plus particulièrement la légalité des clauses de pénalité dans  les contrats. En  la matière,  la  jurisprudence n’est pas  fournie. En  réalité, on  remarque que  la juridiction administrative ne vient sanctionner que les clauses prévoyant des pénalités d’un montant manifestement excessif.  Exemples : TA Amiens, 3 mars 2009, Centre Hospitalier de Doullens : le montant des pénalités est équivalent au prix du marché. CAA Nancy, 6 août 2009 : les pénalités dépassent légèrement le montant du marché.  

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CAA Nancy, 13 octobre 2011, n° 10NC00539, Société Entreprise Jacquet : Les pénalités s’élevaient à 290% du montant du marché c'est‐à‐dire 850 000 euros de pénalité pour 585 jours de retard. Le juge a ramené le montant des pénalités à 75 000 euros. CAA Marseille,  3  décembre  2011,  Société méditerranéenne  de  démolition :  pénalités  de  26000 euros pour 19 jours de retard, soit 60% du marché. La commune a été condamnée à rembourser  la moitié de ces pénalités. Lorsque le juge estime les pénalités trop élevées, il fixe un nouveau montant, mais sans explication sur la détermination du montant. A l’inverse, des pénalités de 10% du montant du marché ne sont pas considérées comme excessives.   A  quel moment  peut‐on  contester  les  pénalités  du  point  de  vue  de  l’entreprise ?  Il  faut  que  les pénalités imputées à l’entreprise aient acquis un caractère définitif, d’où la nécessité pour le maître d’ouvrage de  les reprendre dans  le décompte général définitif. Après  le délai épuisé de 45  jours,  la pénalité  aurait  acquis  un  caractère  définitif,  qui  pourra  donner  lieu  à  contestation  de  la  part  de l’entreprise. Un  arrêt  montre  que  les  contraintes  procédurales  notamment  en  matière  d’établissement  du décompte se retournent parfois contre la personne publique.  CAA Lyon, 30 octobre 2013,   n° 12LY02887, Commune de Laval‐sur‐Doulon : La mairie a notifié un décompte  général  à  l’entreprise  en oubliant  les pénalités de  retard.  Elle décide  alors d’établir un décompte  général  rectificatif, modificatif mais  après  l’expiration  du  délai  de  45  jours.  Le  juge  a considéré que  la collectivité ne pouvait pas établir un tel décompte général modificatif du premier dès lors que le premier avait acquis un caractère définitif au terme d’un délai de 45 jours.   

Echanges avec la salle : Question : Dans quelles conditions peut‐on mettre en œuvre  la responsabilité du maître d’ouvrage du  fait de  la  responsabilité d’une entreprise dans  l’allongement des délais d’exécution du marché, même s’il n’y a pas de faute de la part du maître d’ouvrage ? Réponse : A ce sujet, il existe un arrêt récent du Conseil d’Etat, 5 juin 2013, n°352917, Région Haute‐Normandie : Dans cette affaire, une entreprise demandait à être indemnisée du fait de l’allongement de  la durée du chantier du  fait du retard d’une autre entreprise. La cour administrative d’appel de Douai avait considéré que le maître d’ouvrage était responsable des fautes des autres intervenants. Le Conseil d’Etat a donc cassé cet arrêt en affirmant clairement que la maître d’ouvrage ne peut pas voir  sa  responsabilité  engagée  du  seul  fait  des  fautes  commises  par  les  autres  intervenants. Autrement dit, pour que  la responsabilité du maître d’ouvrage soit engagée,  il faut qu’il existe une part de responsabilité personnelle du maître d’ouvrage. Question :  Dans  le  cas  d’avenant  passé  pour  des  travaux  supplémentaires,  et  qui  vont  avoir  un impact  sur  le  délai  d’exécution,  l’entreprise  peut‐elle  demander  en  plus  des  indemnités  pour dépassement de délai ? Réponse : A priori oui, mais à condition qu’elle arrive à prouver un préjudice au titre de l’allongement du  à  des  travaux  et  un  préjudice  qui  ne  soit  pas  compenser  par  le  paiement  des  travaux supplémentaires.  L’entreprise  doit,  dans  tous  les  cas  et  pour  toute  demande  indemnitaire, démontrer  le  caractère  réel,  certain et direct de  son préjudice :  il  s’agit d’ailleurs de  la principale difficulté pour les entreprises.  

  

II  –  LA BONNE GESTION DU MARCHE:  Les points  à ne  pas négliger dans  le CCAG Travaux  Charles PAREYDT, Avocat  

Présentation des points de vigilance au niveau du CCAG travaux.  Mode de fonctionnement du CCAG travaux 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Le CCAG Travaux est un outil et n’est en rien un cadre réglementaire, c'est‐à‐dire que chaque pouvoir adjudicateur  est  libre  d’apporter  les  dérogations  qu’il  entend.  Les  marchés  peuvent  prévoir  de déroger  à  certaines des  stipulations du CCAG  travaux.  Le CCAP doit être  construit en  fonction du CCAG, et non l’inverse. L’intervenant recommande d’éviter au maximum les copier‐coller.  Toutefois, une certaine démarche doit être respectée en matière de dérogation : 

‐ Les dérogations éventuelles doivent être exprimées clairement dans le CCAP ‐ Le dernier article du CCAP doit récapituler  l’ensemble des dérogations par rapport au CCAG 

travaux Ce  mécanisme  peut  poser  des  problèmes,  notamment  en  matière  d’interprétation.  Certaines dérogations ne sont pas très claires, ou des dérogations sont utilisées en dehors même du texte du CCAG travaux. De plus, et c’est  le cas  le plus fréquent,  l’acheteur public déroge au niveau du CCAP sans  références au CCAG  travaux,  ce qui  implique une  confrontation  textuelle. Celle‐ci peut poser problème  au  niveau  de  la  compréhension  du marché  pour  le  titulaire  du marché  et  lorsqu’il  y  a contentieux.  Cohérence avec les textes en vigueur Cohérence avec le Code des marchés publics (CMP) notamment par rapport aux notions de pouvoir adjudicateur et de représentant de pouvoir adjudicateur. Le  CCAG  travaux  est  un  outil  pédagogique  qui  a  privilégié  les  références  aux  textes  plutôt  que l’intégration dans le corps du texte du CMP. Des  références  sont  également  faites  à  d’autres  sources  du  droit  des  marchés  publics  type commentaires, qui ont vocation à s’appliquer  lors de  l’exécution du marché :  le Code du  travail en matière d’élaboration des plans de  sécurité et de protection de  la  santé des  travailleurs  (art. 28.3 CCAG travaux), certaines dispositions du Code des assurances, du Code de commerce, du Code de la construction et de l’habitation, etc.  Création d’un socle commun  Le CCAG est un outil pédagogique et non un texte réglementaire : souci de créer un socle commun à tous les CCAG dans la conception des premiers articles (ordre de service par exemple, confidentialité, protection de la main d’œuvre, assurances, formes de la résiliation…) Le CCAG travaux conserve évidemment une spécificité qui  lui est propre : sa plus grande spécificité est  la construction d’un CCAG à  travers non pas deux acteurs  (pouvoir adjudicateur et  titulaire du marché) mais à travers trois acteurs (maîtrise d’ouvrage en matière d’exécution de travaux, le maître d’œuvre, l’entreprise de travaux). Ceci permet notamment d’anticiper le contrat de maîtrise d’œuvre en amont.  

I‐ Les acteurs du CCAG travaux Le CCAG travaux prévoit une  liste d’acteurs : 

‐ Le maître de l’ouvrage ‐ Le représentant du pouvoir adjudicateur ‐ Le maître d’œuvre ‐ Le titulaire ‐ Les co‐traitants ‐ Les  sous‐traitants. Depuis  2009,  le CCAG  travaux distingue  la  sous‐traitance directe de 1er 

rang et la sous‐traitance indirecte de 2nd rang.  Les relations non couvertes par le CCAG travaux Il n’y a pas d’anticipation particulière du CCAG travaux face à l’existence fréquente (surtout dans les hôpitaux) d’une maîtrise d’œuvre exercée en interne. Le CCAG travaux est très bien conçu dans le cas où  la maîtrise  d’œuvre  est  externalisée  et  exécutée  par  un  opérateur  privé mais  de  construction proposée pour anticiper une situation qui est l’exercice de la maîtrise d’œuvre en interne et le cumul de  deux  casquettes  (possible  par  la  loi MOP)  entre  la maîtrise  d’ouvrage  et  la maîtrise  d’œuvre 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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exercées par une entité publique. Il est donc nécessaire de  l’anticiper et de retravailler  les missions par rapport à cette particularité avec deux choix : 

‐ Soit il est possible de rester sur une configuration propre au CCAG travaux avec une maîtrise d’œuvre  exercée  par  la  personne  publique  en  identifiant  au  sein  de  la  collectivité  deux services : l’un propre à la maîtrise d’ouvrage, l’autre propre à la maitrise d’œuvre. 

‐ Soit  il est possible de travailler sur une maîtrise d’ouvrage et une maîtrise d’œuvre un peu plus  élargie  par  rapport  à  la  distinction  classique  maîtrise  d’œuvre  publique  /  maîtrise d’œuvre privée.  

 Une autre problématique est celle de l’ignorance de certains acteurs de la construction au niveau du CCAG travaux comme le bureau de contrôle, l’OPC, le CSPC ou CS2I, ainsi que les relations entre les acteurs.  Cela  oblige  donc  un  positionnement  au  niveau  du  CCAP  pour  anticiper  l’absence d’encadrement par le CCAG travaux.  Les périmètres non couverts par le CCAG travaux Il  n’y  a  pas  de  distinction  entre  les  travaux  de  bâtiment  et  les  travaux  d’infrastructures.  Pas  de spécificité propre. Le CCAG travaux est plus réputé pour l’encadrement d’une opération de bâtiment que d’infrastructure. Pas d’adaptation spécifique pour encadrer les opérations de conception‐réalisation. Le CCAG travaux envisage une réalisation classique (loi MOP) mais il n’y a pas d’anticipation, lorsqu’il y a un cumul au sein d’une entité privée, entre l’exercice de la maîtrise d’œuvre (aspect conceptuelle) et la réalisation des travaux. Si  l’acheteur public est confronté à une opération de conception‐réalisation,  il dispose de deux choix : 

‐ Soit il fait abstraction du CCAG travaux ‐ Soit  il reconfigure  le CCAG travaux en redéfinissant  les missions conférées au titulaire et au 

maître  d’œuvre  par  rapport  à  un  acteur,  l’assistant  technique  à maîtrise  d’ouvrage,    qui apparaît au niveau d’une opération de conception‐réalisation. Ce dernier va  reprendre des positions qui sont soit propres à la maîtrise d’œuvre soit pour encadrer des missions propres à  la maîtrise d’œuvre  (avec une phase prédominante :  l’opération de  réception, puisque  la conception‐réalisation pose  le problème d’un groupement qui s’autocontrôle par rapport à une opération de réception). 

 Autre  problème  qui  est  un  « nid  à  contentieux » :  l’absence  de  réelle  définition  du  contenu  des études d’exécution confiées aux entreprises de travaux, qui est fréquente en opération de bâtiment et  le  partage  entre  le  titulaire  du marché  et  le maître  d’œuvre.  Cet  aspect  amène  beaucoup  de problématiques notamment  concernant  la  responsabilité par  rapport à  la  réalisation du processus des études d’exécution. L’encadrement existe mais reste très lapidaire au niveau du CCAG travaux, et mérite une réflexion particulière.  Organiser le rôle de chaque acteur Le CCAG travaux est un outil imparfait par rapport à l’organisation du contenu et du rôle de chaque acteur. Il faut fréquemment se poser la question de savoir qui intervient, qui fait quoi, les limites de responsabilité dans  le cadre de  l’exécution d’un marché de travaux et  les frontières de contenu de missions pour parfaire ce qui est inachevé et non envisagé au sein du CCAG travaux. Pour les grosses opérations de  toute  façon, une  réflexion permanente doit être menée, notamment au niveau des rôles de chaque acteur (entités diverses qui ne sont pas toutes liées par un contrat entre elles mais qui sont toutes liées contractuellement au maître d’ouvrage dans le but de réaliser un ouvrage). Le CCAP en se fondant éventuellement sur le CCAG est la pièce permettant de connaître la place et les obligations de chacun des intervenants.  Le maître de l’ouvrage 

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Pas de définition mais rappel des dispositions de la loi MOP. Il s’agit d’attributs propres à la maîtrise d’ouvrage,  il  n’est  donc  pas  nécessaire  de  le  rappeler  au  sein  du  CCAP.  Ils  existent  de  droit  par l’application  de  la  loi MOP mais  il  y  a  un  travail  à  faire  des  anticipations  d’attributs  de maîtrise d’ouvrage,  qui  seront  autant  de  champs  de  responsabilité  en  cas  de  contentieux,  s’il  y  a  des insuffisances dans l’exercice de ces missions. Par exemple, une des difficultés  récurrentes en matière de  travaux et de CCAG  travaux est  la non anticipation sur l’origine des travaux supplémentaires. Dans son article 14, le CCAG travaux parle de travaux  supplémentaires  au  sens  large,  non  prévus  initialement,  mais  il  ne  propose  pas  de catégorisation de  travaux.  Il  traite  les  travaux supplémentaires comme une catégorie unique.  Il est important  de  prévoir  un  mécanisme  d’anticipation  de  la  catégorisation  de  l’origine  de  travaux supplémentaires : ceux‐ci sont‐ils liés à une modification du programme, à une erreur de conception de la maîtrise d’œuvre, à des aléas, ou à d’autres causes ? Le maître de l’ouvrage est le pouvoir adjudicateur pour le compte duquel les travaux sont exécutés. Lorsque  le marché est conclu par une entité adjudicatrice,  les dispositions au pouvoir adjudicateur s’appliquent à l’entité adjudicatrice. D’après la loi MOP, il appartient au maître d’ouvrage : 

‐ De déterminer la localisation ‐ De définir le programme ‐ D’arrêter l’enveloppe financière prévisionnelle ‐ D’assurer les financements ‐ De choisir le processus selon lequel l’ouvrage sera réalisé ‐ Et de  conclure, avec  les maîtres d’œuvre et entrepreneurs qu’il  choisit,  les  contrats ayant 

pour objet l’étude et l’exécution des travaux  Le représentant du pouvoir adjudicateur Le maître d’ouvrage peut confier ces missions à un mandataire dans les conditions définies par la loi MOP,  ou  à  un  conducteur  d’opération.  Il  s’agit  soit  d’un  agent  du  pouvoir  adjudicateur  soit  du  représentant.  Le  représentant  est  réputé  disposer  des  pouvoirs  suffisants  pour  prendre,  dès notification de  leur nom au  titulaire dans  les délais  requis ou  impartis par  le marché,  les décisions nécessaires engageant le pouvoir adjudicateur.  Le maître d’œuvre Une place réelle est accordée au maître d’œuvre dans  l’encadrement de  l’exécution du marché, au sein du CCAG travaux. Les documents particuliers du marché mentionnent  le nom  et  l’adresse du maître d’œuvre.  Si  ce dernier  est  une  personne  morale,  il  désigne  la  personne  physique  qui  a  seule  qualité  pour  le représenter, notamment pour signer les ordres de service. Le CCAG travaux rééquilibre de façon notable les relations entre maîtrise d’ouvrage et les entreprises en répartissant certaines obligations entre le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre. Cela entraîne de  fait de nouvelles contraintes pour la maîtrise d’œuvre, en mettant à son compte des missions qui ne sont pas forcément prévues dans la loi MOP. Par exemple : 

‐ Obligation pour le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre de recueillir auprès des exploitants d’ouvrages  les mesures  de  prévention  à  appliquer  pendant  l’exécution  des  travaux  (art . 27.3.1 CCAG travaux) 

‐ Obligation de tenir un registre de chantier répertoriant  l’ensemble des documents pouvant s’échanger sur un chantier. Ce registre peut être dématérialisé (art. 28.5) 

‐ Obligation d’informer les entreprises de tout dysfonctionnement occasionné par le personnel intervenant sur  le chantier et entravant  le bon déroulement de celui‐ci renforçant ainsi son devoir de conseil (art. 31.4.5) 

 Le titulaire 

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Il est l’opérateur économique qui conclut le marché avec le représentant du pouvoir adjudicateur. En cas  de  groupement  des  opérateurs,  le  titulaire  désigne  le  groupement,  représenté  par  son mandataire. Dès la notification du marché, le titulaire a l’obligation de désigner une personne physique habilitée à le  représenter pour  les besoins de  l’exécution du marché. D’autres personnes physiques peuvent être habilitées par le titulaire en cours d’exécution du marché. De  plus,  le  titulaire  est  tenu  de  notifier  sans  délai  au  représentant  du  pouvoir  adjudicateur  les modifications survenant au cours de l’exécution du marché et qui se rapportent : 

‐ Aux personnes ayant le pouvoir de l’engager, ‐ A la forme juridique sous laquelle il exerce son activité, ‐ A sa raison sociale ou à sa dénomination, ‐ A son adresse ou à son siège social, ‐ Aux  renseignements  qu’il  a  fourni  pour  l’acceptation  d’un  sous‐traitant  et  l’agrément  des 

conditions  de  paiement,  et  de  façon  générale,  à  toutes  les modification  importantes  de fonctionnement de l’entreprise pouvant influer sur le déroulement du marché.  

La co‐traitance Pour les règles relatives à la co‐traitance, l’article 3.5 du CCAG travaux renvoie aux articles 51, 102, et 106 Code des marchés publics. Le nouveau CCAG travaux de 2009 précise en outre qu’il s’agit d’un groupement momentané  d’entreprises  qui  ne  vit  que  pendant  la  durée  du marché,  c'est‐à‐dire  à l’expiration de la garantie de parfait achèvement.  En  cas de  groupement  conjoint,  il  faut préciser  si  le mandataire du  groupement  sera  solidaire de chacun des autres opérateurs du groupement dans les obligations contractuelles de celui‐ci à l’égard du représentant du pouvoir adjudicateur. En cas de groupement solidaire, chacun des membres du groupement  est  engagé  financièrement  pour  la  totalité  du marché  et  doit  pallier  une  éventuelle défaillance  de  ses  partenaires.  L’un  d’entre  eux  désigné  dans  l’acte  d’engagement  comme mandataire,  représente  l’ensemble  des  entrepreneurs  vis‐à‐vis  du  représentant  du  pouvoir adjudicateur et du maître d’œuvre, pour l’exécution du marché. Lorsque  le maître d’ouvrage  institue une  règle de  solidarité pour  le mandataire du groupement,  il doit le préciser dans les documents particuliers du marché.  Le rôle du mandataire Il est également rappelé par le CCAG travaux. Le mandataire est chargé de : 

‐ Représenter le groupement auprès du pouvoir adjudicateur ‐ Coordonner les prestations du groupement ‐ Assurer la gestion administrative et financière du marché ‐ Représenter chacun des entrepreneurs groupés et ce jusqu’à expiration du délai de garantie 

de parfait achèvement.  Centralisation  au  niveau  du  mandataire  que  l’on  soit  face  à  un  groupement  solidaire  ou  à  un groupement conjoint. Il est le seul interlocuteur viable pour le pouvoir adjudicateur.  Les sous‐traitants Pas d’encadrement spécifique de la sous‐traitance directe. Le CCAG travaux renvoie aux dispositions du CMP et à la loi du 31 décembre 1975 sur la sous‐traitance. L’apport du nouveau CCAG travaux est d’encadrer la sous‐traitance indirecte.  Le CCAG de 2009    reprend également  l’article 6 de  la  loi de 1975 :  le sous‐traitant qui confie à un autre sous‐traitant l’exécution d’une partie du marché dont il est chargé, est tenu de lui délivrer une caution ou une délégation de paiement (art.14). L’article 14 organise également la sécurité financière du sous‐traitant indirect qui ne serait pas agréé au paiement direct en garantissant ses paiements par une caution personnelle et solidaire donnée par  l’entrepreneur ou  le sous traitant de premier rang. Cette caution n’aura pas à être  fournie  si  l’entrepreneur délègue  le paiement du  sous‐traitant   au 

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maitre  d’ouvrage  dans  les  termes  de  l’article  1275  du  Code  civil  à  concurrence  du montant  des prestations exécutées par le sous‐traitant.  

II‐  Prix et règlement des comptes Pas d’innovations fondamentales. Deux temps propres au CCAG travaux : 

‐ Par  rapport  au  CCAG  de  1976,  encadrement  assez  précis  du  circuit  de  paiement  entre  le pouvoir adjudicateur et  le  titulaire du marché avec  la production d’un projet de décompte mensuel (mécanisme propre au CCAG travaux) et la notification d’un état d’acomptes par le maître d’œuvre. Mécanismes encadrés de manière particulière. 

‐ 2ème point important à aborder au niveau du prix dans le cadre du CCAG travaux : mécanisme de  l’article  14  du  CCAG  travaux  encadrant  le  processus  de  règlement  des  travaux modificatifs :  l’article  prévoit  la  notification  d’un  ordre  de  service  à  prix  provisoire  par  le maître  d’œuvre :  notification  du  contenu  des  travaux mais  également  des  prix.  Prix  qui doivent  toujours  faire  référence  à  la  décomposition  du  prix  initial  du  marché  (soit décomposition globale et forfaitaire, soit bordereau de prix unitaire en cas de prix nouveau). 

Cette  problématique  donne  lieu  à  une  distinction  jurisprudentielle  importante :  travaux supplémentaires  ordonnés  par  ordre  de  service  ne  répondent  pas  aux mêmes  exigences  que  les travaux supplémentaires n’étant pas ordonnés par ordre de service (ces derniers doivent répondre à l’exigence de « travaux  indispensables à  la bonne réalisation de  l’ouvrage dans  les règles de  l’art », pour être indemnisés). De  son  côté,  l’entreprise  ne  doit  jamais  réaliser  des  travaux  dans  son  coin  sans  déclencher  de mécanisme d’information. Conseil de  l’intervenant : mettre en exergue ce devoir d’information et prévoir contractuellement ce qui n’est pas régi par l’article 14.   

 D’autres points à anticiper au niveau du CCAG travaux: 

‐ Le contenu des prix  (art. 10.1). Le prix  forfaitaire comprend  certaines  sujétions et certains items  (utilisations  du  domaine  public,  phénomènes  naturels,  présence  de  canalisations, conduites et câbles de toute nature, coûts résultant de l’élimination des déchets de chantier, réalisation  simultanée  d’autres  ouvrages).  Les  prix  sont  réputés  avoir  été  établis  en considérant qu’aucune prestation n’est à fournir par le maître de l’ouvrage. 

Même si le prix forfaitaire est censé représenter une globalité, quand on discutera du périmètre du prix,  il  faut déterminer  s’il  s’agit de  travaux  supplémentaires ou non.  Le  réflexe naturel  est de  se reporter au contenu de ces prix prévu par l’article 10.1 du CCAG Travaux.  on aura  toujours assez souvent  le  réflexe naturel de se  reporter au contenu de ces prix prévu par l’article  10.1  du  CCAG  travaux.  Le  pouvoir  adjudicateur,  selon  les  conseils  de  l’intervenant,  peut prévoir d’autres  items ou en supprimer et prévoir une formule plus globalisante sur un contenu du prix qui englobe tout type de sujétions sans forcément les détailler.   

‐ Distinction entre prix forfaitaires et prix unitaires est bien prévu par le CCAG travaux (article 10.2). 

Il existe un attachement jurisprudentiel fort par rapport à la globalisation du prix forfaitaire. En effet, la  globalité du prix  global  et  forfaitaire  est  souvent mise  en  avant que  ce  soit  au bénéfice ou  au détriment du pouvoir adjudicateur (pose des problématiques comme celle de savoir qui doit prendre en  charge  ce  que  l’étude  de  sol,  dans  un marché  de  travaux,  n’a  pas  pu  anticiper en  amont  de l’opération?)  CAA Nancy, 7 juin 2012, n°11NC00510 : En l’occurrence il s’agissait de fouilles archéologiques ayant conduit à procéder à certaines modifications et notamment à modifier  le système d’assainissement initialement prévu, celui rendu en dernier lieu conduisant à une importante réduction des coûts sur le prix du marché. Le centre hospitalier entendait répercuter cette diminution des coûts sur le prix du marché, en dépit du caractère forfaitaire de celui‐ci.  La cour confirme la position des premiers juges 

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en rappelant que le prix forfaitaire est dû dès lors que l’ouvrage est exécuté, sans que celui‐ci puisse faire l’objet d’une modification en raison d’un changement affectant la décomposition du prix. Rappel assez fréquent de cette jurisprudence   De  plus,  le  prix  forfaitaire  limite  le  droit  à  indemnité :  CE,  5  juin  2013,  n°352917, Région Haute‐Normandie :  Les  difficultés  rencontrées  dans  l’exécution  d’un marché  à  forfait  n’ouvrent  droit  à indemnité  au  profit  de  son  titulaire  que  si  elles  ont  eu  pour  effet  de  bouleverser  l’économie  du contrat  ou  sont  imputables  à  une  faute  directe  de  la  personne  publique.  Cette  position  pose  la question du champ de responsabilité d’un maître d’ouvrage par rapport à une  faute qui  trouverait son origine dans  la  réalisation d’une prestation d’un autre  cocontractant de  la personne publique (maître d’œuvre, OPC, entreprises de  travaux). Elle est  responsable de  toutes  les  fautes, à  charge pour la personne publique d’appeler en garantie ces différents intervenants sur le fondement du lien contractuel qu’elle entretient avec ces intervenants.   

‐ Le CCAG travaux propose une configuration de décomposition du prix global et forfaitaire.  Au  niveau  du  CCAG,  la DPGF  est  présentée  sous  la  forme  d’un  détail  évaluatif  comprenant  pour chaque nature d’ouvrage ou chaque élément d’ouvrage,  la quantité   à exécuter et  le prix de  l’unité correspondant (art. 10) et  indiquant pour  les prix d’unité en question,  les pourcentages de ces prix correspondant aux  frais généraux, aux  impôts et  taxes et à  la marge pour  risques et bénéfices, ce dernier pourcentage s’appliquant au total des frais directs, des frais généraux et des impôts et taxes.  La décomposition prévue par le CCAG travaux va donc très loin dans le détail.  

III‐ Les délais d’exécution propres au CCAG travaux. (art. 19) 1. Les délais 

Point de  vigilance  sur  la date de début d’exécution.  Le délai d’exécution  comprend  la période de préparation  (art.28.1) et  la période de délai d’exécution des  travaux.  Le CCAG  travaux  impose un ordre  de  service  pour  le  démarrage  de  la  période  de  préparation  des  travaux  et  une  fois  cette période de préparation terminée, un autre ordre de service pour  le commencement de  l’exécution des  travaux.  L’article  19  du  CCAG  travaux  prévoit  une  dérogation  permettant  la  notification  d’un ordre de  service englobant  la période de préparation et de démarrage des  travaux pour éviter  les contradictions à ce titre. Attention en cas de travaux allotis ! Il s’agit du seul cas où l’on parle d’un délai global d’exécution des travaux englobant l’ensemble des interventions des différents acteurs et des délais propres à chaque lot qui doivent être précisés dans le cadre d’un planning d’exécution des travaux avec la traduction et la précision d’un planning prévisionnel d’exécution des travaux proposé en amont de l’opération. La prolongation des délais d’exécution est également un mécanisme prévu par le CCAG travaux (art. 19.2).  Il  prévoit  des  circonstances  propres  de  prolongation  des  délais  d’exécution  des  travaux.  Il prévoit aussi une matérialisation de la décision de prolonger les travaux. La prolongation des travaux, pour  les  circonstances  énumérées  par  l’article  19  (exemple :  difficultés  imprévues  en  cours  de chantier), est matérialisée par une décision prise par  le représentant du pouvoir adjudicateur qui  la notifie  au  titulaire  après  proposition  et  discussion  avec  le  maître  d’œuvre  et  avis  du  titulaire. Mécanisme compliqué pour arriver à une prolongation des délais d’exécution ! Le mécanisme peut être simplifié en prévoyant une dérogation à ce titre. Prolongation possible également en cas d’intempéries. A ce  titre,  le CCAG  travaux prévoit aussi un mécanisme.  Prolongation  impulsée  par  un  ordre  de  service  du maître  d’œuvre  sous  réserve  de répondre  à  la  définition  des  intempéries  au  sens  des  dispositions  législatives  et  réglementaires (conditions  atmosphériques,  inondations,  intempéries  qui  rendent  dangereuses  ou  impossible l’accomplissement du travail). Un arrêt de travail doit être ordonné pour vérifier la corrélation entre les  intempéries et  le travail de  l’entreprise pour qu’une déduction soit effectuée sur  la durée réelle d’exécution des travaux. Concernant l’actualité par rapport aux délais d’exécution : 

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‐ CE, 27 octobre 2010, n°323485, Commune de Seyne‐sur‐Mer :  le  titulaire d’un marché de travaux a droit à  l’indemnisation du préjudice qu’il subit du fait de  l’allongement des délais d’exécution  du marché  qui  ne  lui  est  pas  imputable  alors même  que  les  nouveaux  délais avaient  fait  l’objet d’ordres de  service pour  lesquels  il n’avait pas émis de  réserves. Ainsi, l’absence de réserves ne vaut pas renoncement à indemnisation dans le cadre spécifique des délais d’exécution prolongés. 

‐ CE, 13 juin 2012, n° 343788 : La société titulaire d’un marché public a droit à l’indemnisation intégrale des préjudices subis du  fait de retards dans  l’exécution du marché  imputables au maître d’ouvrage, ou à ses autres contractants, et distincts de  l’allongement de  la durée du chantier  lié à  la  réalisation de  travaux  supplémentaires, dès  lors que ce préjudice apparaît certain  et  présente  avec  ces  retards  un  lien  de  causalité  directe.  C’est  une  exigence jurisprudentielle forte. 

 2. Les pénalités  

En  cas  de  retard  imputable  au  titulaire  dans  l’exécution  des  travaux,  le  CCAG  travaux  propose toujours une pénalité  journalière d’un montant de 1/3000 du montant hors taxes de  l’ensemble du marché. La pénalité de retard qui s’applique à la fin du chantier, vient sanctionner un retard dans la livraison de l’ouvrage par rapport au délai d’exécution prévu initialement. Exonération prévue par le CCAG travaux : le titulaire est exonéré des pénalités dont le montant total ne dépasse pas 1000 euros HT pour l’ensemble du marché. D’autres pénalités peuvent être instituées par le marché. Les  retenues  provisoires  sont  à  distinguer  des  pénalités    (art.  20.1.5).  Les  retenues  provisoires peuvent  être  constituées  qu’en  cas  de  retards  partiels  constatés  sur  une  tâche  identifiée  dans  le cadre d’un planning détaillé d’exécution. Le pouvoir adjudicateur n’a pas  l’obligation de mettre en demeure le prestataire avant d’appliquer ce type de pénalité de retard. La retenue sera transformée ou non au moment du décompte du marché si un retard définitif et global est constaté par rapport au délai d’exécution fixé en amont.  CE,  16 mai  2012,  n°345137,  Communauté  agglomération  Rouen‐Elbeuf‐Austreberthe  c/  Société Eurovia Haute‐Normandie : Le dépassement des délais d’exécution en raison de  l’accomplissement de travaux supplémentaires décidés par ordre de service peut justifier l’application des pénalités de retard  prévues  au  contrat  si  aucune  réserve  n’a  été  émise  quant  aux  délais  nécessaires  à  leur réalisation et qu’il n’existe aucun accord entre  les parties pour  les soustraire aux délais d’exécution du contrat initial. CE,  10 mars  2010,  n°308676,  Commune  Issy‐les‐Moulineaux :  Le  Conseil  d’Etat  confirme  que  la collectivité publique peut  renoncer  au bénéfice des pénalités de  retard  et que  cette  renonciation peut  découler  de  la  prolongation  unilatérale  du  délai  d’exécution  par  le  maître  de  l’ouvrage notamment  du  fait  de  la  notification  d’un  nouveau  planning  décalé  d’exécution,  sauf  mention expresse que ce planning ne vaut pas renonciation.  

IV‐ Le règlement des litiges (art. 50 CCAG travaux) Dorénavant, quelle que soit l’origine du litige, l’entrepreneur doit exposer les motifs de son différend dans un mémoire en réclamation, le transmettre au pouvoir adjudicateur et en adresser une copie au maître  d’œuvre  (art.  50.1.1).  Ce  n’est  qu’après  l’avis  du maître  d’œuvre  que  le  représentant  du pouvoir  adjudicateur  notifie  sa  décision  au  titulaire  et  ce  dans  un  délai  de  45  jours  (art.  50.1.2). L’absence de décision dans ce délai vaut rejet implicite du la demande du titulaire (art. 50.1.3). A compter de ce rejet (explicite ou implicite), l’entrepreneur peut saisir le tribunal administratif sans avoir à produire un mémoire complémentaire, sous réserve de ne porter devant la juridiction que les chefs et motifs énoncés dans son mémoire en réclamation (art. 50.3.1).    

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Echanges avec la salle : Question : Un marché avec maîtrise d’œuvre interne ou un marché de travaux sans maîtrise d’œuvre est‐il une dérogation  ou un aménagement du CCAG travaux ? Réponse :  Le  CCAG  travaux  part  du  principe  d’une maîtrise  d’œuvre  privée.  Si  c’est  une  seule  et même personne qui cumule les deux casquettes (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre), le pouvoir adjudicateur peut prévoir des dispositions plus simples et plus opérationnelles que ce qui est prévu par le CCAG travaux. 

  

III – LES GARANTIES CONTRACUELLES: Un contentieux en évolution? Rémi PORTE, Juriste en charge de la construction à la FFSA  La  réception  des  travaux  purge  les  vices  apparents.  Un  arrêt  du  Conseil  d’Etat  du  20  ars  2013, n°357636,  le  rappelle : «  La  réception ne met  fin aux obligations contractuelles des  constructeurs qu’en ce qui concerne  la réalisation de  l’ouvrage   et demeure ainsi par elle même sans effet sur  les droits et obligations financiers nés de  l’obligation du marché à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires dont  la détermination  intervient définitivement  lors de  l’établissement du solde définitif ».  

la garantie de parfait achèvement Prévue par l’article 44.1 du CCAG travaux : le titulaire doit reprendre tous les désordres signalés par le maître d’ouvrage ou le maître d’œuvre.  Le débiteur de la garantie est l’entreprise titulaire et le bénéficiaire est le maître d’ouvrage.  

Si des dommages apparents ont été acceptés sans réserve  lors de  la réception,  il n’y a pas d’action possible.  Les  dommages  objets  de  réserves  à  la  réception  permettent  au  contraire  le  maintien  de  la responsabilité de droit commun du titulaire.  Des dommages survenus pendant la première année suivant la réception des travaux ne relevant pas de la garantie décennale (dommages intermédiaires) doivent être déclarés la première année au titre de la garantie de parfait achèvement. Ces dommages engageront la responsabilité du titulaire.  Lorsque des dommages surviennent pendant la première année suivant la première année de nature décennale, la garantie décennale peut être déclenchée.  Des dommages survenus pendant la première année suivant la réception des travaux relevant de la garantie de bon fonctionnement permettent de déclencher la garantie de bon fonctionnement.  

La responsabilité biennale et décennale Le titulaire de  l’action en garantie décennale est  le propriétaire de  l’ouvrage. Toutefois,  le transfert de propriété est possible à un tiers  (cf CE 9 décembre 2011, n°342283)). Le maître d’ouvrage peut également  donner mandat  à  un  tiers  pour  agir  contre  les  constructeurs,  notamment  au maître d’ouvrage délégué (cf CE 7 mars 2005, n°204454).  Le débiteur de la garantie est le constructeur en lien direct avec le maître d’ouvrage. N’ayant pas de lien direct avec  le maître d’ouvrage,  il ne peut pas être  recherché en décennale. De plus,  l’action délictuelle contre le sous‐traitant est possible (cf CAA Nancy, 16 novembre 2006, n°03NC00758).  

Celui qui a  fait construire et qui vend dans moins de dix ans est  réputé  constructeur et peut être recherché  en  responsabilité  décennale,  d’où  l’intérêt  de  s’offrir  les  assurances  facultatives  des constructeurs non réalisateurs.  

Les ouvrages concernés :  ‐ Neuf/ réhabilitation ‐ Notion d’équipement : dissociable, indissociable ou à usage exclusivement professionnel. 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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La garantie décennale couvre :  ‐ L’atteinte à la solidité de l’ouvrage ‐ L’impropriété à  la destination est une notion non définie par  les textes et  les  juges ont une 

conception extensive de celle‐ci. Cette notion couvre par exemple la sécurité des personnes. (revêtement  de  sols,  non  respect  de  la  règlementation  incendie,  contentieux  lié  à  la règlementation thermique (RT), nuisances sonores…) 

‐ Dommages intermédiaires ‐ Dommages évolutifs. Le juge administratif admet la prise en charge des dommages futurs.  

  L’assurance construction 

L’assurance  des  risques  avant  réception :  en  principe,  les  entreprises  sont  responsables  des dommages avant réception. L’assurance après réception :  Les  ouvrages  soumis  à  l’obligation  d’assurance :  assurance  obligatoire  pour  tous  les  ouvrages  en principe sauf les ouvrages listés à l’article L 243‐1‐1 du Code des assurances.  Les  personnes  soumises  à  l’assurance  obligatoire :  article  L  242‐1  du  Code  des  assurances  donne certaines exceptions. L’obligation dommages ouvrage ne s’applique pas notamment aux personnes morales de droit public et aux personnes morales de droit privé qui assurent  la maîtrise d’ouvrage dans le cadre d’un PPP avec l’Etat.  Même  si  elle  est  facultative,  l’assurance  dommages‐ouvrage  a  un  vrai  intérêt  pour  le maître  de l’ouvrage. C’est une assurance de préfinancement.  

Les assurances facultatives :  ‐ Garantie de bon fonctionnement ‐ Dommages immatériels ‐ Garantie « génie civil ».  

Points de vigilance à l’attention des maîtres d’ouvrage :  A supposer que vous n’ayez pas d’assurance dommages‐ouvrage,    il convient de prêter attention à l’assurance des intervenants à l’acte de construire (entreprises).  Attention également à la date d’ouverture de chantier. La garantie décennale court à compter de la réception, pour autant  l’assureur qui  interviendra pour un désordre de nature décennale n’est pas l’assureur au moment de  la réception mais  l’assureur au moment de  la déclaration d’ouverture de chantier. C’est un critère important à vérifier.  

Attention également aux chantiers importants de plus de 15 millions d’euros. Les entreprises doivent dans ce cas de figure mettre en place des garanties spécifiques. La loi oblige les entrepreneurs à avoir une  garantie  décennale  correspondant  au  coût  total  du  chantier.  Le  contrat  collectif  de responsabilité décennale (CCRD) est régi par l’article 9 du CCAG travaux. 

Pour  l’assurance  dommages‐ouvrage,  entre  la  réception  d’une  déclaration  de  sinistre  réputée constituée et la proposition d’indemnité de l’assureur, il doit s’écouler un délai de 90 jours.  

Le  maître  d’ouvrage  public  est  moins  bien  traité  que  le  maître  d’ouvrage  privé  concernant  la réparation.  Côté  droit  privé  on  a  un  désordre  de  nature  décennale  9  ans  après  la  réception,  l’assureur  des  constructeurs  va  couvrir  la  remise  en  l’état,  comme  si  l’ouvrage  n’avait  jamais  été utilisé. En droit public, la vétusté est en général imputée au maître d’ouvrage.  

Le contentieux Concernant  la  prescription,  les  délais  sont  compliqués  à  gérer.  En  matière  d’assurance,  la prescription est biennale (2 ans) depuis la forme de la prescription avec la loi du 17 juin 2008.  CAA de Douai 14 novembre 2012 :  l’acte  interruptif de  la prescription peut être fait par quelqu’un qui n’est pas habilité avant que le juge statue au fond. 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Le  contentieux évolue  avec une  forte  augmentation de  la  sinistralité  (plus 20% par  rapport  à  l’an passé). Le coût des sinistres majeurs a augmenté pour les assureurs.  Les remèdes pour l’assureur : l’augmentation des prix. Mais en réalité il existe également des actions de  prévention.  Il  faudra  de  plus  en  plus  prendre  en  compte  la  formation  des  entreprises  sur  ces questions.   

Echanges avec la salle :  Intervention  de  Jean‐Marc  Peyrical :  Ce  domaine  des  assurances  est  peu  connu  des  acheteurs publics. Même les conseils ne connaissent pas suffisamment ce domaine. Vous avez dit qu’il y avait de plus en en plus de sinistralité. Peut‐on en conclure que les entreprises travaillent de plus en plus mal ?  Réponse :  En  réalité,  on  constate  en  période  de  crise,  une  augmentation  de  la  sinistralité. Des  problèmes de qualification mais également d’encadrement peuvent être  répertoriés  lorsqu’on a recours à des sous‐traitants. La règlementation est parfois peu connue. La question des matériaux bas de gamme qui sont installés est aussi une question préoccupante.  Remarque: Le formulaire de  la déclaration de sinistre n’est pas assez poussé. Il faut aller plus  loin pour  rechercher  les  responsabilités  de  chacun  des  intervenants.  Ensuite,  chaque  procédé  ne nécessite pas la même assurabilité.  Réponse :  Sur  la  question  des  produits,  l’assureur  ne  garantit  de  base  que  les  techniques  dites courantes (la mise en œuvre, respect du DTU et règles professionnelles, certification des produits etc). Concernant  la déclaration de sinistre,  il est vrai qu’il existe des  formulaires  types. C’est  très encadré lorsqu’on est en dommages‐ouvrage. Si le maître d’ouvrage oublie un élément, l’assureur dispose de 10 jours pour le lui réclamer.  

  

IV  –  LA  RECEPTION DES  TRAVAUX  ET  LA  LEVEE DES  RESERVES:  les  liaisons entre le CCAG et le CCAP Louis ROESSEL, Ingénieur en chef des Hôpitaux universitaires de Strasbourg Charles PAREYDT, Avocat  La fin du marché se matérialise techniquement par la réception des travaux. La réception des travaux est l’acte par lequel le pouvoir adjudicateur déclare accepter l’ouvrage, avec ou sans réserve. Outre le fait que la réception met fin aux relations contractuelles, cet acte est le point de départ des délais de garanties (conditions au chapitre V du CCAG travaux) telles que la garantie de parfait achèvement ou la garantie décennale de bon fonctionnement.  Le maître d’ouvrage doit l’anticiper en amont, dès la phase de conception du calendrier des travaux pour éviter  tout problème au moment des opérations préalables à  la réception  (OPR), et éviter un éventuel  retard.  En  effet,  selon  Charles  Pareydt,  « la  réception  se  prépare  bien  en  amont,  dès  la construction des marchés de prestations  intellectuelles et doit  impliquer  tous  les  intervenants qui vont œuvrer à la conception du calendrier de travaux ».  Les opérations préalables à la réception  L’article 41.2 du CCAG  travaux  reformule  les opérations préalables à  la décision de  réception. Ces opérations comportent en tant que de besoin : 

‐ La reconnaissance des ouvrages exécutés ‐ Les épreuves éventuellement prévues par le marché ‐ La constatation éventuelle de l’inexécution des prestations prévues au marché ‐ La vérification de  la conformité des conditions de pose des équipements aux spécifications 

des fournisseurs conditionnant leur garantie ‐ La constatation éventuelle d’imperfections ou de  malfaçons 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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‐ La  constatation  du  repliement  des  installations  de  chantier  et  de  la  remise  en  était  des terrains et des lieux 

‐ Les constations relatives à l‘achèvement des travaux.  Toutefois,  pour  les  deux  intervenants,  l’article  41.2  du  CCAG  travaux,  qui  prévoit  notamment l’établissement  et  la  tenue  des OPR,  est  lacunaire.  A  ce  titre,  et  pour  combler  cette  insuffisance textuelle,  Louis Roessel  considère  et  conseille  aux participants qu’ « avant même de  consulter  les entreprises,  dès  la  phase  d’études  de  projet  dite  PRO,  il  est  opportun  de  faire  figurer  dans  le calendrier général de  travaux, des  tâches clairement  identifiées préfigurant  la réception, telles que les opérations de vérifications préalables aux OPR, les mises en services, les OPR, etc ».  Pour  éviter  que  des  désordres  n’apparaissent  au  moment  des  OPR,  il  est  conseillé  au  maitre d’ouvrage, au  stade de  la  rédaction des pièces du marché, d’envisager et de planifier, au  sein du calendrier général des travaux,  les vérifications techniques préalables. Pour ce faire « il convient de positionner  les  différentes  tâches  de  pré‐OPR  et  de  décliner  les  tâches  de  vérification  visuelles, fonctionnelles des installations techniques et performantielles, zone par zone, niveau par niveau » a insisté Louis Roessel.  Il  s’agit  en  autres  de  vérifier  sur  site  les  prestations    dès  qu’elles  sont  achevées :  installations techniques ou non techniques, étanchéité à l’air du bâtiment, secours électriques, calfeutrement ou encore la pose d’ossatures de faux plafonds avant blanchiment. Enfin,  les essais et mises en service clôtureront  les vérifications  techniques préalables  (distribution électrique, distribution d’eau chaude…)  La décision de réception La réception prend effet à la date d’achèvement des travaux. Dans le délai de 5 jours suivant la date du procès‐verbal, la maître d’œuvre fait connaître au titulaire s’il  a  ou  non  proposé  au  représentant  du  pouvoir  adjudicateur  de  prononcer  la  réception  des ouvrages et, dans l’affirmative, la date d’achèvement des travaux qu’il a proposé de retenir, ainsi que les réserves dont il a éventuellement proposé d’assortir la réception. Au  vu  du  procès  verbal   des  opérations  préalables  à  la  réception  et  des  propositions  du maître d’œuvre, le maître de l’ouvrage décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves.  Dans  le  cas où  il prononce  la  réception,  il  fixe  la date qu’il  retient pour  l’achèvement des 

travaux. La décision ainsi prise est notifiée au  titulaire dans  les 30  jours suivant  la date du procès‐verbal.  

A défaut de décision du maitre de l’ouvrage notifié dans le délai de 30 jours, les propositions du maître d’œuvre s’imposent au maître de l’ouvrage et au titulaire. 

La réception prend effet à la date fixée pour l’achèvement des travaux.  Les différentes possibilités offertes au maître d’ouvrage Il peut refuser de réceptionner les travaux (art. 41.3 du CCAG travaux) Il peut réceptionner les travaux sans réserve avec une date convenue pour l’achèvement des travaux (art. 41.3) Il  peut  réceptionner  les  travaux  avec  réserves  au  sens  d’imperfections  et  malfaçons  affectant l’ouvrage (art.41.6) Il peut réceptionner les travaux sous réserve de l’exécution de travaux dans un délai qui n’excède pas trois mois  (art. 41.5).  La  constatation de  l’exécution de  ces prestations doit donner  lieu à procès‐verbal dressé dans  les mêmes  conditions que  le procès‐verbal des OPR. Dans  ce  cas,  il bloque  la constitution du décompte général définitif (art. 13). Il peut  réceptionner  sous  réserve de  l’exécution  concluant de  tests ou d’épreuves. Dans  le  cas où certaines épreuves doivent, conformément aux stipulations du CCAP, être exécutées après une durée déterminée de service des ouvrages ou certaines périodes de l’année (art. 41.4) 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Il  peut  réceptionner  avec  réfaction  du  prix  sans  les  imperfections  constatées  soient  de  nature  à porter atteinte à la sécurité, au comportement ou à l’utilisation des ouvrage. Dans ce cadre, le maître d’ouvrage peut, eu égard à la faible importance des imperfections et aux difficultés que présenterait la  mise  en  conformité,  renoncer  à  ordonner  la  réfaction  des  ouvrages  estimés  défectueux  et proposer au titulaire une réfaction sur les prix (art. 41.7).  La levée des réserves (art. 41.6) En principe, au terme de la décision de réception, un délai est fixé pour la levée des réserves.  En absence de délai, l’entrepreneur doit, 3 mois avant l’expiration du délai de garantie, remédié aux imperfections ou malfaçons. Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans  le délai prescrit,  le maître d’ouvrage peut  les faire exécuter aux frais et risques du titulaire.  Le constat de la levée des réserves Même si cette étape n’est pas  inscrite dans  le CCAG travaux,  la  levée des réserves doit faire  l’objet d’un constat pour éviter toute constatation sur la réalité de la levée ou non. Le représentant du pouvoir adjudicateur doit, par décision, lever les réserves et fixer définitivement la date d’achèvement des travaux.  La réception partielle (art.42) La  réception partielle ne doit pas  se confondre avec une  réception  lot par  lot  sur un ouvrage non achevé). La réception partielle est possible lorsque : 

‐ Un délai d’exécution distinct du délai global d’exécution de  l’ensemble des travaux, est fixé par le marché pour une tranche de travaux, un ouvrage ou une partie d’ouvrage. 

‐ Le maître  d’ouvrage  prend  possession,  avant  l’achèvement  de  l’ensemble  des  travaux,  de certains ouvrages ou parties d’ouvrages. 

‐ Pour  les  tranches  de  travaux,  ouvrages  ou  parties  d’ouvrages  ayant  donné  lieu  à  une réception partielle,  le délai de garantie  court à  compter de  la date d’effet de  la  réception partielle. 

‐ Le décompte général est établi à compter de la dernière décision de réception partielle. Il en est également ainsi pour la libération des sûretés. 

 

Echanges avec la salle : Question : Qu’en est‐il des procédures de réception des OPR lorsque la maîtrise d’œuvre est assurée par la maîtrise d’ouvrage (maîtrise d’ouvrage intégrée) ? Réponse : Dans ce cas, le maître d’ouvrage se trouve exclu de l’application de la loi MOP. Cela dit, il existe deux types de possibilité : soit une séparation est envisagée contractuellement entre les deux services (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre) et chacun des services  accomplit ce qui est prévu par le CCAG travaux. Soit les actions peuvent être cumulées (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre) sans  les  identifier  en  tant  que  telle.  L’important  est  que  le maître  d’ouvrage  doit  être  clair  par rapport à l’entrepreneur. Question : Dans  le  cadre  de  la  réalisation d’un ouvrage  sous  forme de  10,  15 ou  20  lots, doit‐on envisager une réception unique ou la réception par lot est‐elle plus judicieuse notamment si certains lots sont terminés bien avant ?  Réponse de Louis Roessel: Nous pratiquons exclusivement la réception unique. Réponse de Charles Pareydt : Juridiquement parlant, le pouvoir adjudicateur peut tout prévoir, dans le  sens où un  lot  est  égal  à un marché.  Tout  reste question d’organisation :  autonomie du CCAP, organisation propre à chaque lot, identification de réception. Toutefois, la difficulté est de savoir tout coordonner.  Par  retour  d’expériences,  il  existe  plutôt  une  pratique  de  la  réception  unique  pour l’ensemble des lots. Un process plus global reste plus simple à maîtriser pour la maîtrise d’ouvrage et pour la maîtrise d’œuvre.  

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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V – LE DECOMPTE GENERAL DEFINITIF (DGD) Louis ROESSEL, Ingénieur en chef des Hôpitaux universitaires de Strasbourg Charles PAREYDT, Avocat  Il  faut  anticiper  au mieux  cette  phase  de  décompte  général.  A  la  différence  de  la  réception  des travaux,  le CCAG prévoit un processus qui est assez encadré. Des mécanismes précontentieux sont prévus pour anticiper et gérer les contentieux.  

Sur l’établissement du décompte général, deux phases classiques sont à distinguer :  ‐ Le règlement financier du marché : il est régi de manière précise par le CCAG Travaux (article 

13  CCAG  Travaux).  Le  règlement  s’effectue  provisoirement  dans  l’attente  du  règlement définitif par le décompte général qui fixe une position financière définitive.  

‐ Notification du projet de décompte mensuel. Au titre du CCAG travaux, un délai strict de 7 jours  est  imposé  au maître  d’œuvre  à  compter  de  la  notification  du  projet  de  décompte mensuel  pour  notifier  un  état  d’acompte  au  titulaire  du  marché  et  en  même  temps soumettre au pouvoir adjudicateur cet état d’acompte. Si cette notification n’intervient pas dans un délai de 7  jours à compter de  la  réception de  la demande du  titulaire, celui‐ci en informe  le  représentant du pouvoir adjudicateur qui procède au paiement  sur  la base des sommes qu’il admet.  

La réception des  travaux marque  la  fin des relations contractuelles et enclenche  les procédures de liquidation  financière du marché qui doivent avoir pour  finalité de constater que  les obligations de paiement ont été respectées, notamment en cours d’exécution et de régler ce qui reste à régler au niveau  du  solde  du  marché.    La  première  des  conditions  est  l’achèvement  des  travaux.  Après l’achèvement des travaux, un projet de décompte final est établi concurremment avec  le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d’exécution des prestations ou à la place de ce dernier. Ce projet de décompte final est  la demande de paiement finale du titulaire, établissant  le montant total des sommes auquel  le  titulaire prétend du  fait de  l’exécution du marché dans son ensemble, son évaluation étant faite en tenant compte des prestations réellement exécutées.  

Au niveau des délais, le titulaire du marché doit notifier le projet de décompte final dans un délai de 45  jours  à  compter de  la décision de  réception des  travaux.  Le  titulaire est  lié par  les  indications figurant au projet de décompte final. Il doit récapituler les réserves qu’il a émises et qui n’ont pas été levées, sous peine de les voir abandonnées.  

Le maître  d’œuvre  effectue  une  vérification  sur  le  décompte  final.  Le  projet  de  décompte  final accepté ou rectifié par le maître d’œuvre devient le décompte final. En cas de rectification du projet de décompte final, le paiement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par le maître d’œuvre.  

Au  niveau  du  décompte  général,  le  maître  d’œuvre  établit  le  projet  de  décompte  général comprenant :  

‐ Le décompte final ‐ L’état du solde, établi à partir du décompte final et du dernier décompte mensuel ‐ La récapitulation des acomptes mensuels et du solde 

Le projet de  décompte  général  est  signé par  le  représentant du pouvoir  adjudicateur. Ce dernier notifie au titulaire  le décompte général avant la plus tardive des deux dates ci‐après :  

→40 jours après la date de remise au maître d’œuvre du projet de décompte final par le titulaire →12 jours après la publication de l’index de référence permettant la révision du solde  

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Si  le  représentant  du  pouvoir  adjudicateur  ne  notifie  pas  au  titulaire,  dans  les  délais  stipulés  ci‐dessus, le décompte général signé, celui‐ci adresse une mise en demeure d’y procéder. L’absence de notification au titulaire du décompte général dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la mise  en  demeure,  autorise  le  titulaire  à  saisir  le  juge  du  contrat  en  cas  de  désaccord.  Si  le décompte général est notifié au  titulaire postérieurement à  la  saisine du  tribunal administratif,  le titulaire n’est pas tenu, en cas de désaccord, de présenter un mémoire en réclamation.  

En résumé :  ‐ Signature sans réserve = décompte général et définitif du marché ‐ Signature avec  réserves mais  sans motiver  les  réserves = décompte général et définitif du 

marché ‐ Pas de signature ni de contestation = décompte général et définitif du marché 

Le  décompte  lie  définitivement  les  parties,  sauf  en  ce  qui  concerne  le  montant  des  intérêts moratoires afférents au solde.  

Le mémoire en réclamation reprend aussi sous peine de  forclusion  toutes  les réclamations qui ont été  formulées  antérieurement  à  la  notification  du  décompte  général.  En  cas  de  réclamation  non reprise au niveau de  la contestation du décompte général,  l’entrepreneur est censé avoir  renoncé implicitement  aux  réclamations  formulées  antérieurement  à  la  notification  du  mémoire  en réclamation. Si aucun accord n’est  trouvé entre  les parties,  le mécanisme prévu par  l’article 50 du CCAG Travaux s’applique.  

Actualité jurisprudentielle :   

CE, 15 novembre 2012, n° 349107, Commune Dijon : Ayant constaté les des imperfections mineures, le maître d’ouvrage peut décider de proposer à l’entreprise une réfaction sur le prix, sinon, ou en cas de  refus de  l’entreprise,  il doit émettre des  réserves  à  la  réception et  l’entrepreneur est  tenu de réaliser les travaux qui sont la condition de la levée des réserves.  

CE, 20 mars  2013, n° 3576536, Centre hospitalier de Versailles :  Si  le maître d’ouvrage notifie  le décompte général d’un marché public de travaux alors même que des réserves relatives à  l’état de l’ouvrage  achevé  n’ont  pas  été  levées  et  qu’il  n’est  pas  fait  état  des  sommes  correspondant  à  la réalisation  des  travaux  nécessaires  à  la  levée  des  réserves  au  sein  de  ce  décompte,  le  caractère définitif de ce dernier a pour effet de  lui  interdire toute réclamation correspondant à ces sommes, même si un litige est en cours devant le juge administratif.  

CAA  Lyon,  28  février  2013,  n°  12LY00477,  Sté  Henri  Germain :  Le  CCAG  travaux  imposant  une notification  du  décompte  général  par  la  personne  responsable  du marché  ou  son mandataire,  la notification par  le maître d’œuvre est  irrégulière. Si c’est  le cas,  le décompte ne peut dès  lors être considéré comme définitif et l’entrepreneur est fondé à saisir directement le juge, malgré l’absence de mémoire en réclamation.  

CAA  Lyon,  31  janvier  2013,  n°  12LY00172,  Sté  Axe  isolation :  Une  entreprise  n’est  recevable  à contester le bien fondé de la créance objet du titre exécutoire, et résultant du décompte du marché, que si ce décompte n’est pas devenu définitif.  

Echanges avec la salle : Question de Jean‐Marc Peyrical : Il est conseillé de ne pas transmettre de décompte général définitif tant que  les réserves ne sont pas  levées. Toutefois, si  la  levée des réserves est  longue et complexe comment faut‐il procéder ? Est‐il possible de se fixer une limite ?  Réponse : c’est une difficulté réelle pour le titulaire mais aussi le maître de l’ouvrage qui continue à faire vivre un solde financier de marché alors qu’il préférerait le clôturer. Le mécanisme qui reste est la réalisation aux frais et risques avec toutes les difficultés que cela peut occasionner.  

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Intervention de Louis Roessel : il faut mettre en place des mécanismes sur le suivi des retards, sur le déroulement  des  opérations,  appliquer  des  retenues  provisoires  et  des  pénalités.  Enfin,  il  est nécessaire  de  prévoir  le  rapport  de  fin  de  chantier  qui  établit  les  responsabilités  des  uns  et  des autres. 

  

VI – LA TRANSACTION 

Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour  La transaction est un outil du Code civil. L’article 2044 du Code civil prévoit que la transaction est un contrat signé entre deux ou plusieurs parties et qui a pour objectif de prévenir ou de mettre fin à un litige né ou à naître.  Ce  contrat a une  force  importante puisqu’il a autorité de  la  chose  jugée. De plus, une  fois que  le contrat est  régulièrement  signé,  il a autorité de  force  jugée. Cela  signifie que  tout  litige porté par l’une des parties, sur un élément objet de la transaction serait nul et non avenue. Le litige est éteint.  

La  transaction doit  faire état de  concessions  réciproques.  Le  juge,  s’il est  saisi de  la  légalité de  la transaction, va contrôler si les sommes qui sont données à l’entreprise sont bien justifiées. Il faut des concessions de la part de la collectivité mais aussi de l’entreprise, c'est‐à‐dire qu’il doit y avoir de la négociation, non de l’automatisme. La transaction sera qualifiée d’illégale par le juge s’il n’y a pas de concessions réciproques. 

Avis CE 6 décembre 2002 Commune de l’Hay les Roses et deux circulaires de 2009 et 2011 : Pendant un temps, beaucoup de comptables publics bloquaient les transactions. Beaucoup de collectivités ne veulent pas faire de transactions à cause de ce problème. Le Conseil d’Etat a alors considéré que  le comptable public n’a pas à se prononcer sur la légalité d’un contrat public. Ce n’est pas son rôle. Le comptable public bloque un paiement s’il manque les pièces comptables qui doivent accompagner le paiement tel que fixé par  la règlementation. Mais  il ne peut pas bloquer une transaction s’il estime qu’elle n’est pas légale.  

L’homologation :  L’homologation permet de  saisir  le  juge administratif avant  la  signature de  la  transaction pour  lui demander son avis. L’homologation n’est pas une condition de régularité de la transaction. Le Conseil d’Etat  a  même  estimé  qu’il  fallait  limiter  les  homologations  pour  désengorger  les  tribunaux. Demander l’avis du juge concernant la transaction retarde par ailleurs la transaction.  Le juge rappelle que l’homologation peut être utile dans deux cas :  

‐ Si l’exécution de la transaction peut s’avérer difficile (sur un plan technique, financier, etc.)  ‐ Si  la  transaction  est  la  conséquence  d’une  décision  de  justice.  Ex :  transaction  est  la 

conséquence d’une annulation de procédure ou de marché.  

Conseils pour une bonne transaction : une écriture fine et travaillée, des concessions réciproques, des explications  sur  les  sommes.  Toutefois,  concessions  réciproques  ne  signifient  pas  nécessairement concessions équivalentes.  La  transaction  est  intéressante  lorsqu’elle  suit  un  avis  (avis  du  comité  consultatif  de  règlement amiable (CCRA), expert, tiers, médiateur, etc.). Pour donner plus de poids à  l’avis en question,  il est intéressant de faire une transaction.   

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Echanges avec la salle :  Question : Le nombre de parties est‐il limité dans une transaction ?  Réponse : Non, la transaction entre plusieurs parties est possible.  Intervention :  Dans  les  CCRA,  il  faut  observer  qu’on  se  préoccupe  moins  des  concessions réciproques que de l’application d’une règle d’équité de manière souple.  Réponse : Cela est lié au comité et à la position du rapporteur.  Question : L’engagement de renoncer au recours vaut‐il concession réciproque ?  Réponse : Oui,  il s’agit d’une forme de concession mais nécessairement  lorsque  la transaction est signée, il n’y a plus de recours possible.  

VII – LES AVENANTS  Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour 

Pour la première fois, les directives européennes vont traiter des avenants.  Le principe dans  les prochaines directives:  l’interdiction des modifications substantielles du contrat. Cette règle vaut pour tous les contrats précédés de mise en concurrence. Règle assez sévere.   Ce principe  reprend  la  jurisprudence de  la CJCE du 19  juin 2008, Pressetext Nachrichtenagentur GmbH, aff. C454/06 

Les modifications substantielles sont définies comme :  ‐ Celles qui auraient pu avoir une  influence sur  la sélection des candidats ou  l’attribution du 

contrat.  ‐ Celles qui modifient l’équilibre économique du contrat en faveur de son titulaire.  ‐ Celles  qui  modifient  considérablement  son  champ  d’application  en  y  englobant  des 

fournitures, des services et des travaux non couverts au départ.  ‐ Et  disposition  assez  sévère  qui  prévoit  que  les modifications  substantielles  sont  définies 

comme celles qui dépassent 5% du prix du contrat et  le  seuil d’application de  la directive, valeur  cumulée  des modifications  successives. Au‐delà  de  5%,  la modification  serait  donc suspecte. Il s’agit d’un pourcentage faible.  

Au vu d’une dernière réponse ministérielle du 6 août 2013, qui fait état des dernières négociations avec la Commission, le Parlement et le Conseil, le seuil pourrait (sans certitude) être porté à 10% de la valeur du contrat. Il s’agirait alors d’un seuil de minimis.  Ce sera  la première fois qu’un texte  imposera un pourcentage au‐delà duquel  la modification serait suspecte. Par ailleurs on parle du cumul des avenants.   

‐ Celles  qui  remplacent  le  partenaire  contractuel,  sauf  opération  de  restructuration  de  la société  contractante  ou  substitution  consécutive  à  une  faillite.  A  condition  que  cela n’entraîne  pas  d’autres  modifications  substantielles  et  ne  vise  pas  à  se  soustraire  à l’application de  la présente directive. Cela ne doit pas  remettre en cause  les conditions de remise en concurrence.  

En revanche, ne seraient pas considérées comme substantielles :  ‐ Les modifications prévues par le contrat sous la forme de clauses de réexamen ou d’options 

claires,  précises  et  univoques.  Il  convient  d’indiquer  le  champ  d’application  des modifications,  la nature des modifications,  les conditions dans  lesquelles elles peuvent être opérées.  

‐ Les modifications rendues nécessaires par des circonstances imprévisibles, sans excéder 50% de  la  valeur  initiale  du  contrat  (sauf  pour  les  concessions  dans  les  activités  de  réseau : réponse ministérielle du 6 août 2013).  

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Dans  les deux cas de modifications autorisées,  la nature globale du contrat ne doit pas s’en trouver changer.   Deux interdictions formelles dans les directives :  

‐ Interdiction  de modifier  le  contrat  pour  remédier  à  des  déficiences  dans  son  exécution (pouvant être réglées en  imposant au titulaire  l’exécution de ses obligations contractuelles) ou pour compenser un risque d’augmentation du prix que le cocontractant a couvert.   

Pour  résumer :  Interdiction d’aider  indûment  le  titulaire du  contrat en  faisant preuve à  son égard d’une indulgence injustifiée.  Le droit européen est plus contraignant qu’auparavant.  Dès 2014, transposition de certaines dispositions des directives.   Quand l’avenant est‐il nécessaire ?  

‐ Changement  de  la  personne  publique.  Nécessité  d’un  avenant  pour  matérialiser  le changement de pouvoir adjudicateur.  

‐ En  cas de défaillance du membre d’un groupement  (réponse ministérielle n° 01602 du 18 octobre 2012) :  

Le membre d’un groupement ne peut se substituer à un autre= violation des règles de mise en concurrence.  

Dans le cas de sa défaillance, un avenant doit être conclu pour poursuivre l’exécution du contrat avec un groupement réduit.  

Lorsque  le membre du  groupement défaillant  est mandataire,  le  groupement doit proposer un mandataire parmi eux.  

En  cas  de  groupement  conjoint  et  si  le mandataire  n’est  pas  solidaire,  le  pouvoir adjudicateur doit passer un marché de substitution aux prestations effectuées par le membre défaillant.  

Quelques jurisprudences sur l’illégalité de l’avenant :  

CAA Douai, 19  juin 2012, Préfet Nord, n° 11DA01071 :  Illégalité d’un  avenant dont  l’objet est de prendre en compte des prestations non prévues au marché.  

CAA Bordeaux, 14 mars 2013, Ecole nationale supérieure des techniques industrielles et des mines d’Albi, n° 11BX03091 : Illégalité d’un avenant dont l’objet est de céder par son titulaire à une autre société une convention d’occupation du domaine public. Une convention d’occupation du domaine public ne se cède pas, il faut en passer une autre.  

TA Paris, 6  janvier 2012, Préfet de  la Région  Ile‐de‐France, n° 1111213/7‐2 :  Illégalité de  l’avenant fixant  la rémunération définitive d’un maître d’œuvre en cas de bouleversement de  l’économie du contrat. Arrêt de la CAA Paris, 25 février 2013 a remis en cause le jugement du TA.  

CAA Marseille,  19  décembre  2011,  Communauté  urbaine Nice‐Côte  d’Azur,  n°  09MA01523 :  Les travaux ordonnés par le maître de l’ouvrage, indissociables du marché initial et ne bouleversant pas l’économie général du marché sont légaux.  

TA  Cergy‐Pontoise,  17  septembre  2013,  Société  DTP21,  n°  1201769 :  Un  candidat  évincé  d’un marché  n’est  pas  recevable  à  demander  l’annulation  d’un  avenant  à  ce  marché.  C’est  une jurisprudence importante, il faut espérer qu’elle soit confirmée.  

Attention à l’exception d’illégalité. Parfois on attaque un avenant parce que le contrat est illégal. On voit beaucoup cela pour les contrats complexes comme les concessions d’aménagement.  Attention,  un  avenant  illégal  peut  entraîner  la  responsabilité  pénale  de  son  auteur  pour  délit  de favoritisme.  

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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Echanges avec la salle :  Intervention Charles Pareydt : J’ai été confronté à certaines situations dans lesquelles on cherche à qualifier l’avenant de nouveau marché par le biais du référé contractuel.  Question :  Vous  avez  évoqué  le  cas  d’un  avenant  de  transfert.  Cet  avenant  doit‐il  être nécessairement tripartite ?  Réponse : Ce n’est pas obligatoire mais préférable  car une partie  se  substitue à une autre. Cela paraît donc assez logique qu’on ait les 3 signataires (effet de la substitution).  Question : Quel est selon vous l’objectif de l’Europe en réduisant autant le seuil pour les avenants ? Réponse :  La  Commission  s’est  fondée  sur  la  jurisprudence  Pressetext  et  la  jurisprudence  est sévère  puisque  la  Cour  estime  dans  ses  considérants  qu’un  avenant  remet  en  cause  l’accord contractuel entre  les parties et  la mise en concurrence  initiale. On ne doit pas modifier  l’accord sauf  exceptionnellement.  La  commission  est partie de  ce principe.  Par principe, un  avenant  est quasiment illégal.  Question : Comment définissez‐vous le bouleversement d’une économie de marché ?  Réponse :  Il s’agit de remettre en cause  le cœur du marché. Cela peut concerner  le prix ou autre chose. Exemple : un avenant qui modifie une  formule de  révision, on bouleverse  l’économie du marché, un avenant qui modifie le périmètre. Bouleverser l’économie de marché = bouleverser les éléments  fondamentaux du marché.  Il est possible de passer un marché complémentaire qui est une vraie alternative à l’avenant. 

VII – LE CONTENTIEUX DE LA RESILIATION Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour Charles PAREYDT, Avocat  Aujourd’hui  dans  les  contrats  administratifs  et  marchés  publics,  le  juge  est  de  plus  en  plus interventionniste. Il n’hésite pas à remettre en cause le contrat signé entre les parties ou à forcer la main pour des raisons de stabilité contractuelle. Par exemple, le recours tropic travaux signalisation permet à un tiers, personne extérieure au contrat en  lui‐même, de pouvoir  l’attaquer en sollicitant du juge son annulation.  Dans  tous  les  contrats  (marchés  publics,  DSP,  contrat  de  partenariat,  convention  d’occupation domaniale),  la  résiliation unilatérale est un des derniers pouvoirs dont bénéficient  les  collectivités publiques. Cette modalité a été reconnue par le juge et permet à la personne publique de mettre fin au  contrat pour des motifs d’intérêt général  (nous ne parlons pas de  la  résiliation pour  faute). En contrepartie de  ce pouvoir,  toute une  jurisprudence  s’est développée  sur  le  recours  indemnitaire pour préjudice  subi du  cocontractant  lorsque  le  contrat a été  résilié pour motif d’intérêt général. C’est donc une prérogative de puissance publique mais avec des contreparties  financières.  Jusqu’à présent,  seule était ouverte  la possibilité d’indemniser  le  cocontractant. Beaucoup de prestataires ont contesté cette situation déséquilibrée. Le juge a changé sa jurisprudence.  Conseil d’Etat, 21 mars 2011, n°304806, commune de Béziers II : Le  juge se reconnaît  la possibilité d’annuler une décision de résiliation qui serait mal fondée. Ce n’est pas un moyen d’ordre public qui peut être relevé d’office par lui : le requérant doit demander l’annulation de la mesure de résiliation. Il peut également ordonner la reprise des relations contractuelles. Ce dernier point est significatif de l’évolution des pouvoirs du juge en matière contractuelle. Il se donne la possibilité de faire revivre le contrat. L’objectif du juge est la stabilité des relations contractuelles. C’est un nouveau  type de  recours de  pleine  juridiction :  le  juge ne  se  contente  pas de  vérifier  la légalité  de  la  mesure  de  résiliation,  il  fait  renaître  un  contrat  dont  la  fin  a  été  décidée  par l’administration. Limite : seul l’ex titulaire du contrat peut demander au juge la reprise des relations contractuelles, et non un tiers au contrat. 

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 Pour donner droit à l’auteur du recours, le juge vérifie : 

‐ La régularité et le bien fondé de la mesure de résiliation. Les acheteurs doivent apprendre à motiver leur décision de résiliation unilatérale. Le juge fait une vérification approfondie. 

‐ Que la reprise des relations contractuelles n’est pas sans objet. Ce sera le cas si le contrat est terminé ou que les obligations contractuelles sont remplies. 

‐ S’il peut  faire droit à  la demande de  reprise des  relations  contractuelles « au  regard de  la gravité  des  vices  constatés  et,  le  cas  échéant,  des  manquements  du  requérant  à  ses obligation  contractuelles, ainsi que des motifs de  la  résiliation ». En outre,  il vérifie que  la reprise  des  relations  contractuelles  n’a  pas  pour  conséquence  de  « porter  une  atteinte excessive  à  l’intérêt  général »  ou  « aux  droits  du  titulaire  du  nouveau  contrat  dont  la conclusion  aurait  été  rendue  nécessaire  par  la  résiliation  litigieuse » (CE,  21 mars  2011, n°304806) 

‐ S’il peut accorder une  indemnité à  l’ex‐titulaire du contrat pour préjudice subi, notamment du  fait de  la non‐exécution du  contrat entre  la date de  résiliation et  la date  fixée pour  la reprise des relations contractuelles. 

Les acheteurs publics doivent être vigilants sur la décision de résilier un marché pour motifs d’intérêt général car celle‐ci peut être lourde de conséquences (annulation de la mesure de résiliation, reprise des relations contractuelles, indemnisation)  Le régime du recours : 

‐ Le recours doit être exercé dans un délai de 2 mois à compter de la date à laquelle la partie a été informée de la décision de résiliation.  

‐ Le  recours n’entre pas dans  le champ de  l’article R421‐5 du Code de  justice administrative (CJA) c'est‐à‐dire que  les voies et délais de recours n’ont pas à être notifiés dans  le courrier de résiliation. Volonté de la part du juge de limiter ce type de recours. 

‐ L’exercice  d’un  recours  administratif  (même  afin  de  contester  des  accusations  de  fautes) n’interrompt pas  le délai. L’administration peut organiser une stratégie pour éviter ce  type de  contentieux :  provoquer  des  échanges  par  exemple,  des  recours  non  contentieux,  des réunions…  

Jean‐Marc Peyrical conseille aux collectivités territoriales et aux acheteurs publics de prononcer des mesures de résiliation pour faute ou pour motifs d’intérêt général de façon collégiale. Par exemple, pour une commune ou une collectivité, faire prononcer  la mesure de résiliation par son assemblée délibérante ; pour un CHU, demander un avis de la part du conseil d’administration. Il est préférable d’avoir une gouvernance collégiale pour ce type de décisions.  Ce recours peut être assorti d’un référé‐suspension contre la décision de résiliation (article L521‐1 du CJA) pour que  les relations contractuelles soient provisoirement reprises. Mais  les conditions de ce référé sont rigoureuses : 

‐ Il  faut  prouver  une  situation  d’urgence,  c'est‐à‐dire  une  atteinte  grave  et  immédiate  aux intérêts du  requérant.  Il  faut que  l’entreprise démontre notamment que si  le contrat n’est pas repris, elle sera dans une situation financière difficile. 

 Exemple:  Conseil d’Etat, 9 mai 2012, n°356209, Région Champagne‐Ardenne La perte d’un chiffre d’affaires global de 3% ne permet pas d’établir une telle atteinte.  Il  faut  caractériser  un  doute  sérieux  quant  à  la  légalité  de  l’acte  contesté  (la mesure  de 

résiliation). En pratique, cette condition est difficilement  remplie, car si  le  juge des  référés avait  un  doute  sérieux,  il  se  placerait  en  tant  que  juge  du  fond.  Il  ferait  pression  sur  ce dernier. Même  si  le  juge ne  suspend pas  la mesure de  résiliation,  l’effet du  recours  reste aléatoire. 

 

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Exemples de jurisprudences CAA Nancy, 28 mars 2013, n° 12NC01362, Commune d’Aubigny‐les‐Pothées La  reprise  des  relations  contractuelles  a  été  ordonnée  par  le  juge  entre  une  communauté d’agglomération et une commune dès lors qu’était en jeu un captage d’eau permettant d’alimenter plus du tiers de la population concernée. Ici le motif d’intérêt général a permis au juge de légitimer la reprise du contrat  CAA Douai, 2 mai 2013, n° 12DA01577 Société Orange France Reprise  du  contrat  ordonnée  entre  un  CROUS  et  un  opérateur  de  téléphonie  dès  lors  que  la résiliation a porté atteinte à l’intérêt général d’une bonne desserte en téléphonie mobile. L’atteinte  à  un des  grands principes du  service public  (principe d’universalité du  service  public)  a justifié la reprise des relations contractuelles.  CAA Bordeaux, 16 juillet 2013, n° 12BX00161, Association CDAS 33 La  reprise  des  relations  contractuelles  n’est  pas  envisageable  du  fait  de  la  « détérioration considérable des relations entre les parties ». Le juge se met ici clairement à la place des parties.  

Echanges avec la salle Intervention  Charles  Pareydt :  Au  départ  pas  ou  peu  de  contrôle  du  juge  administratif  sur  les décisions prises par  la personne publique, notamment dans une optique de  continuité du  service public. Aujourd’hui, on assiste à une  immixtion du  juge dans une optique de  reprise des  relations contractuelles.  Résiliation encadrée par le CCAG Travaux.  Question : Lorsqu’il y a résiliation pour motif d’intérêt général, il y a un pourcentage qui fixe dans le CCAG travaux l’indemnité du titulaire. Est‐ce qu’on peut déroger à ce pourcentage ?  Réponse :  il s’agit de  l’article 46‐4 du CCAG travaux qui fixe un pourcentage de 5% qui s’applique à défaut de précisions au niveau des pièces  contractuelles. Donc  si  rien n’est précisé au niveau des pièces contractuelles, c’est un pourcentage qui s’impose. On peut par ailleurs avoir à supporter  les dépenses d’investissement. On peut aller en deçà en fixant un pourcentage contractuel.  Intervention  Jean‐Marc Peyrical :  Il  faut  insister  sur  le  cas des délégations de  service public  (DSP) lorsqu’il y a résiliation, en particulier sur le devenir des biens (biens de reprise, biens propres, biens de retour). 

  

VIII – LE CONTENTIEUX DE LA SOUS‐TRAITANCE Séverin ABBATUCCI, Directeur juridique de la Fédération Française du Bâtiment (FFB)  I ‐ Les possibilités de sous‐traitance Les possibilités de sous‐traitance s’effectuent sur un marché de service/travaux, qui est un contrat d’entreprise. Le  titulaire doit  réaliser  l’ouvrage commandé.  Il peut confier  l’exécution de  l’ouvrage (ou  une  partie)  à  un  ou  plusieurs  sous‐traitants.  Le  fournisseur  de matériaux  n’est  pas  un  sous‐traitant. Lorsque  les  sous‐traitants  ont  été  identifiés,  ils  doivent  être  déclarés  au  client, maître  d’ouvrage. Dans un marché public, une procédure précise doit être suivie, prévue à  l’article 114 du Code des marchés publics, et précisé par le CCAG travaux (article 3.6). La déclaration doit  indiquer  le nom du sous‐traitant, la nature des prestations, le montant puisqu’il y aura paiement direct du sous‐traitant de  premier  rang  et  également  un  certain  nombre  de  renseignements  sur  les  capacités  du  sous‐traitant (nouveauté par rapport à la version de 2006 du CMP : capacités techniques, professionnelles et financières du sous‐traitant). Il faut relativiser ce contrôle. Au fond l’agrément est une formalité de loi  qui  autorise  la  présence  du  sous‐traitant.  Son  régime  de  paiement  sera  aussi  impacté  par  cet agrément car il sera payé directement par le maître d’ouvrage, s’il est de  premier rang. Mais ce n’est 

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pas  un  contrôle  au même  titre  que  celui  qui  doit  s’exercer  sur  le  futur  titulaire  du marché.  Ce contrôle est  réduit. Le principal  contrôle est  fait en amont par  le  titulaire. Règle  fondamentale de responsabilité des  entrepreneurs :  ils  restent  responsables de  la bonne  exécution du marché. Ces derniers n’ont donc pas intérêt à faire appel à une mauvaise entreprise. 

Procédure d’acceptation et d’agrément des conditions de paiement : paiement direct pour  le sous‐traitant de premier rang. Problème du droit du sous‐traitant à des révisions de prix ? Les révisions de prix accordées au titulaire du marché sont‐elles ipso facto dues au sous‐traitant ? Cela dépend de la convention de sous‐traitance, c'est‐à‐dire du contrat conclu entre  le  titulaire et  le sous‐traitant. Le maître d’ouvrage ne doit pas s’immiscer dans le rapport contractuel auquel il n’est pas partie. 

Mais  la  loi sur  la sous‐traitance du 31 décembre 1975  impose aux acheteurs publics de prononcer l’agrément des conditions de paiement du sous‐traitant, cela sous‐entend que  le maître d’ouvrage peut aussi refuser. Voir  les circulaires d’application de  la  loi de 1975, notamment une circulaire de 1976  reprise  par  celle  du  30  mai  2012  par  le  ministère  de  l’économie  et  des  finances : l’administration  rappelle  que  le maître  d’ouvrage  peut  avoir  un  rôle  à  jouer  pour  équilibrer  les conditions de paiement, notamment s’il y a un déséquilibre s’agissant par exemple des révisions de prix. Dans l’hypothèse où il y a un déséquilibre entre les conditions de paiement du titulaire et celles du sous‐traitant, la loi donne le droit au maître d’ouvrage (d’accepter le sous‐traitant et d’agréer ou non ses conditions de paiement). Par mesure d’équité,  le maitre d’ouvrage peut faire valoir auprès du  titulaire  un  déséquilibre  qu’il  n’accepte  pas,  en  particulier  si  le  sous‐traitant  est  en  charge d’exécuter une grosse partie du marché. Mais le rôle du maître d’ouvrage est délicat car il ne fait pas partie du contrat de sous‐traitance. 

Le  formulaire  DC4  est  un  modèle  de  déclaration  de  sous‐traitance  pouvant  être  utilisé  par  les candidats ou titulaires du marché public ou accord‐cadre pour présenter un sous traitant, ou qui doit l’être lorsque le contrat l’exige, explique la note explicative du ministère de l’Economie.  

Depuis  peu,  il  doit  être  signé  par  le  sous‐traitant,  cela  permet  de  vérifier  que  le  titulaire  a  bien marqué les bons renseignements, les montants etc. 

Sous‐traitant de deuxième rang C’est une nouveauté du CCAG travaux de 2009 (art. 3.6). Le CCAG prévoit désormais  les conditions dans  lesquelles  le  sous‐traitant  de  1er  rang  va  déclarer  le  sous‐traitant  de  2nd  rang  au  maître d’ouvrage, en passant par  le  titulaire de  l’ouvrage. La copie de  la caution bancaire garantissant  les paiements  de  son  sous‐traitant  n’est  pas  suffisante,  le  sous‐traitant  de  1er  rang  doit  fournir  une déclaration du  sous‐traitant de 2nd  rang. Toutefois, à défaut de délégation de paiement,  le maître d’ouvrage  s’engage contractuellement à payer  le  sous‐traitant de 2nd  rang. La délégation n’est pas obligatoire. Selon  le CCAG,  le passage par  le titulaire du marché est obligatoire même s’il n’est pas l’entreprise principale pour le sous‐traitant de 2nd rang.   II ‐ Le paiement direct des sous‐traitants et le mécanisme de l’action directe Champ d’application résiduelle de l’action directe puisqu’elle n’existe pas dans la loi de 1975 sauf si le sous‐traitant  fait moins de 600 euros de  travaux. Toutefois,  les deux actions, paiement direct et action directe, ne peuvent pas être combinées, même si une partie des travaux n’a pas été payée. Un arrêt récent du Conseil d’Etat le rappelle : 15 novembre 2012, n°354255 : dans cette affaire, le sous‐traitant avait bien été agréé par  le maître d’ouvrage. Un acte spécial avait été établi mais pas pour tous  les travaux. L’acte spécial plafonne  le montant du paiement direct. Au‐delà de ce montant,  le maître d’ouvrage ne peut pas payer  les sommes réclamées par  le sous‐traitant au titre des travaux supplémentaires, non déclarés. Le sous‐traitant s’est donc placé sur le titre III de la loi en espérant se faire payer par  le biais de  l’action directe au  titre des  sommes  supplémentaires pour  lesquelles  il n’avait pas été déclaré initialement au maître d’ouvrage. Le maître d’ouvrage a refusé et le juge lui a donné  raison.  Le  sous‐traitant n’a droit au paiement direct que des  sommes prévues dans  le DC4 

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(déclaration de sous‐traitance). Règle sévère pour le sous‐traitant. C’est tout l’intérêt aujourd’hui de la  nouvelle  disposition  qui  veut  que  le  sous‐traitant  signe  l’acte  d’agrément :  il  peut  vérifier  à  ce moment  là  si  la  somme déclarée par  le  titulaire au maître d’ouvrage correspond bien aux  travaux qu’on lui sous‐traite. S’il réalise qu’il y a un écart entre le montant de l’acte spécial (agrément) et le contrat  de  sous‐traitance  signé  avec  l’entreprise  principale  (titulaire  du marché),  il  lui  suffit  de refuser de signer et de demander régularisation à l’entrepreneur. Le sous‐traitant doit être vigilant. Si ces travaux supplémentaires interviennent en cours de chantier : le  parallélisme  des  formes  impose  un  acte  spécial  (déclaration  de  sous‐traitance) modificatif,  qui augmentera  le montant du paiement direct. Si  le maître d’ouvrage est conscient de  l’exécution de travaux  supplémentaires par  le  sous‐traitant,  il peut exiger du  titulaire qu’il  régularise  la  situation (rôle de gendarme). Ce n’est pas un inconvénient pour le maître d’ouvrage mais une protection pour le sous‐traitant. 

Sur  la  procédure  de  paiement  direct :  le  sous‐traitant  fait  sa  facturation  au  nom  du  titulaire  du marché, à charge pour  lui de  la vérifier et de  la transmettre au maître d’ouvrage pour paiement.  Il n’est  plus  possible  pour  le  titulaire  de  fournir  au maître  d’ouvrage  une  simple  attestation  dans laquelle  il  s’est  engagé  à  vérifier  le  montant  de  la  facture  du  sous‐traitant.  Il  doit  fournir  la facturation des sous‐traitants (art. 13.1.7 du CCAG travaux de 2009). Le sous‐traitant, selon l’art. 116 du  CMP,  devrait  même  doubler  cet  envoi  par  le  titulaire,  d’un  envoi  direct  auprès  du  maître d’ouvrage. Mais le paiement direct c’est le paiement du sous‐traitant pour le compte du titulaire car il n’y a pas de contrat entre maître d’ouvrage et sous‐traitant  (pb TVA). Le CMP n’est pas clair sur cette question, ce point est expliqué dans la circulaire de 2012 de la DAJ.  

Arrêt Conseil d’Etat, 21  février 2011, n°318364 :  le titulaire a 15  jours pour vérifier  les  factures du sous‐traitant. Passé ce délai, si  le titulaire n’a pas réagi, son silence vaut acceptation des demandes de paiement du sous‐traitant. Si  le maître d’ouvrage n’a pas  la preuve que  le titulaire a opposé un refus motivé, dans  les 15  jours à partir de  la réception des pièces par  le titulaire, si  le sous‐traitant saisit le maître d’ouvrage, ce dernier doit payer. (Considérant de principe) « … le refus que le titulaire opposerait après 15 jours, n’est pas valable ». Possibilité pour le maître d’ouvrage de contrôler que le sous‐traitant  a  facturé des  travaux bien effectués. Combinaison de  l’article 8 de  la  loi de 1975 et l’article 116 du CMP.  

III  ‐  La  responsabilité  du  maitre  d’ouvrage  au  vu  des  jurisprudences  récentes  rendues  en  ce domaine Régime de protection d’ordre public. Loi de protection du sous‐traitant : c’est le maître d’ouvrage qui a  été  mis  à  contribution.  Le  défaut  de  déclaration  du  sous‐traitant  au  maître  d’ouvrage  est sanctionnable selon le CCAG. Le marché du titulaire peut être résilié s’il refuse de déclarer son sous‐traitant. Moyens  coercitifs  à  la  disposition  du maître  d’ouvrage  qui,  s’il  laisse  faire,  commet  une faute : JP ancienne du Conseil d’Etat datant de 1980, arrêt Schmidt Valenciennes : le juge considère que la tolérance du MOA qui laisse intervenir un sous‐traitant en connaissance de cause sans exiger du titulaire qu’il déclare son sous‐traitant commet une faute délictuelle engageant sa responsabilité civile. Le CE a  limité  la  responsabilité du maître d’ouvrage au  tiers des sommes  impayées au sous‐traitant considérant que ce dernier était aussi fautif (en n’exigeant pas lui‐même la mise en place du paiement direct). Le 3ème tiers est à la charge du titulaire mais celui‐ci est rarement présent, dans ce cas, pour répondre de sa faute. Evolution sur la question avec la soumission des marchés publics à l’art. 14‐1 de la loi de 1975 : pose le principe du contrôle par le maître d’ouvrage du respect de cette loi. Dès qu’il a connaissance de la présence sur le chantier d’un sous‐traitant qui n’a pas été déclaré, le maître d’ouvrage doit mettre en demeure le titulaire de régulariser la situation. En 2001, l’article est devenu applicable aux marchés publics.  Cela  aurait  pu  amener  à  un  durcissement  de  la  responsabilité  du  maître  d’ouvrage. Pourquoi ? Car l’article 14.1 ne s’impose qu’au maître d’ouvrage, il ne charge que le maître d’ouvrage de  régulariser  la  situation  sans  donner  aucun  rôle  au  sous‐traitant.  Si  le  maître  d’ouvrage  est 

Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP 

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plusieurs  fois  sollicité par  le  sous‐traitant et qu’il ne  fait  rien,  la  sanction  sera plus  sévère estime l’intervenant. La commune avait été  très  loin dans  la connaissance de  la présence du sous‐traitant puisqu’il y avait eu un agrément mais ce dernier n’était pas valable, donc le sous‐traitant n’a pas pu bénéficier  du  paiement  direct.  Les  juges  administratifs  ont  considéré  qu’il  s’agissait  d’une  faute encore plus lourde pour le maître d’ouvrage, la commune avait fait croire au sous‐traitant qu’il allait bénéficier  du  paiement  direct.  Le  titulaire  avait  cédé  ses  créances  à  son  banquier  (cession  de créance), ce qui avait bloqué l’acceptation du sous‐traitant. La commune qui le savait (notification de la banque) aurait dû  intervenir pour obliger  le titulaire à réduire  la cession de façon à permettre  la signature régulière de l’acte spécial de sous‐traitance et donc le paiement direct. Il y avait donc une faute aggravée du maître d’ouvrage. Pour la Cour de cassation, le maître d’ouvrage doit indemniser à 100% le sous‐traitant.  Il a un devoir d’immixtion dans cette affaire. Le maître d’ouvrage doit être vigilant.  L’intervenant  informe  les  participants  qu’il  existe  un  nouveau  contrat  type  de  sous‐traitance,  qui n’est pas obligatoire mais recommandé par la FFB.  

Echanges avec la salle : Question : Quelle est  la part de responsabilité du maître d’œuvre de  la présence d’un sous‐traitant non déclaré ? Réponse :  La négligence du maître d’œuvre peut engager  la  responsabilité du maître d’ouvrage.  Il peut établir par exemple des comptes rendus de chantier qui mentionnent le nom du sous‐traitant, qui n’est pas déclaré. Le maître d’œuvre est un peu négligent, car il aurait du se renseigner sur la liste des sous‐traitants agréés, qui doit d’ailleurs être actualisée tout au  long du chantier. Mais  le maître d’œuvre peut se contenter de prévenir simplement le maître d’ouvrage. S’il donne cette information,  il  s’exonère  de  toute  faute. Dans  le  cas  contraire,  il  est  négligent.  Et  le maitre  d’ouvrage  pourra l’appeler en garantie pour une partie de la condamnation. Il est possible d’insérer dans le contrat de maître  d’ouvrage  des  clauses  expresses  pour  le  missionner  d’un  rôle  de  surveillance  dans  ce domaine, mais ce n’est pas automatique.  Question : Ce rôle n’est‐il pas celui du représentant CSPS (Coordinateur Sécurité et Protection de  la Santé)  qui  doit  tenir  des  demandes  d’accès  au  chantier  pour  les  personnes  intervenant  sur  le chantier ? Réponse : non. Il ne sera pas en première ligne. Selon la loi, c’est le maître d’ouvrage qui est chargé de faire respecter la loi sur la sous‐traitance. Après, selon les clauses inscrites dans les contrats avec ces  prestataires,  le  maître  d’ouvrage  aura  ensuite  un  recours  facilité  contre  eux,  si  jamais  sa responsabilité  est  engagée  auprès  du  sous‐traitant.  Conseil  d’Etat  23 mai  2011,  n°338780 :  dans cette  affaire,  le  sous‐traitant  bénéficiait  du  paiement  direct.  Il  y  avait  un  acte  spécial  de  sous‐traitance. Mais le sous‐traitant s’est fait payer par le titulaire du marché. Celui‐ci s’est retourné vers le maître d’ouvrage, qui a refusé de payer son  titulaire. Le CE énonce dans cet arrêt que «le sous‐traitant agrée dispose d’un droit au paiement direct par le maître d’ouvrage mais ces dispositions ne font pas obstacle à ce que  le paiement du sous‐traitant soit directement effectué par  le titulaire du marché, éteignant ainsi à due concurrence la créance du sous‐traitant sur  le maître d’ouvrage». Le maître  d’ouvrage  doit  prévoir  et  s’assurer  du  paiement  direct,  précise  l’intervenant. Mais  il  est intéressant de savoir que  le Conseil d’Etat donne  la possibilité au titulaire de payer  le sous‐traitant  qui  lui  réclame  son paiement. Au  fond,  le  sous‐traitant  a deux débiteurs :  le  titulaire et  le maître d’ouvrage. Séverin Abbatucci ajoute toutefois que le maître d’ouvrage doit s’assurer du paiement du sous‐traitant par le titulaire grâce à la présentation d’un reçu signé par le sous‐traitant attestant qu’il a bien été payé par  le titulaire. Une fois sûr du paiement du sous‐traitant par  le titulaire,  le maître d’ouvrage peut payer son titulaire.  

 

Clôture de la journée