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Synthèse de la 162ème session d’études de l’APASP
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* * * 162ème SESSION D’ETUDES DE L’APASP
Le contentieux de l'exécution des marchés publics de travaux 25 et 26 novembre 2013
* * *
Ouverture par Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour
I – INVENTAIRE DES CONTENTIEUX LIES A L'EXECUTION DES MARCHES PUBLICS DE TRAVAUX Daniel GUILMAIN, Avocat au Barreau de Lille
I ‐ Les caractères des contentieux en matière d’exécution de marchés de travaux :
‐ Contentieux qui trouvent toujours leur origine dans les chantiers où s’exécutent les marchés publics. A ce titre, les contentieux font parfois référence à des périodes d’exécution de travaux relativement anciennes. Il s’agit donc bien souvent d’essayer de reconstituer ce qu’il s’est passé durant ces périodes d’exécution, ce qui n’est pas toujours évident.
‐ Contentieux qui poursuivent toujours une finalité indemnitaire. Contentieux souvent complexes demandant des investigations importantes eu égard à l’importance de l’ouvrage à construire et aux sommes engagées. Beaucoup de gros chantiers (réalisation du zénith, d’université, etc) débouchant bien souvent sur des contentieux indemnitaires à l’issue de la phase de réalisation des travaux. De ce fait, un contentieux de l’exécution risque d’être beaucoup plus onéreux pour la personne publique qu’un contentieux de la passation, notamment s’il est établi qu’elle a commis des fautes dans la réalisation de l’exécution d’un marché de travaux.
‐ Ce sont des contentieux qui sont souvent très longs : 5, 6, voire 7 ans. Ce sont des contentieux indemnitaires donc le juge considère qu’il n’y a pas d’urgence.
‐ Ce sont des contentieux qui s’accompagnent très souvent d’une phase d’expertise, qui peut aussi durer un certain temps
‐ Ce sont des contentieux contractuels, reposant sur l’analyse des différents contrats faisant intervenir les différents intervenants à l’opération de construction (maître d’ouvrage, maître d’œuvre, architecte, l’OPC et les différentes entreprises liées au maître d’ouvrage)
‐ Contentieux dans lesquels les pièges procéduraux sont parfois redoutables : article 50 et suivants du CCAG travaux sur les dispositions relatives aux règlements des litiges et différends. (CCAG travaux de 1976 applicable aux marchés de travaux antérieurs à 2009) Les dispositions ne sont pas toujours aisées à comprendre
‐ Ces contentieux d’exécution de marchés de travaux (notamment sur l’allongement de la durée, les travaux supplémentaires, ou les litiges tenant à la garantie décennale) sont des contentieux où chacun cherche à se défausser sur l’autre : « règle du ce n’est pas moi, c’est l’autre ! »
II ‐ Les principales sources de contentieux :
‐ L’allongement de la durée d’exécution des travaux La durée d’exécution des travaux, et surtout si ceux‐ci sont importants (s’ils sont longs) est rarement respecté. Ces dépassements dans le temps donnent bien souvent lieu à des réclamations indemnitaires. En principe la durée des relations contractuelles, pour les entreprises, part de l’ordre
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de service (OS) de démarrage du chantier jusqu’à la réception et plus précisément jusqu’à la phase d’établissement du décompte général. Les entreprises considèrent que l’allongement de la durée du chantier lui a causé un ou plusieurs préjudices tenant par exemple à la mobilisation de son personnel pendant une durée plus longue ou à la nécessité d’avoir loué des équipements pendant plus longtemps que prévu etc. Le contentieux va d’abord se placer sur le terrain de la recherche des causes de l’allongement. Elles peuvent être multiples : Elles peuvent résulter du fait de la maîtrise d’ouvrage elle‐même Elles peuvent résulter du fait d’entreprises ; d’autres entreprises ayant participé à l’exécution
et notamment de l’entreprise de gros œuvre. Le droit à indemnisation en matière de sujétions techniques imprévues est subordonné au point de savoir si les difficultés rencontrées lors de l’exécution du contrat présentent un caractère exceptionnel, imprévisible au moment de la conclusion du contrat, et sont extérieures aux parties. Particularité : le marché d’une entreprise participant à une opération de construction peut connaître un retard dû par exemple au retard d’exécution d’un autre lot de l’opération mais sans forcément connaitre une durée différente de ce qui était prévu. Il arrive qu’il y ait un décalage dans le temps de l’intervention de l’entreprise mais la durée même de son contrat n’est pas perturbé (elle effectuera toujours dans un délai contractuel de 12 mois par exemple mais en commençant le 1er juin au lieu du 1er février par exemple). Ce cas de figure est fréquent et lorsqu’on arrive à démontrer que l’allongement de la durée d’exécution du contrat ne s’est traduite par l’entreprise qui demande indemnisation que par un simple décalage dans le temps de ses interventions, la possibilité d’obtenir indemnisation pour l’entreprise est plus difficile.
‐ Les travaux supplémentaires Aujourd’hui, il n’existe aucune opération de travaux publics qui ne connaît pas de réclamations au titre de travaux supplémentaires. Le traitement de ce type de contentieux repose sur plusieurs considérations : Les travaux supplémentaires ordonnés par avenant ou ordre de service sont régulièrement
payés. Mais il peut y avoir des problèmes liés au caractère irrégulier des ordres de service.
Hypothèse également où les travaux exécutés sans ordre de service ni accord du maître d’ouvrage. Le principe est le suivant : ces travaux réalisés sans « commande » ne donnent pas lieu à paiement, même s’ils sont utiles à l’ouvrage. En revanche, lorsque les travaux réalisés sans commande sont considérés comme étant indispensables à l’ouvrage, l’entreprise qui les a effectué a le droit d’être indemnisée, et ce en dépit de l’article 15.4.1 du CCAG travaux de 2009 (« … Les travaux qui sont exécutés au‐delà du montant contractuel ne sont pas payés. »). La charge de la preuve du caractère indispensable des travaux supplémentaires repose sur l’entreprise.
La règle de l’indemnisation des travaux supplémentaires non commandés s’applique dans tous les marchés, y compris dans les marchés à forfait.
Le droit au paiement des travaux supplémentaires non commandés bénéficie également au sous‐traitant : arrêt CE 10 février 1997, n°65377.
‐ Le périmètre du prix global et forfaitaire
L’article 10.2 du CCAG travaux de 2009 définit le prix forfaitaire comme étant « tout prix qui rémunère le titulaire pour un ouvrage, une partie d'ouvrage ou un ensemble déterminé de prestations défini par le marché et qui, soit est mentionné explicitement dans le marché comme étant forfaitaire, soit ne s'applique dans le marché qu'à un ensemble de prestations qui n'est pas de nature à être répété. ». Le prix forfaitaire est censé comprendre et rémunérer l’ensemble des travaux nécessaires à la réalisation du marché. Le caractère global du prix ne constitue pas un obstacle à la rémunération des travaux supplémentaires indispensables ou des travaux dus pour sujétions imprévues. Toutefois le prix
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perdra son caractère forfaitaire et global. Ce qui excède le prix forfaitaire doit être contenu dans le décompte général
‐ La réception des travaux Les opérations de réception sont un moment important d’un marché de travaux dans la mesure où elles mettent fin aux relations contractuelles. Sous réserve des dispositions financières, toute la phase du décompte général se fait après la réception des opérations. La réception peut être prononcée de façon expresse ou tacite (art. 41.1.1 à 41.1.3 du CCAG travaux). Les litiges à propos de la réception sont nombreux et peuvent être issus de: La prise de possession de l’ouvrage avant réception Du refus de prononcer la réception et les conséquences financières de l’établissement du
décompte et la levée de la caution bancaire Des modalités pratiques et juridiques des opérations de réception Du caractère partiel ou total de la réception La date effective de départ des garanties La levée ou non des réserves Du maintien de l’obligation de la mission de conseil du maître d’œuvre après la réception
‐ La gestion des garanties post‐contractuelles
Ces garanties sont déclenchées par les opérations de réception. L’opération de réception va d’abord déclencher la garantie de parfait achèvement. Celle‐ci dure un an et vise à la réparation… C’est une garantie contractuelle. Il y a ensuite le déclenchement de garanties post‐contractuelles : La garantie biennale de bon fonctionnement des équipements La garantie décennale pour les malfaçons mettant en jeu la solidité de l’ouvrage ou qui
seraient de nature à rendre l’ouvrage impropre à sa destination. Elle s’accompagne d’une expertise
‐ Le contentieux de la résiliation sans reprise des relations contractuelles
Il existe plusieurs hypothèses de résiliation. Le débat porte généralement sur le volet indemnitaire et sur le caractère bien ou mal fondé de la résiliation notamment lorsqu’il s’agit de résiliation pour faute ou de résiliation pour motif d’intérêt général : articles 45 et suivants du CCAG travaux). III ‐ Actualité jurisprudentielle
‐ La contestation de la décision de résiliation d‘un contrat dans une optique de reprise des relations contractuelles : les décisions rendues depuis l’arrêt du Conseil d’Etat du 21 mars 2011, Commune de Béziers II, n°304806
Cette jurisprudence institue un recours en reprise des relations contractuelles après résiliation d’un contrat administratif. Il s’agit du 3ème grand arrêt du Conseil d’Etat venant remodeler le contentieux des contrats administratifs ainsi que l’office du juge. Le 1er arrêt : 17 juillet 2007, Société Tropic travaux Signalisation, ne concerne que le concurrent évincé Le 2ème arrêt : 28 décembre 1999, Béziers I : pose le principe de la loyauté des relations contractuelles. Il consiste à apprécier, pour le juge, la gravité des irrégularités intrinsèques éventuellement commises à propos du contrat ou des irrégularités se rapportant à sa passation, au regard de la recherche du maintien du lien contractuel. L’objectif est de privilégier le maintien du contrat malgré les irrégularités qui peuvent le frapper. C’est en considération de la gravité des illégalités que le contrat sera annulé à la demande de l’une ou l’autre partie. Recours ouvert seulement aux parties. Le 3ème arrêt : 21 mars 2011, Béziers II : cet arrêt porte sur la résiliation, quelque soit les motifs de celle‐ci. Il s’agit d’un recours de plein contentieux ouvert au cocontractant de l’administration. Le
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juge requalifie ce recours en une demande de reprise des relations contractuelles. Le juge se reconnaît la capacité de faire revivre un contrat résilié. La reprise des relations contractuelles sera fonction des motifs et de la légalité du caractère régulier de la résiliation. La reprise des relations contractuelles sera également fonction de l’intérêt public qu’il peut y avoir à faire renaître le contrat. Le juge définit lui‐même les modalités du recours : Le recours doit être exercé par le cocontractant dans les deux mois à compter de la
notification de la décision de résiliation, y compris s’il s’agit de travaux publics La décision de résiliation n’a pas à mentionner le délai et les voies de recours. Le délai court
donc même s’il n’est pas mentionné L’exercice d’un recours gracieux auprès de l’administration n’interrompt pas le délai de
recours Exemples de décisions rendues en application de la jurisprudence Béziers II : Conseil d’Etat, 23 mai 2011, n° 328525, Etablissement public pour l’aménagement de la région de la Défense : confirme que l’entreprise peut, de façon cumulative, demander la reprise des relations contractuelles du contrat résilié et une indemnisation au titre de la période transitoire entre la date d’effet de la résiliation et la reprise des relations contractuelles ordonnée par le juge. CAA Douai, 23 décembre 2011, n° 10DA00763, GFD Suez Energie : Cet arrêt précise le rôle du juge en matière de reprise des relations contractuelles. Selon la Cour, il incombe au juge du contrat d’apprécier, eu égard à la gravité des vices constatés affectant la décision de résiliation et le cas échéant, à celle des manquements du requérant à ses obligations contractuelles, si la reprise des relations contractuelles n’est pas de nature à porter une atteinte excessive à l’intérêt général ou aux intérêts éventuels d’un tiers (qui aurait pu conclure un contrat avec la personne publique en remplacement du contrat résilié). CAA Douai, 2 mai 2013, n° 12DA01577 Société Orange France Reprise du contrat ordonnée entre un CROUS et un opérateur de téléphonie dès lors que la résiliation a porté atteinte à l’intérêt général d’une bonne desserte en téléphonie mobile. L’atteinte à un des grands principes du service public (principe d’universalité du service public) a justifié la reprise des relations contractuelles. CAA Nancy, 28 mars 2013, n° 12NC01362, Commune d’Aubigny‐les‐Pothées La reprise des relations contractuelles a été ordonnée par le juge entre une communauté d’agglomération et une commune dès lors qu’était en jeu un captage d’eau permettant d’alimenter plus du tiers de la population concernée. Ici le motif d’intérêt général a permis au juge de légitimer la reprise du contrat. Toutefois, le caractère gravement illégal du contrat résilié peut faire obstacle à la reprise des relations contractuelles : Conseil d’Etat, 1er octobre 2013, n°349099 : la Haute Juridiction a considéré que le contrat résilié était affecté d'un vice grave le rendant irrégulier par nature : une clause prévoyait la renonciation de l'acheteur public à l'exercice de son pouvoir de résiliation unilatérale. La reprise des relations contractuelles est donc jugée impossible. CAA Bordeaux, 16 juillet 2013, n° 12BX00161, Association CDAS 33
Nonobstant l’illégalité de la décision de résiliation, l’une des causes qui peut conduire le juge à ne pas ordonner la reprise des relations contractuelles, ce sont justement l’état des relations. Lorsque le juge constate une détérioration manifeste des relations, il s’abstient d’ordonner la reprise du contrat. La reprise des relations contractuelles doit être possible : ce n’est pas le cas lorsque, au moment où le juge se prononce, le contrat a épuisé ses effets : Conseil d’Etat, 23 mai 2011, n°323468, Société d’Aménagement d’Isola 2000. Comme dans le recours Tropic, le Conseil d’Etat indique dans l’arrêt Béziers II que, le cas échéant, le recours en reprise des relations contractuelles peut être accompagné d’un référé suspension pour suspendre la décision de résiliation. Toutefois, la pratique atteste que les conditions pour tenter
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d’obtenir la suspension sont difficiles à réunir (pareil que dans le cadre d’un recours Tropic). Il faut démontrer qu’il y a urgence à suspendre puis un doute sérieux quant à la légalité de la décision dont on demande suspension. Pour ce qui est de la suspension dans le cadre d’un recours Béziers II, un arrêt du Conseil d’Etat du 9 mai 2012, Région Champagne‐Ardennes, n°356209, vient enserrer les conditions pour l’obtention d’une suspension. A propos de l’urgence, le juge doit d’une part apprécier les atteintes graves et immédiates
que la résiliation porte à un intérêt public, ou aux intérêts du requérant, l’entreprise, au regard de sa situation financière (la résiliation prive l’entreprise d’une part significative de chiffre d’affaires voire de l’exercice même de son activité, de sa pérennité). Ces éléments vont être mis en balance par le juge avec l’intérêt général. Ils vont également être mis en balance par rapport aux droits des tiers et notamment à ceux d’un éventuel nouveau contractant de l’administration. Conception étroite de l’urgence qui peut justifier la suspension d’une mesure de résiliation : aucune jurisprudence à ce jour à la connaissance de l’intervenant ayant suspendu une mesure de résiliation
A propos du doute sérieux : confirmation par un arrêt du Conseil d’Etat du 7 mai 2013, Société Auxiliaire de Parc de la Région Parisienne, n°365043 : ne constitue pas un doute sérieux sur la légalité de la décision de résiliation le fait que la résiliation soit due à la volonté de relancer une mise en concurrence d’une DSP dont la durée excède la durée légale. Conception assez étroite du doute sérieux de la part du juge.
‐ L’extension de la jurisprudence Commune de Béziers aux mesures de modifications
unilatérales des contrats Un nouveau recours en annulation des modifications unilatérales du contrat? Le recours institué par la décision du Conseil d'Etat "Béziers II" donne la possibilité pour le cocontractant de l'administration de demander l'annulation d'une mesure de résiliation qu'il estime illégale, en vue de la reprise des relations contractuelles. Un jugement du TA de Lille du 20 février 2013, Lyonnaise des Eaux France et Eaux Nord, a semblé étendre cette jurisprudence aux autres mesures prises par la personne publique, telles que les modifications unilatérales du contrat. Dans cette affaire, une convention de délégation de service public (DSP) en matière d’eau potable et d’assainissement avait été conclue entre la communauté urbaine de Lille et la Lyonnaise des Eaux et sa filiale locale, la société des Eaux du Nord. Pendant l'exécution de la convention, la communauté urbaine a pris de façon unilatérale deux décisions (révision du prix de l'eau, reversement de provisions). Saisi du litige, le TA de Lille, a annulé les deux décisions et a ordonné la remise en état initiale du contrat. Les parties ayant conclu une transaction, l'affaire n'a donc pas été portée devant les juridictions supérieures. Selon Daniel Guilmain, ce jugement peut être rapproché avec l'arrêt du 21 mars 2011, dans la mesure où le juge adopte un raisonnement similaire: "au nom de l’intérêt du cocontractant, le juge du contrat est fondé à rétablir une situation antérieure". Pour l'intervenant, il s'agirait d'un recours en restitution d’un contrat dans son état initial, le contrat n'ayant pas été résilié, et non d'un recours en reprise des relations contractuelles. Toutefois, comme dans Béziers II, le juge du TA annule les modifications prises par la personne publique et ordonne la remise du contrat en l’état où il se trouvait avant les modifications, précise Daniel Guilmain. Le juge semble ainsi contourner l'impossibilité de principe pour le cocontractant de l'administration de contester devant lui une décision d'exécution du contrat. L'impossibilité pour le juge d'annuler une mesure d'exécution d'un contrat public Le juge peut‐il annuler d'autres mesures d'exécution du contrat, autre que la décision de le résilier? L'arrêt du 21 mars 2011 (Béziers II) ne le précise pas. Le rapporteur public avait alors laissé la porte ouverte à une évolution future de la jurisprudence en matière de modifications unilatérales du contrat.
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Selon Daniel Guilmain, la question restait posée jusqu’à l’intervention récente d’une décision du Conseil d’Etat du 25 octobre 2013. En effet, par cet arrêt, le Conseil d'Etat est venu clore définitivement le débat. "Une mesure d'exécution (en l'occurrence, la décision d'interrompre l'une des prestations prévues par un marché à bons de commande) d'un contrat n'ayant ni pour objet ni pour effet de mettre fin aux relations contractuelles n'est pas au nombre de celles dont le cocontractant de l'administration est recevable à demander l'annulation au juge du contrat et sa suspension au juge des référés. Seul est ouvert un droit à indemnisation", précise l'arrêt. Cet arrêt confirme que la jurisprudence Béziers II ne vaut que pour la décision de résiliation. Le jugement du TA de Lille restera donc isolé, a commenté l'intervenant. En l'occurrence, il s'agissait d'un marché à bons de commande sans minimum ni maximum passé entre la région Languedoc‐Roussillon et une association pour les années 2011 et 2012, pour des actions de formation concernant le brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et des sports. Le marché est reconduit pour la période 2013‐2014. Toutefois, ayant relevé des manquements de l'association à ses obligations contractuelles, la région a mis fin à la prestation de formation, objet du bon de commande. Contestant cette mesure, l'association a saisi le juge des référés du tribunal administratif pour demander l'annulation ainsi que la suspension de l'exécution de la décision d'interruption du bon de commande. Le tribunal a fait droit à sa demande se fondant sur la circonstance selon laquelle cette décision aurait causé un préjudice financier trop important à l'association. La région forme alors un pourvoi devant le Conseil d'Etat. La Haute juridiction rappelle d'abord le principe selon lequel "les parties à un contrat ne peuvent pas demander au juge l'annulation d'une mesure d'exécution de ce contrat, mais seulement une indemnisation du préjudice qu'une telle mesure leur a causé". Une telle interruption constitue « une simple mesure d'exécution du contrat », considère le Conseil d'Etat. En effet et comme l'avait relevé le tribunal administratif, "la décision attaquée avait pour objet non de résilier le marché à bons de commande conclu avec cette association mais seulement d'interrompre l'exécution de l'une des prestations prévues par un bon de commande". Le juge n'ayant pas pris en compte les conséquences de cette constatation a commis une erreur de droit, puisqu'une telle mesure n'est pas "au nombre de celles dont le cocontractant de l'administration est recevable à demander l'annulation au juge du contrat et la suspension de l'exécution au juge du référé". L'association n'était donc pas recevable à demander l'annulation de la décision d'interrompre l'une des prestations prévues au marché. L'ordonnance du juge des référés a donc été annulée.
‐ La modulation des pénalités de retard : les décisions rendues en application de l’arrêt du Conseil d’Etat du 29 décembre 2008, OPHLM de Puteaux, n°296930
Depuis cet arrêt, le JA, comme le JJ, se reconnaît désormais compétent pour apprécier les pénalités de façon générale et notamment les pénalités de retard en matière de marchés publics. Auparavant, au nom de la liberté contractuelle des parties, le juge administratif considérait qu’il n’avait pas à interférer dans l’application des clauses de pénalité. Renversement de jurisprudence avec l’arrêt du 29 décembre 2009. Le juge va apprécier les pénalités infligées et plus particulièrement la légalité des clauses de pénalité dans les contrats. En la matière, la jurisprudence n’est pas fournie. En réalité, on remarque que la juridiction administrative ne vient sanctionner que les clauses prévoyant des pénalités d’un montant manifestement excessif. Exemples : TA Amiens, 3 mars 2009, Centre Hospitalier de Doullens : le montant des pénalités est équivalent au prix du marché. CAA Nancy, 6 août 2009 : les pénalités dépassent légèrement le montant du marché.
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CAA Nancy, 13 octobre 2011, n° 10NC00539, Société Entreprise Jacquet : Les pénalités s’élevaient à 290% du montant du marché c'est‐à‐dire 850 000 euros de pénalité pour 585 jours de retard. Le juge a ramené le montant des pénalités à 75 000 euros. CAA Marseille, 3 décembre 2011, Société méditerranéenne de démolition : pénalités de 26000 euros pour 19 jours de retard, soit 60% du marché. La commune a été condamnée à rembourser la moitié de ces pénalités. Lorsque le juge estime les pénalités trop élevées, il fixe un nouveau montant, mais sans explication sur la détermination du montant. A l’inverse, des pénalités de 10% du montant du marché ne sont pas considérées comme excessives. A quel moment peut‐on contester les pénalités du point de vue de l’entreprise ? Il faut que les pénalités imputées à l’entreprise aient acquis un caractère définitif, d’où la nécessité pour le maître d’ouvrage de les reprendre dans le décompte général définitif. Après le délai épuisé de 45 jours, la pénalité aurait acquis un caractère définitif, qui pourra donner lieu à contestation de la part de l’entreprise. Un arrêt montre que les contraintes procédurales notamment en matière d’établissement du décompte se retournent parfois contre la personne publique. CAA Lyon, 30 octobre 2013, n° 12LY02887, Commune de Laval‐sur‐Doulon : La mairie a notifié un décompte général à l’entreprise en oubliant les pénalités de retard. Elle décide alors d’établir un décompte général rectificatif, modificatif mais après l’expiration du délai de 45 jours. Le juge a considéré que la collectivité ne pouvait pas établir un tel décompte général modificatif du premier dès lors que le premier avait acquis un caractère définitif au terme d’un délai de 45 jours.
Echanges avec la salle : Question : Dans quelles conditions peut‐on mettre en œuvre la responsabilité du maître d’ouvrage du fait de la responsabilité d’une entreprise dans l’allongement des délais d’exécution du marché, même s’il n’y a pas de faute de la part du maître d’ouvrage ? Réponse : A ce sujet, il existe un arrêt récent du Conseil d’Etat, 5 juin 2013, n°352917, Région Haute‐Normandie : Dans cette affaire, une entreprise demandait à être indemnisée du fait de l’allongement de la durée du chantier du fait du retard d’une autre entreprise. La cour administrative d’appel de Douai avait considéré que le maître d’ouvrage était responsable des fautes des autres intervenants. Le Conseil d’Etat a donc cassé cet arrêt en affirmant clairement que la maître d’ouvrage ne peut pas voir sa responsabilité engagée du seul fait des fautes commises par les autres intervenants. Autrement dit, pour que la responsabilité du maître d’ouvrage soit engagée, il faut qu’il existe une part de responsabilité personnelle du maître d’ouvrage. Question : Dans le cas d’avenant passé pour des travaux supplémentaires, et qui vont avoir un impact sur le délai d’exécution, l’entreprise peut‐elle demander en plus des indemnités pour dépassement de délai ? Réponse : A priori oui, mais à condition qu’elle arrive à prouver un préjudice au titre de l’allongement du à des travaux et un préjudice qui ne soit pas compenser par le paiement des travaux supplémentaires. L’entreprise doit, dans tous les cas et pour toute demande indemnitaire, démontrer le caractère réel, certain et direct de son préjudice : il s’agit d’ailleurs de la principale difficulté pour les entreprises.
II – LA BONNE GESTION DU MARCHE: Les points à ne pas négliger dans le CCAG Travaux Charles PAREYDT, Avocat
Présentation des points de vigilance au niveau du CCAG travaux. Mode de fonctionnement du CCAG travaux
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Le CCAG Travaux est un outil et n’est en rien un cadre réglementaire, c'est‐à‐dire que chaque pouvoir adjudicateur est libre d’apporter les dérogations qu’il entend. Les marchés peuvent prévoir de déroger à certaines des stipulations du CCAG travaux. Le CCAP doit être construit en fonction du CCAG, et non l’inverse. L’intervenant recommande d’éviter au maximum les copier‐coller. Toutefois, une certaine démarche doit être respectée en matière de dérogation :
‐ Les dérogations éventuelles doivent être exprimées clairement dans le CCAP ‐ Le dernier article du CCAP doit récapituler l’ensemble des dérogations par rapport au CCAG
travaux Ce mécanisme peut poser des problèmes, notamment en matière d’interprétation. Certaines dérogations ne sont pas très claires, ou des dérogations sont utilisées en dehors même du texte du CCAG travaux. De plus, et c’est le cas le plus fréquent, l’acheteur public déroge au niveau du CCAP sans références au CCAG travaux, ce qui implique une confrontation textuelle. Celle‐ci peut poser problème au niveau de la compréhension du marché pour le titulaire du marché et lorsqu’il y a contentieux. Cohérence avec les textes en vigueur Cohérence avec le Code des marchés publics (CMP) notamment par rapport aux notions de pouvoir adjudicateur et de représentant de pouvoir adjudicateur. Le CCAG travaux est un outil pédagogique qui a privilégié les références aux textes plutôt que l’intégration dans le corps du texte du CMP. Des références sont également faites à d’autres sources du droit des marchés publics type commentaires, qui ont vocation à s’appliquer lors de l’exécution du marché : le Code du travail en matière d’élaboration des plans de sécurité et de protection de la santé des travailleurs (art. 28.3 CCAG travaux), certaines dispositions du Code des assurances, du Code de commerce, du Code de la construction et de l’habitation, etc. Création d’un socle commun Le CCAG est un outil pédagogique et non un texte réglementaire : souci de créer un socle commun à tous les CCAG dans la conception des premiers articles (ordre de service par exemple, confidentialité, protection de la main d’œuvre, assurances, formes de la résiliation…) Le CCAG travaux conserve évidemment une spécificité qui lui est propre : sa plus grande spécificité est la construction d’un CCAG à travers non pas deux acteurs (pouvoir adjudicateur et titulaire du marché) mais à travers trois acteurs (maîtrise d’ouvrage en matière d’exécution de travaux, le maître d’œuvre, l’entreprise de travaux). Ceci permet notamment d’anticiper le contrat de maîtrise d’œuvre en amont.
I‐ Les acteurs du CCAG travaux Le CCAG travaux prévoit une liste d’acteurs :
‐ Le maître de l’ouvrage ‐ Le représentant du pouvoir adjudicateur ‐ Le maître d’œuvre ‐ Le titulaire ‐ Les co‐traitants ‐ Les sous‐traitants. Depuis 2009, le CCAG travaux distingue la sous‐traitance directe de 1er
rang et la sous‐traitance indirecte de 2nd rang. Les relations non couvertes par le CCAG travaux Il n’y a pas d’anticipation particulière du CCAG travaux face à l’existence fréquente (surtout dans les hôpitaux) d’une maîtrise d’œuvre exercée en interne. Le CCAG travaux est très bien conçu dans le cas où la maîtrise d’œuvre est externalisée et exécutée par un opérateur privé mais de construction proposée pour anticiper une situation qui est l’exercice de la maîtrise d’œuvre en interne et le cumul de deux casquettes (possible par la loi MOP) entre la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre
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exercées par une entité publique. Il est donc nécessaire de l’anticiper et de retravailler les missions par rapport à cette particularité avec deux choix :
‐ Soit il est possible de rester sur une configuration propre au CCAG travaux avec une maîtrise d’œuvre exercée par la personne publique en identifiant au sein de la collectivité deux services : l’un propre à la maîtrise d’ouvrage, l’autre propre à la maitrise d’œuvre.
‐ Soit il est possible de travailler sur une maîtrise d’ouvrage et une maîtrise d’œuvre un peu plus élargie par rapport à la distinction classique maîtrise d’œuvre publique / maîtrise d’œuvre privée.
Une autre problématique est celle de l’ignorance de certains acteurs de la construction au niveau du CCAG travaux comme le bureau de contrôle, l’OPC, le CSPC ou CS2I, ainsi que les relations entre les acteurs. Cela oblige donc un positionnement au niveau du CCAP pour anticiper l’absence d’encadrement par le CCAG travaux. Les périmètres non couverts par le CCAG travaux Il n’y a pas de distinction entre les travaux de bâtiment et les travaux d’infrastructures. Pas de spécificité propre. Le CCAG travaux est plus réputé pour l’encadrement d’une opération de bâtiment que d’infrastructure. Pas d’adaptation spécifique pour encadrer les opérations de conception‐réalisation. Le CCAG travaux envisage une réalisation classique (loi MOP) mais il n’y a pas d’anticipation, lorsqu’il y a un cumul au sein d’une entité privée, entre l’exercice de la maîtrise d’œuvre (aspect conceptuelle) et la réalisation des travaux. Si l’acheteur public est confronté à une opération de conception‐réalisation, il dispose de deux choix :
‐ Soit il fait abstraction du CCAG travaux ‐ Soit il reconfigure le CCAG travaux en redéfinissant les missions conférées au titulaire et au
maître d’œuvre par rapport à un acteur, l’assistant technique à maîtrise d’ouvrage, qui apparaît au niveau d’une opération de conception‐réalisation. Ce dernier va reprendre des positions qui sont soit propres à la maîtrise d’œuvre soit pour encadrer des missions propres à la maîtrise d’œuvre (avec une phase prédominante : l’opération de réception, puisque la conception‐réalisation pose le problème d’un groupement qui s’autocontrôle par rapport à une opération de réception).
Autre problème qui est un « nid à contentieux » : l’absence de réelle définition du contenu des études d’exécution confiées aux entreprises de travaux, qui est fréquente en opération de bâtiment et le partage entre le titulaire du marché et le maître d’œuvre. Cet aspect amène beaucoup de problématiques notamment concernant la responsabilité par rapport à la réalisation du processus des études d’exécution. L’encadrement existe mais reste très lapidaire au niveau du CCAG travaux, et mérite une réflexion particulière. Organiser le rôle de chaque acteur Le CCAG travaux est un outil imparfait par rapport à l’organisation du contenu et du rôle de chaque acteur. Il faut fréquemment se poser la question de savoir qui intervient, qui fait quoi, les limites de responsabilité dans le cadre de l’exécution d’un marché de travaux et les frontières de contenu de missions pour parfaire ce qui est inachevé et non envisagé au sein du CCAG travaux. Pour les grosses opérations de toute façon, une réflexion permanente doit être menée, notamment au niveau des rôles de chaque acteur (entités diverses qui ne sont pas toutes liées par un contrat entre elles mais qui sont toutes liées contractuellement au maître d’ouvrage dans le but de réaliser un ouvrage). Le CCAP en se fondant éventuellement sur le CCAG est la pièce permettant de connaître la place et les obligations de chacun des intervenants. Le maître de l’ouvrage
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Pas de définition mais rappel des dispositions de la loi MOP. Il s’agit d’attributs propres à la maîtrise d’ouvrage, il n’est donc pas nécessaire de le rappeler au sein du CCAP. Ils existent de droit par l’application de la loi MOP mais il y a un travail à faire des anticipations d’attributs de maîtrise d’ouvrage, qui seront autant de champs de responsabilité en cas de contentieux, s’il y a des insuffisances dans l’exercice de ces missions. Par exemple, une des difficultés récurrentes en matière de travaux et de CCAG travaux est la non anticipation sur l’origine des travaux supplémentaires. Dans son article 14, le CCAG travaux parle de travaux supplémentaires au sens large, non prévus initialement, mais il ne propose pas de catégorisation de travaux. Il traite les travaux supplémentaires comme une catégorie unique. Il est important de prévoir un mécanisme d’anticipation de la catégorisation de l’origine de travaux supplémentaires : ceux‐ci sont‐ils liés à une modification du programme, à une erreur de conception de la maîtrise d’œuvre, à des aléas, ou à d’autres causes ? Le maître de l’ouvrage est le pouvoir adjudicateur pour le compte duquel les travaux sont exécutés. Lorsque le marché est conclu par une entité adjudicatrice, les dispositions au pouvoir adjudicateur s’appliquent à l’entité adjudicatrice. D’après la loi MOP, il appartient au maître d’ouvrage :
‐ De déterminer la localisation ‐ De définir le programme ‐ D’arrêter l’enveloppe financière prévisionnelle ‐ D’assurer les financements ‐ De choisir le processus selon lequel l’ouvrage sera réalisé ‐ Et de conclure, avec les maîtres d’œuvre et entrepreneurs qu’il choisit, les contrats ayant
pour objet l’étude et l’exécution des travaux Le représentant du pouvoir adjudicateur Le maître d’ouvrage peut confier ces missions à un mandataire dans les conditions définies par la loi MOP, ou à un conducteur d’opération. Il s’agit soit d’un agent du pouvoir adjudicateur soit du représentant. Le représentant est réputé disposer des pouvoirs suffisants pour prendre, dès notification de leur nom au titulaire dans les délais requis ou impartis par le marché, les décisions nécessaires engageant le pouvoir adjudicateur. Le maître d’œuvre Une place réelle est accordée au maître d’œuvre dans l’encadrement de l’exécution du marché, au sein du CCAG travaux. Les documents particuliers du marché mentionnent le nom et l’adresse du maître d’œuvre. Si ce dernier est une personne morale, il désigne la personne physique qui a seule qualité pour le représenter, notamment pour signer les ordres de service. Le CCAG travaux rééquilibre de façon notable les relations entre maîtrise d’ouvrage et les entreprises en répartissant certaines obligations entre le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre. Cela entraîne de fait de nouvelles contraintes pour la maîtrise d’œuvre, en mettant à son compte des missions qui ne sont pas forcément prévues dans la loi MOP. Par exemple :
‐ Obligation pour le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre de recueillir auprès des exploitants d’ouvrages les mesures de prévention à appliquer pendant l’exécution des travaux (art . 27.3.1 CCAG travaux)
‐ Obligation de tenir un registre de chantier répertoriant l’ensemble des documents pouvant s’échanger sur un chantier. Ce registre peut être dématérialisé (art. 28.5)
‐ Obligation d’informer les entreprises de tout dysfonctionnement occasionné par le personnel intervenant sur le chantier et entravant le bon déroulement de celui‐ci renforçant ainsi son devoir de conseil (art. 31.4.5)
Le titulaire
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Il est l’opérateur économique qui conclut le marché avec le représentant du pouvoir adjudicateur. En cas de groupement des opérateurs, le titulaire désigne le groupement, représenté par son mandataire. Dès la notification du marché, le titulaire a l’obligation de désigner une personne physique habilitée à le représenter pour les besoins de l’exécution du marché. D’autres personnes physiques peuvent être habilitées par le titulaire en cours d’exécution du marché. De plus, le titulaire est tenu de notifier sans délai au représentant du pouvoir adjudicateur les modifications survenant au cours de l’exécution du marché et qui se rapportent :
‐ Aux personnes ayant le pouvoir de l’engager, ‐ A la forme juridique sous laquelle il exerce son activité, ‐ A sa raison sociale ou à sa dénomination, ‐ A son adresse ou à son siège social, ‐ Aux renseignements qu’il a fourni pour l’acceptation d’un sous‐traitant et l’agrément des
conditions de paiement, et de façon générale, à toutes les modification importantes de fonctionnement de l’entreprise pouvant influer sur le déroulement du marché.
La co‐traitance Pour les règles relatives à la co‐traitance, l’article 3.5 du CCAG travaux renvoie aux articles 51, 102, et 106 Code des marchés publics. Le nouveau CCAG travaux de 2009 précise en outre qu’il s’agit d’un groupement momentané d’entreprises qui ne vit que pendant la durée du marché, c'est‐à‐dire à l’expiration de la garantie de parfait achèvement. En cas de groupement conjoint, il faut préciser si le mandataire du groupement sera solidaire de chacun des autres opérateurs du groupement dans les obligations contractuelles de celui‐ci à l’égard du représentant du pouvoir adjudicateur. En cas de groupement solidaire, chacun des membres du groupement est engagé financièrement pour la totalité du marché et doit pallier une éventuelle défaillance de ses partenaires. L’un d’entre eux désigné dans l’acte d’engagement comme mandataire, représente l’ensemble des entrepreneurs vis‐à‐vis du représentant du pouvoir adjudicateur et du maître d’œuvre, pour l’exécution du marché. Lorsque le maître d’ouvrage institue une règle de solidarité pour le mandataire du groupement, il doit le préciser dans les documents particuliers du marché. Le rôle du mandataire Il est également rappelé par le CCAG travaux. Le mandataire est chargé de :
‐ Représenter le groupement auprès du pouvoir adjudicateur ‐ Coordonner les prestations du groupement ‐ Assurer la gestion administrative et financière du marché ‐ Représenter chacun des entrepreneurs groupés et ce jusqu’à expiration du délai de garantie
de parfait achèvement. Centralisation au niveau du mandataire que l’on soit face à un groupement solidaire ou à un groupement conjoint. Il est le seul interlocuteur viable pour le pouvoir adjudicateur. Les sous‐traitants Pas d’encadrement spécifique de la sous‐traitance directe. Le CCAG travaux renvoie aux dispositions du CMP et à la loi du 31 décembre 1975 sur la sous‐traitance. L’apport du nouveau CCAG travaux est d’encadrer la sous‐traitance indirecte. Le CCAG de 2009 reprend également l’article 6 de la loi de 1975 : le sous‐traitant qui confie à un autre sous‐traitant l’exécution d’une partie du marché dont il est chargé, est tenu de lui délivrer une caution ou une délégation de paiement (art.14). L’article 14 organise également la sécurité financière du sous‐traitant indirect qui ne serait pas agréé au paiement direct en garantissant ses paiements par une caution personnelle et solidaire donnée par l’entrepreneur ou le sous traitant de premier rang. Cette caution n’aura pas à être fournie si l’entrepreneur délègue le paiement du sous‐traitant au
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maitre d’ouvrage dans les termes de l’article 1275 du Code civil à concurrence du montant des prestations exécutées par le sous‐traitant.
II‐ Prix et règlement des comptes Pas d’innovations fondamentales. Deux temps propres au CCAG travaux :
‐ Par rapport au CCAG de 1976, encadrement assez précis du circuit de paiement entre le pouvoir adjudicateur et le titulaire du marché avec la production d’un projet de décompte mensuel (mécanisme propre au CCAG travaux) et la notification d’un état d’acomptes par le maître d’œuvre. Mécanismes encadrés de manière particulière.
‐ 2ème point important à aborder au niveau du prix dans le cadre du CCAG travaux : mécanisme de l’article 14 du CCAG travaux encadrant le processus de règlement des travaux modificatifs : l’article prévoit la notification d’un ordre de service à prix provisoire par le maître d’œuvre : notification du contenu des travaux mais également des prix. Prix qui doivent toujours faire référence à la décomposition du prix initial du marché (soit décomposition globale et forfaitaire, soit bordereau de prix unitaire en cas de prix nouveau).
Cette problématique donne lieu à une distinction jurisprudentielle importante : travaux supplémentaires ordonnés par ordre de service ne répondent pas aux mêmes exigences que les travaux supplémentaires n’étant pas ordonnés par ordre de service (ces derniers doivent répondre à l’exigence de « travaux indispensables à la bonne réalisation de l’ouvrage dans les règles de l’art », pour être indemnisés). De son côté, l’entreprise ne doit jamais réaliser des travaux dans son coin sans déclencher de mécanisme d’information. Conseil de l’intervenant : mettre en exergue ce devoir d’information et prévoir contractuellement ce qui n’est pas régi par l’article 14.
D’autres points à anticiper au niveau du CCAG travaux:
‐ Le contenu des prix (art. 10.1). Le prix forfaitaire comprend certaines sujétions et certains items (utilisations du domaine public, phénomènes naturels, présence de canalisations, conduites et câbles de toute nature, coûts résultant de l’élimination des déchets de chantier, réalisation simultanée d’autres ouvrages). Les prix sont réputés avoir été établis en considérant qu’aucune prestation n’est à fournir par le maître de l’ouvrage.
Même si le prix forfaitaire est censé représenter une globalité, quand on discutera du périmètre du prix, il faut déterminer s’il s’agit de travaux supplémentaires ou non. Le réflexe naturel est de se reporter au contenu de ces prix prévu par l’article 10.1 du CCAG Travaux. on aura toujours assez souvent le réflexe naturel de se reporter au contenu de ces prix prévu par l’article 10.1 du CCAG travaux. Le pouvoir adjudicateur, selon les conseils de l’intervenant, peut prévoir d’autres items ou en supprimer et prévoir une formule plus globalisante sur un contenu du prix qui englobe tout type de sujétions sans forcément les détailler.
‐ Distinction entre prix forfaitaires et prix unitaires est bien prévu par le CCAG travaux (article 10.2).
Il existe un attachement jurisprudentiel fort par rapport à la globalisation du prix forfaitaire. En effet, la globalité du prix global et forfaitaire est souvent mise en avant que ce soit au bénéfice ou au détriment du pouvoir adjudicateur (pose des problématiques comme celle de savoir qui doit prendre en charge ce que l’étude de sol, dans un marché de travaux, n’a pas pu anticiper en amont de l’opération?) CAA Nancy, 7 juin 2012, n°11NC00510 : En l’occurrence il s’agissait de fouilles archéologiques ayant conduit à procéder à certaines modifications et notamment à modifier le système d’assainissement initialement prévu, celui rendu en dernier lieu conduisant à une importante réduction des coûts sur le prix du marché. Le centre hospitalier entendait répercuter cette diminution des coûts sur le prix du marché, en dépit du caractère forfaitaire de celui‐ci. La cour confirme la position des premiers juges
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en rappelant que le prix forfaitaire est dû dès lors que l’ouvrage est exécuté, sans que celui‐ci puisse faire l’objet d’une modification en raison d’un changement affectant la décomposition du prix. Rappel assez fréquent de cette jurisprudence De plus, le prix forfaitaire limite le droit à indemnité : CE, 5 juin 2013, n°352917, Région Haute‐Normandie : Les difficultés rencontrées dans l’exécution d’un marché à forfait n’ouvrent droit à indemnité au profit de son titulaire que si elles ont eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat ou sont imputables à une faute directe de la personne publique. Cette position pose la question du champ de responsabilité d’un maître d’ouvrage par rapport à une faute qui trouverait son origine dans la réalisation d’une prestation d’un autre cocontractant de la personne publique (maître d’œuvre, OPC, entreprises de travaux). Elle est responsable de toutes les fautes, à charge pour la personne publique d’appeler en garantie ces différents intervenants sur le fondement du lien contractuel qu’elle entretient avec ces intervenants.
‐ Le CCAG travaux propose une configuration de décomposition du prix global et forfaitaire. Au niveau du CCAG, la DPGF est présentée sous la forme d’un détail évaluatif comprenant pour chaque nature d’ouvrage ou chaque élément d’ouvrage, la quantité à exécuter et le prix de l’unité correspondant (art. 10) et indiquant pour les prix d’unité en question, les pourcentages de ces prix correspondant aux frais généraux, aux impôts et taxes et à la marge pour risques et bénéfices, ce dernier pourcentage s’appliquant au total des frais directs, des frais généraux et des impôts et taxes. La décomposition prévue par le CCAG travaux va donc très loin dans le détail.
III‐ Les délais d’exécution propres au CCAG travaux. (art. 19) 1. Les délais
Point de vigilance sur la date de début d’exécution. Le délai d’exécution comprend la période de préparation (art.28.1) et la période de délai d’exécution des travaux. Le CCAG travaux impose un ordre de service pour le démarrage de la période de préparation des travaux et une fois cette période de préparation terminée, un autre ordre de service pour le commencement de l’exécution des travaux. L’article 19 du CCAG travaux prévoit une dérogation permettant la notification d’un ordre de service englobant la période de préparation et de démarrage des travaux pour éviter les contradictions à ce titre. Attention en cas de travaux allotis ! Il s’agit du seul cas où l’on parle d’un délai global d’exécution des travaux englobant l’ensemble des interventions des différents acteurs et des délais propres à chaque lot qui doivent être précisés dans le cadre d’un planning d’exécution des travaux avec la traduction et la précision d’un planning prévisionnel d’exécution des travaux proposé en amont de l’opération. La prolongation des délais d’exécution est également un mécanisme prévu par le CCAG travaux (art. 19.2). Il prévoit des circonstances propres de prolongation des délais d’exécution des travaux. Il prévoit aussi une matérialisation de la décision de prolonger les travaux. La prolongation des travaux, pour les circonstances énumérées par l’article 19 (exemple : difficultés imprévues en cours de chantier), est matérialisée par une décision prise par le représentant du pouvoir adjudicateur qui la notifie au titulaire après proposition et discussion avec le maître d’œuvre et avis du titulaire. Mécanisme compliqué pour arriver à une prolongation des délais d’exécution ! Le mécanisme peut être simplifié en prévoyant une dérogation à ce titre. Prolongation possible également en cas d’intempéries. A ce titre, le CCAG travaux prévoit aussi un mécanisme. Prolongation impulsée par un ordre de service du maître d’œuvre sous réserve de répondre à la définition des intempéries au sens des dispositions législatives et réglementaires (conditions atmosphériques, inondations, intempéries qui rendent dangereuses ou impossible l’accomplissement du travail). Un arrêt de travail doit être ordonné pour vérifier la corrélation entre les intempéries et le travail de l’entreprise pour qu’une déduction soit effectuée sur la durée réelle d’exécution des travaux. Concernant l’actualité par rapport aux délais d’exécution :
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‐ CE, 27 octobre 2010, n°323485, Commune de Seyne‐sur‐Mer : le titulaire d’un marché de travaux a droit à l’indemnisation du préjudice qu’il subit du fait de l’allongement des délais d’exécution du marché qui ne lui est pas imputable alors même que les nouveaux délais avaient fait l’objet d’ordres de service pour lesquels il n’avait pas émis de réserves. Ainsi, l’absence de réserves ne vaut pas renoncement à indemnisation dans le cadre spécifique des délais d’exécution prolongés.
‐ CE, 13 juin 2012, n° 343788 : La société titulaire d’un marché public a droit à l’indemnisation intégrale des préjudices subis du fait de retards dans l’exécution du marché imputables au maître d’ouvrage, ou à ses autres contractants, et distincts de l’allongement de la durée du chantier lié à la réalisation de travaux supplémentaires, dès lors que ce préjudice apparaît certain et présente avec ces retards un lien de causalité directe. C’est une exigence jurisprudentielle forte.
2. Les pénalités
En cas de retard imputable au titulaire dans l’exécution des travaux, le CCAG travaux propose toujours une pénalité journalière d’un montant de 1/3000 du montant hors taxes de l’ensemble du marché. La pénalité de retard qui s’applique à la fin du chantier, vient sanctionner un retard dans la livraison de l’ouvrage par rapport au délai d’exécution prévu initialement. Exonération prévue par le CCAG travaux : le titulaire est exonéré des pénalités dont le montant total ne dépasse pas 1000 euros HT pour l’ensemble du marché. D’autres pénalités peuvent être instituées par le marché. Les retenues provisoires sont à distinguer des pénalités (art. 20.1.5). Les retenues provisoires peuvent être constituées qu’en cas de retards partiels constatés sur une tâche identifiée dans le cadre d’un planning détaillé d’exécution. Le pouvoir adjudicateur n’a pas l’obligation de mettre en demeure le prestataire avant d’appliquer ce type de pénalité de retard. La retenue sera transformée ou non au moment du décompte du marché si un retard définitif et global est constaté par rapport au délai d’exécution fixé en amont. CE, 16 mai 2012, n°345137, Communauté agglomération Rouen‐Elbeuf‐Austreberthe c/ Société Eurovia Haute‐Normandie : Le dépassement des délais d’exécution en raison de l’accomplissement de travaux supplémentaires décidés par ordre de service peut justifier l’application des pénalités de retard prévues au contrat si aucune réserve n’a été émise quant aux délais nécessaires à leur réalisation et qu’il n’existe aucun accord entre les parties pour les soustraire aux délais d’exécution du contrat initial. CE, 10 mars 2010, n°308676, Commune Issy‐les‐Moulineaux : Le Conseil d’Etat confirme que la collectivité publique peut renoncer au bénéfice des pénalités de retard et que cette renonciation peut découler de la prolongation unilatérale du délai d’exécution par le maître de l’ouvrage notamment du fait de la notification d’un nouveau planning décalé d’exécution, sauf mention expresse que ce planning ne vaut pas renonciation.
IV‐ Le règlement des litiges (art. 50 CCAG travaux) Dorénavant, quelle que soit l’origine du litige, l’entrepreneur doit exposer les motifs de son différend dans un mémoire en réclamation, le transmettre au pouvoir adjudicateur et en adresser une copie au maître d’œuvre (art. 50.1.1). Ce n’est qu’après l’avis du maître d’œuvre que le représentant du pouvoir adjudicateur notifie sa décision au titulaire et ce dans un délai de 45 jours (art. 50.1.2). L’absence de décision dans ce délai vaut rejet implicite du la demande du titulaire (art. 50.1.3). A compter de ce rejet (explicite ou implicite), l’entrepreneur peut saisir le tribunal administratif sans avoir à produire un mémoire complémentaire, sous réserve de ne porter devant la juridiction que les chefs et motifs énoncés dans son mémoire en réclamation (art. 50.3.1).
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Echanges avec la salle : Question : Un marché avec maîtrise d’œuvre interne ou un marché de travaux sans maîtrise d’œuvre est‐il une dérogation ou un aménagement du CCAG travaux ? Réponse : Le CCAG travaux part du principe d’une maîtrise d’œuvre privée. Si c’est une seule et même personne qui cumule les deux casquettes (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre), le pouvoir adjudicateur peut prévoir des dispositions plus simples et plus opérationnelles que ce qui est prévu par le CCAG travaux.
III – LES GARANTIES CONTRACUELLES: Un contentieux en évolution? Rémi PORTE, Juriste en charge de la construction à la FFSA La réception des travaux purge les vices apparents. Un arrêt du Conseil d’Etat du 20 ars 2013, n°357636, le rappelle : « La réception ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs qu’en ce qui concerne la réalisation de l’ouvrage et demeure ainsi par elle même sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l’obligation du marché à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires dont la détermination intervient définitivement lors de l’établissement du solde définitif ».
la garantie de parfait achèvement Prévue par l’article 44.1 du CCAG travaux : le titulaire doit reprendre tous les désordres signalés par le maître d’ouvrage ou le maître d’œuvre. Le débiteur de la garantie est l’entreprise titulaire et le bénéficiaire est le maître d’ouvrage.
Si des dommages apparents ont été acceptés sans réserve lors de la réception, il n’y a pas d’action possible. Les dommages objets de réserves à la réception permettent au contraire le maintien de la responsabilité de droit commun du titulaire. Des dommages survenus pendant la première année suivant la réception des travaux ne relevant pas de la garantie décennale (dommages intermédiaires) doivent être déclarés la première année au titre de la garantie de parfait achèvement. Ces dommages engageront la responsabilité du titulaire. Lorsque des dommages surviennent pendant la première année suivant la première année de nature décennale, la garantie décennale peut être déclenchée. Des dommages survenus pendant la première année suivant la réception des travaux relevant de la garantie de bon fonctionnement permettent de déclencher la garantie de bon fonctionnement.
La responsabilité biennale et décennale Le titulaire de l’action en garantie décennale est le propriétaire de l’ouvrage. Toutefois, le transfert de propriété est possible à un tiers (cf CE 9 décembre 2011, n°342283)). Le maître d’ouvrage peut également donner mandat à un tiers pour agir contre les constructeurs, notamment au maître d’ouvrage délégué (cf CE 7 mars 2005, n°204454). Le débiteur de la garantie est le constructeur en lien direct avec le maître d’ouvrage. N’ayant pas de lien direct avec le maître d’ouvrage, il ne peut pas être recherché en décennale. De plus, l’action délictuelle contre le sous‐traitant est possible (cf CAA Nancy, 16 novembre 2006, n°03NC00758).
Celui qui a fait construire et qui vend dans moins de dix ans est réputé constructeur et peut être recherché en responsabilité décennale, d’où l’intérêt de s’offrir les assurances facultatives des constructeurs non réalisateurs.
Les ouvrages concernés : ‐ Neuf/ réhabilitation ‐ Notion d’équipement : dissociable, indissociable ou à usage exclusivement professionnel.
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La garantie décennale couvre : ‐ L’atteinte à la solidité de l’ouvrage ‐ L’impropriété à la destination est une notion non définie par les textes et les juges ont une
conception extensive de celle‐ci. Cette notion couvre par exemple la sécurité des personnes. (revêtement de sols, non respect de la règlementation incendie, contentieux lié à la règlementation thermique (RT), nuisances sonores…)
‐ Dommages intermédiaires ‐ Dommages évolutifs. Le juge administratif admet la prise en charge des dommages futurs.
L’assurance construction
L’assurance des risques avant réception : en principe, les entreprises sont responsables des dommages avant réception. L’assurance après réception : Les ouvrages soumis à l’obligation d’assurance : assurance obligatoire pour tous les ouvrages en principe sauf les ouvrages listés à l’article L 243‐1‐1 du Code des assurances. Les personnes soumises à l’assurance obligatoire : article L 242‐1 du Code des assurances donne certaines exceptions. L’obligation dommages ouvrage ne s’applique pas notamment aux personnes morales de droit public et aux personnes morales de droit privé qui assurent la maîtrise d’ouvrage dans le cadre d’un PPP avec l’Etat. Même si elle est facultative, l’assurance dommages‐ouvrage a un vrai intérêt pour le maître de l’ouvrage. C’est une assurance de préfinancement.
Les assurances facultatives : ‐ Garantie de bon fonctionnement ‐ Dommages immatériels ‐ Garantie « génie civil ».
Points de vigilance à l’attention des maîtres d’ouvrage : A supposer que vous n’ayez pas d’assurance dommages‐ouvrage, il convient de prêter attention à l’assurance des intervenants à l’acte de construire (entreprises). Attention également à la date d’ouverture de chantier. La garantie décennale court à compter de la réception, pour autant l’assureur qui interviendra pour un désordre de nature décennale n’est pas l’assureur au moment de la réception mais l’assureur au moment de la déclaration d’ouverture de chantier. C’est un critère important à vérifier.
Attention également aux chantiers importants de plus de 15 millions d’euros. Les entreprises doivent dans ce cas de figure mettre en place des garanties spécifiques. La loi oblige les entrepreneurs à avoir une garantie décennale correspondant au coût total du chantier. Le contrat collectif de responsabilité décennale (CCRD) est régi par l’article 9 du CCAG travaux.
Pour l’assurance dommages‐ouvrage, entre la réception d’une déclaration de sinistre réputée constituée et la proposition d’indemnité de l’assureur, il doit s’écouler un délai de 90 jours.
Le maître d’ouvrage public est moins bien traité que le maître d’ouvrage privé concernant la réparation. Côté droit privé on a un désordre de nature décennale 9 ans après la réception, l’assureur des constructeurs va couvrir la remise en l’état, comme si l’ouvrage n’avait jamais été utilisé. En droit public, la vétusté est en général imputée au maître d’ouvrage.
Le contentieux Concernant la prescription, les délais sont compliqués à gérer. En matière d’assurance, la prescription est biennale (2 ans) depuis la forme de la prescription avec la loi du 17 juin 2008. CAA de Douai 14 novembre 2012 : l’acte interruptif de la prescription peut être fait par quelqu’un qui n’est pas habilité avant que le juge statue au fond.
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Le contentieux évolue avec une forte augmentation de la sinistralité (plus 20% par rapport à l’an passé). Le coût des sinistres majeurs a augmenté pour les assureurs. Les remèdes pour l’assureur : l’augmentation des prix. Mais en réalité il existe également des actions de prévention. Il faudra de plus en plus prendre en compte la formation des entreprises sur ces questions.
Echanges avec la salle : Intervention de Jean‐Marc Peyrical : Ce domaine des assurances est peu connu des acheteurs publics. Même les conseils ne connaissent pas suffisamment ce domaine. Vous avez dit qu’il y avait de plus en en plus de sinistralité. Peut‐on en conclure que les entreprises travaillent de plus en plus mal ? Réponse : En réalité, on constate en période de crise, une augmentation de la sinistralité. Des problèmes de qualification mais également d’encadrement peuvent être répertoriés lorsqu’on a recours à des sous‐traitants. La règlementation est parfois peu connue. La question des matériaux bas de gamme qui sont installés est aussi une question préoccupante. Remarque: Le formulaire de la déclaration de sinistre n’est pas assez poussé. Il faut aller plus loin pour rechercher les responsabilités de chacun des intervenants. Ensuite, chaque procédé ne nécessite pas la même assurabilité. Réponse : Sur la question des produits, l’assureur ne garantit de base que les techniques dites courantes (la mise en œuvre, respect du DTU et règles professionnelles, certification des produits etc). Concernant la déclaration de sinistre, il est vrai qu’il existe des formulaires types. C’est très encadré lorsqu’on est en dommages‐ouvrage. Si le maître d’ouvrage oublie un élément, l’assureur dispose de 10 jours pour le lui réclamer.
IV – LA RECEPTION DES TRAVAUX ET LA LEVEE DES RESERVES: les liaisons entre le CCAG et le CCAP Louis ROESSEL, Ingénieur en chef des Hôpitaux universitaires de Strasbourg Charles PAREYDT, Avocat La fin du marché se matérialise techniquement par la réception des travaux. La réception des travaux est l’acte par lequel le pouvoir adjudicateur déclare accepter l’ouvrage, avec ou sans réserve. Outre le fait que la réception met fin aux relations contractuelles, cet acte est le point de départ des délais de garanties (conditions au chapitre V du CCAG travaux) telles que la garantie de parfait achèvement ou la garantie décennale de bon fonctionnement. Le maître d’ouvrage doit l’anticiper en amont, dès la phase de conception du calendrier des travaux pour éviter tout problème au moment des opérations préalables à la réception (OPR), et éviter un éventuel retard. En effet, selon Charles Pareydt, « la réception se prépare bien en amont, dès la construction des marchés de prestations intellectuelles et doit impliquer tous les intervenants qui vont œuvrer à la conception du calendrier de travaux ». Les opérations préalables à la réception L’article 41.2 du CCAG travaux reformule les opérations préalables à la décision de réception. Ces opérations comportent en tant que de besoin :
‐ La reconnaissance des ouvrages exécutés ‐ Les épreuves éventuellement prévues par le marché ‐ La constatation éventuelle de l’inexécution des prestations prévues au marché ‐ La vérification de la conformité des conditions de pose des équipements aux spécifications
des fournisseurs conditionnant leur garantie ‐ La constatation éventuelle d’imperfections ou de malfaçons
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‐ La constatation du repliement des installations de chantier et de la remise en était des terrains et des lieux
‐ Les constations relatives à l‘achèvement des travaux. Toutefois, pour les deux intervenants, l’article 41.2 du CCAG travaux, qui prévoit notamment l’établissement et la tenue des OPR, est lacunaire. A ce titre, et pour combler cette insuffisance textuelle, Louis Roessel considère et conseille aux participants qu’ « avant même de consulter les entreprises, dès la phase d’études de projet dite PRO, il est opportun de faire figurer dans le calendrier général de travaux, des tâches clairement identifiées préfigurant la réception, telles que les opérations de vérifications préalables aux OPR, les mises en services, les OPR, etc ». Pour éviter que des désordres n’apparaissent au moment des OPR, il est conseillé au maitre d’ouvrage, au stade de la rédaction des pièces du marché, d’envisager et de planifier, au sein du calendrier général des travaux, les vérifications techniques préalables. Pour ce faire « il convient de positionner les différentes tâches de pré‐OPR et de décliner les tâches de vérification visuelles, fonctionnelles des installations techniques et performantielles, zone par zone, niveau par niveau » a insisté Louis Roessel. Il s’agit en autres de vérifier sur site les prestations dès qu’elles sont achevées : installations techniques ou non techniques, étanchéité à l’air du bâtiment, secours électriques, calfeutrement ou encore la pose d’ossatures de faux plafonds avant blanchiment. Enfin, les essais et mises en service clôtureront les vérifications techniques préalables (distribution électrique, distribution d’eau chaude…) La décision de réception La réception prend effet à la date d’achèvement des travaux. Dans le délai de 5 jours suivant la date du procès‐verbal, la maître d’œuvre fait connaître au titulaire s’il a ou non proposé au représentant du pouvoir adjudicateur de prononcer la réception des ouvrages et, dans l’affirmative, la date d’achèvement des travaux qu’il a proposé de retenir, ainsi que les réserves dont il a éventuellement proposé d’assortir la réception. Au vu du procès verbal des opérations préalables à la réception et des propositions du maître d’œuvre, le maître de l’ouvrage décide si la réception est ou non prononcée ou si elle est prononcée avec réserves. Dans le cas où il prononce la réception, il fixe la date qu’il retient pour l’achèvement des
travaux. La décision ainsi prise est notifiée au titulaire dans les 30 jours suivant la date du procès‐verbal.
A défaut de décision du maitre de l’ouvrage notifié dans le délai de 30 jours, les propositions du maître d’œuvre s’imposent au maître de l’ouvrage et au titulaire.
La réception prend effet à la date fixée pour l’achèvement des travaux. Les différentes possibilités offertes au maître d’ouvrage Il peut refuser de réceptionner les travaux (art. 41.3 du CCAG travaux) Il peut réceptionner les travaux sans réserve avec une date convenue pour l’achèvement des travaux (art. 41.3) Il peut réceptionner les travaux avec réserves au sens d’imperfections et malfaçons affectant l’ouvrage (art.41.6) Il peut réceptionner les travaux sous réserve de l’exécution de travaux dans un délai qui n’excède pas trois mois (art. 41.5). La constatation de l’exécution de ces prestations doit donner lieu à procès‐verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès‐verbal des OPR. Dans ce cas, il bloque la constitution du décompte général définitif (art. 13). Il peut réceptionner sous réserve de l’exécution concluant de tests ou d’épreuves. Dans le cas où certaines épreuves doivent, conformément aux stipulations du CCAP, être exécutées après une durée déterminée de service des ouvrages ou certaines périodes de l’année (art. 41.4)
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Il peut réceptionner avec réfaction du prix sans les imperfections constatées soient de nature à porter atteinte à la sécurité, au comportement ou à l’utilisation des ouvrage. Dans ce cadre, le maître d’ouvrage peut, eu égard à la faible importance des imperfections et aux difficultés que présenterait la mise en conformité, renoncer à ordonner la réfaction des ouvrages estimés défectueux et proposer au titulaire une réfaction sur les prix (art. 41.7). La levée des réserves (art. 41.6) En principe, au terme de la décision de réception, un délai est fixé pour la levée des réserves. En absence de délai, l’entrepreneur doit, 3 mois avant l’expiration du délai de garantie, remédié aux imperfections ou malfaçons. Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, le maître d’ouvrage peut les faire exécuter aux frais et risques du titulaire. Le constat de la levée des réserves Même si cette étape n’est pas inscrite dans le CCAG travaux, la levée des réserves doit faire l’objet d’un constat pour éviter toute constatation sur la réalité de la levée ou non. Le représentant du pouvoir adjudicateur doit, par décision, lever les réserves et fixer définitivement la date d’achèvement des travaux. La réception partielle (art.42) La réception partielle ne doit pas se confondre avec une réception lot par lot sur un ouvrage non achevé). La réception partielle est possible lorsque :
‐ Un délai d’exécution distinct du délai global d’exécution de l’ensemble des travaux, est fixé par le marché pour une tranche de travaux, un ouvrage ou une partie d’ouvrage.
‐ Le maître d’ouvrage prend possession, avant l’achèvement de l’ensemble des travaux, de certains ouvrages ou parties d’ouvrages.
‐ Pour les tranches de travaux, ouvrages ou parties d’ouvrages ayant donné lieu à une réception partielle, le délai de garantie court à compter de la date d’effet de la réception partielle.
‐ Le décompte général est établi à compter de la dernière décision de réception partielle. Il en est également ainsi pour la libération des sûretés.
Echanges avec la salle : Question : Qu’en est‐il des procédures de réception des OPR lorsque la maîtrise d’œuvre est assurée par la maîtrise d’ouvrage (maîtrise d’ouvrage intégrée) ? Réponse : Dans ce cas, le maître d’ouvrage se trouve exclu de l’application de la loi MOP. Cela dit, il existe deux types de possibilité : soit une séparation est envisagée contractuellement entre les deux services (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre) et chacun des services accomplit ce qui est prévu par le CCAG travaux. Soit les actions peuvent être cumulées (maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre) sans les identifier en tant que telle. L’important est que le maître d’ouvrage doit être clair par rapport à l’entrepreneur. Question : Dans le cadre de la réalisation d’un ouvrage sous forme de 10, 15 ou 20 lots, doit‐on envisager une réception unique ou la réception par lot est‐elle plus judicieuse notamment si certains lots sont terminés bien avant ? Réponse de Louis Roessel: Nous pratiquons exclusivement la réception unique. Réponse de Charles Pareydt : Juridiquement parlant, le pouvoir adjudicateur peut tout prévoir, dans le sens où un lot est égal à un marché. Tout reste question d’organisation : autonomie du CCAP, organisation propre à chaque lot, identification de réception. Toutefois, la difficulté est de savoir tout coordonner. Par retour d’expériences, il existe plutôt une pratique de la réception unique pour l’ensemble des lots. Un process plus global reste plus simple à maîtriser pour la maîtrise d’ouvrage et pour la maîtrise d’œuvre.
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V – LE DECOMPTE GENERAL DEFINITIF (DGD) Louis ROESSEL, Ingénieur en chef des Hôpitaux universitaires de Strasbourg Charles PAREYDT, Avocat Il faut anticiper au mieux cette phase de décompte général. A la différence de la réception des travaux, le CCAG prévoit un processus qui est assez encadré. Des mécanismes précontentieux sont prévus pour anticiper et gérer les contentieux.
Sur l’établissement du décompte général, deux phases classiques sont à distinguer : ‐ Le règlement financier du marché : il est régi de manière précise par le CCAG Travaux (article
13 CCAG Travaux). Le règlement s’effectue provisoirement dans l’attente du règlement définitif par le décompte général qui fixe une position financière définitive.
‐ Notification du projet de décompte mensuel. Au titre du CCAG travaux, un délai strict de 7 jours est imposé au maître d’œuvre à compter de la notification du projet de décompte mensuel pour notifier un état d’acompte au titulaire du marché et en même temps soumettre au pouvoir adjudicateur cet état d’acompte. Si cette notification n’intervient pas dans un délai de 7 jours à compter de la réception de la demande du titulaire, celui‐ci en informe le représentant du pouvoir adjudicateur qui procède au paiement sur la base des sommes qu’il admet.
La réception des travaux marque la fin des relations contractuelles et enclenche les procédures de liquidation financière du marché qui doivent avoir pour finalité de constater que les obligations de paiement ont été respectées, notamment en cours d’exécution et de régler ce qui reste à régler au niveau du solde du marché. La première des conditions est l’achèvement des travaux. Après l’achèvement des travaux, un projet de décompte final est établi concurremment avec le projet de décompte mensuel afférent au dernier mois d’exécution des prestations ou à la place de ce dernier. Ce projet de décompte final est la demande de paiement finale du titulaire, établissant le montant total des sommes auquel le titulaire prétend du fait de l’exécution du marché dans son ensemble, son évaluation étant faite en tenant compte des prestations réellement exécutées.
Au niveau des délais, le titulaire du marché doit notifier le projet de décompte final dans un délai de 45 jours à compter de la décision de réception des travaux. Le titulaire est lié par les indications figurant au projet de décompte final. Il doit récapituler les réserves qu’il a émises et qui n’ont pas été levées, sous peine de les voir abandonnées.
Le maître d’œuvre effectue une vérification sur le décompte final. Le projet de décompte final accepté ou rectifié par le maître d’œuvre devient le décompte final. En cas de rectification du projet de décompte final, le paiement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par le maître d’œuvre.
Au niveau du décompte général, le maître d’œuvre établit le projet de décompte général comprenant :
‐ Le décompte final ‐ L’état du solde, établi à partir du décompte final et du dernier décompte mensuel ‐ La récapitulation des acomptes mensuels et du solde
Le projet de décompte général est signé par le représentant du pouvoir adjudicateur. Ce dernier notifie au titulaire le décompte général avant la plus tardive des deux dates ci‐après :
→40 jours après la date de remise au maître d’œuvre du projet de décompte final par le titulaire →12 jours après la publication de l’index de référence permettant la révision du solde
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Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire, dans les délais stipulés ci‐dessus, le décompte général signé, celui‐ci adresse une mise en demeure d’y procéder. L’absence de notification au titulaire du décompte général dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la mise en demeure, autorise le titulaire à saisir le juge du contrat en cas de désaccord. Si le décompte général est notifié au titulaire postérieurement à la saisine du tribunal administratif, le titulaire n’est pas tenu, en cas de désaccord, de présenter un mémoire en réclamation.
En résumé : ‐ Signature sans réserve = décompte général et définitif du marché ‐ Signature avec réserves mais sans motiver les réserves = décompte général et définitif du
marché ‐ Pas de signature ni de contestation = décompte général et définitif du marché
Le décompte lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires afférents au solde.
Le mémoire en réclamation reprend aussi sous peine de forclusion toutes les réclamations qui ont été formulées antérieurement à la notification du décompte général. En cas de réclamation non reprise au niveau de la contestation du décompte général, l’entrepreneur est censé avoir renoncé implicitement aux réclamations formulées antérieurement à la notification du mémoire en réclamation. Si aucun accord n’est trouvé entre les parties, le mécanisme prévu par l’article 50 du CCAG Travaux s’applique.
Actualité jurisprudentielle :
CE, 15 novembre 2012, n° 349107, Commune Dijon : Ayant constaté les des imperfections mineures, le maître d’ouvrage peut décider de proposer à l’entreprise une réfaction sur le prix, sinon, ou en cas de refus de l’entreprise, il doit émettre des réserves à la réception et l’entrepreneur est tenu de réaliser les travaux qui sont la condition de la levée des réserves.
CE, 20 mars 2013, n° 3576536, Centre hospitalier de Versailles : Si le maître d’ouvrage notifie le décompte général d’un marché public de travaux alors même que des réserves relatives à l’état de l’ouvrage achevé n’ont pas été levées et qu’il n’est pas fait état des sommes correspondant à la réalisation des travaux nécessaires à la levée des réserves au sein de ce décompte, le caractère définitif de ce dernier a pour effet de lui interdire toute réclamation correspondant à ces sommes, même si un litige est en cours devant le juge administratif.
CAA Lyon, 28 février 2013, n° 12LY00477, Sté Henri Germain : Le CCAG travaux imposant une notification du décompte général par la personne responsable du marché ou son mandataire, la notification par le maître d’œuvre est irrégulière. Si c’est le cas, le décompte ne peut dès lors être considéré comme définitif et l’entrepreneur est fondé à saisir directement le juge, malgré l’absence de mémoire en réclamation.
CAA Lyon, 31 janvier 2013, n° 12LY00172, Sté Axe isolation : Une entreprise n’est recevable à contester le bien fondé de la créance objet du titre exécutoire, et résultant du décompte du marché, que si ce décompte n’est pas devenu définitif.
Echanges avec la salle : Question de Jean‐Marc Peyrical : Il est conseillé de ne pas transmettre de décompte général définitif tant que les réserves ne sont pas levées. Toutefois, si la levée des réserves est longue et complexe comment faut‐il procéder ? Est‐il possible de se fixer une limite ? Réponse : c’est une difficulté réelle pour le titulaire mais aussi le maître de l’ouvrage qui continue à faire vivre un solde financier de marché alors qu’il préférerait le clôturer. Le mécanisme qui reste est la réalisation aux frais et risques avec toutes les difficultés que cela peut occasionner.
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Intervention de Louis Roessel : il faut mettre en place des mécanismes sur le suivi des retards, sur le déroulement des opérations, appliquer des retenues provisoires et des pénalités. Enfin, il est nécessaire de prévoir le rapport de fin de chantier qui établit les responsabilités des uns et des autres.
VI – LA TRANSACTION
Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour La transaction est un outil du Code civil. L’article 2044 du Code civil prévoit que la transaction est un contrat signé entre deux ou plusieurs parties et qui a pour objectif de prévenir ou de mettre fin à un litige né ou à naître. Ce contrat a une force importante puisqu’il a autorité de la chose jugée. De plus, une fois que le contrat est régulièrement signé, il a autorité de force jugée. Cela signifie que tout litige porté par l’une des parties, sur un élément objet de la transaction serait nul et non avenue. Le litige est éteint.
La transaction doit faire état de concessions réciproques. Le juge, s’il est saisi de la légalité de la transaction, va contrôler si les sommes qui sont données à l’entreprise sont bien justifiées. Il faut des concessions de la part de la collectivité mais aussi de l’entreprise, c'est‐à‐dire qu’il doit y avoir de la négociation, non de l’automatisme. La transaction sera qualifiée d’illégale par le juge s’il n’y a pas de concessions réciproques.
Avis CE 6 décembre 2002 Commune de l’Hay les Roses et deux circulaires de 2009 et 2011 : Pendant un temps, beaucoup de comptables publics bloquaient les transactions. Beaucoup de collectivités ne veulent pas faire de transactions à cause de ce problème. Le Conseil d’Etat a alors considéré que le comptable public n’a pas à se prononcer sur la légalité d’un contrat public. Ce n’est pas son rôle. Le comptable public bloque un paiement s’il manque les pièces comptables qui doivent accompagner le paiement tel que fixé par la règlementation. Mais il ne peut pas bloquer une transaction s’il estime qu’elle n’est pas légale.
L’homologation : L’homologation permet de saisir le juge administratif avant la signature de la transaction pour lui demander son avis. L’homologation n’est pas une condition de régularité de la transaction. Le Conseil d’Etat a même estimé qu’il fallait limiter les homologations pour désengorger les tribunaux. Demander l’avis du juge concernant la transaction retarde par ailleurs la transaction. Le juge rappelle que l’homologation peut être utile dans deux cas :
‐ Si l’exécution de la transaction peut s’avérer difficile (sur un plan technique, financier, etc.) ‐ Si la transaction est la conséquence d’une décision de justice. Ex : transaction est la
conséquence d’une annulation de procédure ou de marché.
Conseils pour une bonne transaction : une écriture fine et travaillée, des concessions réciproques, des explications sur les sommes. Toutefois, concessions réciproques ne signifient pas nécessairement concessions équivalentes. La transaction est intéressante lorsqu’elle suit un avis (avis du comité consultatif de règlement amiable (CCRA), expert, tiers, médiateur, etc.). Pour donner plus de poids à l’avis en question, il est intéressant de faire une transaction.
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Echanges avec la salle : Question : Le nombre de parties est‐il limité dans une transaction ? Réponse : Non, la transaction entre plusieurs parties est possible. Intervention : Dans les CCRA, il faut observer qu’on se préoccupe moins des concessions réciproques que de l’application d’une règle d’équité de manière souple. Réponse : Cela est lié au comité et à la position du rapporteur. Question : L’engagement de renoncer au recours vaut‐il concession réciproque ? Réponse : Oui, il s’agit d’une forme de concession mais nécessairement lorsque la transaction est signée, il n’y a plus de recours possible.
VII – LES AVENANTS Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour
Pour la première fois, les directives européennes vont traiter des avenants. Le principe dans les prochaines directives: l’interdiction des modifications substantielles du contrat. Cette règle vaut pour tous les contrats précédés de mise en concurrence. Règle assez sévere. Ce principe reprend la jurisprudence de la CJCE du 19 juin 2008, Pressetext Nachrichtenagentur GmbH, aff. C454/06
Les modifications substantielles sont définies comme : ‐ Celles qui auraient pu avoir une influence sur la sélection des candidats ou l’attribution du
contrat. ‐ Celles qui modifient l’équilibre économique du contrat en faveur de son titulaire. ‐ Celles qui modifient considérablement son champ d’application en y englobant des
fournitures, des services et des travaux non couverts au départ. ‐ Et disposition assez sévère qui prévoit que les modifications substantielles sont définies
comme celles qui dépassent 5% du prix du contrat et le seuil d’application de la directive, valeur cumulée des modifications successives. Au‐delà de 5%, la modification serait donc suspecte. Il s’agit d’un pourcentage faible.
Au vu d’une dernière réponse ministérielle du 6 août 2013, qui fait état des dernières négociations avec la Commission, le Parlement et le Conseil, le seuil pourrait (sans certitude) être porté à 10% de la valeur du contrat. Il s’agirait alors d’un seuil de minimis. Ce sera la première fois qu’un texte imposera un pourcentage au‐delà duquel la modification serait suspecte. Par ailleurs on parle du cumul des avenants.
‐ Celles qui remplacent le partenaire contractuel, sauf opération de restructuration de la société contractante ou substitution consécutive à une faillite. A condition que cela n’entraîne pas d’autres modifications substantielles et ne vise pas à se soustraire à l’application de la présente directive. Cela ne doit pas remettre en cause les conditions de remise en concurrence.
En revanche, ne seraient pas considérées comme substantielles : ‐ Les modifications prévues par le contrat sous la forme de clauses de réexamen ou d’options
claires, précises et univoques. Il convient d’indiquer le champ d’application des modifications, la nature des modifications, les conditions dans lesquelles elles peuvent être opérées.
‐ Les modifications rendues nécessaires par des circonstances imprévisibles, sans excéder 50% de la valeur initiale du contrat (sauf pour les concessions dans les activités de réseau : réponse ministérielle du 6 août 2013).
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Dans les deux cas de modifications autorisées, la nature globale du contrat ne doit pas s’en trouver changer. Deux interdictions formelles dans les directives :
‐ Interdiction de modifier le contrat pour remédier à des déficiences dans son exécution (pouvant être réglées en imposant au titulaire l’exécution de ses obligations contractuelles) ou pour compenser un risque d’augmentation du prix que le cocontractant a couvert.
Pour résumer : Interdiction d’aider indûment le titulaire du contrat en faisant preuve à son égard d’une indulgence injustifiée. Le droit européen est plus contraignant qu’auparavant. Dès 2014, transposition de certaines dispositions des directives. Quand l’avenant est‐il nécessaire ?
‐ Changement de la personne publique. Nécessité d’un avenant pour matérialiser le changement de pouvoir adjudicateur.
‐ En cas de défaillance du membre d’un groupement (réponse ministérielle n° 01602 du 18 octobre 2012) :
Le membre d’un groupement ne peut se substituer à un autre= violation des règles de mise en concurrence.
Dans le cas de sa défaillance, un avenant doit être conclu pour poursuivre l’exécution du contrat avec un groupement réduit.
Lorsque le membre du groupement défaillant est mandataire, le groupement doit proposer un mandataire parmi eux.
En cas de groupement conjoint et si le mandataire n’est pas solidaire, le pouvoir adjudicateur doit passer un marché de substitution aux prestations effectuées par le membre défaillant.
Quelques jurisprudences sur l’illégalité de l’avenant :
CAA Douai, 19 juin 2012, Préfet Nord, n° 11DA01071 : Illégalité d’un avenant dont l’objet est de prendre en compte des prestations non prévues au marché.
CAA Bordeaux, 14 mars 2013, Ecole nationale supérieure des techniques industrielles et des mines d’Albi, n° 11BX03091 : Illégalité d’un avenant dont l’objet est de céder par son titulaire à une autre société une convention d’occupation du domaine public. Une convention d’occupation du domaine public ne se cède pas, il faut en passer une autre.
TA Paris, 6 janvier 2012, Préfet de la Région Ile‐de‐France, n° 1111213/7‐2 : Illégalité de l’avenant fixant la rémunération définitive d’un maître d’œuvre en cas de bouleversement de l’économie du contrat. Arrêt de la CAA Paris, 25 février 2013 a remis en cause le jugement du TA.
CAA Marseille, 19 décembre 2011, Communauté urbaine Nice‐Côte d’Azur, n° 09MA01523 : Les travaux ordonnés par le maître de l’ouvrage, indissociables du marché initial et ne bouleversant pas l’économie général du marché sont légaux.
TA Cergy‐Pontoise, 17 septembre 2013, Société DTP21, n° 1201769 : Un candidat évincé d’un marché n’est pas recevable à demander l’annulation d’un avenant à ce marché. C’est une jurisprudence importante, il faut espérer qu’elle soit confirmée.
Attention à l’exception d’illégalité. Parfois on attaque un avenant parce que le contrat est illégal. On voit beaucoup cela pour les contrats complexes comme les concessions d’aménagement. Attention, un avenant illégal peut entraîner la responsabilité pénale de son auteur pour délit de favoritisme.
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Echanges avec la salle : Intervention Charles Pareydt : J’ai été confronté à certaines situations dans lesquelles on cherche à qualifier l’avenant de nouveau marché par le biais du référé contractuel. Question : Vous avez évoqué le cas d’un avenant de transfert. Cet avenant doit‐il être nécessairement tripartite ? Réponse : Ce n’est pas obligatoire mais préférable car une partie se substitue à une autre. Cela paraît donc assez logique qu’on ait les 3 signataires (effet de la substitution). Question : Quel est selon vous l’objectif de l’Europe en réduisant autant le seuil pour les avenants ? Réponse : La Commission s’est fondée sur la jurisprudence Pressetext et la jurisprudence est sévère puisque la Cour estime dans ses considérants qu’un avenant remet en cause l’accord contractuel entre les parties et la mise en concurrence initiale. On ne doit pas modifier l’accord sauf exceptionnellement. La commission est partie de ce principe. Par principe, un avenant est quasiment illégal. Question : Comment définissez‐vous le bouleversement d’une économie de marché ? Réponse : Il s’agit de remettre en cause le cœur du marché. Cela peut concerner le prix ou autre chose. Exemple : un avenant qui modifie une formule de révision, on bouleverse l’économie du marché, un avenant qui modifie le périmètre. Bouleverser l’économie de marché = bouleverser les éléments fondamentaux du marché. Il est possible de passer un marché complémentaire qui est une vraie alternative à l’avenant.
VII – LE CONTENTIEUX DE LA RESILIATION Jean‐Marc PEYRICAL, Président de l’APASP – Maître de conférences ‐ Avocat à la Cour Charles PAREYDT, Avocat Aujourd’hui dans les contrats administratifs et marchés publics, le juge est de plus en plus interventionniste. Il n’hésite pas à remettre en cause le contrat signé entre les parties ou à forcer la main pour des raisons de stabilité contractuelle. Par exemple, le recours tropic travaux signalisation permet à un tiers, personne extérieure au contrat en lui‐même, de pouvoir l’attaquer en sollicitant du juge son annulation. Dans tous les contrats (marchés publics, DSP, contrat de partenariat, convention d’occupation domaniale), la résiliation unilatérale est un des derniers pouvoirs dont bénéficient les collectivités publiques. Cette modalité a été reconnue par le juge et permet à la personne publique de mettre fin au contrat pour des motifs d’intérêt général (nous ne parlons pas de la résiliation pour faute). En contrepartie de ce pouvoir, toute une jurisprudence s’est développée sur le recours indemnitaire pour préjudice subi du cocontractant lorsque le contrat a été résilié pour motif d’intérêt général. C’est donc une prérogative de puissance publique mais avec des contreparties financières. Jusqu’à présent, seule était ouverte la possibilité d’indemniser le cocontractant. Beaucoup de prestataires ont contesté cette situation déséquilibrée. Le juge a changé sa jurisprudence. Conseil d’Etat, 21 mars 2011, n°304806, commune de Béziers II : Le juge se reconnaît la possibilité d’annuler une décision de résiliation qui serait mal fondée. Ce n’est pas un moyen d’ordre public qui peut être relevé d’office par lui : le requérant doit demander l’annulation de la mesure de résiliation. Il peut également ordonner la reprise des relations contractuelles. Ce dernier point est significatif de l’évolution des pouvoirs du juge en matière contractuelle. Il se donne la possibilité de faire revivre le contrat. L’objectif du juge est la stabilité des relations contractuelles. C’est un nouveau type de recours de pleine juridiction : le juge ne se contente pas de vérifier la légalité de la mesure de résiliation, il fait renaître un contrat dont la fin a été décidée par l’administration. Limite : seul l’ex titulaire du contrat peut demander au juge la reprise des relations contractuelles, et non un tiers au contrat.
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Pour donner droit à l’auteur du recours, le juge vérifie :
‐ La régularité et le bien fondé de la mesure de résiliation. Les acheteurs doivent apprendre à motiver leur décision de résiliation unilatérale. Le juge fait une vérification approfondie.
‐ Que la reprise des relations contractuelles n’est pas sans objet. Ce sera le cas si le contrat est terminé ou que les obligations contractuelles sont remplies.
‐ S’il peut faire droit à la demande de reprise des relations contractuelles « au regard de la gravité des vices constatés et, le cas échéant, des manquements du requérant à ses obligation contractuelles, ainsi que des motifs de la résiliation ». En outre, il vérifie que la reprise des relations contractuelles n’a pas pour conséquence de « porter une atteinte excessive à l’intérêt général » ou « aux droits du titulaire du nouveau contrat dont la conclusion aurait été rendue nécessaire par la résiliation litigieuse » (CE, 21 mars 2011, n°304806)
‐ S’il peut accorder une indemnité à l’ex‐titulaire du contrat pour préjudice subi, notamment du fait de la non‐exécution du contrat entre la date de résiliation et la date fixée pour la reprise des relations contractuelles.
Les acheteurs publics doivent être vigilants sur la décision de résilier un marché pour motifs d’intérêt général car celle‐ci peut être lourde de conséquences (annulation de la mesure de résiliation, reprise des relations contractuelles, indemnisation) Le régime du recours :
‐ Le recours doit être exercé dans un délai de 2 mois à compter de la date à laquelle la partie a été informée de la décision de résiliation.
‐ Le recours n’entre pas dans le champ de l’article R421‐5 du Code de justice administrative (CJA) c'est‐à‐dire que les voies et délais de recours n’ont pas à être notifiés dans le courrier de résiliation. Volonté de la part du juge de limiter ce type de recours.
‐ L’exercice d’un recours administratif (même afin de contester des accusations de fautes) n’interrompt pas le délai. L’administration peut organiser une stratégie pour éviter ce type de contentieux : provoquer des échanges par exemple, des recours non contentieux, des réunions…
Jean‐Marc Peyrical conseille aux collectivités territoriales et aux acheteurs publics de prononcer des mesures de résiliation pour faute ou pour motifs d’intérêt général de façon collégiale. Par exemple, pour une commune ou une collectivité, faire prononcer la mesure de résiliation par son assemblée délibérante ; pour un CHU, demander un avis de la part du conseil d’administration. Il est préférable d’avoir une gouvernance collégiale pour ce type de décisions. Ce recours peut être assorti d’un référé‐suspension contre la décision de résiliation (article L521‐1 du CJA) pour que les relations contractuelles soient provisoirement reprises. Mais les conditions de ce référé sont rigoureuses :
‐ Il faut prouver une situation d’urgence, c'est‐à‐dire une atteinte grave et immédiate aux intérêts du requérant. Il faut que l’entreprise démontre notamment que si le contrat n’est pas repris, elle sera dans une situation financière difficile.
Exemple: Conseil d’Etat, 9 mai 2012, n°356209, Région Champagne‐Ardenne La perte d’un chiffre d’affaires global de 3% ne permet pas d’établir une telle atteinte. Il faut caractériser un doute sérieux quant à la légalité de l’acte contesté (la mesure de
résiliation). En pratique, cette condition est difficilement remplie, car si le juge des référés avait un doute sérieux, il se placerait en tant que juge du fond. Il ferait pression sur ce dernier. Même si le juge ne suspend pas la mesure de résiliation, l’effet du recours reste aléatoire.
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Exemples de jurisprudences CAA Nancy, 28 mars 2013, n° 12NC01362, Commune d’Aubigny‐les‐Pothées La reprise des relations contractuelles a été ordonnée par le juge entre une communauté d’agglomération et une commune dès lors qu’était en jeu un captage d’eau permettant d’alimenter plus du tiers de la population concernée. Ici le motif d’intérêt général a permis au juge de légitimer la reprise du contrat CAA Douai, 2 mai 2013, n° 12DA01577 Société Orange France Reprise du contrat ordonnée entre un CROUS et un opérateur de téléphonie dès lors que la résiliation a porté atteinte à l’intérêt général d’une bonne desserte en téléphonie mobile. L’atteinte à un des grands principes du service public (principe d’universalité du service public) a justifié la reprise des relations contractuelles. CAA Bordeaux, 16 juillet 2013, n° 12BX00161, Association CDAS 33 La reprise des relations contractuelles n’est pas envisageable du fait de la « détérioration considérable des relations entre les parties ». Le juge se met ici clairement à la place des parties.
Echanges avec la salle Intervention Charles Pareydt : Au départ pas ou peu de contrôle du juge administratif sur les décisions prises par la personne publique, notamment dans une optique de continuité du service public. Aujourd’hui, on assiste à une immixtion du juge dans une optique de reprise des relations contractuelles. Résiliation encadrée par le CCAG Travaux. Question : Lorsqu’il y a résiliation pour motif d’intérêt général, il y a un pourcentage qui fixe dans le CCAG travaux l’indemnité du titulaire. Est‐ce qu’on peut déroger à ce pourcentage ? Réponse : il s’agit de l’article 46‐4 du CCAG travaux qui fixe un pourcentage de 5% qui s’applique à défaut de précisions au niveau des pièces contractuelles. Donc si rien n’est précisé au niveau des pièces contractuelles, c’est un pourcentage qui s’impose. On peut par ailleurs avoir à supporter les dépenses d’investissement. On peut aller en deçà en fixant un pourcentage contractuel. Intervention Jean‐Marc Peyrical : Il faut insister sur le cas des délégations de service public (DSP) lorsqu’il y a résiliation, en particulier sur le devenir des biens (biens de reprise, biens propres, biens de retour).
VIII – LE CONTENTIEUX DE LA SOUS‐TRAITANCE Séverin ABBATUCCI, Directeur juridique de la Fédération Française du Bâtiment (FFB) I ‐ Les possibilités de sous‐traitance Les possibilités de sous‐traitance s’effectuent sur un marché de service/travaux, qui est un contrat d’entreprise. Le titulaire doit réaliser l’ouvrage commandé. Il peut confier l’exécution de l’ouvrage (ou une partie) à un ou plusieurs sous‐traitants. Le fournisseur de matériaux n’est pas un sous‐traitant. Lorsque les sous‐traitants ont été identifiés, ils doivent être déclarés au client, maître d’ouvrage. Dans un marché public, une procédure précise doit être suivie, prévue à l’article 114 du Code des marchés publics, et précisé par le CCAG travaux (article 3.6). La déclaration doit indiquer le nom du sous‐traitant, la nature des prestations, le montant puisqu’il y aura paiement direct du sous‐traitant de premier rang et également un certain nombre de renseignements sur les capacités du sous‐traitant (nouveauté par rapport à la version de 2006 du CMP : capacités techniques, professionnelles et financières du sous‐traitant). Il faut relativiser ce contrôle. Au fond l’agrément est une formalité de loi qui autorise la présence du sous‐traitant. Son régime de paiement sera aussi impacté par cet agrément car il sera payé directement par le maître d’ouvrage, s’il est de premier rang. Mais ce n’est
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pas un contrôle au même titre que celui qui doit s’exercer sur le futur titulaire du marché. Ce contrôle est réduit. Le principal contrôle est fait en amont par le titulaire. Règle fondamentale de responsabilité des entrepreneurs : ils restent responsables de la bonne exécution du marché. Ces derniers n’ont donc pas intérêt à faire appel à une mauvaise entreprise.
Procédure d’acceptation et d’agrément des conditions de paiement : paiement direct pour le sous‐traitant de premier rang. Problème du droit du sous‐traitant à des révisions de prix ? Les révisions de prix accordées au titulaire du marché sont‐elles ipso facto dues au sous‐traitant ? Cela dépend de la convention de sous‐traitance, c'est‐à‐dire du contrat conclu entre le titulaire et le sous‐traitant. Le maître d’ouvrage ne doit pas s’immiscer dans le rapport contractuel auquel il n’est pas partie.
Mais la loi sur la sous‐traitance du 31 décembre 1975 impose aux acheteurs publics de prononcer l’agrément des conditions de paiement du sous‐traitant, cela sous‐entend que le maître d’ouvrage peut aussi refuser. Voir les circulaires d’application de la loi de 1975, notamment une circulaire de 1976 reprise par celle du 30 mai 2012 par le ministère de l’économie et des finances : l’administration rappelle que le maître d’ouvrage peut avoir un rôle à jouer pour équilibrer les conditions de paiement, notamment s’il y a un déséquilibre s’agissant par exemple des révisions de prix. Dans l’hypothèse où il y a un déséquilibre entre les conditions de paiement du titulaire et celles du sous‐traitant, la loi donne le droit au maître d’ouvrage (d’accepter le sous‐traitant et d’agréer ou non ses conditions de paiement). Par mesure d’équité, le maitre d’ouvrage peut faire valoir auprès du titulaire un déséquilibre qu’il n’accepte pas, en particulier si le sous‐traitant est en charge d’exécuter une grosse partie du marché. Mais le rôle du maître d’ouvrage est délicat car il ne fait pas partie du contrat de sous‐traitance.
Le formulaire DC4 est un modèle de déclaration de sous‐traitance pouvant être utilisé par les candidats ou titulaires du marché public ou accord‐cadre pour présenter un sous traitant, ou qui doit l’être lorsque le contrat l’exige, explique la note explicative du ministère de l’Economie.
Depuis peu, il doit être signé par le sous‐traitant, cela permet de vérifier que le titulaire a bien marqué les bons renseignements, les montants etc.
Sous‐traitant de deuxième rang C’est une nouveauté du CCAG travaux de 2009 (art. 3.6). Le CCAG prévoit désormais les conditions dans lesquelles le sous‐traitant de 1er rang va déclarer le sous‐traitant de 2nd rang au maître d’ouvrage, en passant par le titulaire de l’ouvrage. La copie de la caution bancaire garantissant les paiements de son sous‐traitant n’est pas suffisante, le sous‐traitant de 1er rang doit fournir une déclaration du sous‐traitant de 2nd rang. Toutefois, à défaut de délégation de paiement, le maître d’ouvrage s’engage contractuellement à payer le sous‐traitant de 2nd rang. La délégation n’est pas obligatoire. Selon le CCAG, le passage par le titulaire du marché est obligatoire même s’il n’est pas l’entreprise principale pour le sous‐traitant de 2nd rang. II ‐ Le paiement direct des sous‐traitants et le mécanisme de l’action directe Champ d’application résiduelle de l’action directe puisqu’elle n’existe pas dans la loi de 1975 sauf si le sous‐traitant fait moins de 600 euros de travaux. Toutefois, les deux actions, paiement direct et action directe, ne peuvent pas être combinées, même si une partie des travaux n’a pas été payée. Un arrêt récent du Conseil d’Etat le rappelle : 15 novembre 2012, n°354255 : dans cette affaire, le sous‐traitant avait bien été agréé par le maître d’ouvrage. Un acte spécial avait été établi mais pas pour tous les travaux. L’acte spécial plafonne le montant du paiement direct. Au‐delà de ce montant, le maître d’ouvrage ne peut pas payer les sommes réclamées par le sous‐traitant au titre des travaux supplémentaires, non déclarés. Le sous‐traitant s’est donc placé sur le titre III de la loi en espérant se faire payer par le biais de l’action directe au titre des sommes supplémentaires pour lesquelles il n’avait pas été déclaré initialement au maître d’ouvrage. Le maître d’ouvrage a refusé et le juge lui a donné raison. Le sous‐traitant n’a droit au paiement direct que des sommes prévues dans le DC4
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(déclaration de sous‐traitance). Règle sévère pour le sous‐traitant. C’est tout l’intérêt aujourd’hui de la nouvelle disposition qui veut que le sous‐traitant signe l’acte d’agrément : il peut vérifier à ce moment là si la somme déclarée par le titulaire au maître d’ouvrage correspond bien aux travaux qu’on lui sous‐traite. S’il réalise qu’il y a un écart entre le montant de l’acte spécial (agrément) et le contrat de sous‐traitance signé avec l’entreprise principale (titulaire du marché), il lui suffit de refuser de signer et de demander régularisation à l’entrepreneur. Le sous‐traitant doit être vigilant. Si ces travaux supplémentaires interviennent en cours de chantier : le parallélisme des formes impose un acte spécial (déclaration de sous‐traitance) modificatif, qui augmentera le montant du paiement direct. Si le maître d’ouvrage est conscient de l’exécution de travaux supplémentaires par le sous‐traitant, il peut exiger du titulaire qu’il régularise la situation (rôle de gendarme). Ce n’est pas un inconvénient pour le maître d’ouvrage mais une protection pour le sous‐traitant.
Sur la procédure de paiement direct : le sous‐traitant fait sa facturation au nom du titulaire du marché, à charge pour lui de la vérifier et de la transmettre au maître d’ouvrage pour paiement. Il n’est plus possible pour le titulaire de fournir au maître d’ouvrage une simple attestation dans laquelle il s’est engagé à vérifier le montant de la facture du sous‐traitant. Il doit fournir la facturation des sous‐traitants (art. 13.1.7 du CCAG travaux de 2009). Le sous‐traitant, selon l’art. 116 du CMP, devrait même doubler cet envoi par le titulaire, d’un envoi direct auprès du maître d’ouvrage. Mais le paiement direct c’est le paiement du sous‐traitant pour le compte du titulaire car il n’y a pas de contrat entre maître d’ouvrage et sous‐traitant (pb TVA). Le CMP n’est pas clair sur cette question, ce point est expliqué dans la circulaire de 2012 de la DAJ.
Arrêt Conseil d’Etat, 21 février 2011, n°318364 : le titulaire a 15 jours pour vérifier les factures du sous‐traitant. Passé ce délai, si le titulaire n’a pas réagi, son silence vaut acceptation des demandes de paiement du sous‐traitant. Si le maître d’ouvrage n’a pas la preuve que le titulaire a opposé un refus motivé, dans les 15 jours à partir de la réception des pièces par le titulaire, si le sous‐traitant saisit le maître d’ouvrage, ce dernier doit payer. (Considérant de principe) « … le refus que le titulaire opposerait après 15 jours, n’est pas valable ». Possibilité pour le maître d’ouvrage de contrôler que le sous‐traitant a facturé des travaux bien effectués. Combinaison de l’article 8 de la loi de 1975 et l’article 116 du CMP.
III ‐ La responsabilité du maitre d’ouvrage au vu des jurisprudences récentes rendues en ce domaine Régime de protection d’ordre public. Loi de protection du sous‐traitant : c’est le maître d’ouvrage qui a été mis à contribution. Le défaut de déclaration du sous‐traitant au maître d’ouvrage est sanctionnable selon le CCAG. Le marché du titulaire peut être résilié s’il refuse de déclarer son sous‐traitant. Moyens coercitifs à la disposition du maître d’ouvrage qui, s’il laisse faire, commet une faute : JP ancienne du Conseil d’Etat datant de 1980, arrêt Schmidt Valenciennes : le juge considère que la tolérance du MOA qui laisse intervenir un sous‐traitant en connaissance de cause sans exiger du titulaire qu’il déclare son sous‐traitant commet une faute délictuelle engageant sa responsabilité civile. Le CE a limité la responsabilité du maître d’ouvrage au tiers des sommes impayées au sous‐traitant considérant que ce dernier était aussi fautif (en n’exigeant pas lui‐même la mise en place du paiement direct). Le 3ème tiers est à la charge du titulaire mais celui‐ci est rarement présent, dans ce cas, pour répondre de sa faute. Evolution sur la question avec la soumission des marchés publics à l’art. 14‐1 de la loi de 1975 : pose le principe du contrôle par le maître d’ouvrage du respect de cette loi. Dès qu’il a connaissance de la présence sur le chantier d’un sous‐traitant qui n’a pas été déclaré, le maître d’ouvrage doit mettre en demeure le titulaire de régulariser la situation. En 2001, l’article est devenu applicable aux marchés publics. Cela aurait pu amener à un durcissement de la responsabilité du maître d’ouvrage. Pourquoi ? Car l’article 14.1 ne s’impose qu’au maître d’ouvrage, il ne charge que le maître d’ouvrage de régulariser la situation sans donner aucun rôle au sous‐traitant. Si le maître d’ouvrage est
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plusieurs fois sollicité par le sous‐traitant et qu’il ne fait rien, la sanction sera plus sévère estime l’intervenant. La commune avait été très loin dans la connaissance de la présence du sous‐traitant puisqu’il y avait eu un agrément mais ce dernier n’était pas valable, donc le sous‐traitant n’a pas pu bénéficier du paiement direct. Les juges administratifs ont considéré qu’il s’agissait d’une faute encore plus lourde pour le maître d’ouvrage, la commune avait fait croire au sous‐traitant qu’il allait bénéficier du paiement direct. Le titulaire avait cédé ses créances à son banquier (cession de créance), ce qui avait bloqué l’acceptation du sous‐traitant. La commune qui le savait (notification de la banque) aurait dû intervenir pour obliger le titulaire à réduire la cession de façon à permettre la signature régulière de l’acte spécial de sous‐traitance et donc le paiement direct. Il y avait donc une faute aggravée du maître d’ouvrage. Pour la Cour de cassation, le maître d’ouvrage doit indemniser à 100% le sous‐traitant. Il a un devoir d’immixtion dans cette affaire. Le maître d’ouvrage doit être vigilant. L’intervenant informe les participants qu’il existe un nouveau contrat type de sous‐traitance, qui n’est pas obligatoire mais recommandé par la FFB.
Echanges avec la salle : Question : Quelle est la part de responsabilité du maître d’œuvre de la présence d’un sous‐traitant non déclaré ? Réponse : La négligence du maître d’œuvre peut engager la responsabilité du maître d’ouvrage. Il peut établir par exemple des comptes rendus de chantier qui mentionnent le nom du sous‐traitant, qui n’est pas déclaré. Le maître d’œuvre est un peu négligent, car il aurait du se renseigner sur la liste des sous‐traitants agréés, qui doit d’ailleurs être actualisée tout au long du chantier. Mais le maître d’œuvre peut se contenter de prévenir simplement le maître d’ouvrage. S’il donne cette information, il s’exonère de toute faute. Dans le cas contraire, il est négligent. Et le maitre d’ouvrage pourra l’appeler en garantie pour une partie de la condamnation. Il est possible d’insérer dans le contrat de maître d’ouvrage des clauses expresses pour le missionner d’un rôle de surveillance dans ce domaine, mais ce n’est pas automatique. Question : Ce rôle n’est‐il pas celui du représentant CSPS (Coordinateur Sécurité et Protection de la Santé) qui doit tenir des demandes d’accès au chantier pour les personnes intervenant sur le chantier ? Réponse : non. Il ne sera pas en première ligne. Selon la loi, c’est le maître d’ouvrage qui est chargé de faire respecter la loi sur la sous‐traitance. Après, selon les clauses inscrites dans les contrats avec ces prestataires, le maître d’ouvrage aura ensuite un recours facilité contre eux, si jamais sa responsabilité est engagée auprès du sous‐traitant. Conseil d’Etat 23 mai 2011, n°338780 : dans cette affaire, le sous‐traitant bénéficiait du paiement direct. Il y avait un acte spécial de sous‐traitance. Mais le sous‐traitant s’est fait payer par le titulaire du marché. Celui‐ci s’est retourné vers le maître d’ouvrage, qui a refusé de payer son titulaire. Le CE énonce dans cet arrêt que «le sous‐traitant agrée dispose d’un droit au paiement direct par le maître d’ouvrage mais ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le paiement du sous‐traitant soit directement effectué par le titulaire du marché, éteignant ainsi à due concurrence la créance du sous‐traitant sur le maître d’ouvrage». Le maître d’ouvrage doit prévoir et s’assurer du paiement direct, précise l’intervenant. Mais il est intéressant de savoir que le Conseil d’Etat donne la possibilité au titulaire de payer le sous‐traitant qui lui réclame son paiement. Au fond, le sous‐traitant a deux débiteurs : le titulaire et le maître d’ouvrage. Séverin Abbatucci ajoute toutefois que le maître d’ouvrage doit s’assurer du paiement du sous‐traitant par le titulaire grâce à la présentation d’un reçu signé par le sous‐traitant attestant qu’il a bien été payé par le titulaire. Une fois sûr du paiement du sous‐traitant par le titulaire, le maître d’ouvrage peut payer son titulaire.
Clôture de la journée