5
Presses Universitaires du Mirail Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIX e -XX e siècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines) by Fernando DEVOTO; Pilar GONZÁLEZ BERNALDO Review by: Michel BERTRAND Caravelle (1988-), No. 82 (Juin 2004), pp. 288-291 Published by: Presses Universitaires du Mirail Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40854138 . Accessed: 14/06/2014 22:56 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires du Mirail is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Caravelle (1988-). http://www.jstor.org This content downloaded from 91.229.248.111 on Sat, 14 Jun 2014 22:56:15 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXesiècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines)by Fernando

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXesiècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines)by Fernando

Presses Universitaires du Mirail

Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et enFrance, XIX e -XX e siècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines) by FernandoDEVOTO; Pilar GONZÁLEZ BERNALDOReview by: Michel BERTRANDCaravelle (1988-), No. 82 (Juin 2004), pp. 288-291Published by: Presses Universitaires du MirailStable URL: http://www.jstor.org/stable/40854138 .

Accessed: 14/06/2014 22:56

Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at .http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp

.JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range ofcontent in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new formsof scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected].

.

Presses Universitaires du Mirail is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access toCaravelle (1988-).

http://www.jstor.org

This content downloaded from 91.229.248.111 on Sat, 14 Jun 2014 22:56:15 PMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 2: Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXesiècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines)by Fernando

288 C.M.H.L.B. Caravelle

andins de la région de Huencavelica, la mine constitue une voie d'accès à la modernité et un lieu par excellence du métissage.

Cependant, derrière ces rapides changements et ces ruptures vécues avec le passé paysan, ce dernier ne disparaît pas brutalement. C'est ce que révèle l'étude du deuxième thème abordé, relatif à l'univers symbolique du mineur de Julcani. Croyances religieuses et représentations n'évoluent que dans la très longue durée, favorisant inévitablement une confrontation avec la modernité et transformant la mine en espace de métissage. En ce sens, le mineur de Julcani n'est nullement un déraciné social ou économique, ni à proprement parler un prolétaire. Ses liens avec sa communauté paysanne restent très forts, avec des traductions souvent concrètes en termes de revenus complémentaires, de propriétés, ou encore de sociabilités. Il continue à participer à la vie de sa communauté, notamment par le biais du système des charges auquel il contribue. Dans cet entre-deux au sein duquel se situe le mineur, c'est sans réelle surprise que l'on découvre que sa femme occupe une place primordiale : elle joue le rôle essentiel de « pont » entre les deux univers auxquels appartient simultanément le mineur. Enfin, le mineur perçoit lui-même son séjour à la mine comme une contrainte, un sacrifice imposé par la dureté des temps. En ce sens, il n'imagine nullement un avenir semblable pour ses enfants, sans pour autant leur souhaiter de revenir dans la communauté... En d'autres termes, le passage à la mine est vécu comme un moyen d'échapper à la misère paysanne tout en préparant, dans les meilleures conditions possibles, notamment grâce à l'investissement éducatif, l'intégration de la génération suivante au monde urbain.

De ce point de vue, et malgré un fort attachement à son milieu d'origine, le mineur de Julcani contribue à la construction d'une nouvelle identité. Fort de son passé de paysan andin qu'il assume pleinement, il n'en est pas moins porteur d'une nouvelle culture faite d'un savoir technique nouveau et, souvent, d'une conscience politique radicalement autre. C'est proprement d'une culture « chola », c'est-à-dire hybride, que se réclament ces mineurs, comme le souligne l'auteur en reprenant le concept de J. Nash. La condition de mineur-paysan étudiée par Carmen Salazar-Soler constitue ainsi un moment-clé dans la construction d'une identité nouvelle qui accompagne le passage de la condition de paysan à celle de mineur. A l'image de ce qui s'y passait à l'époque coloniale, la mine continue à occuper dans les Andes une place bien particulière : elle constitue, au même titre que l'hacienda pour d'autres régions, un des lieux de prédilection du brassage des populations qui depuis cinq cents ans ont contribué à construire les sociétés et, plus largement, les identités latino-américaines.

Michel BERTRAND Université de Toulouse-Le Mirail

Fernando DEVOTO et Pilar GONZALEZ BERNALDO (coord.).- Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXe siècles.- Paris, L'Harmattan (coll. Recherches et Documents Amériques latines) 2002.- 311p.

C'est trop souvent avec circonspection que le lecteur se saisit d'un livre collectif en raison des inévitables déceptions que sa lecture suscite. Manque de cohérence, inégale qualité des contributions, hétérogénéité des propos et des styles, absence d'une véritable approche collective, mal cachée par une

This content downloaded from 91.229.248.111 on Sat, 14 Jun 2014 22:56:15 PMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 3: Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXesiècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines)by Fernando

Comptes rendus 289

introduction qui relève souvent de l'exploit d'équilibriste... On ne connaît que trop ces critiques couramment adressées à ce type d'ouvrage, ne serait-ce d'ailleurs que pour y avoir soi-même contribué. Aussi est-il important de souligner d'emblée que l'ouvrage coordonné par Fernando Devoto et Pilar Gonzalez Bernaldo échappe en grande partie à la plupart de ces classiques reproches.

Peut-être est-ce dû d'abord au fait que les contributions réunies constituent les premiers fruits d'un programme de recherche mené en commun par des universitaires français et argentins : on y retrouve des problématiques identiques, une réflexion commune, des approches complémentaires, des questionnements voisins, des références partagées, des conclusions enfin qui, sans être nécessairement similaires, ne se répondent pas moins les unes aux autres et révèlent un véritable travail collectif né de la confrontation et du débat. Cependant, à notre sens, la cohérence de l'ensemble est surtout apportée par la remarquable introduction signée par Pilar Gonzalez Bernaldo. Son propos est d'éclairer et de jalonner ce qu'elle baptise comme « un nouveau chantier de recherche », contrat qu'elle remplit ici à la perfection. Sans masquer les diversités qui peuvent exister d'un texte à l'autre, elle met en évidence les points de rencontres devenus l'armature de cette réflexion collective. A commencer d'abord par le parti pris, a priori discutable, d'une démarche comparatiste entre deux pays très dissemblables. Si tous deux ont bien été, dans leur histoire récente ou moins récente, des terres d'accueil pour emigrants, les écarts n'en sont pas moins patents : chronologies des immigrations qui ne se recoupent pas, histoires nationales respectives plus qu'éloignées, positions géographiques radicalement différentes se traduisant en termes d'inégale distance entre le pays de départ et le pays d'accueil. Pourtant, au-delà de ces contextes variables, la comparaison reste pertinente, comme le souligne l'auteur. D'abord et surtout parce que, face à un phénomène flou et vaste comme peut l'être l'émigration, l'ouvrage ne retient que la seule « émigration politique ». Choix délibéré qui place au cœur de cet ouvrage le poids du politique, et notamment l'impact, décisif, des « événements politiques » sur l'immigration. Choix qui impose une réflexion théorique préalable afin de délimiter cette émigration et de la distinguer d'autres processus migratoires de nature différente. Si les divers contributeurs ne partagent pas nécessairement tous la même définition de leur objet d'étude, ils ne s'essayent pas moins à en délimiter les contours même si l'image se brouille plus d'une fois, tant le phénomène à appréhender est complexe et varié. Selon les situations et les moments étudiés, ils oscillent entre deux interprétations extrêmes. Fruit de processus de type macro-historique, l'émigration politique est d'abord liée aux grands événements historiques des époques considérées : crises politiques majeures, guerres civiles, mise en place de régimes autoritaires comme purent l'être au cours du XXe siècle les régimes fasciste et franquiste. En ce sens la comparaison des émigrations politiques espagnole et italienne du siècle dernier vers la France et l'Argentine prend toute sa légitimité.

Dans le même temps, on ne peut exclure de ces déplacements humains la dimension des choix individuels et personnels qui y ont aussi leur part, rendant les comparaisons et les modélisations, compte tenu du léger décalage chronologique de ces exils autant que de la différence radicale entre les pays d'accueil, très aléatoires. C'est à ce titre que, comme le souligne très justement Pilar Gonzalez Bernaldo, les précautions méthodologiques apparaissent comme

This content downloaded from 91.229.248.111 on Sat, 14 Jun 2014 22:56:15 PMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 4: Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXesiècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines)by Fernando

290 C.M.H.LB. Caravelle

indispensables au moment de tenter une ébauche de définition ou de synthèse des réalités de ces émigrations politiques. Celles-ci passent notamment par la prise en compte d'une chronologie très fine, par celle de l'inégale durée de l'émigration et de l'exil qui en découle, ou encore par celle de la permanence, ou de son abandon, de l'engagement politique dans l'exil.

Cette difficile appréhension du phénomène de l'émigration relève aussi de la difficulté à le nommer, et ce d'autant plus que le français et l'espagnol ne recourent pas à des mots réellement équivalents. Au-delà de cette contrainte linguistique propre à une approche comparatiste, l'immigrant politique renvoie à d'autres réalités, et donc à d'autres appellations, qui ont nom « exil », « refuge », « expatriation » voire « étranger ». Or les frontières entre ces divers vocables sont elles-mêmes loin d'être toujours très claires... A ce constat de départ s'ajoute un important facteur aggravant : ces mêmes limites entre les diverses notions évoquées sont elles-mêmes loin d'être stables dans le temps. Quant à la valeur qui leur est accordée, elle varie dans un même pays en fonction des moments historiques traversés. Ici, le recours à la loi comme expression de la norme sociale peut se révéler utile : elle exprime à un moment donné la conception que se construit une société de ces immigrants sans toutefois épuiser toutes les nuances. La prise en compte de ces dernières passe plus largement par la reconstitution des représentations collectives ou des mythes nationaux relatifs à la place que chaque nation prétend accorder à ces victimes de l'arbitraire politique.

Compte tenu de la complexité du phénomène abordé, le changement d'échelle d'observation se révèle alors indispensable. Aux approches globales tendant à appréhender le phénomène dans la durée et dans toute sa diversité, répondent des études de cas fondées soit sur une expérience individuelle, soit sur le recueil de témoignages. Ce faisant, c'est alors à la mémoire de l'exil que s'attachent les auteurs en donnant directement la parole aux acteurs eux-mêmes. Surgissent alors d'autres regards sur cet exil politique, qui s'attachent à souligner les contraintes subies, les conditions d'accueil -ou leur absence... -, l'inégale présence de nationaux dans la terre d'exil, l'insertion plus ou moins rapide, le maintien de solidarités de natures diverses - culturelles, régionales, mutualistes voire syndicales ou politiques. . .

A partir de cette grille de lecture et d'analyse, l'ouvrage est construit de manière strictement symétrique : quatre contributions portant sur les exils italiens, tant en France qu'en Argentine, au moment du fascisme ; six contributions relatives à l'émigration politique espagnole dans l'un et l'autre des pays considérés entre la fin du XIXe siècle et la période franquiste. Si l'intérêt personnel a orienté notre lecture davantage vers la partie ibérique, on ne s'étonne pas moins, dans celle relative à l'Italie, de l'absence de toute référence aux importants travaux de L. Teulière sur ce sujet. Parmi les textes relatifs à l'exil espagnol, trois retiennent plus particulièrement l'attention. Le premier n'est autre que le témoignage, remarquable de sensibilité, de pudeur et d'intelligence, fourni par Nicolas Sánchez Albornoz. Reconstituant son propre itinéraire de fils d'un ambassadeur de la République devenu quelques années plus tard président de son gouvernement en exil, il témoigne du parcours d'un adolescent pris dans le maelstrom consécutif à l'éclatement de la guerre civile espagnole. Parlant d'expérience, il souligne la complexité de l'exil pour celui-là même qui le vit : au point d'évoquer « ses exils au pluriel, car une seule personne peut en accumuler plus d'un », ainsi que la difficulté à se situer soi-même, le temps passant, entre

This content downloaded from 91.229.248.111 on Sat, 14 Jun 2014 22:56:15 PMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

Page 5: Emigration politique, une perspective comparative, Italiens et Espagnols en Argentine et en France, XIXe-XXesiècles. (coll. Recherches et Documents Amériques latines)by Fernando

Comptes rendus 291

les statuts de réfugié, d'exilé ou d'immigrant. Aussi, parvenu au terme de ses pérégrinations entre Espagne, France, Argentine et Etats-Unis, s'interroge-t-il : « Qu'étais-je devenu à ce moment-là ? Pour les autorités américaines, j'étais un immigrant tout court et pour l'Espagne, un ressortissant indésirable auquel elle accordait finalement un passeport. Mais pour moi-même, je continuais d'être fièrement un réfugié républicain doublé d'un exilé argentin ».

La réflexion de Geneviève Dreyfus-Armand s'attache précisément à mesurer la place occupée par les républicains espagnols en France. A la lire, on comprend que le facteur déterminant dans cette analyse n'est autre que la durée, trans- formant les réfugiés en exilés. Cette transformation ne se fit pas sans douleur, ne serait-ce qu'en raison des années noires que constituent celles du gouvernement de Vichy. Pourtant c'est bien en vertu de l'impossibilité du retour, en raison de la permanence du régime franquiste, que va se structurer cet exil espagnol en France, oscillant entre intégration réussie et permanence identitaire.

La mise en parallèle de cette analyse avec celle proposée par Dora Schwarzstein relative à l'exil espagnol en Argentine est particulièrement éclairante. A la différence de la situation antérieure, la communauté se constitue tardivement, étant plus nombreuse en 1990 qu'en 1940 ! L'auteur souligne par ailleurs la spécificité de cette immigration dans un pays où la présence d'une forte communauté hispanique change radicalement les données par rapport à la situation française. Cela se traduit par un accueil actif de la part de la société argentine alors que l'Etat se révèle bien plus réticent. Cette réserve est à mettre en parallèle avec l'attitude plus qu'ambiguë du péronisme face à ces républicains fuyant un régime dont il partage nombre des valeurs... Enfin, l'héritage colonial alimentant une forte méfiance vis-à-vis de ces nouveaux gachupines, on se sur- prend à peine de la difficile intégration de ces immigrants à la société argentine.

Au vu des grandes qualités scientifiques de l'ouvrage, le lecteur ne peut que regretter une relecture trop approximative et sans doute rapide du manuscrit ayant laissé passer entre les mailles des correcteurs ou autres relecteurs de la maison d'édition quelques coquilles qu'il était souvent facile d'éviter. Certaines, évoquant les « parties politiques » (p. 258) ou encore « les quatre coins de l'hexagone » (p. 240) relèvent de la plaisanterie de potache. D'autres, comme celle transformant les camps d'internement du sud-ouest français en « camps de concentration » (p. 250) franchissent la ligne jaune - ou blanche ! - de l'erreur historique. Certes, le mot a bien été employé en 1939 pour qualifier les camps d'internements des réfugiés républicains, comme le rappelle l'excellent No pasarân, album souvenir, de Henri François Imbert. Cependant, les mots aussi ont une histoire : faire comme si l'expression « camp de concentration » n'évoquait pas aujourd'hui une autre réalité, bien plus tragique, qu'elle soit nazie, stalinienne ou « polpotienne », c'est perdre de vue la nécessaire mise en perspective de la connaissance historique. Bien plus, c'est risquer de contribuer à la banalisation des génocides étroitement associés à ces camps qui sont la marque indélébile des totalitarismes du XXe siècle. Au final, et malgré ces réserves de forme, cet excellent ouvrage collectif ne se révèle pas moins être un parcours réussi parmi les réalités diverses, complexes, souvent douloureuses et néanmoins passionnantes de l'exil politique au cours du XXe siècle.

Michel BERTRAND Université de Toulouse-Le Mirail

This content downloaded from 91.229.248.111 on Sat, 14 Jun 2014 22:56:15 PMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions