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47 Revue Marocaine de Rhumatologie L’association d’un souffle cardiaque et d’une fièvre fait toujours évoquer une endocardite infectieuse. Nous rapportons un cas clinique dont l’évolution nous a poussé à redresser le diagnostic de l’étiologie infectieuse de l’endocardite. OBSERVATION Une jeune femme de 26 ans, enceinte de 14 semaines d’aménorrhée (SA), ayant comme antécédent deux fausses couches survenues au premier trimestre des grossesses et sans facteur de risque cardio-vasculaire connu, était hospitalisée en gynécologie pour fièvre à 39 °C, douleur abdominale avec vomissements bilieux et une altération de l’état général. Elle rapportait une dyspnée stade II de la NYHA évoluant depuis 01 mois et un phénomène de Raynaud des doigts. Elle n’y avait pas de notion de palpitations, de perte de connaissance ni de douleurs thoracique. L’examen clinique trouvait une tension artérielle à 128/72 mm Hg, une fréquence cardiaque à 94 bpm, un souffle Endocardite multi embolique : et si ce n’est pas infectieux ? Multiple embolisms in endocarditis : what if it is not infective ? Ali Chaib 1 , Jaouad Benameur 1 , Maha Raissouni 2 , Fatima Zahra Miftah 2 , Ali Abouzahir 3 , Jamal Kheyi 1 , Hicham Bouzelmat 1 , Abdelhamid Moustaghfir 1 1 Service de Soins Intensifs et Rythmologie, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat - Maroc 2 Service d’explorations non invasives, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat - Maroc. 3 Service de Médecine Interne, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat - Maroc. Rev Mar Rhum 2013; 23: 47-51 Correspondance à adresser à : A. Chaib Email : [email protected] Résumé L’origine infectieuse est l’étiologie la plus fréquente des endocardites. Cependant, les autres causes devraient être évoquées quand l’évolution sous antibiothérapie est atypique Nous rapportons le cas d’une jeune patiente, enceinte, admise initialement pour suspicion d’endocardite infectieuse associant fièvre et végétation mitrale. Les hémocultures négatives, l’évolution défavorable, la survenue d’accidents thromboemboliques multiples et les résultats du bilan immunologique ont conduits au diagnostic d’endocardite de Libman-Sacks dans le cadre d’un syndrome catastrophique des antiphospholipides. Malgré un traitement par bolus de corticothérapie, l’évolution était fatale. A travers cette observation, nous discutons les aspects cliniques, diagnostiques, pronostiques et les options thérapeutiques que requiert l’endocardite de Libman-Sacks en comparaison avec l’endocardite infectieuse. Mots clés : endocardite de Libman-Sacks, syndrome catastrophique des antiphospholipides, endocardite non infectieuse ; embolies multiples. Abstract The infectious origin is the most common etiology of endocarditis. However, other causes should be raised when the evolution under antibiotic treatment is atypical. We report the case of a young pregnant patient, admitted for suspected infective endocarditis with fever and mitral vegetation. The negative blood cultures, unfavorable evolution, the occurrence of thromboembolic events and the results of multiple immunological investigations led to the diagnosis of Libman-Sacks endocarditis in the context of catastrophic antiphospholipid syndrome. Despite treatment with corticosteroids bolus, evolution was fatal. Through this observation, we discuss the clinical, diagnostic, prognostic and therapeutic options that Libman-Sacks endocarditis requires compared with infective endocarditis. Key words : Libman-Sacks endocarditis, catastrophic antiphospholipid syndrome, non infective endocarditis, multiple embolisms. CAS CLINIQUE Disponible en ligne sur www.smr.ma

Endocardite multi embolique : et si ce n’est pas infectieux · dyspnée stade II de la NYHA évoluant depuis 01 mois et un phénomène de Raynaud des doigts. Elle n’y avait pas

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CAS CLINIQUE

L’association d’un souffle cardiaque et d’une fièvre fait toujours évoquer une endocardite infectieuse. Nous rapportons un cas clinique dont l’évolution nous a poussé à redresser le diagnostic de l’étiologie infectieuse de l’endocardite.

ObSErvAtION

Une jeune femme de 26 ans, enceinte de 14 semaines d’aménorrhée (SA), ayant comme antécédent deux fausses couches survenues au premier trimestre des

grossesses et sans facteur de risque cardio-vasculaire connu, était hospitalisée en gynécologie pour fièvre à 39 °C, douleur abdominale avec vomissements bilieux et une altération de l’état général. Elle rapportait une dyspnée stade II de la NYHA évoluant depuis 01 mois et un phénomène de Raynaud des doigts. Elle n’y avait pas de notion de palpitations, de perte de connaissance ni de douleurs thoracique.

L’examen clinique trouvait une tension artérielle à 128/72 mm Hg, une fréquence cardiaque à 94 bpm, un souffle

Endocardite multi embolique : et si ce n’est pas infectieux ?Multiple embolisms in endocarditis : what if it is not infective ?

Ali Chaib1, Jaouad Benameur1, Maha Raissouni2, Fatima Zahra Miftah2,Ali Abouzahir3, Jamal Kheyi1, Hicham Bouzelmat1, Abdelhamid Moustaghfir1

1 Service de Soins Intensifs et Rythmologie, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat - Maroc

2 Service d’explorations non invasives, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat - Maroc.

3 Service de Médecine Interne, Hôpital Militaire Mohammed V, Rabat - Maroc.

Rev Mar Rhum 2013; 23: 47-51

Correspondance à adresser à : A. ChaibEmail : [email protected]

résuméL’origine infectieuse est l’étiologie la plus fréquente des endocardites. Cependant, les autres causes devraient être évoquées quand l’évolution sous antibiothérapie est atypique

Nous rapportons le cas d’une jeune patiente, enceinte, admise initialement pour suspicion d’endocardite infectieuse associant fièvre et végétation mitrale.

Les hémocultures négatives, l’évolution défavorable, la survenue d’accidents thromboemboliques multiples et les résultats du bilan immunologique ont conduits au diagnostic d’endocardite de Libman-Sacks dans le cadre d’un syndrome catastrophique des antiphospholipides.

Malgré un traitement par bolus de corticothérapie, l’évolution était fatale. A travers cette observation, nous discutons les aspects cliniques, diagnostiques, pronostiques et les options thérapeutiques que requiert l’endocardite de Libman-Sacks en comparaison avec l’endocardite infectieuse.

Mots clés : endocardite de Libman-Sacks, syndrome catastrophique des antiphospholipides, endocardite non infectieuse ; embolies multiples.

AbstractThe infectious origin is the most common etiology of endocarditis. However, other causes should be raised when the evolution under antibiotic treatment is atypical.

We report the case of a young pregnant patient, admitted for suspected infective endocarditis with fever and mitral vegetation.

The negative blood cultures, unfavorable evolution, the occurrence of thromboembolic events and the results of multiple immunological investigations led to the diagnosis of Libman-Sacks endocarditis in the context of catastrophic antiphospholipid syndrome.

Despite treatment with corticosteroids bolus, evolution was fatal. Through this observation, we discuss the clinical, diagnostic, prognostic and therapeutic options that Libman-Sacks endocarditis requires compared with infective endocarditis.

Key words : Libman-Sacks endocarditis, catastrophic antiphospholipid syndrome, non infective endocarditis, multiple embolisms.

CAS CLINIQUEDisponible en ligne sur

www.smr.ma

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d’insuffisance mitrale à 3/6, sans signes d’insuffisance cardiaque. Les pouls étaient présents et symétriques sans souffle vasculaire. L’examen cutané trouvait des nécroses au niveau des pulpes des doigts. L’Electrocardiogramme inscrivait un rythme régulier sinusal sans trouble de la repolarisation. La radiographie du thorax n’a pas été faite à cause de la grossesse.

La présence de fièvre associée au souffle d’insuffisance mitrale conduisait à la réalisation d’une échocardiographie trans-thoracique puis trans-oesophagienne, qui objectivaient une végétation sur le bout distal de la grande valve mitrale mesurant 8 mm (Fig. 1 et 2) avec une insuffisance mitrale grade II, des cavités gauches légèrement dilatées avec une fraction d’éjection conservée et un épanchement péricardique de faible abondance. L’échographie abdominale montrait des signes en faveur d’un infarctus splénique.

Biologiquement, on notait un syndrome inflammatoire avec une CRP à 23mg/l et une VS à 54 mm./1ère

h. L’hémogramme montrait une anémie à 8.8g/dl

normocytaire, arégénérative, sans thrombopénie, des leucocytes à 7400/ml dont 4600/mm3 de PNN et 2300/mm3 de lymphocytes. Il existait une insuffisance rénale modérée avec une créatinine à 20 mg/l (clairance de créatinine à 49,12 ml/min).

Le diagnostic d’une endocardite infectieuse multi embolique était évoqué devant l’infarctus splénique et les lésions cutanées prises pour des emboles septiques. Une antibiothérapie probabiliste par Amoxicilline 200mg/kg/j et gentamycine 160mg/j était alors débutée après avoir réalisé des hémocultures. L’évolution initiale était marquée par la survenue brutale de trouble de la conscience avec hémiparésie gauche. La TDM cérébrale objectivait un accident vasculaire cérébrale ischémique parieto-temporal droit avec des signes de transformation hémorragique (Fig. 3).

Le bilan infectieux montrait des hémocultures négatives même après une mise en culture de plus de 07 jours et même pour les germes du groupe HACEK (Haemophilus parainfluenzae, H. aphrophilus, H. paraprophilus, Actinobacillus actinomycetemcomitans, Cardiobacterium hominis, Eikenella corrodens et Kingella kingae). Les sérologies de Coxiella burnetti, Chlamydia, légionelles, et brucelles étaient négatives. Par ailleurs, on notait une fausse sérologie syphilitique avec VDRL positif et TPHA négative. Le bilan immunologique confirmait la présence à des taux élevés des anticorps anticardiolipines (ACL) IgG à 186UGPL (normal < 20), et des anticorps anti-

Figure 1 et 2 : ETT et ETO : présence de végétations sur le bout distal de la grande valve mitrale et sur la paroi de l’OG en regard de l’insertion de la petite valve mitrale. ETT : échocardiographie transthoracique. ETO : échocardiographie transoesophagienne. OG : oreillette gauche)

Figure 3 : TDM cérébrale : plage hypo-dense temporo-frontale droite exerçant un léger effet de masse, et discrets signes d’infarcissement hémorragique.

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ß2GP1 à 80 UGPL (normal < 20). Les Ac antinucléaires et anti-ADN natifs étaient négatifs tout comme les anti cytoplasmes des neutrophiles (ANCA). Le complément sérique était normal. Le diagnostic d’un syndrome des antiphospholipides avec endocardite de Libman-Sacks était alors retenu.

Au plan thérapeutique, la présence d’accident vasculaire cérébral n’avait pas permis l’administration de traitement anticoagulant. La corticothérapie était initiée par un bolus quotidien de 1g de methyprednisolone pendant 03 jours, relayée par 60 mg/j de prednisone. L’évolution s’était aggravée par la survenue successivement d’un avortement spontané, puis d’une ischémie aigue du membre inferieur droit entrainant l’amputation de la jambe après échec du traitement endoluminale. Un syndrome catastrophique des antiphospholipides était alors fortement évoqué. La patiente décéda dans les suites d’une pneumopathie sévère compliquée d’un choc septique.

DISCUSSION

L’endocardite non infectieuse (ENI) est une situation clinique peu fréquente et rarement évoquée notamment sous des cieux ou la valvulopathie rhumatismale est une pathologie courante. La prévalence des ENI sur l’ensemble des endocardites est de 5% [1]. En présence de végétation valvulaire à l’échocardiographie, le diagnostic de l’ENI devra être évoqué lorsqu’au moins trois hémocultures sont négatives même après une mise en culture pendant 07 jours et les bilans sérologiques sont non contributifs[1]. Autre argument qui pourrait suggérer l’ENI est l’aggravation de l’état clinique, biologique (inflammatoire) ou échocardiographique malgré l’antibiothérapie [1, 2].

Le syndrome des anti phospholipides ( SAPL) associé ou non au lupus systémique est la cause la plus fréquente des ENI réalisant la classique endocardite de Libman-Sacks (ELS). D’autres causes ont été décrites comme l’endocardite fibroblastique de Loefller ou l’endocardite marastique associée à un cancer[1].

Le syndrome des antiphospholipides (SAPL) est défini, selon les critères de Sapporo[3] modifiées à Sydney en 2006[4], par l’association de manifestations thromboemboliques ou obstétricales et d’anticorps antiphospholipides durables (anticoagulant circulant de type lupique, anticorps anticardiolipine IgG ou IgM à titre moyen ou élevé ou anticorps anti-β2 glycoprotéine de type 1 IgG ou IgM) sur au moins deux prélèvements espacés de plus de 12 semaines4. Chez notre patiente, il existe la notion de deux fausses couches, la notion de thrombose vasculaire

et la découverte d’ACL dans le sang (en plus de la fausse sérologie syphilitique). Dans notre observation, le décès de la patiente ne nous a pas permis de réaliser une nouvelle recherche d’AC pour confirmer leur caractère durable.

Les autres manifestations possibles lors du SAPL sont cutanées, neurologiques, hématologiques (thrombopénie et anémie hémolytique), surrénaliennes ou cardiaques[5]. L’atteinte cardiaque peut intéresser l’endocarde, le péricarde, les artères coronaires et moins fréquemment le myocarde. L’atteinte valvulaire est la plus fréquente et intéresse plus fréquemment la valve mitrale. Elle est, comme chez notre patiente, plus souvent fuyante que sténosante. Elle est typiquement pauci symptomatique, mais peut être à l’origine de complications graves : événements thromboemboliques, surinfections bactériennes, fuite valvulaire pouvant entrainer une insuffisance cardiaque [6, 7]. L’ELS est une atteinte classique du SAPL. Sa prévalence serait autour de 40% parmi les patients lupiques [8].

L’ELS a été décrite en 1924 comme une déformation valvulaire atypique verruqueuse et stérile chez des patients qui étaient atteints de lupus[9]. L’association entre l’ELS et SAPL a été pour la première fois notée en 1985 chez des jeunes patientes avec anticoagulant lupique circulant [10].

La pathogénie exacte de l’ELS est encore incertaine. Il est supposé que le mécanisme initiateur est un phénomène auto-immun : les AC anti phospholipides (APL) favoriseraient la formation de thrombi fibrino-plaquettaires sur l’endothélium dont l’organisation entraine un épaississement diffus des valves, la formation de végétations et ultérieurement une dysfonction valvulaire [11]. Les APL sont des anticorps reconnaissant les phospholipides membranaires. Ces derniers interviennent dans les mécanismes régulateurs de la coagulation ce qui explique les conséquences thromboemboliques[12]. L’atteinte péricardique parait moins fréquente, les premières séries ont estimées sa prévalence autour de 20%[13].

Le diagnostic de l’ELS est difficile à distinguer de l’endocardite infectieuse [14] ou des tumeurs intracardiaques. Elles ont en commun plusieurs manifestations cliniques : aspect de végétation à l’échocardiographie, signes inflammatoires, lésions cutanées et atteinte rénale [15]. Cependant, en cas d’ENI, Les végétations sont souvent de petite taille, le syndrome inflammatoire est moins marqué par rapport à l’EI ( taux de leucocytes et CRP moins élevés)[2] , les hémocultures sont négatives et les taux des AC sont élevés. A l’échocardiographie, les végétations semblent échodsenses à bord irrégulier, solidement attachées à la surface des valves et sans mouvement indépendant [14, 16].

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Les lésions cutanées, comme c’est le cas pour notre patiente, peuvent être trompeuses et évoquer des emboles septiques au lieu de lésions en rapport avec la vascularite [15]. Il peut s’agir de gangrènes digitales qui peuvent être révélatrices du SAPL et engagent le pronostic vital lorsqu’elles sont extensives. Nous n’avons pas trouvé de livédo qui est une manifestation cutanée fréquente mais non pathognomonique du SAPL.

Le pronostic du SAPL a nettement été amélioré par les progrès thérapeutiques apportés par les immunosuppresseurs et les anticoagulants. Cependant, en absence du traitement adéquat, plusieurs complications sont à craindre. La présence d’APL est un facteur de risque de maladie veineuse thromboembolique et de survenue d’AVC et d’IDM. La présence d’atteinte valvulaire est elle-même associée à un risque élevé de survenue de thromboses artérielles et d’événements emboliques cérébraux [17]. Notre patiente a présenté en plus de l’atteinte valvulaire, des accidents vasculaires ischémiques cérébral et périphérique, une dysfonction rénale et des lésions cutanées sévères. La succession de ces événements fait penser à un syndrome catastrophique des antiphospholipides comme il a été décrit par Asherson en 2003 et est de plus mauvais pronostic [18]. La grossesse a dû précipiter l’évolution fatale de ce SAPL méconnue chez cette patiente [19].

Le traitement de l’ELS est également un challenge. Dans les formes sévères, la prise en charge est tributaire d’un diagnostic précoce et d’un traitement agressif pour éviter une évolution rapidement fatale [20]. Les corticoïdes accélèrent la cicatrisation de la lésion myocardique auto-immune en réduisant l’inflammation et l’activité de la maladie [6,13] mais peut aggraver une infection bactérienne et sont donc non recommandées en cas de suspicion d’EI.

Le risque thromboembolique élevé impose une prévention à long terme par une anti coagulation à doses thérapeutiques ou l’INR doit être entre 3 et 3,5 en cas de thrombose artérielle [5]. La survenue de complications hémorragiques comme c’est le cas pour notre patiente, peut en limiter la prescription et donc exposer les patients à plus de risque thromboembolique [11].

En cas de dysfonction valvulaire avec retentissement hémodynamique important, le contrôle peut se faire par un traitement conservateur : immunosuppresseurs, anticoagulants, et le traitement spécifique de l’insuffisance cardiaque (diurétiques, bêtabloqueurs et IEC) [16]. L’utilité de la prophylaxie de l’endocardite reste controversée

[14]. Si le tableau est sévère et réfractaire, la correction chirurgicale s’impose. Le SAPL est la cause auto-immune la plus fréquente d’ENI ayant nécessité un remplacement valvulaire [12]. La plastie est préférée chaque fois qu’elle est possible [7]. Quand le remplacement valvulaire est inévitable, le choix entre une bio prothèse ou une prothèse mécanique dépendra de l’âge du patient, de ses souhaits et, chez la femme, du désir de procréer. Il est à rappeler qu’en cas de LES, le risque de calcification de la bio prothèse doit être pris en considération et l’anti coagulation peut s’avérer nécessaire. De ce fait, une prothèse mécanique peut assurer de meilleurs résultats pour les valvulopathies mitrales dues à l’ELS [7, 14].

CONCLUSION

Le diagnostic d’endocardite non infectieuse doit être évoqué quand l’évolution est atypique sous antibiothérapie. Malgré quelques similitudes cliniques et échocardiographiques, l’endocardite de Libman-Sacks est une forme clinique particulière dont l’évolution peut être fatale quand le diagnostic et surtout le traitement n’est pas instauré précocement.

CONfLItS D’INtérêtS

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt.

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