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Institut Régional de Formation aux Métiers de la Rééducation et de la Réadaptation des Pays de la Loire 54, rue de la Baugerie 44230 Saint Sébastien sur Loire Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques concernant l’efficacité de la reprogrammation sensori-motrice dans la prise en charge d’un patient non opéré atteint d’instabilité passive de l’épaule : revue de littérature théorique et pratique Laure PECQUEUX Travail Ecrit de Fin d’Etudes En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute Année scolaire : 2012-2013 REGION DES PAYS DE LA LOIRE

Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

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Page 1: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

Institut Régional de Formation aux Métiers de la Rééducation et de la

Réadaptation des Pays de la Loire

54, rue de la Baugerie

44230 Saint Sébastien sur Loire

Etat des lieux des connaissances masso-

kinésithérapiques concernant l’efficacité de la

reprogrammation sensori-motrice dans la

prise en charge d’un patient non opéré atteint

d’instabilité passive de l’épaule : revue de

littérature théorique et pratique

Laure PECQUEUX

Travail Ecrit de Fin d’Etudes

En vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithérapeute

Année scolaire : 2012-2013

REGION DES PAYS DE LA LOIRE

Page 2: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

Résumé

L’épaule est un complexe articulaire ambivalent facilement exposé aux épisodes

luxants. On retrouve de nombreux cas de luxations ou de subluxations chez des sujets jeunes

pratiquant des sports de contacts ou de lancers.

Cette revue de littérature a pour but d’exposer les conséquences anatomo-

physiologiques de l’instabilité d’épaule et se penche sur l’intérêt neurophysiologique de la

reprogrammation sensori-motrice. La mise en lien des données théoriques et pratiques

optimisera le retour à une vie quotidienne et sportive sans récidive, chez des patients n’ayant

pas subi de chirurgie.

Mots Clés / Keywords

épaule instable / shoulder instability

système sensori-moteur / sensorimotor system

proprioception / proprioception

contrôle neuromusculaire / neuromuscular control

rééducation / rehabilitation

Page 3: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

Sommaire

Introduction ......................................................................................................................... 1 1

Les éléments anatomiques permettent la stabilité active et passive du complexe de 2

l’épaule ....................................................................................................................................... 2

2.1 Les éléments de stabilité de l’épaule ........................................................................... 2

2.1.1 La stabilité passive du complexe ..................................................................................... 2

2.1.2 Les muscles péri-articulaires permettent une stabilisation active et dynamique du

complexe de l’épaule ...................................................................................................................... 3

2.2 Le premier facteur d’instabilité de l’épaule : les altérations anatomiques .................. 3

Pathophysiologie de l’épaule instable passivement ............................................................ 4 3

3.1 Les différentes orientations de l’instabilité d’épaule ................................................... 4

3.1.1 L’instabilité antérieure .................................................................................................... 4

3.1.2 L’instabilité postérieure ................................................................................................... 7

3.1.3 L’instabilité multidirectionnelle ....................................................................................... 8

3.2 Distinguer la laxité articulaire pathologique de l’épaule instable passivement et la

laxité articulaire physiologique .............................................................................................. 8

Le système sensori-moteur permet la coordination des éléments de stabilité active .......... 9 4

4.1 Les éléments du système sensori-moteur permettent une coordination dynamique,

facteur de stabilité .................................................................................................................. 9

4.1.1 Les afférences proprioceptives sont le point de départ du système sensori-moteur .. 10

4.1.2 L’intégration du message proprioceptif ........................................................................ 13

4.1.3 Le contrôle neuromusculaire comme réponse motrice efférente à l’intégration de

l’information proprioceptive ......................................................................................................... 15

4.2 Les limites du système sensori-moteur : sources d’instabilité .................................. 16

4.2.1 Influence de la fatigue musculaire sur le système sensori-moteur .............................. 16

4.2.2 Les déficits sensori-moteurs dans l’épaule instable passivement ................................ 16

Place du traitement fonctionnel : influence des éléments anatomo-physiologiques sur la 5

prise en charge sensori-motrice d’une épaule instable passivement ........................................ 19

5.1 Les intérêts et les inconvénients du traitement conservateur par rapport au traitement

chirurgical ............................................................................................................................. 19

5.2 Objectifs et principes de la rééducation sensori-motrice : justifications grâce aux

données anatomo-physiologiques énoncées ......................................................................... 21

5.2.1 Objectifs de prise en charge : ........................................................................................ 21

5.2.2 Principes de prise en charge et éléments de progression en rééducation sensori-

motrice………….. ............................................................................................................................. 21

5.3 Moyens thérapeutiques .............................................................................................. 22

Page 4: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

5.3.1 Position de stabilité articulaire maximale (PSAM) et reproduction de position ........... 22

5.3.2 Reproduction de force ................................................................................................... 23

5.3.3 Stabilisations rythmiques .............................................................................................. 23

5.3.4 Chaine cinétique ouverte et chaine cinétique fermée .................................................. 24

5.3.5 Les plans instables ......................................................................................................... 26

5.3.6 Le travail pliométrique .................................................................................................. 26

5.4 Intégration du geste sportif dans la rééducation de l’épaule instable ........................ 28

Discussion ......................................................................................................................... 28 6

Conclusion ........................................................................................................................ 30 7

Page 5: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

1

Introduction 1

La démarche réflexive de ce travail écrit de fin d’études fait suite à une pratique

personnelle d’un sport de lancer et de contacts dans lequel la pathologie de l’épaule instable

passive est très répandue. Les difficultés importantes rencontrées par les personnes souffrant

d’instabilités et souhaitant reprendre une activité optimale m’a interrogée et plus

particulièrement leur appréhension et leur gène quotidienne. Je me suis alors documentée afin

de mieux en comprendre la complexité de l’atteinte. Différentes lectures m’ont amenée à

m’intéresser à la rééducation sensori-motrice, très utilisée en kinésithérapie mais à la fois si

complexe.

L’épaule est un complexe composé de cinq articulations devant allier deux fonctions

contradictoires que sont la stabilité et la mobilité. En effet, elle permet l’orientation du

membre supérieur dans l’espace, les mouvements balistiques à grandes vitesses, les

mouvements de tractions et de poussées… Lorsque cette articulation est stable, la tête

humérale est alignée avec la fosse glénoïdienne et la résultante des forces est centrée. Cet

alignement articulaire se traduit par un équilibre des contraintes dynamiques (forces

développées par les muscles péri-articulaires) et mécaniques (système capsulo-ligamentaire).

A la différence d’une épaule « saine », l’instabilité se traduit par un déplacement

exagéré de la tête humérale dans la cavité glénoïde ou une lésion des structures péri-

articulaires. Nous pouvons alors nous demander quels sont les mécanismes lésionnels et les

facteurs favorisants ? Quel type de public est préférentiellement touché et pour quelles

raisons ? Pourquoi existe-t-il une notion de chronicité et de récidive ? Comment l’éviter ? A

quoi cette pathologie fait-elle référence d’un point de vue anatomique ou biomécanique ?

Comment confirmer ou réaliser le diagnostic clinique ? Quelles peuvent être les complications

à plus ou moins long terme ?

L’ambivalence de cette articulation nécessite une coordination parfaite des éléments

de stabilité rendue possible grâce au système sensori-moteur. A quoi cette notion fait-elle

référence ? À quoi correspond-elle d’un point de vue anatomique et physiologique ? Quels

sont les liens que l’on peut faire entre ces éléments théoriques et pratiques ? Quelle influence

la rééducation sensori-motrice peut-elle avoir sur la pathologie de l’épaule instable ? Peut-elle

permettre de diminuer le risque de récidives ? Que peut-elle apporter par rapport à une

stabilisation chirurgicale ? Quels sont les outils dont dispose le kinésithérapeute ?

A partir de différentes recherches dans les bases de données pubmed, science direct, em-

consulte et refdoc, l’objectif de ce travail écrit sera de répondre à une problématique globale

issue des questionnements précédents : Quels sont les liens et les données probantes de la

reprogrammation sensori-motrice dans la rééducation de l’épaule instable

passivement ? Pour cela, seront donc évoqués en premier lieu les éléments qui permettent la stabilité

d’une épaule. De ces bases anatomiques découleront les raisons de l’instabilité d’épaule

passive avec une description théorique de la pathologie. En complément, la neurophysiologie

du système sensori-moteur sera également évoquée afin d’expliquer la nécessité d’une

coordination entre éléments passifs et dynamiques. Enfin, il sera abordé, à partir d’une mise

en lien des données précédentes et de la littérature, l’aspect rééducatif d’une épaule instable

passive non opérée.

Il sera souligné que les instabilités récidivantes de l’adolescent hyperlaxe et du sujet âgé

seront exclues de cet écrit. Aussi, la rééducation sensori-motrice post opératoire ne sera pas

développée ainsi que la prise en charge immédiate après le traumatisme.

Page 6: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

2

Les éléments anatomiques permettent la stabilité active et passive du 2complexe de l’épaule

L’épaule est une articulation très ambivalente qui nécessite mobilité et stabilité. Elle a

pour but de placer le membre supérieur dans un secteur de fonction pour la main.

2.1 Les éléments de stabilité de l’épaule

2.1.1 La stabilité passive du complexe

2.1.1.1 L’alignement osseux, élément relatif de stabilité L’épaule est une articulation complexe composée de cinq

articulations intimement liées dans leur fonctionnement : l'acromio-

claviculaire (1), la sterno-claviculaire (2), l'omo-serrato-thoracique (3), la

scapulo-humérale (4) et l’articulation sous deltoïdienne (5) (figure 1).

L’articulation scapulo-humérale met en contact la glène et la tête humérale

dont les surfaces articulaires sont très inégales. En effet, le diamètre de la

tête est quasiment le double de celui de la cavité. Aussi, la congruence

articulaire est meilleure dans le sens cranio-caudal avec une forme en poire

de la glène. Enfin, le cartilage articulaire au centre de la gléno-humérale est

fin et s’élargit en périphérie (1).

2.1.1.2 Le bourrelet glénoïdien ou labrum Le bourrelet glénoïdien est un fibrocartilage qui augmente la profondeur de la cavité

glénoïdale de 2,5 à 5 mm en moyenne. Il joue donc un rôle important dans la stabilité de

l’épaule en augmentant la congruence articulaire mais également en améliorant l’étanchéité

articulaire (cet élément prendra tout son sens lors de l’explication de la pression articulaire

négative). Selon Bleton (1), le bourrelet diminuerait la translation latérale de 20%. Dans la

partie inférieure du labrum s’insère le complexe capsulo-ligamentaire : on parle d’un véritable

verrou à l’armé du bras (1) (2) (3).

2.1.1.3 La capsule articulaire La capsule articulaire de l’articulation gléno-humérale unit la scapula et l’humérus.

Elle est lâche et se compose de plusieurs culs de sac permettant la mobilité. De plus, elle

adhère à la face périphérique du bourrelet et contient des mécanorécepteurs (1) (2).

2.1.1.4 Le ligament gléno-huméral Trois faisceaux sont distingués : le ligament gléno-huméral

supérieur (LGHS), le ligament gléno-huméral moyen (LGHM) et le

plus important le ligament gléno-huméral inférieur (LGHI) (figure 2).

Ceux-ci ne se mettent en tension que dans les amplitudes extrêmes de

l’épaule. Pour le LGHI, deux faisceaux se distinguent, un antérieur et

un postérieur. En effet, en position d’armé de bras, le faisceau

postérieur limite la luxation inférieure et l’antérieur la luxation de

même sens. En ce qui concerne la rotation interne, le faisceau

postérieur limite alors la luxation de même sens et l’antérieur la

luxation inférieure (1) (2) (3).

2.1.1.5 La pression articulaire négative A l’état physiologique l’articulation est dite virtuelle et close. Elle contiendrait moins

de 1mm3 de liquide synovial. Lors de tout mouvement de translation ou de décoaptation de la

tête humérale il y aurait une dépression articulaire favorisant la stabilisation comme une

5

Figure 1 : les cinq

articulations composant

le complexe de l’épaule

Figure 2 : les faisceaux du

ligament gléno-huméral

Page 7: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

3

Figure 3 : les muscles de la coiffe des rotateurs

ventouse. La pression articulaire et la stabilité de l’épaule dépendent donc de la quantité de

liquide synovial (1) (2).

2.1.2 Les muscles péri-articulaires permettent une stabilisation active et dynamique du complexe de l’épaule

La stabilité active de l’épaule est assurée par la

présence des muscles péri-articulaires. Les muscles de la

coiffe des rotateurs (le subscapulaire, l’infra-épineux, le

supra-épineux et le petit rond, (figure 3)) ainsi que le

deltoïde, le long biceps, le grand pectoral, le grand dorsal

et les muscles du tronc seront principalement cités. De

manière générale, ces muscles trouveront surtout leur

efficacité dans les positions basses de l’épaule. Cependant

ils jouent tout de même un rôle de stabilisation dans toute

l’amplitude articulaire et notamment dans les positions

hautes d’instabilité passive. Il est vrai que le supra épineux

et le subscapulaire stabilisent la tête préférentiellement en

milieu de mouvement, lorsque le système capsulo-

ligamentaire est le moins efficace, alors qu’en fin de mouvement le petit rond et l’infra-

épineux ont un indice de compression élevé. La stabilité active antérieure de l’épaule est

rattachée à la présence du subscapulaire en avant de l’articulation et en postérieur à la

présence de l’infra épineux et du petit rond (3) (4).

Les contractions synergiques des muscles péri-articulaires, et notamment de la coiffe,

permettent une stabilisation dynamique de l’épaule. En effet, leur contraction coordonnée

entraîne une force coaptatrice comprimant la tête humérale sur la glène grâce à une résultante

des forces orientée vers le centre de la cavité. Pour cela, le grand pectoral et le grand dorsal

s’opposent à la contraction du deltoïde dans les mouvements d’abduction en tant

qu’abaisseurs. A l’inverse, le grand pectoral ne peut se contracter seul car il favorise la

translation antérieure de la tête alors que le grand dorsal va dans le sens d’un recul de

l’humérus (3) (4).

L’articulation de l’épaule est un complexe ambivalent. En effet, il est stable

anatomiquement mais au service de la mobilité afin d’orienter le membre supérieur dans

l’espace. Une lésion des éléments capsulo-ligamentaires ou une altération de la coordination

dynamique peut alors entrainer une instabilité passive de l’épaule. Dans cet écrit, l’instabilité

active engendrée par une lésion tendineuse ne sera pas évoquée.

2.2 Le premier facteur d’instabilité de l’épaule : les altérations anatomiques

Les éléments cités précédemment, lorsqu’ils ne remplissent plus leur rôle

physiologique, peuvent créer des instabilités comme :

La faible congruence articulaire favorise la mobilité mais pas la stabilité.

Les anomalies d’orientations des surfaces articulaires (antéversion ou rétroversion

excessive de la glène, rotation humérale) entre glènes et tête humérale vont dans le sens d’une

instabilité.

La rupture du bourrelet glénoïdien diminue la congruence et l’étanchéité articulaire.

La suppression de la dépression articulaire augmenterait la laxité articulaire.

Page 8: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

4

Les épanchements font varier les quantités liquidiennes intra articulaires et influencent

donc la pression négative en faveur de la stabilité de l’épaule.

La lésion ligamentaire favorise la laxité articulaire. Aussi, une lésion de désinsertion

ou de rupture ligamentaire est toujours associée à une distension ligamentaire. Selon

Forthomme et al (3), après deux épisodes de luxations antérieures, les portions antéro-

inférieures de la capsule articulaire seraient distendues de 190% en moyenne par rapport à une

épaule saine. De plus, une déchirure capsulo-ligamentaire peut entrainer une atteinte des

mécanorécepteurs dont on développera l’importance plus tard.

Le déséquilibre de force musculaire entre agonistes et antagonistes altère la

stabilisation dynamique de l’épaule.

Les dyskinésies scapulaires perturbent l’alignement segmentaire de la scapula et de la

tête humérale comme par exemple lors d’une diminution de la sonnette latérale lors des

mouvements d’élévation du membre supérieur.

Une épaule est stable grâce à ses structures anatomiques passives et sa coordination

musculaire. Une lésion des structures ou une altération du système actif (ou les deux le plus

souvent car une altération de la stabilité passive influence la contraction musculaire)

favoriseront donc l’instabilité de l’articulation.

Pathophysiologie de l’épaule instable passivement 3

L’instabilité de l’épaule regroupe différentes formes cliniques qui dépendent du

contexte de survenu et du mécanisme de la lésion. Deux formes cliniques sont distinguées :

La subluxation se traduit par une perte de contact partielle entre la tête humérale et la

glène. Elle se réduit spontanément ou de manière autonome par le patient (5).

La luxation vraie correspond à une perte de contact complète qui nécessite une réduction

pars un tiers.

Selon Wilk et al (5), un premier épisode de subluxation serait moins douloureux

qu’une première luxation. Il peut également être retrouvé des épaules douloureuses à la suite

d’accidents passés inaperçus. En effet, dans ce cas le sujet ne se plaint d’aucune sensation

d’instabilité et ne témoigne d’aucun épisode luxant. Il sera retrouvé de simples douleurs à

l’armer de bras et des lésions éventuelles lors d’examens complémentaires.

Au sein des luxations et subluxations, il est distingué leur direction (antérieure,

postérieure ou multidirectionnelle), leur étiologie (traumatique ou micro-traumatique et

volontaire ou involontaire) et leur fréquence (aigüe ou récidivante) (6) (7).

L’interrogatoire permettra lors de la première consultation de se renseigner sur le

mécanisme lésionnel, l’étiologie et la chronicité éventuelle ce qui permettra d’orienter la

rééducation. Il est également ajouté qu’instabilité et niveau de pratique n’ont aucune

corrélation (8).

3.1 Les différentes orientations de l’instabilité d’épaule

3.1.1 L’instabilité antérieure Il est évoqué une instabilité antérieure lorsqu’il y a une avancée de la tête humérale

vers l’avant par rapport à la cavité glénoïdale ou lors de lésions des structures de maintiens

antérieurs (7). Celle-ci est très fréquente et représenterait 95% des épisodes de luxations de

l’épaule (5). Elle pourrait se retrouver chez l’enfant et également dans toutes les tranches

d’âges chez l’adulte. Le risque de récidive chez l’enfant de moins de 17 ans serait élevé (71%

selon Sirveaux et al (6)).

Page 9: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

5

3.1.1.1 Les mécanismes mis en cause

3.1.1.1.1 Traumatiques La luxation ou subluxation antéro-interne est fréquente en traumatologie. Elle

représenterait 11% des traumatismes de l’épaule et serait la luxation la plus fréquente de

l’organisme humain selon Saraglia (6) (8).

Elle survient souvent lors d’une activité sportive et touche donc préférentiellement des

sujets jeunes. Il existe deux types de mécanismes traumatiques luxants :

direct : on y référencera les impacts comme une chute sur le moignon de l’épaule ou

un choc postérieur, etc…

indirect : un mouvement d’armé de bras forcé, une traction du membre supérieur, une

abduction-rotation latérale forcée, une chute sur la main avec une épaule en

abduction-rotation latérale, etc… (6) (9). Wilk et al (5) évoquent également un

mouvement d’abduction horizontale.

La luxation antéro-interne est une pathologie largement retrouvée dans les sports de

contacts (rugby, judo…) dans lesquels on retrouvera préférentiellement des lésions faisant

suite à des traumatismes directs. Elle est également très fréquente en ski lors de chutes (8) .

Dans les sports de lancers (handball...) ou les arts martiaux (lutte, judo…), les traumatismes

pourront être indirects.

3.1.1.1.2 Micro-traumatiques L’instabilité micro-traumatique antérieure se traduit par des lésions des structures en

avant de l’articulation gléno-humérale lors de mouvements répétitifs. Très fréquemment ce

type de lésions se retrouve chez des sportifs pratiquant un sport de lancer (baseball,

handball…). En effet, il est retrouvé chez ces patients un déficit freinateur du mouvement en

abduction-rotation interne avec des rotateurs médiaux plus forts que leurs antagonistes. Ce

déséquilibre engendre alors des translations antérieures excessives de la tête humérale lors du

geste sportif, impliquant des contraintes en avant de poussées et de traction en postérieur.

L’instabilité micro-traumatique antérieure est un cercle vicieux d’auto entretien dans

lequel la répétition du geste engendre des lésions anatomiques favorisant l’instabilité par

distension capsulo-ligamentaire et diminution du contrôle sensori-moteur (ces notions seront

développées ultérieurement).

Il est rarement retrouvé des épisodes de luxations dans ce type d’instabilités mais

plutôt des subluxations faisant suite à l’augmentation progressive des lésions lors du geste

sportif. En effet, sans gestes traumatisants, sans chute, etc… le mouvement répétitif devient à

lui seul source de subluxations (10). De plus, les lésions micro-traumatiques seraient

favorisées chez les sujets souffrant de laxité constitutionnelle (il sera évoqué ultérieurement la

notion de micro-traumatismes et de distension capsulo-ligamentaire).

3.1.1.2 Les lésions anatomiques éventuelles Un épisode de luxation ou de subluxation engendre régulièrement des lésions au

niveau du rebord antéro-inférieur de la glène. Il est retrouvé des lésions de Bankart, c’est-à-

dire des désinsertions du labrum et de la capsule dans la zone antéro-inférieure notamment

lors de luxations récidivantes ou de subluxations. 80 à 97% des luxations antérieures de

l’épaule seraient associées à ce type de lésions (4). De plus, elles peuvent être associées à une

rupture du périoste antérieur, ce sont ALPSA lésions (Anterior Labroligamentous Periosteal

Sleeve Alvusion) ou s’étendre vers le haut jusqu’à l’insertion du biceps brachial, dans ce cas

ce sont des SLAP lésions (Superior Labrum from Anterior to Posterior) (6).

Il est également retrouvé des distensions de la capsule antérieure surtout au niveau de

l’insertion labrum-capsule et au niveau du ligament gléno-huméral moyen et inférieur.

Page 10: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

6

Aussi, il faut prêter attention aux lésions musculaires au niveau du subscapulaire

(rotation externe violente), du supraépineux ou de l’infraépineux et du chef long du biceps

brachial (SLAP lésions)…

Des lésions osseuses peuvent également être engendrées lors d’un épisode luxant

comme une fracture impaction de la face postéro-supérieure de la tête humérale contre le

rebord glénoïdien (lésions de Hill Sachs), des fractures du tubercule majeur, du processus

coracoïde ou encore du col de l’humérus.

L’ensemble de ces lésions éventuelles sont importantes à connaitre lors de la prise en

charge d’une épaule instable (6) (7).

3.1.1.3 L’examen du patient L’interrogatoire du patient concernera principalement la description du traumatisme

éventuel pour lequel le patient est amené à être pris en charge en rééducation. Aussi, ses

antécédents (des épisodes de luxations controlatéraux, d’entorses de chevilles, etc…) pourront

orienter vers une laxité congénitale que l’on développera plus tard. Il pourra alors décrire une

douleur importante lors de la lésion avec une impotence fonctionnelle, une saillie externe de

l’acromion du fait de l’avancée de la tête humérale que l’on appellera signe de l’épaulette, une

déformation en coup de hache externe, un effacement du sillon delto-pectoral, un vide sous

acromial, etc… (6) (8).

Le patient non opéré, après un épisode luxant, est immobilisé coude au corps en

rotation interne pour une durée variable. En moyenne une immobilisation de trois semaines

est conseillée dans la littérature. Une éventuelle amyotrophie au niveau des muscles péri-

articulaires de l’épaule pourra donc être recherchée en clinique (6). Le reste de l’examen est

composé :

Test d’appréhension (figure 4)

Il constitue le signe clinique essentiel de l’instabilité

antérieure. Le patient est assis, le kinésithérapeute est derrière lui

et soutient le membre supérieur au niveau du coude tout en

l’amenant en abduction-rotation latérale (position RE2). Ensuite le

praticien accentue la rotation externe et amène une légère pression

postéro-antérieure au niveau de la tête humérale. Le test est positif

lorsque le patient interrompt le mouvement par crainte de voir son

épaule se luxer (2) (6).

Fulcrum Test (figure 5)

Ce test est similaire au précédent à la seule différence que

le patient est en décubitus dorsal (2) (6).

Test de recentrage ou relocation test (figure 6)

Le patient est en décubitus dorsal, épaule en dehors de

la table et en position d’armer de bras comme pour le test

précédent. Avec sa main proximale, le praticien amène la tête

humérale d’arrière en avant ce qui peut recréer la sensation

d’instabilité ou de douleur du patient. Lorsque la tête est

ramenée vers l’arrière cette sensation ou cette douleur

disparaissent. Ce test permet de révéler la douleur due à la

lésion des structures antérieures et de distinguer l’instabilité et

le conflit d’épaule (2) (6).

Figure 4 : test d’appréhension

Figure 6 : test de recentrage

Figure 5 : Fulcrum Test

Page 11: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

7

Lors de l’examen clinique d’un patient souffrant d’instabilité passive de l’épaule, il

sera recherché une éventuelle laxité congénitale globale pouvant être présente dans un cadre

traumatique ou micro-traumatique et favorisant la récidive. Cette notion sera évoquée plus

tardivement dans l’écrit.

3.1.2 L’instabilité postérieure L’instabilité postérieure est beaucoup plus rare que l’antérieure et correspond à un

recul de la tête humérale par rapport à la glène (6). Wilk et al (5) évoquent une fréquence

inférieure à 5% des épisodes d’instabilités de l’épaule. L’instabilité postérieure est une autre

affection que l’antérieure et il n’est pas possible de transposer les connaissances d’une

pathologie à l’autre (7).

3.1.2.1 Les mécanismes mis en cause Il est retrouvé des luxations postérieures lors de traumatismes violents de la voie

publique avec un membre supérieur en rotation interne. Il est également décrit ce type de

lésions lors de crise d’épilepsie, d’électrocution ou d’électrothérapie, suite à une tétanisation

musculaire (6). Celles-ci peuvent aussi se retrouver lors de gestes de poussées ou de chocs

directs sur le moignon de l’épaule notamment lors d’une activité sportive ou de chutes la main

à plat, le membre toujours en rotation interne (5) (8).

3.1.2.2 Les lésions anatomiques éventuelles De la même manière que lors de luxations antérieures, il peut être retrouvé des lésions

osseuses notamment de la tête humérale par impaction antérieure ou des atteintes du tubercule

mineur. Le patient peut également avoir une fracture du bord postérieur de la glène (fréquence

de 9% dans les épisodes luxants traumatiques postérieurs selon Sirveaux et al (7)) ou des

lésions au niveau des muscles de la coiffe des rotateurs. Comme dans tous types d’instabilité,

il y aura des lésions au niveau capsulaire (6).

Test du lanceur

Le patient, toujours en décubitus dorsal réalise un lancer ou un service rapide (rotation

médiale) pendant que le kinésithérapeute contre le mouvement avec une résistance au poignet.

Le test est positif lorsqu’il reproduit la sensation d’instabilité de l’épaule. De plus, étant

traumatisant il ne sera réalisé que chez des patients très musclés ou présentant une instabilité

frustre. En effet, il ne sera jamais utilisé si le test d’appréhension est positif (2) (6).

Tests de laxité antérieure : recherche d’un

tiroir antérieur par Rockwood et Rodineau

(figure 7)

Dans les deux tests décrits par Rockwood et

Rodineau, le patient est assis. En revanche, pour

Rodineau, le patient est légèrement penché en avant.

Le kinésithérapeute empaume la tête humérale d’une

main et réalise un contre appui sur le moignon de

l’épaule de l’autre. Il suffit alors d’exercer une

translation d’arrière en avant. Le test est positif

lorsque la laxité antérieure est plus importante du

côté lésé par rapport au côté sain.

Figure 7 : appréciation des tiroirs antéro-

postérieurs selon Rockwood et Rodineau

Page 12: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

8

3.1.2.3 L’examen clinique Il sera mené de la même manière que lors d’une luxation

antérieure en ce qui concerne l’interrogatoire.

D’un point de vue clinique, le patient sera placé en position

assise, le bras en position RE3 (90° flexion, adduction et rotation

médiale d’épaule avec un coude fléchi à 90°). Le kinésithérapeute

recherche un signe d’appréhension en maintenant d’une main la scapula

et de l’autre le coude du patient sur lequel il exerce une pression d’avant

en arrière (figure 8). Un ressaut peut-être perçu.

Les tests de tiroirs décrits par Rockwood et Rodineau

précédemment seront également réalisés. Il sera cette fois-ci recherché

un glissement postérieur plus important du côté pathologique par

rapport au côté sain (2) (6).

De la même manière que pour l’instabilité antérieure, on recherchera une éventuelle

laxité congénitale dont les tests seront décrits plus tardivement.

3.1.3 L’instabilité multidirectionnelle Ce type d’instabilité est décrit chez des patients présentant au moins deux instabilités

dans deux plans différents. Il est présent dans un cadre d’hyperlaxité avec un excès de fibres

élastiques au sein de la capsule articulaire. Cette prédisposition est le plus souvent

constitutionnelle. Les structures anatomiques de ce type de patients permettent une faible

stabilité statique et dynamique ce qui favorisent leurs lésions lors des microtraumatismes

quotidiens. Dans la plupart des cas, une direction d’instabilité est prédominante sur les autres

et se traite alors comme les affections citées précédemment (5) (7).

3.2 Distinguer la laxité articulaire pathologique de l’épaule instable passivement et la laxité articulaire physiologique

Comme évoqué précédemment la laxité articulaire peut-être pathologique dans le

cadre d’instabilités mais elle peut également être physiologique. L’hyperlaxité

constitutionnelle se diagnostic de manière clinique par :

Une rotation latérale bilatérale coude au corps (RE1) supérieure ou égale à 85°

de manière spécifique (11).

Des tiroirs antérieurs, postérieurs (tests de Rockwood et Rodineau déjà

évoqués) et inférieurs (sulcus test, figure 9) de grandes amplitudes.

Un signe du pouce positif (figure 10).

Les termes épaule instable et laxité sont souvent assimilés car les deux sont très liés.

En effet, la laxité constitutionnelle est considérée comme un facteur favorisant important

dans l’instabilité de l’épaule passive (un léger traumatisme pourra être à l’origine d’un

Figure 8 : test d’appréhension

postérieure

Figure 10 : signe du pouce Figure 9 : sulcus test

Page 13: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

9

épisode luxant). En revanche, lorsqu’il est évoqué une laxité, à la suite d’un ou plusieurs

épisodes luxants, alors celle-ci est pathologique : c’est une instabilité passive.

Les filles et les adolescents sont plus exposés à la laxité articulaire de l’épaule ce qui

pourrait expliquer le risque de récidives important dans cette tranche d’âge (92%) (5). De

plus, certaines personnes hyperlaxes peuvent subluxer leur épaule de manière volontaire.

Il parait également important de préciser que l’hyperlaxité de l’épaule n’est pas

forcément associée à une hyperlaxité généralisée des autres articulations. Elle reste cependant

souvent associée à des phénomènes d’entorses à répétition des chevilles (élément pouvant être

demandé lors de l’interrogatoire) (12).

L’épaule instable passivement se définit comme une lésion des structures anatomiques

de l’épaule ou un mouvement exagéré de la tête humérale par rapport à la glène. Elle résulte

de traumatismes (luxation et subluxation) ou éventuellement de microtraumatismes. Cette

pathologie est donc souvent retrouvée dans les sports de pivots-contacts et de lancers, c’est

pourquoi elle présente principalement un problème chez les sujets jeunes en plein essor de

leur activité sportive.

Lors de l’examen du patient, le mécanisme lésionnel et la fréquence des épisodes

luxants seront recherchés. En effet, nous pourrons être face à un premier épisode ou une

récidive. De plus, il sera important de demander le type de pratique sportive du patient afin de

savoir s’il est sujet à des micro-traumatismes. La direction de l’instabilité sera également

évaluée grâce aux tests cliniques de tiroirs et d’appréhension ainsi que la présence éventuelle

d’une laxité constitutionnelle.

La pathologie décrite étant en grande majorité antérieure, seule celle-ci sera

développée dans la suite de l’écrit.

Le système sensori-moteur permet la coordination des éléments de stabilité 4active

4.1 Les éléments du système sensori-moteur permettent une coordination dynamique, facteur de stabilité

L’épaule est un système sous contraintes mécaniques avec des éléments passifs

évoqués précédemment (capsule articulaire, ligaments, structure osseuse, labrum et force de

pression intra articulaire) et sous contraintes dynamiques lors de la contraction des muscles

péri-articulaires. La stabilité de l’épaule nécessite une bonne coordination entre ces

différentes contraintes qui n’est rendue possible que par l’intervention du système sensori-

moteur (13).

Le système sensori-moteur est auto-organisé, c’est un « contrôle bouclé » (14). En

effet, il est composé de voies proprioceptives afférentes qui acheminent leurs informations

sensitives vers le système nerveux central où ces données sont intégrées par les centres

nerveux afin de créer une réponse motrice adaptée des structures actives (figure 11).

Structures musculaires

et capsulo-

ligamentaires

Intégration = système

nerveux central

Elaboration programmes

moteurs

Information proprioceptive

Réponse motrice

Figure 11 : schématisation du système sensori-moteur bouclé

Page 14: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

10

Notre vie quotidienne est remplie d’expériences sensori-motrices pour lesquelles ce

système entre en jeux. En effet, chaque action, chaque posture, chaque déplacement… résulte

d’une adaptation de notre organisme face à un message sensitif. Les contractions musculaires

correspondent à des ajustements permanents au cours de la journée, c’est le processus continu

de feedback ou de rétrocontrôle. A l’inverse, le feedforward est un phénomène intermittent

qui apparait préalablement à l’activation du feedback. En effet, ce dernier correspond à une

anticipation précédant la détection du message afférent et n’apparait que dans certaines

situations de « stress articulaire » (15). La stabilité dynamique de l’épaule, à l’image du reste

du corps nécessite donc une combinaison de ces deux phénomènes complémentaires.

Il faut cependant préciser que le système sensori-moteur ne se résume pas simplement

à une boucle réflexe à laquelle la réponse motrice correspond à un message sensitif. En effet,

c’est un ensemble beaucoup plus complexe, composé de nombreuses afférences et efférences

influant les unes sur les autres à l’aide de synapses excitatrices ou inhibitrices.

4.1.1 Les afférences proprioceptives sont le point de départ du système sensori-moteur

La proprioception est un terme issu du latin proprius « qui appartient à » et capere

« recueillir ». Elle correspond à un ensemble d’informations sensorielles provenant de

récepteurs spécifiques et permet de rendre compte de la position et du mouvement des

segments d’une articulation (16). La proprioception est décrite par Le Cavorzin (17) comme

« une connaissance des parties du corps, de leur position et de leur mouvement dans l’espace,

sans que l’individu ait besoin de vérifier avec les yeux ». Au sein du système rétroactif, elle

correspond au dispositif sensoriel qui détecte les variations par rapport à une valeur de

référence, fournissant un signal d’erreur au système nerveux central (14).

La proprioception est le point de départ de la boucle sensori-motrice et a deux grands

objectifs :

Fournir les informations nécessaires à la réalisation de programmes moteurs en

fonction du contexte de l’action ou de la posture (point de départ du feedback évoqué

précédemment). En effet, pour effectuer un geste, l’organisme doit prendre en compte

différents paramètres comme la position articulaire, la force musculaire développée, le

sens du mouvement, sa vitesse, etc… Ces éléments nécessitent des interactions entre

les différents composants articulaires.

Fournir les informations nécessaires à l’adaptation de ce programme en fonction

des contraintes extérieures inattendues. Il est ici retrouvé le point de départ du

phénomène de feedforward évoqué précédemment.

Lorsque des mouvements ou postures sont réalisés, les informations évoquées sont souvent

associées aux informations visuelles, mais la proprioception reste souvent plus précise et/ou

plus rapide.

Afin d’illustrer le phénomène proprioceptif avec une expérience de la vie de tous les

jours, prenons l’exemple d’une personne marchant avec une boite à chaussures fermée sans

savoir ce qu’elle peut contenir et ne voulant donc pas la faire tomber. La vision va se focaliser

sur la boite comme lorsque l’on ne veut pas renverser une tasse très remplie, mais ne prendra

pas forcément en compte l’ensemble des informations apportées par la proprioception

(placement du membre supérieur, surface de la boite sur la main, poids de l’objet, type de sol,

vitesse de marche…) Ces éléments sont primordiaux pour la réalisation du feedback énoncé

ci-dessus. Enfin, si l’on introduit à cette situation un évènement non prévisible comme une

personne déboulant à toute vitesse, alors la personne tenant la boite va devoir s’adapter à cette

Page 15: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

11

nouvelle situation et de manière beaucoup plus rapide que lors d’un mécanisme de feedback :

c’est le feedforward (18).

En conclusion, la proprioception doit à la fois fournir les informations pertinentes qui

tiennent compte des contraintes internes nécessaires pour réaliser le mouvement espéré mais

également des contraintes extérieures pouvant modifier de manière inattendue le geste. Sans

information proprioceptive, il ne peut y avoir de réponse motrice adaptée. Le rétrocontrôle est

donc impossible sans le début de la « boucle ».

4.1.1.1 Les différents types d’informations proprioceptives Les informations sensorielles proprioceptives regroupent :

Le positionnement articulaire correspond à l’appréciation et à l’interprétation des

informations concernant la position articulaire et son orientation dans l’espace.

La kinesthésie provient du grec kinesis qui correspond au mouvement et aisthesis qui

signifie la sensibilité. Elle correspond donc à une perception du déplacement articulaire.

La sensation de résistance se rapporte alors à la force appliquée et générée dans

l’articulation (17).

Les informations proprioceptives peuvent être inconscientes lorsqu’elles sont

transmises par les voies spinocérébelleuses et conscientes s’il s’agit de la voie lemniscale. Ces

deux systèmes seraient probablement complémentaires. (13) (17) (19) (20)

4.1.1.2 Les mécanorécepteurs Le message proprioceptif prend son origine dans les mécanorécepteurs qui sont des

neurones sensoriels afférents présents dans les muscles, les tendons, les fascias, la capsule

articulaire, les ligaments et la peau. En revanche, aucun mécanorécepteur dans le labrum ni la

tête humérale n’est retrouvé (16) (21). Ces récepteurs sont sensibles à une déformation

mécanique de leurs tissus qu’ils transforment en un signal modulé en fréquence à travers les

voies afférentes jusqu’au système nerveux central. La sollicitation du récepteur engendre une

sortie de sodium des canaux ioniques permettant la genèse d’un potentiel d’action.

L’augmentation de la déformation au niveau du capteur sensoriel engendre une augmentation

des potentiels d’actions et des informations arrivant aux centres nerveux (22).

Chaque récepteur présente une sensibilité spécifique, c’est-à-dire qu’il répond à une

gamme de stimuli qui lui est propre. Il présente également un seuil de dépolarisation

spécifique (15). Chaque récepteur est donc plus ou moins sensible à certain stimuli.

4.1.1.2.1 Les récepteurs capsulo-ligamentaires Les récepteurs capsulo-ligamentaires regroupent deux types de mécanorécepteurs :

Les corpuscules de Pacini sont des récepteurs dynamiques, d’adaptation dite rapide. Ils

sont abondants dans la capsule articulaire selon Lephart et Jari (16) et plus abondants

dans les ligaments gléno-huméraux selon Grigg (22). Ils sont sensibles à la

compression, celle-ci étant plus rare que l’étirement simple, et ne sont stimulés que lors

de mouvements articulaires rapides (20).

Les corpuscules de Ruffini à l’inverse sont des récepteurs statiques et dynamiques,

d’adaptation lente. Globalement, ils sont les plus représentés dans l’articulation et

notamment dans le ligament coraco-acromial. Ils donnent des informations sur la

direction et la vitesse du mouvement. En l’absence de mobilisation, ils ne sont actifs

que si l’articulation est positionnée dans leur secteur d’activation, c’est-à-dire entre 15°

et 30° (20).

Les corpuscules présentent également un seuil de dépolarisation bas, pouvant

engendrer rapidement la genèse de potentiels d’actions (16) (23).

Page 16: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

12

Il semble important de noter que les structures capsulo-ligamentaires sont lâches en

course moyenne et ne se mettent en tension que dans les courses extrêmes. Les

mécanorécepteurs sensibles à l’étirement de ces structures ne seront donc sollicités que dans

les fins d’amplitude articulaires (22) (24). En revanche, selon Lephart et Jari (16), il n’existe

pas de prédominance d’un mécanorécepteur sur l’autre dans ces amplitudes extrêmes, chacun

apporte ses informations au système nerveux central par l’intermédiaire de fibres nerveuses de

type II (23).

Enfin, les mécanorécepteurs influenceraient également l’activité du motoneurone γ,

innervant à son tour les fuseaux neuromusculaires dont le rôle sera décrit plus tardivement

dans l’écrit.

4.1.1.2.2 Les récepteurs musculo-tendineux Les organes tendineux de golgi (OTG) sont espacés dans la jonction musculo-

tendineuse à différents intervalles et sont stimulés lors de la tension tendineuse. Il est évoqué

une sensibilité à la tension musculaire passive, c’est-à-dire lors de l’étirement du muscle, et

une tension musculaire active, lors de la contraction du muscle (15). Ces structures sont

considérées comme des récepteurs de positions et de direction du mouvement mais ont surtout

un rôle de protection du système musculo-tendineux. En effet, ils détectent les tensions

excessives et permettent de moduler la contraction musculaire (24). De ce fait, la réponse

motrice entraine un relâchement des agonistes et une contraction des antagonistes modulée

par un inter-neurone en réponse aux afférences supra spinales et périphériques (20). Le

motoneurone γ joue également un rôle d’intermédiaire (25).

Le seuil de dépolarisation de la membrane d’un OTG est bas, ils sont donc très

sensibles à un écart de tension tendineuse (23). Les informations proprioceptives, prenant leur

origine dans les OTG sont alors véhiculées dans des fibres nerveuses afférentes de grandes

tailles myélinisées de type Ib, à leur sortie de la capsule. Ces fibres permettent une conduction

rapide jusqu’aux centres nerveux.

4.1.1.2.3 Les fuseaux neuromusculaires

Les fuseaux neuromusculaires font partie intégrante du corps musculaire. Ils sont

responsables de la transmission des informations sur la longueur et le changement de longueur

du muscle (15). Ils sont composés de :

Fibres extrafusales qui sont des fibres musculaires « normales », contractiles

Figure 12 : les fibres du fuseau

neuromusculaire

Page 17: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

13

Fibres intrafusales qui sont des fibres modifiées enroulées autour d’un fuseau. Elles

n’ont aucune propriété contractile et servent simplement de récepteurs sensoriels. On

distingue au sein des fibres intrafusales :

la partie annulo spiralée (en bleu sur la figure 12) correspond au point de

départ du réflexe myotatique qui transmet son information grâce aux fibres

nerveuses de type Ia.

La terminaison en bouquet (en jaune sur la figure 12) transmet son

information par l’intermédiaire des fibres sensitives afférentes II dont le

diamètre est moins important que les fibres précédentes : la conduction est

donc moins rapide (23) (25).

Les fibres intrafusales sont innervées par les voies efférentes du motoneurone γ. En

co-activation avec le motoneurone α innervant les fibres contractiles, les deux motoneurones

engendrent un raccourcissement du fuseau neuromusculaire. Le fuseau, par l’intermédiaire de

ses fibres sensorielles, devient alors plus sensible aux changements de longueur du muscle et

va alors transmettre les informations proprioceptives aux centres nerveux (15) (25). A

l’inverse des mécanorécepteurs, les fuseaux neuromusculaires perçoivent les variations dans

différentes amplitudes articulaires (20).

Aussi, il a été dit que les autres mécanorécepteurs auraient une afférence sur le

motoneurone γ au niveau spinal, il y aurait donc une régulation continuelle de la longueur et

de la sensibilité des fuseaux neuromusculaires (15) (18) (24).

Chaque mécanorécepteur (corpuscules, OTG et fuseaux neuromusculaires) possède

ses propres spécificités en termes de gamme de stimuli et de seuil de dépolarisation. Leur

activation permet donc de fournir des informations proprioceptives diverses mais

complémentaires. Ils sont ensuite reliés à une fibre nerveuse ascendante, de conduction

nerveuse plus ou moins rapide, qui va conduire les messages sensitifs jusqu’aux différents

centres intégrateurs.

4.1.1.3 Les voies proprioceptives ascendantes L’information proprioceptive est transmise au système nerveux central grâce à

différents types de fibres nerveuses dont la vitesse de conduction est variable. Il est fait la

distinction entre deux voies différentes mais complémentaires : la voie lemniscale conduisant

les informations sensitives conscientes et les voies spinocérébelleuses transférant les

informations inconscientes (17).

Après avoir été acheminées jusqu’au système nerveux central, les informations

proprioceptives vont y être intégrées afin de créer une réponse motrice adaptée. Selon, la voie

empruntée et le niveau central de leur intégration, ces informations seront dites conscientes ou

inconscientes. En effet, toujours selon l’exemple de la boite à chaussures, si nous souhaitons

la soupeser afin d’évaluer sa masse, les informations seront conscientes alors que si nous nous

promenons avec la boite dans la main tout en discutant avec notre voisin, la force utilisée pour

porter la boite sera inconsciente.

4.1.2 L’intégration du message proprioceptif L’ensemble des informations proprioceptives provenant des corpuscules de Pacini ou

de Ruffini, des OTG et des fuseaux neuromusculaires sont acheminées à différents niveaux du

système central où elles sont croisées avec les informations visuelles et vestibulaires.

L’intégration consiste en une sommation des informations sous l’influence de synapses

inhibitrices et excitatrices qui entrainent une ouverture ou une fermeture de canaux ioniques,

modulant le signal nerveux. Les synapses inhibitrices et excitatrices peuvent provenir des

Page 18: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

14

neurones sensitifs afférents évoqués précédemment ou des voies descendantes du système

nerveux central.

Il existe trois niveaux de traitement de l’information : la moelle épinière, le tronc

cérébral et le cortex cérébral associé au cérébellum. Chaque niveau d’intégration est en

relation avec les autres (15).

4.1.2.1 Le premier niveau d’intégration : la moelle épinière La moelle épinière constitue le premier niveau d’intégration des informations

proprioceptives et élabore des schémas moteurs élémentaires.

Les informations proprioceptives provenant des fuseaux neuromusculaires sont issues

des fibres Ia et II. Les fibres Ia se connectent directement avec le motoneurone α pour former

le réflexe myotatique. Les fibres de type II se projettent alors sur un interneurone activant le

motoneurone α, ce dernier étant largement influencé par les structures supra spinales et les

influx provenant des OTG et des mécanorécepteurs. La modulation des motoneurones α ne

concerne pas simplement la réponse motrice des muscles agonistes mais également celle des

antagonistes. Cette notion semble importante, car en ce qui concerne la stabilité de l’épaule,

l’étirement des structures péri-articulaires lors du mouvement s’accompagne d’une co-

contraction des muscles stabilisateurs. Pour cela, le réflexe myotatique est décrit comme

polysynaptique avec une action facilitatrice sur le motoneurone α agoniste et une action

inhibitrice sur les motoneurones antagonistes, permettant le relâchement musculaire.

En ce qui concerne les influx provenant des OTG à travers les fibres Ib, ils sont

également transmis aux interneurones médullaires. A l’inverse des fuseaux neuromusculaires

sensibles à l’étirement musculaire, les OTG sont stimulés lors de la mise en tension du

muscle. Il y aura donc une inhibition des motoneurones α des muscles agonistes et une

facilitation des motoneurones des muscles antagonistes.

A leur tour, les influx provenant des mécanorécepteurs grâce aux fibres de petits

calibres vont influencer l’activité des interneurones médullaires (20).

4.1.2.2 Le deuxième niveau d’intégration : le tronc cérébral Les informations proprioceptives sont croisées avec les informations visuelles et

vestibulaires. Les schémas moteurs créés à ce niveau d’intégration sont stéréotypés et

automatiques. Le tronc cérébral joue un rôle important dans le maintien et la modulation du

tonus musculaire. Il est signalé une voie descendante médiale influençant le motoneurone

responsable de l’innervation des muscles proximaux. Cette innervation peut être excitatrice ou

inhibitrice (15) (24).

4.1.2.3 Le dernier niveau d’intégration : le cortex cérébral, en association au cérébellum

Au sein du cortex cérébral, il existerait un échange entre le cortex sensoriel, qui reçoit

les informations proprioceptives, et le cortex moteur qui va établir en conséquence des

schémas moteurs. De manière générale, le cortex cérébral établit des schémas de mouvements

complexes en fonction des déficits de stabilité mécanique, il permet d’organiser et de préparer

la commande motrice (13).

Ce dernier niveau d’intégration est le siège de la proprioception consciente. De plus, il

a été fait l’hypothèse qu’en fonction des informations proprioceptives, les schémas moteurs

habituels pourraient être modifiés. Cette question a été démontrée lors de lésions du ligament

croisé antérieur du genou avec une adaptation des ischios jambiers pour la stabilité de

l’articulation. Cette adaptation n’a jamais été démontrée au niveau de l’épaule instable mais

parait envisageable du fait des modifications d’activités musculaires constatées dans cette

pathologie (20).

Page 19: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

15

Le cérébellum a un rôle inconscient de contrôle entre le schéma préétabli et le

mouvement réalisé et joue un rôle important dans l’apprentissage moteur (15) (20) (24).

L’intégration des informations proprioceptives aboutit à la création de schémas

moteurs plus ou moins complexes et rapides suivant les structures centrales sollicitées. Elle

permettrait également une prise de conscience et donc une mémorisation des séquences

motrices réutilisables en réponse aux contraintes internes et externes.

4.1.3 Le contrôle neuromusculaire comme réponse motrice efférente à l’intégration de l’information proprioceptive

Le contrôle neuromusculaire correspond au message moteur efférent rendu possible

par la création de schémas au niveau du système nerveux central. Il répond au message

sensitif et correspond à la dernière partie de la « boucle ». Cette réponse motrice correspond à

un ensemble de contraintes dynamiques conscientes ou inconscientes coordonnées (15).

Il existe trois types de réponses motrices différentes en fonction du niveau

d’intégration. En effet, les efférences issues de la moelle épinière engendreront une réponse

réflexe rapide et élémentaire. Aussi, du tronc cérébral résultera un mouvement automatique.

Ces évènements seront inconscients alors que les réponses motrices prenant leurs origines

dans le cortex cérébral seront conscientes et complexes.

Le contrôle neuromusculaire joue sur la co-activation coordonnée des muscles péri-

articulaires des différentes articulations du complexe de l’épaule, la stabilisation réflexe,

l’activation préparatoire et la régulation de la rigidité et du tonus musculaire (13) (15). Le fait

d’avoir une préparation de la contraction musculaire permettrait une réponse plus rapide. De

plus, cette activation anticipée pourrait être apprise et stockée pendant la rééducation afin

d’être réutilisée lors d’une activité ultérieure (24). Lors d’une situation de stress articulaire, il

pourrait y avoir une réponse motrice anticipée, car stockée préalablement en rééducation,

permettant d’éviter une lésion. Cette notion reprend le principe du feedforward évoqué plus

tôt dans cet écrit. En ce qui concerne le phénomène de feedback, il est constamment utilisé

lors des mouvements de l’épaule afin de coordonner les réponses musculaires face aux

contraintes internes et externes de l’individu (15). La réponse motrice est donc constamment

examinée et régulée au cours de la journée (13). Aussi, plus il y aura d’apprentissages et

d’expériences sensori-motrice et meilleur sera le geste.

Il semble cependant difficile de faire la différence entre la commande motrice du

mouvement et le contrôle neuromusculaire associé. En effet, les structures mises en œuvre

sont les mêmes, seulement, il existe une régulation du schéma en fonction des contraintes

internes et externes de l’individu (15). Par exemple lorsqu’un objet est lancé, il y a le schéma

moteur du lancer mais celui-ci doit également tenir compte des données proprioceptives

internes à l’individu (mouvements de l’ensemble des articulations du membre supérieur) et

celles provenant de l’environnement extérieur pour maintenir la stabilité du complexe de

l’épaule.

Le système sensori-moteur correspond à une boucle d’autorégulation entre les

éléments proprioceptifs ascendants et la réponse motrice efférente. L’ensemble forme un

système complexe avec de nombreuses interactions permettant de réguler les réponses

motrices au cours de la journée grâce aux phénomènes de feedbacks et de feedforwards. Les

mécanismes de ce système complexe sont résumés dans le schéma en annexe 1.

Page 20: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

16

4.2 Les limites du système sensori-moteur : sources d’instabilité

4.2.1 Influence de la fatigue musculaire sur le système sensori-moteur

D’après certaines études, il semblerait que la fatigue musculaire ait une influence sur

la boucle rétroactive du système sensori-moteur. En effet, d’après Carpenter et al (26), elle

augmenterait le seuil de détection des mouvements de rotation de l’épaule de 73%.

L’augmentation du seuil de détection entrainerait donc une diminution de la sensibilité

proprioceptive, ce qui a aussi été démontrée par l’étude de Hung-Maan et al (27), selon

laquelle, la fatigue musculaire entrainerait un retard de détection des mouvements au niveau

des mécanorécepteurs musculo-tendineux (OTG et fuseau neuromusculaire). La sensibilité du

mouvement étant diminuée, le risque de blessures serait augmenté avec l’activité que ce soit

du côté dominant ou non.

Il a aussi était montré que la détection du mouvement de rotation latérale apparaitrait

plus précocement que celui de rotation médiale (26). En revanche, les rotateurs médiaux de

l’épaule auraient une meilleure résistance à la fatigue du côté dominant comme du côté non

dominant que les rotateurs latéraux (étude réalisée chez des tennismans juniors de haut

niveau) (28). On peut alors se demander si une détection de la rotation latérale en toute fin

d’amplitude est présente ? Existerait-il un risque lésionnel en fin de mouvement d’armé ?

Cette notion ne favoriserait-elle pas les luxations antéro-inférieures, si courantes, en fin de

geste de lancer notamment ? Cependant, on peut également penser que ces spécificités

dépendent de l’activité physique pratiquée et donc de la force musculaire développée avec le

sport. Enfin, d’après Tripp and al (29), la fatigue aurait une influence sur le positionnement

articulaire de la scapulo-thoracique et de la gléno-huméral chez des lanceurs de baseball.

L’ensemble de ces études convergent donc vers la même hypothèse, à savoir que la

fatigue musculaire influencerait la proprioception (kinesthésie et positionnement articulaire)

mais rien n’est en faveur d’une modification du contrôle neuromusculaire. Myers et al (30)

signalent même dans leur étude que la réponse motrice est aussi rapide. Il semble donc

intéressant en rééducation de travailler la répétition et le positionnement de l’ensemble du

complexe articulaire afin de pallier les déficits proprioceptifs éventuels pouvant survenir en

cas de situation de fatigue musculaire.

4.2.2 Les déficits sensori-moteurs dans l’épaule instable passivement

4.2.2.1 Epaule instable et déficits sensori-moteurs : de nombreuses études en parlent

Les lésions capsulo-ligamentaires évoquées précédemment influenceraient les influx

proprioceptifs et donc le système sensori-moteur. Pour cela, les altérations kinesthésiques

(perception du mouvement articulaire) grâce au TTDPM (Treshold To Detection of Passive

Motion ou « seuil de détection du mouvement passif ») et les altérations du positionnement

articulaire ont été étudiées :

Lephart et al (31) montrent qu’il existe un seuil de détection du mouvement passif plus

long pour les épaules instables lors des rotations latérales et médiales en position neutre

ainsi qu’une reproduction anormale de la position passive (RPP ou Reproduction of

Passive Motion) par rapport au côté sain (on précisera qu’il n’y aucune différence entre

le côté dominant et le côté non dominant). Après avoir réalisé les mêmes tests chez des

patients ayant subis une capsuloraphie (rétablit la tension de la capsule articulaire), ils

ont confirmé le fait qu’une diminution de la tension capsulo-ligamentaire chez des

patients souffrant d’instabilité de l’épaule diminue le seuil de détection du

mouvement engendrant une mauvaise activation des voies afférentes et donc un

Page 21: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

17

déficit proprioceptif. On ne peut pas parler dans cette étude de déafférentation mais de

mauvaise activation nerveuse car les patients opérés récupèrent l’influx afférent, sans

pour autant que la chirurgie rétablisse les connexions nerveuses.

Tibone et al (21) ont également montré qu’il existait des déficits proprioceptifs chez des

patients souffrant d’instabilité avec une reproduction anormale de la position. De la

même manière, les voies afférentes sont mal activées car la re-tension capsulaire

améliore les résultats.

Forwell et Carnahan (32) ont montré des plus grandes vitesses maximales lors de

mouvements chez des patients souffrant d’instabilité de l’épaule lors d’exercices de

pointages dans différentes conditions (yeux ouvert, yeux fermés, vibrations au niveau du

deltoïde postérieur) témoignant de déficits proprioceptifs avec une diminution du

contrôle freinateur.

Les déficits proprioceptifs sont donc mis en avant chez des patients souffrant

d’instabilité de l’épaule mais certaines études montrent également des altérations similaires

chez des sujets n’ayant eu aucun épisode luxant et pratiquant une activité de lancer avec un

geste répétitif micro-traumatique :

Allegrucci et al (33) ont étudié la différence de TTDPM entre le côté dominant

effectuant le geste répétitif du lancer et le côté non dominant (témoin) chez des athlètes

sains, c’est-à-dire, sans pathologie d’épaule instable diagnostiquée ou douleur. Ils ont

alors trouvé que le seuil de détection du mouvement passif était abaissé dans les

positions hautes, c’est-à-dire lorsque la tension capsulo-ligamentaire est plus importante

ce qui confirmerait que la tension capsulo-ligamentaire évoquée précédemment influx

sur la détection du mouvement. Ils ont aussi noté un TTDPM plus important du côté

dominant dans différentes positions de l’épaule (hautes ou basses) par rapport au côté

contro-latéral signalant le déficit proprioceptif chez des lanceurs subissant un geste

microtraumatique répétitif.

Il a été précisé dans les chapitres précédents que la proprioception est le point de

départ de la boucle sensori-motrice. Son altération due à la laxité ligamentaire provoquée par

un geste sportif répétitif ou un traumatisme pourrait donc avoir une influence sur la réponse

motrice qui en découle et ainsi favoriser un cercle vicieux lésionnel :

Grâce à leur analyse électromyographique, McMahon et al (34), ont remarqué chez des

patients souffrant d’instabilité de l’épaule par rapport à des personnes saines, que l’on

avait une modification du contrôle neuromusculaire avec une diminution d’activité du

muscle supra-épineux pendant l’abduction de l’épaule et de la scapula (dans le plan de la

scapula) et une diminution de l’activité du muscle serratus antérieur pendant les

mouvements d’élévations du membre supérieur. Cette étude est d’autant plus

intéressante qu’elle met en avant des déficits de coordination entre les muscles de la

coiffe et les muscles scapulaires.

Une autre étude électromyographique s’est intéressée au geste de lancer (baseball) chez

des patients présentant une pathologie d’instabilité d’épaule. Glousman et al (35) ont

retrouvé chez ces patients des compensations face au manque de stabilité. En effet, ils

ont remarqué une augmentation d’activité du supra-épineux et du biceps brachial

(stabilisateurs antérieurs) et une sous sollicitation des muscles subscapulaires, grand

pectoral, grand dorsal et serratus antérieur durant la phase d’armer de bras (positions

contraignantes nécessitant une stabilisation antérieure optimale) par rapport au groupe

témoin.

Selon Myers et al (36), les patients souffrant d’instabilités antérieures traumatiques

récidivantes présentent des altérations du contrôle neuromusculaire qui pourraient

Page 22: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

18

avoir des effets dramatiques sur l’alignement de la composante des forces de

l’articulation gléno-humérale et qui pourraient donc contribuer à cette chronicité. Dans

leur étude électromyographique, ils ont enregistré l’activité des muscles péri-articulaires

en position d’appréhension (RE2) et ont remarqué une absence de co-activation des

muscles de la coiffe, une activation retardée du biceps brachial et un pic d’activation

plus important des muscles subscapulaire, supra-épineux et infra-épineux par rapport au

groupe témoin. On signalera alors que le biceps brachial permet d’augmenter la

résistance et de protéger l’épaule dans les mouvements d’armer de bras, en diminuant les

contraintes au niveau du faisceau inférieur du ligament gléno-huméral. Aussi, il

semblerait que l’augmentation des pics d’activation des muscles de la coiffe permettrait

de compenser les déficits de stabilisation passive et seraient la conséquence de déficits

proprioceptifs post lésionnels.

4.2.2.2 Les déficits sensori-moteurs s’associent aux lésions anatomiques : l’entrée dans un cercle vicieux de chronicité et de récidives

La notion de chronicité est évoquée lorsque le patient présente au moins deux épisodes

luxants, confirmés par les radiographies. Une distinction est alors faite entre les luxations

récidivantes, les subluxations récidivantes et les formes mixtes dans lesquelles il y a une

alternance de luxations et de subluxations (7). Aussi, les patients jeunes présentent plus de

risques de récidives que les sujets âgés du fait de leurs activités plus fréquentes et plus à

risque en moyenne (8). En effet, Wilk et al (5) décrivent une fréquence de récidive de 92%

chez les adolescents, 67% chez des sujets de 21 à 30 ans et de 20% pour une tranche d’âge de

40 à 50 ans.

A l’aide des chapitres énoncés précédemment, on comprend alors que l’instabilité de

l’épaule associe une altération de la stabilité passive (distension capsulo-ligamentaire) et de la

coordination sensori-motrice. Il en est de même pour un sportif réalisant un geste répétitif

micro-traumatisant sans antécédent d’épisode luxant. Il est pour cela difficile de connaitre la

cause première de l’instabilité d’épaule chez un sportif. Il est vrai qu’un premier épisode

traumatique (luxation ou subluxation) crée des lésions capsulo-ligamentaires diminuant la

stabilité passive de l’épaule, la sensibilité proprioceptive qui en découle et donc la réponse

motrice pouvant favoriser les microtraumatismes. Cependant, on remarque également que les

patients présentant une laxité capsulo-ligamentaire congénitale ou acquise par la répétition

d’un geste pourvoyeur de microtraumatismes présentent des déficits proprioceptifs et

neuromusculaires prédisposant aux épisodes luxants (37). Ce raisonnement est schématisé à la

figure 13. Les lésions anatomiques et les altérations du système sensori-moteur s’associent

donc pour créer une épaule instable et favoriser la récidive.

Episode luxant

(luxation,

subluxation)

Lésions

anatomiques

Diminution

informations

proprioceptives

Figure 13 : schématisation du cercle vicieux d’auto-entretien dans l’instabilité passive de l’épaule

Altération

neuromusculaire

Epaule instable

(Microtraumatismes)

Page 23: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

19

En conclusion, le système sensori-moteur est une boucle rétroactive. En effet, il débute

par une afférence sensitive de laquelle découle une réponse motrice efférente adaptée. La

partie sensitive proprioceptive rend compte de la position de l’articulation, du sens du

mouvement et de la force développée dans l’articulation par l’intermédiaire de

mécanorécepteurs spécifiques. Ces informations sont alors transmises au système nerveux

central grâce à des voies ascendantes afin de les regrouper et d’établir des schémas moteurs

adaptés.

Grâce à cette boucle rétroactive, le système sensori-moteur permet à l’épaule de

s’adapter de manière continue à l’environnement et de protéger ses structures anatomiques

lors des mouvements grâce à une contraction coordonnée des muscles péri-articulaires : on

parle de phénomène de feedback. De plus, la boucle permet à l’articulation d’anticiper et de

contrecarrer les traumatismes grâce à un phénomène d’anticipation (le feedforward) sans

lequel la lésion traumatique arrive plus rapidement que la réponse motrice ordinaire. Aussi,

grâce à leurs intégrations au niveau du cortex cérébral, ces phénomènes anticipatifs peuvent

être mémorisés et réutilisés lors de situation de stress articulaire. C’est dans cette optique que

prend tout l’intérêt de la rééducation sensori-motrice. En effet, elle cherchera à limiter le

risque de récidives, notamment en période de fatigue musculaire, et l’entrée dans un cercle

vicieux de chronicité chez des patients présentant une laxité capsulo-ligamentaire associée à

des déficits proprioceptifs et neuromusculaires.

Enfin, on peut également s’interroger sur l’intérêt préventif de la reprogrammation

sensori-motrice chez des sujets à risques ?

Place du traitement fonctionnel : influence des éléments anatomo-5physiologiques sur la prise en charge sensori-motrice d’une épaule instable passivement

5.1 Les intérêts et les inconvénients du traitement conservateur par rapport au traitement chirurgical

Un des objectifs de ce travail écrit de fin d’étude est de comprendre l’intérêt du

traitement conservateur par rapport au traitement chirurgical dans la pathologie de

l’épaule instable passivement ? Pour cela, il a été regroupé les études suivantes :

En 2005, Kirkley et al (38) ont réalisé une étude permettant d’objectiver les résultats

cliniques après une stabilisation sous arthroscopie ou après un traitement conservateur lors

d’un premier épisode traumatique de l’épaule. Ils ont trouvé à long terme (79 mois) un

nombre de récidives plus important chez les patients non opérés que chez les patients opérés

(18,5% contre 60%). En revanche, ils ont également étudié les résultats de différents

questionnaires complétés par les patients ou les thérapeutes (Western Ontario Shoulder

Instability ou WOSI, Disability of the Arm Shoulder and Elbow ou DASH et American

Shoulder and Elbow Surgeon ou ASES) et ont constaté peu de différence de fonctionnalité de

l’épaule entre les deux groupes pour l’ASES et le DASH. En revanche, la fonctionnalité serait

diminuée de 11% pour le groupe non opéré à 79 mois post traitement avec le WOSI.

De la même manière, Jakobsen et al (39) ont confirmé en 2007, que le risque de

récidives à plus ou moins long terme était moins important pour les patients opérés (9% de

récidives pour le traitement chirurgical contre 62% pour le traitement conservateur à 10 ans).

De plus, ils décrivent de « bons résultats » pour les patients ayant subi un traitement

chirurgical secondaire au traitement conservateur ayant échoué. Pour eux, même si certains

patients dans leur étude semblent satisfaits du traitement conservateur, les résultats sont

Page 24: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

20

favorables au traitement chirurgical après un premier épisode de luxation traumatique sur tous

les plans (récidives et complications comme la douleur, l’instabilité…).

Enfin, en 2010, il a été réalisé une revue Cochrane par Handoll et al (40) confirmant

que le risque de récidives est moins important lors de traitements chirurgicaux que lors

de traitements conservateurs. Même si la chirurgie semble préférable pour des personnes

jeunes pratiquant des activités à risques, il semble pour eux impossible de généraliser

l’indication chirurgicale. Aussi, il existerait selon les auteurs, de nombreux biais dans les

études réalisées. Par exemple, il est difficile de savoir si le traitement chirurgical effectué est

le meilleur et il en est de même pour la qualité du traitement conservateur. Cet écrit signale

également qu’il existe des risques de complications post opératoires et notamment infectieux

qui ne sont pas présents avec la rééducation.

En conclusion, le traitement chirurgical semble le plus indiqué lors d’un premier

épisode de luxation traumatique chez une personne jeune et pratiquant une activité à risques.

Cependant, il doit être discuté au cas par cas et tenir compte d’un ensemble de facteurs intra-

individuels (laxité congénitale, activité sportive et niveau de pratique, âge, motivations, peur

du risque infectieux, contexte de prise en charge…) (4). Le traitement conservateur pourra

être proposé en première intention afin d’éviter la chirurgie. Si le sujet fait alors face à une

récidive, les résultats après un traitement chirurgical secondaire semblent être satisfaisants (la

rééducation sera en revanche plus longue pour un sportif souhaitant reprendre son activité !).

Après avoir discuté l’intérêt du traitement conservateur par rapport à la stabilisation

chirurgicale, il était également important de comprendre quel est l’intérêt de la rééducation

sensori-motrice au sein de ce traitement conservateur, dans la pathologie de l’épaule

instable passivement non opérée ?

Si il est fait référence à ce qui a été dit auparavant, le patient se présente en

rééducation avec une distension de ses structures capsulo-ligamentaires à la suite d’un

traumatisme ou la répétition d’un geste microtraumatique. Il en découle également une

dysfonction des mécanismes de stabilisations dynamiques. En effet, la diminution de la

sensibilité proprioceptive semble influer sur le contrôle neuromusculaire de l’épaule

engendrant une altération des phénomènes de feedback et de feedforward. Etant donné que

son épaule est exposée au risque de récidives et que sans chirurgie il est impossible de réparer

la distension ligamentaire, le traitement fonctionnel veillera à pallier les déficits de

stabilisation passive grâce à une meilleure stabilisation dynamique. Il sera recherché une

augmentation de la sensibilité proprioceptive et une optimisation du contrôle

neuromusculaire : on parle de reprogrammation sensori-motrice (RPSM).

Il ne faut cependant pas omettre que la rééducation sensori-motrice n’est pas le seul

élément du traitement conservateur, elle ne suffit pas à la réhabilitation d’une épaule instable

passive non opérée. En effet, selon la cause de l’instabilité et sa temporalité (aigüe ou

chronique) la réhabilitation pourra également nécessiter une récupération des amplitudes

articulaires et des techniques à visées antalgiques par exemple. De plus, elle sera toujours

associée à un renforcement musculaire ce qui rend la justification scientifique de son

efficacité difficile car indissociable (20).

Après avoir expliqué l’intérêt du traitement conservateur et de la RPSM dans la

pathologie de l’épaule instable, il faut alors se demander comment réaliser une

reprogrammation sensori-motrice efficace d’après les données théoriques énoncées

précédemment ? On précisera que la rééducation théorique proposée ci-après est orientée pour une

instabilité antérieure soit 95% des épisodes luxants.

Page 25: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

21

5.2 Objectifs et principes de la rééducation sensori-motrice : justifications grâce aux données anatomo-physiologiques énoncées

5.2.1 Objectifs de prise en charge : (13) (19) (20) (24) (41) Le principal objectif à court, moyen et long terme de la rééducation sensori-motrice de

l’épaule instable passivement est de permettre au patient de retrouver son niveau d’activité

sans gêne, douleur ou appréhension tout en évitant le risque de récidives (4). De cet objectif

général résulte différents sous-objectifs basés sur les données anatomo-physiologiques

développées dans les chapitres précédents :

Améliorer le stock d’informations proprioceptives pour compenser les déficits post

lésionnels créés par la distension capsulo-ligamentaire :

Augmenter la sensibilité des afférences périphériques.

Rétablir et favoriser l’apparition de nouvelles voies afférentes pour restaurer la

transmission des influx proprioceptifs.

Améliorer la prise de conscience proprioceptive.

Intégrer des nouveaux schémas moteurs afin d’optimiser le réflexe d’étirement mais

aussi l’élaboration au niveau central de schémas de plus en plus adaptés aux situations

de stress articulaire qui permettront d’éviter les lésions.

Améliorer la réponse motrice :

Améliorer la préparation et la réaction motrice grâce à l’intégration de nouveaux

schémas moteurs.

Restaurer une stabilisation dynamique de l’épaule en facilitant la coordination et

la co-activation des couples de force. L’objectif sera de centrer la résultante des

forces des différents groupes musculaires dans la glène.

Augmenter la force de compression de la résultante des forces centrée dans la

glène afin de favoriser la congruence articulaire stabilisatrice.

Améliorer la rigidité musculaire.

Ajuster le mouvement scapulaire à celui de la tête humérale.

Apprendre la position de stabilité articulaire maximale (PSAM) qui faciliterait la

congruence articulaire et la stabilisation dynamique des muscles de la coiffe.

Faciliter la transition entre rééducation et retour à l’activité en rééduquant le geste sportif

traumatisant et redonner une fonctionnalité normale de l’épaule dans les activités de la

vie quotidienne et sportive.

5.2.2 Principes de prise en charge et éléments de progression en rééducation sensori-motrice

La rééducation sensori-motrice peut être commencée précocement de manière peu

intense et dans des positions de stabilités car dans ce cas-là, les risques d’aggravation de la

lésion sont peu importants (19).

Afin d’améliorer la sensibilité des afférences périphériques il faudra travailler dans des

amplitudes moyennes pour stimuler les récepteurs musculo-tendineux puis dans des

amplitudes de plus en plus hautes pour stimuler les récepteurs capsulo-ligamentaires (24). Il

faudra aussi tenir compte de l’évolution des lésions avant d’aller dans des positions de plus en

plus instables. De plus, favoriser les perturbations extérieures dans des positions diverses

permet d’augmenter l’intégration proprioceptive et la mémorisation au niveau central de

schémas moteurs qui pourront être réutilisés lors de situations dangereuses pour l’articulation

dans un temps inférieur au risque lésionnel (13). On travaillera également la double tâche afin

de solliciter les différents niveaux d’intégration des afférences proprioceptives.

Il ne faudra travailler aucun muscle de manière analytique qui pourrait favoriser

l’instabilité comme le grand pectoral, le grand dorsal ou encore le chef long du biceps

Page 26: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

22

Figure 14 : Apprentissage de la PSAM

Elle est composée de co-contractions

des érecteurs du rachis pour la stabilisation du tronc (1)

des muscles fixateurs de la scapula pour la stabilité de

l’unité scapulo-claviculaire (2)

des muscles de la coiffe pour la stabilisation de l’unité

scapulo-humérale (3)

et d’un alignement segmentaire (4)

brachial. En effet, ce dernier est responsable d’une composante ascensionnelle de la tête trois

fois plus grande que la composante stabilisatrice même s’il s’oppose aux translations dans les

positions basses de 0 à 45°. Aussi, le deltoïde participe à la stabilité de l’épaule en RE2, il ne

peut donc pas être sollicité dans une autre position (24).

Lors des mouvements d’élévation, la sonnette médiale est à proscrire afin d’éviter la

translation inférieure de la tête humérale (24).

La répétition favorisera l’ensemble de ces mécanismes et permettra d’éviter les lésions

facilitées par la fatigue musculaire et la diminution de vigilance.

La reprogrammation sensori-motrice est composée d’une gamme impressionnante

d’exercices variés, progressifs et adaptables aux situations et au matériel à la disposition du

thérapeute. Cependant, il peut être donné des éléments de progression classiquement utilisés

en thérapie. Par exemple, il est possible de partir d’une position de stabilité articulaire vers

une position de plus en plus contraignante pour l’épaule. Aussi, lors des sollicitations

manuelles, on pourra d’abord prévenir le patient puis jouer en progression sur sa réactivité

face à une sollicitation méconnue. L’ajout de plans instables favorisera aussi cette notion de

réactivité et de sollicitations diverses. De plus, il faudra jouer sur les bras de leviers,

l’intensité, la vitesse des sollicitations… La difficulté pourra également être augmentée en

supprimant les informations visuelles ou en ajoutant des tâches multiples.

5.3 Moyens thérapeutiques

5.3.1 Position de stabilité articulaire maximale (PSAM) et reproduction de position

La Position de Stabilité Articulaire Maximale (figure 14) est obtenue lorsque l’humérus

est dans le prolongement de l’épine de la scapula. En effet, dans cette position le complexe

omo-huméral présente :

− Une congruence articulaire maximale. On parle de Closed packed position de Mac

Conail.

− Un verrouillage de la tête humérale contre la glène grâce à une mise en tension

ligamentaire (stabilisation mécanique) et une action coaptatrice dynamique des

muscles de la coiffe (stabilisation dynamique). Cette position permettrait

d’optimiser la relation longueur-tension de la coiffe des rotateurs évitant ainsi de

mettre en danger les structures passives (41).

En plus de cet alignement segmentaire, il est également demandé au patient un auto-

grandissement ainsi qu’une adduction sonnette latérale de la scapula favorisant l’alignement

segmentaire épine-tête humérale. Cette position présente un intérêt dans la stimulation

proprioceptive.

Comme évoqué précédemment dans les éléments de progression, la reprogrammation

sensori-motrice commencera dans une position de stabilité de l’épaule pour aller vers des

Page 27: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

23

secteurs de plus en plus contraignants. C’est dans ce début de réhabilitation que la PSAM

prend donc tout son intérêt. Pour cela, l’intégration de la position sera favorisée, en plaçant le

membre supérieur dans l’alignement de l’épine scapulaire de manière passive puis active avec

ou sans repères (bâtons dans l’alignement de la scapula). Il sera aussi possible d’utiliser des

outils de feedbacks visuels et de guider verbalement le patient afin qu’il réalise conjointement

l’auto-grandissement et les mouvements de sonnette latérale et d’adduction de la scapula

(instabilité antérieure) (24).

Toujours d’après les éléments de progression cités précédemment, il sera possible de

favoriser l’intégration sensori-motrice grâce à de nombreuses répétitions, en demandant au

patient de fermer les yeux, en rajoutant des stabilisations rythmiques que l’on évoquera…

Cette position devra enfin être adaptée au geste sportif incriminé.

5.3.2 Reproduction de force Il a été dit précédemment qu’un patient souffrant d’instabilité présentait des déficits

proprioceptifs (21) (31) (32). Aussi, il a été évoqué que la proprioception regroupe différentes

sensibilités et notamment la sensation de résistance ou production de force au sein de

l’articulation (17). Il est vrai que les études citées évoquent simplement une altération de la

sensibilité kinesthésique et du placement articulaire mais la sensation de résistance n’a pas

été testée et il semblerait donc intéressant de tester la capacité du patient à reproduire une

force identique au sein de son épaule (21) (31) (32). Les machines de reproduction de force de

type Huber® permettent de tester ce type de capacités. En effet, il est demandé au patient de

réaliser un mouvement de traction ou de poussé dans une position de l’épaule donnée (trois

niveaux d’amplitudes différents). La force appliquée par l’opérateur est enregistrée par la

machine. Par la suite, le patient doit reproduire la même force à l’aide de feedbacks visuels

qui permettent également au kinésithérapeute de suivre l’évolution du patient. De la même

manière que lors des exercices précédents, les positions de l’épaule pourront être variées, en

jouant sur la mise en mouvement du plateau au niveau des membres inférieurs ou en y faisant

varier la position des pieds (24).

5.3.3 Stabilisations rythmiques Des études citées précédemment ont montré que les patients souffrant d’instabilité de

l’épaule présentaient des déficits proprioceptifs et donc une altération du contrôle

neuromusculaire qui en résulte (21) (32) (36). De plus, il a été dit que le système sensori-

moteur permettait les phénomènes de feedforwards (18). La reprogrammation sensori-

motrice, à l’aide des stabilisations rythmiques cherche à favoriser ces phénomènes qui

permettront d’anticiper un phénomène lésionnel. En effet, elle regroupe différents types

d’exercices permettant une adaptation du complexe de l’épaule et de l’ensemble de

l’organisme à des contraintes extérieures variées. Cette diversification de situations subies par

l’articulation de l’épaule pendant la rééducation permettra au système nerveux central

d’intégrer des schémas moteurs et de les stocker afin de les réutiliser lors d’une activité

ultérieure (24). De plus, selon Wilk et al (42), l’alternance de contractions agonistes-

antagonistes faciliterait la co-activation musculaire et donc la compression articulaire

stabilisatrice.

Les stabilisations rythmiques peuvent être appliquées par le soignant, par le patient

lui-même ou des outils variés et dans toutes les positions. Il est distingué les stabilisations

isométriques pendant lesquelles l’objectif est de répondre à la sollicitation dans une position

donnée, des stabilisations dynamiques ou les sollicitations extérieures sont appliquées à

n’importe quel moment du mouvement.

Page 28: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

24

Les exercices de stabilisations rythmiques étant nombreux, il est par exemple

proposé (20) (24) :

L’application de résistances manuelles isométriques par le kinésithérapeute

alternativement dans le sens de la rotation interne ou de la rotation externe dans la

PSAM.

Des résistances élastiques lors du renforcement des rotateurs en RE2 ou RE1

L’utilisation de plans instables sous les membres inférieurs ou supérieurs en chaine

cinétique fermée (plateau de freeman, ballons, wobble boards, bosu, etc...).

L’utilisation de Flexibarres permet un travail statique des muscles de la coiffe dans

différentes positions. Les sollicitations peuvent être antéro-postérieures ou latérales.

5.3.4 Chaine cinétique ouverte et chaine cinétique fermée Distinguer la chaine cinétique ouverte (CCO) de la chaine cinétique fermée (CCF)

semble parfois assez difficile en ce qui concerne la rééducation du membre supérieur. Aussi,

les deux types d’exercices semblent à la fois complémentaires et nécessaires à la

reprogrammation sensori-motrice d’une épaule instable passivement (43).

5.3.4.1 Chaine cinétique ouverte (CCO) Elle est décrite dans la littérature comme un segment distal libre, ne supportant pas le

poids du corps. Le travail en CCO permettrait des mouvements de grandes vitesses avec peu

de stabilisations à la différence de la CCF. De plus, on retrouverait des contraintes en

cisaillement, une déformation des mécanorécepteurs et une alternance de contraction

excentrique et concentrique lors du mouvement (43).

Ce type d’exercice permet en début de rééducation l’apprentissage de la PSAM, chez

des lanceurs en position d’armer de bras. En progression, la chaine ouverte permet également

d’appliquer des stabilisations rythmiques comme évoqué précédemment. En fin de

rééducation, elle pourra notamment servir à travailler les gestes sportifs dans des positions

extrêmes (tennis, sports de lancers, hockey, natation…) avec un minimum de stabilisation et

un maximum de vitesse en vue d’une reprise d’activité optimale.

5.3.4.2 Chaine cinétique fermée (CCF) A l’inverse de la CCO, la chaine cinétique fermée est définie comme un segment distal

mobile qui supporterait le poids du corps (43). De nombreuses activités physiques utilisent le

membre supérieur en CCO, cependant, il semble intéressant de travailler également la CCF

car elle permettrait une stabilisation de l’ensemble du complexe articulaire. En effet, il y

aurait une diminution des contraintes en cisaillement et des translations de la tête humérale

grâce à une stabilisation dynamique de la scapulo-thoracique ainsi qu’une co-contraction des

muscles de la coiffe et une augmentation de la congruence articulaire (36). Cette dernière

favoriserait donc la stimulation des récepteurs proprioceptifs (on a dit précédemment que les

corpuscules de Pacini étaient sensibles à la compression) dont la sensibilité est diminuée par

la distension capsulo-ligamentaire. L’ouvrage de Ellenbecker et al (44) signale une

augmentation de la kinesthésie lors de rééducation en CCF.

Pour illustrer la CCF dans la rééducation de l’épaule instable, il pourra être réalisé des

exercices d’appuis faciaux (sur quatre membres puis en progression jouer sur une diminution

des appuis, figures 15 et 16), d’appuis latéraux (sur mur ou sur sol), etc…En progression, il

faudra ajouter des plans instables au niveau des membres supérieurs ou inférieurs que l’on

évoquera dans le chapitre suivant, il sera possible de jouer sur les informations visuelles, les

déstabilisations manuelles appliquées par le praticien (l’ajout de déstabilisations extérieures

variées favorisent l’intégration proprioceptive (5) (13) (41)), etc…

Page 29: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

25

En conclusion, l’ensemble des exercices proposés en CCO ou CCF permettent à

différents instants de la rééducation de stimuler les afférences proprioceptives et d’améliorer

le contrôle neuromusculaire de l’épaule en intégrant des schémas moteurs variés.

5.3.4.3 Tractions en chaîne cinétique fermée L’alternance de tractions et de compressions dans l’axe de la diaphyse humérale (ne

pas solliciter les différents faisceaux du grand pectoral) permettent l’activation réflexe des

muscles coaptateurs et la stimulation des récepteurs articulaires (42).

D’après Stévenot et al (45), les mouvements en chaîne cinétique ouverte ainsi qu’une

altération sensori-motrice de la coiffe comme dans la pathologie de l’épaule instable

altéreraient le centrage de la tête humérale. Etant donné que l’atteinte étudiée se traduit par

des translations excessives de la tête humérale par rapport à la glène, il semblerait intéressant

de solliciter la coiffe comme un muscle stabilisateur et recentreur. Pour cela, cette étude

propose de placer le patient en position assise. Ensuite, le kinésithérapeute empaume la base

du pouce de la main du sujet avec sa main homolatérale; puis il élève le membre supérieur du

sujet dans le plan de la scapula jusqu’à le placer dans le prolongement de la partie sous-

cutanée de l’épine, enfin le kinésithérapeute plaque le dos de la main du sujet contre son

thorax afin d’offrir un point fixe distal. Le sujet serre lui aussi la base du pouce du

kinésithérapeute. La rotation de l’épaule est celle choisie spontanément par le sujet. La main

controlatérale du kinésithérapeute est posée sur l’épaule, le pouce posé sur l’extrémité

proximale de l’humérus, la face palmaire des 3 derniers doigts posée sur la fosse infra-

épineuse (figure 17). Dans cette position, le kinésithérapeute tient fermement la main du sujet

et lui demande : « tirez comme pour raccourcir le membre supérieur sans fléchir le coude ni

surélever l’épaule » (figure 18).

On sait désormais que la chaîne cinétique fermée favorise la congruence articulaire.

De plus, cet exercice est réalisé avec un alignement segmentaire stabilisateur. Ces

sollicitations favoriseraient donc les afférences proprioceptives et le contrôle

neuromusculaire. Aussi, la coiffe agirait dans le même temps comme un muscle recentreur,

protégeant ainsi les lésions des structures stabilisatrices. Enfin, cette étude étant surtout

orientée vers les pathologies tendineuses de la coiffe, on peut également ajouter un versant

préventif aux complications des instabilités d’épaule.

Figure 15 : RPSM en CCF sur deux membres

supérieurs

Figure 16 : RPSM en CCF sur un membre

supérieur

Figures 17 et 18 : Recentrage actif de la

tête humérale en chaîne cinétique fermée

avec contrôle palpatoire de la contraction

musculaire

Page 30: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

26

5.3.5 Les plans instables L’ajout d’un plan instable en reprogrammation sensori-motrice permet d’augmenter

l’activité musculaire nécessaire à la stabilité de l’articulation et de l’équilibre postural global.

D’après les notions évoquées précédemment, les déstabilisations stimulent les afférences

proprioceptives et le contrôle neuromusculaire puisque l’organisme doit constamment

s’adapter aux contraintes extérieures. Les déstabilisations amenées par les plans instables sont

variées et dépendent grandement des stratégies d’équilibrations du patient.

Sandhu et al (46) ainsi que Lehamn et al (47), ont réalisé des études

électromyographiques lors d’exercices de push-ups sur plans stables et instables et ont trouvé

des modifications d’activités musculaires entre les deux exercices qui confirment les notions

précédentes. En revanche, ils signalent aussi que l’activation musculaire n’est augmentée que

sur certains groupes musculaires mais pas sur tous. Celle-ci dépendrait de la position du

patient par rapport au plan instable (dans ce cas un ballon de Klein) et de son centre de

gravité. Ils font également l’hypothèse que chaque individu pourrait utiliser des stratégies

d’équilibrations qui lui sont propres. La coordination neuromusculaire pourrait donc dépendre

de facteurs intra-individuels ce qui suggérerait que l’entrainement pourrait influencer les

réponses face à l’instabilité.

Enfin, Naughton et al (48) ont réalisé une étude mêlant CCF et plans instables en

plaçant leurs patients sur des ballons de Klein au niveau du bassin (pas d’appuis des membres

inférieurs au sol ou sur le ballon) avec un appuis des membres supérieurs sur un wobbleboard

(plateau instable sphérique). Ils ont retrouvé une amélioration de la discrimination du

mouvement chez ces patients par rapport au groupe témoin. Ces exercices permettraient de

stimuler les récepteurs proprioceptifs musculaires et articulaires et donc de stimuler les

afférences proprioceptives mal activées chez une personne souffrant d’instabilité de l’épaule.

L’alternance de sollicitations dans différents plans nécessiterait une adaptation importante et

donc un contrôle dynamique coordonné. Le contrôle sensori-moteur est donc stimulé et se

doit d’être efficace. Les figures 19 et 20 illustrent ce travail en CCF sur plan instable.

7

5.3.6 Le travail pliométrique En fin de prise en charge, le travail pliométrique permet un perfectionnement du

contrôle neuromusculaire et une augmentation de la proprioception notamment consciente

grâce aux contractions alternées concentriques et excentriques rapides. En effet, il y aurait une

première phase excentrique créant un stretch rapide, stimulant, au niveau des structures

musculo-tendineuses. La seconde phase correspond à l’amortissement du mouvement et doit

être le plus court possible afin de garder l’effet neurologique bénéfique du stretch. La dernière

phase est concentrique en réponse à l’étirement des structures musculo-tendineuses lors du

stretch (13) (42).

Figure 19 : RPSM en CCF, le plan instable est placé sous un

membre inférieur et le membre supérieur controlatéral est en

appui sur un plan stable

Figure 20 : RPSM en CCF, les deux membres

supérieurs sont en appuis sur un plan instable

Page 31: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

27

Aussi, la partie théorique évoquait une sensibilité à la tension musculaire passive des

OTG, c’est-à-dire lors de l’étirement du muscle, et une sensibilité à la tension musculaire

active lors de la contraction du muscle. Les exercices excentriques récréent ce cas de figure

puisqu’il y a une contraction musculaire dont les points d’insertions s’éloignent. Leur

activation entraine par la suite un relâchement des agonistes et une contraction des

antagonistes modulée (15) (20) (24). De la même manière, les fuseaux neuromusculaires sont

responsables de la transmission des informations sur le changement de longueur du muscle

(15). Ils seront donc stimulés lors de première phase excentrique et l’information

proprioceptive transmise aux centres nerveux influera sur la réponse motrice. Swani et al (49),

rajoutent dans leur revue de littérature une notion d’adaptation des OTG avec la répétition des

mouvements qui augmenterait en réponse la sensibilité des fuseaux neuromusculaires lors

d’un programme de réentrainement pliométrique de six semaines chez des nageuses de haut

niveau. Cet accroissement de sensibilité des fuseaux améliorerait la proprioception. De plus,

les auteurs signalent que l’alternance de contraction rapide permet une stimulation du système

nerveux périphérique (aspect proprioceptif) mais également central car le patient doit

anticiper le geste qui s’enchaine (lancer-réception-lancer-réception…). Il est ici retrouve les

phénomènes de feedback et de feedforward : le patient doit s’adapter continuellement lors de

l’exercice mais également anticiper toutes modifications pouvant apparaitre (trajectoires

modifiée du lancer, plus grande vitesse…). Enfin, il a été évoqué précédemment l’influence

de la fatigue sur le système sensori-moteur or cette revue signale que la répétition des lancers

sur une période de six semaines pourrait diminuer l’apparition précoce de fatigue musculaire

et augmenter l’efficacité et la coordination musculaire dans ces situations (49).

Wilk et al (42) ont créé un programme d’entrainement pliométrique à l’aide d’un

trampoline incliné à 45° par rapport à la verticale chez des lanceurs. Il consistait tout d’abord

à réaliser des lancers à deux mains en position basse (position de départ avec les mains et le

ballon au niveau du thorax), puis des lancers à deux mains en position haute (position de

départ avec le ballon derrière la tête), des lancers à deux mains sur le côté et enfin des lancers

à une main en position fonctionnelle d’armé de bras. Le but de ces exercices était pour les

auteurs de transférer l’énergie des membres inférieurs vers le geste de lancer.

Après avoir évoqué l’intérêt des exercices pliométriques sur la stimulation

proprioceptive, le contrôle neuromusculaire ainsi que sur les phénomènes de feedbacks et de

feedforwards, il est donné quelques exemples utilisés en rééducation. Il est notamment cité les

poussées sur mur puis en progression sur table, sur le sol en faisant varier le placement de

l’épaule, les différents lancers, les appuis faciaux sur plan instable (figure 21) ou trampoline

(figure 22), etc… (24). Il sera également intéressant de jouer sur la vitesse d’éxecution,

l’intensité des lancers, la distance du trampoline, le poids des ballons, le changement de plan

instable, l’ajout d’une tâche secondaire type « pompe claquée », etc…

Figure 21 : travail pliométrique sur plan instable, la

position des mains varie

Figure 22 : travail pliométrique sur

trampoline

Page 32: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

28

En fin de rééducation, ce type d’exercices semble très intéressant car ils permettent

d’augmenter le stress articulaire et de mettre le patient face à des sollicitations retrouvées dans

de nombreuses activités (42). En effet, les pratiques sportives requièrent des situations

explosives que l’on retrouve dans les exercices pliométriques (41).

5.4 Intégration du geste sportif dans la rééducation de l’épaule instable La reprogrammation sensori-motrice d’une épaule instable passivement doit tenir

compte de l’activité sportive pratiquée par le patient afin de travailler dans le mouvement à

risque. En effet, il sera important de réaliser des exercices en position d’armer de bras chez un

lanceur, le nageur sera rééduqué dans différentes positions en jouant sur les mouvements de

pronation-supination, le tennisman travaillera dans des positions hautes contraignantes

adaptées à son geste de coup droit ou de revers mis en cause (41) … A chaque sportif

correspondra une prise en charge adaptée, répondant à ses besoins et aux contraintes liées à

l’activité.

Pour illustrer ce chapitre et ayant évoqué des programmes pliométriques, il peut

paraitre intéressant pour un lanceur par exemple de travailler des lancers sur trampoline, avec

ou sans ballons lestés afin de se rapprocher de son geste fonctionnel.

Discussion 6

L’épaule instable passivement se définit principalement par une translation excessive

de la tête humérale par rapport à la glène. Ce mouvement pathologique s’explique par des

déficits de stabilisations mécanique et dynamique : le phénomène luxant a engendré une

distension capsulo-ligamentaire influant directement sur la sensibilité et la réponse du système

sensori-moteur coordinateur des contractions musculaires.

En effet, ce système bouclé débute par la formation d’un message sensitif

proprioceptif prenant naissance au niveau de mécanorécepteurs spécifiques situés dans la

capsule articulaire distendue, des ligaments laxes, des tendons, des muscles... Ce message

renseigne sur le positionnement articulaire, le sens du mouvement et la force développée dans

l’articulation. Les informations sensitives mal détectées du fait des lésions anatomiques sont

acheminées à des vitesses différentes vers les centres nerveux. La moelle épinière, le tronc

cérébral puis l’association du cortex cérébral et du cervelet réalisent alors la sommation

d’informations proprioceptives erronées à partir desquelles ils vont établir des schémas

moteurs compensateurs plus ou moins complexes et rapides. De ces schémas résultera donc

des réponses motrices déficitaires face à une situation de stress articulaire.

La problématique majeure de cette pathologie est alors d’éviter d’entrer dans un cercle

vicieux de chronicité. En effet, quel que soit le point de départ de la pathologie (traumatique

ou microtraumatique), les lésions anatomiques vont altérer le contrôle sensori-moteur et

favoriser les récidives qui à leur tour aggraveront les lésions initiales, le déficit proprioceptif

et le contrôle neuromusculaire… On ajoutera que la laxité constitutionnelle de par la

distension ligamentaire est également un facteur favorisant l’instabilité de l’épaule.

Aussi, tout au long de notre journée, la réponse motrice est régulée grâce aux

phénomènes sensori-moteurs de feedbacks et de feedforwards. La sensibilité proprioceptive

ainsi que la réponse neuromusculaire qui en découle étant altérées, ces mécanismes correctifs

seraient donc déficitaires. Cependant, la sensibilité proprioceptive pourrait être sollicitée à

travers des situations variées de rééducation (plan instable, chaîne cinétique ouverte et fermée,

travail pliométrique, PSAM…) de la même manière que le contrôle neuromusculaire. Les

phénomènes complémentaires de feedforwards et de feedbacks pourraient alors être

Page 33: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

29

mémorisés et réutilisés lors de situations de stress articulaire, protégeant ainsi l’épaule de la

récidive.

Une étude récente (Avril 2012) de Hung et Darling (50) remet en cause les données

précédentes. En effet, ils ont remarqué que la littérature mettait en avant un déficit

proprioceptif chez des sujets atteints d’instabilité de l’épaule en s’appuyant sur des mesures

du positionnement articulaire exclusivement passif. Comme leurs prédécesseurs, ils ont

retrouvé cette altération passive en abduction-rotation latérale, en revanche ils ont remarqué

qu’en actif le positionnement articulaire chez les patients souffrant d’instabilité était similaire

à celui de sujets sains. Pour eux, les informations provenant des mécanorécepteurs,

notamment des fuseaux neuromusculaires et des OTG mis en tension lors du mouvement,

pourraient compenser les déficits proprioceptifs post lésionnels apportés par les distensions

capsulo-ligamentaires. Les individus souffrant d’instabilité de l’épaule pourraient donc avoir

un contrôle neuromusculaire adéquat pour stabiliser leur épaule dans les activités de la vie

quotidienne et cette altération pourrait ne pas être le facteur favorisant majoritaire aux

récidives. Cette étude remet donc en cause l’intérêt de la reprogrammation sensori-

motrice dans la rééducation de la stabilisation active de l’épaule. On peut quand même se

demander si l’intérêt de la RPSM n’est mis en doute que pour des activités fonctionnelles ou

s’il est également remis en cause en vue d’une reprise d’activités sportives traumatisantes

pour l’épaule ? Ces données récentes nécessiteraient donc des études complémentaires.

La reprogrammation sensori-motrice pourrait alors être remise en cause dans la

rééducation d’une instabilité passive de l’épaule non opérée même si une seule étude

contradictoire ne semble pas suffire à contrecarrer les écris précédents. Tout de même, l’élan

kinésithérapique tend de nos jours à aller dans le sens de l’Evidence Based Medecine (EBM)

ou plutôt de l’Evidence Based Practice qui se définissent comme « l'utilisation consciencieuse

et judicieuse des meilleures données actuelles de la recherche clinique dans la prise en charge

personnalisée de chaque patient » (51).

Sackett et al (51) précisent tout de même que la rééducation basée sur les preuves vient

compléter l’expérience et le jugement du thérapeute mais ne les remplace pas. En effet, il est

parfois difficile de connaître les raisons de la réussite ou de l’échec d’une technique sur un

patient, cela semble « parfois aller au-delà des preuves ». Il est vrai que le traitement

fonctionnel et donc la reprogrammation sensori-motrice a permis à certains patients de

retrouver des activités de la vie quotidienne et sportive même si celle-ci pourrait être

controversée à l’avenir par l’apport de preuves scientifiques… (39) (40).

Il a été dit précédemment que l’épaule était un complexe articulaire et pourtant cet

écrit se penche principalement sur l’articulation gléno-humérale. En effet, lorsque la

pathologie de l’épaule instable est décrite l’articulation gléno-humérale est en première ligne

car elle est le lieu du mécanisme luxant. C’est également elle qui subit des lésions

anatomiques engendrant des déficits proprioceptifs et neuromusculaires. Cependant, on

remarque dans la littérature que cette pathologie a une influence sur l’ensemble du complexe

de l’épaule et associe notamment des dysfonctions au niveau scapulaire. En effet, d’après

Fayad et al (52), il y aurait une altération de la position cinématique de la scapula associée à

un déséquilibre de l’activité des muscles scapulo-thoracique : le rythme scapulo-huméral

serait donc modifié par rapport au côté sain. Aussi, McMahon et al (34) mettent en avant des

déficits de coordination entre les muscles scapulaires et les muscles de la coiffe. Ces éléments

signaleraient donc une altération du système sensori-moteur au niveau scapulaire et

viendraient s’associer aux éléments déficitaires de la gléno-humérale, évoqués dans les

chapitres précédents.

Page 34: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

30

Dans ce travail, l’importance des liens entre les différentes articulations du complexe de

l’épaule avait déjà été évoquée. En effet, l’alignement segmentaire permettrait d’augmenter la

congruence articulaire et donc la stabilité. Dans le même principe, Finoff et al (41) signalent

que l’articulation gléno-humérale ne pourra être stable que si la scapula est stable. Il

semblerait donc important d’associer à la rééducation déjà évoquée dans cet écrit, un travail

de la cinématique et de la stabilité scapulaire.

Enfin, il ne faudra pas oublier que la reprogrammation sensori-motrice est indissociable

du reste du traitement conservateur dans l’épaule instable et notamment du renforcement

musculaire spécifique à une activité donnée.

Conclusion 7

L’objectif de cette revue de littérature est de regrouper les informations concernant la

pathologie de l’épaule instable mais surtout de mettre en lien les données théoriques

anatomiques et neuro-physiologiques à la pratique clinique. Même si la reprogrammation

sensori-motrice semble pouvoir être remise en cause par les données scientifiques dans la

rééducation de l’épaule instable passivement, chez un patient non opéré, elle semble faire

consensus en kinésithérapie et reste quotidiennement utilisée en pratique.

Ce travail m’aura donc permis d’améliorer mes connaissances en traumatologie de

l’épaule ainsi qu’en neurologie mais surtout de faire évoluer ma pratique professionnelle

future concernant une pathologie en accroissement au cours des dix dernières années du fait

de l’intensification des pratiques sportives.

Page 35: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

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Page 38: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques

Longueur du muscle

Capsule

et

ligaments

Muscles

Corpuscules de Pacini et

Ruffini

Mouvements articulaires

Vitesse

Direction

II

OTG

Tension tendineuse = protection

Etirement musculaire

Contraction musculaire

Ib

Fuseaux neuromusculaires Ia

Moelle

épinière

Tronc

cérébral

Cortex cérébral

+

Cérébellum II

Motoneurone α

= réflexe

myotatique

Motoneurone α

Motoneurone γ

Mouvements

élémentaires

Mouvements

automatiques

Mouvements volontaires

Prise de conscience

1

2

3

+ /-

+/-

- agoniste

+ antagoniste

- agoniste

+ antagoniste

Mécanorécepteurs

Fibres

sensitives

afférentes SNC

Fibres

motrices

efférentes

Proprioception Intégration Contrôle neuromusculaire

Annexe : schéma bilan des interactions du système sensori-moteur

Page 39: Etat des lieux des connaissances masso- kinésithérapiques