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Interview de la députée de la Knesset Einat Wilf, par David Kanner, in Jérusalem Post
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Propos recueillisPropos recueillispar David Kannerpar David Kanner
erusalem Post : Tsipi Livni pourKadima, Shelly Yachimovitch pour leParti travailliste, Limor Livnat, auLikoud, vous-même pour le partiAtsmaout, que vous avez cofondé avecEhoud Barak, plus de femmes siègent
aujourd’hui à la Knesset. Se sent-on moinsseule ?
Einat Wilf : Nous ne sommes pas dans lasituation des pays du nord de l’Europe, oùles Assemblées nationales comptent 50, voire60 % de députées, mais nous sommes aumême niveau que la France et les Etats-Unis,à savoir 20 % de femmes à la Knesset. Ce n’estpas l’idéal, mais ce n’est pas rien. Etre unefemme politique en Israël devient un phéno-mène moins unique. Sur le banc de la Knessetoù je m’asseois, nous sommes cinq femmescôte à côte.
J.P. : Cela crée-t-il une solidarité entrevous, en dépit de vos différences d’opinions ?
E.W. : Nous nous retrouvons en effet surdes sujets qui touchent aux femmes, auxdroits en général.
J.P. : Etre une femme politique en Israëlexpose-t-il à plus d’attaques ?
E.W. : À plus de soutien aussi ! Noussommes perçues comme plus sérieuses,moins entachées par les affaires de corrup-tion, plus travailleuses. Mais il reste desobstacles, comme sur les questions religieuseset sur celles qui touchent à la sécurité.
J.P. : Ceux-là mêmes qui empêcheraientune femme d’accéder au poste de Premierministre ?
E.W. : Les Israéliens n’ont pas confiance aufait qu’une femme puisse protéger le pays.Les citoyens votent sur les questions de sécu-rité. Mais les temps changent. Aujourd’hui,Israël fait moins face à des défis militaires qu’àdes combats d’idées pour prévaloir son droitd’exister, sa nécessité de se défendre pourlutter contre les attaques qui visent à le délé-gitimer. Ces nouveaux paramètres liés aumonde des idées peuvent autant, voiredavantage, engager une femme.
J.P. : Quels sont les sujets qui définissentvotre action politique ?
E.W. : Je travaille sur les questions liées àl’éducation, comme par exemple changer lestatut des professeurs, mais aussi sur les ques-tions pour favoriser le droit des femmes etsoutenir leur entrée dans le monde politique,pour défendre l’image d’Israël, ou sur lesquestions religieuses relatives à l’Etat.
J.P. : Où en est la situation des femmes enIsraël ?
E.W. : Nous devons continuer à nous battrepour les questions relatives à l’égalité dessalaires pour un travail et des qualificationségales. Pour le temps de travail. Il convientd’aménager les heures de travail pour laisser
à une femme le choix de travailler mais ausside s’occuper de sa famille. Il faut laisser plusde femmes à des postes de responsabilitédans l’armée, ou au niveau politique. Nousdevons améliorer nos droits, et affirmer noscapacités de commander.
J.P. : Vous soutenez l’idée de la laïcité enIsraël.
E.W. : J’aime cette idée, mais elle revêt uncontenu différent de celle qu’il y a en France.En Israël, le peuple juif est indissociable del’Etat. Le calendrier est ponctué par les fêtesjuives. La religion juive définit le peuple juif,mais l’Etat doit être laïc, en ce sens que lesionisme n’est pas un combat religieux. Larévolution du sionisme n’est pas achevée.Nous devons encore travailler sur les ques-tions liées à la conversion par exemple. Celle-ci peut ne plus être religieuse, mais sioniste,comme une appartenance à l’Etat d’Israël.
J.P. : Cette question des contours dusionisme est-elle au cœur de la création devotre parti, Atsmaout, que vous avezcofondé avec Ehoud Barak ?
E.W. : La plupart des Israéliens n’aimentpas les idées trop à gauche, car elles sontconsidérées comme aller à l’encontre del’idée du sionisme. Le combat en faveur desdroits de l’Homme par exemple est utilisé endehors de nos frontières contre Israël. C’estplus facile pour les militants de droite et d’ex-trême-droite de se revendiquer comme lesseuls patriotes, les garants d’Israël. Or, c’estfaux. Le sionisme, comme patrie pour lepeuple juif est une des idées les plus justes aumonde. De plus, certains, comme les Arabesou les ultra-religieux ont une relation ambi-valente vis-à-vis de l’Etat.
C’est le défi d’aujourd’hui : rassemblerautour du sionisme. Etre israélien octroie desdroits mais aussi exige des devoirs.
J.P. : Parallèlement, vous développez un“scepticisme” de gauche ?
E.W. : Il y a 10-15 ans, j’étais certaine qu’ilfallait partager le pays et aboutir à descompromis douloureux. Aujourd’hui, je nesais pas. La période est difficile pour des gensqui se sont engagés en faveur de la paix. Queveulent les Palestiniens : un Etat, ou détruirel’Etat juif ?
J.P. : Vous êtes pessimiste ? E.W. : On ne peut pas créer une foi qui
ne repose sur aucune réalité. Mais c’est laquestion à laquelle doivent répondre lesArabes et les Palestiniens. Acceptent-ilsl’idée d’un Etat juif dans la région ? Si oui,tous les autres points sont des détails.
J.P. : Pourquoi avoir créé un nouveauparti ?
E.W. : Pour porter un parti du centresioniste avec des idées de gauche maisqui puisse diriger. Le Parti travailliste quepeut-être dirigera Shelly Yachimovichest trop ancré à gauche. Tsipi Livni se dità gauche, mais au sein de Kadima figurent
un grand nombre de personnalités très àdroite. Atsmaout, que nous avons créé avecEhoud Barak, veut reprendre l’initiative pourla paix et les négociations. BinyaminNetanyahou, lui, est surtout occupé à main-tenir debout sa majorité.
J.P. : Pendant ce temps-là, Israël estattaqué par des groupes qui appellent auboycott de ses produits et de sa culture.
E.W. : Ce n’est pas honnête. Ces groupesattaquent Israël avec beaucoup de passion,mais en ont-ils pour les autres endroits dumonde où la liberté des hommes et desfemmes est violée ?
De plus, souvent, ces gens-là sont associésavec des mouvements antidémocratiques etislamistes radicaux. Ils représentent lecomble de l’hypocrisie. D’ailleurs, vous voyezbien que les peuples arabes se battent aujour-d’hui contre l’oppression de leur pouvoirpolitique. Israël n’est plus leur souci car c’estleur régime qui utilise la haine d’Israël pourmasquer leur propre misère et diriger leurcolère contre nous.
J.P. : En quoi les révolutions arabespeuvent-elles favoriser un changement ?
E.W. : Il se passe toujours
quelque chose dans les périodes de boulever-sement. Au lendemain du bloc de l’ex-Union soviétique, le processus pour meneraux Accords d’Oslo a commencé. Lapériode est inquiétante, mais il fautespérer que les pays de cette région vonts’orienter vers des régimes plus démocra-tiques, plus respectueux des droits deshommes et des femmes. Ce sera alors lemoment pour Israël de faire confiance àces partenaires. Car c’est plus facile denégocier avec des pays qui partagent desvaleurs dans lesquelles nous nous recon-naissons.
J.P. : Quels sont vos mentors en poli-tique ?
E.W. : J’ai une grande admiration pourShimon Peres. J’estime beaucoup ShellyYachimovich même si nous ne partageonspas les mêmes opinions. Sinon, ma famillereste mon soutien le plus fort. Et puis, il y aSimone de Beauvoir pour ses idées et sonparcours de femme.
J.P. : Que voudriez-vous dire aux femmesaujourd’hui ?
E.W. : On peut tout faire. Et tout le mondepeut le faire. ■
A l’occasion de la journée de la femme, rencontre avec un des emblèmes tout féminin de la vie politique du pays. Einat Wilf : membre de la Knesset, cofondatrice du parti Atsmaout. Une jeune
maman à l’emploi du temps chargé qui concilie congé maternité et sessions parlementaires
C ’est le 8 mars 1910 que la Journée de la femme est décrétée pour la premièrefois, initiée à Copenhague, au Danemark, par une confédération internationalede femmes socialistes. Objectif : que la gent féminine se voit accorder le droit
de vote partout dans le monde. Dès 1893, la Nouvelle-Zélande avait donné le ton. Ses résidentes pouvaient alors
voter, mais ne seront éligibles qu’en 1919. En Europe, fidèles à leur réputation, les paysnordiques sont les premiers à permettre aux femmes d’exprimer leurs voix : laFinlande en 1906, puis le Danemark en 1908. Les Allemandes suivront, en 1918. Dansl’Hexagone, il faudra attendre l’ordonnance du 21 avril 1944 pour accorder auxFrançaises le droit de se rendre aux urnes. Elles en feront usage pour la première foisun an plus tard, le 20 avril 1945. En Suisse, si un mouvement se fonde dès 1909 pourla conquête du droit de vote des femmes, les suffragettes n’auront gain de causequ’en 1971. L’Azerbaïdjan sera le premier pays musulman à reconnaître des droits politiques auxfemmes : il leur accorde le droit de vote dès 1918. Quand Israël se dote de saconstitution d’Indépendance, en 1948, il “assure à tous ses citoyens la totale égalitéde leurs droits sociaux et politiques, sans distinction de religion, de race ou de sexe”,comme l’avait annoncé Une volonté d’égalité totale, prononcée par David BenGourion.En 1975, les Nations unies instaurent le 8 mars comme la Journée internationale de lafemme.
Aujourd’hui encore, beaucoup reste à faire en matière d’égalité des droits politiques.Parmi les derniers à avoir autorisé leurs femmes à se rendre aux urnes : le Koweït en2005 et les Emirats arabes unis en 2006.
Un siècle d’histoire
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16 – DU 8 AU 14 MARS 2011 – f r. j p o s t . c o m
8 marsJournée de la femme
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“Etre femme aujourd’hui, c’est pouvoir tout faire”