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Assurances et gestion des risques, Vol. 83 (1-2) Insurance and risk management, Vol. 83 (1-2) ARTICLES ACADÉMIQUES ACADEMIC ARTICLES ETUDE DE RUINE D’UNE COMPAGNIE D’ASSURANCE AUTOMOBILE Mohamed DAKKON Université Abdelmalek Essaâdi, Faculté Polydisciplinaire de Tétouan, Morocco Département de Statistique et Informatique. [email protected] RÉSUMÉ L’objectif de ce travail est d’évaluer la probabilité de ruine en temps fini et infini de la branche RC automobile de la compagnie Zurich d’assurance (Tanger, Maroc) indépendamment des autres branches. Afin d’identifier le modèle de risque correspondant et de calculer ces caractéristiques, nous nous appuyons sur l’approche stochastique et les résultats de la théorie de la ruine avec un ajuste- ment des données collectées. De plus, nous réalisons une approche de simulation pour estimer la probabilité de ruine en temps fini de cette branche d’activité. Mots clés : Assurance ; Modèles de risque ; Probabilité de ruine ; teste d’ajustement ; Simulation. ABSTRACT The objective of this work is to evaluate the ruin probabilities within finite and infinite time of the RC automobile from Zurich Insurance Company in Tanger, Morocco. In order to identify the corresponding risk model and calculate these characteristics, we lean on the stochastic approach and the results of the ruin theory with an adjustment of the collected data. Furthermore, a simulation study is realized in order to estimate the ruin probability in finite time for this line of business. KeyWords: Insurance; Risk models; ruin probabilities; Adjustment tests; Simulation. 128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 99_2016-08-16_09:45:53_K

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Assurances et gestion des risques, Vol. 83 (1-2)Insurance and risk management, Vol. 83 (1-2)

ARTICLES ACADÉMIQUES

ACADEMIC ARTICLES

ETUDE DE RUINE D’UNE COMPAGNIED’ASSURANCE AUTOMOBILE

Mohamed DAKKONUniversité Abdelmalek Essaâdi, Faculté Polydisciplinaire de Tétouan, Morocco

Département de Statistique et Informatique. [email protected]

RÉSUMÉ

L’objectif de ce travail est d’évaluer la probabilité de ruine en temps fini et infinide la branche RC automobile de la compagnie Zurich d’assurance (Tanger,Maroc) indépendamment des autres branches. Afin d’identifier le modèle derisque correspondant et de calculer ces caractéristiques, nous nous appuyons surl’approche stochastique et les résultats de la théorie de la ruine avec un ajuste-ment des données collectées. De plus, nous réalisons une approche de simulationpour estimer la probabilité de ruine en temps fini de cette branche d’activité.

Mots clés : Assurance; Modèles de risque; Probabilité de ruine; teste d’ajustement;Simulation.

ABSTRACT

The objective of this work is to evaluate the ruin probabilities within finite andinfinite time of the RC automobile from Zurich Insurance Company in Tanger,Morocco. In order to identify the corresponding risk model and calculate thesecharacteristics, we lean on the stochastic approach and the results of the ruintheory with an adjustment of the collected data. Furthermore, a simulation studyis realized in order to estimate the ruin probability in finite time for this lineof business.

KeyWords: Insurance; Risk models; ruin probabilities; Adjustment tests; Simulation.

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1. Introduction

L’opération d’assurance a pour effet le transfert total ou partiel desconséquences financières du risque subi par l’assuré vers une sociétéd’assurance. Les dépenses prises en charge par la société peuvent cor-respondre soit à des indemnités à verser à des tiers au titre de la res-ponsabilité (civile, professionnelle, ou autre) de l’assuré, soit à laréparation des dommages subis par ce dernier. Mais qu’adviendrait-il deces compagnies d’assurance lorsqu’elles courent elles-mêmes un risque?

En assurance, on qualifie de risque de ruine la probabilité que laréserve d’une compagnie d’assurance, qui est la différence entre le totaldes primes reçues et le total des montants de réclamations payées,devienne négative à un certain temps. À ce moment, on dit que la ruineapparaît du fait d’un mauvais calcul du taux de cotisation des assurésou de sinistres trop importants à couvrir.

La théorie mathématique de l’assurance peut contribuer à promou-voir le développement de méthodes plus rationnelles dans la gestiondes risques. Un des outils les plus puissants pour comprendre l’évolu-tion de la richesse d’une compagnie d’assurance est la modélisationstochastique. L’équilibre à long terme des résultats de la compagnied’assurance correspond à la notion mathématique de probabilité deruine. Le concept de probabilité de ruine sera basé sur des modèlesqui relèvent de la théorie du risque.

Nous serons amenés à considérer une compagnie d’assurance qui veutinvestir une certaine somme d’argent dans une branche d’assurance. Lemodèle consiste à la représentation du niveau des réserves comme étantle résultat de la différence entre les recettes par primes chargées et lespayements dus aux sinistres enregistrés en tenant compte d’un capitalinitial. Le modèle de risque, unidimensionnel, composé d’une seulebranche d’assurance, est un modèle utilisé pour décrire ce mécanismed’arrivée des sinistres et des montants des réclamations. Le modèleconcerne l’assurance non-vie, c’est-à-dire, les assurances «dommages»ou «accidents» par opposition aux assurances vie qui présentent d’autresproblèmes et relèvent d’une autre modélisation.

L’objectif de ce travail est de modéliser l’évolution de la richesse d’unecompagnie d’assurance et d’évaluer sa probabilité de ruine, c’est-à-dire,la probabilité que les dommages à payer aux assurés dépassent les coti-sations. La société marocaine d’assurance Zurich a pris conscience de

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93Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

l’ampleur de ce problème, c’est pourquoi, nous envisageons d’évaluerla probabilité de ruine de la branche RC (Responsabilité Civile) automo-bile de la compagnie Zurich d’assurance (Tanger, Maroc) en fonction ducapital initial investi.

A travers cette étude, nous tenterons d’apporter quelques élémentsde réponses aux interrogations posées. Ainsi, notre méthodologie detravail fait appel à une recherche bibliographique sur le thème d’unepart, une collecte de données auprès de la compagnie Zurich d’assu-rance (Tanger, Maroc) d’autre part et enfin, l’application des résultatsde la théorie du risque et de la ruine à la branche RC automobile dela compagnie Zurich d’assurance (Tanger, Maroc).

2. Modelisation de la reserve de la branche RC automobilede la compagnie Zurich, assurance

Le résultat d’une compagnie d’assurance à la fin de chaque exercicedépend de la réalisation de nombreuses activités. Dans ce travail, nousallons considérer l’activité provenant du côté purement assurance. C’estainsi que le modèle sera réduit à la représentation du niveau des réservescomme étant le résultat de la différence entre les recettes par primeschargées et les payements dûs aux sinistres enregistrés. Cette étapeconcerne alors la modélisation de la réserve et de ses paramètres, àsavoir, la prime, le nombre et le montant des réclamations des sinistres.

Le processus décrivant l’évolution d’un portefeuille d’assurance estdéfini comme suit : la société d’assurance dispose d’un capital initial upour démarrer son activité. Un volume de primes Π est perçu chaqueannée par la compagnie. En contrepartie de ces primes, la compagniedoit dédommager des sinistres qui surviennent aléatoirement au coursdu temps à des instants σ σ1 2, ,..... Les montants de ces sinistres sont

Z1, Z2, …. Le résultat X (t) de la branche d’activité à l’instant t est

donné par :

X t u t R t u t Zi

N t

i( ) = ( ) ( ) = ( )=1

( )

+ − + − ∑Π Π

qui représente la réserve de la branche considérée.

Nous nous intéressons à la détermination du processus { ( ), 0}X t t ≥ .

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2.1 Modèle de risque classique

Le modèle de risque de Cramér-Lundberg ou P/G, désigné aussi sousle nom du modèle de risque classique ou encore Poisson composé, aété introduit en 1903 par l’actuaire Suédois Filip Lundberg (cf. [8]) etest connu comme la base du fondement de la théorie du risque.

La notation P/G, empruntée de la théorie des files d’attentes, four-nit l’information au sujet des lois des arrivées et des montants desréclamations des sinistres. La lettre G signifie général et P signifiePoisson (cf.[6]). Il s’ensuit que la suite { }σn n N∈ des arrivées des récla-mations forme un processus de Poisson ce qui est équivalent à direque les temps des inter-occurrences T nn n n= , 11σ σ− ≥− sont de dis-tribution exponentielle.

Ce modèle est construit selon les hypothèses suivantes :

• Le processus de comptage { ( ), 0}N t t ≥ du nombre de réclamationsest un processus de Poisson d’intensité λ.

• La séquence { }Zn n N∈ ∗ des montants des réclamations est une suitede variables aléatoires indépendantes et identiquement distribuéesde moyenne finie µ .

• La prime est proportionnelle au temps, c’est-à-dire, Π( ) =t ct ouc > 0 est le taux de prime constant choisi de telle sorte que la so-ciete ait de bonnes chances de survie.

• Pour tout t > 0 et n ≥ 1, on suppose que la variable aléatoire N (t)et le vecteur aléatoire ( ,..., )1Z Zn sont indépendants.

Le processus de Poisson compose modelise la reserve { ( ), 0}X t t ≥ avec:

X t u ct R t t( ) = ( ), 0+ − ≥ (1)

où R t Zi

N t

i( ) ==1

( )∑ est le montant cumulé des réclamations à l’instant t,

Le processus de risque est donné par

{ ( ) = ( ), 0}S t ct R t t− ≥

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95Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

De plus,

E ct R t ct E N t ct t c t t[ ( )] = [ ( )] = = ( ) = ,− − − −µ λ µ λµ θ

où θ est le chargement de sécurité.

Cas particulier : Modèle de Lundberg ou P/P

Un cas particulier du modèle de risque classique est le modèle deLundberg appele aussi modèle P/P. Ce modèle se caracterise par ladistribution exponentielle des montants des reclamations, c’est-à-dire,

F y e yZ

y

( ) = 1 , 0,1

− ≥−µ

où FZ est la fonction de repartition de la variable aléatoire Z qui génèrele montant des reclamations.

2.2 Collecte des données

Afin de modéliser la réserve de la branche RC automobile de lacompagnie Zurich d’assurance (Tanger, Maroc) et de calculer sa pro-babilité de ruine, une collecte de données s’est déroulée dans cettecompagnie. Les données recueillies sont représentées sous forme derapports mensuels (bordereaux). La période d’étude s’étale sur troisans, du 01/01/2006 au 31/12/2008. Les informations qui nous inté-ressent dans ces données sont :

2.2.1 La réserve initiale

Nous considérons la réserve initiale u ≥ 0 de la branche RC automobiledu 31 décembre 2005.

2.2.2 Le nombre de réclamations (processus de comptage des réclamations)

Lors d’une réclamation d’un assuré, l’indemnisation n’est pas immé-diate. La durée d’attente de cette indemnisation est aléatoire. Elle peutêtre de quelques jours, de quelques mois ou encore de plusieursannées. Dans certains cas, le sinistre peut ne jamais être indemnisé s’ilmanque par exemple des éléments dans son dossier de réclamation.

En général, dans la théorie du risque, cette attente est négligée eton suppose que la date de réclamation du sinistre correspond à la datede son indemnisation. Dans notre cas, nous ne considérerons pas la

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date de réclamation du sinistre mais la date de son indemnisation, car,l’intérêt de l’étude porte sur la modélisation de la réserve, qui estfonction des instants de recettes et de dépenses, de plus, la ruine peutapparaître aux instants d’indemnisation uniquement. Dans ce qui suit,nous gardons l’appellation “réclamation” afin de respecter la notationactuarielle. On associe au nombre de réclamations le processus decomptage { ( ), 0}N t t ≥ qui, à chaque instant t, fait correspondre lenombre N(t) de réclamations qui se sont produites dans l’intervalle]0, ]t . Le temps t se compte en mois en raison de la nature des donnéesqui sont des résultats mensuels. Le processus { ( ), 0}N t t ≥ du nombrede réclamations vérifie pour tout t, h ≥ 0 :

• N (0) = 0,

• N t N( ) ∈ ,

• N t N t h( ) ( )≤ + .

De plus, N t h N t( ) ( )+ − represente le nombre de réclamations dansl’intervalle ] , ]t t h+ .

Nous avons relevé un échantillon de 36 observations, correspondantaux 36 mois de la période d’étude.

2.2.3 Le montant des réclamations (indemnisation) des sinistres

Soit Zn > 0 le montant de la n eme` réclamation. La séquence { }Zn n N∈ ∗ estune suite de variables aléatoires positives, indépendantes et identique-ment distribuées de même fonction de répartition FZ . L’indépendancedes montants des réclamations se caractérise naturellement, car le mon-tant d’une réclamation est une estimation des dégâts causés par le sinistrequi n’influe aucunement sur les montants des autres réclamations.

Notons Z la variable aléatoire qui représente le montant des réclama-tions. Nous avons relevé un échantillon de 116 montants de réclamations.

2.2.4 Le nombre de primes reçues (processus de comptage des primes)

Il s’agit du nombre de primes reçues par la branche RC automobilepour chaque mois t . Le processus { ( ), 0}'N t t ≥ du nombre de primesreçues vérifie pour tout t h, 0≥ :

• N ' (0) = 0,

• N t N' ( ) ∈ ,

• N t N t h' '( ) ( )≤ + .

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Ainsi, le processus { ( ), 0}'N t t ≥ est un processus de comptage.

Nous avons relevé un échantillon de 36 observations, correspondantaux 36 mois de la période d’étude.

2.2.5 Le montant des primes

Soit ci le montant de la i eme` prime reçue. Dans le cas où on supposeque la prime est constante, les recettes reçues par la compagnie jusqu’àl’instant t sont donc égales à Π( ) =t ct où c est le taux de primeconstant par unité de temps. Dans notre cas, l’unité de temps est lemois, c est alors le taux de prime mensuel qui sera estimé.

2.3 Ajustement des données

Cette étape consiste à ajuster nos données sur : le nombre de réclama-tions, le montant des réclamations et la prime par des lois statistiquesconnues. L’estimation des paramètres des lois et l’ajustement des don-nées sont effectués à l’aide du logiciel libre R.

2.3.1 Ajustement des données du nombre de réclamations

Des données sur les arrivées ou les inter-arrivées des réclamations nousauraient permis de conclure si le processus du comptage { ( ), 0}N t t ≥est un processus de Poisson. Seulement, les seules données accessiblessont le nombre de réclamations pour chaque mois.

Le Théorème 1 fournit une condition nécessaire sur le processus dePoisson. Nous allons vérifier cette condition.

Théorème 1: (cf. [8])

Si { ( ), 0}N t t ≥ est un processus de Poisson de paramètre λ > 0, alorsN(t) suit une loi de Poisson de paramètre λt .

Proof : Cf. [8].

Considérons le processus de comptage { ( ), 0}N t t ≥ du nombre deréclamations sur ]0, ]t qui prend comme valeurs l’échantillon observédurant les 36 mois de la période d’étude. La démarche consiste à sup-poser que l’échantillon de N(t) obéisse à la loi de Poisson. L’estimationdu paramètre λt de la loi de Poisson a été réalisée par la méthode duMLE. Le modèle est validé grâce au test d’ajustement de Kolmogorov-Smirnov avec un seuil de signification α = 5%. Les résultats obtenussont représentés dans le tableau 1.

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TABLE 1 Ajustement des données du nombre de réclamationspar la loi de Poisson.

Loi ajustée n λt Dn dn,α Décision

Poisson 36 1016.055 0.186 0.216 Validé

où n : Taille de l’échantillon,

λt : Estimateur du paramètre λt de la loi de Poisson,

Dn : Statistique empirique du test de Kolmogorov-Smirnov,

dn,α : Quantile tabulé du test de Kolmogorov-Smirnov avec un seuil de signification α = 0.05 .

Les résultats obtenus montrent que pour le nombre de réclamationsN(t), le modèle de Poisson de paramètre λt = 1016.055, est accepté avecun niveau de signification α = 5%.

Pour déterminer λ il suffit de prendre un grand t et de calculerN t t( ) / . Ainsi, λ = (36) / 36 = 2303 / 36 = 63.972N qui correspond aussiau nombre moyen de réclamations par mois.

La condition nécessaire du processus de Poisson étant vérifiée, nousallons vérifier la condition suffisante du théorème 2.

Théorème 2: (cf. [9])

Un processus de comptage homogène, à accroissement indépendantset pour lequel la conclusion du théorème 1 est valable, est un proces-sus de Poisson.

Proof : Cf. [9]

Nous avons constaté durant cette étude au niveau de la compagnieZurich d’assurance (Tanger, Maroc) que :

1. Le nombre de réclamations (indemnisations) sur une durée (inter-valle) de temps dépend de la longueur de cette durée de tempsuniquement, plus l’intervalle est grand, plus il y’aura d’indemnisa-tions et l’inverse aussi. De plus, ce nombre ne dépend aucunementde la position de l’intervalle sur l’axe du temps du fait que lesindemnisations se déroulent avec la même fréquence durant toutel’année. Nous pouvons alors déduire que le nombre de réclama-tions N(t) est homogène dans le temps.

2. L’hypothèse d’indépendance des accroissements de N(t) est natu-relle. En effet, pour t = 1;36, les variables aléatoires N t N t( 1) ( )+ −

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99Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

sont indépendantes, c’est-à-dire que le nombre d’indemnisationsdurant un mois est indépendant du nombre d’indemnisations desautres mois. Ceci est valable pour tout autre intervalle de temps.

Ainsi, en vertu du théorème 2, nous pouvons conclure que le pro-cessus de comptage { ( ), 0}N t t ≥ est un processus de Poisson.

2.3.2 Ajustement des données du montant des réclamations

Le modèle choisi pour le montant des réclamations est la loi exponen-tielle afin d’obtenir le modèle de Lundberg (P/P).

L’estimation du paramètre δ de la loi exponentielle a été réaliséepar la méthode du MLE en utilisant le logiciel R . Le modèle est validépar le test d’ajustement de Kolmogorov-Smirnov avec un seuil de sig-nification α = 5% . Les résultats obtenus sont représentés dans le tab-leau 2. où δ est l’estimateur du paramètre δ de la loi exponentielle.

TABLE 2 Modélisation du montant des réclamationspar la loi exponentielle.

Loi ajustée n δ Dn dn,α Décision

Exponentielle 116 9.421 10 5× − 0.080 0.216 Validé

Ainsi, le montant des réclamations est de distribution exponentiellede paramètre δ = 9.421×10‒5.

La fonction de répartition FZ du montant des réclamations est alors

F t exp tZ ( ) = 1 ( 9.421− − ×10‒5t)

La fonction de survie du montant des réclamations donnée par

F t F t exp tZ Z( ) = 1 ( ) = ( 9.421− − ×10‒5t)

décroît exponentiellement en fonction de t. Ce qui signifie que la queuede la distribtion de FZ est légère qui permet d’obtenir des solutionsquantitatives simples de la probabilité de ruine.

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2.3.3 Ajustement du montant des primes reçues

Puisque l’estimation de la probabilité de ruine d’un modèle de risqueavec une prime variable est très compliquée, nous allons ajuster lemontant des primes afin d’avoir un taux de prime constant. L’unité detemps est le mois, nous allons alors ajuster la prime à un taux mensuelconstant. Ainsi, nous considérons le montant total des primes reçuespour chaque mois.

Soit C la variable aléatoire représentant le total des primes reçueschaque mois. Nous obtenons un échantillon de 36 observations ensommant pour chaque mois de la période d’étude, toutes les primesrécoltées durant ce mois.

Nous allons maintenant tester l’hypothèse que C suit la loi normalede paramètres ( , )2m σ afin d’estimer le taux de prime mensuel c parl’estimateur MLE de la moyenne m de la loi normale et d’utiliser lestests gaussiens pour la validation de cet estimateur.

L’estimation des paramètres m et σ 2 a été réalisée par la méthodedu MLE en utilisant le logiciel R . Le modèle est validé grâce au testd’ajustement de Kolmogorov-Smirnov avec un seuil de significationα = 5% . Les résultats obtenus sont représentés dans le tableau 3.L’ajustement des primes à une loi normale est validé. Nous exploitonsce résultat pour utiliser les tests gaussiens pour tester la validité del’estimateur du taux de prime c qui n’est autre que l’estimateur MLEde la moyenne de la loi normale.

Nous allons tester H0 “m = 576402.3” contre H1 “m # 576402.3”.Nous utilisons le test de Student sur la moyenne de la loi normale avecun niveau de signification α = 5%. Les résultats obtenus sont représentésdans le tableau 4 suivant :

où T : Statistique empirique du test de Student,

tn−1, /2α : Quantile tabulé du test de Student avec un seuil de significationα = 0.05%.

L’hypothèse H0 est acceptée. Finalement,

c m= = 576402,33.

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101Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

TABLE 3 Ajustement du montant total mensuel des primes reçues.

Loi ajustée n Paramètre de la loi Dn dn,α Décision

Normale 36 m = 576402.33,σ 2 = 18367.33

0.205 0.216 Validé

TABLE 4 Résultats du test de Student pour la moyenne des montantsmensuels des primes.

n Moyenne m T t n( 1, / 2)− α Décision

576402.33 0 2.216 Validé

Remarque : La variance σ 2 = 183676.33 est grande, ce qui signifie,théoriquement, que l’échantillon observé a des valeurs dispersées. Lavaleur élevée de la variance peut être justifiée d’une part, par le faitqu’elle soit non significative devant les primes encaissées qui,rappelons-le, sont des totaux mensuels. D’autre part, par l’augmenta-tion de 20% du tarif de l’assurance RC automobile entrée en vigueuren janvier 2006. Cette augmentation a été étalée sur deux ans, à raisonde 5% tous les six mois, ce qui correspond à notre période d’étude.Les assureurs avaient justifié l’augmentation par le déficit énorme enre-gistré par les compagnies d’assurances sur cette garantie.

2.4 Indépendance entre le nombre et le montant des réclamations

Le but de cette partie est de vérifier l’indépendance entre { ( ), 0}N t t ≥et { }Zn n N∈ ∗ .

Étudier l’indépendance entre le nombre et le montant des réclama-tions revient à étudier la corrélation entre ces deux variables. Unemesure de la corrélation est obtenue par le calcul du coefficientde corrélation linéaire de Bravais-Pearson que nous estimons avec lelogiciel R.

L’indépendance se caractérise lorsque le coefficient de corrélationρ est nul. Afin de vérifier ceci, nous appliquons le test de corrélationde Pearson qui teste l’hypothèse H0 : = 0ρ contre H1 : 0ρ ≠ . Autrementdit, le test de Pearson teste l’indépendance entre le nombre et le mon-tant des réclamations.

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102 Assurances et gestion des risques/Insurance and risk management Vol. 83 (1-2)

Les résultats sont représentés dans le tableau 5.

TABLE 5 Résultats du test d’indépendance de Pearson.

n ρ t t n( , 2)α − Décision

-0.199 -1.1876 1.697 Validé

où ρ : Estimateur de Pearson du coefficient de corrélation entre le nombre et le montant des réclamations,

t : Statistique empirique du test de Pearson,

t n( , 2)α − : Quantile tabulé du test de Student avec un seuil de signification α = 0.05 .

L’hypothèse H0 est acceptée, c’est-à-dire, ρ = 0. D’où, les processus{ ( ), 0}N t t ≥ et { }Zn n N∈ ∗ sont indépendants (indépendance linéaire).

Remarque : Réellement, il existe une certaine dépendance entre lenombre et le montant des réclamations. D’ailleurs, lorsqu’on estime lecoefficient de corrélation, on trouve que ρ = 0.19− . La modélisationde cette dépendance nécessite l’introduction des fonctions dites fonc-tions copules (cf. [4]). Ainsi, afin de simplifier notre étude, nous négli-geons la faible dépendance entre le nombre et le montant desréclamations et nous supposons l’indépendance que nous venons devérifier par le test de Pearson.

2.5 Modèle de risque de la branche RC automobile

2.5.1 Cas où la prime est constante

L’analyse des données a révélé que le processus de comptage du nombrede réclamations { ( ), = 1,...,36}N t t est un processus de Poisson de para-mètre λ , ce qui nous mène au modèle de risque classique. De plus,le montant des réclamations est de distribution exponentielle de para-mètre δ . Nous pouvons alors conclure, lorsque la prime est constante,que le modèle de risque obtenu est le cas particulier du modèle derisque classique appelé modèle de Lundberg ou le modèle P/P.

La réserve de la branche RC automobile à l’instant t est par consé-quent,

X t u ct R t ou R t Z ti

N t

i( ) = ( ), ( ) = , 0=1

( )

+ − ≥∑

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103Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

2.5.2 Cas où la prime est variable

Lorsqu’on suppose que la prime est variable, la réserve prend laforme suivante:

X t u t R t ou R t Z ti

N t

i( ) = ( ) ( ), ( ) = , 0=1

( )

+ − ≥∑Π

et { ( ), 0}Π t t ≥ est le processus des primes tel que :

Π( ) = ,=1

' ( )

t ci

N t

i∑où { ( ), = 1,......,36}'N t t est le processus de comptage des primes reçueset ci le montant de la i eme` prime reçue.

2.5.3 Comparaison entre les deux cas

L’évolution de la réserve durant la période d’étude selon les deuxmodélisations précédentes est représentée dans le graphe 1. La repré-sentation graphique de la réserve de la branche RC automobile révèleque les deux courbes représentant la réserve selon que la prime soitconstante ou variable sont pratiquement pareilles dans les deux cas.De plus, l’instant de ruine, c’est-àdire, le moment où la réserve devientnégative est le même pour les deux courbes. Nous pouvons alors sup-poser que la prime est constante. Ainsi, le modèle de Lundberg repré-sente bien l’évolution de la réserve de cette branche d’assurance.

FIGURE 1 Evolution de la réserve de la branche RC automobile.

-7

-6

-5

-4

-3

-2

-1

0

1

2

3x 106

X(t)= u+ct-R(t)

temps (mois)

Evolution de la réserve à travers le temps

rése

rve

0 5 10 15 20 25 30 35 40

X(t)= u+ (t)-R(t)

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 111_2016-08-16_09:45:55_K

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104 Assurances et gestion des risques/Insurance and risk management Vol. 83 (1-2)

3. Probabilité de ruine de la branche RC automobile

Dans ce qui suit, nous allons évaluer la probabilité de ruine pour lemodèle de risque obtenu, qui n’est autre que le modèle de Lundberg (P/P).

3.1 Présentation

Considérons le processus de réserve { ( ), 0}X t t ≥ de la compagnie d’as-surance où

X t u ct R t( ) = ( ),+ −

c est le taux de prime constant par unité de temps, R t( ) est le montantcumulé des réclamations jusqu’à l’instant t et u est la réserve initiale.

Définissons la variable aléatoire

τ µ( ) = { ( ) < 0 / (0) = }0t

X t X u≥

inf

τ ( )u représente l’instant où le processus de réserve devient négatif,sachant que la réserve initiale est u. Autrement dit, τ ( )u est l’instantde ruine du portefeuille d’assurance.

On appelle probabilité de ruine à horizon fini T , la fonction :

ψ τ( , ) = [ { ( ) < 0 / (0) = }] = [ ( ) < ]0

u T P X t X u P u Tt T≤ ≤

inf

En temps infini, elle est définie par

ψ ψ τ( , ) = ( ) = [ { ( ) < 0 / (0) = }] = [ ( ) < ]0

u u P X t X u P ut

∞ ∞≥

inf

3.2 Chargement de sécurité

On appelle chargement ou coefficient de sécurité, la quantité définie par:

θ λµ= .c −

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 112_2016-08-16_09:45:55_K

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105Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

Le coefficient λµest interprete comme le montant moyen des sinistrespar unite de temps. Il parait prudent que l’assureur fixe un taux deprime c superieur à λµpour que, en moyenne, les primes recues soientsuperieures aux indemnisations payees par la compagnie d’assurance.En effet, nous avons la propriete suivante :

Propriete du coefficient de securite

• Si θ > 0, cela garantit, d’aprés la loi forte des grands nombres, quele processus de reserve tend presque surement vers +∞ et queψ ( ) < 1u . L’activité est dite dans ce cas “rentable”.

• Si θ ≤ 0, alors X t( ) tend vers −∞ presque surement quand t tendvers l’infini et par conséquent ψ ( ) = 1u . Proof : Cf. [1].

De facon evidente, la compagnie doit s’assurer que θ > 0. Sous cettehypothèse, nous pouvons quantifier la probabilité de ruine, autrement,la ruine sera certaine.

Dans le cas de la branche RC automobile de la compagnie Zurichd’assurance (Tanger, Maroc), nous avons :

c = 576402.33 DHs : taux de prime mensuel, λ = 63.972 : moyennemensuelle du nombre de reclamations, µ = 10614.32 DHs : montantmoyen des reclamations.

Ainsi

θ λµ= = 576402.33 63.972 10614.32 = 102616.949 < 0c − − × − Nousconstatons que θ < 0, c’est-à-dire que la prime est plus petite que lemontant moyen des réclamations que la compagnie d’assurance payepour ses assurés. Ainsi, la condition nécessaire n’est pas vérifiée. Cerésultat signifie qu’à partir d’un certain temps, la branche RC automo-bile sera ruinée avec une probabilité égale à 1. Finalement, la proba-bilité de ruine de la branche RC automobile à horizon infini est

ψ ( ) = 1, 0.u u ≥

Pour u = 102677.17 DHs, l’instant de la ruine de la branche RC auto-mobile déduit graphiquement (Cf. figure 1) est τ (102677.17) = 24 quicorrespond au 24 eme mois de la période d’étude, c’est-à-dire que laruine de la branche RC automobile apparait a partir de decembre 2006.

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 113_2016-08-16_09:45:55_K

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106 Assurances et gestion des risques/Insurance and risk management Vol. 83 (1-2)

Le probleme de ruine survient au niveau du chargement de securiteθ qui est negatif. En observant l’expression θ λµ= c − , nous remarquonsque l’actuaire peut influer uniquement sur le taux de prime c pour queθ devienne positif. Effectivement, il n’est pas possible de varier lenombre moyen ou le montant moyen des réclamations en raisonde leur aspect aléatoire. Cependant, varier le paramètre c ne veut pasforcement dire attribuer une nouvelle tarification de la prime RC auto-mobile, car comme nous l’avons mentionne auparavant, le taux deprime c est une moyenne du montant de la prime globale que la com-pagnie reçoit chaque mois et non une prime individuelle (qui concerneun seul client).

Ainsi, afin de vérifier la condition nécessaire sur le chargement desécurite, le taux de prime c doit satisfaire la condition

c > ,λµ

où λ = 63.972 et µ = 10614.32 , c’est-à-dire,

c > 679019.279.

Notons c la nouvelle valeur de c pour laquelle la condition c > λµest vérifiée. La prime c peut etre écrite comme suit :

c = (1 ) , > 0,+ θ λµ θ

où θ est le chargement de securité relatif. Ainsi, pour de nouvellesvaleurs de la prime c obtenues en donnant à θ differentes valeurspositives, la positivité du chargement de sécurité est vérifiée, d’où laruine de la branche RC automobile n’est plus certaine en vertu de lacondition suffisante sur le chargement de sécurité. Nous pouvons alorscalculer sa probabilité de ruine.

3.3 Calcul de la probabilité de ruine à horizon infini

Le théorème 3 fournit une expression de la probabilité de ruine àhorizon infini ψ ( )u dans le cas du modèle de risque classique.

Théorème 3: (Cf. [11])

Pour tout u ≥ 0,

ψ λµ λµ( ) = (1 ) ( ) ( ) ( )

( =1)

uc c

F un

nZs n−

∞∗∑ (2)

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 114_2016-08-16_09:45:55_K

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107Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

où ( ) = 1 ( )F FZs n

Zs n∗ ∗− et ( )FZ

s n∗ est la n eme` convolution de ( )FZs tel que:

F x F y dy xZs

x

Z( ) =1

(1 ( )) , 0.0µ ∫ − ≥

Proof :cf. [11].

Application au modèle de Lundberg (P/P)

En utilisant la formule (2), nous allons déduire l’expression exacte deψ ( )u pour le modèle de risque de Lundberg ( / )P P .

ψ ρ ρ ρ λδ

( ) = (1 ) ( ) ( ), =( )( =1)

u F ucn

nZs n−

∞∗∑

Pour des montants de réclamations exponentiels de paramètre δ ,nous avons

F ue u

uZ

u

( ) =1 , 0;

0, < 0.

− ≥

−δ

Calculons F u F y dy xZs

u

Z( ) = (1 ( )) , 0.0

δ ∫ − ≥

F u e dy e eZs

uy u u u( ) = = (

1)[ ] = 1 .

0 0δ δδ

δ δ δ∫ − − −−−

Aansi, F u F u u RZs

Z( ) = ( ), ∈ .

( )FZs n∗ représente la n eme` convolution de FZ

s . Puisque nous avonsl’indépendance des n variables aléatoires Z i ni , = 1, , de distributioncommune Exp( )δ et que F FZ

sZ= , alors ( )FZ

s n∗ est la fonction de répar-tition de la somme des n variables aléatoires Z i ni , = 1,..., .

Nous utiliserons les transformées de Laplace afin de déterminer ( )FZs n∗ .

ˆ ˆL x L xFZ

nFZ

n( ) ( )( ) = [ ( )]∗ , ou encore ˆ ˆL x L xfZ

nfZ

n( ) ( )( ) = [ ( )]∗ ,

où fZ est la densité de probabilité des montants des réclamations Zi ,i n= 1,..., . Ainsi,

L x f t e dt e dtxfZ Z

xt x t( ) 0 0

( )( ) = ( ) = =∞ − ∞ − +∫ ∫ +

δ δδ

δ

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Page 18: ETUDE DE RUINE D’UNE COMPAGNIE …...128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 100_2016-08-16_09:45:54_K Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile 93 l’ampleur de ce problème,

108 Assurances et gestion des risques/Insurance and risk management Vol. 83 (1-2)

D’où,

L xx

xfZ

n n( ) ( ) = [ ] , 0∗

+≥

δδ

En se référant aux tables des transformées de Laplace (Cf. [10]), noustrouvons que :

( ) ( ) =( )

( 1)!, 0

1

f xx

ne xZ

nn

x∗−

−≥

δ δ δ

qui correspond à la densité de probabilité de la loi ′d Erlang n( , )δ dontla fonction de répartition est donnée par :

( ) ( ) = ( ) ( ) = 1( )

!.

=0

1

F x F x ex

kZn

Zs n

k

nx

k∗ ∗

−−− ∑ δ δ

Ce résultat signifie que la somme de n variables aléatoires indépen-dantes de distributions exponentielle de même paramètre δ est uneloi ′d Erlang n( , )δ . Alors,

( ) ( ) = 1 ( ) ( ) =( )

!.

=0

1

F x F x ex

kZs n

Zs n

k

nx

k∗ ∗

−−− ∑ δ δ

Ainsi,

Ψ( ) = (1 )( )

!

= (1 )

=1 =0

1

=

u ex

k

e

n

n

k

nx

k

u

n

∞ −−

∑ ∑δ ρ δ

δ

δ

δ

11 =0

1 ( )

!

∞ −

∑ ∑ρ δn

k

n kx

k

=0 = 1

= (1 )( )

!−

+∑− δ δδu

k

k

n k

ex

k

∞∞

∑ ρn

−∞ +

∑−−

δ δ ρρ

δu

k

k k

ex

k= (1 )

( )

! 1=0

1

−∞

∑δ ρδu

k

e=(

=0

δδ ρρ

x

k

k k)

! 1

1+

δ δ ρδe eu u= −

ρ δ λe c u= ( / ) .− −

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 116_2016-08-16_09:45:55_K

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109Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

Finalement,

ψ λδ

δ λ( ) = .( / )uc

e c u− − (3)

Le tableau 6 contient les résultats de la probabilité de ruine a horizoninfini ψ ( )u de la branche RC automobile selon la formule (3), pourdes valeurs de θ > 0 données et pour c = 576402.33, λ = 63.972,µ = 10614.32 et la reserve initiale u = 102677.17. Nous constatons apartir des resultats du tableau 6, que les differences ( )c c− sontgrandes. Ainsi, pour éviter la ruine certaine de la branche RC automo-bile, l’actuaire devra augmenter la prime d’une quantite importante. Ilfaudrait que le taux de prime c depasse la valeur λµ representant lecout moyen des réclamations.

TABLE 6 Probabilité de ruine en temps infini pour des valeurs positivesde θ .

θ c c c− ψ ( )u

/10000 679087.180 102684.850 0.998

/5000 679155.082 102752.752 0.997

/1000 679698.298 103295.968 0.989

/500 680377.317 103974.987 0.978

/100 655809.471 109407.141 0.899

/50 692599.664 116197.334 0.811

/40 695994.761 119592.431 0.770

/30 701653.255 125250.925 0.708

/20 712970.242 136567.912 0.600

/10 746921.206 170518.876 0.377

3.4 Simulation de la probabilité de ruine à horizon fini

Le théorème 4 fournit un résultat explicite de la probabilité de ruineà horizon fini pour le modèle de Lundberg. Cependant, une intégrationnumérique est nécessaire (Cf. [1]).

Théorème 4: (Cf. [11])

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 117_2016-08-16_09:45:55_K

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110 Assurances et gestion des risques/Insurance and risk management Vol. 83 (1-2)

Supposons que F x eZx( ) = 1− −δ pour tout x ≥ 0 .Alors,

ψπ

δ λδ δ π( , ) =

1.1

( , , )() 1 (1 )

0u T

re e g u T y dr u u r T− − − − +− ∫ yy (4)

où r c= /δ λ et g s y re

r r yy y

rs w r y

( , , ) = 21 2

( ((2 / )

ω ω+

+ −+

cos

cossin sin

rrysin ))

Proof : Cf. [11]

Lors de l’application numérique, nous avons remarqué que l’intégralede l’équation (4) diverge pour nos parametres λ , μ et u .

Nous proposons alors une approche simulation pour calculer la pro-babilite de ruine a horizon fini ψ ( , )u T . Le principe consiste a simulern = 100 repetitions independantes du processus de reserve jusqu’à ceque la ruine se produise. Dans chaque repetition nous arretons le test àT, à moins que la ruine ne se produise avant l’instant T, dans ce cas,nous nous arretons a l’instant de ruine. Soit p l’estimateur de ψ ( , )u T .Nous prenons le rapport p n n= /' ou n' est le nombre de fois ou laruine s’est produite avant l’instant T, par rapport au nombre total n desimulations. En repetant l’experience 50 fois (simulation de Monte Carlo)et en prenant la moyenne des estimateurs p, nous obtenons une estima-tion de la probabilite de ruine a temps fini ψ ( , )u T .

Pour différentes valeurs de T correspondant à des mois, nous avonsdans le tableau 7 les résultats de la simulation de la probabilité deruine a horizon fini ψ ( , )u T pour les augmentations précédentes dutaux de prime c (cf. section 3.3) qui assurent un chargement de securitepositif et pour c = 576402.33, λ = 63.972, = 10614.32 et u = 102677.17.Nous constatons que pour la prime c estimée, la ruine est certaineaprès le 9 eme mois (à partir du 10 eme mois). Tandis que pour les diffé-rentes augmentations de la prime c, la ruine n’est plus certaine. Deplus, plus T augmente, plus la probabilité de ruine ψ ( , )u T augmente.Nous remarquons également que plus c augmente, plus la probabilitéde ruine à horizon fini ψ ( , )u T diminue. Notons que ces augmentationsdoivent être raisonnables afin de ne pas perdre de contrats (concur-rences entre les compagnies d’assurance).

128298 001-122 int NB_Ok-Proofs_PG 118_2016-08-16_09:45:55_K

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111Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

TABLE 7 Simulation de la probabilite de ruine en temps finipour differentes valeurs de c .

c c c− ψ ( ,9)u ψ ( ,12)u ψ ( ,18)u ψ ( ,24)u ψ ( ,30)u

.33 0 0.999 1 1 1 1

.180 102684.850 0.834 0.888 0.942 0.967 0.975

.082 102752.752 0.829 0.884 0.939 0.966 0.973

.298 103295.968 0.827 0.884 0.935 0.964 0.974

.317 103974.987 0.822 0.882 0.932 0.958 0.972

.471 109407.141 0.796 0.852 0.908 0.940 0.954

.664 116197.334 0.738 0.809 0.866 0.888 0.915

.761 119592.431 0.694 0.769 0.833 0.881 0.894

.255 125250.925 0.655 0.723 0.787 0.832 0.842

.242 136567.912 0.565 0.616 0.676 0.701 0.720

.206 170518.876 0.305 0.325 0.327 0.332 0.333

4. CONCLUSION

Dans ce travail, nous avons modélisé la réserve de la branche RC auto-mobile de la compagnie Zurich d’assurance (Tanger, Maroc) et nousavons calculé la probabilité de ruine de cette branche d’assurance ense basant sur les résultats de la théorie du risque. La modélisation dela réserve nous a permis d’identifier le modèle de risque correspondantà la branche RC automobile qui est le modèle de Lundberg, en suppo-sant l’indépendance entre le nombre et le montant des réclamations etla constance de la prime.

Le développement des résultats de la théorie classique de la ruineau modèle de Lundberg nous a permis d’obtenir une expressionexacte de la probabilité de ruine à temps infini. Quant à la probabilitéde ruine à temps fini, nous avons présenté des résultats théoriquespour ce modèle particulier. En se basant sur les résultats de la théorieclassique de la ruine dans le cas du modèle de Lundberg, l’applicationnumérique a révélé que la probabilité de ruine de la branche RC auto-mobile était de 1, c’est-à-dire que la ruine est certaine, en raison de lacondition nécessaire sur le chargement de sécurité qui n’est pas vérifiéeet de la supposition d’indépendance entre la branche étudiée et lesautres branches de l’agence.

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112 Assurances et gestion des risques/Insurance and risk management Vol. 83 (1-2)

Une augmentation du taux de prime c éviterait que la branche RCautomobile ne soit ruinée. Cependant, cette alternative peut paraîtrenon réalisable d’un point de vue économique. Par ailleurs, une aug-mentation du nombre d’assurés permettrait l’augmentation du taux deprime c afin de couvrir les réclamations des sinistres. Une autre solu-tion consiste en l’utilisation des techniques de division du risque commela coassurance et la réassurance.

Puisque le décideur, au sein de la compagnie d’assurance, peutintervenir uniquement sur la valeur de la prime, nous avons calculé,pour plusieurs augmentations du taux de prime c, les probabilités deruine associées en temps fini et infini. Notons que pour la probabilitéde ruine à horizon fini, même en présence de résultats théoriques,l’application numérique demeure compliquée en raison des expres-sions complexes de cette probabilité. Il est alors intéressant d’utiliserdes méthodes numériques ou des techniques de simulation.

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113Etude de ruine d’une compagnie d’assurance automobile

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