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direction régionale de l’Équipement d’Ile de France Évaluation des implications économiques et spatiales de la mutation industrielle en Ile-de-France mai 2005

Evaluation des implications économiques et spatiales … · Monsieur LEHU, Sorbonne, professeur du DESS Logistique Nous remercions aussi les dirigeants des entreprises qui nous ont

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direction régionale de l’Équipement d’Ile de France

Évaluation des implications économiques et spatiales de la mutation industrielle en Ile-de-France

mai 2005

Évaluation des implications économiques et spatiales de la mutation industrielle en Ile-de-France

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REMERCIEMENTS

Tout au long de cette étude, nous avons rencontré un certain nombre de professionnels qui nous ont fait part de leur vision de l’évolution de l’emploi industriel et de sa mutation au sein de la région Ile-de-France. Ce rapport a été bâti avec les conseils de toutes les personnes citées ci-après qui nous ont permis d’appréhender l’étude sous des angles aussi divers que pertinents. Ainsi, nous tenons à remercier : Toutes les personnes ayant accepté de faire partie du comité de pilotage : Madame LEMERCIER, Direction Régionale de l’Equipement Monsieur MONNOT, Direction Régionale de la Banque de France Madame FRANCASTEL, Direction Régionale de l’Equipement, chargée d’études Monsieur DESCHAMPS, Responsable d’étude pour la CCIP/CROCIS Monsieur CARRE, CNRS, Chercheur et professeur à Paris Nanterre Madame CRUSILLEAU, DRIRE, responsable de mission Monsieur CALZADA, INSEE, responsable d’étude Madame DE LA PORTE, IAURIF, chargée d’étude Monsieur SAIGAULT, IAURIF, chargé d’étude Les experts en géographie, logistique, Recherche et industrie du comité du 2 juillet 2003 : Monsieur GAULIER, CEPII, chargé d’étude Monsieur BOULEY, GEODIS Monsieur BROGGIO, CGPME Monsieur FONTANESI, FIEV Monsieur LE BLANC, CERNA Monsieur DE KERANGAL, INSIGNIA BOURDAIS, Monsieur LEHU, Sorbonne, professeur du DESS Logistique Nous remercions aussi les dirigeants des entreprises qui nous ont permis de cerner les stratégies d’entreprise et de construire les scénarios futurs d’évolution de l’industrie en Ile-de-France. Nous remercions enfin, les statisticiens et responsables d’étude, et experts de filière Madame SOUQUET, responsable d’étude Madame BASTIDE, responsable du service Etude et Diffusion du SESSI Monsieur TELLIER, chargé d’étude, filière Textile, Habillement, Mode Madame JEANNEAU, ARD, responsable des projets Industrie

5

SOMMAIRE

PREMIERE PARTIE : LES MUTATIONS DE L’INDUSTRIE FRANCILIENNE..................... 9

1.1 Les grandes tendances de l’industrie française depuis l’après-guerre .......................... 12 1.1.1 L’industrie française perd des emplois depuis 1974 .................................................... 12 1.1.2 Le phénomène s’accélère dans les années 1980........................................................... 13 1.1.3 L’embellie des années 1996 et suivantes ...................................................................... 15 1.1.4 Quel repositionnement industriel pour la France ?...................................................... 17

1.2 Les grandes tendances de la transformation de l’industrie francilienne....................... 19 1.2.1 Les années 50 marquent le début d’une politique de déconcentration de certaines activités vers la province............................................................................................................... 19 1.2.2 Depuis 10 ans, l’Ile-de-France perd des emplois dans tous les secteurs industriels ... 19 1.2.3 Les gains de productivité soutenus de l’industrie francilienne sont le reflet d’une industrie en renouvellement permanent........................................................................................ 22 1.2.4 L’augmentation de la productivité ne permet pas à l’industrie francilienne de maintenir sa contribution à la valeur ajoutée industrielle ........................................................... 22 1.2.5 L’Île-de-France connaît une évolution plus défavorable que les autres grandes régions industrielles françaises ................................................................................................................. 23

1.3 Mutations internes et localisation des entreprises industrielles en Ile-de-France ........ 33 1.3.1 Stratégies d‘entreprises et mutations socioprofessionnelles ........................................ 33 1.3.2 Mutations industrielles et localisation des entreprises industrielles ............................ 34

1.4 Les liens entre les mutations industrielles et les services rendus aux entreprises......... 36 1.4.1 Un contexte d’ensemble ................................................................................................ 36 1.4.2 Le contenu des services................................................................................................. 36 1.4.3 Le développement des services en France .................................................................... 37 1.4.4 Le recours à l’intérim ................................................................................................... 41 1.4.5 Les services et l’industrie en Ile-de-France.................................................................. 44

1.5 Les mutations spatiales de l’industrie francilienne.......................................................... 50 1.5.1 Mutation et localisation de l’industrie agroalimentaire en Ile-de-France................... 54 1.5.2 Mutation et localisation de l’industrie aéronautique et spatiale en Ile-de-France...... 56 1.5.3 Mutation et localisation de l’industrie automobile en Ile-de-France........................... 58 1.5.4 Mutation et localisation de l’industrie textile-habillement en Ile-de-France............... 60 1.5.5 Les grandes caractéristiques des zones d’activité franciliennes .................................. 64 1.5.6 Points forts des départements de la région Ile-de-France............................................ 65

1.6 L’Ile-de-France face aux grandes agglomérations européennes .................................... 66 1.6.1 Définition de la compétitivité et de l’attractivité .......................................................... 66 1.6.2 Mise au point d’un modèle d’évaluation....................................................................... 66 1.6.3 Méthodologie statistique de la notation........................................................................ 67 1.6.4 Délimitation des zones géographiques européennes .................................................... 68 1.6.5 Les indicateurs de compétitivité et d’attractivité retenus dans la comparaison des agglomérations européennes ........................................................................................................ 69 1.6.6 Classement des agglomérations européennes par leur compétitivité et leur attractivité 69 1.6.7 Compétitivité de l’Ile-de-France : comparaison avec Rhône-Alpes et Pays de Loire.. 77

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DEUXIEME PARTIE : LES SCÉNARIOS PRÉVISIONNELS D’ÉVOLUTION DE QUATRE FILIÈRES INDUSTRIELLES EN ILE-DE-FRANCE ................................................................... 79

1.7 La construction des scénarios ............................................................................................ 81 1.7.1 Méthode des scénarios .................................................................................................. 81 1.7.2 Les hypothèses socio-économiques sous-jacentes aux deux scénarios......................... 91

1.8 Présentation des deux scénarios prévisionnels ............................................................... 100 1.8.1 La notoriété de Paris................................................................................................... 100 1.8.2 Les scénarios............................................................................................................... 105

1.9 Conclusion générale .......................................................................................................... 126

TROISIEME PARTIE : RECOMMANDATIONS ET PLAN D’ACTION................................ 127

7

Le mot « désindustrialisation » apparaît de manière récurrente dans le vocabulaire de la vie économique française à partir de l’année 1974, date à laquelle se manifestent les premiers signes tangibles de difficultés économiques en France, liés aux graves événements internationaux provenant de la crise du Proche-Orient d’octobre 1973. Pour la première fois, depuis ce que l’on a coutume d’appeler les « 30 glorieuses », la France va connaître des turbulences économiques profondes qui, encore aujourd’hui, se font sentir par leur ampleur. L’importance de la mutation, notamment pour l’industrie, est difficile à interpréter de prime abord, car derrière l’apparence des chiffres d’un « déclin industriel », se cachent des phénomènes tels que : transferts d’emplois, modifications de l’organisation interne des entreprises, externalisations, restructurations, recours accru à l’intérim, qui obligent à nuancer et à retenir des mots plus appropriés que celui de « désindustrialisation ». Si ce vocable, désormais passé dans le langage commun, donne à penser que l’industrie est perdue pour l’espace considéré, la réalité est plus complexe. Pour éviter tout malentendu, l’expression « mutation industrielle » sera employée de préférence à celle de « désindustrialisation » dans la mesure où il ne s’agit pas de perte irrémédiable de l’industrie mais bel et bien de logique de transformation qui s’articule autour de trois dimensions : évolution de l’emploi, re-localisations et transformations au sein des filières industrielles. Dans une économie mondialisée, la division internationale du travail s’est d’abord traduite par des délocalisations industrielles. Ce phénomène touche aujourd’hui également les services, apanage des économies dites « développées ». Pour préserver ses emplois et son rang international, l’Ile-de-France ne pourra pas faire l’impasse d’une réflexion sur le devenir de son industrie. Les emplois « captifs » des services à la personne et du tourisme ne pourront pas à eux seuls assurer le développement régional. Ce rapport a pour thème principal la requalification progressive de l’industrie francilienne. Il vise trois objectifs :

- évaluer sur une longue période de temps l’ampleur du phénomène de la mutation industrielle en Ile-de-France ;

- apprécier par des entretiens auprès de responsables d’entreprises industrielles franciliennes, les formes de la mutation, la logique des décisions, la chaîne des conséquences ainsi que les stratégies qui accompagnent ces entreprises dans les prochaines années ;

- enfin, définir des scénarios futurs permettant de tracer les contours de l’évolution de l’industrie francilienne.

Ce rapport devrait nourrir les réflexions préparatoires à l’élaboration du prochain Schéma Directeur de l’Ile-de-France, avec l’idée sous-jacente que la mutation industrielle est à ce point importante qu’elle est susceptible d’induire à elle seule des conséquences portant sur de multiples facettes de la structuration de l’Ile-de-France. Inversement, l’aménagement du territoire régional est en mesure d’accroître l’efficacité du système régional, et par-là, de favoriser le maintien d’une industrie en Ile-de-France ; une industrie sachant tirer partie des atouts régionaux, mais adaptée à la concurrence internationale et aux spécificités inhérentes à une métropole de plus de 11 millions d’habitants.

Michel Ternisien PriceWaterHouseCoopers

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Première partie : LES MUTATIONS DE L’INDUSTRIE FRANCILIENNE

Appréciation quantitative et qualitative

11

Préambule La première partie du rapport est consacrée à l’appréciation quantitative et qualitative du phénomène de la mutation industrielle en région Ile-de-France sur la dernière décennie en situant cette mutation par rapport à celle de la France et de certaines régions françaises. Cette première partie se scinde en cinq chapitres :

- Le premier chapitre examine l’évolution de l’industrie française et de ses emplois en faisant ressortir les efforts de productivité accomplis.

- Le second chapitre empreinte la même démarche, mais en dégageant les spécificités de la région

Ile-de-France. - Le chapitre 3 porte l’accent sur les mutations socioprofessionnelles en faisant ressortir les

professions qui montent et celles qui perdent progressivement de leur importance. - Le quatrième chapitre essaie d’expliquer le lien étroit entre la perte de l’emploi industriel et la forte

poussée des services marchands. - Enfin, le dernier chapitre est consacré à une comparaison de l’Ile-de-France avec les principales

agglomérations européennes afin d’estimer le niveau d’attractivité de l’Ile-de-France.

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1.1 Les grandes tendances de l’industrie française depuis l’après-guerre Un phénomène économique se repère par trois dimensions :

- son origine : il possède une « origine », un point de départ, caractérisé par le moment où il commence à être repérable sur le plan quantitatif (il devient significatif et il est mesurable) ;

- sa continuité : pour être considéré comme un événement structurel, il doit se répéter de manière continue ou récurrente dans le temps ;

- son intensité : le phénomène que l’on observe peut varier dans son ampleur au fil du temps avec des périodes d’accélération et de décélération. Cette démarche a ainsi permis de séquencer l’évolution de l’industrie française en trois phases et d’analyser chacune d’elles au regard de l’évolution de l’emploi, de la valeur ajoutée et de la productivité.

1.1.1 L’industrie française perd des emplois depuis 1974

S’il fallait donner une datation précise de la mutation industrielle en France, l’année 1974 serait à retenir. Cela ne signifie pas que le mouvement ait brusquement démarré à cette date, sans qu’il y ait eu de signes avant-coureurs. Un exemple permettra de mieux comprendre ce point. Lorsque les Forges d’Ivry quittent la commune d’Ivry-sur-Seine en 1962, beaucoup d’observateurs économiques ne s’y sont pas trompés et voient à juste titre le début de la désindustrialisation dans cette commune. La nouveauté réside dans le fait qu’à partir de 1974, le solde entre les emplois créés et les emplois perdus dans l’industrie devient négatif ou au mieux nul : l’industrie ne sera quasiment plus jamais, prise globalement, créatrice nette d’emplois. Évolution des effectifs industriels en France (emploi total)

Année 1964 1973 1974 1975 1978 1982 1984 1986 1990 1994 1998 2000

Emploi industriel

(en milliers) 5 841 6 303 6 258 6 071 5 593 5 253 5 008 4 782 4 664 4 170 4 096 4 138

Source : INSEE Conjoncture de l’emploi En cette fin d’année 1973, la France connaît des difficultés qui la conduiront à des réactions en profondeur, la forçant à faire évoluer son industrie. La crise du Proche-Orient (dite guerre du « KIPPOUR ») voit naître une organisation différente et toute puissante du marché de l’énergie et plus particulièrement de « l’or noir ». Le cartel de l’OPEP se structure en faveur d’une régulation forte du marché du pétrole, à la fois dans la fixation de son prix et dans la détermination des quantités produites. Les conséquences de cette organisation seront spectaculaires pour les pays industriels : un quadruplement du prix du pétrole brut en un laps de temps extrêmement court, augmentant considérablement la facture de l’énergie et révélant les faiblesses structurelles de l’industrie française. En quelques mois, le prix du baril passe de 3 $ à plus de 12 $. L’industrie française ne résistera pas à cette « poussée » de la facture énergétique. Pour la première fois en 1974, la France va connaître un recul industriel. Le phénomène sera dès lors structurel, ne cessant pratiquement jamais. Au fil des années, l’industrie, au sens de la comptabilité nationale, contribuera de moins en moins à la richesse nationale : A partir des années soixante-dix, la contribution de l’industrie au PIB commence à diminuer. De 1950 à 1970, cette contribution était stable et représentait 30% du PIB. En 1980, la contribution de l’industrie n’est plus que de 27% et celle-ci va décroître jusqu’en 2000.

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1.1.2 Le phénomène s’accélère dans les années 1980

La seconde inflexion tient au « second choc pétrolier » qui produira les mêmes effets que le premier en augmentant les coûts de production sur un laps de temps très court, le tout dans un contexte international défavorable avec des circonstances propres à la France. Au cours des précédentes décennies, l’industrie française avait marqué une certaine résistance aux événements économiques mondiaux ; le second choc pétrolier marque l’accélération du déclin industriel. Le deuxième choc pétrolier de 1979, lié à la crise iranienne (l’arrivée au pouvoir de l’Imam KHOMEINY, entraînant une redéfinition des rapports de force au Moyen-Orient), viendra accentuer les difficultés des pays industriels et plus particulièrement de la France : le prix du pétrole grimpe jusqu’à 35 $ le baril en 1980, ce qui engendre un impact négatif estimé à l’époque à 6% du PIB français, perturbant le fonctionnement d’industries consommatrices d’énergie et d’entreprises fragiles. Cet impact, la France le reçoit d’autant plus douloureusement, que la nouvelle politique énergétique, centrée sur le « tout nucléaire » n’a pas encore produit tous ses effets. Cette « donne » économique, couplée à une montée du dollar dont la valeur culminera en 1983 à une parité de un dollar pour 10.59 FRF, sera d’autant plus mal vécue par les pays industriels, que la facture pétrolière des pays se règle à cette période dans cette monnaie. A la conjoncture internationale, s’ajoute un contexte politique propre à la France, marqué par des décisions politiques et économiques qui auront des impacts très importants sur l’industrie : politique de nationalisations des grands groupes industriels entre 1981 et 1982, coûteuse (rachat de 100% de l’actif net), perturbatrice, mais parallèlement sources d’accélération de profondes transformations. Évolution en terme de valeur ajoutée : A partir des années 1980, on assiste à une diminution notable de la contribution de l’industrie à la richesse nationale qui s’érode de manière sensible et régulière au fil des années : entre 1970 et 1980, la contribution de l’industrie française à la valeur ajoutée diminue de 0,4% contre 3% entre 1980 et 1990, sur un nombre d’années équivalent.

0

1 0

2 0

3 0

4 0

5 0

6 0

7 0

8 0

9 0

1 er trim . 2 e 1950

3 e trim . 4 e trim .

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90%

100%

1 95 0

S tru ctu re p ar bra n c h e d e la v ale ur ajo uté e

S o u rce : IN S E E

S erv ic es n on m arc h ands A s s uranc es e t o rg . F in anc ie rs L oc a tions im m ob iliè res S erv ic es m arc h ands T rans p or ts - téléc om m u n ic at ions C om m erc e B T P E n erg ie Ind us tr ie m anu f ac tu r iè re Ind us tr ie ag roa lim en ta ire A gric u ltu re

1 9 8 0 1 9 9 0 2 00 0 1 9 7 0 1 9 6 0

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Source : INSEE, Comptes nationaux de 1970 à 2001 aux prix de 1995

Les conséquences de cette conjoncture se feront sentir sur des pans entiers de l’économie industrielle et notamment sur des filières économiques très fragiles où les coûts de production sont trop élevés en comparaison de ceux de certains pays (Corée du Sud, Chine,…). Trois secteurs d’activité subissent des restructurations profondes :

- La fabrication de l’acier compte 39 000 salariés en 1994 contre 160 000 vingt ans plus tôt. - L’industrie textile qui perd en 40 ans près de 70% de ses effectifs. - Les chantiers navals (fabrication de bateaux) : en 1994, 6 000 salariés contre 21 000 en 1984.

D’autres filières, telles que l’industrie automobile, se trouvent menacées et sont conduites à se restructurer de manière drastique pour faire face à la concurrence internationale. Évolution en terme d’emploi : L’emploi industriel continue de croître jusqu’en 1974, année de la crise internationale, puis chute de manière très significative à partir de cette date et le phénomène se poursuit dans les années 1980. La courbe de l’emploi industriel illustre bien ce mouvement de perte continue de l’emploi industriel au plan national (presque continue car il existe un première exception avec les années 1989 et 1990 et une seconde à partir de 1996). Ces emplois « perdus » dans l’industrie iront pour une très grande part dans les « services associés » à ces industries par le phénomène bien connu de l’externalisation. Une autre partie des emplois sera réellement perdue pour l’industrie nationale du fait de délocalisations vers des pays à faibles coûts de main-d’œuvre. Évolution en terme de productivité : La forte progression de la productivité industrielle française (valeur ajoutée industrielle à prix constants rapportée aux effectifs salariés industriels) reflète l’importance de la mutation qui s’est opérée en France au cours des trente dernières années. Depuis 1970, la productivité industrielle française augmente quasiment sans interruption. L’ampleur de la restructuration est telle qu’entre 1974 et 2000, la productivité industrielle fait plus que doubler, ce qui correspond à une progression de la productivité à prix constants supérieure à 3% par an.

Evolution de la contribution de l'industrie française

à la richesse nationale

0

200 000

400 000

600 000

800 000

1 000 000

1 200 000

1 400 000

1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000

en millions d'euros

0,0

5,0

10,0

15,0

20,0

25,0

30,0

35,0 %

VA France toutesbranchesconfondues prix 1995

VA France Industrie aux prix 1995

Part de la VA industrielle dans la richesse nationale

1 2

3

15

Evolution de l'emploi salarié industriel en France de 1964 à 2001

4000

4500

5000

5500

6000

6500

1964 1974 1977 1979

1981 1983 1985 1987

19891991

1993 1995 1997 1999

2001

Emplois salariés en milliers

Evolution de la productivité industrielle française en volume de 1970 à 2001

0

10

20

30

40

50

60

70

19701972

19741976

19781980

19821984

1986 1988

1990 1992

19941996

19982000

(en milliers d'euros per capita)

Productivité France Industrie

Source : INSEE, Conjoncture de l’emploi, Comptes nationaux prix 1995

1.1.3 L’embellie des années 1996 et suivantes

L’approche en terme de Valeur Ajoutée A partir de 1996, une reprise de l’industrie apparaît. La part de la valeur ajoutée industrielle dans le PIB remonte au-dessus de 19% et se maintient à ce niveau jusqu’en 2002. Cette amélioration est importante et significative, même s’il est encore difficile de bien l’interpréter. Elle trouve son origine dans des facteurs structurels forts et aujourd’hui bien identifiés tels que : début de la convergence des politiques économiques des pays de l’Europe pour se préparer à la monnaie unique (le marché international de la France est européen), croissance économique mondiale très favorable, assainissement financier des entreprises françaises, bonnes performances à l’exportation. L’approche par l’emploi salarié industriel Cette amélioration porte également sur l’évolution des effectifs industriels. L’industrie française continue à perdre des emplois entre 1996 et 1999 mais à un rythme beaucoup lent que par le passé. En 2000 et 2001, on note même une légère reprise de l’emploi. Évolution des effectifs industriels en France (emploi total)

Année 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001

Effectif industriel français

(en milliers)

4 664 4 664 4 609 4 459 4 255 4 170 4 175 4 125 4 092 4 096 4 087 4 137 4 181

Source : INSEE, conjoncture de l’emploi L’importance qu’il convient d’accorder à cette amélioration industrielle est controversée : certains experts pensent que la France n’a fait que suivre un mouvement économique mondial très favorable, d’autres estiment qu’à ce contexte s’ajoutent des facteurs propres à la France. Néanmoins, ce phénomène dure depuis 1996.

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En conclusion Au cours des deux dernières décennies, les gains de productivité de l’industrie française se sont élevés à près de 3,5% par an. La symétrie des courbes d’évolution de la productivité, de l’emploi et de la valeur ajoutée depuis 1978 reflète l’ampleur de la mutation opérée par l’industrie française :

- substitution de capital au travail, - externalisation des activités de service, - recours accru à l’intérim, - repositionnement de l’industrie française sur les branches les plus créatrices de valeur - évolution vers des métiers de plus en plus qualifiés et à haute valeur ajoutée, etc.

En conclusion, la profonde mutation opérée par l’industrie française lui a permis de maintenir la croissance de sa valeur ajoutée, bien que celle-ci soit globalement inférieure à la croissance nationale, tous secteurs confondus. Évolution de la productivité du travail industriel, des effectifs et de la valeur ajoutée en France (base 100 en 1978)

Source : INSEE données CVS-CJO

1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000

VA / Effectifs 26.4 27.9 29.3 31.6 34.1 40.0 43.4 46.5 48.9 52.1 57.1 60.7

Évolution productivité 100 105.5 111 120 129 151.3 179.9 176.1 185 197 216 230

Évolution effectifs 100 97.0 94.0 88.5 84.4 82.0 74.0 69.4 65.7 64.7 64.8 66.0Évolution VA prix constants 100 103.7 105.3 107.5 110.4 116.3 123.5 123.7 123.2 129.2 142 153.8

Évolution de la productivité industrielle, des effectifs et de la VA en France (Base 100 en1978)

50

100

150

200

250

1978 1982 1986 1990 1994 1998

productivité

effectifs

VA prix constants

2000

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1.1.4 Quel repositionnement industriel pour la France ?

Depuis les années soixante-dix, l’industrie française a subi d’importantes transformations mais celles-ci ont touché les branches industrielles de manière très contrastée que ce soit en terme de valeur ajoutée, d’emplois ou de productivité. L’approche par la Valeur Ajoutée L’examen des branches industrielles (cf histogramme ci-dessous), en valeur ajoutée, montre que les évolutions sont différentes d’une branche à l’autre :

- la branche « Industries Agricoles et Alimentaires » perd de son importance au fil du temps, passant de 3,5% de la valeur Ajoutée nationale en 1978 à 2.3% en 2002. Ce phénomène se retrouve pour l’industrie des biens de consommations qui perd 1,1 point sur la même période ;

- les branches : « automobile, biens d’équipement et biens intermédiaires » stoppent leur

perte d’influence à partir de 1996. Ce constat est surtout vrai pour l’industrie automobile qui progresse très lentement sur la période et qui devient, dès 1996, un des moteurs de la croissance. Depuis 1997, l’industrie automobile apporte une contribution non négligeable à la croissance de l’économie française et aux excédents de la balance commerciale. Les constructeurs français grâce à leur politique constante d’innovation, gagnent des parts de marché en France et en Europe.

Structure par branches de la valeur ajoutée de l'industrie française en 1978 et 2002

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

1978 2002

Biens Intermédiaires

Biens d'équipement

Automobile

Biens de consommation

Industrie agroalimentaire

Source : INSEE, Comptes Nationaux, aux prix constants 1995

L’approche par les effectifs industriels Depuis 1989, deux secteurs seulement sont créateurs d’emplois (l’industrie des composants électriques et électroniques et les industries agroalimentaires). Tous les autres secteurs industriels perdent des emplois à un rythme plus ou moins important. Les secteurs du textile et de l’habillement et cuir sont sans conteste les plus touchés par les diminutions d’emplois (respectivement -3,3% et -6,2% par an).

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Évolution de l’emploi industriel français par secteurs de 1989 à 2000

Évolution Secteurs Taux d’évolution annuel moyen 1989 - 2000

Édition Imprimerie Reproduction - 0,8 % Habillement et Cuir - 6,2 % Équipements du Foyer - 1,8 % Construction navale, aéronautique - 2,4 % Équipements électriques et électroniques - 0,4 % Produits minéraux - 2,1 % Textile - 3,3 % Bois Papier - 1,6 % Chimie - 0,6 % Métallurgie - 1,1 %

Perte d’emploi industriel

Automobile - 0,9 % Équipements mécaniques - 0,3 % Stagnation de l’emploi Pharmacie, parfumerie et entretien - 0,3 % IAA 0,3 % Progression de l’emploi Composants électriques et électroniques 1,3 %

Source : INSEE, l’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000, Comptes nationaux L’automobile, industrie phare de la France Le graphique ci-dessous montre l’évolution de la productivité industrielle par grandes branches de 1990 à 2000. L’industrie automobile se positionne comme la plus motrice en terme de gains de productivité avec une progression de 4,4 % par an. Les biens d’équipements et les biens intermédiaires viennent juste après. Les biens de consommation, malgré une augmentation de leur productivité, progressent moins que la moyenne nationale. L’industrie agroalimentaire est la seule des cinq branches à connaître une diminution de sa productivité.

Evolution de la productivité industrielle nationale par branches (Base 100 en 1990)

90

100

110

120

130

140

150

160

170

180

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

IAA

Biens de consommation AutomobileBiens d'équipements Biens intermédiaires

Total France

Source : INSEE, L’emploi départemental de 1989 à 2001, Données CVS-CJO

19

1.2 Les grandes tendances de la transformation de l’industrie francilienne La région Île-de-France reste encore aujourd’hui la première région industrielle de la France, que ce soit par le nombre d’établissements, les emplois ou la contribution en terme de Valeur Ajoutée. Toutefois, les politiques publiques d’aménagement du territoire et les stratégies d’entreprises visant à minimiser le coût des facteurs de production ont conduit à une diminution du poids de la région Île-de-France dans l’industrie nationale.

1.2.1 Les années 50 marquent le début d’une politique de déconcentration de certaines activités vers la province

L’approche précédente effectuée en termes de Valeur Ajoutée, d’emploi et de productivité doit être replacée dans le contexte historique de la politique d’aménagement du territoire. La perte de l’emploi industriel francilien au bénéfice des régions n’est pas uniquement le fait de choix d’entreprises mais résulte également d’une volonté d’aménagement du territoire née dans les années 1950. A partir de 1963, cette volonté est incarnée par la Direction de l’Aménagement du Territoire et de l’Action Régionale (DATAR) qui met en œuvre cette politique de déconcentration des activités d’abord industrielles, puis ensuite tertiaires (c’est en 1963 que naît le choix de huit métropoles d'équilibre). Les premières décentralisations concernent le secteur public et industriel : l'École nationale supérieure de l'aéronautique à Toulouse, le Service de télécommunication des armées à Rennes, l'industrie électronique en Bretagne, l'Aérospatiale à Toulouse et Bordeaux. A partir de 1982, les lois sur la décentralisation ambitionnent de mobiliser les énergies locales par le moyen d’une politique contractuelle entre l’État et les régions. Dans le même temps, I'Europe s'élargit et se soucie à son tour de réduire les écarts excessifs de développement entre les régions des États membres. Elle souhaite ainsi renforcer sa cohésion interne. La réforme des fonds structurels communautaires en 1989 engage la politique régionale européenne. La carte des zones éligibles à la prime d’aménagement du territoire pour les entreprises industrielles pour la période 2000-2006 exclut l’Ile-de-France. Aujourd’hui, encore, le souci de rééquilibrage industriel joue en faveur de la province.

1.2.2 Depuis 10 ans, l’Ile-de-France perd des emplois dans tous les secteurs industriels

Dans une première approche, la mutation de l’industrie francilienne est visible à travers les importantes pertes d’emplois subies. La période 1974 - 2002 peut ainsi être scindée en plusieurs phases1 : - la première période (1974-1982) est celle des débuts de la mutation de la France industrielle et de l’industrie de l’Ile-de-France. Les pertes d’emplois industriels s’effectuent à un rythme rapide en France mais de manière plus soutenue en Ile-de-France. - la seconde période (1982-1988) est une période de répit pour l’emploi industriel francilien ; on détruit des emplois mais à un rythme plus faible pour l’Ile-de-France (-1,5% par an) comparativement à la France (-2,2% par an). - la troisième période (1988-1997) : Dans un contexte national de « désindustrialisation, la France perd ses emplois industriels à hauteur de 1,4% par an entre 1989 et 1997. L’Ile-de-France n’échappe pas à ce phénomène puisque son industrie perd ses emplois à un rythme beaucoup plus rapide comparativement à l’industrie nationale (-4,1% par an sur la même période). - La quatrième période (1997-2002) : cette phase marque une perte d’emploi pour l’Ile-de-France beaucoup moins importante comparativement à la période précédente, alors que la France est sur cette même période légèrement créatrice d’emplois.

1 Le découpage reprend ici celui opéré dans l’étude menée par Nicole CADENEL et Christian CALZADA « La géographie de l’emploi industriel », 2001/2002, Annales des Mines. Cette étude fait apparaître un découpage de l’évolution des effectifs industriels en Ile-de-France en trois phases jusqu’en 1997. Cette analyse a été élargie en y intégrant une quatrième phase correspondant aux années de 1997 à 2002.

20

Au total, en 26 ans, la France a perdu ses emplois industriels à un rythme de 1,2% par an mais l’Ile-de-France accentue cette tendance avec une perte d’emplois supérieure à 2% par an. Évolution à long terme de l’emploi industriel en IDF et en France (taux de variation annuel moyen) 1974- 1982 1982-1988 1989-1997 1997-2002

Ile-de-France (1) -2.1% -1.5% -4,1% -1.6%

France (2) -1.5% -2.2% -1.4% + 0,4% Sources : (1)Insee, Nicole CADENEL, Christian CALZADA, « La géographie de l’emploi industriel en Ile-de-France », Réalités Industrielles, Annales de Mines, février 2000, éditions ESKA Pour les données ultérieures à 1997 : Insee Ile-de-France, Faits et Chiffres de chaque années à partir de 1997 (2) de 1974 à 1988 : annuaire statistique de la France, 1988, Tableau 14 « Emploi total par secteur d’activité 1954-1988 » A partir de 1988 : Séries longues, édition 2002, INSEE Conjoncture Une analyse plus fine par secteur d’activité confirme cette tendance : sur les 11 dernières années, aucun secteur d’activité francilien ne parvient à créer des emplois. Tous secteurs confondus, les effectifs industriels franciliens diminuent à un taux de 3,2% par an. Seule l’industrie des équipements électriques et électroniques arrive sur la période à maintenir au même niveau ses effectifs. Ce maintien est d’autant plus caractéristique pour l’Ile-de-France, que l’emploi industriel de ce secteur en France connaît un taux de croissance annuel négatif (-0,4%). En Île-de-France, la baisse de l’emploi des activités industrielles est particulièrement marquée :

la diminution est continue sur la décade, contrairement à la province qui, postérieurement à 1996 arrive globalement à conserver ses emplois industriels ;

la baisse est plus forte en Île-de-France qu’en France dans tous les secteurs d’activités (sauf équipement électrique et électronique et habillement-cuir)

Les rythmes moyens de pertes d’emplois illustrent l’étendue du phénomène. Même l’industrie de « l’édition, de l’imprimerie et de la reproduction », qui a été le premier employeur de l’Ile-de-France pendant longtemps, voit ses effectifs régresser de 2% par an. Alors que l’Ile-de-France perd ses emplois industriels à un rythme de 3,2% par an sur la période, la France ne les perd qu’à hauteur de 1% par an sur la même période. Taux d’évolution des emplois industriels en IDF sur la période 1989-2000 Taux de croissance annuel moyen 1989-2000 (%) Ile-de-France France Industries agricoles et alimentaires -2 0.3 Habillement et cuir -5 -6.2 Édition, imprimerie, reproduction -2 -0.8 Pharmacie, parfumerie, -2.8 -0.3 Équipements du foyer -5.4 -1.8 Automobile -4 -0.9 Construction navale, aéronautique et ferroviaire -5.3 -2.4 Équipements mécaniques -1.7 -0.3 Équipements électriques et électroniques 0 -0.4 Produits minéraux -5.2 -2.1 Textile -5.3 -3.3 Bois et papier -5.2 -1.6 Chimie, caoutchouc et plastiques -6.1 -0.6 Métallurgie et transformation des métaux -5.1 -1.1 Composants électriques et électroniques -2.5 1.3

1.2.2.1 TOTAL - 3.2 -1 Source : INSEE, L’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000

21

L’importance de la mutation de l’industrie en Ile-de-France apparaît clairement dans l’examen de l’évolution des emplois par secteurs d’activité (NES 36).

Seul le secteur des équipements électriques et électroniques parvient à stabiliser ses emplois.

Les secteurs de l’Édition, Imprimerie et Reproduction (point fort historique de l’Ile-de-France), des industries agroalimentaires et des équipements mécaniques perdent leurs emplois de manière significative mais marquent une résistance relative à la diminution des effectifs. Pour ces trois secteurs, la perte d’emploi est d’environ 20 % par rapport à 1989.

Les secteurs « Pharmacie, Parfum et Entretien » et « Composants électriques et électroniques » connaissent des pertes d’emplois très substantielles de l’ordre de 25 %. C’est la tendance moyenne suivie par l’industrie tous secteurs confondus.

Enfin, tous les autres secteurs (« Habillement, Cuir », « Équipement du foyer », « Aéronautique et aérospatiale », « Produits minéraux », etc.) subissent des transformations profondes qui se traduisent par des pertes d’emplois de l’ordre de 45 % et plus.

Evolution de l'emploi salarié industriel francilien par secteur en base 100 1989

50

60

70

80

90

100

110

1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

IAA Habillement et Cuir Edition Imprimerie et reproduction

Pharmacie, parfum et entretien

Equipements du foyer Automobile Aéronautique et aérospatiale

Equipement mécaniques Equipements électriques et électroniques

Produits minéraux Textile Industries du Bois Papier Chimie et caoutchouc Métallurgie et transformation des métaux

Composants électriques et électroniques

Total

Source : INSEE, L’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000

22

1.2.3 Les gains de productivité soutenus de l’industrie francilienne sont le reflet d’une industrie en renouvellement permanent

L'Île-de-France se caractérise par une productivité supérieure à celle des autres régions françaises. Depuis 1990, la région a encore développé un effort de productivité supérieur à la moyenne nationale. Si l’on prend comme base 100 l’année 1990, on constate qu’en 2001, la productivité en Île-de-France a atteint l’indice 151, ce qui représente un taux de croissance annuel moyen de 3,7%. Si l’on compare cette évolution avec celle de la France entière, on constate un écart de 0,8 point en faveur de l’Île-de-France ; Ceci confirme bien l’ampleur de la mutation opérée et l’effort considérable de productivité réalisé. Ces gains de productivité sont le résultat de la mutation opérée par la région :

celle-ci a su se repositionner sur les secteurs les plus intensifs en travail qualifié (industrie des biens d’équipement, automobile)

au sein de chaque branche d’activité, seules les fonctions stratégiques, les plus qualifiées, sont maintenues en Île-de-France

Mais le recul des effectifs industriels franciliens est tel que ces efforts de productivité ne permettent pas à l’industrie francilienne de maintenir sa contribution française en terme relatif de valeur ajoutée (celle-ci, longtemps située à 21% de l’ensemble de l’industrie nationale, est aujourd’hui proche de 19,5%).

1.2.4 L’augmentation de la productivité ne permet pas à l’industrie francilienne de maintenir sa contribution à la valeur ajoutée industrielle

En matière de valeur ajoutée, l’industrie francilienne subit la même tendance à la baisse que la France entière, mais la particularité de l’industrie francilienne tient dans le fait que cette diminution est plus rapide et plus forte que celle de l’industrie française. Le recul de l’industrie se fait sentir en Île-de-France dès 1974 et commence à être observable sur le plan statistique dès 1976. Après cette date, la contribution de l’industrie francilienne à la richesse nationale baisse tendanciellement, sans qu’il y ait une quelconque inversion de tendance. Globalement, la contribution de l’industrie de l’Île-de-France perd de son importance depuis 1990 : elle passe en dessous de 4% en 1996 et tombe à 3,4% en 2001. Si l’on rapporte cette contribution non plus à la richesse nationale mais à la contribution de l’ensemble de l’industrie nationale, cette proportion est de 19,5% en 2001. Contrairement à l’évolution notée pour la France, on ne constate pas de reprise en Île-de-France à partir de 1996 : alors que l’industrie nationale semble marquer une reprise à partir de cette date, l’industrie francilienne continue son déclin pour atteindre en 2001 une contribution autour de 3,4% (ce qui représente une contribution de 19.5% si on la rapporte à la valeur ajoutée de l’industrie). Contribution de l’industrie francilienne à la valeur ajoutée nationale

Mds d’euros courants 19

76

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

-89

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

VA industrie

IDF 18,8 21,1 18,8 21,1 24,1 25,7 29,0 31,6 33,9 43,4 43,5 43,4 40,3 40,9 41,2 40,9 43,5 44,0 44,9 44,5 45,7

PIB

309 351 309 351 400 450 516 570 623 943 980 1018 1032 1064 1095 1118 1150 1197 1242 1302 1351

VA ind IDF / PIB

6,6 6,4 6,1 6,0 6,0 5,7 5,6 5,5 5,4 4,6 4,4 4,3 3,9 3,8 3,8 3,7 3,8 3,7 3,6 3,4 3,4

Source INSEE données CVS-CJO

23

1.2.5 L’Île-de-France connaît une évolution plus défavorable que les autres grandes régions industrielles françaises

Méthodologie Pour affiner le jugement de la mutation industrielle de l’Ile-de-France, il a semblé opportun de comparer cette mutation à celle que peuvent connaître aujourd’hui quatre autres régions françaises : Rhône-Alpes, Nord Pas-de-Calais, Pays de la Loire, et PACA. Ces régions ont des traits communs :

- ce sont les régions les plus importantes de France en termes de valeur ajoutée et d’emplois industriels ;

- ce sont des régions qui font l’objet d’importantes restructurations. La période de comparaison est 1990 - 2001 (pour certains critères, l’information a manqué pour l’année 2001). Enfin, pour être plus pertinent dans les jugements, l’analyse a été réalisée en trois temps : l’Ile-de-France est comparée à chacune des quatre régions, puis au cumul des régions, et enfin au niveau national. La mutation de l’industrie francilienne : approche globale L’analyse de la contribution en Valeur Ajoutée de l’industrie francilienne à l’industrie française et à la richesse nationale fait ressortir trois constats majeurs, comparativement aux régions les plus industrielles de France : Le poids relatif des cinq régions les plus contributives en valeur ajoutée industrielle est en retrait régulier depuis 1990. Pour la première fois, au cours de la décennie, les cinq régions industrielles de France passent en-dessous de 50% (par rapport à la contribution de l’industrie) et en-dessous de 10% (par rapport à la contribution nationale). Le taux de croissance moyen de la valeur ajoutée de l’industrie francilienne sur onze ans est inférieur à la croissance moyenne de l’industrie des cinq régions (0,48% contre 1,3%), à la croissance moyenne de l’industrie française (2,1%), et enfin à la croissance moyenne de la valeur ajoutée nationale (3,3%).

La diminution de la contribution de l’industrie francilienne au PIB et à la valeur ajoutée industrielle nationale est continue sur la période, alors que ce phénomène ne se manifeste pas dans les autres régions industrielles qui parviennent à se maintenir sur la période analysée.

Seule la région des Pays de Loire progresse. Cette dernière région voit son industrie progresser à un rythme moyen de 3,7% par an alors que l’Ile-de-France est en quasi stagnation sur la même période. Globalement, cela signifie que la région Pays de Loire se réapproprie l’industrie. Ce phénomène est suffisamment rare pour qu’on le souligne. Les explications résident dans plusieurs éléments : la prise de conscience par cette région de sa trop grande spécialisation dans la filière des IAA, une politique volontariste des collectivités, orientée notamment sur l’industrie.

Contribution à la VA sur la période 1990-2001 des 5 premières régions de France

Industrie Régionale

sur Industrie France

Industrie régionale sur PIB

Industrie Régionale

sur Industrie France

Industrie régionale sur PIB

Industrie Régionale

sur Industrie France

Industrie régionale sur PIB

Industrie Régionale

sur Industrie France

Industrie régionale sur PIB

Industrie Régionale

sur Industrie France

Industrie régionale sur PIB

Ile de France 23,2 4,7 22 4 20,8 3,7 20,4 3,7 19,5 3,4

Rhône Alpes 11,7 2,3 11,6 2,1 12,2 2,2 12,1 2,2 12,1 2,1

Nord Pas de Calais 7,1 1,4 7,2 1,3 7,3 1,3 7,1 1,3 7,2 1,3

Pays de Loire 5,1 1 5,3 1 5,6 1 5,9 1,1 6,1 1,1

PACA 4,3 0,9 4,2 0,8 4,2 0,8 4,4 0,8 4,5 0,8

Top 5 51,5 10,3 50,4 9,1 50,1 9 49,9 9 47,2 8,3

20011990 1993 1996 1999

Source : INSEE, en % de la VA données CVS-CJO

24

Evolution des valeurs ajoutée régionales et nationales (base 100 en 1990)

90

100

110

120

130

140

150

1990 1993 1996 1999 2001

Ile de FranceRhône AlpesNord Pas de CalaisPays de LoirePACATop 5Industrie FranceCroissance nationale

Source : INSEE, calculs effectués en Base 100 1990 Le tableau ci-dessous illustre bien les difficultés de l’industrie francilienne. Si l’industrie connaît un rythme de croissance inférieur à la croissance nationale, les différences de croissance entre la France l’industrie française dans son entier, le cumul des cinq régions, le rythme de chacune des régions et la faiblesse relative de la croissance francilienne. Comparaison des croissances annuelles moyennes de la Valeur Ajoutée

%

Île-de-France

Rhône-Alpes NPdC Pays de

Loire PACA TOP 5 Industrie France

Croissance nationale

Taux de croissance

annuel moyen 1990-2001

0,48 2,42 2,2 3,7 2,5 1,3 2,1 3,3

Source : INSEE, Comptes Nationaux, Données CVS-CJO Analyse comparative de l’Ile-de-France, de Rhône-Alpes et de Pays de Loire Méthodologie : Pour la suite, le paragraphe se concentre sur trois régions essentielles que sont Pays de Loire, Rhône-Alpes et Ile-de-France, qualifiées comme étant les trois premières régions industrielles de France en terme de Valeur ajoutée, effectifs et productivité. Les analyses comparatives sont ensuite faites en raisonnant par grandes branches de la comptabilité nationale (l’indicateur retenu sera la valeur ajoutée) puis par secteur d’activité lorsque l’information est disponible (l’indicateur retenu est l’emploi). Grille de correspondance entre branche et secteurs d’activité

Industries des biens de consommations

Habillement, Cuir Edition, imprimerie Pharmacie, parfumerie et entretien Industries des équipements du foyer

Industrie automobile Industrie automobile Fabrication d’équipements automobiles

Industries des biens d’équipement

Construction navale, aéronautique et ferroviaire Équipements mécaniques Équipements électriques et électroniques

Industries des biens intermédiaires

Produits minéraux Textile Bois et papier Chimie caoutchouc plastiques Métallurgie et transformation des métaux Composants électriques et électroniques

25

Les industries agroalimentaires La Valeur ajoutée à prix constants : La branche IAA francilienne progresse de 1.3% par an sur la période, alors que les deux autres régions progressent à un rythme de 4.5% pour les Pays de Loire et de 2.8% pour la région Rhône-Alpes dont la croissance est proche de la moyenne nationale. L’évolution des effectifs : L’Ile-de-France perd 20% de ses effectifs dans cette branche, alors que dans les deux autres régions, ceux-ci progressent (surtout pour la région Pays de Loire). Il est à noter l’effort tout particulier réalisé par les Pays de Loire en matière de productivité apparente du travail (4.5% de progression de la VA à prix constants et 2.3% pour les effectifs, ce qui donne un effort de productivité de 2.2% par an). Le graphique ci-dessous montre l’évolution de la productivité de l’industrie agroalimentaire des trois régions les plus industrielles de France avec la comparaison de la productivité française de la même branche. L’Ile-de-France se démarque avec un taux d’évolution de sa productivité annuelle de 3,2% contre un recul national de 0,2% par an. C’est le seul secteur à connaître une baisse de productivité sur la période étudiée.

Evolution de la productivité des IAA par régions

(Base 100 en 1990)

90

95

100

105

110

115

120

125

130

135

140

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

Ile de France Pays de la Loire Rhône Alpes France

Source : INSEE, Comptes Nationaux 1998, l’emploi départemental et sectoriel 2001

La nette progression de la productivité francilienne, avec une diminution de ses effectifs sur la même période, s’explique par une concentration importante des emplois à forte valeur ajoutée sur la région Ile-de-France avec la présence de sièges sociaux des grands groupes de l’industrie agroalimentaire (exemple : Danone, Nestlé, Heineken,...).

26

Les industries de biens de consommations La Valeur ajoutée à prix constants : Seule la région Rhône-Alpes fait mieux que la moyenne nationale. Les Pays de la Loire suivent la tendance nationale, tandis que l’Ile-de-France est bien en dessous (seulement 6% de la croissance de la VA de 1990 à 2001). Toutefois, en 2001, l’Ile-de-France contribue encore pour 35% de la valeur ajoutée nationale de l’industrie des biens de consommation. C’est dans ce secteur que la contribution francilienne est la plus forte. L’évolution des effectifs : Pour comprendre l’évolution de l’emploi, il est nécessaire de descendre par secteur d’activité.

• Habillement et cuir : La situation en terme d’emploi montre les difficultés de ce secteur. Sur la période 1989-2000, les emplois sont divisés par deux pour la France. Il en est de même des trois régions à quelques nuances près. Ces trois régions leaders industriels ne font pas mieux que l’ensemble du pays.

• Pharmacie, parfum et entretien : La situation est radicalement différente. La France maintient ses effectifs dans ce secteur. Les trois régions se trouvent quant à elles dans une situation contrastée. Les emplois de Pays de Loire progressent à un rythme de 4% par an. Rhône-Alpes maintient ses effectifs. L’Ile-de-France perd 25% de ses effectifs (-2.8% par an).

• Édition, Imprimerie, Reproduction : Globalement, la France perd ses emplois à un rythme très lent (-0.8% par an). Rhône Alpes réussit à maintenir ses emplois sur la période 1989-2000, tandis que Pays de Loire accroît ses effectifs. L’Ile-de-France perd ses effectifs à raison de 2% par an. Malgré cela, ce secteur reste le premier employeur de la région Ile-de-France avec 80 000 emplois en 2000, soit 14% des emplois industriels de la région et 38% des emplois nationaux de l’édition.

• Équipement du foyer : Ce secteur perd au niveau national 1.8% de ses effectifs par an depuis 1989. Seule la région Pays de Loire conserve ses emplois. Rhône-Alpes perd 25% de ses effectifs sur la période. L’Ile-de-France voit ses effectifs se réduire de moitié (-5% par an).

Evolution de la productivité des biens de consommation par régions (Base 100 en 1990)

90

100

110

120

130

140

150

160

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

Ile-de-FrancePays de la LoireRhône AlpesFrance

Source : INSEE, Comptes Nationaux 1998, l’emploi départemental et sectoriel 2001

27

La branche des biens de consommation est composée de secteurs qui subissent tous des pertes d’emplois sur les trois régions exceptée l’industrie « pharmaceutique, parfum et entretien » qui arrive à maintenir ses emplois. La valeur ajoutée de l’industrie des biens de consommation progresse, malgré une nette différence du rythme de croissance selon la région. Les régions Rhône-Alpes et Pays de Loire, comme évoqué précédemment, évoluent à un rythme plus soutenu que l’Ile-de-France. Cette différence se fait sentir dans l’évolution de la productivité de la région Rhône-Alpes qui devance les deux autres jusqu’en 1999. La mutation de l’industrie des biens de consommation se caractérise par trois aspects :

- un désengagement massif des activités les plus traditionnelles de l’industrie habillement-cuir : les effectifs sont diminués de moitié en onze ans : 130 000 emplois sont perdus en France.

- l’industrie pharmaceutique apparaît comme un secteur de pointe :

• elle dégage un fort excédent commercial avec plus de 38%2 de sa production destinée aux marchés étrangers (pour moitié européens),

• sa structure d’emploi est orientée vers les hautes qualifications avec les métiers de Recherche et Développement,

• un marché très concentré au regard des récentes fusions des acteurs mondiaux,

• une localisation de plus en plus systématique des groupes pharmaceutiques français et étrangers en Ile-de-France (Johnson & Johnson à Issy-les-Moulineaux, Pfizer à Montrouge, Aventis à Antony, etc).

- L’industrie des biens de consommation est celle qui, parmi les cinq branches, affecte le plus grand pourcentage de son chiffre d’affaires à l’achat de services dans l’objectif d’externaliser la « gestion du quotidien »3. Les fonctions les plus externalisées sont le commercial (7,5% du CA de l’industrie), les services généraux (6% du CA de l’industrie), et la recherche et technologie (6% du CA), etc.

2 SESSI, 4 pages, « La santé de l’industrie pharmaceutique française», n°157, fév. 2002, Jean-François Loué, Arielle Moreau 3 SESSI, 4 pages, « La consommation des services par l’industrie : un quart du chiffre d’affaire », n°150, juillet 2001, Catherine Souquet

28

L’industrie automobile La Valeur ajoutée à prix constants : L’industrie automobile est le secteur industriel qui connaît la plus forte progression de sa valeur ajoutée depuis 1990. C’est le seul secteur qui soit nettement au-dessus de l’évolution globale de l’industrie nationale : si on prend l’année 1990 comme base 100, l’industrie automobile atteint l’indice 156 en 2001, tandis que la moyenne de l’industrie n’est qu’à 126. La valeur ajoutée de l’industrie automobile progresse dans la France entière à raison de 4% par an. La région Pays de Loire évolue à un rythme de 5% par an, nettement supérieur à la moyenne nationale. Rhône-Alpes se situe un peu en dessous de la moyenne nationale (3.5% par an). L’Ile-de-France progresse mais à raison de 2.7% par an, soit à un rythme nettement inférieur à la France. Toutefois, en 2001, l’Ile-de-France contribue encore pour le quart de la valeur ajoutée du secteur automobile. L’évolution des effectifs : au sein de cette industrie, la baisse des effectifs franciliens est plus rapide que celle de la moyenne nationale et de Rhône-Alpes. La région Pays de Loire réussit à accroître ses emplois. Sur les onze années de la période (1989-2000), en base 100 1989, l’Ile-de-France atteint un indice de 64 (soit un taux de croissance négatif de 4% par an) contre 95 pour la région Rhône-Alpes et 106 pour la région Pays de la Loire. La productivité Automobile : L’automobile est le secteur industriel qui enregistre les plus forts gains de productivité. L’effort est considérable surtout pour l’Ile-de-France et sans équivalent pour les deux autres régions. Dans la région capitale, la valeur ajoutée de l’industrie automobile ne progresse qu’à un taux de 2.7% par an mais dans la même période les effectifs chutent de 4% par an, ce qui donne une progression annuelle de la productivité de 6.8%. Dans un contexte national de croissance de la productivité de l’industrie automobile, l’industrie francilienne devance toutefois la région Rhône-Alpes et la région des Pays de Loire, ainsi que la moyenne nationale. La spécificité de la mutation francilienne tient notamment à deux points :

- La localisation des deux constructeurs français en Ile-de-France, et le maintien d’usines de production à forte rentabilité sur la région : la politique actuelle des constructeurs est effectivement d’organiser l’Ile-de-France par fonction de l’entreprise et de constituer des zones spécialisées comme le centre de recherche de Renault à Guyancourt (et à Vélizy pour Peugeot), le centre de production de Peugeot à Poissy (et à Flins pour Renault). Cette politique se fait ressentir chez les équipementiers qui suivent, par voie de fait, la distribution spatiale des constructeurs en se positionnant à proximité des usines de production.

- La chaîne de valeur de l’industrie automobile est fortement intégrée : les équipementiers,

les constructeurs et les réseaux de vente sont extrêmement liés. Ainsi, tout événement impactant un des maillons de la chaîne aura des répercussions notables sur les autres maillons (ce point sera plus amplement développé en deuxième partie). Les constructeurs ont connu depuis le milieu des années 1990 une forte croissance de leur production qui a directement soutenu la performance des équipementiers. Le graphe ci-après 4 illustre bien cette forte intégration de la chaîne de valeur automobile. Ceci apparaît notamment par le parallélisme des courbes entre la construction automobile et les équipementiers.

4 SESSI, 4 pages, « La chaîne de l’équipement automobile : une accélération technologique », n°164, septembre 2002, Gilles Rotman

29

Evolution de la productivité de l'industrie autom obile par régions (base 100 en 1990)

90

110

130

150

170

190

210

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

Ile-de-FrancePays de la LoireRhône AlpesFrance

Source : INSEE, Comptes Nationaux 1998, l’emploi départemental et sectoriel 2001

30

Les industries de biens d’équipement La Valeur ajoutée à prix constants : La progression de ce secteur se situe globalement dans la moyenne de l’industrie nationale (2.1% par an). Rhône-Alpes suit la performance nationale. Pays de Loire connaît une très forte progression (4.6% par an). L’Ile-de-France progresse à un rythme inférieur à 1% par an. Cependant, en 2001, l’Ile-de-France contribue encore pour 24% de la valeur ajoutée nationale de l’industrie des biens d’équipement. L’évolution des effectifs :

• Construction navale, aéronautique et ferroviaire : La France a perdu nombre de ses salariés dans ce secteur d’activité (- 2.4% par an). Hormis Pays de Loire qui conserve ses emplois, Rhône-Alpes et Ile-de-France accentuent la tendance nationale, surtout pour l’Ile-de-France qui réduit ses effectifs de 5.3% par an.

• Équipements mécaniques : La région Rhône-Alpes suit la tendance nationale et conserve ainsi ses effectifs. Pays de Loire fait progresser ses effectifs (2.2% par an). L’Ile-de-France perd 17% de ses salariés en cumul sur la période.

• Équipements électriques et électroniques : Globalement, les trois régions conservent leurs salariés sur la période et sont très proches de la moyenne nationale.

La productivité de l’industrie des Biens d’Équipements : La France cumule une progression de sa productivité industrielle de 4,7% par an depuis 1990, contre 3,9% par an pour l’Ile-de-France, 3% pour les Pays de la Loire et 2,2% pour Rhône-Alpes. C’est le seul secteur dans lequel l’Ile-de-France connaît des gains de productivité inférieurs à la moyenne nationale. Les évolutions régionales et nationales sont toutefois similaires : jusqu’en 1999, les quatre courbes du graphe ci-dessous connaissent les mêmes progressions de productivité. En revanche, en 2000, on note le même fléchissement de la productivité pour Rhône-Alpes et Pays de la Loire alors que les productivités nationale et francilienne continuent de progresser. Évolution de la productivité des Biens d'Équipement

100

110

120

130

140

150

160

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

Ile-de-France Pays de la Loire Rhône Alpes France

Source : INSEE, L’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000, Comptes nationaux, Données CVS-CJO 1998

31

Les industries des biens intermédiaires La Valeur ajoutée à prix constants : Les industries des biens intermédiaires voient leur valeur ajoutée croître de 2% par an en moyenne nationale. Les deux régions, Rhône-Alpes et Pays de Loire évoluent plus rapidement que la moyenne nationale surtout pour la région Pays de Loire (3.7% par an). En revanche, l’Ile-de-France voit sa contribution dans cette filière régresser de manière significative (-1.3% par an). C’est le seul secteur industriel dans lequel l’Ile-de-France connaisse une baisse de sa valeur ajoutée. L’évolution des effectifs : • Produits minéraux : Hormis Pays de Loire qui maintient ses effectifs, l’Ile-de-France perd près de

la moitié de ses emplois contre 25% pour la région Rhône-Alpes.

• Textile : La France a vu ses salariés disparaître de cette filière au profit de nombreux pays d’Asie. Globalement, 30% des effectifs de ce secteur ont quitté les métiers qui s’y rapportent sur la période 1989-2000. Pays de Loire parvient à maintenir ses emplois sur la même période. Rhône-Alpes fortement implantée il y a à peine deux décennies, voit ses effectifs diminuer du quart. L’Ile-de-France perd près de la moitié de ses emplois.

• Bois et papier : Le constat est presque le même que pour le secteur d’activité qui précède. La France perd 20% de ses emplois dans cette filière. Pays de Loire conserve ses effectifs. L’Ile-de-France perd près de la moitié de ses effectifs.

• Chimie, caoutchouc et plastiques : La France maintient ses salariés pour ce secteurs d’activité. Deux régions, Rhône-Alpes et Pays de Loire font sensiblement mieux. L’Ile-de-France réduit ses effectifs de moitié.

• Métallurgie et transformation des métaux : La logique est la même. La France perd 20% de ses effectifs. Les deux régions, Rhône-Alpes et Pays de Loire gardent leurs salariés. L’Ile-de-France perd 43% de ses effectifs en cumul sur la période.

• Composants électriques et électroniques : Ce secteur d’activité connaît une progression de ses salariés au plan national (1.3% par an). Les régions Rhône-Alpes et Pays de Loire créent des emplois à un rythme soutenu et supérieur à la moyenne nationale. L’Ile-de-France perd 25% de ses salariés dans ce secteur sur la période.

La productivité de l’industrie des biens intermédiaires : dans un contexte général de perte d’emploi au niveau national, se faisant ressentir dans chacune des régions, l’Ile-de-France a la particularité de perdre ses emplois plus vite, mais de réussir à minimiser la baisse de sa valeur ajoutée grâce à des gains de productivité importants (4,2% par an contre 3,5% au niveau national). Evolution de la productivité des Biens Intermédiaires par régions

(Base 100 en 1990)

100

105

110

115

120

125

130

135

140

145

150

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

Ile-de-FrancePays de la Loire Rhône AlpesFrance

Source : INSEE, L’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000, Comptes nationaux, Données CVS-CJO 1998

32

Conclusions : Le tableau ci-dessous donne par grandes branches le rythme d’évolution de la productivité et des effectifs sur la période 1989-2000. La croissance de la productivité francilienne est supérieure de 0,7 points à la croissance nationale, avec un secteur phare : l’industrie automobile. Évolution annuelle de la productivité dans cinq branches industrielles de 1990 à 2000 % Ile-de-

France Pays de

Loire Rhône Alpes France

IAA 3,2 1,1 0,8 -0,2

Biens de consommation 4,0 2,9 3,6 3,1

Automobile 7,0 4,7 3,4 6,2

Biens d'équipements 3,9 3,0 2,2 4,7

Biens intermédiaires 4,1 2,7 2,7 3,7

Total Industrie 4,2 2,7 2,6 3,5

Source : INSEE, L’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000 Comptes nationaux, Données CVS-CJO 1998 Certes le recul industriel est à peu près général pour ces régions sauf pour la région Pays de Loire. L’Ile-de-France se caractérise toutefois par deux points spécifiques : toutes les branches industrielles de l’Ile-de-France sont en recul (taux de variation négatif de l’emploi) et ce recul est beaucoup plus significatif en Ile-de-France que dans les autres grandes régions françaises. Évolution de l’emploi dans 5 branches industrielles de 1989 à 2000

Ile-de- France

Rhône Alpes

Nord Pas-de-Calais

Pays de la Loire PACA

IAA -2,0 0,8 -0,3 2,1 -0,3

Biens de consommation -3,3 -2,1 -3,1 -1,7 -1,6

Automobile -4,2 -0,5 1,5 0,5 -2,6

Biens d'équipement -1,8 -0,3 -1,1 1,2 -1,7

Biens intermédiaires -4,8 -4,8 -1,9 0,7 -0,9

Source : INSEE, L’emploi départemental et sectoriel de 1989 à 2000

Cette analyse comparative laisse apparaître une nouvelle vision de la productivité industrielle francilienne qui ne se fonde plus uniquement sur une optimisation de l’appareil productif, mais aussi la redistribution du travail au travers des emplois. La région Ile-de-France caractérisée par un très fort positionnement industriel dans nombre de secteurs d’activité, il y a trente ans, voit sa position redéfinie de manière très substantielle sur des pans entiers de son industrie. Malgré la diminution de sa contribution en terme de valeur ajoutée, comparativement aux autres régions, et une perte significative des emplois de son industrie, l’Ile-de-France reste la première région industrielle de France. Ces signes contradictoires entre baisse du poids francilien (en effectifs et en valeur ajoutée) et gains de productivité records sont la manifestation directe d’une transformation en profondeur du tissu industriel francilien, au titre d’une spécificité régionale. Comme nous le développerons par la suite, l’industrie francilienne apparaît positionnée sur des fonctions stratégiques (sièges sociaux, R&D) et des métiers hautement qualifiés.

33

1.3 Mutations internes et localisation des entreprises industrielles en Ile-de-France

1.3.1 Stratégies d‘entreprises et mutations socioprofessionnelles

La structuration d’un espace en catégories socioprofessionnelles (CSP) est le reflet d’un certain développement économique. En quoi l’Ile-de-France est-elle différente des autres régions de France dans la structuration de la qualification de sa main-d’œuvre ? Pour comprendre l’évolution des emplois au sein des entreprises industrielles, les activités ont été divisées en trois grandes catégories : - les activités de production au sens strict du terme ; - les activités d’ingénierie qui comprennent les activités de recherche et développement, les activités de conception et de recherche appliquée ; - les activités tertiaires qui ont trait aux fonctions support de l’entreprise : fonctions managériales, fonctions administratives, comptables et financières, fonctions informatiques, fonctions commerciales, autres fonctions de services, etc. Sur les quinze dernières années, la réorganisation des trois grandes fonctions de l’entreprise s’est réalisée globalement selon le schéma suivant : - conserver les fonctions à forte valeur ajoutée sur le cœur de l’Ile-de-France (Paris Intra-muros ou toute première couronne), correspondant à des niveaux de salaire généralement élevés : activités d’ingénierie et activités des fonctions support. Ceci a conduit à une mutation spatiale des fonctions de production, avec dans son sillage, les fonctions de management de la production (encadrement technique des ensembles de production) ; - relocaliser les fonctions de production à plus faible valeur ajoutée, selon une triple logique : soit transférer ces activités productives à la périphérie de l’Ile-de-France, soit sur d’autres régions de France, soit sur d’autres pays que la France. La filière automobile est illustrative de cette logique spatiale des années 1970 à aujourd’hui : se délocaliser en quittant Paris ou sa banlieue proche (quai de Javel ou île Seguin), s’implanter dans les pourtours de l’Ile-de-France ou dans des zones ayant un passé industriel fort. La filière textile a davantage suivi la deuxième solution en délocalisant une grande partie de sa production dans les pays d’Asie pour ne maintenir que ses fonctions de création sur la région. L’analyse des effectifs industriels par CSP entre 1990 et 1999 en Ile-de-France confirme cette logique d’évolution spatiale :

1. La « poursuite » de la marginalisation des emplois ouvriers : La marginalisation de la main-d’œuvre de production présente dans la région (phénomène qui avait déjà largement commencé dans les années 1970-1985) semble aujourd’hui prendre fin. Le poids de l’Ile-de-France dans l’emploi ouvrier national est passé au dernier recensement (en 1999) en-dessous des 10%, traduisant la poursuite de la délocalisation des activités de production des entreprises industrielles hors de l’Ile-de-France.

2. La diminution du nombre de cadres industriels : Le tableau ci-dessous montre surtout la

diminution très significative du poids des cadres industriels franciliens qui représentaient encore 45% des emplois nationaux du même type en 1990 pour atteindre 37% au recensement de 1999. Cette baisse illustre que la délocalisation hors de l‘Ile-de-France a donc également concerné les métiers qualifiés annexes à la production. Ces emplois étant fortement connectés à l’acte de la production, ils ont suivi les mouvements de délocalisation de la production.

34

Effectifs industriels franciliens par CSP entre 1990 et 1999

16662 836 20989 262Total IDF 9200 993 12353 638Ouvriers Industrie 1970 686 26123 824Employ é s Industrie 20190 457 26252 479Professions intermédiaires Industrie 37167 151 45213 165Cadres Industrie 1533 549 1846 140Artisans, commer ç ants, chefs d'entreprises Industrie

Part IDF / France en %Total IDF Part IDF / France

en %Total IDF

1 999 1 990

16662 836 20989 262Emploi industriel total IDF

9200 993 12353 638Ouvriers Industrie 1970 686 26123 824Employés Industrie 20190 457 26252 479Professions intermédiaires Industrie 37167 151 45213 165Cadres Industrie 1533 549 1846 140Artisans, commerçants, chefs d’entr. Industrie

Part IDF / France en %Total IDF Part IDF / France

en %Total IDF

1999 1990

Source : INSEE, Recensements 1990 et 1999 Cette analyse permet de faire le constat que toutes les professions sont touchées par la diminution de l’emploi industriel en Ile-de-France. Cela distingue l’Ile-de-France de la province qui a connu une évolution positive de ses emplois industriels de cadres et de professions intermédiaires de 1990 à 1999. Tandis que l’industrie francilienne perdait 46 000 emplois de cadres, la province en gagnait 20 000. Malgré cela, les pertes d’emplois industriels sont telles en Ile-de-France sur les autres catégories d’emploi que la part des cadres dans l’emploi industriel régional augmente de 1990 à 1999 de 22 à 25%. A cet égard, la mutation socioprofessionnelle est moins forte en province puisque son industrie ne compte que 8% de cadres en 1999, pour 7% en 1990.

1.3.2 Mutations industrielles et localisation des entreprises industrielles

Ces mutations socioprofessionnelles sont à appréhender dans le contexte des grandes tendances affectant l’aménagement du territoire francilien : - Déplacement des emplois de plus en plus loin du centre de la région : On note un desserrement géographique de l’emploi vers les communes de l’Ile-de-France les plus éloignées du centre. Si l’on prend 1978 comme point de repère (base 100 en 1978), les emplois en grande couronne se situent en 2000 à l’indice 148 (ce qui représente une vitesse de déplacement de 3.3% par an), alors que les emplois dans Paris intra-muros se situent à l’indice 87 et que les emplois dans la petite couronne sont à l’indice 1125 . La petite couronne francilienne a perdu entre 1990 et 1999 41% de ses effectifs industriels, toutes CSP confondues, contre 17% pour la grande couronne francilienne. - Déséquilibre des emplois entre l’Est et l’Ouest de la région : Les transformations socioprofessionnelles sont très contrastées au sein des départements de l’Ile-de-France. D’une manière générale, cette mutation socioprofessionnelle a concerné l’Ouest de Paris (Paris 15eme, Paris 8eme et Paris 17eme), mais surtout la zone Nord-Ouest de la région Ile-de-France (Courbevoie, Levallois-Perret, Neuilly sur Seine, Boulogne-Billancourt) qui, par les transformations de leur tissu économique, ont concentré une forte partie des emplois relevant des activités d’ingénierie et des activités tertiaires, déséquilibrant la région par rapport à l’Est. En 1999, les Hauts-de-Seine sont le premier département d’accueil des cadres de l’industrie avec 30% des emplois régionaux, tandis que Paris, Les Hauts de Seine et les Yvelines cumulent 70% des emplois régionaux de cadres de l’industrie. Ce déséquilibre apparaît nettement avec le département du Val-de-Marne situé à l’est de la région. Ce département a le plus fort taux de mobilité des entreprises (capacité des établissements à se transférer dans d’autres lieux) et le plus faible taux d’attractivité qui le place entre la 90 et 95ème position au plan national6.

5 INSEE L’emploi salarié francilien fin 2000 – n°217 Décembre 2002 6 INSEE Les transferts d’établissements dans le Val-de-Marne n°222 avril 2003

35

Ce sont les Hauts-de-Seine qui ont connu les plus grandes transformations, selon un modèle d’évolution qui n’est pas sans rappeler (avec un décalage dans le temps) celui de la capitale. Entre 1990 et 1999, ce département a vu fondre ses effectifs ouvriers et employés industriels à un rythme plus rapide que Paris intra-muros. Si l’on prend 1994 comme point de repère (base 100 en 1994) : le nombre d’entreprises industrielles est passé à 84 en 2001 (88 pour l’ensemble de la région) et le nombre d'entreprises tertiaires (services marchands aux entreprises notamment) à 118 (source : INSEE Fichier SIRENE). L’attractivité de ce département en termes d’emplois confirme le déséquilibre : sur une population active de 726 000 personnes vivant dans les Hauts-de-Seine, 53% travaillent sur le département mais avec le renfort de 470 000 salariés venant d’autres départements de la région (source : INSEE recensement 1999). L’analogie entre la zone de la Défense et le « triangle d’or de la capitale est de plus en plus manifeste : on y trouve beaucoup de sièges sociaux de part et d’autre. Toutefois, les professionnels de l’immobilier donnent encore aujourd’hui un léger avantage à la capitale par rapport à La Défense (avis donné par INSIGNIA BOURDAIS et confirmé par d’autres professionnels de l’immobilier de bureau). L’analyse par département nous permet aussi de différencier les départements moteurs des départements en perte de vitesse, de même de faire le constat d’une petite couronne se désengageant plus des emplois industriels que la grande couronne francilienne toutes CSP confondues. Lorsque sur neuf ans la petite couronne perd 41% de ses effectifs industriels, la grande couronne n’en perd que 17%. Le département des Yvelines est celui, sur la période, qui perd le moins ses emplois et qui crée même des emplois cadres et professions intermédiaires. Dans une moindre mesure, le département de la Seine-et-Marne connaît également une évolution favorable pour ces deux catégories. Évolution des effectifs industriels par CSP en Ile-de-France de 1990 à 1999

Taux de croissance 1990-1999 (%)

Artisans ,commerçants,

chefs d'ent Industrie

Cadres Industrie

Professions intermédiaires

Industrie

Employés Industrie

Ouvriers Industrie Total

Paris -37 -36 -36 -45 -52 -42Hauts-de-Seine -30 -28 -41 -52 -60 -42Seine-Saint-Denis -26 -23 -30 -45 -45 -37Val-de-Marne -28 -36 -20 -46 -50 -39Petite couronne -33 -31 -35 -47 -52 -41Seine-et-Marne -8 8 8 -25 -26 -14Yvelines -17 27 5 -29 -35 -10Essonne -18 -19 -15 -38 -34 -26Val-d'Oise -15 -20 -11 -37 -31 -24Grande couronne -14 4 -3 -32 -31 -17Total IDF -27 -22 -25 -43 -43 -33

Source : INSEE, Recensements 1990 et 1999

36

1.4 Les liens entre les mutations industrielles et les services rendus aux entreprises

1.4.1 Un contexte d’ensemble

La perte de l’industrie est-elle compensée par le développement des services ? Cette question est au cœur des réflexions sur le développement industriel car depuis une vingtaine d’années, des transferts très actifs existent entre les deux secteurs que l’on qualifie souvent de « secondaire » et de « tertiaire », sans que l’on sache avec précision si les pertes en emplois de l’un sont absorbées par les gains en emplois de l’autre. Cette incertitude provient de la complexité de ces transferts qui traduisent la manière dont nombre d’entreprises industrielles ont géré les fonctions qui ne relevaient plus de leur cœur de métier, en externalisant, en favorisant des créations d’entreprises, en transférant les emplois vers des sociétés déjà existantes,… C’est la raison pour laquelle, il paraît préférable d’aborder la question des liens entre services et industrie non sous l’angle réducteur du transfert mais sous le prisme de la complémentarité entre industrie et services. Il est nécessaire d’avoir présent à l’esprit qu’ils vont de pair : l’entreprise industrielle se concentre aujourd’hui sur ce qu’elle sait le mieux faire et achète à l’extérieur des services annexes (nettoyage, comptabilité…) et des expertises qui la font progresser et créer de la valeur. C’est cette complémentarité qui permet de bien comprendre ce que l’un apporte à l’autre en terme de création de valeur.

1.4.2 Le contenu des services

Sur les cent dernières années, les emplois de services ont subi une profonde transformation. A la fin du 19ème siècle, les services étaient largement représentés par des emplois de domestiques qui ont ensuite quasiment disparus. Après la seconde guerre mondiale, la transformation est évidente pour la France : c’est en 1949 que pour la première fois les emplois dans le secteur tertiaire sont supérieurs aux emplois industriels. Mais c’est vers les années 1960, avec une forte accélération à partir de 1974, que commence véritablement ce que l’on a appelé la « tertiarisation » de l’économie qui peut être associée à une forte urbanisation et à une profonde transformation de l’industrie.

Définition de la notion de services rendus aux entreprises

Il existe au préalable une ambiguïté dans la terminologie. Lorsque l’on parle de « services », il est fréquent d’utiliser des expressions très différentes : secteur tertiaire, services marchands et non marchands, services rendus aux entreprises, services rendus à l’industrie… Ces notions ne sont pas équivalentes. Celle de secteur « tertiaire » est la mieux connue, la plus employée dans le langage courant mais la plus large dans son contenu : on parle de « tertiarisation » de l’économie. On y inclut des activités telles que : le commerce, les transports, les activités immobilières, les services rendus aux entreprises et aux particuliers, l’éducation, la santé et l’action sociale. Cette notion de tertiaire ne permet pas d’établir une compréhension rationnelle du lien avec l’industrie, compte tenu de l’hétérogénéité de son contenu. Dans ce paragraphe, c’est la notion de service rendu aux entreprises qui a été retenu. Il paraît préférable de restreindre l’analyse à la notion de « services marchands », plus restrictivement encore, à celle de « services rendus aux entreprises » qui exprime mieux le lien entre les entreprises et les services et enfin à celle de services rendus à l’industrie. Il s’agit alors des services suivants : postes et télécommunications, métiers du conseil et de l’assistance, services opérationnels (location de matériels, enquêtes et sécurité, nettoyage, fourniture de personnel…) et de la R&D. Cette notion est plus pertinente et l’on retrouve à l’intérieur, des métiers que les entreprises industrielles ont souvent externalisés ou confiées en sous-traitance à des entreprises existantes ou créées. Une étude du SESSI7 montre que les entreprises industrielles externalisent volontiers certains services et pas d’autres et que cette externalisation peut évoluer dans le temps. Mais le plus souvent, sont externalisés les services suivants : le nettoyage, la collecte de déchets, le transport et la logistique, la restauration, la sécurité, la comptabilité, l’affacturage et la location de matériel.

7 Voir « Le 4 pages des statistiques industrielles », SESSI, DIGITIP, n°149 de Juillet 2001.

37

Cette approche par l’externalisation, conduit à faire le tri dans les formes de travail au sein de l’industrie. La sous-traitance n’est pas à prendre en considération dans cette analyse du lien entre services et industrie : les activités de sous-traitance restent dans le cœur de métier de l’entreprise qui sous-traite et restent classées dans les métiers de l’industrie. Ce chapitre concerne donc les services que l’entreprise décide de « faire faire » à un partenaire extérieur au lieu d’en assumer elle-même la charge.

1.4.3 Le développement des services en France

Comparaison de la croissance de l’industrie et des services sur les trente dernières années Les services marchands dans leur ensemble ont connu, vers les années 1970 en France, un développement spectaculaire. La croissance depuis 1978, des « services » à prix constants a suivi un rythme de l’ordre de 2.6% par an, contre 2.2% pour l’industrie manufacturière. Globalement, la richesse créée par les services marchands progresse plus rapidement que celle créée par l’industrie : le différentiel est de l’ordre de 0.4 point par an. Cette remarque permet de confirmer que les « services aux entreprises » sont créateurs nets de richesses. Les services créent les services. Une entreprise externalise un service qu’elle ne veut plus exercer, estimant qu’il n’est plus dans son cœur de métier. Dans un premier temps, il vit fermement attaché à sa structure d’origine. Pour assurer sa pérennité, il vend son expertise à d’autres entreprises industrielles puis développe de nouveaux services qui lui permettent de conquérir de nouveaux marchés et enrichit de ce fait son offre initiale : les services créent des services. Valeur ajoutée (aux prix de 1995) des services marchands et de l’industrie

Année VA industrie VA services

1978 100 100

2001 167 180

Taux annuel 2.2% 2.6% Source : INSEE Séries longues Edition 2002

L’analyse de l’évolution de l’emploi salarié sur longue période entre l’industrie et les services marchands montre que la diminution de l’emploi de l’un (l’industrie) est plus que compensée par le développement des services. Sur les trois dernières décennies, l’emploi salarié industriel a diminué de 1.3% par an, alors que les services marchands ont connu une progression annuelle de 2.2%. Cet écart signifie que les services ont créé en première approximation un solde net d’emploi de : 0.9% par an. Globalement, les services ont sur le plan national, totalement absorbé la diminution des emplois liée à la mutation de l’industrie et, de surcroît, les services ont su créer des emplois grâce à leurs expertises.

38

Évolution des effectifs industriels et tertiaires

Année Emploi industriel* Emploi tertiaire ** 1978 100 100 2001 75 167

Taux annuel -1.3% + 2.2% * hors construction ** hors administration, éducation, santé et action sociale ; on est proche de la notion de services marchands Source : INSEE Séries longues Edition 2002 Ces deux séries permettent aussi de faire ressortir une nouvelle fois la mutation de l’industrie française et son effort de productivité sur les trente dernières années (+3.5% d’accroissement de la productivité par an hors effets des prix). Il faut noter la difficulté pour le secteur des services de faire progresser sa productivité, malgré l’aide de l’informatique dans le traitement des données (0.4% par an néanmoins de croissance de la productivité). Progression de la productivité du travail 1978-2001

Industrie

Services principalement marchands

Progression de la productivité

+ 3.5% + 0.4% Source : INSEE Séries longues Edition 2002

Le graphique ci-après illustre par grands secteurs d’activité de l’industrie le lien des variations d’emploi et les progrès de l’emploi dans les services sur la période 1990-2000.

0 200 400 600 800 1000 1200 1400

R&D

serv-opérat

conseil

poste-télécom

IAA

métaux

chimie

bois-papier

textile

matériaux

equip.electr

mécanique

mat.transp

Auto

equip.foyer

pharm-parf

édition,

hab-cuir

effectifs en 2000

croissance

diminution

Evolution des effectifs de l'industrie et des services qui lui sont associés de 1990 à 2000

Unités = Milliers de personnes Source : Insee-Dares, principaux indicateurs ; 1990-2000

Note de lecture : De 1990 à 2000, les effectifs ont diminués de 258 000 à 128 000 personnes dans le secteur de l’habillement et du cuir (C1) alors qu’ils sont passés de 802 000 à 1 288 000 personnes dans les sociétés de conseil et d’assistance aux entreprises (informatique, administration, publicité, ingénierie…).

39

La contribution des services à la valeur ajoutée On peut s’interroger sur la signification de l’importance de la contribution des services à la valeur ajoutée nationale : est-ce un bien ou un mal en terme de développement, pour un pays ou pour une région, d’avoir une part aussi importante de son PIB en provenance des services ? Cette interrogation correspond à un vieux débat entre ceux qui voient dans la régression de l’apport industriel le signe d’un déclin, alors que d’autres y voient au contraire le chemin normal du développement. Les éléments de réponse ne peuvent être émis qu’en se comparant avec les autres pays ayant un schéma de développement proche de celui de la France. Le tableau qui suit, extrait des statistiques de l’OCDE, montre la prépondérance de la contribution des services dans une grande partie des pays de l’Europe. La plupart des pays européens ayant un développement économique proche, voient leur richesse provenir à plus de 70% des services et entre 26% et 29% de l’industrie. Il existe une exception de taille à cette généralisation : l’Allemagne. Ce pays a encore un poids industriel supérieur à 30% de la valeur ajoutée et une contribution des services de l’ordre de 67%. Aujourd’hui ce pays est toutefois confronté à des difficultés économiques importantes et à une crise profonde de transformation industrielle. Contributions sectorielles à la valeur ajoutée brute (OCDE)

1ays

Contribution de l’industrie à la valeur ajoutée brute en 2000

Contribution des services à la valeur ajoutée brute en 2000

Allemagne 31.5% 67.3 % Belgique 27.7% 70.9% Espagne 30.3% 66.0 % France 26.1% 70.9% Italie 29.2% 67.9% Pays-Bas 27.2% 70.1% Suède 28.0% 70.2%

Source : OCDE Le dynamisme des services rendus aux entreprises Parmi l’ensemble des services, les plus dynamiques sont incontestablement les « services rendus aux entreprises ». Ces derniers ont progressé ces vingt dernières années deux fois plus vite que les services marchands pris dans leur ensemble. En prenant la Valeur Ajoutée, les services rendus aux entreprises ont connu en France une croissance annuelle de plus de 7%, soit une progression, hors dérive des prix à la consommation, de 4.6% par an sur 20 ans, ce qui est considérable et équivaut à un doublement en volume tous les 15 ans. La croissance de ces activités ne peut se concevoir sans établir un lien avec la restructuration des entreprises industrielles et le recentrage sur le « core business » (cœur de métier). En prenant comme base 100 l’année 1980, les services marchands parviennent à un niveau proche de l’indice 300 en l’an 2000 (en euros constants), ce qui représente une progression moyenne annuelle de 5,5%. Si l’on met en parallèle la croissance de l’industrie, l’écart entre les deux courbes est évident, ce qui tendrait à prouver que les services ont absorbé les évictions d’emplois de l’industrie, tout en sachant rebondir pour créer de nouveaux métiers ou de nouvelles expertises. Ce dernier point est essentiel dans la compréhension de l’évolution simultanée des services et de l’industrie. Les métiers des « services rendus à l’industrie » sont nés le plus souvent de la demande des entreprises industrielles qui ne souhaitaient plus réaliser ce type de prestations. Mais ils sont devenus au fil du temps de véritables entreprises avec de nouvelles prestations, de nouvelles expertises et de nouveaux métiers, répondant mieux aux exigences de compétitivité des entreprises industrielles.

40

Cette idée se confirme si l’on détaille les différents types de services. Les métiers de l’ingénierie et des analyses techniques qui sont en appui direct à l’industrie, suivent une courbe de croissance très proche de celle de l’industrie dans son ensemble avec une évolution relativement lente. En revanche, d’autres métiers du service tels que : l’assainissement et la sécurité, connaissent quant à eux un développement particulièrement important. Ceci résulte de deux phénomènes : - d’un large appel de la part de l’industrie à leur expertise - à la capacité de ces services à créer de nouveaux débouchés au sein même de l’industrie (diversification) ou au sein des autres entreprises de services (nouveaux débouchés). L’enquête réalisée par la DIGITIP8 montre les demandes de services par grandes branches industrielles :

• L’industrie des biens de consommation affecte plus de 25% de son chiffre d’affaires essentiellement dans les services commerciaux, maintenance et services généraux, administration générale et logistique.

• L’automobile : 13% de son chiffre d’affaires concerne des achats de service sur les fonctions de maintenance, logistique et administration générale.

• Les biens d’équipement, pour 21% du chiffre d’affaires, achètent essentiellement les services de maintenance et d’administration.

• Les biens intermédiaires consacrent 21 % de leur chiffre d’affaires à l’achat de services : la logistique, l’administration générale et la maintenance représentent les budget d’achats les plus importants.

La consommation de services par secteurs en % du CA des entreprises manufacturières en 1999

7

7

8

4

25

21

21

13

0 5 10 15 20 25 30 35

Biens de consommation

Biens intermédiaires

Biens d'équipement

Automobile

Production en interne

Achats

Source : SESSI Enquête sur les services en 1999

8 SESSI, Enquête sur les services en 1999 (2002)

41

Les fonctions dans les achats de services par branches industrielles en 1999

19,4 22,9 2933,7

14,7 23

27,622,5

16,5

20,3 13,8

25,6

24,5 11,4 9,4

6,320,4 13,8 10,3

6,1

2,7 1,7 6,5

2,91,8

6,9 3,4 2,9

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90%

100%

Biens de consommation Automobile Biens d'équipement Biens intermédiaires

Achats

Informatique et télécommunications

Recherches et technologies

Commercial

Logistique

Administration générale

Maintenance / services généraux

Source : SESSI Enquêtes sur les services en 1999

1.4.4 Le recours à l’intérim

Comme évoqué précédemment, l’industrie fait de plus en plus appel à des entreprises de services afin d’externaliser des fonctions autrefois internes à l’entreprise industrielle : c’est le cas de la logistique, l’administration générale, la maintenance et les services généraux, etc. Le développement du recours à l’intérim constitue également un aspect important de la mutation industrielle, traduisant la demande de flexibilité des entreprises. 90% des intérimaires de l’industries sont des ouvriers, contribuant à une réelle activité de production matérielle. Du fait de leur statut d’intérimaires, ils sont pourtant comptabilisés dans les services dans les statistiques sur l’emploi.s Toutefois, le recours à l’intérim n’a pas été pris en compte dans la mesure de la contribution à la valeur ajoutée de l’industrie. Ce point n’est pas à négliger. En effet, l’industrie française recourt à l’intérim à hauteur de 8% (part des intérimaires dans l’emploi salarié total du secteur, y compris l’intérim) contre 2% pour les services. Ce tableau explicite la nette progression du taux de recours à l’intérim par l’industrie française entre 1996 et 2000. Le taux de recours moyen à l’intérim croît sur la période 1996-20009

Par ailleurs, le doublement des effectifs intérimaires dans l’industrie hors construction sur la même période montre que l’intérim a pris une place de plus en plus importante dans la gestion du personnel des entreprises industrielles.

9 L’incidence du recours à l’intérim sur la mesure de la productivité du travail des branches industrielles, Lucie Gonzalez, Economie et Statistiques n°357-358, 2002

42

Évolution des effectifs intérimaires dans l’industrie (hors construction) pour 1996-2000

Qu’est-ce que l’intérim ? Le travail intérimaire se définit comme un travail temporaire effectué par un travailleur (l'intérimaire), pour le compte d'un employeur, l'entreprise de travail intérimaire, chez un tiers, le client utilisateur. Il s'agit donc d'une relation triangulaire : L'entreprise de travail intérimaire: la société qui engage l'intérimaire est en fait le seul et unique employeur de celui-ci. Elle garantit la sécurité et veille au respect rigoureux des droits et au paiement du salaire. L'intérimaire: le travailleur qui est mis à la disposition de l'utilisateur. L'utilisateur: la société qui manque temporairement de main-d'œuvre a recours à l’intérim pour répondre à des pics d’activité. L’emploi d’intérimaire dans des entreprises industrielles n’augmente pas pour autant les effectifs industriels recensés par les différentes institutions publiques. Avoir recours à l’intérim est considéré comme l’achat de services externes. Par ailleurs, employer des intérimaires pour une entreprise industrielle représente plusieurs bénéfices - La compensation de son manque d’effectifs lors de pics d’activité, - Les entreprises d’intérim offrent généralement une prestation complète qui inclut la recherche, la sélection, la formation, la mise à disposition et la gestion administrative des intérimaires, - Ainsi, l’entreprise industrielle ne s’engage pas sur des contrats CDI qui représenteraient une charge fixe non cohérente avec le cycle de production hors pics d’activité. Depuis l’existence de la notion d’intérim dans les textes législatifs en 1972, la définition d’intérimaire, au regard de la loi, n’a cessé d’évoluer pour s’adapter aux besoins des entreprises. La liste des possibilités de recours à l’intérim s’allonge en 1986 avec les situations de commandes exceptionnelles et le remplacement d’un salarié dont le poste va être supprimé. Cet assouplissement de la réglementation a fait doubler de 1983 à 1989 le nombre d’intérimaires. En revanche, alors que l’intérim devait se définir comme conjoncturel et ponctuel, les entreprises en font de plus en plus un usage structurel, sans justification de recours conformes à la réglementation, sortant alors du cadre législatif.

43

Dans quelles mesures l’industrie a-t-elle recours à l’intérim ? Lorsqu’on analyse les raisons pour lesquelles l’industrie recourt à l’intérim, on y trouve des raisons très conjoncturelles (nécessité de flexibilité de l’activité) mais aussi une composante structurelle liée à une décision stratégique. Cette remarque est d’ailleurs confirmée par de récents travaux de l’INSEE. « Conçu au départ pour permettre aux employeurs de faire face à l’indisponibilité temporaire d’un salarié, le travail temporaire est rapidement devenu un outil d’adaptation de l’emploi aux fluctuations de l’activité. Pour la période de croissance plus ou moins soutenue, mais continue, dans laquelle s’est engagée l’industrie depuis 1995, l’intérim est devenu, pour certaines entreprises industrielles et certains secteurs d’activités, un mode de gestion des effectifs salariés qui va bien au-delà de l’adaptation à la conjoncture de court terme et qui répond à la modification des modes de gestion de la production (utilisation de la sous-traitance, flux tendus).

Exceptionnel et conjoncturel, le recours à l’intérim est devenu structurel et systématique. Dans le secteur automobile par exemple, quel que soit l’état de la conjoncture, les grands constructeurs et les équipementiers emploient une réserve d’intérimaires « permanents », celle-ci pouvant atteindre le quart du personnel fixe de production dans certains établissements.

En fonction de leur perception de la conjoncture à moyen terme, les entreprises industrielles modifieraient la répartition de leurs effectifs entre emplois permanents (CDI, éventuellement à temps partiel) et emplois temporaires (CDD, Intérim), réversibles et plus flexibles. L’évolution de l’intérim proviendrait donc d’une composante conjoncturelle (ajustement rapide des effectifs à la conjoncture), mais aussi une composante structurelle relevant d’un choix de gestion du personnel incluant un degré variable de flexibilité du travail. » 10 Quelles catégories socioprofessionnelles intérimaires sont représentées dans l’industrie ? D’après les déclarations mensuelles des agences d’intérim, en 1999, 59% des intérimaires de l’industrie sont des ouvriers non qualifiés, contre 29% pour les ouvriers qualifiés. Les professions tertiaires de l’industrie ne sont représentées qu’à hauteur de 11% de l’ensemble des intérimaires travaillant pour l’industrie. Ceci confirme bien l’observation faite par l’INSEE selon laquelle l’entreprise industrielle cherche avant tout à desserrer durablement ses contraintes de production par un recours de plus en plus systématique à l’intérim. Structure de qualification de la population intérimaire par secteurs d’activité en 1999

Ces pourcentages sont à comparer à la répartition par CSP de l’emploi permanent du secteur industriel. Ainsi, on peut observer que les ouvriers non qualifiés « permanents » ne représentent que 17% de la population salariée permanente de l’industrie contre 37% pour les ouvriers qualifiés.

10 Extrait de l’étude menée par Lucie Gonzalez, « l’incidence du recours à l’intérim sur la mesure de la productivité des branches industrielles », Economie et Statistique n°357-358, 2002

44

Structure de qualification des salariés permanents par secteurs d’activité en 1999

Ainsi, parallèlement à l’étude des apports des services externes à l’industrie, le recours à l’intérim est un point majeur dans l’ajustement des ressources de personnel à la production.

1.4.5 Les services et l’industrie en Ile-de-France

L’Ile-de-France et la diversité des services L’Ile-de-France a connu un développement spectaculaire des métiers du service. Si l’on considère la Valeur Ajoutée en Ile-de-France, la part contributive de l’industrie dans cette région est aujourd’hui de l’ordre de 19%, alors que les services marchands (à l’exclusion des services non marchands) représentent à eux seuls plus de 66% de cette valeur ajoutée et près de 69% des emplois. La contribution des « services marchands » en termes de valeur ajoutée en Ile-de-France est considérable et se situe donc dans un rapport de 1 à 4 par rapport à la contribution de l’industrie et ce phénomène s’accentue chaque année. Tous les 5ans, en moyenne, la contribution de l’industrie francilienne s’effrite de 1 point et la progression des services marchands est de 3 points. Les Services franciliens représentent à eux seuls 29% de la valeur ajoutée des services de la France, alors que cette proportion est de 20% pour l’industrie. Plus que les autres régions, l’Ile-de-France est celle des services. Lorsque l’on analyse la contribution des services en Ile-de-France, la part majeure revient aux services rendus aux entreprises. De même, si l’on effectue une analyse transversale, ces mêmes services apportent une contribution de 53% par rapport à la France entière. La valeur ajoutée par les services en Ile-de-France en 2002

Services

Valeur Ajoutée (en millions d’euros)

IDF / France entière

(%)

Transports 15 37.2%

Activités financières 25.5 52.1%

Activités immobilières 32.2 27.7%

Télécommunications 7.4 27.7%

Autres services aux entreprises 59.9 53.5%

Services aux particuliers 16.9 24.3%

Autres 10.8 30.8%

Total des services 167.7 29.0% Source : INSEE, Comptes régionaux et CROCIS « Les chiffres clés par secteur »

L’Ile-de-France accueille une très grande diversité de métiers des services, ce qui confère à la région francilienne une vocation plutôt généraliste. Ce point différencie de manière singulière l’Ile-de-France du Grand Londres par exemple où les services sont nettement spécialisés dans les métiers de la

45

finance. On reviendra sur ce point à deux reprises dans le rapport : lors de l’étude comparative des agglomérations européennes et en deuxième partie. Certains services de l‘Ile-de-France sont à très forte valeur ajoutée (exemple : ingénierie industrielle) et d’autres fortement consommatrices de salaires (exemple : le nettoyage industriel). Des deux extrêmes, ce sont les services à forte valeur joutée qui tiennent une place prépondérante en Ile-de-France : 60% du total des emplois des salariés du secteur des services informatiques se trouvent en Ile-de-France et 70% du conseil. Les services aux entreprises Dans ce paragraphe est explicitée l’évolution des services rendus aux entreprises en France de 1996 à 2000. Les données concernant les « services rendus spécifiquement aux industries » en Ile-de-France sont de sources différentes et par conséquent non comparables. Pour cette raison, l’analyse portera, de manière générale, sur les services rendus aux entreprises en France. Dans une logique globale de recentrage des industries vers leur cœur de métier, on peut remarquer que les entreprises industrielles externalisent de plus en plus fréquemment les services n’ayant aucun lien avec leurs activités de production industrielle. Ces activités ont été répertoriées par l’INSEE comme des activités de « services aux entreprises ». Comment ces services ont-ils évolué? Les services aux entreprises sont composés de quatre secteurs :

- Poste et télécommunications, - Services opérationnels, - Conseil et Assistance, - Recherche et développement.

L’approche par l’emploi Au sein des services aux entreprises, deux secteurs prédominent en terme d’effectifs : les Services opérationnels et Conseil et assistance : en effet, ils représentent à eux deux 82% des effectifs du secteurs des « Services aux entreprises ». De l’ensemble, les Services opérationnels connaissent l’évolution la plus importante devant la Recherche et Développement et le Conseil et Assistance.

Evolution des effectifs des services aux entreprises en France en base 100 en 1996

95

105

115

125

135

145

1996 1997 1998 1999 2000

Poste et télécommunication

Conseil et Assistance

Services opérationnels

Recherche et développement

Total

Source : INSEE, Système unifié de statistiques d'entreprises (SUSE-INSEE), Base Alisse

46

L’approche par la Valeur Ajoutée Là encore, l’analyse de l’évolution de la valeur ajoutée de chacun des secteurs composant les services rendus aux entreprises fait ressortir l’essor des secteurs opérationnels et conseil et assistance. Parallèlement, en calculant le poids de chacun dans la création de richesse de la branche des services aux entreprises, les services opérationnels (34% en 2000) et conseil et assistance (43% en 2000) devancent les Postes et télécommunications ainsi que le secteur de le Recherche et Développement. A eux deux, ils représentent plus de trois quart de la création de richesse des services rendus aux entreprises. Evolution de la VA des services aux entreprises en France Base 100 1996

95

100

105

110

115

120

125

130

135

140

145

150

1996 1997 1998 1999 2000

Poste et télécommunication

Conseil et Assistance

Services opérationnels

Recherche et développement

Total

Source : INSEE, Système unifié de statistiques d'entreprises (SUSE-INSEE), Base Alisse L’approche en terme de productivité La productivité du secteur évolue lentement sur la période étudiée. Néanmoins, le service « Conseil et assistance » se démarque en atteignant un indice 110 en Base 100 1996 (la plus forte augmentation du secteur).

E v o lu t io n d e la p ro d u c t iv ité d e s s e r v ic e s a u x e n tre p r is e s e n F r a n c e B a s e 1 0 0 1 9 9 6

8 5

9 0

9 5

1 0 0

1 0 5

1 1 0

1 1 5

1 9 9 6 1 9 9 7 1 9 9 8 1 9 9 9 2 0 0 0

P o s te e t té lé c o m m u n ic a t io n

C o n s e il e t A s s is ta n c e

S e rv ic e s o p é ra t io n n e ls

R e c h e rc h e e td é v e lo p p e m e n t

T o ta l

Source : INSEE, Système unifié de statistiques d'entreprises (SUSE-INSEE), Base Alisse

Cette analyse en effectifs, valeur ajoutée et productivité fait clairement ressortir les Services opérationnels et Conseil et assistance comme les deux services les plus créateurs de richesses et d’emplois sur la période étudiée. Afin d’appréhender la structure de ces deux services phares pour les entreprises, une analyse plus approfondie de chacun de ces services a été effectuée.

47

Le service de Conseil et assistance aux entreprises Le service de Conseil et assistance aux entreprises est composé des activités suivantes :

• Activité informatique • Services professionnels • Administration des entreprises • Publicité et études de marché • Architecture, ingénierie, contrôle

Une analyse par l’emploi salarié positionne les activités informatiques comme les plus créatrices d’emploi depuis 1996 avec comme indice 160 en base 100 1996. Cette activité concentre aussi la plupart des effectifs du secteur Conseil et Assistance avec les services professionnels.

Evolution des effectifs du service Conseil et Assistance en France Base 100 en 1996

95

105

115

125

135

145

155

165

1996 1997 1998 1999 2000

Activité informatique

Services professionnels

Administration d'entreprises

Publicité et étude de marché

Architecture, ingénierie, contrôle

Total

Source : INSEE, Système unifié de statistiques d'entreprises (SUSE-INSEE), Base Alisse

En revanche, l’analyse de la productivité de chacune des activités du secteur conseil et assistance fait ressortir la publicité et les études de marché comme l’activité la plus productive sur la période 1996-2000 suivies par les activités d’architecture, ingénierie et contrôle.

Evolution de la productivité du secteur Conseil et Assistance par activités en FranceBase 100 en 1996

80

90

100

110

120

130

1996 1997 1998 1999 2000

Activité informatique Services professionnelsAdministration d'entreprisesPublicité et étude de marchéArchitecture, ingénierie, contrôleTotal

Source : INSEE, Système unifié de statistiques d'entreprises (SUSE-INSEE), Base Alisse

48

Les Services opérationnels Les Services opérationnels sont composés des métiers suivants :

• Location sans opérateur : pour éviter la gestion de flottes importantes de machines et de véhicules

• Sélection et fourniture du personnel • Sécurité, nettoyage et services divers aux entreprises : assurer lé sécurité et la propreté des

locaux • Assainissement, voirie, gestion des déchets

Le graphique ci-dessous montre la progression importante des effectifs franciliens du secteur des Services opérationnels qui évolue au rythme moyen de 10,6 % par an depuis 1996, avec une forte démarcation du secteur de « Sélection et fourniture de personnel » dont les effectifs augmentent depuis 1996 à la vitesse de 18,6% par an.

Evolution des effectifs des services opérationnels en Ile-de-France (Base 100 en 1996)

90

110

130

150

170

190

210

1996 1997 1998 1999 2000

Services opérationnels

Location sans opérateur

Sélection et fourniture de personnel

Sécurité, nettoyage et servicesdivers aux entreprisesAssainissement, voirie et gestiondes déchets

INSEE, base Alisse, Enquête annuelle des entreprises, Critère effectifs

NB : la donnée 1997 pour les services opérationnels est non complète d’après la base Alisse. Elle a été notifiée 100. Les investissements directs étrangers renforcent la prééminence des services en Ile-de-France Les investissements directs étrangers (IDE) réalisés en France sont en terme de flux de l’ordre de 55 à 60 milliards d’euros sur les trois dernières années11. Ce montant fait (en valeur absolue) depuis de nombreuses années de la France un des pays les plus attractifs de l’Europe. Ces flux représentent en moyenne 4,5 % de la valeur ajoutée nationale. L’encours des investissements directs étrangers en France atteint un montant de 335 milliards d’euros et progresse à un rythme extrêmement rapide depuis 1999. Un examen du contenu de ces investissements permet de montrer la place prépondérante que tient l’Ile-de-France dans la captation de ces investissements étrangers. Au 1er janvier 2002, elle accueille près de 46% des sièges sociaux des sociétés étrangères implantées en France12.

11 Banque de France – Direction Générale des études et relations internationales – Direction de la Balance des Paiements, 18 juin 2003 12 Les Cahiers du Crocis, Janvier 2003, « Les IDE révélateurs de l’attractivité régionale »

49

Mais en Ile-de-France, la majorité des IDE concerne les métiers du service. Pour près de 67% des cas, une implantation en Ile-de-France concerne les services et loin derrière la distribution et la production. Ceci a pour conséquences d’accentuer les déséquilibres entre les départements de la région qui sont déjà flagrants : les entreprises de « services aux entreprises » qui sont souvent des services à forte intensité intellectuelle, se trouvent principalement à Paris et dans les Hauts de Seine, et beaucoup moins dans les autres départements de la première couronne. Enfin, près des trois quarts des entreprises de « services rendus aux entreprises » de plus de 500 salariés se trouvent dans la région francilienne. Cette disproportion dans la taille est ici flagrante. Comme le fait remarquer le CROCIS, « les activités industrielles apparaissent donc comme minoritaires par rapport à l’attraction de l’activité des services »13. Parmi ces activités, on retrouve pour une large part les services fournis aux entreprises (près de 29% d’après la base Téléfilm, CCIP). Une étude menée par Paris-Ile-de-France-capitale économique sur la période 1997-2000 précise que seulement 8% des implantations concerne des unités de production, tandis que les ventes et le marketing en cumuleraient 65%. La région francilienne possède indéniablement des atouts qui font d’elle une force d’attraction indéniable. Mais rien n’est définitivement acquis. On note depuis quelques années une diminution progressive du niveau d’implantation des sièges des firmes étrangères en Ile-de-France. Ceci montre que cette attractivité n’est pas immuable et qu’elle s’érode au fil des années et ce, dans le cadre d’une compétition toujours forte des agglomérations de l’Europe pour attirer les investissements internationaux. Le Monde du 27 juin 2003, « Malgré des handicaps, la France attire des investisseurs étrangers » (extrait). « Malgré les avantages que présentent la France, le pays a un véritable problème sur les investissements concernant les centres de décisions. Les groupes mondiaux veulent optimiser leurs emplacements européens que ce soit pour leurs sièges sociaux, leurs directions marketing ou de ressources humaines. Pour ce type de localisation, le Royaume-Uni, la Belgique et le Luxembourg sont plébiscités ». D’un autre côté, l’AFII14 note que le fort ralentissement de la croissance des TIC s’est traduit au niveau national par un retour à « l’ancienne économie ». Les sites de production manufacturière, avec la réalisation de logiciels, représentent 58% de l’emploi créé. On observe également une nette progression des projets dans le secteur automobile, les industries de transformation, les équipements électroniques, électriques et médico-chirurgicaux.

13 CROCIS numéro spécial sur les IDE, page 14. 14 Agence Française pour les Investissements Internationaux

50

1.5 Les mutations spatiales de l’industrie francilienne15 Les mutations de l’industrie francilienne se caractérisent en premier lieu par l’ampleur de la perte des effectifs industriels. Alors que l’industrie francilienne comptait 1,2 millions de salariés en 1976, elle n’en compte plus que 600 000 en 2001, soit une perte de la moitié de ses effectifs. De 22%, le poids de l’industrie francilienne est ainsi tombé à 16% des emplois nationaux du secteur. Tous les départements sont touchés par les diminutions d’effectifs. Toutefois, ce sont les départements qui concentraient le plus d’emplois qui ont été le plus touchés : Paris et les Hauts-de-Seine ont perdu respectivement 325 000 et 227 000 emplois depuis 1976. Seul le département des Yvelines a connu une évolution à la hausse à partir de 1997. La cartographie des effectifs industriels de l’Île-de-France révèle que les pertes d’emplois ont principalement touché la zone centrale où les effectifs étaient traditionnellement concentrés. En 1976, la grande couronne représentait 27% de l’emploi industriel ; en 2003 elle en concentre 44%. Les réallocations d’emploi industriel ont principalement bénéficié au département des Yvelines et à la ville nouvelle de Saint-Quentin. L’emploi industriel reste cependant relativement présent sur la zone centrale, et ce quelles que soient les catégories socioprofessionnelles. Si le nombre d’ouvriers de l’industrie est passé de 620 000 en 1976 à 200 000 en 1999, avec de très importantes pertes sur la zone centrale, en 1999, ces emplois

15 Cette partie a été entièrement réécrite par la DREIF.

Evolution de l'emploi industriel des départements d'Ile-de-France de 1976 à 2003

50

100

150

200

250

300

350

400

450

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

(en milliers)

Paris

Hauts-de-Seine

Seine-Saint-Denis

Val-de-Marne

Seine-et-Marne

Yvelines

Essonne

Val d'Oise

Source : Unedic, emploi salarié privé

51

Évolution de l’emploi industriel de 1976 à 2001

52

Comment se dessine aujourd’hui l’implantation industrielle en Ile-de-France ? En 2001, les principales zones d’emploi industriel sont :

- Paris et les Hauts-de-Seine représentent toujours un pôle industriel important - Au nord-est immédiat de Paris jusqu’à Aulnay et autour de Roissy - Un vaste territoire situé au sud de Paris allant de la vallée de la Bièvre à Marne-la-Vallée - Les villes nouvelles d’Évry et Melun-Sénart - Le pôle technologique du sud-ouest francilien allant de la ville nouvelle de Saint-Quentin en

Yvelines à Vélizy-Villacoublay - Le territoire de Seine-aval autour de Poissy, Flins et jusqu’à Cergy-Pontoise

Le pôle de La Défense est désormais omniprésent sur l’Ile-de-France par sa taille et la qualité des entreprises qui ont choisi de s’y installer :16 :

- le centre d’affaires de La Défense concentre plus de 3600 établissements, 1500 sièges sociaux dont onze des vingt premiers groupes français (qui représentent 7% des sièges sociaux de 500 salariés ou plus de l’Ile-de-France), dont de nombreux sièges sociaux de l’industrie.

- ce pôle concentre également 2,5 millions de mètres carrés de bureaux.

- équipé de plus de 40 kilomètres de câbles et fibres optiques, le centre d’affaires offre 80 points d’accès pour desservir l’ensemble des établissements.

Le déséquilibre entre l’Est et l’Ouest de l’Ile-de-France est visible en ce qui concerne la géographie globale de l’emploi. Il est renforcé par la localisation à l’ouest des fonctions stratégiques de quartiers généraux et de recherche et développement.

16 CCIP Hauts de Seine – Service Aménagement, Urbanisme et Environnement – Mars 2001

53

Les quatre secteurs industriels étudiés ici (agroalimentaire, textile-habillement, automobile et aéronautique et spatiale) se sont réorganisés suivant une logique de desserrement des établissements et des emplois vers la grande couronne. Toutefois, la cartographie des emplois de ces secteurs met en évidence des localisations très différenciées :

Il existe de fortes polarisations, notamment pour les activités concentrées dans un petit nombre d’établissements telles que l’aéronautique et l’automobile.

Le secteur de l’habillement reste très central (Paris et communes limitrophes de Seine-Saint-Denis notamment).

Les industries agroalimentaires sont plus éparpillées sur le territoire, tout en se structurant à l’est de la région en trois pôles (Roissy, Marne-la-Vallée et Evry).

54

1.5.1 Mutation et localisation de l’industrie agroalimentaire en Ile-de-France

Ces activités se caractérisent par un nombre important de petits établissements : près de 60% des effectifs sont dans des établissements de moins de 50 salariés. L’industrie agroalimentaire est présente dans de nombreuses communes franciliennes (670) car elle comprend des activités communément considérées comme des commerces de proximité tels que charcuterie, boulangerie, pâtisserie, confiserie… La boulangerie-pâtisserie, avec près de 20 000 emplois est le premier employeur de l’industrie agroalimentaire. Les plus gros établissements sont Nestlé à Marne-la-Vallée, Pernod à Créteil, la SEITA à Paris13, LU à Ris-Orangis… Malgré un desserrement de l’emploi, celui-ci reste relativement concentré sur la zone agglomérée.

industrie agroalimentaire

05 000

10 00015 000

20 00025 000

30 00035 000

0-50 50-100 100-150 150-200 200-500 500 à +

taille de l'établissement

effe

ctifs

sal

arié

s

Source : Insee, ERE 2000

55

Hormis la boulangerie-pâtisserie, tous les secteurs des industries agroalimentaires ont globalement subi des réductions d’effectifs depuis 1976. Cette tendance s’est toutefois infléchie pour certaines activités depuis 1997 (industries des boissons). Entre 1993 et 2001, les industries agroalimentaires se sont desserrées et polarisées sur :

les Hauts-de-Seine (Gennevilliers +400 salariés, Rueil-Malmaison +1500, Issy-les-Moulineaux +800, Antony +500) et sur trois pôles d’un arc est-parisien :

Autour de Roissy : +600 emplois au Mesnil-Amelot

A Marne-la-Vallée : +1600 emplois à Noisiel et +400 à Lagny-sur-Marne

Autour d’Evry : +1300 emplois

Sur le 13ème arrondissement de Paris(+600) et à Ivry-sur-Seine (+300)

emplois des principales industries agroalimentaires en Ile-de-France

0

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

30 000

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Industrie des viandesIndustrie des corps grasIndustrie laitièreTravail des grains - de produits amylacésFabrication industrielle de produits de boulangerieBoulangeries pâtisseriesAutres industries alimentairesIndustrie des boissons

Source :Unedic

56

1.5.2 Mutation et localisation de l’industrie aéronautique et spatiale en Ile-de-France

Le secteur de l’industrie aéronautique et spatiale est très polarisé sur le territoire francilien en raison du petit nombre d’établissements qui le composent : 91 établissements pour 26 600 emplois en 2000. De plus 90% des effectifs sont concentrés dans des établissements de plus de 200 salariés (les 24 plus gros établissements du secteur). La SNECMA, Dassault et EADS sont les principales entreprises du secteur. Elles représentent 70% des effectifs régionaux. En 2001, les principaux pôles d’emploi sont :

l’arc ouest-nord de la proche couronne : Vélizy-Villacoublay, Meudon, Saint-Cloud, Colombes, Gennevilliers, Argenteuil, Saint-Ouen, La Courneuve, Le Bourget, Bonneuil-en-France

les Mureaux pour la construction de lanceurs et engins spatiaux

les villes nouvelles d’Evry et Sénart pour la construction de moteurs pour aéronefs

industrie aéronautique et spatiale

0

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

0-50 50-100 100-150 150-200 200-500 500 à +

taille de l'établissement

effe

ctifs

sal

arié

s

Source : Insee, ERE 2000

57

Depuis 1993, l’industrie aéronautique et spatiale a perdu beaucoup d’emplois (près de 30%). Les pertes ont principalement concerné les secteurs de la construction de lanceurs et engins spatiaux et la construction de cellules d’aéronefs (respectivement -70% et -25%), tandis que les emplois de la construction de moteurs pour aéronefs sont restés stables. Les Hauts-de-Seine, et en limite sud, Vélizy-Villacoublay ont été particulièrement touchés par les diminutions d’emploi, tandis que la ville nouvelle d’Évry, avec la présence de SNECMA Moteurs, s’affirme en tant que pôle de l’industrie aéronautique et spatiale en Ile-de-France.

emplois de l'industrie aéronautique et spatiale en Ile-de-France

0

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

30 000

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Construction de moteurs pour aéronefs

Construction de cellules d'aéronefs

Construction de lanceurs et engins spatiaux

Source : Unedic, emploi salarié privé

58

1.5.3 Mutation et localisation de l’industrie automobile en Ile-de-France

Le secteur de l’industrie automobile représente 60 000 emplois en Ile-de-France. Il est très polarisé sur le territoire francilien en raison du petit nombre d’établissements qui le composent : 226 établissements pour 57 400 emplois en 2000. De plus 90% des effectifs sont dans des établissements de plus de 200 salariés (les 25 plus gros établissements du secteur). Peugeot et Renault sont les principales entreprises de cette industrie. Elles représentent à elles deux 84% des effectifs régionaux de l’industrie automobile.

Hormis le site de Peugeot Citroën à Aulnay-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, la quasi-totalité des emplois sont situés à l’ouest de la région : les Yvelines et les Hauts-de-Seine concentrent respectivement la moitié et le quart des effectifs régionaux. Les principaux sites d’implantation des entreprises sont Poissy, Guyancourt, Aubergenville, Vélizy-Villacoublay dans les Yvelines ; Boulogne Billancourt, Rueil Malmaison et La Garenne Colombe dans les Hauts-de-Seine. Emplois de l’industrie automobile en 2001 :

PEUGEOT CITROËN

RENAULT

industrie automobile

0

10 000

20 000

30 000

40 000

50 000

60 000

0-50 50-100 100-150 150-200 200-500 500 à +

taille de l'établissement

effe

ctifs

sal

arié

s

Source : Insee, ERE 2000

59

La grande majorité des emplois du secteur concerne la construction de véhicules automobiles (85%) qui est très concentrée sur un petit nombre de communes. Les équipementiers sont positionnés en satellite, à proximité des pôles. Ce secteur a subi de fortes réductions d’effectifs dans les années 1980 mais il semble s’être stabilisé depuis 1993, en tout cas pour ce qui est de la construction de véhicules automobiles stricto sensu. Depuis 1993, les réorganisations spatiales se sont traduites par une polarisation importante sur les centres de haute technologie :

ouverture du Technocentre de Renault en 1998 à Guyancourt dans les Yvelines qui concentre aujourd’hui près de 8000 emplois ;

développement du centre technique de PSA-Peugeot-Citroën à Vélizy-Villacoublay et ouverture d’un centre technique à La Garenne-Colombe dans les Hauts-de-Seine en 1999. Le centre de design du Groupe, l'Automotive Design Network (ADN), inauguré en octobre 2004 sur Vélizy, regroupe - sur 70 000 m2 et 4 niveaux - l’ensemble des studios de style et les équipes d’innovation et d’architecture véhicule.

emplois de l'industrie automobile en Ile-de-France

0

20 000

40 000

60 000

80 000

100 000

120 000

140 000

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Construction de véhicules automobiles

Fabrication de carrosseries automobiles

Fabrication d'équipements automobiles

Source : Unedic, emploi salarié privé

60

1.5.4 Mutation et localisation de l’industrie textile-habillement en Ile-de-France

Le secteur textile-habillement représente 25 000 emplois en 2003, dont 5000 pour le secteur de la fabrication textile. Ces activités se caractérisent par un nombre important de petits établissements : près de 80% des effectifs sont dans des établissements de moins de 50 salariés. Malgré un desserrement de l’emploi ; le secteur de l’industrie textile-habillement reste très polarisé sur Paris : en 2000, la capitale concentre 60% des emplois régionaux du secteur.

industrie textile-habillement

0

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

0-50 50-100 100-150 150-200 200-500 500 à +

taille de l'établissement

effe

ctifs

sal

arié

s

Source : Insee, ERE 2000

61

L’industrie textile-habillement a connu une diminution continue de ses effectifs depuis le milieu des années 1970. Le secteur de la fabrication de vêtements en textile, premier employeur de la filière, a vu ses effectifs diminuer de 65% depuis 1976. Les réorganisations spatiales de l’industrie textile habillement se sont essentiellement faites vers les communes limitrophes de Paris de la Seine-Saint-Denis et dans une moindre mesure des Hauts-de-Seine.

emplois de l'industrie textile-habillement en Ile-de-France

0

10 000

20 000

30 000

40 000

50 000

60 000

1976

1978

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

Autres industries textiles

Fabrication d'étoffes et d'articles à maille

Fabrication de vêtements en cuir et fourrures

Fabrication de vêtements en textile

Source : Unedic

62

Conclusion : Les activités industrielles, historiquement concentrées sur la zone centrale (Paris et proche couronne) se sont réorganisées spatialement vers La Défense pour les sièges sociaux de l’industrie et vers des zones plus excentrées de la grande couronne pour les centres techniques et les activités de production. Cette réorganisation répond à des contraintes de rentabilité (coût du foncier, de l’immobilier) et d’environnement (nuisances générées par l’industrie peu compatibles avec l’habitation). Par ailleurs, la géographie des activités industrielles est très différente suivant le type d’activité :

des activités à haute valeur ajoutée très polarisées : automobile, aéronautique, pharmacie parfumerie entretien, équipements électriques et électroniques

des activités traditionnellement concentrées sur la capitale : édition imprimerie, habillement cuir

des activités plus dispersées sur le territoire francilien (équipements mécaniques, composants électriques et électroniques, industries agroalimentaires, équipements du foyer, chimie caoutchouc plastiques, métallurgie et transformation des métaux)

De 1975 à 1999, l’industrie francilienne a perdu 650 000 emplois, soit la moitié de ses effectifs. Les baisses d’effectifs ont principalement touché les professions les moins qualifiées :

-420 000 ouvriers

-170 000 employés

-85 000 professions intermédiaires

+34 000 cadres

Quasiment toutes les communes sont touchées par les diminutions d’effectifs ouvriers et employés, certaines communes des villes nouvelles parviennent toutefois à stabiliser ces emplois. Les professions intermédiaires se desserrent vers les villes nouvelles et les cadres de l’industrie quittent Paris et se repositionnent sur les Hauts-de-Seine, Vélizy-Villacoublay et Saint-Quentin en Yvelines.

63

LOCALISATIONS DES ACTIVITĒS INDUSTRIELLES EN 2001

automobile édition, imprimerie, reproduction

pharmacie, parfumerie et entretien

équipements électriques et électroniques

chimie, caoutchouc, plastiques

composants électriques et électroniques

équipements du foyer

habillement, cuir industries agroalimentaires

équipements mécaniques

métallurgie et transformation des métaux

construction navale, aéronautique et ferroviaire

2000 salariés 1000 200

64

1.5.5 Les grandes caractéristiques des zones d’activité franciliennes

Les zones d’activité franciliennes se caractérisent par : - La dispersion des zones d’activité franciliennes : L’examen des zones d’activité franciliennes laisse apparaître un sentiment de dispersion qui correspond à l’absence de réelle spécialisation de la région. Cette observation se retrouve dans d’autres domaines comme la recherche et développement ; elle est pluridisciplinaire, sans spécialité dominante en comparaison d’autres régions. Les zones d’activité franciliennes présentent trois défauts majeurs :

trop grand nombre : elles sont en trop grand nombre sur un espace géographique limité. Ces zones sont donc nécessairement éclatées (on peut dénombrer schématiquement quinze grands pôles d’activité différents en Ile-de-France dont dix tiennent un rôle important),

niveau de qualité insuffisant : elles sont de qualité inégale au regard du niveau de leur infrastructure et de la qualité des services qu’elles offrent (restauration collective, services bancaires,...). De plus, elles ne sont pas toutes en mesure de répondre aux besoins des grandes entreprises internationales (la zone aéroportuaire du Bourget est en voie de rénovation et ne donne pas une image de qualité pour l’aéroport du Bourget qui est un des tous premiers centres européens pour les voyages d’affaires),

déficit d’image : elles souffrent parfois d’un déficit d’image. La zone de Vélizy-Villacoublay est moins associée à l’aéronautique que ne l’est la ville de Toulouse, alors que cette zone regroupe les plus grands noms de la filière.

- Une tendance accrue ces dernières années à la polarisation des activités : Le constat précédent doit être atténué. Les quinze grands pôles franciliens jouent un rôle majeur dans l’économie de la région : ils représentent 30% des emplois salariés de la région (CROCIS Enjeux Ile-de-France n°44 octobre 2002). Par ailleurs, on note une tendance accrue ces dernières années à un renforcement de la réorganisation de l’activité industrielle autour de pôles ayant un sens économique (logique industrielle) et qui correspond mieux à la stratégie actuelle des entreprises qui sont à la recherche de synergies entre métiers proches ou complémentaires. L’exemple du plateau de Saclay géré en Communauté d’agglomération, est illustratif de l’importance qu’il convient d’accorder aux pôles d’excellence : ce plateau unique (c'est le seul pôle comparable aux grands centres mondiaux de formation, de recherche, de développement et d'innovation) regroupe aujourd’hui 21 centres de recherche et d’enseignement supérieur, plus de 2600 entreprises dont certaines sont de tout premier plan, alors que d’autres sont des PMI, mais toutes ont en commun d’être spécialisées dans des secteurs de pointe ayant une connexion forte avec des pôles de recherche importants. - Certaines zones disparaissent et se désengagent entièrement d’un secteur et de ses emplois, parfois au profit d’une autre zone : le secteur du Textile Habillement et Mode suit en partie cette logique de déplacement des emplois du centre de Paris vers sa première couronne sur la zone de Saint Denis et Montreuil. D’autres zones se désengagent d’un ou plusieurs secteurs pour se spécialiser sur un métier ou chaîne de valeur. - Enfin, certaines zones semblent se spécialiser en dédiant leurs zones d’activité à une seule filière.

65

1.5.6 Points forts des départements de la région Ile-de-France

Le tableau qui suit a pour objet de faire apparaître les principaux points forts de chacun des départements de l’Ile-de-France. Cette analyse ne se veut pas exhaustive : elle a simplement pour objectif de mettre en lumière les axes stratégiques et les principaux atouts des départements franciliens. Départements Principaux atouts et points forts

Présence de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle Existence d’une plate-forme aéroportuaire Val d’Oise (95) Ville nouvelle de Cergy-Pontoise Présence de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle Existence d’une plate-forme aéroportuaire Parcs d’expositions internationaux (Villepinte, Le Bourget) Plateformes logistiques (Prologis/Garonor)

Seine saint Denis (93)

Zone aéroportuaire du Bourget Zone tertiaire Aéroport d’Orly Marché de Rungis Plateforme SOGARIS Port de Bonneuil

Seine et Marne (94)

Pôle pharmaceutique et médical Génopôle d’Evry Scientipôle du plateau de Saclay Essonne (91) Ville nouvelle d’Evry Quartier d’affaires et Sièges sociaux Recherche privée Port de Gennevilliers

Hauts de Seine (92)

Plateforme multimodale Pôle de recherche privée Port de Limay Haute Technologie

Yvelines (78)

Ville de Saint-Quentin-en-Yvelines Industrie agricole et alimentaire Pôle multimédia Plateformes logistiques

Seine et Marne (77)

2 villes nouvelles : Sénart et Marne la Vallée Sièges sociaux (entreprises, banques, assurances) Recherche Paris (75) Lieux de congrès internationaux

Le tableau ci-dessus illustre la diversité des atouts de la région Ile-de-France au travers de ses départements.

66

1.6 L’Ile-de-France face aux grandes agglomérations européennes

1.6.1 Définition de la compétitivité et de l’attractivité

Ce chapitre est consacré à l’analyse de la compétitivité et de l’attractivité de l’Ile-de-France et à sa comparaison avec d’autres régions d’Europe. A cette analyse, ont été ajoutées les deux autres régions de France jugées représentatives : Rhône-Alpes et Pays de Loire.

• La compétitivité est ici définie dans un sens très large comme l’ensemble des facteurs stratégiques par lesquels une région est capable de « faire mieux » que ses compétiteurs, c’est-à-dire les autres régions d’Europe. La compétitivité représente l’avantage concurrentiel d’une région pris dans son sens le plus large. Ce concept n’est pas réductible à la productivité qui n’est qu’une facette de la compétitivité. Pour mesurer cette dernière, il est nécessaire de déployer une démarche globale, faisant intervenir non pas un seul indicateur mais un faisceau d’indicateurs reflétant l’ensemble des avantages concurrentiels17.

• L’attractivité est le corollaire de la compétitivité : plus une région est d’apparence compétitive, plus elle est en mesure d’être un lieu d’attractivité national et international, c’est-à-dire un lieu d’implantation pour les entreprises ou les particuliers.

1.6.2 Mise au point d’un modèle d’évaluation

Les études comparatives des pays européens et des agglomérations européennes sont nombreuses. Deux sources ont été sélectionnées pour construire l’analyse compétitivité – attractivité :

- Les données statistiques de EUROSTAT, - Une étude récente quantitative et qualitative réalisée pour le compte de la DATAR et qui effectue une

comparaison détaillée des principales villes de l’Europe18. Ces deux sources présentent l’avantage d’être complètes, objectives (indicateurs quantitatifs homogènes) et cohérentes par rapport à la problématique de la mutation industrielle.19 Ainsi, pour parvenir à une analyse globale des agglomérations européennes, il a été mis au point un modèle permettant de les classer les unes par rapport aux autres. Le modèle repose sur plusieurs principes :

- retenir des indicateurs homogènes et pertinents : l’analyse comparative repose sur une notation des agglomérations à partir d’indicateurs stratégiques (voir plus loin). Pour parvenir à des notations précises ont été retenus des indicateurs objectifs et pertinents, comparables d’une agglomération à l’autre et qui proviennent d’une source statistique impartiale. C’est la raison pour laquelle le modèle d’évaluation repose en grande partie sur les données fournies par EUROSTAT et la DATAR.

- mettre au point un principe de notation aussi objectif que possible afin d’éviter les interprétations et les jugements de valeur. La notation repose ainsi sur des intervalles définis par des paramètres quantifiables et non subjectifs.

- définir des zones d’agglomération qui soient homogènes afin que les comparaisons soient pertinentes. C’est un problème difficile à résoudre et qui ne reçoit pas de réponse totalement adéquate. En effet, la question est bien de savoir ce qui est vraiment comparable à la région Ile-de-France lorsque l’on parle de la région de Londres par exemple ? Il a été décidé de prendre les définitions de EUROSTAT. C’est ainsi que Londres est analysé sous plusieurs angles. Pour être précis, les zones administratives dites NUTS2 ont été retenues.

17 Cette manière d’appréhender la compétitivité par un faisceau d’indicateurs est à l’origine d’une polémique sur la mesure de la compétitivité. L’organisme le plus connu, le World Economic Forum a, par cette approche, positionné la France dans les 20ème rangs, ce qui a suscité de vives réactions de la part de nombreux économistes français. L’approche développée dans ce rapport présente des analogies avec la méthode du World Economic Forum. 18 Rapport d’étude DATAR : « Les villes européennes : analyse comparative » mise en ligne sur le site de la DATAR en mai 2003. 19 Toutefois, chacune de ces données est à utiliser avec précaution. En effet, l’étude de la DATAR prend en compte des agglomérations européennes, alors que EUROSTAT utilise les régions européennes.

67

1.6.3 Méthodologie statistique de la notation

L’intérêt de la notation est de permettre de sommer des éléments qui sont exprimés dans des unités différentes et qui de ce fait sont hétérogènes. In fine, apparaîtra un classement des différentes régions d’Europe exprimant leur niveau de compétitivité et leur niveau d’attractivité. La notation a été mise au point sur les principes suivants : pour un indicateur quantitatif, sont calculés deux paramètres : la moyenne et l’écart type. Ces deux paramètres permettent de définir six intervalles :

- Les deux premiers intervalles sont déterminés en ajoutant et en enlevant à la moyenne le produit de l’écart type par le coefficient de précision20.

- Deux autres intervalles sont déterminés en ajoutant ou en retranchant à la moyenne une fois l’écart type.

- Deux autres intervalles sont déterminés automatiquement à partir des extrêmes de chaque côté de la moyenne plus ou moins l’écart-type.

Note : Pour éviter de se retrouver dans la situation où l’écart type serait supérieur à la moyenne, ont été éliminées les grandeurs quantitatives extrêmes auxquelles automatiquement ont été données soit la notation « mauvaise » soit la notation « excellente ». Ce procédé permet de ne pas remettre en question la notation mais en même temps de resserrer le niveau de l’écart type. Pour les critères purement qualitatifs, l’intensité de la notation a été fractionnée en six niveaux différents afin de retrouver les mêmes subdivisions que pour l’évaluation quantitative.

Échelle de notation de la compétitivité des agglomérations européennes

20 Le coefficient de précision est de 0,198 pour une distribution normale dans le cadre d’un test bilatéral avec un niveau de confiance de 95%. Il est fait implicitement l’hypothèse que la distribution des indicateurs suit sensiblement une loi normale.

Moyenne

Mauvais Faible Moyen Moyen Fort Excellent

0 2 4 4 6 8

68

1.6.4 Délimitation des zones géographiques européennes

Comme cela a été dit précédemment, le découpage des régions pris en compte pour l'étude des données quantitatives a été défini en se fondant sur la nomenclature des unités territoriales statistiques EUROSTAT, à savoir ce que l’on appelle « les NUTS de niveau 2 ». Cette nomenclature a été établie par EUROSTAT dans le but de disposer d'un schéma unique et cohérent de répartition territoriale pour l'établissement des statistiques régionales de l'Union Européenne. La nomenclature NUTS subdivise chaque état membre en un nombre entier de régions du niveau NUTS 1, lesquelles sont à leur tour subdivisées en un nombre entier de régions de niveau NUTS 2 et ainsi de suite. Note : De plus, le découpage des régions pris en compte dans cette étude représente un découpage fonction d'une zone d'influence économique. Les zones d'influence économique ont été précisées par les DREE (Directions des Relations Economiques Extérieures) présentes dans les chambres d'expansion économique des ambassades françaises à l'étranger. Par conséquent, ont été définies deux types de zones :

• Des zones pour lesquelles la région économique correspond à une région géographique définie par la nomenclature NUTS 2 (Ile-de-France, Rhône-Alpes, Pays de Loire et Lombardie).

• Des zones pour lesquelles la région économique ne correspond pas à une région géographique définie par la nomenclature NUTS 2 (Belgique, Hollande, Allemagne, Royaume-Uni).

Zones géographiques retenues pour les comparaisons européennes Ces précisions permettent de définir les zones suivantes par pays : France : L’Ile-de-France (Code FR1) comprend huit départements. La région Rhône-Alpes (Code FR71) comprend huit départements. La région Pays de Loire (Code FR51) comprend cinq départements. Italie : Pour l’Italie, a été retenue la région de la Lombardie (Code IT2). Belgique : Bruxelles en terme de région économique est 40 fois plus grande que la région administrative et contient 2,5 millions d'habitants de plus. Ont été prises en compte trois zones différentes: Bruxelles Capitale (Code BE1), Vlaams Brabant (Code BE24) et Brabant Wallon (Code BE31). Hollande : La région comparable à l'Ile-de-France est représentée par la « Zuid Holland » (Code NL33), la « Noord Holland » (Code NL32) et Utrecht (Code NL31), ce qui correspond à la « Randstad ». Allemagne : Deux zones sont analysées : La région économique de Frankfort, 10 fois plus étendue que la région administrative. Elle représenté par les régions Darmstadt (Code DE71), et Gieben (DE72). La région Rhin-Ruhr, avec Düsseldorf (Code DEA1) et Cologne (Code DEA2). Royaume-Uni : Pour le Royaune-Uni, deux grandes zones ont été analysées : Londres et sa région, représenté par « Inner London » (Code UKI1) et « Outer London » (Code UKI2), Cependant, la véritable zone d'influence économique est plus large et prend en compte Bedfordshire and Hertfordshire (Code UKH2), Essex (Code UKH3), Kent (Code UKJ4), Surrey, East and West Sussex (Code UKJ2), Berkshire, Buckinghamshire and Oxfordshire (Code UKJ1).

69

1.6.5 Les indicateurs de compétitivité et d’attractivité retenus dans la comparaison des agglomérations européennes

Sur le plan des données, ont été privilégiés les indicateurs se rapportant à la compétitivité et dont les éléments d’appréciation statistique existent pour toutes les NUTS (sauf quelques rares exceptions). Les indicateurs de compétitivité ont été scindés en neufs grands déterminants différents :

- Le dynamisme de la population (2 indicateurs) : la densité de population (habitants au Km²), le taux

d’accroissement total de la population entre 1996 et 2000. Ce qui est jugé par ces indicateurs c’est le dynamisme de la population.

- Le niveau de richesse (2 indicateurs) : le PIB par habitant et le taux de croissance du PIB régional entre 1995 et 1999.

- Le dynamisme de l’emploi (3 indicateurs) : le taux de chômage et son évolution dans le temps, le taux de croissance de la population active entre 1996 et 2000.

- La qualité de l’emploi (3 indicateurs) : niveau de formation de la population et niveau d’emploi dans les services.

- L’efficacité de la recherche et développement (4 indicateurs) : Cette partie de la notation tient une place importante car elle concerne des points essentiels de la stratégie future des régions. Quatre indicateurs ont été retenus : deux indicateurs sur les brevets, un indicateur portant sur le nombre d’unités de recherche publiques et privées et un indicateur sur le nombre de revues scientifiques éditées.

- La qualité de l’emploi à haute intensité de connaissances (5 indicateurs) : cette thématique a pour objectif de mesurer la capacité d’une région à dynamiser ses activités de R&D via la formation des étudiants et la part des emplois dans cette activité.

- Le coût et la concentration de l’emploi (2 indicateurs) : le niveau des salaires et la densité de l’emploi dans l’industrie manufacturière.

- Le degré d’équipement en moyens de transports (3 indicateurs) : Deux indicateurs ont été retenus : l’accessibilité des villes, le parc des véhicules privés et le trafic aérien.

- Le dynamisme économique des régions (5 indicateurs) : Cet aspect tient une large place dans la notation car il fait transparaître l’attractivité régionale en tant que centre d’événements économiques. Cinq indicateurs ont été retenus : la mesure de la diversité industrielle, le nombre de sièges sociaux des grands groupes européens, le nombre de banques internationales, nombre annuel de congrès internationaux, nombre de foires et de salons internationaux.

Au total, 29 indicateurs ont été sélectionnés, ce qui donne une note maximale de 232 points avec une moyenne à 116 points. Toutefois, pour accentuer les points forts et les points faibles des différentes régions mises en compétition, a été utilisé un procédé qui consiste à élever au carré les notes attribuées. Ce procédé a pour objectif de mettre en exergue les facteurs les mieux notés et de pénaliser davantage les facteurs ayant reçu une note faible ou nulle.

1.6.6 Classement des agglomérations européennes par leur compétitivité et leur attractivité

Les différentes agglomérations ont été classées sur la base du principe de notation indiqué ci-dessus. Le classement présenté ci-dessous porte sur les critères de compétitivité dont les sources proviennent essentiellement de EUROSTAT et de la DATAR. De même, les régions sont celles définies par EUROSTAT. Le classement fait ressortir une typologie en quatre segments : - les agglomérations à très forte compétitivité (plus de 3 500 points) : elles sont au nombre de trois (Buckinghamshire and Oxfordshire, INNER LONDON et l’Ile-de-France). Ces trois agglomérations ont en commun d’avoir de très bons positionnements sur de nombreux points essentiels de la compétitivité.

- les agglomérations à forte compétitivité (entre 2 500 points et 3 500) : on y trouve les autres zones du « Grand Londres » et l’Utrecht ;

- les agglomérations à compétitivité moyenne (entre 1 300 points et 2 500 points) : se trouvent à cette place, les régions de la Darmstadt, de Bruxelles et de Rhin-Rühr ;

- les agglomérations faiblement compétitives (moins de 1 300 points) : on y retrouve la Lombardie, certaines régions de l’Allemagne.

70

Classement des neuf premières agglomérations européennes selon leur niveau de compétitivité

Région Score Total Critères Score

Partiel Commentaires

Population 196 Richesse économique 144 Emploi 484 Force de travail 484 Recherche et développement 900 Emploi à haute intensité de connaissances 1 024 Statistiques d’entreprise 36 Transport 256

Buckinghamshire Oxfordshire

1ère position

4 308

Dynamisme économique 784

Nombreux avantages concurrentiels sur le niveau d’activité de la population Mais surtout très fort positionnement sur tous les indicateurs touchant la science et la technologie

Population 576 Richesse économique 196 Emploi 36 Force de travail 676 Recherche et développement 784 Emploi à haute intensité de connaissances 784 Statistiques d’entreprise 16 Transport 100

Inner London

2ème position 3 952

Dynamisme économique 784

Beaucoup de points forts pour cette agglomération sur des axes stratégiques majeurs. Deux points faibles : son chômage et l’emploi à haute intensité de connaissance

Population 144 Richesse économique 36 Emploi 36 Force de travail 484 Recherche et développement 676 Emploi à haute intensité de connaissances 900 Statistiques d’entreprise 100 Transport 256

Ile-de-France

3ème position 3 788

Dynamisme économique 1 156

L’Ile-de-France arrive dans les trois premières agglomérations de l’Europe. Très bon positionnement sur les sciences et technologies même si des agglomérations font mieux dans ce domaine. Par ailleurs, l’atout majeur de l’Ile-de-France est son dynamisme économique à travers l’organisation d’événements économiques et dans sa capacité à accueillir des sièges de groupes étrangers.

71

Région Score total Critères Score

partiel Commentaires

Population 324 Richesse économique 64 Emploi 256 Force de travail 676 Recherche et développement 576 Emploi à haute intensité de connaissances 484 Statistiques d’entreprise 16 Transport 100

Outer London

4ème position 3 280

Dynamisme économique 784

Positionnement correct sur de nombreux points avec un point fort sur son dynamisme économique

Population 100 Richesse économique 100 Emploi 400 Force de travail 484 Recherche et développement 324 Emploi à haute intensité de connaissances 784 Statistiques d’entreprise 16 Transport 196

Sussex

5ème position 3 188

Dynamisme économique 784

L’attractivité du East and West Sussex porte essentiellement sur la qualification des emplois à haute intensité de connaissance et son dynamisme économique porté à l’international.

Population 196 Richesse économique 100 Emploi 256 Force de travail 400 Recherche et développement 400 Emploi à haute intensité de connaissances 676 Statistiques d’entreprise 36 Transport 196

Bedford

6ème position 3 044

Dynamisme économique 784

La région de Bedford détient les mêmes atouts que le Sussex : ses emplois à haute intensité de connaissance et son dynamisme à l’international.

72

Région Score total Critères Score

partiel Commentaires

Population 324 Richesse économique 100 Emploi 400 Force de travail 256 Recherche et développement 256 Emploi à haute intensité de connaissances 144 Statistiques d’entreprise 36 Transport 36

Utrecht

7ème position 2 524

Dynamisme économique 196

L’Utrecht, en 7ème position, a des qualités d’attractivité sur chacun des critères, sans pour autant en faire des atouts et en dégager une force.

Population 100 Richesse économique 100 Emploi 196 Force de travail 400 Recherche et développement 400 Emploi à haute intensité de connaissances 324 Statistiques d’entreprise 16 Transport 144

Essex

8ème position 2 464

Dynamisme économique 784

L’Essex a un atout majeur : son dynamisme économique porté à l’international en accueillant des entreprises et instituts bancaires étrangers.

Population 100 Richesse économique 36 Emploi 196 Force de travail 324 Recherche et développement 324 Emploi à haute intensité de connaissances 256 Statistiques d’entreprise 16 Transport 144

Kent

9ème position 2 180

Dynamisme économique 784

Le Kent a un atout majeur : son dynamisme économique porté à l’international en accueillant des entreprises et instituts bancaires étrangers.

Sources : EUROSTAT et Etude DATAR : « les villes européennes : analyse comparative », 2002

73

Tableau des indicateurs des critères de quatre régions BE1 BE24 BE31 DE72 DE71 DEA1 DEA2 NL31 NL32 NL33

Hab/Km² 1999 5913,60 480,30 318,60 197,40 498,50 995,60 578,00 809,20 944,20 1181,80

Taux d'accroissement

naturel de la population pour

1000 Hab 99

2,72 0,99 2,30 -0,28 0,11 -1,96 0,31 5,62 3,98 3,51

Taux d'accroissement

total entre 96 et 001,18 1,55 3,19 0,72 0,94 -0,49 1,79 3,48 2,02 1,95

PIB/ Hab en SPA 99 46179 23589 21222 20286 31218 25601 24864 31088 28363 25379

Tx de Croissance Moyen du PIB en%

entre 95 et 993,81 4,68 4,18 4,00 3,75 3,66 3,22 7,80 6,31 6,21

Tx de Chômage % du total 2000 11,08 2,87 6,50 6,29 5,22 8,07 7,12 2,14 2,87 2,74

Evolution Tx de Chô 96-00:Tx de croi annuel moyen

-5,670 -13,642 -5,029 -1,915 -3,042 -2,740 -2,355 -19,153 -18,363 -19,237

Population active: tx de croi annuel moyen 96-00

1,522 1,442 2,452 -0,034 0,284 0,240 1,196 2,352 1,412 2,461

Tx d'emploi des pers agées de 55 à 64 ans

en 200034,46 28,20 35,13 37,88 41,28 33,15 35,94 41,54 37,85 41,37

% de contrats CDD au printemps 2000 8,32 7,80 10,73 12,63 12,63 10,47 11,89 14,70 12,95 13,84

L'emploi dans les services % de

l'emploi total au printemps 2000

85,58 70,94 79,18 64,37 70,53 65,98 68,38 84,76 81,92 79,04

Nombre d'étudiants 95 95 95 95 95 95 95 95 95 95

Nombre de revue scientifique éditées 10 10 10 130 130 10 10 500 500 500

Nombre d'unités de recherche publiques

et privées610 610 610 610 610 610 610 610 610 610

Nbre de brevets par section dominante

200023 23 23 22 22 23 23 23 23 21

Demandes de brevet dans des secteurs

de haute technologie 2000 Total et par

million d'habitants

22,91 42,97 62,50 27,00 39,83 22,12 52,45 39,20 21,14 20,59

% de la pop(25 à 64) avec une formation de troisième degré

39 33 40 22 25 18 21 34 28 25

Part de diplômés d'études supéreures

en science et technologie dans les 20 à 29 ans en 2000

9,70 9,70 9,70 8,20 8,20 8,20 8,20 5,80 5,80 5,80

Emploi en haute technologie:

industries manufacturière en %de l'emploi total

1999

7 8 6 12 14 10 11 3 3 3

Emploi en haute technologie:

Services en %de l'emploi total 1999

4 5 5 3 4 3 4 6 4 5

Emploi en services à haute intensité de

connaissance 199945 42 40 31 36 30 32 46 45 42

Salaires et traitements par

personne employée 1999

30,6 28,7 30,4 30,8 39,1 35,9 37,3 26,8 27,1 28,4

Densité de l'emploi dans l'industrie

manufacturière 1999 Nbre de pers employées

parsurface KM²

291,3 22,3 14,2 15,9 36,5 74,1 39,3 35,2 42,9 46,2

Accessibilité de la région 120 120 120 120 120 120 120 120 120 120

Nombre de véhicules privés

pour 10 HAB5,02 5,21 4,61 5,39 5,67 4,98 5,08 4,20 3,86 3,78

Trafic aérien de passagers (en

millions)30 30 30 50 50 110 110 30 30 30

Niveau de diversité industrielle 6 6 6 4 4 8 8 6 6 6

Nombre de sièges sociaux des grands groupes européens

20 20 20 30 30 0 0 30 30 30

Nombre de banque internationales 150 150 150 500 500 150 150 150 150 150

Nombre annuel de congrés

internationaux200 200 200 300 300 80 80 130 130 130

Nombre de Foires et de salon

internaionaux25 25 25 75 75 75 15 50 50 50

TRANSPORT

Dynamisme économique à l'international

Qualité de l'emploi à haute intensité de connaissances

STATISTIQUES STRUCTURELLES D'ENTREPRISES

PRODUIT INTERIEUR BRUT REGIONAL

CHOMAGE REGIONAL

Rhin-Ruhr(Münster Weser-Ems)DarmstatdBruxelles Randstad

POPULATION

FORCE DE TRAVAIL

Recherche et Développement

74

Tableau des indicateurs des critères de quatre régions IDF Pays de la Loire Rhône-Alpes LombardieFR1 FR51 FR71 IT2 UKH2 UKH3 UKJ1 UKJ2 UKJ4 UKI1 UKI2

Hab/Km² 1999 912,60 100,70 129,50 379,00 558,40 440,20 368,60 474,90 425,00 8789,60 3537,00

Taux d'accroissement

naturel de la population pour

1000 Hab 99

8,39 3,71 4,59 -0,57 3,61 1,05 4,35 -0,81 0,82 8,24 4,45

Taux d'accroissement

total entre 96 et 00-0,44 2,74 1,23 1,58 3,06 2,47 3,12 3,43 2,34 3,85 2,21

PIB/ Hab en SPA 99 32801 18547 21788 28959 22819 19972 27846 22468 19980 51392 18635

Tx de Croissance Moyen du PIB en%

entre 95 et 993,68 3,80 4,11 4,49 6,87 7,04 7,09 7,78 5,44 6,09 6,49

Tx de Chômage % du total 2000 8,67 7,64 8,61 4,48 2,71 3,73 1,92 2,58 4,12 10,59 4,86

Evolution Tx de Chô 96-00:Tx de croi annuel moyen

-5,140 -9,037 -5,016 -0,511 -20,158 -11,923 -18,648 -17,873 -11,773 -9,546 -14,312

Population active: tx de croi annuel moyen 96-00

0,989 1,972 -1,162 0,774 0,417 0,596 1,756 0,972 0,225 0,682 0,897

Tx d'emploi des pers agées de 55 à 64 ans

en 200038,48 23,45 32,50 21,85 59,61 54,21 62,48 59,12 53,17 46,48 53,56

% de contrats CDD au printemps 2000 11,80 18,30 15,78 6,67 6,11 6,11 6,73 6,27 5,28 10,89 7,33

L'emploi dans les services % de

l'emploi total au printemps 2000

80,21 61,78 65,86 58,14 73,92 74,14 75,74 78,45 73,30 87,60 84,26

Nombre d'étudiants 350 50 95 350 350 350 350 350 350 350 350

Nombre de revue scientifique éditées 130 2 10 10 500 500 500 500 500 500 500

Nombre d'unités de recherche publiques

et privées2350 300 400 610 1500 1500 1500 1500 1500 1500 1500

Nbre de brevets par section dominante

200028 22 23 22 21 21 27 21 23 27 27

Demandes de brevet dans des secteurs

de haute technologie 2000 Total et par

million d'habitants

77,67 4,05 43,44 17,48 52,39 42,90 68,41 35,77 8,37 44,25 19,49

% de la pop(25 à 64) avec une formation de troisième degré

33 17 24 9 28 18 34 30 21 37 27

Part de diplômés d'études supéreures

en science et technologie dans les 20 à 29 ans en 2000

19,60 19,60 19,60 5,70 16,20 16,20 16,20 16,20 16,20 16,20 16,20

Emploi en haute technologie:

industries manufacturière en %de l'emploi total

1999

7 8 9 12 9 8 10 6 7 2 4

Emploi en haute technologie:

Services en %de l'emploi total 1999

6 3 4 3 6 4 8 7 3 6 6

Emploi en services à haute intensité de

connaissance 199945 31 34 26 41 43 45 47 41 59 48

Salaires et traitements par

personne employée 1999

30,7 21,7 24,2 18,8 27,2 26,0 28,2 25,7 26,0 26,0 26,0

Densité de l'emploi dans l'industrie

manufacturière 1999 Nbre de pers employées

parsurface KM²

47,5 8,0 11,0 52,6 39,4 25,8 25,2 22,3 23,2 23,2 23,2

Accessibilité de la région 150 5 120 120 120 120 120 120 120 120 120

Nombre de véhicules privés

pour 10 HAB4,63 4,92 5,19 5,57 4,84 4,47 5,15 4,71 4,25 3,63

Trafic aérien de passagers (en

millions)110 1 10 30 110 110 110 110 110 110 110

Niveau de diversité industrielle 8 6 8 6 2 2 2 2 2 2 2

Nombre de sièges sociaux des grands groupes européens

60 0 0 20 60 60 60 60 60 60 60

Nombre de banque internationales 500 150 150 500 500 500 500 500 500 500 500

Nombre annuel de congrés

internationaux300 50 130 130 300 300 300 300 300 300 300

Nombre de Foires et de salon

internaionaux85 15 15 85 85 85 85 85 85 85 85

TRANSPORT

Dynamisme économique à l'international

Qualité de l'emploi à haute intensité de connaissances

STATISTIQUES STRUCTURELLES D'ENTREPRISES

PRODUIT INTERIEUR BRUT REGIONAL

CHOMAGE REGIONAL

Great London

POPULATION

FORCE DE TRAVAIL

Recherche et Développement

75

La très forte présence aux tous premiers plans de la compétitivité des agglomérations londonienne est un fait marquant de cette étude. Il est à noter que quelle que soit la méthode d’approche que l’on retienne, le positionnement stratégique de l’Ile-de-France reste toujours très attractif et compétitif. Dans l’étude conduite dans ce rapport, la région francilienne intervient au troisième rang.

Le profil du Grand Londres

L’industrie ne tient plus qu’une place mineure (elle est deux fois inférieure à celle que l’on trouve dans l’ensemble du Royaume-Uni. Cet ensemble complexe, baptisé de « Grand Londres » est caractérisé par une forte présence des services à forte valeur ajoutée : 32% de la population active de Londres travaille dans le secteur de la « Finance, de l’assurance et de la Banque », alors que cette proportion est inférieure à 20% pour l’ensemble du pays. En dehors de cette spécialisation qui a fait la réputation de Londres dans le monde entier, le « Grand Londres » possède une forte présence des métiers tels que : l’édition, la communication et les nouvelles technologies. On compte la présence de grands opérateurs de télécommunication. En matière de transport, Londres est la ville la plus accessible au monde par le transport aérien : London Heathrow est emprunté par plus de 53 millions de passagers ce qui en fait l’un des aéroports internationaux les plus importants. L’Inner London est la région qui compte le plus grand nombre d’entreprises (autour de 203 000 entreprises) dont une large part est dans les métiers de la finance au sens large du terme. La ville de Londres figure régulièrement dans le haut des classements internationaux des villes : Healey & Baker classe Londres depuis 11 ans consécutifs comme la ville de référence pour les affaires. Londres ne compte pas moins de 500 banques étrangères ce qui place la ville en première position dans le monde. Les principales entreprises françaises y sont présentes comme le rappelle le schéma ci-dessous.

76

Le profil de la Randstadt : une région mondialisée ouverte sur l’avenir

Depuis 1990, la RANSTADT connaît un fort accroissement de sa population, avec un taux de 7,8%, dont le quart dans la seule année de 1999. Cet accroissement s’est traduit par un phénomène de périurbanisation autour des quatre grandes villes de la zone : AMSTERDAM, ROTTERDAM, LA HAYE et UTRECHT. Cette croissance est notamment due à l’amélioration de la situation de l’emploi ainsi qu’à la politique nationale de développement économique reposant sur : - la modération salariale, - l’accroissement de la flexibilité du travail et du coût du travail pour les moins qualifiés, - un glissement de la politique de garantie des revenus aux sans emploi vers des politiques d’incitation à reprendre une activité, - développement des emplois à temps partiel, - développement des qualifications. Ainsi, la Randstadt a connu une croissance de ses emplois de plus de 22% sur 9 ans, soit deux points de mieux que l’ensemble des Pays-Bas. Cette forte croissance de l’emploi s’est traduit notamment par une importante tertiarisation de l’économie (environ 90% des emplois créés relevaient des services) : - services aux entreprises - services à la population (éducation, santé) - services financiers En 1999, les principaux secteurs d’activité de la Randstadt sont :

Les principaux secteurs d'activité de la Randstadt en % d'emplois

15,6

15,3

11

8,3

7,7

5,2

Commerce

Services aux entreprises

Industrie

Administrations publiques

Transports, logistiques ettélécommunications Secturs financiers

La Randstadt contribue à hauteur de 49% en 1998 au PIB néerlandais dont 30% sont générés par les services aux entreprises, 15 % par l’industrie et 19% par les services non marchands. Cette répartition de la contribution de la Randstadt au PIB national est significative du poids économique et démographique que cette zone peut représenter. Par ailleurs, rapporté à l’ensemble des secteurs d’activité du pays, en terme d’emploi, la Randstadt semble se spécialiser dans des secteurs à forte valeur ajoutée : services financiers, services aux entreprises et transports et communications.

77

1.6.7 Compétitivité de l’Ile-de-France : comparaison avec Rhône-Alpes et Pays de Loire

L’analyse qui suit a pour objet de situer le niveau de compétitivité des trois régions étudiées préalablement en terme de contribution à la richesse nationale et industrielle ainsi qu’en terme d’emploi. Ici, est étudiée, de la même manière que pour les agglomérations européennes, la compétitivité de ces régions sur un plan global. Classement des trois régions françaises selon leur niveau de compétitivité

Fort Moyen Faible

Population Pays de la Loire

Rhône-Alpes Ile-de-France

PIB Ile-de-France Pays de la Loire Rhône-Alpes

Chômage Pays de la Loire Rhône-Alpes Ile-de-France

Force de travail Rhône-Alpes Ile-de-France Pays de la Loire

Recherche et développement Ile-de-France Pays de la Loire Rhône-Alpes

Emploi à haute intensité de connaissance Ile-de-France Rhône-Alpes Pays de la Loire

Statistiques structurelles d’entreprises Ile-de-France Rhône-Alpes Pays de la Loire

Transport Ile-de-France Rhône-Alpes Pays de la Loire

Attractivité économique de la région Ile-de-France Rhône-Alpes Pays de la Loire

Ce tableau résume le positionnement de chacune des régions en fonction de leurs points faibles et de leurs points forts (voir tableau de notation en annexe 17). L’Ile-de-France, avec un total de 3 788 points sur une notation maximale de 7 488 points, présente un positionnement fort sur l’ensemble des critères stratégiques de la compétitivité d’une région : capital innovation et dynamisme économique à l’international. Dans le classement national, l’Ile-de-France est suivie par Rhône-Alpes. Le rating national attribue à cette région une notation de 980 points sur 7 488, ce qui la place loin derrière l’Ile-de-France. La région ne détient pas, sur ces critères de compétitivité de forces majeures comparativement à l’Ile-de-France. Cependant, on peut noter un bon positionnement sur deux d’entre eux : sa force de travail et ses transports. Avec un total de 696 points, la région Pays de Loire ne détient pas non plus de forces stratégiques majeures de développement économique et de compétitivité. Néanmoins, la région obtient de fortes notations sur les données structurelles de l’économie : population, taux d’activité et les statistiques structurelles d’entreprises, qui représentent la première base au développement de la compétitivité d’une région. On notera ainsi, la prépondérance de la région Ile-de-France sur des critères significatifs comme la recherche et le développement ainsi que le dynamisme économique orienté à l’international.

78

79

Deuxième Partie : LES SCÉNARIOS PRÉVISIONNELS D’ÉVOLUTION DE QUATRE FILIÈRES INDUSTRIELLES EN ILE-DE-FRANCE

Analyse prospective du devenir de l’Ile-de-France industrielle

80

1.7 La construction des scénarios

1.7.1 Méthode des scénarios

Cette partie du rapport est consacrée à la présentation des différents scénarios prévisionnels concernant l’évolution de quatre filières industrielles en Ile-de-France. Les scénarios présentés ci-après ont été construits à partir de 40 entretiens tenus en face-à-face avec des dirigeants de ces filières. Qu’est-ce qu’un scénario ? Pour dessiner les horizons prévisionnels, la méthode des scénarios a été retenue : elle consiste à construire un récit prospectif, cohérent et structuré dont l’objet est de dessiner des horizons futurs possibles ou probables. Le récit est essentiellement qualitatif. Le récit se construit à partir de facteurs stratégiques identifiés et classés en fonction de leur degré de motricité caractérisée par leur capacité à entraîner les autres facteurs dans un changement complexe que le récit essaie de décrire21.

Comment construire un scénario prévisionnel ? a) Le raisonnement par filière Définition : L’analyse a été conduite en s’appuyant sur la notion de « filière ». Cette manière de raisonner consiste à analyser un ensemble d’activités ayant en commun un produit (ou un ensemble de produits) en faisant ressortir l’ensemble des activités qui vont de l’amont par la fourniture d’équipements, à la fabrication et de la fabrication à la distribution. Chaîne de valeur d’une filière : La filière se schématise par une chaîne de valeur qui fait apparaître les liens que chaque maillon de la chaîne entretient avec les autres22. Ce schéma permet de comprendre la manière dont une filière fonctionne et tisse ses liens pour parvenir au produit. Le nombre de maillons indique le degré de complexité d’une filière. L’existence d’un noyau central permet de mesurer la force ou la faiblesse d’une filière. Les avantages d’une approche par la notion de filière : Cette approche par filière présente plusieurs avantages :

- La filière offre une vision globale : elle situe les activités dans une chaîne de valeur ; - La filière offre une meilleure appréciation des impacts : elle met en relief les impacts d’une

décision en faisant ressortir les conséquences que cette décision peut avoir sur l’ensemble des éléments de la filière. On apprécie mieux l’onde de choc d’une décision.

21 Cf l’article de Hugues de Jouvenel dans la revue Futuribles : « La démarche prospective : un bref guide méthodologique », Futuribles de novembre 1999 p. 47 et suivantes. 22 Cette analyse s’inspire des travaux essentiels provenant de Michael PORTER et notamment l’ouvrage de base : « Compétitive Strategy : techniques for analyzing indsutries and competitors » Free Press 1980.

CHAINE DE VALEUR DE L’INDUSTRIE AUTOMOBILE

CHAINE DE VALEUR DE L’INDUSTRIE AERONAUTIQUE ET AEROSPATIALE

Équipementiers électriques

ÉquipementiersPneumatique

Constructeurs

Système de distribution intégré et SAV

Équipementiers pièces courantes

ÉquipementierS

Avionneurs

Marché civil Marché militaire

Motoristes Systèmiers Sous-traitants

CHAINE DE VALEUR DE L’INDUSTRIE AGROALIMENTAIRE

CHAINE DE VALEUR DE L’INDUSTRIE TEXTILE, HABILLEMENT ET MODE

Ennoblissement

Préparation des fibres

Filature

Fabrication

Distribution

Tissage

Agriculture Pêche

Industries de première transformation: Produits alimentaires intermédiaires (ingrédients)

(rizeries, huileries, conserveries de poisson, abattage et découpe, etc.)

Grossistes

Industries de transformations assemblage, packaging, marketing

(production de plats préparés, de plats surgelés, etc.)

Grande Distribution Restauration Hors Foyer

Élevage

Les grands enseignements concernant les quatre filières étudiées : L’examen des schémas des chaînes de valeur fait ressortir les grandes différences et ressemblances qui peuvent apparaître entre les quatre filières étudiées.

- Les ressemblances : La filière « aéronautique aérospatiale » et la filière « automobile »

présentent beaucoup d’analogies en terme de structuration 23: o ce sont des filières très ramassées (petit nombre de maillons de la chaîne entre

l’amont et l’aval). Cette caractéristique indique clairement que les différents acteurs de la filière travaillent étroitement ensemble (travail collaboratif dans la conception et le développement). Il s’agit là incontestablement d’une force. Mais cette force contient en elle des faiblesses car toute perturbation d’un maillon de la filière induit une onde de choc importante de par la solidarité qui unit chaque maillon entre l’amont et l’aval.

o Ces filières sont concentrées autour d’un « cœur » (le constructeur) qui guide la stratégie de la chaîne et l’impulse vers le haut (ouverture internationale, exigence de qualité et de forte intégration, logique d’implantation territoriale). C’est aussi le cœur de la chaîne qui imprime la clé du succès, à savoir le travail collaboratif ;

o Les différents maillons de la chaîne sont composés à chaque niveau d’acteurs très puissants et ce, tout au long de la chaîne avec des équipementiers amont de rang 1 concentrés, travaillant en étroite liaison avec les constructeurs ;

o La chaîne est complète au sens où il n’y a pas de maillons manquants ou de maillons fragilisés.

- Les différences : Les deux autres filières sont au contraire plus fragiles mais à des degrés

divers : la plus fragilisée est certainement la filière « textile habillement cuir» qui a délocalisé une grande part de ses métiers dans des pays à faible coût. La filière comporte ainsi des maillons fragilisés ou manquants. La filière agro-alimentaire est quant à elle très fragilisée dans sa partie amont (abattoirs en difficulté dans les différentes filières de la viande), à l’exception d’industries très innovantes. Ces deux filières ont aussi en commun d’avoir une partie aval encore dynamique (confection ou distribution alimentaire).

b) Les entretiens avec les dirigeants des quatre filières industrielles Pour construire les scénarios et identifier les facteurs stratégiques d’une décision de localisation spatiale, une quarantaine d’entretiens a eu lieu entre fin-avril et début-juillet 2003 dans les quatre filières industrielles, présentes à des degrés divers, dans la région francilienne. Le tableau ci-après donne la répartition des personnes interrogées par grandes filières et selon la taille des entreprises interrogées (il est indiqué s’il s’agit d’une petite, d’une moyenne ou d’une grande entreprise, ainsi que la répartition des effectifs en France et en Ile-de-France). Il est à noter que les PMI n’ont pas été oubliées dans cette enquête. L’interlocuteur a presque toujours été le dirigeant ou une personne de haut niveau désignée par le dirigeant.

23 Il est vrai que ces deux filières ont beaucoup de points communs ne serait-ce que dans leur histoire et leur évolution ainsi que dans leur modalité économique (activités à forts investissements). Cette analogie explique très certainement que ces filières finissent par se structurer de manière analogue.

Typologie des entreprises interrogées par secteur et par taille entreprises interrogées entre avril et juillet 2003

Filière Taille de l'entreprise

CAmillions d'euros Effectifs Effectifs Ile-de-

France Fonction Zone d'emploi

Tout secteur Agence 100 100 Responsable de dévelopement Paris

Tout secteur GEI Directeur d'étude Paris

NA 4 200 4 200 Chef de département Roissy

6 900 40 000 Vice PDG Boulogne Billancourt

13,5 50 560 PDG Roissy

278 1 300 640 PDG Versailles

2 900 11 500 15 000 DREDRT Paris

NA Directeur Industriel RoissyPMI 0,3 40 40 PDG en départ Roissy

1 800 7 000 Nanterre

249 1 500 100 Président du directoire Poissy

36 140 000 28 000 SG Boulogne Billancourt

1 700 PDG Saint Ouen

57 192 500 Délégué aux relations extérieures

ParisPoissy

57 192 500 Responsable de l'ingénierie

ParisPoissy

1 10 10 PDG Versailles4,6 40 40 PDG Etampes

NA 60 Responsable commercial Melun

600 1 500 1 400 DG NanterreNA 360 PDG Créteil

NA Direction aménagement Saint denis

211 800 200 Directeur de site Paris10 130 824 DG Paris

2 830 2 685 PDG Saint Denis1 200 2 400 0 DI Paris2 800 1 500 Paris

69 400 Directeur de site Versailles6,1 17 PDG Nanterre212 3 000 150 DG France Saint denis2 15 15 PDG Coulommiers

0,2 60 DG Nanterre

13 60 60 DG Orly

64 530 200 DAF Roissy

1 200 5 000 DI Paris368 1 400 500 DAF Nanterre

6 000 50 50 PDG Saint Denis1,4 60 10 PDG ParisNA 25 PDG Créteil73,6 200 DAF ParisNA Chef de mission ParisNA 9 DG Paris1 35 35 PDG Paris

GEI

PMI

Textile

IAA

Automobile

Aéronautique et aérospatiale

GEI

GEI

PMI

GEI

PMI

Les entretiens visaient trois objectifs : - le passé : comprendre les évolutions spatiales des sociétés sur les dix dernières années avec les raisons qui les ont conduites à ces changements de localisation et les conséquences qui ont suivi ;

- un bilan de la situation actuelle : analyser les avantages et les inconvénients d’une présence francilienne et préciser les emplois existant aujourd’hui ;

- les perspectives d’avenir : enfin, tracer les lignes d’évolution à long terme de l’occupation spatiale de la région francilienne en intégrant les facteurs de décision et les impacts de ces décisions. c) Identification des facteurs de décision Les entretiens ont permis de comprendre les raisons des localisations spatiales des entreprises au sein de l’Ile-de-France et d’apprécier les facteurs de décision qui ont conduit une société ou un groupe, soit à se maintenir dans la région, soit à envisager une localisation hors de l’Ile-de-France, soit à restructurer ses localisations entre l’Ile-de-France et les autres régions de France ou de l’Europe. Les entretiens ont ainsi permis : - de réaliser une analyse structurelle du phénomène qui conduit une entreprise à envisager une mutation profonde de la localisation de ses activités ; - de comprendre les impacts de telles décisions sur les entreprises qui coopèrent avec celle qui décide de changer sa localisation. Des entretiens, sont ressortis une liste de facteurs de décision. Les facteurs de décision ont été regroupés en quatre grandes catégories :

- Les facteurs liés à l’environnement au sens large du terme : ce sont toutes les contraintes

liées à l’urbanisme, à la mixité entre la ville et l’habitat, à la qualité des infrastructures des zones d’activité.

- Les facteurs économiques : il s’agit de données économiques parfois exogènes que

l’entreprise intègre dans sa stratégie et qui déterminent sa politique de coût, de recrutement, ou de données locales telles que les taxes foncières, le coût des transports collectifs,…

- Les facteurs internes à l’entreprise : ce sont les facteurs qui conduisent à des politiques

d’optimisation des coûts et de rationalisation des sites : coût de la main-d’œuvre, coûts de transport et de logistique,...

- Les facteurs liés au marché : Il s’agit ici des facteurs concernant l’approche clients et

fournisseurs, la qualité de la main d’œuvre : tout ce que l’entreprise peut trouver sur ce marché comme moyens ou objectifs pour son activité.

Méthode de réduction des facteurs : Suite aux entretiens, une quarantaine de facteurs sont apparus. De cette liste de départ, il a été jugé nécessaire de réduire le nombre des facteurs pour en comprendre la complexité, en les regroupant par grands thèmes et ainsi de ramener la problématique à des facteurs clés en abandonnant les facteurs à impact faible. C’est ainsi que 23 facteurs clés de décision ont été mis en évidence : ces facteurs proviennent d’une analyse approfondie des décisions que les entreprises industrielles ont prises et de la manière dont ces facteurs peuvent jouer pour des décisions futures en terme de motricité ou d’inertie. Ces critères, décrits ci-dessous, correspondent à 4 grandes thématiques.

1. Les facteurs liés à l’environnement Cadre de vie de l’Ile-de-France : ensemble des caractéristiques du cadre de vie de la région Ile-de-France. Cadre légal et fiscal : éléments de la politique fiscale et légale de la région. Contraintes réglementaires : respect de l’environnement dans un contexte urbain contraignant : gestion des déchets, traitement des nuisances sonores, nuisances olfactives,etc. Notoriété de Paris : Paris, capitale de la France, et centre de la région Ile-de-France, représente aussi le « cœur économique » du pays. Sa notoriété est au centre de nombreuses stratégies de localisation. Qualité des infrastructures : les réseaux de transports en commun et les réseaux routiers sont des déterminants de la qualité des zones d’emploi. Qualité des relations avec les zones d’implantation : l’implication des collectivités locales et leurs différentes actions pour maintenir ou attirer des entreprises peuvent être un facteur important dans la décision de localisation d’une industrie. 2. Une logique de marché Potentiel du marché : être localisé en Ile-de-France assure une proximité du marché et une réactivité par rapport aux fluctuations de la demande. Proximité des grands clients : un fournisseur industriel peut choisir sa localisation en fonction de la situation géographique de ses grands clients et ainsi intégrer sa logique de développement spatial. Proximité des grands fournisseurs : dans le cadre d’une relation quasi-exclusive entre un fournisseur et son client, le client peut choisir sa situation géographique en fonction de celle du fournisseur. Qualité de la main-d’œuvre : la région parisienne, du fait de sa forte concentration d’universités et d’écoles supérieures, offre un bassin d’emploi qualifié, facilitant ainsi le recrutement. Image de la zone : certaines zones d’emploi sont fortement spécialisées sur des métiers appartenant à une même chaîne de valeur. 3. Une logique interne à l’entreprise Poids de l’histoire : certaines entreprises industrielles, historiquement implantées en Ile-de-France, mais souhaitant se délocaliser, choisissent de conserver leur positionnement régional afin de maintenir les emplois et leur image auprès de leurs clients. Capacité d’intervention de l’actionnariat : les actionnaires participent aux décisions stratégiques d’une entreprise, et choisissent ainsi son positionnement géographique. Poids des investissements / Cycle des activités : les industries lourdes en terme d’investissement, lors de leur choix de localisation, doivent prendre en compte le coût de déménagement d’un site industriel. Possibilité d’extension : l’espace autour d’un site industriel entre en ligne de compte pour anticiper les possibilités d’extension d’une industrie. Le manque d’espace peut justifier une délocalisation. Pression syndicale : les industries manufacturières sont composées de main-d’œuvre souvent syndicalisée. Les revendications et le poids des conflits peuvent y être forts et motiver ainsi une délocalisation. 4. Une logique de rationalisation des activités Coût de la main d’œuvre : les coûts salariaux interviennent dans une stratégie d’implantation surtout si l’entreprise s’interroge sur le type d’emplois qu’elle souhaite maintenir ou délocaliser. Existence d’un pôle alternatif : émergence de sites suivant une logique de développement de l’excellence et pouvant être une alternative aux pôles franciliens (pôles européens, pôles régionaux). Forte Valeur Ajoutée des activités : certaines entreprises industrielles décident de délocaliser les activités de production pour ne conserver sur le site principal que les activités à forte valeur ajoutée ou de répartir les sites par grandes fonctions de l’entreprise (Production, R&D, Corporate, etc). Pôle d’excellence : l’existence de pôles d’excellence peut motiver une entreprise à se délocaliser sur ce pôle afin de bénéficier d’effets de synergie et de cohésion de la chaîne de valeur. Optimisation des coûts : la délocalisation d’un ou plusieurs sites peut suivre une logique de regroupement des industries sur un seul site pour réaliser des économies d’échelle et optimiser les coûts de fonctionnement de l’entreprise. Rationalisation des activités : la délocalisation peut répondre à une logique de rationalisation des activités en terme de :

- spécialisation : abandon de certaines activités et sites pour se spécialiser sur un ou plusieurs métiers

- optimisation des coûts : regroupement des sites pour réaliser des économies d’échelle - optimisation de la chaîne de valeur : se concentrer sur les activités à haute valeur ajoutée.

d) Notation des liens et de leur intensité (Matrice des impacts croisés) L’objectif de cette phase consiste à apprécier l’influence que chaque facteur clé entretient avec les autres facteurs. Cette étape est essentielle car il s’agit de comprendre les liens qu’un facteur de décision peut avoir sur les autres facteurs :

• Existe-t-il bien une influence directe du facteur A sur le facteur B, ou bien la relation est-elle inverse de B vers A ?

• Existe-t-il une relation de colinéarité : une troisième variable C agit sur A et B ? • La relation de A à B est-elle directe, ou bien passe-t-elle par l'intermédiaire d'un autre

facteur clé ? Pour déterminer ces liens complexes entre les facteurs de décision, la technique la plus classique consiste à disposer, sous la forme d’une matrice, les facteurs moteurs et dépendants. Ce procédé est nécessaire, car une décision stratégique met en œuvre un nombre plus ou moins important de facteurs qui vont agir selon des processus complexes. Cette méthode atténue une vision trop intuitive. Cette étape a donc pour objectif de modéliser les interactions des facteurs. Les facteurs sont regroupés en deux catégories : en fonction de leur motricité et de leur dépendance.

- Facteur de motricité (ou de mobilité) : Ces facteurs ont été dénommés « Facteurs de motricité » car ils possèdent une capacité à entraîner (donc à jouer un rôle moteur) d’autres facteurs, rendant possible la mise en œuvre de décisions stratégiques importantes. Par exemple, l’évolution des contraintes réglementaires en Ile-de-France (relatives à la protection de l’environnement) est un facteur ayant une forte motricité car le durcissement des règles du jeu dans ce domaine accentue la probabilité de décisions de délocalisation en dehors de la région francilienne.

- Facteur de dépendance (ou d’inertie) : Ces facteurs sont qualifiés de « dépendants » dans la mesure où ils dépendent des autres facteurs ; ce sont les facteurs moteurs qui influent sur eux et qui conduisent les entreprises à des décisions stratégiques qui peuvent avoir des incidences sur la localisation. La rationalisation des activités au sein d’une zone géographique est un facteur de dépendance car il est lié à d’autres facteurs (coûts fonciers par exemple) plus en amont dont ils dépendent mais il peut conduire l’entreprise à prendre une décision qui serait par exemple de réduire le nombre de ses sites.

Cette modélisation permet donc de mesurer deux paramètres importants : • Le nombre de liens qu’un facteur donné entretient avec les autres facteurs. Un facteur

qui entretient de nombreux liens avec les autres préfigure l’importance qu’il aura ; • L’intensité de chacun de ces liens : Une fois établis les liens qu’un facteur entretient

avec les autres, l’intensité est notée de facteur à facteur sur une échelle d’intensité allant de 0 à 3 (niveau 0 : il n’y a aucun lien ; niveau 1 : intensité faible ; niveau 2 : intensité moyenne mais non négligeable ; niveau 3 : intensité forte).

Le principe de la notation des facteurs clés de décision : La notation doit être faite avec soin et nécessite souvent plusieurs « passages » afin de s’assurer de la cohérence des liens analysés et de l’objectivité dans la notation de l’intensité des liens. La notation est faite en se posant la question : « Ce facteur « A » a-t-il une influence sur le facteur « B », si oui, quelle est l’intensité de ce lien ? ». Cette question est ainsi posée à chaque facteur. On mesure ainsi le soin qu’il convient d’accorder à cette notation. Au final, on obtient une matrice donnant : - en ligne, le total des points obtenus. Ce nombre indique le degré de motricité d’un facteur. - en colonne, le total des points indique le degré de dépendance d’un facteur. De ce fait, chaque facteur est identifié selon deux coordonnées : le niveau de motricité et le niveau de dépendance. Cette méthodologie est classique dans la détermination des scénarios. Elle fait partie des outils auxquels les prévisionnistes ont recours pour définir les horizons possibles du futur24.

24 voir sur ce point, la revue « Futuribles » n°179, article déjà cité de Hugues de Jouvenel : « Sur la démarche prospective. Un bref guide méthodologique ». novembre 1999. Vois notamment les pages 56 et suivantes.

Matrice de motricité – dépendance des facteurs de mobilité des industries d’Ile-de-France

1 2 3 4 5 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23

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1 Qualité des infrastructures 3 0 0 1 0 3 2 0 2 0 0 2 1 0 0 0 3 3 2 2 3 272 Cadre de vie de l'ile-de-France 0 0 0 1 2 3 2 3 1 0 0 0 2 0 0 1 0 0 2 0 0 173 Cadre légal et fiscal 2 1 0 3 3 2 3 2 3 0 0 0 1 0 0 0 1 1 2 2 3 294 Contraintes réglementaires 0 2 1 1 3 2 2 2 3 0 0 3 0 2 0 2 2 2 1 3 2 335 Coût de la main d'œuvre 0 2 0 0 3 2 3 2 3 0 0 3 2 0 1 2 0 0 2 0 3 287 Existence d'un pôle alternatif 0 1 1 0 2 3 3 0 1 0 0 0 3 0 0 1 0 0 2 0 3 208 Image de la zone 0 2 2 2 2 2 2 2 1 2 2 0 3 1 1 0 1 2 3 2 0 329 Forte Valeur Ajoutée des activités 2 2 0 0 3 1 3 3 3 2 0 2 3 1 0 1 2 2 3 2 3 38

10 Notoriété de Paris 3 3 2 3 3 2 3 3 2 2 3 0 2 3 3 1 3 3 3 3 2 5211 Optimisation des coûts 0 0 0 0 0 2 2 3 2 2 1 3 3 1 0 3 0 1 2 2 3 3012 Capacité d'intervention de l'actionnariat 1 0 1 1 0 0 2 2 0 2 2 2 1 0 0 1 0 1 0 1 3 2013 Poids de l'histoire 0 0 0 0 2 0 3 1 2 2 3 0 2 0 0 3 1 1 2 2 2 2614 Poids des investissements / Cycle d'activité 1 0 0 0 0 0 0 1 0 3 1 3 1 0 0 1 0 0 1 1 3 1615 Pôle d'excellence 1 1 1 1 1 1 3 3 0 2 1 0 2 0 1 0 2 3 2 2 3 3016 Possibilité d'extension 0 0 0 0 0 2 1 1 1 2 0 0 3 1 0 1 0 1 0 3 3 1917 Potentiel du marché 0 0 0 0 0 3 1 0 3 1 1 0 3 2 0 1 1 2 1 1 1 2118 Pression syndicale 0 0 0 0 3 1 2 2 2 3 2 3 1 1 0 0 0 0 2 2 3 2719 Proximité des grands clients 0 0 0 0 0 3 2 1 0 3 0 1 2 2 0 3 1 2 1 1 3 2520 Proximité des grands fournisseurs 0 0 0 0 0 1 2 1 0 3 0 0 2 2 0 0 1 1 0 1 3 1721 Qualité de la main d'œuvre 2 1 1 0 3 1 3 3 1 3 1 2 2 2 0 0 2 1 0 2 3 3322 Qualité des relations avec les zones d'implantation 1 1 1 0 0 2 2 0 0 0 0 2 1 0 3 0 0 1 1 0 1 1623 Rationalisation des activités 0 0 0 0 2 2 1 3 0 3 2 0 3 2 0 0 3 3 2 0 2 28

13 19 10 7 27 34 45 41 25 46 19 19 34 36 11 9 25 22 27 31 34 50 584

Matrice de Motricité - Dépendance des facteurs de mobiltié des Industries d'Ile de France

Dépendance

Motricité

e) Regroupement des facteurs par thème (graphique Mode) Une fois la matrice obtenue, celle-ci est stabilisée en portant au carré ou au cube la notation de l’intensité des liens. Ce procédé s’applique à chaque notation (on obtient en bout de ligne ou en bout de colonne la somme des carrés et non le carré de la somme). Ce procédé présente l’avantage de faire ressortir les liens à forte intensité au détriment des liens d’intensité 2 et d’intensité 1. Ce procédé permet d’inscrire chaque facteur sur un graphique selon les axes « motricité / dépendance » et de les positionner selon leurs coordonnées. Le graphique ci-dessous donne le nuage de points on est parvenu par la notation des facteurs de décisions stratégiques de dirigeants. Les différentes coordonnées génèrent des points qui s’agglomèrent selon des logiques qu’il appartient ensuite d’interpréter.

Motricité - Dépendance des facteurs de localisation pour quatre filières industrielles en Ile de France

Existence d'un pôle alternatif

Image de la zone

Forte Valeur A joutée des activités

Notoriété de Paris

Optimisation des coûtsPôle d'excellence

Rationalisation des activités

Cadre de vie de l' ile-de-France

Cadre légal et fiscal

Contraintes réglementaires

Coût de la main d'œuvre

Capacité d' intervention de l' actionnariat

Poids de l' histoire

Poids des investissements / Cycle d'activité

Possibilité d'extension

Potentiel du marché

Pression syndicale

Proximité des grands clients

Proximité des grands fournisseurs

Qualité de la main d'œuvre

Qualité des relations avec les zones

Qualité des infrastructures

0

1000

2000

3000

0 500 1000 1500 2000 2500 3000Dépendance

Mot

ricité

Ce graphique révèle ainsi deux nuages de points, répondant chacun à une logique, c’est le principe même du scénario :

- Le premier nuage de points (droite) comprend des facteurs liés à l’optimisation des coûts et à la rationalisation des activités.

- Le deuxième nuage de points (gauche) regroupe deux grands types de variables : des contraintes de nature réglementaire et environnementale. Ces critères sont tous moteurs et indiquent que leur variation dans le temps est susceptible de provoquer des mouvements de localisation. des contraintes répondant à une logique de spécialisation des entreprises autour soit d’un métier, soit de pôles d’excellence.

Les deux scénarios retenus

Deux scénarios se constituent, chacun a été dénommé en fonction des variables qui le déterminent : Scénario 1 : Agir sur l’industrie francilienne par la constitution de pôles d’excellence. Scénario 2 : Agir sur l’industrie francilienne par la rationalisation des activités et optimisation des coûts. Il faut noter qu’un facteur s’écarte totalement des autres et n’entre dans aucune de ces logiques : la notoriété de Paris. En effet, située bien au-dessus des deux nuages de points, il semble que la notoriété de Paris soit un facteur implicite à chacun des deux scénarios dans le processus de décision. Il a été considéré comme tel dans la suite de ce travail.

1.7.2 Les hypothèses socio-économiques sous-jacentes aux deux scénarios

Les deux scénarios décrits ci-après reposent sur des hypothèses économiques et démographiques implicites qu’il convient de commenter.

• Hyp1 : Croissance «douce» du PIB : autour de 2% par an Les scénarios prévisionnels s’appuient sur une croissance future plutôt faible du PIB. Après consultation des travaux des prévisionnistes (INSEE, OCDE, REXECODE), il a semblé raisonnable de retenir une croissance modérée du PIB de la France et de la région qui suit largement l’évolution nationale. Le taux qui revient le plus souvent de la part des prévisionnistes se situe autour de 1.9% à 2% par an. Cette hypothèse de croissance « douce » a été retenue, y compris pour le PIB de la région Ile-de-France, en estimant que l’Ile-de-France suivrait sensiblement la tendance du pays. Ce faible taux de croissance signifie que le tissu industriel francilien n’évoluera pas sous l’influence d’une croissance rapide de la région. Les scénarios sont donc placés dans une logique de progression et non dans une logique de fortes ruptures.

• Hyp2 : Faible évolution démographique de la région Ile-de-France Le recensement de 1999 a montré que la région Ile-de-France dans sa globalité n’était plus un pôle de croissance démographique : en 1990, la population de l’Ile-de-France atteignait 10.7 millions d’habitants ; en 1999, cette population n’atteignait que 10.9 millions d’habitants (INSEE recensement 1999). Cette évolution vers une croissance lente, apparaît comme une tendance de fond et il a été considéré que cette faible croissance démographique se poursuivrait pour atteindre une population de 11.3 millions en 2010 et 11.6 millions en 2020 25 et 12 millions en 2030. Cette évolution provient essentiellement du dynamisme naturel de la région (+0.7% par an).

Globalement, il a été retenu l’hypothèse selon laquelle le poids relatif de la région parisienne en terme de population avait atteint son apogée vers la fin des années 1970 (avec un taux de l’ordre de 18.8%) et que ce taux resterait sensiblement stable dans le temps26. Cette tendance se reflète aussi en terme de contribution à la richesse avec un léger fléchissement de cette contribution à travers le temps (le rapport entre PIB Ile-de-France / PIB France métropole baisse très sensiblement depuis une dizaine d’années et est aujourd’hui de l’ordre de 28%). Cela signifie que la disparité entre la région parisienne et le reste de la France tend très sensiblement à se résorber sur longue période.

• Hyp3 : L’Ile-de-France est moins marquée par le vieillissement que les autres régions

La région Ile-de-France est gagnée comme toute la France par le vieillissement de sa population. Cependant, les prévisions montrent que ce vieillissement se concrétiserait dans des proportions bien moindres dans la région que pour le reste de la France : à l’horizon 2030, la région Ile-de-France conserverait un âge moyen légèrement inférieur à 40 ans (taux de natalité plutôt favorable) avec encore une attractivité de la tranche des 20-29 ans. « Toutes les régions devraient être concernées par ce vieillissement. L’Ile-de-France serait de loin la moins touchée : la moyenne d’âge y gagnerait moins de 4 ans mais augmenterait deux fois moins qu’en Lorraine et Champagne Ardenne. Déjà parmi les plus jeunes régions de France en 2000 (avec le Nord Pas-de-Calais), l’Ile-de-France deviendrait en 2030 la seule région n’atteignant pas 40 ans d’âge moyen »27.

25 Cf DATAR, Aménager la France en 2020 Jean-Louis GUIGOU La Documentation Française 2000. INSEE Ile-de-France Septembre 2001 et INSEE « projections régionales à l’horizon 2030 » Chantal BRUTEL et Laure OMALEK, (INSEE Première) 26 Maurice CATTIN et Christophe Van HUFFEL Inégalités spatiales et développement économique : le cas français (1850-2000) 21-23 août 2002 37eme colloque de l’ASRDLF 27 Laure OMALEK et Chantal BRUTEL, Projections régionales de population pour 2030 : l’impact des migrations, INSEE PREMIERE, n°805, septembre 2001

Ce dernier point est important mais susceptible d’être remis partiellement en question. La qualité de vie en Ile-de-France est certainement le facteur clé capable de remettre en cause l’attractivité des classes d’âge les plus jeunes et les plus diplômées. Certains dirigeants lors des entretiens n’ont pas caché que nombre de salariés parmi les plus diplômés souhaitaient quitter la région pour se tourner vers des pôles alternatifs offrant une plus grande qualité de vie.

• Hyp4 :Persistance du déséquilibre Est-Ouest de la région francilienne

Globalement, la région Ile-de-France se caractérise par un déséquilibre persistant entre l’est et l’ouest de la région qui concentre davantage d’emplois, de qualifications et de richesses. La cartographie de l’implantation des plus grandes entreprises industrielles en Ile-de-France met en évidence cette séparation de plus en plus nette entre l’Est et l’Ouest, notamment pour les filières automobile et aéronautique / aérospatiale. Le problème est de savoir si cette tendance est modifiable ou non et s’il est opportun de retenir ou non ce déséquilibre comme une hypothèse de long terme. Plusieurs aspects doivent être pris en compte :

- l’offre à venir de bureaux : l’examen de l’offre de bureaux sur la période postérieure à 2000 (et qui se débouclera en 2004 et plus) montre que plus de la moitié de cette offre est à une distance proche du « triangle d’or »28 (entre 5 et 10 kms) et qu’une large partie de cette offre est drainée sur le pôle de La Défense (Puteaux, Courbevoie, Levallois, Nanterre) et sur le pôle du Val-de-Seine (Issy, Boulogne, Meudon), avec une ouverture sur le proche Est (Seine Saint Denis et Val-de-Marne)29 .

- les entretiens qui ont été conduits auprès des grands acteurs de la région ne permettent pas d’affirmer que cette bipolarisation de la région sera fondamentalement remise en cause.

Sur le long terme, est-il possible de maintenir cette hypothèse d’une polarisation vers l’Ouest ? Plusieurs arguments laissent penser que cette prééminence durera sur le long terme : la croissance de l’urbanisation de l’Ile-de-France sera plus modeste que par le passé (voir ci-dessus), la recherche des implantations va se porter sur les zones les plus dynamiques dont une large partie se trouve à l’Ouest. Cependant, il devrait y avoir des freins naturels à ce mouvement : le manque de réserves foncières sur cette partie de l’Ile-de-France, les coûts de plus en plus élevés du foncier, etc. Il semble qu’à long terme, le rôle prééminent de l’Ouest ne devrait pas être remis en question mais avec un rééquilibrage relatif vers l’Est parisien et sa propre périphérie. La montée de la zone de Marne-la-Vallée constitue une opportunité de rééquilibrage à long terme entre l’est et l’ouest sans remettre en cause la localisation de plus en plus à l’ouest des entreprises industrielles. Aujourd’hui la zone économique accolée à la ville nouvelle offre 107 000 emplois et s’affirme comme un pôle tertiaire : commerces, services aux particuliers, services aux entreprises, éducation santé et action sociale.

28 La notion de triangle d’or correspond aux trois arrondissements de Paris recueillant le plus grand nombre de sièges sociaux : 8ème, 17ème et 16ème en passant par la place de l’Etoile. 29 Note Rapide n°308, septembre 2002, IAURIF « Construction de bureaux 2000-2004 : l’attrait de la couronne parisienne ». Cette étude montre que les livraisons de bureaux en blanc de plus de 5 000 m² entre 2000 et 2004 se concentre à 67% sur Paris-Capitale et sur les Hauts-de-Seine.

• Hyp5 : Reconversion des friches industrielles et atténuation des poches de pauvreté Derrière cette bipolarisation de l’Ile-de-France se retrouvent les disparités liées aux anciennes zones industrielles qui, atteintes par le reflux des activités industrielles, souffrent de fortes disparités en termes de revenus, de taux d’emploi et de précarité. Il en est ainsi du Nord de l’agglomération parisienne : Ouest de la Seine Saint-Denis, boucle de Gennevilliers, Sud-Est du Val d’Oise30, Seine-Amont (Val de Marne). C’est le cas aussi d’autres territoires déséquilibrés par la croissance rapide de l’agglomération francilienne avec la politique des villes nouvelles : Trappes, Noisy-le-Grand, Cergy-Saint-Christophe. Cette tendance à la précarisation accrue n’a pas été retenue comme hypothèse des deux scénarios dans la mesure où, malgré l’importance des enjeux que ces territoires représentent, une prise de conscience a déjà engagé l’État à bâtir un plan d’action. Il a donc été estimé que les déséquilibres de niveau de vie que l’on note aujourd’hui dans la région francilienne ne s’accentueraient pas au point de faire intervenir des variables de ce type dans les scénarios d’évolution du tissu francilien.

• Hyp6 : Le développement en périphérie Les départements de la grande couronne devraient absorber la quasi-totalité de la croissance démographique de la région surtout pour le département de la Seine-et-Marne. En revanche, la population de Paris intra-muros devrait rester identique ainsi que la population de la première couronne. Ceci implique aussi que des villes situées à la périphérie de la région (Chartres, Pithiviers, Compiègne,....) devraient connaître un développement rapide et entrer dans le centre de gravité de la région et devenir une « troisième couronne ». Sur la période 1990-1999 les mouvements de population suivent le sens suivant : la ville-centre a cessé de perdre des effectifs, la banlieue voit sa population croître faiblement, seule la couronne péri-urbaine connaît une croissance significative de sa population31. La carte ci-après traduit ce phénomène de développement des liens entre l’Ile-de-France et les départements limitrophes, constituant ainsi une troisième et quatrième couronne. Le rayonnement de la région parisienne s’agrandit donc au-delà de son périmètre administratif.

INSEE Picardie Relais, n°112 – 2003, Frédéric Gilli.

30 IAURIF. « Note Rapide Territoires de l’aménagement » n°1 mai 2000. 31 Pascal BESSY-PIETRI Economie et statistiques n°336 2000 « Les formes récentes de la croissance urbaine ».

Les scénarios ont été construits avec l’idée sous-jacente d’un décalage de plus en plus fort entre la région administrative et la région économique qui s’étendrait jusqu’au bassin parisien. D’une manière plus générale, le problème est de savoir gérer des zones économiques qui ne concordent pas, au fil du temps, avec les zones administratives des communes et des départements. L’exemple le plus patent est celui de la zone de Roissy qui comprend l’aéroport et sa plate-forme économique. Trois départements peuvent légitimement revendiquer l’influence de cet aéroport sur l’économie de leur département. Le seul problème qui compte pour les franciliens est de savoir comment favoriser cette zone économique pour qu’elle contribue du mieux possible en termes d’emplois. Néanmoins, il sera nécessaire que les départements développent des initiatives de plus en plus fortes afin de coordonner des opérations d’implantations de grande envergure. Cet éloignement toujours plus important entre les résidents et les zones d’emploi conduit à des déplacements toujours plus importants en distance, ce qui accroît les besoins en infrastructures de transport. (ce point sera développé dans le scénario n°2).

Les logiques économiques sous-jacentes aux scénarios L’objectif étant de comprendre les facteurs qui conduisent à des changements de localisation, les entretiens ont permis de mieux comprendre les modalités des mutations spatiales. Le maintien ou non en Ile-de-France est le fruit d’une décision souvent complexe mais lorsque cette décision est prise, elle peut prendre dans la réalité des formes très différentes. Suite aux entretiens, les logiques ont été regroupées autour de deux grandes modalités : la délocalisation totale et la délocalisation partielle ou maîtrisée qui interviendront plus loin comme élément de compréhension des scénarios prévisionnels.

• Hyp7 : La délocalisation pure et simple (ou délocalisation totale) La forme la plus radicale de la mutation spatiale est la délocalisation pure et simple. Dans ce cas, l’entreprise ferme son site de production sur un espace bien défini (par exemple l’Ile-de-France) et, de manière concomitante, implante (ou transfère) soit dans une autre zone géographique que l’Ile-de-France, soit de manière plus radicale, hors de la France, un nouveau centre de production. Dans les deux cas, les emplois sont perdus pour la région. On peut parler de délocalisation. Toutefois, dans cette logique de « délocalisation », il faut distinguer deux stratégies de la part des entreprises : Stratégie 1 : l’entreprise décide de s’implanter dans une autre zone géographique (située à l’étranger) et réimporte les produits fabriqués dans la zone économique d’origine. Cette stratégie est synonyme de délocalisation. Stratégie 2 : l’entreprise ferme un site de production pour s’implanter dans un autre pays pour y vendre une part de sa production sur place et ainsi assurer le développement de son activité sur un marché étranger. Le résultat est le même pour la région de fermeture du site qui voit ses emplois supprimés. En revanche, on ne peut pas parler de délocalisation pour tous les emplois perdus car une partie de ces emplois est destinée à servir une population locale étrangère. Le problème est cependant plus subtil pour une entreprise qui décide de déplacer son siège social dans un autre pays. Comme la délocalisation a surtout concerné de la production physique, le mot délocalisation apparaît pour des délocalisations immatérielles plus insolite. Le secteur des carrosseries automobile : depuis quelques années, on voit apparaître sur certains marchés comme les carrosseries automobiles, une concurrence des Pays de l’Est, avec des faibles coûts de main-d’œuvre. Ainsi, certains carrossiers, devant la concurrence, ont fait le choix de se délocaliser en Europe de l’Est afin de profiter de cette main-d’œuvre à bas coût, pour non seulement desservir le marché local mais aussi réimporter les produits finis en France. Cette délocalisation a été d’autant plus motivée que les constructeurs automobiles eux-mêmes ont fait ce choix peu de temps avant. Le groupe EXXONMOBIL a en juin 2003 informé la presse que son siège social européen serait implanté en 2005 en Europe Centrale, ce qui se traduit par la disparition progressive du site de Rueil-Malmaison sur 5 ans. Les raisons de cette délocalisation ont été motivées par la rationalisation des coûts de fonctionnement des sièges européens, ainsi tous rassemblés en Europe centrale. Les divisions de supply chain, logistique, comptabilité, etc., sont dispersées dans les différents sièges sociaux des autres pays. Il y a bien là une délocalisation de type tertiaire avec une redéfinition spatiale des fonctions de l’entreprise à l’échelle européenne. Il faut ajouter que cette stratégie constitue véritablement un exemple dans la mesure où elle peut préfigurer des stratégies équivalentes et notamment dans des groupes étrangers implantés depuis longtemps en Ile-de-France.

• Hyp7bis : La délocalisation maîtrisée ou partielle Depuis le milieu des années quatre-vingt, les solutions retenues par les entreprises sont plus complexes et des modalités différentes de délocalisation peuvent se rencontrer. Le plus souvent, la délocalisation est maîtrisée ou partielle. Dans ce cas, certains maillons de la chaîne de valeur sont transférés dans une autre zone géographique. Les autres maillons demeurent dans la zone géographique initiale avec des recompositions d’emplois (conservation d’emplois qualifiés). Le schéma de délocalisation partielle est fréquent et se déroule selon un mécanisme à peu près identique :

- les emplois liés à la conception (de la recherche appliquée à la mise au point du prototype) restent dans la zone géographique de départ, qui est souvent une grande agglomération.

- Les emplois de mise en série (production) sont réalisés dans une autre région (qui peut être hors de France).

Il y a bien délocalisation partielle car des emplois (ceux de la fabrication avec des emplois qualifiés directement associés) ne seront plus comptabilisés dans la région d’origine. Il y a globalement perte d’emplois pour la région mais compensée par le maintien d’emplois de haute qualification et, le cas échéant, la recomposition des emplois vers le « haut » (concentration des efforts de R&D par exemple). Dans tous les cas, les activités liées aux fonctions « support » (administration, forces commerciales,..) restent dans la région d’origine. Il s’agit là d’une délocalisation partielle car des parties de la chaîne de valeur sont conservées dans le lieu d’origine de l’entreprise. Cette délocalisation « partielle » est très représentative de la logique que suivait la filière du Textile, Habillement, Mode encore bien implantée en région parisienne au début des années soixante-dix. La région parisienne et plus précisément le centre de Paris représentaient le coeur du secteur Textile. Au début des années soixante-dix, les entreprises de Textile, pour résister à la concurrence, ont cherché à diminuer leur coût de production, ce qui les a amenés à délocaliser leurs activités de production pour les implanter hors de l’Ile-de-France, voire hors France : à l’époque, les pays du Maghreb ont bénéficié de cette nouvelle logique de délocalisation, puis plus tardivement les pays d’Asie ou l’Inde. Aujourd’hui les seuls emplois qui subsistent dans la confection sont soit le fait de petits ateliers souvent tenus par des artisans issus de l’immigration, soit le fait d’industries du luxe qui affichent pour les marchés étrangers la marque « Paris ». Par ailleurs, les activités de conception et de design ont été conservées en région parisienne. Ce scénario de délocalisation partielle tel qu’il vient d’être décrit se réalise sous de multiples formes. La répartition entre phase de conception et autres phases du processus de fabrication : Quelle que soit la solution retenue, la stratégie reste la même : conserver sur la région francilienne les maillons stratégiques qui, parallèlement, correspondent à des activités à salaires élevés et qu’une agglomération importante comme l’Ile-de-France peut supporter. Parmi les activités stratégiques, on constate la volonté des entreprises de maintenir sur l’agglomération francilienne les activités placées en amont de la production : la recherche et développement et la conception jusqu’à la phase qui précède la production proprement dite. Une variante consiste souvent à conserver des activités d’assemblage post-production, alors même que la production a été délocalisée. Dans ce schéma, seule la fabrication est délocalisée et les pièces reviennent dans la région d’origine pour y être assemblées (contrainte de la proximité de la zone de consommation). Le groupe PEUGEOT a retenu cette logique et elle est classique pour la filière automobile. L’unité d’Aulnay en région parisienne qui compte aujourd’hui 5 440 salariés, est surtout chargée de l’assemblage pour certains types de véhicules : la Peugeot 106, la Saxo et la C3, alors que les pièces ont été fabriquées soit hors Ile-de-France, soit dans d’autres pays. La conséquence de cette logique est la suivante : la valeur ajoutée se concentre sur l’amont de la chaîne de valeur et sur les activités de services. Entre les deux, l’entreprise cherche soit à délocaliser, soit à externaliser (voir ci-après).

L’évolution du secteur Textile a montré, à partir du milieu des années quatre-vingt, que le processus de délocalisation ne suffisait plus à la filière. En effet, une nouvelle réflexion s’est portée sur la séparation entre les activités de production et les activités périphériques : un nouveau mode de gestion des activités a été, de plus en plus couramment appliqué : l’externalisation. Même les activités auparavant délocalisées ont été concernées. Ainsi, les entreprises textile qui produisaient dans des pays comme le Maghreb se sont entièrement séparées de cette production pour l’externaliser. Ce nouveau mode de gestion a profité à l’émergence de nouveaux pays vers le milieu des années quatre-vingt, comme les pays d’Asie. Externalisation partielle tout au long de la chaîne de valeur : Le schéma de délocalisation maîtrisée peut se complexifier par des externalisations partielles tout au long des activités composant la chaîne de valeur de l’entreprise. L’entreprise combine à la fois la délocalisation (selon un mode identique à celui envisagé précédemment) et l’externalisation, qui est une autre stratégie qui peut aboutir ou non à des transferts d’emplois. Une variante consiste à rechercher des ressources spécialisées dans la phase de fabrication mais sur des éléments du produit pour lesquels l’entreprise estime que sa valeur ajoutée est trop faible. Il n’y a plus nécessairement de délocalisation dans ce scénario. Par exemple, on confie la production de certains composants du produit à des entreprises spécialisées qui peuvent se porter acquéreurs des usines. Il n’y a pas de perte d’emplois pour la région car l’unité industrielle reste en place ; elle est simplement gérée par des professionnels spécialisés dans la production de l’élément en question. Il s’agit bien d’une externalisation car l’entreprise va chercher sur le marché des ressources complémentaires qui lui font défaut ou sur lesquelles d’autres font mieux (d’où l’expression « outsourcing » qui signifie bien « rechercher des ressources externes complémentaires »). C’est ainsi que des grandes entreprises vendent certaines de leurs unités de fabrication à des groupes plus spécialisés dont c’est le métier. Le groupe Alcatel a déclaré confier la fabrication des composants électroniques à des spécialistes. Ces partenaires autrefois sous-traitants de l’entreprise deviennent ses partenaires à part entière. Ces opérations permettent au groupe de se concentrer sur les phases plus amont et de porter ses efforts sur la recherche et développement. Le schéma de recherche permanente de la création de valeur peut se généraliser de la manière suivante : on ne conserve que ce que l’on sait bien faire et qui est stratégique ; le reste est soit délocalisé (avec des pertes d’emplois pour la région), soit «outsourcé» (sans qu’il y ait nécessairement de pertes d’emplois sur la région). Cette combinaison des logiques conduit à une évolution complète des activités de la filière tout au long de la chaîne de valeur avec un mouvement qui se précise : le client transfère vers l’entreprise industrielle les activités qu’il ne souhaite plus réaliser (on se tourne vers un prestataire plus spécialisé) et l’entreprise industrielle transfère vers ses fournisseurs les tâches qu’elle estime ne plus pouvoir accomplir. On assiste à chaque stade de la chaîne de valeur de la filière à un glissement progressif des compétences de l’amont vers l’aval. Les différentes stratégies retracées ci-dessus peuvent se schématiser au moyen de la chaîne de valeur décrite par Michael Porter dans son ouvrage « L’avantage concurrentiel » : les termes et schémas ont été repris de sa théorie. La chaîne de valeur de Michael Porter expose les activités d’une entreprise, qu’il classifiera d’activité principales ou de soutien en fonction du cœur de métier de l’entreprise. A partir des analyses d’évolution et faits historiques des entreprises industrielles depuis les années soixante-dix en première partie, deux constats peuvent être rappelés :

- les entreprises industrielles ont modifié dans le temps leurs modes de gestion de production et des services périphériques : elles se sont tout d’abord orientées vers une gestion dite de délocalisation jusqu’au milieu des années quatre-vingt pour se tourner vers une logique d’externalisation à partir du milieu des années quatre-vingt.

- Les activités délocalisées ou externalisées concernaient aussi bien la production que les services périphériques.

En rapportant cette évolution à la chaîne de valeur de M. Porter, on obtient les schémas suivants.

Chaîne de valeur jusqu’au milieu des années quatre-vingt

Activités délocalisées

Chaîne de valeur à partir du milieu des années quatre-vingt

Activités externalisées

Cette comparaison entre le mode de gestion avant le milieu des années quatre-vingt et après permet de constater que les entreprises industrielles sont capables d’externaliser toutes les activités de la chaîne de valeur pour se concentrer sur ce qu’elles estiment être leur cœur de métier. Dans cette stratégie de recherche de ressources extérieures, il n’y a pas de tabou et mêmes des fonctions à forte valeur ajoutée peuvent être externalisées si l’entreprise estime que cette opération lui amène de la flexibilité.

Infrastructure de l’entreprise

Gestion des Ressources Humaines

Développement Technologique Recherche et Développement

Approvisionnement

Logistique Interne

Production Logistique Externe

Marketing et Vente

Services

Marge

Activités principales

Activités de

soutien

Infrastructure de l’entreprise

Gestion des Ressources Humaines

Développement Technologique Recherche et Développement

Approvisionnement

Logistique Interne

Production Logistique Externe

Marketing et Vente

Services

Marge

Activités principales

Activités de

soutien

Exemples d’activités externalisables recensées par M. Porter Activités principales externalisables - Marketing et vente : l’industrie pharmaceutique fait appel à des forces de vente d’entreprises

spécialisées afin d’assurer la promotion des médicaments. - Logistique externe : la montée en puissance des logisticiens montre la volonté des entreprises

industrielles de laisser la gestion de leurs flux de livraison à des entreprises externes. - La production : cette activité est de plus en plus fréquemment délocalisée et/ou externalisée dans la

plupart des filières industrielles (Textile, Automobile, etc.). - Services : le terme de « services » recouvre de multiples facettes : nettoyage, maintenance, restauration

collective,…, plus communément appelés services opérationnels, gestion de la comptabilité, etc. Ces activités sont le plus fréquemment externalisées au sein des industries.

Activités de soutien externalisables - Approvisionnement : l’utilisation du e-procurement a facilité la gestion des achats des entreprises

industrielles. - Développement Technologique et R&D : le développement des sociétés de services d’ingénierie

informatique est représentatif de l’externalisation de ce service par les entreprises. IBM, Altran développent pour le compte des entreprises des solutions d’ingénierie informatique.

- Gestion des ressources humaines : le service de la « paie » est de plus en plus souvent externalisé à des entreprises spécialisées.

En définitive, les stratégies des entreprises combinent trois logiques économiques bien connues et que l’on retrouvera dans les scénarios qui seront développés plus loin :

- une logique d’optimisation des coûts qui raisonne en termes d’avantages comparatifs en privilégiant les zones géographiques à coûts bas avec des productivités acceptables et une qualité qui soient aux normes du groupe. Quand ces facteurs sont réunis, on délocalise sur des productions banalisées où les coûts ajoutés élevés de l’agglomération de départ ne peuvent se justifier compte tenu du prix du produit ;

- une logique de spécialisation qui consiste à se spécialiser sur les tâches que l’on sait le

mieux faire et de profiter au maximum des économies d’échelle que procurent le marché international ;

- une logique de chaîne de valeur qui consiste à ne retenir dans la chaîne de valeur que les

activités stratégiques et celles qui nécessitent de se maintenir à proximité d’une grande agglomération.

1.8 Présentation des deux scénarios prévisionnels

1.8.1 La notoriété de Paris

1.8.1.1 L’image de Paris dans la localisation des entreprises des quatre filières

Des différentes simulations provenant des scénarios, un facteur se détache par l’importance qu’il revêt : l’image de Paris. Cette problématique est au centre de la plupart des stratégies de localisation construites par les entreprises. S’implanter dans la capitale ou à proximité de la capitale, répond à plusieurs soucis et il convient en la matière de segmenter les situations. La nécessité d’une proximité avec le marché de consommateurs : Le cas le plus fréquent est celui de l’entreprise pour qui Paris et sa région sont une part importante de leurs débouchés. Pour ces entreprises, la contrainte d’une localisation dans la région ou dans la ville est une nécessité sinon, les coûts de livraison ou de distribution viennent alourdir les charges et compromettre la rentabilité de leur modèle économique. C’est l’effet classique d’agglomération et les économies d’échelle qui l’accompagne. Si l’on généralise, il s’agit de toutes les entreprises qui doivent se trouver à distance raisonnable de leur marché potentiel : c’est le cas des sociétés de distribution alimentaire du panel ou des sociétés de la confection qui estiment que la proximité de Paris ou leur présence dans Paris intra-muros est une nécessité. Dans l’industrie du luxe, la marque « Paris » (ou « Made in France ») est une valeur du développement de l’entreprise au point que la marque « Paris » n’est pas séparable de la marque de l’entreprise. Cette nécessité d’une présence francilienne concerne surtout les fonctions tertiaires, il n’est pas nécessaire que la production soit localisée sur la capitale ou la première couronne : les villes « avants-postes » jouent sur ce point un rôle essentiel. Mais dans l’industrie du luxe, la présence de certains métiers de production près de la capitale fait partie de la stratégie. Ce point a été mis en évidence de manière systématique lors des entretiens. Le groupe HEINEKEN par exemple dispose d’une dizaine d’entrepôts tout autour de la région parisienne qui lui appartiennent et qui assurent dans un délai optimum les livraisons dans la capitale. Cette contrainte est incontournable et la grande difficulté réside dans les encombrements qui caractérisent l’agglomération parisienne et dans le maintien d’une dizaine de « points noirs » qui subsistent depuis une quinzaine d’années32 en Ile-de-France. L’intégration dans la stratégie de l’image de Paris : En dehors de cette problématique qui répond à une nécessité vitale (être proche de son marché naturel), s’implanter dans la région où se trouve la capitale est considéré comme un élément important d’une stratégie de localisation. L’image que véhicule Paris et la notoriété qui la concerne tiennent donc une place non négligeable dans le choix de s’implanter ou non dans la région. Cette vision concerne aussi bien les sociétés françaises que les sociétés étrangères33 mais elle est surtout le fait de sociétés des métiers du luxe, de la mode ou de sièges sociaux de certaines entreprises industrielles.

32 Voir sur ce point l’étude réalisée par les CCI de l’Essonne, de Meaux, de Melun, de Paris, de Versailles, du Val-d’Oise et des Yvelines : « Création et aménagement des infrastructures de transport en Ile-de-France : les 6 priorités pour les entreprises » avril 2003. Publication de la CCI de Paris. 33 L’étude conduite par Matthieu CROZET et Thierry MAYER Jean Louis MUCCHIELLI confirme que les entreprises étrangères qui s’implantent en France le font en utilisant des critères des proches des entreprises françaises. Voir « How do firms agglomerate ? » Travaux de recherche de l’université de Paris I 2003.

L’exemple de Hermès est intéressant. Cette société consacrée aux métiers du luxe allie sa stratégie mondiale avec l’éclat de la capitale. Au sein de la capitale, le choix des implantations est symbolique : faubourg Saint-Honoré, Georges V, Hôtel Hilton et le terminal 2 de l’aéroport de Roissy. Les ateliers de sellerie à Pantin qui doivent s’étendre, suite à la disparition programmée des Grands Moulins de Pantin, s’inscrivent dans une même stratégie. L’atelier fonctionne sur l’image d’artisans réalisant des tâches artistiques. L’activité même de production de Hermès participe à la consolidation d’une stratégie globale du groupe. Ce dernier n’est pas séparable de la ville de Paris. On cherche ici le « made in Paris ». La recherche d’un bassin d’emplois qualifiés et diversifiés : Pour les entreprises fabriquant un produit complexe (automobile ou avion civil), la région parisienne est considérée comme un élément important de la stratégie car elle bénéficie d’une image positive pour la qualité de ses ingénieurs et de ses diplômés d’une façon générale (écoles de commerce). La bonne qualité du bassin d’emploi francilien en terme de qualification est fréquemment avancée par les responsables industriels. Ceci est surtout vrai quand l’entreprise installe ou étend ses fonctions tertiaires, ses fonctions d’ingénierie ou de R&D. L’Ile-de-France est considérée par beaucoup d’entreprises plutôt haute-technologie comme présentant des atouts importants. Ce qui compte alors, c’est la diversité de l’offre des diplômés. La qualité des écoles et des diplômés n’est pas remise en cause, au contraire, même si certaines entreprises estiment qu’il y a une trop grande dispersion et un manque de visibilité. Dans cette démarche, la localisation des entreprises dépend de la stratégie suivie par le groupe ; la proximité d’une grande école n’est pas une nécessité mais les partenariats conclus avec ces écoles sont une contrainte forte. Quant au choix des groupes étrangers, il est en grande partie lié aux stratégies des groupes français. La qualité du produit immobilier : ce critère occupe selon les professionnels de l’immobilier d’entreprises une place importante dans le choix des utilisateurs. L’immobilier est considéré comme un outil de travail qui doit être performant et flexible, doté de tous les moyens que la technique et la technologie actuelles mettent à la disposition des entreprises (câble haut débit, alimentation télécom, etc. La capitale jouit d’une bonne notoriété pour son tissu immobilier et notamment la partie de la capitale située dans le fameux « triangle d’or » qui reste très attractif pour beaucoup d’entreprises, malgré une nécessité de renouvellement du parc. Le poids de l’histoire : l’association de l’image de la région Ile-de-France à celle de l’entreprise est considéré comme un atout pour des entreprises installées depuis longtemps en Ile-de-France. Le poids de l’histoire pèse dans ce cas de manière symbolique avec un attachement fort à la région. Envisager de délocaliser, au-delà des calculs économiques, est une décision impliquant et relevant d’une autre logique. L’attachement est plus fort qu’on ne le croit et beaucoup d’entreprises préfèrent rester dans un quartier lié à leur histoire, plutôt que de migrer vers des zones apparemment plus rationnelles. Lors des entretiens, l’attachement de certaines entreprises à la localisation francilienne est apparue importante car elle constitue un pan de l’histoire de la société. Le groupe RENAULT attache un intérêt symbolique à sa présence à Boulogne-Billancourt qui constitue pour la société le point de démarrage des activités automobiles au travers de son fondateur au début du siècle. On retrouve cette perception dans des entreprises de l’aéronautique comme Dassault. Le siège de Saint-Cloud, en fin de rénovation, est aussi l’expression des débuts des activités de la société. Cet attachement historique se retrouve dans des entreprises moins médiatiques. Une entreprise comme Fould Springer leader mondial des produits dérivés de la levure naturelle est présente à Maisons-Alfort depuis près de 130 ans.

Paris comme choix dans une économie de plus en plus globalisante : Mais les économies sont de plus en plus ouvertes et implanter son siège social, son centre de R&D en Ile-de-France, pour des entreprises très mondialisées, est le fruit d’une réflexion approfondie où Paris et sa région sont mises en concurrence dans une approche de type séquentiel. La démarche va considérer en premier lieu le pays, puis vient en second rang la région la plus optimale, puis en troisième lieu la ville et enfin en dernier lieu le terrain où s’implanter. L’attractivité ou non de Paris entre au second plan de la décision34. Il s’agit là d’un axe de réflexion tout à fait majeur. Pour des marchés très globalisés, l’unité de mesure est le territoire et la question la plus pertinente est de savoir si le positionnement par rapport aux principaux clients est le bon. Ceci implique qu’il ne peut y avoir de rente de situation : toute activité, même à forte valeur ajoutée, peut être délocalisée, dès lors que cette délocalisation est créatrice de valeur. Cette opinion a été émise par certains équipementiers de l’aéronautique qui choisissent leur localisation en fonction d’un critère fondamental qui est la proximité du client (par exemple Airbus). Dès lors, s’installer près de l’aéroport de Roissy, ou près de Toulouse ou près de Hambourg, est entièrement lié à l’endroit où les pièces qui sont fournies par l’équipementier en question seront assemblées. Si un changement intervient de la part du client (changement du lieu d’assemblage par exemple), une décision de délocaliser peut être prise. Cette manière de raisonner est de plus en plus fréquente dans les secteurs où la fabrication du produit surtout lorsqu’il est complexe, nécessite un partenariat très fort et des co-productions à différents stades d’élaboration du produit. Certaines entreprises préfèrent créer des bureaux d’études dans des pays étrangers afin de constituer un maillage de compétences qui soit au plus près des clients. L’Inde est un exemple de ce mode de fonctionnement. Ce pays possède une industrie aéronautique diversifiée avec de nombreux programmes nationaux. La politique des grands constructeurs est alors de constituer sur place des unités de fabrication et les bureaux d’études associés.

1.8.1.2 Paris et sa région ont-ils une image cohérente ?

Si l’image de Paris et de sa région sont des paramètres importants pour nombre d’entreprises, il existe un paradoxe dans le fait que le prestige de Paris est assis sur des représentations qui ne sont pas en connexion directe avec celles de la première région industrielle de France. L’image de Paris reste encore très largement associée aux fonctions culturelles assumées par la capitale depuis des siècles : Paris demeure pour le monde entier le haut lieu touristique et culturel avec un patrimoine incomparable (présence de musées de renommée mondiale, opéras, théâtres), le cœur du luxe et de la gastronomie. Ces images classiques divergent des représentations d’une ville industrielle. Se maintenir dans ce « Paris » ou s’implanter dans la région dominée par une telle ville, est considéré comme un atout qui compte dans la décision de localisation. Le positionnement de Paris en termes de gouvernance est toutefois ambigu :Paris est à la fois la capitale administrative et politique de la France mais aussi la tête de pont d’une région qu’elle doit administrer. La superposition des images complexifie le problème : la ville concentre les pouvoirs centraux de l’Etat, les plus grandes administrations nationales, les sièges des partis politiques, des syndicats.

34 Cf Jean-Louis MUCHIELLI, Professeur à Paris I : « Certains facteurs d’implantation peuvent donc varier selon le niveau d’analyse. Si l’Europe est choisie pour des raisons de marché, il faut ensuite considérer le choix entre centre et périphérie avant de se pencher sur le pays éventuellement retenu. Peu à peu se dessinent des Short Lists ». Cette dernière expression est importante car elle traduit des comportements de répétition et d’exclusion de certaines villes. Voir Les entretiens Friedland : « Localisation des centres stratégiques des entreprises : la France reste-t-elle compétitive ? » le 2 juillet 2002.

La région Ile-de-France est dans une situation paradoxale car c’est de toutes les régions celle qui exerce le moins de pouvoirs sur son propre territoire35. Ceci s’explique par le fait que la Capitale prend en charge en priorité des problèmes nationaux, voire mondiaux et que le pouvoir régional doit gérer dans l’interstice des pouvoirs. Cette superposition des rôles dans la capitale-région est également un facteur de concentration des lieux de décision, des sièges sociaux de grandes entreprises ou des activités à haut niveau de connaissance.

Part des effectifs français dépendant d’une entreprise dont le siège est en Ile-de-France

Activités Part de la région Ile-de-France

Automobile 80% Industrie pharmaceutique 75% Équipements électriques et électroniques 75% Construction navale, ferroviaire et aéronautique 75% Textile 15% Agroalimentaire et Bois-papier 27% Études de marché 89% Ingénierie informatique publicité 79% Services juridiques 74%

Source : rapport du Sénat 3 avril 2003 par Jean François Poncet document déjà cité. Mais le plus paradoxal réside dans le fait que le prestige de Paris est adossé à des représentations liées à des métiers anciens, traditionnels, pas toujours innovants en termes de technologie (activités du luxe et de la gastronomie). Il faut cependant préciser que cela ne semble pas gêner les entreprises (même les plus technologiques d’entre elles) qui semblent dans certains cas en tirer parti. Cette constatation n’exclut pas qu’il faille capitaliser sur les autres aspects de l’Ile-de-France comme lieu d’excellence, pôle de recherche et développement, bassin de haute technologie. L’ambiguïté est d’ailleurs présente dans les grands rendez-vous industriels : les documents commerciaux du dernier salon du Bourget de juin 2003 le prouve. La région est dénommée de deux manières différentes : en version française, la région est dénommée « Paris Ile-de-France » et en anglais «Paris Region »36. Cet intitulé de « Paris Région» ou « Paris Ile-de-France » résume bien l’ambivalence d’une région dirigée par une capitale qui doit assumer trois rôles qui ont du mal à converger :

- capitale politique, administrative et culturelle ; - capitale économique de la France ; - vitrine économique européenne et mondiale.

Ceci confirme qu’au plan international entre le mot « France » et le mot « Paris », c’est le second qui l’a emporté. Comme le confirme le rapport du Sénat : « Tous les débats sur l’aménagement de la région sont marqués par la nécessité de prendre en compte simultanément ces différentes échelles 37». Le grand défi de la capitale et de sa région est de construire une image qui synthétise les trois dimensions de « Global city » que Paris assume et qui la met en concurrence directe avec les métropoles les plus puissantes de l’Europe. En effet, dans une étude effectuée par la DATAR, les grandes agglomérations européennes ont été analysées en fonction de deux facteurs : leur rayonnement (mesuré par des critères montrant l’influence de l’agglomération) et leur diversité industrielle38.

35 Jean FRANCOIS-PONCET RAPPORT D'INFORMATION 241 (2002-2003) - Délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire 36 Cf l’argumentaire mis au point par l’ARD sur le nom de la région. 37 Rapport du Sénat document déjà cité. 38 Céline ROZENBLAT et Patricia CICILLE « Les villes européennes : une étude comparative » , rapport réalisé à la demande de la DATAR , 2003.

L’agglomération de Paris se positionne comme une ville à très fort rayonnement international (en obtenant le plus grand coefficient) combiné à un haut degré de diversité industrielle (noté à un niveau de 9 sur un maximum de 10). Cette position est en soi excellente mais elle fait ressortir le fait que Paris doit se construire une image en tant que métropole industrielle. Par ailleurs, cette étude révèle que peu de grandes métropoles européennes possèdent d’image industrielle. Ce point sera plus amplement développé dans l’explication du scénario « agir sur l’industrie francilienne par la constitution de pôles d’excellence ». L’image de la capitale-région doit se situer au-delà des représentations traditionnelles qu’elle véhicule aujourd’hui. Mais le choix de cette image dépend largement d’un des deux scénarios décrits ci-après. Londres s’est construit une image par son rôle de place financière centrale de l’Europe et il ne viendrait à l’idée de personne de penser que Paris puisse, même à terme, rivaliser sur ce terrain. Londres compte les sièges sociaux de 110 entreprises parmi les 500 leaders européens alors que Paris n’accueille que 35 d’entre elles. La construction du capital-marque de Paris et de sa région passe par l’examen attentif des trois leviers d’une marque39 :

- La définition du Capital Relationnel : ce capital mesure la capacité que possède Paris à tisser des liens avec les grands acteurs mondiaux (entreprises, institutionnels, etc.). Il est certain que Paris possède un capital relationnel de tout premier plan : il est de très loin en Europe le carrefour des grands congrès internationaux et des grands événements culturels ;

- La définition du Capital Métier : C’est là que réside la plus grande difficulté dans la constitution

du capital marque. Aujourd’hui, Paris est assimilé à des métiers qui ne relèvent pas de la haute technologie. Le problème est de savoir dans quelle mesure ce qui fonde aussi la richesse de la capitale (industrie et Ingénierie High-Tech) est susceptible de créer une identité au même titre que le luxe a su la construire. Cet enjeu nécessitera de faire coexister deux images l’une pour la capitale et qui restera axée sur les représentations traditionnelles, l’autre sur les métiers à forte valeur ajoutée et dans lesquels les savoir-faire de la région sont réels.

- La définition du Capital Imaginaire : Ce capital dérive du précédent : la capacité de la région

francilienne à développer une part de rêve, ce que l’industrie du luxe a su dégager avec force à travers le monde pour la capitale. Or, une ville, pour être force d’attraction, doit pouvoir incarner le rêve. La filière aérospatiale et aéronautique ou la filière automobile qui sont les deux points forts de la région seront-elles en mesure d’incarner cette part de rêve ?

Ce n’est pas un pari impossible que de créer du rêve quand on sait que le dernier salon du Bourget de juin 2003 a attiré plus de 300 000 visiteurs dans un contexte difficile marqué par des grands conflits internationaux. Notons aussi que plus 15 000 personnes sont venues dans la même période assister au dernier vol du Concorde.

39 L’approche par les trois capitaux de la marque est développée par la société « TheBrandCity » (brochure de présentation de la société), filiale du groupe Highco.

1.8.2 Les scénarios

1.8.2.1 SCENARIO 1 :

« Agir par l’optimisation des coûts et la rationalisation des activités »

1.8.2.1.1 Fondements théoriques du scénario Ce scénario regroupe des facteurs de décision axés pour l’essentiel sur des variables stratégiques de coûts et de variables clés dont la logique repose sur la rationalisation des implantations. Ce scénario s’inscrit dans des logiques d’optimisation des coûts de fonctionnement des sites en Ile-de-France et de rationalisation de la localisation et du nombre d’établissements.

• La logique d’optimisation des coûts : cette logique fait surtout intervenir un raisonnement à dominante financière : on s’implante dans une zone d’activité, on conserve un site francilien, selon une logique de coûts en cherchant à les minimiser. C’est une logique orientée vers le court terme et qui conduit à des décisions rapides, même si, elles sont parfois prises à partir de données prévisionnelles, faisant ressortir les avantages et les coûts associés à la décision.

• La logique de rationalisation des sites : la logique qui précède est complétée ou non par une démarche plus ample qui consiste à s’interroger sur le nombre de sites que l’on possède en Ile-de-France et sur l’opportunité de les garder tous ou de les rassembler en un nombre de sites plus restreint. Cette deuxième logique est proche de la première car son raisonnement est dicté par une logique de coûts mais elle dépasse la problématique précédente en allant vers une logique industrielle : on rapproche des activités qui sont communes dans le but de rechercher la spécialisation des sites géographiques.

Il reste à préciser que la démarche d’optimisation des coûts est souvent sommaire notamment dans les entreprises de taille moyenne : peu d’entreprises réalisent un véritable bilan « coût / création de valeur ». Le plus souvent, seule l’analyse « coût » est réellement mise en œuvre (sans tenir compte des coûts induits le plus souvent), ce qui conduit à privilégier des sites géographiques où les coûts directs sont les plus faibles. Cette logique ne conduit pas à un chemin optimal tant que la démarche n’est pas réalisée en termes de « gains-coûts ». Dans les grandes entreprises, où la démarche ne peut être que globale, aux coûts directs d’une installation, on ajoute les coûts induits (exemple : difficultés de recrutement, absence de services d’une zone,...) et l’analyse est complétée en prenant en considération les avantages d’une localisation par rapport à une autre. Cette deuxième démarche conduit à une meilleure allocation des implantations que la première et fait apparaître les sites optimaux.

1.8.2.1.2 Typologie des entreprises concernées par le scénario La logique d’optimisation des coûts concerne des entreprises aux profils différents :

- ce sont des entreprises en difficulté financière ou en fragilité industrielle. Dans ce cas, l’Ile-de-France est considérée comme une région aux coûts élevés parmi lesquels les coûts du foncier et la fiscalité locale jugée dissuasive, entrent en ligne de compte ;

- ce sont des entreprises concernées par des mises aux normes importantes provenant d’activités jugées non compatibles avec un environnement urbain (abattoirs, fabrication d’aliments pour animaux, produits chimiques, stockage d’engrais,...) et qui conduisent ces dernières à des investissements que souvent elles ne peuvent assumer.

La logique de rationalisation des sites concerne surtout les entreprises de grande taille qui ont réalisé des acquisitions récentes par une politique de croissance externe active et qui se retrouvent de ce fait à la tête d’un nombre important de sites répartis sur des zones géographiques différentes. Pour des entreprises industrielles, lourdes en capital, la rationalisation peut se traduire par des transferts de sites avec la fermeture d’autres sites dans le but de rechercher au mieux la complémentarité des activités.

La rationalisation des sites peut ne pas se traduire par des mutations spatiales, ce qui est souvent le cas lorsque les industries reposent sur des investissements importants qu’il est difficile de transférer. Il en est ainsi lorsque les activités de la société qui entrent dans le périmètre d’un nouveau groupe, sont réparties entre plusieurs sites pour former des complémentarités, ce qui conduit à vider progressivement les activités des sites initiaux et à programmer soit leur mutation par la venue d’autres activités, soit à envisager leur fermeture progressive par une absence d’investissements. La filière aéronautique a été confrontée à ce scénario. De nombreuses fusions et acquisitions ont eu lieu ces dernières années dans cette filière. Elles ont conduit les groupes acquéreurs à entreprendre sur la région Ile-de-France de nombreux regroupements d’activité dans le but d’obtenir les meilleures synergies entre les métiers et les compétences mais sans qu’il y ait nécessairement à court terme de sites fermés. Au bout du processus, à plus long terme, les sites les moins aptes au développement des activités seront soit fermés, soit progressivement amenés à une obsolescence pour être ensuite fermés. Dans son rapport annuel 2002, le groupe SNECMA illustre bien cette politique qui a conduit à regrouper les activités de l’équipementier LABINAL au sein de Messier-Bugatti, le regroupement des équipements moteurs chez Hispano-Suiza, le regroupement des activités non aéronautiques chez TURBOMECA avec pour objectif : « dégager toutes les synergies industrielles entre les lignes de produits et les savoir-faire ». La filière automobile a largement utilisé cette logique à la fois d’optimisation des coûts et de rationalisation des sites dans les années 1980 et jusqu’au début des années 1990. Les grands choix de localisation en Ile-de-France ont conduit à conserver dans la région les emplois tertiaires (emplois des fonctions support), les emplois d’ingénierie (bureau d’études) et les emplois de Recherche et Développement. Les emplois de production sont devenus largement minoritaires et ne subsistent que dans les pourtours de la région. Le groupe RENAULT dispose aujourd’hui schématiquement de quatre grands sites d’emplois : les activités tertiaires regroupées à Boulogne-Billancourt (6 000 emplois), les activités d’ingénierie à Rueil-Malmaison (4 000 emplois), les activités de recherche appliquée à Guyancourt (11 000 emplois). Le seul site de production significatif reste celui de Flins (4 000 emplois) en deuxième couronne.

1.8.2.1.3 Les mutations engendrées par le scénario Ce scénario trouve sa dynamique dans les décisions prises par les entreprises et moins sous l’impulsion des collectivités locales, si ce n’est par le biais des taxes locales qui peuvent entrer en ligne de compte et renforcer l’intensité de la démarche centrée sur l’optimisation des coûts. La réduction des coûts comme facteur déterminant de la localisation conduit à un scénario d’amplification des écarts des situations existantes. Une logique de coûts conduit souvent à sélectionner les sites géographiques qui optimisent cette logique et donc à déclasser les sites offrant le moins d’optimalité. Les récentes études40 conduites par INSIGNIA BOURDAIS (étude portant sur un échantillons de 21 grandes entreprises ayant des besoins en locaux de plus de 5000 m²) situent l’ampleur des mouvements d’entreprises tous secteurs au sein de l’Ile-de-France (Etudes 2002). Il ressort que 215 000 m² ont quitté Paris pour aller soit en première couronne soit en deuxième couronne. Parallèlement, 27 000 m² sont allés de la première couronne vers Paris. Enfin, la deuxième couronne a reçu 84 000 m². « Ces transferts importants ont été motivés selon INSIGNIA BOURDAIS par des recherches d’économies et par une rationalisation des surfaces occupées.

40 INSIGNIA BOURDAIS RESEARCH (2003) : « I on the market : bureaux », Paris, Les Editions INSIGNIA BOURDAIS

Ce scénario contribue à accentuer la plupart des écarts et des contradictions qui caractérisent l’Ile-de-France.

- renforcer l’écart entre niveaux d’emplois au sein des départements de la région : cet écart serait creusé, accentuant les phénomènes de « fracture sociale » qui sont déjà sources de difficultés et de tensions au sein de la région. Il existe aujourd’hui une forte disparité entre les départements franciliens (voir tableau ci-dessous) allant pour le taux de chômage du simple au double entre les Yvelines et la Seine-Saint-Denis. Une accentuation de cette disparité, compromettrait la cohésion de la région.

Taux de chômage en 2002 des départements franciliens

Départements Taux de chômage en % en 2002

Paris 10.4

Hauts de Seine 8.3

Seine Saint Denis 12.4

Val de Marne 8.3

Seine et Marne 6.6

Yvelines 6.6

Essonne 6.7

Val d’Oise 8.5

Ile-de-France 8.7

Source : INSEE, GARP cité dans le rapport de Bruno ROBINE d’avril 2003 pour le Conseil économique et social

- accentuer l’écart en l’Est et l’Ouest de l’Ile-de-France : cet écart est déjà une des caractéristiques de la région Ile-de-France. Le scénario « optimisation des coûts » aurait comme conséquence d’accentuer ce contraste car les zones d’activités de l’Ouest sont précisément celles qui offrent la meilleure adéquation entre les avantages d’un positionnement en Ile-de-France et les coûts résultant de cette implantation. Le scénario d’optimisation des coûts conduirait à un déclassement rapide des sites présentant le moins d’optimalités en termes d’avantages-coûts (des zones comme celle de Dourdan ou celle de Meaux qui n’offrent pas tous les avantages des zones plus dynamiques comme celle de Versailles par exemple) et à un renforcement des zones d’activité les plus dynamiques.

Ce phénomène s’observe très fréquemment : dans une logique de type libéral, il existe une tendance à la concentration des investissements sur les agglomérations déjà les mieux dotées41 . Un examen des emplois de la filière aéronautique illustre l’écart entre Ouest et Est de l’Ile-de-France. Un scénario prévisionnel axé sur une logique de coûts et de rationalisation des sites, conduirait à étendre le déséquilibre à l’ensemble des territoires Ouest de la région Ile-de-France. Ce déséquilibre engendrerait des disparités sociales importantes, des migrations domicile-travail de l’Est vers l’Ouest avec des aggravations certaines de circulation et de transport. Le déclassement entre les sites franciliens se ferait au détriment des filières industrielles en situation de fragilité (textile notamment et certains maillons de la filière agro-alimentaire) qui se déplaceraient sur les zones les moins coûteuses mais aussi les moins optimales de la région. De même, sur les sites les meilleurs donc a priori les plus chers, la coupure entre les grandes entreprises et les plus petites se feraient sentir avec plus de force. La logique d’optimalisation des coûts rend plus difficile la montée rationnelle de la zone de Marne-la-Vallée comme contrepoids à l’Ouest.

41 Anne AGUILERA et alias « Localisation des activités et mobilité », Programme de recherche transports terrestres 1996-2000, rapport de décembre 1999.

- faire reculer les zones résidentielles sur la troisième couronne et au-delà en renforçant les villes avant-postes : la tendance actuelle (et le scénario le renforcerait) est de voir s’étendre la zone d’influence de Paris et de sa première couronne Ouest dans un rayon toujours plus large de l’ordre de 80 Km, incluant des villes qui ne sont pas dans la région administrative de l’Ile-de-France, mais qui se trouvent dans « l’hinterland » de Paris. Il s’agit de villes qualifiées d’avant-poste qui, bien que se trouvant de l’autre côté de la ceinture verte de la région parisienne, ont de plus en plus vocation à structurer l’espace du bassin parisien : Chartres, Beauvais, Compiègne, Creil, Château-Thierry, Dreux, Montargis, Soissons, Sens, Evreux 42. C’est ce que montre la carte ci-dessous où l’on voit émerger un ensemble régional complexe avec des cercles concentriques de plus en plus larges.

42 Voir sur ce point les études de l’INSEE Picardie et notamment les travaux de Frédéric GILLI qui mettent l’accent sur le décalage entre la région administrative et la région urbaine.

- renforcer les investissements des unités de production hors de l’Ile-de-France : le scénario renforcerait, surtout dans le cadre d’une optimisation des coûts, la volonté de produire hors de l’Ile-de-France mais sous des formes particulières que les mouvements récents confirment. La plus courante de ces formes serait surtout de ne pas réaliser d’investissements nouveaux dans les unités de production situées en Ile-de-France et d’investir soit dans d’autres régions de France mais surtout d’investir dans les pays d’Europe Centrale ayant une forte tradition industrielle, avec des coûts en main-d’œuvre relativement plus faibles qu’en France et à distance acceptable des grandes agglomérations occidentales. Certains dirigeants au cours des entretiens ne nous ont pas caché la stratégie qui consistait à faire du neuf hors Ile-de-France, ce qui conduirait à terme à une obsolescence des unités de production encore installées en Ile-de-France. Cette orientation des investissements conduirait de manière plus marquée à spécialiser les pays d’Europe centrale dans une division internationale du travail. Comme le fait observer le CPII 43 « Les industries des PECO qui ont les meilleures performances à l’exportation (automobile, matériel électrique, machines et équipement) réalisent l’essentiel de leur progression dans les produits intermédiaires. Certaines industries d’Europe centrale apparaissent désormais intégrées dans une division internationale des processus productifs avec celles de l’Union Européenne. Une telle division de travail qui existe traditionnellement dans le textile-habillement, via la sous-traitance, se développe ces dernières années dans de nouveaux secteurs comme l’industrie automobile, les appareils de télécommunication, à travers des investissements directs des firmes occidentales ». Ce mouvement déjà notable au début des années 2000 s’est encore considérablement accentué en 2002 et début 2003 surtout pour les unités industrielles et plus particulièrement la filière automobile. Elle concerne dans une moindre mesure (poids des investissements comme facteur d’inertie) la filière aéronautique qui reste encore largement dépendante des investissements effectués dans le passé mais cette tendance est néanmoins réelle via de nouveaux pays d’investissement tels la Russie par exemple.

43 Françoise LEMOINE et Michaël FREUDENBERG « Les pays d’Europe centrale et orientale dans la division du travail en Europe ». Économie Internationale n°80 1999.

Extrait du journal Le Monde dans son édition du 26 juin 2003 : « L'attrait industriel des pays d'Europe centrale ne devrait pas se démentir en 2003. Ces derniers mois, l'allemand Bosch a choisi la Hongrie pour délocaliser sa production de démarreurs. Un pays également élu par Philips pour produire des tubes cathodiques au détriment d'un site français. Le cabinet Ernst & Young, qui a sondé 200 dirigeants internationaux (américains, européens, asiatiques...), en mars, note que, à 44 %, ces décideurs économiques plébiscitent les pays d'Europe centrale pour l'implantation d'une unité de production. L'avantage de ces territoires est clair : ils sont proches géographiquement des marchés finaux européens, le coût de la main-d'œuvre qualifiée y est de trois à quatre fois inférieur. Déjà une compétition féroce fait rage entre eux. Le prochain pays montant devrait être la Slovaquie, où les groupes automobiles PSA et Volkswagen ont déjà programmé des investissements ». La politique d’implantation directe plus que de délocalisation est une logique de court terme. Sur le long terme, les avantages paraissent moins évidents car ces régions qui ne bénéficient pas toujours d’autres conditions indispensables à la réalisation d’un optimum (politique de transport, qualité des services, niveau de la main d’œuvre,..) ne tiendraient pas nécessairement leurs promesses sur une longue période de temps44 . - renforcer la séparation des métiers : la logique d’optimisation des coûts renforce la séparation des métiers entre ceux ayant une forte valeur ajoutée et ceux à plus faible valeur ajoutée. Ce mouvement est déjà très ancien. Le scénario le renforcerait dans deux directions : - toutes les filières industrielles ont largement concentré sur l’Ile-de-France les métiers d’ingénierie, de recherche et développement et d’activités tertiaires (correspondant aux fonctions support). Ce mouvement serait renforcé par le scénario car, l’optimisation des coûts concernerait tous les métiers, y compris ceux à forte valeur ajoutée. Cette logique peut aller jusqu’à des fermetures de sites eux-mêmes à forte valeur ajoutée (le groupe Pfizer a décidé en avril 2003 de fermer son centre de recherche de Fresnes qui faisait double emploi avec celui de Londres). Il n’y a pas de situation de rente. Une pure logique de coût peut conduire à installer des unités de recherche et de développement dans des pays où les conditions sont réunies : dès lors que certains pays d’Europe Centrale auront des unités de production de taille importante, la logistique pour approvisionner leur propre pays mais aussi les autres pays de la région, l’intérêt d’installer des bureaux d’études ou des centres de développement sera plus évident ;

- cette logique conduit certains groupes à séparer les fonctions tertiaires en deux catégories : les métiers qui doivent rester à proximité immédiate de la Direction Générale et donc proche du centre : soit à Paris, soit dans la première couronne (stratégie, marketing, responsables des unités opérationnelles, ...) et d’éloigner dans les autres couronnes (où même hors de l’Ile-de-France) les fonctions moins stratégiques (fonctions comptables et financières, administration des ressources humaines, fonctions informatiques,...). Un constructeur automobile a décidé de scinder ses effectifs tertiaires en deux catégories : les fonctions qualifiées de « corporate » qui doivent rester à proximité immédiate de la direction générale, elle-même installée dans un endroit symbolique du métier et de l’histoire de l’entreprise et les autres fonctions tertiaires qui pourront être transférées en deuxième couronne et pour lesquelles un coût au m² élevé ne se justifie pas. Cette opération se traduit par un partage entre 25% des effectifs qui restent auprès de la Direction générale et 75% localisés en deuxième couronne. Cette opération ne coûtera aucun emploi pour la région puisqu’il s’agit d’un transfert intra-régional mais le transfert aurait pu se faire en dehors de la région parisienne. En termes d’emplois industriels, le scénario achèverait le processus d’éloignement des emplois industriels de production de la région (y compris pour les filières agroalimentaires qui s’installeraient hors de la première couronne et de la seconde couronne pour s’implanter en troisième couronne ou dans les villes avant-poste) mais amorcerait une autre sélection entre les emplois qui doivent impérativement demeurer proche de la Direction (emplois « corporate ») et ceux pour qui la proximité avec la Direction n’est pas nécessaire et qui de ce fait peuvent être délocalisés hors de la région. 44 Jacques-François THISSE et Tanguy Van YPERSELE , « Métropoles et concurrence internationale », Economie et Statistiques n°326-327 1999 -6/7 et M. PORTER (1998) « Clusters and the New Economics of Competition », Harvard Business Review pp 77-90.

1.8.2.2 SCENARIO 2 :

« Agir par la constitution de pôles de compétences »

1.8.2.2.1 Les fondements théoriques du scénario Ce scénario comprend deux grands types de facteurs-clés de décision : - des variables-clés ayant trait à la qualité de la main d’œuvre, à l’existence de pôles d’excellence et de pôles de compétences, - des variables réglementaires nationales ou des variables d’actions relevant des collectivités locales (taxe professionnelle, taxes foncières,...) qui, depuis les lois de décentralisation, ont pris une importance considérable par leur capacité à orienter les choix de localisation des entreprises. Ces deux types de variables sont très proches les unes des autres dans le graphique Motricité-Dépendance avec un aspect plus moteur pour les variables de nature réglementaire, ce qui laisse présager que le scénario n°2 doit lier intimement ces deux variables. Cette proximité indique aussi que le scénario de la polarisation ne peut se réaliser sans la mise en œuvre de variables de nature politique. Le récit qui construit ce scénario est distinct du précédent par la logique qui l’anime : ce n’est plus une pure logique de coût, même si celle-ci intervient, mais une logique de spécialisation progressive des localisations géographiques. Dans ce scénario, les implantations des entreprises répondent à une logique de long terme où l’on cherche par sa localisation à donner un sens et à construire une image. Une entreprise n’est pas présente sur une zone par le simple fait que les coûts y sont faibles mais aussi parce que la localisation dans cette zone :

- donne un sens à l’activité qu’on y implante, - comprend des entreprises proches du métier (idée de complémentarité) - accueille des concurrents connus et prestigieux (idée d’image) - attire des entreprises étrangères, mêmes si elles sont concurrentes (notion de concurrence

positive). La formation de ces pôles d’excellence est orientée par une politique locale favorable qui cherche à attirer les investissements à forte valeur ajoutée. C’est toute une politique d’urbanisme qui se met en place avec un respect des règles d’environnement, une structuration de la politique de transport et des partenariats avec des pôles de recherche. Une analyse conduite en 2002 45 sur les investissements étrangers en France met en évidence les phénomènes de polarisation des activités. Cette étude confirme surtout que les entreprises étrangères qui s’installent en France et en Ile-de-France ont tendance à répliquer les mêmes raisonnements que leurs concurrents français au lieu de suivre les choix effectués par leurs homologues déjà installés. Les entreprises étrangères estiment que les firmes françaises ont une démarche rationnelle et que les informations dont elles bénéficient pour se localiser sont en qualité supérieure à celles dont disposent les entreprises de leur propre pays déjà implantées. Les entreprises étrangères ont tendance à se rapprocher de leurs concurrents dans leur choix de localisation.

45 Matthieu CROZET, Thierry MAYER, Jean-Louis MUCHIELLI: « How do firms agglomerate ? » 9 janvier 2003 Université de Paris I et CNRS.

1.8.2.2.2 Polarisation et diversification industrielle Ce modèle de développement relance le questionnement sur la spécialisation ou non de la région Ile-de-France. Aujourd’hui les activités de la région francilienne sont diversifiées. Pour certains, il s’agit d’un point fort car la région réduit ses risques et entretient la richesse née de cette diversité. Pour d’autres, il s’agit d’un point faible car il est impossible d’être bon partout et la diversité nuit à la lisibilité et à l’attractivité. L’examen des différents départements de l’Ile-de-France, ne laisse pas apparaître de réelle spécialisation. On voit tout juste se former des dominantes industrielles : le Val d’Oise par exemple avec 18% de ses emplois dans le transport aérien et les Yvelines avec 14% de ses effectifs dans la construction des véhicules automobiles sont des exemples d’émergence de spécialisation. Ce modèle est-il ou non une référence qu’il conviendrait de suivre ? La réponse se trouve en partie dans l’orientation des grandes agglomérations européennes. Or, une analyse des stratégies internationales des grandes métropoles européennes va davantage dans le sens d’une diversification que d’une spécialisation. Pour définir le type de modèle vers lequel évoluent les grandes métropoles, deux visions ont été croisées pour assurer le positionnement des villes dans leur stratégie industrielle 46:

- le degré de diversification industrielle : la diversité industrielle est notée de 1 (ville très spécialisée avec présence de 1 à 3 secteurs industriels seulement) à 10 (ville complètement diversifiée avec 11 secteurs industriels présents sur 14 secteurs industriels composant l’industrie).

- le niveau de rayonnement : ce niveau est obtenu en combinant 15 critères très discriminants 47: Ces quinze critères, qui vont de la démographie, aux réseaux de recherche et à la population étudiante, permettent de classer les villes européennes en 7 classes de rayonnement allant de la classe 1 (ville à faible rayonnement) à la classe 7 (ville à très fort rayonnement).

Le graphique qui suit met en relation ces deux critères afin de dégager l’existence ou non d’un modèle de développement vers lequel les grandes agglomérations européennes essaieraient de tendre. Vingt-huit villes ont été testées. Le graphique a été simplifié en estimant qu’il y avait diversité quand l’indicateur atteignait le niveau 6 et plus (jusqu’à 10 au maximum) et que le rayonnement commençait à être significatif à partir de 3 (jusqu’à un maximum de 7). Sur le graphique a été placée la diagonale qui relie le point A (rayonnement de niveau 3 et diversification industrielle de niveau 6) au point B (rayonnement 7 et diversification 10). Cette diagonale exprime la relation idéale entre la diversification industrielle et le rayonnement. Si toutes les villes venaient se disposer le long de cette diagonale, il y aurait une relation linéaire croissance entre rayonnement et diversification industrielle. De part et d’autre de la diagonale, ont été tracées deux parallèles (la première part du niveau 4 de rayonnement et s’arrête au niveau 8 de diversification, la seconde part du niveau 7 de la diversification et se termine au niveau 10). Ces deux parallèles déterminent le « couloir » acceptable d’un modèle qui mettrait en relation diversification industrielle et rayonnement. Le croisement du rayonnement d’une grande agglomération et sa diversité industrielle, permet de constater que sur les 28 villes testées sur la base de cette relation, 21 villes tiennent dans le « couloir » indiqué et que 7 se situent en dehors de ce couloir. Cette proportion importante montre qu’il y a bien aujourd’hui, pour la majorité des grandes villes européennes, une stratégie qui consiste à maintenir une grande diversité industrielle.

46 Nous nous sommes fortement inspirés de l’étude de la DATAR sur la comparaison des villes européennes, étude réalisée par Céline ROZENBLAT et Patricia CICILLE. 47 Ces 15 critères sont : la population (et son évolution), le trafic des ports maritimes, le trafic des aéroports, l’accessibilité, le nombre de sièges sociaux des grands groupes européens, l’importance des places financières, le niveau du tourisme urbain, les foires et salons, le nombre de congrès, les musées, les grandes manifestations culturelles, les étudiants, les revues scientifiques, les réseaux de recherche

Il est possible d’affirmer que le chemin le plus probable du rayonnement pour une grande agglomération européenne, est au moins d’avoir ou de conserver une industrie diversifiée. Cette affirmation est le résultat d’une convergence et non d’une règle absolue. Il faut bien entendu être prudent dans ces affirmations car il existe des exceptions majeures à cette convergence : la plus notable d’entre elles est la ville de Londres, complètement excentrée par rapport au schéma précédent avec un fort niveau de rayonnement et un très faible niveau de diversification industriel.

Par ailleurs, la situation est différente d’un pays à l’autre. Dans cet exercice qui consiste à mettre en relation rayonnement et diversité, il faut constater au passage le très bon positionnement de l’Allemagne qui compte quatre villes dans le couloir tracé ci-dessous. La France ne compte quant à elle que deux villes (Paris et Lyon). En définitive, plusieurs conclusions se dégagent de cette analyse :

- le modèle dominant est celui du maintien d’une diversité industrielle : sur les 28 villes européennes analysées, 21 se sont orientées vers un schéma industriel de type diversifié ;

- la relation linéaire croissante entre diversification industrielle et niveau du rayonnement qui se trace par la diagonale du graphique, fonctionne de manière très étroite pour 16 villes sur 28. Ceci implique (avec les restrictions émises plus haut) que plus une ville est diversifiée dans sa politique industrielle, plus son rayonnement a des chances d’être important.

- Le positionnement de Paris est excellent car la ville bénéficie d’un bon positionnement sur les deux critères.

Notons que deux villes ont véritablement su construire une image mondiale : Paris et Londres. Mais il est intéressant d’observer que ces deux grandes villes n’ont pas construit cette forte notoriété sur l’industrie mais sur des métiers radicalement différents : la finance pour Londres et le luxe pour Paris. Ceci implique une nouvelle fois que cette image industrielle reste à construire pour Paris (pour Londres cette image industrielle est impossible à construire car les éléments fondamentaux ne sont pas réunis, ce qui peut être interprété comme une voie ouverte pour Paris). Tableau n°29 : Corrélation entre rayonnement des villes européennes et diversification industrielle

Diversification industrielle 9 10

Niveau de rayonnement

3

6 7 8

7

6

5

4

Stockholm

Paris

Madrid

Amsterdam Milan

Barcelone

Lisbonne

Hambourg

Marseille Florence

Berlin Bruxelles VienneMunichCopenhague

Helsinki Zurich Genève

Lyon

Francfort Oslo

A

B

Cette analyse permet de préciser un certain nombre d’ambiguïtés. Le scénario dit de « polarisation des compétences ou pôles d’excellence » ne doit pas s’interpréter comme une volonté de réduire la diversité de l’industrie francilienne. Une politique qui irait dans ce sens s’écarterait du modèle dominant d’évolution des grandes villes de l’Europe. La polarisation de l’activité industrielle implique l’émergence de « pôles économiques » dans des domaines orientés vers la haute technologie (filière aéronautique par exemple), sans exclure des domaines industriels traditionnels (filière de l’édition et de l’imprimerie). Cette remarque indique que la constitution de pôles d’excellence n’est pas synonyme de spécialisation. Des filières industrielles que l’on pourrait qualifier de classiques ont, elles aussi, des besoins en matière d’emplois qualifiés. L’exemple du groupe « in vivo » illustre l’évolution possible des métiers sur la filière du commerce des céréales. Ce groupe constitué en 2001 qui réalise 2.8 milliards d’euros de chiffre d’affaires, a développé au fil des années des emplois de services de haut niveau pour le compte de 250 coopératives céréalières et de coopératives d’approvisionnements (engrais). Les 600 emplois situés en Ile-de-France, correspondent à la sélection et à la commercialisation des semences, l’agrofourniture, la logistique, et le commerce international de grains, la nutrition et la santé animale. Dans ces activités, figurent des activités de recherche et développement (recherche sur des compléments alimentaires pour les animaux, recherche sur la qualité des semences notamment). Le scénario de polarisation consiste à créer un environnement qui permet à l’Ile-de-France de développer des emplois à forte valeur ajoutée (emplois d’ingénierie et emplois de conception) en amalgamant des compétences complémentaires les unes aux autres, tout en conservant la diversité des filières industrielles qui font la richesse de l’Ile-de-France. Cette diversité doit être complète : la recherche de pôles d’excellence n’implique pas nécessairement une tertiarisation de l’économie, qui consisterait en une concentration des métiers administratifs ou des métiers liés aux fonctions support des entreprises. La diversité concerne aussi le maintien de métiers liés à la production, même si ces métiers seront de plus en plus minoritaires dans l’avenir. Ce point a été confirmé par les dirigeants des entreprises au cours des entretiens. Ils ont insisté sur la nécessité de conserver en Ile-de-France des métiers de production. Cette volonté est d’ailleurs une réalité pour de nombreux grands groupes industriels : Renault a conservé une unité importante à Flins, Peugeot à Poissy, Dassault à Argenteuil, Snecma dans de nombreuses villes de l’Ile-de-France (Corbeil par exemple). La raison invoquée était que le maintien d’unités de production permettait aux bureaux d’études d’avoir une certaine prise sur la réalité et d’éviter de concevoir dans l’absolu, sans un appui des métiers industriels. 2.1.1.1.1 Les conditions d’un environnement permettant l’émergence de pôles d’excellence en Ile-

de-France Cet environnement favorable nécessite notamment une organisation qui repose sur plusieurs piliers : - agglomérer les compétences ; - former des pôles géographiques de compétences ; - adapter l’organisation du travail selon un mode de co-production ; - mettre en place une politique de transport ; - positionner les bases logistiques ; - instaurer un dialogue entre les collectivités locales et les entreprises. 1. Favoriser l’émergence de bassins de compétences répondant à une demande de haute qualification mais diversifiée sur une pluralité de filières. Cette condition est souvent mise en avant lors des entretiens avec les responsables des entreprises. Elle correspond à la volonté de maintenir et de renforcer un enseignement professionnel diversifié qui concerne non seulement les ingénieurs diplômés des grandes écoles mais aussi les techniciens de haut niveau ; ce dernier point est important et souvent relégué au second plan, alors qu’il est une préoccupation des industriels et des responsables de bureaux d’études.

Les responsables d’entreprises ne remettent pas en cause la bonne qualité des grandes écoles d’ingénieurs – même si l’offre par son abondance manque souvent de clarté et de lisibilité – tout en estimant que les entreprises industrielles ont besoin tout à la fois de techniciens de bon niveau au même titre qu’elles ont besoin d’ingénieurs possédant une forte ouverture sur les problèmes internationaux et le management des hommes.

Ce dernier point n’a pas échappé aux dirigeants des grands groupes. Conscients de la nécessité de faire évoluer ses cadres supérieurs, le groupe SNECMA a crée en 2002 sa propre université qui se veut une université de management et un complément aux formations continues données par les sociétés du groupe.

Cette université interne a pour objet de former au management et aussi de permettre aux responsables ou futurs responsables de se connaître, d’échanger les bonnes pratiques et de se préparer aux évolutions futures : prises de responsabilité, mais aussi mobilité en termes de métiers et de pays.

Mais la difficulté que rencontrent les dirigeants réside dans la vision que les jeunes peuvent avoir de l’industrie qui véhicule des stéréotypes nuisant à une image positive des métiers qu’elle propose. Cette vision plutôt négative des jeunes à l’égard de l’industrie en général, a été mise en avant au cours des entretiens. Une enquête conduite en 2002 auprès de trois mille 48 jeunes, leur demandant de choisir parmi une liste de 29 secteurs ceux où ils aimeraient travailler. L’aéronautique et le spatial est le premier secteur industriel à apparaître mais cette apparition ne se fait qu’au onzième rang, avec seulement un tiers d’opinions positives, loin derrière les secteurs de la communication - publicité - marketing, plébiscités par plus de 65% des jeunes. La réalité confirme la désaffection des moins de 25 ans pour l’industrie : entre 1990 et 2001 la part des moins de 25 ans dans l’emploi industriel est passée de 10.6% à 7.1%. Il s’agit bien d’un problème culturel profond, difficile à résoudre, qui concerne l’image que renvoie l’industrie dans l’opinion et parmi les plus jeunes. Cette opinion trouve en partie ses racines dans les épreuves par lesquelles sont passées les générations de salariés précédentes. On retrouve un problème du même ordre que celui évoqué pour l’image de la région-capitale : comment faire rêver avec l’industrie ? 2. Adapter l’organisation des pôles de compétences en filières en regroupant sur une « plate-forme » géographique unique des entreprises ayant une complémentarité de métiers (en amont et en aval), avec une proximité de pôles de recherche publics ou privés et des écoles professionnelles, le tout rassemblé dans un périmètre délimité. Ces regroupements en plates-formes permettent de créer des synergies et d’attirer les entreprises étrangères (les études montrent que les entreprises marquent de l’intérêt pour des zones présentant des rationalités économiques quand bien même ces zones accueilleraient des concurrents directs). Surtout, ces zones « plates-formes » sont une des conditions pour que se crée une image forte sur laquelle la région peut capitaliser et donner une identité qui fait aujourd’hui défaut à l’Ile-de-France. Le concept de plate-forme est revenu à plusieurs reprises dans les propos des dirigeants. L’idée sous-jacente est d’organiser sur un espace où les déplacements sont réduits des métiers qui se complètent et qui mutualisent ce qui est nécessaire.

L’exemple de la zone de Paris- Le Bourget (558 hectares avec trois pistes) illustre cette évolution en plate-forme. Mise à part la nécessaire évolution de cette zone sur le plan des infrastructures, Le Bourget repose depuis 1981 sur l’activité de l’aviation d’affaires (aviation « corporate » –flotte privée des entreprises- aviation d’affaires commerciale, encore dénommée « taxis aériens » - compagnies aériennes n’effectuant de vols qu’à la demande, aviation d’affaires en multipropriété – achat par une société d’un certain nombre d’heures de vol). Cette plate-forme qui n’a pas en Europe d’équivalent (exceptée l’Angleterre), accueille une soixantaine d’établissements (plus de 4 000 emplois). Plus d’un quart de ces sociétés (1 200 emplois) exerce une activité de transport aérien directement liée à l’aviation d’affaires, les autres exercent des activités support : services aéroportuaires, maintenance, équipements...). L’avenir de cette zone d’aviation repose sur des activités qui sont liées au devenir de la capitale (Si l’on souhaite faire de Paris une des capitales d’accueil de grands événements mondiaux, il est nécessaire d’avoir un aéroport spécialisé répondant à des demandes précises).

En dehors de cette activité d’aviation d’affaires, le site est aussi devenu le rendez-vous annuel du salon aéronautique « vitrine » grand-public d’une industrie où l’Europe affiche sa technologie et son ambition (300 000 visiteurs en juin 2003).

48 Le Monde de l’Emploi « Le rendez-vous manqué des jeunes et de l’industrie » Mardi 1er juillet 2003.

Les critères de localisation se modifient très sensiblement par rapport au scénario précédent : on s’implante dans des zones qui ont un sens et non par une opportunité qui serait fondée sur une visibilité strictement financière. La polarisation territoriale conduit à attirer des entreprises d’une même branche, d’un même secteur ou d’une même filière qui se regroupent en un même lieu afin de bénéficier au maximum de toutes les externalités positives liées à leur implantation. 3. Adapter l’organisation du travail par le travail « collaboratif » La constitution de pôles de compétences nécessite une modification profonde de l’organisation du travail. Ce point est important car il est un des moyens de remettre en cause les images souvent négatives de l’industrie. Beaucoup d’entreprises développent des modes d’organisation très novateurs. Ceci est surtout vrai dans les métiers liés à la conception des produits ou à la R&D. Le pendant d’une organisation par filière consiste en une organisation du travail coopérative qui réponde aux mêmes impératifs : regrouper dans des lieux appropriés, souvent un lieu dédié, des forces humaines de sensibilité et de culture différentes afin d’optimiser la capacité de création. Ce mélange concerne aussi les sous-traitants équipementiers qui travaillent sur les mêmes espaces. Ce mode de travail est aujourd’hui mis en oeuvre dans les métiers de l’automobile aux phases de conception qui désormais doivent répondre à deux impératifs : favoriser au mieux la nature même de la conception (être de plus en plus créatifs) et optimiser le temps de la conception (rationaliser les flux d’échanges par une organisation efficace où chacun perd le moins de temps possible). Ce sont ces principes qui ont guidé le fonctionnement du Technocentre de Guyancourt (groupe RENAULT) et le nouveau centre de conception de PSA Peugeot-Citroën qui entrera en activité en 2004 à Vélizy. Ce dernier est une bonne illustration de plusieurs problématiques :

- une problématique métier : comment faire en sorte que la conception devienne un processus global non réservé aux seuls concepteurs mais impliquant à des moments précis d’autres métiers ;

- une problématique industrielle : obtenir, sans faire perdre en créativité, que la conception soit optimisée dans le temps ;

- une problématique humaine : mettre ensemble des métiers différents qui se complètent sans se disperser et sans se ralentir ;

- une problématique d’organisation de l’espace de travail : organiser des lieux où les échanges d’informations peuvent se faire le mieux possible en évitant les cloisonnements, sans nécessairement les condamner. Le centre de design de Vélizy repose ainsi sur des principes novateurs extrêmement forts : mettre ensemble des métiers qui habituellement sont séparés et accélérer la convergence pour optimiser le temps de création : - le centre rassemble les compétences liées au produit (représentants du marketing des marques et du groupe), celles liées au style (couleurs et matières propres à chaque marque) et celles liées à la technique (sur un même plateau projet, on retrouve des équipes carrosserie, des équipes habitacle, électronique, télématique, …) ; - le centre dispose sur un lieu unique des acteurs différents pour réaliser un travail dans une démarche simultanée qui évite des remises en cause tardives, sources de dysfonctionnements et génératrices de coûts importants. 4. Favoriser les liens de communication entre les pôles de compétences : la mise en oeuvre de pôles d’excellence placés sur des zones géographiques « secondaires », situées le plus souvent en seconde couronne de l’Ile-de-France, conduit à revoir la manière dont les transports sont organisés aujourd’hui dans la région. Les déplacements, connaissent deux phénomènes qui se cumulent :

- ils augmentent à un rythme soutenu49, et supérieur à la croissance de la région ; - ils sont de plus en plus longs du fait de l’éloignement domicile-travail.

49 On comptabilise aujourd’hui 37 millions de déplacement quotidiens en Ile-de-France, alors que leur nombre était de 21 millions en 1990, ce qui représente un taux de croissance de l’ordre de 5% par an. Voir sur ce point l’étude de la CCIP d’avril 2003 présenté par Guy-François PARMENTIER , « Création et aménagement des infrastructures en Ile-de-France : les 6 priorités pour les entreprises ». D’autres travaux prospectifs montrent que d’ici 2020, les flux de transports devraient progresser en cumul de 56% par rapport à la situation présente.

Or, les transports en Ile-de-France sont organisés de manière radiale avec un réseau conçu (et qui continue à être conçu) pour assurer la convergence des flux migratoires sur la capitale et de la capitale vers la région. La réalité révèle des modifications sur les courants de ces flux par un fort accroissement des déplacements transversaux au sein de l’Ile-de-France qui représentent à eux seuls 20% des déplacements professionnels et leur progression est supérieure à celle de la moyenne des déplacements. Les trajets de banlieue à banlieue sont de ce fait très difficiles car les infrastructures routières et ferroviaires ne peuvent répondre de manière satisfaisante à cette demande. La stratégie des pôles d’excellence, rend cruciale une organisation des transports qui assure de bonnes liaisons régionales afin de permettre aux différents pôles d’entretenir des communications régulières. Au cours des entretiens, ce problème de la mauvaise qualité des infrastructures transversales en Ile-de-France fait partie des thèmes de réflexion de la part des dirigeants. Dans les critères de décision d’une localisation en Ile-de-France, les possibilités offertes par les transports (variété, accessibilité, coût) font partie des critères stratégiques. Il est à noter que le récent rapport de l’Inspection générale des Finances et du Conseil général des Ponts et Chaussées insiste sur le fait que la grande priorité de la région Ile-de-France est « d’achever au plus tôt certaines rocades et radiales, qui manquent actuellement au réseau structurant pour constituer des itinéraires physiquement continus et pour permettre au trafic régional et national d’accéder aux pôles de vie... »50. La plupart des études convergent et considèrent que la plus grande des priorités pour l’Ile-de-France est de terminer les rocades qui permettent de contourner l’agglomération parisienne. Ceci implique : - le bouclage complet de la francilienne (bouclage Sud-Ouest et bouclage Nord-Ouest) qui aujourd’hui comporte des ruptures importantes génératrices de nombreux dysfonctionnements et dont la non-réalisation rendrait très difficile une mise en œuvre de ce scénario ; - une bonne insertion des radiales (notamment de certaines autoroutes) sur les rocades. D’une façon générale, sur le long terme une priorité doit être donnée aux communications transversales. 5. Positionner les bases logistiques dans une réflexion globale La région Ile-de-France est un « hub » de tout premier plan à la fois logistique et économique (30% des emplois logistiques, 25% du parc et 40% des entrepôts sont situés en Ile-de-France). Cinq pôles logistiques dominent la région par leur attractivité à la fois nationale et internationale : il s’agit de quatre villes nouvelles (Marne-la-Vallée, Evry, Cergy-Pontoise, Melun-Sénart) et le pôle Roissy-Charles-de-Gaulle (n’est pas retenu ici le Port Autonome de Paris qui joue un rôle spécifique par rapport à cette étude). Trois difficultés influencent la stratégie des bases logistiques franciliennes :

- le coût immobilier des installations logistiques qui croît de manière très rapide, même si la région Ile-de-France est encore loin des prix rencontrés à Francfort ou à Londres.

- la pénurie de grandes surfaces disponibles (supérieures à 10 000 m²) qui devient un des problèmes de la région.

- la concentration des bases logistiques autour de certains axes et nœuds du réseau routier qui ont pour conséquence de saturer le trafic et de rendre difficile l’accessibilité des pôles.

Il est à noter que les grandes bases logistique de l’Ile-de-France, se trouvent principalement à l’est de la région. A long terme, ces trois phénomènes conduisent à un cycle qui peut favoriser ou ralentir le scénario de la polarisation :

- le desserrement : c’est le premier mouvement naturel conduit les responsables des bases logistiques à rechercher plus loin ce qu’ils ne trouvent plus à proximité. C’est ainsi que l’on

50 Inspection générale des Finances et Conseil général des Ponts et Chaussées, « Rapport d’audit sur les grands projets d’infrastructures de transports, Février 2003. La Documentation Française.

voit des bases logistiques s’installer en dehors de la région administrative pour atteindre les zones du bassin parisien situées « aux portes » de l’Ile-de-France : la Picardie, la Haute-Normandie (Rouen Vallée de Seine) et la région Centre (Orléans). C’est ce que montre la carte ci-après qui confirme que ce mouvement de desserrement concerne toutes les agglomérations.

Orléans a vu, ces dernières années, l’implantation des plus grands noms de la logistique, et connaît une véritable flambée des loyers et les bases déjà installées doivent évoluer en fonction des critères de modernité de plus en plus exigeants.

- le deuxième mouvement est celui de la saturation : certaines autoroutes (A1 et A6) aux entrées de l’Ile-de-France sont aujourd’hui en phase de saturation car ces nœuds de communication ont attiré les logisticiens et connaissent une réelle congestion. Le desserrement ne résout pas sur le long terme l’entrée nécessaire dans la région Ile-de-France.

Si la région Ile-de-France concentre plus d’un tiers des bases logistiques françaises, son inadaptation paraît plus évidente pour les PMI qui manquent d’une catégorie intermédiaire dite de « locaux d‘activité » de petites et moyennes dimensions comprenant une zone de stockage avec une partie de bureaux. Ce besoin non satisfait a été signalé par les PME/PMI couvertes par l’enquête et confirmé par les professionnels de l’immobilier (INSIGNIA BOURDAIS).

Ces deux problèmes se succèdent en un cycle « desserrement / congestion / desserrement » et montrent que la stratégie suivie par les métiers de la logistique n’est pas dissociable d’une réflexion d’ensemble sur la politique des transports à tenir en Ile-de-France. Le scénario de la polarisation met en évidence la complémentarité des approches. L’existence de zones de compétences placées en première ou en seconde couronne, nécessite une réflexion globale sur les transports et la logistique. 6. Instaurer un dialogue avec les collectivités locales L’examen des zones d’activité en Ile-de-France montre que celles-ci ne sont pas correspondent pas aux limites administratives des départements. Des zones d’activité débordent sur des départements différents, rendant le découpage administratif de la région en inadéquation avec son armature économique. L’importance de l’intercommunalité : Dans un contexte de décentralisation, l’accomplissement de projets complexes, qui seront une réalité dans un scénario de polarisation, nécessitera la systématisation de politiques d’aménagement fondées sur l’intercommunalité, telle que prévue par la loi sur la simplification de la coopération intercommunale (dite loi Chevènement), qui permet sous une forme fédérative, par le biais d’un EPCI 51 ou d’un GFP 52, de regrouper des communes autour d’un projet de développement local et de favoriser l’aménagement du territoire. Cette intercommunalité permet de mettre en œuvre une approche territoriale à la fois plus cohérente et efficace53. L’intercommunalité comme facteur de rationalisation : Ce rôle des collectivités locales, avec parfois de la part des dirigeants le regret que ses représentants n’aient pas toujours la vision globale nécessaire à des grands projets, est considéré comme prééminent dans la mise en œuvre d’une politique axée sur des pôles d’excellence. Comme l’indique l’IAURIF, « l’intercommunalité pourrait être l’occasion d’organiser de manière rationnelle des pôles d’emplois structurés, mieux adaptés aux besoins des entreprises (dans un soucis de complémentarité plutôt que de concurrence) sur des territoires pouvant exercer une attraction et profiter de pôles urbains proches »54. L’exemple du « Plateau de Saclay » est une illustration des possibilités offertes par l’intercommunalité au travers de 14 communes (Palaiseau, Saclay, Orsay,...) qui associent leurs efforts pour continuer à développer dans un cadre approprié un des tous premiers pôles scientifiques de l’Ile-de-France.

1.8.2.2.3 Les mutations engendrées par la formation de pôles d’excellence Peut-on dire s’il existe ou non une polarisation de fait en Ile-de-France ? Dans la première partie de ce rapport, il a été indiqué que la région possède aujourd’hui un grand nombre de zones d’activité, souvent éparpillées et que les zones de grande ampleur font défaut. A titre d’exemple, le département de la Seine-Saint-Denis compte 70 zones d’activités différentes, le Val d’Oise plus de 30. Des zones d’activité trop dispersées : la dispersion des activités sur le territoire francilien fragilise les entreprises qui bénéficient moins des effets d’agglomération et nuit à la lisibilité de l’organisation territoriale. Une étude réalisée par le CROCIS sur les pôles spécialisés en Ile-de-France fait état de cette dispersion des établissements qui caractérise une grande partie des activités industrielles.

51 Etablissement Public de Coopération Intercommunale 52 Groupement à Fiscalité Propre 53 IAURIF Note rapide Territoire d’aménagement, n°1, 2000, « Les territoires dans l’aménagement régional » 54 IAURIF Note rapide Le bilan du SDRIF n°309 septembre 2002.

Source : Crocis Enjeux Ile-de-France « Les pôle spécialisés en Ile-de-France » n° 44 octobre 2002

La polarisation industrielle en marche : La lecture des mutations spatiales sur les vingt dernières années montre une tendance de plus en plus marquée vers la constitution de pôles d’excellence, situés pour la plupart dans la partie Ouest de l’Ile-de-France. Cette tendance à la polarisation accrue n’est pas identique d’une filière industrielle à l’autre. La polarisation est relativement marquée dans les industries aéronautiques et spatiales, automobile et habillement, en revanche, les industries agroalimentaires apparaissent plus dispersées. La polarisation intervient dans d’autres domaines que celui de l’industrie. C’est ainsi que l’on a vu apparaître dans le 15eme arrondissement puis sur les communes environnantes (Issy-les-Moulineaux, Boulogne Billancourt) un pôle audiovisuel avec les sièges sociaux de chaînes de TV importantes (France 2 et France 3, TF1,...), alors que dans le Nord en première couronne apparaissent les unités de production qui alimentent en images et idées les chaînes audiovisuelles. Le secteur public lui-même entame un vaste mouvement de regroupement à partir du 12eme arrondissement pour s’étendre vers le 13eme arrondissement. La polarisation et la concentration vers l’Ouest : La polarisation qui commence à apparaître n’efface pas le déséquilibre Est / Ouest. La polarisation se manifeste sur les zones géographiques présentant le plus d’avantages économiques. Le schéma ci-dessous donne l’indice de spécialisation (qui ne se recoupe que partiellement avec la polarisation qui raisonne plus en filière qu’en secteur d’activité) du bassin parisien. On constate que l’indice est élevé pour Paris (espace tertiaire) mais aussi les Yvelines et le Val d’Oise situés à l’Ouest qui affichent des indices de spécialisation bien plus élevés que les autres départements de la région.

Source : Frédéric GILLI INSEE Picardie n°113 2003. Les Yvelines constituent un point de réflexion intéressant. Selon les informations communiquées par le Conseil Général, près de 23 % des salariés de ce département travaillent dans les industries et les services que l’on pourrait classer dans les métiers de haute technologie ; c'est l’un des taux les plus élevés des départements franciliens. Les industries et les services de haute technologie occupent ainsi une place déterminante dans ce département. La polarisation commence à émerger, car six communes totalisent 60% des emplois qualifiés de high-tech. En premier lieu, se trouve la zone de Vélizy-Villacoublay qui abrite près de 20 000 emplois salariés dans ces secteurs, et devient une place notable en high-tech au sein même de l’Ile-de-France. Ce pôle de haute technologie, qui a surgi dès les années 1960 avec les implantations de Matra, s’est trouvé conforté ces dix dernières années avec l’implantation de sociétés prestigieuses de la filière automobile et de la filière aéronautique. Par ailleurs, la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines accueille près de 25 000 emplois salariés des secteurs de l’industrie et des services de haute technologie.

Les limites à cette attractivité de l’Ouest résident dans deux évolutions complémentaires :

- la première évolution tient au fait que les coûts, nés de la rareté des réserves foncières, devraient logiquement freiner ce mouvement, dès lors que le bilan avantages-coûts jouera en défaveur des zones situées à l’Ouest ;

- la seconde évolution est plus volontariste et concerne les variables stratégiques dont

disposent les pouvoirs publics : - il relève de la politique d’aménagement du territoire régional de permettre les

rééquilibrages régionaux et d’assurer la cohésion sociale et territoriale. La révision du SDRIF, l’appel à prjet pour des pôles de compétitivité, la politique de l’agrément sont autant de moyens d’orienter la région francilienne vers un mode de développement plus équilibré.

- les collectivités locales disposent également d’un levier important qui est celui de la fiscalité directe locale (taxe foncière, taxe d’habitation, taxe professionnelle)

Cette possibilité d’une intervention des collectivités locales comme acteur de la polarisation peut donner lieu à des dérives négatives et des sous-scénarios ne sont pas à rejeter. Les collectivités peuvent par exemple faire un choix entre les entreprises qu’elles souhaitent conserver sur leur territoire et celles qu’elles souhaitent éloigner. Au cours des entretiens, certains dirigeants ont signalé que des responsables de collectivités de certaines zones d’activités ne souhaitaient pas avoir d’unités de production qui pourraient nuire à une image qu’ils souhaitent se donner. Ce choix se concrétise par des actions sur les politiques fiscales, les politiques urbaines, environnementales,… : augmentation des taxes foncières, renforcement des contraintes d’urbanisme, et des contraintes d’environnement, etc. L’objectif ici est d’éloigner les industries susceptibles de perturber la vie des citadins. Les conflits sociaux sont une limite très claire à ce scénario. Chaque fermeture de site sur une zone peut donner lieu à des conflits et peut ternir l’image sociale de la zone. La seule alternative consiste à instaurer un dialogue entre les représentants des collectivités territoriales et ceux des entreprises afin de parvenir à une politique cohérente et de consensus qui soit toute à la fois respectueuse de l’environnement, et favorable à la constitution de pôles d’excellence. A travers cette voie médiane on rejoint le scénario défini par la DATAR sous le nom de « Polycentrisme maillé » qui concilie les trois impératifs du développement : la cohésion, la performance économique, le respect des grands équilibres environnementaux55. Polarisation et évolution des métiers : La polarisation par une agglomération rationnelle des compétences va provoquer des regroupements de métiers qui vont dépasser les clivages habituels de l’entreprise. Les métiers vont se recomposer au sein de plates-formes uniques sur un même site selon une logique propre au produit qui sortira en bout de chaîne.

55 Aménager la France de 2020, rapport déjà cité, p.64 et suivantes

1.8.2.2.4 Les limites du scénario des pôles d’excellence Maintenir la diversité : la polarisation n’est pas synonyme de spécialisation comme cela est fréquemment admis dans les esprits. Les capitales qui exercent la plus forte attirance sont celles ayant réussi à garder une pluralité de métiers industriels. La polarisation s’appréhende en terme de filière. Cela signifie que l’on favorise l’accueil d’entreprises de tailles différentes (PMI ou TPI), de métiers différents mais ayant une complémentarité (liens amont et aval) avec des partenariats axés sur des centres de recherche et des écoles de prestige.

L’exemple des constructeurs automobiles illustre bien ces évolutions vers des partenariats qui impliquent entre autre une proximité géographique : dès la fin de l’année 1999, le groupe s’est lancé dans une politique de partenariats forts dan le but de parvenir dans des délais de plus en plus courts à des solutions réellement innovantes. Ces accords de partenariat s’orientent dans deux directions : démarche de collaboration avec des laboratoires scientifiques (CNRS, CEA,...) et des équipementiers avec des plans d’innovation fournisseurs.

Comme le fait observer Jean-Louis Guigou56, « désormais, la matière première devient le savoir, l’innovation, la capacité à interconnecter les fonctions, la force de l’organisation : on passe d’une géographie des coûts à une géographie des organisations qui renvoie à la montée de notions de qualité globale des territoires et des institutions qui s’impose dans une économie et une société beaucoup plus mobile ». La polarisation n’exclut pas la pluralité des sites : l’émergence de pôles d’excellence en Ile-de-France avec une présence des métiers de l’amont à l’aval, se réalise aujourd’hui sur plusieurs pôles majeurs. La pluralité des zones d’emplois n’est pas incompatible avec l’idée d’une polarisation. Il parait même sain qu’il y ait plusieurs sites qui cherchent à attirer les grandes entreprises françaises et internationales afin d’éviter les concentrations excessives qui donneraient à terme le sentiment de « ghetto industriel ». La différence entre les pôles se concrétisera sur la capacité qu’aura l’un d’eux à attirer les symboles de la filière. Cependant, il est nécessaire d’avoir présent à l’esprit que la région Ile-de-France a trop de sites industriels, souvent dispersés et ne permettant pas d’optimiser les externalités d’une polarisation, alors que les besoins des entreprises s’orientent de plus en plus sur des investissements ayant une emprise au sol importante. La polarisation se concrétisera sur les nouveaux investissements : certaines filières industrielles nécessitent de très gros investissements (c’est le cas de certains centres de production de la filière aéronautique, mais c’est aussi le cas de certains centres tertiaires et de R&D de la filière automobile) qui rendent toute mobilité spatiale difficilement réalisable sur un court ou moyen terme : de ce fait, la polarisation par l’émergence de zones d’excellence, doit se faire en attirant les nouveaux investissements. L’exemple de Vitapole du groupe Danone est un cas de création de site à haute valeur ajoutée. Vitapole est un centre de R&D pluridisciplinaire et mondial chargé d’élaborer des nouvelles technologies sur les trois métiers du groupe : produits frais, biscuits, eaux. Ce centre a été construit en 2002 à Palaiseau où se concentrent 200 laboratoires et plus de 10 000 chercheurs. Danone a recherché sur cet emplacement géographique l’excellence de la région de Palaiseau connue pour son pôle scientifique.

DELPHI, premier équipementier automobile mondial, regroupe en 2003 l’ensemble de ses efforts de recherche sur Tremblay en France. La raison majeure de ce choix réside dans la présence toute proche des sièges sociaux des deux grands majors français ainsi que dans la qualité des centres de recherche franciliens, notamment en matière de sécurité et de qualité environnementale.

Le site Vélizy pour PSA a été choisi pour deux types de raisons : - situation géographique du site : - la proximité de Paris a indéniablement joué car Paris incarne l’image de la créativité - le site est au centre du triangle d’or de l’automobile (complémentarités de métiers à proximité) ; - la grande accessibilité du site par l’autoroute et à proximité de l’aéroport d’Orly ; - logique interne au groupe : - ce centre est proche des centres de décision du groupe ; - il est aussi proche du service des achats.

Cet exemple montre bien que le choix du site intègre beaucoup de variables qui concernent la complémentarité des métiers qui est le fondement des activités à haute technologie où la conception exige une multitude de compétences qu’une entreprise seule, fût-elle puissante, ne peut réunir de manière exclusive.

56 Jean-Louis Guigou, « Aménager la France de 2020 », la Documentation Française, 2000

Existence de pôles alternatifs : Parmi les variables - clés, une est souvent citée par certaines entreprises : l’existence possible de pôles alternatifs à l’Ile-de-France. Cette variable exprime nettement une limite possible à la polarisation des activités industrielles en Ile-de-France. Lors des entretiens, les dirigeants d’entreprises ont fait part des attentes importantes des ingénieurs et des techniciens en matière de qualité de vie. A cet égard, l’Ile-de-France présente des désavantages (encombrements, éloignement habitat-emploi, cherté de la vie…). Toulouse est souvent citée comme une alternative possible à la région parisienne, notamment dans les métiers de la filière aéronautique-aérospatiale. Cette attitude, même si elle est marginale, implique que l’aménagement des zones d’emplois, notamment pour les métiers à haute valeur ajoutée, soit repensé en tenant compte des nouvelles valeurs des salariés les plus jeunes et les plus diplômés. Une zone doit comporter une offre de services complète (ces services vont des transports, aux capacités d’accès, aux restaurants d’entreprise et restaurants privés, au logement et aux services à la population : commerces, loisirs...). La zone du Mesnil-Amelot (zone industrielle à proximité de Roissy) marque un net déficit en services. A l’inverse, la zone du Bourget, en pleine restructuration, s’est rapprochée des collectivités locales limitrophes afin de développer des partenariats sur des métiers de services comme les centres de formation pour attirer les grandes entreprises de la chaîne de valeur aéronautique et aérospatiale. La prise en compte dès le démarrage d’une zone d’activité, de l’ensemble des services nécessaires est une préoccupation de la part des promoteurs : dans la zone d’emploi des 12ème et 13ème arrondissements de Paris, près de la Bibliothèque Nationale, cette préoccupation a été prise en compte dès le démarrage de l’opération.

La montée des contraintes environnementales : cet élément a été cité à de nombreuses reprises par les industriels qui sont conscients que l’industrie est de moins en moins tolérée dans un environnement marqué par l’habitat. L’acte de produire génère le plus souvent des nuisances de toutes natures (sonores, olfactives, rejets boueux,...). Au fur et à mesure que la ville progresse l’incompatibilité habitat activité est de plus en plus évidente. L’exemple de l’activité de la meunerie est illustratif de la puissance de la politique environnementale comme moyen de structurer l’espace. En Ile-de-France, en l’espace de cinq ans, deux grands moulins ont fermé. La raison essentielle de ces fermetures a pour origine le décret connu sous le nom de « décret silo » datant de 1998 et qui oblige les installations de stockage d’une certaine taille à mettre en place des systèmes permettant de limiter les risques d’explosion. L’application de ce décret conduisait les industriels de la meunerie à effectuer des investissements considérables sans rapport avec la rentabilité de l’activité. Par conséquent les industriels de ce secteur ont choisi de fermer les sites franciliens pour envisager des installations plus modernes au-delà de la deuxième couronne de l’Ile-de-France. Cet exemple traduit la difficulté de maintenir dans une zone urbaine dense des activités qui ne peuvent supporter la proximité de l’habitat. Ce scénario de limitation prend tout son sens avec le texte présenté le 25 juin 2003 au conseil des ministres et dont l’ambition est d’intégrer dans le préambule de la constitution les droits de l’environnement. C’est en effet un pas supplémentaire en faveur d’une prise en compte de plus en plus forte des aspects environnementaux.57 Extrait de l’article du journal Le monde du 25 juin 2003 citant une partie du texte qu’a examiné le conseil des ministres : « chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et favorable à sa santé. Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement détenues par les autorités publiques ». Ce scénario impacte en tout premier lieu les industries à rejets et à effluents (traitements des eaux, déchets solides,…). Les entreprises les plus fragiles et concernées par ces aspects environnementaux ne pourront pas résister à la montée des investissements engendrés par les contraintes d’environnement. On devrait donc assister à une délocalisation de ces industries à la périphérie de l’Ile-de-France (dans les villes avant-poste par exemple). Sont également concernées les industries à nuisances sonores qui devront investir pour respecter de nouvelles contraintes dans ce domaine. De même, sont compromises l’avenir des industries enserrées dans des zones d’habitat qui ne pourront à terme maintenir la mixité entre production et habitation. Ce scénario, s’il n’est pas maîtrisé et mis en œuvre progressivement, est source de délocalisations importantes : tout dépend du dialogue qui sera instauré entre les collectivités locales et les entreprises.

57 Le monde, article du 25 juin 2003, « Le droit à l’environnement va être inscrit dans la constitution », Béatrice Gurrey

1.9 Conclusion générale L’Ile-de-France apparaît au terme de cette analyse comme une région forte de ses richesses et de ses atouts, mais aussi confrontée à des enjeux importants dans un contexte de concurrence accrue entre les grandes agglomérations. La région francilienne doit relever les défis qui en feront ou non un pôle majeur de l’Europe étendue. Deux grandes voies s’ouvrent à elle :

1. Laisser faire, laisser agir les forces du marché : cette logique que nous avons dénommée : « Agir par l’optimisation des coûts et la rationalisation des sites », a donné à l’Ile-de-France de nombreux résultats positifs. Elle a fait de cette région une des plus productives au monde et l’une des plus diversifiées en Europe. Mais une stratégie guidée uniquement par le marché conduit à des déséquilibres territoriaux et ne permet pas de structurer le système productif de façon optimale.

2. Face aux formidables enjeux de l’Europe élargie, la diversité de l’industrie francilienne doit

progressivement s’organiser en pôles de compétences et d’excellence. Cette profonde mutation suppose que trois actions majeures soient mises en œuvre :

- Construction d’une image pour Paris-Région : L’Ile-de-France concentre la majorité des

emplois des filières de la haute technologie sans que cette image ait pu être véritablement capitalisée. La construction de l’image de Paris-Région passe par une réflexion qui tourne autour de trois axes : sur quels métiers se valoriser ? sur quelles capacités relationnelles investir ? sur quel capital imaginaire faire rêver ?

- Favoriser l’émergence de pôles d’excellence : La comparaison des grandes

agglomérations européennes montre qu’il n’y a pas de modèle pré-établi : de grandes agglomérations n’ont qu’un tissu industriel fragile, tandis que d’autres disposent d’une industrie diversifiée et puissante. Quoi qu’il en soit, tout converge vers l’importance de l’émergence de pôles d’excellence qui ne sont pas des pôles de spécialisations mais des pôles d’agglomération de compétences trouvant leur synergie dans des industries innovantes à fort niveau de Recherche et Développement, de conception et d’études. La poursuite de cet objectif suppose une action volontariste des pouvoirs publics au niveau national et plus local (bassin parisien, région).

- Concertation et dialogue entre collectivités locales et entreprises : Ce scénario ne peut

pas se construire sans l’interface constructive des collectivités locales qui doivent s’organiser sous la forme de l’intercommunalité, seul moyen de pouvoir créer en Ile-de-France des projets de grande ampleur et qui donneront à cette région la cohérence qui semble lui faire défaut.

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Troisième Partie : RECOMMANDATIONS ET PLAN D’ACTION

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Préambule Les recommandations qui suivent ne prennent pas partie pour l’un des deux scénarios définis dans l’étude. Elles se situent en toile de fond de ces scénarios. I. Études et réflexions 1. Réflexion d’ensemble sur « Paris-Région » et ses activités industrielles Le point de départ consiste à rechercher l’identité de la région francilienne. Cette recherche doit s’articuler autour de trois axes : les métiers, l’attractivité et l’imaginaire. Deux écueils doivent être évités : - penser que Paris et sa région peuvent avoir le même nom. Paris a son image connue à travers le monde et il serait illusoire de penser qu’il serait possible de la modifier.

- éviter un catalogue de métiers qui serait censé refléter les points forts de la région.

- axe métiers : privilégier les métiers industriels qui sont déjà des axes forts sur lesquels il est possible de construire une image et qui offrent des perspectives en termes d’emplois qualifiés.

- axe attractivité : à partir des métiers « phares », déterminer une politique de grands événements internationaux capables de construire un capital relationnel.

- axe imaginaire : en combinant les deux axes qui précèdent, définir une IMAGE fondatrice de la région de Paris avec la symbolique et la culture qui s’y rapporte.

2. Région économique et région administrative : la configuration administrative de la région diffère de plus en plus de sa configuration économique avec un rôle important joué par des villes avant-poste aux « entrées » de l’Ile-de-France. L’organisation du système productif devrait être systématiquement appréhendée dans des limites plus larges que celles de la région administrative. 3. Inventaire exhaustif des forces et faiblesses des zones d’activité de la région : établir une information exhaustive des forces et faiblesses des zones d’activité de la région avec une approche susceptible d’aider les investisseurs à définir une stratégie de localisation. 4. Analyse des modes d’organisation avancés du travail : étudier la manière dont certaines filières s’organisent dans leur travail (existence de plates-formes communes entre acteurs différents) pour favoriser l’innovation et définir dans quelle mesure ces modes d’organisation peuvent se transposer à des univers différents. II. Initiatives en faveur des acteurs locaux et régionaux

5. Définir les grandes orientations économiques de la région eut égard à la politique industrielle : - Veiller à maintenir la diversité industrielle de la région. - Conserver une grande diversité du tissu économique (PMI et grandes entreprises). - Favoriser parallèlement l’émergence de filières porteuses (en termes d’emplois hautement qualifiés). 6. Donner les moyens à l’intercommunalité : inciter les autorités locales à s’organiser en intercommunalité pour des projets de grande envergure. Faire appel à des professionnels de la gestion de projets pour assurer le management d’opérations intercommunales de grande ampleur. 7. Développer la politique d’accueil des investisseurs étrangers en région

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III. Initiatives en faveur des zones d’activité de la région 8. Mettre à niveau les zones d’activité franciliennes : élaborer un inventaire détaillé des difficultés des zones d’activité de la région et déterminer les zones prioritaires afin d’assurer leur mise à niveau (bâtiments, services, fléchage,....), voire leur réhabilitation pour certaines d’entre elles. 9. Mettre au point des plates-formes communes de travail : prévoir dans les zones d’activité des centres de travail en commun : les technocentres constituent un des moyens de concrétiser le mode de travail collaboratif mettant en relation sur un même site des sociétés et des métiers différents pour favoriser l’optimisation de l’innovation. 10. Maintenir des locaux d’activité pour les PMI : construire des locaux d’activité pour les PMI franciliennes : les zones d’activité de la région disposent de grands entrepôts mais les locaux d’activité (locaux + entrepôts) font défaut aux petites unités industrielles qui ont besoin de vivre à proximité de la région. 11. Terminer les infrastructures de transport permettant de faciliter les liaisons inter banlieues : la politique de transport en Ile-de-France est encore beaucoup trop radiale ; il paraît nécessaire de finaliser en priorité les transports permettant une meilleure liaison des zones d’activité entre elles et d’alléger les temps de transport entre les banlieues. 12. Bâtir une stratégie de complémentarité entre les zones d’activité et les plates-formes logistiques : la logistique, essentielle dans une politique d’optimisation des coûts, a besoin d’importantes réserves foncières en région pour se redéployer mais ce redéploiement doit se faire dans un cadre où les moyens de transports sont repensés (éviter la trop grande prééminence de la route). IV. Initiatives en faveur de la formation 13. Améliorer la lisibilité des filières de formation aux métiers qualifiés de l’industrie : la région dispose d’un ensemble très riche de filières professionnelles préparant aux métiers de l’industrie (techniciens, ingénieurs, chercheurs), mais cette multiplicité doit gagner en simplicité pour construire une offre plus lisible et plus rationnelle. 14. Entreprendre toute action visant à améliorer l’image de l’industrie, notamment auprès des classes d’âge les plus jeunes :

- favoriser les initiatives permettant de montrer les différentes facettes de l’industrie ainsi que les possibilités et perspectives qu’elle offre en termes de carrière

- développer les partenariats entre industries et écoles supérieures autres que les écoles d’ingénieurs. IV. Initiatives en faveur de la complémentarité industries-services 15. Favoriser les liaisons entre les services et l’industrie : l’acte de produire évolue considérablement dans le temps et l’externalisation doit devenir une pratique courante afin de rendre la production encore plus évolutive. Inciter à une réflexion permanente sur les métiers que doit conserver une unité de production et préparer les esprits à des changements permanents.

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