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Du même auteur

Séraphin illustré, Les 400 coups, 2010.Contes de la Montagne du Père Bougonneux, nouvelles,

Le Bulletin des agriculteurs, 1941-1970.Les Pamphlets de Valdombre, périodique, 1936-1942.Précisions sur « Un homme et son péché », Éditions du Vieux Chêne, 1936.Le Déserteur et autres récits de la terre, Éditions du Vieux Chêne, 1934.Un homme et son péché, Éditions du Totem, 1933.Ombres et clameurs. Regards sur la littérature canadienne, essai,

Éditions Albert Lévesque, 1933.Le Secret de Lindbergh, Éditions de la Porte d’or, 1928.Les Vivants et les autres, Librairie Ducharme, 1922.

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Nouvelles Histoires des Pays d’eN Haut

Séraphin

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Projet dirigé par Martine Podesto, directrice des éditions

Adjoint éditorial : Éric St-PierreConception graphique : Nathalie CaronMise en pages : Studio C1C4Révision linguistique : Rosaire Fontaine, Philippe Paré-Moreau et

Myriam de RepentignyIllustration : © Albert Chartier, 1951, tous droits réservés

Conversion au format ePub: Studio C1C4

Québec Amérique329, rue de la Commune Ouest, 3e étage Montréal (Québec) Canada H2Y 2E1Téléphone : 514 499-3000, télécopieur : 514 499-3010

Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.

Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.

Les Éditions Québec Amérique bénéficient du programme de subvention globale du Conseil des Arts du Canada. Elles tiennent également à remercier la SODEC pour son appui financier.

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Grignon, Claude-Henri, 1894-1976Séraphin : Nouvelles histoires des pays d’en haut(Tous continents)Publié antérieurement dans la revue Bonnes soirées à partir de 1954.L’ouvrage complet comprendra 3 volumes.Sommaire : t. 1. Le grand roman canadien.ISBN 978-2-7644-2510-7 (vol. 1) (Version imprimée)ISBN 978-2-7644-1194-0 (PDF)ISBN 978-2-7644-1195-7 (ePub)I. Titre. II. Titre : Le grand roman canadien. III. Collection : Tous continents.PS8513.R68S47 2013 C843’.52 C2013-940944-0PS9513.R68S47 2013

Dépôt légal : 3e trimestre 2013Bibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du Canada

Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés

© Éditions Québec Amérique inc., 2013.quebec-amerique.com

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Nouvelles Histoires des Pays d’eN Haut

tome 1

Séraphin

Claude-Henri grignon Préface de Pierre grignon

TexTe inédiT

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PRÉFACEpar Pierre Grignon

Une œuvre originale

Nous publions, plus de soixante ans après sa parution dans l’édi-tion canadienne du magazine européen Bonnes Soirées, le texte intégral du Séraphin de Claude-Henri Grignon. L’écrivain publia cette œuvre originale sous forme de feuilleton au tout début des années 1950. Nous sommes alors, notons-le bien, avant Les Belles Histoires des pays d’en haut à la télévision, qui entreront en ondes en septembre 1956 avec l’immense succès que l’on sait. Le feuilleton n’est pas un art mineur dans la littérature, tant en France qu’ailleurs dans le monde. Le feuilleton, grâce au très large lectorat qu’il assurait dans les grands journaux, fit souvent davantage pour la célébrité, et la richesse, des grands écrivains que ne le permettaient les éditeurs de livres de l’époque aux ventes ridiculement limitées. Plusieurs feuilletons auront été de vastes succès populaires dans des revues et des journaux avant de cons-tituer de grands classiques et d’être édités sous forme de livres.

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Claude-Henri  Grignon avait l’âge très respectable de soixante-deux ans quand il signa son premier contrat de télé-vision à Radio-Canada. C’est d’ailleurs le surcroît de travail que lui imposait ce nouveau défi qui l’amena à mettre un terme à l’écriture du Séraphin des Bonnes Soirées. Détail important que celui-là, car ce Séraphin est bien une œuvre en soi, annoncia-trice à plusieurs égards des Belles Histoires des pays d’en haut. Elle nous instruit sur le cheminement de l’écrivain vers ce qui donnera une ampleur jusque-là insoupçonnée à son univers dramatique et qui s’imposera comme une émission phare de notre télévision nationale, émission bien vivante encore de nos jours.

Situer les très beaux textes du Séraphin dans l’abondante production littéraire de son auteur est essentiel à notre bonne compréhension. Ainsi certains personnages de premier ordre des Belles Histoires n’appartiennent-ils pas encore à l’action dra-matique comme telle de l’œuvre, quoique de nombreuses réfé-rences historiques leur assurent une présence presque constante. C’est le cas en particulier du Curé Labelle et d’Arthur Buies. Les Français diraient qu’ils sont en réserve de la République à titre de futurs personnages « bien vivants » dans l’univers romanesque de Grignon. La différence la plus notable que l’on puisse éta-blir entre Un homme et son péché, à la radio depuis 1939, et Les Belles Histoires de la télévision, à compter de 1956, repose sur-tout sur la très forte présence du Curé Labelle. La toute première scène de la série télé s’ouvre d’ailleurs dans le bureau de Labelle à Saint-Jérôme. Et ce n’est pas par hasard. Claude-Henri Grignon attendait ce moment depuis très longtemps. Le 29 septembre 1935, vingt et un ans presque jour pour jour avant Les Belles Histoires des pays d’en haut, Grignon, sous son pseudonyme de Valdombre, écrivait à son maître Olivar Asselin :

« je ne croupirai pas dans un fonctionnarisme bébête qui m’empêcherait d’écrire l’histoire roman‑ cée du curé labelle et tout le roman social de nos mœurs si pures à l’époque de la colonisation dans le fin nord. »

Séraphin – Nouvelles Histoires des pays d’en haut10

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On peut parler du projet d’une vie. Claude-Henri Grignon tenait de son père, Wilfrid Grignon, disciple authentique et ami intime du curé Labelle, cette immense admiration pour le Roi du Nord. Le jeune Wilfrid avait quatorze ans quand le curé Antoine Labelle arriva à Saint-Jérôme, en 1868. Le presbytère faisait face à l’Hôtel du peuple de Médard Grignon. Des liens très forts se tissent rapidement entre les deux hommes. Wilfrid est un grand jeune homme sérieux. Brillant même. Il est l’aîné des douze en-fants qui naîtront chez l’aubergiste et son adorable femme. Il étudie au sémi naire de Sainte-Thérèse, précisément où Labelle avait fait ses études classiques. Le curé s’intéressa de près aux études classiques puis à la formation en médecine de son jeune « voisin d’en face ». Le docteur Wilfrid Grignon aura donc connu le curé Labelle, mort en 1891, pen dant vingt-trois ans. Ces deux géants partagèrent les mêmes convictions profondes sur la colo-nisation, sur les progrès nécessaires de l’agriculture et sur la politique. C’est Labelle qui demanda au jeune docteur Grignon

d’aller s’établir à Sainte-Adèle en 1878. Le docteur Grignon aura même une ferme expérimentale et un laboratoire de mé-decine vétérinaire à Sainte-Adèle, en plus de publier des centaines de chroniques, plusieurs livres et de porter le titre pres-tigieux de Conférencier officiel du Gou-vernement en agriculture. Il fut maire de Sainte-Adèle… bien évidemment et pré-fet du comté de Terrebonne. Tout cela allait marquer le jeune Eugène-Henri, plus tard célèbre sous le pseudonyme de Claude-Henri.

Si nous insistons sur le fait que Séraphin est une œuvre ori-ginale, cela tient au rôle de premier plan qu’y tiennent le Gros Docteur et ses amours avec la belle Angélique. Claude-Henri Grignon a beaucoup écrit sur son père. L’un des textes, paru

Wilfrid GrignonGracieuseté de Pierre Grignon

Préface 11

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dans L’Histoire de Sainte‑Adèle en 1927, s’intitule Le médecin des pauvres. Il en a parlé abondamment dans ses chroniques, lors de ses conférences et de ses causeries. Quand il entreprend l’écriture de Séraphin pour les Bonnes Soirées, il sait très bien quel hom-mage il rendra à son père. D’ailleurs, en 1956, lorsque viendra le temps de définir les traits physiques du Gros Docteur des Belles Histoires de la télé vision, Claude-Henri Grignon remettra à Fernand Quirion, le premier réalisateur, une photographie de son père. Si l’auteur s’interdisait d’appeler son personnage « doc-teur Grignon », il le nomma « Marignon », auquel il ne manque que le « G » pour retrouver l’orthographe de sa famille.

Une conclusion s’impose : le Séraphin paru dans Bonnes Soirées a son caractère propre. Il s’agit de textes savoureux, comme l’auteur sait tellement bien en écrire. Il nous entraîne dans un univers dramatique en mutation. Ses personnages s’inspirent en partie de ceux de l’émission radiophonique Un homme et son péché chaque jour en ondes en ce début des années 1950. Grignon joue avec ses personnages, anciens et nouveaux, et ses intrigues créent une œuvre nouvelle, qui a sa propre identité. Ainsi observe-t-on que Séraphin est parfois absent de chapitres entiers et que les noms de certains personnages sont en pleine mouvance.

Présence et actualité d’un écrivain et de son œuvre

Claude-Henri Grignon disait souvent, avec un sourire de satis-fac tion et sur un ton qui ne permettait aucune réplique : « Séraphin ne mourra jamais. Il ne peut pas mourir. Il vivra tant que nous par lerons français au Pays de Québec ! » L’Histoire tend à lui donner raison trente-sept ans après sa mort, survenue le 3 avril 1976. Il disait aussi, d’un air plus moqueur cette fois : « J’ai tué le prénom Séraphin ! » Il avait bien raison. À compter des années 1940, soit une décennie après la parution de son

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roman Un homme et son péché, mais surtout après la mise en ondes à la radio de Radio-Canada de la première adaptation du roman en septembre 1939, plus personne n’osa prénommer son fils « Séraphin ». Et pourtant, ce prénom avait été fréquent jusqu’alors. Pensons à l’his torien Séraphin Marion, au notaire Séraphin Cherrier, au premier-né de la famille Bock qui avait le privilège de porter le beau prénom de l’ancêtre, Séraphin, et ce sur plusieurs géné rations. Fait cocasse, le bedeau du curé Antoine Labelle, le vrai, s’appelait Séraphin Gaudreau. Les regis-tres de nos paroisses en témoignent.

« J’ai déménagé les pays d’en haut. »

Quant aux pays d’en haut de l’époque de l’Amérique française, vocable connu des administrateurs, des coureurs des bois, des militaires, des missionnaires et des colons, ils partaient bien du nord de la Louisiane pour atteindre les Grands Lacs vers l’Ouest, mais ne passaient surtout pas par les Laurentides au nord de Mon tréal. Cette expression, maintes fois attestée dans les textes anciens et chez plusieurs auteurs tels Lionel Groulx, Georges-Hébert Germain et Francine Ouellette, entre autres, identifiait les pays des différentes nations amérindiennes de l’Amérique française sur cet immense territoire. Or, Claude-Henri Grignon aimait ce vocable. Il en connaissait très bien l’acception première et avait entendu ces mots de la bouche de son père ou d’autres gens cultivés à l’époque de sa jeunesse à Sainte-Adèle. Jamais cependant elle n’avait eu une consonance régionale ou lauren-tienne.

L’immense région au nord de la seigneurie des Mille-Îles, au nord de Saint-Sauveur donc, s’appelait les Cantons du Nord ou simplement le Nord. Et quand Claude-Henri Grignon affir-mait qu’il avait « déménagé les pays d’en haut » (qu’il écrivait au début toujours en lettres minuscules), il avait raison une fois

Préface 13

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de plus. Notons que Claude-Henri Grignon lui-même connut, au fil des ans, une variante très significative dans l’usage et la graphie des « pays d’en haut ». Il fit ensuite un premier nom pro-pre : les « Pays d’en haut », puis il passa aux « Pays d’en Haut » devant la généralité grandissante de l’expression. Il a imposé, par la puissance évocatrice de son œuvre, par l’usage sciemment « anachronique » et quasi-quotidien qu’il en a fait, cette expres-sion passée depuis lors dans l’usage courant. À telle enseigne que ces mots composent maintenant un beau nom propre avec ma-juscules et traits d’union : les Pays‑d’en‑Haut. La fiction s’impose ici comme réalité. S’il y a depuis une trentaine d’années un terri-toire administratif bien défini sous le vocable MRC des Pays‑d’en‑Haut, formée d’une douzaine de municipalités dont Sainte-Adèle et Saint-Sauveur, les gens persistent à identifier les pays d’en haut aux frontières et aux lieux nommés dans l’univers dramatique beaucoup plus étendu des Belles Histoires des pays d’en haut. Il en est ainsi de Saint-Jérôme, de Sainte-Agathe ou de Sainte-Scholastique par exemple, qui font partie de trois MRC diffé rentes.

Le succès franchement phénoménal des Belles Histoires des pays d’en haut depuis 1956 peut étonner. Avec comme consé-quence que plusieurs se demandent si Claude-Henri Grignon, né en 1894, a écrit autre chose. J’ai eu à répondre à cette question des milliers de fois depuis ma jeunesse. Plus tard, et encore aujourd’hui, mon enseignement de la littérature et du cinéma, mes conférences au Québec et au Nouveau-Brunswick, mes chroniques et mes écrits sur le sujet m’ont permis de lever le voile sur ce qui ne devrait pourtant pas être un mystère. Claude-Henri Grignon a écrit tous les jours pendant presque soixante années. Tous les jours, à compter de ses vingt ans, en 1914, comme si, à sa manière, il partait à la Première Guerre. Sa déci-sion d’écrire et de ne faire que cela à une époque où personne ne gagnait sa vie avec sa plume étonna au plus haut point le

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Gros Docteur Wilfrid Grignon, son père. Ce choix n’en demeura pas moins irrévocable. Ce fils prodigue allait être journaliste, mais un journaliste de combat, rapidement devenu un polémiste toujours prêt à en découdre par l’écrit et plus tard par la parole.

Pour les gens de lettres de sa génération, pour les journa-listes, les politiciens et les personnes cultivées de ce temps et d’aujourd’hui, Claude-Henri Grignon était avant tout un pam-phlé taire sans merci qui sabrait sous le pseudonyme de Val-dombre. On définit le pamphlétaire comme un écrivain de combat, un polémiste, du grec polemikos : relatif à la guerre. Pour Grignon lui-même, ses Pamphlets de Valdombre (1936-1942) sont demeurés, avec ses nombreux textes polémiques, l’axe cen-tral déterminant de son œuvre écrite. Son roman Un homme et son péché fut à ses yeux, indéfectiblement, « un pamphlet contre l’argent ». Il l’a toujours soutenu et des centaines de dédicaces, entre autres, en témoignent. La pauvreté extrême qu’il connais-sait en 1933, et plus précisément depuis le décès de son père en 1915, lui a inspiré ce texte magnifique, mais empreint d’une violente dénonciation de l’argent et de sa face la plus hideuse, le péché d’avarice.

Sous divers médias, et s’étendant sur plus de cinq géné ra-tions, Claude-Henri Grignon aura marqué profondément l’ima-ginaire collectif du Canada français. Le réseau national de Radio-Canada s’étendait déjà d’un océan à l’autre, avec un débor-dement significatif des ondes radio vers les Franco-Américains de la Nouvelle-Angleterre. Il n’en demeure pas moins que l’œuvre écrite de cet auteur est colossale et diversifiée. On pourrait légi-timement penser que les volets radiophonique, cinématogra-phique et télévisuel de l’œuvre de Claude-Henri Grignon ont en quelque sorte occulté, pour ne pas dire « écrasé », la vie intense de l’homme de lettres remarquable que fut Grignon.

Toujours dans ce même esprit de situer le Séraphin de Bonnes Soirées dans la vie et l’œuvre de son auteur, permettez

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que je reprenne, parce que froidement factuel, un passage de ma préface du Séraphin illustré (Les éditions Les 400 coups, 2010) : « En 1933, à la publication du roman Un homme et son péché, Claude-Henri Grignon n’en était pas à ses premières armes en litté ra ture. Il avait déjà publié un premier pamphlet en 1922 : Les vivants et les autres, suivi du Secret de Lindbergh (1928) et d’Om‑bres et clameurs (1933). Il poursuivra avec Le déserteur et autres récits de la terre (1934), Précisions sur Un homme et son péché (1936), et ce qui fut l’œuvre de sa vie de polémiste : Les  Pamphlets de Valdombre… » On parle ici de milliers de pages.

« Il faut ajouter une œuvre radiophonique de près de 30 000 pages de scénarios, 1264 pages d’une œuvre ori‑ginale, restée indépendante des personnages du roman de 1933 : les Contes de la montagne du Père Bougonneux dans le Bulletin des agriculteurs entre 1941 et 1970. En plus du journalisme, du roman, du radio roman, il écrivit et produisit des paysanneries, pièces de théâtre interpré‑tées par les comédiens si populaires de l’émission radio‑phonique… Le cinéma viendra en 1949 et 1950 avec deux longs métrages au succès constant. Entre 1949 et 1953 l’écrivain aura sa propre émission de radio, le Journal parlé de Claude-Henri Grignon, sur les ondes de CKAC tous les dimanches soirs. Il est maire de son cher village Sainte‑Adèle et préfet du grand comté de Terrebonne. »

Cependant un mystère plane quant au lieu où se passe l’his-toire de ce Séraphin paru dans Bonnes Soirées. Jamais il n’y est fait mention de Sainte-Adèle. L’auteur ne nomme pas le vil-lage qu’habitent tous ses personnages. Et pourtant tout concourt à définir les lieux. Même la maison du Gros Docteur avec cette demeure qu’habite la belle Angélique, juste derrière. Toutes les références géographiques sont d’une précision remarquable ; toutes ces paroisses voisines, bien identifiées, ont un centre

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névralgique, politique et historique qui ne peut être que Sainte-Adèle. Ce trait quelque peu fascinant de l’œuvre demeure un mystère…

Oui, le Séraphin que nous publions en 2013 est un texte ori-ginal, précurseur des Belles Histoires et qui prend fin au moment où l’auteur s’engage dans l’aventure périlleuse de la télévision à peine naissante. En 1956, la télévision n’a que quatre années d’existence. Plusieurs considèrent sa venue comme celle d’un média sans grand avenir, un jouet technologique, un vil sous-produit du théâtre. Tout reste donc à inventer, tant sur le plan technique que sur celui de la création dans chacun des do maines de cet art révolutionnaire. Un écrivain de soixante-deux ans, passéiste convaincu et affiché, accepte de s’adapter aux contin-gences d’un monde parsemé d’inconnues et de pièges de toutes sortes.

C’est pour relever ce défi énorme que l’auteur déjà célèbre, que le créateur de Séraphin Poudrier dut mettre un terme à Séraphin, ce feuilleton qu’il avait eu tant de bonheur à écrire.

Monsieur Rosaire Fontaine

Il y a quelques années, Rosaire Fontaine me rendit visite chez moi à Sainte-Adèle. Les trésors que possède ce collectionneur remarquable me renversèrent. Ses archives sur Claude-Henri Grignon permirent d’abord de publier le Séraphin illustré que Grignon avait écrit pour le Bulletin des agriculteurs et qu’Albert Chartier avait illustré sur une période de dix-neuf ans. Michel Viau mena à bien la réalisation de ce très bel album paru en 2010. Mais mon ami Rosaire avait un trésor plus précieux en-core : tous les épisodes du Séraphin que Grignon publia sous forme de feuilleton dans Bonnes Soirées. Une œuvre magnifique dont je ne me remémorais que des bribes, ayant été pensionnaire au Collège de Saint-Laurent toutes les années de sa parution. Des

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souvenirs lointains d’une revue, à la maison, lors de nos rares « libérations conditionnelles » du collège. Les textes originaux de Séraphin que Rosaire me remit me firent découvrir le chaî-non manquant… à ma culture. La suite des événements, vous en tenez le premier tome entre vos mains. Merci Rosaire.

Pierre Grignon, Sainte‑Adèle, avril 2013

Séraphin – Nouvelles Histoires des pays d’en haut18

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AvAnt-PRoPospar Rosaire Fontaine

Un homme et son œuvre se joignent à Bonnes Soirées1

En 1952, Claude-Henri Grignon était déjà l’un des auteurs les plus prolifiques et respectés de son époque. Les neuf dernières années avaient été consacrées à l’écriture de scénarios pour le radioroman Un homme et son péché et son adaptation théâtrale Les paysanne‑ ries. Deux longs métrages, directement inspirés des personnages de Grignon et intitulés Un homme et son péché et Séraphin, avaient été diffusés sur les grands écrans en 1949 et 1950 et couronnés de

succès. En 1951, l’abandon du projet d’un troisième film, Donalda, avait permis à Claude-Henri Grignon, libéré de ses fonctions de maire de Sainte-Adèle (1941-44, 1945-50), d’entrepren-dre avec l’illustrateur Albert Chartier

1. Quelques rares bibelots d’époque. De gauche à droite : deux banques à l’effigie d’Hector Charland, vendues vers la fin des années quarante, et deux statuettes en plâtre disponibles par offre postale de la compagnie Pepsodent durant l’été 1954.

Photo : © Mario Landerman1

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la publication de la bande dessinée Séraphin illustré dans le Bulle‑tin des Agriculteurs. C’est à cette époque qu’il entreprit l’écriture de toutes nouvelles aventures mettant en scène ses célèbres per-sonnages. Son œuvre, imposante, fut publiée intégralement sous forme de roman-feuilleton dans la revue d’origine belge Bonnes Soirées.

La petite histoire de Bonnes Soirées au Québec

C’est avec le premier numéro de Bonnes Soirées, publié au début de l’année 1922, que les éditions Dupuis firent leurs premiers battements d’ailes. Cette publication belge, constituée à la base de romans-feuilletons et destinée principalement à la « femme au foyer », fut rejointe en 1924 par Moustique, un journal humoris-tique, et en 1938 par le Journal Spirou. Ces deux autres hebdo-madaires sont toujours publiés à fort tirage encore de nos jours. C’est avec l’apparition de ce dernier titre que l’éditeur s’est graduel lement spécialisé en bandes dessinées avec des person-nages comme Lucky Luke, le Marsupilami, Gaston Lagaffe et les Schtroumpfs, sans oublier les aventures de Spirou.

Le succès de Bonnes Soirées ne se fit pas attendre : cinq cent mille exemplaires par semaine furent bientôt distribués en Europe.

En 1952, les Éditions J. Dupuis Fils inc. firent une incursion en sol québécois et entreprirent d’offrir à leur nouveau marché une version adaptée de Bonnes Soirées, qui proposait des romans, des recettes ou des patrons de couture suggérés par des auteurs et des artisans locaux. La contribution québécoise à la revue représentait en moyenne trente pour cent du contenu de l’hebdomadaire, qui substituait à cette fin du matériel européen. C’est dans ce contexte que fut annoncé en grande pompe le début du grand roman- feuilleton de Claude-Henri Grignon. Cet ajout à Bonnes Soirées devint rapidement le moteur commercial de l’hebdomadaire. À un tel point qu’on proposa, deux mois suivant le début de la

Séraphin – Nouvelles Histoires des pays d’en haut20

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REMERCiEMEnts

J’aimerais remercier monsieur Pierre Grignon pour sa grande ouverture d’esprit et pour son dévouement remarquable à pré-server la mémoire de l’œuvre de son illustre parrain. Je remercie également Michel Viau, Christiane Chartier et Mario Landerman pour leur aide et leur grande disponibilité, et finalement, ma tendre moitié Jacynthe Laliberté pour sa patience à toute épreuve.

Rosaire Fontaine

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