52
LE RECOURS EN DIFFAMATION: REMÈDE OU MAL NÉCESSAIRE? Conférence présentée dans le cadre du Congrès de la Fédération Québécoise des Municipalités Québec, le 26 septembre 2014 Par Me Alain-Claude Desforges

Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

  • Upload
    others

  • View
    3

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

LE RECOURS EN DIFFAMATION:

REMÈDE OU MAL NÉCESSAIRE?

Conférence présentée dans le cadre du Congrès de la Fédération Québécoise des

Municipalités Québec, le 26 septembre 2014

Par Me Alain-Claude Desforges

Page 2: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

REMARQUES PRÉLIMINAIRES

w  • Des procédures bien de notre temps : la liberté d’expression devenue sacro-sainte ?

• Le contexte où les attentes des citoyens sont considérables

• Le contexte où les ambitions politiques sont parfois démesurées

• Le trouble-fête en mal de célébrité ou de notoriété

Page 3: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Dans l’affaire Landry et al c. Dumont (2012 QCCS 2769), l’honorable juge Dominique Landry s’exprime ainsi, résumant la situation qui est faite aux hommes politiques ou aux personnes publiques :

w  [52] La jurisprudence retient en effet qu’une personne qui exerce des activités publiques et politiques doit manifester un niveau de tolérance plus élevé que celui que l’on retrouve habituellement chez les autres citoyens. Il a aussi été retenu que les politiciens doivent s’attendre à répondre de l’usage qu’ils font des fonds publics.

w  [.

Page 4: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  [53] Les auteurs Baudouin et Deslauriers se disent d’avis que les personnes publiques, comme les personnages politiques, peuvent s’attendre à être plus attaquées que d’autres et leur mesure de tolérance à l’injure doit, dans leur cas, être plus large.

w  54] Ils estiment toutefois que ces dernières conservent un droit à leur réputation et les attaques à leur endroit sont inacceptables, si elles sont basées sur des faits inexacts ou qui ne sont pas d’intérêt public.

Page 5: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Prud’homme c. Prud’homme et al ([2002] 4 R.C.S. 663) : w  Dans une action en diffamation contre un élu municipal, la liberté

d’expression revêt une singulière importance puisque le rôle de cet élu est intimement lié à la pérennité de la démocratie municipale. L’élu municipal est en quelque sorte le porte-voix de ses électeurs : il transmet leurs doléances à l’administration, d’une part, et les informe de l’état de cette administration, d’autre part. Son droit de parole ne saurait être limité sans conséquences négatives sur la vitalité de la démocratie municipale, comme le souligne le professeur P. Trudel dans un article intitulé « Poursuites en diffamation et censure des débats publics. Quand la participation aux débats démocratiques nous conduit en cour :

LIBERTÉ D’EXPRESSION ET DROIT À LA RÉPUTATION

Page 6: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  La démocratie municipale suppose la confrontation des points de vue et les débats ouverts, parfois vigoureux et passionnés. Les échanges sur des matières controversées ne peuvent exister que dans un climat de liberté. Si les règles entourant le déroulement de pareils débats sont appliquées de manière à laisser craindre à ceux qui y participent d’être traînés devant les tribunaux, au moindre écart, la probabilité qu’ils choisissent de se retirer de la chose publique s’accroît.

Page 7: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  En conséquence, aussi libre qu’il soit de discuter de sujets d’intérêt public, l’élu municipal doit agir en personne raisonnable. Le caractère raisonnable de sa conduite sera souvent démontré par sa bonne foi et les vérifications préalables qu’il aura effectuées pour s’assurer de la véracité de ses allégations. Il s’agit là des balises de son droit de commentaire qui a été maintes fois reconnu par les tribunaux.

Page 8: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Nicole Vallières, La Presse et la diffamation, Montréal, Wilson & Lafleur, 1985, page 8 :

w  Au Québec, nous employons de façon interchangeable les termes libelle, injure, diffamation et même libelle diffamatoire pour signifier une atteinte à la réputation. Cette terminologie recouvre diverses réalités.

DISTINCTION ENTRE LA DIFFAMATION ET L’INJURE

Page 9: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  2.1 La diffamation et l’injure w  Une première distinction s’impose entre la diffamation et

l’injure. L’article 29 du Code français de la presse l’établit avec une remarquable concision. Nous l’avons souligné plus haut : « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur … est une diffamation. ». Mais l’article ajoute que « toute expression outrageante, terme de mépris ou invective, qui ne renferme l’imputation d’aucun fait, est une injure. ». Nos tribunaux ont entériné cette distinction.

Page 10: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  La diffamation doit donc se présenter sous la forme « d’une articulation précise de faits de nature à être sans di f f icul té l ’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire ».

Page 11: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Récemment, l’honorable Robert Mongeon, j.c.s., dans l’affaire Martineau c. Proulx et al (2013 QCCS 1490), après avoir fait siens les propos qui précèdent, ajoute :

w  [20] Il y aurait donc une distinction à retenir entre propos diffamatoires, d’une part, et injures, d’autre part. Il est suggéré que l’injure constituerait une forme de faute moindre que la diffamation. Par contre, les deux notions constituent des fautes en droit et si l’injure est prouvée, elle entraîne réparation dans la mesure où elle dépasse les normes de la bonne foi et de la liberté d’expression de son auteur.

Page 12: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  De fait, la diffamation consiste dans la communication de propos ou d’écrits qui font perdre l’estime et la considération de quelqu’un ou qui, encore, suscitent à son égard des sent iments défavorab les ou désagréables.

Page 13: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  DÉFINITION w  Dans l’arrêt Société Radio Sept-Îles inc. ([1994] R.J.Q.

1811), l’honorable juge Louis LeBel, alors de la Cour d’appel du Québec, s’exprimait ainsi :

w  Génériquement, la diffamation consiste dans la communication de propos ou d’écrits qui font perdre l’estime ou la considération de quelqu’un ou qui sont désagréables. Elle implique une atteinte injuste à la réputation d’une personne par le mal que l’ont dit d’elle ou la haine, le mépris ou le ridicule auxquels on l’expose. La diffamation se définirait comme l’atteinte fautive à la réputation d’autrui. Elle prend diverses formes. Écrite ou verbale, elle peut être le fait des médias écrits ou électroniques.

DIFFAMATION

Page 14: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  On a également qualifié la diffamation comme suit dans Leblanc c. Turpin où le juge Orville Frenette écrit :

w  La diffamation donne lieu à un recours en dommages-intérêts si le « défendeur sciemment, de mauvaise foi, avec l’intention de nuire, s’attaque à la réputation de la victime et cherche à la ridiculiser, à l’humilier, à l’exposer à la haine ou au mépris du public et d’un groupe. »

Page 15: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Les auteurs Jean-Louis Baudouin et Pierre-Gabriel Jobin s’expriment ainsi (Traité des obligations, 5e édition, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais inc.) :

w  De plus, la diffamation, en droit civil, ne résulte pas seulement de la divulgation ou de la publication de nouvelles fausses et erronées. Il y a, à notre avis, responsabilité lorsque les faits publiés sont exacts, mais que la publication n’a pour autre but que de nuire à la victime.

Page 16: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Beaudoin c. La Presse, [1998] R.J.Q. 204 (C.S), page 213 :

w  La forme d’expression du libelle importe peu; c’est le résultat obtenu dans l’esprit du lecteur qui crée le délit. L’allégation ou l’imputation diffamatoire peut être directe comme elle peut être indirecte « par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie, ou se produire sous une forme conditionnelle, dubitative, hypothétique ». Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation « soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation, d’une phrase interrogative, du rappel d’une rumeur, de la mention de renseignements qui ont filtré dans le public, de juxtaposition de faits divers qui ont ensemble une semblance de rapport entre eux ».

Page 17: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Comme l’a établit la décision de la Cour suprême du Canada dans Prud’homme c. Prud’homme et al ([2002] 4 R.C.S. 663), la responsabilité liée à la diffamation est conséquente avec l’établissement d’une faute au sens du droit civil québécois. Or, selon les auteurs Jean-Louis. Baudouin et Phi l ippe Deslaur iers (La responsabilité civile, 2e édition, 1998, pages 301-302), la faute en matière de diffamation peut résulter de deux types de conduites, l’une malveillante, l’autre simplement négligente :

NÉCESSITÉ D’UNE FAUTE

Page 18: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  La première est celle où le défendeur, sciemment, de mauvaise foi, avec intention de nuire, s’attaque à la réputation de la victime et cherche à la ridiculiser, à l’humilier, à l’exposer à la haine ou au mépris du public ou d’un groupe. La seconde résulte d’un comportement dont la volonté de nuire est absente, mais où le défendeur a, malgré tout, porté atteinte à la réputation de la victime par sa témérité, sa négligence, son impertinence ou son incurie. Les deux conduites constituent une faute civile, donnent droit à réparation, sans qu’il existe de différence entre elles sur le plan du droit. En d’autres termes, il convient de se référer aux règles ordinaires de la responsabilité civile et d’abandonner résolument l’idée fausse que la diffamation est seulement le droit d’un acte de mauvaise foi emportant intention de nuire.

Page 19: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Ainsi, trois types de situation sont susceptibles d’engager la responsabilité de l’auteur de paroles diffamantes :

w  … La première survient lorsqu’une personne prononce des propos désagréables à l’égard d’un tiers tout en les sachant faux. De tels propos ne peuvent être tenus que par méchanceté, avec l’intention de nuire à autrui. La seconde situation se produit lorsqu’une personne diffuse des choses désagréables sur autrui alors qu’elle devrait les savoir fausses. La personne raisonnable s’abstient généralement de donner des renseignements défavorables sur autrui si elle a des raisons de douter de leur véracité.

Page 20: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Enfin, le troisième cas, souvent oublié, est celui de la personne médisante qui tient, sans justes motifs, des propos défavorables, mais véridiques, à l’égard d’un tiers.

w  (Jean Pineau et Monique Ouellette, Théorie de la responsabilité civile, 2e édition, 1980, pages 63-64)

w  Ainsi, en droit civil québécois, la communication d’une information fausse n’est pas nécessairement fautive.

w  (Nicole Vallières, La Presse et la diffamation, Montréal, Wilson & Lafleur, 1985, page 10)

Page 21: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Toutefois, la véracité des propos peut être un moyen pour établir l’absence de faute dans les circonstances où l’intérêt public est en jeu.

w  Le silence ou la non divulgation de raisons pour adopter une position ne constitue pas une faute.

Page 22: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Jean-François Gaudreault-Desbiens, Le traitement juridique de l’acte individuel fautif de l’élu municipal, source d’obligations délictuelles ou quasi délictuelles. Un essai de systématisation critique du droit positif québécois, (1993) 24 R.G.D. 469-513, page 502 :

w  En droit civil québécois, l’application des règles ordinaires de la responsabilité civile permet de protéger l’élu municipal sans avoir recours à une notion extrinsèque. En ce sens, l’immunité relative qu’accorde le droit civil à l’élu municipal ne constitue qu’une simple défense de justification qui invoque a priori l’absence de faute de l’élu, compte tenu de ses fonctions, des devoirs qu’elles supposent et des circonstances particulières de l’espèce.

ABSENCE D’IMMUNITÉ DU MEMBRE DU CONSEIL

Page 23: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  En effet, les règles de la responsabilité civile veulent que le comportement de l’élu soit apprécié objectivement, en référant au comportement qu’auraient adopté, dans les mêmes circonstances, des acteurs comparables. Ce que l’on appelle « immunité relative » n’est donc, en droit civil, que la défense de celui qui a pu poser un acte objectivement dommageable mais qui n’est pas pour autant en faute, parce que cet acte a été posé dans l’exercice normal de fonctions publiques, que ces fonctions lui imposaient un devoir de poser cet acte (ou que celui-ci peut être rattaché à un devoir inhérent auxdites fonctions), qu’il était donc dans l’intérêt public de le poser et qu’en le posant, son auteur a agi avec tous les soins qu’un acteur comparable aurait raisonnablement pris dans les mêmes circonstances.

Page 24: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Prud’homme c. Prud’homme et al ([2002] 4 R.C.S. 663) : w  En droit civil québécois, le critères de la défense d’immunité

relative sont autant de circonstances à considérer dans l’appréciation de la faute. Par conséquent, les seules règles applicables à l’action en diffamation intentée contre un élu municipal québécois demeurent alors les règles prévues au Code civil. Ces règles doivent cependant être appliquées de façon contextuelle en tenant compte des exigences liées à la fonction d’élu municipal et des contraintes spécifiques de l’administration municipale. Elles peuvent aussi intégrer le contenu de l’autre défense proposée par l’intimé, celle de commentaire loyal et honnête ...

Page 25: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  L’atteinte à la réputation est appréciée objectivement, en se référant au point de vue du citoyen ordinaire. Ainsi :

w  Ce niveau d’analyse se justifie par le fait qu’une atteinte à la réputation se traduit par une diminution de l’estime et de la considération que les autres portent à la personne qui est l’objet des propos. Il n’y a donc pas que l’auteur et la personne qui fait l’objet des propos qui entrent en scène. Une personne est diffamée lorsqu’un individu donné ou plusieurs lui renvoient une image inférieure à celle que non seulement elle a d’elle-même, mais surtout qu’elle projetait aux « autres » dans le cours normal de ses interactions sociales.

APPRÉCIATION DE L’ATTEINTE À LA RÉPUTATION

Page 26: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Dans notre société, toute personne peut légitimement s’attendre à un traitement égal sur le plan juridique. L’atteinte à la réputation se situe à un autre niveau. Diffamer quelqu’un, c’est attenter à une réputation légitimement gagnée. Par conséquent, l’effet de la diffamation n’est pas tant l’incidence sur la dignité et le traitement égal reconnus à chacun par les chartes, mais la diminution de l’estime qui revient à une personne à la suite de ses interactions sociales.

w  (Bou Malhab c. Diffusion Métromédia CMR inc., 2011 C.S.C. 9, 1 R.C.S. 214)

Page 27: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Ainsi : w  Il faut, en d’autres termes, se demander si un citoyen

ordinaire estimerait que les propos tenus, pris dans leur ensemble, ont déconsidéré la réputation d’un tiers. À cet égard, il convient de préciser que des paroles peuvent être diffamatoires par l’idée qu’elles expriment explicitement ou encore par les insinuations qui s’en dégagent.

w  (Prud’homme c. Prud’homme et al, [2002] 4 R.C.S. 663, par. 34)

Page 28: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Beaudoin c. La Presse, [1998] R.J.Q. 204 (C.S), page 211 :

w  La forme d’expression du libelle importe peu; c’est le résultat obtenu dans l’esprit du lecteur qui crée le délit. L’allégation ou l’imputation diffamatoire peut être directe comme elle peut être indirecte par voie de simple allusion, d’insinuation ou d’ironie, ou se produire sous une forme conditionnelle, dubitative, hypothétique. Il arrive souvent que l’allégation ou l’imputation soit transmise au lecteur par le biais d’une simple insinuation, d’une phrase interrogative, du rappel d’une rumeur, de la mention de renseignements qui ont filtré dans le public, de juxtaposition de faits divers qui ont ensemble une semblance de rapport entre eux.

Page 29: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Les mots doivent d’autre part s’interpréter dans leur contexte. Ainsi, il n’est pas possible d’isoler un passage dans un texte pour s’en plaindre, si l’ensemble jette un éclairage différent sur cet extrait. À l’inverse, il importe peu que les éléments qui le composent soient véridiques si l’ensemble d’un texte divulgue un message opposé à la réalité. On peut de fait déformer la vérité ou la réalité par des demi-vérités, des montages tendancieux, des omissions, etc. Il faut considérer un article de journal ou une émission de radio comme un tout, les phrases et les mots devant s’interpréter les uns par rapport aux autres.

Page 30: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  L’auteur, celui qui répète les propos diffamatoires, et celui qui les approuve sont également responsables.

Page 31: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  La Cour supérieure a établi, dans Fabien c. Dimanche-Matin Ltée (1979 C.S. 928), les critères qui ont été repris à de nombreuses occasions par les tribunaux supérieurs. Ils sont comme suit :

w  1. la gravité intrinsèque de l’acte diffamatoire; w  2. sa portée particulière relativement à celui qui en a

été la victime; w  3. l’importance de la diffusion publique dont le libelle a

été l’objet;

ÉTABLISSEMENT DES DOMMAGES

Page 32: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  4. le genre de personnes qui, présumément, en ont pris connaissance et les conséquences que la diffamation a pu avoir sur leur esprit et sur leur opinion à l’égard de la victime;

w  5. le degré de la déchéance plus ou moins considérable à laquelle cette diffamation a réduit la victime par comparaison avec son statut antérieur;

w  6. la durée éventuelle et raisonnablement prévisible du dommage causé et de la déchéance subie;

Page 33: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  7. la contribution possible de la victime par sa propre attitude ou sa conduite particulière, à la survenance du préjudice dont elle se plaint;

w  8. les circonstances extérieures qui auraient, de toutes façons et indépendamment de l’acte fautif des défendeurs, constitué des causes probables du préjudice allégué, ou, au moins, d’une partie de ces préjudices.

w  La réclamation des honoraires engagés.

Page 34: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Gendron et al c. Magny, l’honorable Alain Trudel, j.c.q., 2012 QCCQ 401 :

w  [61] [..]

w  [42] L’arrêt de la Cour suprême du Canada dans l’affaire de l’hôpital St-Ferdinand est toujours d’actualité pour l’interprétation de l’article 49 de la charte. La juge Claire L’Heureux-Dubé y écrivait ceci :

LES DOMMAGES PUNITIFS

Page 35: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  121. En conséquence, il y aura atteinte illicite et intentionnelle au sens du second alinéa de l’art. 49 de la Charte lorsque l’auteur de l’atteinte illicite a un état d’esprit qui dénote un désir, une volonté de causer les conséquences de sa conduite fautive ou encore s’il agit en toute connaissance des conséquences, immédiates et naturelles ou au moins extrêmement probables, que cette conduite engendrera. Ce critère est moins strict que l’intention particulière, mais dépasse, toutefois, la simple négligence. Ainsi, l’insouciance dont fait preuve un individu quant aux conséquences de ses actes fautifs, si déréglée et téméraire soit-elle, ne satisfera pas, à elle seule, à ce critère.

Page 36: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  L’article 49 de la Charte des droits et libertés de la personne prévoit :

w  Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte.

w  En cas d’atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.

Page 37: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  De plus, l’article 1621 du Code civil du Québec prévoit : w  Lorsque la loi prévoit l’attribution de dommages-intérêts

punitifs, ceux-ci ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive.

w  Ils s’apprécient en tenant compte de toutes les circonstances appropriées, notamment de la gravité de la faute du débiteur, de sa situation patrimoniale ou de l’étendue de la réparation à laquelle il est déjà tenu envers le créancier, ainsi que, le cas échéant, du fait que la prise en charge du paiement réparateur est, en tout ou en partie, assumée par un tiers.

Page 38: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Les articles 604.6 et 711.19.1 de la Loi sur les cités et villes (L.R.Q., c. C-19) et du Code municipal (L.R.Q., c. 27.1) prévoient que toute municipalité doit :

w  … assumer la défense ou la représentation, selon le cas, d’une personne qui est, soit le défendeur, l’intimé ou l’accusé, soit le mis en cause, dans une procédure dont est saisi un tribunal et qui est fondée sur l’allégation d’un acte ou d’une omission dans l’exercice des fonctions de la personne comme membre du conseil, de fonctionnaire ou d’employé de la municipalité, ou d’un organisme mandataire de celle-ci.

PROTECTION DE L’ÉLU CONTRE LES PERTES FINANCIÈRES LIÉES À

L’EXERCICE DE SES FONCTIONS

Page 39: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Il n’est pas nécessaire que la personne poursuivie soit encore officier; l’obligation de la municipalité se poursuit au-delà du mandat.

Page 40: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Comme l’indique Me Marc Lalonde dans La protection contre les pertes financières liées à l’exercice des fonctions municipales : de la théorie à la pratique, Développements récents en droit municipal (2011), volume 331 :

w  C’est la teneur des allégations qui fait naître pour la municipalité une obligation d’assumer la défense. Une allégation constituant, à sa face même, un rattachement à l’exercice de la fonction municipale est suffisant pour générer l’obligation légale d’assumer la défense. (page 7)

Page 41: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Plus loin : w  Cependant, le juge doit aussi dégager sa propre opinion sur la

question du rattachement aux fonctions municipales, suivant les faits allégués dans la procédure, et non suivant la qualification qu’en fait le poursuivant. Ainsi, un tribunal pourrait conclure qu’une personne était dans l’exercice de ses fonctions, même si le demandeur a qualifié l’acte de faute personnelle posée hors du cadre des fonctions. (page 7)

w  L’examen doit porter sur deux éléments, à savoir la finalité de l’acte posé par l’élu municipal et la pertinence de l’acte au regard des affaires municipales.

Page 42: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Beaulieu et al c. Packington (Municipalité de), 2008 QCCA 442 :

w  [43] La Cour a conclu que le conseiller municipal était dans l’exercice de ses fonctions municipales même si celles-ci n’ont pas été exercées lors d’une séance du conseil, à la condition que l’acte posé résulte de son mandat :

Page 43: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Les fonctions municipales, comme les autres fonctions publiques, ne s’exercent pas seulement autour d’une table de délibérations. Elles suivent l’officier public dans tous les actes qu’il pose, en tant qu’officier public, et ses actes revêtent et gardent le même caractère d’autorité ou de responsabilité lorsqu’ils sont faits en raison même des fonctions qu’il exerce ou, si l’on veut, lorsqu’ils sont posés ou exercés dans l’intérêt public. Ainsi le maire d’une municipalité, quelles que soient les circonstances de lieu, de temps et de personnes, n’abdique nullement son caractère d’officier public, lorsqu’il prend une initiative ou accomplit un devoir inhérent à sa fonction.

Page 44: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Il en est de même d’un conseiller municipal, d’un commissaire d’écoles ou d’un syndic de fabrique. En d’autres termes, pour déterminer le caractère de ces fonctions publiques, il suffit de se demander si l’acte accompli résulte du mandat confié à cet officier ou si ce dernier n’a fait qu’agir en une qualité purement personnelle.

w  […]

Page 45: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Je dirai davantage. Si le maire d’une municipalité va rencontrer chez lui un conseiller, ou si encore, un conseiller municipal va rencontrer un de ses collègues pour connaître ses vues sur un problème municipal, j’estime que ce conseiller garde toujours son caractère d’officier public et qu’il est, dans une telle occurrence, dans l’exercice de ses fonctions publiques.

Page 46: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Je conclus donc en disant que le barème qui doit nous guider dans une telle matière est celui-ci : si la personne dans l’intérêt de la municipalité, fait, étant un officier municipal, une communication qu’elle a intérêt à faire et qu’elle la fait à une personne qui a un intérêt correspondant à la recevoir, il y a, par la coexistence de ces divers éléments, une preuve que la personne a agi dans l’exercice de ses fonctions.

Page 47: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  [44] Dans son article « Le traitement juridique de l’acte individuel fautif de l’élu municipal, source d’obligations délictuelles ou quasi délictuelles. Un essai de systématisation critique du droit québécois », l’auteur Jean-François Gaudreault-Desbiens fait remarquer que chaque cas constitue un cas d’espèce. Il dégage cependant un cadre d’analyse qui me paraît valable :

Page 48: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  […] il faut retenir de cette étude de la notion d’exercice des fonctions que le critère de base de cette notion est le bénéfice ou l’intérêt que la municipalité tire de l’acte posé par l’élu municipal. Ceci impose, d’une part, d’examiner la finalité de l’acte et, d’autre part, d’en étudier la pertinence au regard des affaires municipales. Ainsi, l’acte posé pour des motifs strictement personnels à l’élu et n’ayant aucun lien de pertinence avec les affaires municipales sera le plus souvent posé hors de l’exercice des fonctions. L’examen consiste en fait à vérifier l’existence d’un lien logique entre l’acte posé et l’intérêt ou le bénéfice que la municipalité en retire.

Page 49: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Pour établir ce lien, il sera évidemment utile, sinon nécessaire, de voir si l’acte posé peut se rattacher à un devoir inhérent aux fonctions de l’élu, de façon à en identifier la justification juridique. C’est donc d’abord et avant tout en fonction de l’acte lui-même qu’est résolue la question de savoir si l’élu agissait dans l’exercice de ses fonctions. Dans ce contexte, le forum où est posé l’acte ne revêt pas une importance déterminante.

Page 50: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  [45] Suivant ce cadre d’analyse, deux éléments doivent être examinés pour décider si l’élu municipal est dans l’exercice de ses fonctions : 1o la finalité de l’acte posé par l’élu municipal et 2o la pertinence de l’acte au regard des affaires municipales.

Page 51: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  Il doit s’agir d’un journal et ce journal doit avoir respecté les formalités prévues à la Loi sur les journaux et autres publications (L.R.Q., c. J-1) pour se prévaloir des dispositions de la Loi sur la presse.

w  Les procédures doivent être intentées dans les trois mois qui suivent la publication de l’article ou dans les trois mois de la connaissance de cette publication, mais au plus tard dans l’année. Elles doivent être précédées d’un avis préalable de trois jours au bureau du journal, permettant au journal de rectifier ou de rétracter l’article.

APPLICATION DE LA LOI SUR LA PRESSE (L.R.Q., C. P-19)

Page 52: Fédération québécoise des municipalités · Created Date: 9/17/2014 2:39:23 PM

w  La rétractation doit être complète et la rédaction doit justifier de sa bonne foi pour voir les dommages limités au seul préjudice réellement subi. La rétractation doit évidemment être sans frais et dans un endroit du journal aussi en vue que l’article incriminé.

w  La prescription du recours w  La couverture d’assurance et les exclusions.