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La Faculté de Droit Virtuelle est la plate-forme pédagogique de la Faculté de Droit de Lyon www.facdedroit-lyon3.com Date de création du document : année universitaire 2006/07 Consultez les autres fiches sur le site de la FDV : www.facdedroit-lyon3.com Fiche à jour au 5 mars 2007 F F F I I I C C C H H H E E E P P P E E E D D D A A A G G G O O O G G G I I I Q Q Q U U U E E E V V V I I I R R R T T T U U U E E E L L L L L L E E E Diplôme : Master 1 Matière : Droit international privé Web-tuteur : Sabine Robert S S S E E E A A A N N N C C C E E E N N N ° ° ° 1 1 1 4 4 4 L L L O O O R R R D D D R R R E E E P P P U U U B B B L L L I I I C C C F F F R R R A A A N N N Ç Ç Ç A A A I I I S S S E E E N N N M M M A A A T T T I I I E E E R R R E E E I I I N N N T T T E E E R R R N N N A A A T T T I I I O O O N N N A A A L L L E E E S S S O O O M M M M M M A A A I I I R R R E E E Civ.1 ère , 23 janvier 1979 3 I. LA CONTRARIETE DE LA LOI ETRANGERE A L’ORDRE PUBLIC FRANÇAIS EN MATIERE INTERNATIONALE 4 A. LE CONTENU DE LORDRE PUBLIC FRANÇAIS EN MATIERE INTERNATIONALE 4 Paris, 6 juillet 1989 5 Civ.1 ère , 6 juillet 1988 5 Crim., 16 juin 1993 6 Civ.1 ère , 13 novembre 1979 7 Civ.1 ère , 12 mai 1987 8 Civ.1 ère , 9 octobre 1991 9

FIIICCCHHHEEE PPEEEDDDAAA VII...Lung a assigné les sociétés Petropar, Sonatrach et Petral en paiement des loyers échus du 1er avril 1968 au 15 janvier 1976, que la cour d'appel

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Date de création du document : année universitaire 2006/07

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Fiche à jour au 5 mars 2007

FFFIIICCCHHHEEE PPPEEEDDDAAAGGGOOOGGGIIIQQQUUUEEE VVVIIIRRRTTTUUUEEELLLLLLEEE

Diplôme : Master 1

Matière : Droit international privé

Web-tuteur : Sabine Robert

SSSEEEAAANNNCCCEEE NNN°°°111444 ––– LLL’’’OOORRRDDDRRREEE PPPUUUBBBLLLIIICCC FFFRRRAAANNNÇÇÇAAAIIISSS EEENNN MMMAAATTTIIIEEERRREEE IIINNNTTTEEERRRNNNAAATTTIIIOOONNNAAALLLEEE

SSSOOOMMMMMMAAAIIIRRREEE Civ.1ère, 23 janvier 1979 3

I. LA CONTRARIETE DE LA LOI ETRANGERE A L’ORDRE PUBLIC FRANÇAIS EN MATIERE INTERNATIONALE 4

A. LE CONTENU DE L’ORDRE PUBLIC FRANÇAIS EN MATIERE INTERNATIONALE 4

Paris, 6 juillet 1989 5

Civ.1ère, 6 juillet 1988 5

Crim., 16 juin 1993 6

Civ.1ère, 13 novembre 1979 7

Civ.1ère, 12 mai 1987 8

Civ.1ère, 9 octobre 1991 9

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B. LES MODALITES D’APPRECIATION DE LA CONFORMITE DE LA LOI ETRANGERE A L’ORDRE PUBLIC FRANÇAIS EN MATIERE INTERNATIONALE 10

Civ.1ère, 19 octobre 1999 11

Com., 18 janvier 2000 11

II. LA MISE EN ŒUVRE DE L’EXCEPTION D’ORDRE PUBLIC 13

A. LES CONDITIONS DE LA MISE EN ŒUVRE DE L’EXCEPTION D’ORDRE PUBLIC 13

Civ.1ère, 3 janvier 1980 13

Civ.1ère, 19 février 1963 15

Soc., 1er mars 1973 16

Civ.1ère, 17 février 2004 17

Civ.1ère, 10 février 1993 18

B. LES EFFETS DE LA MISE EN ŒUVRE DE L’EXCEPTION D’ORDRE PUBLIC 19

Civ.1ère, 14 juin 2005 19

Civ.1ère, 6 décembre 2005 20

Civ.1ère, 15 juillet 1963 21

27/08/2007 - 23:33:4014_L_ordre_public_francais_en_matiere_internationale.doc 2/22 2

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L’exception d’ordre public permet l’éviction de la loi étrangère compétente d’après les règles de conflit de lois du for et l’application subsidiaire de la loi du for. En effet, si la loi matérielle compétente déterminée d’après le jeu de la règle de conflit de lois et éventuellement du renvoi est une loi étrangère, celle-ci peut ne pas être appliquée par le for. L’exception d’ordre public est l’un des mécanismes juridiques du droit international privé, permettant au for d’écarter l’application d’une loi étrangère, pourtant compétente, dès lors que cette dernière est contraire à l’ordre public. Elle apparaît donc comme un mécanisme correcteur venant atténuer, au stade de l’application de la loi étrangère compétente, le principe de neutralité de la règle de conflit de lois. En effet, grâce à l’exception d’ordre public, le for peut prendre en considération le contenu de la loi étrangère afin d’écarter l’application de cette dernière et protéger ainsi les valeurs et principes essentiels de son ordre juridique (pour une confirmation de principe, cf. Civ.1ère, 23 janvier 1979).

CCiivv..11èreère,, 2233 jjaannvviieerr 11997799

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : Attendu que, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, la demoiselle Lung, aux droits de laquelle ses héritiers sont dans la procédure, a donné à bail divers locaux dans un immeuble lui appartenant et sis à Alger à la société Petropar, que celle-ci, ayant eu son capital, nationalisé dans sa majorité, transféré à la Sonatrach et ayant dû apporter le surplus à la société Petral a été liquidée, que les locaux litigieux déclarés vacants ont été occupés par la Sonatrach, que la demoiselle Lung a assigné les sociétés Petropar, Sonatrach et Petral en paiement des loyers échus du 1er avril 1968 au 15 janvier 1976, que la cour d'appel a donné acte à Martin-Dupont, liquidateur de la société Petropar de son offre de payer le loyer du 1er avril 1968 au 31 mars 1973, date à laquelle le bail était arrivé à son terme, et l'a condamné à payer en Algérie ladite somme augmentée du complément prévu à la clause d'indexation du contrat, qu'elle a condamné les sociétés Petral et Sonatrach à payer une indemnité d'occupation pour la période postérieure et la somme de 30000 francs à titre de dommages-intérêts, que la cour d'appel a enfin commis un expert afin d'évaluer le supplément de loyer et d'indemnité d'occupation résultant de l'indexation ;

Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir condamné les sociétés Sonatrach et Petral, alors que la déclaration de vacance, distincte des "nationalisations" , ne peut être tenue pour contraire à l'ordre public français, l'attribution à l'Etat des biens vacants étant admise en droit français et alors, en toute hypothèse, qu'il ne peut y avoir aucune faute génératrice de dommages-intérêts dans le fait, pour une personne physique ou morale algérienne, d'occuper un immeuble sis en Algérie conformément à la loi algérienne et aux décisions prises par les pouvoirs publics de ce pays ; Mais attendu, d'une part, que la loi française n'admettant la vacance d'un bien que si ce bien est sans maître, la cour d'appel a pu décider que la mesure de dépossession sans indemnité dont la demoiselle Lung a été la victime était contraire à l'ordre public français et ne saurait avoir d'efficacité en France, et d'autre part, que la privation du loyer par les sociétés occupant les locaux litigieux justifiait l'allocation à la propriétaire d'une indemnité compensatrice, qu'il s'ensuit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a légalement justifié sa décision et que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

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Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 20 octobre 1976 par la Cour d'appel de Paris.

Notons que lorsque la loi étrangère est compétente en vertu d’une convention internationale, l’exception d’ordre public ne pourra être mise en œuvre qu’à la condition que son jeu soit admis par la convention.

Par ailleurs, la « loi étrangère » pouvant être évincée par l’exception d’ordre public doit être entendue largement. Elle comprend non seulement les actes législatifs étrangers, mais aussi les actes des autorités publiques étrangères, ainsi que les jugements étrangers (cf. fiche 16,17 et 18).

Ainsi, après avoir identifié la loi étrangère compétente, si le juge français constate la contrariété de la loi étrangère applicable à l’ordre public français en matière internationale (I), il pourra mettre en œuvre l’exception d’ordre public afin, éventuellement, d’en écarter l’application effective (II).

I. La contrariété de la loi étrangère à l’ordre public français en matière internationale

Afin de déterminer si la loi étrangère compétente est contraire à son ordre public, et avant d’apprécier la conformité de la loi étrangère (B), le for français doit s’interroger sur le contenu de ce dernier (A).

A. Le contenu de l’ordre public français en matière internationale

1. Définition

Il convient avant tout de ne pas confondre l’ordre public international, lequel serait l’ordre public en matière internationale, et l’ordre public national (interne), mais valant dans des litiges internationaux. C’est ce dernier qui est en jeu dans le cadre de l’exception d’ordre public. Nous parlerons d’ordre public français en matière internationale, afin d’éviter toute confusion. Il convient, par ailleurs, de ne pas confondre l’ordre public français en matière internationale, avec l’ordre public national, ce dernier étant beaucoup plus vaste. Les principes constituant l’ordre public français en matière internationale sont des principes essentiels dont l’importance peut être graduée sur trois niveaux. L’appartenance des principes à l’ordre public français en matière internationale est déterminée par les juges à l’occasion des litiges (cf. à propos du droit moral de l’auteur, Paris, 6 juillet 1989, extraits).

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PPaarriiss,, 66 jjuuiilllleett 11998899

Considérant qu’en droit international privé, l’exception d’ordre public est une réaction d’intolérance à la loi étrangère qui doit être exercée avec beaucoup de mesure et non à l’occasion de n’importe quelle divergence sérieuse avec le droit d’un autre Etat :

Que les nécessités de l’ordre public français s’y apprécient de façon plus rigoureuse qu’en droit interne et ne s’imposent que quand la contrariété apportée à la loi du for ébranle les fondements sur lesquels repose la société française dans l’ordre politique social ou familial

Qu’ainsi le recours à l’exception oblige à démontrer la très haute valeur de ce que l’on entend préserver, l’absence de dommage causé à d’autres principes non moins respectables et reconnus par la France elle-même, enfin la gravité de l’atteinte subie faisant qu’elle dépasse le seuil de ce qui est supportable.

Le premier niveau est constitué par les « principes universels de justice considérés dans l’opinion française comme doués de valeur internationale absolue » auxquels se réfère le célèbre arrêt Lautour du 25 mai 1948 (à propos du principe de responsabilité sans faute, 1384 al.1er du Code civil, qui ne fait pas partie desdits principes). Cette définition montre bien que l’universalité visée est emprunte de relativité. Les droits fondamentaux font partie de cette catégorie.

Le second est constitué par les principes qui, sans être considérés comme ayant une portée universelle, sont fondamentaux pour l’ordre juridique français, tels que la monogamie par exemple (Civ.1ère, 6 juillet 1988).

Le troisième regroupe les principes défendant une politique législative du for, autrement dit les lois qui régissent l’organisation politique économique et sociale du pays (matière économique, familiale…, dont ne fait pas partie, selon la jurisprudence, le principe de réparation intégrale, Crim., 16 juin 1993).

Notons que les conventions internationales de protection des droits de l’homme, telles que la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, sont prises en compte dans la mise en œuvre de l’exception d’ordre public.

CCiivv..11èreère,, 66 jjuuiilllleett 11998888

Vu les principes du droit international privé français et l'article 29 de la convention générale sur la sécurité sociale conclue le 19 janvier 1965 entre la France et l'Algérie, applicable en la cause ;

Attendu que M. Rabah Baaziz et Mme Marinette Arthaud, tous deux de nationalité française, se sont mariés à Lyon le 9 août 1954 ; qu'après l'accession de l'Algérie à l'indépendance, M. Baaziz a acquis la nationalité algérienne et a contracté un second mariage en Algérie avec Mme Fethita M'Djahri, selon la loi algérienne ; qu'il a été victime en France, le 11 mai 1978 d'un accident mortel du travail ; que par arrêt du 10 juillet 1980, devenu irrévocable, la cour d'appel de Lyon a décidé que le second mariage ne pouvait produire effet en France que dans la mesure où il ne heurtait pas la conception française de l'ordre public international et que, pareillement, Mme M'djahri ne pouvait faire usage sur le territoire français de sa qualité de

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veuve de M. Baaziz que dans des conditions qui ne seraient pas contraires à l'ordre public ; Attendu que l'arrêt attaqué a dit, sur le fondement de l'article 29 de la convention susvisée en vigueur à la date de l'accident, et dont les dispositions ont été reprises par l'article 42 de la convention générale signée le 1er octobre 1980 -, que la rente du conjoint survivant due à la suite du décès de M. Rabah Baaziz doit être servie à parts égales entre Mme Arthaud et Mme M'Djahri ; Attendu, cependant, que sauf dispositions contraires, les conventions internationales réservent la contrariété à la conception française de l'ordre public international ; que cette conception s'oppose à ce que le mariage polygamique contracté à l'étranger par celui qui est encore l'époux d'une Française produise ses effets à l'encontre de celle-ci ; qu'ainsi, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les principes et le texte susvisés ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen, ni sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 février 1984, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

CCrriimm..,, 1166 jjuuiinn 11999933

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 4 et 10 de la convention de La Haye du 4 mai 1971, de l'article 1382 du Code civil, de la loi du 5 juillet 1985, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, du principe d'ordre public de la réparation intégrale du préjudice :

" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Mme Elflein, ès qualités, de ses demandes tendant à la réparation du préjudice moral subi par elle et son enfant mineur, du fait des conséquences de l'accident litigieux ;

" aux motifs que " c'est à juste tire et en application de l'article 4 de la convention de La Haye du 4 mai 1971 que le tribunal correctionnel a déclaré que la loi applicable, en ce qui concerne la réparation du préjudice, était, en l'espèce, la loi allemande ; qu'en effet, les deux véhicules impliqués dans l'accident étaient immatriculés en Allemagne ; qu'en outre, le prévenu et la victime y avaient leur résidence ; que les dispositions légales allemandes ne prévoient pas la réparation d'un préjudice moral (pretium affectionis) de la veuve ou de l'enfant de la victime ; que cette limitation, si elle est contraire aux règles de droit français, n'est pas incompatible avec l'ordre public international au sens du droit international privé ; qu'en effet, de nombreux Etats y compris au sein de la Communauté économique européenne sont régis par des dispositions légales excluant la réparation d'un préjudice moral au sens du droit français " (cf. arrêt p. 7 et 8) ;

" alors que selon l'article 10 de la convention de La Haye du 4 mai 1971, l'application d'une loi déclarée compétente par cette Convention peut être écartée si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public au sens international ; que le principe de la réparation intégrale de tous les préjudices subis par la victime, notamment du préjudice moral, est un principe fondamental qui appartient à la conception française de l'ordre public international ; qu'en refusant de réparer le préjudice moral de Mme Elflein et de son fils, au motif pris que l'absence de réparation d'un tel préjudice par la loi allemande applicable en la cause n'est pas incompatible avec l'ordre public international au sens du droit international privé, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés " ;

Attendu que, statuant sur la réparation des conséquences dommageables du délit d'homicide involontaire commis par Klaus Fritges sur la personne

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d'Alfred Elflein au cours d'une collision entre deux véhicules immatriculés en Allemagne, la juridiction du second degré rejette, par les motifs repris au moyen, la prétention d'Irmgard Schubert veuve Elflein qui demandait la réparation du préjudice d'affection subi par elle et son fils à la suite du décès de son époux, consécutif à l'accident ;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel n'a nullement méconnu les textes et principe visés au moyen ;

Qu'en effet, n'est pas contraire à l'ordre public, au sens du droit international privé, l'exclusion par la loi étrangère de la réparation intégrale du préjudice et notamment celle d'un préjudice moral ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.

2. Le principe d’actualité de l’ordre public

Le contenu concret de l’ordre public français en matière internationale est variable et évolutif. Il varie en fonction de la société. On parle d’actualité et de variabilité de l’ordre public. Le contenu de l’ordre public variant dans le temps, il convient de déterminer le moment de la confrontation de la loi étrangère à l’ordre public. Ce moment est précisé en vertu du principe d’actualité. En effet, c’est à cette date qu’il faut se placer afin de déterminer si tel ou tel principe ou valeur relève de l’ordre public français en matière internationale, en fonction de l’opinion qui prévaut à ce moment-là (Civ.1ère, 13 novembre 1979). Ainsi, certains principes initialement exclus sont progressivement entrés dans la sphère de l’ordre public comme le principe d’égalité des filiations et ses diverses conséquences (Civ. 1ère 12 mai 1987).

CCiivv..11èreère,, 1133 nnoovveemmbbrree 11997799

Sur les deux moyens réunis : Attendu que, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, Aimé W.-L., de nationalité belge, a eu deux fils, Louis, de nationalité belge et né d'un premier mariage de son père, et Jacques, de nationalité française, né au cours d'un second mariage d'Aimé W.-L. d'une femme autre que son épouse, que, cette seconde union ayant été dissoute, Aimé W.-L. a épousé la mère de son fils Jacques qu'il a reconnu et légitimé ; Que se fondant sur les dispositions de la loi belge qui n'admet ni la reconnaissance ni la légitimation des enfants adultérins, Louis W.-L. a assigné le 11 avril 1964 son frère consanguin devant le Tribunal de grande instance de Paris en nullité des reconnaissance et légitimation dont il a été l'objet ; que la cour d'appel, statuant sur renvoi après cassation, a déclaré l'action prescrite ;

Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir décidé que l'action en contestation d'état, régie par la loi belge qui en édicte l'imprescriptibilité, serait soumise à la prescription trentenaire par l'effet de la conception française de l'ordre public international, alors que, dans le droit antérieur à la loi du 3 janvier 1972, l'imprescriptibilité des actions en contestation d'état aussi bien que des actions en réclamation d'état, aurait été unanimement admise, la distinction entre ces deux actions résultant, selon le moyen, pour

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la première fois, de l'arrêt de cassation rendu dans la cause actuelle, le 25 novembre 1975, et alors que les nouvelles règles instituées par la loi du 3 janvier 1972, concernant notamment celle relative à la prescription trentenaire des actions relatives à la filiation, seraient loin de faire l'unanimité de sorte que l'on ne saurait y voir l'expression française de l'ordre public international, et alors que, dans le contexte de l'arrêt attaqué, ce serait la loi du 3 janvier 1972 qui aurait donné à la prescription trentenaire de l'action le caractère d'ordre public international que lui prête la cour d'appel, que l'action litigieuse soumise à la loi belge d'imprescriptibilité n'aurait pu se prescrire avant cette date, puisque jusqu'à cette date, la conception française de l'ordre public international ne s'opposait pas à cette imprescriptibilité ; qu'en conséquence, l'article 15 de la loi du 3 janvier 1972 aurait été applicable et le point de départ de la prescription fixé au 1er août 1972 ; Mais attendu que la cour d'appel, qui a justement écarté l'application en la cause de la loi du 3 janvier 1972, a pu relever cependant que ses dispositions caractérisaient < un intérêt de bien commun >, traduisant une < conception actuelle fondamentale > au sens de l'ordre public international français, que, retenant que la prescription trentenaire a commencé à courir du jour où l'état contesté a été créé, c'est-à-dire du 6 avril 1922, jour de la légitimation de Jacques W.-L., la cour d'appel a décidé à bon droit que l'action introduite par Louis W.-L., le 11 avril 1964, était prescrite ; que les premier et second moyens sont sans fondement ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 14 mars 1978 par la Cour d'appel de Rouen.

CCiivv..11èreère,, 1122 mmaaii 11998877

Sur le premier moyen :

Vu l'article 425-1°, du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'en vertu de ce texte, le ministère public doit avoir communication des causes relatives à la filiation ; que cette exigence est d'ordre public ;

Attendu que, sur la demande en partage de la succession d'X... formée par M. Y..., les consorts Z..., défendeurs à l'action, ont soulevé, par voie d'exception, la nullité de la reconnaissance et de la légitimation dont M. Y... avait été l'objet ;

Attendu qu'il ne résulte ni des mentions de l'arrêt, ni des pièces du dossier, ni d'aucun élément de preuve que la cause ait été communiquée au ministère public ; que cette communication ne peut notamment être déduite de la lettre adressée à M. Y... par le procureur général près la cour d'appel, postérieurement à l'arrêt attaqué, qui se bornait à indiquer que le ministère public n'avait pas pris de conclusions ; que la cour d'appel n'a donc pas satisfait aux prescriptions du texte susvisé ;

Et sur le cinquième moyen, pris en sa première branche :

Vu les principes qui régissent le droit international privé, ensemble l'article 331 du Code civil, dans sa rédaction de la loi du 30 décembre 1915 ;

Attendu qu'X..., de nationalité belge, a eu, de son premier mariage, un fils prénommé Z... ; qu'au cours de sa deuxième union, un autre fils, prénommé Y..., est né le 27 janvier 1920 de sa liaison avec J... F... ; qu'après dissolution de ce deuxième mariage, X... a, le 7 avril 1922, épousé J...F... après avoir, au préalable, reconnu son second fils ; que celui-ci ayant demandé le partage de la succession de son père décédé le 21 novembre 1959, les héritiers de Z... ont soutenu qu'il n'avait pas la qualité d'héritier d'X..., sa reconnaissance par ce dernier et sa légitimation par le mariage de son père avec J... F... devant être annulées par application de la loi belge qui interdit la reconnaissance et

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la légitimation des enfants adultérins ; que l'arrêt attaqué a considéré que la validité de la légitimation devait en effet être appréciée au regard de la loi belge en vigueur au jour du mariage et que la prohibition qu'elle édictait " était conforme à l'ordre public actuel au sens du droit international privé français, seules les lois plus larges que la loi française en la matière pouvant être évincées au nom de l'ordre public mais non les lois plus restrictives " ; qu'il a en conséquence décidé que M. Y..., enfant adultérin non légitimé du de cujus, n'avait pas de droit dans sa succession ;

Attendu cependant que le principe de la légitimation par le mariage des enfants naturels, même d'origine adultérine, traduit une conception fondamentale actuelle du droit français entraînant, par l'effet de l'ordre public l'éviction de la loi belge ; que l'article 331 du Code civil, dans sa rédaction en vigueur au jour du mariage des parents de M. Y..., dispose que les enfants nés du commerce adultérin du mari sont légitimés par le mariage subséquent de leurs père et mère lorsque ceux-ci les reconnaissent au moment de la célébration, s'il n'existe pas, à ce moment, d'enfants légitimes issus du mariage au cours duquel l'enfant adultérin est né ou a été conçu ; que dès lors en se déterminant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les principes et le texte susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, troisième, quatrième et sixième moyens, ni sur la seconde branche du cinquième moyen :

CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 12 juin 1984, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon

3. Ordre public de fond / ordre public de procédure

Parmi les principes relevant de l’ordre public français en matière internationale, on distingue les principes substantiels (par exemple le principe d’égalité des filiations, Civ.1ère, 12 mai 1987 précité), des principes relatifs à la procédure (par exemple l’exigence de motivation, Civ.1ère, 9 octobre 1991).

CCiivv..11èreère,, 99 ooccttoobbrree 11999911

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que l'arrêt attaqué (Montpellier, 21 février 1990) a refusé l'exécution d'un jugement du Landgericht de Sarrebrück, prononcé par défaut, qui a condamné la Société générale routière à payer à la société allemande Polypetrol la contre-valeur en DM de la somme de 231 258,61 francs, aux motifs que les documents produits ne permettaient pas de contrôler les conditions requises pour la reconnaissance ;

Attendu qu'il est reproché à cet arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il appartient à celui qui invoque l'irrégularité d'une décision dotée, de plein droit, d'efficacité selon la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, de faire la preuve que l'absence de motifs recèle une contrariété aux règles de la Convention, de sorte qu'en décidant qu'en l'absence de production de tout document équivalent, elle n'était pas en mesure de contrôler les conditions de la reconnaissance de la décision, la cour d'appel a violé les articles 27, 1°, et 28 de la Convention précitée ; alors, d'autre part, qu'en refusant l'exécution pour la seule raison que la décision n'était pas motivée et que le demandeur ne produisait aucun élément

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équivalent à la motivation sans l'inviter à produire les justificatifs utiles, la cour d'appel a encore violé les mêmes textes ; alors, enfin, qu'en se fondant sur le fait que si des procès-verbaux de gendarmerie établissaient que la Société générale routière avait bien été avisée d'un procès intenté à Sarrebrück, il n'en résultait pas que l'objet de celui-ci ait été porté à la connaissance de la Société générale routière, qui, à défaut, n'avait pu organiser sa défense, la cour d'appel a aussi violé l'article 27, 2°, de la Convention précitée en ajoutant à ce texte une précision qu'il ne contient pas

Mais attendu, d'abord, qu'est contraire à la conception française de l'ordre public international la reconnaissance d'une décision étrangère non motivée lorsque ne sont pas produits des documents de nature à servir d'équivalent à la motivation défaillante ; qu'il incombe au demandeur de produire ces documents, même lorsqu'il s'agit d'une décision bénéficiant d'une reconnaissance de plein droit, dès lors qu'il doit produire une expédition de la décision, conformément à l'article 46 de la Convention du 27 septembre 1968 ; que la cour d'appel n'était nullement tenue, dans l'exercice de son contrôle, de suppléer la carence du demandeur en l'invitant à produire ces éléments ;

Attendu, ensuite, que l'acte introductif d'instance ou l'acte équivalent, dont la notification régulière est requise par l'article 27, 2°, de la Convention de 1968, doit, par définition, contenir des indications suffisantes sur l'objet de la demande, à défaut desquelles les droits de la défense ne sont pas respectés ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

B. Les modalités d’appréciation de la conformité de la loi étrangère à l’ordre public français en matière internationale

Après avoir identifié la loi étrangère compétente, le for français va donc apprécier la conformité de la loi étrangère à l’ordre public français tel qu’il vient d’être déterminé (cf. supra I). L’appréciation se fait in concreto en fonction du résultat concret découlant de l’application de la loi étrangère au cas d’espèce. Il est donc tenu compte des circonstances particulières de la situation privée internationale litigieuse. Ainsi, ce n’est pas tant la conformité à l’ordre public des dispositions de la loi étrangère abstraitement considérées qui doivent être appréciées, mais la conformité du résultat de l’application de la loi étrangère en l’espèce.

Ainsi, a pu être considérée comme non conforme à l’ordre public, la loi étrangère qui énonce un principe d’irrévocabilité de la reconnaissance d’enfant naturel, ce qui fait obstacle au rétablissement de la filiation biologique véritable. Au contraire, la jurisprudence a décidé qu’était conforme à l’ordre public la loi étrangère qui exclut l’adoption dès lors qu’une autre mesure est mise en place (Civ.1ère, 19 octobre 1999) ou encore la loi étrangère qui permet l’ouverture d’une procédure collective contre un non-commerçant (Com., 18 janvier 2000).

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CCiivv..11èreère,, 1199 ooccttoobbrree 11999999

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que les époux X..., de nationalité marocaine, font grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Rennes, 7 octobre 1996) d'avoir rejeté leur requête en adoption simple de leur nièce, Naoual X..., de même nationalité, née le 19 octobre 1991, alors, selon le moyen, d'une part, que l'arrêt, qui se retranche derrière la loi étrangère pour refuser le bénéfice de l'adoption simple à un enfant, se dispensant ainsi d'analyser le consentement de ses parents, méconnaît l'ordre public international français et viole par là même les articles 6 du Code civil, 8-1 de la convention européenne des droits de l'homme et 21 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant ; que, d'autre part, l'arrêt, qui n'a pas recherché si l'enfant avait vécu presque exclusivement en France depuis sa naissance, ce qui justifiait qu'il soit fait échec à l'application de la loi nationale par le jeu de l'ordre public français, manque de base légale au regard de l'article 6 du Code civil ;

Mais attendu que, par motifs adoptés, la cour d'appel, après avoir relevé que les requérants et l'enfant étant de nationalité marocaine, il y avait lieu de faire application de l'article 83 du Code marocain du statut personnel et des successions prohibant l'adoption, a exactement décidé, sans violer les textes visés au moyen, que ce texte n'était pas contraire à la conception française de l'ordre public international ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

CCoomm..,, 1188 jjaannvviieerr 22000000

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 décembre 1996), qu'après l'ouverture en Suède (le 22 avril 1993) d'une procédure de " faillite de non-résident " à l'égard de M. Pehrsson, la Haute Cour de Justice de Londres, sur requête de la Scandinaviska Enskilda Banken, dont la créance n'avait pas été payée, a prononcé la faillite de M. Pehrsson ; que M. Kinlan, désigné en qualité de " trustee " du patrimoine du débiteur, a sollicité l'exequatur de cette décision ; que le tribunal a accueilli sa demande ;

Attendu que M. Pehrsson reproche à l'arrêt d'avoir déclaré exécutoire en France l'ordonnance de faillite rendue le 20 octobre 1994 par la Haute Cour de Justice de Londres, alors, selon le pourvoi, d'une part, que toutes les fois que la règle française n'attribue pas compétence exclusive aux tribunaux français, le tribunal étranger ne sera reconnu compétent que si le litige se rattache d'une manière caractérisée au pays dont le juge a été saisi et si le choix de la juridiction n'a pas été frauduleux ; que, pour estimer que la juridiction anglaise était compétente pour ouvrir une procédure collective à l'égard de M. Pehrsson, la cour d'appel se réfère aux règles de compétence édictées par le droit anglais et au fait que M. Pehrsson avait eu sur le territoire anglais une " activité liée à une exploitation commerciale ayant généré des dettes " ; qu'en statuant ainsi, elle ne vérifie pas si le litige se rattachait d'une manière caractérisée à l'Angleterre, violant les principes qui régissent la compétence juridictionnelle internationale, ensemble l'article 1er du décret du 27 décembre 1985 ; alors d'autre part, et dans le même ordre d'idées, que pour déclarer exécutoire en France le jugement de faillite rendu en Angleterre, la cour d'appel relève seulement que la faillite antérieurement déclarée en Suède ne prive pas les créanciers de M. Pehrsson du droit de poursuivre une procédure collective en Angleterre " permettant la liquidation de ses biens et le règlement de ses dettes " et que la banque " l'a poursuivi en

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Angleterre pour les dettes qu'il y a contractées pour les besoins d'une activité poursuivie dans ce pays " ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme elle y était invitée, si la faillite anglaise pouvait avoir une efficacité concrète en Angleterre puisque M. Pehrsson n'y possède aucun bien et si cette faillite n'était pas organisée dans le but de lui faire produire des effets en France où l'ouverture d'une faillite directe est impossible, et sans rechercher non plus si la faillite suédoise privait la banque du droit de poursuivre individuellement les biens du débiteur situés en France autrement que par une déclaration de faillite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des principes qui régissent la compétence juridictionnelle internationale, ensemble les articles 31 du nouveau Code de procédure civile et 1er du décret du 27 décembre 1985 ; et alors, enfin, qu'en énonçant " que le fait que M. Pehrsson n'ait pas la qualité de commerçant en Angleterre n'est pas contraire à l'ordre public français dès lors que les procédures collectives ne sont plus réservées à cette catégorie de justiciables en France ", pour accorder, sans aucune réserve, l'exequatur à la décision de faillite rendue en Angleterre à l'égard d'un débiteur domicilié en France, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'ordre public international et violé l'article 2 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, d'une part, qu'en retenant que M. Pehrsson qui a admis au cours de la procédure suivie en Angleterre que les critères de compétence étaient remplis et n'a exercé aucun recours contre l'ordonnance du 20 octobre 1994 a eu, sur le territoire anglais une résidence effective pendant les trois années qui ont précédé la saisine de la Haute Cour de Justice de Londres ainsi qu'une activité commerciale y ayant généré des dettes, la cour d'appel a vérifié que le litige se rattachait de manière caractérisée à l'Angleterre ;

Attendu, d'autre part, que s'il est vrai que M. Pehrsson a relevé, devant la cour d'appel, qu'il n'avait aucun bien en Angleterre, il n'a tiré aucune conséquence juridique de cette affirmation, de telle sorte qu'en retenant que la vente des biens appartenant en Suède à M. Pehrsson n'avait pas permis de payer la créance de la banque et que la loi suédoise ne privait pas les créanciers qui n'avaient pas été désintéressés de la faculté de poursuivre personnellement le débiteur sur ses biens situés à l'étranger, la cour d'appel a effectué la seule recherche qui lui était demandée ;

Attendu, enfin, que l'exequatur d'une décision étrangère ouvrant une procédure collective à l'égard d'un non-commerçant n'est pas contraire à la conception française de l'ordre public international ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

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II. La mise en œuvre de l’exception d’ordre public

L’exception d’ordre public ne produira ses effets (B) qu’à certaines conditions qu’il convient de préciser préalablement (A).

A. Les conditions de la mise en œuvre de l’exception d’ordre public

Il ne suffit pas que la loi étrangère soit contraire à l’ordre public pour que l’exception joue. Certaines conditions viennent déterminer dans quelle mesure la contrariété de la loi étrangère compétente va déclencher le jeu de l’exception de l’ordre public. Il convient de retenir deux distinctions.

1. Effet plein/effet atténué de l’ordre public

L’intensité de la réaction du système juridique et donc la mise en jeu de l’exception d’ordre public est différente selon qu’il s’agit de faire obstacle à l’acquisition d’un droit en France, ou qu’il s’agit de laisser se produire en France les effets d’un droit acquis à l’étranger sans fraude et en application de la loi compétente selon le droit international privé français. Ce principe, consacré par l’arrêt Rivière du 17 avril 1953 a été régulièrement confirmé (Civ. 1ère, 3 janvier 1980).

CCiivv..11èreère,, 33 jjaannvviieerr 11998800

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : Attendu, selon les énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué, que Larbi Bouazza s'est marié en Algérie, en 1936, avec Zohra Bendeddouche, et en a eu sept enfants ; qu'après s'être installé en France avec sa famille et y avoir acquis des immeubles, il est retourné en Algérie et y a épousé, en 1969, conformément à son statut personnel, Fatima Boumaza dont il a eu deux enfants ; que, Larbi Bouazza étant décédé en 1974, la cour d'appel a décidé que dame Boumaza et ses deux enfants, de nationalité algérienne comme le défunt lui-même, étaient en droit de venir à la succession des immeubles situés en France, en qualité d'épouse et d'enfants légitimes du défunt, au même titre que dame Bendeddouche et ses sept enfants, également de nationalité algérienne, et en concours avec eux ;

Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors que, d'une part, la loi française, applicable à la dévolution successorale des immeubles situés en France, ne reconnaît qu'une épouse légitime et n'admet parmi les ayants droit du défunt que cette épouse, de sorte que, selon le moyen, la deuxième épouse ne pouvait prétendre à aucune vocation successorale, quels que fussent son statut personnel et la régularité de son statut matrimonial, et alors que, d'autre part, lorsque, comme en l'espèce, la règle de conflit du for désigné, pour résoudre la question d'état des

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personnes, préalable à celle de dévolution successorale, une loi étrangère, en l'occurrence la loi algérienne, cette loi devrait être écartée, au nom de la conception française de l'ordre public international, en tant qu'elle valide un mariage polygamique et reconnaît au second conjoint et à ses enfants les qualités d'époux et d'enfants légitimes ;

Mais attendu que, d'une part, si la loi française régit la dévolution successorale des immeubles sis en France, la qualité de conjoint et l'établissement de la parenté nécessaire pour le jeu de la dévolution successorale relèvent de la loi personnelle, ainsi que l'a énoncé à bon droit la cour d'appel ;

Et attendu que, d'autre part, la réaction à l'encontre d'une disposition de loi étrangère contraire à la conception française de l'ordre public n'est pas la même suivant qu'elle met obstacle à la création en France d'une situation juridique prévue par cette loi ou qu'il s'agit seulement de laisser acquérir des droits en France, sur le fondement d'une situation créée sans fraude à l'étranger en conformité avec la loi ayant compétence en vertu du droit international privé français, et qu'en particulier, en cas de mariage polygamique régulièrement contracté à l'étranger conformément à la loi personnelle des parties, le second conjoint et ses enfants légitimes peuvent prétendre, en ces qualités, concurremment avec le premier conjoint et ses propres enfants, exercer les droits reconnus par la loi successorale française, soit au conjoint survivant, soit aux enfants légitimes ; qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué est légalement justifié et que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 22 février 1978 par la Cour d'appel de Paris.

Ce principe conduit à distinguer deux types d’effets produits par l’exception d’ordre public. L’effet plein, qui est produit par l’ordre public à l’égard des situations qui se constituent en France, sera très rigoureux. En effet, dans ce cas, la réaction face à une loi étrangère non conforme sera vive, car il s’agit d’appliquer directement sur le territoire français une loi qui heurte les conceptions essentielles de l’ordre juridique français. L’effet atténué, au contraire, se manifeste à l’égard des situations constituées à l’étranger et dont il s’agit de faire produire certains effets en France. Dans ce cas, la réaction face à une loi étrangère non-conforme à l’ordre public sera plus nuancée, car il s’agit de trouver un équilibre entre la défense de l’ordre public et le respect de la sécurité juridique et des droits acquis par les parties et éviter ainsi une discontinuité dans la situation juridique internationale. Par ailleurs, d’un point de vue géographique, l’ordre public français est moins affecté puisqu’il ne s’agit pas de créer sur le territoire français une situation contraire, mais d’en reconnaître certains effets. Seuls les effets les plus graves et les plus en contrariété avec le système juridique du for seront écartés. Ainsi, certains aspects et effets de la situation créée à l’étranger en application d’une loi étrangère compétente, mais contraire à l’ordre public français pourront être tolérés et le jeu de l’exception d’ordre public sera donc atténué (admission de certains effets, en France, d’un mariage polygamique prononcé à l’étranger, reconnaissance à la seconde épouse de droit alimentaires Civ.1ère, 19 février 1963). Cependant, l’exception d’ordre public pourra jouer dès lors que la contrariété paraît intolérable et que l’effet réclamé en France est manifestement contraire à

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l’ordre public (refus de reconnaître un droit aux prestations des assurances maladie et maternité au profit de la seconde épouse, Soc., 1er mars 1973 ; refus de reconnaissance d’une répudiation Civ.1ère, 17 février 2004,).

CCiivv..11èreère,, 1199 fféévvrriieerr 11996633

Sur le premier moyen : Attendu que Felix Chemouni, tunisien de confession israélite, qui a, en Tunisie, épousé en la forme religieuse mosaïque d'abord en 1940 la française Esther Valensi, puis le 7 mai 1945, Henriette Krieff, de nationalité tunisienne, étant venu se fixer en France avec ses deux épouses et les enfants qu'il en avait, a bientôt quitté sa seconde femme pour vivre uniquement avec la première ;

Que dame Krieff a alors formé devant la juridiction française une demande en contribution alimentaire aux charges du mariage ;

Que l'action accueillie en première instance ayant été rejetée en appel, cette décision a été cassée au motif que n'était nullement contraire à l'ordre public international français l'action de dame Krieff tendant à voir reconnaître en France une créance alimentaire découlant de sa qualité d'épouse légitime acquise en Tunisie en vertu de la loi nationale étrangère des deux époux, compétente au regard de la règle française de conflit ;

Que le jugement confirmatif attaqué, statuant sur renvoi, ayant fait droit à la demande, il lui est d'abord fait grief, par le pourvoi, d'avoir statué après débats en chambre du conseil, alors que semblable action devait être débattue à peine de nullité en audience publique ;

Sur le cinquième moyen : Attendu que non moins vainement il est fait grief à la décision attaquée de n'avoir pas répondu aux conclusions faisant valoir que le mariage religieux avait été dissous par répudiation opérée par le mari en vertu de la loi mosaïque ; Attendu en effet, qu'en énonçant, par application et interprétation d'un droit étranger dont le contrôle échappe à la Cour de cassation, que Chemouni n'a pas établi la réalisation de la répudiation par lui alléguée, le jugement a répondu aux conclusions invoquées, dont au surplus la teneur n'est pas produite ; que le moyen est donc sans fondement ; Sur les sixième et septième moyens en leurs diverses branches ; Attendu qu'il est encore reproché aux juges du fond d'avoir refusé de tenir compte de ce que les obligations alimentaires envers dame Krieff et ses enfants étaient incompatibles avec les conséquences résultant, quant aux effets du second mariage, de l'acquisition par Chemouni du statut personnel français, sans d'autre part répondre à ses conclusions prétendant qu'avant même sa naturalisation, il avait perdu son statut personnel tunisien mosaïque, tant par sa première union avec une française, que du seul fait de son établissement en France, et enfin de n'avoir pas non plus répondu aux conclusions faisant valoir que dame Krieff ne pouvait se prévaloir des dispositions des articles 864 du code de procédure civile et 214 du Code civil ; Mais attendu que la décision attaquée, en décidant à bon droit que l'établissement de Chemouni en France n'avait eu aucun effet sur son statut personnel tunisien, et qu'il n'avait perdu ce statut pour acquérir le statut français, qu'uniquement par l'effet de sa naturalisation en août 1956, a par la même nécessairement répondu pour les rejeter aux conclusions alléguant une acquisition du statut français du fait de circonstances antérieures ; que d'autre part, c'est très justement que les juges du fond ont décidé que nonobstant la naturalisation française de Chemouni,la créance alimentaire de dame Krieff, qui, tant au regard de la loi commune des époux avant août 1956, que de la loi française régissant depuis cette date les effets du mariage d'époux de nationalité différente domiciliés tous deux en France, découlait directement pour elle de sa qualité d'épouse légitime définitivement acquise par un mariage

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valablement contracté à l'étranger conformément à la loi compétente au fond comme en la forme suivant le droit international privé français, devait être reconnue en France, et devait y être exécutée par application des lois françaises tant de procédure, dès avant 1956, qu'également de fond depuis cette date ;

Que les deuxième, troisième et huitième moyens ne sont pas mieux fondés que les précédents ;

D'où il suit que l'arrêt attaqué, qui est motivé, a légalement justifié sa décision ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre le jugement rendu le 2 février 1960 par le Tribunal de grande instance de Versailles ;

SSoocc..,, 11erer mmaarrss 11997733

Sur le moyen unique : Attendu qu'il résulte des constatations des juges du fond que Sefouni ressortissant algérien a épousé successivement en Algérie, selon la loi musulmane, le 28 août 1931 Arbia Hamdoun, et le 26 septembre 1950, alors que la première union n'était pas dissoute, Aicha Siad ;

Qu'il réside avec cette dernière en France où il travaille ;

Qu'il a demandé le bénéfice des prestations de l'assurance maladie pour des soins dispensés à sa deuxième épouse le 11 juillet 1968 ainsi que, pour la même, les prestations de l'assurance maternité en vue d'un accouchement prévu fin juillet 1968 ;

Que la caisse les a refusées en relevant qu'il en avait déjà réclamé pour sa première épouse ;

Qu'il fait grief à la cour d'appel de l'avoir débouté de son recours, alors que les travailleurs salariés ou assimilés qui se rendent de France en Algérie ou inversement bénéficient ainsi que les membres de leur famille des prestations de maternité en Algérie et en France et que doivent être considéré comme membres de la famille des travailleurs algériens leurs conjoints légitimes, même en cas de polygamie, l'ordre public français ne s'opposant pas à la reconnaissance des unions polygamiques, à condition qu'elles soient contractées à l'étranger et que le statut personnel des intéressés l'autorise, et alors subsidiairement que les travailleurs algériens ont droit aux prestations de maladie pour au moins un conjoint et que le refus de ces prestations pour la seconde épouse de Sefouni ne pouvait se justifier qu'a condition qu'il fut établi que ses deux épouses vivaient en France et qu'il avait demandé le bénéfice de prestations maladie ou maternité pour la première épouse ;

Mais attendu qu'après avoir à juste titre rappelé que la convention franco-algérienne sur la sécurité sociale attribue aux ressortissants algériens travaillant en France les mêmes avantages dans le régime général de sécurité sociale qu'aux ressortissants français, et qu'il s'ensuivait que les ayants-droit de Sefouni tels qu'ils sont définis par ce régime doivent bénéficier des prestations des assurances maladie et maternité qui sont attribuées aux assurés français, la cour d'appel observe que la loi française ne reconnaît qu'une épouse légitime et n'admet parmi les ayants-droit de l'assuré social que cette épouse ;

Qu'en effet, la convention générale énonce en son article premier que les travailleurs français ou algériens sont " soumis " respectivement aux législations de sécurité sociale applicables en Algérie ou en France et en bénéficient ainsi que leurs ayants-droit " dans les mêmes conditions " que les ressortissants de chacun de ces Etats et précise en son article 3 que lesdits travailleurs sont soumis aux législations en vigueur au lieu de leur travail ;

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Attendu qu'ayant constaté que le premier mariage de Sefouni n'était pas dissout, que ses deux épouses vivaient en France, que Sefouni avait déjà réclamé des prestations pour la première, la cour d'appel, était fondée à décider qu'au regard du régime français de sécurité sociale, la deuxième épouse de Sefouni ne pouvait ouvrir droit aux prestations sollicitées quels que fussent le statut personnel de Sefouni et la régularité de sa situation matrimoniale ;

D'où il suit que le moyen qui n'est pas fondé en sa première branche et qui critique, en sa deuxième branche, des circonstances de fait non contestées devant les juges du fond ne saurait être accueilli ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 10 mars 1971 par la Cour d'appel de Paris.

CCiivv..11èreère,, 1177 fféévvrriieerr 22000044

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Ait X... et Mme Y..., tous deux de nationalité algérienne, se sont mariés en Algérie en 1985 ; qu'en janvier 1998, Mme Y... a présenté une requête en divorce au juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris ; qu'à l'audience du 7 avril 1998, M. Ait X... a soulevé l'exception de litispendance internationale, en raison de l'instance en divorce pendante devant le tribunal de Sidi M'hamed (Algérie) depuis le 23 novembre 1997 ;

Attendu que M. Ait X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 22 mars 2001) d'avoir dit que le jugement du tribunal de Sidi M'hamed du 29 mars 1998 ayant prononcé le divorce ne pouvait être reconnu en France et d'avoir rejeté l'exception de chose jugée, alors, selon le moyen, que, dès lors qu'il résulte des propres constatations des juges du fond : 1 / que le litige entre les époux, tous deux de nationalité algérienne et mariés en Algérie, se rattachait de manière caractérisée aux juridictions algériennes, 2 / que la procédure devant la juridiction algérienne avait été loyale et contradictoire, l'épouse obtenant des dommages-intérêts, 3 / que le choix du juge algérien n'avait pas été frauduleux, dans la mesure où la saisine de la juridiction algérienne ne visait pas à faire obstacle à la saisine préalable du juge français et où, au contraire, l'épouse n'avait saisi la juridiction française qu'après mise en oeuvre de la procédure en Algérie, la cour d'appel ne pouvait refuser l'exequatur du jugement algérien du 23 mars 1998 sans violer l'article 1er d) de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964 et les principes régissant l'ordre public international français ;

Mais attendu que l'arrêt retient que le divorce des époux Ait X... a été prononcé par les juges algériens, malgré l'opposition de la femme, au seul motif, admis par la loi algérienne, que le pouvoir conjugal reste entre les mains de l'époux et que le divorce doit être prononcé sur la seule volonté de celui-ci ; que la cour d'appel en a exactement déduit que, même si elle résultait d'une procédure loyale et contradictoire, cette décision constatant une répudiation unilatérale du mari sans donner d'effet juridique à l'opposition éventuelle de la femme et en privant l'autorité compétente de tout pouvoir autre que celui d'aménager les conséquences financières de cette rupture du lien matrimonial, était contraire au principe d'égalité des époux lors de la dissolution du mariage reconnu par l'article 5 du protocole du 22 novembre 1984, n° 7, additionnel à la convention européenne des droits de l'homme, que la France s'est engagée à garantir à toute personne relevant de sa juridiction, et donc à l'ordre public international réservé par l'article 1er d de la Convention franco-algérienne du 27 août 1964, dès lors que, comme en l'espèce, les deux époux étaient domiciliés sur le territoire français ; d'où il suit que la deuxième branche du moyen n'est pas fondée tandis que les deux

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autres sont inopérantes dès lors qu'elles s'attachent à la compétence du juge algérien que la cour d'appel n'a pas déniée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

2. L’ordre public de proximité

En matière d’effet plein de l’ordre public vient s’ajouter la condition de proximité. En effet, la variabilité de la réaction à l’ordre public dans l’espace se manifeste notamment par le fait que l’exception d’ordre public ne joue qu’à la condition que la situation privée internationale présente une certaine proximité géographique avec le territoire français. Ainsi, la contrariété d’une loi étrangère à l’ordre public ne permettra pas le jeu de l’exception d’ordre public que dans la mesure où la situation litigieuse présente des liens de rattachement suffisants avec le territoire du for. Par exemple, en matière d’établissement du lien de filiation, la jurisprudence exige que l’enfant soit de nationalité française ou ait sa résidence en France (Civ.1ère 10 février 1993).

CCiivv..11èreère,, 1100 fféévvrriieerr 11999933

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que Mme Y..., de nationalité tunisienne, a donné naissance le 22 mai 1984, à Paris, à une fille prénommée Sarah ; qu'en juin 1986, elle a assigné M. X..., de nationalité algérienne, avec lequel elle prétendait avoir vécu en concubinage de 1981 à la fin de 1985, en recherche de paternité, et paiement d'une pension alimentaire pour l'enfant, sur le fondement de l'article 340.4° et 5° du Code civil, et subsidiairement, par application des dispositions de l'article 311-15 du même Code, en constatation de possession d'état ; que l'arrêt attaqué (Paris, 13 octobre 1989) a dit que la loi française était applicable et a accueilli les demandes de Mme Y... après avoir retenu l'existence de relations stables et continues entre celle-ci et M. X..., pendant la période légale de conception ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que les lois étrangères qui prohibent l'établissement de la filiation naturelle ne sont pas contraires à la conception française de l'ordre public international dont la seule exigence est d'assurer à l'enfant les subsides qui lui sont nécessaires ; qu'en écartant la loi tunisienne, normalement applicable, au profit de la loi française par cela seul que cette loi, en prohibant l'établissement judiciaire de la filiation naturelle, serait contraire à la conception française de l'ordre public, la cour d'appel a violé l'article 311-14 du Code civil et méconnu la notion française de l'ordre public international ; alors, d'autre part, que dans le cas où l'enfant naturel et l'un de ses père et mère ont en France leur résidence habituelle, la loi française s'applique seulement pour ce qui concerne les effets attachés à la possession d'état et non dans toutes ses dispositions relatives à l'établissement de la filiation naturelle ; qu'en déclarant la paternité naturelle établie sur le fondement d'un concubinage notoire au cours de la période légale de conception, au prétexte que l'enfant et sa mère avaient leur résidence habituelle en France, la cour d'appel a violé les articles 311-15 et 340 du Code civil ; et alors enfin, que si dans le cas où l'enfant et sa mère ont leur résidence habituelle en France, la paternité naturelle peut être établie par

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application de la loi française, c'est à la condition que soit établie la possession d'état d'enfant naturel de cet enfant à l'égard du père prétendu ; qu'en ne constatant pas les éléments constitutifs de la possession d'état d'enfant naturel dans les rapports entre l'enfant Sarah et l'exposant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 311-15 et 334-8 du Code civil ;

Mais attendu que si les lois étrangères qui prohibent l'établissement de la filiation naturelle ne sont, en principe, pas contraires à la conception française de l'ordre public international, il en est autrement lorsque ces lois ont pour effet de priver un enfant français ou résidant habituellement en France, du droit d'établir sa filiation ; que, dans ce cas, cet ordre public s'oppose à l'application de la loi étrangère normalement compétente ; qu'en l'espèce les juges du fond ont constaté que Sarah Y... a obtenu un certificat de nationalité française et qu'elle réside en France depuis sa naissance ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté la loi tunisienne normalement applicable, au profit des dispositions des articles 340 et suivants du Code civil français, que, par ces motifs, la décision déférée, en ce qu'elle écarte la loi tunisienne, normalement applicable au profit des dispositions des articles 340 et suivants du Code civil, se trouve légalement justifiée, abstraction faite de critiques énoncées par les deuxième et troisième branches qui sont dès lors inopérantes ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.

B. Les effets de la mise en œuvre de l’exception d’ordre public

1. L’office du juge

La jurisprudence a récemment précisé l’office du juge en matière d’exception d’ordre public. Reprenant les solutions adoptées quant à la mise en œuvre de la règle de conflit de lois, la Cour de cassation recourt à la distinction droits disponibles / droits indisponibles. Ainsi, en matière de droits disponibles, les juges ne sont pas tenus de vérifier d’office la conformité de la loi étrangère applicable à l’ordre public français en matière internationale (la question doit donc être soulevée par les parties). Cependant, l’arrêt n’exclut pas la faculté pour le juge de faire jouer d’office l’exception d’ordre public dans une telle hypothèse dès lors qu’il considère que la loi n’est pas conforme à l’ordre public. Il s’agit donc, en matière de droit disponible, d’une faculté (Civ.1ère, 14 juin 2005). En revanche, en matière de droit indisponible le juge est tenu, même d’office, non seulement de mettre en œuvre la règle de conflit, mais aussi de vérifier que la loi étrangère applicable ne soit pas contraire avec l’ordre public français en matière internationale (Civ.1ère, 6 décembre 2005).

CCiivv..11èreère,, 1144 jjuuiinn 22000055

Sur le moyen unique tel que figurant au mémoire en demande et reproduit en annexe :

Attendu que Mme X... agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses enfants mineurs a formé un pourvoi contre un

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arrêt de la cour d'appel de Nancy du 1er mars 2002 ayant dit la loi grecque applicable à son action en indemnisation et ayant déclaré celle-ci préscrite ;

Attendu que la cour d'appel a fait application du droit étranger compétent selon la règle de conflit de lois invoquée devant elle, sans avoir, compte tenu de la teneur de la loi étrangère telle qu'elle l'a souverainement définie, à rechercher d'office si cette loi était contraire à la conception française de l'ordre public international ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi…

CCiivv..11èreère,, 66 ddéécceemmbbrree 22000055

Sur le moyen unique, pris en ses cinquième et sixième branches :

Vu l'article 3 du Code civil ;

Attendu qu'en matière de droits indisponibles, il incombe au juge français de mettre en oeuvre, même d'office, la règle de conflits de lois, de rechercher la teneur du droit étranger et de l'appliquer sous réserve qu'il ne soit pas contraire à l'ordre public international français ;

Attendu que le 27 octobre 1996, M. X..., de nationalité belge, a épousé au Sénégal, selon le rite coutumier, Mme Y..., de nationalité sénégalaise ; que les époux s'étant séparés, Mme Y... a contracté un second mariage, le 4 mars 2000, avec M. Z... ; que, par jugement du 7 février 2001, le tribunal départemental de Dakar a, sur requête de M. X..., autorisé l'inscription du mariage coutumier sur les registres de l'Etat civil ; qu'un certificat de mariage a en conséquence été dressé le 3 mai 2001 ; que M. X..., domicilié en France, a saisi le juge aux affaires familiales de Limoges d'une requête en divorce ;

Attendu que, pour déclarer le jugement du tribunal départemental de Dakar du 7 février 2001 inopposable en France et la requête en divorce irrecevable, l'arrêt retient que les dispositions de la loi étrangère, qui permettent un "état de bigamie apparent" sont contraires à la conception française de l'ordre public international et ne sauraient donc avoir d'efficacité en France ;

Qu'en statuant ainsi, alors d'une part que, selon l'article 146 du Code de la famille sénégalais, le mariage coutumier non constaté par l'officier d'Etat civil est valable mais seulement inopposable à l'Etat et aux collectivités publiques et d'autre part que le mariage du 27 octobre 1996, qui ne constituait pas par lui-même une situation de bigamie, n'était pas contraire à l'ordre public international français, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 juin 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges

2. La substitution de la loi du for

Dès lors que la loi étrangère est contraire à l’ordre public et que les conditions auxquelles est subordonné le jeu de l’exception d’ordre public sont remplies, le juge va pouvoir évincer la loi étrangère, écarter l’application de cette dernière, et lui substituer la loi du for (cf. par exemple Civ.1ère, 15 juillet 1963). L’éviction ne doit pas être totale, mais seulement partielle. En effet, seules les dispositions contraires doivent être écartées, la loi étrangère restant, dans son ensemble et dans la mesure du possible applicable (il s’agit d’une exception à la loi compétente, par conséquent, il convient, s’il est possible de faire une

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application distributive des dispositions de la loi étrangère et de la loi du for).

CCiivv..11èreère,, 1155 jjuuiilllleett 11996633

Sur le moyen unique pris en sa première branche : Attendu que, poursuivi pour abandon de famille sur la plainte de la dame Attia, Sellam a saisi le tribunal d'une demande tendant à voir constater l'inexistence ou prononcer la nullité du mariage invoqué par la dame Attia ;

Qu'il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir décidé que le mariage célébré en Israël, le 22 mai 1958 entre Sellam et la dame Attia devait être considéré comme valable ;

Que le pourvoi prétend que Sellam, qui ne connaissait que la langue française et ignorait le droit rabbinique, n'avait pu comprendre la nature de la cérémonie à laquelle il assistait à cette date avec des personnes qu'il n'avait rencontrées que quelques jours auparavant ;

Qu'en conséquence il n'avait pu donner un consentement valable au mariage prétendu ;

Mais attendu que la cour d'appel constate que Sellam, israélite originaire de la même commune d'Algérie que la dame Attia, avait décidé de se rendre en Israël au mois de mai 1958 pour la retrouver ;

Que, quelques jours après son arrivée en Israël, il obtenait, sur sa propre demande, d'un tribunal rabbinique un jugement décidant qu'il pouvait être procédé à la célébration du mariage projeté entre lui-même et la dame Attia ;

Qu'il s'était présenté en personne devant le rabbin pour fixer la date de la cérémonie à laquelle il a pris part en costume de marie et lors de laquelle un acte de mariage avait été dressé en langue hébraïque avec une traduction française ;

Qu'un livret de mariage avait été ensuite délivré par l'ambassade de France à Tel Aviv, où l'acte de mariage avait été transcrit sur les registres de l'état civil de la même ambassade ;

Que l'arrêt attaqué relève encore que Sellam avait, en présence de deux témoins, déclaré devant le rabbin vouloir prendre la demoiselle Attia pour femme suivant la loi de Moïse ;

Que de ces divers éléments, il déduit que Sellam ne rapporte pas la preuve que son consentement n'ait pas été valablement donné dans le cadre d'une cérémonie qu'il avait lui-même sciemment et préalablement sollicitée et préparée en plein accord avec sa future épouse ;

D'où il suit que les griefs articulés par la première branche du moyen ne sauraient être retenus ;

Sur la seconde branche du moyen : Attendu qu'il est encore soutenu que, le même acte ayant, lors de la cérémonie de mariage, constate à la fois l'union des époux et défini leurs conventions matrimoniales, ledit acte, auquel Sellam n'aurait pas réellement souscrit, était contraire à la fois à la loi israélienne et à la loi française et heurterait l'ordre public international français ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir rappelé que le mariage est soumis aux règles de forme de la loi du lieu de la célébration, et après avoir souverainement interprété les dispositions de la loi étrangère applicable en l'espèce, décidé à bon droit que les divergences entre ladite loi et la loi française, et spécialement la possibilité de comprendre en un même document l'acte de mariage et des dispositions relatives au statut matrimonial des époux, ne sont pas contraires à l'ordre public français au point d'exiger la substitution de la loi française à la loi locale normalement compétente ;

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Qu'ainsi les critiques formulées par la seconde branche ne sauraient pas davantage être acceptées ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 23 mars 1962 par la Cour d'appel de Paris.

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