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Enseigner le développement durable. Géographie 2 de – Sociétés et développement durable © CRDP de l’académie d’Amiens, 2010-2011 Thème 3. Aménager la ville Compte tenu de la diversité des villes en pays développés et dans les pays des Suds, ce thème fait l’objet de deux mises au point scientifiques. 1. Villes et développement durable en pays développés I. Croissance urbaine, étalement urbain, inégalités sociospatiales I.1. Définir les termes I.2. Pourquoi lier les trois expressions ? I.3. Mesurer l’étalement urbain : un exercice difficile I.4. Étalement urbain et inégalités locales II. Transports et mobilités II.1. Problématique générale II.2. Sortir de la dépendance automobile III. Aménager des « villes durables » III.1. La problématique de l’aménagement de la ville durable en Amérique du Nord : l’exemple des États-Unis III.2. La problématique de l’aménagement de la ville durable en Europe occidentale Documents de la mise au point 1 Document 1. Aperçu des grandes conférences de cadrage, des structures de mobilisation et de coordination Document 2. Sortir de la dépendance automobile, l’exemple de l’agglomération de Grenoble Document 3. L’exemple de Portland aux États-Unis Document 4. La perspective d’une écocité, l’exemple de Fribourg (Allemagne) 2. Villes et développement durable dans les pays des Suds I. Les villes des Suds : croissance, étalement, pressions sur les milieux I.1. Une transition urbaine accélérée… aux facettes multiples I.2. La croissance spatiale : facteurs et impacts I.3. Étalement spatial et pression sur les milieux II. Disparités dans l’accès aux services essentiels : l’exemple de l’eau et des trans- ports II.1. Inégalités d’accès à l’eau II.2. Inégalités d’accès aux transports III. Aménager des villes durables au Sud ? III.1. Les politiques urbaines des Suds sous influence : entre ajustement structurel et déve- loppement durable III.2. Hétérogénéité des situations urbaines des Suds face à la problématique du dévelop- pement durable Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

FOREDD Thème 3. Aménager la ville lÕaide de la Casden ......Document 5. Le cordon urbain et périurbain du Golfe de Guinée Document 6. Problèmes de transport à Alger Document

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Enseigner le développement durable. Géographie 2de – Sociétés et développement durable © CRDP de l’académie d’Amiens, 2010-2011

Thème 3. Aménager la ville

Compte tenu de la diversité des villes en pays développés et dans les pays des Suds, ce thème fait l’objet de deux mises au point scientifiques.

1. Villes et développement durable en pays développés

I. Croissance urbaine, étalement urbain, inégalités sociospatialesI.1. Définir les termesI.2. Pourquoi lier les trois expressions ?I.3. Mesurer l’étalement urbain : un exercice difficileI.4. Étalement urbain et inégalités locales

II. Transports et mobilitésII.1. Problématique généraleII.2. Sortir de la dépendance automobile

III. Aménager des « villes durables »III.1. La problématique de l’aménagement de la ville durable en Amérique du Nord : l’exemple des États-UnisIII.2. La problématique de l’aménagement de la ville durable en Europe occidentale

Documents de la mise au point 1�� Document 1. Aperçu des grandes conférences de cadrage, des structures de mobilisation et de coordination

�� Document 2. Sortir de la dépendance automobile, l’exemple de l’agglomération de Grenoble

�� Document 3. L’exemple de Portland aux États-Unis

�� Document 4. La perspective d’une écocité, l’exemple de Fribourg (Allemagne)

2. Villes et développement durable dans les pays des Suds

I. Les villes des Suds : croissance, étalement, pressions sur les milieuxI.1. Une transition urbaine accélérée… aux facettes multiplesI.2. La croissance spatiale : facteurs et impactsI.3. Étalement spatial et pression sur les milieux

II. Disparités dans l’accès aux services essentiels : l’exemple de l’eau et des trans-ports

II.1. Inégalités d’accès à l’eauII.2. Inégalités d’accès aux transports

III. Aménager des villes durables au Sud ?III.1. Les politiques urbaines des Suds sous influence : entre ajustement structurel et déve-loppement durableIII.2. Hétérogénéité des situations urbaines des Suds face à la problématique du déve lop-pement durable

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Documents de la mise au point 2�� Document 1. Les agglomérations de plus de 10 000 habitants en 1950 et 2020, en Afrique de l’Ouest

�� Document 2. Croissance urbaine à Mexico

�� Document 3. Problèmes d’aménagement urbain au Caire

�� Document 4. La course à l’eau à Dakar

�� Document 5. Le cordon urbain et périurbain du Golfe de Guinée

�� Document 6. Problèmes de transport à Alger

�� Document 7. La préservation de l’environnement, source de conflits intra-urbains. Exemple de Rio

Pistes pédagogiques

Piste 1. Exploiter et confronter des informations sur une grande métropole, Istanbul

Piste 2. Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilité à Alger

Piste 3. Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemple de la ville d’Auxerre

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Mise au point scientifi que — Villes et développement durable en pays développés 1.

Enseigner le développement durable. Géographie 2de – Sociétés et développement durable © CRDP de l’académie d’Amiens, 2010-2011

complexes, au croisement, le plus souvent, de questions relatives :

– à la production de la structure et de la matérialité des villes (relevant donc de l’urbanisme) ;

– aux structures démographiques et sociales ainsi qu’à la manière dont s’éta-blissent et se transforment les rapports sociaux ;

– aux dispositifs de gouvernement et de gestion, mais aussi de mobilisation de ressources et de compétences sociales et culturelles ;

– aux structures des systèmes productifs localisés* et aux acteurs et agents contribuant à leur fonctionnement ;

– à la nécessaire attention et évaluation des externalités environnementales (en matière d’air, d’eau, de biodiversité végétale et animale) qu’implique la concentration de population et d’activités.

Cette entrée par des questionnements plutôt transversaux représente un passage obligé pour poser la réflexion touchant la perspective d’une « ville durable ». Cette réfl exion oblige également à penser le rap-port existant entre les villes (et ce qui fait leur substance matérielle et humaine) et les emboîtements de temporalités (locales, nationales, internationales) à travers les-quelles elles se sont trouvées façonnées et qui contribuent à leur fabrique. Si le regard rétrospectif s’impose, il est tout aussi néces-

Introduction

La problématique du développement durable s’applique aisément aux villes,

d’autant que dans les pays développés celles-ci concentrent la très grande majorité des populations et des activités. Cette problé-matique reformule la question du dévelop-pement au regard d’enjeux à la fois démo-graphiques, sociaux, politiques, culturels, économiques, environnementaux. Pour beaucoup, ces enjeux sont récurrents. Ils ont été, et demeurent, au cœur des conditions historiques de (re)production des villes. Il en est ainsi, par exemple, des enjeux de division/ségrégation sociale, de pauvreté, comme des consommations de ressources (en énergie, en eau, en sol, etc.). Il est cepen-dant d’autres enjeux qui, par leur caractère inédit, obligent à des reformulations. Par exemple, le vieillissement des populations oblige à repenser la question des rapports et des solidarités intergénérationnels, ou bien, dans un tout autre domaine, en regard des problématiques du changement climatique et des limites évaluées des stocks de certaines ressources énergétiques fossiles, en particu-lier, du pétrole, s’affi rme le besoin de repenser certains usages de la ville et peut-être même d’imaginer la transformation des modes de vie citadins.

Ce bref aperçu montre combien il peut être nécessaire d’entrer dans des questions

par Jacques CHeVALierprofesseur émérite,université du Maine.

* Systèmes productifs

localisés

Terme utilisé en aménagement

du territoire pour désigner

« une organisation productive

particulière localisée sur

un territoire correspondant

généralement à un bassin

d’emploi »(DATAR). Cette

organisation comprend des

entreprises ayant des activités

similaires ou complémentaires

(ex. : les PME dynamiques de la

Vendée ou de la Toscane).

Mise au point scientifique

Villes et développement durableen pays développés

Le texte qui suit débute par une introduction

générale ayant pour objectif de montrer

comment aujourd’hui, et à la suite de quel

cheminement, peut être pensée la problématique

de la ville durable. Suivent trois parties, chacune

étant dédiée aux entrées imposées par

le programme : Croissance urbaine, étalement urbain, inégalités sociospatiales ; Transports et

mobilités ; Aménager des « villes durables ».Pour chacune de ces parties, un texte de cadrage

ouvre par des liens sur des compléments permet-

tant de construire des études de cas ou de donner

une illustration à une partie de cours.

En conclusion générale, sont rappelées quelques

données essentielles.

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable2.

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saire de s’inscrire dans une vision prospec-tive. En effet, poser la relation entre ville et développement durable c’est à la fois comprendre ce qui s’est réel lement passé, appréhender la complexité et les défis du présent , et enfin définir les lignes de force des actions, collectives et individuelles, à venir pour construire les conditions d’une nouvelle place des villes dans le monde de demain.

Aujourd ’hui, en Europe occidentale comme dans les pays développés du continent américain, plusieurs grandes réf lexions structurent le rapport entre villes et déve-loppement durable.

La première porte sur la forme et l ’étendue des vi l les. Cette réf lexion a commencé à être formulée quand l’examen des effets des modèles d’urbanisation qui ont eu cours au xxe siècle a été entamé à partir des décennies 1960-1970, et surtout au cours des deux dernières décennies du siècle dernier. En effet, ces modèles d’urba-nisation ont fait apparaître toujours plus d ’exagération des externalités négatives (en matières environnementale et sociétale notamment) alors que les bénéfices apparais-saient toujours bien réels mais de moins en moins partagés. Ceci explique, par exemple, combien sont devenues insistantes la ques-tion de l’éta lement urbain et la probléma-tique du renouvellement urbain, autant dans leurs dimensions spatiales, matérielles que sociales ; toutes deux contribuant à asseoir l’idée d’un nécessaire tournant urbanistique.

La seconde concerne la confrontation des villes à une indispensable transition éner-gétique. En effet, autant pour assurer l’exis-tence que le développement des principales fonctions urbaines (résidence, mobilités, production, consommation, récréation), il est indispensable de recourir à d’importantes quantités d’énergie primaire. Cette énergie, transformée en divers usages (chauffage, cli-matisation, eau chaude, etc.), est aujourd’hui en très grande partie fournie à partir de res-sources fossiles largement carbonées. En raison, d’une part des perspectives de chan-gement climatique, pour lequel les concen-trations de gaz à effet de serre (GES) jouent

probablement un rôle indéniable et, d’autre part, des perspectives d’épuisement à moyen terme d’une part de certaines ressources en combustible, un effort particulier est sollicité pour substituer des énergies renouvelables (solaire, géothermie, biomasse, etc.) aux énergies fossiles traditionnelles. Ce passage d’un système énergétique à un autre définit un enjeu de taille puisqu’il s’agit de concevoir une ville sans carbone (post-carbone) ou, pour le moins, fonctionnant sur un mode économe en émissions de carbone.

La troisième a trait aux conditions d’une naturalisation de la ville. Par définition la ville représente le résultat du plus important des processus d’artificialisation de l’œkou-mène. Il peut donc sembler paradoxal de vou-loir reconstruire une relation ville/nature. En fait, bien des bénéfices collectifs peuvent être envisagés grâce à cette reconnexion. Par exemple, la constitution de corridors éco-logiques traversant les espaces urbanisés permet d’envisager une prise en compte des problématiques d’érosion et de discontinuité de la biodiversité. Dans un autre registre, la végétalisation de la ville peut contribuer à modifier et améliorer le climat urbain et donc le confort des résidants. Enfin, l’inté-gration des problématiques touchant aux eaux urbaines (imperméabilisation modifiant les conditions de ruissellement, lavage des polluants de surface, etc.) dans le fonction-nement du cycle de l’eau apparaît aujourd’hui comme indispensable.

La dernière grande série de réflexions concerne la question des inégalités. Les cycles successifs de développement des villes ont tous consacré des inégalités. Dans les villes contemporaines, les conditions de fonction-nement des systèmes productifs localisés, la manière dont ceux-ci se transforment, conduisent à consolider des divisions socio-spatiales existantes tout en en produisant de nouvelles. Ces divisions fondées sur des caractéristiques de capital économique et culturel contribuent à façonner le fonction-nement des rapports sociaux et à fonder, en partie également, les principes du gou ver-nement urbain. À ces inégalités économiques

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable en pays développés 3.

Enseigner le développement durable. Géographie 2de – Sociétés et développement durable © CRDP de l’académie d’Amiens, 2010-2011

et culturelles sont bien souvent associées, désormais, des inégalités de nature écolo-gique ou environnementale, les moins aisés ayant souvent un accès limité aux aménités environnementales et, par contre, une expo-sition plus forte aux externalités environne-mentales négatives (pollutions, bruit, etc.) associées au fonctionnement de la ville. Cette complexification de la question des inégalités constitue un véritable défi politique puisqu’il s’agit de construire de nouveaux modes de régulation prenant en compte ces lignes de clivage et de penser de nouvelles manières de concevoir l’aménagement des villes dans la perspective de recoudre ce qui est aujourd’hui plutôt segmenté.

Ces réflexions ont été structurées pro-gressivement, principalement entre 1990 et aujourd’hui, au travers d’initiatives venant essentiellement des Nations unies telles que les conférences pour l ’environnement et le développement, celles sur les établis-sements humains (UN-HABITAT) ou orga-nisées dans le cadre du Forum urbain mon-dial (voir document 1), initiatives relayées au sein de l’OCDE (à partir des années 1992 et 1993 quand s’engage la réflexion portant sur la ville du xxie siècle, puis le programme « ville écologique ») ou par la Commission européenne (qui publie en 1991 son Livre vert sur l’environnement urbain et engage le projet « ville durable » (1993) qui se concré-tisera l’année suivante par la campagne des villes européennes pour un développement durable). Mais cette structuration doit aussi beaucoup à la mobilisation d’élus, de techni-ciens et d’associations venant de villes très variées autant par leurs localisations que par leurs tailles, devenus des acteurs clés, ayant construit des réseaux fondés sur des engage-ments communs et l’échange d’expériences. La ville durable a ainsi cessé d’être un concept pour s’inscrire dans des perspectives bien réelles.

Durant la dernière décennie du xxe siècle et la première du xxie s’est ainsi esquissé un changement important dans la manière de penser les villes dont nous pouvons commen-cer à voir les effets, surtout depuis une dizaine

d’années, avec plus ou moins d’intensité. Une des manifestations de ce changement s’est traduite par l’apparition de nouveaux morceaux de villes, conçus selon des prin-cipes innovants afin d’apporter des réponses concrètes aux réflexions engagées en matière de développement urbain durable : les éco-quartiers*. Ces nouveaux produits urbains, essentiellement européens, ne peuvent faire à eux seuls la ville durable. Toutefois, ils per-mettent de conduire des expérimentations appropriables pour transformer la ville.

Ce sont ces principales réflexions qui doivent organiser la mise en œuvre des trois points du programme « Villes et déve lop-pement durable » :

1. Croissance urbaine, étalement urbain, inégalités socio-spatiales.

2. Transports et mobilités.3. Aménager des « villes durables ».

�� Document 1. Aperçu des grandes confé-

rences de cadrage, des structures de mobilisation

et de coordination

I. Croissance urbaine, étalement urbain, inégalités sociospatiales

I.1. Définir les termesCroissance urbaine*. Expression recou-

vrant deux principaux sens : augmentation de la population des villes, processus de dila-tation des territoires urbanisés. Ces deux sens ne sont pas nécessairement liés. Dans les pays développés, l ’extension des terri-toires urbains dépend de moins en moins des conditions de la croissance de la population et davantage des transformations des socié-tés contribuant à créer de nouveaux besoins résidentiels (décohabitation, division des ménages) et surtout de nouvelles infrastruc-tures destinées à la production, à la consom-mation, à la mobilité, aux loisirs.

Étalement urbain*. Processus d’extension spatiale des villes aux dépens de territoires naturels et agricoles qui les environnent. Il s’agit donc d’un processus d’artificialisation des sols. Ce processus n’est généralement pas spatialement continu. En effet, pour

* Écoquartier

Quartier d’une ville conçu pour

répondre aux exigences d’un

développement durable : faible

impact environnemental, mixité

des fonctions économiques et des

milieux sociaux.

* Croissance urbaine

Terme désignant à la fois

la croissance quantitative de

la population urbaine

et le processus d’augmentation

des surfaces occupées

par l’espace urbain.

* Étalement urbain

Processus d’augmentation

des surfaces occupées par

l’espace urbain aux dépens des

espaces naturels ou agricoles.

Très lié à la « dépendance

automobile » l’étalement urbain

est généralement beaucoup

plus rapide que la croissance

démographique des villes.

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable4.

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répondre aux différents besoins de résidence, d’activité, d’infrastructures, de récréation, etc., l’artificialisation va affecter des terri-toires aux qualités souvent différentes créant ainsi des discontinuités plus ou moins impor-tantes dans le dessin de la ville.

Inégalités sociospatiales*. Désignent la façon dont les inégalités sociales fondées sur les variations de statut, d’âge, d’origine, de genre se traduisent dans l’espace. Les divi-sions ou les fractures sociales sont évaluées dans l’espace résidentiel. Aussi les conditions d’accès et d’occupation du logement sont-elles déterminantes dans la construction des inégalités sociospatiales.

I.2. Pourquoi lier les trois expressions ?Les processus de croissance urbaine sont

multiples et conduisent de manière inévitable à produire de l’étalement urbain.

• Même en densifiant l’usage des espaces déjà urbanisés, ces derniers ne pourraient pas satisfaire l’ensemble des besoins nouveaux, en particulier ceux destinés à des activités économiques consommatrices d’espaces et/ou créatrices de nuisances. L’exemple des activités de logistique illustre bien ce phéno-mène. Mais bien d’autres exemples peuvent être donnés, comme par exemple celui des activités de loisir ou de récréation. La construction de grands équipements (stade, salle de spectacle, multiplexe, etc.) destinés à accueillir un nombre important de spec-tateurs suppose, outre la surface même des équipements, des infrastructures de desserte qui souvent occuperont souvent plus d’espace que l’équipement lui-même.

• L’étalement est également généré par des besoins résidentiels. En effet, si des opé-rations de renouvellement urbain* ne sont pas rares (par reprises de friches industrielles ou remplacement de groupes d’habitation devenus obsolètes par exemple), celles-ci ne peuvent concerner que des fractions limi-tées des espaces déjà urbanisés et s’effectuent souvent à un coût plus élevé que l’extension sur des terrains vierges. Par ailleurs, la demande en logements indépendants dans

des environnements peu denses reste forte et ne peut pas être totalement contrainte.

Le lien entre étalement urbain et iné-galités socio-spatiales apparaît tout aussi manifeste.

• Les sociologues de l’« école de Chicago » au cours des décennies 1920-1930 avaient souligné combien la « mise à distance » était un ressort des conduites sociales urbaines. Et celle-ci ne s’est pas démentie depuis, même si les modalités de cette « mise à dis-tance » ont pu se renouveler. S’éloigner des autres (craints, redoutés ou plus simplement considérés comme peu ou non fréquen-tables) contribue à produire de l’étalement. Toutefois, les logiques sociales ne sont pas les seules à l’œuvre.

• Les logiques économiques sont éga-lement très prégnantes, principalement par le fonctionnement de deux marchés : le marché de l’emploi, le marché immobilier. Le marché de l’emploi repose sur bien des carac-téristiques, dont la localisation des emplois. Lorsque les systèmes productifs locaux se déconcentrent, l ’employé est conduit à accompagner cette déconcentration. De leur côté, les marchés du foncier et de l’immobi-lier suivent une règle générale de décrois-sance des prix des centres aux périphéries. Se loger au moindre coût d’accès (en locatif ou en accession à la propriété) tend donc à renforcer les territoires urbains périphériques, et favo-rise la recherche de territoires toujours plus éloignés, l ’équilibre se construisant, pour chaque ménage, sur le rapport entre coût fon-cier ou immobilier/coût et temps de mobilité.

I.3. Mesurer l’étalement urbain : un exercice difficilePréciser la nature de l’étalement et quan-

tifier le processus pose la question des indica-teurs utilisés. En s’appuyant sur des travaux récents, il est possible de dégager deux prin-cipales constructions de l’étalement urbain.

Étalement urbain = artificialisation des sols : il s’agit de mesurer toutes les pertes de surfaces naturelles ou agricoles associées à l’urbanisation, par les constructions elles-mêmes, l’emprise des infrastructures, les sols

* Inégalités socio-spatiales

La manière dont les inégalités

sociales (variations de revenus,

d’origine, d’âge, de sexe, etc.)

se répartissent dans l’espace.

La tendance globale en économie

libérale est à l’accentuation de

la ségrégation socio-spatiale.

* Renouvellement urbain

Processus de reconstruction d’une

ville sur elle-même en utilisant par

exemple des friches industrielles

ou portuaires ou en rénovant des

quartiers d’habitation dégradés.

C’est une des solutions possibles

pour réduire l’étalement urbain.

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable en pays développés 5.

Enseigner le développement durable. Géographie 2de – Sociétés et développement durable © CRDP de l’académie d’Amiens, 2010-2011

artificiels non bâtis (jardins, espaces verts notamment). Selon une étude de l ’IFEN (Institut français de l ’envi ron nement), en 2004, les territoires artificialisés repré-sentaient 8,3 % du territoire national et, entre 1994 et 2004, la consommation de terres agricoles et naturelles a progressé de 15 % (surface totale correspondant à la superficie moyenne d’un département) alors que la population augmentait, elle, de 5 %.

Cette approche définit l’étalement prin-cipalement par les externalités négatives (consommations d’espace) qu’il provoque aux dépens d’autres sphères (agriculture, nature). Elle permet de mesurer la totalité des nou-velles étendues mobilisées par la poursuite du processus d’urbanisation.

Î Pour en savoir plushttp://www.stats.environnement.developpement-

durable.gouv.fr/uploads/media/Sol1.pdf

Commissariat général au développement

durable, Références L’environnement en France,

juin 2010, p. 41-46.

http://www.stats.environnement.developpement-

durable.gouv.fr/uploads/media/ree2010_

Environnement_en_France.pdf

Étalement urbain = modalités de l’urba ni-sa tion : cette approche s’appuie sur la mesure des distances aux villes-centres des construc-tions neuves résidentielles et sur l’évolution des densités de logements. Selon l ’étude conduite par le Commissariat du déve lop-pement durable sur la base des 71 plus grandes aires urbaines de métropole au cours de la période 1980-2008, le modèle général associe étalement et densification. Surtout, cette étude montre que ce modèle général connaît des variations temporelles et spa-tiales significatives. Ainsi, la moitié des aires urbaines* a connu une phase de diminution de l’étalement entre 1980 et 1990 puis une augmentation, alors que d’autres (au nombre de 14) révèlent, durant trois décennies, une stagnation de celui-ci, ou que d’autres encore (4) montraient une hausse continue.

Cette mesure cerne bien les tendances générales ainsi que les modalités de l’étale-

ment urbain propres à chaque agglomération. Toutefois, elle ne révèle que la partie résiden-tielle du processus, à l’exclusion de tout ce qui concerne les développements des infrastruc-tures qui contribuent très lar gement à l’éta-lement, et ne dit rien des surfaces consom-mées par celui-ci.

Î Pour en savoir plusCommissariat général au développement

durable, Références, L’environnement en France,

juin 2010, p. 97-100.

http://www.stats.environnement.developpement-

durable.gouv.fr/uploads/media/ree2010_

Environnement_en_France.pdf

I.4. Étalement urbain et inégalités localesDerrière le processus d’étalement, en

particulier dans le volet résidentiel de celui-ci, se manifestent des distributions sociales remarquables.

• L’une des plus remarquables est celle du différentiel entre grandes classes d’âges. Les jeunes ménages, surtout ceux s’engageant dans une démarche d’accession à la propriété, tendent à être les moteurs de l’étalement car c’est en périphérie des aires urbaines qu’ils peuvent optimiser leur souhait. Ce qui va avoir pour effet de solliciter les communes d’accueil en matière de services destinés à ces ménages (écoles maternelles, élémen-taires, etc.). L’étude conduite par Danielle Rapetti en Loire-Atlantique illustre très bien ce processus.

Î Pour en savoir plusDanielle Rapetti, « Exode urbain des jeunes

couples en Loire-Atlantique », in Mappemonde,

2007-4, n° 88.

http://mappemonde.mgm.fr/num16/articles/

art07405.html

• Une autre distinction repose sur l ’inégalité spatiale de l ’offre de logements sociaux, logements destinés aux ménages les plus modestes. Historiquement, ces der-niers ont principalement été construits dans les villes-centres, ou en périphérie immé-

* Aire urbaine

Espace occupé par une

ou plusieurs agglomérations

contiguës et leurs périphéries.

La définition des limites d’une aire

urbaine varie sensiblement d’un

pays à l’autre. En France une aire

urbaine est définie précisément

comme l’ensemble constitué

par un pôle urbain (au moins

5 000 emplois) et sa couronne

périurbaine (au moins 40 %

de la population active résidente

y travaillant).

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable6.

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diate de celles-ci surtout durant la période de construction des grands ensembles des décennies 1960-1980. Même si, depuis, le logement social s’est relativement dispersé, ceci explique la persistance d’un réel déficit de tels logements dans les communes périur-baines qui ont connu un développement récent. Ce déficit peut résider évidemment dans le refus opposé par certaines munici-palités d’accueillir les projets de bailleurs sociaux. Ce qui explique que, en France, la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU), adoptée en 2000, ait mis en application, au nom de l ’idée de solidarité et de cohésion urbaines, des pénalités pour les communes ne mettant pas en œuvre les politiques destinées à développer le logement social.

• Les conditions d ’accès au logement ainsi que les demandes exprimées par les ménages se combinent pour dessiner des géographies sociales locales. Construites par exemple sur des données concernant les revenus, ces géographies sociales mettent en perspective deux principales lectures. La première est celle permettant de distin-guer les quartiers aisés et riches des quar-tiers pauvres. Si les communes périurbaines comptent généralement des ménages plus aisés que les villes-centres, les situations sont cependant loin d’être homogènes. La seconde lecture permet de distinguer les territoires sociaux homogènes de ceux qui révèlent une certaine mixité sociale. L’exemple de l’agglo-mération de Tours analysée par R. Brunet pour l ’Observatoire des inégalités montre bien comment ces deux lectures sont complé-men taires. Les périphéries (aisées ou non) apparaissent ainsi socialement plus homo-gènes que la ville centre où, quel que soit le quartier, les revenus des résidants appa-raissent contrastés et témoignent donc d’une réelle mixité sociale.

Î Pour en savoir plusRoger Brunet, « Inégalités locales de revenus :

l’exemple de l’agglomération de Tours »,

Observatoire des inégalités, novembre 2008.

http://www.inegalites.fr/spip.php?article951

Conclusion

Malgré la difficulté à définir et à mesurer l’étalement urbain, il existe bien un lien entre la dilatation de l’espace des agglomérations et la réorganisation spatiale des sociétés urbaines. Aussi ne faut-il donc pas s’étonner de l’importance prise par la problématique de la solidarité et de la cohérence territoriales dans la perspective de construire des villes plus durables.

II. Transports et mobilités

II.1. Problématique généraleL’urbanisation contemporaine s’est très

largement assise sur l ’intensification des flux de marchandises et de ressources, entre régions rurales et villes ou entre villes, et l’accrois sement des mobilités, et notamment par la part individuelle de celles-ci, sous la forme d’une forte dépendance automobile associée à un niveau élevé d’équi pement des ménages et à la progression de la multimotorisation.

Cette situation a un double effet. • D’un côté, elle provoque une forte

consommation d’énergie principalement d’origine fossile, accompagnée d’émissions importantes de gaz à effet de serre (GES) contribuant ainsi au processus global de changement climatique, sans oublier d’autres polluants aux effets plus localisés.

• D’un autre, elle conduit à une sur-consommation d’espace en raison des infras-tructures de circulation qu’il faut développer pour répondre aux besoins ou les anticiper.

II.1.1. Définir la dépendance automobileLa dépendance se construit sur l’usage

de l’automobile (partagée ou non) alors qu’il existe un autre mode de transport possible, notamment des transports urbains (TU). Pour que ce choix puisse être réellement exercé, le résidant doit obligatoirement être situé dans un périmètre de TU et à une dis-tance raisonnable accessible par la marche des points d’accès au réseau. Cette situation est loin de concerner tous les citadins, ou

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable en pays développés 7.

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périurbains et évidemment les ruraux. En France, entre 30 et 40 % de la population sont considérés comme les seuls vrais captifs de l’automobile.

En fait si l’usage de l’automobile s’est aussi répandu, même pour ceux qui objectivement ont le choix d’un autre mode disponible, c’est en raison de l’extension du « système automo-bile » au sein des agglomérations.

II.1.2. Définir le « système automobile »Cette expression, popularisée par G.

Dupuy (La dépendance automobile. Symptômes, analyses, diagnostic, traitements, Anthropos, 1999, 160 p.), montre que l ’automobile a généré un système de production, de ser-vices, d’infrastructures et d’équipements divers (centres commerciaux, motels, etc.) qui ne cesse de conforter son rôle et son usage. Au point que certains usages de la ville ne peuvent se faire sans automobile. Ce « système automobile » a débuté avec la pro-duction de masse des automobiles, d’abord en Amérique du Nord ensuite en Europe occi-dentale, et s’est à la fois intensifié et diversi-fié au cours des décennies qui ont succédé à la Seconde Guerre mondiale. Le fondement du système se trouve évidemment dans le rapport entre croissance du taux de moto-risation et investissements publics dans les infrastructures routières et autoroutières. C’est autour de ce fondement qu’ont été gref-fées des zones résidentielles ou d’activités diverses en grande partie accessibles seu-lement grâce à l’automobile.

II.2. Sortir de la dépendance automobileCet te sor t ie suppose deu x t y pes

d’interventions : • proposer des modes alternatifs (dif-

férentes formes de transports collectifs, « modes doux » : marche, vélo) ;

• modifier les règles (politiques, éco-nomiques, urbanistiques) qui organisent le « système automobile » pour rendre celui-ci moins prégnant sur l’organisation de la vie quotidienne des citadins et périurbains.

II.2.1. Développer les modes alternatifs à l’automobileL’accent a d’abord été mis sur le renfor-

cement des transports collectifs, le passage à des « modes doux » restant, dans un pre-mier temps, anecdotique et limité à des zones urbaines très restreintes (par exemple pié-tonnisation de rues commerçantes de centre-ville). En France par exemple, c’est à partir du début de la décennie 1980 que s’enclenche cette démarche, en particulier par la promo-tion des TCSP (transports en commun en site propre) ; et notamment le renouvellement de l’intérêt pour le tramway (secondairement le métro et les bus à haut niveau de service) qui va devenir durant les trois dernières décen-nies un élément structurant dans toutes les agglomérations intermédiaires ou grandes.

Î Pour en savoir plusLes villes tramway en France

http://fr.wikipedia.org/wiki/

Liste_des_tramways_de_France

Thierry Gouin et al., « Planification urbaine et

tramway en France », CERTU, 2009, Mobilités et

transports. Le point sur, fiche n° 9.

http://urbamet.documentation.developpement-

durable.gouv.fr/documents/Urbamet/0291/

Urbamet-0291984/TU%20CE02%2010256-9.

pdf

Dans certaines agglomérations, ce sont de véritables nouveaux réseaux qui ont ainsi été mis en place, réseaux dont le développement n’est pas achevé.

�� Document 2. Sortir de la dépendance auto-

mobile, L’exemple de l’agglomération de Grenoble

L’agglomération de Grenoble est citée non pour en faire un exemple mais seulement pour montrer les différentes ressources qu’il est possible généralement de trouver dans nombre d’agglomérations françaises pour traiter et argumenter les grandes lignes de cette question.

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable8.

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Conclusion

La question des transports et des mobi-lités est incontestablement au cœur des réflexions et des actions pour rendre les villes plus durables. Cette question croise à la fois des problématiques sociales (acces-sibilité), économiques (coûts directs et indi-rects, immédiats et à moyen et long termes du « système automobile »), environnementales (externalités négatives de ce système). Il n’est donc pas surprenant de voir la place occu-pée par cette question dans les politiques en cours. En même temps, passer d’un système à un autre est long et coûteux en investis-sements publics. En dehors de la question des arbitrages et du portage politique, il demeure que ce passage d’un système à un autre prendra des tournures différentes selon les agglomérations, et concernera sans aucun doute surtout les parties les plus denses et continues des agglomérations et non la tota-lité de ces dernières.

III. Aménager des « villes durables »

Les processus d ’urbanisation du xxe siècle et les formes d’agglomération qu’ils ont déterminées sont loin d’être homogènes. En particulier, doivent être distingués ceux ayant eu cours en Europe occidentale et ceux qui ont prévalu en Amérique du Nord. Ceux qui ont fonctionné au Japon ou en Australie pourraient être individualisés eux aussi mais ne feront pas ici l’objet de développements.

La question de l’aménagement des agglo-mérations dans des perspectives durables ne se formule pas exactement dans les mêmes termes selon évidemment l ’histoire et les modalités de l’urbanisation. Mais cela ne suf-fit pas. Les postures culturelles, la manière dont les sociétés se construisent et se voient, les grandes déterminations idéologiques et politiques, notamment les plus clivantes (dirigisme vs pragmatisme, centralisation vs décentralisation, formes d’organisation et de fonctionnement de la démocratie entre démocratie strictement représentative et celle associant des formes de participation),

enfin les lignes de force des systèmes pro-ductifs nationaux ne sont évidemment pas étrangères non plus à la manière de penser les perspectives du passage à une ville plus durable.

Pour aller à l’essentiel, deux « modèles » de perspectives se dessinent depuis deux décennies.

• Le premier se rencontre en Amérique du Nord (Canada et États-Unis) et met l’accent sur la question de l’excès d’étalement urbain (urban sprawl) et comment y remédier.

• Le second s’est plutôt répandu progres-sivement à travers l ’Europe occidentale et tend à promouvoir des formes innovantes d’urbanisation en faisant de l ’écoquartier une sorte de standard de l’ébauche de ville durable.

III.1. La problématique de l’aménagement de la ville durable en Amérique du Nord : l’exemple des États-UnisDans un pays où le processus d’urbanisa-

tion contemporain a donné naissance à une ville étalée et éclatée, où le système auto-mobile a été modelé le plus précocement et développé avec le plus d’excès (en matière de dépendance automobile, seules les grandes agglomérations australiennes arrivent à éga-ler les villes états-uniennes), la probléma-tique de la ville durable est apparue au cours des deux dernières décennies du xxe siècle à la suite de critiques de plus en plus vigou-reuses à l’égard du modèle d’urbanisation qui a souvent déstructuré la ville pour imposer la suburb et provoqué d’importantes externali-tés négatives notamment en matière sociale et environnementale.

Définition de la suburb. Le terme peut être traduit par le mot banlieue. Mais ce mot ne suffit pas à définir les formes et les conte-nus de la suburb, ainsi que le poids qu’elle représente désormais dans le dispositif géo-graphique de peuplement puisque celle-ci représente plus de la moitié de la population nationale. Aussi l’emploi du mot banlieue, en France, renvoie-t-il à des réalités morpholo-

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable en pays développés 9.

Enseigner le développement durable. Géographie 2de – Sociétés et développement durable © CRDP de l’académie d’Amiens, 2010-2011

giques, démographiques, sociologiques, etc. trop différentes pour qu’il soit employé.

C’est ainsi que progressivement s’est construit un référentiel dont l’objectif est à la fois de lister les dysfonctionnements et de mettre en perspective les solutions capables de remédier à ces derniers. Ce référentiel est construit sur trois termes ou expressions : smart growth, sustainability, livability qui constituent les points d’ancrage de toutes les politiques de développement urbain durable.

• Smart growth désigne l ’ensemble des démarches et outils mis en action pour contrôler la croissance spatiale, qui doit devenir plus « smart ≈ intelligente », moins consommatrice de ressources, plus économe en mobilités, etc.

• Sustainability renvoie à l’ensemble des préconisations et dispositifs organisés per-mettant d’économiser des ressources (en espaces naturels, en biodiversité, en eau), d’améliorer l ’état de celles-ci quand elles sont dégradées et à remédier aux externalités négatives de la production et de la consom-mation, en particulier des déchets.

• Livability est un mot définissant des principes de qualité (et d’amélioration de celle-ci) attachés à la vie quotidienne des résidants. Cela concerne autant l’accessibi-lité que la mise à disposition d’équipements collectifs de qualité (écoles, terrains de sport et de récréation, etc.), l’amélioration du cadre de vie ou encore la sécurité.

Ces politiques de développement urbain durable se sont plus ou moins rapidement déployées parmi les États fédérés au cours des deux dernières décennies et ont été relayées par les collectivités locales selon des rythmes plus ou moins vigoureux. Les agglomérations pionnières se sont engagées dès le début de la décennie 1990, voire antérieurement. Et certaines sont même devenues des « icônes » (à l ’image de Portland, Oregon) du déve-lop pement urbain durable à l ’échelle du continent , et même au-delà.

�� Document 3. L’exemple de Portland aux

États-Unis

III.2. La problématique de l’aménagement de la ville durable en Europe occidentaleLes conditions de l’urbanisation contem-

poraine en Europe occidentale n’ont pas été parfaitement identiques à celles qui ont pré-valu aux États-Unis. L’expansion périurbaine y a été généralement plus tardive, nombre de développements périphériques (comme en France par exemple) ont pris la forme de grands ensembles de collectifs, les trans-ports collectifs ont continué de structurer une part non négligeable des nouveaux déve-loppements. Les villes, après avoir connu un développement démographique spectacu-laire durant les décennies d’après Seconde Guerre mondiale, ont le plus souvent atteint un stade de croissance faible à modérée et les besoins en logements procèdent plus de la multiplication des ménages que de la dyna-mique démographique, sauf là où un solde migratoire positif reste d’un niveau élevé. Par ailleurs, entre les décennies 1950 et 1970, l’Europe a connu un large mouvement ten-dant à mettre en place, ici et là, des « villes nouvelles » ce qui a empêché que se tarisse l’innovation urbanistique.

Si la préoccupation de la consomma-tion d’espaces agricoles et naturels n’est pas absente, comme l’a montré la partie consa-crée à l’étalement urbain, elle n’est cependant pas aussi exacerbée que dans le cas états-unien. Ceci s’explique, du moins pour cer-tains pays par :

• l ’importance prise par les politiques publiques d’organisation et de gestion des territoires, de la réorganisation municipale allemande aux politiques de planification stricte (Pays-Bas) ou moins stricte (France) de l’usage des sols ;

• des préoccupations environnemen-tales plus globales (changement climatique, réduction des émissions de GES, biodiversité) ayant servi de trame à la définition de poli-tiques au sein de l’Union européenne et des États membres ;

• la mobilisation des villes au sein de la Campagne des Villes Durables Européennes a permis de réussir dès le milieu de la décennie

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable10.

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1990 la formation d’un réseau d’échanges d’expériences, d’élaboration de référentiels ;

• des programmes européens et les soutiens f inanciers bien réels qui les accompagnaient.

C’est d’ailleurs en grande partie grâce à ces réseaux de villes et ces financements que la notion d’écoquartier a émergé, le mot caractérisant des projets urbains localisés cherchant à croiser les différentes dimen-sions du développement urbain durable. C’est également dans ce contexte qu’est née aussi l’idée d’un urbanisme durable pouvant être appliqué à l ’ensemble des projets urbains qu’ils soient destinés à produire de nouveaux morceaux d’agglomération ou à opérer dans le registre du renouvellement urbain pour les parties existantes des villes.

Î Pour en savoir plusPerspectives européenne et française.

Base documentaire très riche établie par le

Commissariat général au développement durable

(MEEDDM), avril 2010.

http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/

pdf/Ville_durable05_2010-2.pdf

Sans faire à lui seul la ville durable, l’éco-quartier est devenu en Europe une pièce maîtresse des engagements de villes dans la perspective de les rendre plus durables.

Malgré la diversité des écoquartiers existants, il existe néanmoins une défini-tion standard permettant de mettre en avant quelques caractéristiques clés. Morceau de ville conçu avec le souci de minimiser les externalités environnementales négatives provoquées par les bâtiments, les résidants et les activités et pour optimiser les différents paramètres de la qualité de vie des habitants, l’écoquartier impose :

• le choix d ’un site pertinent pour construire une véritable accroche urbaine (insertion ou prolongement dans l’existant) ;

• la proximité d’une offre de transports collectifs et des solutions alternatives à l’usage de la voiture, voire sa disparition ;

• une réel le mi x ité des fonct ions (activité, résidence, loisir, etc.) et des

milieux sociaux (mixité sociale et mixité intergénérationnelle) ;

• des espaces publics structurants, facili-tant les rencontres, les échanges, l’urbanité ;

• la participation des habitants aux choix stratégiques et à l’animation collective ;

• l’usage économe du sol et l’offre d’une véritable diversité de milieux construits ou naturels ;

• des choix de localisation et de construc-tion des bâtiments permettant une véritable sobriété énergétique ;

• la prise en compte du fonctionnement du cycle de l’eau urbaine ;

• le maintien, voire le renforcement, de la biodiversité ;

• la gestion en amont de toutes les pro-blématiques déchets.

Î Pour en savoir plusRevue Diagonal, novembre 2008, n° 178.

http://www.ecoquartiers.developpement-durable.

gouv.fr/IMG/pdf/diagonal_178_complet_

cle78c78c-1.pdf

Les écoquartiers en Europe :

http://www.energy-cities.eu/IMG/pdf/

ademe_eco_quartiers_fr.pdf

Un exemple d’écoquartier à Amsterdam :

http://www.gwl-terrein.nl/?francais

�� Document 4. La perspective d’une écocité,

l’exemple de Fribourg (Allemagne)

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable en pays développés 11.

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Conclusion générale

« Penser et produire la ville durable » s’ inscrit dans un processus de

longue durée : les premières fondations remontent aux décennies 1970-1980 et le chemin prospectif est déjà tracé jusqu’aux décennies 2020-2050. Ce que nous observons aujourd’hui est seulement une photographie, qu’il faut contextualiser dans le temps et dans l’espace. En effet, toutes les villes (en Europe comme en Amérique du Nord) n’ont pas la même histoire et elles ne se trouvent pas confrontées aux grandes problématiques surplombantes (énergie-climat, déve lop-pement économique et social, etc.) selon des intensités identiques.

La perspective de la ville durable qui se dessine doit beaucoup aux processus de régulation et d’initiative mis en place par les États, parfois de manière coordonnée comme en Europe. Toutefois, au-delà des dispositifs législatifs et réglementaires de plus en plus

prégnants, cette perspective doit également beaucoup aux conditions localisées d’appro-priation et d’initiative des villes et agglomé-rations pour construire des politiques, à la manière aussi dont elles mettent en place des réseaux d’échanges, au potentiel de mobili-sation sociale qui se manifeste.

Ces politiques (qui doivent être prospec-tives) articulent généralement deux types de stratégies : celles de rupture (qui reposent surtout sur des contraintes imposées avec plus ou moins de fermeté et de rapidité), celles d’adaptation (qui de manière pragma-tique encouragent). Par ailleurs ces politiques ne sont plus sectorielles mais globales, trans-versales, coordonnées.

En guise de conclusion ultime, il est nécessaire de se méfier de toute simplification abusive, comme par exemple celle qui souvent se fait jour dans la confusion écoquartier = ville durable, ou des stratégies de communi-cation, de marketing urbain qui trop souvent donnent à voir des épiphénomènes.

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Thème 3. Améneger la ville. Villes et développement durable en pays développés

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▼ Document 1.

Aperçu des grandes conférences de cadrage, des structures de mobilisation et de coordination

CNUED (1) CNUEH (2) + FUM (3) Réseaux et associations de villes

1972 : Stockholm1er Sommet de la Terre. Création du PNUE (4)

1976 : Vancouver (Habitat I)

1982 : Nairobi2e Sommet de la Terre

1990 : Lancement du programme « Cités durables »

Soutien des Nations unies à la création de l’ICLEI (5)

1992 : Rio de Janeiro3e Sommet de la Terre

1992 : Rio et Engagement de CuritibaLancement des programmes ICLEI : Agenda 21 locaux, Réseau des villes pour la protection du climat1993 : New York : 1er Sommet mondial des maires sur le changement clima-tique (ICLEI)1994 : Aalborg : Charte d’Aalborg,Lancement de la CVDE (6),Newcastle : création du réseau Énergie-Cités

1996 : Istanbul (Habitat II : Sommet des villes)

1996 : Lisbonne CVDE : de la charte à l’action

1997 : New YorkSommet de la Terre + 5

2000 Hanovre CVDE

2001 : New York (Istanbul + 5)

2002 : JohannesburgSommet mondial sur le développement durable

2002 : NairobiComprendre les challenges du déve-loppement urbain durable2004 : BarceloneVilles, carrefours des cultures : inclu-sion et intégration

2004 : Aalborg CVDE

2006 : VancouverNotre futur : des villes durables – tra-duire des idées en actes

2007 : Séville CVDE

2008 : NanjingUrbanisation harmonieuse : le défi d’un développement territorial équilibré2010 : Rio de JaneiroLe droit à la ville : réarticuler la ville divisée

2010 : Dunkerque CVDE

(1). CNUED : Conférences des Nations unies pour l’environnement et le développement.

(2). CNUEH : Conférences des Nations unies sur les établissements humains (UN-HABITAT).

(3). FUM : Forum urbain mondial.

(4). PNUE Programme des Nations unies pour l’environnement.

(5). ICLEI : International Council for Local and Environmental Initiatives (Conseil international pour les initiatives locales et environnementales).

(6). CVDE : Campagne des villes durables européennes (initiative Commission européenne).

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Thème 3. Améneger la ville. Villes et développement durable en pays développés

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▼ Document 2.

Sortir de la dépendance de l’automobile. L’exemple de l’agglomération de Grenoble

Cet exemple apparaît particulièrement pertinent, avec un réseau de 270 km structuré sur 4 lignes de tramway, 22 de bus, 2 pôles d’échanges multimodaux, 74 millions de voyageurs transportés (contre 17 en 1973) et l’une des meilleures moyennes françaises en matière d’usage des transports urbains par les habitants. Ceci est notamment dû au fait que désormais 44 % de la population et la moitié des emplois se trouvent à moins de 400 m d’un arrêt de tramway.

ÎPour en savoir plus à propos de l’histoire et du fonctionnement du réseau de TU de Grenoble :•L’histoire du réseau de Grenoble : http://www.semitag.com/index.php?id=144•Le syndicat mixte et la gestion du réseau : http://www.smtc-grenoble.org/?q=node/67Parallèlement, mais surtout durant les deux dernières décennies, sont mis en œuvre de nouveaux plans de développement des

« modes doux » et en particulier du vélo. Alors que les cycles avaient quasiment disparu des agglomérations, une nouvelle place leur est accordée au travers d’aménagements spécifiques (bandes et pistes cyclables). Ainsi, Grenoble s’est-elle engagée dès la décennie 1970 dans une politique cherchant à maintenir l’usage du vélo en ville puis, à partir de la dernière décennie du xxe siècle, à favoriser son véritable retour afin de réduire l’usage de l’automobile.

ÎPour en savoir plus à propos de la politique cyclable et les aménagements à Grenoble :http://www.energy-cities.eu/db/grenoble_123_fr.pdfhttp://www.lametro.fr/449-la-politique-cyclable.htmhttp://www.lametro.fr/440-piste-cyclable-grenoble.htm

Ceci s’accompagne généralement de mesures favorisant la pratique de la marche comme mode de mobilité dans la ville.

Sortir par étapes du système automobile

Dans ce domaine, les interventions concernent des registres variés.•Le premier tend à brimer la place de la circulation automobile et à la contraindre par le temps et le coût d’usage. Pour ce faire,

différentes méthodes existent : partage de la voirie existante, limitations diverses, exclusion de certains périmètres, etc.•Le second consiste à favoriser les modes alternatifs et à encourager leur usage, au-delà des clientèles qui ne disposent pas

d’automobiles. Des tarifs attractifs, des dessertes rapides, etc. interviennent dans ce domaine.•Le troisième concerne la réorganisation de la ville non plus autour de l’automobile mais des transports collectifs. La promotion

de nouveaux principes d’aménagement le long des grands axes structurants ces derniers et les nœuds d’échanges concourent à cela. C’est ainsi qu’à Grenoble, à l’instar d’autres villes françaises et étrangères, a été promue la charte « urbanisme et transport » fruit d’une coordination entre l’agence d’urbanisme et le syndicat gérant le développement du réseau. Cette nouvelle démarche en matière d’aménagement devrait servir de guide pour accompagner la mise en service de la cinquième ligne de tramway.

ÎPour en savoir plus à propos des objectifs de cette chartehttp://www.smtc-grenoble.org/files/4p_charte.pdfhttp://www.smtc-grenoble.org/files/genese_charte_urbanisme.pdf

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▼ Document 3.

Portland (Orégon) : maîtriser la croissance spatiale, rendre la ville plus vivable, respecter l’environnement

Caractéristiques

PopulationVille = 582 000 habitants, agglomération (comprend trois comtés de l’État d’Oregon et un de l’État voisin de Washington) = 2,2 mil-

lions habitants, Metro Portland (territoire du gouvernement métropolitain limité aux comtés de l’État d’Oregon) = 1,5 million habitants.

Principales activitésIntel, principal employeur industriel ; plus de 1 200 entreprises de hautes technologies ; siège de Nike ; centre universitaire ; 3e pôle

portuaire et logistique de la façade pacifique états-unienne

Politique de développement urbain durable1975. Lois de l’État d’Oregon instituant un contrôle de la croissance spatiale des villes.1980. Adoption par la ville de Portland du premier schéma directeur de développement urbain.1988-1995. Poursuite du travail de planification territoriale à l’échelle du centre, des quartiers.1992-1995. Élaboration et adoption par le gouvernement métropolitain Metro Portland du plan 2040.Tous ces outils ont pour objectif de maîtriser la consommation d’espace destiné à l’urbanisation, notamment en établissant une

« frontière de croissance urbaine » et d’organiser l’aménagement de la ville en répondant à deux principaux objectifs : mixer les fonc-tions dans les différents secteurs de celle-ci, développer des systèmes de mobilité (métro léger, tramways, vélos, marche) permettant de s’émanciper par étapes du système automobile et permettre de produire un meilleur bien être environnemental, social et sanitaire.

Cette politique, insufflée par l’État d’Oregon, ne constitue pas seulement un affichage. Des investissements publics importants, le recours à une planification territoriale stricte, une adhésion certaine d’une majorité de la population à cette politique ont permis de réelles avancées. Toutefois, le taux de pauvreté demeure élevé, le coût d’accès au logement apparaît moins bon que dans des agglo-mérations équivalentes, la congestion automobile progresse de manière vigoureuse. Réussir la transition vers une ville plus durable demande du temps, ce qui explique que les horizons les plus prometteurs apparaissent à partir de 2030-2050.

ÎPour en savoir plusLe Bureau of Planning and Sustainability de la ville de Portland permet d’accéder (en anglais) à des documents d’une très grande

variété, y compris des cartes montrant les différentes orientations de la planification territoriale pour produire une ville plus durable :http://www.portlandonline.com/bps/index.cfm?c=28534La division Planning and Conservation du gouvernement métropolitain Metro Portland dédie (en anglais) de nombreuses pages

à différents dossiers de ses politiques de développement urbain durable (développements intégrant la nature, revitalisation urbaine, développements centrés sur les transports urbains, recyclage des friches, etc.) :

http://www.oregonmetro.gov/index.cfm/go/by.web/id=25025

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Thème 3. Améneger la ville. Villes et développement durable en pays développés

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▼ Document 4

Fribourg-en-Brisgau (Allemagne, Bade-Wurtemberg) : la perspective d’une écocité

Caractéristiques

PopulationAgglomération de taille intermédiaire : 219 000 habitants.

Principales activitésÉconomie fortement tertiarisée : services, enseignement supérieur, nouvelles technologies « vertes » (450 entreprises – dont Solar

Fabrik – 10 000 emplois).

Politique de développement urbain durableAnnées 1970. Forte mobilisation antinucléaire, développement d’un mouvement pour la valorisation des énergies renouvelables

(solaire notamment).Décennie 1980. Engagement dans une politique énergétique innovante (économie, énergies renouvelables), politique des transports

collectifs et alternatifs, création d’une carte de circulation intermodale pour l’ensemble de la région de FribourgAnnées 1990. Amplification de la politique de transports collectifs (tramways et bus) avec pour résultat aujourd’hui 60 % de la

population et 69 % des emplois desservis par les tramways, en 1996 engagement dans un plan climat avec pour objectif une réduction des émissions de GES de 40 % à l’horizon 2030, en 1996 lancement du premier écoquartier (Vauban), de 1996 à 1998 lancement du second écoquartier (Rieselfeld)

Décennie 2000. Fin des opérations Vauban et Rieselfeld, élargissement de la politique de réhabilitation thermique des logements anciens, poursuite de la politique énergétique.

Au final, après plus de trente ans d’engagements et de politiques, Fribourg peut apparaître comme une des villes européennes témoignant le mieux de la réalité d’une perspective de ville durable. L’étalement urbain a été bien maîtrisé et le périurbain dense est bien connecté à la ville centre. Le système de transports (collectifs et cycles) est extrêmement performant et réduit la pression du système automobile sur l’organisation et le fonctionnement de la ville. Une véritable politique énergétique (et climatique) a été déployée (même si ne doit pas être surestimée la part des énergies renouvelables dans la consommation locale) et ses effets se font sentir dans le domaine économique. Les deux vastes écoquartiers regroupant plus de 16 000 habitants témoignent de processus d’innovation urbanistique et sociale qui ont fait école ailleurs en Allemagne ou d’autres pays européens.

ÎPour en savoir plusÀ propos des écoquartiers de Fribourg :http://www.freiburg.de/servlet/PB/show/1180733/rieselfeld_fr.pdf (en français).http://www.freiburg.de/servlet/PB/show/1183188_l1/rieselfeld_Folder_franzoesisch.pdf (en français).http://www.energy-cities.eu/IMG/pdf/Ecoquartiers_Vauban.pdf (en français).http://www.forum-vauban.de/index.shtml (en allemand et anglais).Concernant les politiques d’aménagement de la ville de Fribourg :http://www.freiburg.de/servlet/PB/menu/1143621_l1/index.html (en allemand).

RetourMiseau point

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Les faits sont bien connus : les pays des Suds ont réalisé en un demi-siècle une

transition urbaine* au rythme sans précédent dans l’histoire de l’humanité ; la majorité de la croissance urbaine actuelle a lieu dans les pays en développement. Selon les projections, la population urbaine de l’Afrique et de l’Asie aura doublé de 2000 à 2030. Elle continuera également d’augmenter, mais plus lentement, dans la région Amérique latine et Caraïbes (FNUAP 2007).

Le décalage est patent entre la réalité de ces villes du Sud et les objectifs économiques, environnementaux et sociaux du déve lop-pement durable. Une approche géographique du développement durable urbain doit donc rendre compte des conditions de vie des cita-dins en fonction de plusieurs problèmes :

– rapidité de la croissance démographique et de l’étalement, gigantisme, impacts de ces villes aux équipements sous-dimensionnés sur l’environnement physique, impacts envi-ronnementaux (pollutions, énergie, déchets), vulnérabilité aux risques ;

– questions liées à l’hétérogénéité sociale interne de ces villes et à l’ampleur croissante de la pauvreté urbaine, aggravée par l’iné-quité spatiale des aménagements, au manque d’engagement public et de régulations dans l’accès au logement et aux services de base ;

– questions du potentiel économique, budgétaire, gestionnaire, politique : quels moyens les pouvoirs urbains et les institu-tions internationales qui les soutiennent peuvent-ils (veulent-ils) mettre au service du développement ?

Les divergences croissantes dans l’évo-lution de ces ensembles régionaux sur le plan économique, ainsi que la forte hété-rogénéité des situations urbaines des Suds ne les empêchent pas de conserver de forts points communs sur le plan du « mal déve-lop pement » urbain : impacts environne-

par Élisabeth Dorier professeure, université de Provence.

* Transition urbaine

Passage d’un monde où

la population est majoritairement

rurale à un monde où elle est

majoritairement urbaine.

Mise au point scientifique

Villes et développement durable dans les pays des Suds

mentaux, insuffisances des aménagements, inégalités socio-économiques internes, et surtout inéquité sociospatiale dans l’accès à l’habitat et aux services urbains.

I. Les villes des Suds : croissance, éta-lement, pressions sur les milieux

I.1. Une transition urbaine accélérée… aux facettes multiples

I.1.1. Banalisation du gigantisme et multiplication des villes de toute tailleLe taux annuel de croissance urbaine des

régions les moins développées a atteint 3 % durant la période 1995-2000, contre 0,5 % par an dans des régions plus développées. Ces taux élevés cachent de fortes disparités selon les catégories de villes.

Le gigantisme urbain, phénomène géo-graphique de la seconde moitié du vingtième siècle, s’est banalisé. Entre 1950 et 2000 s’est produite une inversion historique de la hiérarchie urbaine mondiale par rapport au début du xxe siècle : la plupart des villes mul-timillionnaires se trouvent dans les pays des Suds (15 des 20 agglomérations de 10 mil-lions d’habitants et plus se trouvent dans des PVD, 35 sur 50 des agglomérations de 5 millions d’habitants et plus). Si les plus peu-plées d’entre elles ont une longue histoire et appartiennent à des puissances industrielles anciennes (Mexique, Inde, Brésil), les plus dynamiques en termes de croissance écono-mique et démographique appartiennent aux pays émergents d’Asie du Sud. Tout en bas

accroissement naturel taux d

’urbanisa

tion

A B C D

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable18.

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de la hiérarchie mondiale, avec une urbani-sation plus modeste tant en proportion des habitants qu’en taille des agglomérations, les pays les moins avancés et l’Afrique subsaha-rienne poursuivent une croissance urbaine très rapide (4 % par an en Afrique Noire) en décalage avec leur sous-industrialisation.

La multiplication des très grandes villes ne signifie pas que l’urbanisation des PVD se réduit aux « mégapoles ». « Seulement » 15 % de la population urbaine mondiale vit dans des villes de plus de 10 M hab. Et l’on observe un ralentissement de la crois-sance de ces mégapoles : depuis 15 ans, seules 5 des « mégapoles » des Suds (Dehli, Dakha, Karachi, Lagos, Jakarta) ont encore une croissance démographique très rapide (supérieure à 3 % par an 1). La plupart des agglomérations multimillionnaires des Suds ont une croissance ralentie par rapport au rythme des années 1970-1980 (Mexico : 1 %, Le Caire : 1,4 %), si bien que les prévisions catastrophistes des années 1970 se sont avé-rées erronées.

Ce sont partout les villes de moins de 2 millions d ’habitants qui connaissent actuellement la plus forte croissance démo-graphique. Cette croissance accélérée est liée à des facteurs contradictoires : soit à l’émer-gence économique (Inde, Indonésie), soit à des crises et des guerres qui déstabilisent les populations rurales (Afghanistan, Angola, Mozambique, Congo).

Les villes « juste » millionnaires des Suds en très forte croissance démographique (plus de 3 % par an) sont celles qui connaissent les principaux problèmes de développement durable, car moins bien pourvues en équipe-ments que les mégapoles qui sont souvent des capitales, moins médiatisées, souvent « oubliées » des investissements nationaux et internationaux. Dans tous les continents du Sud, les ruraux migrent vers (ou tran-sitent par) les villes moyennes, et ont déjà une expérience urbaine en arrivant dans la grande ville. Des facteurs politiques comme des processus de décentralisation peuvent aussi jouer pour expliquer le dynamisme des villes petites et moyennes, observé en

Afrique de l’ouest. On peut y voir une source de rééquilibrage des territoires favorable au développement… ou un risque de dispersion des investissements publics.

�� Document 1. Les agglomérations de plus

de 10 000 habitants en 1950 et 2020, en Afrique

de l’Ouest

I.1.2. Le débat sur les liens entre urbanisation et développement : entre « productivité urbaine » et « biais urbain »Le cadre de pensée du développement

durable conduit à revisiter un débat vieux de plusieurs décennies : l’urbanisation accélérée dans les PVD est-elle un ferment de déve-loppement ou un facteur d’aggravation des déséquilibres ?

L’urbanisation accélérée des PVD fut considérée, dans les décennies 1960-1980 comme un processus « explosif », source de déséquilibres et néfaste pour le déve lop-pement, et les mégapoles, dont la croissance n’était pas fondée sur un développement éco-nomique, comme des parasites accaparant les richesses et les forces vives des pays (concept d’overurbanization). En 1985 P. Bairoch sous-crit à ce registre d’analyse à travers une autre expression, celle d’« inflation urbaine 2 ».

La thèse de Lipton (1977-1993) 3, qui est toujours au centre de vifs débats, défend l’idée que l’urbanisation accélérée serait l’un des facteurs de la persistance de la pauvreté dans les Suds. La croissance des grandes villes serait ainsi artificiellement accélérée, dans les PVD, par une mauvaise allocation des ressources nationales au détriment des autres espaces (campagnes, petites villes). L’argumentation est fondée sur la disparité des équipements entre villes et campagnes, ou le maintien de prix agricoles à des niveaux artificiel lement bas pour « nourrir les villes 4 » et qui aboutissent aussi à démoti-ver les producteurs agricoles, et à accentuer l ’exode rural. Le point de vue défendu par Lipton est largement relayé par certaines ONG et par la FAO. Le résultat de ce « biais

1. Il est possible que les statistiques minorent

la croissance des mégapoles chinoises.

2. Paul Bairoch. De Jéricho à Mexico. Villes et économie

dans l’histoire. Gallimard, 1985, 707 p.

3. Michael Lipton. Why poor people stay

poor : urban bias in World development. Harvard

University Press, Cambridge Mass, 1977.

4. Denise Douzand-Rosenfeld, P. Grandjean (dir.). Nourrir les métro-poles d’Amérique latine.

L’Harmattan, 1986, 293 p.

N. Bricas et al. Nourrir les villes en Afrique

subsaharienne. L’Harmattan, (Villes et

entreprises), 1986, 421 p.

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable dans les pays des Suds 19.

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urbain » est, côté rural, un sous-équipement persistant, toujours observé. Côté urbain, la pauvreté majoritaire et le sous-emploi ne cessent de s’aggraver dans des villes de pays sous-industrialisés, dont le peuplement est disproportionné par rapport à leurs bases économiques.

Dans les années 1980-1990, des études contestent ou nuancent ces points de vue. Il est difficile de prouver que le « biais urbain » serait l’explication majeure de la croissance urbaine dans les PVD, notamment dans les pays émergents où le facteur industriel est décisif. Les modalités de croissance urbaine ont évolué. Si les migrations tiennent tou-jours une place dans la croissance des villes, elles ne sont plus prédominantes. Les villes des Suds (même les villes africaines) ont atteint une certaine maturité, et l’essentiel de leur accroissement démographique est naturel. En outre, les migrations rural-urbain ne se traduisent qu’exceptionnellement (dans les zones difficiles) par un « exode rural » qui dévitaliserait les campagnes. On constate que l’effet d’agglomération peut être source de création de nouvelles activités, attirer des implantations industrielles (délocalisations). Des recherches menées dans les PVD depuis les années 1990-2000 ont montré que, sous certaines conditions (transports, filières de prix favorables aux producteurs), les grandes villes ont un impact économique positif sur leurs territoires ruraux, y compris sur le déve-loppement des activités paysannes dans les espaces agricoles, dynamisés par la demande urbaine. Ce secteur est qualifié de « vivrier marchand » (Chaléard et Dubresson, 1999).

Au niveau des institutions économiques internationales, des rapports récents insistent sur la productivité et la créativité urbaine en critiquant le « biais anti-urbain ». Dans son rapport 2008, la Commission sur la croissance et le développement estime que « les économies des agglomérations se sont avérées constituer l’une des forces principales entraînant la croissance et le développement. Ainsi, l’urbanisation est le pivot de la moder-nisation de la société ». La Banque Mondiale défend aussi des positions résolument « pro-

urbaines » (rapport 2009) : les villes sont des foyers de richesses, la productivité indus-trielle surpassant de loin la productivité agri-cole, les migrations du rural vers l’urbain sont excellentes pour la croissance.

Tout le problème est de mettre cette « pro-ductivité urbaine » au service d’une bonne gestion interne de la ville (financements d’infrastructures, de services) en captant une partie du PIB urbain pour les finances publiques et en organisant des formes de redistribution et de solidarités territoriales. C’est pourquoi la Banque mondiale s’inté-resse à l’amélioration des finances locales des villes, par des programmes de fiscalité, en s’appuyant sur le foncier (cadastres urbains) et surtout la taxation des activités (y compris les activités informelles). Cependant l’aggra-vation de la pauvreté urbaine est apparue comme un paramètre crucial susceptible d’obérer le développement durable, et s’est imposée comme une priorité. Plus nuancé que la Banque mondiale, le FNUAP (Fonds des Nations Unies pour la Population) note encore en 2007 une aggravation continue de la pauvreté et des inégalités urbaines qui se traduisent par de fortes injustices spa-tiales et environnementales. « La pauvreté s’accroît plus rapidement en milieu urbain qu’en milieu rural, tout en faisant l’objet de bien moins d’attention. Les statistiques agré-gées masquent les profondes inégalités et reflètent mal la concentration de la pauvreté extrême dans les villes. » (FNVAP 2007, chap. 6) ; il convient de s’y attacher pour « Libérer le potentiel de la croissance urbaine » (sous-titre du rapport FNUAP 2007).

I.2. La croissance spatiale : facteurs et impacts5 % de croissance annuelle, c’est le dou-

blement d ’une population urbaine tous les 15 ans, et une augmentation bien plus rapide encore de la surface à urbaniser (car ces villes sont surtout « horizontales ») avec les problèmes corrélatifs de la croissance des besoins en logements populaires, en kilo-mètres de voirie, de réseaux. Malgré le ralen-tissement de la croissance démographique

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable20.

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des très grandes villes des Suds, l’étalement spatial de leurs périphéries, riches et pauvres, résidentielles ou fonctionnelles ne se dément pas. À Mexico, le « district fédéral » perd des habitants tandis que les municipalités de la zone métropolitaine conservent des taux de croissance très élevés.

�� Document 2. Croissance urbaine à Mexico

Une politique de redensification du centre de l’agglomération de Mexico a été lancée, afin de contrôler cet étalement urbain dans les périphéries du District Fédéral non encore urbanisées et de repeupler les quatre arron-dissements centraux, grâce à des facilités administratives pour construire des loge-ments neufs dans la ville centre. Mais elle induit surtout une spéculation foncière sur le centre, ainsi que des dynamiques de gentrification.

I.2.1. L’étalement spatial lié au problème du logement des pauvresL’une des raisons des processus d’expan-

sion urbaine extensifs, dispersés, très consommateurs d’espace est l’insuffisance de l’offre de logement formel locatif acces-sible aux ménages dont les revenus sont pré-caires, ces derniers étant majoritaires dans la population.

Quelques amalgames sont à éviter, en particulier celui qui conduit à assimiler tous les quartiers périphériques populaires ou informels à des « bidonvilles » (strictement parlant, quartiers d’habitat en matériaux précaires). Parmi les plus grands bidonvilles, plusieurs sont centraux ou péricentraux, comme Dharavi, au cœur de Bombay. Dans ces zones hyperdenses et insalubres, les habi-tants escomptent de meilleures opportunités d’insertion à l’économie urbaine, à l’emploi, aux revenus.

La mobilité vers des périphéries loin-taines et non viabilisées constitue souvent la seule possibilité des pauvres pour se loger à moindre coût dans les zones les moins acces-sibles, les plus ingrates, et parfois sous forme d’occupation illégale de terrains publics (les

fameuses « invasiones » des périphéries urbaines de Lima) et presque toujours sous forme d’habitat individuel « autoconstruit ». Ce faisant, la « durabilité » qu’ils recherchent est la sécurité résidentielle, en évitant les risques d’expulsion dont restent passibles les habitants de bidonvilles péricentraux ou les occupants illégaux de terrains privés.

Les vastes périphéries, qui abritent la moitié de la population urbaine des Suds, à bonne distance des centres villes, sont souvent construites en dur, mais sans plani-fication, ni aménagements préalables, sans tenir compte des documents d’urbanisme, parfois sur des zones pentues à risque géo-morphologique ou technologique. Le sen-timent qui prévaut est celui d’un abandon par les pouvoirs publics, notamment lors de catastrophes comme des glissements de ter-rains, des inondations.

Les habitants y mobilisent cependant diverses stratégies individuelles et collectives pour acquérir des terrains, bâtir en dur, amor-cer des équipements (dispensaires, écoles, cantines, petits réseaux d’adduction d’eau de sources à Quito). Ils savent souvent s’organi-ser socialement pour exercer des pressions sur les autorités politiques afin d’obtenir des « régularisations » a posteriori qui replacent leurs quartiers dans le droit urbain commun, permettent de les équiper progressivement. Les régularisations a posteriori de quartiers informels constituent un processus classique d’intégration urbaine, présentant pour les autorités l ’avantage d’amortir la pression sociale sans dépenses publiques directes. À Mexico, tolérance et régularisations suc-cessives font que 50 à 60 % de la population réside aujourd’hui dans des lotissements populaires construits à l ’origine en marge de la légalité.

I.2.2. L’étalement spatial lié à l’essor de nouveaux quartiers résidentiels aisésUn nouveau facteur d ’étalement des

agglomérations des Suds, qui s’inscrit dans une dynamique de fragmentation urbaine*, est l ’émergence de zones périphériques d’affaires et de prestige, qui animent la compé-

* Fragmentation urbaine

Un phénomène urbain

relativement récent. L’unité d’une

métropole éclate au profit de

l’émergence de « fragments » de

ville, sans cohérence d’ensemble.

Elle s’exprime notamment par une

crise des espaces publics.

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable dans les pays des Suds 21.

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ti tion internationale entre villes, et celle de quartiers résidentiels aisés à la lisière des agglomérations (edge cities). Accessibles par la route, délibérément éloignés des centres et dotés de niveau d’équipement automobile élevé, ils présentent toutes les garanties de prestation de services marchands qui pal-lient aux défaillances des systèmes publics des périphéries urbaines (surpresseurs pour l’eau, générateurs pour l’électricité, sociétés de sécurité et d’entretien des espaces verts). On y trouve des résidences de luxe, souvent fermées et sécurisées surtout lorsqu’elles sont situées à proximité de zones d’habitat populaire (Guerrien M., 2004). Ces quartiers reproduisent dans les mégapoles des PVD les formes urbaines globales les plus éloignées de l ’idéal de « ville durable » du fait d’une surconsommation d’eau et d’énergie (même si l’un des arguments de vente y est souvent la qualité de vie, la pureté de l’air, la verdure, l’écologie…).

�� Document 3. Problèmes d’aménagement

urbain au Caire

I.3. Étalement spatial et pression sur les milieux

1.3.1. Vulnérabilité aux risques naturelsLe mi l ieu physique const itue une

cont ra i nte que l ’on ne de v ra it plu s aujourd’hui éluder, comme en témoignent les exemples du Caire, de Mexico, de Port au Prince etc.. Ces très grandes agglomérations exercent aujourd’hui une forte pression sur leurs sites et bien au-delà, dans le périmètre de vastes régions métropolitaines, en matière de ressources en eau, de consommation de terres agricoles rares (delta du Nil). Elles sont exposées au risque sismique et les récents tremblements de terre affectant ces villes ont souligné la forte vulnérabilité des quar-tiers populaires informels ou de quartiers taudifiés, sans fondamentalement changer la dynamique de construction, largement incontrôlée, et le non-respect des normes lié à la nécessité (pour les habitants), à la spécu-lation (du côté des promoteurs immobiliers

et propriétaires fonciers), à l’incurie et à la corruption (du côté des autorités publiques en charge de l’habitat) (voir le document 3 Problèmes d’aménagement urbain au Caire).

I.3.2. Les villes des PVD, entre pénurie et stress hydriqueL’eau est évidemment l’une des probléma-

tiques prioritaires du développement urbain durable. Les besoins hydriques urbains connaissent une croissance exponentielle du fait de l’essor démographique, de l’évolution de la consommation liée au mode de déve-loppement socio-économique et de l’urbani-sation. La consommation unitaire moyenne des ménages urbains est généralement supé-rieure à celle des milieux ruraux. Le problème de pression sur la ressource, corrélé au milieu bioclimatique, est particulièrement aigu dans les villes des régions sèches qui doivent cher-cher leur eau à plusieurs dizaines voire 100 ou 200 km. Casablanca, Dakar ou Mexico mobilisent leur eau potable dans un rayon de plus de 100 km.

�� Document 4. La course à l’eau à Dakar

Des aménagements concertés sont donc nécessaires pour mieux répartir les usages de l’eau entre campagnes et villes, penser à la réutilisation des eaux usées (déjà partiel-lement fonctionnel à Mexico), à l’utilisation des retours d’eaux de drainage agricole ou à la production industrielle d’eau douce par dessalement (projet envisagé pour Dakar, mais avec un problème de financement du coût énergétique). La gestion « durable » de la ressource en eau pour les villes doit être menée à l ’échelle des bassins hydrogra-phiques, veiller à la sauvegarde des écosys-tèmes, prendre en compte la diversité des usages, leurs conflits potentiels. Pourtant, contrairement à une autre idée reçue, les grandes villes ne sont pas les premières (pas les seules) responsables de la dégradation des ressources en eau, ou du « stress hydrique » que l’on peut observer dans certaines régions des Suds. Environ 70 % de la consommation d’eau dans le monde est imputable à l’agricul-

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable22.

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ture et la portion de l’eau consommée dans les villes en représente moins d’un quart, voire moins en Afrique. La responsabilité quantitative majeure dans les prélèvements et les gaspillages mondiaux est celle de la grande agriculture irriguée. Les modèles de la « révolution verte » en Asie, ou du maraîchage intensif (bassin méditerranéen), certains grands aménagements hydrauliques, l’emploi massif de pesticides ont conduit à une agri-culture non durable qui peut indirectement affecter les villes.

I.3.3. Rejets urbainsCompte tenu du retard d’équipement des

villes des PVD, intégrer le déve lop pement durable aux politiques d’adduction d’eau signifierait, en généralisant l’accès à l ’eau, de prévoir simultanément de traiter les émissions d’eaux usées qui augmenteront nécessairement. Au Maroc, l’assainissement (évacuation des eaux usées hors des villes) est prévu, mais pas leur dépollution (7 % seu-lement des eaux sont épurées).

Dans le delta de la Rivière des Perles, région phare de la nouvelle industrialisation chinoise (environ 40 M d’habitants), l’indus-tria li sa tion fulgurante et l ’urbanisation extensive se sont substituées en quelques années à la mise en valeur traditionnelle rizi-cole du delta. Les autorités ont établi un péri-mètre de protection en amont pour garantir la qualité des eaux de Canton. En aval, les bras ramifiés du fleuve et l ’omniprésence des anciens canaux agricoles constituent des atouts pour des implantations industrielles (textile, industrie chimique électronique), mais les rejets industriels dans le milieu demeurent quasi incontrôlés, la faiblesse des contraintes environnementales constituant un atout d’attractivité pour les investisseurs. Moins de 40 % des rejets urbains sont épu-rés. La pollution organique et industrielle provoque, plusieurs fois par an, des pénuries d’eau potable dans les villes situées en aval du delta. (Si-Ming L. et KOON-Kwa W., 2007).

I.3.4. Impacts de l’urbanisation rapide sur les systèmes littoraux (voir aussi le chapitre sur Les littoraux, espaces convoités)Environ 750 millions de personnes vivent

dans des villes situées sur les côtes, dont 24 % dans des mégapoles de plus de 10 M d’habi-tants (estimation GRUMP). Ce fait est parti-culièrement marqué dans le cas des PVD dont les grandes villes, souvent fondées pour les besoins de la traite coloniale, sont situées en position littorale, souvent dans des sites qui étaient initialement favorables, mais sont aujourd’hui fragilisés par leur croissance rapide (par exemple, Saint-Louis du Sénégal).

Sur les littoraux propices aux échanges, se développent les Mégalopolis des « Suds » : de vastes régions polynucléaires de plu-sieurs dizaines de millions d’habitants, où s’imbriquent grosses agglomérations, mul-tiples villes moyennes, espaces naturels et agricoles, zones périurbaines et axes de transports. La distinction s’estompe entre urbain et rural. Une occupation extensive et incontrôlée y menace des écosystèmes fragiles.

�� Document 5. Le cordon urbain et périurbain

du Golfe de Guinée

Au nom du développement durable, la communauté internationale se préoccupe de minimiser la dégradation et de sauvegarder la biodiversité littorale à travers le financement divers plans d’aménagement intégrés (pro-gramme d’aménagement des zones humides (PAZH) au sud Bénin, par exemple)… qui se bornent souvent à produire des études et émettre de pieuses recommandations faute d’une véritable motivation politique, et en raison de la complexité des enjeux locaux. S’il faut arbitrer entre extraction pétrolière, créa-tion d’une autoroute et préservation d’une mangrove, quels pouvoirs publics choisiront cette dernière ?

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Page 24: FOREDD Thème 3. Aménager la ville lÕaide de la Casden ......Document 5. Le cordon urbain et périurbain du Golfe de Guinée Document 6. Problèmes de transport à Alger Document

Mise au point scientifique — Villes et développement durable dans les pays des Suds 23.

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II. Disparités dans l’accès aux ser-vices essentiels : l’exemple de l’eau et des transports

Dans les villes des Suds, les inégalités sont aggravées par l’inéquité des politiques urbaines. En effet, si la ségrégation est un fait urbain universel, on peut considérer le sous-équipement des quartiers pauvres comme l’indicateur le plus pertinent qui permette de qualifier le « mal-développement » dans des domaines comme l’accès à l’eau, à la santé, aux transports.

Plusieurs séries de facteurs imbriqués expliquent cette situation :

– La rapidité de la croissance démogra-phique, l ’étalement spatial qui nécessite-raient des investissements énormes, per-pétuellement dépassés par les besoins, de kilomètres de réseaux urbains.

– Le caractère informel ou même illégal de certains quartiers pauvres qui les tient de facto à l’écart des équipements.

– Les charges récurrentes d’entretien qu’imposent les réseaux existants. Les entre-prises publiques n’étant pas été en mesure de les assumer, la gestion de ces réseaux tend à être déléguée, depuis 15 ans, au secteur privé sous l’impulsion des institutions internatio-nales, lors des plans d’ajustement structurels (voir partie III).

– Les effets pervers de ces privatisations et des nouvelles modalités de gestion de ser-vices (disparités, hausses des tarifs) appli-qués aux villes des Suds : faible capacité (ou faible volonté) de régulation ou de négocia-tion des autorités urbaines avec les opéra-teurs pour imposer des solidarités sociales ou territoriales.

Le symptôme majeur est la persistance, la réactivation, ou l’apparition récente d’un dualisme urbain entre fragments de ville parfois ultramodernes, construits, viabilisés et équipés selon des standards occidentaux et vastes quartiers populaires « sous-inté-grés ». Dans ces derniers, la production des logements et services de première nécessité se réalise à travers des filières marchandes, souvent informelles, qui développent des

adaptations anarchiques aux carences d’équi-pements et de services collectifs.

II.1. Inégalités d’accès à l’eau 5

Plus que de la seule insuffisance des res-sources du milieu, les pénuries d’eau en ville relèvent souvent davantage de la vétusté des réseaux et de leur mauvais entretien. La consommation unitaire moyenne des ménages urbains est généralement supé-rieure à celle des milieux ruraux mais sa répartition est inéquitable. À Mexico, la consommation d ’eau varie de moins de 20 litres par personne et par jour pour les ménages pauvres des quartiers non raccordés aux réseaux, achetant l’eau « au détail » au camion-citerne, à 300 litres par personne et par jour et plus dans les quartiers aisés (volumes consommés supérieurs au standard des villes françaises).

La prise de conscience de l’état de dégra-dation catastrophique tant des entreprises nationales d’adduction d’eau que des infras-tructures dont elles avaient la charge (par exemple, fuites de 40 % sur le réseau de conduites d’eau de Mexico) a conduit aux vagues de privatisation des années 1980-1990. Celles-ci ont ouvert le champ à des multinationales spécialisées qui ont rationa-lisé la gestion, diminué les gaspillages et les pertes et ont financé leurs investissements en menant des politiques de multiplication des branchements à domicile, après avoir fermé les accès gratuits. Des campagnes d’abonne-ments à des tarifs sociaux ont été soutenues par la Banque mondiale pour accompagner cette évolution.

Mais les firmes de services et leurs sous-traitants se partagent en priorité les segments d’activité et les zones rentables des villes de pays émergents. Elles tendent à se désen-gager des pays non solvables ou politique-ment revendicatifs (Afrique subsaharienne, Amérique latine). Certains appels d’offres de villes africaines pour la production/d’eau potable ne trouvent plus preneurs car l’état des réseaux est trop dégradé et la proportion d’habitants non solvables est trop forte.

5. Voir aussi le chapitre « L’eau, ressource essen-tielle ».

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Ainsi, seule une faible partie des quartiers de certaines grandes villes des Suds est tou-jours « branchée » sur des services d’adduc-tion d’eau en réseau (moins de 20 % à Lusaka, moins de 40 % à Cebu aux Philippines), alors que ceux-ci constituent une norme majori-taire (mais non universelle) dans d’autres pays (80 % à Buenos Aires, au Cap, à Rio). Dans les villes petites et moyennes, les modes non conventionnels d’approvisionnement sont majoritaires.

Des « pénuries d’eau », temporaires ou structurelles, ruptures d’approvisionnement, baisses de pression, « délestages » (rotation entre les quartiers, certains n’étant alimentés qu’une à deux heures par nuit), constituent le quotidien des habitants de certains quar-tiers tandis que d’autres sont alimentés en permanence.

Face aux carences d ’aménagements publics, les solutions sont individuelles, non contrôlées, marchandes et socialement sélec-tives. Les résidences aisées sont équipées de forages et de motopompes connectées à des générateurs, de surpresseurs et de réser-voirs qui se remplissent la nuit, aux heures de disponibilité.

Les ménages disposant de revenus faibles et irréguliers, doivent réinventer chaque jour des solutions qui sont porteuses de risques sanitaires : achat d’eau au détail auprès de revendeurs professionnels (dont l’origine et la potabilité ne sont pas garanties), achat de voisinage, récupération d’eau de pluie, collecte d’eau de puits, de rivière…

Outre les problèmes immédiats de salu-brité et les risques de santé associés (voir Dorier-Apprill, 2006), la difficulté d’accès aux équipements de base a des impacts indirects sur l’activité urbaine, l’entreprenariat, donc le développement. Les habitants de « quar-tiers sous-intégrés » doivent consacrer à l’eau et à l’assainissement une part de leurs reve-nus et de leur temps proportionnellement plus importants que les groupes à plus hauts revenus, ce qui grève à la fois leur budget et l’énergie qui pourrait être consacrée à une activité productive. La différence de coûts unitaires varie à la fois entre les pays, entre

les villes et à l ’intérieur des villes selon la source d ’approvisionnement. En 1997, à Bangkok le m3 d’eau valait 0,38 US dollar à au robinet à domicile contre 28,9 chez le vendeur d’eau

Des enquêtes menées dans neuf villes d’Afrique de l’Est et d’Inde ont indiqué que les ménages n’étant pas raccordés à l ’eau courante passaient en moyenne 92 minutes par jour pour s’approvisionner en eau 6. Les ménages dépourvus de toilettes à leur domi-cile devaient payer en moyenne 15 % de leur revenu pour l’usage de WC payants.

I.2. Inégalités d’accès aux transports

II.2.1. Transports et mobilités des pauvresL’accès à l ’automobile reste très discri-

miné socialement, la grande majorité des habitants des villes des PVD qui vivent sous le seuil de pauvreté ne disposent pas de véhi-cule. L’inégal accès au transport est un vrai problème pour les citadins pauvres des pays du Sud, source de perte de temps, de produc-tivité et d’argent.

Dans les années 1980-1990 la faillite ou le constat de faible rentabilité de plusieurs réseaux publics aux tarifs trop bas a motivé leur fermeture ou leur privatisation, sous la pression des institutions financières inter-nationales. Les transports en commun sont donc de plus en plus dominés par un secteur privé très concurrentiel, souvent artisanal, peu régulé. Les coûts du déplacement vers le lieu de travail ou d’étude sont un poste majeur des dépenses des ménages pauvres vivant en périphérie, ce qui signifie qu’il faut parfois sacrifier la scolarisation ou l’accès aux soins de santé à cause du prix des déplace-ments. Les pauvres doivent consacrer deux heures ou plus de leur journée à leurs trajets entre le travail et la maison.

Dans les périphéries populaires les cita-dins doivent marcher longtemps avant de gagner la première voie bitumée accessible aux véhicules, pour ensuite s’entasser dans des transports collectifs majoritairement pri-

6. Source : http://ww2.unhabitat.org/media-

centre/ (united nations human settlements programm)

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vés, inconfortables, bruyants, polluants, par-fois dangereux… Ils ont le mérite de rendre un service quotidien que les pouvoirs publics n’assument pas ou n’assument plus après les vagues de privatisation des années quatre-vingt-dix. (Godard X. 2006). La marche à pied ici, n’est pas un choix personnel de vie saine et contribution à la réduction de la pollution, mais une pure contrainte.

�� Document 6. Problèmes de transport à Alger

Les minibus, les taxis collectifs, et, en bout de chaîne, les taxis-motos répondent plus particulièrement aux besoins des quar-tiers informels les plus enclavés et mal viabi-lisés. Leur taille leur permet de manœuvrer plus facilement (les taxis motos peuvent même aborder les pistes non goudronnées les plus étroites). Leurs faibles tarifs unitaires sont compensés par un principe général : ils ne démarrent que s’ils ont fait le plein de pas-sagers, et/ou modifient ou rallongent leurs itinéraires si nécessaire, ce qui allonge d’au-tant les temps et longueurs de trajet. Mais les habitants des zones éloignées, insécurisées sont parfois véritablement pris en otage. Les transporteurs peuvent modifier les tronçons d’itinéraires, réclamer plusieurs paiements pour un même trajet. Dans ces systèmes très peu régulés, la compétition entre chauffeurs conduit à ne pas respecter les règles élémen-taires de sécurité.

II.2.2. Quelle amélioration des systèmes de transports urbains ?Des solutions de référence au problème

des transports urbains dans les PVD, comme le modèle de Curitiba (Brésil), ou l ’expé-rience de Bogota, avec son système de bus à haute capacité appelé Transmilenio, ont été fortement soutenues par les bailleurs de fonds internationaux et très médiatisés (Gil-Beuf, 2007). Ils commencent à servir d’exemple aux villes occidentales (Beaucire, 2007). Ils articulent le transport de masse (bus en « site propre » de grande capacité, sur une voie réservée inaccessible à tout autre usage), connecté à un réseau de « bus

de rabattement » gratuit, lui-même articulé aux transports artisanaux de faible capacité à itinéraires souples pour les zones reculées (type minibus, taxis collectifs). Mais cette solution suppose des aménagements de voirie qui ne sont possibles que si la morphologie urbaine s’y prête (il faut de longues et larges avenues rectilignes), si la quantité des voya-geurs transportés justifie l’investissement, et si politiques urbaines, opérateurs et citadins sont prêts à s’adapter.

L’amélioration de l ’accessibilité et la durabilité des systèmes de transport passe donc non seulement par une amélioration de la voirie et une gestion prévisionnelle de son entretien, de l’état des véhicules, mais aussi par une meilleure organisation et des aménagements tarifaires favorables aux rési-dents pauvres des zones très éloignées. C’est pourquoi les institutions internationales financent actuellement la mise en place de plans de déplacements urbains (comme celui de Dakar) avec des autorités régulatrices inté-grant les diverses composantes de la filière (entreprises publiques, entreprises privées formelles, artisanat informel).

II.2.3. L’automobilisation progresse, source d’étalement urbain et d’une pollution encore mal contrôléeIl ne faut pas se fier au sensationnel : les

données internationales sur la pollution automobile et son coût dans les villes des Suds sont sujettes à caution, car elles sont généralement établies par extrapolation et non par enquêtes directes (Godard X., 2006). La consommation d’énergie transport/km des grandes villes de l’Asie émergente serait encore deux fois inférieure à celle des villes européennes (et 9 fois inférieure à celle des USA) (Orfeuil, 2006).

La circulation automobile n’est vraiment intense que dans les très grandes agglomé-rations de pays industrialisés des Suds, et leur émission de gaz à effet de serre (GES) par habitant reste inférieure à celle des villes développées. Ainsi la moitié des véhicules de tout le Mexique circulent dans la région de Mexico. La dissociation est toujours plus

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable26.

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marquée entre lieu de résidence et lieu de tra-vail et des investissements publics en faveur des voies autoroutières continuent à favoriser le développement du recours à l’automobile entre la « ville centrale », qui a perdu plus d’un million d’habitants depuis 1970, et ses périphéries (2,7 millions de véhicules).

La congestion routière est la contrepartie de l ’existence d’une classe moyenne nom-breuse, capable d’accéder au véhicule parti-culier et de vivre dans des périphéries rési-dentielles raccordées par voies routières aux zones d’activité : c’est le modèle de la « dépen-dance automobile » qui se diffuse aux pays émergents. Dans les pays d’Asie (Vietnam, Thaïlande) en cours de déve lop pement écono-mique, on estime que les vitesses automobiles à l’heure de pointe ont diminué en moyenne de 2 km/h par an depuis la deuxième moi-tié des années 1980 (Godard, 2006). L’usage des deux-roues motorisés s’est massivement développé grâce à l’importation de motocy-clettes chinoises très bon marché depuis 20 ans. Observé en Asie du sud (75 % des dépla-cements quotidiens des ménages à Ho-Chi-Minh-Ville), mais aussi dans certains pays africains, il est largement responsable de formes de péri-urbanisation rapide, permet-tant à des ménages relativement modestes d ’élargir le rayon de leurs déplacements domicile-travail.

L’automobilisation des villes des pays émergents progresse avec la commerciali-sation de véhicules neufs à moindre coût, qui pourra garantir des débouchés aux constructeurs de véhicules particuliers 7 tou-chés par la stagnation de la consommation en Occident, malgré une concurrence très rude des constructeurs asiatiques face à des rentes de situation anciennes. La motorisa-tion des déplacements urbains des PVD se nourrit encore des flux de véhicules d’occa-sion, vétustes et réformés dans les pays euro-péens et vendus sur les marchés des PVD, via des filières et des ports spécialisés dans leur importation (Cotonou, en Afrique, importe environ 200 000 véhicules par an, une par-tie étant réexportée vers les pays voisins, notamment le Nigeria où leur importation

directe par voie maritime est interdite). Plusieurs pays ont cependant adopté une réglementation restrictive (le Sénégal inter-dit depuis 2005 l’importation et la vente de véhicules de plus de 5 ans). Des initiatives parfois soutenues par la Banque Mondiale visent à y renouveler le parc automobile des minibus et des taxis urbains, dans un double but de réduction des pollutions et de déve-loppement économique. Des partenariats « Sud-Sud » se mettent en place, comme dans le cas de Dakar, grâce au partenariat entre Tata Motors et Senbus pour l’assem-blage de minibus (à Thiès, 70 km de Dakar) et à l’usine irano-sénégalaise d’assemblage de véhicules utilitaires, Seniran-Auto, basée également à Thiès : elle vise d’abord le renou-vellement du parc des taxis, l’équipement des ménages dakarois et, à terme, une diffusion sous-régionale.

III. Aménager des villes durables au Sud ?

Tenter d ’appliquer la problématique du développement durable aux villes des PVD, telle qu’elle est actuellement dévelop-pée dans les villes occidentales, paraît une gageure tant celles-ci semblent cristalliser les déséquilibres économiques, sociaux et environnementaux.

III.1. Les politiques urbaines des Suds sous influence : entre ajustement structurel et développement durable

III.1.1. Le développement urbain durable au Sud : quelle volonté politique ?Planifier, gérer, gouverner dans la durée

des villes à croissance rapide est un défi pour des autorités locales aux moyens faibles. Les villes n’ont pas toujours une réelle autonome de décision politique par rapport aux États La faiblesse des finances publiques urbaines est un autre point de blocage essentiel. Elle est liée, non seulement aux faibles ressources des pays, mais aussi à la faiblesse des systèmes de redistributions des États aux villes et à

7. La production automo-bile mondiale de voitures

particulières est passée de 30 M par an environ dans

les années 1980 à 50 M environ aujourd’hui.

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la faiblesse des fiscalités publiques locales. Il est difficile techniquement, socialement et politiquement (faute de cartographie pré-cise du cadastre, faute d’informations fiables sur les résidents, en raison des énormes dis-parités de conditions d’habitat) de mettre en place des taxes liées à l’habitation ou au foncier, et les faibles ressources propres des villes empêchent certaines politiques qui seraient redistributrices entre parties de l’espace urbain. La volonté publique d’inves-tir dans l’aménagement urbain, freinée par la faiblesse des ressources propres des villes, se limite souvent encore aux parties cen-trales et celles qui mettent en jeu l ’image publique « internationale » (grands équi-pements, nouveaux quartiers d’affaires…). Pour le reste prédominent des stratégies poli-tiques de « laisser-faire », par exemple face à la surdensification et la taudification de quartiers populaires, à la dégradation d’équi-pements anciens, à la spéculation foncière sur des zones en principe non urbanisables, à l’expan sion de quartiers informels.

Des pays, surtout émergents (Chine, Vietnam, Maroc) se dotent de réels projets d’urbanisme pour les périphéries. Ils sont rarement inspirés par les principes à long terme du développement durable… mais plu-tôt dictés par la nécessité souvent urgente de canaliser la pression spontanée sur certains espaces (villes nouvelles versus quartiers spontanés du Caire, péri-urbanisation au Vietnam), par un volontarisme dans l’expan-sion péri-urbaine (création d’axes de voirie et de réseaux à Hanoï, Vientiane) ou par des urgences sectorielles ou sociales, comme le relogement de ménages modestes après des déplacements autoritaires hors des quartiers d’affaires des villes (cas de Casablanca ou des grandes villes chinoises). (PRUD, 2004 – Plan bleu, 2010).

Si bien qu’on peut encore dire que « la pro-blématique du développement durable est plutôt identifiable à travers des stratégies, des acteurs et des financements d’origine internationale » (de Miras, 2006) que dans les projets endogènes. Les territoires urbains des Suds, subissent, plus que les villes occi-

dentales, l’influence des bailleurs de fonds internationaux.

III.1.2. Des orientations internationales divergentesLes priorités internationales prônées

pour développer les villes des Suds ne sont pas absolument convergentes, et les principes du « développement durable » ne sont pas toujours traités avec le même ordre de prio-rité par les bailleurs bilatéraux (qui tendent à soutenir, à la demande, des projets natio-naux) et multilatéraux (qui tendent davan-tage à orienter les politiques urbaines des États). Si les institutions de l’ONU (PNUD, UN habitat etc.), les principales ONG de déve-loppement (OXFAM) ont promu activement le discours du développement durable, les agen-das 21, la participation de la société civile… le couple FMI-Banque mondiale (principaux bailleurs de fond et prescripteurs des poli-tiques urbaines au Sud), continue à s’attacher à une vision plus économiciste et gestion-naire du développement urbain, à des inves-tissements lourds dans les infrastructures, sur des modèles urbains importés. La diver-gence s’est théoriquement atténuée depuis quelques années avec l’adoption des objectifs du Millénaire pour le développement.

Du côté de la Banque mondiale.Depuis la décennie 1980, FMI et Banque

mondiale (où seuls les pays occidentaux contributeurs détiennent le pouvoir de décision) considèrent que le développement repose avant tout sur des bases économiques, sur l’équilibre budgétaire public et sur le ren-forcement de l’efficacité des infrastructures destiné à améliorer la productivité des villes. Le credo néolibéral de ces institutions atteint son point culminant dans les années 1980, période dite du « consensus de Washington ». Pour les PVD et leurs villes, c’est la période des plans d’ajustement structurels.

Partant du postulat de l’incapacité des pouvoirs publics à organiser l’accès de tous aux services essentiels, à travers leurs régies ou sociétés nationales d ’eau, d ’assai nis-sement ou d’électricité, la Banque mondiale

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable28.

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octroie alors ses crédits en contrepartie du désengagement du politique de la « ges-tion » urbaine (privatisation des entreprises publiques ou délégations de services muni-cipaux sous contrat à des entreprises spé-cialisées). Les services qui étaient subven-tionnés et constituaient une source de déficit public (comme l’accès gratuit à des fontaines publiques de distribution d’eau dans certains quartiers) sont supprimés. L’idée est de res-ponsabiliser les usagers. Les ressources ainsi dégagées ont permis de rendre plus efficaces certains services dévolus au secteur privé, de mieux entretenir les infrastructures. Mais faute de placer l’équité au cœur de ces poli-tiques, on observe souvent une dégradation des conditions de vie des citadins pauvres qui accèdent plus difficilement aux services essentiels aujourd’hui que dans les années 1970.

Face aux contestations parfois violentes des politiques urbaines de l’ajustement struc-turel (émeutes de la faim, « guerres de l’eau », changements politiques et re-nationalistion du secteur dans certains pays latino-amé-ricains), la Banque mondiale a pro gres si-vement nuancé ses prescriptions, d’abord grâce à la promotion de la « bonne gouver-nance » : démocratie locale et municipalisa-tion, décentralisation, appel à la participa-tion des habitants.

Dans les programmes urbains qu’elle finance actuellement, la Banque mondiale ne remet toujours pas en cause une approche techniciste par les grandes infrastructures et équipements, héritée de l’histoire du dévelop-pement urbain occidental. L’aménagement y est toujours fondé sur des réseaux centra-lisés (tout à l’égout) consommateurs d’eau, d’énergie, coûteux en implantation et en entretien… bien que ces systèmes aient montré leurs limites et qu’ils ne soient pas forcément adaptables à tous les contextes bioclimatiques.

Des modèles alternatifs (énergies renou-velables, dispositifs solaires, assainissement économe en eau, compostage des déchets, petits lagunages à végétaux), proposés par des ONG, n’ont jamais vraiment bénéficié

d’un appui international, et sont toujours restés au stade anecdotique et expérimental.

Du côté du PNUD.La prise de conscience des effets pervers

de l’« ajustement structurel » sur les villes des Suds intervient au moment où se construit la notion de développement durable Les institu-tions de l’ONU (où les PVD sont représentés au prorata de leur nombre) et spécialement le PNUD (programme des Nations unies pour le développement), les conférences mondiales sur le développement durable ont réitéré des appels de principe en faveur de l’aide publique multilatérale au développement et à la solida-rité mondiale. Elle est destinée à promouvoir la dimension humaine et sociale du déve-loppement, et soutient l’accès généralisé à l’eau et à la santé, définis comme des droits primordiaux et fondateurs de tout dévelop-pement durable, y compris pour les citadins non solvables. Cette position culmine avec l’adoption des Objectifs du Millénaire pour le développement. Cette affirmation pro-gressive du développement durable comme doxa universelle est accompagnée de débats houleux entre pays occidentaux, émergents, et moins avancés sur les modèles de dévelop-pement, sur le rôle (et la souveraineté) des États face aux institutions internationales, sur la nécessité et la nature des régulations entre intérêt des marchés et intérêt général.

III.1.3. Le discours du développement durable appliqué aux villes des Suds : bonnes pratiques ou leurre ?Le discours sur le développement durable

sous-tend de plus en plus la politique inter-nationale des institutions onusiennes en direction des pays des Suds. Avoir rédigé un « agenda 21 » urbain, injecter de la « durabi-lité » dans les demandes subventions devient une condition de l’aide publique au dévelop-pement urbain, qu’elle soit multilatérale ou qu’elle transite par les « coopérations décen-tralisées » qui associent des agglomérations du Nord et des communes du Sud.

Des institutions multilatérales, des associations mondiales de villes, des ONG

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financées par des coopérations internatio-nales jouent un rôle important pour orien-ter les politiques urbaines des PVD dans le sens souhaité. Des réseaux d‘information, des sessions de formation destinées au per-sonnel municipal assurent la « dissémina-tion » du concept. Mais, outre le fait que les pouvoirs nationaux et locaux se retrouvent dépassés par des ingérences venues d ’en haut (PNUD) ou d’en bas (ONG locales finan-cées par l’inter na tio nal), l’examen attentif du contenu concret (souvent mince) et du déroulement des programmes labellisés « développement durable » dans les villes des Suds laisse souvent très dubitatif, alors même que la conviction locale est faible, et que certains projets semblent décalés face aux urgences sociales et urbaines, à commen-cer par l ’ampleur de la pauvreté qui, dans les villes des Suds, est majoritaire. (Navez Bouchanine F., 2007).

La préservation de l’environnement peut devenir source de conflits intra-urbains entre groupes sociaux. Pour le plus grand nombre des habitants, les urgences relèvent encore souvent des mauvaises conditions de (sur)vie quotidienne : logement, accès à l’eau, insalu-brité. Seules certaines catégories sociales des quartiers aisés de ces villes duales (à l’image des nantis des pays occidentaux) ont les moyens de se préoccuper des aspects les plus « écologiques » du développement durable, en particulier la préservation d’espaces verts et forestiers intra et périurbains contre l’urba-ni sa tion anarchique. Des conflits environ-nementaux fondés sur le paradigme du développement durable et de la biodiversité dans les agglomérations des Suds, naissent des contestations lors de la délimitation de réserves ou de zones forestières protégées, qui visent à bloquer l’expansion spatiale de quar-tiers populaires informels (Rio, Monterrey, Richards ‘s Bay sur le littoral sud africain). Ces tensions interrogent les logiques de pré-servation de l’environnement : outil de déve-loppement durable pour tous, ou vecteur de renforcement du dualisme urbain ?

�� Document 7. La préservation de l’environ-

nement, source de conflits intra-urbains. Exemple

de Rio

III.1.4. Les multinationales de services et le développement durable : entre marché et intérêt généralLes technologies environnementales

et la gestion déléguée de services urbains dans les villes des PVD constituent un énorme marché potentiel. Après la période des ajustements structurels ces firmes se sont implantées en Afrique et en Amérique latine où elles ont repris en main les ser-vices urbains en réseau comme l’adduction d’eau. Au Brésil (en 2005) les trois premiers fournisseurs d’équipements et services de l’envi ron nement sont les États-Unis (35 %), l’Allemagne (25 %), la France (15 %). Les mul-tinationales françaises, comme Veolia, Suez, la SAUR, qui désormais interviennent dans les villes des Suds, présentent des garanties d’expérience en matière de technicité, de rigueur de gestion. Ces firmes spécialisées dans la « gestion déléguée » des villes ont intégré l ’argumentaire et la pédagogie du développement durable ; elles contribuent à la formation de cadres des villes des PVD, et financent des fondations de recherche dans ce domaine. Elles sont susceptibles de vendre un savoir faire en matière de gestion de l’envi ron nement et de dépollution… mais il s’agit bien d’une prestation marchande. À la suite de tensions politiques, de ruptures de contrat (Buenos Aires), ces grandes firmes tendent aujourd’hui à quitter les pays les plus instables, revendicatifs où peu rentables, et se tournent massivement vers le marché asia-tique (Botton S., 2006).

La capacité de négociation des collecti-vités territoriales pour imposer aux grands opérateurs de l ’eau un cahier des charges « durable » dépend de la puissance écono-mique des pays, du volume des abonnés sol-vables, et surtout de la volonté politique des États, de leur conception de l’intervention et/ou de la régulation qui suppose des moyens pour imposer un niveau de tarification de l’eau acceptable par les plus pauvres tout en

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable30.

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incluant la dépollution. En Afrique subsa-harienne, les projets n’incluent pas l’épura-tion qui, au pire, n’est pas prévue du tout, au mieux, est confiée à un organisme de tutelle public doté de faibles moyens pour l’entretien du patrimoine existant, comme au Sénégal.

Les pays émergents commencent à prendre conscience du problème de l’épura-tion, au moins pour quelques villes « phares ». En Chine, dans les contrats récents de Suez ou de Veolia qui portent sur des zones d’affaires ou touristiques (Pékin, Shanghai, Shenzhen), l’épuration est prévue de pair avec les contrats de « production » d’eau potable et annoncée avec fierté ; elle contribue tant à l’image du pays qu’à celle des opérateurs. Il faut dire que le marché de la gestion de l’eau (et des déchets) dans les villes chinoises suscite la convoi-tise particulière des investisseurs, tant que l’expertise chinoise n’est pas encore effective dans ce domaine d’activité. Contrairement à l ’Amérique latine et à l ’Afrique, d’où ces firmes se désengagent aujourd’hui, les villes chinoises sont solvables.

La délégation ou privatisation des ser-vices d’environnement urbain pose des pro-blèmes territoriaux. Dans de très grandes agglomérations modernes, on peut avoir un système dual dans lequel une entreprise dotée de matériel moderne dessert certains secteurs rentables tandis que les zones moins accessibles ou moins solvables seront traitées par des manœuvres informels dans d’exé-crables conditions de travail et de salubrité (« metrobus » desservant seulement les quar-tiers centraux d’affaires de Mexico, chiffon-niers du Caire évincés des quartiers riches où le ramassage des ordures a été délégué à plusieurs multinationales, vidangeurs d’eaux usées dans les zones sans égouts, loueurs de toilettes etc.). Les quartiers sous-intégrés, sans voirie, d’accès difficile aux camions, ont pour seul recours l ’« assainissement auto-nome », c’est-à-dire des systèmes de fosses d’aisance cimentée vidangeables ou à « fond perdu », ou la collecte des déchets via des charretiers. (pour plus de détails cf. Dorier-Aprill, 2006)

Dans les villes ou les quartiers trop dému-nis, les ménages sélectionnent les services vitaux (eau, santé, transports), mais ne peuvent par exemple consacrer un budget à l’enlèvement de leurs ordures ménagères…

III.2. Hétérogénéité des situations urbaines des Suds face à la problématique du développement durableL’universalisation du « bon processus »

consensuel du développement durable est souvent posée sans que soit soulevée la ques-tion de son application dans des contextes si différents à tous égards. On ne doit pas oublier la forte hétérogénéité des situations urbaines des Suds face à la problématique du développement durable : selon la taille des agglomérations considérées, leur niveau d’industrialisation, leur dépendance à l‘auto-mobile, leurs contraintes environnementales, leur mode de gouvernance, plus ou moins démocratique.

Du côté des pays d’économie à forte crois-sance : l ’industrialisation et la croissance accélérée des villes d’Asie du Sud ou du bas-sin méditerranéen se réalisent sur la base d’aménagements à moindres coûts et d’appels massifs à des migrations de travail. Leurs niveaux élevés de pollution et de rejets, leur expansion face à des espaces ruraux et agri-coles laissés pour compte, leur pression sur les ressources en eau, leur dualisme social et économique tend à relancer les débats sur le décalage entre croissance et développement. Ils réactualisent la thèse du « biais urbain », car les rejets, nuisances, congestions de ces agglomérations peuvent exercer des rétroac-tions négatives sur l ’activité économique elle-même.

Du côté des pays moins développés : l’urba ni sa tion rapide est toujours déconnec-tée de la croissance économique dans nombre de pays d’Amérique centrale ou d’Afrique. Leurs villes sont par ailleurs dépourvues de données démographiques, économiques ou environnementales fiables, si bien qu’elles ne sont pas prises en compte dans les modèles de la Banque mondiale qui argumentent en

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Mise au point scientifique — Villes et développement durable dans les pays des Suds 31.

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faveur de la « productivité urbaine » (rap-port 2009). La pauvreté majoritaire (souvent plus de 60 %) et la prédominance de l’habitat populaire auto-construit informel sont ici les principaux facteurs d’étalement urbain sous formes de périphéries mal contrôlées, sous équipées (de 40 à 80 % des quartiers). La faible accessibilité aux services de base est source de vulnérabilité sanitaire accrue chez les plus pauvres.

III.2.1. Sous-développement et faible empreinte écologiqueTenter de transposer aux villes des PVD

certaines expérimentations des villes du Nord européen (déplacements « doux », habi-tat « écologique ») pourrait aussi passer pour une provocation indécente.

Dans les PVD, la très faible empreinte écologique de certaines villes millionnaires (comme Brazzaville, dite « la verte », de nombreuses villes d ’Afrique équatoriale ou d’Amérique centrale) révèle un déve lop-pement économique et social faible, en raison de la captation des richesses primaires du pays par un petit nombre de sociétés interna-tionales s’appuyant sur une classe politique corrompue. Le paysage urbain est certes ver-doyant, la pollution atmosphérique est faible : c’est faute d’industrie. L’automobilisation est limitée du fait du manque de voirie carros-sable et des faibles mobilités périurbaines. Les « déplacements doux » que cherchent à développer les autorités municipales occi-dentales (marche à pied, vélo) sont ici impo-sés aux plus pauvres qui n’ont aucune autre alternative. Les ponctions sur le milieu sont réduites en raison des dramatiques carences d’infrastructures de réseau (eau). La faible production de déchets par tête est liée à la pauvreté majoritaire et à la survie quoti-dienne à laquelle la majorité des habitants est réduite. Le recyclage est une pratique de pauvreté.

L’immense majorité de la population pauvre aspire simplement à se loger, à moins restreindre son utilisation d’eau, consom-mer et à posséder une voiture ! Ces villes n’exercent de faibles impacts environnemen-

taux que parce que seule une infime minorité de privilégiés accède au confort en palliant individuellement les carences d’équipements publics, mais sans aucun souci de la notion de développement durable. Ainsi, les véhi-cules 4x4 permettent de circuler sur les rues défoncées, les groupes électrogènes indivi-duels à essence fournissent l’électricité des climatiseurs, les motopompes et les forages privés incontrôlés pour l’eau se multiplient, favorisés par la baisse des prix de ces produits massivement importés.

III.2.2. Villes industrielles et développement durable dans les PVDInversement, c’est dans les pays en forte

croissance économique que les pressions envi-ronnementales urbaines sont les plus lourdes, du fait de l’impact d’activités industrielles polluantes ou consommatrices d’eau, face aux énormes retards en matière d’assainissement et d’épuration domestique et industrielle (de Miras, 2006). C’est précisément la faiblesse des réglementations et des contrôles publics qui attire ici certaines industries polluantes autorisées à fonctionner sans prendre les pré-cautions nécessaires (cf. explosion de l’usine chimique de Bhopal en Inde). La création de richesses urbaines dans les PVD se réalise – au moins dans un premier temps – au prix de pollutions, forts impacts environnementaux et risques technologiques, considérés par les pouvoirs publics et par les habitants des villes concernées comme des « externalités » secon-daires face à la pauvreté et au sous-emploi.

Il y a aussi des effets indirects de l’émer-gence d’une classe moyenne au mode de vie de type « occidental » dans certaines parties des agglomérations. Ainsi, la banalisation de la desserte en eau au domicile explique la hausse exponentielle de l’émission d’eaux usées tandis que l ’accès à la consomma-tion de masse augmente la production de déchets solides, à laquelle ces villes ne sont pas préparées. Selon l’Association chinoise de la protection environnementale, moins de 2 % des déchets urbains en Chine étaient décontaminés avant 1990. En 1999, il existait 696 usines qui traitaient 63,4 % des ordures.

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable32.

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Mais seulement 200 d’entre elles avaient la capacité de rendre les déchets non domma-geables pour l’environnement, soit 20,3 % des déchets traités. Aujourd’hui il y aurait plus de 700 usines « sûres », mais elles ne traitent encore que 52 % des déchets urbains.

La croissance industrielle n’est pas non plus automatiquement gage de déve lop-pement humain, comme le montrent les conditions de vie des travailleurs pauvres dans les mégapoles asiatiques ou latino-américaines. Les industries manufacturières font massivement appel aux réservoirs de main-d’œuvre peu qualifiés de zones rurales. Celles-ci alimentent donc des migrations intérieures nouvelles, observées d’Istanbul à Lima, de Guangzhou à Casablanca. Ces néoci-tadins, parmi lesquels de nombreux migrants saisonniers, viennent occuper en sous-loca-tion des taudis de quartiers populaires, des extensions d’immeubles réalisées de manière informelle (Guangzhou, Le Caire), densifier des zones de bidonvilles proches des zones d’emplois, à l’image des entassements décrits au xixe siècle par Dickens, Engels ou Reclus dans la mégalopole londonienne. S’agit-il vraiment d’une étape incontournable du développement économique ? Ne pourrait-on pas imaginer la promotion d’un autre mode de développement ?

Des classes moyennes apparaissent, mais on observe que les disparités socio-spatiales s’accentuent (rapport FNUAP 2007). La faiblesse des prélèvements fiscaux sur les activités urbaines, dérisoire par rapport à leur valeur économique, ne permet pas aux finances publiques urbaines d’être suf fi-samment confortées pour faire face aux défis d’un développement durable.

Les mégapoles industrialisées des pays émergents sont bien des lieux de concen-trations des richesses et de la productivité nationale, mais elles fonctionnent comme des systèmes structurellement inégalitaires. À propos de ces villes, c’est bien le terme de « mal-développement » qui s’impose…

Conclusion

Sans souscrire à un discours alarmiste sur les villes des Suds, il faut bien reconnaître qu’elles doivent affronter des problèmes aigus qui paraissent encore peu solubles face aux objectifs de développement durable. Certains sont liés aux héritages de décennies de crois-sance brutale : caractère désordonné de l’éta-lement spatial urbain, pression anarchique exercée sur les ressources (eau, sol, forêts), dysfonctionnement de leurs équipements dans un contexte de pauvreté majoritaire. D’autres sont liés à des dynamiques internes inégalitaires, une mauvaise allocation des richesses nationales, une mauvaise gouver-nance. D’autres enfin se sont aggravés depuis les années 1980 à la suite de la crise de la dette et des politiques d’économies budgé-taires draconiennes dites d ’« ajus tement structurel » qui ont alors été adoptées dans les PVD sous la pression du FMI et de la Banque mondiale.

On l’a vu, les défis les plus difficiles du développement urbain durable dans les PVD ne sont pas des aménagements tech-niques ou sectoriels, mais la mise en place des péréquations territoriales nécessaires à une équité élémentaire : la prise en compte du volet social du développement durable. Ce qui revient à rappeler que la question du développement durable ne relève pas seu-lement d’efficacité technique ou sectorielle, mais pose des questions fondamentales de choix politiques et de régulations, du niveau global aux différentes échelles territoriales.

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▼ Document 2

Évolution de la population des arrondissements et municipalités de la zone métropolitaine de la vallée de Mexico (1995-2000)

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▼ Document 3. Problèmes d’aménagement urbain au Caire

Avec près de 39 000 hab/km² la ville du Caire est l’une des villes les plus denses du monde (Plan Bleu, 2008). Le rejet des formes de cohabitation et voisinage au sein de la ville dense par les classes moyennes et supérieures s’accompagne de l’importation de modèles urbains « anglo-saxons » fondés sur une mobilité individuelle motorisée généralisée.

A. New Cairo, une edge city de promotion privée dans le désert. Un modèle résolument « insoutenable » pour classes moyennes aisées et supérieures…

Le schéma de développement de corridors de développement et de villes nouvelles (new-settlements) intègre un territoire élargi à une trentaine de kilomètres autour de la ville au-delà des limites du grand Caire. La promotion marchande joue un rôle majeur dans la conception de ces périphéries qui mobilisent davantage des préoccupations de spéculation économique que de développement durable.

Ci-dessous New Cairo, situé sur un plateau désertique à l’Est du Caire. Au premier plan, le mur d’enceinte d’un « compound » ou résidence fermée sécurisée très sélective dotée d’un parc d’agrément. L’usage généralisé de la climatisation pallie une architecture « mondialisée » qui n’est pas adaptée aux climats à longue saison chaude.

Photos E. Dorier-Aprill

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Le compound Katameya Heights à New Cairo

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Photo E. Dorier-Aprill

B… Mais aussi une réponse à la vulnérabilité des constructions en zone péri-centraleEn zone populaire péri-centrale du Caire, on rencontre les plus fortes densités urbaines au monde. Le risque d’effondrement est

accru par des extensions verticales hasardeuses des immeubles

Outre le fait que les étages des immeubles présentent une hétérogénéité du bâti qui les fragilise, les surélévations sont occupées par des séries de baraques en location, en dur ou en matériaux de récupération édifiées par les propriétaires des immeubles. Mais le problème du logement est tel dans la ville du Caire que les habitants n’ont guère le choix d’arbitrer entre leurs priorités vitales.

E. Dorier-Apprill

RéférencesFlorin B. « Vivre en parallèle ou à l’écart : l’évolution des villes nouvelles du Grand Caire ». Annales de la recherche urbaine, n° 98,

octobre 2005, p. 97-105 [document en ligne].Capron G. (dir.). Quand la ville se ferme, quartiers résidentiels sécurisés, Paris, Bréal, éd. D’autre part, 287 p.

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▼ Document 4. La course à l’eau à Dakar

La ville a d’abord été alimentée grâce à des nappes phréatiques locales, en particulier celles du cordon dunaire. Mais dès le début des années quatre-vingt, leur surexploitation provoque une inversion de leurs échanges avec la mer, et des intrusions d’eau saline, nécessitant le recours à des ressources exogènes, celles du lac de Guiers, défluent du fleuve Sénégal, raccordé à Dakar par une conduite de 300 km (voir le croquis ci-dessous).

Le lac s’étale sur environ 50 km et sa largeur maximale est de 7 km. Il contient 400 millions de m3 lorsque le plan d’eau est au niveau moyen de 1,25 m. Le Projet sectoriel eau – PSE (1995-2000) a permis d’assurer l’alimentation en eau potable de Dakar jusqu’en 2006, avec un doublement de la conduite d’eau provenant du lac de Guiers, le renforcement de la centrale de Ngnith. Toutefois le dernier projet PELT, (projet sectoriel eau à long terme) ne permettra d’assurer l’alimentation en eau potable de Dakar et de centres urbains intermédiaires que jusqu’en… 2015 grâce à la construction d’une nouvelle usine de traitement à l’extrémité sud du lac de Giers (keur Momar Sarr) dont la capacité sera ensuite doublée (130 000 m3/j). Une augmentation de la capacité de l’amenée est nécessaire. Or, le lac est un espace de pluri-activités. Il fait l’objet d’une double pression croissante avec l’augmentation des prélèvements pour l’agriculture irriguée, et l’alimentation en eau potable de la capitale. Sa population riveraine est estimée à près de 30 000 habitants qui utilisent la ressource en eau : pêche, usages agricoles intensifs (canne à sucre en culture intensive industrielle par la Compagnie sucrière sénégalaise, maraîchage irrigué à vocation marchande en plein essor) et pastoraux (l’activité la plus ancienne, conduite par les bergers Peuls, aujourd’hui mise à l’écart : les couloirs d’accès du bétail aux berges du fleuve se raréfient). Cette utilisation non concertée provoque une altération de la qualité de la ressource : traces de pollution biologique, rejets chimiques (nitrates, pesticides), augmentation de la salinité, développement excessif de la végétation (risque d’eutrophisation). Un plan d’action pour le lac de Guiers est lancé (2008) pour mettre en place une gestion intégrée de la ressource.

E. Dorier-Apprill

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Entre Lagos et Abidjan il regroupe près de 25 millions d’habitants sur une bande lagunaire étroite de 800 km très fragile où les capitales sont implantées moins d’un mètre au-dessus du niveau marin. (Africopolis, 2009). L’occupation de cette mégalopolis afri-caine en émergence est plus extensive mais en très forte croissance démographique. (Denis E., Moriconi-Ebrard F, 2009)

Les ressources des écosystèmes côtiers y sont menacées. Les conflits d’utilisations se multiplient : industrialisation, circulation routière, habitat informel pauvre ou aisé concurrencent brutalement des usages primaires encore vivaces (pêche, agriculture de plantation) dans des milieux humides (lagunes, marais, cordons sableux). (Dorier-Apprill et Domingo, 2004).

Le régime de propriété ou de réglementation des zones côtières ne facilite pas toujours l’intervention publique. L’extraction non maîtrisée du sable marin, ajoutée aux aménagements portuaires, aggrave une érosion côtière qu’on retrouve tout le long du Golfe de Guinée. On attribue souvent les reculs du littoral à la montée du niveau marin… mais les impacts anthropiques jouent un rôle majeur et expliquent une bonne part des vulnérabilités actuelles. Il serait ainsi indispensable d’arrêter les prélèvements anarchiques et intensifs du sable marin côtier destiné à la construction populaire urbaine 1, qui contribuent très fortement à provoquer ou aggraver une érosion côtière destructrice. La régulation est complexe, car ces carrières littorales (partiellement stoppées), absorbent ici le sous-emploi des jeunes, en les détournant de l’agriculture, et fournissent des recettes aux communes rurales qui perçoivent des taxes sur leur exploitation.

E. Dorier-Apprill

1. Le sable marin est perçu comme une ressource renouvelable, inépuisable. Il est moins cher sur le marché local que le sable de rivière ou de carrière. Calcul à court terme, lui aussi, puisque les constructions qui utilisent le sable marin sont aussi beaucoup plus fragiles.

▼ Document 5

Le cordon urbain et périurbain du Golfe de Guinée

▼ extraction De sable près De cotonou

Cliché E. Dorier-Apprill.

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BarceloneAlepTangerAlgerTunisLe CaireIstanbul

2238

134

313

84

920

102

3826

100

382

1263

88

111

4170

1959

470

85

590 5094

3273

38965

Densité de population (hab/km2)

Taux de motorisation (veh/1000 hab)

Densité automobile (veh/km2)

Source : Plan bleu.

▼ Document 6

À Alger une progression « constante » de l’offre de transports… au profit des d’opérateurs spécialisés privés…

Depuis 1963, le transport collectif à Alger était assuré par une en treprise publique unique, sous tutelle du ministère des Transports : la Régie syndicale des transports algérois (RSTA). À partir de 1988, les marchés des transports ont été ouverts à une multitude d’opé-rateurs privés afin de lutter contre le chômage des jeunes. La création de micro-entreprises de transport a été encouragée par l’État au travers de prêts bancaires bonifiés pour l’acquisition de véhicules et d’une exonération fiscale pendant cinq ans.

Après la suppression des subventions qui lui étaient octroyées depuis sa création, l’ex-RSTA devenue l’ETUSA a connu d’impor-tantes difficultés financières, et n’a jamais pu assurer une desserte complète et équitable des différents secteurs de l’agglomération. Dès lors, les défaillances des opérateurs publics sont palliées par les services des 2 787 opérateurs privés qui assurent une desserte plus fine des territoires périphériques : ils répondent ainsi à des besoins de déplacement non satisfaits par le transport institutionnel. Depuis 2001, l’ETUSA a été reprise en main par les pouvoirs publics. Mais la trop lente amélioration de son offre de service s’est répercutée sur l’augmentation des déplacements motorisés en voitures particulières. Le transport urbain par taxi, avec 11 000 taxis individuels et collectifs, a pratiquement remplacé le transport collectif dans l’hypercentre.

Plan Bleu, 2009, La mobilité urbaine dans l’agglomération d’Alger : évolutions et perspectives. Safar Zitoun Madani, Tabti-Talamali Amina.

Voir également la piste pédagogique n° 2.

▼ une comparaison avec D’autres granDes villes méDiterranéennes

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Thème 3. Aménager la ville : villes et développement durable Villes et développement durable dans les pays des Suds

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Au cœur de l’agglomération de Rio de Janeiro (Brésil), la forêt du parc national de Tijuca, avec 3 900 hectares, a été classée en 1991 « Patrimoine de l’Humanité et réserve biologique de la biosphère » par l’Unesco. Sa préservation mobilise tant les préoccupations de la biodiversité que celles du tourisme : c’est l’un des sites les plus visités de Rio, et elle est « vendue » par les opérateurs comme « la plus grande forêt intra-urbaine du monde ». De leur côté, faute d’habitat social, les habitants pauvres étaient tentés d’investir cet espace pour y bâtir des logements.

La « Floresta da Tijuca » abrite des centaines d’espèces de la faune et de la flore de la forêt Atlantique, végétation originelle du littoral brésilien. L’entretien du parc coûte six millions de reals par an (près de deux millions d’euros) financés à parité par L’Institut brésilien de l’Environnement (Ibama) et la commune. La forêt est menacée, encerclée par quarante-six favelas, dont la Rocinha, la plus grande de Rio avec 150 000 habitants. L’une des tâches les plus ardues pour ses cinquante gardes est le contrôle des pressions diverses dues à l’expansion de ces favelas. À cet effet, l’Ibama et la Banque Interaméricaine de développement (BID) ont signé en 2005 un contrat de 250 000 dollars qui permettra de créer, en 2006, un système de surveillance télédétecté à partir d’images Landsat à la résolution spatiale de 25 m2, suffisantes pour détecter des campements de braconniers par exemple. Le programme de surveillance permettra aussi d’étudier avec précision les menaces sur l’environnement et l’état de la faune et la flore. (Extrait de Amat J.-P., 2000)

Dans le cas de Rio, le gouvernement brésilien a pris conscience que protéger la forêt des extensions de favelas ne peut résoudre les problèmes sociaux. En 2005, le secrétaire de l’Environnement du gouvernement brésilien indique que le programme de préservation de la Floresta da Tijuca doit aller de pair avec une politique de construction de logements sociaux car il en manquait 400 000 à Rio et 8 millions dans le pays… Plusieurs agences d’écotourisme dit « éthique » proposent désormais d’associer la visite de la Floresta avec celle de la favela de Rocinha : visite d’écoles, dons aux organisations communautaires, et vue panoramique sur Rio… façon de proposer un tourisme urbain équitable, ou de donner bonne conscience aux visiteurs ?

Voir http://www.favelatourismworkshop.com/

Le même genre d’initiative existe dans d’autres bidonvilles du monde, par exemple Kliptown à Soweto…

E. Dorier-Apprill

▼ Document 7.

La préservation de l’environnement, source de conflits intra-urbains. Exemple de Rio

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41. Piste pédagogique 1 – Exploiter et confronter des informations sur une grande métropole, Istanbul

Piste pédagogique 1Exploiter et confronter des informations sur une grande métropole, Istanbul

ÎProblématique d’ensemble•« Croissance urbaine, étalement urbain, inégalités socio-spatiales »•« Aménager des villes durables ? »

ÎCapacités travaillées• Identifi er des documents.•Prélever et confronter des informations selon des approches spécifi ques en fonction du document ou du corpus documentaire.

ÎPrésentation de l’activitéLes élèves sont amenés à réfl échir sur le phénomène de croissance des mégapoles et d’étalement urbain des pays du Sud à travers l’étude d’une métropole-mégapole : Istanbul.La démarche s’effectue en deux temps.•Premièrement, les élèves relèvent et croisent des informations tirées de deux documents de nature différente afi n de repérer l’urbanisation informelle des périphéries d’Istanbul et les défi s pour le xxie siècle.•Puis, ils analysent une des solutions proposées afi n de répondre aux problèmes de l’étalement urbain : un projet d’écoquartier dans le quartier d’Atasehir, rive asiatique d’Istanbul, cherchant à prendre en compte un aménagement dense de l’espace, une mixité d’usage et un respect de l’environnement (quartier sans voitures).A noter qu’il est possible pour l’enseignant de prolonger sa réfl exion sur Istanbul en consultant deux vidéos du géo-graphe Jean-François Pérouse :Les projets urbains d’Istanbul 2010 : http://www.ifea-istanbul.net/website_2/index.php?option=com_content&view=article&id=765%3A24052010-perouse&catid=61%3A2010&Itemid=131&lang=frLa gestion du grand Istanbul : http://www.ifea-istanbul.net/website_2/index.php?option=com_content&view=article&id=649%3A08042010-seminaire-ovipot-perouse&catid=61%3A2010&Itemid=131&lang=fr

ÎDocuments supportsDocument 1. Les quartiers d’Istanbul : article de la romancière turque Sedef Ecer (du début à « en protégeant leur bouche et leur nez avec des écharpes… »).http://remue.net/spip.php?article3854Document 2. Bienvenue à Istanbul ! : article de Jean-François Pérouse sur le site de l’Institut français d’études ana-toliennes (à partir de : « L’emprise urbaine dépasse les 5 000 km2… » jusqu’à la fi n).http://www.bicyclair.eu/cgi-bin/prog/pform.cgi?langue=fr&Mcenter=superarticle_standard&TypeListe=showdoc&IDDocMniv3=44&email=&password=&PRINTMcenter=1 Document 3. Vidéo promotionnelle présentant le projet de l’écoquartier Varyap Meridian à Istanbul.http://www.youtube.com/watch?v=dQ2-hgM1bBoou http://www.dailymotion.com/video/xbp5f3_varyap-meridian-konut-projesi_lifestyle#from=embedDocument 4. Article : « Sur la rive asiatique d’Istanbul, un écoquartier espère donner l’exemple » (Le Monde, 10 octobre 2010).

Démarche

L’activité proposée s’effectue en deux temps :La première étape consiste à défi nir les caractéristiques spatiales et sociales de la métropole économique de la Turquie : Istanbul.La deuxième étape analyse une solution aux problèmes d’urbanisme de cette ville à travers un projet d’écoquartier.

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42. Piste pédagogique 1 – Exploiter et confronter des informations sur une grande métropole, Istanbul

Première étapeÀ l’aide des documents 1 et 2, compléter le tableau ci-dessous en repérant les auteurs, leurs statuts et la nature des deux

documents proposés, et relever les informations caractérisant Istanbul mégapole d’un pays du « Sud », la Turquie. (Les réponses souhaitées figurent en rouge.)

L’association remue.net, née autour du site personnel de l’écrivain François Bon, met en ligne des pages d’informations et de liens sur de nombreux auteurs contemporains et classiques, ainsi que sur les ateliers d’écriture. Concernant l’actualité de la littérature et de l’internet littéraire, le site offre également des chroniques et un weblog d’actualités littéraires.

Article de remue.net Production de J.-F. Pérouse

Statut de l’auteurNature du document

Romancière franco turqueBlog

Géographe, spécialiste d’IstanbulProduction scientifique

Dans les métropoles-mégapoles des pays en développement :

Constat Constat Défis

Phénomène d’étalement de la villeFacteur externe :Facteur interne :

Quartiers tentaculaires

Exode ruralRecherche d’un terrain disponible

5 000 km2 Limiter l’étalement urbain

Contrastes sociaux accusés :à travers

L’environnement

L’habitat

Les équipements

Pauvres/riches

Vue sur déchets/vue sur mer

Gecekondu (urbanisation informelle avec recherche de confort : terrasse, eau courante, radiateurs, étages supérieurs) immeubles luxueux

Absent (usage du charbon)/gaz

Précarité massive/richesse ostentatoire

complexes résiden-tiels fermés

Intégrer une part importante de la population sans droit

Espace à risque Pollutions multiples (de l’air, déchets…) Tremblement de terreAccroissement du trafic

Construction antisismique

Dynamiques récentes Construction de tours (habitat collectif) Développement des transports

Limiter le trafic automobile

L’analyse de ces deux auteurs est-elle complémentaire, contraire ou compatible ?Deux auteurs dont l’analyse, sous forme différente, apparaît à la fois compatible et complémentaire.

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43. Piste pédagogique 1 – Exploiter et confronter des informations sur une grande métropole, Istanbul

Deuxième étapeCompléter le tableau ci-dessous en croisant les informations des documents 3 et 4.Ces deux documents, de nature différente, proposent une solution au constat effectué en première étape. (Les réponses

attendues figurent en rouge.)

Statut du document Doc 3 : vidéo promotionnelle turque (muette)

Doc 4 : article de vulgarisation d’un quotidien français : Le Monde

Espace concerné Le quartier d’Atasehir, rive asiatique d’Istanbul

Quelques critères d’un écoquartier :

Réduire la consommation d’énergie (eau, combustible, émission de CO2)

Nombreuses parois de verre pour les toursAbsence de circulation automobile

Panneaux solaires, éolienne, récupération des eaux de pluieMatériaux de construction de proximité (bâtiments HQE)

Porter attention au cadre de vie Espaces verts nombreuxFontaine, miroir d’eau…

Zone verte de 37 hectares, respectueuse de la topographie (« espaces naturels »)Oasis verteRespect des spécificités de la ville (culture, patrimoine)Rehausser les standards de construction locale

Favoriser la circulation douce Piétons, cyclistes, absence de transports individuels ou collectifs motorisés

Rassembler les fonctions urbaines sur un même espace

Habitat (concentration verticale), hôtel, loisirs visibles.

1500 logementsHôtel 5 étoilesCentre d’affairesInstallations sportives et commercialesNouveau centre d’affaires.

Favoriser la mixité sociale (coha-bitation de catégories sociales différentes)

Nombreuses esplanades favorisant les rencontres. Population virtuelle ?

? pas d’information sur une volonté de mixité sociale

Ce futur quartier d’Istanbul est-il un espace intégré à d’autres échelles ? Peut-il être une solution à l’étalement urbain ou une enclave pour privilégiés ?

Intégration à plus petite échelle grâce à l’autoroute reliant Istanbul à la capitale turque : Ankara et à l’aéroport. Espace « oasis », parmi un monde d’immeubles, acteurs étatique ou économiques (compagnie de bâtiments et travaux publics turque, banques) mais non mention de la population stambouliote, concentration verticale et activités économiques pour un public élitiste ?

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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44. Piste pédagogique 2 – Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilité à Alger

Piste pédagogique 2Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilitéà Alger

ÎProblématique d’ensemble•« Transports et mobilité »

ÎCapacités et méthodes travaillées•Exploiter et confronter des informations.•Décrire et mettre en récit une situation géographique.

ÎPrésentation de l’activité• Il s’agit d’étudier les enjeux de la mobilité dans une grande agglomération d’un pays du Sud, Alger.Elle se déroule en deux temps : d’abord les élèves sélectionnent dans différents documents les faits nécessaires à la construction de leur argumentation, ensuite, ils classent ces arguments afi n de pouvoir rédiger une rédaction (ou récit géographique) structurée répondant au sujet.•Ce travail peut être conçu comme une partie d’une étude de cas, donnant lieu à un prolongement sous forme d’un travail à la maison ou comme exercice méthodologique destiné à préparer un certain type d’évaluation.

ÎDocuments supportsDocument 1. Évolution de la population dans l’aire urbaine d’Alger de 1966 à 2008.Document 2. Évolution de l’offre de transport à Alger.Document 3. Évolution de la densité de population et de la densité des emplois à Alger.Document 4. Évolution des modes de déplacement (texte).Document 5. L’habitat dans la wilaya d’Alger.Pour plus d’informations, consulter :www.planbleu.org/publications/Synthese_moburb_Damas_FR.pdfhttp://www.planbleu.org/publications/Mobilite_urbaine/Mob_Urb_Alger_rapport2009.pdf

Démarche

Premier temps – Sélectionner les arguments dans les cinq documents proposésLes élèves doivent répondre aux questions proposées pour chaque document en sélectionnant les informations pertinentes et

en les reformulant par des mots clés afi n de répondre au sujet sur « Les enjeux de la mobilité urbaine à Alger ».Pour gagner du temps, l’enseignant peut répartir les documents entre différents groupes puis réaliser une mise en commun.

Les documents sont présentés dans un ordre volontairement aléatoire.Document 1. Comment évolue l’offre totale de transport à Alger depuis 1995 ?D’après le document précédent, comment l’expliquez-vous ?Comment évoluent respectivement l’offre publique et l’offre privée de transport ?Quelle conséquence cela peut-il avoir sur la gestion et le fi nancement des transports à Alger ?Document 3. Comment évolue la densité de population entre le centre et les couronnes de 1987 à 2004 ?Dans quelles zones sont surtout situés les emplois ?Quel lien existe-t-il entre la localisation des densités de population et celle des emplois dans l’agglomération algéroise ?Quelles conséquences cette hyperconcentration au centre a-t-elle sur les migrations pendulaires ?Document 4. Comment caractériser le taux d’équipement des ménages en véhicules particuliers à Alger ?Quel pourcentage représente la voiture particulière dans les déplacements en 2004 ?Quelle est la crainte des services publics pour les années à venir ?

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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45. Piste pédagogique 2 – Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilité à Alger

Quelles sont les mesures prises par les pouvoirs publics pour limiter l’impact de la croissance du parc automobile ?Quel est le principal mode de déplacement à Alger que ce soit en 1990 ou 2004 ?Quel mode de transport motorisé a le plus augmenté sur cette période ?Quels sont les autres modes de transport motorisés utilisés ? Quelle réalité la politique de transport de la ville doit-elle alors

prendre en compte ?Document 5. Quel type d’habitat trouve-t-on dans le centre ?Quel type d’habitat trouve-t-on en périphérie ? Quelle conséquence ce type d’habitat a-t-il sur l’étalement urbain ?Pourquoi ce type d’habitat renforce-t-il les problèmes d’accessibilité au centre ?D’après les pourcentages indiqués, à quel problème se heurtent les politiques d’aménagement urbain ?Combien de communes dénombre-t-on entre Alger et ses deux couronnes ?Qu’est-ce que la wilaya d’Alger ?Quelle conséquence cette multiplicité d’acteurs a-t-elle sur la politique d’aménagement urbain ?

Deuxième temps : organisation des arguments, rédaction du récit géographique•1. Classer les arguments qui viennent d’être relevés dans les différentes colonnes du tableau suivant. (Le professeur propose

les trois thèmes correspondant aux trois colonnes.) (Les réponses souhaitées figurent en rouge.)

Des problèmes d’accès pour tous : le souci de l’accessibilité

Des acteurs multiples : les problèmes de gouvernance

La nécessité de modes de transport complémentaires :

vers la multimodalité

– La population augmente de façon importante et régu-lière depuis 1960.– Pour 2030, les perspectives montrent que la popula-tion aura atteint les 5 millions d’habitants.– 3 millions d’habitants en 2008.– La population baisse dans l’hypercentre, est stable dans le centre et augmente dans les couronnes périphériques.– Alger correspond à une aire urbaine de plus en plus grande, composée d’un centre-ville et de deux couronnes. La ville s’étale de plus en plus vers le Sud et l’Est de l’agglomération pour la première couronne, vers le Sud et l’Ouest et l’Est pour la deuxième couronne.– On trouve surtout des habitats collectifs dans le centre.– On trouve surtout des habitats individuels dans les couronnes, habitats qui consomment beaucoup d’espace donc qui accentuent l’étalement urbain. Il faut donc que le réseau de transport accompagne cet étalement en couvrant une zone toujours plus vaste et éloignée du centre.– Les fortes densités de population coïncident avec les fortes densités d’emplois.Les zones les plus denses pour l’emploi et les habitants correspondent au centre et à l’hyper centre-ville d’Alger.– L’évolution des densités entre le centre et les couronnes montre que les migrations pendulaires vont augmenter encore.– Les politiques de transport doivent en plus prendre en compte dans leurs perspectives une proportion importante d’habitat illicite qui gonflera les besoins en transport.

– Les offres publiques et privées ont augmenté mais dans une proportion beaucoup plus impor-tante pour l’offre privée surtout entre 1995 et 2000.– Le financement et la gestion des transports à Alger doivent donc se faire en concertation entre différents partenaires publics et privés.– On peut décompter 51 communes.– La wilaya, collectivité publique territoriale équivalente à un dépar-tement en France.– Il faut réussir à mettre d’accord 51 acteurs communaux, qui n’ont pas les mêmes besoins en transports.

– Le taux d’équipement en véhicules particuliers est faible, il concerne surtout les habitants aisés de la périphérie.– La voiture représente 2,8 % des déplacements en 2004.– La crainte des pouvoirs publics est l’augmentation du parc automobile qui pourrait accroître la pollution.– Les pouvoirs publics encou-ragent l’utilisation de véhicules fonctionnant au GPL.– La marche à pied reste le princi-pal moyen de transport à Alger.– Ce sont les transports collec-tifs : bus et trains qui ont le plus augmenté sur cette période.– Les Algérois utilisent aussi le taxi.– La politique de transport de l’agglo mé ra tion d’Alger doit prendre en compte la diversité des modes de transport bus, train, taxi, voiture particulière et marche à pied.

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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46. Piste pédagogique 2 – Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilité à Alger

•2. Formuler les arguments de chaque partie en commençant par l’idée la plus importante. Développer l’argumentation en utilisant les exemples pris dans les documents.

Arguments : Exemples repris dans les documents pour illustrer l’argument

1. Des problèmes d’accès…

– Une demande croissante en transport depuis 1960 et qui va s’accentuer avec la croissance du nombre d’habitants.

– La population augmente de façon importante et régulière depuis 1960 : 3 millions habitants aujourd’hui. En 2030, la popu-lation aura atteint les 5 millions d’habitants.

– Une ville qui s’étale de plus en plus et qui augmente la taille de l’espace à desservir par les réseaux de transport.

– Alger correspond à une aire urbaine de plus en plus grande, composée d’un centre-ville et de deux couronnes périphériques. La ville s’étale de plus en plus vers le Sud et l’Est et dans une moindre mesure vers l’Ouest.– La population baisse dans l’hypercentre, est stable dans le centre et augmente à la périphérie.– On trouve surtout un habitat individuel à la périphérie, habitat qui consomme beaucoup d’espace, donc qui accentue l’éta-lement urbain.

– La majorité des emplois se trouvent dans le centre-ville, il en découle de fortes migrations pendulaires qui convergent vers le centre.

– Les zones les plus denses pour l’emploi et les habitants cor-respondent au centre et à l’hyper centre-ville d’Alger.– L’évolution des densités entre le centre et les couronnes montre que les migrations pendulaires vont augmenter encore.– Les politiques de transport doivent en plus prendre en compte dans leurs perspectives d’une proportion importante d’habitat illicite qui gonflera les besoins en transport.

2. Accentués par des problèmes de gouvernance

– Une multiplicité d’acteurs à toutes les échelles : l’État, la wilaya, les communes.

– 51 communes visibles sur la carte + la wilaya, collectivité publique territoriale (département).Il faut réussir à mettre d’accord de très nombreux acteurs qui n’ont pas les mêmes besoins.

– La gestion des transports est assurée par des sociétés publiques et par des sociétés privées, surtout depuis 1995 au moment où l’État a libéralisé les transports.

– Le financement et la gestion des transports à Alger doivent donc se faire en concertation entre différents partenaires publics et privés.– Les offres publiques et privées ont augmenté mais avec une proportion beaucoup plus importante pour l’offre privée surtout entre 1995 et 2000.

3. …Gouvernance qui doit prendre en compte la spécificité des transports à Alger

– Des modes de déplacement spécifiques à cette ville. – Les habitants ont plus de véhicules particuliers à Alger que dans le reste du pays.– La marche à pied reste le principal moyen de transport à Alger.

– Le véhicule individuel, encore peu développé, n’est pas for-cément la meilleure solution.

– Le taux d’équipement en véhicules particuliers est faible, il concerne surtout les habitants aisés de la périphérie.– La voiture représente 12,8 % des déplacements en 2004.– La crainte des pouvoirs publics est l’augmentation du parc automobile qui pourrait accroître la pollution.– Les pouvoirs publics encouragent l’utilisation de véhicules fonctionnant au GPL.

– Beaucoup de modes différents de transports : certains indivi-duels, d’autres collectifs.

– Ce sont les transports collectifs : bus et trains qui ont le plus augmenté sur cette période.– Les Algérois utilisent aussi le taxi.– La politique de transport de l’agglomération d’Alger doit prendre en compte la diversité des modes de transport bus, train, taxi, voiture particulière, marche à pied et les deux roues (encore très peu présents).

•3. En s’appuyant sur le tableau précédent, rédiger un récit géographique répondant au sujet « Les enjeux de la mobilité urbaine à Alger ».

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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▼ Document 1. Évolution de la population dans l’aire urbaine d’Alger de 1966 à 2008. RetourPistepédagogique

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48. Piste pédagogique 2 – Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilité à Alger

▼ Document 3

Évolution de la densité de population et de la densité des emplois à Alger

Densité de population hab/km2 Densité des emplois/km2

1987 2004 1987 2004

Hypercentre 61 000 33 700 11 700 22 800

Centre-ville 17 000 15 900 3 800 4 700

Première couronne 4 700 7 200 800 1 200

Deuxième couronne 1 200 2 600 50 300

Source : M. Safra Zitoun, A. Tabli-Talamali, La mobilité urbaine dans l’agglomération d’Alger, PAM-Plan Bleu, juin 2009.

▼ Document 2

Évolution de l’offre de transport à Alger

Evolution de l’offre de transport collectif à Alger

Sources : Plan Bleu avec données de l’étude de cas Plan Bleu : La mobilité urbaine dansl’agglomération d’Alger : évolutions et perspectives. Safar Zitoun Madani, Tabti-TalamaliAmina (2009).

Offre publiqueOffre privéeTotal

160 000

140 000

120 000

100 000

80 000

60 000

40 000

20 000

0

Places offertes

1995 2000 2005 2010

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Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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49. Piste pédagogique 2 – Mettre en récit une situation géographique à partir de l’exemple de la mobilité à Alger

▼ Document 4. Évolution des modes de déplacement

L’urbanisation périphérique, l’élévation des niveaux de vie, l’allongement des distances de déplacement en raison de l’étalement urbain ont contribué à l’équipement des ménages en voitures particulières.

En 2004, 58 % des ménages algérois ne disposaient pas de véhicules, 36 % possédaient un véhicule et 6 % au moins deux véhicules. Le taux de motorisation des ménages est plus élevé en périphérie que dans les quartiers centraux, notamment pour les catégories sociales élevées.

Outre les effets néfastes qu’elle produit (pollution atmosphérique, congestion de la circulation), l’augmentation des déplacements en voitures particulières à Alger conduit à une progression constante de la consommation de carburants fossiles, peu chers dans ce pays producteur d’hydrocarbures. La consommation de gasoil a doublé entre 2000 et 2008.

Pour infléchir cette tendance à la diésélisation, des mesures ont été prises par les pouvoirs publics en vue d’encourager l’uti-lisation des gaz carburants, en particulier le GPL (conversion de 1000 taxis au GPL, prix attractifs, etc.)

D’après Sylvain Houpin, Mobilité urbaine et développement durable en Méditerranée, PAM, Plan Bleu, Sophia-Antipolis, avril 20104b Évolution des modes de déplacements.

% du total des déplacements 1990 2004

Marche à pied 66,8 55,7

Transport collectif 17,7 28,7

Voiture particulière 13,4 12,8

Taxi 1,9 2,1

Deux roues 0 0,6

Source : M. Safra Zitoun, A. Tabli-Talamali, La mobilité urbaine dans l’agglomération d’Alger, PAM-Plan Bleu, juin 2009.

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50.

▼ Document 5. L’habitat dans la wilaya d’Alger RetourPistepédagogique

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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51. Piste pédagogique 3 – Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemple de la ville d’Auxerre

Piste pédagogique 3Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemplede la ville d’Auxerre

ÎProblématique d’ensemble•« Aménager des villes durables ? »

ÎCapacités travaillées•Organiser et synthétiser des informations dans un schéma.•Développer un discours oral ou écrit construit et argumenté, le confronter à d’autres points de vue.

ÎDocuments supports•Site de la ville d’Auxerre : http://www.auxerre.com/•Site spécifi que dédié au projet : www.quais-yonne.fr

Présentation de l’activité

Les élèves sont invités à présenter et défendre une des trois propositions d’aménagement des quais de la ville d’Auxerre dans le cadre d’un projet d’urbanisation durable. L’activité se décompose en trois temps :

Premier temps, le repérage des acteursL’enseignant pourra mettre en valeur les nouvelles pratiques de « gouvernement » des villes à travers la bonne gouvernance qui

préconise une gestion publique transparente et une incitation à une implication active des citoyens dans le processus de décision.

Deuxième temps, l’état des lieuxDepuis la fi n du xixe siècle, les villes se sont désintéressées de leur cours d’eau, sauf pour s’en protéger. Désormais elles

cherchent à les intégrer, dans l’aménagement urbain en réaménageant les fronts fl uviaux, perçus dès lors comme éléments du patrimoine et reconstruction d’une identité urbaine.

Troisième temps, les projets et le débatIl sera possible de diviser la classe en équipes, travaillant sur un des projets. On débouche sur trois brefs exposés suivis d’un

débat qui permettent de travailler sur la compétence « développer un discours oral construit et argumenté ». L’objectif est de rendre concret la nécessité d’effectuer des choix conformes aux exigences d’un développement durable.

Démarche

Dans un premier temps, pour repérer les acteurs et la fi nalité du projet.Consulter le site : http://www.auxerre.com/Sélectionner à droite la rubrique : « Auxerre magazine », télécharger le numéro d’octobre et lire la page 3, puis la rubrique, « le

réaménagement des quais de l’Yonne », pages 8-9.Les élèves peuvent répondre d’abord à quelques questions de repérage.•Qui est à l’origine du projet ? La commune d’Auxerre.•Quelle est la fi nalité du projet pour la ville d’Auxerre ? Intégrer l’Yonne à l’espace urbain.•Quel est le dispositif prévu pour l’information et la participation de la population concernée par le projet ? Site internet,

plaquette, forum.•Existe-t-il une ou des solutions ? (se rendre à la rubrique « demain ») Trois projets sont proposés.•À quelle échelle, le projet est-il envisagé ? micro-local

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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52. Piste pédagogique 3 – Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemple de la ville d’Auxerre

•Qui peut participer ? (aller voir la rubrique à gauche : « aujourd’hui », la page « appel à idées ») tout individu ou collectivité concernés par le projet.

•Quels sont selon vous, les principaux avantages de la démarche ? Dialogue entre élus et électeurs, débat, possibilité de modifier le projet, capacité à rendre concret le développement durable.

Dans un deuxième temps, effectuer l’état des lieux.À partir du site www.quais-yonne.fr, rubrique « Aujourd’hui », repérer les questions soulevées et le constat effectué par la collec-

tivité locale concernant les quais de l’Yonne. Synthétiser les difficultés actuelles de cet espace au cœur de la ville, en complétant le schéma ci-dessous s’appuyant sur les 3 piliers du développement durable (ou 4 si l’on prend aussi en compte la dimension culturelle).

Pilier économique

Activités économiquesréduites

Pilier social

Contraintes de circulationet de stationnement

Pratiques ludiques discontinueset limitées !

Pilierenvironnement

Rivière dissociée de la villepar des axes de circulation

Participation citoyenne

Culture : panorama exceptionnel et patrimoine historique peu mis en valeur

Rubrique à consulter

Appel à idées

Voirie et circulation

Les acteurs du projet

Circulation douce

Usages et activités

Activitéséconomiques

Espaces verts

Rubrique à consulterRubriques à consulter

Bilan

Rubrique à consulter

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53. Piste pédagogique 3 – Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemple de la ville d’Auxerre

Dans un troisième temps, défendre un des trois projets de réaménagement des quais de la ville d’Auxerre.Pour cela, repérer les points forts du projet sélectionné ainsi que ses faiblesses afin de préparer une argumentation lors du

débat. Pour cela, il sera nécessaire de consulter le projet proposé par l’équipe municipale, puis de lire les opinions de la population auxerroise, laissées sur le forum.

On pourra retranscrire les réponses, en construisant le schéma précédent revisité par les propositions auxerroises. Des questions indicatives sont mentionnées afin de guider le travail.

Pilier environnement

Pilier social

En quoi le projet améliore-t-illes conditions de la vie dela population ?Comment le projet améliore-t-ill’attractivité du territoire ?

Quels sont les impacts du projetsur l’environnement ?En lien avec la consommationdes ressources naturellesEn lien avec la production de déchetset de polluants (bruit)En lien avec les émissions degaz à effet de serre

Pilier économique

Quel secteur d’activités estconcerné par le projet ?Quelles sont les retombéeséconomiques du projetsur le territoire ?Quelles sont les charges nouvellesengendrées par le projet ?

Participation citoyenne

Culture : en quoi le projet favorise-t-il le maintien de l’identité culturelle ?

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Pilier socialPilier économie

Pilier environnement

Pilier social

Pilierenvironnement

Pilier économie

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54. Piste pédagogique 3 – Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemple de la ville d’Auxerre

Le projet sélectionné et étudié accorde-t-il une priorité à un des piliers du développement durable ou évite-t-il tout déséquilibre ? Projet 1 priorité à l’environnement, Projet 2 priorité au pilier société, Projet 3 priorité au pilier économie.

▼ la solution socio centrée accorDe la priorité au pilier société

▼ la solution écolo centrée met en avant le pilier environnement

Specimen offert avec l’aide de la Casden. FOREDD 2011

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Pilier économie

Pilier social

Pilierenvironnement

Pilierenvironnement

Pilier économiePilier social

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55. Piste pédagogique 3 – Développer un discours oral construit et argumenté à partir de l’exemple de la ville d’Auxerre

▼ la solution économico centrée favorise le pilier économique

▼ solution équicentrée recherche un équilibre entre les 3 piliers

Pour terminer, les élèves présentent le projet étudié, en exploitant un schéma, tout en ayant la possibilité de reprendre une des illustrations proposées par le site de la ville d’Auxerre.

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