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Forum Forêt-Faune - UQACbibvir2.uqac.ca/archivage/12769167.pdf · Nathalie Perron, biol. M. Sc. ... Ph.D. Consortium de ... Chapitre 17. Fo r ê t - Fa u n e:m a riage d’amour

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Dépôt légal 2001Bibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du Canada

ISBN 2-9807036-0-5

© 2001 Forum Forêt-Faune

Forum Forêt-FauneDépartement des sciences fondamentalesUniversité du Québec à Chicoutimi555, boulevard de l’UniversitéChicoutimi (Québec) G7H 2B1Téléphone : (418) 545-5011, poste 5084Télécopieur : (418) 545-5012Courriel : [email protected] internet : http://ForumForetFaune.qc.ca

Le présent document doit être cité de la façon suivante :

Perron, N., M. Plante et C. D u s s a u l t . 2 0 0 1 . Tout un monde à connaître!Actes du 2i è m e Fo rum Fo r ê t - Fa u n e, Jonquière, 10-11 novembre 1999.Fo rum Fo r ê t - Fa u n e, Chicoutimi, 260 p.

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Forum Forêt-Faune

Tout un monde à connaître !Actes du 2ième Forum Forêt-Faune

Conférences et table rondesur l’intégration des activités forestières et fauniques

Centre des congrès – Holiday Inn SaguenayJonquière, 10-11 novembre 1999

Sous la direction de

Nathalie Perron, biol. M. Sc.Association des biologistes du Québec

et

Marc Plante, ing. f.Ministère des Ressources naturelles – Forêt Québec

et

Claude Dussault, biol. M. Sc.Société de la faune et des parcs du Québec

Juin 2001

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- Remerciements -

Nous tenons à remercier monsieur Jacques Brassard, ministredes Ressources naturelles du Québec et monsieur GuyChevrette, ministre responsable de la Société de la faune et desparcs du Québec pour leur contribution financière à la publicationdes Actes du 2ième Forum Forêt-Faune. Nous remercions égale-ment madame Jocelyne Girard-Bujold, députée de Jonquière etporte-parole du Bloc Québécois en matière d’Environnementpour son soutien logistique lors de l’élaboration de ce volume.

- Comité organisateur -L’équipe du Fo rum Fo r ê t - Faune 1999 était fo rmée despersonnes-ressources suivantes :

NATHALIE PERRON, biol. M. Sc.Association des biologistes du Québec

MARC PLANTE, ing. f.Ministère des Ressources naturelles - Forêt Québec

CLAUDE DUSSAULT, biol. M. Sc.Société de la faune et des parcs du Québec

DAMIEN CÔTÉ, biol.Ministère des Ressources naturelles - Forêt Québec

GILLES H. LEMIEUX, géogr. Ph. D.Consortium de recherche sur la forêt boréale commerciale

YVES MARCHAND, biol.Cégep de St-Félicien

CAROLINE GIRARD, biol.MARIE-ÈVE LESSARD, étudiante en biologie

SONIA SIMARD, étudiante en biologieDANIELLE BOURBONNAIS, étudiante en biologie

Université du Québec à Chicoutimi

Note : Les auteurs demeurent responsables de leurs opinions et cela n’engageen rien le Forum Forêt-Faune.

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- Table des matières -Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5Comité organisateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5Mot du ministre des Ressources naturelles . . . . . . . . . . . . . .13Mot du ministre responsable de la Faune et des Parcs . . . . .15Mot de la députée de Jonquière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17

- Partie 1 -Allocutions d’ouverture

Jean-Francois MOREAU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .21Nathalie PERRON . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .23Marc PLANTE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .25

- Partie II -Impacts sur la faune

Chapitre 1. Portrait du territoire québécois:utilisations forestièreset fauniques, par Gilles H. LEMIEUX . . . . . . . . . . . . . .29

Chapitre 2. L’exploitation forestière et la faune terrestre en forêtboréale: vers une meilleure compatibilité, par FrançoisPOTVIN. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .37

Chapitre 3. L’éclaircie précommerciale, un traitement qui inquiète,par Judith COURTOIS, Hugues SANSREGRET et LouisBÉLANGER. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .47

Chapitre 4.Impact des pratiques forestières sur l’hydrologie des coursd’eau, par André P. P L A M O N D O N, François G U I L L E M E T T E,Denis L É V E S QU E et Louis P R É VO S T . . . . . . . . . . . . . . .5 7

Chapitre 5. Impact des feux et des coupes forestières dans leslacs du bouclier laurentien, par Pierre MAGNAN, RichardCARIGNAN, Jacob KALFF, Bernadette PINEL-ALLOUL etDolors PLANAS. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .63

Chapitre 6. Conservation des communautés d’oiseaux et protec-tion du milieu ri ve rain en forêt boréale, par MarcelDARVEAU, Louis BÉLANGER, Jean HUOT et MarylèneBOULET . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .73

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Chapitre 7. Les brûlis récents, la récupération des arbres mortset leurs conséquences sur la biodiversité, par PierreDRAPEAU. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .83

- Partie III -Mise en oeuvre

Chapitre 8. Processus élargi de planification de l’aménagementforestier, par Marian FOURNIER . . . . . . . . . . . . . . . .101

Chapitre 9. Les modèles d’indice de qualité de l’habitat : un outild’évaluation des habitats fauniques à l’échelle régionale,par Pierre BLANCHETTE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .109

Chapitre 10. Comment élaborer une stratégie de dispersion descoupes à l’échelle du paysage en forêt boréale?, parNathalie PERRON et Louis BÉLANGER. . . . . . . . . . .117

Chapitre 11. Intégration des préoccupations autochtones dansl’aménagement forestier, par Susanne HILTON . . . . .127

Chapitre 12. Le rôle des aires protégées et l’importance de leurbonne gestion, par Gilles SEUTIN . . . . . . . . . . . . . . .135

Chapitre 13. Le patrimoine naturel: notre responsabilité éthiqueet sociale, par Marcel J. MÉLANÇON. . . . . . . . . . . . .145

Chapitre 14. La mise en œuvre de la gestion intégr é e :le cas de laPo u rvo i rie des Laurentides, par André S T- P I E R R E . . . .153

Chapitre 15. La gestion de l’habitat forestier au Nouveau-Brunswick, par Dan BEAUDETTE et Luc GAGNON . .159

- Partie IV -Table ronde

Chapitre 16. Mise en contexte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .171

Chapitre 17. Fo r ê t - Fa u n e : m a riage d’amour ou de ra i s o n ? . .1 7 3

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- Partie V -Résumé des présentations par affiche

Caractérisation et sélection d’habitats chez la tortue des bois(C l e m mys insculpta), par Martin A RV I S A I S, EstherLÉVESQUE et Jean-Claude BOURGEOIS. . . . . . . . .209

Programme d’implantation et de restauration des canards arbori-c o l e s, par A S S O C I ATION DES SAU VAGINIERS DUSAGUENAY-LAC-ST-JEAN. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .211

La coupe en mosaïque, un choix chez Alliance, par JacquesBÉLANGER. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .212

Impacts de l’aménagement du territoire sur le mouvement desoiseaux fo r e s t i e r s, par Marc B É L I S L E, André D E S RO C H E R Set Marie-Josée F O RT I N . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2 1 4

La prédation de nids artificiels d’oiseaux le long de routes,rivièreset lacs,dans une sapinière boréale,par Marylène Boulet etMarcel Darveau. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .216

Plan d’aménagement forestier de l’aire du caribou de laGaspésie, par Sylvain Champagne, Hélène Falardeau,Nelson Fo u rn i e r, Jean Lamoureux, Gilles Landry,Jean-Marc Hardy et Alain Viau . . . . . . . . . . . . . . . . .218

Utilisation à court terme des séparateurs de coupes par l’écureuilroux, le grand polatouche et le tamia rayé, par Mathieu C Ô T É,Jean F E R RO N et Martin-Hugues S T- L AU R E N T . . . . . . .2 2 0

Les corridors fo r e s t i e r s, par Sonia D U C H E S N E, Luc B É L A N G E R,Marcelle G R E N I E R et Francine H O N E . . . . . . . . . . . . .2 2 2

Démarche d’élaboration d’indicateurs locaux d’aménagementforestier durable, par Osvaldo VALERIA ECHEGOYEN,Louis BÉLANGER et Jean-Jacques CHEVALIER . . . .224

Transfert de connaissances sur la mise en valeur des habitatsfauniques Juin 1999-juin 2000, par FÉDÉRATION DESPRODUCTEURS DE BOIS DU QUÉBEC . . . . . . . . .226

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Le développement d’un entrepôt de données pour l’étude et la ges-tion de la biodiversité, par André F R A N C O E U R . . . . . .2 2 8

C o m p a raison de l’utilisation de différents types de structures de fo r ê trésiduelle par le tétras du Canada (Falcipennis canadensis) ,par Caroline G I R A R D et Hubert M O R I N . . . . . . . . . . . . .2 3 0

Caractérisation de l’habitat de l’orignal et planification d’interven-tions forestières dans la réserve faunique Port-Cartier -Sept-Îles, par Alain GUITARD et M. FLEURY . . . . . . .231

Impacts à long terme de la fo r e s t e rie sur l’av i faune de nospessières boréales: que peut-on apprendre de l’ex-p é rience scandinave? 1) Des écosystèmes simi-l a i r e s, par Louis I M B E AU, Mikko M Ö N K K Ö N E N e tAndré D E S RO C H E R S. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 3 3

Impacts à long terme de la foresterie sur l’avifaune de nos pes-sières boréales: que peut-on apprendre de l’expériencescandinave? 2) Identification des espèces préoccupantes,par Louis I M B E AU, Mikko M Ö N K K Ö N E N et AndréDESROCHERS. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .235

Doit-on conserver des pessières surannées? Le cas bien partic-u l i e r du pic tri d a c t y l e,par Louis Imbeau et AndréDesrochers. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .237

Recherche et actions en biodiversité, un investissement durable,par Jean-Guy LAFLAMME. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .239

Conséquences des patrons traditionnels de migration sur ladynamique de populations de cerfs de virginie vivant à lalimite nord de leur aire de distribution, par Louis LESAGE,André D U M O N T, Michel C R Ê T E, Jean H U OT e tJean-Pierre OUELLET. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .240

Forêt privée : intégrer la protection et la conservation des habi-tats fauniques dans la réalisation des travaux sylvicolesprivées. Bilan d’un projet pilote mené à la forêt modèle duBas-Saint-Laurent, par Joanne MARCHESSEAULT. . .242

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Programme de lavage périodique des machineries forestières,par Christian MATHIEU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .243

Implication de la Société de la faune et des Parcs en forêt privée,par Magella MORASSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .244

Importance des brûlis pour le pic à dos noir en forêt boréale, parAntoine NAPPI, Pierre DRAPEAU, Jean-François GIROUXet Jean-Pierre SAVARD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .245

L’effet de l’hétérogénéité locale de la végétation sur le choix del’emplacement des territoires de nidification de la parulinebleue (Dendroica caerulescens) et de la paruline couron-née (S e i u rus aurocapillus ), par Véronique S T- L O U I S,Marie-Josée FORTIN et André DESROCHERS . . . . .247

Dynamique spatio-temporelle des cormorandières de la réservede parc national de l’Archipel-de-Mingan, par Ju l i eVALCOURT et Hubert MORIN . . . . . . . . . . . . . . . . . .249

L’obstruction visuelle dans les bandes boisées sur les parterresde coupe en forêt d’épinette noire : implications pour lespaysages et la faune, par Christine VALLIÈRES, MarcelDARVEAU et Jean-Claude RUEL . . . . . . . . . . . . . . . .250

- Partie VI -Allocation de clotûre

Forêt-faune, une union vitale par Réjean GAGNON . . . . . . .255

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- Mot du ministre des Ressources naturelles -

Je veux d’abord féliciter les organisateurs du Forum Forêt-Faunepour le retentissant succès obtenu lors de la deuxième édition dece colloque tenu à l’automne 1999 à Jonquière.

Plus de 450 participants,tous utilisateurs des ressources dumilieu forestier qui discutent entre eux,voilà bien,à mon avis,lemeilleur chemin pour atteindre notre objectif commun en cohab-itation et d’harmonisation.

« La forêt au cœur de nos vies » et, comme vous le soulignez sibien, c’est aussi, « Tout un monde à connaître! ». Conscients decette réalité, il est de notre devoir d’agir ensemble et de pour-suivre nos efforts en vue d’améliorer nos manières de faire leschoses.

J’invite tous les partenaires de tous les milieux à poursuivre danscette voie du dialogue, de la compréhension des enjeux et de lareconnaissance mutuelle de nos intérêts collectifs.

Encore une fois, je vous dis bravo pour cette initiative de concer-tation qu’est le Forum Forêt-Faune et surtout permettez-moi deremercier ceux et celles qui ont contribué à l’enrichissement desdiscussions concernant la cohabitation harmonieuse de tous lesutilisateurs de cette magnifique forêt québécoise.

Jacques BrassardMinistre des Ressources naturelles,

Député de Lac-Saint-Jean

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- Mot du ministre responsable -de la Faune et des Parcs

Je suis très heureux de contribuer à la réussite du Forum Forêt-Faune qui a connu un succès indéniable. Cet événement cons-titue une occasion unique d’échanger sur les enjeux forestiers etfauniques et permet aux divers acteurs d’entreprendre desactions concertées en vue de réaliser des aménagements faune-forêt structurants.

La Société de la faune et des parcs qui vient d’être crééeendosse les objectifs poursuivis par le Forum. Il faut intensifier larecherche concernant l’effet des traitements sylvicoles sur lafaune et ses habitats, mais encore plus important, il faut faireconnaître les résultats de ces recherches. Nous devons égale-ment traduire en actions concrètes ces résultats, c’est pourquoinous participons activement à plusieurs initiatives visant l’appli-cation de la Gestion intégrée des ressources. Finalement, lesutilisateurs des ressources fauniques représentent une clientèleprivilégiée de la Société que nous nous devons de considérerdans nos prises de décision.

Le thème du Forum : « Tout un monde à connaître! » démontreune ouverture vers de nouvelles façons de faire en regard del’aménagement des ressources du milieu forestier. La Société dela faune et des parcs a justement été créée pour développer desapproches novatrices faisant appel aux divers acteurs du milieu.Le Forum fournit une occasion privilégiée pour faire connaîtrenotre point de vue et nous nous en réjouissons.

En terminant, je félicite les organisateurs de ce forum et ne peuxque souhaiter la répétition d’un tel événement.

Guy ChevretteMinistre responsable de la Faune et des Parcs,

Député de Joliette

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- Mot de la députée de Jonquière -

Tant par la participation que par les résultats obtenu s, la deuxièmeédition du Fo rum Fo r ê t - Faune peut être qualifiée d’un gra n ds u c c è s.

Si le premier Forum Forêt-Faune avait démontré la pertinence der é u n i r, pour une première fo i s, tous les utilisateurs desressources fauniques et forestières, l’édition 1999 a réussi l’ex-ploit d’enclencher un processus qui nous permettra de se rap-procher davantage de l’objectif d’une gestion intégrée desressources.

La conciliation des intérêts divergents n’est pas une mince tâchemais tous sont conscients qu’elle est essentielle à la préservationdes ressources. Comme l’on dit : « C’est à se parler que l’on secomprend ». Aussi difficile que cela pouvait paraître au départ,les discussions de ce Forum ont permis de dégager un certainnombre de consensus qui favoriseront la mise en branle d’unepremière série d’actions concertées. De plus, ce Forum a permisde renforcer les mécanismes de communications entre les dif-férents groupes d’utilisateurs, un préalable nécessaire à touteharmonisation.

Tant à titre de députée de Jonquière qu’à celui de porte-parole duBloc Québécois en matière d’Environnement, je suis particulière-ment fière que ce Forum Forêt-Faune soit une initiative d’inter-venants de notre région. En imaginant et en organisant cesforums, les instigateurs ont ouvert de nouvelles portes et nousont permis de découvrir une recette à succès. Le plus gratifiant,c’est que notre patrimoine naturel et l’ensemble de notre collec-tivité québécoise en retireront les bénéfices.

Félicitations à l’organisation et aux participants de cette deuxièmeédition et longue vie à la formule du Forum Forêt-Faune !

Jocelyne Girard-BujoldDéputée de Jonquière

Porte-parole du Bloc Québécoisen matière d’Environnement

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- Partie I -Allocations d’ouverture

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- Jean-François Moreau -Doyen des études de cycles supérieurs et de la recherche

Université du Québec à Chicoutimi

Mesdames et messieurs,

C’est un grand plaisir renouvelé pour moi de venir inaugurer cedeuxième Forum Forêt-Faune puisque j’avais eu ce même plaisirlors du tout premier, il y a deux ans. Le succès de ce dernier estmesurable par la nombreuse assistance qui y participa. À nousvoir tous si nombreux réunis ici, il ne fait aucun doute que cedeuxième colloque sera au moins aussi fructueux.

Le succès, non seulement du premier, mais tout autant du seconddécoule par t i c ulièrement du souci de réunir une multiplicité despécialistes représentant un grand nombre de disciplines.

Ainsi, l’idée majeure à promouvoir pour saisir les problèmes com-plexes auxquels nous faisons face, de façon générale dans notresociété, y compris la question de l’exploitation du milieu naturel,est l’approche que l’on appelait il y a peu de temps multidisci-plinaire et que j’ai tendance de plus en plus à appeler uneapproche interdisciplinaire voire même transdisciplinaire! Votreprésence tout comme le programme témoignent de cetteapproche à large spectre: spécialistes de la faune, d’autres enbiologie, géographes …

En terminant, je voudrais tout particulièrement remercier les trèsnombreux commanditaires privés aussi bien que publics, univer-sitaires, qui ont permis de mettre sur pied ce colloque. J’aimeraisaussi remercier les organisateurs, tout particulièrement la prési-dente du Forum, madame Nathalie Perron. L’organisation d’un telfo rum constitue un énorme trava i l . Je remercie aussi ses collabo-ra t e u r s, en particulier monsieur Marc Plante.

Je vous souhaite donc à toutes et à tous un excellent colloque.Merci.

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- Nathalie Perron -Association des biologistes du Québec

Bienvenue à tous et à toutes !

Je suis extrêmement heureuse de vous retrouver en si grandnombre aujourd’hui pour la deuxième édition du Forum Forêt-Faune. Vous êtes plus de 450 participants à vous être déplacés,provenant de toutes les régions du Québec.

Brièvement, j’aimerais vous expliquer d’où vient le Forum Forêt-Faune. Le premier forum vient d’un constat que Marc Plante etmoi avions fait, chacun de notre bord, parce que à l’époque onne se connaissait pas. En 1996, vous vous souviendrez quenous étions en plein dans le contexte de l’élaboration d’unenorme canadienne en vue d’une foresterie durable. Nous étionsconscients que les problématiques environnementales nécessi-taient de plus en plus l’intervention d’équipes pluridisciplinairespour intégrer l’ensemble des connaissances.Cependant, la réalitéétait tout autre! On se retrouvait bien plus souvent à discuterseulement entre nous, biologistes ou ingénieurs fo r e s t i e r s. J evous le concède c’est bien plus simple de travailler ainsi parceque l’on parle le même langage mais j’ai le regret de vous direque ce n’est pas comme cela que l’on va parvenir à une vérita-ble gestion intégrée des ressources au Québec!

C’est à l’automne 1996, sur un banc d’autobus scolaire, en direc-tion de la Forêt Montmorency, que nous avons décidé de créer unévénement afin de réunir l’ensemble des intervenants du milieuforestier et faunique. De retour au royaume du Saguenay, Marcet moi avons regroupé les principaux intervenants concernés etc’est d’un véritable travail d’équipe, puisque nous étions sixorganisations et maintenant sept, que le Forum Forêt-Faune estné !

Aujourd’hui en 1999, nous partageons toujours les mêmes objec-tifs. Que vous soyez biologiste, ingénieur forestier, étudiant,pourvoyeur, industriel, autochtone ou gestionnaire de zec, vousêtes réunis ici à Jonquière pendant presque deux jours, pouréchanger sur une problématique commune qui est l’intégrationdes préoccupations fauniques dans l’aménagement forestier.

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Vous êtes venus probablement pour mettre à jour vos connais-sances ou pour faire part de votre expérience et c’est très bien.Cependant, nous nous attendons à beaucoup plus de votre part!Je vais laisser le soin à mon collègue Marc Plante de vous expos-er nos attentes.

Dans un autre ordre d’idée, je suis convaincue que plusieursd’entre vous êtes réellement préoccupés par les ruptures destocks de matière ligneuse ou de population animale mais avezvous pensez à une rupture de stock de décideurs? Le comitéorganisateur y a pensé pour vous encore cette année. Le comitéorganisateur a fait une place aux étudiants et ils sont nombreuxaujourd’hui à répondre à l’appel. Ils sont près de 150 à s’êtredéplacés de partout au Québec pour prendre part à ce forum. Jevous demande de faire un effort pour les intégrer eux aussi!

En terminant, l’Association des biologistes du Québec est fièred’être associée à la deuxième édition du Forum Forêt-Faune. Jevous souhaite à tous et à toutes des échanges fructueux lors dece forum.

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- Marc Plante -Ordre des ingénieurs forestiers du Québec

Bonjour à tous,

Comme vous le savez sans doute, le thème de ce deuxièmeforum est « Tout un monde à connaître! ». Ce thème avait unedouble signification pour les membres du comité organisateur.

D’un part, nous voulions mettre en évidence la grande diversitédes intervenants dans le domaine fo r ê t - fa u n e. D ’ a i l l e u r s,regardez autour de vous et vous verrez des gens provenant dedivers paliers de gouvernements, de l’industrie forestière et desorganismes fauniques. Vous verrez aussi plusieurs représen-tants des communautés autochtones du Québec, des chercheurs,des étudiants et bien d’autres encore.

Notre défi n’est pas seulement de vous réunir en grand nombreici aujourd’hui. Nous voulions surtout créer un événement quifavoriserait les échanges entre vous tous. «Tout un monde à con-naître», c’est un peu notre façon de vous dire que le dialogue estle meilleur des outils pour commencer ou pour continuer dans lavoie de la gestion intégrée des ressources du milieu forestier.

D’autre part, le thème du forum fait référence également à lagrande diversité du milieu dans lequel nous intervenons tous.Nous croyons à l’importance d’harmoniser les pra t i q u e sforestières et les préoccupations fauniques. Encore faut-il pourcela bien connaître les effets des interventions forestières sur lafaune et son habitat. Nous espérons que ce forum vous permet-tra de répondre à quelques-unes de vos questions à ce sujet.

Finalement, rappelons que l’Ordre des ingénieurs forestiers duQuébec s’est donné comme mission de veiller à ce que la ges-tion du patrimoine forestier assure la pérennité des ressourcesde la forêt. Pour y arriver, l’Ordre mise, entre autres, sur laprésence d’individus compétents et responsables. En fournissantà ces membres un accès à une formation de qualité, le présentforum s’inscrit parfaitement dans la lignée de sa mission. C’estdonc avec intérêt et fierté que nous nous sommes associéscomme partenaire à la réalisation d’un tel événement.

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- Partie II -Impacts sur la faune

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- Chapitre 1 -PORTRAIT DU TERRITOIRE QUÉBÉCOIS: UTILISATIONS

FORESTIÈRES ET FAUNIQUES

Gilles H. LEMIEUX, géogr. Ph. D.

Université du Québec à Chicoutimi555, boulevard de l’Université Chicoutimi (Québec) G7H 2B1

Résumé

Le Forum Forêt-Faune est l’amorce d’un long processus quidevra nécessairement déboucher sur l’élaboration et la mise enœuvre d’un concept visant à créer des espaces polyvalents auxactivités complémentaires et durables pour les terres publiquesdu Québec. Le projet de stratégie québécoise sur les aires pro-tégées se retrouve à la charnière forêt-faune. Mais il doit s’éten-dre aux autres composantes du milieu naturel, le climat, l’eau, lessols, les formes de terrain et les paysages formant des écosys-tèmes complexes. C’est le grand défi de l’aménagement rationnelet de la gestion intégrée des ressources pour un développementharmonieux et durable.

Le Québec foisonne d’aires géographiques faisant l’objet d’uneprotection particulière (réserves écologiques, parcs, réservesnationales de faune, refuges fauniques, réserves fauniques, airesfauniques communautaires, petits lacs aménagés, pourvoiries,zones d’exploitation contrôlée, habitats fauniques, réserves àcastors, terrains de piégeage, réserves de chasse et de pêche etsanctuaires. C’est au sud du Québec qu’on retrouve la majoritéde ces statuts territoriaux. Plus de 50% de toutes ces aires ontune superficie inférieure à 10 km2 et 95% ont moins de 10 000km2. Le Québec dispose de peu d’aires protégées permettantd’assurer la protection de sa diversité biologique, à l’échelle desgrands écosystèmes et des paysages, surtout dans la forêtb o r é a l e. Citons le ra p p o rt de mars 1999 du ministère del’Environnement:“Les aires protégées constituent désormais unecomposante indissociable de la gestion durable des forêts et, ence sens, la création d’aires protégées est, même aux yeux des

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intervenants dans l’économie forestière, un atout pour la maintiende la vigueur économique actuelle et future du secteur forestierquébécois.”

“La difficulté de créer de vastes aires protégées au Québec tientsurtout à l’incompatibilité des affectations territoriales (exploita-tion forestière, minière, hydroélectrique) avec l’objectif de con-servation. Toutefois, contrairement à de nombreux pays, leQuébec possède deux atouts majeurs pouvant faciliter la créa-tion de vastes aires protégées: 1) la presque totalité (93,6%) duterritoire est de tenure publique et 2) le Québec possède encorede vastes étendues de paysages sauvage dans sa partie septen-trionale.” La table est mise… discutons !

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Ce deuxième Fo rum Fo r ê t - Faune 1999 «Tout un monde à con-naître!» est l’amorce d’un long processus qui dev ra nécessairementdéboucher sur l’élaboration et la mise en œuvre d’un concept visantà créer des espaces polyvalents aux activités complémentaires etd u ra bles pour les terres publiques du Québec. Le projet de stra t é g i equébécoise sur les aires protégées se retrouve à la charn i è r efo r ê t - fa u n e. Mais il doit s’étendre aux autres composantes du milieunaturel, le climat, l’eau, les sols, les fo rmes de terrain et les pay s a g e sfo rmant des écosystèmes complexe s. C’est le grand défi del’aménagement rationnel et de la gestion intégrée des ressourcespour un développement harmonieux et dura ble en cette premièredécade du nouveau millénaire.

Une biodiversité mal protégée

Le Québec foisonne d’aires géographiques faisant l’objet d’uneprotection part i c u l i è r e. Selon la direction des territoires fa u n i q u e s,de la réglementation et des permis du service des territoires fa u-niques du Québec, les territoires ayant un statut particulier oufaisant l’objet d’une protection particulière se gèrent en ve rtu dequatre lois et s’énumèrent comme suit dans le tableau 1.

Tableau 1. Territoires ayant un statut particulier ou de protectionparticulière

Source:Gouvernement du Québec, Faune et Parcs.1999.Territoires ayant un statut particulier ou faisant l’ob-jet d’une protection particulière. Direction des territoires fauniques, de la réglementation et des permis,Service des territoires fauniques, 50 p.

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À en croire ce tableau, plus de 94% de tout le territoire québé-cois, qui s’étend sur 1 667 900 km2, serait protégé. C’est au suddu Québec cependant qu’on retrouve la majorité de ces statutsterritoriaux. Plus de 50% de toutes ces aires ont une superficieinférieure à 10 km2 et 95% ont moins de 10 000 km2. De toutesces surfaces géographiques à statut particulier, le Québec dis-pose de peu d’aires protégées permettant d’assurer la protectionde sa diversité biologique, à l’échelle des grands écosystèmes etdes paysages, surtout dans la forêt boréale.

Tableau 2. Comparaison du Québec avec le reste du monde auplan des aires protégées

Source: Projet de stratégie québécoise sur les aires protégées, N/Réf.:5143-06-14, Ministère de l’environ-nement, Gouvernement du Québec.

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Traditionnellement, le Québec a développé deux importantesactivités de plein air et de tourisme sur ses vastes espaces géo-graphiques: la chasse et la pêche. Pendant longtemps, la fonc-tion gouvernementale qui gérait les activités touristiques dans lest e r ritoires publics du Québec s’est appelé «ministère duTourisme, de la Chasse et de la Pêche». Pendant plusieursdécades, les clubs de chasse et pêche et leurs gardiens ont étéles gestionnaires des territoires consacrés uniquement à la chas-se et à la pêche. Le peuple québécois n’était que très peu sen-sibilisé à la protection des ressources naturelles qui lui apparais-saient par ailleurs inépuisables. La grande forêt du Québec étaitavant tout considérée comme une ressource d’extraction quisemblait assez vaste pour se protéger par elle-même. En 1979,le Québec a emboîté tardivement le pas en créant les premiersvéritables parcs de conservation et de récréation qui valorisaientles autres aspects de la forêt et donnaient accès à la nature àtoutes les couches de la société. Le premier parc canadien deconservation avait déjà vu le jour à Banff en 1885.

Aujourd’hui, c’est près de 1 100 sites naturels qui sont protégésau Québec. Cependant, comme l’indique le tableau 2, l’ensem-ble de ces efforts de conservation et de protection de la biodi-versité, répondant aux critères de l’UICN (Union Internationalepour la Conservation de la Nature) et appuyant l’effort interna-tional visant à créer un vaste réseau d’aires protégées, ne faitque 2,8% du territoire québécois. Cette superficie à l’échellemondiale serait plutôt de l’ordre de 8,8%. Il en résulte une biodi-versité mal protégée puisque d’une part les superficies des airesprotégées sont trop restreintes et d’autre part, leur distributionterritoriale n’est pas assez homogène et représentative de toutel’échelle latitudinale et altitudinale du Québec.

Le tableau 3 fait état du pourcentage des aires protégées auQuébec par zone de végétation. Ces zones s’étendent du bassindu Saint-Laurent au sud jusqu’à la toundra au nord. Les pour-centages révèlent que la zone de la pessière noire occupée parles grandes sociétés d’extraction de la matière ligneuse ainsi queles zones plus fragiles de la taïga et de la toundra sont malreprésentées au plan de la protection des éléments représenta-tifs de leur diversité biologique.

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Tableau 3. Pourcentage des aires protégées au Québec parzone de végétation

Source:Gouvernement du Québec, Faune et Parcs. 1999. Territoires ayant un statut particulier ou faisantl’objet d’une protection particulière. Direction des territoires fauniques, de la réglementation et des permis,Service des territoires fauniques, 50 p.

L’incompatibilité des affectations territoriales

Citons le document préliminaire de support au projet de stratégiequébécoise sur les aires protégées de mars 1999 du ministère del’Environnement: “Les aires protégées constituent désormaisune composante indissociable de la gestion durable des forêts et,en ce sens, la création d’aires protégées est, même aux yeux desintervenants dans l’économie forestière, un atout pour la maintiende la vigueur économique actuelle et future du secteur forestierquébécois.” Quand passerons-nous de la parole aux actes ?Pour l’instant, le seul moyen mis de l’avant par le gouvernementpour générer de l’activité économique à partir des forêts de pes-sière noire du Québec est l’attribution de contrats d’approvision-nements et d’aménagement forestier (CAAF) à des industrielsforestiers qui sont propriétaires d’usines de transformation. Leterritoire est donc concédé à l’unique fin de récolter la matièreligneuse selon des méthodes prévues pour favoriser son renou-vellement éventuel. Les autres usagers de la forêt comme lestouristes d’aventure, les pêcheurs, les chasseurs, les explo-rateurs, les peintres et les poètes sont les invités et n’ont qu’àsuivre les routes tracées par les exploitants. Des normes d’inter-vention visent à assurer le maintien ou la reconstitution du cou-vert forestier, la protection de l’ensemble des ressources dumilieu forestier et la compatibilité de l’aménagement forestieravec les autres activités pratiquées en forêt.

Qu’en est-il en pratique ? La gestion des ressources du milieuforestier opère selon deux cadres, celui de la ressource faunique

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et celui de la ressource ligneuse. Celui de la ressource ligneusea le plus de moye n s, il brandit l’importance économique de sesi n t e rve n t i o n s, il est celui qui rend le territoire accessible audeuxième cadre qui est à la remorque du premier. L’un aune vision à moyen et à court term e, l’autre planifie à longt e rme pour les générations futures. La gestion faunique estnationale et régionale, la gestion ligneuse est multinationale eti n t e rn a t i o n a l e. L’un est qualitatif et récréatif d’apparence, l’autreest quantitatif, industriel, commercial et soutient l’économie sanslaquelle il n’y a point de salut pour le premier.

Le ministère des Ressources naturelles du Québec est responsabl enous dit-on de la gestion et de la mise en valeur du territoire q u é b é-cois et des ressources énergétiques, forestières et minéra l e s. D e sfonctionnaires travaillent pour mieux ex t raire la ressource etd’autres tentent de la protéger.Cet état de choses crée un état con-flictuel au sein même de ce ministère.C’est un autre ministère, celuide l’environnement qui étudie présentement la possibilité d’instau-rer dans la forêt boréale québécoise un réseau d’aires protégées.

On cite encore dans le projet de stratégie québécoise sur lesaires protégées: “La difficulté de créer de vastes aires protégéesau Québec tient surtout à l’incompatibilité des affectations terri-toriales (exploitation forestière, minière, hydroélectrique) avecl’objectif de conservation. Toutefois, contrairement à de nom-breux pays, le Québec possède deux atouts majeurs pouvantfaciliter la création de vastes aires protégées: 1) la presque tota-lité (93,6%) du territoire est de tenure publique et 2) le Québecpossède encore de vastes étendues de paysages sauvages danssa partie septentrionale.”

La nécessité d’augmenter le nombre, la superficie et lareprésentativité des aires protégées

La preuve n’est plus à faire. L’aménagement rationnel et polyva-lent d’un milieu forestier et sa gestion intégrée doivent supporterdes dispositions permettant aussi la non-utilisation de certainesaires. Les aires protégées contribuent à la protection de la bio-diversité, maintiennent des fonctions écologiques essentielles etpermettent la sauvegarde d’échantillons représentatifs ou excep-tionnels d’une région géographique d’un état. Selon le projet dela stratégie québécoise: “en favorisant la conservation, la préser-

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vation, le tourisme, le loisir de plein air et l’éducation au milieunaturel et la sensibilisation à l’environnement, les aires protégéesjouent un rôle considérable dans la réalisation des objectifs dudéveloppement durable… Les aires protégées représentent ettraduisent les valeurs qu’une société attache aux processus etaux objets naturels et culturels. Elles contribuent à la qualité dela vie en protégeant les écosystèmes et en préservant la dive r s i t éb i o l o g i q u e. Enfin, les aires protégées contri buent à l’économie enfavo risant le touri s m e, le commerce et les échanges.

L’ i n d u s t rie forestière est consciente que la forêt québécoise est plusque de la matière ligneuse. L’ i n d u s t rie veut s’engager à déve l o p p e rdes part e n a riats avec les autres utilisateurs de la forêt afin de main-tenir la biodiversité du milieu fo r e s t i e r. S e rait-elle prête à aidera d m i n i s t ra t i vement, techniquement et financièrement à créer desaires protégées à travers ce si vaste territoire qu’elle occupe ?

La table est mise. Discutons!

Références

G o u ve rnement du Québec, Faune et Pa r c s. 1 9 9 9 . Te r ritoires aya n tun statut particulier ou faisant l’objet d’une protection part i -c u l i è r e. Direction des territoires fa u n i q u e s, de la réglem e n t a-tion et des perm i s, Service des territoires fa u n i q u e s, 50 p.

G o u ve rnement du Québec, Conservation et Pa t ri m o i n eécologique, ministère de l’Environnement. 1999. Airesprotégées au Québec: c o n t ex t e, constats et enjeux.Document préliminaire de support au projet de stratégiequébécoise sur les aires protégées, version du 18 mars1999, 57 p. (3 annexes)

G o u ve rnement du Québec, ministère des Ressources naturelles.1 9 9 9 . Guide de l’utilisateur des ressources du milieufo r e s t i e r. En col l a b o ration avec la Fondation de la faune duQ u é b e c, l’Association des manu fa c t u riers de bois de sciagedu Québec et la Fédération québécoise de la fa u n e, 31 p.

Gouvernement du Québec, ministère des Ressources naturelles.1997. Les forêts du Québec. 8 p. (annexes)

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- Chapitre 2 -L’EXPLOITATION FORESTIÈRE ET LA FAUNE TERRESTRE

EN FORÊT BORÉALE:VERS UNE MEILLEURECOMPATIBILITÉ

François POTVIN, ing. f., biol., Ph.D.

Société de la Faune et des Parcs du Québec675, boul. René-Lévesque Est, 11e étage

Québec (Québec) G1R 5V7

Résumé

La faune représente un des enjeux majeurs dans le vigoureuxdébat qui a cours sur l’exploitation forestière en forêt boréale.Des travaux de recherche récents et les développements de lagestion intégrée permettent d’envisager des solutions pouratteindre une meilleure compatibilité. Cette présentation dressed’abord le portrait de la faune terrestre au Québec, en termesd’habitat et d’effets de la coupe, et décrit les besoins des utilisa-teurs (chasseurs, trappeurs, pourvoyeurs). Après une perturba-tion majeure, la communauté des espèces fauniques change toutau long des stades de développement de la forêt. Par ailleurs,les domaines vitaux des espèces varient de moins d’un hectare(petits mammifères) à plusieurs dizaines de kilomètres carrés(orignal). La coupe a donc des effets fort différents selon legroupe d’espèces. Les petits mammifères demeurent présentsaprès CPRS (souris sylvestre, campagnol à dos roux) ou peuventsubsister dans les séparateurs de coupe (écureuils). Les parter-res de coupe récents ne conviennent pas au petit gibier (lièvre,gélinotte, tétras) et la valeur des séparateurs de coupe commehabitat de transition pour ce groupe d’espèces semble fortvariable. Parmi les animaux à fourrure, la martre est l’espèce laplus affectée car elle a besoin d’une mosaïque de grande dimen-sion (5-10 km2) où la forêt domine. Enfin, l’orignal est peu présentdans les aires d’intervention récentes, mais la coupe aura uneffet bénéfique sur cette espèce à moyen terme. Pour prendreen compte la diversité des besoins de la faune et des utilisateurs,nous décrivons une approche d’aménagement utilisant quatreéchelles: celle du peuplement forestier (sylviculture), celle de la

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gestion intégrée, celle du paysage forestier et celle de la préser-vation de la biodiversité. En plus du modèle des coupes con-centrées couramment utilisé (le “modèle RNI”), nous proposonsdeux autres modes de distribution des aires de coupe qui visentà favoriser la gestion intégrée faune-forêt.

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La faune représente un des enjeux majeurs dans le vigoureuxdébat qui a cours sur l’exploitation forestière en forêt boréale.Pour mettre en place la gestion intégrée des ressources et la cer-tification des pratiques forestières, il faut trouver des solutionspermettant d’atteindre une meilleure compatibilité entre l’ex-ploitation forestière et la faune. Des travaux de rechercherécents à ce sujet ont été réalisés dans trois secteurs différents:• Abitibi-Témiscamingue:effets à court terme de la coupe avec

protection de la régénération (CPR) sur la faune terrestre,étude réalisée de 1990 à 1995 par le MEF, l’UQAR, l’UQATet l’Université de Sherbrooke (Potvin et Courtois 1998, Potvinet al. 1999);

• nord du lac Saint-Jean: fréquentation des séparateurs decoupe par la faune, projet amorcé en 1997 par le MRN, leMEF, l’UQAR, l’Université Laval, l’UQAC et FERIC;

• Forêt Montmorency et ses environs: divers travaux reliés auxbandes riveraines, aux traitements de régénération forestièreet à la forêt mosaïque (Darveau et al. 1995, 1999, deBellefeuille 1997, Gagné 1997, Alvarez 1996).

Cette présentation dresse d’abord le portrait de la faune terrestreau Québec, en termes d’habitat et d’effets de la coupe, et décritles besoins des utilisateurs (chasseurs, trappeurs, pourvoyeurs).Elle propose ensuite des modalités de coupe compatibles avecles besoins de la faune et des utilisateurs, dans une démarche degestion intégrée. Enfin, elle aborde des préoccupations plusvastes comme la préservation de la biodiversité.

LA FAUNE VERTÉBRÉE QUÉBÉCOISE

La faune ve rtébrée québécoise compte 648 espèces, dont199 poissons, 37 amphibiens et reptiles, 326 oiseaux et 91m a m m i f è r e s. Nous nous intéressons à la faune terrestre, cequi comprend les gallifo rmes (perdrix) (7 espèces), les petitsmammifères (32), les animaux à fo u r rure (21) et les gra n d smammifères terrestres (7).

Après une perturbation majeure, la communauté des espècesfauniques change tout au long des stades de développement dela forêt. Plusieurs espèces, comme le lièvre d’Amérique et l’ori-gnal, sont plus abondantes en début de succession, alors qued’autres, comme la martre d’Amérique et le tétras du Canada,préfèrent les forêts de stade intermédiaire, mûr ou suranné. Les

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besoins spatiaux des espèces sont reliés à leur domaine vital. Ledomaine vital des petits mammifères est de 1 ha ou moins, celuidu petit gibier se situe entre 1 et 25 ha environ, alors que lamartre et l’orignal occupent plusieurs kilomètres carrés.

Les utilisateurs de la faune ont aussi des besoins spatiaux va ri é s.Les chasseurs d’orignal fréquentent traditionnellement des terri-toires de 1 à 2 km2. Les territoires de piégeage des trappeurs sontde l’ordre de 50 à 100 km2, alors que les pourvo i ries à droitexclusif s’étendent généralement sur 100 à 300 km2.

Figure 1. Abondance relative de quelques espèces animales enfonction du stade de développement de la forêt.

EFFETS DE LA COUPE

Les effets de la coupe sur la faune varient en fonction desbesoins spatiaux et des exigences en terme d’habitat de chaquegroupe d’espèces. Les petits mammifères sont en général peuaffectés. Après CPR, la souris sylvestre augmente en nombre,alors que plusieurs autres espèces demeurent présentes dansles parterres de coupe. Les espèces davantage inféodées à laforêt (écureuil roux, polatouche ou “écureuil volant”) peuve n tsubsister dans les séparateurs de coupe.

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Par contre, les parterres de coupe récents ne conviennent pas aupetit gibier (lièvre, gélinotte huppée, tétras des savanes) et lavaleur des séparateurs de coupe comme habitat de transitionpour ce groupe d’espèces semble fort variable. L’étude en coursau nord du lac Saint-Jean vise précisément à évaluer cet aspect.Par contre, après 10 à 30 ans, le milieu devient très favorablepour certaines espèces comme le lièvre, quand la nourriture et lecouvert s’installent à nouveau.

Les effets sur les animaux à fourrure varient selon l’espèce. Àcourt terme, la CPR affecte peu le castor et a un effet bénéfiqueà moyen terme. Le renard roux, le lynx du Canada et le loup sontdavantage liés aux populations de proies et donc aux conditionsqui affectent ces dernières. La martre est l’espèce la plus affec-tée car elle a besoin d’une mosaïque de grande dimension (5-10km2) où la forêt domine.

Parmi les grands mammifères, l’orignal est peu présent dans lesaires d’intervention récentes, mais la coupe aura un effet béné-fique sur cette espèce à moyen term e. Il en est de même pourl’ours noir. Le caribou par contre est une espèce de forêt cli-macique et est affecté négativement par l’ex p l o i t a t i o nfo r e s t i è r e. Des travaux sont en cours sur cette espèceactuellement (R. C o u rt o i s, comm. p e r s. ) .

VERS UNE MEILLEURE COMPATIBILITÉ

Pour prendre en compte la diversité des besoins de la faune etdes utilisateurs, nous décrivons une approche d’aménagementutilisant quatre échelles:celle du peuplement forestier, celle de lagestion intégrée, celle du paysage forestier et celle de la préser-vation de la biodiversité. L’échelle du peuplement forestier, cellede la sylviculture, est sous la responsabilité de l’aménagisteforestier. La CPR pratiquée actuellement est une meilleure tech-nique de récolte que la coupe à blanc traditionnelle mais ellepourrait être améliorée, par exemple en protégeant la régénéra-tion haute ou les petites tiges marchandes et en laissant sur pieddes chicots et des arbres refuges pour la faune. En forêt boréale,la coupe partielle pourrait aussi avoir sa place dans les peuple-ments de structure inéquienne.

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Figure 2. Échelles d’aménagement de la faune et de la forêt.

C’est à une échelle intermédiaire, celle de la gestion intégrée(50-500 km2) que les changements les plus substantielsdevraient s’opérer. La gestion intégrée nécessite un partage derespon-sabilités en une concertation entre les industri e l sforestiers, les utilisateurs et le public. Au lieu d’une approcheréglementaire qui crée des mosaïques forestières homogènes, ilfaut viser une diversification des approches, en priorisant dessecteurs. Ainsi, en plus du modèle des coupes concentréescouramment utilisé (le “modèle RNI”), nous proposons deuxautres modes de distribution des aires de coupe qui visent àfavoriser la gestion intégrée faune-forêt.

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Figure 3. Exemple de répartition des coupes proposées pour lelièvre (A) et la martre (B).

Il serait illusoire de penser que tous les problèmes peuvent êtrerésolus à cette échelle. Les industriels forestiers planifient leuraménagement à l’échelle de l’aire commu n e. Un secteur derecherche en plein développement concerne l’échelle du pay s a g efo r e s t i e r. C’est à cette échelle que des stratégies globales visantà s’inspirer du régime des perturbations naturelles pourra i e n ts’appliquer. Entre autres, il faudrait laisser une proportion deforêts anciennes et distribuer les coupes et la forêt résiduellepour construire une mosaïque plus “naturelle”.

Enfin, l’échelle la plus englobante est celle de la préservation dela biodiversité. Il s’agit ici d’une responsabilité gouvernementalequi nécessite une vision régionale et nationale. Elle fait appel à

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A

B

des rapports de statut d’espèces et utilise des approches commel’analyse de carences (gap analysis). C’est à cette échelle quesont pris en compte les espèces menacées et les écosystèmesrares ou exceptionnels.

CONCLUSION

En conclusion, la foresterie est devenue plus complexe et lesattentes du public sont très élevées. Malgré le défi auquel noussommes confrontés, il faut considérer que la tâche de l’aména-giste deviendra plus intéressante, car “art”et jugement seront misà profit et le travail multidisciplinaire sera de plus en plus requis.

RÉFÉRENCES

Alvarez, É. 1996. La forêt mosaïque: une alternative d’aménage-ment pour le maintien de la martre dans la sapinièreboréale? Thèse M.Sc., Univ. Laval. 38 p.

Darveau, M., Beauchesne, P., Bélanger, L., Huot, J., et Larue, P.1995. Riparian forest strips as habitat for breeding birds inboreal forest. J. Wildl. Manage, 59 : 67-78.

D a rveau, M., Bélanger, L., et Huot, J. 1 9 9 9 . Étude sur la faune etles lisières boisées ri ve ra i n e s : synthèse des résultats 1988-1996 et recommandations d’aménagement. U n i ve r s i t éL aval, Faculté de Fo r e s t e rie et de Géomatique, Rap.39 p.

de Bellefeuille, S. 1997. La sapinière boréale en voie derégénération: un écosystème inhospitalier pour le lièvred’Amérique. Thèse M.Sc., Université Laval.

Gagné, N. 1997. Effets de différentes méthodes de régénérationde la sapinière boréale humide sur les petits mammifères.Thèse Ph.D., Université Laval.

Potvin, F., et Courtois, R. 1998. Effets à court terme de l’ex-ploitation forestière sur la faune terrestre: synthèse d’uneétude de cinq ans en Abitibi-Témiscamingue et implica-tions pour l’aménagement forestier. Québec, Ministère del’Environnement et de la Faune, Direction de la faune etdes habitats, Rap. 4026-98-11. 91 p.

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Potvin, F., Court o i s, R.et Bélanger, L. 1 9 9 9 . S h o rt - t e rm responseof wildlife to clear-cutting in Québec boreal fo r e s t : mu l t i -scale effects and management implications. C a n . J. Fo r.R e s. 2 9 : 1 1 2 0 - 1 1 27.

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- Chapitre 3 -L’ÉCLAIRClE PRÉCOMMERCIALE,

UN TRAITEMENT QUI INQUlÈTE

Judith COURTOIS, biol., Hugues SANSREGRET, biol., et LouisBÉLANGER, biol., ing. f. Ph.D.

Faculté de foresterie et de géomatique, Université LavalSainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Résumé

Le stade gaulis est un stade de développement particulièrementcritique pour la faune boréale. C’est à ce stade, qu’une commu-nauté faunique riche se reconstitue après le désert biologiquecausé par une coupe à blanc. L’éclaircie précommerciale (ÉPC)est un traitement qui inquiète plusieurs utilisateurs du territoirenotamment des groupes autochtones, certains chasseurs depetits gibiers ainsi que certains biologistes. Il semblerait que lelièvre délaisserait les superficies traitées, suivi de ses préda-teurs. Plus récemment, le Service Canadien de la Faune s’inter-rogeait sur l’impact potentiel de l’ÉPC sur la grive de Bicknell,une espèce rare qui est lice aux sapinières denses en altitude.Suite à ces appréhensions, un projet de recherche a été mis surpied au Saguenay à l’initiative d’Abitibi-Price et de sa table deconcertation (GEAIS). Le premier objectif était de déterminer sil’ÉPC avait des effets sur le lièvre d’Amérique, les petits mam-mifères et les oiseaux forestiers. Le deuxième objectif était devérifier certaines mesures d’atténuation.

Nos observations après 3 années d’étude démontrent que l’ÉPCa un impact sur le lièvre. Ce traitement ne fournit pas une qua-lité adéquate d’habitat, notamment en ce qui concerne le couvertde protection. Ceci est particulièrement évident l’hiver. Le suivitélémétrique d’individus a montré que leurs déplacements se fai-saient dans les peuplements adjacents occasionnellement dansles bordures des zones traitées mais rarement dans les zoneséclaircies. L’ÉPC provoque aussi des changements dans lesa s s e m blages d’oiseaux fo r e s t i e r s. Le pic flamboyant et lamésange à tête noire délaisseraient les sites traités. Par contre,l’ÉPC ne semble pas avoir d’effets sur les petits mammifères.

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Deux mesures d’atténuation ont été testées. L’ÉPC avec protec-tion des valeurs fauniques consistait à préserver la végétationinférieure à 1,5 mètre, les arbres fruitiers et un feuillu parrésineux éclairci. L’ÉPC avec bandes refuges consistait à main-tenir des bandes non traitées de 20 mètres de large à tous les 95mètres. En raison de l’épaisseur de neige, l’ÉPC avec protectiondes valeurs fauniques ne s’avère que partiellement efficace. Ilsemble que les lièvres utiliseraient le traitement en début d’hiveravant que le couvert de protection en dessous de 1,5 mètre nesoit enseve l i . Pour l’ÉPC avec bandes refuges, on note qu’elleest légèrement plus utilisée que l’ÉPC. L’utilisation serait con-centrée à l’intérieur des bandes refuges. Il sembl e rait donc quetout ce qui diminu e rait la sévérité de l’ÉPC aiderait à améliorer laqualité générale de l’habitat. L’augmentation du nombre de tigesrésiduelles résineuses serait particulièrement bénéfique.

Introduction

Présentement, l’éclaircie précommerciale (ÉPC) constitue uneintervention forestière hautement pratiquée. Depuis 1990, où 22537 hectares ont été traités au Québec, les superficies ont aug-menté à près de 63 400 hectares en 1996 (Legris et Couture1999). En fait, l’ÉPC est une pratique sylvicole qui gagne enimportance depuis qu’elle a été privilégiée dans la stratégie deprotection des forêts comme un traitement susceptible de dimin-uer la vulnérabilité des peuplements à la tordeuse des bourgeonsde l’épinette au Québec (Québec 1994). D’un point de vue sylvi-cole le stade gaulis constitue un stade où les principes de l’amé-nagement forestier peuvent très bien s’appliquer.

Cependant, sur le plan biologique, le stade gaulis correspond àun stade faunique riche où la restauration de certaines espècesclés de l’écosystème , notamment le lièvre d’Amérique (Lepusamericanus) surviendrait après le “désert biologique” causé parla coupe. Potvin et Courtois (1998), dans une étude menée dansla région de l’Abitibi-Témiscamingue, ont soulevé l’hypothèseque le stade gaulis constitue un stade important dans le proces-sus de rétablissement des communautés fauniques après l’appli-cation de la coupe avec protection de la régénération (CPR).

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L’ÉPC : un traitement qui inquiète

Face à l’utilisation intensive du traitement d’ÉPC, des préoccu-pations sociales ont commencé à resurgir dans la région duS a g u e n ay-Lac-St-Jean par l’entremise de la table de concer-tation du Groupe d’Entente pour l’Aménagement Intégré de larivière Shipshaw (GEAIS) ainsi qu’auprès de différentsgroupes de trappeurs de la région de Charl evoix et det rappeurs montagnais. Pa rallèlement, une enquête menéeauprès de trappeurs et d’ex p e rts de la fa u n e, qui trava i l l e n tdans plusieurs régions du Québec, a démontré que les per-sonnes consultées ont une vision plutôt négative de l’ÉPC etque la relation entre le lièvre d’Amérique et ses prédateurs est,selon eux, fortement perturbée sur une période d’environ 10 ans.Le lièvre a besoin d’un couve rt d’abris dense où idéalementl ’ o b s t ruction visuelle latérale serait supérieure à 85 % de recou-v r e m e n t . De plus, il a besoin de brout (Ferron et al. 1 9 9 6 ) .

Un projet de recherche a été mis sur pied en concertation avecl’Université Laval, la compagnie Abitibi-Price, le G.E.A.I.S., leministère des Ressources naturelles régional et la Fondation dela faune du Québec afin de vérifier le bien-fondé de cesappréhensions et d’expérimenter des mesures d’atténuation.Pour mesurer l’impact de l’ÉPC, le dispositif créé est constitué detrois blocs complets. Chaque bloc comprend trois unités detraitement et un témoin. Les espèces cibles sont le lièvred’Amérique, les petits mammifères et les oiseaux forestiers. Pourun même bloc, les unités expérimentales ont reçu, de façon aléa-toire, l’un ou l’autre des traitements suivants : éclaircie précom-merciale avec des bandes de refuges, un témoin ou un site nonéclairci, éclaircie précommerciale conventionnelle, éclaircie pré-commerciale avec protection des valeurs fauniques

Une éclaircie précommerciale avec bandes refuges est réaliséeselon un patron de coupe par bandes où des bandes traitées de95 mètres de largeur alternent avec des bandes non traitées de15 à 20 mètres de largeur. Ces dernières représentent environ10 % du secteur d’intervention (figure 1A). Le témoin est uneunité expérimentale non éclaircie (figure 1B). L’éclaircie précom-merciale conventionnelle correspond au traitement réalisé sui-vant les normes du ministère des Ressources naturelles.Il s’agit de réduire le couve rt arborescent à 2 500 tiges

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résineuses/hectare en moyenne, d’essences commerciales biendistribuées (figure 1C).

L’éclaircie précommerciale avec protection des valeurs fauniquesest un traitement où le maintien d’un plus grand nombre de tigespar hectare est privilégié. L’objectif est de maintenir une obstruc-tion visuelle latérale suffisante pour minimiser l’impact du traite-ment sylvicole. Pour ce faire, il s’agit de dégager les essencescommerciales sur 1 mètre de rayon pour obtenir, en moyenne, uncouvert arborescent de 2 500 tiges commerciales dégagées parhectare. De plus, une tige commerciale feuillue est laissée à 1mètre d’une tige résineuse de diamètre similaire, lorsque la dis-tribution le permet, afin de minimiser l’homogénéisation du peu-plement.

Entre les tiges dégagées, toute la régénération, ainsi que lavégétation arbustive de hauteur égale ou inférieure à 1,5 mètre,sont laissées en place. Finalement, les arbres fruitiers tels lessorbiers (Sorbus americanus), cerisiers (Prunus pensylvanica) etamelanchiers (Amelanchier) sont préservés. Les arbres fruitiersn’ont pas été considérés comme des tiges feuillues commer-ciales. (figure 1D).

Figure 1. Schéma des différents traitements utilisés sur le dis-positif. A) éclaircie avec bandes refuges, B) témoin, C) éclaircieprécommerciale conventionnelle et D) éclaircie avec protectiondes valeurs fauniques.

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que les sites éclaircis avec l’ÉPC (pr. 0,17) sont moins fréquen-tés par le lièvre que les sites non éclaircis. Alors que, pour la sai-son hive rnale la fréquentation dans les sites traités est presquei n existante compara t i vement aux sites témoin (pr.0,01) (figure 3).Alors que pour ÉPC avec protection ont obtient des valeurs inter-médiaires au témoin et à l’ÉPC lors de la saison froide.

Figure 3. Nombre de fèces par 4 m2 et par mois dénombré enhiver (gauche) et en été (droite) selon l’année

Au niveau de la qualité de l’habitat, le nombre de ramilles disponibl e sen 1998 dans les sites témoins étaient de 105 667 ra m i l l e s / h e c t a r ede 180 111 ramilles/hectares dans les sites avec ÉPC et de 145 817ramilles/hectare pour l’ÉPC avec protection. Cependant, les pour-centages de ramilles broutées dans les ÉPC étaient inférieurs ausite témoin. D u rant les deux années de suivi le pourcentage deramilles broutées par le lièvre va riait de 14,1 % à 3,4 % selon la hau-teur (max. 2,5 mètres) pour les témoins. Une analyse similaireréalisée dans les sites éclaircis démontre un fa i ble pourcentaged’utilisation avec des valeurs inférieures à 1,0 % des ra m i l l e sb r o u t é e s. À l’opposé de ÉPC conventionnel, l’ÉPC avec protectionobtient des pour- centages plus élevés (9,4 % à 5,4 %) mais dèsqu’on dépasse 1,5 mètre de hauteur ce dernier obtient des va l e u r ssimilaires à l’ÉPC.

Les données d’obstruction visuelle recueillies sur les sites éclair-cis démontrent que l’obstruction visuelle latérale est insuffisantedans les sites éclaircis comparativement aux sites témoins. Surtrois années de suivis, le pourcentage d’obstruction visuellelatérale du témoin demeure supérieur à 65 %, et ce dès la pre-mière année. À l’opposé, ce seuil n’est atteint que trois ans aprèsl’application du traitement d’ÉPC pour les classes de hauteursinférieures à 1,5 mètre ce qui empêche le lièvre de fréquenter lessites éclaircis durant la saison hivernale.

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Les oiseaux forestiers et les petits mammifères utilisent-ilsles sites éclaircis ?

Au niveau des oiseaux fo r e s t i e r s, l’application du tra i t e m e n td’ÉPC provoque des changements dans les communautés av i-e n n e s. Les principaux impacts se traduisent surtout dans leschangements au niveau de la représentativité de chacune desespèces en présence. Les espèces de milieux ouve rts (bruant àgorge blanche par exemple) deviennent dominantes compara t i ve-ment aux espèces liées à un couve rt arboricole plus dense (paru-line à poitrine baie par exe m p l e ) . Ce changement provient de l’ou-ve rture du couve rt provoqué par l’ÉPC qui diminue la qualité del’habitat pour les espèces qui désirent commencer à coloniser lespeuplements lorsque le couvert arborescent devient intéressant.Certaines espèces comme le pic flamboyant (Colaptes auratus)et la mésange à tête noire (Parus atricapillus) vont délaisser lessuperficies traitées avec l’ÉPC mais semble utiliser quelque peules ÉPC avec mesures d’atténuations. La réduction de la densitédu couvert forestier semble donc influencer favorablement lesoiseaux forestiers de milieux ouverts au détriment des oiseauxde milieux plus arboricoles qui désireraient utiliser les stadessubséquents à la CPRS. Ces changements dans les assem-blages d’oiseaux indiquent que le stade gaulis constitue un stadeimportant pour certaines espèces qui ont besoin d’un milieu plusdense pour commencer à coloniser la forêt.

Les analyses réalisées n’ont pas permis d’identifier un effet del’ÉPC ainsi que des mesures d’atténuations parmi les onzeespèces recensées de petits mammifères. Parmi les espèces lesplus fréquentes, on retrouvait le tamia rayé (Tamias striatus ), lecampagnol à dos roux (Clethrionomys gapperi) et la sourissylvestre (Peromyscus maniculatus).

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Figure 4. Abondance relative de trois espèces de petits mam-mifères retrouvées dans le traitement d’ÉPC et les sites témoins.Aucune différence significative ne fut observée au seuil de χ = 0.05.

Pourquoi un résultat ambigu?

Comme le démontrent nos résultats, le facteur clé pendantl’hiver est l’obstruction visuelle causée par la densité des tigesrésineuses du peuplement. Les méthodes d’atténuations pro-posées n’ont pas pris en considération cette variable d’où l’effi-cacité mitigée de l’éclaircie précommerciale avec protection desvaleurs fauniques. Le dispositif étudié a cependant permis dedéterminer qu’il y a un impact de l’éclaircie précommerciale surc e rtaines espèces fauniques qui ont besoin des étagessupérieurs de la strate arbustive (lièvre, oiseaux forestiers).

Les causes de cet impact seraient liées :

• à un couvert de protection résineux déficient,• à la disponibilité de couvert (au dessus de 1,5 m) insuffisant,• et de problèmes liés à l’accès à la nourriture et au déplace-

ment (pic flamboyant).

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Cependant, ces facteurs sont sujets à une variabilité régionalequi vient influencer l’impact que peut avoir l’ÉPC. L’intensité et ladurée de l’impact de l’ÉPC sont liées à :

• la quantité de feuillus avant coupe,• la densité et la composition résineuse,• la capacité des essences à rejeter,• l’épaisseur de la neige,• et aussi au niveau de croissance (fonction du sol et du climat).

Conclusion

L’ÉPC a des impacts sur la petite faune. La durée des impacts estvariable et reste à déterminer. Cependant, à court terme il y a unmoyen d’atténuer cet impact par l’entremise de l’ÉPC avec pro-tection des valeurs fauniques.

Remerciements

Cette étude a été rendue possible grâce au support financierd’Abitibi-Consolidated, du ministère des Ressources naturelles(unité de gestion 23) et de Fondation de la faune. Nous désironsadresser nos sincères remerciements à Viateur Beaulieu, AgatheCimon, Jean Legri s, Rolland Veilleux, Jean Huot, Sylva i nBoisclair et l’équipe de terrain.

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- Chapitre 4 -IMPACT DES PRATIQUES FORESTIÈRES SUR

L’HYDROLOGIE DES COURS D’EAU

André P. PLAMONDON, ing. f. Ph.D, François GUILLEMETTE,Denis LÉVESQUE et Louis PRÉVOST

Laboratoire d’hydrologie forestièreCentre de recherche en biologie forestière

Département des sciences du bois et de la forêtUniversité Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Résumé

Les salmonidés requièrent des habitats que l’on retrouve ty-piquement en milieu forestier peu perturbé. La qualité de ceshabitats sur un bassin versant découle principalement de carac-téristiques fixes telles la géologie, le sol, la topographie et de fac-teurs variables tels le climat, la végétation et l’hydrologie. Enconditions naturelles, le régime d’écoulement de l’eau et sa qua-lité varient en fonction du type d’événement pluvieux ou de fonte,des apports sédimentaires reliés par exemple aux glissementsde terrain ou à l’érosion des berges et des modifications de lavégétation par les chablis, les épidémies d’insectes et les fe u x .Plusieurs activités anthropiques dont la récréation, l’ex p l o i t a t i o nm i n i è r e, la vo i rie et la récolte de la matière ligneuse peuve n tinfluencer le régime hydrologique et par conséquent la qualitéde l’habitat aquatique. Cette présentation a pour objet de tra i t e rdes effets des opérations forestières sur l’hydrologie des coursd’eau. Les débits de pointe de pluie en période estivale et lespointes printanières ont été étudiés suite à des coupes couvrantrespectivement 31 % et 85 % de la superficie de deux bassinssitués à la Forêt Montmorency.

Les pointes de pluie n’ont pas été augmentées par la coupe de31 % de la superficie alors que l’on a obtenu une augmentationmaximale de 163 % sur le bassin coupé à 85 %. Ces résultatsconcordent avec les données compilées par Lee MacDonald(Université du Colorado) et provenant des bassins expérimen-

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taux recevant de 1200 à 2000 mm de précipitations annuelles.Un petit débit de pointe occasionné par une forte pluie au débutde la période de fonte a augmenté de 90 % suite à la coupe de35 % tandis qu’un faible débit de fonte a augmenté de 78 % suiteà la coupe couvrant 85 % de la superficie d’un bassin. Ces résul-tats combinés à ceux des autres bassins expérimentaux démon-trent que les débits de pointe sont augmentés et que leurfréquence peut augmenter lorsque la coupe dépasse 50 à 68 %de la superficie du bassin versant. L’absence d’augmentationsubstantielle de la pointe forêt lorsque la coupe ne dépasse pas50 % de la superficie du bassin s’explique par la désynchronisa-tion des taux de fonte entre la partie coupée et la forêt.

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Méthodologie

Les débits sont mesurés depuis 1967 à l’exutoire des bassins 5,6 et 7A et depuis 1971 à l’exutoire du 7 (figure 1). Ces bassinsont respectivement 917, 394, 122 et 233 hectares. Les débits depointe, l’écoulement rapide et lent de crue ainsi que les temps deretard, de concentration, de montée, de décrue et de base ontété évalués. Seulement les débits de pointe sont discutés danscette présentation. Durant la période, dite de calibrage, de 1967à 1974 les débits de pointe des bassins 6 et 7A demeuré boisésont été comparés entre eux (points noirs figure 2). En conditionsnaturelles, les débits de pointe du bassin 6 varient d’environ–40 % à +50 % par rapport à ceux du bassin 7A. En 1974-1976,le bassin 6 a été coupé sur 31 % de sa superficie et l’effet de lacoupe évalué durant deux périodes soit 1977-1984 et 1985-1992. L’absence d’effet de cette coupe a permis d’utiliser lebassin 6 comme témoin pour évaluer l’effet d’une coupe sur85 % de la superficie du bassin 7A en 1973-1974 (figure 1). Il està noter que les autres coupes n’ont fait que récolter des peuple-ments affaiblis par la tordeuse ou le chablis. L’impact de cescoupes est considéré négligeable.

Figure 1. Carte de l’historique des coupes sur le bassin desEaux-Volées.

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Résultats

Les pointes de pluie n’ont pas été augmentées par la coupe de31 % de la superficie (figure 2) alors que l’on a obtenu une aug-mentation maximale de 163 % sur le bassin coupé à 85 % (figure 3).C es résultats avec les données compilées par Lee MacDonald( U n i versité du Colorado) et provenant des bassins ex p é ri m e n t a u xr e c evant de 1 200 à 2 000 mm de précipitations annu e l l e s. Un petitdébit de pointe occasionné par une fo rte pluie au début de lap é riode de fonte a augmenté de 90 % suite à la coupe de 31 %(figure 4) tandis qu’un faible débit de fonte a augmenté de 78 %suite à la coupe couvrant 85 % de la superficie d’un bassin (figure 5).Ces résultats combinés à ceux des autres bassins expérimen-taux démontrent que les débits de pointe sont augmentés et queleur fréquence peut augmenter lorsque la coupe dépasse 50 % à68 % de la superficie du bassin versant. L’absence d’augmenta-tion substantielle de la pointe forêt lorsque la coupe ne dépassepas 50 % de la superficie du bassin s’explique par la désynchro-nisation des taux de fonte entre la partie coupée et la forêt.

Figure 2. Relations of instantaneous rainfall peak flows and quickflow volumes between basins 6 and 7 during the calibration post-logging I and II.

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Figure 3. C o m p a raison des Log des débits de pointe sur lesbassins 6 et 7A pour la période de calibrage 1967-1974 et lap é riode post-traitements 1994-1997.

Figure 4. Relationships of cumulative snowmelt volumes beforepeak and instantaneous snowmelt peak flows between basins 6and 7A during the calibaration and post-logging I and II.

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Figure 5. C o m p a raison des débits de pointe journaliers sur lesbassins 6 et 7A pour la période de calibrage 1967-1974 et lap é riode post-traitement 1994-1997.

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- Chapitre 5 -IMPACT DES FEUX ET DES COUPES FORESTIÈRES DANS

LES LACS DU BOUCLIER LAURENTIEN

Pierre M AG N A N, biol. P h . D.1, Richard C A R I G N A N2, Jacob K A L F F3,B e rnadette P I N E L - A L L O U L2 et Dolors P L A N A S4

1 Département de chimie-biologie, UQTRBoulevard des Forges, C.P. 500

Trois-Rivières (Québec) G9A 5H7

2 Département de sciences biologiques, Université de Montréal3 Département de biologie, Université McGill

4 Département des sciences biologiques, UQAM

Résumé

L’objectif de notre programme de recherche est d’évaluer l’impactdes grands feux et des coupes forestières sur la physico-chimiede l’eau, le phytoplancton, le zooplancton et les communautés depoissons des lacs du bouclier laurentien. De juin 1996 à sep-tembre 1999, nous avons échantillonné 38 lacs situés dans larégion du Réservoir Gouin; les bassins de drainage de 20 de ceslacs étaient non perturbés (lacs de référence) alors que ceux de9 d’entre eux avaient été brulés (lacs de feu) et ceux de 9 autresavaient fait l’objet de coupes forestières (lacs de coupe).

Physico-chimie de l’eau: Les lacs de coupe affichaient des con-centrations plus élevées de carbone organique dissous (COD),de phosphore total (PT) et de potassium que les lacs deréférence et de feu. La profondeur de la zone photique a égale-ment été réduite de 50-75 % dans les lacs de coupe compara-tivement aux lacs de référence et de feu. Les lacs de feu ontprésenté les concentrations les plus élevées en PT, NO3, -N,Ca2+, Mg 2+, SO4

2- et Cl-. Les effets des coupes et du feu surla qualité de l’eau ont très peu diminué (10-20 %), et ont aug-menté dans certains cas, dans les trois années qui ont suivi lesperturbations.

Phytoplancton: L’abondance des algues réputées toxiques(Cyanophytes) était faible et n’a pas varié entre les trois types de

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lacs. La biomasse globale des algues a augmenté dans les lacsperturbés et cette augmentation a été plus marquée dans leslacs de feu. Enfin, la biodiversité des algues était significative-ment plus faible dans les lacs dont les bassins de drainage ontconnu des coupes forestières supérieures à 40% de leur superfi-cie, deux ans après les perturbations.

Zooplancton. Dans les deux années suivant les perturbations,les lacs de feu supportaient de plus grandes biomasses decyclopoides et de rotifères que les lacs de référence alors que leslacs de coupe supportaient de plus fa i bles biomasses decalanoides que les lacs de référence. Les biomasses descladocères et copépodes ne variaient pas de façon significativeentre les trois types de lacs. Trois ans après les perturbations,les impacts observés chez certains groupes zooplanctoniquesn’étaient plus perceptibles; les trois groupes de lacs présentaientdes biomasses équivalentes d’organismes dans tous les groupestaxonomiques et classes de tailles.

Communautés de poissons: Un total de 23 espèces de pois-sons ont été capturées dans les lacs à l’étude. Le grand brochet(Esox lucius), la perchaude (Perca flavescens), et le meunier noir(Catostomus commersoni), étaient présents dans presque tousles plans d’eau. Le grand corégone (Coregonus clupeaformis) ,et le doré (Stizostedion vitreum), ont été retrouvés dans 11 et 9lacs respectivement. L’abondance relative (prises par unité d’ef-fort) des espèces n’était pas différente entre les trois groupes delacs. Cependant, l’abondance des jeunes perchaudes et meu-niers noirs était significativement plus faible dans les lacs pertur -bés. Ces diminutions d’abondance des jeunes stades sont sus-ceptibles d’avoir des effets en cascade sur les espèces d’intérêtcomme le brochet et le doré, qui utilisent la perchaude et le meu-nier comme proies.

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En 1995, le Centre sur la Gestion durable de la forêt boréale(Réseaux des centres d’excellence CRSNG-Industrie) a démarréun programme de recherche visant (1) à identifier et comparerles impacts de la coupe forestière et des feux de forêt sur les lacsde la forêt boréale et (2) développer des outils de gestion simplespermettant de minimiser les effets des coupes. En Haute-Mauricie, neuf lacs affectés par la coupe et neuf autres affectéspar le feu ont été suivis pendant les quatre années suivant lesperturbations. Seize lacs non perturbés, comparables aux précé-dents, ont servi de témoins, tandis que les bassins de 4 autresfurent coupés pendant l’étude. Plusieurs caractéristiques tellesla qualité des eaux, la productivité biologique, les poissons et lacontamination par le mercure ont été étudiées par des équipesde chercheurs provenant des universités de Montréal, UQAM etUQTR.

1- Description des problèmes

Qualité des eaux

Plusieurs effets des coupes et des feux ont été observés sur lacomposition chimique des eaux. Cependant, nous rapportons icique les effets les plus susceptibles d’influencer les communautésaquatiques. Dans les lacs affectés par la coupe, nous avonso b s e rvé une augmentation des concentrations en carboneorganique dissous et en phosphore total, ainsi qu’une diminutionde la transparence des eaux (figure 1).

Le carbone organique dissous donne une couleur brune auxeaux. Ceci explique la transparence réduite des lacs ayant desconcentrations élevées en carbone organique dissous (figure 1).La transparence des eaux influence la stratification thermiquedes lacs. Par exemple, en été, les lacs dont les eaux sont trèsbrunes montrent des températures de surface plus élevées queles lacs à eaux claires. Les lacs à eaux brunes ont égalementtendance à montrer un appauvrissement de l’oxygène en eauxprofondes.

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phénomène serait dû à une augmentation des apports enmatière organique (à laquelle le mercure est associé) suivant lacoupe. La figure 2 montre que la contamination du zooplanctonen mercure est plus élevée dans les lacs affectés par la coupeque dans les lacs témoins et les lacs affectés par le fe u . Cette con-tamination est directement proportionnelle aux concentrations enmatière organique dissoute mesurées dans les lacs (figure 1).Nos mesures de la concentration en mercure chez le brochet sug-gèrent que cette contamination se transmet jusqu’au sommet dela chaîne alimentaire (figure 3). Nos résultats pour le brochetd o i vent cependant être considérés comme préliminaires puisquecette espèce était présente dans seulement quatre des neuf lacsaffectés par la coupe. À moyen terme, ces résultats devront êtreconfirmés dans un plus grand nombre de lacs ayant subit descoupes forestières.

Figure 2. Évolution saisonnière de la concentration en méthyl-mercure dans le zooplancton des lacs de Haute-Mauricie, 1996.

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Figure 3. Concentration en mercure total dans les brochets cap-turés dans les lacs affectés par la coupe, le feu et les lacstémoins.

Productivité biologique

Dans les lacs, les algues microscopiques trouvées dans lacolonne d’eau ou attachées aux substrats solides de la zone lit-torale forment la base de la chaîne alimentaire. La productivitéde ces algues est contrôlée par les apports d’éléments nutritifs(phosphore, azote) et par la transparence de l’eau. Dans les lacsde la Haute-Mauricie, la biomasse de ces algues était fortementcorrélée aux apports en phosphore et à la transparence de l’eau.Ainsi, la productivité biologique fut fortement stimulée (200 %)dans les lacs ayant les plus grandes concentrations de phospho-re, soient ceux affectés par le feu. Malgré des apports de phos-phore relativement élevés dans les lacs affectés par la coupe,l’augmentation de productivité fut beaucoup moins importante,en raison de la transparence réduite de l’eau.

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Poissons

Des pêches expérimentales un an et deux ans après impact parles coupes et le feu ne révèlent que des effets relativement sub-tils sur les populations de poissons. Les captures par unité d’ef-fort de meunier noir, d’omble de fontaine, de perchaude, de bro-chet, de doré et de grand corégone ne furent pas significative-ment différentes entre les lacs témoins et ceux affectés par lacoupe ou le feu. Les taux de croissance mesurés chez la per-chaude furent les mêmes dans ces trois groupes de lac.Cependant, le recrutement des perchaudes et des meuniersnoirs fut significativement plus faible dans les lacs ayant subi descoupes et des feux que dans les lacs témoins. Le recrutementdu grand corégone a montré la même tendance. La baisse derecrutement chez ces trois espèces pourrait, à plus long terme,affecter le rendement des espèces sportives telles le brochet etle doré, qui utilisent les jeunes perchaudes, meuniers et coré-gones comme proies. À moyen terme, ces résultats devrontégalement être confirmés dans un plus grand nombre de lacsayant subit des coupes forestières.

Solutions

Nos résultats montrent qu’il serait facile d’atténuer les impacts dela coupe sur la qualité de l’eau, la contamination par le mercure etla productivité biologique des lacs. En effet, nous avons trouvéque dans les lacs affectés par la coupe ou par le feu, la concen-t ration de la majorité des substances mesurées était directementp r o p o rtionnelle au ra p p o rt entre la superficie déboisée et la super-ficie ou le volume du lac récepteur (figures 4 et 5). Ces figuresmontrent que la concentration en carbone organique dissous( vecteur du mercure) ne dépasse celle des lacs de référence quelorsque le ra p p o rt entre la superficie du bassin versant coupée etle volume du lac dépasse 0,5. Pour le phosphore, les concentra-tions des lacs témoins ne sont dépassées que lorsque le ra p p o rtentre la superficie coupée et la superficie du lac dépasse la valeurde 4. Les modèles simples illustrés aux figures 4 et 5 ont préditcorrectement les effets observés dans les lacs dont les bassinsversants ont été déboisés pendant l’étude.

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Figure 4.Relation linéaire entre la concentration en phosphore etle facteur d’impact (aire déboisée : aire du lac) pour les lacs affec-tés par la coupe ou le feu. La ligne pleine définit la relationobservée lorsque seuls les lacs perturbés sont considérés. Laligne formée de grands traits montre cette relation lorsque leslacs témoins sont inclus. Les lignes supérieures et inférieuresdélimitent l’intervalle de confiance des prédictions.

Ces modèles peuvent être appliqués en trois étapes aux lacsjugés à risque, c’est-à-dire ceux pour lesquels d’importantescoupes sont prévues sur le bassin versant :

On doit tout d’abord délimiter le bassin versant du lac et en mesu-rer la surface. Cette opération peut être effectuée manuellementou à l’aide de méthodes automatiques (Arc/Info, Arc/View);

On doit ensuite mesurer la surface ou le volume du lac. Les rela-tions illustrées aux figures 4 et 5 peuvent être exprimées en fonc-tion de la surface ou du volume. Celles basées sur le volumesont un peu plus précises que celles basées sur la surface du lac.Cependant, la mesure du volume d’un lac est plus coûteuse carelle comporte une sortie sur le terrain;

On utilise ensuite les relations montrées aux figures 4 et 5 pourcalculer les valeurs prédites du carbone organique dissous, duphosphore ou de l’atténuation lumineuse. Ces valeurs doivent

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ensuite être comparées aux critères appropriés de qualité deseaux. Si les valeurs calculées dépassent les critères de qualité,on peut se servir des mêmes relations pour calculer la superficiemaximale de coupe qui n’entraînera pas un dépassement de cescritères.

Figure 5. Relations linéaires entre la concentration en carboneorganique, l’atténuation lumineuse et le facteur d’impact VIR (airedéboisée : volume du lac) pour les lacs affectés par la coupe oule feu.La ligne pleine définit la relation observée lorsque seuls leslacs perturbés sont considérés. La ligne fo rmée de grands tra i t smontre cette relation lorsque les lacs témoins sont inclus. L e slignes supérieures et inférieures délimitent l’intervalle de confiancedes prédictions.

Les critères de qualité des eaux : lesquels utiliser?

Le ministère de l’Environnement du Québec a déjà établi unesérie de critères visant la majorité des polluants susceptiblesd’être rencontrés dans les eaux. Pour le phosphore, par exem-p l e, ces critères spécifient que les perturbations d’ori g i n ehumaine ne devraient pas entraîner un dépassement au-delà dela limite de 0,33 mmole/L établie pour les lacs naturellement peuproductifs. Ces critères spécifient également que la transparencedes eaux ne doit pas être diminuée par plus de 50 % de sa valeurnaturelle. Pour les lacs de la Haute-Mauricie, il serait préférabled’établir, en collaboration avec le MRNQ et le MENVIQ, descritères fondés sur la variabilité naturelle observée de la qualitédes eaux.

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Conclusions

En Haute-Mauricie, des effets significatifs de la coupe ont étéobservés au niveau de la qualité des eaux, de la contaminationpar le mercure, de la productivité biologique et du recrutement decertaines espèces de poissons. Notre étude a permis d’établir,pour la première fois, non seulement au Québec mais ailleursdans le monde, des relations quantitatives entre la qualité deseaux des lacs, leur contamination par le mercure, leur producti-vité ainsi que les perturbations de leurs bassins versants par lacoupe et le fe u . Ces relations peuvent aisément être appliquées àla protection des lacs. Le choix des critères de qualité à utiliserpour la protection des lacs de la Haute-Mauricie dev rait cependantfaire l’objet d’une concertation entre l’industrie et les ministèresimpliqués dans la gestion du terri t o i r e.

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- Chapitre 6 -CONSERVATION DES COMMUNAUTÉS D’OISEAUXET PROTECTION DU MILIEU RIVERAIN EN FORÊT

BORÉALE

Marcel DARVEAU1, ing. f. Ph. D., Louis BÉLANGER1, JeanHUOT2 et Marylène BOULET1

1Département des sciences du bois et de la forêt2 Département de biologie

Université LavalSainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Résumé

Les habitats riverains sont traditionnellement soustraits auxcoupes forestières en raison de leur pouvoir tampon sur les habi-tats aquatiques. Au cours des dernières décennies, les écolo-gistes ont montré que les habitats riverains jouaient aussi un rôlemajeur dans les écosystèmes terrestres.

En 1987, le Gouve rnement du Québec a remplacé la norme deprotection de lisières boisées de 60 m de largeur en bordure descours d’eau et plans d’eau d’au moins 3 m de largeur par l’obl i g a-tion de maintenir des lisières boisées ri ve raines de 20 m en bordurede tous les plans d’eau et cours d’eau perm a n e n t s, avec c o m m eseule mesure spécifique un élargissement à 60 m le long desrivières à saumon. Ce changement, qui visait essentiellement àcontrôler l’apport de sédiments dans les cours d’eau suite à l’ex-ploitation fo r e s t i è r e, suscita des interrogations quant aux m e s u r e sde conservation appropriées pour la faune terrestre, d’autantplus que les lisières boisées ri ve raines sont souvent les seulesréserves de forêt mature dans les paysages forestiers.

Nous avons comparé l’utilisation de lisières boisées de dif-férentes largeurs dans la sapinière à bouleau blanc pendant 7ans. Deux conclusions principales ont émergé de cette étude :premièrement, les lisières boisées de 20 m et 40 m sont tropétroites pour certaines espèces d’oiseaux qui les évitent(Mésange à tête brune, Sittelle à poitrine rousse et Tétras du

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Canada). Deuxièmement, les lisières étroites sont envahies pardes espèces d’oiseaux généralistes qui deviennent plus abon-dantes que les espèces de forêt mature.

Une autre étude réalisée dans la pessière noire à mousses mon-tre que les lambeaux de forêts qui restent sous forme de bandesriveraines et de séparateurs secs de 60 m de largeur et qui occu-pent 15 % des aires de coupe, ont des densités d’oiseaux troisfois plus faibles que les massifs forestiers. Cette différence estattribuable en bonne partie à deux groupes préoccupants dupoint de vue de la biodiversité, soient les oiseaux résidants et lesmigrateurs néotropicaux. D’une part, on peut conclure que lesséparateurs secs et les bandes riveraines pourraient maintenirun peu plus de 5 % des effectifs d’oiseaux que l’on trouvait avantla coupe, ce qui pourrait être suffisant pour maintenir la biodi-ve r s i t é . D’autre part, on peut conclure que, du point de vue despopulations d’oiseaux, le type de paysage généré par cettes t ratégie d’intervention n’est pas le plus efficace et qu’à super-ficie égale (15 % de la forêt originale), un gros bloc pourra i tmaintenir plus d’oiseaux.

Nous recommandons de remplacer la norme unifo rme des lisièresboisées ri ve raines de 20 m par des pratiques d’aménagementfavo risant l’hétérogénéité à différentes échelles spatiales. C e c ipeut être fait en diversifiant les largeurs de lisières et les intensitésd ’ é c l a i r c i e. Étant donné que nos études ne sont pas accompa-gnées d’une évaluation des aspects socio-économiques de l’amé-nagement du milieu ri ve rain, nous ne pouvons déterminer quelleest la meilleure combinaison de lisières boisées pour un pay s a g eforestier donné. To u t e fo i s, nos résultats peuvent aider lesaménagistes à mettre en valeur le rôle clé des écosystèmesri ve rains et à les faire contri buer au maintien de la biodive r s i t élocale en servant de refuge pour la faune terrestre.

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Introduction

Les habitats ri ve rains sont traditionnellement soustraits auxcoupes forestières en raison de leur pouvoir tampon sur leshabitats aquatiques. Au cours des dernières décennies, lesécologistes ont montré que les habitats ri ve rains jouaient aussiun rôle majeur dans les écosystèmes terrestres.

En 1987, le Gouvernement du Québec a remplacé la norme deprotection de lisières boisées de 60 m de largeur en bordure descours d’eau et plans d’eau d’au moins 3 m de largeur par l’obli-gation de maintenir des lisières boisées riveraines de 20 m enbordure de tous les plans d’eau et cours d’eau permanents, aveccomme seule mesure spécifique un élargissement à 60 m le longdes rivières à saumon (Gouvernement du Québec 1988). Cechangement, qui visait essentiellement à contrôler l’apport desédiments dans les cours d’eau suite à l’exploitation forestière,suscita des interrogations quant aux mesures de conservationappropriées pour la faune terrestre, d’autant plus que les lisièresboisées riveraines sont souvent les seules réserves de forêtmature dans les paysages forestiers.

Comparaison de lisières boisées de différentes largeurs ensapinière

En 1988, une étude sur la faune et les bandes riveraines a étéinitiée dans la sapinière à bouleau blanc, dans le secteur de laForêt Montmorency (Darveau et al., 1999a). La question de baseposée au début de l’étude était : quelles sont les conditions mini-males de lisière boisée ri ve raine permettant le maintien de lafaune fo r e s t i è r e, plus particulièrement pour trois groupes fa u-niques «indicateurs» : les communautés d’oiseaux fo r e s t i e r s, lesc o m munautés de petits mammifères et le lièvre d’Améri q u e(Lepus ameri c a nu s)? L’approche a consisté essentiellement endes inventaires ou des relevés pour comparer l’utilisation desdifférents types de lisière (20 m, 40 m, 60 m et témoins >300 mde largeur intacts; 20 m éclaircis), de 1988 à 1996. En coursd ’ é t u d e, des questions relatives à la reproduction, à l’alimentationou aux déplacements de certaines de ces espèces se sonta j o u t é e s. Finalement, nous avons ajouté des questions relatives àl’habitat à l’échelle du pay s a g e, i.e. la disponibilité de chicots pourles canards nichant dans une cavité d’arbre, la superficie des

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lisières boisées ri ve raines dans le paysage et l’utilisation deslisières comme corridor de déplacement par les mammifères àgrands domaines vitaux.

Deux conclusions principales en émergent (tableau 1).Premièrement, les lisières boisées de 20 m et 40 m sont tropétroites pour certaines espèces d’oiseaux et de mammifères quiles évitent. Deuxièmement, en plus des espèces qui évitent leslisières étroites, certaines de celles qui s’accommodent de ceslisières étroites montrent des signes de déra n g e m e n t . Le campa-gnol à dos roux, un petit mammifère qui, dans notre aire d’étude,évite le milieu ri ve rain en forêt naturelle et qu’on fo r c e, lors decoupes fo r e s t i è r e s, à se réfugier dans les lisières boisées ri ve ra i n e sé t r o i t e s, en est un exe m p l e. L’ e nvahissement des lisières étroitespar des espèces d’oiseaux généralistes qui deviennent plus abon-dantes que les espèces de forêt mature en est un autre. Ainsi, nosdonnées montrent que des changements subtils s’opèrent dans leslisières étroites. Il est difficile de prédire si ces changementsmèneront à la disparition de ces espèces des lisières étroites ous’ils s’estomperont avec la régénération des milieux adjacents.

Comparaison de lisières de 60 m riveraines et nonriveraines en pessière noire

Cette étude a été initiée en 1997, suite à l’adoption par leGouvernement du Québec d’un nouveau Règlement sur lesnormes d’interventions en milieu forestier (RNI) (Gouvernementdu Québec 1996). Pour limiter la superficie des aires de coupesd’un seul tenant dans les forêts du domaine public québécois, ondoit conserver entre deux aires de coupes soit un séparateurboisé de 60-125 m de largeur selon la dimension des coupesadjacentes, soit un bloc de forêt d’au moins 3 m de hauteur d’unesuperficie équivalente à la plus grande des aires déboisées.Comme dans le RNI précédent, les séparateurs de 60 m peuventêtre combinés aux lisières boisées riveraines de 20 m qu’on doittoujours laisser en bordure des cours d’eau et des plans d’eaup e rm a n e n t s. On ignore la capacité de ces séparateurs ri ve rains ounon ri ve rains à maintenir la biodive r s i t é . Un dispositif ex p é ri m e n t a la été installé en 1997 par le ministère des Ressources naturelleset le ministère de l’Environnement et de la Faune en collabora t i o navec Produits forestiers Donohue pour évaluer l’utilisation par lafaune des séparateurs de coupe et des blocs résiduels. Dans les

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lignes qui suivent, nous traiterons du volet communautés depassereaux de cette étude (Darveau et al. 1 9 9 9 b ) .

Les travaux se sont déroulés dans un aire d’environ 100 km2

( 4 9o09’N, 72o58’O) dans l’aire commune 025-03, secteur des lacsMontréal, Gronick et du Loup, à environ 30 km au nord-ouest deS a i n t - T h o m a s - D i d y m e, comté de Roberva l . De 1997 à 1999,nous avons comparé les communautés d’oiseaux et évalué lesuccès reproducteur des oiseaux dans un dispositif ex p é ri m e n t a lcontenant 20 unités d’échantillonnage : 5 témoins, 5 sépara t e u r sde coupe en milieu ri ve rain, 5 séparateurs de coupe non ri ve ra i n set 5 blocs résiduels de 20 ha. Pour faciliter l’analyse des données,les oiseaux ont été repartis en 4 groupes selon leur statut migra-t o i r e : espèces résidantes (résident à l’année dans la région),espèces irru p t i ves (qui ont une migration irrégulière et dont lespopulations montrent de fo rtes fluctuations en relation avec ladisponibilité de nourriture), migrateurs de courte distance (hive r-nent aux États-Unis et au Canada) et migrateurs néotropicaux( h i ve rnent plus au Sud) (David 1996; Gauthier et Au b ry 1995).

Les résultats des trois années d’étude montrent principalementque les densités d’espèces de migrateurs de courte distancesont significativement plus élevées dans les sépara t e u r sriverains que dans les séparateurs non riverains (significatif 3 anssur 3) et que les migrateurs néotropicaux sont 2-3 fois moinsabondants dans les séparateurs riverains et non riverains quedans les témoins (significatif 3 ans sur 3). Les résidants ont mon-tré le même patron que les néotropicaux la première année, maispas les 2 suivantes. Quant aux espèces irruptives, elles étaientpeu abondantes partout.

Dans cette région d’étude, les coupes forestières pratiquéesselon le modèle avec des séparateurs de coupe (riverains et nonriverains) diminuent de près de 85% la superficie en forêt maturedans les aires de coupe (J.F. Gingras, FÉRIC, comm.pers.). Nosrésultats montrent que les lambeaux de forêts qui restent sousforme de séparateurs riverains et non riverains ont des densitésd’oiseaux plus faibles que les massifs forestiers. D’une part, detels résultats peuvent paraître rassurants (1) parce qu’ils mon-trent que les séparateurs sont utilisés par les oiseaux forestiers,(2) parce que le succès reproducteur n’y est pas plus faible et (3)parce qu’on pourrait estimer que ces séparateurs peuvent main-

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tenir un peu plus de 5% des effectifs d’oiseaux que l’on trouvaitavant la coupe, ce qui pourrait être suffisant pour maintenir la bio-diversité. D’autre part, on peut conclure que, du point de vue despopulations d’oiseaux, le type de paysage généré par cettestratégie d’intervention n’est pas le plus efficace et qu’à superfi-cie égale (15% de la forêt originale), un gros bloc pourrait main-tenir plus d’oiseaux. De plus, il est connu qu’à la suite de lacoupe des forêts adjacentes, les populations d’oiseaux aug-mentent temporairement dans les lambeaux de forêt rémanentequi servent de refuge temporaire pour les oiseaux (Darveau et al.1995;Schmiegelow et al. 1997). Il est donc possible qu’au coursdes prochaines années, les densités de populations deviennentencore plus faibles dans les séparateurs.

Recommandations

Une norme générale obligeant à laisser des lisières boisées de 20m le long de tous les cours d’eau et plans d’eau, avec comme seulemesure spécifique un élargissement à 60 m le long des rivières àsaumon, ne peut assurer le maintien de la biodive r s i t é . N o u srecommandons de favo riser une certaine hétérogénéité à dif-férentes échelles spatiales. Étant donné que nos études ont étémenées surtout à l’échelle du peuplement et parce qu’elles ne sontpas accompagnées d’une évaluation des aspects socio-économiques de l’aménagement du milieu ri ve rain, nos données nenous permettent pas de déterminer le mélange approprié delisières à maintenir dans le pay s a g e. N é a n m o i n s, nos résultats der e c h e r c h e, alliés à des ex p é riences de développement de stra t é-gies d’aménagement du milieu ri ve rain sur les terres tra d i t i o n n e l l e sdes Algonquins du lac Barrière (Bélanger et al. 1994) et à la Fo r ê tMontmorency (Delorme 1993;Vallières 1999) nous amènent à pro-poser une stratégie globale visant les objectifs suiva n t s :(1) maintenir le rôle clé des écosystèmes ri ve rains pour la biodive r-sité régionale; (2) maintenir l’intégrité écologique des écosystèmesa q u a t i q u e s ; (3) contri buer à maintenir la biodiversité locale encréant des refuges pour la faune terrestre; (4) protéger les habi-tats et les espèces d’intérêt particulier; (5) protéger des sitesrécréatifs et touristiques; (6) contribuer au maintien de la con-nectivité du paysage (corridors fauniques);particulièrement dansles paysages dominés par la coupe rase; (7) permettre l’exploita-tion de la matière ligneuse lorsqu’elle est compatible avec lesobjectifs précédents.

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Remerciements

Nous sommes reconnaissants envers toutes les personnes et lesorganisations qui ont contribué à ces études. Merci aussi auxorganisateurs du Forum Forêt-Faune 1999 qui ont fourni uneexcellente opportunité de présenter et discuter ces résultats.

Références

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- Chapitre 7 -LES BRÛLIS RÉCENTS, LA RÉCUPÉRATION

DES ARBRES MORTS ET LEURS CONSÉQUENCESSUR LA BIODIVERSITÉ

Pierre DRAPEAU, biol. Ph.D.

Département des sciences biologiques, UQAMGroupe de recherche en écologie forestière interuniversitaire

(GREF-I)C.P. 8888 succ. Centre-VilleMontréal (Québec) H3L 3K6

Résumé

Un défi important posé par la gestion durable des forêts, tantpour l’industrie forestière que pour les agences gouvernemen-tales responsables de la gestion des forêts, consistera à évaluersi les forêts aménagées peuvent se substituer aux mosaïquesnaturelles. L’un des aspects à considérer dans cette évaluationrenvoie au maintien en forêt aménagée d’une quantité et d’unequalité des débris ligneux morts debout et au sol comparables àce qui prévaut dans les mosaïques naturelles. En forêt deconifères, la densité de la matière ligneuse morte atteint desvaleurs maximales dans les forêts anciennes et les brûlisrécents. Dans les forêts anciennes, plusieurs études ont docu-menté l’importance de la matière ligneuse morte pour la faune,tant en ce qui a trait au rôle de gîte des arbres morts qu’à celuide ressource alimentaire. Les brûlis récents ont toutefois étépassablement négligés et leur rôle dans le maintien de la diver-sité biologique des mosaïques forestières boréales demeureméconnu. Depuis 1997, une étude sur la diversité biologique desforêts matures et anciennes issues de perturbations naturellesest en cours sur un territoire de 25 000 km2 qui recoupe les por-tions québécoise et ontarienne de la grande région de la ceintured’argile «Clay belt» dans la zone de la pessière noire à moussesen Abitibi. Les résultats préliminaires de cette étude indiquentque le premier stade après feu est caractérisé par une diversitébiologique tout à fait particulière qu’on ne retrouve pas dans lesautres classes d’âge de la forêt boréale. Pour la forêt boréale de

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l’est du Canada, dont le Québec est un maillon important, larécupération du bois mort dans les superficies brûlées est unestratégie d’aménagement qui pourrait affecter non seulement lafaune qui dépend de ces forêts de début de succession maiségalement la diversité biologique de la forêt boréale dans sonensemble compte tenu de la contribution importante des brûlisrécents.

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Introduction

Bien que l’aménagement forestier puisse montrer des similaritésavec les perturbations naturelles (feux et épidémies d’insectes)auxquelles sont adaptés les organismes, il persiste d’importantesdifférences entre ces deux types de perturbations. Par exemple,il est connu que les révolutions forestières sont généralementplus courtes que le cycle des perturbations naturelles (Spies etal. 1994 ; Gauthier et al. 1996 ; Bergeron et al. 1999a) et plussévères quant aux arbres vivants et morts qui sont laissés aprèscoupe (Spies et al. 1994). En ce qui a trait aux arbres morts, leurimportance écologique n’a cessé d’être reconnue ces dernièresannées (Harmon et al. 1986 ; Spies et al. 1988). Que ce soitquant à leur rôle d’habitat pour la faune vertébrée (Maser et al.1988 ; Hutto 1995 ; Bull et al. 1997), et invertébrée (Stark 1982 ;Holliday 1991), que leur importance dans les flux d’énergie et lecycle des éléments nutritifs, ou encore de leur influence sur lesconditions de sols ou le transport des sédiments, les arbresmorts debout et au sol représentent une caractéristique clé desécosystèmes boréaux. Un défi important posé par la certificationenvironnementale de l’aménagement forestier, tant pour l’indus-trie forestière que pour les agences gouvernementales respon-sables de la gestion des forêts, consistera à évaluer si les forêtsaménagées peuvent se substituer aux mosaïques naturelles(Hansen et al. 1991 ; Franklin 1993 ; Hejl et al. 1995). L’un desaspects à considérer dans cette évaluation renvoie au maintienen forêt aménagée d’une quantité et d’une qualité des débrisligneux morts debout et au sol qui soit comparable à ce qui pré-vaut dans les mosaïques naturelles.

Dans les forêts de conifères, la densité de la matière ligneusemorte debout et au sol atteint des valeurs maximales dans lesforêts anciennes et les brûlis récents (Hutto 1995;Saab et D u d l ey1 9 9 8 ; C l a rk et al. 1 9 9 8 ) . Dans les forêts anciennes, plusieursétudes ont documenté l’importance de la matière ligneuse mor t edebout et/ou au sol pour la fa u n e, tant en ce qui a trait au rôle degîte des arbres morts qu’à celui de ressources alimentaires (Dav i set al.1 9 8 3 ; Bull et al.1 9 8 6 ; Maser et al.1 9 8 8 ; Lundquist et Mari a n i1 9 9 1 ; Walters 1991;Bull et al. 1 9 9 7 ) . Les brûlis récents ont toute-fois été passablement négligés (Hutto 1995; Saab et Dudley1998) et leur rôle dans le maintien de la diversité biologique desmosaïques forestières boréales demeure méconnu .

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Pour les forêts anciennes, le MRN a récemment mis sur pied ungroupe de travail qui vise à identifier et à protéger les forêtsexceptionnelles du Québec. Les forêts anciennes représententl’une des trois catégories de forêts visées par ce programme. Àl’inverse, les plans spéciaux d’aménagement portant sur larécupération du bois dans les brûlis (l’article 79 de la loi sur lesForêts) risquent d’altérer passablement la disponibilité du boismort et en corollaire, d’affecter la diversité biologique qui dépendde cet attribut clé de l’habitat en zone boréale. Un principe élé-mentaire de précaution incite que l’on s’assure que cette inter-vention ne cause pas de préjudice à la diversité biologique de lamosaïque forestière boréale. Le présent travail fait partie d’unprogramme de recherche portant sur la dynamique de la forêtboréale et sa diversité biologique qui est en cours depuis 1997dans la portion ouest de la zone de pessière noire à mousses enAbitibi. Le volet concernant les brûlis récents vise: (1) à évaluerla contribution, au sein de la mosaïque forestière boréale, desbrûlis à la diversité biologique et (2) à préciser le rôle joué par leschicots (arbres morts) dans le maintien de cette dive r s i t ébiologique. Dans le cadre du présent document, l’accent sera missur les résultats concernant la disponibilité des arbres morts etleur utilisation par l’avifaune, l’un des quatre groupes indicateursde la diversité biologique suivi dans ce programme de recherche.

Aire d’étude

Cette étude a été menée dans la zone de la pessière noire àmousses dans le nord-ouest de la région de l’Abitibi au Québec(49°13’17” à 49°51’05”; 78°38’35” à 79°23’13”) ainsi que dans laforêt modèle du lac Abitibi (49°03’33” à 49°42’20”; 80°09’03” à80°38’35”) en Ontario. Ces régions font partie de la ceintured’argile, «northern Clay Belt», une vaste unité physiographiquecaractérisée par des dépôts lacustres des lacs proglaciairesBarlow et Objibway (Vincent et Hardy 1977). Les sols argileuxprédominent cette région où la topographie est relativementfaible et la mosaïque forestière est dominée par l’épinette noire(Picea mariana ). Le pin gris (Pinus banksiana) domine les sitesxériques tels les eskers, les plages et les plaines proglaciaires(Rowe 1972).

Nos sites d’études étaient localisés à l’intérieur d’un vastesecteur entre le 48ième et le 50ième degré de latitude (25 000 km2)

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où la reconstitution historique des feux est en cours le long d’untransect nord-sud (Bergeron et al. 1999b). La carte préliminairede l’historique des feux et les cartes forestières reportant lesopérations récentes et projetées pour les prochaines années ontété utilisées pour délimiter quatre paysages forestiers (100 à 250km2) provenant de divers événements de feu (de 1 an à plus de200 ans après feu). Dans chaque paysage, les stations d’échan-tillonnage de l’avifaune et de la matière ligneuse morte ont étédisposées le long de transects linéaires (distance entre les sta-tions 350 à 450 m) qui avaient de 1,2 à 2,5 km de longueur. Autotal, le territoire a été couvert par 348 stations d’échantillonnage.

Méthodes

Échantillonnage de l’avifaune et des arbres morts debout

La méthode des points d’écoute a été utilisée pour dénombrerles oiseaux (Blondel et al. 1 9 7 0 ; 1 9 8 1 ; Ralph et al. 1 9 9 5 ) . L e sdénombrements ont été réalisés durant les mois de juin de1997 et 1998. L’échantillonnage débutait à l’aurore pour se ter-miner à 9:00 (HAE). Les données d’occurrence et d’abondanceont été récoltées dans un rayon de 75 m et à distance illimitée.Les stations ont été visitées deux fois au cours de la saison denidification, au début et dans la deuxième moitié de juin. Àchaque visite, les oiseaux (vus et entendus) étaient notés àtoutes les 5 minutes pour une période de 20 minu t e s. L e smodalités d’utilisation de la technique des points d’écoute sontbasées sur une étude méthodologique préalable sur l’efficacitéde cette technique à bien cara c t é riser la composition des com-munautés d’oiseaux à l’échelle du point (Drapeau et al . 1 9 9 9 ) .

Les conditions locales de la végétation et plus particulièrement ladensité et la qualité des arbres morts debout ont été carac-térisées à chaque station d’échantillonnage des oiseaux. De lami-juillet à la mi-août, ces caractéristiques ont été mesuréesdans des quadrats couvrant une surface de 700 m

2. Pour les

arbres morts debout, le diamètre exact à hauteur de poitrine(DHP) a été mesuré pour tous les arbres de plus de 1,3 m.Chaque arbre a également été caractérisé quant à son état dedécomposition. Nous avons utilisé le système de classificationde Thomas et al . (1979) modifié par le Service des forêts de laColombie-Britannique. L’état de décomposition a été mesuré au

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moyen de trois variables décrivant (1) la condition de la cime, (2)le pourcentage d’écorce sur le tronc et (3) le niveau de décom-position du tronc. Une analyse en composantes principales surces va ri a bles a ensuite permis d’ordonner les stations quant àl’état moyen de décomposition des arbres mort s. L’ u t i l i s a t i o ndes arbres morts pour l’alimentation (petits trous et/ou soulève-ment de l’écorce) et la reproduction (cavités de nidification) ontété notées pour chaque arbre.

Résultats

Changements de disponibilité des arbres morts

La disponibilité des arbres morts a varié de façon significative enfonction du temps depuis le dernier feu (figure 1). La densité desarbres morts était maximale dans le brûlis récent et a atteint savaleur minimale dans les forêts anciennes (figure 1). Lespaysages brûlés de 20 ans et de plus de 100 ans avaient desdensités similaires qui étaient intermédiaires aux deux autrespaysages.

Figure 1. Surface terrière moyenne des arbres morts debout enfonction du temps depuis le dernier feu dans quatre paysagesforestiers échantillonnés en Abitibi. Les lettres différentesindiquent une différence significative (P < 0,05) entre lespaysages.

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Des différences significatives ont également été notées pourl’état de décomposition des arbres morts entre les pay s a g e sforestiers (Kruskal-Wallis: χ2 = 27,7, df = 3, P = 0,001). Dans lebrûlis récents, les arbres étaient peu décomposés tandis que laplus fo rte proportion d’arbres fo rtement décomposés étaitobservée dans les peuplements provenant du brûlis de 20 ans(figure 2). L’état de décomposition des arbres morts dans lesforêts matures et anciennes était similaire. Dans ces paysages laplupart des arbres morts atteignaient un état de décompositionintermédiaire (figure 2 ).

Figure 2. Proportion d’arbres morts debout à divers stades dedécomposition (Dec1 = peu décomposé, Dec2= modérémentdécomposé, Dec3 = fortement décomposé) en fonction du tempsdepuis le dernier feu dans les quatre mosaïques forestièreséchantillonnées en Abitibi.

Distribution des groupes d’espèces utilisateurs des arbres morts

Au total, 94 espèces ont été détectées dans les 348 stationsd ’ é c h a n t i l l o n n a g e.La moitié de ces espèces étaient rares (détectéesdans moins de 5 % des stations). Globalement, la proport i o nd’espèces associées aux arbres morts tant pour leur alimentationque pour leur reproduction (ci-après, UAM pour utilisateurs d’arbresm o rts) était de 15 %. Le long du gradient représentant les diversesclasses d’âge de la forêt issue de feux la proportion d’UAM était

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maximale dans le stade post-feu de 1 an ainsi que dans les forêtsmatures (figure 3).La proportion d’oiseaux excavateurs primairesde cavités (EPC) était plus élevée dans les forêts récemmentbrûlées tandis que les oiseaux utilisateurs secondaires de cavités(USC) étaient concentrés dans le paysage de forêts matures touten étant abondants dans les forêts anciennes. Les excavateursprimaires étaient toutefois absents dans les forêts anciennes del’Abitibi.

Figure 3. Proportion des espèces utilisatrices d’arbres morts surle nombre total d’espèces d’oiseaux détectées en fonction dutemps depuis le dernier feu dans les quatre paysages forestierséchantillonnés en Abitibi. Trois groupes d’oiseaux sont représen-tés, l’ensemble des espèces utilisatrices UAM, les excavateursprimaires de cavités EPC et les utilisateurs secondaires decavités USC. Les tests statistiques (Tests de G) portaient sur unec o m p a raison entre paysages pour chacun des gr o u p e sd’espèces. Les lettres différentes indiquent une différence signi-ficative (P < 0,05) entre les paysages.

Distribution des espèces individuelles

Bien que rencontré sporadiquement dans les autres paysagesforestiers, le Pic à dos noir était fortement associé aux brûlisrécents (figure 4a). Le Pic flamboyant était plus fréquent dans lespremiers stades suivant le feu (brûlis de 1 et de 20 ans). Le Pic

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maculé n’a été détecté que dans les forêts matures alors que lePic tridactyle, bien que faiblement abondant, a été détecté dansles paysages récemment brûlés et dans les forêts matures. Lesutilisateurs secondaires de cavités étaient concentrés dans lesforêts matures, notamment le Grimpereau brun et la Sittelle àpoitrine rousse (figure 4b). Le Troglodyte mignon et la Mésangeà tête brune étaient aussi abondants dans les forêts anciennesque dans les forêts matures (figure 4b).

Figure 4. D i s t ri bution des espèces individuelles des gr o u p e sécologiques(a) d’ex c avateurs primaires et (b) d’utilisateurssecondaires de cavités dans les quatre paysages fo r e s t i e r sreprésentant un gradient temporel depuis le dernier feu enA b i t i b i .

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Discussion

La disponibilité en arbres morts en ce qui a trait à leur quantitéqu’à leur qualité (accroissement du diamètre des arbres mortsdebout) a souvent été associée aux forêts anciennes qui sontconsidérés comme des habitats clés pour la faune en raison deces attributs structuraux d’habitat (Raphael et White 1984;Probstet al. 1992). Pour la zone de pessière à mousses de l’ouest duQuébec, nos résultats indiquent que la disponibilité en arbresmorts était fortement réduite dans les forêts anciennes. La sur-face terrière moyenne des arbres morts atteignait sa plus faiblevaleur dans ce paysage. Les forêts anciennes n’ont égalementpas la même importance écologique pour la distribution de l’avi-faune associée aux arbres morts que ce qui a été observé dansles études précitées. Ainsi, les excavateurs primaires ét a i e n tmoins abondants dans le paysage de forêts anciennes et l’abon-dance des utilisateurs secondaires de cavités était pri n c i p a l e m e n tliée à l’omniprésence du Troglodyte mignon. L’ i m p o rtance des fo r ê t sanciennes pour les oiseaux peut va rier en fonction des écosys-tèmes fo r e s t i e r s. Dans une revue récente de la littérature publiée surles oiseaux forestiers des Rocheuses, en comparant divers trava u xp o rtant sur les relations av i faune – habitats, Hejl et al. (1995) n’ontpu trouver d’espèces d’oiseaux associées façon consistante auxforêts anciennes. Nos résultats apparaissent généra l i - s a bles àl ’ e n s e m ble du territoire de la ceinture d’argile en zone de pessièrenoire à mousses de l’ouest (Saucier et al. 1 9 9 8 ) . Pour la pessièrenoire à mousses de l’est, la portée et les limites de nos résultatsd evront être jaugées au moyen d’autres études axées sur la dis-t ri bution de la faune en fonction du gradient d’âge des fo r ê t sdepuis la dernière perturbation naturelle.

Nos résultats indiquent que les brûlis récents sont spécifiquestant au niveau de leur attributs structuraux d’habitat que desespèces qui les fréquentent ; ce qui en fait des habitats impor-tants en zone de pessière. Ainsi, les oiseaux excavateurs de ca-vités atteignent leur abondance maximale dans les brûlisrécents. Une espèce comme le Pic à dos noir est non seulementplus abondante mais est également restreinte aux brûlis récents.Sa fréquence de détection dans les habitats brûlés est dix foissupérieure à ce qui a été observé dans les autres classes d’âgede forêts. Nos résultats sont similaires à ceux d’Hutto (1995) etde Saab et Dudley (1998) pour les forêts des Rocheuses.

92

À l’échelle de son aire de répartition, le Pic à dos noir est de plusen plus considéré comme une espèce spécialiste des brûlisrécents. Enfin, les brûlis récents sont des habitats clés dans lerecrutement des arbres morts tant pour leur quantité que pourleur qualité. Bien qu’il ne soit pas surprenant que le feu consti-tue la source principale de bois mort en forêt boréale, l’impor-tance des brûlis récents comme source de recrutement de lamatière ligneuse morte est amplifiée dans notre région d’étudepar le faible recrutement observé dans les autres classes d’âgedes forêts d’épinette noire.

Implications en aménagement forestier

L’objectif premier de l’aménagement forestier est de perpétuerles forêts, et non de changer l’affectation des terres comme c’estle cas pour l’agriculture (Hejl et al. 1995). Cette interventionhumaine peut néanmoins entraîner des changements à longt e rme dans la composition et la structure des mosaïquesforestières et, en corollaire, des changements de dive r s i t ébiologique. En forêt boréale mixte les effets combinés de lacoupe sur la régénération du couvert forestier (Carleton etMcLellan 1994) et des courtes révolutions forestières (Spies etal. 1994 ; Gauthier et al. 1996) ont généré des changements àgrande échelle favorisant la conversion du couvert forestiermature de mixte à feuillu. Drapeau et al. (sous presse) ont mon-tré que ces changements à grande échelle peuvent affecter l’in-tégrité écologique des communautés d’oiseaux.

En zone de pessière à mousses, la composition du couvertforestier est plus simple et risque moins d’être affectée par l’amé-nagement forestier. Des changements dans la structure d’âge dela mosaïque sont toutefois à prévoir, notamment la diminution dela proportion de forêts surannées et anciennes dans le paysage(Bergeron et al. 1999a). La perte nette d’habitats forestierssurannés et anciens est d’autant plus préoccupante si ces habi-tats forment une proportion importante de la mosaïque forestière.Dans notre région d’étude, la proportion des peuplements quidépasse 100 ans est très élevée. Une régularisation avec unerévolution de 100 ans n’inclut que 40 % des peuplementsnaturels. L’intégrité écologique des communautés animales,notamment de l’avifaune risque fort d’être fortement altérée parl’effet cumulatif du rajeunissement de la mosaïque forestière sur

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l’ensemble du territoire, et ce même si à une échelle locale, nospeuplements forestiers anciens ne comportaient pas d’espècesrestreintes à ces habitats. Dans ce type de forêt, l’enjeu premieren matière de maintien de la diversité biologique renvoie donc àla mise en place d’une stratégie d’aménagement qui sur l’ensem-ble du territoire, conserve la diversité des conditions forestièresde toutes les classes d’âge des forêts. La stratégie d’aménage-ment proposée récemment par Bergeron et al. (1999a) et quiconsiste à remplacer la régularisation uniquement basée sur lacoupe totale (CPRS) par une diversification des pra t i q u e sforestières sur un même territoire s’avère être une approcheprometteuse pour maintenir en forêt aménagée la gamme desconditions forestières habituellement rencontrées en fo r ê tnaturelle et ainsi minimiser les effets sur la diversité biologique.Dans leur modèle Bergeron et al. (1999a) proposent que les ter-ritoires soient en partie aménagés en CPRS, en coupes par-tielles et en coupes sélectives recréant ainsi une distribution desclasses d’âge semblable à celle générée par les feux. En outre,des interventions forestières (coupe sélective) sont proposéesdans les forêts anciennes. À cet égard, nos résultats n’indiquentpas que cela pourrait causer un préjudice au contingent d’espècesqui fréquentent cet habitat en Abitibi.

Enfin, étant présentement en progression dans les forêts nordiques,l’aménagement forestier dev ra de plus en plus composer avec lesincendies de forêt qui, à ces latitudes, ont cours sur de gra n d e ss u p e r f i c i e s. Dans ce contex t e, il devient important de mettre en placedes modalités d’aménagement qui prennent en considération la con-t ri bution des arbres morts au maintien de la diversité biologique. L e splans spéciaux actuels de récupération des arbres brûlés ne tiennentpas compte du rôle écologique des forêts brûlées dans le maintien dela diversité biologique. La contri bution des brûlis récents tient à la fo i sau fait qu’ils sont des habitats clés pour certaines espèces fa u n i q u e s(la seule espèce d’oiseau spécialisée dans notre aire d’étude étaitassociée à cet habitat) et qu’ils représentent la principale source der e c rutement en arbres morts est importante en zone de pessièrenoire à mousses. Des interventions forestières qui ne tiennent pascompte de ces connaissances peuvent non seulement compromettrela viabilité des populations fauniques qui dépendent de ce typed’habitat forestier mais également réduire considéra blement ladisponibilité pour la faune en arbres morts sur l’ensemble du terri t o i r eforestier en zone de pessière à mousses.

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Remerciements

Cette recherche a été financée par le Réseau des centresd’excellence en Gestion durable des forêts, le Ministère desRessources naturelles du Québec, le Service canadien de lafaune (Région du Québec) et la forêt modèle du lac Abitibi. Desremerciements particuliers s’adressent à mon équipe de terrain,Réjean Deschênes, Daniel Brongo, Simon Bérubé, EmmanuelMilot, Antoine Nappi, François Gagnon et Julie Fortin.

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- Partie III -Mise en oeuvre

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- Chapitre 8 -PROCESSUS ÉLARGI DE PLANIFICATION

DE L’AMÉNAGEMENT FORESTIER

Marian FOURNIER, ing. f.

Ministère des Ressources naturelles880, chemin Sainte-Foy, bureau 5.00

Québec (Québec) G1S 4X4

Résumé

Le Forum Forêt-Faune constitue une excellente occasion pourtous les participants de mettre à jour leurs connaissances enmatière de gestion intégrée des ressources (GIR). En complé-ment avec la panoplie d’études et d’outils qui leur sont présentés,les gens désireux de s’impliquer pour améliorer la GIR ont besoinde bien comprendre le processus de planification de l’aménage-ment forestier en vigueur au Québec. Pour chacun des territoiressous aménagement forestier (aire commune), l’approche globalede planification comporte trois niveaux.

Le premier niveau général porte sur un hori zon de 25 ans. Il fo u rn i tune description des superficies occupées par les principaux gra n d sécosystèmes forestiers et présente les stratégies d’aménagementqui ont été choisies pour récolter, régénérer et aménager lesdifférents écosystèmes fo r e s t i e r s. C’est à ce niveau que peuve n têtre discutés plusieurs éléments clés comme : les objectifs de pro-duction, les âges de révolution, les méthodes de régénération, lafréquence des éclaircies, etc. Chacun de ces choix a un impact surl ’ é t a blissement de la possibilité de récolte annuelle à rendements o u t e nu et sur la conservation des potentiels multiressources desforêts aménagées.

Le second niveau porte sur un horizon intermédiaire de cinq ans.Il permet de localiser l’ensemble des interventions forestières quisont prévues, y compris le développement du réseau routier.C’est donc à ce niveau qu’il est possible d’analyser la mosaïqueforestière de manière à définir des opportunités d’amélioration decertains habitats fauniques ou la protection de certaines « zones

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sensibles » devant faire l’objet d’analyses plus poussées. C’està cette échelle qu’il est possible d’identifier plus facilement le ter-ritoire d’appartenance de la majorité des intervenants locaux.

Le troisième niveau porte sur la planification annuelle détailléedes opérations forestières. C’est à cette échelle que l’on peutfaire une analyse détaillée de la mosaïque forestière résiduelle etdes mesures de protection spécifiques appliquées aux sites sen-sibles. C’est aussi à ce niveau qu’éclatent les conflits d’utilisa-tion.

Les autorités du MRN, de concert avec leurs homologues de laFAPAQ, ont annoncé un appel à la concertation et une ouverturedu processus de planification de l’aménagement des forêtspubliques. Les intervenants qui veulent s’impliquer concrètementpour améliorer la GIR dans un territoire particulier ont donc toutavantage à identifier clairement le niveau de planification quitraite directement des enjeux spécifiques qui les intéressent. Ilspourront ainsi s’impliquer plus efficacement en proposant desopportunités d’intervention constructives visant à contribuer auconsensus global.

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Le Forum Forêt-Faune constitue une excellente occasion pourpermettre aux participants de mettre à jour leurs connaissancesen matière de gestion intégrée des ressources (GIR). En com-plément avec la panoplie d’études et d’outils qui leur sont présen-tés, les gens désireux de s’impliquer pour améliorer la GIR ontbesoin de bien comprendre le processus de planification del’aménagement forestier en vigueur au Québec.

Globalement, le Québec dispose d’un cadre légal assez com-plet qui comporte plusieurs lois dont le rôle est d’assurer lac o n s e rvation et la mise en valeur de l’ensemble des ressourcesdu terr i t o i r e. Les forêts commerciales couvrent environ 50% dut e r ritoire québécois. C’est la Loi sur les forêts qui fixe lesgrandes orientations d’aménagement et qui précise les méca-nismes de contrôle des activités autori s é e s.

Pour chacun des territoires publics sous aménagement forestier(aire commune), l’approche globale de planification comportetrois niveaux.

✔ Planification stratégique

Le premier niveau général porte sur un horizon de 25 ans. Ilfournit une description des superficies occupées par les princi-paux grands écosystèmes forestiers et présente les stratégiesd’aménagement qui ont été choisies pour récolter, régénérer etaménager les différents écosystèmes forestiers. C’est à cen i veau que peuvent être discutés plusieurs éléments cléscomme : les objectifs de production, les âges de révolution, lesméthodes de régénération, la fréquence des éclaircies, etc.Chacun de ces choix a un impact sur l’établissement de la pos-sibilité de récolte annuelle à rendement soutenu et sur la conser-vation et la mise en valeur des potentiels multiressources desforêts aménagées.

✔ Planification tactique

Le second niveau porte sur un horizon intermédiaire de cinq ans.Il représente en quelque sorte la continuité du plan stratégiqueen permettant de localiser l’ensemble des interve n t i o n sforestières qui sont prévues, y compris le développement duréseau routier. C’est donc à ce niveau qu’il est possibl ed’analyser la mosaïque forestière de manière à définir des oppor-

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tunités d’amélioration de certains habitats fauniques ou la pro-tection de certaines « zones sensibles » devant faire l’objetd’analyses plus poussées. C’est à cette échelle qu’il est possibled’identifier plus facilement le territoire d’appartenance de lamajorité des intervenants locaux et de discuter des objectifs deproduction de chacun des groupes concernés.

✔ Planification opérationnelle

Le troisième niveau porte sur la planification annuelle détailléedes opérations fo r e s t i è r e s. C’est à cette échelle que l’on peutfaire une analyse détaillée de la mosaïque forestière résiduelleet des mesures de protection spécifiques appliquées aux sitess e n s i bl e s. C’est aussi à ce niveau que se déclarent les conflitsd’utilisation latents.

✔ Exemple d’analyse des grands enjeux :

Plusieurs grands enjeux peuvent être l’objet d’une analyse dif-férente à chacun de ces trois nive a u x . Nous avons choisi de vo u sp r é s e n t e r, sous fo rme de tableaux, quelques exemples comme :

• L’amélioration des communications entre les multiplesintervenants,

• La conservation de la biodiversité,• Le développement des accès au territoire,• La stabilisation des approvisionnements des usines et

des perspectives d’emploi dans le domaine forestier.

Bien que ces exemples ne soient pas complets, nous espérons qu’ilsvous aideront à mieux comprendre les enjeux pour élaborer ensuitevos propres analyses sur les sujets qui vous touchent de plus près.

Les autorités du MRN, de concert avec leurs homologues de laFAPAQ, ont annoncé un appel à la concertation et une ouverturedu processus de planification de l’aménagement des forêtspubliques. Les intervenants qui veulent s’impliquer concrètementpour améliorer la GIR dans un territoire particulier ont donc toutavantage à identifier clairement le niveau de planification quitraite directement des enjeux spécifiques qui les intéressent. Ilspourront ainsi s’impliquer plus efficacement en proposant desopportunités d’intervention constructives visant à contribuer à laprotection et la mise en valeur des ressources et ce, sur unebase consensuelle.

104

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- Chapitre 9 -LES MODÈLES D’INDICE DE QUALITÉ DE L’HABITAT : UN

OUTIL D’ÉVALUATION DES HABITATS FAUNIQUES ÀL’ÉCHELLE RÉGIONALE

Pierre BLANCHETTE, biol. Ph. D.

Société de la Faune et des Parcs du Québec675, boul. René-Lévesque Est, 10e étage

Québec (Québec) G1R 5V7

Résumé

Les modèles d’indice de qualité de l’habitat (IQH) constituentavant tout un outil d’évaluation des habitats fauniques à l’échelled’un grand territoire. Ils ne permettent pas de faire de l’amé-nagement des habitats, peuplement par peuplement. Les IQHont été développés pour évaluer la qualité de l’habitat de cer-taines espèces fauniques à partir des cartes forestières ou éco-forestières produites par le ministère des Ressources naturelles.Les composantes qui jouent un rôle déterminant dans les cyclesvitaux des espèces choisies ont été identifiées à partir d’unerevue de la littérature scientifique et transposées dans les mo-dèles. La complexité et la précision des IQH dépendent à la foisdes besoins de l’espèce en terme d’habitat, du niveau de con-naissance de la sélection de l’habitat de l’espèce en cause, etde la disponibilité des données descr i p t i ves de l’habitatprésentes sur les cartes forestières ou écofo r e s t i è r e s. U nprocessus de validation des IQH, actuellement en cours, estnécessaire afin de bonifier les modèles et de les rendre plusp e r fo rm a n t s. Un logiciel simple et pratique (IQH.EXE) estd i s p o n i ble pour calculer l’IQH, ou certaines variables d’IQH,pour 6 espèces et ce, à partir des bases de données descriptivesdes cartes forestières ou écoforestières.

Adapté de : Ostiguy, D. (en préparation). Planifier la gestionintégrée des ressources du milieu forestier ; desoutils. Chapitre 1. La conservation de la diversitébiologique. Faune et Parcs Québec.

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L’indice de qualité d’habitat (IQH) est un outil d’analyse et de ges-tion des habitats fauniques qui permet de déterminer la valeur dechacun des peuplements forestiers présents sur un territoiredonné. On obtient en fait des informations concernant la qualitéet la quantité des habitats des espèces considérées. On utilisela cartographie des peuplements forestiers l’échelle 1 : 20 000,qui est produite par le ministère des Ressources naturelles(MRN). On a aussi recours à la littérature scientifique afin deconnaître les composantes de l’habitat qui jouent un rôle déter-minant dans les cycles vitaux des espèces choisies. Ce sont lesexigences d’habitats qui sont décrites dans les modèles. Entransposant ces données sur la carte écoforestière, on peut ainsilocaliser les secteurs qui constituent des habitats de bonne,moyenne ou faible qualité. Lorsque vient le moment de planifierles interventions forestières, ces informations facilitent la prise dedécision des gestionnaires et utilisateurs soucieux de respecterle développement durable des ressources et de participer aumaintien de la biodiversité.

Prenons le cas de la martre d’Amérique, par exemple. Pourhabiter à l’année dans un milieu donné, cette espèce doit y trou-ver les principaux éléments nécessaires à sa survie. Or, les con-naissances acquises sur la biologie de la martre permettent depréciser ses exigences en termes d’habitat. Ainsi, pour qu’unmilieu puisse répondre aux besoins de cet animal à fourrure, ondoit y trouver :

1 . Des débris ligneux (branch e s ,t ro n c s , arbres renv e rs é s , etc.) DL

Ces débris sont particulièrement importants pour la martre pen-dant la saison hivernale car ils créent des tunnels et des abrissous la neige et permettent ainsi à l’animal de se protéger dufroid et de trouver plus facilement la nourriture dont il a besoin(souris, mulots, etc.).

2 . Un couvert forestier dense dominé par des résineux CEDCLes débris ligneux sont généralement plus abondants dans cesforêts que dans celles où les feuillus dominent. En outre, plus unpeuplement résineux est dense, moins il y a de neige au sol, cequi facilite les déplacements de la martre et améliore son habitat.

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3 . Des peuplements à un stade de développement avancé SD

Les forêts matures et surannées (vieilles forêts) répondent auxbesoins d’abri de la martre et ils forment une meilleure barrièrecontre la neige. L’animal a donc plus facilement accès aux débrisaccumulés sur le sol. De plus, ces peuplements sont plus fra-giles face aux perturbations naturelles (grands vents, etc.) et lesdébris ligneux y sont plus abondants.

Chacun de ces éléments est considéré dans le calcul de l’IQH dela martre dont voici un bref aperçu.

Dans cette équation:

• DL réfère aux débris ligneux (décrit au point 1);• CEDC signifie composition en essences et densité du

couvert (décrit au point 2);• SD désigne le stade de développement (décrit au point 3);• 3 est le nombre par lequel on divise le résultat pour obtenir

une valeur d’IQH entre 0 et 1.

Lors du calcul de l’IQH on attr i bue une valeur de 0 à 3 à chaqueélément de l’équation, la cote 0 (nulle), 1 (fa i ble), 2 (moyenne) ou3 (élev é e ) . Par exe m p l e, on pourrait obtenir dans un peuplement :

• la cote 1 pour les débris ligneux (DL) ;• la cote 1 pour la composition et la densité du couve rt (C E D C) et• la cote 3 pour le stade de développement (SD).

L’indice de qualité d’habitat de ce territoire se calculerait alorscomme suit:

111

Ce résultat de 0,48 nous indique que ce peuplement représenteun habitat de faible qualité pour la Martre d’Amérique (tableau 2).

Tableau 2. Classe de qualité de l’habitat forestier selon la valeurde l’IQH de la martre

En faisant ce même calcul pour chacun des peuplementsprésents dans les limites du territoire, on peut déterminer lavaleur globale de ce territoire en tant qu’habitat pour une espèce(figure 1).

Le logiciel IQH

Le logiciel IQH calcule les indices de qualité de l’habitat de lamartre d’Amérique, de l’orignal, de la gélinotte huppée, dulièvre d’Amérique, du grand pic et de l’ours noir à partir desdonnées du deuxième ou du troisième programme décennald’inventaire forestier. Les résultats qui sont compilés pourchaque parcelle forestière ou chaque municipalité, sontexprimés en termes de superficie de chacune des classes dequalité d’habitat (nulle, faible, moyenne ou élevée) et depourcentage de chacune de ces classes dans chacune desparcelles ou municipalités considérées.

Les modèles d’IQH et les éléments considérés pour le calculva rient selon les exigences des espèces représentative sc h o i s i e s. Ainsi, le Grand pic, espèce représentative des fo r ê t sfeuillues matures et sura n n é e s, se réfugie dans les fo r ê t sdenses et hautes qui sont dominées par les feuillus et où il y asuffisamment de chicots de grande taille pour la nidification.L’IQH du grand pic tient compte de tous ces éléments.

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Figure 1. Exemple de l’évaluation de la qualité de l’habitat d’uneespèce représentative des forêts résineuses surannées à partirde la carte écoforestière (échelle 1/20 000) du MRN.

113

Attention

Les modèles IQH constituent avant tout un outil de planifica-tion de la conservation des habitats à l’échelle d’un grand ter-ritoire et non pas un outil qui permet de faire l’aménagementdes habitats, peuplement par peuplement. La précision desrésultats des IQH s’amenuise à mesure que la superficie duterritoire à évaluer diminue. La fiabilité des IQH dépend à lafois du niveau de connaissance que l’on a des relations entrel’espèce et son habitat et de la précision des données quisont utilisées pour évaluer les habitats. Enfin, les mo-dèlesIQH devront être validés afin d’augmenter leur niveau de con-fiance ; d’ailleurs, certains modèles ont déjà fait l’objet d’unevalidation où sont en voie de l’être.

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LARUE, P. 1992. Développement d’un indice de qualité del’habitat pour la Martre d’Amérique (Martes americana) auQuébec. Québec, ministère du Loisir, de la Chasse et dela Pêche, Direction générale de la ressource faunique,Gestion intégrée des ressources, Document technique92/7, 30 p.

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- Chapitre 10 -COMMENT ÉLABORER UNE STRATÉGIE

DE DISPERSION DES COUPES À L’ÉCHELLEDU PAYSAGE EN FORÊT BORÉALE?

Nathalie P E R RO N1, biol. M.Sc., et Louis B É L A N G E R2, ing.f. P h . D.

1Université du Québec à Chicoutimi555, boulevard de l’Université Chicoutimi (Québec) G7H 2B1

2Faculté de foresterie et de géomatiqueUniversité Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Résumé

Au Québec, malgré les progrès réalisés en matière de planifica-tion et d’aménagement forestier, un enjeu majeur demeure, celuides superficies de coupe versus la forêt résiduelle. Le nouveaurèglement sur les normes d’intervention (RNI) dans les forêts dudomaine public a mis presque uniquement l’emphase sur laréduction de la dimension des coupes au détriment de la forêtrésiduelle qui elle est en «lambeaux». Cette situation est problé-matique pour plusieurs espèces fauniques qui ont besoin de cesforêts résiduelles en proportions suffisantes afin de se maintenirsur le territoire. À l’instar de d’autres provinces, nous allonsdevoir réviser nos façons de faire et planifier la dispersion descoupes à une autre échelle, celle du paysage!

Pour atteindre les objectifs que le Québec s’est fixé en matièrede maintien de la biodiversité, nous allons devoir élaborer desstratégies de coupes basées sur l’aménagement de la mosaïqueforestière plutôt que sur le peuplement. Trois approches sontenvisageables. Tout d’abord, il y l’élaboration d’une nouvellen o rme panquébécoise. Cette ave nue serait sûrement tropgénérale et contraignante. Tout comme l’Ontario, nous pourrionsaussi décider d’imiter les perturbations naturelles mais la popu-lation ne serait sans doute pas d’accord. La voie privilégiée

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serait plutôt d’élaborer un plan d’affectation des terres qui seraitsous la responsabilité du Gouvernement. Ce nouveau niveau deplanification serait à l’échelle des MRC et aurait des objectifs demosaïque par unités terri t o riales de référence (UTR). On s’inspi-r e rait des régimes de perturbations naturelles de la forêt boréalepour élaborer des stratégies de dispersion des coupes, socialementa c c e p t a bl e s, adaptées aux différents types d’écosystèmes.

Dans une perspective de foresterie durable, cette nouvelle façonde faire devra s’adapter aux différents contextes régionaux, telsque la variété d’écosystèmes boréaux (sapinière ou pessière), letype et le régime de perturbations naturelles (épidémie de latordeuse des bourgeons de l’épinette, chablis ou feux) ainsi queles besoins des utilisateurs (forestiers ou fauniques) et les aspi-rations des populations locales.

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Au Québec, malgré les progrès réalisés en matière de planifica-tion et d’aménagement forestier, un enjeu majeur demeure, celuides superficies de coupe versus la forêt résiduelle. Le nouveaurèglement sur les normes d’intervention (RNI) dans les forêts dudomaine public a mis presque uniquement l’emphase sur laréduction de la dimension des coupes au détriment de la forêtrésiduelle qui elle est en «lambeaux». Cette situation est problé-matique pour plusieurs espèces fauniques qui ont besoin de cesforêts résiduelles en proportions suffisantes afin de se maintenirsur le territoire. Les conséquences en terme de gestion forêt-faune sont importantes.

À l’instar de d’autres provinces, nous allons devoir réviser nosfaçons de faire et planifier la dispersion des coupes à une autreéchelle, celle du paysage! Une réforme majeure du régimeforestier s’impose afin d’implanter une gestion intégrée faune-forêt. Pour maintenir la biodiversité de nos forêts, il est primordialde se fixer des objectifs de forêt résiduelle à conserver aprèscoupes, d’où le concept de la forêt mosaïque. Trois pistes desolution sont envisageables.

Élaborer une nouvelle norme panquébécoise

L’élaboration d’une nouvelle norme panquébécoise est sûrementla voie à laquelle nous sommes le plus habitués. Une façon defaire pourrait être de se baser sur les exigences de l’orignal parexemple. Dorénavant, nous pourrions décider que 50 % des peu-plements forestiers devraient être plus grands que 7 mètres parunité territoriale de référence (UTR) de 100 km2 mais c’est dis-cutable.

Imiter fidèlement la nature

L’Ontario pour sa part a choisi une voie différente pour desraisons quasi philosophico-politique, celle d’imiter fidèlement lanature. Cette stratégie repose sur l’imitation des perturbationsnaturelles, en l’occurrence les feux. Il est évident qu’un besoinde régionalisation s’impose en fonction : 1) du type d’écosystème(sapinière ou pessière), 2) du régime de perturbations naturelles(épidémie de tordeuse des bourgeons de l’épinette, chablis oufeu) et 3) des populations locales. Sans cela, une crise politiqueest envisageable puisque ce n’est pas parce que l’on imite la

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nature que cela est socialement acceptabl e. Il ne faut pas oubl i e rque les gens sont aussi importants que la nature !

Élaborer une stratégie proche des gens et de la nature

Proche des gens

Ce serait un nouveau niveau de planification, sous la respon-sabilité du Gouvernement. Il s’effectuerait en concertation avecla population à l’échelle des municipalités régionales de comté(MRC). Des objectifs de mosaïque seraient fixés par UTR. L’outilprivilégié serait le plan d’affectation des terres. Il est à noter quecette approche a été adoptée par la Colombie-Britannique via le«Land Use Plan».

Proche de la nature

Il est primordial de comprendre les régimes de perturbationsnaturelles afin de s’en inspirer pour élaborer des stratégies decoupe socialement acceptable. Il existe au Québec quelquesexemples d’initiatives en forêt boréale: la Forêt Montmorency del ’ U n i versité Lava l ; la forêt mosaïque de Produits fo r e s t i e r sAlliance Inc. et la Forêt modèle crie de Waswanipi.

Pourquoi?

Pour maintenir la diversité sur l’ensemble d’un terri t o i r e. En main-tenant une mosaïque d’écosystèmes dans chaque terri t o i r e, onp r é s e rve ra la diversité de la majorité des espèces et de la dive r s i t égénétique au sein de chacune d’elles. C’est la notion du filtre bru tqui s’applique voulant que plus on est proche de la nature moinson a de risque de perdre des composantes import a n t e s.

Sapinière boréale pluviale

La sapinière boréale pluviale est un écosystème dominé par lesapin baumier. Elle est caractérisée par un régime de petitesperturbations comme les chablis et les épidémies de la tordeusedes bourgeons de l’épinette.

Le concept de la forêt mosaïque a été élaboré au début desannées ’90 à la Forêt Montmorency, forêt d’enseignement et de

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recherche de l’Université Laval. Cette stratégie avait pour objec-tifs 1) d’adapter ses procédés de coupe à la dynamique naturellede l’écosystème, en l’occurrence la sapinière, 2) de contrôler ladimension de ses coupes, 3) de disperser adéquatement sescoupes sur le territoire d’aménagement, 4) d’harmoniser la formede ses coupes avec le paysage et 5) d’établir et de maintenir unréseau routier permanent.

Tout d’abord, il a fallu déterminer quelles étaient les pert u r b a t i o n snaturelles sur le territoire et mesurer leur ampleur. À la Fo r ê tMontmorency en 1944, on observait un ensemble de petites per-turbations dispersées sur tout le terri t o i r e. La figure 1 montre queles perturbations étaient de petites tailles va riant de 60 hectares àmoins d’un hectare. Ces jeunes peuplements de sapin baumierp r ovenaient de l’épidémie de tordeuse des bourgeons de l’épinettede 1919 et de chabl i s. Ce phénomène est aussi cara c t é ri s t i q u edes sapinières de la réserve faunique des Laurentides, de laGaspésie et du massif des monts Va l i n s. Il est à noter que les per-turbations naturelles en sapinière ne dominent jamais le pay s a g e.

Figure 1. D i s t ri bution de fréquence des jeunes peuplements de sapinbaumier à la Forêt Montmorency en 1944 (tiré de Leblanc 1998).

La stratégie de récolte de la Forêt Montmorency est basée sur ladispersion, dans l’aire d’aménagement, de coupes à blanc partrouées de dimensions limitées. La planification se fait à deuxéchelles. Au niveau régional, on planifie un aménagement inten-sif par bloc forestier de 100 à 200 km2. Au niveau local, c’est larègle des trois tiers qui s’applique soit : 1/3 en peuplements enrégénération (0-25 ans), 1/3 en peuplements jeunes (25-50 ans)et 1/3 en peuplements mûrs (50-75 ans). La dimension maxi-male des superficies de coupe est de 1/3 plus petit que 10 ha, de

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1/3 entre 10 et 30 ha et de 1/3 entre 30 et 80 ha. Ces interven-tions ont été reconnues socialement acceptables par les dif-férents utilisateurs de la Forêt Montmorency.

La pessière noire de l’Est

La pessière noire de l’Est est un écosystème dominé parl’épinette noire. Elle est caractérisée par un régime de grandesperturbations: les feux. Le territoire étudié correspond à celui del’Unité de gestion St-Félicien (UG-25). C’est une forêt publiquede 23 966 km2, comprise dans le domaine de la pessière noire àmousses.

Tout d’abord, on peut se poser la question suivante : Est-ce quenos grandes coupes imitent les feux? Dans l’imaginaire collectif,il ne fait aucun doute que nos grandes coupes à blanc imitent lesfeux. Par contre, les gestionnaires savent très bien que ce n’estpas le cas puisqu’il y a le règlement sur les normes d’intervention(RNI) qui limite la dimension des coupes. Mais qu’en est-il vrai-ment?

Nombre, superficie et distribution spatiale des perturbations

À l’échelle régionale, le paysage présentait un plus grand nom-bre de petites perturbations que de grandes (figure 2). Lamajorité des brûlis (90 %) et des coupes forestières (78 %) étaitinférieure à 100 hectares. La superficie des coupes de récupéra-tion était plus grande et plus variable. Seulement 31 % d’entreelles étaient inférieures à 100 hectares. Malgré leur nombre peuimportant, ce sont les grandes perturbations qui ont façonné lamosaïque forestière de l’unité de gestion Saint-Félicien de 1973à 1997 (figure 3). La plupart des surfaces brûlées (91 %) ont étécausées par des feux de plus de 5 000 hectares. Ce sont aussiles coupes de forte dimension qui étaient responsables de 74 %des superficies récoltées dans l’U.G.25. Toutefois, leur taille étaitplus variable allant 500 à 9 999 hectares. La superficie descoupes de récupération était de la même envergure mais dansune plus forte proportion (86 %). La figure 4 montre, qu’àl’échelle régionale, la coupe forestière a été la perturbationmajeure en terme de superficie totale de 1973 à 1997. Soixante-quatorze pour cent de la superficie récoltée a fait l’objet d’inter-ventions de grande dimension, variant de 500 à 9 999 hectares.

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La coupe de récupération était quant à elle marginale. Un exem-ple de la distribution spatiale des perturbations récentes dansl’aire d’étude est présenté à la figure 5. Les feux étaient desphénomènes isolés, répartis sur l’ensemble du territoire con-trairement aux coupes forestières qui étaient agglomérées et quise concentraient dans la moitié sud de l’unité de gestion.

Figure 2. C o m p a raison du pourcentage du nombre total de per-turbations par classe de taille dans l’unité de gestion Saint-Féliciende 1973 à 1997.

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Figure 3. Comparaison du pourcentage de la superficie totaledes perturbations par classe de taille dans l’unité de gestionSaint-Félicien de 1973 à 1997.

Figure 4. Comparaison de la superficie totale des perturbationspar classe de taille dans l’unité de gestion Saint-Félicien de 1973à 1997.

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Figure 3. Comparaison du pourcentage de la superficie totaledes perturbations par classe de taille dans l’unité de gestionSaint-Félicien de 1973 à 1997.

Figure 4. Comparaison de la superficie totale des perturbationspar classe de taille dans l’unité de gestion Saint-Félicien de 1973à 1997.

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Figure 5. Image Landsat du 12 août 1996 (185 X 185 km) déli-mitant les feux (blanc) et les coupes (noir) récentes.

S’inspirer des perturbations naturelles

Pour réaliser un aménagement forestier durable, basé sur l’imita-tion des perturbations naturelles dans les forêts d’épinettesnoires, on doit nécessairement s’inspirer des feux. Ces feux sontsouvent très grands, plus grands que la plupart des coupesfo r e s t i è r e s. Globalement, à l’échelle régionale, la coupeforestière réalisée par le passé au nord du lac Saint-Jean n’estpas si éloignée du régime actuel de perturbations naturelles. Laprincipale différence ne réside pas dans la dimension des airesde coupes forestières mais plutôt dans celle des secteurs où onles agglomère et dans la distance insuffisante qui les sépare.

La forêt mosaïque pour la pessière boréale

Pour la pessière boréale, la forêt mosaïque prendra une toutautre allure qu’en sapinière. Il faudra limiter la superficie maxi-male des agglomérations de coupes et accroître leur dispersionsur le territoire de façon à minimiser les impacts sur la faune et à

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freiner l’effet «tapis roulant» du sud vers le nord. À l’instard’ALPAC en Alberta, il faudra disperser les coupes en fonctiondes feux les plus anciens et restreindre la dimension desagglomérations de coupes. De plus, il est nécessaire de faire descoupes de formes irrégulières et d’inclure une proportion devégétation résiduelle interne en plus, des séparateurs et desbandes riveraines.

L’extrapolation un danger…

Les paysages naturels de sapinière et de pessière sont différentsen raison de la nature, de la fréquence et de l’ampleur des per-turbations qui les affectent (épidémie d’insectes, chablis, feux).La forêt mosaïque résultante sera elle aussi différente. Nos amé-nagements forestiers devraient s’inspirer de la nature tout enétant adaptés à la région, à l’écosystème et aux besoins. Lesnormes mur à mur devraient être banies et la variabilité devraitdevenir la norme.

Référence

Leblanc, M. 1998. La sapinière vierge de la forêt Montmorencyet sa région : une forêt boréale distincte. Mémoire demaîtrise, Faculté de foresterie et de géomatique, UniversitéLaval, Ste-Foy, 145 p.

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- Chapitre 11 -INTÉGRATION DES PRÉOCCUPATIONS AUTOCHTONES

DANS L’AMÉNAGEMENT FORESTIER

Susanne HILTON, directriceForêt modèle crie de WaswanipiWaswanipi (Québec) J0Y 3C0

Résumé

Lorsqu’on parle de planifier l’aménagement forestier en tenantcompte des droits autochtones tels qu’ils sont définis par lesententes et conventions en vigueur, un problème se pose : si l’onveut réellement que cet arrimage porte fruit, une redéfinition sys-tématique des processus d’aménagement actuels s’impose.

De plus en plus au cours des dernières années, les commu-nautés des Premières Nations ont entrepris des activités cibléesd’enregistrement de données qui vont de l’utilisation du territoire,à l’identification de sites sacrés ou d’habitats écologiquements e n s i bl e s. Cette info rmation, d’ordinaire compilée par lesPremières Nations elles-mêmes, est alors transmise aux profes-sionnels forestiers qui restent aux prises avec la tâche d’intégrerces données à leurs plans d’aménagement forestier. Dans cecontexte, il ne faut pas se surprendre de constater que ni les pro-fessionnels forestiers ni les communautés des Premières Nationsne soient satisfaits des résultats. Cette insatisfaction de part etd’autre pourrait résulter du fait que l’on tente d’appliquer dif-férents systèmes de connaissance dans un but qui n’est peut-être pas compris de la même façon par les deux parties encause. On essaie de mélanger des pommes et des orangesavant de savoir si l’on veut faire du jus ou cuire une tarte.

Le processus d’aménagement forestier tel qu’il est compris parles professionnels forestiers implique qu’un certain volume debois sera récolté dans une aire donnée, tout en protégeant leshabitats pour certaines espèces clés. Ce processus met de l’a-vant la primauté de l’espèce humaine considérée distincte etsupérieure aux autres espèces, en la plaçant au centre de l’équa-tion de la planification. Cette vision n’est pas nécessairement

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partagée ou comprise par les Premières Nations qui dépendenttoujours des ressources forestières pour la chasse, la pêche et lepiégeage.

Si les professionnels forestiers ont réellement l’intention d’impli-quer les Premières Nations, le besoin est pressant d’une réori e n-tation radicale du processus de planification de l’aménagementfo r e s t i e r. Cette nouvelle initiative dev rait être authentiquementmu l t i d i s c i p l i n a i r e. Elle dev rait clairement aborder la question desvaleurs intrinsèques et non économiques de la fo r ê t . Elle dev ra i taussi permettre aux Premières Nations et aux utilisateurs de laforêt de développer et de formuler des objectifs de gestionforestière spécifiques. Le besoin est là pour un processus qui soitflexible et adaptable au fur et à mesure que chacune des partiesprenantes au dossier développe une familiarité avec les besoinset les capacités de l’autre.

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Je reçois un appel vers 23 heures un mardi soir, me demandantde visiter une famille à leur camp le lendemain. Un cousin m’ex-plique qu’il s’agit d’une urgence et que je ne devrais pas retarder.

Je me réveille tôt et je conduis 200 kilomètres sur des cheminsforestiers. J’arrive au camp familial vers 9 heures; je m’aperçoisque trois ou quatre personnes sont encore au lit et que le patrondu territoire de chasse, le tallyman (ou ouchimow en cri), n’estpas là. Je me demande qu’est ce qui peut être si pressant pourque je sois obligé d’annuler toutes mes réunions prévues pouraujourd’hui.

L’épouse du tallyman, Eva, me donne une tasse de thé et medemande si je veux l’accompagner pendant qu’elle vérifie sescollets à lièvres. On met nos raquettes, les miennes en plastiqueet aluminium, celles d’Eva, faites à la main par son père. Durantnotre marche, Eva me raconte que c’est sa mère qui lui a montrécomment placer les pièges à lièvres. Mais, avec toutes lescoupes forestières et la construction de chemins, que sa tech-nique et sa compréhension à savoir où placer les collets ne s’ap-pliquent plus. Eva ajoute qu’elle observe que les lièvres sont plusm a i gres et goûtent différemment depuis que les activitésforestières ont commencé. Ça prend tous mes efforts pour nepas faire de commentaires ou d’essayer d’expliquer que le lienentre la saveur de la viande et la foresterie est difficile à faire.

Après deux heures de marche, nous revenons au camp. Il fautdire que je suis convaincue qu’on marche dans la mauvaisedirection. Eva a pris tellement de raccourcis que je me suisdésorientée. On place les lièvres près du poêle à bois pour lesdégeler et elle m’offre une soupe instantanée Ramen avec dubannock.

Quelques minutes plus tard, on entend la motoneige du tallymanapprochant du camp. Abel me salue sans mot, mange lesrestants du souper d’hier et va se reposer sur son lit. Pendant sasieste de ? d’heure, je pense au rapport que je dois compléterpour le Conseil de bande, le budget que je dois déposer et lesdemandes de subventions qui traînent sur mon bu r e a u .Personne ne me parle dans le camp et je me demande encoreune fois qu’est ce qui peut être si important.

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Finalement, Abel se lève, s’assoit à la table et baisse le son deson «bush radio». Enfin, on va discuter de ses préoccupations!Son fils, qui a 27 ans, vient s’asseoir à la table avec nous pourpermettre à Abel de parler en cri. Je me retiens de sortir un car-net pour prendre des notes. Cela donnerait l’impression que jesuis un chercheur qui va se servir de ses mots et connaissancesau lieu d’écouter et d’apprendre une leçon importante.

Abel commence en me disant que ça fait longtemps qu’il voulaitpartager avec moi cette histoire mais, je n’étais pas prête. Il nesait pas si je suis prête maintenant mais, il n’a pas le choix parcequ’ils sont en train de construire un chemin. Abel me demande(sans vraiment vouloir une réponse) si je sais d’où viennent lesorignaux?

Il y a un silence total dans le camp, même avec quatre adultes etsix enfants. Je m’aperçois que tous ses enfants et petits-enfantsnous entourent et l’écoutent attentivement.

Abel reprend. « Le Créateur a su comment planifier pour tous lesbesoins des humains pour la survie. En respectant l’équilibre etl’égalité de toutes les espèces, Le Créateur nous promet qu’il yaura toujours assez à manger pour tout le monde. Le Créateur amême su d’avance qu’il y aurait la foresterie, les projets minierset hydroélectriques. C’est pour ces raisons que le Créateur a misdes endroits spéciaux dans la forêt pour cacher et protégertoutes les espèces. Ces endroits, connus seulement par les plusrespectés (hommes et animaux), permettent un renouvellementcontinu de la faune. »

Abel me confie qu’il a le privilège d’avoir un de ces sites sur sonterritoire de chasse, dédié aux orignaux. Il me dit qu’il me racon-te cette histoire parce qu’ils sont en train de construire un nou-veau chemin forestier près de ce lieu, ce qui veut dire qu’il y aurabientôt des coupes (avec protection de la régénération et dessols je pense).

Abel remplit de nouveau sa tasse de thé. Son fils qui traduisait, medemande si j’ai tout compris parce qu’il y avait beaucoup de motsen cri qu’il ne savait pas comment les dire en anglais. Le filsrajoute que c’est seulement la deuxième fois qu’il entend cette his-toire et que son père ne lui a pas encore montré ce « s p o t » s a c r é .

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Abel reprend sa place à la table. Il prend ma main et me dit,« Susanne, tu nous comprends. Va parler à la compagnie,explique-leur avec tes mots qu’ils ne doivent pas – non peuventpas - construire un chemin là-bas. »

Abel se lève et s’étend sur son lit. Les enfants et petits-enfantsreprennent où ils en étaient avant. Abel a dit ce qu’il avait à direet je suis libre de reprendre la route. Eva me donne les lièvresqu’on a ramenés le matin. Elle me dit que je devrais faire du she-baye, un ragoût, pour mieux comprendre ce qu’elle a essayé dem’expliquer ce matin. Eva commence à faire chauffer l’eau pourfaire la vaisselle et parle sans vraiment s’adresser à moi. Elle ditque tellement de choses ont changé durant sa vie. La télévision,l’établissement d’une communauté permanente, le besoin defaire de l’argent pour payer les factures de téléphone et d’Hydro.

À ce point, je dois avouer que je n’écoutais plus. Je me demandesi je dois leur expliquer le ra p p o rt que je viens de recevoir sur led e rnier inventaire portant sur l’orignal dans la zone 17. Les résul-tats de cette étude ne correspondent pas du tout à l’histoire d’Abel.Je songe aussi à mon ra p p o rt d’activité que je dois préparer pourmon conseil d’administra t i o n . Comment est-ce que j’explique cettej o u rnée? Échange d’info rmation? Apprentissage collabora t i f ?

En quittant le camp, le fils d’Abel m’accompagne à mon véhicule.Il me demande, lorsque j’expliquerai à la compagnie l’histoire deson père, si je peux leur demander de venir déblayer la route àleur camp. Le fils me dit, même si les chemins dérangent les ani-maux, au moins ça lui permet de venir au camp avec son camion.

Ma famille fictive illustre plusieurs éléments qui sont toujoursprésents dans le contexte de la Forêt modèle crie de Waswanipi.

• Des liens de confiance où on ne cherche pas continuellementà insérer l’information dans ces propos préconçus.

• Flexibilité d’échéancier. Ça a pris toute une journée pourrecevoir de l’information qui va exiger plusieurs suivis. Toutce que j’ai eu, ce sont des pistes à suivre dans le futur. Eneffet, il me faudrait plusieurs essais pour être capable decomprendre l’information fournie.

• Contradiction – pas de route, déblayer la route.

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La Forêt modèle crie de Waswanipi est un projet visant àdévelopper des définitions applicables d’aménagement forestierdurable. Nous visons plus précisément à Waswanipi à dévelop-per des définitions autochtones.

Le territoire de Waswanipi s’étend sur 35 000 km2, organisé en 52territoires de chasses familiaux ou traplines. La communauté deWaswanipi a une entreprise forestière, Mishtuk, et une scierie enpartenariat avec Domtar, Nabakatuk. Incluant le CAAF, ilsrécoltent du bois sur 2 000 km2 Tout le territoire de Waswanipi estcouvert par des CAAFs.

Notre mandat à la forêt modèle, c’est d’améliorer la gestion desressources pour tous les utilisateurs, cris et non-cris. Ceci exigel’utilisation et l’application des connaissances cries dans la prisede décision et dans les choix d’aménagements de Mishtuk etnous espérons influencer nos partenaires dans la forêt modèle,Donohue et Domtar ainsi que d’autres entreprises forestières.

C’est un grand défi et notre projet est en évolution constante. Lesobservations que je vais partager avec vous ne sont pas tiréesdirectement des expériences de la forêt modèle mais réflètentmes dix ans de travail dans le domaine de la gestion deressources naturelles dans un contexte autochtone.

La science occidentale et la science crie sont toutes deuxfondées sur l’accumulation d’une série d’observations qui sontprogressivement ordonnées de manière compréhensible. Cesdeux sciences font appel au même exercice mental (analyse etsynthèse) et ne sont pas si différentes. Ce sont les phénomènesobservés qui les différencient et ce à quoi ils sont appliqués.Alors que la science occidentale a pour but ultime de permettreà l’être humain de contrôler son environnement, la science cries’intéresse avant tout au rôle de celui-ci dans son environ-nement.

La science occidentale et la science crie sont deux ensembles deconnaissances distincts et parallèles. Bien qu’elles aient toutesdeux recours à la même faculté d’analyser des phénomènes oudes situations, elles diffèrent dans leur finalité : à quel problèmechacune applique-t-elle son savoir? Autres différences impor-tantes, les échelles spatiales et temporelles ne coïncident pas.

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Dans ce contex t e, l’approche d’«intégration» de ces deux sci-ences ne peut pas conduire à des résultats satisfaisants pourt o u s. Il faut établir des mécanismes qui permettent de tenircompte des informations issues de ces deux sciences pour éla-borer des solutions communes à des problèmes communs.

Ceci exige une ouve rture d’esprit des gestionnaires desressources naturelles et des autochtones pour accepter le fait quenous avons tous des limites de connaissances. Pour déve l o p p e rdes solutions, il faut être capable de poser des questions et det ravailler conjointement afin d’atteindre un but qui a été élaborée n s e m bl e. Ça prend plus que de bonnes compétences enb i o l o g i e, en fo r e s t e rie ou en écologie. Nous avons besoin d’ap-proches multidisciplinaires avec une perspective humaniste.

C’est facile d’en parler mais pour l’appliquer, c’est autre chose.Présentement à Waswanipi, la communauté se questionne sur lerôle des projets de recherche déposés à la forêt modèle. Biensûr, les commentaires sont fournis indirectement et par voieinformelle. Mais il y a un débat intéressant qui se déroule àsavoir qui devrait poser les questions de recherche. Les cris (etcomme vous pouvez le constater par mon histoire, ceci n’est pastoujours évident de formuler des questions de recherche) ou lesexperts en matière de gestions des ressources naturelles? Maiscomment est-ce qu’on explique ceci lors des demandes de sub-ventions?

C’est par l’entremise de cette petite histoire que Susanne Hiltona essayé de nous présenter quelques aspects de la «réalité crie»et des défis qu’elle engendre lorsqu’il est question d’aménage -ment forestier durable.

Ses propos nous ont fournis plusieurs pistes de réflexion et quel -ques mises en garde dont voici les principales :

• La patience et l’importance de prendre son temps et surtoutd’en «donner»;

• L’ouverture d’esprit, la souplesse d’adaptation et la flexibilitédans l’organisation;

• La nécessité de développer des liens de confiance;• Le danger des idées préconçues, des préjugés et des clichés;• Les différences d’échelles spatiale et temporelle;

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• Le fossé entre la «science» autochtone et la nôtre;• L’illusion de la compréhension mutuelle;• La relation «naturelle» qui existe entre les autochtones et

leur environnement;• La barrière de la langue et plus encore celle de la culture;• L’ i n existence de certains de nos concepts en milieu

autochtone;• L’ a r b i t rage de la prépondérance des préoccupations

autochtones sur les préoccupations scientifiques;• Les dilemmes et contradictions entre valeurs traditionnelles

et aspirations actuelles.

Autant de sujets qui animent le quotidien de la Forêt modèle cri ede Wa swanipi qui cherche à développer des définitionsautochtones de l’aménagement forestier dura ble pour améliorer lagestion des ressources pour tous les utilisateurs, cris et non-cri s.

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- Chapitre 12 -LE RÔLE DES AIRES PROTÉGÉES ET L’IMPORTANCE DE

LEUR BONNE GESTION

Gilles SEUTIN, biol. Ph. D.

Département de géographie, Université McGill1205, rue Docteur Penfield

Montréal (Québec) H3A 1B1

Résumé

Chacun des 175 pays ayant ratifié la Convention sur la diversitébiologique (CDB) s’est engagé à: « établir un système de zonesprotégées ou de zones où des mesures spéciales doivent êtreprises pour conserver la diversité biologique (article 8a) », « éla-borer, si nécessaire, des lignes directrices pour le choix, la créa-tion et la gestion de zones protégées ou de zones où desmesures spéciales doivent être prises pour conserver la diversitébiologique (article 8b) », « réglementer ou gérer les ressourcesbiologiques présentant une importance pour la conservation dela diversité biologique à l’intérieur comme à l’extérieur des zonesprotégées afin d’assurer leur conservation et leur utilisationdurable (article 8c) » et « promouvoir un développement durableet économiquement rationnel dans les zones adjacentes auxzones protégées en vue de renforcer la protection de cesdernières (article 8e) ».

Un consensus politique existe donc sur la nécessité des airesprotégées et de leur bonne gestion.Ce consensus est aussi illus-tré par le fait qu’il existe plus de 30 000 aires protégées sur laplanète, couvrant plus de 13 millions de km2 ou près de 9% dessurfaces émergées de la Terre (WCMC 1999). Mais quels rôlesont ces aires protégées? La CDB définit une aire protégéecomme « toute zone géographiquement délimitée qui estdésignée, ou réglementée, et gérée en vue d’atteindre des objec-tifs spécifiques de conservation. » L’UICN pour sa part fournit ladéfinition suivante: « une portion de terre et/ou de mer vouéespécialement à la protection et au maintien de la diversitébiologique, ainsi que des ressources naturelles et culturelles

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associées, et gérée par des moyens efficaces, juridiques ouautres. » Une analyse de la littérature scientifique et de plans degestion d’aires protégées permet d’identifier neuf principauxobjectifs de ces zones: la recherche scientifique, la protectiondes espaces sauvages, la préservation des espèces et de la bio-diversité, le maintien des fonctions écologiques, la protectiond’éléments naturels et culturels particuliers, le tourisme et leloisir, l’éducation, l’utilisation durable des ressources naturelles,et la préservation de particularités culturelles. Évidemment,aucune aire protégée ne peut répondre simultanément à tous cesmandats qui, parfois, sont incompatibles. Un bon systèmed’aires protégées nécessite donc qu’un ensemble complémen-taire de zones soit désigné, chacune ayant des objectifs définiset mis en ordre de priorité.

Certains auteurs ont récemment suggéré que dans un nouveaumonde de développement dura ble les aires protégées neseraient plus nécessaires. Ceci révèle une mauvaise com-préhension du concept de développement durable, du principede précaution et de la méthode scientifique. P ri m o, ledéveloppement durable n’est pas synonyme d’une exploitationmaximale et sans frontière des ressources naturelles. Secundo,toute exploitation, même théoriquement durable, comporte desrisques et les aires protégées fo u rnissent une assurance contrec e l a . Te rt i o, le développement de techniques d’ex p l o i t a t i o nd u ra ble des ressources étant une activité scientifique, de gra n d e saires protégées de toute exploitation sont nécessaires pourl’étude des processus naturels que les méthodes dura bles d’ex-ploitation cherchent à simu l e r. Proposer la conversion des airesprotégées et zones d’exploitation dura ble est donc inacceptabl ecar contraire à la logique même du développement dura bl e.

Au Québec, seul 3,5 % du territoire est officiellement protégé,dont 48 % partiellement. Ceci est fort en deçà de la moyennemondiale; une majorité des pays en développement ont plusd’aires protégées que le Québec. Quel effort supplémentairefaut-il fournir? Certains biologistes de la conservation suggèrentque 50 % d’un territoire ne devrait pas être exploité, même demanière strictement dura bl e. Le consensus écopolitique intern a-tional préconise présentement plutôt que de 10 à 12 % d’un terri-toire dev rait être désigné comme aire protégée. Ce pourcentagen’est atteint pour aucune des régions écologiques du Québec.

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Chacun des 175 pays qui ont ratifié la Convention sur la diversitébiologique (CDB 1992) s’est engagé à: « établir un système dezones protégées ou de zones où des mesures spéciales doiventêtre prises pour conserver la diversité biologique (article 8a) »,« élaborer, si nécessaire, des lignes directrices pour le choix, lacréation et la gestion de zones protégées ou de zones où desmesures spéciales doivent être prises pour conserver la diversitébiologique (article 8b) », « réglementer ou gérer les ressourcesbiologiques présentant une importance pour la conservation dela diversité biologique à l’intérieur comme à l’extérieur des zonesprotégées afin d’assurer leur conservation et leur utilisationdurable (article 8c) » et « promouvoir un développement durableet économiquement rationnel dans les zones adjacentes auxzones protégées en vue de renforcer la protection de cesdernières (article 8e) ».

Un consensus politique existe donc sur la nécessité des airesprotégées et de leur bonne gestion. Ce consensus est illustrépar le fait qu’il existe plus de 30 000 aires protégées sur laplanète, couvrant plus de 13 millions de km2, soit près de 9% dessurfaces émergées (WCMC 1999).

Quels rôles ont les aires protégées?

La Convention sur la diversité biologique définit une aire protégéecomme « toute zone géographiquement délimitée qui estd é s i g n é e, ou réglementée, et gérée en vue d’atteindre des objec-tifs spécifiques de conserva t i o n » (CDB 1992). L’Union mondialepour la nature fo u rnit pour sa part la définition suiva n t e : « une por-tion de terre et/ou de mer vouée spécialement à la protection etau maintien de la diversité biologique, ainsi que des ressourcesnaturelles et culturelles associées, et gérée par des moyens effi-c a c e s, juridiques ou autres » (UICN 1994). Une analyse de la lit-t é rature scientifique et de plans de gestion d’aires protégées per-met d’identifier neuf principaux objectifs de ces zo n e s :

• la recherche scientifique,• la protection des espaces sauvages,• la préservation des espèces et de la biodiversité, • le maintien des fonctions écologiques,• la protection d’éléments naturels et culturels particuliers,• le tourisme et le loisir,

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• l’éducation,• l’utilisation durable des ressources naturelles, et • la préservation de particularités culturelles.

Évidemment, aucune aire protégée ne peut répondre simultané-ment à tous ces mandats qui, parfois, sont incompatibles. Unbon système d’aires protégées nécessite donc que plusieurssites complémentaires soient désignés, chacun ayant des objec-tifs définis et priorisés. L’UICN propose une nomenclature et unsystème de classification des aires protégées basés sur leursobjectifs de gestion (tableaux 1 et 2).

Tableau 1. Les types d’aires protégées selon l’Union mondialepour la nature (UICN 1994).

Les aires de types I, II et III sont internationalement reconnuescomme celles qui offrent la meilleure protection de la biodiversitéet des processus écologiques naturels, car aucune exploitationcommerciale des ressources n’y est permise. Ce sont aussi ceszones qui nous serviront de site d’étude de l’évolution desécosystèmes en dehors d’interventions humaines majeures,ainsi que de sites témoins pour évaluer les impacts de nos pra-tiques ailleurs sur le territoire.

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Tableau 2. Les objectifs de gestion des différents types d’airesprotégées. Les objectifs principaux sont codifiés par un 1, lesobjectifs secondaires par un 2, les autres objectifs qui sont poten-tiellement compatibles par un 3 et les objectifs incompatibles parun « - ».

Certains auteurs ont récemment suggéré que dans un nouveaumonde de développement dura ble les aires protégées neseraient plus nécessaires. Ceci révèle une mauvaise com-préhension du concept de développement durable, du principede précaution et de la méthode scientifique. Primo, le développe-ment durable n’est pas synonyme d’une exploitation maximale etsans frontière des ressources naturelles. S e c u n d o, touteexploitation, même théoriquement durable, comporte des risqueset les aires protégées fournissent une assurance contre cela.Les aires protégées sont donc un mécanisme permettant de met-tre en oeuvre le principe de précaution adopté au Sommet de Rioen 1992. Tertio, le développement de méthodes d’exploitationdurable des ressources étant une activité scientifique, des airesprotégées contre toute exploitation sont nécessaires pour l’étudedes processus naturels que les méthodes durables d’exploitationcherchent à simuler. Proposer la conversion des aires protégéesen zones d’exploitation durable ou en aires à usages multiplesest donc inacceptable car contraire à la logique même dudéveloppement durable.

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Où en sommes-nous?

La classification des aires protégées de l’UICN est maintenantacceptée par la grande majorité des gouvernements du monde etpar la plupart des groupes environnementalistes. Le tableau 3présente le nombre d’aires protégées et leur surface au monde,au Canada et au Québec.

Tableau 3. Nombre et étendue (% de la surface terrestre du ter-ritoire) des aires protégées au monde, au Canada et au Québec.

1 WCMC 19992 Boisseau et Gauthier. 1997. Le Parc marin du Saguenay St-Laurent n’est pas inclus car il n’a pas de com-posante terrestre.

Comparativement au reste du monde, une faible proportion duterritoire québécois est effectivement protégée (tableau 3). Les3,15 % du Québec qui sont protégés correspondent à 52 578km2. En fait, seul 1,15 % du Québec est désigné dans les caté-gories « de forte protection » de l’UICN (c.à.d. les catégories I àIII). Notons aussi que les deux aires de mise bas du caribou aunord du 52e parallèle représentent à elles seules 67 % du terri-toire protégé du Québec. Au Québec méridional (c.à.d. au sudde la Baie James), 17 089 km2 sont protégés. À titre comparatif,mentionnons que près de 4 000 km2 de forêts sont coupéschaque année au Québec (SCF 1999).

Les biologistes ne s’entendent pas sur la proportion d’un terri-toire qu’il est nécessaire de protéger. Une majorité d’expertsestime qu’un objectif de 20 % serait souhaitable, mais quelques-uns suggèrent des valeurs de 50 % (Noss 1996). Le consensusécopolitique international préconise présentement que de 10 à

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12 % d’un territoire devrait être protégé comme aires protégéesde type I à V. Ce chiffre est un compromis entre ce qui est jugénécessaire pour la conservation de la biodiversité et les con-traintes politiques, sociales et économiques à la conservation(WRI et al. 1992). Il faut donc voir ces 10-12 % comme un mini-mum nécessaire à atteindre à court terme, et non comme un butlouable et non urgent. Le tableau 3 indique qu’un important rat-trapage est nécessaire au Québec où nous devrions tenter detripler les superficies protégées au plus tôt.

Représentation écologique

Un bon réseau d’aires protégées inclura une représentationadéquate des différents habitats ou régions écologiques rencon-trés sur le territoire. Acceptant l’objectif de 10 % comme valable,seules 50 (26 %) des 193 provinces biogéographiques terrestresmondiales (Udvardy 1975) sont présentement adéquatementprotégées, alors que 39 autres (20 %) sont protégées à moins de1 % (McNeely et al. 1994). Aucune des grandes régionsécologiques du Québec n’est adéquatement représentée dans leprésent réseau d’aires protégées (figure 1, adapté de Bergeronet Lévesque 1997).

Figure 1. P r o p o rtion du territoire de chaque sous-domainebioclimatique protégé au Québec. Les codes d’identifications o n t : P = pessière, S = sapinière, E = éra bl i è r e, M = mousse,BB = bouleau bl a n c, BJ = bouleau jaune, T = tilleul, C = cary-e r, O = ouest, E = est.

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La taille des aires protégées

Les biologistes de la conservation ont clairement démontré l’im-portance des aires protégées de grande taille (voir p.ex. Shafer1991, Meffe and Carroll 1994). L’appauvrissement de la diversitégénétique, l’extinction des espèces, le déséquilibre des commu-nautés et les dysfonctions des écosystèmes sont en effet moinsp r o b a bles dans de grandes parcelles. Plusieurs analysesthéoriques et des données empiriques indiquent que des airesprotégées de moins de 100 km2 sont souvent de peu de valeur àmoyen terme, alors qu’à long terme des surfaces de plusieursmilliers de km2 sont souhaitables, voire nécessaires (voir Shafer1991). À peine 10 % des aires protégées du monde ont une taillesupérieure à 1 000 km2 (McNeely et al. 1994). Au Québec, troisaires seulement atteignent ce seuil.Le faible nombre de réservesintégrales de grande taille, ou même de taille moyenne, sur le ter-ritoire québécois est particulière inquiétant (figure 2).

Figure 2. S u r face des aires de protection intégrale (Type I) et de con-s e rvation et loisir (Type II) au Québec.

Quel effort supplémentaire faut-il fournir?

L’importance des aires protégées comme outil de conservationde la biodiversité est maintenant presque universellement recon-nue. Les biologistes de la conservation ont clairement établiqu’un ensemble de sites de grande taille, représentatif des dif-férents écosystèmes d’une région et totalisant 10 % ou plus de lasurface de cette région, doit être identifié et l’exploitation desressources naturelles doit y être interdite. Peu d’écosystèmes dela Terre bénéficient d’une telle protection.

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Le Québec dispose des outils légaux et réglementaires néces-saires pour l’identification, la désignation et la bonne gestiond’aires protégées. Par contre, nous n’avons désigné que 3,15 %de notre territoire comme aires protégées, ce qui est nettementi n f é rieur à la moyenne planétaire. Les prétentions qu’établir desaires d’usages multiples ou d’utilisation dura ble est suffisant pourc o n s e rver la diversité biologique sont erronées. Il est grand tempsde compléter le réseau québécois d’aires protégées. Comme pay sriche et signataire de la Convention sur la diversité biologique, dontle siège est à Montréal, nous nous devons d’agir vite.

Références

Bergeron, J.-F. et Lévesque, B. 1997. Répartition des aires pro-tégées de catégories I, II, III (UICN) pour le Québec méri-dional. Ministère Environnement et Faune et Ministère desRessources naturelles, Québec.

Boisseau, G. et Gauthier, B. 1997. Répertoire des airesnaturelles protégées au Québec. Ministère Environnementet Faune, Québec.

CDB (Convention sur la diversité biologique). 1992. Conventionsur la diversité biologique: Texte et annexes. NationsUnies, New York.

IUCN (The World Conservation Union). 1998. 1997 UnitedNations List of Protected Areas. IUCN, Gland,Switzerland.

McNeely, J. A., Harrison, J. et Dingwall, P. 1994. ProtectingNature: Regional Reviews of Protected Areas. IUCN,Gland, Switzerland

Meffe, G. K. et Carroll, C. R. 1994. Principles of ConservationBiology. Sinauer Associates, Inc., Sunderland, Mass.

Noss, R. F. 1996. Protected areas: How much is enough? Pp.91-120, in: R. G. Wright, National Parks and ProtectedAreas. Blackwell Science, Cambridge, Mass.

SCF (Service canadien des forêts). 1999. L’État des forêts au

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Canada 1998-1999. Ressources naturelles Canada,Ottawa.

S h a fe r, C. L . 1 9 9 1 . Nature Reserve s : Island T h e o ry andC o n s e rvation Pra c t i c e. Smithsonian Inst.P r e s s, Wa s h i n g t o n ,D. C.

Udvardy, M. D. F. 1975. A Classification of the BiogeographicalProvinces of the World. IUCN, Gland, Switzerland.

UICN. 1994. Lignes directrices pour les catégories de gestiondes aires protégées. UICN, Gland, Suisse.

WCMC (Wo rld Conservation Monitoring Centre). 1 9 9 9 .Protected Areas Program. http://www.wcmc.org.uk/protec-ted_areas/data/.

WRI (World Resources Institute), IUCN and UNEP (UnitedNation Environment Program). 1992. Global BiodiversityStrategy. WRI, Washington, D.C.

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- Chapitre 13 -LE PATRIMOINE NATUREL: NOTRE RESPONSABILITÉ

ÉTHIQUE ET SOCIALE

Marcel J. MÉLANÇON, bioéthicien M.Sc. Ph.D.

Université du Québec à Chicoutimi555, boulevard de l’UniversitéChicoutimi (Québec) G7H 2B1

Résumé

L’ÉTHIQUE est une science humaine (philosophie) qui étudie laconduite humaine en tant que soumise à des valeurs, à la dif-férence d’autres sciences humaines, telles la psychologie ou lasociologie, qui posent des jugements de fait sur des comporte-ments humains individuels ou sociaux.

LA BIOÉTHIQUE est l’éthique appliquée au secteur des sciencesde la vie et de la santé la bio-médecine. Elle est née dans lesannées 1960 d’une série de révolutions d’ordre techno-scien-tifique et socio-culturel. Au cours du tiers de siècle qui l’a vuenaître, elle a subi une évolution historique quant à son objet d’in-vestigation. Elle a d’abord originée du secteur bio-médical : c’estl’éthique clinique («la conduite au chevet du malade»). Elle s’estensuite ~tendue au champ techno-scientiflque : c’est l’éthique dela recherche et l’expérimentation sur des sujets humains («laconduite au laboratoire »). Les principaux principes et normessont maintenant établis dans ces secteurs biomédicaux.

LA BIODIVERSITÉ constitue une troisième phase d’exploration,plus récente, de la bioéthique, sous la pression d’une nouvelleprise de conscience : celle d’un patrimoine collectif à préserver,voire à restaurer. La bioéthique est maintenant somméed’analyser la conduite face la bio-diversité (le «bios » grec qui vabien au-delà de la stricte biologie) pour maintenir et préserver lep o l y m o rp h i s m e, l’habitat et les interrelations entre les viva n t s. L abioéthique est ainsi passée des enjeux liés aux «poumons d’acier»(les respirateurs artificiels des années 1960) aux «poumonsforestiers» (les respirateurs de la planète des années 2000).

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L’OBJECTIF DE LA COMMUNICATION est :(1) de tracer un brefaperçu de l’histoire de la bioéthique;(2) de mettre l’accent sur lesnouvelles responsabilités éthiques et sociales qui incombent auxclients humains de la forêt (industries forestières et autres con-sommateurs forestiers) face aux habitants non humains de cetteforêt (faune et flore); (3) de signaler des valeurs qui doivent êtreh i é rarchisées dans notre «agir fo r ê t - faune» (valeurs économiques,e s t h é t i q u e s, sociales), si l’on veut respecter les vivants humains etsub-humains qui partagent la même habitation collective, l’écosys-tème global.

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Hippocrate (Ve s. A.C.), père de la médecine occidentale, impo-sait à ses disciples l’obligation de prêter un serment les obligeantà prendre soin de la santé du patient, à la conserver et à larestaurer si elle était atteinte, mais en aucun cas concourir à sadétérioration.

Les professionnels de la protection de la biodiversité, notammenten matière de forêt/faune (agents gouvernementaux, biologistes,conservateurs et environnementalistes, etc.) ne prêtent pasformellement un tel serment. Ils ont cependant le devoir profes-sionnel face aux autres citoyens, d’être les gardiens de la viesub-humaine et de la vie humaine en autant que celle-ci puisseêtre affectée dans l’interaction avec l’environnement.

Plus impéra t i vement encore, ils doivent être les chiens de gardede la nature, aboyer en cas de danger et, dans certaines circons-t a n c e s, mordre s’il y avait abus ou surexploitation du patri m o i n enaturel. En effet, la société les a formés, puis salariés. En retour,nous avons, en tant que citoyens, des attentes, voire des exi-gences envers eux en tant que gardiens et porte-parole desressources qui constituent notre patrimoine humain collectif.

D’autre part, les simples citoyens qui partagent l’habitat-terre ontaussi des devoirs. En effet, la protection de l’environnement etdes écosystèmes, ainsi que le maintien de la biodiversité ne sontpas que l’apanage des professionnels de la biologie, des ges-tionnaires et de l’État;ils constituent des enjeux majeurs qui nousinterpellent comme citoyens et comme société. Si nous avonsdes droits, nous avons aussi des devoirs.

Le couple droit/devoir enfante la responsabilité en éthique. Eneffet si, d’une part, nous avons le droit d’utiliser, d’aménager etmême de modifier la nature, il y a par contre un devoir de la pro-téger contre d’éventuels prédateurs (prédateurs industriels, parexemple), en fonction des générations futures. C’est là notreresponsabilité comme professionnels, comme citoyens et commesociété. Nous sommes tous collectivement solidaires et respon-sables face au capital-nature, tout comme les médecins face aucapital-santé.

Pa rler de droits, de devo i r s, de responsabilités, relève del’éthique;mais appliquer ces concepts au vivant, qu’il soit humain

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ou infra-humain nous amène à traiter de bio-éthique. C’est ceque cette présentation voudrait souligner.

L’objectif de la communication est donc: (1) de tracer un très brefaperçu de l’histoire de la bioéthique dont la biodiversité constituel’un des champs d’investigation; (2) de mettre l’accent sur lesnouvelles responsabilités éthiques et sociales qui incombent auxclients humains de la forêt (industries forestières et autres con-sommateurs forestiers) face aux habitants non humains de cetteforêt (fa u n e, flore); (3) de signaler des valeurs qui doivent êtreh i é rarchisées dans notre « agir fo r ê t - fa u n e » (valeurs économiques,e s t h é t i q u e s, sociales), si l’on veut respecter les vivants qui part a-gent la même habitat commun et le même écosystème global.

1. La bioéthique : bref historique

L’éthique est une science humaine (philosophie) qui étudie laconduite humaine en tant qu’elle se soumet à des valeurs - à ladifférence d’autres sciences humaines, telles la psychologie oula sociologie, qui posent des jugements de fait sur des com-portements humains individuels ou sociaux.

La bioéthique est l’éthique a p p l i q u é e au secteur des sciencesde la vie et de la santé : la b i o m é d e c i n e. Elle est née dansl ’ e f fe rvescence des années 1960, suite à une série de révo-lutions d’ordre économique (le « b o o m » d’après-guerre)techno-scientifique (transplantations d’organes, respira t e u r s,e t c . ) et socio-culturel (mouvements des droits civils, duf é m i n i s m e, du pacifisme, etc.). Au cours du tiers de siècle quil’a vue naître, elle a subi une évolution historique quant à sonobjet d’inve s t i g a t i o n . Elle a d’abord originé du secteur bio-m é d i c a l : c’est l’éthique c l i n i q u e ( « la conduite au cheve t d um a l a d e » ) . Elle s’est ensuite étendue au champ t e c h n o - s c i e n t i f i q u e :c’est l’éthique de la recherche et l’ex p é ri m e n t a t i o n sur des sujetshumains (« la conduite au labora t o i r e » ) . Les pr i n c i p a u xp rincipes et normes sont maintenant établis dans cessecteurs biomédicaux.

La biodiversité constitue une troisième phase d’exploration,plus récente, de la bioéthique, sous la pression d’une nouvelleprise de conscience : celle d’un patrimoine collectif à préserver,voire à restaurer : l’habitat humain et la diversité de la vie. Ainsi

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la bioéthique est maintenant sommée d’analyser la conduite facela bio-diversité (le « bios » grec qui va bien au-delà de la strictebiologie) pour maintenir et préserver le polymorphisme, l’habitatet les inter-relations entre les vivants. La bioéthique est ainsipassée des enjeux liés aux « poumons d’acier » (les respirateursartificiels des années 1960) aux « poumons forestiers » (les res-pirateurs de la planète des années 2000).

La génomique vient, très récemment, de s’ouvrir comme unautre volet de la diversité, surtout avec les programmes de car-t o graphie et de séquençage des génomes, dont celui duGÉNOME HUMAIN. Ils se proposent d’analyser l’informationgénétique qui constitue l’infrastructure moléculaire de tout vivant.Ils rendent possible l’abolition des frontières inter-spécifiques etla recombinaison du vivant, en même temps que la ‘création’ denouvelles espèces. Mais il n’y a pas lieu, ici, de développer cesecteur de la bioéthique.

2. Quelques principes éthiques directeurs

Quels seraient les principaux principes qui devraient gouvernernotre conduite pour agir comme des agents responsables face àla préservation de notre patrimoine naturel?

Tout d’abord, un prérequis méthodologique. Les dive r s e ssciences possèdent chacune leurs instruments méthodologiquespour analyser un phénomène spécifique : appareils sismo-graphiques, de télédétection, etc., qui leur permettent de con-duire les observations et expérimentations.

L’éthique et la bioéthique sont dotées de leur propre méthode quileur sert de poids et mesure : ce sont des principes qui détermi-nent les norm e s, règles ou règlements mu l t i fo rm e s. C e sprincipes sont des jugements généraux issus de l’expérience,souvent millénaire, qui sert à mesurer ce qui est ‘bien’, ‘moinsbien’, ou ‘mauvais’ dans l’agir individuel ou collectif.

En l’occurrence, ici, quels devraient être les principes éthiquesqui devraient présider à notre action pour respecter la biodiver-sité, tant écologique que génomique? Ce sont les principessuivants qui nous permettent de relever le défi face aux enjeuxqu’il nous faut relever en tant que professionnels, citoyens ou

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société. Ils ont été émis en partie par la Déclaration de Rio etcelles qui l’ont suivie. Ces principes sont inter-reliés et complé-mentaires.

2.1 Le principe de précaution

L’euphorie des grandes révolutions industrielles du siècle dernier,accompagnées de ce qu’on qualifie de « capitalisme sauvage »,nous a légué un environnement qu’on doit maintenant dépollueret restaurer à coup de ressources technologiques, financières ethumaines. De plus, une nouvelle vision du monde vient d’attirerl’attention sur deux réalités : les ressources naturelles ne sontpas illimitées et l’on doit assurer un développement durable deces ressources (par exemple le reboisement après les coupesforestières).

La prévoyance, la vigilance, la lucidité et la prudence dans ledéveloppement s’avèrent désormais incontournables si l’on veutassurer une relation harmonieuse entre l’homme et la nature etune transmission d’un habitat sain pour les générations à venir.

2.2 Le principe de responsabilité, de solidarité et de fiduciarité

Des décisions ou orientations doivent être pensées en fonctiondes générations futures. L’axiome amérindien est éloquent à cetégard : « La terre ne nous est pas donnée en héritage, elle nousest prêtée par les générations à venir ». Nous sommes des fidu-ciaires redevables, face à nos descendants, du capital-natureque nous leur léguerons :

• qualité de l’habitat planétaire impliquant des « denrées » pr i-mordiales pour la vie que sont l’eau, l’air, la faune et la flore;sans cette qualité nous risquons de vouer les générationsfutures à une insuffisance respiratoire ou alimentaire;

• qualité de la santé génomique du patrimoine génétique desindividus, des espèces et des écosystèmes, sinon nousrisquons d’hypothéquer la vie ou la survie de ceux qui vien-dront après nous; ici, les organismes génétiquement modifiésdoivent attirer particulièrement l’attention.

« Suis-je le gardien de mon frère? » Nous le sommes, que nousle voulions ou non.

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2.3 Le principe de transparence

Que ce soit dans l’ordre scientifique proprement dit (ce qui sepasse dans les laboratoires) ou dans l’ordre des sciencesappliquées (ce qui est mis en œuvre sur le terrain) de laforesterie, de l’agronomie, ou de l’environnement, la trans-parence est primordiale. Transparence face aux paris et trans-parence face au public. Ici encore, une des meilleures garantiesde décisions ou orientations responsables est l’information et ledébat entre pairs et dans la société. Les médias ont aussi un rôleimportant à jouer dans l’information : celui de courroie de trans-mission entre ce qui se passe dans les bureaux ou les labora-toires, et le grand public.

Tout ce qui pourrait se décider ou se réaliser en vase clos peutêtre suspect, lorsqu’il est question d’orientations qui engagentl’avenir.

2.4 Le principe de multidisciplinarité

Le cheminement parallèle de la biologie (entendue au sens largedes sciences de la vie) et des sciences humaines devrait êtreune chose du passé. Les enjeux, défis et dilemmes qui surgis-sent maintenant des biosciences et biotechnologies transcen-dent chacune des disciplines.

Au temps du biologiste Aristote (IVe s.A . C.), philosophie et scienceslogeaient sous un même toit et cohabitaient à une même t a bl e.Elles se sont ensuite séparées et ont cheminé para l l è l e m e n tjusqu’aux années d’après-guerre.Maintenant, sagesse, éthique etsciences doivent retourner à la complémentarité de départ, tout engardant certes chacune leur originalité et leur méthode spécifique.Cependant la nouveauté, la complexité et l’impact sur lesg é n é rations futures nécessitent une analyse et une prise dedécision multidisciplinaires en regard des problèmes quit ranscendent de ces disciplines.

2.5 Le principe de coopération

Finalement, un dernier principe, corollaire du principe de solida-rité, a été formulé lors de la discussion avec les membres duComité organisateur de ce Forum Forêt-Faune : le principe de

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coopération entre les divers clients de la forêt-faune, à savoir lesindustries forestières, les chasseurs et les pêcheurs, voire lespromeneurs.

S’il existe des valeurs économiques, respectables par ailleurs, ily a aussi des valeurs sociales et esthétiques à respecter. Ceprincipe de collaboration entre les divers acteurs de la forêt-fauneimplique un esprit de collaboration et une exclusion des rapportsde force entre les divers intervenants. La mise en commun desressources et des efforts constituent un levier puissant pourpréserver ce que la Nature nous a transmis après des millionsd’années de gestation : une forêt-faune qui permet à notreplanète de respirer et à nos collègues humains de jouir d’un habi-tat où il fait bon vivre.

Conclusion

En guise de conclusion, la bioéthique qui étudie la conduiteindividuelle et collective face aux avancements des sciences ettechnologies de la vie et de la santé, a subi une profonde évo-l u t i o n . Elle a passé, sans pour autant le délaisser, du champ dela biomédecine à celui de la biodive r s i t é .

Elle est une réponse, en même temps qu’une réaction, de l’intel -ligence humaine pour auto-préserver sa santé physique, mentaleet environnementale. Elle nous somme de nous mettre ensemblepour penser et trouver des solutions afin de sauvegarder notrepatrimoine actuel en fonction des générations à venir.

Remerciements au Comité organisateur du Forum Forêt-Faune,de même qu’à l’Association des biologistes du Québec qui m’ontdécerné le titre de Membre honoraire (1998-1999).

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- Chapitre 14 -LA MISE EN ŒUVRE DE LA GESTION INTÉGRÉE :LE CAS

DE LA POURVOIRIE DES LAURENTIDES

André ST-PIERRE, ing. f.

Produits forestiers Donohue Inc.4000, chemin St-Eusèbe

St-Félicien (Québec) G8K 2R6

Résumé

Un plan d’aménagement forestier a été réalisé en 1997 pour let e r ritoire de la Po u rvo i rie des Laurentides qui couvre près de 243k m2. Une approche de gestion intégrée des ressources a alorsété ex p é rimentée en collaboration avec plusieurs interve n a n t s :dont le pourvoye u r, Produits Forestiers Donohue, Abitibi-Consolidated, Panneaux Chambord, le ministère des Ressourcesnaturelles et le ministère de l’Environnement et de la Fa u n e.

À l’occasion du Forum Forêt-Faune, on brossera dans un premiertemps, un portrait de cette expérience positive dans la mise enœuvre de la gestion intégrée des ressources. Une présentationsommaire du projet sera effectuée tout en mettant l’emphase surles objectifs poursuivis, les étapes de réalisation, les résultatsobtenus.

Enfin, en seconde partie de l’exposé, on posera des éléments deréflexion plus généraux portant sur l’application du concept degestion intégrée en forêt publ i q u e. Il sera alors question du contex t eactuel, des difficultés et des facteurs de succès à considérer pourréaliser ce nouveau concept de gestion des ressources fo r e s t i è r e s.

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Introduction

Un plan d’aménagement a été réalisé en 1997 sur le territoire dela Pourvoirie des Laurentides qui couvre une superficie de 243km carrés et chevauche deux aires communes sur forêt publique.On y pratique la pêche et la chasse, en plus des activités récréa-tives et de villégiature. Des travaux de récolte et sylvicoles ontété pratiqués à différentes périodes sur le territoire.

L’avènement des Contrats d’Approvisionnement d’AménagementForestier (CAAF) en 1987 a défini un nouveau mode de fonction-nement sur les forêts domaniales. La publication subséquentedes modalités d’intervention en forêt publique en 1989, est venuepréciser les vocations du territoire et les façons d’intervenir. Onvenait alors d’introduire les zones de productions forestière,récréative, faunique, etc.

Le ministère des Ressources naturelles de la régionSaguenay-Lac-Saint-Jean amorçait une réflexion au début 1996sur l’harmonisation des interventions des industriels forestierssur les territoires fauniques. Rappelons qu’un an plus tôt, lespourvoyeurs du Québec lançaient un mémoire sur la question.Au printemps 1996, Produits Forestiers Donohue inc.allait de l’a-vant avec la confection d’un plan d’aménagement dans l’optiquede se donner des orientations quant à l’intégration des activitésforestières sur la Pourvoirie des Laurentides. Un groupe de tra-vail est alors formé avec le pourvoyeur, les Ministères desRessources naturelles et de l’Environnement et de la Faune, demême qu’Abitibi-Consolidated et Panneaux Chambord.

Le projet de gestion intégrée

On a d’abord formé un comité de concertation représentatif desintervenants sur le territoire. Il s’agit d’une étape importante quia permis au groupe d’effectuer une réflexion et de développerune vision commune de la problématique et des éléments desolutions. Le projet a été réalisé en plusieurs phases. On ad’abord analysé l’inventaire forestier du point de vue de la com-position forestière, l’âge des peuplements et leur maturité. On aconduit une évaluation des potentiels et des contraintes à l’amé-nagement, en particulier pour :

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• La localisation de la récolte future ;• L’accessibilité du territoire ;• Le potentiel sylvicole ;• Le potentiel pour l’orignal ;• La vulnérabilité à la tordeuse.

On a localisé les peuplements parvenant à maturité au cours desprochains 20 ans à l’aide la géomatique. La dispersion des boismûrs, dans l’espace et dans le temps, alors observée, a confirmél’impact négligeable de la récolte à venir sur les activités et sitesprincipaux de villégiature. Le potentiel faunique a été défini enconsidérant les différents facteurs prépondérants du comporte-ment de l’orignal en regard des besoins d’abri, de nourriture etdes conditions forestières rencontrées. L’ i n fo rmation alorsrecueillie s’est avérée précieuse pour planifier les développe-ments futurs concernant l’orignal.

Des objectifs d’aménagement ont été retenus, conformément à laplanification de la pourvoirie, à plus long terme en matièrerécréo-touristique, forestier et faunique. L’affectation du territoireet les modalités d’intervention ont été révisées pour concilier lespréoccupations du pourvoyeur en respect avec les normes d’in-tervention sur les forêts publiques. Enfin, on a préconisé desinterventions adaptées en périphérie du réseau principal d’accès,de même que dans les zones de villégiature afin de minimiserl’impact visuel de la récolte au moyen de coupe de superficieréduite de forme irrégulière. Une récolte en mosaïque est aussiretenue pour favoriser l’orignal. Enfin, des mesures d’atténuationdes impacts des aires d’ébranchage sont considérées le long deschemins principaux.

Suite à la confection du plan d’aménagement on a réalisé sur leterritoire des éclaircies commerciales et pré-commerciales, demême que la réfection du réseau routier. Ces travaux sont égale-ment réalisés dans l’optique de mettre en valeur les sitesfréquentés et sensibiliser la clientèle à l’égard de l’aménagementforestier.

On peut identifier certains bénéfices suite au projet. La réflexionet démarche communes du groupe est un résultat par lui-même.Le niveau de confiance entre les intervenants et la qualité desrelations inter-personnelles sont des indicatifs de la réussite du

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projet. L’intégration des activités sur la Pourvoirie en découlenécessairement. La démarche a permis à tous de posséder lamême compréhension des enjeux et de faire des consensus. Leplan d’aménagement constitue une référence et une synthèsenécessaires qui permet à chacun de sécuriser les investisse-ments nécessaires au développement de l’entreprise.

Les éléments de réflexion

La mise en œuvre de la gestion intégrée des ressourcesprésente des difficultés. Les connaissances requises sont sou-vent partagées par plusieurs spécialistes œuvrant dans desorganisations distinctes. Traditionnellement, la gestion du terri-toire s’est effectuée en délimitant les compétences propres auxforêts, à l’environnement et à la faune. C’est également undomaine relativement nouveau au Québec et dans certains cas,on est encore au stade de la recherche. Les difficultés rencon-trées dans le passé sont souvent un frein à tout amorce d’un dia-logue constructif. Enfin, les intérêts en jeu de chacun et la mis-sion propre de chaque entreprise rendent la tâche égalementplus complexe. Voilà tant d’aspects qui en rend l’intégration pro-blématique.

Suite à l’expérience réalisée pour la Pourvoirie des Laurentides,on peut identifier les facteurs de succès suivants :

1. Miser sur les relations inter-personnelles

Il faut savoir miser sur une démarche de groupe afin « d’amé-nager » aussi les relations inter-personnelles et travailler dansl’optique de créer un climat de collaboration. C’est un résultatintangible que l’on doit poursuivre dès le début.

2. Être partie prenante au projet

On doit établir un mécanisme de concertation pour le projet quifait place à l’ouverture et la reconnaissance mutuelle de chacun.Définir le fonctionnement du groupe et prévoir un mandataire quicoordonne la démarche et assure la gestion des part i e sprenantes.

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3. Miser sur l’expérimentation

Il faut miser sur l’entrepreneurship et l’expérimentation de projetsqui favorisent l’innovation et le partenariat; faire place à unedémarche par étape, à petite échelle, pour se donner des succèsensemble; retenir d’abord les projets à fortes chances de succèset où les risques sont faibles. L’état a un rôle de mobilisateurdans le développement forestier et aura à encourager des initia-tives qui sortent des sentiers battus. Soulignons ici, le pro-gramme de mise en valeur des ressources du milieu forestier quiva en ce sens.

Conclusion

La loi sur les forêts et les modalités d’intervention en forêtpublique encadrent déjà l’utilisation du territoire. Ce cadre deréférence reflète, en principe, les besoins et valeurs des citoyens,tant au niveau social qu’économique. Il s’agit d’un modèle quidoit évoluer avec le développement de la société québécoise,guider les choix des aménagistes, en harmoniser l’intégration etéviter les abus.

De nouvelles considérations sont venues récemment s’ajouter audébat. Le développement durable et la biodiversité entraînentdéjà des questionnements et auront nécessairement des inci-dences sur les façons de faire en matière de gestion intégrée desressources. Cela exigera une mise à jour des lois et règlementspour les rendre plus efficaces et éviter d’alourdir davantage lesystème en place. Doit-on miser seulement sur le cadre régle-mentaire pour assurer le succès à cet égard ? Réagir rapide-ment au changement est nécessaire aux individus comme auxorganisations. Pour ce faire, on doit miser sur l’implication et larecherche de solutions concertées. Il faut présager que desgroupes ou tables de concertation viendront compléter au besoinles mécanismes de consultation actuels prévus par la loi sur lesforêts. Il faut cependant prendre garde face aux formules pré-définies applicables à toutes les situations. Le contexte de lagestion intégrée et les besoins des intervenants sont variés etproposent, plutôt en ce sens, de l’ouverture afin de composeravec les véritables enjeux en cause. C’est un projet mobilisateurpour les intervenants du milieu où l’on doit chercher le maximumde bénéfices pour tous.

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- Chapitre 15 -LA GESTION DE L’HABITAT FORESTIER AU

NOUVEAU-BRUNSWICK

Dan BEAUDETTE1 et Luc GAGNON2

1Ressources naturelles et ÉnergieProvince du Nouveau-Brunswick C.P. 6000Fredericton (Nouveau-Brunswick) E3B 5H1

2Ressources naturelles et ÉnergieProvince du Nouveau-Brunswick C.P. 170Bathurst (Nouveau-Brunswick) E2A 3Z2

Résumé

Quatre-vingt-cinq pour cent de la superficie du Nouve a u -Brunswick est constituée de forêt productive; 48 % de cette forêt(3 millions ha) est publique. Pour des fins d’aménagement, lesterres de la Couronne sont divisées en 10 permis de coupe. Lesobjectifs de gestion pour ces terres sont définis par le gouverne-ment; la préparation et la mise en œuvre des plans sont duressort des compagnies forestières, titulaires des permis decoupe. Des plans de gestion révisés sont soumis tous les 5 ans.Ceux-ci doivent démontrer que les niveaux de récolte de laressource ligneuse peuvent être soutenus sur un horizon de 80ans et que les objectifs pour les autres ressources de la forêt sontr e n c o n t r é s. Les 25 premières années d’intervention sontréférées spatialement.

Depuis 1992, les objectifs de gestion incluent le maintien d’unepartie de la forêt de conifères dans un état de maturité avancée;ceci pour combler des besoins spécifiques reliés aux habitatsfauniques. Débutant avec les plans à être déposés pour 2002, laportée des objectifs a été élargie pour inclure des valeurs liées àla biodiversité, celle-ci étant gérée au niveau du paysage foresti-er.

Nous avons identifié un ensemble d’espèces de vertébrés pou-vant servir d’indicateurs d’une gestion soutenue de nos forêts.

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Ces espèces ont été choisies en fonction des différentsregroupements d’habitat disponibles, de leurs rôles spécifiquesdans l’écosystème, du niveau de leur interaction avec l’environ-nement et de leur préférence pour un micro-habitat. Les habitatsforestiers ont été définis en termes de type de végétation, del’étape de développement de la forêt et d’agencement spatial.Des objectifs ont été établis pour chaque type d’habitat basé surle maintien de populations viables de toutes les espèces indica-trices là où, sur les terres de la Couronne, ces espèces sontindigènes.

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Gestion Forestière

Quatre-vingt-cinq pour cent du territoire du Nouveau-Brunswickest boisé. Dans cette forêt, les peuplements résineux occupent45 % de la superficie. Les principales espèces sont l’épinettenoire, l’épinette rouge et le sapin baumier. Ce dernier est plusabondant dans le nord-ouest et le centre-nord de la province,alors que les épinettes dominent ailleurs. Les peuplements feuil-lus occupent 28 % de la forêt et sont bien distribués partout, saufdans le centre intérieur de la province. Soixante pour cent despeuplements feuillus sont dominés par un mélange d’espècestolérantes constituées d’érable à sucre, de bouleau jaune et dehêtre, ou par l’érable rouge. Les autres feuillus d’importance sontle bouleau blanc et le peuplier faux-tremble. Les peuplementsmélangés occupent 27 % du territoire forestier et sont bienreprésentés partout.

Quarante-huit pour cent de la forêt, soit approximativement troismillions d’hectares, est du domaine public et est administré selonla Loi sur les terres et forêts de la Couronne (1980) du Nouveau-Brunswick. Pour les besoins de la gestion forestière, ces terressont partagées entre dix permis de coupe qui varient de 72 000à 532 000 ha. Les objectifs de gestion pour ces permis sont défi-nis par le ministère des Ressources naturelles et de l’Énergie(MRNÉ). La planification et la mise en application de tous lesaspects de la gestion sont sous la responsabilité des compag-nies forestières qui sont titulaires de permis.

Les titulaires soumettent à l’approbation du MRNÉ, à chaquecinq ans, des plans de gestion forestière. Les deux étapes de laplanification sont le développement de stratégies d’aménage-ment et leur délimitation géographique. Les plans soumis doiventdémontrer que les niveaux de récolte de la matière ligneuse peu-vent être soutenus sur un horizon de 80 ans, tout en maintenantles autres valeurs de la forêt au moins aux niveaux établis par leMRNÉ. La délimitation géographique consiste à cartographierles aires de coupe et les zones destinées aux autres ressourcesde la forêt, et ce pour les 25 à 35 premières années. Ce proces-sus assure que les stratégies sont viables dans l’espace, dumoins pour cette période de temps.

Les objectifs visés lors du développement des plans de gestion

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forestière ont traditionnellement été de maximiser, au sein dechaque permis, la récolte de la matière ligneuse, ceci étantnéanmoins assujetti à des restrictions imposées pour les zonesde protection des plans d’eau, les aires d’hivernage du cerf deVirginie et les sites inaccessibles. En 1992, les objectifs de ges-tion sont étendus pour inclure, pour sa valeur en tant qu’habitat,le maintien de forêts surannées d’épinette-sapin. Avec les plansqui seront soumis en 2002, l’étendue des objectifs se voit encoreélargie afin d’inclure les valeurs reliées à la biodiversité àl’échelle du paysage forestier.

Forêts surannées d’épinette-sapin

Les espèces fauniques (ve rtébrés) considérées lors dudéveloppement des plans de gestion de 1992 ont été mises enpriorité selon leur niveau d’association avec les types de peuple-ments forestiers jugés les plus susceptibles de décroître signi-f i c a t i vement en terme d’abondance. La classification desespèces se fait suivant trois étapes. Premièrement, les peuple-ments sont assignés à l’un de dix types forestiers, ainsi qu’à l’unedes 12 classes d’âge. Deuxièmement, des projections sur 40ans des structures de classes d’âge par type forestier sont effec-tuées à partir des stratégies de gestion soumises en 1987.

À cette étape, les changements projetés les plus significatifsdans l’abondance des types forestiers sont :

1. une diminution en superficie des peuplements de conifèresdominés par l’épinette,

2. une quasi-disparition des peuplements mélangés dominéspar l’épinette,

3. une augmentation des peuplements résineux et mélangésdominés par le sapin,

4. une augmentation des peuplements de feuillus intolérants.

De plus, l’étendue naturelle des âges est tronquée à 50 ans pourles types dominés par l’épinette et le sapin baumier. Les prévi-sions au niveau de l’abondance des forêts surannées à domi-nance résineuse montrent qu’elles passent de 46 % du territoireen 1992, à 8 % en 2032. Les analyses cartographiques indiquentqu’en 2032, pratiquement tous les peuplements contribuant àces types forestiers se retrouvent là où la récolte est restreinte, et

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principalement dans les zones de protection des plans d’eau.

L’étape finale de la classification des espèces fauniques consisteà établir leur niveau d’association avec les types forestiers donton a prévu une réduction en approvisionnement. Seize espècesde vertébrés sont identifiées comme étant dépendantes desforêts surannées résineuses. Une approche globale aurait icinécessité que des objectifs et des stratégies soient développéspour chacune de ces espèces. Cependant, le choix retenu àcourt terme (plans de gestion de 1992) est de mitiger les impactspotentiels défavorables résultant des pénuries prévues en habi-tat. À cette fin, les objectifs de gestion sont élargis pour inclurele maintien de quantités spécifiques de forêts sura n n é e sd’épinette-sapin.

Le concept de forêts surannées d’épinette-sapin est défini commeétant celui rencontrant les besoins stru c t u raux et spatiaux de lam a rtre d’Améri q u e. De toutes les espèces dépendant de ce typed’habitat, la martre est celle dont le domaine vital est le plusgra n d ; donc celle la plus susceptible de requérir de grandes éten-dues de forêt adéquate. Les objectifs à atteindre, en ce qui con-c e rne l’abondance et la répartition des forêts sura n n é e sd’épinette-sapin, sont basés sur le nombre désiré de couplesreproducteurs de mart r e s, sur la superficie de territoire requispour chaque couple, et sur un estimé de la taille et de la disper-sion nécessaire des blocs forestiers de ce type d’habitat. C e sobjectifs sont ensuite évalués en fonction des réductions prévuesau taux soutenu de coupe annuelle. Conséquemment, des objec-tifs finaux de 172 000 ha d’habitat sont retenus, soit une superfi-cie équivalente à 10 % de toute la forêt publique à dominancerésineuse. Cet habitat est réparti au sein de 240 blocs forestiersdont la superficie minimale d’habitat par bloc est établie à 375 ha.La mise en application des objectifs pour le maintien de forêtssurannées d’épinette-sapin se traduit, en 1992, par une réductionde 18 % du taux soutenu de coupe annuelle.

Indicateurs de la gestion forestière

La portée des objectifs de la gestion forestière se voit aujourd’huiélargie afin d’inclure les valeurs associées à la biodiversité àl’échelle du paysage. Les changements incluent l’utilisationd’espèces animales à titre d’indicateurs d’un rendement soutenu

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du milieu forestier. Les vertébrés servent bien ce rôle étantdonné la grande étendue des échelles spatiales auxquelles ilsinteragissent avec leur environnement.

L’utilité des espèces indicatrices est double. Premièrement, lestendances attendues dans l’abondance des habitats peuvent êtreétablies, pour chaque espèce, à partir de l’analyse des plans degestion forestière en cours. Au besoin, cela résulte en des objec-tifs de niveaux d’habitat à atteindre lors du processus de planifi-cation. Deuxièmement, les tendances dans l’abondance despopulations peuvent être évaluées par la surveillance ou la com-pilation de données d’inventaires existants.

Les espèces indicatrices sont sélectionnées de façon àreprésenter la variabilité des structures corporelles, des rôlesdans l’écosystème, de l’échelle des interactions avec l’environ-nement et des associations d’habitats. À cette fin, 157 espècessont caractérisées selon les variables suivantes:

1. la classe de vertébré (mammifère, oiseau, reptile, amphibien)est utilisée comme indice pour la structure corporelle,

2. le régime alimentaire (herbivo r e, carn i vo r e, gra n i vo r e, insecti-vore ou omnivore) est un indice pour le rôle dans l’écosystème;

3. la taille du domaine vital ainsi que la taille corporelle sont desindices pour l’échelle des interactions avec l’environnement,

4. le type de peuplement forestier, le développement succes-sionnel et les communautés végétales non-forestières sontutilisés pour décrire l’habitat.

Les espèces fauniques sont divisées parmi celles ayant unique-ment besoin de la forêt et celles nécessitant un mélange de forêtet d’autres types d’habitat. Elles sont ensuite regroupées selonleur classe, leur type d’alimentation, la taille de leur domainevital, leur taille corporelle et leur habitat. Au moins une espèceindicatrice est choisie pour représenter chacun des groupes. Lasuite de cet article porte sur les espèces dépendantes unique-ment de la forêt, bien qu’un processus similaire ait été entreprispour les espèces requérant un mélange d’habitats.

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Habitat pour la faune forestière

Trente-huit communautés végétales sont décrites pour leNouveau-Brunswick à partir de l’analyse de la composition enespèces de la strate arborescente supérieure. La faune estassignée à une ou plusieurs de ces communautés en se basantsur la littérature et sur l’opinion d’experts en la matière. Les 38c o m munautés végétales sont ensuite regroupées en typesd’habitat selon la similarité de leur composition végétale et dupatron d’assignation des espèces fauniques. Les cinq catégoriesd’habitats résineux (composition ≥50 % en conifères) qui enrésultent sont : épinette-sapin, épinette-sapin pur (≥75 %conifères), épinette noire, pin gris, et pin rouge et blanc. Lesdeux catégories d’habitats feuillus (<50 % conifères) sont : feuil-lus et feuillus tolérants (≥35 % en espèces tolérantes). Unhuitième type d’habitat, la forêt mélangée (25 à 75 % conifères),chevauche toujours l’un ou l’autre des types précédents. Notonsque certains habitats sont des sous-ensembles d’autres types àdéfinition plus large (i.e. feuillus tolérants est un sous-ensemblede feuillus). Lorsque les besoins de certaines espèces sont ren-contrés à l’intérieur d’un habitat à définition large, ils le sontégalement au sein de l’habitat des sous-ensembles.

Les espèces végétales sont ensuite assignées à l’un ou l’autre desquatre stades de la succession végétale suiva n t e : j e u n e, mature,s u ranné ou vétéran à fo rt diamètre, ci-après appelé tout simplementv é t é ra n. Le stade suranné correspond à la période au cours delaquelle se produit une mortalité significative dans la strate arbores-cente supéri e u r e.Des analyses effectuées dans des places-échan-tillon montrent que l’âge moyen des peuplements au début du stades u ranné est de 60 ans pour le sapin baumier, 70 ans pour le pin gri sainsi que pour les espèces de feuillus intoléra n t s, 80 ans pourl’épinette noire, 90 ans pour l’épinette rouge, l’épinette bl a n c h e, lepin rouge et le pin blanc et 120 ans pour les feuillus toléra n t s. L estade des vétérans correspond à la période au cours de laquelle lestiges d’arbres commencent à atteindre 45 cm de diamètre à hau-teur de poitrine (dhp). Les données indiquent que l’âge moyen despeuplements au début de cette étape est de 90 ans pour les fe u i l-lus intoléra n t s, le pin rouge et le pin bl a n c, 110 ans pour l’épinetterouge et l’épinette blanche et 120 ans pour les feuillus toléra n t s. L esapin baumier, le pin gris et l’épinette noire ne se rendent généra l e-ment pas au stade de vétérans tel que défini.

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Les espèces fauniques utilisées à titre d’indicateur sont le gros-bec errant et le roitelet à couronne rubis pour les forêts suran-nées d’épinette-sapin pur; la martre d’Amérique (MA), le pic àdos noir (PDN), la sittelle à poitrine rousse (SPR), la moucherolleà côtés olive (MCO), la mésange à tête brune (MTB) et lechardonneret des pins pour les forêts surannées d’épinette-sapin; les MA, PDN, SPR, MCO, MTB et la paruline à poitrinebaie pour les forêts surannées d’épinette noire; la MA pour lestade vétéran de l’habitat épinette-sapin; la paruline des pinspour les forêts surannées de pin rouge et pin blanc; la chouetterayée, la sittelle à poitrine blanche et le pioui de l’est pour lesforêts surannées de feuillus tolérants; le pic flamboyant, le picmaculé et la paruline couronnée pour les forêts surannées defeuillus; le grand pic pour le stade vétéran des forêts feuillues; lagrive à dos olive et le grand polatouche pour les forêts surannéesmélangées et, enfin, le pékan pour le stade vétéran de la forêtmélangée.

Les objectifs de travail concernant la distribution et le niveaud’abondance de chaque type d’habitat sont établis en vue d’as-surer le maintien de populations viables de toutes les espècesindicatrices, là où elles sont indigènes sur les terres publiques.Les données de base sont le nombre d’individus nécessaire pourmaintenir une population viable, la superficie minimum qu’un blocdoit avoir pour être considérée comme habitat et le nombre deblocs d’habitat requis au sein desquels les populations vouluespeuvent être maintenues. La taille pour une population viable estétablie à 500 femelles reproductrices, et ce pour toutes lesespèces.

La superficie minimum pour un bloc d’habitat est la superficiecontiguë minimale requise pour que l’habitat soit considéréadéquat. Cette superficie est déterminée pour chaque espèce enfonction de l’utilisation projetée du bloc, de l’espace requis parfemelle reproductrice et du nombre de femelles reproductricesdevant être supporté dans chaque bloc. L’utilisation projetée estque le bloc doit pourvoir à tous les besoins des espèces visées,ou qu’il puisse procurer un élément particulier nécessaire à la nid-ification ou à l’établissement de terr i e r s. Dans le premier cas, lataille des blocs est calculée en se reportant aux domaines vitauxdes espèces. Dans le second cas, elle est établie en utilisant unestimé de la superficie requise pour procurer l’élément particulier

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recherché. Pour la majorité des espèces, les blocs d’habitatdoivent supporter 10 femelles reproductrices, un nombre consi-déré suffisamment grand pour fonctionner en tant qu’unité sociale.Pour un petit nombre d’espèces ayant de grands domaines vitauxet une bonne capacité de dispersion, les blocs d’habitat sontconçus pour ne supporter qu’une seule, ou deux fe m e l l e s. A i n s i ,le plus grand bloc d’habitat recherché doit être constitué de 400ha de forêts sura n n é e s d’épinette-sapin et doit pourvoir auxdomaines vitaux de deux femelles et un mâle, dans le cas de lam a rtre d’Améri q u e. Tous les autres blocs doivent être entre 20 et60 ha. Les espèces ayant de grands domaines vitaux (la chouetteray é e, le grand pic, le pékan) tendent à requérir des blocs d’habitatspécifique uniquement pour rencontrer leurs besoins de nidificationou de construction de terriers. Ainsi la taille des blocs d’habitatrequise pour ces espèces demeure petite.

Les endroits à l’intérieur desquels les populations viables doiventêtre maintenues sont nommés unités de gestion. Les critèrespour définir ces unités veulent qu’elles utilisent des frontièresécologiques existantes, qu’elles soient suffisamment grandespour supporter une population et suffisamment petites pouréviter une dispersion excessive des blocs d’habitat. L’élément leplus influent sur la dimension d’une unité de gestion est la tailledu domaine vital. Une grande variabilité dans la superficie desdomaines vitaux empêche l’utilisation d’un seul ensemble d’u-nités de gestion. Ainsi, les unités ultimement définies sontl’équivalent des éco-districts (n = 34; taille moyenne sur les ter-res publiques = 91 000 ha), des éco-régions (n = 7; taillemoyenne = 444 000 ha), ou de l’ensemble des terres du domainepublic (3,1 millions ha).

La quantité minimale d’habitat requise par espèce est fonction dela taille des blocs d’habitat, du nombre de blocs nécessaire poursupporter une population et du nombre d’unités de gestion. Pourchaque type d’habitat, il est établi que l’abondance minimum cor-respond à la superficie requise pour rencontrer les besoins detoutes les espèces indicatrices associées à cet habitat.

Plans de gestion forestière de 2002

Planifier à long terme pour des objectifs spatiaux multiples est unprocessus complexe. L’horaire imposé pour l’établissement des

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objectifs et des normes devant être appliqués aux plans de ges-tion de 2002 ne permet pas le développement de méthodologiesqui pourraient faciliter l’obtention des résultats désirés. La com-plexité de la planification est donc diminuée en combinant destypes d’habitat et des étapes de succession similaires et enabandonnant certains critères spatiaux.

Les objectifs finaux pour les plans de 2002 sont donc de pourvo i r :67 000 ha de forêts sura n n é e s de feuillus toléra n t s, 18 000 ha deforêts surannées de fe u i l l u s, 172 000 ha de forêts sura n n é e sd’épinette-sapin, 4 000 ha de forêts surannées de pin, 96 000 hade forêts surannées mélangées et 12 000 ha du stade vétéran dela forêt mélangée.La superficie totale requise pour les quatre pre-miers types, qui sont additifs, est de 261 000 ha, ou 9 % des ter-res publ i q u e s. Des critères spatiaux ne sont appliqués que pourles forêts surannées d’épinette-sapin. Les plans soumis serontalors utilisés pour évaluer les tendances à long terme de l’abon-dance des types d’habitat et des stades de la succession et serv i-ront à tester leur confo rmité avec les critères spatiaux.

Conclusion

La planification stratégique et à long terme des activités de ges-tion sur les terres publiques du Nouve a u - B ru n sw i ck a débuté en1 9 8 2 . Les ressources gérées à ce moment se limitaient à lamatière ligneuse, même si des dispositions étaient prises enfonction des zones de protection des plans d’eau et des airesd ’ h i ve rnage du cerf de V i r g i n i e. En 1992, les objectifs sont élar-gis pour inclure le maintien de 10 % de la forêt dominée enconifères au stade de forêts surannées d’épinette-sapin. L e smodifications mises de l’avant pour 2002 incluent l’utilisationd’espèces fauniques comme indicateur d’une gestion soutenu ede la forêt, ainsi que l’élargissement des objectifs pour inclurel’étendue des types d’habitat utilisé par ces espèces.

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- Partie IV -Table ronde

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- Chapitre 16 -CONTEXTE DE LA TABLE RONDE

Les objectifs poursuivis par les organismes forestiers et fau-niques apparaissent souvent divergents, et pour cause. Dans lecas des organismes forestiers, la forêt représente une source dematière ligneuse indispensable pour l’industrie forestière. Lavitalité économique de plusieurs villes et même de régions endépend directement. Pour d’autres, cette même forêt représenteun habitat indispensable à une faune va ri é e. L’ a c t i v i t ééconomique qui découle des activités de la chasse, de la pêche,du piégeage ou simplement de la villégiature, bien que moindrecomparativement à celle du volet forestier, est aussi à considé-rer. Toutefois, bien au-delà de l’aspect économique, la forêtreprésente également un patrimoine à protéger.

La foresterie a vécu de nombreux changements au fil du temps.D’une opération à petite échelle, elle est devenue avec le tempsun vaste chantier technologique où la récolte est à la limite mêmede la capacité de production de la forêt. La mise en place desc o n t rats d’approvisionnement et d’aménagement fo r e s t i e r(CAAF) ainsi que du Règlement sur les normes d’intervention(RNI) en milieu forestier font partie des mesures qui ont étéprises en réponse à une pression accrue sur la forêt ainsi qu’auxpréoccupations de l’ensemble des utilisateurs du milieu forestier.Cependant, les récentes connaissances concernant l’impact del’exploitation forestière sur la faune ainsi que les nouvelles préoc-cupations environnementales, modifient notre façon d’entrevoir lagestion et l’aménagement du territoire forestier. Entre l’applica-tion stricte des règlements sur les normes d’intervention et l’amé-nagement intégré de toutes les ressources, il y a encore un écartimportant. Comment minimiser cet écart ?

Bien que des amorces de consultation afin d’harmoniser l’ex p l o i t a-tion forestière avec les intérêts des autres intervenants soient enp l a c e, force est de reconnaître que ces mécanismes sont loind’être parfaits et complets. Comment parvenir à un compromisa c c e p t a ble pour tous ? Doit-on compter sur le vo l o n t a riat de l’in-d u s t rie forestière ou au contra i r e, doit-on légiférer de façon à fo r c e run meilleur aménagement forestier ? F o r ê t - Fa u n e : m a r i aged’amour ou de raison ? Voilà la question que nous vous posons!

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- Chapitre 17 -TABLE RONDE

Forêt-faune : mariage d’amour ou de raison

Serge Pinard, ingénieur forestierChef du service de l’aménagement forestierMinistère des Ressources naturelles

Merci beaucoup monsieur Dufour. Il y a des stars d’un soir et jevous avoue personnellement qu’aujourd’hui je me sens le plat dujour. Monsieur Marc Ledoux, sous-ministre associé aux forêts,m’a demandé de vous transmettre ses excuses et son regret dene pas pouvoir participer à cette table ronde. Comme monsieurDufour l’a mentionné, la gestion des priorités oblige!

M a riage d’amour, mariage de raison? Je vais essayer de vo u st ransmettre le plus fidèlement possible la vision de monsieurLedoux mais je vais probablement y mettre mon petit grain de sel.

Ce n’est pas nécessairement un mariage d’amour ou de raison.C’est plus une question de dire que tout ce qui est fait avec cœura beaucoup plus de chance d’être durable dans le temps. Onpourrait penser que le mariage d’amour a une viabilité plusintéressante. Toutefois, il y a des exigences et des pré-requis àcela et un des gros pré-requis, on l’a vu au cours des deux jourset principalement en début d’après-midi, c’est l’établissementd’une relation de partenariat dans le cadre d’un territoire donnéou d’une préoccupation sur un territoire donné. Cette relation departenariat se construit tranquillement au fur et à mesure qu’onvit des relations et des résultats satisfaisants pour l’ensemble desparties. Cela prend vraiment de la volonté et le goût de dévelop-per une vision commune. Au ministère, on pense que la gestionintégrée va être durable et effectivement rentable pour la collec-tivité dans ces conditions.

Il n’en demeure pas moins que des fois le cœur a des raisonsque la raison ignore. Il va peut-être falloir, jusqu’à un certainpoint, cibler certaines attentes ou certains objectifs à atteindredans la mise en valeur et l’aménagement des ressources.

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Toutefois, le pari c’est d’y aller sur une base de volontariat etd’incitatif et de développer des partenariats qui seront durablesdans le temps.

Je m’arrêterai là pour le moment monsieur Dufour.

George Arsenault, géographeVice-présidentSociété de la faune et des parcs du Québec

Je ne sais pas si effectivement il y a eu mariage ou s’il doit y avoirmariage avec autant de partenaires impliqués! C’est une ques-tion plutôt personnelle et je ne voudrais pas me prononcer pourtous les gens présents dans la salle qui sont, sans doute, lespartenaires de cette grande aventure forêt-faune. Ce qui estimportant, ce n’est pas de savoir s’il y a eu mariage ou non, maisplutôt de savoir si ce mariage en est un de part e n a riat et est-ce qu’ony travaille ensemble? Ce que je peux vous dire, c’est que depuisquelques années, du moins en ce qui concerne l’ex-ministère del ’ E nvironnement et de la Faune et maintenant la Société de la fa u n eet des parcs, les fréquentations augmentent beaucoup entre lesp a rtenaires et nous, les ministères et les industri e l s. Si on veut quecela continu e, et peut-être arri ver à un mariage, il y a des conditionscomme on vient de le mentionner. Pour moi, une de ces condi-tions essentielles est de travailler ensemble du début jusqu’à lafin. Il ne faut pas qu’un des partenaires embarque dans le sys-tème une fois les décisions prises et viennent par la suite lesmodifier. Ce n’est comme cela qu’on doit travailler ensemble.

L’utilisation de la coupe de bois pour restaurer l’habitat du cerf deVirginie à Anticosti est un exemple où nous avons déjà travailléensemble. Notre collaboration avec d’autres partenaires pouraménager la forêt privée est un autre exemple. Il y a une fouled’autres exemples où dans la réalité nous travaillons ensemble.Parfois ce n’est pas le cas, parfois nous sommes en conflit, enconfrontation, de moins en moins heureusement, mais je diraispeut-être, et en conclusion, qu’il y a deux facteurs que je pourraisconsidérer en bout de ligne : le facteur P pour Personnalité et lefacteur O pour Ouverture.

Le facteur Personnalité est très important lorsqu’on vient pourrégler des problèmes ou travailler ensemble. Dans mes quelques

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années de carrière, les problèmes ou les situations dans lesquelsj’ai eu le plus de difficultés à ava n c e r, ce n’était pas nécessairementpour des raisons techniques mais plutôt à cause de la personnalitédes gens, la mienne et celle des autres.

Les personnes assises en face de moi ont-elles l’ouverture pourque l’on puisse travailler ensemble? En bout de ligne, les ques-tions se règlent à deux ou trois personnes autour de la mêmetable. Si l’ouverture n’est pas là, si ce sont des gens qui ont unepersonnalité fermée, je pense alors qu’on a bien peu de chancede succès peu importe les outils qu’on met à la disposition desgens. Je n’ai pas de raison scientifique qui affirme cela maisc’est un peu ma petite expérience dans le domaine. C’estquelque chose qu’on ne peut contrôler mais qu’il est possible detravailler. Il faut être conscient qu’il s’agit d’un facteur important.Ce n’est pas qu’une question technique ou d’outils c’est unequestion de personnalité. C’est une question de relationshumaines.

Jacques Gauvin, ingénieur forestierVice-président à la foresterieAssociation des manufacturiers de bois de sciage du Québec

Bonjour à tous et à toutes. Je veux commencer par remercier lesgens du Forum Forêt-Faune, les organisateurs de cet événe-ment, pour avoir invité l’Association des manufacturiers de boisde sciage à venir faire part de son point de vue. À cet égard, jeveux indiquer que monsieur Jacques Robitaille, président-directeur général, qui devait être ici initialement, s’excuse de nepouvoir y être. Il a une bonne raison, puisqu’il a une réunion deson comité exécutif aujourd’hui. Je sais que ce forum lui tenait àcœur car, dès le début, il avait confirmé sa présence mais il nepouvait malheureusement pas être là et il s’en excuse. Autrespetites notes. Je veux féliciter les organisateurs de cet événe-ment. Je n’ai que des éloges pour les gens qui ont mis sur piedcette activité, avec je pense énormément d’énergie, et je trouveça particulièrement intéressant.

La question qui nous a été posée dans ce Forum Forêt-Fauneest : Mariage d’amour ou de raison, la forêt et la faune.

Quand j’écoutais monsieur Seutin, tout à l’heure, il parlait de

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cette île déserte où il y avait un homme et une femme quiaccouchait de deux filles et qui finalement après cela, ça ne secontinuait pas. Ce qu’il a peut-être oublié de dire, c’est que si elleavait accouché de deux garçons cela n’aurait pas plus marché.Cela m’a fait pensé à une grande leçon. L’homme et la femmeont besoin l’un de l’autre. Par contre cela ne veut pas dire néces-sairement qu’ils sont obligés de se marier pour que ça marche…N’ayez pas de mauvaises pensées!

En fait, je voulais en venir à dire, ça prend un peu des deux, unpeu d’amour et un peu de raison. Je pense que dans tout cou-ple c’est peut être vrai. J’ai l’impression que cela s’applique aussidans la relation qui peut exister entre les intervenants fauniqueset forestiers. Le mot amour, même si c’est un mot un peu bizarredans les circonstances, est très présent. Il a même été présentdans certains aspects qui ont été abordés dont les aspectshumains que même monsieur Arsenault vient de mentionner. Lerespect, l’écoute, c’est là que les premiers changements com-mencent car tant qu’il n’y a pas cela il n’y a pas de mariage, il n’ya même pas de dialogue ce qui est peut-être l’élément le plusimportant. Le premier changement à effectuer et la première per-sonne à regarder pour faire les premiers pas, c’est soi-même. Jeme souviens de la petite phrase qui disait que la porte duchangement s’ouvre par l’intérieur. Avant de dire qu’il faudraitchanger telle affaire, qu’il faudrait que l’autre personne change, ilfaut commencer par regarder ce que nous-mêmes pouvonsapporter comme changement et par la suite, tendre la main ànotre interlocuteur.

Dans les discussions, c’est comme cela que je vois l’aspectamour : le respect, l’écoute, le dialogue avec les gens. Ensuite laraison! C’est inévitable nous vivons dans un monde où la sociétéa évolué, dont les valeurs ont évolué, et qui a des dimensionséthiques. C’était intéressant d’entendre certains aspects à cesujet ce midi. C’est une réalité que nous constatons. Notresociété a évolué et on doit évoluer avec elle. C’est là que vientla raison dans ce mariage.

Les affrontements sont un autre aspect qui m’apparaissentencore plus important et qui ont marqué, je dirais mes derniersmois de travail. Ils sont stériles voire inutiles, ils donnent l’im-pression de faire avancer des choses, et peut-être dans un petit

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pourcentage de cas c’est vrai. Cependant, j’ai comme convictionque dans une grande majorité de cas les affrontements ne fontque perdants-perdants. Si jamais vous êtes intéressés, mettez lamain sur un petit livre qui s’appelle The power of nice. Je nepense pas qu’il ait été traduit mais vous allez comprendre.

Nos entreprises fauniques et forestières seront aussi perdantessi elles ne sont pas capables d’avoir de mariage de raison entreelles. Ce n’est pas pour des raisons humaines mais carrémentpour des raisons d’affaires car lorsque les entreprises perdent,quand les organisations perdent, ce sont les employés qui per-dent, c’est la société en général qui perd. Je pense donc quec’est un mariage où il y a les deux dimensions. Dans lessemaines, les mois, et possiblement dans les années qui vien-dront, ce mariage devra se développer et il y a des ingrédientsqui viendront s’y greffer. J’en donne juste quelques-uns qui indi-rectement répondront peut-être aux questions du sondage quiseront présentées plus tard :

Une législation et une réglementation souple ainsi que des ori-entations gouvernementales cohérentes. Éviter le mur à mur. Cen’est pas juste l’industrie qui dit cela. On l’a aussi entendu de lapart de chercheurs, notamment François Potvin qui a fait desétudes extrêmement intéressantes. On a entendu aussi deschoses extrêmement valables de la part d’autres chercheurs.C’est donc très important d’éviter le mur à mur, de trouver desmoyens de s’ouvrir pour reconnaître la diversité de nos préoccu-pations mais aussi pour reconnaître la diversité de la forêtquébécoise ainsi que ses enjeux.

Identifier clairement les objectifs et les responsabilités dechacun. On va devoir mettre cela sur la table et commencer à separler! C’est quoi nos responsabilités respectives, c’est quoi tesobjectifs, comment puis-je travailler avec toi si tu ne m’expliquespas tes objectifs ou si je n’ai pas la décence de te demanderlesquels ils sont.

Enfin une plus grande ouverture au dialogue. Ça revient un peuà ce que je disais plus tôt. Nous avons une belle opportunitéd evant nous qui s’appelle la révision du régime fo r e s t i e r.Cependant, il n’y a pas que cela. Il y a le quotidien et un régimeforestier quel qu’il soit, si bon soit-il, ne réglera pas tout. C ’est le

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contraire mais dans le vécu quotidien on en voit des exemples eton ne les voit peut-être pas suffisamment où des personnes separlent, des êtres humains échangent et finissent par trouver descompromis. C’est un autre mot qui a été utilisé et c’est commeça qu’on avance. Il n’y a pas beaucoup d’autres méthodes. Sivous en connaissez d’autres, vous me le direz après ou vous lementionnerez tout à l’heure.

J’arrête là-dessus monsieur Dufour.

Claude Gauthier, présidentFédération québécoise de la faune (FQF)

Cela me fait plaisir d’être ici à nouveau. C’est la deuxième foisque j’ai le plaisir de venir vous visiter. Il y a deux ans lors du pre-mier Forum Forêt-Faune, d’ailleurs monsieur Arsenault était là, jefélicitais les organisateurs et je les félicite encore une fois carcela me semble être encore une fois une fameuse réussite.

Je suis le président de la Fédération québécoise de la faune,mais aujourd’hui je représente le groupe Faune national. C’est lecomité aviseur du ministre à la Société de la Faune et des Parcs(FAPAQ). Il est composé des grandes fédérations de la faune : laFédération des pourvoyeurs du Québec (FPQ), la Fédération desgestionnaires de zecs (FQGZ), la Fédération des trappeurs ges-tionnaires du Québec, la Société des établissements de plein airdu Québec (SÉPAQ), la Fondation de la faune du Québec (FFQ)et notre organisme la Fédération québécoise de la faune (FQF)dont la mission est de perpétuer la chasse et la pêche commeactivités sportives au Québec.

La question est : Est-ce un mariage d’amour ou de raison? Onva donner notre opinion à la fin de la présentation. J’aimeraisd’abord vous dire que nous avons commencé à la fédération àcruiser les forestiers il y a trois ans. On a commencé à lescruiser car on s’est aperçu qu’il y avait une maison, qui s’appelaitla forêt, et eux avaient les murs et la toiture. Nous en tantqu’utilisateur, on s’occupait des habitants qu’il y avait dedans.Nous nous sommes dit que si nous étions pour parler de la mai-son et de la façon de la gérer, on devrait s’asseoir avec ceux quiauront à la construire, à la rénover ou à la débâtir. Nous noussommes assis avec l’AMBSQ, et à cette époque l’Association

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des industries forestières du Québec (AIFQ), pour travailler à yamener du positivisme. Le positivisme s’en vient de façon à ceque les 208 associations membres de la fédération puissent tra-vailler avec les forestières en région. Nous avons publié, il y a unpeu plus d’un mois, Le guide d’utilisateur en milieu forestier. Jecrois que vous en avez une copie dans votre pochette. Ce guideest le résultat de près de trois ans de travail avec les partenairespour aider les gens à commencer à préparer les interventions enmilieu forestier en collaboration avec les forestières. Noussommes présentement à travailler sur un autre sujet pour lesannées prochaines, qui consiste à vulgariser l’information sur lesinterventions en milieu forestier afin d’aider les gens. Je saisqu’on parle ici avec des ingénieurs forestiers qui connaissent lesgrands mots qui sont utilisés en foresterie, mais pour les gensordinaires, les gens qui ont des chalets, les gens des pourvoiries,des zecs, etc., les façons d’intervenir, les CPRS, etc. ce ne sontpeut-être pas des mots qui leur sont familiers. Il est donc néces-saire de vulgariser l’utilisation de ces termes afin que les genssachent vraiment de quoi il s’agit. Est-ce qu’ils vont arriver chezeux au printemps et voir un arbre aux 50 pieds, s’il va y avoirencore une belle forêt, si ce sera une coupe, si ce sera ce quenous appelons une coupe en écaille de poissons, une coupe quiva préser ver le visuel, etc. Nous travaillons un peu avec ça, onprépare un kit encore pour vulgariser cette information. Vousvoyez que l’intervention se fait plutôt au niveau de notre associa-tion en région. Au Québec, chaque région administrative a unconseil général de la faune avec un président régional et un con-seil d’administration. Il y en a un au lac Saint-Jean et auSaguenay, et vous comprendrez que tous les membres dugroupe national travaillent avec les forestiers, etc.

Pour répondre à la question du jour, je vous dirai qu’on a com-mencé à fréquenter les forestiers il y a à peu près trois ans etce n’est peut-être pas un mariage d’amour mais c’est sûrementun mariage de ra i s o n . Même si c’est un mariage de ra i s o n ,peut-être aussi un mariage d’affa i r e s, il n’y a rien qui nousempêche à force de se fréquenter de commencer à s’aimer aulieu de continuer à se haïr. Je pense que c’est un peu ça qu’onessaie de fa i r e.

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Cliffoard MoarChefConseil des Montagnais du lac-Saint-Jean

Court message en langue autochtone.

Habituellement, c’est là que je change de langue car je com-mence à perdre les gens…<rires>….

Première des choses, bonjour à tous. Je suis très heureux d’êtreici et je remercie beaucoup le comité organisateur de nous avoirinvités afin de participer aux échanges et aux cheminements dudéveloppement de la société en général.Je pense que pour nousce sont des étapes importantes. C’est sûr que ce soir, dans mesprières, je vais sûrement parler à mon grand-père en lui disantque je ne sais pas si c’est une bonne affaire, mais aujourd’hui onne fait plus partie de la faune! Maintenant, est-ce que c’est unebonne chose ou non? On verra plus tard… Ce qui est importantau niveau du questionnement et de la participation autochtone,c’est que l’on arrive à un point déterminant dans le sens deséchanges qui ont eu lieu et qui vont avoir lieu pour faire en sorteque les autochtones puissent prendre leur place dans ledéveloppement global de leur société et de la société en général.En prenant notre place, c’est sûr qu’on va arriver avec uneperspective un peu nouvelle, un peu différente. On ne demandepas aux gens d’accepter ces dimensions dans le sens que c’estla seule façon de voir les choses, mais c’est plutôt celle où noussommes bien.

J’étais ici il y a quelques semaines, lors du congrès de l’Ordredes ingénieurs forestiers du Québec, et j’ai dit en arrivant : j’aihâte de voir le jour où les gens vont arrêter de voir lesautochtones comme un problème. En référence au domaineforestier, nous ne sommes pas la tordeuse d’épinettes! On peutregarder le côté autochtone comme une opportunité. Je pensequ’on peut même envisager une sorte de relation qui va faire ensorte qu’on va créer de nouveaux modèles ou de nouvelles rela-tions qui seront drôlement intéressantes. C’est certain que pournous, la dimension de la forêt et de la faune c’est très importantdans nos activités traditionnelles. Dans ma langue le verbe voirfait en sorte qu’on voit des êtres qui sont vivants et non vivants.Nous voyons l’arbre au même titre qu’on voit l’homme. Pour

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nous, c’est bien important car tout ce que l’on voit mérite lemême respect et ce respect amène une dimension spirituelle.Pourquoi ce respect? Parce que tout ce qui vit est le résultat dela création. La relation que l’être a avec la création ça lui appar-tient mais il doit la respecter. Traditionnellement et même encoreaujourd’hui, quand on se tente en territoire, notre porte est tou-jours dirigée vers l’est. Pourquoi? Parce qu’au matin lorsqu’onse lève on fait une prière. Ce n’est pas vraiment une prière c’estplutôt un remerciement qu’on fait à la création. On remercie lesquatre dons de la vie. Avec le soleil vient le feu, avec le lac vientl’eau, où nous sommes tenté c’est la terre et tout ce qui nousentoure c’est l’air. Ce sont des dons qui nous ont été donnés.Nous devons les protéger, en prendre soin. Cela ne veut pas direqu’on est contre le développement, loin de là. J’ai même fini madernière conférence en disant une partie d’un discours d’un chefjadis qui avait dit au gouvernement : « Maintenant que j’ai mesterres vous voulez que je coupe le bois sur mes terres pour nour-rir mon peuple. Vous est-ce que vous scalperiez votre mère? ».Aujourd’hui presque 20 ans plus tard, parce que j’étais parti enmission pour sauver la forêt, étant le chef de la communauté, jetermine en disant, car j’imagine que j’ai évolué, «mère une coupede cheveux cela vous dirait!».

Pour revenir à la question mariage d’amour ou de raison, je neveux pas partir un débat mais habituellement, le mariage est lerésultat de la rencontre de l’amour et de la raison. Ce résultat aquelque chose de bien spécial car c’est un engagement solennelqu’on fait. Un des mots clés est le compromis. Je le sais, cela fait21 ans que je suis marié! Oui, compromis est un mot importantmais il y a aussi l’écoute. L’écoute doit être là et l’écoute ne veuxpas nécessairement dire j’entends. J’essaie de comprendreégalement. Souvent le problème que nous rencontrons aujour-d’hui, c’est qu’on parle beaucoup mais on ne s’écoute pas. Onentend. mais on essaie pas de comprendre. Je pense que si onpeut arriver à avoir un lieu où le respect et le partage sont lesvaleurs qui empreignent un peu l’environnement, je crois que lemariage peut réussir. C’est sûr que pour nous dans les semaineset les mois qui viendront, il y aura beaucoup de sensibilisation etbeaucoup d’éducation qui devront être faites sur les réalités desdeux sociétés, la vôtre et la nôtre. On devra démystifier un peutoute la question des négociations territoriales. Ce n’est pas ungrand bateau qu’on veut faire. On ne veut pas mettre tout le

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monde dans le grand bateau et l’envoyer en mer. Loin de là!C’est un peu comme le mariage. On veut trouver une façon devivre ensemble en paix et en harmonie comme nos ancêtres l’ont fa i t .Quand les gens disent que ça ne se peut pas, que ce n’est pas pos-s i ble je réponds, . « Oui, mais on l’a déjà fait et on pourrait le refa i r e ! ».

Merci au comité de nous avoir invités car cela nous permet de vo u sprésenter une perspective nouve l l e. Comme je le dis souvent, l’his-toire est un lieu d’apprentissage et notre rencontre avec Ja c q u e sC a rt i e r, nous a donné un outil bien important aujourd’hui et qu’onu t i l i s e, c’est les miroirs. Sauf que ce que l’histoire ne conte pas,c’est que le premier autochtone qui a embarqué sur le bateau at r é buché et a cassé la première caisse. Les sept ans de malheuron est à la veille de les finir! Pour revenir un peu sur les miroirs,l ’ i m p o rtant c’est l’évaluation qu’on en fait et je pense que ça va per-mettre de prendre des décisions éclairées pour les générations àve n i r.

RÉSULTATS DU SONDAGE

L’ensemble des participants se répartissent en proportion sem-blable, soit 53 % qui s’identifient au secteur forêt et 47 % ausecteur faune, pour un total de 279 personnes (figure 1). Lespersonnes s’identifiant à la fois forêt et faune ont été exclues desrésultats pour des raisons purement logistiques lors du Forum.

Figure 1. Répartition des participants selon leur appartenanceau milieu forestier ou faunique.

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Question 1 : Les préoccupations fauniques sont bien prises encompte dans la planification des activités forestières.

Question 2 : Depuis les cinq dernières années, on note uneamélioration dans l’intérêt porté envers la faune par l’industrieforestière

Question 3 : Les organismes fauniques sont suffisammentexigeants envers le monde forestier quant à leur préoccupation.

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Question 1 : Les préoccupations fauniques sont bien prises encompte dans la planification des activités forestières.

Question 2 : Depuis les cinq dernières années, on note uneamélioration dans l’intérêt porté envers la faune par l’industrieforestière

Question 3 : Les organismes fauniques sont suffisammentexigeants envers le monde forestier quant à leur préoccupation.

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Question 7 : Afin de favoriser une plus grande gestion intégréeen forêt publique, nous devrions miser sur :

Question 8 : À votre avis, quelle est la principale raison quiempêche actuellement une meilleure prise en compte des préoc-cupations fauniques?

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Question 1 :

George Arsenault

Si l’on veut que quelqu’un écoute ce que l’on a à dire, il faut avo i rquelque chose à dire. Pa r fois nos connaissances du côté fa u n i q u ene sont pas aussi à point qu’elles pourraient l’être selon less e c t e u r s. S u rtout en ce qui concerne la valeur économique, quandon s’assoie à la table et qu’on veut avoir des arguments solides, sion sait que l’autre partie connaît exactement la valeur d’un m3 d ebois et que je ne peux pas donner la valeur d’une martre ou d’unp o r c - é p i c . C’est parfois difficile, malgré que j’aimerais féliciter etpéter mes bretelles et péter les bretelles de la société, tellement onest fier de nos biologistes et chercheurs qui ont présenté les docu-m e n t s, aujourd’hui et hier. Je pense qu’il nous manque encorec e rtaines connaissances pour bien participer au débat. Si on ve u tque notre point de vue soit reconnu, il faut les chiffrer et il fa u td ’ excellents arguments et parfois cela nous manque.

Clifford Moar

Quand on regarde une situation, il faut la regarder de plusieursperspectives pour voir pourquoi cela ne fonctionne pas. Il y a cer-tainement un problème de communication, ça c’est sûr. Si onparlait de mariage, on aurait un souper causerie bientôt. Ce queje voulais dire aussi, c’est que les standards qui sont mis del’avant pour justement établir les bases des discussions, doiventparfois être remis en question. Nous avions justement ce genrede discussions dernièrement avec les gens du domaine forestier.Nous leur disions : « vous donnez une valeur à l’arbre quand ilest à l’horizontal, tandis que nous on lui donne une valeurlorsqu’il est à la vertical ». C’est certain que si on part de cettefaçon on ne s’entendra pas. Êtes-vous capable de comprendrecette dimension-là? Le territoire est un lieu où des êtres y viventet pas seulement nous autres. C’est une maison, c’est un lieud’apprentissage. Je pense que c’est dans cette dimension qu’ondevrait cheminer dans nos discussions.

Claude Gauthier

On dit que des préoccupations fauniques sont prises en consi-dération. Les gens ne sont pas d’accord avec cela et il y a

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plusieurs raisons. Une des premières raisons, c’est qu’il n’y apas d’obligation légale de la part des forestières qui les obligentà avoir une vision plus faunique. On ne veut pas encarcanerl’exploitation forestière dans une législation, mais je pense qu’il yaurait lieu d’avoir des principes directeurs qui rassembleraient lalégislation. Le RNI en est un. Le nouveau régime forestier enserait un autre pour faciliter l’implication des gens, des villégia-t e u r s, des chasseurs, des pêcheurs, des associations quifréquentent le territoire, non pas à l’étape de la présentation desplans quinquennaux, mais au tout début pour avoir vraiment uneconcertation avant de mettre en place un plan quinquennal. Il n’ya personne qui connaît mieux la forêt que ceux qui y vivent. Lafaçon de chasser des autochtones, leur façon de travailler, per-mettent de connaître l’emplacement des ravages, sans toutefoistous les connaître. Ils peuvent donc aider et conseiller. Il en estde même pour les chasseurs. On a beau dire que les orignauxchangent de place lorsqu’on coupe un ravage, mais si tu lecoupes en septembre ou octobre, il sera peut-être trop tard pourqu’ils aient le temps de déménager pour passer l’hiver. Dans leRNI ou encore dans le nouveau régime forestier, on pourraitprévoir l’obligation de rencontrer les utilisateurs de la faune avantde préparer des plans quinquennaux afin d’assurer une meilleureconcertation.

De plus, l’implication des organismes sans but lucratif, comme laFédération québécoise de la faune et les zecs, repose beaucoupsur le bénévolat. Nous n’avons donc pas les moyens financiersde payer des ingénieurs forestiers, des biologistes, etc. pours’occuper dans chaque région des plans quinquennaux. Nousdemandons donc une vulgarisation du contenu des plans afinque les gens les comprennent mieux et ainsi les aider à mieuxtravailler. Également, l’échelle de planification en milieu forestiern’est pas la même. À titre d’exemple, le court terme pour unchasseur qui planifie sa chasse, c’est l’année prochaine. Pourune compagnie forestière c’est 25-45 ans. Du moyen terme pourun gouvernement c’est 100 ans. Ils savent 100 ans d’avancecomment cela va coûter dans 100 ans d’ici. L’échelle n’est pas lamême pour tout le monde. Il faudrait peut-être commencer par separler à la même échelle pour mieux se comprendre.

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Jacques Gauvin

Juste un petit commentaire. Monsieur Gauthier, vous avez dittantôt qu’on était pour s’aimer dans pas longtemps. J’y crois moiaussi, mais de grâce ne me forcez pas à vous aimer…

Je m’explique sérieusement. Vous parlez d’obligation. Je croisqu’il y a une autre réponse tout à l’heure que je trouvais fortintéressante, peut-être parce qu’elle servait mes propos, maisc’est l’évolution dans le temps quant aux préoccupations fau-niques (question 2). Si ma mémoire est bonne, ça donnait deschiffres intéressants. J’ai l’impression qu’on est parti dans labonne direction et que ce n’est pas parce qu’on additionneraitdes obligations ou des mesures coercitives quelconques qu’onprogresserait davantage. J’ai l’impression que les endroits oùc’est plus difficile, il en restera toujours et à la limite, il y a peut-être une catégorie X de personnes qui ne bougeront jamais tantque nous n’aurons pas de législations. J’ai l’impression que lagrande majorité, on en voit de plus en plus d’exemples, commeceux vus aujourd’hui et il y en a eu d’autres ailleurs, où le dia-logue et le rapprochement peuvent certainement se fa i r e.Cependant, je ne crois pas qu’il soit facilité du tout dans un con-texte où l’on additionnerait des obligations légales.

Claude Gauthier

J’aimerais vous rappeler que j’ai bien spécifié que c’était par desmoyens légaux ou encore par des grands principes directeurs.

Jacques Gauvin

Ah! Celle-là je l’avais échappé. Probablement que je n’écoutaispas assez ce que vous disiez… mais on est bien parti vous etmoi…

Claude Gauthier

Quand on commence à préparer la réponse avant la fin de laquestion…

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Jacques Gauvin

C’est vrai. Je parle d’écoute active… Cordonnier mal chaussé!

Serge Pinard

Comme réactions généra l e s, ce qui me surprend et je trouve celaintéressant, c’est qu’il n’y a pas de clivage entre les répondantsforêt et les répondants fa u n e. À partir d’aujourd’hui, il va falloir met-tre en place des systèmes qui peuvent prendre des risques auxdeux places. Mais une fois qu’on a dit cela, il faut permettre les dis-c u s s i o n s. Nous nous le sommes fait dire pendant deux jours, hieret aujourd’hui. Monsieur Gauthier vient d’en parler et monsieurGauvin vient aussi de préciser de ne pas forcer le mari a g e. Il fa u tque les choses se règlent sur le terrain, les préoccupations sont-elles bien prises en compte, quelles préoccupations? On a vudepuis deux jours, plusieurs conférenciers en ont parlé, qu’il y adifférentes échelles de planification qui correspondent à cert a i n e sp r é o c c u p a t i o n s. Déjà de se comprendre et de développer lamême grille d’analyse, risque d’améliorer cet aspect de la prise encompte des préoccupations. Il faut juste que le processus de pla-nification permette ces opportunités sur le plan de pri n c i p e sd i r e c t e u r s, d’objectifs ou de résultats à atteindre et laisser lesm oyens aux gens sur le terra i n .

En forêt boréale, on devrait orienter l’exploitation forestière versles coupes en mosaïque

Serge Pinard

C’est ce à quoi nous nous attendions! Au cours de la consultationsur la mise à jour du régime forestier, il y a eu une très forte affir-mation pour tenir compte de l’ensemble des ressources, pourparticiper davantage aux processus de planification d’aménage-ment forestier et pour favoriser une mise en œuvre de la gestionintégrée sur le territoire. Ce que l’on constate et ce qui nous estrapporté, ce que je vois dans le colloque d’aujourd’hui et d’hier, ily a une amélioration à apporter à la mosaïque forestière. Il n’y apas une solution, il n’y a pas un modèle unique. Il faut dévelop-per, expérimenter et tester des options concrètement sur le terr i-toire et en fonction des préoccupations écologiques, biologiques,sociales et économiques.

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Jacques Gauvin

D’ailleurs, à moins de n’avoir rien compris, on s’est fait dire quela forêt boréale n’était pas aussi uniforme qu’on aurait pu lepenser ou que certains le pensaient. Justement, il y a moyend’intervenir en fonction de cette variabilité. L’aspect perturbationest une chose, mais des fois ce n’est peut-être pas juste desgrands placards de bois comme on se l’imaginait. J’ai cru com-prendre qu’il pouvait y avoir des nuances, des choses intéres-santes à expérimenter ou à tester sur le terrain. Il y a peut-êtredes endroits où effectivement différents types de coupe enmosaïque peuvent s’appliquer. Il ne faut donc pas généraliser, endisant : forêt boréale égale coupe mosaïque. Il y a une nuance àapporter à quelque part. Il y aurait plusieurs solutions pourplusieurs types de forêt boréale.

Clifford Moar

Je crois qu’il y a une opportunité qui semble se dessiner, mais jet r o u ve important de ne pas oublier toute la dimension de l’éva l u a-t i o n . La coupe mosaïque, je vais parler un peu comme pour macoupe de cheveux que j’ai dit au début, c’est peut-être juste unem o d e. J’espère que non! Je pense qu’il y a des outils de mesurequi doivent être mis en place afin de voir le cheminement et l’évo-lution des impacts et être capable de revenir sur une décision telleque celle-là si les info rmations le proposent.

George Arsenault

Je voulais ajouter, au sujet de la forêt boréale, un point concer-nant l’aspect de la protection d’une certaine représentativité decette forêt. C’est le débat qu’on va avoir à faire dans lessemaines et les mois à venir. On devra aussi discuter non seule-ment de la façon dont on va la couper, mais aussi comment nousallons protéger certaines régions qui sont uniques. Nous allonspeut-être avoir aussi un problème de dialogue et de sémantique.J’espère que non! En tant que géographe, je ne m’aventureraipas sur l’aspect technique des coupes, mosaïque ou autres. Cesont plutôt les coûts des modalités qu’il faut évaluer. Plusieursquestions sont à considérer. Quels sont les coûts pour l’ex-ploitant? Pouvons-nous mettre en place des systèmes qu’on estcapable de payer à l’intérieur de certains régimes? Que ferons

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nous si ça coûte plus cher? Est-ce que l’on est prêt à payer pource type de coupe? Est-ce qu’il y a d’autres façons d’intervenirpour payer ces coûts? Je pense qu’il y a aussi un débat à avoirà ce sujet et non pas uniquement de dire qu’il y a une méthodequi va régler tous nos problèmes.

Claude Gauthier

Moi ce qui me fait peur c’est le brand name. Il y a des gens quivont faire leur shopping chez Maxi, mais qui disent toujours faireleur Steinberg parce que le brand name c’est de faire sonSteinberg. Il y a trois ans lorsqu’on présentait un projet et qu’onvoulait le faire accepter, on disait qu’on faisait du développementdurable. L’an passé, on faisait de la biodiversité. Cette année, sivous voulez avoir un projet, vous marquez que vous faites de lagestion intégrée des ressources (GIR) avec de la mosaïquededans. Je pense qu’on doit se tenir loin des brand name. C’esttout du Steinberg! Ce que nous regardons à propos de la coupeen mosaïque, là où elle est praticable, c’est qu’elle représenteune approche très intéressante du point de vue habitat faunique.On se trouve à diviser l’habitat faunique mais non pas à l’élimi-ner complètement. Ce qui est important, c’est ce qu’on laissedebout et non pas ce que l’on sort. Lorsqu’on laisse desessences, qui sont pour nous des habitats fauniques, parce quechaque partie de la forêt est un habitat faunique, on enlève pasle couvert forestier à la faune, on enlève pas la biodiversité. Ledéveloppement durable et la gestion intégrée des ressourcespermet de laisser sur place les éléments intéressants pour lafaune et pour nous. Il faut dire également que les coupes enmosaïque copient un peu les perturbations naturelles comme lesfeux, les épidémies d’insectes, etc. C’est sûr que les insectes neprendront pas une forêt complète. Elles vont prendre une partiede la forêt seulement. C’est la même chose que pour les coupesen mosaïque. C’est pour cela que l’approche que l’on a enverscette méthode de coupe est très positive, mais on met quandmême un bémol dessus : là où elle est praticable.

Question de l’auditoire : Louis Bélanger, Université Laval

La foresterie est différente des autres activités qui ont un impactsur le milieu. Au Québec et au Canada, c’est normalement celuiqui fait l’impact qui a le fardeau de la preuve pour démontrer s’il

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y a un impact et comment les atténuer. Pourquoi est-ce qu’enforesterie ce sont ceux qui subissent les impacts qui doivent fairela preuve, les recherches pour démontrer si oui ou non la coupeoccasionne un impact. Actuellement au Québec, le système està l’envers.

À peu près partout au Canada, il y a au moins un écologiste ouun biologiste au sein de l’industrie forestière dont le rôle estd’évaluer les impacts et de développer des mesures d’atténua-tion. Le Québec est un des seuls endroits où les gens de lafaune doivent faire la démonstration scientifique qu’il y un impactet cela avec peu de moyens financiers. Il revient au promoteur àfaire cette démonstration. Au Québec, le secteur forestier ne lefait pas actuellement ou très peu.

Question pour monsieur Arsenault. Il faut faire attention aux coûts.Il y a le court et le moyen term e. Dans le cas de la mosaïque, il y ades coûts à court term e. Ce sont des investissements à moye nt e rm e. Selon l’étude de FERIC c’est rentable à moyen term e. Il nefaut pas se faire prendre dans le bateau sur les coûts à court term e.

Serge Pinard

Il y a quand même énormément de travaux qui se font pour éva l u e rles impacts des différentes pra t i q u e s. Les budgets prov i e n n e n tentre autre du fonds forestier et du programme de mise en va l e u rdes ressources du milieu fo r e s t i e r. Il y a des argents qui sontd i s p o n i bles pour évaluer les différents impacts. On les évalue defaçon à être capable de les apprécier dans le processus de planifi-c a t i o n . Ces impacts ne sont pas toujours les mêmes d’une place àl ’ a u t r e. On a vu hier lors des présentations de messieurs Magnanet Plamondon, qu’ils essayaient justement d’évaluer des impacts,soit par ra p p o rt aux bassins versants ou autres. Ce sont quandmême des projets qui sont ex i g e a n t s, auxquels énormément deressources ont été consacrées. Cela nous perm e t t ra d’améliorerles objectifs ou les résultats à atteindre par l’industrie fo r e s t i è r e.

Claude Gauthier

J’ai un peu de la difficulté avec cela monsieur Pinard carj’aimerais que vous m’expliquiez pourquoi dans la pochette qui aété remise ici au participant, 75% de la documentation vient du

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domaine de la faune et 15% vient des ressources naturelles. J’ail’impression que vous n’en faites pas de recherche. Vous vous fiezsur ce que les autres font pour appuyer ce que vous avez à dire.

Question de l’auditoire : Yves March a n d, CEGEP de Saint-Félicien

Monsieur Arsenault, vous avez dit précédemment qu’il était diffi-cile d’évaluer économiquement un animal. C’est une erreur depenser comme cela. On essaie de comparer une structure indus-trielle qui est capable de mesurer tous ses coûts à chacune desétapes, à une structure qui ne mesure pas tous ses coûts maisqui fait plutôt partie d’un ensemble. Par exemple, un chalet nesert pas juste pour la villégiature, mais aussi pour la chasse. Unvéhicule peut servir pour le travail, mais aussi pour la chasse. Ilfaut regarder la forêt comme une valeur sociale. Quelle propor-tion de forêt on veut garder pour pratiquer d’autres activités. Onarrivera jamais à donner une valeur économique réelle pour uneespèce animale. On ne s’entendra jamais là-dessus. Pourquoicontinuer à tenir ce discours.

George Arsenault

On ne cherche pas à avoir le mot de la fin sur cette question. Cen’est pas facile non plus de qualifier des valeurs sociales et s’il ya une discussion et que l’on veut arriver à une conclusion, il fautavoir certain terrain sur lequel on peut échanger. Il n’y a pas unfacteur qui va l’emporter sur l’autre. Ce n’est pas seulement unequestion de coûts, mais aussi de valeurs sociales. La mission denotre société parle bien sûr de la conservation, mais aussi dedéveloppement économique régional, social et culturel. Cesaspects sont tout aussi importants. Les valeurs culturelles etsociales sont encore plus difficiles à définir. Peut-être pas? Peut-être qu’il y a des gens qui savent très bien comment le faire, maisje pense que cela va être difficile aussi.

Question de l’auditoire : Yves March a n d, CEGEP de Saint-Félicien

La forêt appartient à l’ensemble de la population et non pas auxcompagnies forestières. C’est à la société de définir la répartitionde la ressource forêt. Actuellement, c’est comme si les activitésautre que le prélèvement de la matière ligneuse passaient ensecond lieu.

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Jacques Gauvin

J’ai toujours de la difficulté avec ces généralisations, à l’effet quel’industrie ne tient pas compte de ces valeurs. Globalement, il ya des enjeux qui sont à cette échelle. Tout à l’heure, on parlaitdes aires protégées et il y a d’autres dossiers de ce type. Lesvaleurs sociales, les considérations culturelles ainsi que lesautres éléments qui sont moins purs et durs que l’économiquesont importants mais on ne doit pas prendre à la légère lesaspects économiques.

Où va-t-on cristalliser davantage ces valeurs ou ces besoins?Ces besoins vont se cristalliser proche des personnes qui inter-viennent dans des milieux X. Là où je veux vous amener, c’estqu’on va essayer de régler les problèmes le plus proche de l’en-droit où ils se trouvent et dans un dialogue avec les intervenants,quasiment ad-hoc, entreprises, situations, régions, zone par zoneafin d’essayer de les régler. Dans une discussion entre uneentreprise forestière et une entreprise faunique, il n’est pasillogique de commencer à parler de ses objectifs, des actions àposer et des bases sur lesquelles elles reposent. Je ne crois pasque ce soit méchant que de soulever la dimension économique.Aussi, je ne vois pas de problème de ce côté là et il y a desresponsabilités qui sont partagées.

Louis Bélanger disait plus tôt que l’odieux revient à celui qui inter-vient. Les chasseurs et les pêcheurs en font un prélèvement. Ilsinterviennent aussi dans le milieu. Il ne faut pas inventer desproblèmes à partir des considérations qu’on a l’impression qui neseront pas prises globalement. Dans les faits, dans le dialoguedont on parlait, tout peut entrer en ligne de compte, tout peut êtrearbitrer, tout peut être discuté. C’est sûr que si on regarde çaglobalement en se disant, qu’on ne parlera pas d’économique ence qui a trait à la faune, il me semble que ce n’est pas logique.

Question de l’auditoire : Pierre Dubois, Coalition pour les forêtsvierges nordiques

Si on croit à la GIR, va-t-on donner aux organismes qui reposentsur le bénévolat, comme les zecs, les moyens de la faire avancerpour qu’elle ne demeure pas uniquement que des beaux mots, etleur fournir la possibilité d’avoir une contre expertise pour qu’ils

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puissent réagir aux plans pour enfin avoir un vrai débat.

Serge Pinard

Depuis deux jours, les gens ont dit que les outils existent pourpartir la gestion intégrée. L’inertie qu’il faut vaincre, c’est la com-munication. Il faut mettre les gens en contact, développer unecompréhension et une vision commune. Ceci se fait sur leterrain, cela se fait localement.

Il faut continuer à faire du développement scientifique ettechnique et à améliorer les outils et la connaissance desimpacts. Il y a déjà quelque chose en place et il y a sûrementm oyen de pri o riser les choses et d’aller de l’ava n t . Il faut pri o ri s e rnos besoins à ce niveau là.

Les gens nous disent qu’ils ne veulent pas de mur à mur, laissernous travailler chez-nous avec les gens que l’on connaît, maisnous avons besoin d’un minimum d’enlignement. Dans le cadrede la mise à jour du régime forestier, le défi est de se reposition-ner par rapport à nos objectifs, à nos résultats, aux nouveauxenjeux. Comment faire les choses pour s’assurer que ce que l’onva faire, va aller dans le sens du consensus collectif. Quelsseront les outils? Je ne le sais pas, ils sont à développer.

Question de l’auditoire : Luc Bélisle, Faune et Parcs Québec

Des lettres signées par les sous-ministres du MRN-SecteurForêt, Forêt Québec et de Faune et Parcs Québec, ont étéenvoyées aux bénéficiaires de CAAF afin de tenir compte de laGIR dans l’élaboration des plans généraux et quinquennauxd’aménagement forestier. On a aussi demandé aux directeursrégionaux de mettre sur pied des comités interministériels afind’implanter la GIR. Selon les différentes régions, cette invitationa pu être interprétée différemment. Pour certains, il peut s’agird’une invitation timide alors que pour d’autres, il s’agit d’unedemande plus formelle.

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Doit-on passer à des choses plus sérieuses, à quel rythme etselon quelle pression?

George Arsenault

C’est notre ex-employé ça!

La gestion intégrée des ressources, cela fait six ans qu’on y tra-vaille. Nous étions rendu à l’étape d’une formation conjointeentre le secteur forêt et nous. Quelles sont les prochainesétapes? Je peux avouer candidement que notre réflexion n’estpas vraiment à point. On voulait lancer l’opération mais je recon-nais qu’il manque peut-être certains aspects financiers. Ce sontsouvent des personnes bénévoles qui sont associées à ceprocessus, mais je pense que la première étape est de donnerdes outils, de réunir les gens et là je pense que les besoins vontpeut-être mieux sortir. C’est un peu l’œuf et la poule. Si aujour-d’hui, je demandais à chacune des régions, quels sont sesbesoins, je ne sais pas si ce serait clair. J’arrive de la Gaspésieoù nous avons parlé avec des personnes du milieu faunique. Lefinancement est une question de l’heure dans plusieursdomaines, alors que le gouvernement se retire dans bien des casdes programmes de financement. En clair, je ne peux pas répon-dre à votre question à savoir si on a vraiment un programmequ’on va mettre sur pied demain pour financer ces projets. Il fautpeut-être mieux clarifier ces besoins. J’aimerais qu’on travaille leplus possible sur la formation. J’aimerais aussi que les gens enparlent, mais il ne faut pas que ce soit uniquement une questionforêt-faune car c’est aussi une question d’économie régionale.Nous avons rencontré les autres acteurs, les CRD, les CRCD, lesCLD et il faut voir également avec ces gens ce qu’ils peuventfaire. La réponse pour le moment c’est que malheureusement iln’y a pas de programmes spécifiques de financement pour lesgens qui veulent faire la gestion intégrée des ressources. Peut-être qu’on va mieux définir les besoins et bâtir un programmedans ce sens là. Nous avons été capables dans le passé de bâtirdes programmes dans d’autres domaines quand on sait claire-ment ce qu’on veut faire. Peut-être qu’on manquait d’audace etqu’on pensait que la notion de GIR ne lèverait pas. Actuellement,ce que les gens chez nous me disent, c’est que ça lève tellementvite qu’on est plus capable pratiquement d’être avec les gens etde les accompagner. C’est bien que ce soit à ce point parti et

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lancé. Peut-être que cela va prendre encore un peu de tempspour s’ajuster, mais je dis tant mieux que les gens veulent fairequelque chose dans le domaine. La GIR ce n’est pas quelquechose à court terme. C’est une façon de faire, de voir et depenser. J’espère qu’on va être capable de mieux aider les gensà faire cette démarche, mais j’admets que pour nous présente-ment à la société, nous sommes débordés. Dans un sens tantmieux! Je vois qu’on a des devoirs à faire et vous nous rappelezces devoirs et c’est bien.

Serge Pinard

Au secteur forêt, c’est le même esprit que du côté de George.En ce qui concerne la lettre des sous-ministres, nous av i o n sdeux choix : légiférer ou miser sur le vo l o n t a ri a t . On venait dep u blier le ra p p o rt final du projet interm i n i s t é riel GIR. Il y ava i tune série de recommandations là-dedans, et on pouvait se dire :on va attendre la mise à jour du régime forestier où on va allertordre un peu des bra s. Le comité consultatif qui nous a suivitout au long du projet interm i n i s t é riel sur lequel il y avait aumoins une trentaine d’organismes, la majorité ne voulait pas sefaire imposer, se faire tordre les bra s. Laissez-nous essayer desc h o s e s, facilitez-nous les essais. On s’est dit que :dans le cadrelégal actuel et dans le cadre du processus de planificationactuel, il y a une opportunité qui passe. C’est celle de la révi-sion des plans généraux, des plans quinquennaux 1999-2000.On dev rait au moins essayer de faire un petit pas dans ce cadrelà, aussi petit soit-il, aussi imparfait soit-il. Identifier les limites,les contra i n t e s, et s’en servir pour aller plus loin, dans undeuxième temps. L’ e s p rit était vraiment là, en dessous de cettelettre et adressée, autant aux bénéficiaires de contrat qu’auxgestionnaires de territoires fa u n i q u e s. E s s ayez donc de faire unpetit pas. Il y a plein d’initiative s. Depuis ce temps, c’est trèsva ri a ble d’une région à l’autre et j’en conv i e n s. Il y a eu pleind ’ i n i t i a t i ves qui sont très intéressantes. Ce sont celles là qu’ilfaut promouvo i r, accompagner et encoura g e r. L’ e s p rit de lalettre est vraiment là.

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Question de l’auditoire : Yves Lachapelle, Association des ma-nufacturiers de bois de sciage du Québec

Comment fait-on pour intégrer les préoccupations des gens quine sont pas présents sur le territoire, comme les gens deMontréal, mais qui sont préoccupés par les questions environ-nementales?

Serge Pinard

Espérons que les solutions vont régler les problèmes. C’est bienpersonnel ce que je vais dire. À différents niveaux, il y a desprocessus administratifs, réglementaires et légaux au gouverne-ment du Québec. Il y a des périodes de consultation, despériodes pour recueillir des préoccupations. La commission par-lementaire qui s’en vient sur le régime en est une où tout lemonde, peu importe où il vit, va pouvoir émettre des opinions,des revendications et demander des précisions. L’autre niveau,c’est probablement au niveau régional. Au niveau du territoired’appartenance, du territoire habité, il y aura peut-être un élé-ment pour se donner des objectifs. On parle de vision communeà l’échelle régionale. Donnons-nous des objectifs conjoints, puisaprès dans la mise en valeur des ressources on va travailler aveccette affe c t a t i o n . C’est peut être une façon de le fa i r e.Personnellement c’est un moyen. Il y a un niveau régional. Hier,François Potvin trouvait qu’il manquait peut être une échelle deplanification. C’est peut être là qu’il faut creuser et envisagerquelque chose. Je n’ai pas la solution. Si vous en avez une,amenez-la!

Claude Gauthier

C’est un petit commentaire pas négatif, mais très positifd’ailleurs. Vous avez dépensé je ne sais pas combien, des cen-taines de milliers de dollars pour réagir au film de RichardDesjardins alors que depuis les quatre dernières années vousauriez pu être proactifs en montrant aux gens ce que vous faitesde positif en forêt. Vous ne faites pas que des mauvais coupsdans le bois, vous en faites des bons aussi. Il n’y a personne quile sait parce que vous ne les faites pas connaître. Arrêtez deréagir à ce qui se passe et commencez à être proactifs, puis ànous montrer ce que vous avez fait, ce que vous êtes capables

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de faire et ce que vous voulez faire. Je vais dire comme tantôt,un peu en québécois, on va arrêter de vous taper sur la gueule,on va commencer à vous parler et ça va bien aller.

Clifford Moar

Je ne voudrais pas que mon exposé amène des interprétations.Je voudrais clarifier quelque chose tout de suite, lorsque je par-lais des dons de la vie que le créateur nous a donné. Je ne veuxpas partir de débats à savoir si c’est le côté autochtone qui estbon ou le côté non autochtone qui n’est pas bon. Ce n’est pasdans ce type de dialogue qu’il faut aller. Nous, nous sommesbien dans une façon d’être et de faire les choses. C’est sûr quedans la relation que l’on a avec les vivants, il n’y a pas une rela-tion de dominance. Quand on chasse, on a peut-être des gensqui ont perdu cela chez nous, mais la plupart des vrais trappeurs,des vrais chasseurs, ils prient. C’est un remerciement qu’on faitau créateur quand l’ours et le castor viennent à nous. Ce n’estpas une relation où l’humain domine la flore ou la faune. On neveut pas imposer cela à tout le monde non plus, ce n’est pas ceque je veux dire, mais pour nous c’est important d’avoir cettedimension. C’est sûr que c’est disponible à tout le monde. Toutle monde peut y adhérer. Je ne dis pas que c’est réservé seule-ment aux autochtones. Souvent le problème, lorsqu’on parle auxmultinationales, c’est qu’ils n’ont pas d’âme. Ce n’est pas unecritique que je fais, mais une réalité je pense. Ce que je veux direc’est qu’il y a des individus qui y travaillent et eux ont une âme.

Question de l’auditoire : Marc Bélisle, Université Laval

En écologie, il est souvent difficile d’avoir des modèles prédictifssolides sans réaliser des études coûteuses et à grande échelle.Actuellement, le financement est manquant. Aussi, il manque unlien entre les chercheurs et les compagnies. En êtes-vous con-scients?

Jacques Gauvin

Je ne peux pas parler de l’industrie forestière, mais en tout casdans l’ensemble, il y a dans notre industrie comme ailleurs de lab i o d i versité! Nous avons ouve rt un poste de biologiste àl’Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec

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que nous espérons combler bientôt. Par ailleurs, je pense que ceque vous nous lancez est un cri du cœur. Vous parlez de pas-sion, c’est bien, mais la passion s’éteint quelque part quand onmanque de ressources. Je ne peux pas dire que je connais énor-mément l’état de la recherche forestière ou écologique auQuébec, mais je pense que c’est un message qui a été reçu, pasuniquement par moi, mais aussi par les gens de l’industrie quisont ici. Pour moi c’est une réalité que je ne connaissais pas. Jepense qu’il y aurait peut être lieu qu’on en soit davantage infor-mé, ne serait-ce qu’au niveau de l’association en tant que telparce que c’est mon niveau d’intervention. Il y a quelque choseà regarder de ce côté. Merci de votre commentaire.

George Arsenault

J’ai admis d’entrée de jeu qu’il manquait parfois de l’argent pourles connaissances. Nous avons une petite équipe et nousessayons de répondre à nos préoccupations à court terme,comme l’impact des coupes. Il faut essayer de faire quelquechose parce que c’est à ce niveau que nous sommes.

Nous sommes présentement dans un régime avec des règle-ments. Nous essayons de voir l’impact des règlements. Je penseque c’est de notre responsabilité de le faire. Pour les autresdomaines de la recherche, je vous dirais que nous sommes tousun peu en manque d’argent. C’est quoi la solution? En cemoment, ce n’est pas vers le gouvernement ou vers notre sociétéqu’il faut regarder pour avoir de l’argent, pour financer des projetsde grande envergure et à long terme. J’aimerais que ce soit lecas mais ce ne l’est pas. Je ne sais pas où vous orienter, mais ilse fait quand même des recherches à long terme et sur une autreéchelle. Peut être que vous n’avez pas encore trouvé la place oùinsérer les recherches que vous essayez de faire. Humblement,chez nous on ne le fait pas, mais les recherches qu’on fait, je ledis encore, j’en suis fier, y compris l’IQH, malgré que je ne l’ai pastoujours compris moi-même. Il faut avoir quelque chose danslequel on peut engager le devoir actuel, sinon le long terme çanous échappe carrément.

Commentaire de l’auditoire : Bruno-Pierre Harvey, biologiste

Ça fait 15 ans que l’on parle de la GIR. Si aujourd’hui, comme le

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dit monsieur Arsenault nous sommes dépassés par les évène-m e n t s, c’est parce qu’on a dormi sur la sw i t c h. L’énergie est là, lap o p u l a rité gra n d i e. J’espère que la révision du régime fo r e s t i e rs e ra une bonne occasion pour amorcer une profonde réflexion afind’éviter qu’on dise dans cinq ans:nous sommes encore dépassés.

Commentaire de l’auditoire : Victor Brunette, Fédération desproducteurs de bois du Québec

Bien que ce ne soit pas un reproche, la forêt privée n’a pas prisune grande place dans l’actuel forum. Il serait intéressant quecet aspect soit considéré lors d’un prochain Forum Forêt-Faune.La forêt privée représente des territoires intéressants pour lafaune et pour leurs utilisateurs puisque 50% des activités deprélèvements fauniques sont effectués sur les terrains privés.

Nous avons fait beaucoup de sensibilisation auprès des proprié-taires privés par le passé. Elle a permis une intégration despréoccupations fauniques à l’intérieur des plans de gestion.Cependant, peu de travaux sont réalisés parce que les normesde travaux d’aménagement forestier ne sont pas adaptées auxp a rt i c u l a rités fa u n i q u e s. Des incitatifs financiers sera i e n tsouhaitables pour aménager d’autres ressources que la fibre. Ilest nécessaire de faire évoluer les normes.

R É ACTIONS AUX RÉSULTATS DES QUESTIONS ÀC O N S E N S U S

POUR FAVORISER LA GESTION INTÉGRÉE, LE VO L O N TA R I ATOU LA LÉGISLAT I O N ?

Résultats : Législatif : 31 tablesLégislatif et volontariat : 14 tablesVolontariat : 4 tables

Législation : Comme cadre pour orientationsSoupleQui fixe les objectifs à atteindreQui oblige des résultatsAssortie d’incitatifsIl faut que ce soit un cadre d’action et non pas d’imposition des actions

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Volontariat : Basé sur une concertation locale en autant queles intervenants soient éduqués et informés.

QUELS SONT LES OBSTACLES À SURMONTER POURACCENTUER LA GIR?

Résultats : Manque de concertation (21 tables)Coûts des application (18 tables)Manque d’info rmation et de son tra n s fe rt (18 tabl e s )I n t é gration des divers ministères concernés (10 tabl e s )Vision sectorielle (6 tables)Manque de mesures incitatives (6 tables)

Jacques Gauvin

Je ne suis pas particulièrement mal à l’aise mais j’aurais aiméprendre le temps de regarder ces résultats. Je n’ai pas uneénorme surprise. C’est sûr qu’il faut nuancer quand on dit légis-latif versus vo l o n t a ri a t . Quel genre de nuance pourra i t - o na p p o rter si on jasait individuellement avec les personnes?Quand on regarde par la suite, on parle de souplesse, de cadre,de fixer les objectifs à atteindre et d’adopter des mesures incita-tives. Cela correspond à ce que je disais dans mon introduction.Il faut un certain encadrement législatif, puisque le réglementaireest nécessaire. Ce n’est pas le free for all que l’on veut, mais onne veut pas de mur à mur non plus. Pour moi, des mesures inci-tatives, des objectifs à atteindre, qu’on clarifie ensemble cesobjectifs …j’ai pas mal au ventre pour l’instant avec ce qui estapparu là, ça va pas si mal.

George Arsenault

Moi j’ai mal au ventre! Parce que si votre suggestion sur l’inté-gration des ministères veut dire pour nous que nous allons être ànouveau intégré à un autre ministère, alors c’est la dernière foisque je participe à votre forum! Le problème n’est pas dans l’or-ganisme où on se trouve. C’est la volonté qu’on a à travaillerensemble et ça j’y crois. Je suis un peu déçu de voir une recom-mandation qui veut que la GIR soit encadrée par une législation.Je n’ai pas pris le temps d’examiner ce que cela voulait dire.Pour nous, la GIR c’est une façon de travailler. C’est pratique-ment une façon d’aimer. Comment peut-on légiférer sur la façon

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de s’aimer en couple. Je ne sais pas. Sans doute ai-je mal com-pris votre recommandation. J’ai compris qu’il y a un manqued’argent, un manque de connaissances. Mais légiférer une façonde travailler! J’ai sans doute mal compris car j’ai de la difficultéavec cette recommandation.

Serge Pinard

Pour le législatif, chez nous on a pas de maux de ventre là dessus.C’est sûr qu’il ne faut pas légiférer, réglementer ou normer le com-m e n t . Ce sont des résultats, des objectifs, des suivis, des réditionsde compte, des obligations de se parl e r, etc. On a quand mêmesenti l’obligation de légiférer sur le partage du patrimoine fa m i l i a l .Il faut peut être le prendre sous cet angle pour faciliter le départ dela roue. Il faut peut être mettre un petit peu de pression dans les y s t è m e, mais de façon à ce qu’il soit capable de l’absorber.

Concernant la deuxième question, on a des éléments qu’on necomprend pas non plus. Des structures, c’est courant on esthabitué. Il y a peut être de l’intégration à faire sur le terrain, pasjuste dans les ministères, les gens qui réalisent l’intervention surle terrain. Peut être que ce bout là ne sort pas souvent, mais il ya peut être des choses à regarder de ce côté là. Il y a aussi toutela partie concertation, communication, partage de l’information.On ne reviendra pas là dessus, je pense que c’est très évident,c’est un morceau de départ. Puis il y a la partie coût entre lesdeux. Il y a différentes options, approches ou réflexions. Unechose est sûre, il faut les évaluer sérieusement. Bien souvent,les coûts, je ne dis pas qu’il y en a pas, mais on peut ramener leschoses à leurs justes perspectives.

Claude Gauthier

Nous on dit qu’il devrait y avoir une obligation légale de faire unegestion intégrée des ressources. Cette obligation légale devraitêtre accompagnée de grands principes directeurs adaptés auxrégions et aux situations, parce que le mur à mur on est pas pourça non plus. Là où on veut qu’il y ait du mur à mur, c’est dansl’obligation légale de faire une certaine forme de gestion intégréedes ressources, surtout en concertation avec les gens qui sontdans les alentours. La communication et des grands principesdirecteurs aideraient à la mise en place de cela.

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Jacques Gauvin

Cette fois ci, je vous ai écouté comme il le faut. Vous n’avez pastout à fait dit la même chose que tout à l’heure. Vous m’avezrepris et je m’en souviens. Vous avez dit : législation ou grandsprincipes directeurs.Vous m’avez un petit peu tapé sur les doigts.Là vous dites : législation et grands principes directeurs, et ça çane marche pas vraiment.

Claude Gauthier

Tout à l’heure je parlais de l’ensemble de la gestion des forêts.On disait qu’il ne fallait pas y aller par législation, mais pour cequi est de la gestion intégrée des ressources, il devrait y avoirune obligation d’en faire. Et de quelle manière? À l’aide degrands principes directeurs adaptés aux régions. Cela ne peutpas la même chose en Estrie, en Mauricie, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, en Abitibi, sur la Côte-Nord ou en Gaspésie. Il yaurait une obligation de faire une table de concertation, uneobligation de consulter les gens avant de faire les plans quin-quennaux, une obligation de le faire dans une optique de gestionintégrée des ressources.

Jacques Gauvin

Il faudrait explorer davantage cette idée. Toutefois, je ne suis pascertain que c’est en forçant et en mettant des mesures législa-tives qui obligent les gens à s’asseoir ensemble qu’on avanceplus vite. On a vu que le principal obstacle est le manque deconcertation. La concertation forcée je ne sais pas si ça fonc-tionnerait si bien que cela. J’ai des doutes.

Clifford Moar

Quand on parle de législation dans le domaine autochtone, c’estun sujet très délicat. Vous savez très bien que la directionautochtone à travers le pays, c’est vers l’autonomie gouverne-mentale où nous pourrions décider de notre avenir. Je pense quec’est un droit qui nous est dû et pour arriver à formuler un terraind’entente, c’est sûr que la négociation est importante. Ce qu’onregrette, c’est souvent que des décisions nous sont imposéessans que nous puissions vraiment participer dans la prise de

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décision. Je ne veux pas faire de débat sur cela, mais c’est sûrque pour nous, je dois faire cette nuance là pour débuter la sen-sibilisation sur la réalité autochtone envers les gens.

Monsieur Jules Dufour remercie l’ensemble des participants etclôt cette table ronde.

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- Partie V -Résumé des présentation par affiche

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CARACTÉRISATION ET SÉLECTION D’HABITATS CHEZ LATORTUE DES BOIS (Clemmys Insculpta)

Martin ARVISAIS1, Esther LÉVESQUE1, Jean-ClaudeBOURGEOIS2

1 Université du Québec à Trois-Rivières3351, boulevard des Forges

Trois-Rivières (Québec) G9A 5H7

2 Société de la faune et des parcs du Québec5575, rue St-Joseph

Trois-Rivières-Ouest (Québec) G8Z 4L7

Nous avons caractérisé les habitats utilisés dans le temps par latortue des bois (Clemmys insculpta) dans la région de laMauricie, Québec, Canada, au cours de l’année 1997. Nousavons également déterminé si elle utilise les habitats en fonctionde leur disponibilité à l’intérieur des domaines vitaux (sélection 3e

ordre) et identifié les principaux paramètres qui seraient suscep-tibles de jouer un rôle dans les processus de sélection d’habitats.Les habitats ont été caractérisés pour 20 tortues des bois qui ontété suivies par télémétrie sur une base hebdomadaire entre le 15mai et le 15 novembre 1997. La tortue des bois utilise unegrande diversité d’habitats terrestres (32 milieux) et aquatiques(8 milieux) au cours de sa saison active. L’utilisation des dif-férents habitats est différentielle dans le temps. En effet, la tortuedes bois est en association avec les milieux aquatiques lotiqueset lentiques au cours des périodes de sortie d’hibernation et depré-hibernation alors qu’on la retrouve dans tous les types demilieu au cours des périodes de ponte et estivale. Les tortuesdes bois n’utilisent pas les habitats de façon aléatoire à l’intérieurde leur domaine vital puisque 19 individus sur 20 utilisent leshabitats en disproportion de leur disponibilité. La sélectiond’habitats semble s’effectuer en relation avec des paramètres dela physionomie des peuplements qui sont susceptibles de jouerun rôle lors de la thermorégulation de l’espèce. En effet, lesrecouvrements arborescent et arbustif haut faible, les couvertsde feuillus, les coupes partielles, le mauvais drainage et la prox-imité de milieux aquatiques lotiques et lentiques favorisent larégulation de la température de la tortue des bois à un momentou à un autre de son cycle vital. La protection de bandes

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riveraines d’au moins 250 mètres en bordure des cours d’eauprincipaux serait souhaitable afin de protéger la majorité deshabitats utilisés par la tortue des bois.

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PROGRAMME D’IMPLANTATION ET DE RESTAURATIONDES CANARDS ARBORICOLES

Association des Sauvaginiers du Saguenay-Lac-St-Jean

C.P. 71La Baie (Québec) G7B 3P9

Notre Programme d’Implantation et de Restauration des CanardsArboricoles (P.I.R.C.A.),débuté à l’hiver 1999, vise à restaurer lespopulations de canards arboricoles de la région par la mise enplace et le suivi d’un réseau de nichoirs adaptés pour ceux-ci. Cetype de programme a déjà fait ses preuves en Amérique du Nordet ici même au Québec, c’est la Société d’Aménagement de BaieLavallière (SABL) parrainé par Canards Illimités, le Servicecanadien de la faune et la Fondation de la faune du Québec quia initié la gestion et le suivi des nichoirs répertoriés dans laprovince (principalement dans la partie méridionale sud).

Au Saguenay-Lac-St-Jean, les populations de Garrot à œil d’Orindiquant des baisses significatives en forêt boréale (plus parti-culièrement dans les secteurs d’exploitation), le Canard branchuétant de plus en plus présent sur notre territoire (parce que pro-fite de mieux en mieux des réseaux de nichoirs déjà existantsplus au Sud) et l’importance de restreindre la pression de chas-se sur le Canard noir (objectif du Plan Conjoint du Canard Noir(PCCN)) sont des raisons qui ont amené l’ASSLSJ à mettre enplace un réseau de nichoir régional qui implique à la fois la com-munauté locale et les principaux intervenants du secteur fo r e s t i e r.Ayant recours le plus souvent aux tronc d’arbres morts (chicots)de plus de 30 cm de diamètre pour nicher, les canards arbori-coles dépendent, entre autres, des différentes pra t i q u e sforestières exercées pour retrouver des habitats propices à lanidification.

Jusqu’à présent plus de 170 nichoirs ont été installés auSaguenay-Lac-St-Jean. Parmi ceux-ci près de 94 ont été pris encharge par des citoyens inscrits dans notre programme de par-rainage. Le PIRCA se poursuit encore pour plusieurs années(trois ans ou plus), puisque le succès d’un tel programme dépendessentiellement du suivi qui est accordé aux nichoirs installésdans le réseau.

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LA COUPE EN MOSAÏQUE, UN CHOIX CHEZ ALLIANCE

Jacques BÉLANGER

Produit forestier Alliance Inc.200, rue De Quen

Dolbeau-Mistassini (Québec) G8L 5M8

D’abord, il est important de définir ce nouveau patron de coupequi est en vigueur dans les opérations forestières de Produitsforestiers Alliance Inc. au lac Saint-Jean depuis 1995. La coupeen mosaïque, telle que pratiquée chez Alliance, est un choix«volontaire» qui consiste à répartir en trois interventions suc-cessives, dans le temps et dans l’espace, la récolte d’une forêtrésineuse à maturité.

De cette façon, une première intervention, à l’année 1 dans unterritoire donné, permet de prélever autour de 50 % de la super-ficie forestière mature. La seconde intervention est prévue aumoment où la régénération des secteurs récoltés à l’année 1 aatteint 3 mètres de hauteur en moyenne. Ce moment varie de 8à 12 ans, selon qu’on soit dans le domaine de la sapinière ou dela pessière noire. Bien qu’il faille conserver en tout temps aumoins 30 % du couvert forestier d’une hauteur de 7 mètres etplus par unité territoriale de référence (variant de 300 à 500km2/UTR), nous estimons récolter autour de 40 % d’un bloc deforêt mature à la seconde intervention. Enfin, la troisième inter-vention est prévue lorsque les jeunes peuplements, issus à l’an-née 1, ont atteint 7 mètres de hauteur en moyenne, soit entre 16et 24 ans selon le cas. La superficie moyenne des blocs récoltésest de 30 hectares dans les domaines de la sapinière et de 50hectares dans la pessière.

Qu’est-ce qui peut motiver un détenteur de CAAF à utiliser un telpatron de coupe dans sa planification?

1. Une perception positive du public et une plus grande har-monisation avec les autres utilisateurs de la forêt (récréation,faune, paysage).

2. Des effets positifs sur la faune et le paysage forestier.3. Une meilleure protection du territoire en cas de feu.4. Un gain de la possibilité forestière dû principalement à la

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réduction du chablis par rapport aux séparateurs de coupe.5. Un meilleur équilibre des distances de transport et des

volumes par tige pour les scieries.

Cette approche avant-gardiste a le double avantage de préser-ver un couvert de protection pour l’ensemble des espèces fau-niques tout en créant à proximité de ces mêmes secteurs, un bonpotentiel d’alimentation pour les herbivores. De plus, elle permetaux villégiateurs de poursuivre la pratique de leurs activitésfavorites dans des paysages forestiers agréables. Nous avons denombreux exemples d’intégration à cet égard avec les zecs, lespourvoyeurs, les villégiateurs, les autochtones, les municipalités,etc.

Pour toutes ces ra i s o n s, nous croyons qu’il est préféra bl ed’appliquer cette technique d’aménagement à la forêt boréale.Bien sûr, le défi pour un détenteur de CAAF est de taille quant àl’effort financier requis pour soutenir le devancement des infras -tructures (chemin d’accès, ponts, camp). Selon l’évolution desmarchés, sera-t-il possible de tenir le cap? Nous le souhaitonsvivement, mais…

Dans le contexte actuel des différents conflits d’usage du terri-toire forestier, nous croyons qu’il est urgent de mettre en placedes incitatifs financiers afin de permettre à un tel modèle d’amé-nagement de se propager et de se poursuivre. Le temps n’estplus aux discours mais à l’action. Nous sommes persuadés quele gouvernement, comme gestionnaire des forêts publiques, a unrôle de « leader » à jouer dans ce dossier. La coupe en mosaïquechez Alliance ce n’est pas une simple expérience, mais bien unmode opérationnel et cela, par choix.

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IMPACTS DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE SUR LEMOUVEMENT DES OISEAUX FORESTIERS

Marc BÉLISLE, André DESROCHERS et Marie-Josée FORTIN

Centre de recherche en biologie forestièreUniversité Laval

Sainte-Foy (Québec ) G1K 7P4.

On peut attribuer une large part du déclin des populationsd’oiseaux forestiers à la simple perte d’habitats. Toutefois, lacomposition du paysage, i.e. la nature et la proportion des dif-férents habitats qui le composent, ainsi que sa configuration peu-vent amplifier les effets négatifs de la perte de couvert forestier.En effet, en plus de réduire le couvert forestier, l’agriculture, laforesterie et l’urbanisation occasionnent un morcellement de laforêt en îlots de taille réduite et dont le ratio périmètre/surface estélevé. À ce titre, plusieurs études montrent que ces modificationsentraînent un accroissement du taux de prédation des nids et dutaux de parasitisme des nichées, de même qu’un amenuisementdu succès d’appariement et de certaines ressources alimen-taires. À ces effets, s’ajoutent les entraves potentielles que lesmilieux ouverts bordant et isolant les îlots forestiers peuventimposer au mouvement des oiseaux.

Nous présentons ici les premiers résultats expérimentaux mon-trant que la composition et la configuration des paysages influ-encent le mouvement des oiseaux forestiers. L’expérience a étéeffectuée dans les mosaïques agricoles bordant (< 75 km) la villede Québec, en 1997 et 1998. L’expérience consistait d’abord àdéplacer des mâles territoriaux et accouplés sur des distancesvariant de 1 à 4 km. Il nous était ainsi possible de varier la com-position (% de forêt) et la configuration (i.e. distance entre lesîlots forestiers) du paysage entre le territoire des oiseaux et leurpoint de relâche. Le niveau de difficulté à se déplacer entre lepoint de capture et de relâche était ensuite mesuré en termes deprobabilités de retour au territoire et de temps requis poureffectuer ce retour. Les trois espèces à l’étude comprenaientdeux migrateurs néotropicaux (la Paruline bleue, Dendroicacaerulescens, n = 72, et la Paruline couronnée, Seiurus auro -capillus, n = 90) et un résidant (la Mésange à tête noire, Poecileatricapillus, n = 41). L’avantage de procéder à l’aide d’une expéri-

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ence est que nous pouvions contrôler la motivation des oiseauxà se déplacer ainsi que connaître leur destination.

Suite à une analyse des paysages basée sur des imagessatellites Landsat TM, nous avons pu déterminer pour les troisespèces que la probabilité de retour diminuait fortement alorsque le temps pris pour revenir au territoire augmentait avec uneréduction du couvert forestier. De plus, une fois que la variationlinéaire attribuable au couvert forestier fut extraite des variablesde configuration, l’influence de ces dernières était subtile etvariable. Ces résultats indiquent que la composition du paysagea possiblement une plus grande valeur prédictive que saconfiguration en ce qui a trait au mouvement des oiseauxforestiers. Néanmoins, cette conclusion demande à être validéepar une mesure de l’anisotropie des paysages et un contrôlestatistique.

Nos résultats supportent l’hypothèse que la perte et la fragmen-tation des habitats forestiers contraignent le mouvement desoiseaux forestiers et ce, même sur des distances aussi faiblesque 1 à 4 km. Plusieurs modèles théoriques avancent que detelles entraves au mouvement peuvent nuire à la sélection del’habitat ainsi qu’à la structure et à la dynamique des populationsaviennes. Voici donc une raison de plus pour que l’aménagementdu territoire s’effectue à l’échelle des paysages.Tenir compte dela composition et de la configuration des paysages s’avèrenécessaire si l’on veut assurer un maintien des populationsd’oiseaux forestiers.

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LA PRÉDATION DE NIDS ARTIFICIELS D’OISEAUX LELONG DE ROUTES, RIVIÈRES ET LACS, DANS UNE

SAPINIÈRE BORÉALE

Marylène BOULET1 et Marcel DARVEAU2

1Department of Biology, McMaster University1280, Main Street West

Hamilton (Ontario) L8S 4K1

2Centre de recherche en biologie forestièreFaculté de Foresterie et de Géomatique, Université Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Dans les paysages dominés par l’agri c u l t u r e, plusieurs recherchesont noté que la prédation des nids d’oiseaux est plus importanteà l’écotone. Cet effet de bordure a été extrapolé à d’autresé c o s y s t è m e s, dont les forêts aménagées pour la récolteforestière. Cependant, la littérature actuelle suggère que lesprocessus écologiques ayant lieu dans les paysages forestiersen relation avec la prédation des nids d’oiseaux diffèrent de ceuxse produisant dans les paysages agricoles, la plupart des étudesréalisées dans les écosystèmes forestiers n’ayant pas constatéd’effet de bordure. Toutefois, très peu d’études ont comparé laprédation en considérant différents types de bordures. Dans unesapinière boréale, nous avons évalué le risque de prédation denids artificiels d’oiseaux dans 5 bordures forêt-autoroute, 5 bor-dures forêt-chemin forestier, 5 lisières boisées riveraines le longde rivières et 5 lisières boisées riveraines le long de lacs. Nousavons utilisé des nids placés au sol et à 5 m de hauteur, danslesquels nous avons placé deux oeufs de Cailles des blés(Coturnix coturnix) et un oeuf de plasticine. La prédation étaitplus importante dans les bordures forêt-autoroute, intermédiairedans les lisières boisées le long des lacs et dans les borduresforêt-chemin forestier et moindre dans les lisières boisées le longdes rivières. La Corneille d’Amérique (Corvus brachyrhynchos),une espèce généraliste, était un prédateur important le long del’autoroute, mais était quasi absente en bordure des cheminsforestiers et des lisières boisées le long des rivières. L’écureuilroux (Tamiasciurus hudsonicus), une espèce forestière, codomi-nait en bordure de l’autoroute et dans les lisières le long des lacs.Nos résultats suggèrent que dans cet écosystème, la prédation

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des nids dans des habitats de bordure n’est pas problématique,à moins que la présence d’activités humaines ne résulte en unapport de nourriture pour des prédateurs généralistes. D’autresétudes sont requises afin d’évaluer comment la présence de nou-velles sources de nourriture provenant d’activités humainesc o n t ri bue à l’établissement de populations de prédateursgénéralistes dans des paysages forestiers où l’agriculture estabsente.

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PLAN D’AMÉNAGEMENT FORESTIER DE L’AIRE DUCARIBOU DE LA GASPÉSIE

Sylvain CHAMPAGNE1, Hélène FALARDEAU1, NelsonFOURNIER2, Jean LAMOUREUX2,

Gilles LANDRY2, Jean-Marc HARDY1 et Alain VIAU1

1Ministère des Ressources naturelles2Faune et Parcs Québec

124, 1re Avenue Ouest, case postale 550Sainte-Anne-des-Monts (Québec) G0E 2G0

Le caribou de la Gaspésie est en voie d’être désigné espècevulnérable en vertu de la Loi sur les espèces menacées ouvulnérables. Avec la désignation, il faut revoir la protectionaccordée à l’habitat et cela, particulièrement dans les secteurshors-parc. La protection intégrale de tout le territoire fréquentépar le caribou était inacceptable pour le MRN, alors que de lamême manière, la FAPAQ trouvait insuffisante l’application sim-ple du RNI. Les représentants du MRN et de la FAPAQ étaientdonc conviés à un défi commun.

Le caribou fréquente un territoire où se trouve, entre autres, unparc de 802 km2 (1981), un habitat légal de 673 km2 (1993), uneréserve faunique de 1129 km2, quatre aires communes etplusieurs claims miniers. Au niveau de la présence du caribou,nous avons plusieurs localisations de sources différentes :télémétrie 1987-1992 (n=699), télémétrie 1978 (n=306), inven-taires aériens (n=542) et observations au sol (n=84). On évaluele nombre total de bêtes de ce troupeau à environ 250.

Le MRN et la FA PAQ des deux régions administra t i ves con-c e rnées ont fo rmé un comité auquel se gr e f faient à l’occasiond’autres personnes-ressources. Le mandat était de produire unplan d’aménagement forestier pour maintenir un habitat de qualitépour le caribou tout en limitant l’impact sur la possibilité fo r e s t i è r e.Après la délimitation d’un territoire de travail, les membre ducomité ont décidé d’utiliser un système d’info rmation géo-graphique pour intégrer tous les renseignements disponibl e s. L elogiciel ArcView a permis de produire différents scénarios des o u s - zonage de l’aire visée et évaluer les superficies en cause.

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Le produit final est un plan évolutif avec une première versionpour les cinq prochaines années. On y trouve plusieurs zonesallant de la protection intégrale de la forêt à une utilisation plusintensive quoique inférieure à ce que permet le RNI.

Parallèlement à la réalisation du plan, le comité favorise, auxniveaux faunique et forestier, différents projets d’acquisition deconnaissances en collaboration avec l’UQAR et l’UniversitéLaval.

L’élaboration d’un compromis acceptable, aux deux parties enc a u s e, nécessite le partage et la compréhension des probl é m a-tiques des autres acteurs. La collaboration est toujours menacéepar une cristallisation des positions. Lors de la réalisation du plan,le contexte sociopolitique limitait l’élargissement de la consulta-tion (industrie, MRC, universités), ce qui semble créer unmanque de transparence.

Naturellement, l’arrivée d’un nouveau mandat sans ressourcesadditionnelles, avec par surcroît l’apprentissage d’un outil géo-matique, est tout un défi…

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UTILISATION À COURT TERME DES SÉPARATEURS DECOUPES PAR L’ÉCUREUIL ROUX,

LE GRAND POLATOUCHE ET LE TAMIA RAYÉ

Mathieu CÔTÉ, Jean FERRON et Martin-Hugues ST-LAURENT

Université du Québec à Rimouski300, allée des Ursulines

Rimouski (Québec ) G5l 3A1

Dans le but d’évaluer l’utilisation à court terme de la forêtrésiduelle après la récolte forestière dans la pessière noire ducentre du Québec par l’écureuil roux (Tamiasciurus hudsonicus),le grand polatouche (Glaucomys sabrinus) et le tamia rayé(Tamias striatus), nous avons effectué du capture-marquage-recapture durant six périodes entre les mois de mai 1997 et août1999. Chaque période de capture s’échelonnait sur 10 nuitsconsécutives. Quatre différents types de structures de forêt ontété échantillonnés: des bandes sèches de 60 m de largeur (con-dition de site mésique) et des bandes riveraines de 60 m delargeur (comportant un cours d’eau permanent), des blocsrésiduels (de superficie variant entre 19 et 65 ha) et des secteursde forêt non perturbés par les pratiques forestières (témoins).Les résultats indiquent que le grand polatouche et le tamia rayésont présents de façon sporadique dans notre secteur d’étudetandis que l’écureuil roux est l’espèce la plus abondante. Bienque sa présence soit sporadique, le grand polatouche sembleutiliser aussi bien les bandes que les blocs résiduels et lessecteurs témoins. Le tamia rayé était surtout présent dans lesbandes sèches et n’utilise que très peu les blocs résiduels. Poursa part, l’écureuil roux était présent dans tous les types de struc-tures de forêt résiduelle, mais les densités d’individus n’étaientpas supérieures dans un type par rapport à un autre. Le recrute-ment juvénile était aussi équivalent dans tous les types destructures de forêt pour l’écureuil roux. On note cependant unedifférence dans les indices d’alimentation, les témoins et lesblocs résiduels en possédant significativement une plus grandeabondance. L’écureuil roux semble bien s’établir à court terme etréside dans la forêt résiduelle d’épinettes noires après coupes.Le grand polatouche semble tolérer à très court terme laprésence de coupes forestières et utilise les différentes struc-tures de forêt résiduelle aussi bien que la forêt non perturbée. Il

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serait néanmoins important de voir la pertinence à plus longterme de la forêt résiduelle, notamment lorsque ces structurespourront être récoltées alors que la végétation dans les parterresde coupes adjacents aura atteint 3 m de hauteur.

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LES CORRIDORS FORESTIERS

Sonia D U C H E S N E1, Luc B É L A N G E R2, Marcelle G R E N I E R2

et Francine H O N E2

1Fondation les oiseleurs du Québec inc.2Service canadien de la faune

Environnement Canada, région du Québec

L’affiche présentera sommairement la problématique de conser-vation des habitats forestiers en milieu agricole, ainsi que lesrôles et bénéfices des corridors forestiers.

L’utilisation du territoire par l’homme a largement modifié lepaysage forestier de plusieurs régions du Québec, en particulierdans le sud-ouest de la province. Au cours des dernières décen-nies, les terres agricoles, les villes, les banlieues, les infrastruc-tures routières et les zones industrielles se sont graduellementsubstituées aux zones forestières. Cette situation a provoqué ladisparition d’habitats pour la faune et la flore et entraîné par con-séquent une baisse de la diversité biologique associée auxforêts. On estime que plus de 70 % des habitats forestiers del’ensemble de la vallée du Saint-Laurent sont aujourd’hui dis-parus, et ce principalement dans les régions à forte vocation agri-cole, urbaine et industrielle du sud-ouest du Québec et du sud del’Ontario.

Ce phénomène d’empiétement sur les forêts d’origine a frag-menté celles-ci en de petits îlots forestiers de plus en pluséloignés les uns des autres. Outre le fait de diminuer leséchanges génétiques entre les populations, cette fragmentationa réduit considérablement le potentiel de colonisation et dedéplacement des espèces qui vivent en forêt. Les plus affectéessont celles qui tolèrent mal les grands espaces ouverts, commecertains oiseaux migrateurs fréquentant surtout les larges mas-sifs forestiers. Des études récentes ont cependant démontré quela faune et la flore empruntent certains habitats fo r e s t i e r s(boisés, haies, bosquets d’arbres, etc.) encore épargnés etstratégiquement localisés sur le territoire pour se déplacer ou sedisperser d’un habitat d’intérêt à un autre. Ces habitats formentce qu’on appelle des corridors forestiers qui servent ni plus nimoins de liens écologiques à plusieurs populations dans les

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secteurs touchés par d’importants développements socio-économiques, notamment en milieu agricole.

Au Québec, la conservation des habitats forestiers est princi-palement orientée vers la protection d’habitats d’intérêtécologique particuliers tels que, par exe m p l e, des habitatsessentiels pour la faune ou abritant des espèces menacées ouvulnérables. En territoire fragmenté, ces habitats sont souventisolés les uns des autres. Toutefois, dans certaines régions agri-coles, des habitats forestiers résiduels (ex. :grands boisés, haiesou bosquets d’arbres) situés sur des sols non cultivables ou surdes sites de topographie accidentée permettent de contrecarrercet isolement. Lorsque disposés linéairement sur le territoire,entre deux habitats d’intérêt écologique, les habitats forestiersrésiduels forment ce que l’on appelle des corridors forestiers.

Jusqu’à ce jour, la conservation des corridors forestiers aretenu peu l’attention. Cependant, leur protection prend de l’im-portance puisqu’elle permet, à long terme, le maintien de la bio-diversité et l’intégrité écologique des habitats aux échelles localeet régionale. Les corridors forestiers peuvent jouer un rôleécologique important, mais peuvent aussi apporter de nombreuxbénéfices aux communautés locales et régionales.

Afin d’encourager les projets de conservation des corridorsforestiers au Québec, la Fondation Les oiseleurs du Québec inc.et le Service canadien de la faune d’Environnement Canada,région du Québec, ont développé au cours des dernières annéesune démarche d’identification et de description des corridorsforestiers en milieu agricole. Cette démarche, présentée dansun guide technique, est basée sur des projets de recherchemenés à travers le monde et sur des ex p é riences réalisées auQ u é b e c . Un projet pilote de conservation d’un corridor fo r e s t i e ren milieu agricole québécois dans la Municipalité régionale decomté (MRC) du Bas-Richelieu sert d’exemple à la présentationde la démarche.

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DÉMARCHE D’ÉLABORATION D’INDICATEURS LOCAUXD’AMÉNAGEMENT FORESTIER DURABLE

Osvaldo VALERIA ECHEGOYEN, Louis BÉLANGER et Jean-Jacques CHEVALIER

Pavillon Abitibi-Price, Université LavalSainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Dans le contexte où de plus en plus les gens demandent qu’onassure un développement durable des forêts, la certification envi-ronnementale constitue un des principaux outils pour implanterun aménagement forestier durable (AFD). L’un des aspects diffi-ciles est l’élaboration d’indicateurs. Ils permettent d’une part,d’améliorer les connaissances concernant les activitésforestières sur le territoire et, d’autre part, de mesurer l’atteintedes objectifs vis-à-vis des réponses du territoire face auxactivités sylvicoles. Au Canada, l’Association canadienne denormalisation (CSA) a élaboré des normes pour l’enregistrementde l’aménagement forestier durable d’un territoire forestier. Ici, laparticipation du public par le biais d’une table de concertation estl’un des aspects privilégiés par rapport à d’autres systèmes decertification (ISO 14000 et FSC).

Dans le contexte décrit par la CSA et de l’expérience vécue dansl’étude de cas de la Forêt Montmorency, nous proposons unedémarche opérationnelle d’élaboration d’indicateurs locaux poure f fectuer le suivi et le contrôle de l’AFD.Cette démarche s’art i c u l es u i vant cinq différentes approches. L’approche itéra t i ve nousdonne un point de départ à l’élaboration des indicateurs et fixe unpoint de “non retour”, où les actions réalisées par la suite devrontconduire à un engagement réel pour mettre en place un systèmed’AFD. Les approches “top down” et “bottom up” permettent unesorte de mariage entre les points de vue “politique”et “technique”lors de l’approche “harmonisation / confrontation”. L’approchepar amélioration continue permet enfin de vérifier la faisabilitédes indicateurs sur le terrain. La démarche se réalise en 7étapes et demande une forte implication des gens, notammentde la part des gestionnaires avec leur expertise et leurs connais-

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sances, des experts ayant une bonne connaissance du territoirede façon à pouvoir s’exprimer en fonction des valeurs locales etdes membres de la table de concertation, sur qui retombe toutela responsabilité d’une telle entreprise. Cette démarche vise àidentifier des indicateurs ayant les caractéristiques exprimées parla CSA. Un outil essentiel qui porte le nom de grille d’informa-tions, contribue à la validation technique des indicateurs etcontient les éléments considérés importants pour le contrôle et lesuivi de chaque indicateur. Une liste préliminaire de 82 indica-teurs locaux d’AFD a été produite pour la Forêt Montmorency.Ces indicateurs rencontrent les caractéristiques recherchées parla CSA: valables scientifiquement, réalisables, mesurables etcompréhensibles. Les étapes 1 à 4 de la démarche ont étévalidées. Il reste toutefois à vérifier les étapes politiques et l’es-sai sur le terrain. Jusqu’à ce point, la démarche est efficace carelle traduit bien, à notre avis, l’esprit des normes CSA.

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TRANSFERT DE CONNAISSANCES SUR LA MISE ENVALEUR DES HABITATS FAUNIQUES -JUIN 1999-JUIN 2000

Fédération des producteurs de bois du Québec

555, boulevard Rolland-TherrienLongueuil (Québec) J4H 3Y9

De par sa stratégie de développement de la forêt privée, la FPBQvise à promouvoir une gestion intégrée de l’ensemble desressources forestières. Ayant identifié le rôle important quejouent les conseillers forestiers dans la planification forestièreauprès des propriétaires, la FPBQ a identifié un besoin de for-mation chez ces derniers en matières d’aménagement faunique.En effet, en dépit de formations reçues sur la faune, il apparais-sait être difficile pour les conseillers d’intégrer l’aménagementfaunique aux traitements sylvicoles sur le terrain. La FPBQ adonc décidé d’initier un projet novateur de formation, en ce sensqu’un volet faune est intégré au plan d’aménagement forestiertraditionnel. Il en résulte un tout autre plan d’aménagement, unPAFF, (pour plan d’aménagement forêt-faune) qui prescrit destraitements et des recommandations et destiné à tout proprié-taires désireux d’augmenter la présence de la faune sur son lot.

Le projet de Transfert de connaissances sur la mise en valeurdes habitats fauniques comprend trois volets, le premier étant leplus important. Ce premier volet vise à offrir aux différentsconseillers forestiers participants, une série d’ateliers pratiquesportants sur la confection d’un PAFF.

Quatres syndicats des producteurs de bois participent à ce pro-jet : syndicat du Compté de Labelle, de Montréal, d’Outaouais-Laurentides et du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Volets complétaires au projet:

DEUXIÈME VOLET - SENSIBILISATION ET FORMAT I O NAUPRÈS DES PROPRIÉTAIRESLors d’une journée d’initiation, les aménagements réalisés auGroupement faunique du Triangle de Bellechasse feront l’objetd’une visite par des propri é t a i r e s.La visite sera dirigée et commen-tée par un conseiller du Groupement et professionnel en la matière.

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TROISIÈME VOLET - INFORMATION ET COMMUNICATIONProduction et diffusion d’articles à l’intention des propriétaires delots boisés afin de susciter leur intérêt face à l’aménagement fau-nique en milieu forestier.

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LE DÉVELOPPEMENT D’UN ENTREPÔT DE DONNÉESPOUR L’ÉTUDE ET LA GESTION DE LA BIODIVERSITÉ

André FRANCOEUR

Centre de données sur la biodiversité du QuébecUniversité du Québec à Chicoutimi

555, boulevard de l’UniversitéChicoutimi (Québec) G7H 2B1

La biodiversité des milieux naturels représente maintenant pourla plupart des pays une ressource à sauvegarder, voire essen-tielle. Celle du Québec se compose de quelque 40 000 espècesdont 30 000 animaux invertébrés, dominés par 25 000 espècesd’insectes. Les données d’échantillonnage sur leurs populationsdemeurent fragmentaires et dispersées tous azimuts. En fonc-tion du temps, ces données subissent plusieurs types d’avatar:m a t é riel pour les spécimens, documentaire, taxinomique,toponymique, et contextuel pour les données elles-mêmes.

De plus, il n’existe aucun système global pour colliger et stockerces données scientifiques, ce qui occasionne des pertes consi-dérables en temps et en renseignements détenus en particulierpar diverses institutions ou individus. Une telle situation consti-tue une entrave majeure non seulement au développement desconnaissances fondamentales, mais aussi à la production dediverses analyses scientifiques et socio-économiques dans lesdomaines touchant directement ou indirectement la biodiversité:b i o s y s t é m a t i q u e, fa u n i s t i q u e, biogéogra p h i e, env i r o n n e m e n t ,foresterie, agriculture et santé publique. On ne peut penser gérerl’environnement en général, et la biodiversité en particulier, defaçon dynamique et efficace dans le temps, sans tenir comptedes composantes essentielles des écosystèmes et sans lesinstruments scientifiques adéquats pour ce faire.

Ce contexte, vécu en recherche, a incité un groupe de biologistesdu réseau de l’Université du Québec à concevo i r, dans uneoptique généraliste et globale, un outil nouveau et standardisépour stocker et analyser les données d’échantillonnage et sup-p o rter leur ex p l o i t a t i o n . Bien qu’orienté vers les insectes aud é p a rt, il s’agit d’un modèle universel pouvant gérer l’échantil-lon et ses données descri p t i ve s, taxinomiques, écologiques et

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b i bl i o graphiques pour tout groupe d’organisme de n’impor t equel milieu. Il devient ainsi possible de ra s s e m bl e r, de stan-dardiser et de valider les données fondamentales qui perm e t-tent divers types d’analyse et d’études sur la biodive r s i t é .

Une telle base de données primaires associée à des banques dedonnées écologiques géoréférencées et à des logiciels de géo-matique permet de créer un Système d’information et de gestiondes échantillonnages sur la biodiversité ou SIGEB. Une descrip-tion de ce système est présentée.

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COMPARAISON DE L’UTILISATION DE DIFFÉRENTS TYPESDE STRUCTURES DE FORÊT RÉSIDUELLE PAR LETÉTRAS DU CANADA (FALCIPENNIS CANADENSIS)

Caroline GIRARD et Hubert MORIN

Université du Québec à Chicoutimi, 555, boulevard de l’Université

Chicoutimi (Québec) G7H 2B1,

Le tétras du Canada (Falcipennis canadensis) est un oiseau qui estdépendant des forêts de conifère pour subvenir à ses besoins. L e se f fets réels, sur cet oiseau, des activités de l’industrie forestière dansla forêt boréale sont encore peu connu s. Au Québec, une étuderéalisée en 1994 en Abitibi-Témiscamingue par Turcotte et al. a tra i t éde l’impact à court terme de l’exploitation forestière sur cet oiseau.Cette étude concluait que le maintien de forêts résiduelles et de ban-des ri ve raines est essentiel pour minimiser l’impact de l’ex p l o i t a t i o nforestière sur l’oiseau. Elle émettait également des doutes quant àl’efficacité de ces structures à assurer la survie de l’espèce à court ,m oyen et long term e. Afin de répondre à ce dernier doute, une étudea été réalisée au cours de l’été 1998 (mai-août) dans la région du LacS a i n t-J e a n . Cette étude avait pour but de cara c t é riser et de comparerl ’ u t i l i s a tion par le tétras du Canada de trois env i r o n n e m e n t sd i s p o n i bles après coupe fo r e s t i è r e, soit des bandes de 60 m (enmilieu sec et en milieu humide) et des blocs de forêt résiduelle d’unetrentaine d’hectares ainsi que de la forêt non perturbée utiliséecomme témoin. Vinqt-sept tétras (13 mâles et 14 femelles) ont étémunis de radio-émetteurs et suivis à une fréquence d’une localisationaux deux jours. Les données recueillies ont permis d’évaluer la tailledes domaines vitaux, les distances minimales de déplacement entredeux localisations, le taux de survie et la reproduction des tétra s. D e si nventaires de végétation ont également permis de décrire l’habitatprésent à l’intérieur des domaines vitaux des tétra s. Les résultatso b t e nus montrent que les structures de forêt résiduelle, telles qu’ellessont réglementées par le RNI, s’avèrent adéquates pour satisfaire lesbesoins estivaux des tétras du Canada en autant qu’il y ait de la fo r ê tnon perturbée à proximité (peu de tétras sont demeurés uniquementdans les bandes et les bl o c s ) . Des études plus poussées (échantil-lon plus grand, territoires exploités plus va s t e s, études à plus longt e rme) seront toutefois nécessaires afin de connaître l’efficacité deces structures pour les saisons et années futures.

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CARACTÉRISATION DE L’HABITAT DE L’ORIGNAL ETPLANIFICATION D’INTERVENTIONS FORESTIÈRES DANS

LA RÉSERVE FAUNIQUE PORT-CARTIER-SEPT-ÎLES

Alain GUITARD et M. FLEURY

Faune-Experts Inc.186, rue St-Jean-BaptisteBic (Québec) G0L 1B0

L’exploitation de l’orignal par la chasse représente une activitétrès importante sur le plan financier dans la réserve Port-Cartier-Sept-Îles. L’abondance d’orignaux dans la réserve Port-Cartier-Sept-Îles est par contre faible. Ces faibles densités sont reliées àune faible capacité de support du milieu pour l’orignal dans laforêt boréale. Entre autres, la proportion d’essences feuillues,nourriture principale de l’orignal, est faible en plus d’une lenteurconsidérable à se régénérer. C’est la raison pour laquellel’éclaircie précommerciale peut être néfaste en certaines occa-sions pour l’orignal.

Selon le plan quinquennal d’aménagement forestier d’Uniforêt-Port-Cartier (1999-2004), des travaux d’éclaircies précommer-ciales d’envergure sont prévus au nord de la réserve. Avant laréalisation de ces travaux, une étude a été entamée depuis l’été1999 afin de: (1) documenter la distribution de l’original dans lesecteur visé de 130 km2; (2) caractériser l’habitat de l’orignal(couvert de protection, nourriture, modifications temporelles ducouvert forestier, etc.) et (3) caractériser l’utilisation de l’habitatpar l’orignal afin de proposer des interventions fo r e s t i è r e sadéquates.

L’étude en cours a pour principaux objectifs:

1) Amorçer une démarche de gestion intégrée des ressourcesdans la réserve;

2) Connaître les cara c t é ristiques générales de l’habitat de l’ori g n a ldans la réserve ;

3) Connaître la distribution de l’orignal dans le secteur nord de laréserve par un inventaire aérien;

4) Quantifier la disponibilité et l’utilisation du brout sur l’ensem-ble du bloc nord;

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5) Planifier des interventions forestières qui auront un impactpositif sur l’habitat de l’orignal tout en prenant compte desprincipes actuels d’exploitation de la forêt publique.

Des résultats préliminaires des inventaires de brout d’orignal etde l’habitat forestier seront présentés ainsi que les résultatsescomptés.

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IMPACTS À LONG TERME DE LA FORESTERIE SUR L’AVIFAUNE DE NOS PESSIÈRES BORÉALES:

QUE PEUT-ON APPRENDRE DE L’EXPÉRIENCE SCANDINAV E ?1) DES ÉCOSYSTÈMES SIMILAIRES

Louis IMBEAU1, Mikko MÖNKKÖNEN2 et AndréDESROCHERS1

1Centre de recherche en biologie forestièrePavillon Abitibi-Price, Université Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

2Département de BiologieUniversité d’Oulu

POB 3000, Oulu, FIN-90401, Finlande

Dans la forêt boréale de l’est du Canada dominée par la pessièrenoire, les impacts à long terme de la foresterie sur la diversitébiologique de cet écosystème sont encore peu connus. Mêmepour un groupe relativement bien étudié comme les oiseaux, nosconnaissances sur les tendances actuelles des populations sontfragmentaires. Cependant, pourrait-on tirer profit de l’expériencescandinave où les tendances à long terme des espèces sontd i s p o n i bles de même qu’étroitement reliées à l’ex p l o i t a t i o nforestière?

Dans un premier temps, nous devons nous assurer que lesécosystèmes comparés sont similaires. Il s’avère que toutcomme nos pessières boréales, la forêt boréale Scandinave étaitautrefois soumise à l’influence cyclique des feux et composée àplus de 40 % par des peuplements d’âge mature ou suranné.Cependant, l’avancée de la récolte commerciale vers le nord aucours du siècle dernier a considérablement modifié cette struc-ture d’âge au profit de stades plus jeunes. Le même phénomèneest en cours au Québec, quoiqu’il ait débuté près de 150 ans plustard.

Malgré leur isolement géoraphique, 21 espèces d’oiseaux seretrouvent dans les deux forêts boréales considérées, 34 autressont si étroitement apparentées qu’on peut les considérercomme des “équivalents écologiques”. De plus, la similarité desassemblages d’espèces d’oiseaux en fonction des stades de

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développement forestier est étonnante. Les migrateurs tropicauxatteignent leur abondance maximale au début ou en milieu desuccession et sont peu présents dans les stades matures. Lesrésidants et les nicheurs en cavités atteignent leur abondancemaximale dans les forêts les plus âgées dans les deux régions.On peut donc s’attendre à ce que les modifications de la struc-ture d’âge des forêts de même que l’aménagement intensif liéaux activités de la récolte forestière aient des effets similaireschez les populations d’oiseaux de la forêt boréale de l’est duCanada et de la Scandinavie.

En conséquence, les déclins importants observés chez plusieursespèces Scandinaves et l’allongement de la liste rouge desespèces menacées en raison des activités forestières sont desproblèmes majeurs qui pourraient également se reproduire auQuébec. Pour tirer profit de cette expérience, la première étapec o n s i s t e ra toutefois à déterminer quelles sont les espècesquébécoises les plus susceptibles de réagir de façon similaire età éviter de répéter les causes de leur déclin.

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I M PACTS À LONG TERME DE LA FORESTERIE SURL’AVIFAUNE DE NOS PESSIÈRES BORÉALES:

QUE PEUT-ON APPRENDRE DE L’EXPÉRIENCE SCANDINAV E ?

2) IDENTIFICATION DES ESPÈCES PRÉOCCUPANTES.

Louis IMBEAU1, Mikko MÖNKKÖNEN2 et AndréDESROCHERS1

1Centre de recherche en biologie forestièrePavillon Abitibi-Price, Université Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

2Département de Biologie, Université d’OuluPOB 3000, Oulu, FIN-90401, Finlande.

Afin d’identifier les espèces québécoises les plus susceptibles dedécliner suite aux activités forestières, nous avons établi pourchacune d’entre elles une somme de facteurs de risque baséesur 10 critères liés à leur écologie (sélection de l’habitat etstratégie de nidification). Au niveau de l’habitat, les espèces defin de succession, ayant de grands domaines vitaux ou utilisantdes chicots sont les plus vulnéra bl e s. Au niveau des sites denidification, les nicheurs en cavités (particulièrement les plusgrandes espèces ne pouvant excaver elles-mêmes) sont les plusnégativement affectés. Un risque supplémentaire a été ajoutépour les espèces résidantes ou dont la distribution est stricte-ment boréale.

La validation de ce classement a été effectuée avec les espècesscandinaves. En effet, il existe un lien significatif entre la sommede facteurs obtenus et les tendances à long terme des popula-tions. Les espèces accumulant le plus de facteurs sont cellesayant connu les déclins les plus importants. En Scandinavie, 14espèces présentent un nombre élevé de facteurs de risque (plusde 4). Parmi celles-ci, 5 n’utilisent pas de nichoirs artificiels etleurs populations ont décliné d’au moins 45 % au cours des 50dernières années. Au Québec, 10 espèces présentent autant defacteurs: deux sont holarctiques (Pic tridactyle et Nyctale deTengmalm) et 4 autres (Grand Pic, Mésange à tête brune,Grimpereau brun et Mésangeai du Canada) sont considéréescomme des équivalents écologiques d’espèces scandinaves.

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Seulement 3 des espèces à haut risque pourraient utiliser desnichoirs artificiels (Garrot d’Islande, Petit Garrot et Nyctale deTengmalm). Les deux espèces en tête de cette liste (Pic tri-dactyle et Pic à dos noir) sont strictement reliées aux pessièressurannées ou aux brûlis.

En Scandinavie, les aires protégées jouent un rôle importantpour maintenir la plupart de ces espèces en déclin. Toutefois, àl’heure actuelle seulement 0,4 % de la pessière québécoise eststrictement protégée. De plus, la planification des aires decoupes à l’échelle des paysages (landscape ecological planning)est également devenue nécessaire pour optimiser la configura-tion des aires laissées intactes. Le Québec accuse un retard cer-tain à ce chapitre. Tout comme en Scandinavie il y a 50 ans, peud’espèces boréales sont actuellement menacées au Québec.Considérant nos pratiques actuelles, il ne s’agit probablementque d’une question de temps. Tirer profit de l’ex p é ri e n c eScandinave pourrait nous aider à ne pas répéter les mêmeserreurs en termes de conservation et constitue un des défismajeurs de la foresterie québécoise en matière de biodiversité.

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DOIT-ON CONSERVER DES PESSIÈRES SURANNÉES?LE CAS BIEN PARTICULIER DU PIC TRIDACTYLE

Louis IMBEAU et André DESROCHERS

Centre de recherche en biologie forestièrePavillon Abitibi-Price, Université Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Au sein des pessières noires québécoises, le Pic tridactyle(Picoides tridactylus) est une espèce résidante qui se retrouvepresque exclusivement dans des forêts surannées (> 120 ans)contenant une forte densité de chicots. En raison de cettepréférence d’habitat, ce pic est probablement l’espèce d’oiseaudont les populations seront les plus négativement affectées parles activités de récolte forestière. Cette étude apporte de nou-velles informations sur les arbres utilisés pour sa quête de nour-riture et pour son tambourinage. Ces aspects sont trop souventnégligés dans l’écologie des espèces de pics et peuvent entreren conflit avec un aménagement intensif des forêts visant princi-palement la production de matière ligneuse.

Au cours de deux périodes estivales et d’une période hivernale,une quarantaine d’individus différents ont été suivis visuellementdans le secteur du lac Rivard (49°48’N, 73°08’O), au nord-ouestdu lac Saint-Jean. Chaque arbre utilisé était caractérisé par lesvariables suivantes: espèce, diamètre à hauteur de poitrine(dhp), classe de détérioration, hauteur et pourcentage de recou-vrement de l’écorce. Chaque arbre utilisé a été apparié à l’arbrele plus proche non-utilisé (> 5 cm dhp) afin d’identifier les carac-téristiques des arbres recherchés par ces pics.

Tant en été qu’en hiver, les chicots étaient nettement plus utilisésque les arbres vivants pour leur recherche de nourri t u r e.Toutefois, la disponibilité des chicots en hiver était considérable-ment réduite comparativement à l’été puisque les arbres mortscouchés au sol étaient alors ensevelis sous la neige. En plus depréférer les arbres de plus grand diamètre, les chicots récem-ment morts attaqués par des larves d’insectes sous l’écorceétaient nettement plus utilisés que les arbres ayant une cote dedétérioration avancée. Ces résultats appuient le fait que le Pic tri-

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dactyle soit une espèce étroitement spécialisée à la recherche descolytes qui n’attaquent que des arbres récemment morts. Quantaux arbres utilisés pour le tambourinage, un faible recouvrementd’écorce et une cime coupée semblent être des caractéristiquesimportantes leur offrant de meilleures possibilités acoustiques.

Ces résultats soulignent l’importance des forêts surannées pourla persistence de populations viables de Pics tri d a c t y l e spuisqu’ils semblent nécessiter un recrutement constant dechicots récemment morts au sein de leurs domaines vitaux. Enconséquence, la protection des chicots existants sur les aires decoupe n’améliorerait au mieux qu’à très court terme la qualité del’habitat de cette espèce dans des milieux aménagés. D’autresnicheurs en cavité qui n’utilisent pas les chicots pour leur quêtealimentaire pourraient toutefois bénéficier de cette mesure. Lasuite de ce projet de recherche nous permettra prochainementde publier d’autres résultats concernant les domaines vitaux demême que les mouvements de ces pics dans des secteursforestiers encore intacts comparativement à d’autres secteursintensément modifiés par les activités de récolte forestière.

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RECHERCHE ET ACTIONS EN BIODIVERSITÉ, UNINVESTISSEMENT DURABLE

Jean-Guy LAFLAMME

Le GABIOForêt Québec – Fond forestier- Volet recherche

2700, rue EinsteinSainte-Foy (Québec) G1P 3W8

Le secteur forestier québécois reconnaît la nécessité de gérer laforêt sur la base du développement dura bl e. À la suite de cetter e c o n n a i s s a n c e, six critères de développement dura ble ont étéi n t é grés à la Loi sur les fo r ê t s. Pa rmi ceux-ci figure la conserva-tion de la diversité biologique. C’est précisément sur ce cri t è r eque portent les réflexions du Groupe d’action sur la biodive r s i t é( G A B I O ) . Le GABIO s’est tout d’abord penché sur la définition dela diversité biologique et il a retenu comme base commune de dis-c u s s i o n : «La va riabilité des espèces viva n t e s, des écosystèmesdans lesquels elles vivent et des processus biotiques. Protéger lab i o d i versité revient donc à protéger la diversité des écosystèmes,la diversité des espèces, la diversité au sein des espèces (dive r-sité génétique) et à maintenir l’ensemble des processus ou inter-actions qui existent entre ces divers éléments».

Le mandat du GABIO consiste entre autres à identifier lesbesoins de recherche et à accentuer le transfert des connais-sances. Le GABIO aimerait inciter les utilisateurs, les chercheurset les industriels à s’impliquer dans le groupe ou dans le proces-sus qui l’entoure. Le groupe d’action a à son actif différentesréalisations, comme par exemple la coordination d’un atelierd’expert tenu en mars dernier qui visait à déterminer les enjeuxde conservation de la biodiversité du milieu forestier dans larégion de Québec (03).

Le GABIO identifie les priorités de R-D en regard des préoccu-pations grandissantes du public et des différents intervenants. Ilintègre la réalité du terrain afin de répondre à ces préoccupationset aux différents besoins. On insiste donc sur une vision réalistede la recherche et sur la livraison des résultats pour contribuer aumaintien de la biodiversité face aux pratiques d’aménagementforestier durable.

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CONSÉQUENCES DES PATRONS TRADITIONNELS DEMIGRATION SUR LA DYNAMIQUE DE POPULATIONS DE

CERFS DE VIRGINIE VIVANT À LA LIMITE NORD DE LEURAIRE DE DISTRIBUTION.

Louis LESAGE1,2

, André DUMONT1,2

, Michel CRÊTE2,3

,Jean HUOT

1,2et Jean-Pierre OUELLET

4

1Département de biologie, Université Laval

Sainte-foy (Québec) G1K 7P42Centre d’études nordiques, Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

3Service de la faune terrestre, FAPAQ

150, boul. René-Levesque Est (Québec) G1R 4Y14Département de biologie et des sciences de la santé, UQAR

300, allée des Ursulines, Rimouski (Québec) G5L 3A1

Durant l’hiver, les cerfs de Virginie vivant sous nos latitudes seconcentrent dans des ravages pour des raisons de conservationd’énergie et de diminution de prédation. Aux printemps, les cerfsmigrent vers des aires d’été réparti dans les milieux avoisinants.Nous avons voulu tester l’hypothèse que les cerfs du sud duQuébec utilisent traditionnellement les mêmes milieux dû au faitqu’ils possèdent une organisation sociale matriarcale qui setraduit dans des patrons migratoires traditionnels. Nous avonsanalysé les domaines vitaux et les dispersions de 43 cerfs desravages de Pohénégamook et de Témiscouata de l’hiver 1994 àl’été 1997. Nous avons évalué la fidélité inter-annuelle desdomaines vitaux d’hiver et d’été selon le sexe et l’âge des cerfs.Nous avons observé une fidélité très marquée aux domainesvitaux d’hiver et d’été utilisés l’année précédente. Le change-ment dans: les coûts de locomotion, la disponibilité de la nourri t u r eet les patrons d’activité des cerfs pourraient expliquer les trèspetits domaines vitaux d’hiver comparativement à ceux d’été. Auprintemps, les cerfs du ravage de Pohénégamook parcourent enm oyenne deux fois la distance des cerfs du ravage deTémiscouata. Les cerfs du ravage de Pohénégamook se répar-tissent dans des milieux d’été qui chevauchent très peu lesmilieux utilisés par les cerfs du ravage de Témiscouata. Cetteutilisation exclusive du milieu pourrait refléter un apprentissagetransmis de mère en fille. Ces résultats suggèrent que l’utilisa-tion de l’habitat et la dynamique de population est unique pourchaque ravages. Conséquemment, des changements dans la

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dynamique d’une population d’un ravage pourraient se refléterdans des changements importants dans l’utilisation estivale dumilieu ou vice versa en raison des patrons traditionnels de migra-tion. Ce comportement caractéristique des cerfs devrait êtreconsidéré lors de l’aménagement d’une population donnée.

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FORÊT PRIVÉE : INTÉGRER LA PROTECTION ET LACONSERVATION DES HABITATS FAUNIQUES DANS LARÉALISATION DES TRAVAUX SYLVICOLES PRIVÉES

Bilan d’un projet pilote mené à la Forêt modèledu Bas-Saint-Laurent

Joanne MARCHESSEAULT

Forêt modèle du Bas-Saint-Laurent300, allée des Ursulines, bureau J-463

Rimouski (Québec) G5L 3A1

Les propriétaires forestiers du Québec sont de plus en plus nom-breux à se préoccuper de la protection des ressources fauniques.Le projet pilote Travaux faune-forêt mené entre 1995 et 1998sur les territoires de la Forêt modèle du Bas-Saint-Laurent, a per-mis d’identifier des possibilités d’intégrer une douzaine detravaux à caractère forêt-faune dans les pratiques régulièresd’aménagement.

La plupart des travaux ex p é rimentés ont des impacts positifs surl’habitat faunique et n’ont pas posé de problèmes d’application. S ’ i l sne font pas déjà partie de la gamme d’interventions reconnues dansles programmes de mise en valeur des forêts privées régis par lesAgences régionales, une première série pourrait l’être sans impli-cation financière et une deuxième avec un effo rt financier relative-ment modeste, si telle est la volonté des intervenants régionaux.

Là où le projet a été riche en enseignements, c’est sur les limitesdes compétences et des responsabilités des conseillersforestiers en matière d’aménagement à caractère faunique et surle faible pouvoir d’incitation des plans de gestion faunique indi-viduels. De plus, étant donné que le domaine vital de plusieursespèces dépasse fréquemment les limites des propriétés privéesà l’échelle desquelles s’appliquent habituellement les pro-grammes forestiers de mise en valeur et que le potentiel fauniqued’un territoire doit être analysé dans son ensemble, il paraîtimpératif d’aborder l’aménagement des habitats fauniques d’unterritoire par la confection et la mise en oeuvre d’un plan d’inter-vention sur l’ensemble du territoire en ayant recours à l’expertisede spécialistes dans le domaine.

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P ROGRAMME DE LAVAGE PÉRIODIQUE DESM ACHINERIES FORESTIÈRES

Christian MATHIEU

SANI-TERRE INC.1086, boulevard Sacré-Cœur

St-Félicien (Québec) G8K 2X5

Le programme, mis en place par Sani-Terre Inc., est effectué àl’aide d’équipements spécialisés. C’est un concept unique eninstance de brevet. Le lavage des machineries, s’effectue avecprofessionnalisme, tout en respectant l’environnement. Aucunsrésidus ne demeurent sur le sol, nous effectuons la récupérationet le traitement des eaux usées (perte de plus ou moins 5 % del’eau propre).

Avec ce programme, l’entreprise n’a plus qu’à effectuer un entre-tien périodique de sa machinerie. Auparavant, lorsque l’entre-preneur lavait ses équipements tous les résidus pollués seretrouvaient sur le sol, de plus, une grande quantité d’eau étaitgaspillée.

D u rant la saison hive rn a l e, le lavage des machineries est délais-sé par la majorité des contra c t e u r s, étant donné le froid, un tell avage occasionnerait des risques de gel. Po u rtant, il est toutaussi primordial de bien nettoyer sa machinerie afin de diminu e rles risques d’incendie et d’accroître la productivité de celles-ci.Car à -20oC et plus, les risques de surchauffe du moteur et de sescomposantes sont peu probabl e s, mais lorsque le climat ser é c h a u f fe aux alentours de -5 à -10oC les risques augmententc o n s i d é ra bl e m e n t . Nous savons tous qu’un bris d’équipementcoûte facilement entre 5 000$ et 25 000$ en pièces et en perte det e m p s. Par contre, une machine qui suit une cédule de lava g ep é riodique vient d’atténuer les caprices de dame nature.

En adhérant à un tel service de lavages périodiques, les entre-prises (petites et grandes) tireront tous les avantages d’un telp r o gramme et participeront tous ensembles à améliorer la qualitéde vie des générations à venir, en préservant l’environnement etla flore. Nous avons collectivement le devoir de protéger notregrande planète bleue alors engageons-nous y dès maintenant.

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IMPLICATION DE LA SOCIÉTÉ DE LA FAUNE ET DESPARCS EN FORÊT PRIVÉE

Magella MORASSE

Faune et Parcs Québec675, boulevard Réné-Lévesque E.

Québec (Québec) G1R 5V7

La Société de la Faune et des Parcs (FAPAQ), en collaborationavec plusieurs partenaires, a développé une gamme d’outils etd’approches afin de s’assurer de la conservation et de la mise envaleur des ressources fauniques dans la gestion du milieu fores-tier sur terres privées. A l’échelle régionale, la FAPAQ a collaboréavec l’équipe de soutien à l’élaboration des plans de protection etde mise en valeur (PPMV) en vue de proposer aux agences demise en valeur de la forêt privée une approche visant la prise encompte de la conservation de la diversité biologique lors de laconfection des PPMV. A l’échelle du propriétaire forestier, unvolet faunique, à être jumelé au plan d’aménagement forestier, aété réalisé conjointement avec la Fondation de la faune duQuébec et le ministère des Ressources naturelles. Ce guide,destiné avant tout aux conseillers forestiers, propose des mé-thodes pour l’inventaire, l’analyse et l’interprétation des donnéesrelatives à la faune et à ses habitats. La FAPAQ a également par-ticipé à la réalisation de guides techniques simples destinés auxpropriétaires de boisés privés qui désirent effectuer des travauxd’aménagement des habitats fauniques ou de milieux d’intérêtpour la faune (étang, lieux incultes, etc.) sur leur propriété. Enfin,des outils visant à faciliter la mise en valeur des populations fau-niques par les propriétaires ou des regroupements de chasseurssont également présentés.

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IMPORTANCE DES BRÛLIS POUR LE PIC À DOS NOIR ENFORÊT BORÉALE

Antoine NAPPI1, Pierre DRAPEAU1, Jean-François GIROUX1

et Jean-Pierre SAVARD2.

1 Groupe de recherche en écologie forestière interuniversitaire(GREF-I)

Département des sciences biologiquesUniversité du Québec à MontréalC.P.8888, Succursale Centre-Ville

Montréal (Québec) H3C 3P8

2 Service canadien de la faune, région du Québec 1141, route de l’Église. C.P. 10100

Sainte-foy (Québec) G1V 4H5

La conservation des arbres morts constitue un facteur clé aumaintien de la biodiversité. En forêt boréale, plusieurs espècesd’oiseaux, notamment les pics, dépendent des arbres morts tantpour l’alimentation que la nidification. Plusieurs études menéesailleurs en Amérique du Nord ont montré que les fo r ê t sanciennes et les forêts ayant subies des perturbations naturellesrécentes (épidémies d’insectes, feux) contri buent, par leurgrande disponibilité en arbres morts, au maintien des populationsde pics. Cependant, aucune étude n’a encore comparé dans ungradient allant des forêts récemment brûlées jusqu’aux forêtsanciennes l’importance relative de ces différentes mosaïquesforestières naturelles pour les pics. De plus, la dynamique desarbres morts et la distribution des oiseaux associés à cet attributd’habitat sont encore méconnues pour la zone de la pessièrenoire. Les objectifs de l’étude sont 1) de documenter la distribu-tion des pics à travers un gradient de paysages forestiers pertur-bés par différents évènements de feu (1 an, 20 ans, 100 ans et >200 ans) et 2) de comparer la disponibilité et la qualité desarbres morts entre les quatre paysages forestiers. L’aire d’étudese situe au nord-ouest de l’Abitibi (49o02’N à 49o48’N; 78o27’O à80o46’O) dans les secteurs dominés exclusivement par l’épinettenoire et le pin gris. L’avifaune a été recensée par la méthode despoints d’écoute et par repasse de chants (playback). Desquadrats (693 m2) centrés sur les points d’écoute ont été utilisés

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pour l’échantillonnage des chicots > 5 cm pour lesquels étaientnotés le diamètre (DHP), l’état de décomposition et l’utilisationpar les pics pour l’alimentation (écorçage et trous). Les résultatsindiquent 1) une présence accrue des pics dans la mosaïqueforestière mature (100 ans) en comparaison avec la mosaïqueforestière ancienne (> 200 ans) dû principalement à une plusfa i ble densité en chicots dans cette dernière 2) une fo rte associa-tion du Pic à dos noir avec la mosaïque forestière récemmentbrûlée due à une plus forte disponibilité en chicots de grosdiamètres et peu décomposés (caractéristiques des arbres mortsutilisés pour son alimentation). Les résultats suggèrent que l’in-tensification de la coupe de récupération dans les forêts récem-ment brûlées pourrait constituer un menace sérieuse au maintiendes populations de Pic à dos noir à une échelle régionale.

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L’EFFET DE L’HÉTÉROGÉNÉITÉ LOCALE DE LA VÉGÉTATION SUR LE CHOIX DE L’EMPLACEMENT DES

TERRITOIRES DE NIDIFICATION DE LA PARULINE BLEUE(DENDROICA CAERULESCENS) ET DE LA PARULINE

COURONNÉE (SEIURUS AUROCAPILLUS)

Véronique ST-LOUIS1,3, Marie-Josée FORTIN2,3 et AndréDESROCHERS3

1Département de sciences biologiques2Département de géographie

Université de MontréalC.P. 6128, succ. Centre villeMontréal (Québec) H3C 3J7

3Centre de recherche en biologie forestièrePavillon Abitibi-Price, Université Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

Le choix d’un territoire de nidification après une longue migrationconstitue une étape cruciale de la vie de la majorité des oiseauxnord-américains. Les nombreuses études ayant été menées à cejour suggèrent que la végétation locale affecte le choix de l’em-placement du territoire chez les différentes espèces aviaires,mais le mécanisme par lequel les oiseaux utilisent la végétationdans la délimitation de leur territoire demeure méconnu .L’objectif de la présente étude est de déterminer sil’hétérogénéité de la végétation à l’échelle locale a une influencesur les limites territoriales de la paruline bleue (Dendroicacaerulescens) et de la paruline couronnée (Seiurus aurocapillus).L’hypothèse posée est qu’il y a une relation significative entre lesfrontières floues (délimitées entre les peuplements et entre lespourcentages de recouvrement de chacune des strates de lavégétation) et les frontières des territoires des oiseaux. Les deuxespèces étudiées utilisant l’habitat de façon très différente, nousavons prédit qu’elles n’auraient pas les mêmes réponses faceaux frontières végétales. L’étude a été réalisée dans la réserveDuchesnay à 40 km au sud-ouest de la ville de Québec pendantl’été 1999. Les territoires de 10 parulines bleues et de 14 paru-lines couronnées ont été cartographiés à l’aide de la méthode dupoint. L’échantillonnage de la végétation a été réalisé sur uneaire de 0,49 km2 selon une grille régulière à chaque 12,5 m.

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L’analyse des données a consisté dans un premier temps àdélimiter les frontières de la végétation selon différentesva ri a bles puis à quantifier dans un deuxième temps lechevauchement spatial entre les frontières végétales et leslimites territoriales des oiseaux. Les outils statistiques actuelspermettent une étude des plus fine de l’habitat menant à unemeilleure compréhension du comportement animal et ainsi unegestion plus appropriée.

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DYNAMIQUE SPATIO-TEMPORELLE DESCORMORANDIÈRES DE LA RÉSERVE DE PARC NATIONAL

DE L’ARCHIPEL-DE-MINGAN

Julie VALCOURT et Hubert MORIN

Université du Québec à Chicoutimi555, boulevard de l’Université

Chicoutimi (Québec) G7H 2B1

Les populations de Cormorans à aigrettes (Phalacrocorax aur i -tus) sont présentement à la hausse et les effectifs de l’Archipel-de-Mingan n’échappent pas à cette règle. Les causes de cetteaugmentation ne sont pas connues, ce qui ne permet pas unegestion efficace de cette ressource faunique qui détruit progres-sivement les écosystèmes forestiers de certaines îles. L’objectifde cette recherche consiste donc à localiser d’anciennes cor-morandières afin de déterminer si la présence en si grand nom-bre de Cormorans à aigrettes dans l’archipel est un phénomènerécent (20e siècle) ou ancien. Deux techniques ont été utiliséespour déceler la présence d’anciennes cormorandières dansl’archipel. D’une part, des sondages pédologiques ont été dis-tribués sur des transects traversant trois îles susceptibles d’avoirabrité des cormorandières dans le passé. Ces sondages ont étéeffectués dans le but de détecter la présence de cailloux au seindu profil de sol. Ces cailloux sont rejetés par les cormorans ets ’ a c c u mulent aux pieds des arbres où ils nichent. C e smacrorestes sont des signes caractéristiques d’anciennes cor-morandières puisqu’ils ne sont habituellement pas présents dansles sols forestiers et qu’ils s’y conservent pratiquement indéfini-ment. D’autre part, des structures d’âge ont été réalisées afin dedéterminer l’origine des populations de sapins baumiers (Abiesb a l s a m e a) présentes sur les îles. Suite à l’échantillonnage réaliséen 1997 et 1998, aucun caillou n’a été retrouvé dans lessondages pédologiques effectués sur les îles à l’étude. Aucunecormorandière n’aurait donc existé sur ces îles avant le 20e siè-cle. De plus, les structures d’âge ont révélé que les populationsde sapins baumiers ne sont pas issues du passage destructeurdes Cormorans à aigrettes. Bref, la présence en si grand nom-bre des Cormorans à aigrettes dans l’Archipel-de-Mingan est unphénomène récent possiblement d’origine anthropique.

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L’OBSTRUCTION VISUELLE DANS LES BANDES BOISÉESSUR LES PARTERRES DE COUPE EN FORÊT D’ÉPINETTE

NOIRE : IMPLICATIONS POUR LES PAYSAGES ET LAFAUNE

Christine VALLIÈRES1, Marcel DARVEAU2 et Jean-ClaudeRUEL3

Centre de recherche en biologie forestièreUniversité Laval

Sainte-Foy (Québec) G1K 7P4

La critique est présentement très sévère à l’endroit des bandesboisées laissées sur place entre les aires de coupe. L’opacité deces bandes est inconnue, ce qui implique que nous ne savonspas si elles sont suffisantes pour diminuer l’impact visuel descoupes adjacentes, ni si elles constituent un couvert adéquatpour la faune. Notre projet vise à développer une méthode per-mettant d’évaluer l’obstruction visuelle latérale et à vérifier sicette obstruction est adéquate pour les paysages et la faune.

Nous avons étudié l’obstruction visuelle de bandes situées aunord du lac Saint-Jean, dans la pessière noire à mousses. Lestypes de bandes évaluées sont des bandes d’épinette noire de60 m sèches (sans ruisseau) et de 60 m humides (avec ruisseau)et de bandes de 20 m en pin gris et en épinette noire.L’évaluation de l’obstruction visuelle latérale est faite de deuxmanières : (1) par évaluation directe sur le terrain et (2) paranalyse numérique de photographies au laboratoire. Pour l’éval-uation sur le terrain, l’observatrice mesurait l’obstruction visuelled’un panneau de 50 cm de largeur et 6 mètres de hauteur,gradué aux 50 cm, et maintenu en place en bordure de la bande,en se plaçant successivement à 10 m à l’intérieur de la bande,puis à 20 m, et ainsi de suite jusqu’à qu’elle arrive de l’autre côtéde la bande boisée. Pour l’évaluation photographique, des pho-tographies latérales des bandes ont été prises à une distance de30 m et l’obstruction visuelle sera évaluée en mesurant laporosité optique grâce à un logiciel de traitement d’images. Les2 méthodes, une fois validées, pourront être calibrées l’une parrapport à l’autre.

Les données obtenues à l’aide du panneau indiquent que, dans

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le cas de l’épinette noire dans des bandes sèches de 20 m et dupin gris mature, le taux d’obstruction moyen est d’environ 20 % à10 m. de profondeur et de 40 % à 20 m. Chez les bandes sèch-es d’épinette de 60 m, l’obstruction est aussi d’environ 20 % à 10m et de 40 % à 20 m, mais elle dépasse 80 % à 40 m. Enfin,dans les séparateurs humides de 60 m en épinette, l’obstructionest de 20 % à 10 m, de 60 % à 20 m et de 90 % à partir de30 m. Dans ce dernier cas, l’augmentation de l’obstruction estprobablement due à la présence d’aulnes dans le centre de labande boisée. Quant à la hauteur, les pourcentages d’obstructionvisuelle latérale sont en général plus élevés dans les premiers50 cm à partir du sol que pour le reste de la hauteur, à cause dela présence d’éricacées et de chablis.

Dans les prochains mois, nous vérifierons s’il existe une corréla-tion entre ces mesures d’obstruction visuelle et des donnéesd’inventaire d’oiseaux prises dans les mêmes bandes boisées.En bout de ligne, nous effectuerons des recommandations quantà la largeur que dev raient avoir les bandes boisées pour satisfa i r eles besoins des différents «utilisateurs» du territoire fo r e s t i e r.

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- Partie VI -Allocution de clôture

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FORÊT-FAUNE, UNE UNION VITALE

Réjean GAGNON, biol. Ph.D.

Consortium de recherche sur la forêt boréale commercialeUniversité du Québec à Chicoutimi

555, boulevard de l’Université Chicoutimi (Québec) G7H 2B1

Bonjour tout le monde!

D u rant ces deux jours de rencontre, j’ai senti, à plusieurs repri s e s,chez ceux qui ont fait des interve n t i o n s, un engagement profo n de nvers la forêt et/ou la fa u n e. Tous s’entendent pour dire que laforêt ne va pas sans la faune et vice versa et que les enjeux dansle domaine forestier sont majeurs. L’aménagement des territoiresforestiers constitue un projet de société dont la réussite dépendde chacun d’entre nous.

Les années 2000 seront celles de l’env i r o n n e m e n t . Sur la planète,le nombre de personnes augmente. Nous sommes actuellementplus de six milliards et bientôt sept. Où va-t-on s’arrêter? Tous lesgens ont des besoins que seules les ressources de notre planètep e u vent combl e r. Mais ces ressources ne sont pas illimitées.Comment faire pour assurer la pérennité des écosystèmesforestiers et aquatiques dans un contexte d’augmentation con-stante de la demande d’utilisation venant des humains? Le défiest de taille. Au Québec, nous avons encore de grands espacesnaturels et la pression mondiale va faire en sorte que nous allonsêtre obligés de gérer ces territoires selon des critères intern a-tionaux et non seulement locaux. Par exe m p l e, comme mention-né par un des conférenciers, face à la biodiversité, l’Union inter-nationale de conservation de la nature (UICN) propose troisactions à prendre : u t i l i s e r, sauve r, connaître.

Utiliser

La population mondiale s’accroissant, la demande pour les pro-duits de la forêt va, elle aussi, augmenter. Nous ne pouvons pasmettre nos forêts sous une cloche de verre, nous les utilisons.Nous n’aurons pas le choix. Au Québec, nous sommesprivilégiés d’avoir des ressources renouvelables phénoménales

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comme la forêt et l’eau. Jusqu’à maintenant, elles ont procurésécurité et confort à une bonne partie de nos gens. Dansl’avenir, nous serons appelés à partager ces richesses avecl’ensemble de la planète.

Sauver

Durant ce Forum Forêt-Faune, je n’ai pas entendu mentionner,qu’en forêt boréale, il y avait des espèces en danger. Cependant,ça ne veut pas dire que demain il n’y en aura pas. Nous devonsêtre vigilants parce que c’est ce qui nous guette. Il faut faire ensorte que ça n’arrive pas.

Connaître

À court terme, dans la forêt boréale, nous devons augmenter nosconnaissances sur les forêts anciennes, les pessières àcladonies, le caribou des bois et les aires protégées. Au sujet deces dernières, nous devons évaluer le rôle du feu dans la con-servation des forêts d’épinette noire.

En fait, la connaissance devrait être l’assise de notre fonction-nement. C’est d’ailleurs le thème de ce colloque «Tout un mondeà connaître!». Les défis qui nous attendent sont énormes maisaussi très exaltants. La tâche est colossale. La connaissances’avère un bon outil pour faciliter la convergence entre les gensd’opinions différentes. Elle est source de conciliation.

Ce fut un excellent congrès et à la prochaine!

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Chicoutimi, Juillet 2001

Au cours de l’année 2000, le Forum Forêt-Faune a étéhonoré de deux distinctions. La première était le PrixAlphonse Huard décerné par le Mérite scientifiquerégional Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans la catégorie loisiret vulgarisation scientifique. La seconde était le Prixd’excellence pour l’intendance des forêts décerné parHabitat faunique Canada pour souligner la contributionmarquante du Forum Forêt-Faune dans la prise de

conscience et l’appréciation de l’intendance, des pratiques durables et des efforts deconservation de la biodiversité des forêts.

En 2001, c’est au tour du Forum Forêt-Faune de vous offrir les actes de sa deuxième édition.Si cette aventure a connu un tel succès c’est grâce à la contribution de l’ensemble desconférenciers, des bénévoles, des commanditaires et des participants.

Lorsque nous avons choisi le thème de ce forum, «TOUT UN MONDE À CONNAÎTRE !» ,c'est en premier à vous tous que nous pensions. L'intégration des activités forestières etfauniques représente pour nous l'un des défis de la mise en œuvre d'un aménagementforestier durable. Un des premiers pas pour y arriver consiste à apprendre à se connaître et àse faire confiance. Comme vous l’avez sans doute constaté, toute la formule du Forum Forêt-Faune visait, tant au niveau de la durée, de la forme et du choix de nos conférenciers, àfaciliter les échanges entre les participants. Alors, qui que vous soyez et d'où que vousveniez, nous espérons que vous avez su bien profiter de cet événement pour dialoguer et pourvraiment vous connaître.

Le Forum Forêt-Faune, c'est aussi un lieu privilégié pour l'échange d'information. Ce livrese veut un document synthèse rapportant l’essentiel des propos des conférenciers tant auniveau des recherches récentes sur les interactions entre les activités d'aménagement forestieret la faune qu’au niveau des outils et des projets concrets sur l'harmonisation des activitésforestières et fauniques. Vous retrouverez également dans ce recueil la retranscription desdiscussions et des questions abordées durant la table ronde Forêt-faune : mariage d’amour oude raison ainsi que les résumés des nombreuses affiches scientifiques présentées.

La forêt québécoise est souvent plus diversifiée que nous l'imaginons. De l'habitat del'orignal et de la martre en passant par le grand pic et la tortue des bois, vous verrez qu’il y avraiment tout un monde à connaître !

Le comité organisateur