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Fractures diaphysaires des deux os de l’avant-bras chez l’adulte Ch Lefevre D Le Nen F Dubrana E Stindel W Hu Résumé. Les fractures de l’avant-bras sont classiquement représentées par les fractures atteignant simultanément les deux os, ou séparément chacun d’eux. Les fractures diaphysaires d’un seul os s’accompagnent volontiers de lésions ligamentaires et articulaires affectant les extrémités de l’os voisin, définissant ainsi les fractures de Monteggia (fracture de l’ulna et luxation de la tête radiale) et de Galeazzi (fracture du radius et dislocation de l’articulation radio-ulnaire distale). En mettant en cause les mouvements de pronosupination, ces différentes lésions ont la réputation d’un pronostic fonctionnel réservé ; hormis les fractures peu déplacées qui peuvent répondre à des traitements non chirurgicaux, la nécessité d’une réduction anatomique des différentes lésions ostéoarticulaires laisse une grande place aux ostéosynthèses internes. Les fractures ouvertes avec lésions associées des parties molles doivent bénéficier de solutions réglant à la fois les problèmes osseux, mais aussi musculaires, vasculaires, nerveux et cutanés. Pseudarthroses, cals vicieux et synostoses peuvent venir compliquer l’évolution de ces fractures, avec à terme un risque d’enraidissement du coude et du poignet. Les lésions osseuses de l’avant-bras ne doivent pas faire oublier la fréquence des lésions articulaires associées. © 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots-clés : fractures simultanées des deux os, fracture isolée de l’ulna, fracture de Monteggia, fracture isolée du radius, fracture de Galeazzi, luxation de la tête radiale, dislocation de la radio-ulnaire distale, ostéosynthèses, cals vicieux, synostose. Introduction Les fractures diaphysaires d’un ou des deux os de l’avant-bras ont la particularité d’affecter un des maillons essentiels de la chaîne polyarticulaire du membre supérieur, doté globalement de sept degrés de liberté. Ainsi, la survenue de telles fractures peut-elle mettre en jeu la précision d’une mécanique fine : celle du positionnement précis de la main dans l’espace, en raison du risque de perturbation des mouvements de pronosupination. L’amplitude complète de ces rotations axiales de l’avant-bras nécessite en effet l’intégrité de nombreux composants anatomiques, certes osseux, mais aussi articulaires, ligamentaires et musculaires. La prise en charge d’une fracture de l’avant-bras requiert un diagnostic lésionnel complet avant d’envisager une solution thérapeutique adaptée, en sachant d’emblée que le traitement de ces lésions reste quasi exclusivement chirurgical. On admet actuellement que le pronostic de toute fracture ne dépend pas uniquement des lésions osseuses, mais bien aussi de l’état des parties molles environnantes. Cette notion, devenue classique, se vérifie à l’avant-bras plus qu’ailleurs. En effet, l’anatomie complexe du segment antibrachial crée des problèmes thérapeutiques spécifiques non retrouvés dans le traitement des fractures diaphysaires des autres os longs. Rappels anatomophysiologiques Le squelette antibrachial est constitué de deux os longs : le radius en dehors et l’ulna en dedans. En position anatomique dite de référence, c’est-à-dire en supination, les deux diaphyses, alors parallèles, délimitent un espace interosseux. En revanche, lors de la pronation, cet espace s’efface du fait du contact entre les deux diaphyses, le radius précroisant l’ulna. Les épiphyses de chaque os s’articulant transversalement entre elles donnent les articulations radio-ulnaire proximale et radio-ulnaire distale ; ainsi se trouve constitué un véritable cadre ostéoarticulaire radio-ulnaire de l’avant-bras. RADIUS Diaphyse radiale Elle présente dans son ensemble une double courbure concave à la fois en avant et en dedans : – dans le plan frontal, la diaphyse radiale apparaît globalement concave en dedans, donnant la classique courbure pronatrice du radius, courbure indispensable à l’enroulement du radius autour de l’ulna lors de la pronation, les deux os ne devant entrer en contact l’un avec l’autre, en « collision », qu’en fin de mouvement. Une observation plus détaillée permet d’individualiser au radius trois segments : un segment proximal représenté par le col, oblique en bas et en dedans, un segment moyen oblique en bas et en dehors, et enfin un segment distal à nouveau oblique en bas et en dedans. Le radius revêt ainsi la forme d’une manivelle (fig 1), schéma devenu classique et décrit initialement par Kapandji [34] . En perturbant ces différentes courbures, un cal vicieux de la diaphyse radiale peut provoquer une collision prématurée des deux os de l’avant-bras, et limiter ainsi l’amplitude de la pronosupination ; Christian Lefèvre : Professeur, chef de service. Dominique Le Nen : Professeur. Frédéric Dubrana : Praticien hospitalier. Éric Stindel : praticien hospitalier. Weiguo Hu : Professeur associé. Centre hospitalier régional et universitaire, hôpital La Cavale Blanche, boulevard Tanguy-Prigent, 29609 Brest cedex, France. Encyclopédie Médico-Chirurgicale 14-044-A-10 14-044-A-10 Toute référence à cet article doit porter la mention : Lefevre Ch, Le Nen D, Dubrana F, Stindel E et Hu W. Fractures diaphysaires des deux os de l’avant-bras chez l’adulte. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Appareil locomoteur, 14-044-A-10, 2003, 15 p.

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Fractures diaphysaires des deux osde l’avant-bras chez l’adulte

Ch LefevreD Le NenF DubranaE StindelW Hu

Résumé. – Les fractures de l’avant-bras sont classiquement représentées par les fractures atteignantsimultanément les deux os, ou séparément chacun d’eux. Les fractures diaphysaires d’un seul oss’accompagnent volontiers de lésions ligamentaires et articulaires affectant les extrémités de l’os voisin,définissant ainsi les fractures de Monteggia (fracture de l’ulna et luxation de la tête radiale) et de Galeazzi(fracture du radius et dislocation de l’articulation radio-ulnaire distale). En mettant en cause les mouvementsde pronosupination, ces différentes lésions ont la réputation d’un pronostic fonctionnel réservé ; hormis lesfractures peu déplacées qui peuvent répondre à des traitements non chirurgicaux, la nécessité d’une réductionanatomique des différentes lésions ostéoarticulaires laisse une grande place aux ostéosynthèses internes. Lesfractures ouvertes avec lésions associées des parties molles doivent bénéficier de solutions réglant à la fois lesproblèmes osseux, mais aussi musculaires, vasculaires, nerveux et cutanés. Pseudarthroses, cals vicieux etsynostoses peuvent venir compliquer l’évolution de ces fractures, avec à terme un risque d’enraidissement ducoude et du poignet. Les lésions osseuses de l’avant-bras ne doivent pas faire oublier la fréquence des lésionsarticulaires associées.© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : fractures simultanées des deux os, fracture isolée de l’ulna, fracture de Monteggia, fracture isoléedu radius, fracture de Galeazzi, luxation de la tête radiale, dislocation de la radio-ulnaire distale,ostéosynthèses, cals vicieux, synostose.

Introduction

Les fractures diaphysaires d’un ou des deux os de l’avant-bras ontla particularité d’affecter un des maillons essentiels de la chaînepolyarticulaire du membre supérieur, doté globalement de septdegrés de liberté. Ainsi, la survenue de telles fractures peut-ellemettre en jeu la précision d’une mécanique fine : celle dupositionnement précis de la main dans l’espace, en raison du risquede perturbation des mouvements de pronosupination. L’amplitudecomplète de ces rotations axiales de l’avant-bras nécessite en effetl’intégrité de nombreux composants anatomiques, certes osseux,mais aussi articulaires, ligamentaires et musculaires.

La prise en charge d’une fracture de l’avant-bras requiert undiagnostic lésionnel complet avant d’envisager une solutionthérapeutique adaptée, en sachant d’emblée que le traitement de ceslésions reste quasi exclusivement chirurgical.

On admet actuellement que le pronostic de toute fracture ne dépendpas uniquement des lésions osseuses, mais bien aussi de l’état desparties molles environnantes. Cette notion, devenue classique, sevérifie à l’avant-bras plus qu’ailleurs. En effet, l’anatomie complexedu segment antibrachial crée des problèmes thérapeutiquesspécifiques non retrouvés dans le traitement des fracturesdiaphysaires des autres os longs.

Rappels anatomophysiologiques

Le squelette antibrachial est constitué de deux os longs : le radius endehors et l’ulna en dedans. En position anatomique dite deréférence, c’est-à-dire en supination, les deux diaphyses, alorsparallèles, délimitent un espace interosseux. En revanche, lors de lapronation, cet espace s’efface du fait du contact entre les deuxdiaphyses, le radius précroisant l’ulna. Les épiphyses de chaque oss’articulant transversalement entre elles donnent les articulationsradio-ulnaire proximale et radio-ulnaire distale ; ainsi se trouveconstitué un véritable cadre ostéoarticulaire radio-ulnaire del’avant-bras.

RADIUS

¶ Diaphyse radialeElle présente dans son ensemble une double courbure concave à lafois en avant et en dedans :

– dans le plan frontal, la diaphyse radiale apparaît globalementconcave en dedans, donnant la classique courbure pronatrice duradius, courbure indispensable à l’enroulement du radius autour del’ulna lors de la pronation, les deux os ne devant entrer en contactl’un avec l’autre, en « collision », qu’en fin de mouvement. Uneobservation plus détaillée permet d’individualiser au radius troissegments : un segment proximal représenté par le col, oblique enbas et en dedans, un segment moyen oblique en bas et en dehors, etenfin un segment distal à nouveau oblique en bas et en dedans. Leradius revêt ainsi la forme d’une manivelle (fig 1), schéma devenuclassique et décrit initialement par Kapandji [34]. En perturbant cesdifférentes courbures, un cal vicieux de la diaphyse radiale peutprovoquer une collision prématurée des deux os de l’avant-bras, etlimiter ainsi l’amplitude de la pronosupination ;

Christian Lefèvre : Professeur, chef de service.Dominique Le Nen : Professeur.Frédéric Dubrana : Praticien hospitalier.Éric Stindel : praticien hospitalier.Weiguo Hu : Professeur associé.Centre hospitalier régional et universitaire, hôpital La Cavale Blanche, boulevard Tanguy-Prigent,29609 Brest cedex, France.

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Lefevre Ch, Le Nen D, Dubrana F, Stindel E et Hu W. Fractures diaphysaires des deux os de l’avant-bras chez l’adulte. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales ElsevierSAS, Paris, tous droits réservés), Appareil locomoteur, 14-044-A-10, 2003, 15 p.

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– dans le plan sagittal, la diaphyse radiale apparaît légèrementconcave en avant. Sa face antérieure, relativement plane, se prêtefacilement à la mise en place d’une plaque d’ostéosynthèse ;

– la forme du canal médullaire du radius est unique en son genre etne présente pas la symétrie habituelle des canaux médullaires desos longs, avec notamment une portion centrale médiodiaphysairerétrécie en « sablier ». Dans son ensemble, la cavité médullaire revêten effet la forme d’un tronc de cône, à sommet proximal et à basedistale, et dont l’axe incurvé suit la courbure pronatrice de l’os. Unetelle configuration rend a priori difficile une ostéosynthèse par clouintramédullaire. En effet, un tuteur droit classique risquerait deréduire, voire d’effacer cette courbure pronatrice ; de plus, il n’auraitqu’un contact très partiel avec les parois du canal médullaire, dumoins dans toute sa moitié distale. Une telle situation favoriserait lasurvenue de cals vicieux angulaires ou rotatoires. Vouloir utiliserune ostéosynthèse endomédullaire tout en respectant la courburediaphysaire implique d’utiliser un implant préformé, adapté à lacourbure anatomique du radius.

¶ Épiphyses radiales

Elles sont très différentes l’une de l’autre :

– l’épiphyse proximale, profondément située sous les massesmusculaires, porte la tête radiale entièrement recouverte de cartilagearticulaire ; ce contexte anatomique exclut toute possibilitéd’ostéosynthèse intramédullaire par cette extrémité ;

– l’épiphyse distale, beaucoup plus massive, et surtout plussuperficielle sur ses faces dorsale et latérale, autorise en revanchel’implantation d’une broche ou d’un clou, soit par voie dorsale dansla masse osseuse du tubercule de Lister, soit par voie latéralestyloïdienne, en gardant à l’esprit la présence des tendons desdifférents compartiments du poignet.

ULNA

¶ Diaphyse ulnaire

Contrairement à ce qui est fréquemment admis, la diaphyse ulnairen’est ni strictement rectiligne, ni fixe lors des mouvements depronosupination (fig 2) :

– dans le plan frontal, la diaphyse présente une double courburedonnant la forme d’un S allongé, avec une convexité latérale dans lamoitié proximale et une convexité médiale dans la moitié distale.Sommets et courbures ulnaires apparaissent finalement moinsmarqués mais inversés par rapport au radius ;

– dans le plan sagittal, l’ulna apparaît globalement convexe enarrière, le rayon de la courbure devenant plus petit dans le tiersdistal ;

– la face postérieure de la diaphyse est marquée par une crêtemédiane superficielle, palpable sous la peau, et qui sépare unefacette latérale d’une facette médiale, excavée et superficielle, dontl’accès aisé permet la mise en place sans difficulté d’une plaqued’ostéosynthèse. La présence de ces facettes, uniquement dans lamoitié proximale de l’os, explique sa section triangulaire dans cetteportion, alors qu’il devient cylindrique dans sa moitié distale ;

– le canal médullaire ulnaire décrit une forme sinueuse, épousantles courbures décrites plus haut. Large dans sa portion proximale,olécranienne, il devient rapidement étroit et de calibre relativementconstant (autour de 4 à 6 mm) dans les deux tiers distaux, où lescorticales diaphysaires restent épaisses. La réalisation de l’alésaged’un tel canal nécessite le recours à des aléseurs souples et trèstranchants montés sur un guide. En effet, des aléseurs rigides pleinssont ici à proscrire, car trop dangereux du fait du risque de fausseroute.

1 Manivelle radiale et ses muscles moteurs, selon Kapandji. Deux muscles longs : bi-ceps (B) et rond pronateur (RP) ; deux muscles courts : supinateur (S) et carré prona-teur (CP).

2 Déplacements des extrémités distales du radius et del’ulna de la supination active à la pronation active (palettehumérale recalée) (laboratoire de traitement de l’informa-tion médicale (la TIM) : Allaire S, Jacq JJ, Colin D).

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¶ Épiphyses ulnaires

Elles sont très différentes l’une de l’autre, avec, à l’inverse du radius,une épiphyse proximale volumineuse et une distale fine :

– l’épiphyse proximale porte l’olécrane situé dans l’axe longitudinalde la diaphyse. Extra-articulaire, le sommet olécranien demeureanatomiquement le site de prédilection pour la mise en place d’unimplant intramédullaire, qu’il s’agisse de broche(s) ou de clou ;

– l’épiphyse distale porte la tête de l’ulna, entièrement recouvertede cartilage sur ses faces périphérique et distale. Cette tête articulairedevient ainsi impliquée dans l’articulation radio-ulnaire distale, maisaussi dans l’articulation du poignet. Ce contexte anatomique rendpeu acceptable l’utilisation de cette épiphyse pour introduire unimplant intramédullaire. Bien qu’ayant été décrite [73], cette voied’abord semble tout de même très agressive vis-à-vis du poignet.

MEMBRANE INTEROSSEUSE

Étendue sur toute la hauteur de l’espace interosseux, la membraneinterosseuse définit schématiquement la portion réellementdiaphysaire de chacun des deux os. Cette membrane est constituéede fibres disposées en deux plans croisés : un plan antérieurprincipal, oblique en bas et en dedans, et un plan postérieuraccessoire, oblique en haut et en dedans. La portion moyenne duplan antérieur, correspondant à sa plus grande largeur (3,5 cm),apparaît pratiquement deux fois plus épaisse pour constituer enréalité un véritable ligament interosseux assurant la part essentiellede la stabilité longitudinale des deux os de l’avant-bras, certes dansles conditions physiologiques habituelles, mais aussi et surtout aprèsrésection de la tête radiale [49]. La section expérimentale de celigament [2], ou en pratique clinique sa rupture, diminuent en réalitéde 71 % la stabilité longitudinale du squelette antibrachial, alors queles mêmes lésions en zone proximale ou distale de la membrane neréduisent que de 11 % cette stabilité. Tendue à la fois en pronation eten supination, la membrane interosseuse reste l’élément passifessentiel du freinage de l’amplitude de la supination ; un cal vicieuxdiaphysaire rotatoire, notamment du radius, peut donc devenirresponsable d’une diminution de la supination en raison d’une miseen tension prématurée de la membrane.Au total, la membrane interosseuse assure une double fonction : sielle empêche tout diastasis entre radius et ulna, elle transmetégalement les forces axiales de traction ou de compression le longde l’avant-bras [28, 64]. Sa rupture, secondaire à des fractures étenduesde l’avant-bras, explique la survenue de conséquences fonctionnellesparfois majeures, tant au coude qu’au poignet, comme on peut enrencontrer dans le syndrome d’Essex-Lopresti, associant fracture dela tête radiale, lésion de la membrane interosseuse, atteinte de laradio-ulnaire distale.

ARTICULATIONS RADIO-ULNAIRES

Fonctionnellement, le concept d’axe antibrachial ou d’articulationantibrachiale (forearm axis ou forearm joint des Anglo-Saxons) a étédéveloppé pour mettre en avant l’idée de relation entre anatomie etbiomécanique du coude, de l’avant-bras et du poignet, pour enarriver à une notion d’entité anatomofonctionnelle. Afin d’illustrercette relation structure-fonction, Graham [28] a proposé une analogiesimple en utilisant l’image d’un seau et de son anse, assimilant leseau à l’ulna et l’anse au radius. Les fixations de l’anse étantassimilables aux articulations radio-ulnaires proximale et distale, oncomprend que leur bon fonctionnement nécessite le maintien de leurparallélisme (fig 3). Pour Bronstein [12], un raccourcissement duradius de 10 mm réduirait de 47 % la pronation, et de 29 % lasupination.Radius et ulna sont donc articulés entre eux par leurs extrémités :l’articulation radio-ulnaire proximale est principalement stabiliséepar les ligaments annulaire et carré, mais aussi par la capsulearticulaire du coude, ce qui la rend fonctionnellement liée auxarticulations huméroradiale et huméro-ulnaire.Par ailleurs, si l’articulation radio-ulnaire distale a pour stabilisateurprincipal le ligament triangulaire, elle est aussi renforcée en avantpar un ligament ventral (dont la rétraction limite la supination) et

en arrière par un ligament dorsal (dont la rétraction limite lapronation). L’articulation radio-ulnaire distale est de plus liée aupoignet par de nombreux faisceaux ligamentaires radiocarpiensventraux et dorsaux.Ces réalités anatomofonctionnelles permettent de mieux comprendrele pronostic fonctionnel réservé de certaines fracturesdiaphysoépiphysaires de l’avant-bras, mais aussi des associationslésionnelles très fréquentes (fractures diaphysaires-lésionsarticulaires), pourvoyeuses à terme de raideurs du coude ou dupoignet, voire des deux simultanément en cas de traumatismesgraves et étendus.

MUSCLES

Si un grand nombre de muscles occupent les différentes loges del’avant-bras, seuls trois d’entre eux pontent l’espace interosseux etsolidarisent véritablement le radius à l’ulna pour participer auxmouvements de pronosupination : ce sont le supinateur, le rondpronateur et le carré pronateur. Le tonus de ces trois musclesfavorisant le rapprochement des deux os explique la tendance à unediminution de cet espace lors de toute fracture diaphysaire del’avant-bras.Il existe un réel équilibre musculaire de la pronosupination, puisquepour contrebalancer les deux pronateurs (rond et carré), on trouvedeux supinateurs : le supinateur proprement dit (anciennementnommé court supinateur), doublé d’un supinateur puissant : lebiceps brachial. Par ailleurs pour chacun des deux mouvements, ilexiste un muscle long et un muscle court : les longs vont tirer sur lesommet de la courbure, pendant que les courts vont dérouler l’unedes branches de la manivelle radiale de Kapandji. Ainsi pour lasupination, le supinateur inséré sur le col du radius va dérouler cesegment, tandis que le biceps inséré sur la tubérosité radiale tire defaçon permanente sur le sommet de la courbure supinatrice. Pour lapronation, le carré pronateur déroule l’ulna par rapport au radius,tandis que le rond pronateur inséré au sommet de la courburepronatrice va agir par traction (fig 1).Lors d’une fracture diaphysaire des deux os de l’avant-bras, leniveau du foyer de fracture radiale détermine les déplacements enrotation des fragments diaphysaires, expliquant ainsi la sémiologieobservée au poignet et à la main. Cette explication est d’ordreanatomique ; les déplacements sont en effet directement fonction dusiège du trait de fracture par rapport aux insertions musculaires surla diaphyse radiale (fig 4). Ainsi, lors d’une fracture proximale entreles insertions du supinateur et celles du rond pronateur, l’actionconjuguée du biceps et du supinateur entraîne une rotation latérale,ou supination, du fragment radial proximal, tandis que le fragmentdistal reste en rotation médiale, ou pronation, sous l’action du rondpronateur. En revanche, dans le cas d’une fracture située sousl’insertion du rond pronateur, l’action combinée du biceps et dusupinateur reste partiellement neutralisée par celle du rondpronateur, ce qui met le fragment proximal en très discrètesupination, voire même le plus souvent en position neutre.Étant insérés de part et d’autre de la crête postérieure de l’ulna, lestendons des fléchisseur et extenseur ulnaires du carpe laissent

3 Schéma proposé parGraham, assimilant le ra-dius à l’anse d’un seau, etl’ulna au rebord du seau.

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celle-ci superficielle et sous-cutanée. Cette situation anatomiqueexplique l’abord postérieur devenu classique de la diaphyse, à 3 mmen dedans de la crête ; la plaque d’ostéosynthèse ainsi enfouie sousla masse musculaire reste à distance du foyer de fracture radial.

À l’inverse, l’abord de la totalité de la diaphyse radiale esthabituellement antérieur. Décrite initialement par Henry, cette voieprésente l’avantage d’être peu délabrante : en utilisant les défilésmusculaires naturels de la loge antérieure de l’avant-bras, l’accès àla face antérieure plane du radius respecte au mieux en effet lesstructures anatomiques, tout en rendant aisée la mise en place d’uneplaque vissée, et ce, malgré l’importance du volume des massesmusculaires.

Épidémiologie

Dans une étude sur l’épidémiologie des fractures chez15 000 adultes, Singer [75] a signalé l’incidence relativement basse desfractures diaphysaires de l’avant-bras, touchant de 0 à 4 pour10 000 personnes par an ; en revanche, cette étude mentionne untaux nettement plus élevé de ces fractures chez les hommes de 15 à44 ans.

Ces fractures affectent classiquement deux populations biendifférentes : majoritairement des hommes jeunes de 30 ans, dont lerisque de survenue est cinq fois plus élevé que pour une femme deplus de 60 ans.

Selon McQueen [51], l’étiologie la plus fréquente reste la chute de sapropre hauteur (35 %), suivie du choc direct (30 %), et enfin lesaccidents de la route (23 %), avec une répartition très inégale entreles piétons renversés (19 %), et les passagers des véhicules (4 %).L’augmentation de la traumatologie routière est à l’origine detraumatismes à haute énergie, responsables de situations complexesde plus en plus fréquentes, associant fracas osseux et lésions desparties molles. En définitive, 8 % seulement des fractures seraientliées au sport, et les 4 % restants secondaires à des chutes de lieuxélevés et à des raisons diverses.

Mécanisme

Deux types de mécanismes s’opposent : les chocs directs etperpendiculaires à l’avant-bras, en règle à l’origine de lésionsosseuses isolées. À l’opposé, les contraintes axiales associent à desdegrés divers aux lésions osseuses, atteinte de la membraneinterosseuse et dislocations radio-ulnaires [35].Très souvent en cause, le choc direct est parfois difficile à retrouver,notamment dans le cadre de la traumatologie routière, où la violencedu traumatisme rend le blessé incapable de fournir des précisionsconcernant son accident. Plus facile à mettre en évidence etinitialement décrit par Monteggia, le coup de bâton ou de matraquesur un avant-bras mis en position de protection du visage serait àl’origine de la plupart des fractures isolées de l’ulna [2]. L’ouverturecutanée est en règle secondaire à un traumatisme à haute énergie,mais parfois à un coup de fusil, ou encore à un accident d’airbag àl’origine de fractures bilatérales, comme cela a été décrit plusrécemment [43].

Classifications

CLASSIFICATION DES LÉSIONS OSSEUSES

La difficulté de classer des fractures, quel qu’en soit le site, résidedans le choix des critères retenus. Si l’intérêt théorique de cesderniers est d’apporter une valeur pronostique, ils sont en réalitérarement utilisables en pratique clinique, puisque le pronostic d’unefracture dépend finalement au moins autant du patient, duchirurgien et de la technique chirurgicale utilisée, que du type oudu mécanisme de la fracture initiale.De nombreuses classifications ont été proposées ; certaines ont utilisédes éponymes en faisant référence aux auteurs ayant décrit certainesvariétés de fractures. Ainsi l’association fracture diaphysaire del’ulna et luxation de la tête radiale a été décrite pour la premièrefois par Monteggia en1814, et est connue depuis comme la fracturede Monteggia. De la même façon, la fracture isolée du tiers distal duradius associée à une dislocation de la radio-ulnaire distale a étéindividualisée par plusieurs auteurs dont Galeazzi en 1934. Lafracture isolée de la diaphyse ulnaire sans autre lésion associée aparfois été dénommée fracture par coup de bâton ou de matraque(nightstick des Anglo-Saxons). On peut remarquer qu’il n’existe pasd’éponyme concernant les fractures des deux os de l’avant-bras.Différents auteurs ont tenté de distinguer les fractures selon le typede trait (transversal, oblique, spiroïde …), ou selon le niveau desfoyers fracturaires, selon l’importance des déplacements, ou laprésence ou non de comminution, de perte segmentaire de substanceosseuse ou de fractures épiphysaires associées. À ce sujet, la divisionen trois tiers de l’avant-bras a pu être proposée, mais cetteclassification semble « réductrice » pour l’étude des fracturesdiaphysaires proprement dites, notamment si l’on se réfère au carréépiphysaire de Heim qui nous semble bien approprié pour fixer leslimites des zones diaphysaires. Rappelons que cette méthodedélimite chaque extrémité osseuse dans un carré dont les côtéslatéraux et parallèles à l’axe de l’os sont de longueur égale à lalargeur maximale de l’épiphyse. Concernant les deux os de l’avant-bras, il conviendra de considérer comme côté du carré la largeurglobale des deux épiphyses articulées entre elles (fig 5).Finalement, bien que décriée par certains qui lui ont reproché unecertaine complexité, la classification des fractures des os longsproposée par l’AO depuis 1990 reste actuellement une des plusutilisées dans de nombreuses publications. Appliqués de la mêmefaçon pour toute fracture diaphysaire, ses principes systématiqueset logiques en facilitent la reproductibilité. Trois groupes sontindividualisés : le groupe A classe les fractures simples, le groupe Bles fractures à fragments intermédiaires en coin, et le groupe Créunit les fractures complexes. Trois sous-groupes numérotés 1, 2, 3comprennent chacun trois types différents de fractures. Tous lestypes de fractures sont ainsi représentés sur la figure 6. Les fracturessimultanées des deux os sont ainsi des sous-groupes A3, B3, C3,C1(2 et 3), et C2 (2 et 3), les autres types correspondent aux fracturesisolées, soit du radius, soit de l’ulna [61].

4 Déplacement des frag-ments osseux selon le siègedu trait de fracture radial(d’après Kapandji). 1. supi-nation ; 2. pronation ; 3.semi-supination ; 4. semi-pronation.

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Si cette classification AO inclut les fractures de Monteggia ou deGaleazzi, la classification proposée par Bado [7] en 1967 pour uneanalyse plus concise des fractures de Monteggia paraît toujoursintéressante, car correspondant à des réalités cliniques en classantles associations lésionnelles selon le déplacement de la tête radiale(fig 7).

CLASSIFICATION DES LÉSIONS DES PARTIES MOLLES

¶ Dans les fractures ouvertes

Pouvoir évaluer la gravité de l’atteinte des parties mollespérifracturaires est d’un intérêt pronostique évident, mais ladifficulté dans ce domaine réside dans l’aggravation secondairetoujours possible des lésions observées initialement. La classificationde Gustilo [30], initialement proposée pour les fractures de jambe, aété par la suite étendue au reste du squelette. En distinguant troisgroupes de lésions de gravité croissante avec des sous-groupes dansle groupe 3, cette classification est théoriquement plus précise quecelle de Cauchoix et Duparc. Mais en pratique clinique, laclassification de Gustilo s’avère assez délicate à utiliser en urgenceet nécessite en réalité un temps d’exploration chirurgicale, ce quifait qu’au stade clinique initial, la classification de Cauchoix restetrès utilisée, notamment en France. Tscherne a proposé uneclassification ajoutant aux trois stades de Gustilo un quatrièmecomprenant les amputations subtotales ou totales. L’AO proposeune classification toujours assez semblable à celle de Gustilo, maisen insistant plus sur les lésions d’avulsion et de décollement.

¶ Dans les fractures fermées

Plus encore que pour une fracture ouverte, l’appréciation de lagravité de l’atteinte des parties molles lors d’un traumatisme fermé

A1 1 2 3

1 2 3

1 2 3

1 2 3

1 2 3

1 2 3

1 2 3

1 2 3

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A2

A3

B1

B2

B3

C1

C2

C3

A B C6 Classification AO desfractures diaphysaires desdeux os de l’avant-bras (surfond orangé : fractures si-multanées des deux os).

5 Délimitation des zones diaphysaires de l’avant-brasd’après la méthode des carrés épiphysaires de Heim.

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de l’avant-bras demeure d’une réelle difficulté. La classification laplus connue dans ce domaine est certainement celle d’Oestern etTscherne [59], basée sur les lésions cutanéomusculaires, la gravité dela fracture, l’existence d’un décollement, de lésions vasculaires, oula présence d’un syndrome de loge aigu. Cette classificationconserve indéniablement un intérêt pronostique. L’AO a proposéquant à elle une classification plus orientée sur les lésions cutanées,musculaires et neurovasculaires.

Clinique

BILAN DIAGNOSTIQUE INITIAL

Selon les possibilités du blessé, l’interrogatoire s’attache à fairepréciser les circonstances du traumatisme ou de l’accident afin dedégager les notions de compression appuyée ou d’énergietraumatique qui facilitent parfois le bilan lésionnel initial etl’évaluation pronostique ultérieure.Contrairement à ce qui est souvent observé chez l’enfant quiprésente habituellement des fractures incomplètes ou en bois vert,les fractures non déplacées de l’avant-bras sont rares chez l’adulte,chez qui le périoste n’est plus une réalité mécanique. Dans le cadredes fractures simultanées des deux os, l’importance du traumatismeinitial est généralement suffisante pour entraîner un déplacementcliniquement visible, ce qui rend a priori le diagnostic évident. Letableau associe à des degrés divers douleurs, déformation etimpotence fonctionnelle de l’avant-bras. À cette étape cliniqueinitiale, seules les lésions d’un seul os peuvent poser des problèmesdiagnostiques ; rappelons la discrétion, voire l’absence de signescliniques d’une luxation de la tête radiale, trop souvent encore àl’origine d’oublis et d’erreurs diagnostiques…La palpation le long de la crête postérieure ulnaire peut réveiller lasensibilité d’un foyer de fracture. Il existe souvent un certainœdème, dont l’importance est liée à la fois au type de traumatismeinitial (contusion appuyée), et au délai écoulé entre l’accident et lemoment de l’examen. Il est inutile de rechercher une crépitation quine peut qu’être douloureuse et aggraver les dégâts des partiesmolles. Il est en revanche indispensable de tester de façonméthodique la motricité et la sensibilité du radial, du médian et del’ulnaire ; ici encore des tests simples doivent éviter tout inconfortau patient. Parallèlement, la recherche des pouls distaux etcapillaires renseigne sur une éventuelle compression, qui peutparfois être levée par simple manœuvre d’alignement de l’avant-bras : cette manœuvre de réduction permet de stabiliser ensuite lemembre dans une attelle provisoire qui soulage rapidement leblessé.Les fractures ouvertes doivent inciter à encore plus de vigilance dansla recherche de lésions vasculaires ou nerveuses associées ; mais ilest inutile, voire dangereux, de vouloir mener aux urgences unexamen clinique initial approfondi, qui ne peut que majorer le risque

infectieux. Il est préférable dans ce cas d’envelopper le membre dansun champ stérile et de poursuivre secondairement l’exploration deslésions en bloc chirurgical aseptique.Dans tous les cas, l’examen clinique est complété d’un bilanradiographique dont on connaît les difficultés de réalisation. Il estabsolument impératif de visualiser la totalité du squeletteantibrachial, avec les articulations radio-ulnaires proximale etdistale, et de disposer d’incidences orthogonales, si possible de faceet de profil. Ces conditions étant rarement réunies, il ne faut pashésiter à compléter au besoin ce bilan par de nouveaux clichés prissous anesthésie pour permettre une analyse précise des lésions : leurtype (fracture, luxation, diastasis, déplacements, troublesrotationnels…), leur nombre, leur étendue, en n’oubliant pas leurniveau : vérifier à ce sujet le coude, le poignet et la main. L’objectifest de disposer à terme d’un bilan lésionnel complet et précis, quiseul permet d’opter pour une solution thérapeutique adaptée.

ÉVOLUTION

¶ Guérison

Malgré un traitement bien conduit, les fractures diaphysaires del’avant-bras nécessitent bien souvent un délai d’au moins 3 moispour consolider, du moins au sens mécanique du terme, et non ausens radiologique où le terme de « consolidation » est utilisé dèsl’apparition d’une image de cal, devant la densité d’une image apriori rassurante, mais qui ne correspond pas nécessairement à uneréalité mécanique. Cette situation doit être expliquée au patient pourl’inciter à une certaine prudence durant les 2 à 3 mois après ladite« consolidation » radiologique, et lui éviter une fracture itérative.

¶ Complications

La survenue d’une complication retarde toujours les délais deconsolidation. Selon leur délai d’apparition, il est classique dedistinguer les complications immédiates, puis secondaires, et enfintardives.

Complications immédiates

Les compressions vasculaires et nerveuses sont un risque réel desfractures de l’avant-bras, comme celles de la jambe, et pour lesmêmes raisons anatomiques ; à savoir la présence de deux os, d’unemembrane interosseuse, et de nombreux fascias compartimentant lesloges musculaires. La disparition des pouls périphériques peut êtreliée à une compression en rapport avec la déformation de l’avant-bras, auquel cas une simple manœuvre d’alignement du membrepeut suffire à lever la compression et à obtenir à nouveau unecirculation périphérique. En revanche, un avant-bras tendu parl’œdème doit faire penser à un syndrome de loges, peut-être déjàprésent ou en train de se développer, surtout en cas de fracturessimultanées des deux os de l’avant-bras, de syndrome d’écrasement,de traumatismes par arme à feu ou à haute énergie. Eaton et

7 Classification de Bado des fractures de Monteggia.A. Type 1.B. Type 2.C. Type 3.D. Type 4.

*A *B *C

*D

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Green [21] ont insisté sur la valeur diagnostique d’une douleurprovoquée lors de l’extension passive des doigts, et d’une indurationpalpable du compartiment des fléchisseurs de l’avant-bras. Cesauteurs ont également rappelé que l’absence de pouls radial n’étaitpas un critère de certitude diagnostique, puisqu’ils en avaientconstaté l’absence seulement chez cinq patients sur une série de19 syndromes de loges. Le simple fait d’évoquer le diagnostic desyndrome de loges dans un contexte clinique incertain justifie uneprise des mesures de pression des loges musculaires, en comparantau besoin avec le côté opposé [52]. Cette attitude est également fondéedevant un patient inconscient ou confus chez qui on suspecte un teldiagnostic, en sachant qu’une pression égale ou supérieure à45 mmHg devient une indication de fasciotomie. Dans tous les cas,la confirmation d’un syndrome de loges doit être immédiatementsuivie d’un geste de décompression par aponévrotomies, enn’hésitant pas à étendre la décompression en haut jusqu’au coude eten bas au poignet, jusqu’à ouvrir à ce niveau le rétinaculum desfléchisseurs du carpe.L’ouverture de la fracture est souvent la conséquence d’untraumatisme à haute énergie qui explique la fréquence des lésionsassociées, certes cutanées, mais aussi vasculaires ou nerveuses. Lesvaisseaux et les nerfs peuvent être comprimés, mais on observe plussouvent dans ce contexte des lésions à type de plaies, voire desections, qui demandent des gestes de réparation chirurgicale aprèsrepérage soigneux des extrémités vasculaires ou nerveuses.L’ouverture des foyers de fracture a souvent pour conséquence uneaugmentation du délai de consolidation, en raison de la disparitiondes hématomes périfracturaires, mais surtout d’une certainedévascularisation des extrémités osseuses, en rapport avec deslésions de décollement des parties molles. Par ailleurs, l’ouverturecutanée majore à l’évidence les risques de surinfection secondaire.Enfin des lésions majeures d’écrasement de membre, parfois au-dessus de toute possibilité conservatrice, peuvent exception-nellement faire discuter une amputation d’emblée.

Complications secondaires

L’infection secondaire reste toujours une complication redoutablepar les conséquences qu’elle peut elle-même engendrer : à savoir lesretards de consolidation et les raideurs. La survenue d’une infectionà quelques semaines de l’accident initial impose un nettoyagechirurgical, mais sans ablation du matériel d’ostéosynthèse en place.L’immobilisation plâtrée peut être à l’origine de deux types decomplications, en fait liées à l’œdème périfracturaire ; la première, àcause de son augmentation initiale, à type de compression pouvantaller jusqu’à un syndrome de loges, la deuxième, à cause de sadiminution secondaire. Il s’ensuit alors une contention de moindrequalité avec un risque de déplacement secondaire si l’immobilisationplâtrée a été le seul moyen de contention choisi. L’importance decertains de ces déplacements explique la possibilité d’escarres sousplâtre avec risque d’infection surajoutée.La constatation d’une paralysie secondaire est toujours redoutable,car malheureusement souvent en rapport avec le geste chirurgical.Cette complication concerne presque toujours le nerf radial, qui peutêtre comprimé en postopératoire par un œdème ou un hématomelors de la traversée du supinateur, ou encore après une fautetechnique (nerf placé sous une plaque ou sectionné). Si l’atteinte desa branche motrice s’observe après abord antérieur de son tiersproximal, celle de sa branche sensitive est favorisée par un abordpostérieur de sa moitié distale. Une simple neurapraxie doitrécupérer en quelques semaines : si aucun signe de récupérationn’apparaît au bout de 3 mois, une exploration chirurgicale du nerfdevient alors nécessaire.

Complications tardives

Les troubles de la consolidation sont dominés essentiellement parles pseudarthroses et retards de consolidation, et accessoirement parles cals vicieux et les synostoses.

• Pseudarthrose et retard de consolidationSi de plus en plus d’auteurs insistent sur la responsabilité dutabagisme dans l’apparition d’une pseudarthrose, deux facteurs

principaux semblent favoriser les pseudarthroses et retards deconsolidation : le type de la fracture et la qualité du traitementinitial. Il existe ainsi un risque supérieur pour les fractures dugroupe B de l’AO à fragment(s) en coin ou à troisième fragment, etles foyers comminutifs, a fortiori s’ils sont ouverts. Souvent, il fautreconnaître qu’une pseudarthrose ou un simple retard trouvent leurexplication assez logique dans un montage initial en fait inadapté ;les critiques pouvant être faites tant du choix d’un matérield’ostéosynthèse trop instable (l’embrochage centromédullaire,largement utilisé avec succès chez l’enfant, serait plus volontierspourvoyeur de non-consolidation chez l’adulte), que de la réalisationtechnique de l’ostéosynthèse (plaques trop courtes, nombreinsuffisant de vis, absence de contention complémentaire après unmontage précaire…). Indépendantes du sexe et de l’âge, lespseudarthroses diaphysaires de l’ulna sont l’apanage des fracturesdu tiers moyen, dont on connaît la pauvreté de la vascularisation, etde celles à grand déplacement, ouvertes, ou comminutives [11]. Laconstatation d’une absence de cal, ou de son évolution très lente auterme du troisième ou quatrième mois, doit inciter à proposerrapidement une solution chirurgicale, et ne pas attendre des délaisde 6 à 9 mois pour être certain de la survenue d’une consolidationradiologique.

• Cals vicieux

Ils sont toujours secondaires, soit à une insuffisance de réductionavant la mise en place du matériel d’ostéosynthèse, soit à undéplacement secondaire d’un foyer de fracture insuffisammentstabilisé. Qu’ils soient rotatoires ou angulaires, ces cals vicieuxpeuvent entraver l’amplitude de pronosupination, et justifier alorsune ostéotomie correctrice, dont l’indication, et plus encore laréalisation, demeurent souvent difficiles. Dans le but d’évaluer lescals vicieux rotatoires des fractures des deux os de l’avant-bras,Aufauvre et al [ 6 ] ont proposé une méthode de mesuretomodensitométrique des torsions de chaque os, en soulignant desdifficultés de repères fiables pour le radius. Des logicielsinformatiques devraient permettre à l’avenir de pouvoir envisagerdes recalages d’images et d’exploiter ce type de données,manifestement utiles pour l’aide à la décision d’une ostéotomiecorrectrice. Il convient de nuancer le rôle réellement joué par les calsvicieux, toujours visibles et parfois impressionnants sur uneradiographie. Plusieurs études expérimentales ont montré en effetqu’il existait une relative tolérance des cals vicieux angulairesdiaphysaires, selon leur importance bien sûr, mais essentiellementselon leur niveau et accessoirement selon le plan de l’angulation ;ainsi une angulation de 10° radiale ou ulnaire dans n’importe quelplan n’entraînerait pas de diminution significative des rotations. Surle radius, les cals vicieux du tiers distal sont dangereux pour lapronation, tandis que ceux du tiers distal affectent la supination.Sur l’ulna, les angulations du tiers moyen semblent être le plussouvent en cause [47, 70]. Les cals vicieux rotatoires ont la réputationde limiter volontiers les rotations ; Tynan [82]a montré récemmentdans une étude sur pièces cadavériques qu’un cal vicieux isolé etrotatoire de 45° de l’ulna ne diminuait la pronosupination que de20° ! L’intérêt de ces études est de rappeler que les facteurs osseuxne sont pas les seuls en cause dans une limitation de lapronosupination, et que le rôle des parties molles est souventbeaucoup plus important qu’on ne le pense. Ceci a une incidence enpratique clinique : une rééducation fonctionnelle bien suivie doittoujours être proposée au patient avant de lui proposer uneostéotomie correctrice.

• Complications rares

Les synostoses radio-ulnaires résultent de la formation d’un pontosseux développé aux dépens de la membrane interosseuse etbloquant ainsi toute pronosupination. Ces synostoses s’observentélectivement au tiers proximal et au tiers moyen de l’avant-bras etsemblent connaître plusieurs facteurs favorisants : fractures des deuxos situées au même niveau, déchirure de la membrane interosseuse,fractures de Monteggia, fractures comminutives, déplacements desfragments réduisant l’espace interosseux, dislocation desarticulations adjacentes, et immobilisation prolongée. Mais à

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l’inverse, la mobilisation immédiate d’une fracture isolée de l’ulna,pourtant prônée par certains comme technique de traitement, a étéaccusée de favoriser la survenue de synostose [66]. Les traitementschirurgicaux sont également mis en cause, notamment aprèsostéosynthèse par plaques, en cas d’erreurs techniques comme unevoie d’abord unique pour poser les deux plaques, un dépériostageétendu, un passage de mèches trop longues, une mise en place devis trop longues, ou encore après apposition de greffons spongieuxdans l’espace interosseux. Citons enfin comme dernier facteurfavorisant l’existence d’un traumatisme crânien. Ces différentsfacteurs ne sont pas sans rappeler ceux favorisant également lesossifications hétérotopiques [33, 45, 83, 85]. Le blocage des rotations peutêtre d’un réel inconfort pour le patient ; la gravité des conséquencesfonctionnelles étant liée en réalité à l’angle de blocage : si un blocageen supination s’avère très invalidant et peut justifier un traitementchirurgical, la situation la plus tolérable semble être un blocage enposition intermédiaire.

• Adhérences musculaires et tendineusesElles se trouvent parfois associées à des rétractions, entrant alorsdans le cadre d’un syndrome séquellaire de Volkmann. Certainesrétractions affectant les plans musculaires profonds au contact desdiaphyses et de la membrane interosseuse (notamment le fléchisseurprofond des doigts), peuvent nécessiter des gestes de libérationétendus (type Page-Scaglietti), après un bilan des possibilités réellesde récupération fonctionnelle.

• Fractures itératives, ou « refracture » des Anglo-SaxonsParfois observées après l’ablation de plaques vissées [68], Perren [63] adémontré que la raison principale de ces nouvelles fractures n’étaitpas en rapport avec la classique stress protection attribuée à la rigiditéde la plaque, mais qu’elle était bien secondaire à une reconstructioninsuffisante des corticales diaphysaires en rapport avec undépériostage trop étendu et responsable d’une souffrance vasculairede l’os. L’apparition récente sur le marché des nouvelles plaquesLC-DCP devrait diminuer l’incidence de cette complication enautorisant un dépériostage a minima et en préservant ainsi au mieuxla vascularisation osseuse. Cette notion de dépériostage a minima afait développer plus récemment un « fixateur interne », sorte deplaque vissée à contact minimal avec l’os afin d’en préserver aumieux la vascularisation, et dont les résultats préliminaires semblentintéressants [20].

FORMES CLINIQUES

¶ Fractures simultanées des deux osL’existence de deux foyers de fracture explique la fréquence del’œdème et les risques de compressions vasculaires ou nerveuses,ou de survenue d’un syndrome de loges. Contrairement à l’enfant,les fractures sont en règle complètes chez l’adulte, voire à plusieursfragments. Exceptionnellement, des cas de déformation plastiquechez l’adulte ont été décrits dans la littérature [29, 74] ; il s’agissaitd’accidents d’usine en rapport avec des machines rotatives dotéesde courroies de transport. Ce type de lésion, en apparence bénin auniveau osseux, est souvent accompagné d’écrasement des partiesmolles à l’origine de volumineux œdèmes nécessitant unesurveillance. Le traitement de ces lésions reste difficile, car limité àdes manœuvres externes qui ne réduisent jamais parfaitement lescourbures initiales.

¶ Fractures isolées de l’ulna et fractures de MonteggiaLes fractures isolées de l’ulna peuvent être divisées en deux groupesdistincts :

– un groupe où la tête radiale reste en place ; c’est le domaine desfractures par coup de bâton, parmi lesquelles figurent certains typesà risque de non-consolidation : les fractures du tiers moyen(particulièrement celles proches de la jonction avec le tiers distal),les fractures comminutives, les fractures à grand déplacement, pourlesquelles une fixation interne est conseillée [15, 57] ;– le deuxième groupe se rapporte aux fractures de l’ulna associéesà une dislocation de l’articulation radio-ulnaire proximale ou à une

fracture de la tête radiale ; ces lésions entrent dans le cadre desfractures de Monteggia. Rappelons que ces fractures sont classéesen quatre types (cf supra). Ces différents stades répondent à desmécanismes lésionnels très différents [54] :

– le type 1, rencontré chez des sujets plutôt jeunes ou même desenfants, associe donc luxation antérieure de la tête radiale etfracture diaphysaire de l’ulna à angulation antérieure (fig 8). Cetype semble toujours faire l’objet de discussions quant aumécanisme lésionnel. Si historiquement les lésions résultaientd’un choc direct sur le bord ulnaire de l’avant-bras, Evans [23] aévoqué secondairement l’hypothèse d’un traumatisme ou d’unechute sur un avant-bras en hyperpronation, faisant de ce type 1des lésions par mécanisme indirect ; pour étayer cette hypothèse,cet auteur avançait l’argument de la rareté des traces de contusionou d’hématome en regard du bord ulnaire de l’avant-bras. Ilsemble en fait que les deux mécanismes puissent donner ce typede lésions ;– le type 2, combinant une fracture diaphysaire à angulationpostérieure de l’ulna à une luxation postérieure ou postérolatéralede la tête radiale, affecte plutôt la femme d’âge moyen, et réunitsouvent plusieurs lésions : une fracture métaphysoépiphysairecomminutive du tiers proximal de l’ulna isolant un fragment decoronoïde, une luxation-fracture en coin du rebord antérieur de latête radiale ;– le type 3, associant fracture métaphysaire de l’ulna et luxationlatérale ou antérolatérale de la tête radiale, se rencontre autantchez l’adulte que chez l’enfant, et résulterait classiquement d’unmécanisme combinant angulation et rotation, alors qu’il s’agiraitselon Mullick [55] d’un traumatisme en adduction forcée ;– enfin, plus rare, le type 4 apparaît le plus souvent secondaire àun traumatisme violent et direct de l’avant-bras, expliquantl’association des fractures des deux os à une luxation de la têteradiale.

Ces différents types de fractures sont parfois associés à d’autreslésions : fractures du scaphoïde et du radius distal, dislocation ducoude, fractures diaphysaires du radius avec disjonction de la radio-ulnaire distale, ou enfin paralysies notamment du nerf interosseuxpostérieur (en rapport avec le déplacement de la tête radiale), maisaussi des nerfs interosseux antérieur [3], médian et ulnaire.Indépendamment des types lésionnels, les fractures dites deMonteggia ont une symptomatologie commune associant desdouleurs du coude et un blocage de la pronosupination. Lesdéformations observées cliniquement restent bien sûr dépendantes

8 Fracture de Monteg-gia, type 1.

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du type d’angulation de la fracture et de luxation de la tête radiale(antérieure, postérieure, latéralisée…).

¶ Fractures isolées du radius et de Galeazzi

Les fractures isolées du radius peuvent se répartir en trois groupes,selon qu’elles affectent le tiers proximal, le tiers moyen ou le tiersdistal de la diaphyse. Ces groupes partagent en commun uneassociation lésionnelle possible : la dislocation de l’une desarticulations radio-ulnaires.

Fractures du tiers proximal

Les fractures isolées du tiers proximal du radius semblent rares etplus volontiers associées à une fracture diaphysaire de l’ulna aumême niveau, ou à une dislocation de l’une ou l’autre desradio-ulnaires.

Fractures des tiers moyen et distal

En dehors des exceptionnelles fractures isolées médiodiaphysaireset diaphysométaphysaires distales du radius, les fractures du tiersmoyen ou du tiers distal sont plus volontiers associées à unedislocation de l’articulation radio-ulnaire distale (fig 9), mais engardant tout de même à l’esprit la relative rareté de ces associationslésionnelles qui ne représenteraient que 3 à 7 % des fractures del’avant-bras. Galeazzi ayant été le premier auteur à avoir publié unesérie de 18 observations, son nom est resté depuis associé à ce typede lésions. Le mécanisme initial communément admis est un chocdirect dorsoradial sur un avant-bras en pronation forcée, et unpoignet en extension. Ces contraintes seraient même essentiellespour créer une dislocation de la radio-ulnaire distale, dont lapremière étape est réalisée par la rupture du ligament triangulaire.Fracture radiale et lésions ligamentaires de la radio-ulnaire distalesont liées entre elles : en effet, inférieur à 5 mm, le raccourcissementdu radius n’a aucune conséquence sur la radio-ulnaire ; en revanche,dès qu’il excède 10 mm, membrane interosseuse et ligamenttriangulaire sont obligatoirement rompus.L’aspect clinique varie selon la violence du traumatisme initial etl’importance du déplacement lié à la fracture. Si l’on note parfoisdes traces de contusion cutanée en cas de choc direct, l’œdème et ladouleur périfracturaires demeurent des signes constants. La sailliede la tête de l’ulna sous la peau laisse augurer une atteinte de laradio-ulnaire distale.Mudgal et Jupiter [32, 54] ont bien décrit les différentes imagesradiologiques des fractures de Galeazzi associant à des degrésdivers : un raccourcissement du radius par rapport à l’extrémité

distale de l’ulna et un diastasis de l’articulation radio-ulnaire distalebien visibles sur l’incidence de face, alors que sont notés sur le profilune fracture oblique courte du radius associée à un déplacementpostérieur de l’ulna par rapport au radius. La fracture de la base dela styloïde ulnaire, visible sur les deux incidences, est toujours letémoin d’une désinsertion du sommet du ligament triangulaire. Tousces signes au complet traduisent une dislocation de l’articulationradio-ulnaire distale.En dehors des complications habituelles vues plus haut, la séquellemajeure propre aux fractures de Galeazzi, posant parfois desproblèmes thérapeutiques difficiles, est la persistance deperturbations fonctionnelles de la radio-ulnaire distale, qu’il s’agissed’instabilité ou de raideurs à l’origine de dysfonctionnements del’articulation.

¶ Fracture-dislocation bipolaire de l’avant-bras

Décrite initialement par Odena [58], cette lésion grave secondaire àun traumatisme violent a été également analysée par Jupiter [32] quila dénommait « diaphyse radiale flottante ». Il s’agit en réalité de lacombinaison d’une fracture de Monteggia à une fracture deGaleazzi. L’importance des dégâts des parties molles associés à detelles lésions osseuses est à l’origine des 30 % de mauvais résultats àterme.

Traitement

Les fractures des deux os de l’avant-bras font appel à des méthodesthérapeutiques différentes selon leurs types, leur gravité et leursassociations lésionnelles. Il est classique d’opposer les traitementsnon opératoires, dits orthopédiques ou conservateurs des Anglo-Saxons, aux traitements chirurgicaux, ces derniers ayant une placeprépondérante dans ce chapitre, du fait de la nécessité d’obtenir uneréduction précise, qui est a priori le meilleur garant d’une bonneamplitude de la pronosupination.

TRAITEMENT DES FRACTURES RÉCENTES

¶ Traitement des fractures non compliquées des deux os

Traitements non chirurgicaux

Les différents traitements non opératoires ont habituellement, autravers de la littérature, la réputation de n’aboutir qu’à des résultatsfonctionnels assez médiocres (à l’exception de rares cas de fracturesnon déplacées ou stables) ; ils ont même été accusés, par Charnley [13]

en 1961 puis par McLaughlin en 1965 [50], d’être pourvoyeurs de plusde 27 % de cals vicieux, de pseudarthroses ou de synostoses. Ce sontces travaux qui ont été depuis à l’origine d’une tendance assezgénéralisée au choix de la fixation interne par plaques vissées,malgré la conception d’une solution fonctionnelle et non opératoireproposée par Sarmiento [71] dans les années 1970. Toujours largementutilisée chez l’enfant, l’immobilisation plâtrée, au sens strict duterme selon Boehler, c’est-à-dire bloquant les articulations sus- etsous-jacentes jusqu’à consolidation, n’a pratiquement pasd’indication chez l’adulte à l’heure actuelle. En effet, des fracturesdiaphysaires non déplacées pourront certes consolider dans de tellesconditions, mais le blocage prolongé du coude et du poignet rendplus longue et plus pénible la récupération fonctionnelle à terme.Par ailleurs, Sarmiento admet lui-même, qu’appliquée aux fracturescombinées des deux os, sa méthode ne peut concerner que desfractures très peu déplacées. Rappelons qu’il immobiliseinitialement, en moyenne une quinzaine de jours, les foyersfracturaires dans un plâtre traditionnel brachio-antibrachio-palmairejusqu’à la fonte de l’œdème et la disparition des douleurs ; ce n’estqu’à ce moment qu’une attelle moulée sur un avant-bras en positionde supination peut être confectionnée, le coude et le poignet gardantdès lors une certaine liberté de mouvements. Cette techniquedemande une surveillance radiologique régulière (un contrôlehebdomadaire durant les quatre premières semaines) qui peutinciter à reprendre une réduction sous anesthésie devant une

9 Fracture de Galeazzi.

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diminution de l’espace interosseux, une angulation de plus de 10°,ou a fortiori un chevauchement des fragments.

Traitements chirurgicaux

Il existe à travers la littérature un consensus sur la nécessité d’uneréduction chirurgicale des fractures déplacées ou instables [86, 87]. Lesfractures non compliquées restent du domaine de la fixation interne,la fixation externe n’ayant a priori pas de place dans ce chapitre.

• Ostéosynthèse par plaques vissées

Le moyen le plus couramment utilisé [48, 67] est indéniablementl’ostéosynthèse par plaques vissées (fig 10), prônée par l’AO suisseet nécessitant un abord direct des foyers de fractures ; c’est l’openreduction and internal fixation (ORIF) des Anglo-Saxons. La techniqued’ostéosynthèse par plaques obéit à des règles maintenant connues,et qui pourraient se résumer ainsi : abord a minima et réductionanatomique. Les plaques actuellement disponibles permettent delimiter l’exposition de l’os et d’éviter des décollements extensifs dupérioste. Le choix des voies d’abord, en règle séparées pour chaqueos, doit tenir compte du siège des foyers de fractures et des risquesanatomiques encourus, surtout pour les abords du radius (cfTechniques chirurgicales de l’Encyclopédie Médico-Chirurgicale).Ainsi, doit-on vérifier que l’extrémité supérieure d’une plaque,pontant une fracture proximale du radius et atteignant le col ou latête du radius, ne vienne pas comprimer le nerf interosseuxpostérieur [79] ; pour des abords plus distaux, penser à contrôler labranche superficielle du nerf radial. Il ne faut pas hésiter à donnerune courbure à une plaque radiale si celle-ci ne s’adapte pas àl’anatomie de l’os, à condition de réaliser ce geste de façon douce etprogressive pour éviter l’écrouissage de l’alliage de l’implant. Il estcommunément admis d’utiliser des plaques rigides pour membresupérieur, types DCP ou LC-DCP à au moins sept trous de 3,5 mm,et d’avoir au minimum trois vis à corticale de 3,5 mm de part etd’autre du foyer de fracture. Il est préférable d’éviter les plaquesstandards pour vis de 4,5 mm (exceptionnellement indiquées pourde gros os), et les plaques tubulaires dont la résistance en torsion estinsuffisante. Parfois indiquée de première intention en cas de vitalitéosseuse douteuse, la greffe d’os autologue ne doit jamais déborderl’espace interosseux afin d’éviter le risque de synostose ; pour lesmêmes raisons, il est préférable de ne pas laisser en place des vistrop longues.

• Ostéosynthèses endomédullairesLes autres ostéosynthèses internes sont représentées par les implantsendomédullaires qui présentent en théorie l’avantage de ne pas

ouvrir les sites fracturaires pour leur mise en place ; c’est laphilosophie dite du foyer fermé, qui a fait la preuve de son efficacitéen traumatologie diaphysaire du membre inférieur. L’étroitesse descanaux médullaires du radius et de l’ulna a fait utiliser par certainsdes broches centromédullaires, par analogie aux techniques utiliséesavec succès chez l’enfant. Mais, en raison de canaux tout de mêmeplus larges chez l’adulte, l’ostéosynthèse par broches ne donne pasdes résultats aussi constants, du fait d’un contrôle insuffisant de larotation, et ne peut donc être appliquée que pour des canauxmédullaires étroits, tels qu’on peut en rencontrer chez certainsadultes jeunes et plus volontiers chez la femme. Par ailleurs, lanécessité d’avoir recours la plupart du temps à une immobilisationplâtrée complémentaire rend cette méthode plus contraignante pourle patient. C’est la raison pour laquelle de nombreux auteurs ontproposé des implants centromédullaires plus volumineux que desbroches, afin d’obtenir un meilleur contrôle de la rotation desfragments osseux, tout en se passant d’une immobilisationcomplémentaire. Parmi les solutions proposées, on peut mentionnerdes implants de sections angulaires [60, 78], des implants vissés dansle canal, des systèmes de blocages extracorticaux, ou deverrouillages avec possibilités de mise en compression du foyer defracture [39, 44, 73]. Les avantages théoriques de l’enclouagecentromédullaire verrouillé à foyer fermé sont indéniables et leursrésultats cliniques satisfaisants [40, 41, 42]. De Pedro [19] et Taller [78]

soulignent les avantages de l’enclouage par rapport à la plaquevissée : technique simple, intervention courte, pertes sanguineslimitées, peu de risque d’infection, délais de consolidation plusrapides, ablation de matériel plus simple, et faible taux decomplications. Il faut cependant admettre que la réalisation d’unenclouage à foyer fermé d’un avant-bras demande un matérielapproprié, comme pour tout enclouage du membre inférieur. Ainsi,pour éviter une irradiation peropératoire excessive, il est utile dedisposer d’un système stabilisant la réduction des fractures avant etpendant l’intervention, véritable « table orthopédique » adaptée aumembre supérieur. Par ailleurs, il est absolument indispensabled’utiliser des aléseurs souples montés sur guides [76] ; sans ce typede matériel, l’alésage de ces canaux médullaires étroits, entourésd’une corticale épaisse, peut s’avérer d’une réelle difficulté,notamment pour l’ulna.

¶ Traitement des fractures isolées de l’ulnaet de MonteggiaDu fait de leur fréquence, le traitement des fractures isolées de l’ulnaa fait l’objet de très nombreuses publications. Toutes les attitudessont retrouvées dans la littérature. Ainsi certains auteurs [18, 22, 26, 65]

s’abstiennent de traiter les fractures ulnaires isolées peu ou pas

10 Fracture des deux os de l’avant-bras : réduction sousplâtre insuffisante. Ostéosynthèse par plaques vissées.

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déplacées et stables, et prônent même une mobilisation immédiateou précoce après une très courte période d’immobilisation parmanchette plâtrée. Cette technique offre l’avantage d’être simple, dedonner un taux élevé de consolidation (les pseudarthroses seraientmême moins fréquentes qu’avec une immobilisation stricte), parfoisau prix de cals exubérants limitant les rotations, mais tolérables pourle patient.Le résultat des traitements par immobilisation plâtrée simple nesemble pas être influencé par les types de plâtres [4, 17]. Les résultatsdemeurant comparables, il n’est pas indispensable d’avoir recours àun plâtre brachio-antibrachio-palmaire ; une simple immobilisationpar manchette de 8 semaines apparaît suffisante et d’un meilleurconfort pour le patient. Autre conception, la méthode fonctionnellede Sarmiento trouve ici une de ses meilleures indications [25, 72, 84]. Ilfaut classiquement bien mouler l’appareillage le long du bordulnaire de l’avant-bras, autour de l’épiphyse humérale distale, touten donnant une forme aplatie d’avant en arrière à l’attelle pourassurer un meilleur contrôle des rotations ; mais paradoxalement, laméthode réalisée avec des attelles préfabriquées semble donner desrésultats comparables [89]. Les fractures distales se prêtent mieux à laméthode que les fractures du tiers proximal, toujours plus longues àconsolider [15] en raison du volume des masses musculaires, etjustifiant plutôt une ostéosynthèse [77]. Pour Sarmiento, lesindications de sa méthode fonctionnelle se limitent aux fracturesdiaphysaires isolées et peu déplacées, aux types I et II de Gustilo,aux fractures sans luxation associée de la tête radiale, et auxfractures fermées bilatérales de l’ulna [71].Des fractures isolées mais déplacées de l’ulna justifient une solutionchirurgicale pour beaucoup d’auteurs. Si la plaque vissée tienthabituellement une place prépondérante sous l’influence de l’AO,Labbe [35] insiste sur le taux de complications de cette méthode pourfaire valoir l’intérêt de l’ostéosynthèse endomédullaire par brochequi assure un contrôle satisfaisant de la rotation, tout en gardant lesavantages d’une chirurgie à foyer fermé.De façon unanime, la moindre instabilité, un déplacementimportant, des lésions étendues (fig 11), une rupture de la membraneinterosseuse [24, 62], ou l’association à une luxation de la tête radiale [9],justifient pour tous les auteurs une solution chirurgicale. Enrestituant la longueur de l’ulna par la mise en compression du foyerde fracture, soit par plaque, soit par clou verrouillé à compression [19,

40], l’ostéosynthèse va favoriser la stabilité de l’articulation huméro-ulnaire en restituant automatiquement la congruence entre la cupulede la tête radiale et le capitulum de l’humérus (fig 12). Cette stabilitédoit toujours être testée en pronation et en supination, au besoin en

s’aidant de l’amplificateur de brillance. La persistance d’uneinstabilité conduit à une exploration et à une réparation ligamentairecomplémentaire, notamment du ligament annulaire.

¶ Traitement des fractures isolées du radiuset de GaleazziLes fractures diaphysaires distales du radius nécessitent presquetoujours une stabilisation par plaque vissée à foyer ouvert [53]. Siparfois un embrochage multiple à foyer fermé peut résoudre leproblème, l’enclouage n’a pas de place dans ce type de fracture : eneffet, le siège souvent distal, pratiquement métaphysaire du foyerde fracture, fait du clou un tuteur inefficace, sans contact avec lescorticales, et sans action véritable sur la réduction du foyer. Il nefaut pas hésiter à ajouter à la réduction anatomique de la fractureradiale, qui entraîne en règle une réduction de la dislocation de laradio-ulnaire distale, une immobilisation plâtrée complémentaire ensupination complète pour favoriser une cicatrisation ligamentairecorrecte de l’articulation [10]. La moindre constatation d’uneinstabilité de cette dernière nécessite au minimum un embrochageulnoradial temporaire de 3 à 6 semaines (fig 13), voire pour certains

11 A, B. Fracture bifocale del’ulna : enclouage.

*A*B

12 Fracture de Monteggia. Noter l’importance de l’incidence de profil pour vérifierla réduction de la luxation de la tête radiale.

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une exploration de l’articulation suivie d’une réparationligamentaire ou d’une ostéosynthèse par minihauban d’une styloïdeulnaire.

¶ Traitement des fractures ouvertes

Les fractures ouvertes de l’avant-bras posent un problème destratégie thérapeutique : faut-il traiter toutes les lésions en urgence,ou bien stabiliser le plan osseux, revasculariser et couvrir une pertede substance cutanée, puis traiter secondairement une perte desubstance osseuse, tendineuse et/ou nerveuse ? Au membresupérieur, vu l’importance fonctionnelle de la main, la tendanceactuelle est à la reconstruction pluritissulaire en un temps et enurgence, ou en urgence différée dans les 48 premières heures [5, 69].L’intervention initiale débute obligatoirement par un parage trèssoigneux, méthodique, et surtout complet, dont on ne répète jamaisassez le caractère primordial. Dans un but de décontamination, lesexcisions tissulaires sont alternées avec des lavages pulsés avecmatériel approprié, jusqu’à obtenir une plaie parfaitement propre,exempte de tout tissu lésé, nécrotique ou douteux [37, 38].L’ostéosynthèse des foyers de fracture est un préambuleindispensable à tout geste ultérieur, qu’il soit immédiat ousecondaire ; en stabilisant les lésions osseuses, l’ostéosynthèse(parfois intentionnellement raccourcissante) va en effet faciliter lestemps suivants. Si les fixateurs externes monoplans restent souventutiles pour l’alignement et la stabilisation de lésions ulnairesétendues, l’ostéosynthèse interne par plaques ou même par clous(fig 14) semble actuellement volontiers utilisée, peut-être un peu audétriment du fixateur externe, pourtant longtemps prôné dans lepassé, mais quelquefois difficile à poser, et obligeant à résoudresimultanément deux difficultés : tout en étant stable, le montage doiten effet absolument éviter de gêner les gestes de réparation desparties molles.L’existence d’une perte de substance osseuse peut se résoudre deplusieurs manières, selon les conditions locales [5, 27, 80]. Si celles-cisont favorables, (pas de contamination majeure, contusion modérée)et la perte de substance modérée, on peut utiliser en urgence unegreffe classique corticospongieuse iliaque. Si les conditions localesrestent favorables, mais la perte de substance importante, il estpréférable d’avoir recours secondairement à une greffe d’osvascularisé (fibula essentiellement). Soit enfin les conditions localessont mauvaises (fracas osseux, contamination majeure…), lareconstruction est alors secondaire, avec, selon l’étendue de la pertede substance, une greffe corticospongieuse iliaque classique, voireune greffe de fibula vascularisée.En cas d’ischémie, la revascularisation de la main est assurée, soitpar suture directe après recoupe économique des berges vasculairesen l’absence de defect tissulaire, soit par pontage dans le cas

contraire, des artères radiale et/ou ulnaire. Peuvent être utilisés ungreffon veineux sural inversé sur chaque artère lésée, ou mieux unpontage inversé en Y, dont l’extrémité proximale est branchée sur laplus saine des deux artères, et les extrémités distales sur la radialeet l’ulnaire.

En cas de perte de substance cutanée associée, la réalisation d’unlambeau-pontage permet de traiter dans le même temps les deuxpertes de substance, vasculaire et cutanée (lambeau chinois oulambeau musculaire de grand dorsal).

Si le retour veineux dorsal est compromis, il est possible del’améliorer grâce à des sutures ou à des pontages d’une ou deuxveines superficielles de l’avant-bras en utilisant le même type degreffon.

En fonction de l’étendue du defect laissé après les excisionsmusculaires, peuvent être discutées une suture ou une réinsertiondes masses musculaires saines si l’atteinte est limitée ; dans le cascontraire, si le capital musculaire apparaît suffisant, peut se poser laquestion d’une réanimation d’emblée, par transfertsmusculotendineux de l’avant-bras ou par transfert musculaire libreneurotisé de grand dorsal ou de gracile [31, 36] (fig 14).

Les lésions tendineuses sont traitées, soit par suture directe, soit parsuture latérale à un tendon sain voisin, soit par greffe tendineuse outransfert tendineux de l’avant-bras, dont les modalités restentmultiples.

Les lésions nerveuses méritent une attention particulière. En cas desection franche ou de perte de substance très modérée, unavancement du nerf, grâce à une dissection au large de celui-ci,permet de gagner quelques millimètres et de réaliser ainsi unesuture sans tension. La conduite thérapeutique demeure en revanchedifficile devant un nerf étiré, contus avec ecchymose, voire brûlé.Dans ce type de situation, ou lorsque le devenir du membre sembleincertain, il est préférable de reporter la greffe à 45 jours ou 2 moisde l’accident, pour être dans de meilleures conditions. Mais dans lesautres cas et chaque fois que possible, la lésion nerveuse est traitéeen urgence par suture ou greffe à partir d’un nerf sural.

La couverture cutanée est le dernier temps primordial del’intervention. Si la fermeture cutanée s’avère d’emblée impossible,de nombreuses pertes de substance peuvent néanmoins être traitéespar cicatrisation dirigée, suivie éventuellement d’une greffe cutanée,car les deux tiers proximaux de l’avant-bras sont constitués demasses musculaires répondant bien à ce type de traitement. Mais unlambeau peut être indiqué chaque fois que sont exposés le radiuset/ou l’ulna, des structures vasculonerveuses ou des tendons,notamment au tiers distal de l’avant-bras. Le lambeau peut aussiêtre proposé de principe chaque fois qu’une chirurgie secondairenécessitant un plan de glissement (telle une réparation tendineuse),ou un environnement bien vascularisé (telle une greffe nerveuse),doit être entreprise.

Les lambeaux in situ, tels le fléchisseur ulnaire du carpe ou lebrachioradial, ne peuvent pas toujours être utilisés, car ces musclespeuvent parfois être eux-mêmes traumatisés ou contus, ce quiaugmenterait le risque d’échec. Ainsi, les lambeaux libres, cutanésou plutôt musculaires, représentent à l’avant-bras une solution dechoix [5, 8, 14, 46, 56]. En cas de pertes de substance cutanée pure, onpeut utiliser volontiers un lambeau de grand dorsal libre, en gardantau tiers proximal de l’avant-bras une place au lambeaumusculocutané de grand dorsal pédiculé [69]. En cas de pertes desubstance cutanée et vasculaire, on a recours au lambeau-pontagechinois controlatéral (artère radiale) ou au lambeau de grand dorsal(artère du dentelé antérieur). Enfin, les pertes de substance cutanéeet tendinomusculaire peuvent être recouvertes par un lambeau degrand dorsal ou de gracile neurotisé.

La prise en charge de toutes les lésions tissulaires dans les meilleursdélais est le seul moyen de diminuer le taux de complicationsimmédiates (sepsis, nécrose évolutive…) ou secondaires (raideur,pseudarthrose, synostose…), et donc de séquelles tant à l’avant-brasqu’à la main.

13 Fracture de Galeazzi : plaque radiale, broche ulnoradiale.

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TRAITEMENT DES INFECTIONS SECONDAIRES

L’infection secondaire sur matériel complique toujours le traitementet alourdit souvent le pronostic. Deux cas de figures sont àdistinguer ici : l’infection sur plaque vissée nécessite une réouverturedu foyer avec abord de la plaque, suivie d’un parage, de lavagesrépétés, et d’une antibiothérapie en postopératoire ; à ce stade del’évolution, le matériel peut être laissé en place. L’infection surimplant centromédullaire obéit aux mêmes principes, mais le risquede pandiaphysite impose un alésage de tout le canal médullaire ; legeste apparaît certes plus lourd, mais il convient de rappeler que

cette complication est beaucoup plus rare que pour lesostéosynthèses à foyer ouvert [19, 42, 78].

TRAITEMENT DES COMPLICATIONS TARDIVES

¶ Traitement des pseudarthroses

Les pseudarthroses atrophiques justifient une solution chirurgicale,associant classiquement un abord du foyer avec avivement desextrémités, décortication, éventuellement un apport d’os spongieuxautologue, et surtout un montage par plaque vissée, qui doit

14 A, B, C, D, E, F. Écrasement de l’avant-bras : avulsion de la loge antérieure superfi-cielle de l’avant-bras. Lambeau de gracile, consolidation osseuse après double en-clouage, résultat fonctionnel.

*A *B

*C

*D

*E *F

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impérativement être stable et ponter à distance la pseudarthrose.Les pseudarthroses hypertrophiques ne nécessitent qu’un avivementdes extrémités et la mise en place d’une plaque autocompressive.Qu’elles soient atrophiques ou hypertrophiques, les pseudarthrosesde l’ulna peuvent être traitées par enclouage (à foyer fermé aprèstraitement conservateur, ou après ablation d’un matérield’ostéosynthèse préexistant). Les résultats cliniques obtenus parenclouage avec alésage, et si possible mise en compression du foyerde pseudarthrose, font de la méthode une de ses meilleuresindications [40, 41].

¶ Traitement des cals vicieux

Les cals vicieux les plus graves, et en même temps les plus difficilesà traiter, concernent le radius. La courbure pronatrice du radiustolère en effet moins de défaut angulaire que l’ulna, surtout au tiersmoyen de la diaphyse. L’indication d’une ostéotomie doit êtreréfléchie et discutée avec le patient. En effet, la fibrose des partiesmolles environnantes rend souvent difficile la réalisation d’uneostéotomie correctrice ; pour éviter cet écueil, il est conseillé deproposer l’intervention avant le douzième mois. Il faut savoir parailleurs que ce geste n’est pas exempt de complications : retard deconsolidation, infection, ossifications hétérotopiques le long de lamembrane interosseuse, douleurs, dysesthésies, subluxation destêtes radiale ou ulnaire, raideurs, et instabilité ont été décrits [81].

¶ Traitement des synostoses

Si la résection chirurgicale de la synostose supprime le pont osseux,elle ne doit pas cependant résumer à elle seule le traitement. Lerisque de récidive étant en effet évalué à 30 %, il est conseilléd’attendre la maturation de la synostose en s’aidant de lascintigraphie osseuse avant d’intervenir, mais en sachant aussi nepas trop attendre, du fait de la fibrose et de la rétraction évolutivesdes parties molles, qui finissent par rendre difficile la récupérationfonctionnelle à terme [16]. Une fois le geste osseux réalisé, il estpréférable d’interposer dans l’espace interosseux, soit une feuille deSilastict, soit du muscle, ou encore un lambeau graisseux [1, 45, 83, 88].L’analogie mentionnée plus haut entre synostoses et ossificationshétérotopiques justifie pour certains des traitements adjuvants(parfois même associés en cas de risque élevé) que sont les anti-inflammatoires et la radiothérapie. Il semble enfin que le meilleurmoyen de prévenir la synostose soit d’associer à une fixation internestable une mobilisation précoce.

¶ Traitement des séquelles articulaires

L’importance des lésions articulaires associées du coude ou dupoignet explique la possibilité de survenue de raideurs et dedouleurs articulaires, même après traitement a priori correct. Cesséquelles fonctionnelles sont parfois malheureusement laconséquence de lésions passées inaperçues lors du bilan initial ; c’estrappeler ici l’intérêt de toujours vérifier radiographiquement lesinterlignes articulaires du coude et du poignet. Une luxation

invétérée de la tête radiale reste généralement très difficile à réduire,malgré une reconstruction du ligament annulaire associée (fig 15) ;la seule solution se résume alors à une résection de la tête radiale.De la même façon, si une plastie stabilisatrice d’une dislocationancienne de la radio-ulnaire distale ne parvient pas à redonner unestabilité au poignet, il faut se résoudre à proposer au patient uneintervention de Sauvé-Kapandji. Ces dislocations articulairestardives ont toujours un mauvais résultat fonctionnel à terme, dufait de la complexité des lésions.

Conclusion

Au travers de leur polymorphisme clinique, les fractures diaphysairesdes deux os de l’avant-bras partagent en commun un pronosticfonctionnel toujours réservé, d’autant plus s’il existe des lésionsassociées des parties molles périfracturaires, et a fortiori s’il existe desatteintes articulaires à distance. Ces notions rappellent la nécessité d’unbilan initial clinique et radiologique complet si l’on veut voir diminuerla fréquence de séquelles lourdes. Plus qu’une limitation isolée de lapronosupination, l’atteinte des articulations adjacentes du coude et dupoignet peuvent constituer un handicap majeur et parfois définitif pourle patient…

Références ➤

15 Pseudarthrose d’ulna sur rupture deplaque : récidive de la luxation de la têteradiale.

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Appareil locomoteur Fractures diaphysaires des deux os de l’avant-bras chez l’adulte 14-044-A-10

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