3
Dimensions Spirituelles de la Photographie Par Franz Roh ll semble bien qu'en notre XXieme siecle encore trop peu de gens profitent des possibilites qu'offre la photographie dans les directions les plus diverses. On voit toujours, en effet, ap- paraitre des theses tendant a deprecier la valeur, ou, tout au moins, a restreindre le domaine de cet art. lei, de meme que dans Ia vie, on ne profite pas de la richesse des moyens d'ex- pression qui s'offrent a nous et qui ne demandent qu'a etre utilises. On croit souvent qu'il faut choisir entre les genres si divers de l'art photographique, au lieu de constater que ceux-ci existent tout simplement, sans qu'il soit besoin de choisir entre eux. Par contre, on fera preuve de trop de libe- .ralisme, voire de faiblesse, la ou il faudrait montrer de la resolution. Nous ne plaidons naturellement pas ici en faveur d' une absurde photomanie. Nous voulons seulement parler de Ia richesse contrastee du domaine qu' a l' appareil pho- tographique depuis une trentaine d' annees, et sur ce point nous voulons repondre une fois de plus a ceux que nous nommerons les «restrictionnistes». Par exemple, il s'en trouve toujours pour pretendre que Ia photographie ne saurait in- teresser le veritable artiste. Que I' on n' aille pas croire que cette these a disparu, mais elle est facile a refuter. Le recent epanouissement de I' art photographique, comme je I' ai depeint en 1929 dans <<Fotoauge>> (voir chapitre «Mecanisme et expression>>) date des annees 1920 et est du a des artistes. Le Hongrois Moholy-Nagy, les Allemands Willi Baumeister, Max Ernst, Raoul Hausmann, Max Burchartz, George Grosz, Hanna Hiich, pour ne nommer que ceux-la; l'Americain Man Ray, le Russe Lissitzky, etaient des peintres ou des createurs d'une autre branche de l'art: ils ont decouvert, en partant de leur point de vue purement artistique, combien la photographie prise d'une fa!;on vivante depasse le simple cliche mecanique de Ia realite. La photo- graphie se trouve done soumise, elle aussi, au principe de I' art, dans Ia mesure ou I' art n' est pas reduit a un academis- me, voire meme enchaine a un outil determine, crayon ou pinceau. Cette decouverte fut l'acte liberateur de ces annees ou les pionniers d'une nouvelle vision sortaient du sol. D'ail- leurs n'y eut-il pas des peintres qui passerent a la photo- graphie des ses debuts, sans qu' on puisse parler de simple opportunisme de leur part? Pensons par exemple a Hill . en Angleterre et, un peu plus tard, a Hanfstaengl a Munich. Mais voici que les «restrictionnistes>> pretendent qu'il n' est jamais possible d' atteindre, dans une photographie, a cette signification interieure que - cette fois sur le plan de Ia hierarchie esthetique - on reconnait a l' oeuvre d'art. Cette question est beaucoup plus delicate a trancher. Tout depend ici de Ia definition qu ' on donne de <<!'oeuvre d'art>>, definition que l'histoire de I' esthetique laisse controversee. Cette querelle, constamment ranimee par certains «restric- tionnistes>>, il m' est impossible de Ia developper ici, car cela nous conduirait a une etude des valeurs fondamentales, peut- etre meme a des discussions sur le principe de la connaissance. C'est pourquoi nous nous contenterons des remarques qui suivent. Nous donnerons au mot «oeuvre d'art>> le sens d'une creation qui n'est pas seulement un moyen, mais peut etre consideree esthetiquement comme une fin en soi; car elle se suffit a elle-meme; dans son ensemble comrile dans son detail, elle n'appelle aucune modification; c'est une creation que nous considerons comme pleinement expressive et significa- tive (cette derniere qualite ne doit pas etre interpretee au sens rationnel du mot). II devient alors possible de prouver qu'une photographie peut reunir toutes ces conditions. Le fait que, naturellement, ce resultat est rarement atteint ne prouve absolument rien contre le principe lui-meme. Il faudrait en faire un jour Ia demonstration par une exposition, en comparant des photos d'art en noir et blanc et des dessins en noir et blanc de Ia meme epoque. Peut-etre que pour la photographie, seules, ces trente dernieres annees pourraient entrer en ligne, car c'est seulement au cours· de cette periode que Ia photographie a conquis Ia gamme entiere de ses moyens d'expression, alors que gravure sur bois, gravure sur cuivre etc ... possedaient leur technique depuis des siecles deja. On admettra naturellement, en procedant a cette com- paraison, que les possibilites de creation se trouvent, chez le photographe, plus limitees que chez le dessinateur. Ce dernier peut, en effet, au cours de l' elaboration purement materielle de l' oeuvre, adapter chaque coup de crayon a sa propre affectivite. Ce que le photographe perd ici en moyens d' expression doit done etre compense ailleurs par la collabo- ration de Ia nature. Seul un orgueilleux subjectivisme comme celui de la seconde moitie du XIXieme siecle pouvait pre- tendre que Ia nature, et par consequent son image, etaient une sorte de chaos (tout au moins en ce qui concerne sa prehension par l'oeil) alors que l' oeuvre du dessinateur de- vait etre consideree comme une sorte de cosmos. II est egalement faux de pretendre que certaines portions de nature et, en consequence, leur image photographique, n'agissent pas en profondeur sur le spectateur. Que !'element metaphysique d'un fragment de nature se rencontre pour se fondre en un tout avec I' effort de penetration de l'operateur, voila le secret de la photo rare, c' est a dire de la photo de valeur. Pour le photographe specialiste existe toujours une autre difficulte. Devant l'ingenieuse activite et le gout de la re- cherche deployes par Ia photographie moderne, les «restric- tionnistes>> sont intervenus pour declarer: tout ce qu'on nom- me «Subjektive Fotografie>> en general est condamnable par 23

Franz Roh - Dimensions Spirituelles de La Photographie

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Franz Roh - Dimensions Spirituelles de La Photographie

Citation preview

Page 1: Franz Roh - Dimensions Spirituelles de La Photographie

Dimensions Spirituelles de la Photographie Par Franz Roh

ll semble bien qu'en notre XXieme siecle encore trop peu de gens profitent des possibilites qu'offre la photographie dans les directions les plus diverses. On voit toujours, en effet, ap­paraitre des theses tendant a deprecier la valeur, ou, tout au moins, a restreindre le domaine de cet art. lei, de meme que dans Ia vie, on ne profite pas de la richesse des moyens d'ex­pression qui s'offrent a nous et qui ne demandent qu'a etre utilises. On croit souvent qu'il faut choisir entre les genres si divers de l'art photographique, au lieu de constater que ceux-ci existent tout simplement, sans qu'il soit besoin de choisir entre eux. Par contre, on fera preuve de trop de libe­.ralisme, voire de faiblesse, la ou il faudrait montrer de la resolution.

Nous ne plaidons naturellement pas ici en faveur d'une absurde photomanie. Nous voulons seulement parler de Ia richesse contrastee du domaine qu' a conq~is l' appareil pho­tographique depuis une trentaine d' annees, et sur ce point nous voulons repondre une fois de plus a ceux que nous nommerons les «restrictionnistes». Par exemple, il s'en trouve toujours pour pretendre que Ia photographie ne saurait in­teresser le veritable artiste. Que I' on n' aille pas croire que cette these a disparu, mais elle est facile a refuter. Le recent epanouissement de I' art photographique, comme je I' ai depeint en 1929 dans <<Fotoauge>> (voir chapitre «Mecanisme et expression>>) date des annees 1920 et est du a des artistes. Le Hongrois Moholy-Nagy, les Allemands Willi Baumeister, Max Ernst, Raoul Hausmann, Max Burchartz, George Grosz, Hanna Hiich, pour ne nommer que ceux-la; l'Americain Man Ray, le Russe Lissitzky, etaient des peintres ou des createurs d'une autre branche de l'art: ils ont decouvert, en partant de leur point de vue purement artistique, combien la photographie prise d'une fa!;on vivante depasse le simple cliche mecanique de Ia realite. La photo­graphie se trouve done soumise, elle aussi, au principe de I' art, dans Ia mesure ou I' art n' est pas reduit a un academis­me, voire meme enchaine a un outil determine, crayon ou pinceau. Cette decouverte fut l'acte liberateur de ces annees ou les pionniers d'une nouvelle vision sortaient du sol. D'ail­leurs n'y eut-il pas des peintres qui passerent a la photo­graphie des ses debuts, sans qu' on puisse parler de simple opportunisme de leur part? Pensons par exemple a Hill . en Angleterre et, un peu plus tard, a Hanfstaengl a Munich.

Mais voici que les «restrictionnistes>> pretendent qu'il n' est jamais possible d' atteindre, dans une photographie, a cette signification interieure que - cette fois sur le plan de Ia hierarchie esthetique - on reconnait a l' oeuvre d'art. Cette question est beaucoup plus delicate a trancher. Tout depend ici de Ia definition qu' on donne de <<!'oeuvre d'art>>, definition que l'histoire de I' esthetique laisse controversee.

Cette querelle, constamment ranimee par certains «restric­tionnistes>>, il m' est impossible de Ia developper ici, car cela nous conduirait a une etude des valeurs fondamentales, peut­etre meme a des discussions sur le principe de la connaissance.

C'est pourquoi nous nous contenterons des remarques qui suivent. Nous donnerons au mot «oeuvre d'art>> le sens d'une creation qui n'est pas seulement un moyen, mais peut etre consideree esthetiquement comme une fin en soi; car elle se suffit a elle-meme; dans son ensemble comrile dans son detail, elle n'appelle aucune modification; c'est une creation que nous considerons comme pleinement expressive et significa­tive (cette derniere qualite ne doit pas etre interpretee au sens rationnel du mot). II devient alors possible de prouver qu'une photographie peut reunir toutes ces conditions. Le fait que, naturellement, ce resultat est rarement atteint ne prouve absolument rien contre le principe lui-meme. Il faudrait en faire un jour Ia demonstration par une exposition, en comparant des photos d'art en noir et blanc et des dessins en noir et blanc de Ia meme epoque. Peut-etre que pour la photographie, seules, ces trente dernieres annees pourraient entrer en ligne, car c'est seulement au cours ·de cette periode que Ia photographie a conquis Ia gamme entiere de ses moyens d'expression, alors que gravure sur bois, gravure sur cuivre etc ... possedaient leur technique depuis des siecles deja. On admettra naturellement, en procedant a cette com­paraison, que les possibilites de creation se trouvent, chez le photographe, plus limitees que chez le dessinateur. Ce dernier peut, en effet, au cours de l' elaboration purement materielle de l' oeuvre, adapter chaque coup de crayon a sa propre affectivite. Ce que le photographe perd ici en moyens d' expression doit done etre compense ailleurs par la collabo­ration de Ia nature. Seul un orgueilleux subjectivisme comme celui de la seconde moitie du XIXieme siecle pouvait pre­tendre que Ia nature, et par consequent son image, etaient une sorte de chaos (tout au moins en ce qui concerne sa prehension par l'oeil) alors que l' oeuvre du dessinateur de­vait etre consideree comme une sorte de cosmos.

II est egalement faux de pretendre que certaines portions de nature et, en consequence, leur image photographique, n'agissent pas en profondeur sur le spectateur. Que !'element metaphysique d'un fragment de nature se rencontre pour se fondre en un tout avec I' effort de penetration de l'operateur, voila le secret de la photo rare, c' est a dire de la photo de valeur.

Pour le photographe specialiste existe toujours une autre difficulte. Devant l'ingenieuse activite et le gout de la re­cherche deployes par Ia photographie moderne, les «restric­tionnistes>> sont intervenus pour declarer: tout ce qu'on nom­me «Subjektive Fotografie>> en general est condamnable par

23

Page 2: Franz Roh - Dimensions Spirituelles de La Photographie

principe. Le sens et la valeur de la photographie (par oppo­sition au dessin libre) resident dans le <<reportage>>, si l'on entend par la une restitution de la realite, sans intervention de la force creatrice, restitution directe, objective dans. toute la mesure du possible - disons tout simplement une forme superieure du <<cliche>> et rien de plus. Les specialistes de !'experimentation, au contraire, prE:tendent qu'un tel pro­cede finit par Iasser peu a peu tout individu doue d' exigences spirituelles.

Dans les deux cas, on fabrique encore des theories re­strictives, au lieu de profiter des possiblites offertes par deux domaines differents. Le cliche, restitution precise, objective d'une captivante tranche de vie, demeure le noyau fondamen­tal de l'art photographique et ceci pour taus les temps. La photographie vise a apaiser notre faim de realite. Mais dans cette exigence s'affirme deja imperceptiblement la person­nalite de I' operateur. On devrait bien ecrire un jour une phenomeno1ogie de <<l'acte du choix>> , qui d'ailleurs pourrait s'appliquer a d'autres domaines de la vie n'ayant rien de commun avec Ia photographie: <<Dis-moi devant quoi tu t' arretes, et je te dirai qui tu es>>. Que 1' on parcoure une his­toire de Ia photographie, en s' en tenant uniquement au sec-

. teur objectif, et 1' on verra com bien 1' esprit du temps et la psycho Iogie de 1' operateur se font immediament sentir. II est vraiment etrange que, dans cette production photographi­que qui s'etend aujourd'hui sur plus de 100 ans, on puisse assigner une date precise a certains tirages, tels que nus ou paysages, done sans aucune possibilite de reference aux costumes de l'epoque. Entre la photographie objective et la <<Subjektive Fotografie» moderne qui fait apparaitre l'affectivite du photographe, nous trouverons done des l'abord un courant de transitions.

Quelle profusion de possibilites dans cette <<Subjektive Fotografie»! Ce q~e l'on pourrait appeler ici <<Photographie surrealiste» ne represente pour le photographe realiste qu'un domaine <<extra-photographique». Mais le critere de la photo reste dans Ia reunion de conditions specifiques telles que: appareil rencontrant un film sensible, developpement, tirage etc ... a 1' exclusion de processus E:trangers tels que des­sin ou retouches.

Ce sont les memes phenomenes specifiques qui font la beaut€: d'un simple photogramme, ou quelques objets poses sur un papier sensible font surgir des formes magiques, chargees de luminosite, des effets spheriques et transparents de lumiere, tous effets qu'aucune autre technique ne saurait obtenir.

Reconnaissons le meme caractere specifique au simple negatif, qui, rarement il est vrai, peut atteindre a de veri­tables effets de <<surrealite» dont le charme particulier ne peut etre retrouve ailleurs.

Le XIXieme siecle etait, ici comme en d' autres domaines, engage dans un realisme plus ou mains etroit qui l'em­pechait de profiter integralement de toutes ces possibilites. C'est seulement lorsque la peinture, le dessin et aussi la poesie decouvrirent un monde de 1' expression plus mys­terieux auquel chacun voulut acceder, que le photographe

24

commen<;a a s'y interesser, sans pour cela devoir renoncer aux effets et aux possibilites specifiques de son outillage.

Certai~s puristes de la photographie actuelle ne cessent de demander s'il ne s'agit pas dans tout cela d'une action dis­solvante. II est interessant de remarquer a cette occasion que les phenomenes correspondants apparus dans le roman, le drame, la peinture ou le dessin, sont consideres par les memes puristes comme phenomenes de dissolution. L' esprit averti peut done admettre que chez ces anxieux il ne s'agit pas du desir, par ailleurs fort louable, de conserver aux modes d' expression de l'homme leur integrite technique et leur purete, mais d'un renversement de !'esprit humain sur toute la ligne. Aussi n'y a-t-il pas lieu de faire des reserves sur le procede des tirages par superposition de cliches, que beau­coup considerent encore comme exageration subjective ou comme jeu gratuit.

Malgre tout l'arbritaire qu'il peut engendrer, ce domaine, justement parce qu'il n' est pas epuise, doit continuer a etre explore. Les experimentateurs de qualite elimineront les resultats arbitraires jusqu'a ce que surgisse une interpenetra­tion des formes qui reponde aux exigences du fond et de la forme. «L'inge~ieur» de Lissitzky (premiere page de man livre <<Fotoauge», 1929) est un exemple magistral de tres vieille date et qui reste classique aujourd'hui. Que l'on ne vienne done pas objecter que de semblables jeux ouvrent la porte toute grande a l'arbitraire.

Le photo-montage travaille avec d'autres moyens. lei n' apparaissent pas les effets du clair-obscur ou des formes corporelles, mais ils s'opposent comme les elements d'un engrenage. La <<photo interpenetree>> engendrera un courant lyrique de vie, tandis que le montage procede plutot par effet de tension, grace au contraste de ses elements juxta­poses, gardant chacun une relative autonomie. II etait tout nature! que le photo-montage fit son apparition apres le cubisme, qui, en peinture, avait decompose des fragments du monde reel pour reconstituer des ensembles fantastiques que !'on ne pouvait apprecier qu':'t partir de combinaisons geometriques.

Tout aussi specieuse apparait la discussion autour de l'in­venteur du montage photographique: Man Ray, Moholy Nagy, Raoul Hausmann, Hartfield ou George Grosz? Ce qu'on appelle «montage>> est presque aussi ancien que la photographie elle-meme. En effet, il y a plus de 100 ans deja que l'on pratique le decoupage des epreuves (par exemple dans les photos de groupes) pour reconstituer des images nouvelles. Evidemment, on le faisait alors uniquement par inten~t pour le contenu. C' est seulement au XXieme siecle qu'apparaissent ces montages repondant a des besoins struc­turaux, purement optiques; ainsi s'ouvre Ia conquete d'un terrain absolument nouveau. Ce qu'on appelle <<montage>> n'appartient pas seulement a Ia photographie, c'est presque un principe de vie. Peut-etre tout interieur bien amenage, toute harmonie familiale, tout Etat bien gere, toute conver­sation aimable, representent-ils des montages reussis dans la mesure ou l'on a applique le principe suivant: prendre des parties ou des elements deja existants, ayant deja leur valeur

Page 3: Franz Roh - Dimensions Spirituelles de La Photographie

propre, de fac;on a en former un tout d'intensite et de valeurs superieures.

C'est encore aller dans le sens d'une limitation que de. fermer la porte aux essais d'un Keetman, par exemple. Le procede consiste a deplacer rapidement, dans une chambre noire, devant la camera ouverte, des sources de lumiere fixees a des fils ou a des pendules, de fac;on a produire des traits lumineux d'une precision lineaire, dont la reunion sur la photo donne une impression d' espace virtuel. On obtient parfois de cette maniere de delicieux graphismes de lumiere. Art depouille de son objet, et qui ne doit son existence qu'a la photographie. On pourrait objecter ici que ce procede, cette mise en scene prealable, sont trop compliques - ou artificiels. Mais que signifie «artificieb? Dans toute action humaine, tendant a un resultat substantiel, compte seul le produit, le resultat, qui, lui, doit etre superieur. Sur ce terrain egalement les billevesees voisineront avec les creations sublimes.

Ce sont encore d'autres effets de lumiere et d'espace qui naissent du deplacement, non pas des sources lumineuses, mais de Ia camera faisant le tour de son objet dans le temps d'une seule exposition. lei aussi, comme l'a montre Hajek Balke, on assiste a des realisations magnifiques .

Il faudrait finalement rappeler tous les travaux d'ou sur­gissent, dotees d'une richesse inouie et d'un effet prodigieux,

ces structures qui naissent du gonflement des couches sensibles de Ia pellicule. Je voudrais attirer !'attention sur les captivants travaux de Chargesheimer (Cologne). On objecte souvent que sur ce terrain il faut s'abandonner completement au hasard et, en outre, donner la suprematie a des processus chimiques et physiques arbitraires, ou l'homme, au lieu de jouer le role essentiel, celui de createur, se trouve totalement elimine. Mais si l'homme apprend dans une large mesure a dominer ces puissances chimiques? S'il veille a n'en garder que les produits qui lui semblent charges de signification? Est-ce que le principe d'humanite cite plus haut, a propos de chases du monde, n'est pas justement sauvegarde? Nous pouvons achever par une variation sur ce principe, en disant: «Dis-moi ce que tu mets de cote, photographe, et je te dirai qui tu es>>.

Nous ne devons pas engager des querelles sur les metho­des et domaines, magnifiques dans leur diversite, qu'a con­quis Ia photographie nouvelle. Rejouissons-nous de ses richesses contradictoires.

Partout i1 est possible de produire ces oeuvres vers les­quelles on s' efforce dans les milieux de «fotoform» et en general sur le terrain de Ia «Subjektive Fotografie», creations qui, par des moyens purement optiques, nous ouvrent les . portes · du monde de I' esprit.

25