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GALERIES HYDRAULIQUES EN CHARGE FAUT-IL BLINDER OU NON ? Point de vue du géologue et du géotechnicien Critères géologiques et géotechniques FAUT-IL BLINDER UNE GALERIE HYDRAULIQUE EN CHARGE ? Quelques incidents survenus sur des galeries hydrauliques en cours d'exploitation ont conduit EDF à se reposer les questions sur les problè- mes liés à la nécessité ou non de blin- der les ouvrages "Haute Pression". Un groupe de travail intitulé "Blindage des ouvrages Haute Pression " a ras- semblé des avis et des expériences de concepteurs et d'exploitants sur les qualités et le comportement des blin- dages, compte tenu de leurs caracté- ristiques, des propriétés du massif rocheux et des conditions d'exploita- tion. Quelques incidents survenus sur des galeries hydrauliques en cours d'ex- ploitation, ont conduit EDF à se repo- ser les questions sur les problèmes liés à la nécessité ou non de blinder les ouvrages "Haute Pression". Un groupe de travail (*) intitulé "Blin- dage des ouvrages Haute Pression" a rassemblé des avis et des expérien- ces de concepteurs et d'exploitants sur les qualités et le comportement des blindages, compte tenu de leurs caractéristiques, des propriétés du massif rocheux et des conditions d'ex- ploitation, dans le contexte géologi- que français. Les éléments exposés ci-après sont largement empruntés aux conclusions de ce groupe de travail. Les critères géologiques et géotech- niques ne sont qu'une partie des élé- ments de la décision que le maître d'œuvre doit prendre et dans laquelle celui-ci doit faire intervenir l'écono- mie du projet. 1. INCIDENTS SURVENUS DANS DES GALERIES EDF AYANT NÉCESSITE LA MISE EN PLACE D'UN BLINDAGE ; POSÉS Les traversées de Trias (cargneules, gypses, dolomies, anhydrites), quel- quefois des terrains de très mauvaise qualité (schistes) ou de qualité mé- diocre compte tenu de leur altération, J.L GIAFFERI : Chef de la Division Géologie-Géotechnique au Département T.E.G.G. d'Electricité de France. ou très fissurés (granité, gneiss), sont sources d'incidents, n existe plusieurs exemples d'inci- dents : Arly, La Bathie, Garet, Lardit, Tré-la-Tête, Belle Place, Pragnères dont la est cependant très fai- ble eu égard aux 1.500 km de galeries exploitées pour EDF Le processus se présente sous deux aspects qui tiennent compte des pro- priétés des terrains rencontrés - soit il y a dissolution progressive des matériaux ou érosion qui engendre la formation de cavités importantes en- traînant une instabilité de la galerie, sa fracturation et sa rupture (Arîy, Belle Place, La Bathie, .) ; - soit il y a, sous l'effet de la pression intérieure, fissuration de la galerie à la faveur d'un environnement extérieur de mauvaises caractéristiques méca- niques. E y a passage d'eau entraînant éventuellement l'érosion des bétons de revêtement et des instabilités des versants pouvant aller jusqu'au glis- sement. C'est le cas de Tré-la-Tête, Lardit, Garet. Fig. 1 - Galerie d'amenée de La Bathie. SHOULD A PRESSURE GALLERY BESHEATED? Some incidents occurring on pressure galleries during opération hâve led thé French electrical utiUty EDF ta reconsi- der thé question as to whether ornotit is necessary to sheath "high pressure " structures. A working group on thé "Sheathing of High Pressure Structures "collected thé advice and expérience of designers and operators on thé qualities and thé performance ofsheathing, based upon their characteristics, thé properties of rocky formations and operating condi- tions. Ces deux processus sont progressifs et conduisent inévitablement, sinon à la ruine de l'ouvrage, au moins à des avaries graves. 1.2 LES IMPLANTATIONS SOUS FAIBLE COUVERTUBE ROCHEUSE Un manque de couverture (verticale ou transversale) crée une faiblesse du milieu environnant vis-à-vis de la ré- sistance à la pression intérieure en galerie. H en est de même pour des implanta- tions dans des éperons, musoirs, où la dissymétrie des versants entraîne immanquablement une répartition ani- sotrope des contraintes du rocher. Le manque de résistance du terrain permet la fissuration du revêtement en galerie, laissant échapper l'eau qui peut gagner facilement l'extérieur et causer des ravinements et des dom- mages. C'est le cas de : Alrance, La Girotte, Pragnères, Eylie, Tré-la-Tête et dans une moindre mesure Laparan. Dans tous les cas précités, la faiblesse de l'environnement nécessite de réa- liser une étanchéité parfaite du con- duit pour éviter que l'eau, souvent sous pression, n'accentue les risques d'instabilité. (*) Composition du groupe de travail MM. BASSEREAU - MILLET EDF Service de la Production Hydraulique MM CALENDRAY - CHAZAL - GIAFFERI - ROCHE EDFDirection de l'Equipement M RENIER EDF Groupe de Programmation des Equipements Hydrauliques TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS 112 JUILLET/AOUT 1992 201

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GALERIES HYDRAULIQUES EN CHARGEFAUT-IL BLINDER OU NON ?

Point de vue du géologue et du géotechnicienCritères géologiques et géotechniques

FAUT-IL BLINDER UNE GALERIEHYDRAULIQUE EN CHARGE ?

Quelques incidents survenus surdes galeries hydrauliques en coursd'exploitation ont conduit EDF à sereposer les questions sur les problè-mes liés à la nécessité ou non de blin-der les ouvrages "Haute Pression".Un groupe de travail intitulé "Blindagedes ouvrages Haute Pression " a ras-semblé des avis et des expériences deconcepteurs et d'exploitants sur lesqualités et le comportement des blin-dages, compte tenu de leurs caracté-ristiques, des propriétés du massifrocheux et des conditions d'exploita-tion.

Quelques incidents survenus sur desgaleries hydrauliques en cours d'ex-ploitation, ont conduit EDF à se repo-ser les questions sur les problèmesliés à la nécessité ou non de blinder lesouvrages "Haute Pression".Un groupe de travail (*) intitulé "Blin-dage des ouvrages Haute Pression" arassemblé des avis et des expérien-ces de concepteurs et d'exploitantssur les qualités et le comportementdes blindages, compte tenu de leurscaractéristiques, des propriétés dumassif rocheux et des conditions d'ex-ploitation, dans le contexte géologi-que français.Les éléments exposés ci-après sontlargement empruntés aux conclusionsde ce groupe de travail.Les critères géologiques et géotech-niques ne sont qu'une partie des élé-ments de la décision que le maîtred'œuvre doit prendre et dans laquellecelui-ci doit faire intervenir l'écono-mie du projet.

1. INCIDENTS SURVENUSDANS DES GALERIES EDFAYANT NÉCESSITE LA MISEEN PLACE D'UN BLINDAGE

; POSÉSLes traversées de Trias (cargneules,gypses, dolomies, anhydrites), quel-quefois des terrains de très mauvaisequalité (schistes) ou de qualité mé-diocre compte tenu de leur altération,

J.L GIAFFERI :Chef de la Division

Géologie-Géotechniqueau Département T.E.G.G.

d'Electricité de France.

ou très fissurés (granité, gneiss), sontsources d'incidents,n existe plusieurs exemples d'inci-dents : Arly, La Bathie, Garet, Lardit,Tré-la-Tête, Belle Place, Pragnèresdont la est cependant très fai-ble eu égard aux 1.500 km de galeriesexploitées pour EDFLe processus se présente sous deuxaspects qui tiennent compte des pro-priétés des terrains rencontrés- soit il y a dissolution progressive desmatériaux ou érosion qui engendre laformation de cavités importantes en-traînant une instabilité de la galerie, safracturation et sa rupture (Arîy, BellePlace, La Bathie, .) ;- soit il y a, sous l'effet de la pressionintérieure, fissuration de la galerie à lafaveur d'un environnement extérieurde mauvaises caractéristiques méca-niques. E y a passage d'eau entraînantéventuellement l'érosion des bétonsde revêtement et des instabilités desversants pouvant aller jusqu'au glis-sement. C'est le cas de Tré-la-Tête,Lardit, Garet.

Fig. 1 - Galerie d'amenée de La Bathie.

SHOULD A PRESSURE GALLERYBESHEATED?

Some incidents occurring on pressuregalleries during opération hâve led théFrench electrical utiUty EDF ta reconsi-der thé question as to whether ornotitis necessary to sheath "high pressure "structures.A working group on thé "Sheathing ofHigh Pressure Structures "collected théadvice and expérience of designersand operators on thé qualities and théperformance ofsheathing, based upontheir characteristics, thé properties ofrocky formations and operating condi-tions.

Ces deux processus sont progressifset conduisent inévitablement, sinon àla ruine de l'ouvrage, au moins à desavaries graves.

1.2 LES IMPLANTATIONS SOUSFAIBLE COUVERTUBE ROCHEUSE

Un manque de couverture (verticaleou transversale) crée une faiblesse dumilieu environnant vis-à-vis de la ré-sistance à la pression intérieure engalerie.H en est de même pour des implanta-tions dans des éperons, musoirs, où ladissymétrie des versants entraîneimmanquablement une répartition ani-sotrope des contraintes du rocher.Le manque de résistance du terrainpermet la fissuration du revêtementen galerie, laissant échapper l'eau quipeut gagner facilement l'extérieur etcauser des ravinements et des dom-mages. C'est le cas de : Alrance, LaGirotte, Pragnères, Eylie, Tré-la-Tête etdans une moindre mesure Laparan.Dans tous les cas précités, la faiblessede l'environnement nécessite de réa-liser une étanchéité parfaite du con-duit pour éviter que l'eau, souventsous pression, n'accentue les risquesd'instabilité.(*) Composition du groupe de travailMM. BASSEREAU - MILLET EDF Service de laProduction HydrauliqueMM CALENDRAY - CHAZAL - GIAFFERI -ROCHE EDF Direction de l'EquipementM RENIER EDF Groupe de Programmation desEquipements Hydrauliques

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TABLEAU DES INCIDENTS AYANT NÉCESSITÉ LA MISE EN PLACE D'UN BLINDAGE

Aménagement

ALRANCE

ARLY

EMOSSON - galeriede Belleplace

LA BATHIE

ARTIGUES - galeriedu Garet

LA COCHE

PRAGNERESRive droite

PRAGNERESRive droite

PRAGNERESRive droite

PRAGNERESRive gauche

SAINT-DALMAS

VIEUX PRE

VIEUX PRE

LARDIT

LA GIROTTE(galerie de prise)

LAPARAN

BARALET

Type de galerie

En charge - 4 bars

En charge - 1,5 bar0 équivalent 2,75 m (B)

En charge - 1,2 bar4> 2,20 m (B et BA)

En charge - 1 4 bars<t> 4,20 m (B)

En charge0 l,40m(BA)

En charge0 3,40 m (B)

En charge - 1 2 bars<f> 2,60 m (B)

En charge - 1 2 bars4> 2,60 m (B)

En charge - 1 2 bars<t> 2,60 m (B)

En charge - 6 bars<t> 2,30 m (B)

En charge0 2,25 m (B)

En charge - 7 bars<i> 2,50 m (B)

En charge - 7 bars0 2,35 m (V)

En charge - 5 bars(B)

En charge - 1 1 bars

En charge - 8 bars0 2,60 m (B)

En charge - 2 bars0 l,/Om(B)

Contexte des incidents

Trop faible couverture (15 m)entre PK 10754 et 10825

Traversée de cargneules,dolomies et gypses du trias

Traversée de trias(cargneules, gypses)

Traversée de trias (gypses,(anhydrite, cargneule)

Schistes mauvaise qualitéanhydrite, cargneule)

(Lessivage du terrain) diminutiondu module terrain très drainantmilieu fissuré (milieu hors nappe)

Alternance de calcaires et schistesfracturés (manque de couverture)

Alternance de calcaires et schistesfracturés (manque de couverture)

Alternance de calcaires et schistesfracturés (manque de couverture)

Alternance de calcaires et schistesfracturés (manque de couverture)

Passage dans un éboulis

Géologie : grès très fissuré ettrès drainant (hors nappe)

Manque de blocage, défauts deforme du blindage et jeu tôle/blocage supérieurs à ceux pris

Granité décomposé, gore...

Rupture blindage à l'extrémitéau droit d'une Taille, manque decouverture

Fissuration galerie, manque decouverture

Traversée d'un thalweg, manquede couverture

Année

19791981

1976

19761977

19791980

19781986

1977

19611958

1974

1982

19631964

1975

1986

1988

1948

1951

1987

1954

Longueur deblindage en m

Diamètre

71

90

16002m

201<(> 4 m

400 - <f> 1,28 m540-01, 18m

357m

306 - <t> 2,30 m414 - <t> 2,30 m

300 environ<t> 2,30 m

2500 2,30 m

68 -02,10 m200 -02,10 m

11,5002,06m

9500 2,35 m

50 -02,15 m360 - 0 2,35 m-f renf. intérieur

190

300en 2 phases

0 2,40 m

400 1,50m

Sigles employés pour les revêtements Br : brute B : bétonM : maçonnerie BA : béton arméV : viroles métalliques

CAS PARTICULIERS

Aménagement

EYLIE

TRE-LA-TETE

Type de galerie

En charge0 1,90 m (B)

02,10 m (BA)

Contexte des incidents

Mouvements de terrains dusaux infiltrations par manquede couverture et accidentgéologique

Mouvements de terrains dusaux infiltrations par manquede couverture et accidentgéologique

Longueur deblindage en m

39 et 25

18

Réparation

Réparation constituéed'un anneau et assuréepar un chemisage bois

Réparation constituéed'un anneau et assuréepar un chemisage bois

202 TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS — N° 112 — JUILLET/AOUT 1992

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1.3 IMPLANTATION EN MILIEUFISSURÉ - HORS NAPPEDans ce cas, le problème n'est pas unproblème d'instabilité du milieu envi-ronnant, mais simplement une ques-tion d'étanchéité et de perte d'eau(Vieux Pré, Takamaka).Evidemment, cette situation se retrou-ve rarement seule et se conjugue sou-vent avec un manque de couverture(La Coche, Laparan).

F/g. 4 - Aménagement de l'Arly; étuded'une déviation éventuelle delà galerie

dans la traversée du Trias.

1.4 DÉFAUT DE RÉALISATIOND'UN BLINDAGEII peut s'agir par exemple de renfortsnon soudés, de mauvais remplissageen béton de l'anneau externe (VieuxPré) ou de perte d'efficacité du drai-nage

2. QUALITÉS D'UN OUVRAGEHYDRAULIQUE EN CHARGEUn ouvrage souterrain en charge aune mission, commune à tous lesouvrages d'amenée • généralement ils'agit de conduire l'eau jusqu'à la tur-bine ou la pompe avec le minimum defuite et sans provoquer des désordresgraves dans le massif où il est im-planté Un tel ouvrage doit résister àdeux types de sollicitations • chargeintérieure et pression extérieure. Dans

certains cas une approche en bilansapports-pertes est parfois faite.Un enfoncement important de la con-duite par rapport au versant peut, si laqualité du rocher est suffisante, garan-tir l'étanchéité sans qu'il soit néces-saire de recourir à un blindage desparois de l'excavation.Cependant, même un très bon rocherpeut s'avérer perméable si la chargeest trop forte. Le rocher d'Orlu en estun exemple. C'est une migmatite ho-mogène de très bonne qualité :d'après quelques essais au vérin, lemodule d'élasticité est de l'ordre de200.00 MPa et la contrainte de la rocheen place d'environ 20 MPa. Des essaishaute pression de longue durée ontété effectués dans des forages aucœur du massif. Ils ont montré uneperméabilité importante de la roche àpartir de 6 MPa à 13 MPa de pression,100 1/mn/m "disparaissaient"dans le massifLe revêtement en béton, quant à lui,constitue essentiellement une protec-tion mécanique des parois ; les effortsqu'il doit encaisser provoquent safissuration , même convenablementarmé, le revêtement en béton est ra-rement imperméable (voir par exem-ple les galeries de Pragnères, de LaBathie et du Garet)L'étanchéité n'est vraiment assuréeque par l'interposition d'une membra-ne, en général un blindage métallique(il existe quelques exemples de mem-branes plastiques dans des ouvrageshaute pression étrangers) Si, en raisonde la géologie du massif, le blindagene peut être évité, il est alors inutile derechercher un enfoncement importantde l'ouvrage, pour autant que le terrainchoisi ne soit pas de trop mauvaisequalité dans un assez bon terrain,reconnu comme sûrement perméable,le rapprochement de la galerie duversant entraîne une diminution de lapression extérieure et favorise de ce

fait le dimensionnement du blindage,n convient, de toute manière, de veil-ler à ce que la longueur du tronçonblindé soit suffisante, de façon à ne pasreporter les infiltrations au tronçonvoisin.

3. FAUT-IL BLINDEROU NON ?LES CRITÈRES DE CHOIX

Dans quel cas doit-on blinder ou nepas blinder ? L'analyse des incidentsrapportés ci-dessus aide à mettre enévidence un certain nombre de cri-tères à prendre en compte :

3.1 LA CHARGE HYDRAULIQUE

Si la charge hydraulique est inférieureà 10 mètres environ, il n'est pas néces-saire de prévoir un blindage . àAvrieux, la galerie mise en service en1921, qui traverse pourtant des gyp-ses, n'est pas blindée en raison de lafaible pression inférieure (écoulementlibre).

3.2 LA COUVERTURE MINIMALEMESURÉE VERTICALEMENTOU LATÉRALEMENT

Si la couverture minimale de terrainest inférieure à la charge d'eau (sur-pressions non comprises), l'étanchéiténaturelle n'est plus garantie, il y a ris-que de renard par débourrage de fis-sures terreuses, il faut blinder c'estl'esprit de la règle de Talobre. Cetterègle peut sembler excessive quandle rocher est excellent (voir les règlesnorvégiennes par exemple). Si l'on ydéroge, il conviendra de le justifier.Les extrémités de la galerie débou-chant dans une falaise abrupte ferontl'objet d'une attention en raison desrisques de poussée au vide de la paroirocheuse.

Figure 5 - Galerie Mottets-Flon, reconnaissance des cavités.

3.3 LA GÉOLOGIE DU MASSIF

L'ouvrage HP. (charge > 10 m) doitêtre systématiquement blindé, defaçon à assurer son étanchéité, dansdeux cas très particuliers :- La roche traversée est soluble ouérodable (gypse, cargneule ; exem-ple : Arly, La Bathie, Emosson). Parcontre, le passage de l'anhydrite n'en-traîne pas nécessairement l'obligationde blinder (exemple : Ponturin - Arcdans Tïgnes - Echaillon, La Coche,adductions amont du Mont-Cenis).- Le niveau de la nappe phréatiquenaturelle est inférieur à la cote de l'ou-vrage, les fissures du massif peuventservir de relais aux fuites en prove-nance de la conduite, queEe que soitl'épaisseur de la couverture (exem-ple : Takamaka, Vieux Pré, La Coche).Un traitement par injection peut excep-tionneEement suffire (cœur de massif

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rocheux de très bonne qualité tra-versé de quelques grandes fissures) :mais le projeteur dévia justifier cettedisposition particulière par un essaipréalable.La différence de pression h entre lapression intérieure dans la conduite etcelle correspondant au niveau de lanappe est aussi une grandeur signifi-cative. Si h est inférieure à 10 mètres, leblindage n'est pas nécessaire ; si h estsupérieure à 10 mètres, il faut se poserla question.De même, si l'ouvrage traverse desroches non-encaissantes telles queschistes, et si la couverture est insuffi-sante, il y a lieu de prévoir un blindage(exemple : Artigues, Pragnères).La présence de failles au voisinage dela conduite nécessite un traitementlocal par renforcement du terrain ousurépaisseur du blindage.En résumé, la bonne connaissancegéologique participe à l'élaborationdes réponses aux trois questions : faut-il blinder ? Jusqu'où doit-on blinder ?Quel dimensionnement doit-on don-ner au blindage ? Les études de laperméabilité, de l'état de contrainte etde la fracturation de la roche sontindispensables pour permettre aumaître d'ouvrage de prendre cesdécisions.La reconnaissance la meilleure estévidemment donnée par l'exécutionde la galerie elle-même, dans l'axe duprojet et au diamètre définitif Une teEeréalisation fournit les caractéristiquesmécaniques du rocher le long du tracéet, s'il faut blinder, permet de dimen-sionner au plus juste le blindage. Maiscela suppose que le marché de laconduite prévoit des variations dequantités et que le délai de réalisationle permette.Cependant, les reconnaissances sontle plus souvent effectuées en borduredu massif II faut alors se poser la ques-tion de la représentativité de telsessais pour l'ensemble du massif.

3.4 L'ÉCONOMIE DU PROJET

Le choix du tracé résulte souvent d'uncalcul économique : ou bien l'ouvrageest proche de la surface et nécessiteun blindage, ou bien le projeteur l'en-fonce et en principe, si les conditionshydrogéologiques sont satisfaisantes,il n'est pas nécessaire de blinder, maisles ouvrages d'amenée et la galeried'accès à l'usine seront vraisembla-blement plus longs, et une cheminéed'équilibre aval pourra s'avérer né-cessaire. D'autre part, dans ce derniercas, il ne faudra pas hésiter à modifierle tracé et à remettre le projet encause, si des reconnaissances com-plémentaires effectuées au fur et àmesure de l'avancement de la perfora-tion au cœur du massif devaient enmontrer la nécessité.

4. PRINCIPE DES RECONNAISSANCES GÉOLOGIQUESET GÉOTECHNSQUES POUR LA DEFINITIONDU TYPE DE REVÊTEMENT ÉTANCHE DES OUVRAGESHYDRAULIQUES SOUTERRAINS EN CHARGE

Un revêtement a pour rôle de répon-dre aux objectifs suivants :- assurer la stabilité mécanique del'ouvrage, en particulier le maintien desa forme et de ses dimensions ;- assurer une étanchéité suffisante ;- assurer la protection de la rochecontre les risques d'altération, d'éro-sion ou de dissolution dus à l'eau quitransite dans la galerie ;- améliorer le coefficient d'écoulement.L'examen des 19 incidents survenusdans les galeries d'EDF montre queceux-ci peuvent être regroupés entrois catégories :- galerie en charge dans un massifsans nappe phréatique (2 incidents) ;- galerie avec une couverture infé-rieure à la charge de service (10 in-cidents) ;- galerie en charge avec risques dedissolution du gypse (4 incidents),d'érosion (2 incidents).Ces faits confirment qu'un revêtementen béton simple ou même ferraillén'assure pas une étanchéité suffisantepour des pressions de service supé-rieures à 10 mètres. Seule une contre-pression dans le massif assure l'étan-chéité du système béton-terrain.

4.1 CRITÈRE D'ÉTANCHÉTTÉNATURELLE DU MASSIF

L'étude du projet devra donc s'atta-cher à s'assurer que le terrain a uneétanchéité naturelle. Pour ce faire, enplus de l'étude géologique classique(carte géologique, inventaire des sour-ces...), s'il y a un doute sur l'existanced'une nappe, une étude piézométri-que devra être faite, comportant desessais d'eau à la pression de service(cf § 4.5).Dans le cas où il n'existerait pas denappe, ou si l'économie du projetn'admet pas de fuites, le recours àun revêtement parfaitement étanche(blindage métallique, membrane...) esten général nécessaire. Cependant,dans certains cas bien particuliers(cœur de massif traversé de quelquesgrandes fissures) un traitement parinjection peut suffire.

4.2 CRITÈRE DE COUVERTURE

Quelques règles simples qui avaientété énoncées par J.A. Talobre, relativesà la hauteur de couverture, sont àprendre en compte :

- Si la charge est h (exprimée en mètresd'eau), une couverture minimale (verti-cale ou latérale) supérieure à h garantitl'étanchéité, à condition que l'eau nepuisse pas éroder ou dissoudre laroche. Un revêtement simple est suffi-sant (1).- Une couverture comprise entre h et0,6 h ne garantit plus l'étanchéité etlaisse apparaître des risques de renardpar débourrage des fissures à remplis-sage meuble.- Une couverture comprise entre 0,4 het 0,6 h rend critique le risque derenard. Elle permet encore la stabilitéd'un revêtement simple en béton, maisn'assure plus l'étanchéité.- Une couverture comprise entre 0,2 het 0,4 h n'assure la stabilité que ai lerevêtement est armé. L'étanchéité n'estplus assurée.- Une couverture inférieure à 0,2 h doitêtre considérée comme insuffisante.Elle comporte un risque de crevaison.

Ces règles conduisent à mettre enplace un blindage pour assurer la par-faite étanchéité de la galerie dès que hest supérieure à la couverture. Û estvrai que dans certains cas et jusqu'àune couverture égale à 0,4 h, cetterecommandation peut paraître sévère,en particulier si l'on se réfère à ce quise pratique à l'étanger : des essaisd'eau à la pression se service, bienreprésentatifs d'un risque de débour-rage des fissures, sont alors néces-saires pour justifier une dérogation.Une attention particulière doit êtreportée aux extrémités de galerie dé-bouchant dans des éperons trèsétroits, avec risque de poussée auvide.Dans le cas où l'on dérogerait à larègle, il est nécessaire de réaliser desreconnaissances spécifiques permet-tant de décider ou non de blinder, etdans ce dernier cas, de définir la lon-gueur de blindage.Pour ce faire, des essais d'eau à lapression de service, de longue durée(24 heures) devront être réalisés enforage sur le tracé de la galerie défini-tive suivant au moins deux directionsperpendiculaires, par exemple, à par-tir d'une galerie de reconnaissance. Hsera en outre nécessaire de s'assurerde la représentativité de ces essaispar rapport à l'ensemble du massif

( 1 ) Sous réserve que le critère d'étanchéité natu-relle soit vérifié.

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4.3 CRITÈRE DE SOLUBILITÉ

Dans le cas de rencontre de gypseassocié souvent à des cargneules éro-dables, la galerie doit être systémati-quement blindée pour assurer sonétanchéité (aménagement de l'Arly,galerie de Belle Place du collecteursud d'Emosson, galerie d'amenée deLa Bathie).Par contre, pour les traversées d'an-hydrite massive qui généralement setrouve confinée au cœur du massif, iln'est pas nécessaire de recourir à unblindage (Isère-Arc, Ponturin, Arcdans Tignes, adduction amont deMont-Cenis, La Coche, Echaillon). Ce-pendant, une bonne injection de con-finement du terrain autour de la gale-rie est indispensable pour laisser leminimum de vide.Dans ce dernier cas, on admettra quesi des désordres doivent un jour seproduire, c'est à long terme (10-15 ans)et que le choix définitif de la solutionsoit fait sur un plan technico-écono-mique.

4.4 CRITÈRE D'ÉRODABHJTÉ

L'existence de terrain érodable : my-lonite argileuse de faille, cargneulesterreuses... nécessite, soit un renfor-cement du revêtement béton, soit unesurépaisseur du blindage si celui-cin'a pas été dimensionné pour ce typede terrain.Le choix, blindage ou non blindage,est difficile à faire et reste un problèmed'appréciation technico-économique.n dépendra de la longueur de la zone àtraiter, de la pression intérieure, ducontexte géologique et hydrogéolo-gique (risque d'exutoire pour lesfuites...).

4.5 CRITÈRES GÉOTECHNIQUESPOUR LE DIMENSONNEMENTD'UN BLINDAGE

4.5.1 Détermination de longueurde blindage

Dans le cas où les autres seraient res-pectés, le critère de perméabilité de-vient prépondérant.

4.5.1.1 Essais pour évaluerla perméabilitéCeux-ci, de type Lugeon (1), serontréalisés dans des cavernes d'essaisexceptionnellement (exemple : Mon-tezic, Revin...) ou plutôt en sondages(Sarenne, Saint-Guillerme H, Redénat,Orlu...) sur le tracé des futurs ouvrages.

(1) Valeur de l'unité Lugeon : 1 1/mn/m sousIMPa.

Us consisteront à injecter de l'eau parpalier et suivant des cycles à pressioncroissante et décroissante jusqu'à unepression de 20 % supérieure à la pres-sion de service. Ce dernier palierdevra être maintenu pendant 24 heu-res.

Des graphiques pression-débit seronttracés. La précision de la méthodepermet de connaître la perméabilitéexprimée en m/s à une demi-puis-sance de 10 près.

4.5.1.2 Représentativité

Ces essais ont un caractère ponctuel,même réalisés sur une longueur deplusieurs dizaines de mètres ; il estdonc nécessaire de les exécuter sur letracé des ouvrages définitifs jusqu'àrencontrer une zone de perméabilitésatisfaisante ne nécessitant pas unblindage.

4.5.1.3 Historique rapide des essaisHaute Pression

Parmi les essais haute pression réali-sés par EDF, on peut citer ceux faitspour l'aménagement de la "Chute desBois" à Chamonix (1968-1973) dansune galerie bouchonnée. Le réglagepression-débit a été difficile à maîtri-ser. La pression maximum atteinte aété de 12 bars.Lors de la construction de l'usine deCheyïas (1971) ces mêmes essais ontété reconduits.Lors des reconnaissances de la gale-rie de Revin ( 1970) un tronçon de 60 mde longueur a été réalisé en <t> 3 m. Desessais pression-débit ont été poussésjusqu'à une pression de 40 bars pourétudier l'efficacité d'un revêtement enbéton armé sur l'étanchéité.Lors des reconnaissances de l'usinede Montezic (1975) un essai hautepression a été réalisé sur un sondagede 100 m parallèle à la galerie princi-pale et équipé d'une série d'obtura-teurs. Le dispositif de pompes permet-tait d'atteindre des débits de 10 1/ssous 60 bars.Pendant les reconnaissances des puitsde chute de Redénat (1980-1981) unsondage vertical profond de 300 m aété réalisé. 3 tranches de 50 m cha-cune ont fait l'objet d'essais H.P. Lapression maximum développée entête du forage était de 30 bars. Comptetenu de la pression hydraulique natu-relle due à la nappe présente dans lemassif, la pression maximale d'essai aété de 52,5 bars à 275 m de profondeur,correspondant à environ 2 fois la pres-sion de service.A Saint-Guillerme II (1979) des essaisd'eau en sondages ont été poussésrespectivement à 30 bars et 40 bars,afin de déterminer l'arrêt du point deblindage de la cheminée d'équilibre

correspondant au rocher pouvantsupporter 2 fois la pression de service.Lors du creusement de la galerie dereconnaissance de la Sarenne (cam-pagne de reconnaissance de 1984)des essais d'eau haute pression ont étéréalisés en sondage. Les 2 sondagesSI et S2 séparés de 1 m avaient uneincidence différente de façon à ce qu'à30 m de l'origine, l'écartement soit de10 m. La pression d'injection a étépoussée jusqu'à 70 bars, n n'y a pas eucommunication entre les 2 sondagesmalgré la présence d'une venue d'eau.Le rocher (amphibolite des GrandesRousses) a été considéré comme par-faitement étanche.Enfin, bien que cet essai soit différent, ilfaut citer l'expérience réalisée, lors del'Aménagement de Super-Bissorte, envraie grandeur sur un tronçon de gale-rie d'essai blindée d'une longueur de20 m. La pression a été poussée jusqu'à250 bars, on en a déduit une limite dedéformation admissible de l'acier ainsique la réponse mécanique du rocheraux pressions intérieures.

4.5.1.4 Exemple des essaisd'Orlu (Ariège)

Dans le cadre d'un projet d'étuded'une station de transfert d'énergie parpompage, au milieu des années 1980,comprenant une usine souterraineavec 2 puits de chute de 1.600 m delongueur, les essais d'eau proprementdits ont eu pour objectif, l'étude del'étanchéité du massif rocheux, ainsique du comportement du système defissuration soumis à une pressionpouvant atteindre progressivement15 MPa sous une couverture d'environ450 m. Le seuil de pression maximale aété fixé à 15 MPa pour permettre deconclure le cas échéant à un dimen-sionnement minimum des blindagesdes puits HP. et ainsi de diminuer trèssensiblement le coût du projet. Eneffet, le cadre géologique du projetpermettait d'espérer de bons résultats.Pour ce faire 2 sondages ont étéimplantés à l'extrémité de 2 rameauxlatéraux de 17,50 m de longueur réali-sés depuis l'extrémité du tronçon deliaison avec la galerie de reconnais-sance.

a/ Le sondage "actif" :

C'est le sondage dans lequel ont étéréellement mis en œuvre les essaisd'eau haute pression par passes delongueurs variables et paliers depression progressifs, n a une longueurtotale de 125 m.Ce sondage est carotté en <t> 101 mmminimum pour permettre laréalisationdes différents essais géotechniques

TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS — N° 112 — JUILLET/AOUT 1992 20S

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intervenant avant les essais d'eau H P.proprement dits :- un essai d'eau basse pression typeLugeon tous les 10 m,- un essai au dilatomètre sur chaquepasse testée lors des essais HP,- une reconnaissance du massif envi-ronnant par microsismique à la paroi,- une mesure de déviation du forageen fin d'essai.Pour des raisons de sécurité liées à unéventuel contoumement de l'obtura-teur lors des essais H.P, il a étéconvenu de neutraliser par un tubagescellé au rocher, les 50 premiersmètres du sondage.La partie entre 50 et 95 m dans laquellese sont déroulés les essais H.P. mon-tant progressivement à la pression de10 MPa a eEe aussi été tubée Lesessais haute pression à 15 MPa sesont situés dans la tranche 95 m -125m.

Fig. 7 - Graphique des paliers d'injection de la tranche 4 bis.

b/ Le sondage "passif"

C'est un sondage d'absorption quipermet, lors des essais haute pression,de recueillir éventuellement une par-tie de l'eau injectée dans le massif parle sondage "actif"Comme l'actif, ce sondage est carottéen diamètre minimal de 101 mm pourpermettre la réalisation de diversessais géotechniques- un essai d'eau basse pression typeLugeon tous les 10 mètres,- deux essais au dilatomètre,

- une reconnaissance du massif envi-ronnant par microsismique à la paroi,- une mesure de déviation du forage

c/ Conduite des essais haute pression

Le principe général des essais a été lesuivant- réalisation d'un premier cycle enmontant par paliers de 10 bars mainte-nus pendant 1 /2 heure jusqu'à la pres-sion maximale de la tranche testée,

- maintien de cette pression maximalependant 1 ou 2 heures,exécution de 2 cycles réalisés par unemontée en pression rapide (1 ou 2 pa-liers intermédiaires) avec maintien1 heure à la pression maximale et des-cente brutale à zéro,- exécution d'un dernier cycle avecmaintien de la pression maximale pen-dant une longue durée (24 heures engénéral),- descente par paliers de 10 bars en find'essai jusqu'au niveau d'équilibre dela pression du massif

\

\

essai au vérin à piaques de charge• essai au dilatomètre

——— mesures de pressions———— mesures de température——— mesures de débits———— conduite H P

Fig 6 - Principe des mesures réalisées pour l'aménagement d'Orlu.

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La conduite réelle des essais est résumée par le tableau ci-après :

Essai n° 1

Essai n° 2

Essai n° 3

Essai n° 4

Essai n° 4 bis

Essai n° 5

Essai n° 5 bis

Tranchetestée

50- 65m

50- 80m

50- 95m

95- 110m

95- 110m

95- 125m

95- 125m

Pressionmaximale

50 bars

80 bars

100 bars

150 bars

150 bars

140 bars

140 bars

Duréemax. dupalier

4h

24 h

24 h

24 h

2h

2h

2h*

Observations

Après injectiond'étanchéitéà 100 bars

Après injectiond'éfanchéitéà 125 bars

* Suite à un incident au cours de la montée en pression vers le dernier palier de longue durée (24 heures),cet essai a dû être interrompu.

d/ Conditions géologiques :

- Les 2 sondages actif et passif ont étéréalisés dans la migmatite qui consti-tue le faciès rencontré dans cette zoned'Orlu. C'est un matériau massif consti-tué par l'alternance de passées gneis-siques avec une nette orientation desmicas et des passées homogènes ri-ches en quartz et feldspath.- Aucun des 2 sondages n'a rencontréd'accident géologique important et lepourcentage de carottage a été tou-jours supérieur à 90 % et la plupart dutemps égal à 100 %.- En ce qui concerne la fissuration,toutes les fissures sont fermées sansremplissage argileux. La fréquencedes fissures est beaucoup plus impor-tante sur le sondage passif que surl'actif. On peut estimer sur l'ensembledes carottes du sondage actif une fré-quence comprise entre 0 et 3 fissures/mètre alors que sur certaines zones dupassif on observe plus de 20 fis-sures/mètre.- n existe une nappe circulant dans lemassif à travers quelques fissuressaines, avec une pression hydrostati-que de 11 bars environ.

e/ Résultats

L'observation des courbes pression-débit du sondage actif que l'on peutconstruire à partir des enregistre-ments continus en cours d'essai con-firme le caractère homogène durocher mis en évidence par le levégéologique et les essais d'eau bassepression.- De manière générale, on constateune augmentation très importante dudébit absorbé par le rocher au-delàd'une pression de 60 bars.

- On n'observe pas de variations sen-sibles du débit absorbé au cours despaliers longue durée.La relation pression-débit que l'on cal-cule à partir de cet ensemble devaleur expérimentale, s'écrit :0 (1/m/mm) = 1,42 10-7 P«2 bars (1)

Coefficient corrélation : 0,94.

On confirme ainsi la très bonne homo-généité du rocher qui a été testé. Onmet en évidence un phénomène par-faitement continu qui correspond àl'ouverture élastique des fissures quel'on peut considérer comme ferméesau début de l'essai. Une relation entrele débit et la pression est établie. Lapression d'ouverture des fissures estde l'ordre de 60 à 80 bars. Cette valeurest à comparer avec les valeurs mini-males des contraintes verticales me-surées in situ (§ 3.4).Concernant le sondage passif, celui-cin'est pratiquement pas influencé par lamise en pression du forage actif toutau long de l'essai La comparaison despressions entre les 2 sondages montreque la pression du sondage passif avarié entre 9 et 12,5 bars au cours desdifférents essais H.P. Les mesureseffectuées après la fin des tests, ontconfirmé que les mesures de pressionenregistrées pendant l'essai HP sur lesondage passif correspondaient à lapression de la nappe hydrostatique dumassif.Un état zéro de mesures d'eau autourde la zone des essais dans un rayon de5 à 100 m avait été fait. Pendant la réali-sation des essais, aucune augmenta-tion de débit n'a été enregistrée.

F/g. 8 - Essais haute pression en sondage ;relation pression/débit

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il Effets des injections d'étanchéité :

2 injections ont été réalisées après lesessais n° 4 et n° 5 respectivement à100 bars et 120 bars. La mise en pres-

sion était effectuée depuis la tête dusondage actif en une seule passe. Ona utilisé un coulis de ciment pur(CFA 55) avec un C/E = 1.Les quantités injectées ont été les sui-vantes :

Essai n° 4 bis

Essai n° 5 bis

Quantité de ciment

5,75 T

12,10 T

Volume injecté

7,7m3

16,5 m3

Fig. 9 - Comparaison des courbes pression/débitdans le sondage actif avant et après injection.

On constate que l'injection effectuéeaprès l'essai n° 4 sur la tranchée 95-110 m semble avoir été efficace. Eneffet, alors que le débit absorbé avantinjection sous la pression de 100 barsétait de 4301/mn, il passe à moins de1001/mn. Par contre, on retrouve desrésultats d'absorption comparablespour des pressions élevées (150 bars)après claquage du coulis.L'essai n° 5 reste légèrement influencépar l'injection du 4 bis.L'essai n° 5 réalisé après injection de latranche 95-125 m ne montre pasd'amélioration notable par rapport àl'essai n° 5.L'injection d'un rocher massif et peuperméable, même s'il est fissuré, restedonc un problème difficile à maîtriser.

g/ Conclusion :

Les essais haute pression réalisés àOrlu représentent une première tech-nologique. Us se sont globalement dé-roulés selon le schéma prévisionnel etont permis de déterminer une loi

débit-pression conforme à la théoried'ouverture élastique de fissures sousl'effet de la pression.Au niveau de l'application du projet,ces reconnaissances ont confirmé labonne qualité mécanique et l'homo-généité de la migmatite d'Orlu. En cequi concerne l'utilisation du rocherbrut pour économiser un blindage depuits haute pression, il faut retenir quesans injection, on observe une aug-mentation très importante des pertespar absorption du rocher au-delàd'une pression de 60 bars.Le problème de l'injection d'un rochermassif et fissuré de façon homogènen'est pas entièrement résolu. E estdonc conseillé de blinder la partieinférieure des puits jusqu'à unecote où la pression ne dépassera pas50 bars.Les reconnaissances géologiques ulté-rieures devront vérifier que les résul-tats obtenus dans la partie basse dutracé sont extrapolables à la partiehaute.

4.5.2 Détermination descaractéristiques mécaniquesdu rocher

Les expériences antérieures ont mon-tré que la participation du rocher à larésistance à la pression intérieurepouvait aller de 30 à 90 %. n est doncnécessaire de connaître l'état de con-traintes initiales, le module de défor-mation dans la zone influencée parl'excavation et hors de son influence.

4.5.2.1 Mesures de contraintes

Les mesures sont faites au vérin platsur les parois des galeries dans troisdirections, de façon à déterminer l'ani-sotropie de contraintes.Généralement, elles donnent des va-leurs dispersées, n est donc néces-saire de multiplier les points de me-sures.La technique de mesure par surcarot-tage en sondage est une solution quin'a pas encore eu les développementsescomptés.La technique par fracturation hydrau-lique représente sans doute une solu-tion intéressante pour l'avenir.

Exemple des essais d'Orlu :

Les essais ont été réalisés dans 6 ra-meaux perpendiculaires à la galeriede reconnaissance dans la zone usine.Les rameaux exécutés en $ 3,00 m ontune longueur de 10 m.Les essais au vérin plat permettent lamesure de la contrainte à la paroi. L'es-sai consiste à réaliser dans un plan decontrainte principale une saignéemince, puis à introduire dans celle-ciun vérin plat que l'on gonfle jusqu'àannuler le rapprochement des lèvresde la saignée résultant de la décom-pression. La pression P nécessairepour recouvrer l'état initial, mesure lacontrainte principale de la roche enplace, à condition :- que le champ de contrainte dans lematériau soit uniforme et normal auplan de la saignée. Ceci implique enparticulier que la saignée soit peu pro-fonde, de façon à ce que l'on puisseadmettre que la contrainte ne variepas en profondeur,- que les courbes de déformationsoient réversibles sans apparition defluage (matériau élastique).Dans le cas d'Orlu, l'histoire tectoniquedes Pyrénées, confirmée par les varia-tions locales des faciès de la roche(orientation préférentielle des micas)rend très difficile la prédéterminationde l'ellipsoïde des contraintes.H faudrait dans ce cas faire un trèsgrand nombre d'essais dans toutes lesdirections de l'espace et procéder defaçon statistique pour pouvoir recons-tituer les directions principales descontraintes et les quantifier.

208 TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS — N° 112 — JUILLET/AOUT 1992

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D'autre part, les 6 rameaux d'essaisdans lesquels ont été réalisés lesessais, ont en général une longueurtrop faible par rapport à leur diamètrepour que l'on puisse admettre unereparution des contraintes homogè-

nes à la paroi. H faut donc considérerles résultats avec précaution, ISessaisont été réalisés dans les 3 directionsde l'espace, soit 3 essais par chambreLes résultats sont résumés dans letableau ci-après

N° rameau

123456

V (MPa)

23,713,43,76,5

35,360,0

Hl (MPa)

6,028,615,815,019,527,3

H2 (MPa)

18,015,216,521,016,025,0

Nota:V correspond à la contrainte verticale,Hl correspond à la contrainte appliquée parallèlement à l'axe de la galène de

reconnaissance,H2 correspond à la contrainte appliquée perpendiculairement à la galène de

reconnaissance

Observations :

En première analyse, on constate unetrès grande dispersion dans les va-leurs des contraintes verticales Lavaleur de la contrainte verticale vanedans un rapport de 1 à 16 entre les6 essais réalisés, ce qui est énorme àl'échelle de la zone testée, d'où lesréserves préliminaires sur l'interpréta-tion de l'essaiLes contraintes faibles (40 à 60 bars)correspondent en général à des inclu-sions de pegmatite dans un faciès plusmicacé et gneissiqueLa valeur maximale de la contrainteverticale égale à 600 bars est impor-tante et peut éventuellement corres-pondre à une surcontramte locale, on aen effet observé quelques phénomè-nes d'écaillage lors de l'exécution desessaisLes mesures de contraintes réaliséesdans les 2 directions horizontales, sontplus homogènes A l'exception d'unevaleur non prise en compte, on obtienten moyenne- dans la direction Hl 212 bars

(écart type = 67),- dans la direction H2 186 bars

(écart type = 37)

4522 Mesures de déformabilité

a/ La mesure au vénn à plaque decharge ngide se fait dans une galènene dépassant pas 3 mètres de diamè-tre Elle correspond à un chargementmonoaxial allant jusqu'à 16 Mpa Cetessai permet de mesurer la déforma-bilité du rocher décomprimé autourde la galène

Les mesures de déformabilité permet-tent de définir deux types de modu-les (1)- le module de déformation globalequi correspond à la courbe enveloppede l'ensemble des cycles et qui intè-gre le serrage des fissures existantesdu massif affecté par l'exécution, il doitpermettre de calculerlejeu tôle-bétonlors du premier chargement,- le module de déformation élastique

(1) Les valeurs sont obtenues avec une précisionde I ordre de 20 % pour un massif homogènegéologiquement

du rocher sain au-delà de la zonedécompriméeDes mesures à la paroi par sismique-réfraction sont faites pour déterminerl'épaisseur du rocher décompriméb/ La mesure au dilatomètre en foragecorrespond à un chargement radiald'une cavité de diamètre 100 mm àune pression de 16 Mpa Cet essai peutêtre réalisé en plusieurs points d'unforage D permet de mesurer le mo-dule de déformation du rocher nonaffecté par l'excavation.Le maténel existant actuellement per-met de faire des mesures dans unforage vertical de 200 mètreaLa mesure au dilatomètre intéresse unvolume de rocher supéneur à celui del'essai au vénn à plaque ngide, doncintégrant un plus grand nombre de 1s-sures, les valeurs obtenues sont géné-ralement plus faibles, de l'ordre de 20 à50%.

Exemple des essais d'Orlu :Ces essais ont été réalisés au dilato-mètre Socosor 4> 95 mm dans un son-dage carotté au diamètre 101 mm Laséquence de mise en charge du ro-cher comprend 5 cycles de charge-ment-déchargement avec des pres-sions de fin de palier croissantes (4 -8 - 1 0 - 1 2 - 1 5 Mpa) Les paliers demontée et descente en pression sonten général fixés tous les 1 Mpa, aprèschaque cycle de façon à ne pas décol-ler l'appareil du rocher, ce qui fausse-rait l'essai Dans le cas des essais réali-sés à Orlu, la présence d'une nappehydrostatique en charge a entraînéune légère modification du seuil depression des paliers de retour decycles fixé à 25-30 bars pour évitertout incident

Fig 11 Choix des divers modules

16

12

10-

8--

4 -

Contrantes ( MPa )

Déformations

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