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GEORGE BENJAMIN MARTIN CRIMP Récit d’une collaboration

GEORGE BENJAMIN MARTIN CRIMP - Festival …...patience remarquable. Mais entre Martin et moi, ça s’est passé différemment les deux fois. Pour Into theLittle Hill, je n’ai rien

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Page 1: GEORGE BENJAMIN MARTIN CRIMP - Festival …...patience remarquable. Mais entre Martin et moi, ça s’est passé différemment les deux fois. Pour Into theLittle Hill, je n’ai rien

GEORGE BENJAMINMARTIN CRIMPRécit d’une collaboration

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sonnalités aussi différentes que Nathalie Richardpour Le Traitement en 2002, Luc Bondy pour Aufdem Land en 2003 et Cruel and Tender en 2004. Laprésentation parisienne de l’opéra Written on Skin,créé en 2012 au Festival d'Aix-en-Provence, ajouteun volet à cette histoire faite de confiance et defidélité mutuelles. À Londres fin août 2013, dans le quartier résidentielde Maida Vale, George Benjamin et Martin Crimpreviennent sur leur rencontre, détaillent les multiplesstratégies propres au travail en collaboration et nouscontent la progressive construction de cette aventureartistique et humaine « à partir de rien ».

Pierre-Yves Macé

Récit d’une collaborationGeorge Benjaminet Martin Crimp racontent

Impossible de commencer cet entretien autrementque par un récit de votre rencontre… George Benjamin : Pendant vingt-cinq ans, je n’aicessé de chercher quelqu’un avec qui travailler : desauteurs dramatiques, des poètes ou des cinéastes…En vain. Jusqu’au jour où, au cours d’un déjeuner,l’un de mes amis, Laurence Dreyfus – qui était àl’époque mon collègue au King’s College où j’en-seigne – me parle de Martin Crimp et me suggèrede le rencontrer. Trois jours plus tard, il m’en reparleau téléphone et m’apprend que Martin est un « fan »de ma musique. Je suis bien évidemment flatté. Maisj’apprends la vérité un peu plus tard : entre temps,Laurence Dreyfus est allé chez Tower Records, aacheté le seul disque de ma musique qu’il a putrouver, l’a immédiatement envoyé à Martin, lequel,après en avoir écouté une seule pièce a dit quelquechose comme : « Ca va ! ». Ensuite, je demande ànotre maison d’édition commune (Martin et moisommes tous les deux chez Faber), de m’envoyer sespublications, que je lis avidement, avec beaucoupd’enthousiasme. Quelques jours plus tard, nousavons une conversation téléphonique, et peu aprèsnous nous rencontrons. Martin Crimp : J’ajouterais que cet ami commun,Laurence Dreyfus, pour m’avoir entraîné à joueravec un de mes amis l’une des sonates de Bachpour viole de gambe et clavecin, connaissait monactivité secrète de musicien amateur, pianiste etclaveciniste…

GB : Martin est un très bon pianiste.MC :… Et cela a dû l’inciter à favoriser cette rencontre.Il y a un autre point, sans rapport direct avec cettecollaboration, mais qui montre que j’ai progressi-vement voulu amener la musique dans le cadre théâ-tral : à partir de Atteintes à sa vie (Attempts on HerLife, 1997), j’ai commencé à introduire des parolesde chanson dans mes pièces de théâtre. Par exemple,Face au mur (Face to the Wall, 2002) se termine parun blues. Et je dois avouer que, pour la mise en scènede Katie Mitchell au Royal Court, j’ai moi-mêmecomposé et interprété la musique, un blues de douzemesures, basé sur une simple progression d’accords. GB : Il faut ajouter à cela le grand enthousiasme deJoséphine Markovits à l’idée de notre collaborationet le succès des pièces de Martin au Festival d’Automneà Paris. Il y a donc eu un ensemble de forces conver-gentes : cet ami commun, l’éditeur et Joséphine,appuyée par Gérard Mortier.MC : En tant qu’écrivain, j’aime les propositions nou-velles. J’ai donc été fasciné par cette expérienceinédite pour moi : l’écriture d’un texte d’opéra.

Donc, vous vous rencontrez. Et à ce moment-là,avez-vous senti que quelque chose d’important étaiten train de naître ? GB : Pour ma part, je dirais plutôt que j’ai senti quequelque chose était enfin possible. J’ai eu l’intuitiondes qualités, humaines et artistiques, de Martin.J’étais enthousiasmé par ses écrits, l’esprit qui s’endégage et la personne qu’il y a derrière l’œuvre. Maisl’élément le plus important, étrangement, ça a étéla confiance. Je suis très solitaire et secret lorsqueje travaille – comme Martin d’ailleurs – et là j’ai sentique la communication passait. Mais il y a eu d’abordquelques différences, auxquelles nous avons dûnous habituer.

Par exemple ?GB : Je me rappelle en particulier ce terrible déjeunerà Richmond. Martin avait écrit une première scènepour Into the Little Hill, qui comprenait des motscomme « concrete » (béton), « limousine », «barbedwires » (fils de fer barbelés)… Des mots que je n’auraisjamais imaginé mettre en musique et qui ne me sug-géraient rien. Je n’ai pas aimé ce texte. Nous noussommes donc retrouvés pour déjeuner et après unedemi-heure de politesse à l’anglaise, j’ai commencéà me sentir embarrassé, inquiet, voire méfiant.Lorsqu’on collabore – ce qui était nouveau pourmoi –, on doit céder une grande part de sa proprevie créatrice à quelqu’un d’autre. Cela nécessite unegrande confiance. Je me suis ouvert de tout cela à

L’histoire de l’opéra célèbre volontiers les compo-siteurs et librettistes ayant instauré une collaborationlongue et fructueuse (Wolfgang Amadeus Mozart /Lorenzo Da Ponte, Richard Strauss / Hugo von Hof-mannstahl, Kurt Weill/Bertolt Brecht…). S’il est encoretrop tôt pour les réunir au sein de cet auguste pan-théon, le compositeur George Benjamin et le dra-maturge Martin Crimp n’en ont pas moins, en deuxœuvres communes, profondément marqué le paysagede l’opéra en ce début de XXIe siècle. Leur rencontretient de cette sorte de hasard heureux qui rétros-pectivement semble relever de la plus impérieusenécessité. Tout commence en 2004, lorsque, à l’in-vitation du Festival d’Automne, George Benjaminaccepte le principe d’une commande pour une œuvrelyrico-dramatique de format restreint et de minutagelibre. Projet inédit, et pour cause : si son catalogued’alors comprend trois œuvres vocales (A Mind ofWinter, 1981, sur un texte de Wallace Steven, UponSilence, 1990, sur un poème de Yeats, et SometimeVoices, 1996, sur un extrait de The Tempest de Sha-kespeare), jamais le compositeur ne s’est encoreaventuré sur le terrain de l'opéra. La rencontre avecMartin Crimp va accélérer le processus et libérerl’invention longtemps retenue. Le drame lyrique Into the Little Hill est créé en 2006à l’Amphithéâtre de l’Opéra national de Paris-Bastilledans une mise en scène de Daniel Jeanneteau et deslumières de Marie-Christine Soma. Martin Crimpn’est alors pas un inconnu pour le public du Festivald’Automne : dès le début des années 2000, plusieursde ses pièces y ont été mises en scène par des per-

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Opéra Comique, 16, 18, 19 novembre 2013

Written on SkinMusique, George Benjamin Texte, Martin Crimp

Opéra en trois parties, en anglais surtitré en françaisDurée : 1h40

The Protector, Christopher PurvesAgnès, Barbara HanniganAngel 1 – The Boy, Iestyn DavisAngel 2 – Marie, Victoria SimmondsAngel 3 – John, Allan Claytonet David Alexander, Laura Harling, Peter Hobday, Sarah Northgraves

Mise en scène, Katie MitchellScénographie et costumes, Vicki Mortimer Lumière, Jon Clark

Orchestre Philharmonique de Radio FranceDirection, George Benjamin

Assistant musical, Gerry CorneliusCollaborateur artistique, Benjamin DavisAssistant mise en scène, Dan AylingAssistant décors et costumes, Matthew HellyerChefs de chant, Alphone Cemin, Ouri BronchtiMaître d’armes, Kate Waters

Commande et coproduction : Festival d’Aix-en-Provence, Nederlandse Opera Amsterdam, Royal Opera House Covent GardenLondon, Théâtre du Capitole de ToulouseCoréalisation Opéra Comique, Paris ; Festival d’Automne à Paris

En partenariat avec France Inter

France Musique enregistre et retransmet en direct la représentation du 19 novembre

Photo de couverture : © Pascal Victor

Complément au programme édité par l’OpéraComique à l’occasion des trois représentationsde Written on Skin

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patience remarquable. Mais entre Martin et moi, ças’est passé différemment les deux fois. Pour Into theLittle Hill, je n’ai rien envoyé avant d’avoir achevél’écriture. À ce moment-là, nous n’avions pas encorevéritablement établi notre confiance mutuelle. Ouplutôt : je lui faisais confiance, mais je sentais malgrécela que c’était mon œuvre et qu’il fallait que jem’isole pour la réaliser. MC : Pour Written on Skin, nous avons procédé autre-ment. Avec le recul, il semble évident que pour uneœuvre d’un tel format, un feedback entre nous étaitnécessaire. Il fallait que je sente que George étaitsatisfait du travail en cours. À l’inverse, ce n’étaitpas nécessaire que George m’envoie ses esquissesà lui, car c’est toujours magnifique, je n’ai rien àredire ! GB : Je l’ai fait, pourtant, je lui ai envoyé chacunedes quinze scènes dès qu’elles étaient terminées.Pendant l’écriture, nous sommes constamment encontact. Parfois, j’ai dû retirer des mots. Cela m’atoujours été très douloureux, mais heureusementMartin m’a toujours permis de faire ce que je voulaisavec ses textes. Dans Into the Little Hill, je n’ai presquerien coupé : quatre lignes, au plus. Par contre, dansWritten on Skin, pour des raisons de dramaturgie,j’ai dû couper davantage. Par exemple, quand je

choisis de rendre le texte lyrique, en étirant les mots,s’il y a trop de mots, cela déséquilibre la structure.J’ai donc dû me séparer avec regret de certaines desplus belles phrases du texte. MC :Comme a pu le dire Samuel Johnson** , « chaquefois que vous tombez sur un passage qui vous sembleparticulièrement réussi, biffez-le ». George a donceu raison (rires) ! Ça s’est passé ainsi pour les minia-tures, ces descriptions d’images qui reviennent plu-sieurs fois dans l’opéra, comme en écho aux chœursde Into the Little Hill. J’imaginais en écrire quatre,mais George préférait qu’on n’en fasse que trois. Etil avait raison, car avec quatre, on aurait amoindrila force de la toute dernière. GB : D’ailleurs, ces trois miniatures ont obéi à uneforme très particulière de co-écriture, un peu commeun palimpseste. MC : Nous prenons très au sérieux les questions formelles et structurelles, comme une sorte de méta-physique. Sachant que les « jeux formels » intéres-saient beaucoup George, je me suis permis, dans cestrois miniatures, de rendre mon écriture plus « for-maliste » qu’elle ne l’est habituellement. J’ai écrit lapremière (qui correspond au moment où « The Pro-tector » accueille « The Boy ») de façon plutôt ins-tinctive. Puis, quand est venu le moment d’écrire

Martin. Et au lieu de jeter l’éponge comme je le crai-gnais, il s’est montré au contraire très compréhensifet courtois. S’est alors engagée une conversationtrès profonde. Et de fait, en trois quarts d’heure,nous avons esquissé la structure complète de l’opéra,structure à laquelle nous sommes plus tard restésfidèles. Ensuite, tout est allé au mieux.MC : Oui, j’ai dû interroger mes propres processusd’écriture. Alors que l’on peut faire une pièce dethéâtre à partir de la banalité la plus quotidienne(comme le fait Tchekhov par exemple), cette « poé-tique du banal » ne fonctionne pas à l’opéra. Il y aun je-ne-sais-quoi dans la musique de George quine s’y accorde pas. Nous partageons un principe quia sans doute favorisé notre rapprochement : la néces-sité de poser de fortes contraintes formelles dansune œuvre. Je suppose que c’est évident en musique,mais je n’y avais pas pensé avant que George ne leformule. Des contraintes d’intervalles, d’harmonie,mais également des contraintes plus élémentaires :par exemple, pour Into the Little Hill, nous savionstrès tôt qu’il n’y aurait que deux chanteurs et unpetit orchestre de chambre. Ces contraintes sontdéterminantes, car en art il n’y a pas de formesreçues : on commence toujours à partir de rien. GB : Du moins c’est ce que l’on ressent…MC :C’est vrai, c’est ce que je ressens pour mes piècesde théâtre. Mais lorsqu’on regarde dans le cataloguede George, il n’y a pas de quatuor à cordes ou deformes classiques de ce genre.

Comment travaillez-vous ? Avez-vous élaboré uneméthode particulière ?MC : Nous n’avons pas vraiment de méthode. À cha-cune de nos rencontres, nous essayons d’établir uneliste de livres à lire ou de films à regarder. Nous pro-cédons à une sorte d’« échange de biens culturels ».Par exemple George est un admirateur de JosephConrad, ce qui m’a ramené à son œuvre que je n’avaispas lue depuis des années. GB :Et Martin m’a introduit à William Golding* quiest, à mon sens, le successeur de Conrad. Nous dis-cutons énormément et commençons par nous mettred’accord sur ce que nous ne voulons pas faire, cequi nous semble à éviter. Pour Written on Skin, avantde trouver le conte médiéval du Cœur mangé, nousavons testé plusieurs sujets, dont l’un, je me souviens,à partir d’une pièce d’Ibsen. MC : À ce moment-là, le processus consistait à ceque je montre à George des esquisses d’une pageou deux dont nous discutions ensuite, n’hésitantpas à dire « non » lorsque ça ne fonctionnait pas. Etmême lorsque nous avons trouvé le bon sujet, j’ai

écrit deux ou trois versions différentes, qui étaientautant d’approches possibles du même matériau dedépart. Mon impulsion première consistait à dire :j’ai mon histoire, je vais maintenant m’en emparer,la moderniser. Mais j’ai vite réalisé que les particu-larités de la période historique résistaient à ce processus. La vie à cette époque était à la fois pro-fondément métaphysique, par l’influence de la reli-gion, et très physique dans son rapport à la nature.La religion chrétienne venait alors d’instaurer lapratique de la confession, que certains universitairesconsidèrent comme le germe de l’individualismemoderne. Dans l’opéra, Agnès réclame vivement sonstatut d’individu en disant à son mari : « Je ne suispas “la femme”, je suis Agnès». Pour toutes ces raisons,je voulais conserver des traces du Moyen Âge dansle texte, mais sans pour autant écrire un drame his-torique. C’est ainsi que l’idée des anges est apparue.C’était pour moi une manière d’avoir « le beurre etl’argent du beurre », un peu comme pour dire : « Ceciest une vieille histoire, mais nous vivons bel et biendans le temps présent ! ».GB : Nous avons fait beaucoup de recherches surle Moyen Âge provençal, nous avons lu beaucoupde livres, consulté des manuscrits médiévaux à labibliothèque... Cela m’a été utile pour comprendreautant que possible les croyances, les habitudes, lesdéterminations sociales et religieuses de l’époque.J’ai pu également mesurer le rôle significatif de l’artet apprécier les œuvres des troubadours et des enlu-mineurs, foisonnantes de créativité.MC : C’était pour moi une nouvelle manière de tra-vailler. À la base, je n’apprécie pas tellement de passerdes heures dans une bibliothèque. Mais dans lecadre d’un projet spécifique, j’ai pu découvrir la joieconsistant à se plonger dans toutes sortes de livres.C’était déjà le cas pour Into the Little Hill. Commeil s’agit d’une histoire que tout le monde connaît(Le Joueur de flûte de Hamelin), je suis remonté à sapremière version anglaise, qui date de 1604 et dontj’ai récupéré une réédition ancienne, du début duXVIIIe siècle. Et c’est de là que vient le titre, car dansce texte, il était question d’une petite colline (ortho-graphiée joliment avec un seul « t » : « litle hill »).

Puis, plus tard, lorsque vous êtes dans le processusd’écriture proprement dit, est-ce que vous échangezdes esquisses ?GB : Pour les deux opéras, hormis les commanditaires(Joséphine Markovits pour le premier et BernardFoccroulle pour le second), personne n’a été informédu sujet avant que le travail n’approche de sa fin.Ceux avec qui nous avons travaillé ont été d’une

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Sinon, il m’aurait fallu dix ans pour écrire l’opéra !J’ai mis six mois à écrire Into the Little Hill et vingt-six mois pour Written on Skin, ce qui est plutôtrapide, à plus forte raison pour un compositeur lentcomme moi. Les textes de Martin m’ont véritablementstimulé. Par exemple, les trente-cinq dernièresminutes de Written on Skin, je les ai écrites et orches-trées en quatre mois.

Comment, avec le recul, expliquez-vous le succèsde votre collaboration ? GB : Je crois que, pour qu’une collaboration artistiquefonctionne, il faut bien entendu un terrain d’ententecommun, mais également une part de différence :quelque chose qui ne soit pas entièrement compré-hensible ou assimilable par l’autre, sans relever pourautant du mystère. Il est bon qu’il y ait une certainetension, un peu de magie également. Nous parlonsbeaucoup, mais il y a aussi des aspects du travaildont nous ne parlons pas.MC : Oui, c’est une question de pudeur. Il ne nousarrive jamais de déclarer péremptoirement : « Jeveux accomplir ceci » ou « Voilà ce que je vais faire ».Ce serait mortifère. C’est là l’une des chances quenous avons eues avec les producteurs de nos opéras.Tant Joséphine Markovits que Bernard Foccroullen’ont cessé de nous encourager à continuer sur notrelancée, nous laissant une totale liberté et sans nousinterroger sur l’avancement et le développementdu travail. GB : Oui, encore une fois des personnes qui nousont fait confiance et à qui nous avons pu faireconfiance… et les deux en France.

Je suppose qu’il est encore trop tôt pour parler devotre prochaine œuvre…GB : Tout ce que nous pouvons dire, c’est que noussavons ce que nous ne voulons pas faire, mais nesavons pas ce que nous voulons faire. Cela fait à peuprès 1% du travail !

Entretien et traduction, Pierre-Yves Macé

*William Golding (1911-1993) est un écrivain britannique,Prix Nobel 1983, dont l’œuvre (notamment le premierroman Sa Majesté des mouches, 1954) énonce une critiquevirulente de la nature humaine et de la civilisation. ** Samuel Johnson (1709-1784) est l’une des figures majeuresde la littérature anglaise du XVIIIe siècle.

Droits de représentation : Faber Music London, représenté par Alkor – Édition Kassel

les deux autres, j’ai fait en sorte que chacune deslignes comprenne exactement le même nombre desyllabes. J’ai pensé alors : quel cadeau pour un com-positeur d’avoir trois fois la même structure ! Maisce n’en était pas un. GB : Ça aurait pu…MC :Oui, mais ce n’était pas pertinent, dramatique-ment parlant, d’avoir trois fois la même chose. Cela,George l’a immédiatement compris. Vous voyez, jesuis censé être le dramaturge, mais George est vraimenttrès bon sur toutes ces questions de dramaturgie !J’ai donc très sévèrement coupé les deux premièresminiatures, et laissé la dernière telle quelle. Ainsi,dans le déroulement de l’opéra, chaque miniatureest plus longue que la précédente, ce qui est excellentpour l’efficacité du drame. Malgré cela, dans monesprit subsiste toujours le « fantôme » de toutes cesphrases retirées des deux premières miniatures…

Dans les deux opéras, il semble que l’intelligibilitédu texte soit au centre de la poétique. MC : En cela, j’ai dû modifier ma façon d’écrire. Ilm’a fallu épurer l’écriture et aller précisément dansle vif du sujet. À l’opéra, il n’y a ni le temps ni l’espacepour demeurer en dehors. J’ai donc dû renoncer àcertains des procédés (parfois des maniérismes) parlesquels je « faisais la musique » de mes pièces dethéâtre, notamment la superposition des dialogues,tout ce qui fait la pulsation rythmique de l’écriture.Cela étant dit, l’un de mes grands bonheurs en décou-vrant la musique de George a été de réaliser qu’ilsuperposait mes dialogues – qu’il retrouvait donc,spontanément, un procédé que j’avais abandonné.Écouter ces voix entrelacées a été un plaisir inattendu. GB : Parmi les innombrables choses qui m’ont fascinédans cette expérience d’écriture pour la scène, il n’yavait pas seulement la nature des émotions associéesau drame, mais également la juxtaposition et lasuperposition de ces différentes émotions. Par exem-ple, dans la huitième scène de Written on Skin, Agnèsessaie de rester calme pendant que son mari, furieux,l’insulte. Là, le jeu de pouvoir entre les deux per-sonnages doit être simultané : pris par leurs émotions,ils n’attendent pas poliment que chacun parle l’unaprès l’autre, au contraire ils se heurtent. Et toutcela peut se représenter musicalement : l’un des per-sonnages chante plutôt piano, legato, dans un modeet une métrique donnés, pendant que l’autre per-sonnage chante forte, staccato, dans un autre modeet une autre métrique. Plus généralement, c’est làl’essence de la musique, de traiter le temps non seu-lement comme une simple succession d’événements,mais de manière fluide et complexe.

Les deux opéras témoignent de la recherche d’unecouleur spécifique, au plan de l’orchestration, notam-ment. Peut-on dire que cette orchestration découledes mots du texte, un peu comme si le mot était àl’histoire ce que l’orchestration est au « texte »musical ? GB : L’orchestration n’est pas une simple questionde couleur. Comme tout ce qui constitue la musique,l’orchestration est un élément au sein de la structure,simplement cela. Et il en est de même des textesde Martin : l’agencement des mots comme la structureglobale sont incroyablement construits, pensés defaçon architecturale. Et ce souci de construction esten harmonie avec la manière dont j’appréhendechaque élément musical, dont celui de la couleur.J’aime également l’idée qu’une œuvre musicale aitune couleur spécifique et globale, une sorte de tona-lité, de température qui serait perceptible « à dis-tance ». Into the Little Hill a ce genre de couleur etil me semble que Written on Skinégalement, quoiquela palette soit plus variée. Et il est certain que celavient du texte, de son imagerie, ses atmosphères,ses actions et ses couleurs diverses. MC : Bien entendu, lorsque j’écris pour George, jene cherche à prédire d’aucune manière la nature dela musique qui en naîtra. Cela serait destructeur etmême impossible. Je fais en sorte que le texte aitsa propre vie interne, ce qui dépend essentiellementde la force des relations entre les personnages etde la puissance visuelle du monde qui est représenté.

L’orchestration fait montre d’un grand sens du détail,qui est peut-être différent de l’épure qui caractérisele texte et son traitement vocal : comme s’il étaitpossible de « cacher » quelque chose dans la musique,d’y introduire des éléments à peine perceptibles.GB : Je ne pense pas « cacher » des éléments dansma musique, hormis peut-être certains « échafau-dages » pré-compositionnels et quasi-subliminaux,qui en tant que tels ne sont d’aucun intérêt pourl’auditeur. En principe, avec une bonne acoustiqueet dans de bonnes conditions, tout devrait s’entendre.Je pense que c’est comme pour le texte : les motssont simples, mais le texte lui-même est loin del’être. De même, si elle met en valeur le texte, lamusique n’a rien de simple. J’ai été inspiré à cet égardpar l’incroyable complexité du détail dans les enlu-minures des manuscrits médiévaux. Cela étant dit,l’attention au détail n’a pas été la même pour Writtenon Skin que pour mes pièces antérieures. J’ai dûdévelopper une technique d’écriture d’esquisses quine soit pas trop détaillée. Il fallait que j’écrive à peuprès dix fois plus vite, que je sois pris par l’action.

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Président : Pierre RichardDirecteur général : Emmanuel Demarcy-MotaDirectrices artistiques : Marie Collin, Joséphine Markovitswww.festival-automne.com

Président : Maryvonne de Saint PulgentDirecteur : Jerôme DeschampsDirecteur adjoint : Olivier ManteiPlace Boieldieu – 75002 Pariswww.opera-comique.com

L’Opéra Comique remercie L’AMOC pour son soutien à Written on Skin

et ses partenaires

Partenaires média du Festival d’Automne à Paris

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talie Nougayrède

François Hollande l’avait promis, le

gouvernementestenpassede le faire:

repenser le droit d’auteursur Inter-

net,modifier lesystèmederémunéra-

tiondesmusiciensoudescinéastessurla

Toi-

le, changer la façon dont les pirates

de films

oudemusiques sontmis à l’amende.

Les 80 propositions que Pierre Lescure a

dévoilées, lundi 13mai, ne sont pour

l’instant

qu’à l’état de rapport, et l’on ne compte plus

les pavés de cegenre (ici, plus

de 700 pages)

qui ont rejointla poussière des étagères. La

ministrede la culture,AurélieFili

ppetti, sem-

ble néanmoins déterminée à appliquer les

principales recommandations du patron du

ThéâtreMarigny. On le saura en juin. Le plus

difficile est ailleurs. Car Internet – on l’a vu

danslepassé–se jouesouventd

etellesdispo-

sitions réglementaires.

D’autant que Pierre Lescure, avec sa

«Contributionaux politiques culturelles à

l’èrenumérique», chercheunéquilibre fragi-

le, qui traduit d’abord les contr

adictionsde la

gauche: défendre les créateurs

tout en étant

plus clément avec ces jeunes etmoins jeunes

qui voient en Internet un espace de liberté –

et se fichentpasmal dudroit d’auteur.

C’est patent dans les deux principales

mesures.D’uncôté,créerunetaxe

de1%envi-

ron sur la vente detous les appare

ils connec-

tés(ordinateurs, tablettes,smartphones,télé-

viseurs connectés, consoles d

e jeux…), taxe

qui sera reversée aux créateurs. De l’autre,

supprimer la Haute Autorité chargée de lut-

tercontre le téléchargementillégal, la fam

eu-

se Hadopi chère à Nicolas Sarkozy et jugée

« liberticide». Et réduire l’amende du pirate

récidivistede 1500euros à 60euros.

A vouloir contenter le créateur

comme le

consommateur, on risque de mécontenter

les deux. L’UMP dénonce une gauche «dro-

guée à l’impôt ». Et c’est vrai que la taxe

annoncée va toucher tout ach

eteur d’écran,

qu’il soit pirate ou non. Ajoutons

qu’il est

plus facile de taxer le client d’é

crans que les

géants d’Internet commeGoogle ou YouTu-

be, qui profitent tant du piratage. De son

côté, le SNEP, principal syndicat de produc-

teursdedisques, craintque la f

orte réduction

de l’amende n’encourage un peu plus le vol

desmusiques.Onpeutlecomprendre,carcet

-

te industrie du disque a été laminée depuis

unedizained’années.

Chacunestdanssonrôle. Final

ement, iln’y

a que des sociétés d’auteurs pour sa

luer ces

mesures.Carcerapport,bienplus

cohérentet

pragmatique que les précédents sur le

sujet,

est au service d’une juste cause pour tous

ceux qui pensent qu’un auteur doit voi

r son

travail rémunéré et défendu.Mais, en optant

pourcettetaxeàlaconsommationetenétan

t

plusclémentvis-à-visdutéléchargementillé-

gal, lespropositionsdeM.Lescure, parad

oxa-

lement, prennent acte des ravages

du pirata-

ge, qui touchedésormais fortement le ciné-

ma, après lamusique.

Est-ce lameilleure façondepréserver cette

fameuse «exception culturelle» à la

françai-

se – faire sortir la culture du seul marché –,

que tant de créateurs étrangers

nous envient

et que les Etats-Unis, notamment, contes-

tent? Sans doute pas. Mais c’est probable-

ment le levier le plus réaliste.p

aLIRE LE CAHIER ÉCOPAGE3

SERVICES SECRETS :

VERS UN CONTRÔLE ACCRU

SOCIÉTÉ – LIRE PAGE 8

Amnistiesociale:

cacophoniedesdéputésPS

POLITIQUE – LIRE PAGE 9

HENRIGUAINOET LES 105MUTINSCHRONIQUE – LIRE PAGE 24

Plus de deux

milliardsd’habitantsprivés d’eau

LesNationsunies

ontréévalué les

chiffresdespopula-

tionsquin’ontpas

accèsàunesource

potable.Laques-

tiondesefforts

financiersestposée

INTERNATIONAL – P. 2

Commerce:

treize alliéseuropéensavec la France

Lorsdesnégocia-

tionsavec lesEtats-

Unis surunaccord

de libre-échange,

Parisveut faireun

casusbellide la

défensede l’excep-

tionculturelle.

CAHIER ÉCO – P. 3

Bercy : desministres sur

la selletteAprès la charge

deSégolèneRoyal

etd’ElisabethGui-

gou,c’est au tour

deLaurentFabius

demettre lapres-

sionsur leministè-

rede l’économie

etdes finances.

POLITIQUE– P. 7

ÉDITORIAL

PSG:après

lesviolences,

lapoliceen

accusation

AUJOURD’HUI

CANNESsupplément

8PAGES

CCCSCIENCE& MÉDECINE

supplément8PAGES

Internetet culture: le réalismedurapport Lescure

LE CINÉMA FRANÇAIS

PREND CANNES D’ASSAUT

t LeonardoDiCaprio ouvre le Fest

ival

deCannes,mercredi 15mai, en jouant «Gatsby».

Mais ce sont les films français qui do

minent

la compétition comme les sections parallèles

SUPPLÉMENT LIREAUSSI L’ANALYSEPAGE 19

ET L’ENQUÊTESURBOLLYWOODPAGE 23

Acteurs, cinéastes

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SCIENCE& MÉDECINE«DSM»: lemanuel

qui rend fou

Lafête du PSG n’est pas la

seule à avoir été gâchée,

lundi 13mai, par les vio-

lences au Trocadéro et sur les

Champs-Elysées, celle de

Manuel Valls en a aussi pris

un coup. Leministre de l’inté-

rieur venait definir de célé-

brer le bilan de ses zones de

sécurité prioritaires, àLyon,

lorsque la situation a dégéné-

ré en face de la tour Eiffel, où

15000 supporteurs du club

defootball fêtaientsontroisiè-

metitredechampiondeFran-

ce. Après les «manifs pour

tous», la question du main-

tien de l’ordre à Paris revient,

tel un cailloudans la chaussu-

re deM.Valls. Mardimatin, le

bilanpolicier était lourd, avec

trente blessés,une dizaine de

commerces pillés, deux Abri-

busvandalisés,dix-huitvoitu-

res, cinq scooters et deux bus

de la RATP dégradés.

LaurentBorredon

aLIRE LA SUITE PAGE 6

aVive querelle entre

spécialistes surla

cinquième version de la

«bible» de la psychiatrie :

précieux outil de

diagnostic ou dangereux

facteur demédicalisation

de la vie?Recherches sur

le

Facebook a peur dunu Le réseau

social censure chaque jour des

mil-

lions d’images. Le règlement intérieur

interdit toute forme denudité, y co

m-

pris sur lesœuvres d’art. PAGE 7«Nepas comprendre est

merveilleux»A84 ans, le grand

critique littéraire et philosoph

eGeorge

Steiner continue d’explorer les

mystères

de la création et de l’histoire.PAGES 4-5

Laurent Carpentier

Cinquante-cinqe

nceintes. Spa-

tialisation du son. Système

DolbyAtmos.Imagesenultra-

haute définition4K. Ecran

géant. «Gradinage» optimal.

En un mot: l’avenir. Lavoilà

donc, cette fameusesallePathé

+par laquelle

le scandale arrive.Dans le quar

tier populaire

de la place Clichy, à Paris, la sa

lle 1 du Pathé

Wepler est une prouesse.Mais la vraie orig

i-

nalitéde ce lieuouvert endébutd’année,

son

crime en quelque sorte,c’est de dispose

r en

son sein d’une partie «premium». Espace

plus grand entre les rangées, siègeslarges,

inclinables,etsurtoutbienplac

ésetnuméro-

tés, vous laissentunarrière-goûtde

luxeet le

plaisir du privilège… 14,20 euros tout de

même. «Oui, mais vous êtes mieux assis»,

sourit laconiquement la caissière

aux prises

avec le rouleaude samachine à carte b

ancai-

re qui s’est coincé. «Attention,

pour vous, ce

sera les siègesde couleurgrise.

»

Onacriéau loup:payerpluscherpourêtre

mieux servi! L’opération est apparue com

me

le symbole d’une société à deuxvitess

es dont

on ne cesse de dénoncer l’expansi

on. Et peu

importe que la différence de prix

ne soit que

de2eurosouqu’unesalledumêmetype,avec

carré premium, existe depuisplus d’un an à

Chambéry sans que personne y ait vu à redi-

re… A l’initiative du groupe communiste, les

élus du Conseil de Paris ont adopté un vœu

visantàmettrefinàl’expérience,oudumoins

àl’empêcherdesepropager.«Enpério

dedecri-

se économique, la double tarification est une

scandaleuse augmentation qui ne dit pas so

n

nom. Pour le tarif habituel, le spectateur n’a

plus droit qu’à des places “torticolis” : sous

l ôtés C’estleretourd’une“pre-

mière», demande-t-il à la caisse, désignant

ainsi lespremiersrangsbonmarchéduciné-

ma. «Les premières, c’est pourles enfants»,

répond le caissier. «Non,sinon vous auriez

marqué“enfants”.»Et le caissierd

es’agacer :

«Mais c’est pas du tout confortable, c’est

mauvais pour les yeux… Quand vous serez

aveugle vous ne viendrez pas

vous plaindre,

hein?»Comment les stratèges de Pathé ont-ils

défini l’emplacement de ce carré premium

dans lasalle?A-t-onécouté les s

pécialistesde

focale et de champ de vision qui expliquent

,

équation géométrique à l’appui, que la bon-

nedistanceestéquivalenteàd

euxfois ladia-

gonale de l’écran – chose au demeurant

impossible dans la plupart des salles? Ou

bienlessociologuesdel’Institu

tderecherche

sur le cinéma et l’audiovisuel, dépendant d

e

Paris-III, qui ont longuement étudié les co

m-

portements des usagers d’un multiplexe

pour en conclure que ce sont les placesles

plus au fond et les plus proches de la sortie

qui sont les premières choisies…

analysant à

l’envileursmotivations: lapeurd’avoirquel

-

qu’underrièresoi lorsque la salle est v

ide?La

nécessitédepouvoirpartir vite

?Gilles Jacob,

présidentdu Festival deCannes, confiait ain-

si en 2011 que, marqué par la guerre, il s’as-

seyait «toujours au bord du rangafin de par-

«Enpériode de crise économique,

ladouble tarification est

une scandaleuse augmentation

quinedit pas sonnom»

«L’Humanité» du 25mars

Le coming out n’est pas nippon

Au Japon, l’homosexualité n’estpas un

enjeu politique ou social. Elle est plutôt

bien tolérée. A condition de rester une

affaire privée. PAGE 6

P. CHERFILS/ASKIMAGES

Lasalle,stardecinéma

Hors-champsacrédesréalisateursettempledescinéphile

s, lasalleobscurejoueunrôlece

ntral.

Enquêtesursesmétamorphosesàquel

quesjoursdel’ouvertureduFes

tivaldeCannes,le 15mai