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Ce guide traite du thème de l'AlterTour 2010 : l'artificialisation des sols
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infrastructures
c o n t a m i n a t i o n sDopages
économique et agricole
des sols
Livret AlterTour_Artificialisation_ 2010-29_Livret Alternative 28/06/2010 11:44 Page 1
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Ce petit guide nous invite notamment à repenser de fond en comble le devenir
de notre agriculture, de notre alimentation et de nos terroirs.
Force nous est de reconnaître que pour répondre aux exigences d’économies
d’échelle et de standardisation manifestées par les grandes firmes
semencières et agro-industrielles, nombreux sont aujourd’hui les systèmes de
culture et d’élevage qui ne répondent plus aux exigences du
" développement durable ", tant du fait de la dégradation
de l’environnement qu’ils provoquent, que par le
primat des logiques de concentration foncière
et de sous-emploi qui les sous-tendent.
Loin d’être le caprice de quelques
" bourgeois - bohêmes ", le fait de
vouloir développer une agriculture de
qualité et de proximité est devenu le
souhait partagé de nombreux
consommateurs, paysans et autres
citoyens, soucieux de bénéficier d’une
alimentation saine et désireux de se
protéger contre toute pollution majeure et de
préserver les potentialités productives de nos
terroirs sur le long terme.
Il existe d’ores et déjà des systèmes de production agricole alternatifs aux
conceptions agro-industrielles et standardisées actuelles. Ils ont été mis au
point par certains agriculteurs ayant su résister aux pressions des grandes
firmes et pourraient être davantage étendus si la Politique Agricole Commune
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(PAC) prenait davantage en compte les préoccupations relatives à l’emploi, à la
sécurité alimentaire, à l’atténuation du réchauffement climatique, à la
préservation de la biodiversité et à la gestion conservatoire des eaux et des
sols.
Ces systèmes de production "bios" ou "durables" font un usage intensif des
ressources naturelles renouvelables (l’énergie solaire, l’azote de l’air, les eaux
pluviales, etc.) et ont le moins possible recours aux ressources épuisables
(telles que les énergies fossiles) et aux techniques susceptibles de contribuer
aux émissions de gaz à effet de serre. Il ne s’agit pas d’un retour à la " lampe à
huile " mais de combiner savamment, sur nos parcelles, en circuits courts, les
cycles biochimiques de l’eau, du carbone, de l’azote, du phosphore et d’autres
éléments minéraux, pour produire l’alimentation et les
biens ou services dont notre société a le plus besoin.
Cette agriculture recentrée sur les spécificités de nos
écosystèmes vise aussi à ne plus produire en excès les
produits standards qu’il nous a fallu jusqu’alors brader à vil
prix moyennant des subventions à l’exportation. Les pays
déficitaires du Sud ne doivent plus supporter la
concurrence déloyale de notre agriculture
moto-mécanisée et chimisée et devraient avoir le
droit de s’en protéger par des droits de
douane conséquents, comme l’Europe l’a
fait avec succès au lendemain de la
deuxième guerre mondiale.
L’exigence de promouvoir une
agriculture de qualité sur nos
terroirs et le droit des pays
du Sud à recouvrer leur
souveraineté alimentaire sont
bien les deux facettes d’une seule
et même démarche : celle du " développement
durable " dans l’agriculture.
Marc DUFUMIEREnseignant-chercheur • AgroParisTech
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l ’ a r t i f i c ia l i sa t ion• édito 2 - 3
• l’artificialisation en question 4 - 5
• la connaissance sans la sagesse, est de l’intelligence artificielle. 6 - 7
Le sol : une richesse insoupçonnée
• de la cueillette à la culture 8
• pédologie 9
• les clés du sol 10
• microbiologie, une science exclue 11
• l’artificialisation et ses outils de mesure 12 - 13
• enjeux politiques 14
• la directive " Sol " européenne 15
Dopage économique
• " la France est moche " 16
• un exemple de cité-jardin 17
• urbanisation galopante 18
• comment aménager ? 19
• usages et mésusages 20
• circuit de Formule 1 ou... agriculture biologique ? 21
• silicon valley en île-de-France 22
• ensemble pour un accès à la terre 23
• quand inondation et urbanisation se rejoignent 24
• face à la mer 25
• enfouissement des déchets 26
• monsieur Poubelle 27
• relocaliser l’alimentation 28
• amours de légumes 29
en quest ion
" L'horizon est bouché à l'émeri et du sol poussent des lampadaires occupés à semirer dans un point d'interrogation. " (Marc Gendron)
" Concentration de capital destinée à accroître temporairement et artificiellement lepouvoir économique d’un organisme, mais qui engendre durablement une dépendancefinancière pouvant aller jusqu’à la ruine, ainsi qu’un déséquilibre de la répartition desrichesses. "
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Dopage agricole
• artificialisation agricole 30
• la méthode Pochon 31
• nitrates, ni contaminations 32
• objectif qualité des eaux 33
• abandon des terres agricoles 34
• vers une nouvelle PAC 35
• Terre agressée par les pratiques agricoles 36
• techniques de fertilisation 37
• herbes indésirables et perte de biodiversité 38
• permaculture 39
• artificialisation du vivant 40
• semences paysannes 41
• pourtant, un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse... 42 - 43
• ressourcez-vous... 44
• pour aller encore plus loin 45
• mes notes 46
• une Terre aux abois, et la caravane passe 47
• AlterTour 2010 : éloge de la lenteur à bicyclette 48
5
Dopage
mesure anti-Dopage
" Ensemble de procédés chimiques, technologiques et politiques destinés à accroîtretemporairement et artificiellement les rendements agricoles, mais qui engendrentdurablement une dépendance de l’agriculteur, ainsi que des retombées nocives pour lasanté, les sols et l’environnement. "
" Procédé destiné à accroître temporairement et artificiellementcertaines capacités, mais qui engendre durablement dépendances etdégradations. Le dopage est parfois volontairement masqué. "
" Procédé démocratique à finalité économique, agricole, sociétale et/ouenvironnementale. Une mesure anti-dopage doit assurer une répartition équitabledes richesses, protéger durablement les ressources naturelles et préserverl’avenir du vivant. Elle doit être l’émanation d’une volonté citoyenne participativeet éclairée. Souvent, l’observation et le bon sens suffisent à la déterminernaturellement. "
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L’éventualité que le fragile équilibre des sols puisse être rompu siège depuis
longtemps dans notre mémoire collective. 400 ans avant J-C, constatant la
dégradation des terres environnantes, Platon écrivait déjà : " Notre terre est
demeurée par rapport à celle d’alors, comme le squelette d’un corps décharné
par la maladie. Les parties molles et grasses de la terre ont coulé
tout autour, et il ne reste plus que la carcasse nue de la
région ".
Cependant, la connaissance de ce danger
potentiel est largement refoulée. Car l’homme
moderne urbanise et industrialise. Il exploite
et convoite. Il aménage et déménage.
De " Plan d’aménagement du territoire "
en " Plan Local d’Urbanisme",
l’artificialisation des sols s’accroît à la
vitesse d’un département comme la
Seine-et-Marne sur une décennie.
Produisant essentiellement des
quartiers résidentiels, des zones
commerciales et des voies de transport,
ce phénomène se poursuit à un rythme
soutenu. Selon les dernières études
européennes, les terres cultivables et les
milieux naturels sont les premiers à en pâtir,
en particulier sur le pourtour des grandes
villes et le long des voies de transport.
Ces données révèlent qu’aujourd’hui 60% du pays
est couvert de terres agricoles, 35% de forêts ou
d’espaces naturels, et 5% de surfaces artificialisées.
Non content de modeler la Terre, l’humain tente d’accroître
rapidement ses capacités de rendement sur de larges exploitations
agricoles. Engrais, pesticides, plantes génétiquement modifiées,6
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motorisation et informatisation des équipements sont encore trop
souvent encouragés par les subventions de la Politique Agricole
Commune (PAC), les primes et autres ficelles économiques dans le but
avoué de produire toujours plus. Ces dopages agricoles et économiques
constituent les deux mamelles d’une gestion dite " moderne " de
l’agriculture. Si leur contribution a montré une efficacité temporaire,
on en a découvert les revers sur le plan économique avec les problèmes
engendrés par une surproduction, ainsi que sur les plans sanitaire et
environnemental. Les crises économiques se succèdent et,
comme tout être vivant, la Terre finit malade, anémique,
stérile... de même que certains agriculteurs.
Pourtant, " des fous (éventuellement à vélo)
ouvrent les voies qu’empruntent ensuite les
sages ". Et de voix en voies, il n’y a qu’un
pas : des cris d’alarme s’élèvent et
ouvrent de nouveaux chemins. Les voix
alternatives aux dopages économique
et agricole existent et commencent à
être entendues, puis connues, et
enfin reconnues. Après une incursion
dans ce monde largement inconnu
qu’est notre sol, ce recueil présente
quelques-unes des voies alternatives
qui se développent en parallèle des
autoroutes économiques participant à
l’artificialisation des sols, tels que
l’extension des zones urbaines,
l’aménagement des voies de circulation,
l’enfouissement de déchets, sans oublier
les cultures de plantes non destinées à
l’alimentation.
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Le sol : une richesse insoupçonnée
8
Les historiens ont élaboré des théories diverses pour expliquer le passage de la
cueillette à l’agriculture. Tous s’accordent à considérer que " L’âge de pierre " fut une
période d’abondance, avant la sédentarisation de l’humanité et l’apparition de
l’agriculture. Au cours des siècles, la terre prend des rôles multiples. L’argile du sol
permet de confectionner les briques des habitations, des poteries qui conservent les
aliments, et des canaux d’irrigation qui guident l’eau toujours plus loin.
L’agriculture est à son apogée en même temps que l’empire Romain, jusqu’aux premiers
signes de leur décadence commune. Les cultures de blé de la période faste sont d’abord
remplacées par d’autres céréales moins dépendantes
de la richesse de la terre. Au fur et à mesure de la
dégradation des sols, des cultures de moins en
moins exigeantes se succèdent ensuite : arbres
fruitiers, olivier, jusqu’à la vigne.
à la cultureAu 19ème siècle, l’utilisation de
produits chimiques tend à rompre
l’équilibre des sols, jusqu’à la
période contemporaine qui voit
disparaître en moyenne en
France dix tonnes de sol
par hectare et par an.
Un calcul montre même qu’au
rythme actuel, il suffirait de trois siècles
pour que la France devienne un désert. Ce
que les écologistes ont avancé depuis trente
ans se vérifie et nous jouons à l’heure actuelle
l’avenir de notre civilisation. L’occident
pourrait donc s’éteindre comme l’empire
Babylonien, l’Empire Romain, les Mayas, sauf
si la question du sol devient une priorité
collective. Comme le dit Kant :
" Une chose est morale lorsqu’elle est
généralisable à l’ensemble des êtres
humains ".
o. R
ot
y
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Le sol : une richesse insoupçonnée
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carottage : sondage du sol, par extraction d’éléments cylindriques.
tarière : outil en forme d’axe creux, vissé dans le sol pour effectuer des relevés pédologiques.
La formation du sol, son évolution et ses réactions chimiques sont étudiées par le
pédologue au moyen notamment de carottages réalisés avec une tarière. Une fois qu’un
échantillon de sol est extrait, on peut en observer les différentes couches qui
témoignent souvent d’une multitude de transformations biologiques.
De manière générale, l’activité biologique diminue avec la profondeur :
• en surface : la litière, riche en micro-organismes, est le support de la végétation.
Racines et eau y dissolvent la roche. Les feuilles mortes se décomposent pour
former la litière.
• en dessous : la litière se dégrade et se mélange à la couche minérale pour former
l’humus. Cette interface entre matière organique et minéraux constitue la source
de nourriture des végétaux.
• le sous-sol est constitué par la roche-mère. Dans des conditions spécifiques,
minéraux et matière organique se mélangent afin de former des hydrocarbures.
La pédologie nous apprend
qu’il ne suffit pas d’apporter
quelques éléments chimiques à
la litière d’un sol pour la
re-équilibrer. Généralement, ce
sont l’azote, le phosphore et la
potasse (N, P, K), conseillés par
tout agronome parce que les
plantes en sont fortes
consommatrices. Il existe en
fait plus de 28 autres
substances qui participent à
l’équilibre du sol et donc de la
végétation.
Lorsque la plante s’affaiblit du fait d’une carence de l’un de ces éléments, elle devient
plus susceptible d’être éliminée par des parasites. La réponse apportée habituellement
par les agriculteurs est d’utiliser encore plus de pesticides, entrant ainsi dans le cycle
infernal d’un dopage du sol, qui devient dépendant de produits chimiques pour en réduire
les conséquences.
Les différentes couches du sol
Végétation
Sol
Sous-sol
litièrehumus
couche minérale
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Le sol : une richesse insoupçonnée
les clés du solDans un écosystème terrestre naturel, les éléments nutritifs prélevés par les
organismes vivants retournent au sol sous forme de débris végétaux, d’excréments
et de cadavres d’animaux. Puis ils sont libérés plus ou moins rapidement, au cours
de plusieurs processus de décomposition – humidification et minéralisation - avant
d’alimenter à nouveau la faune et la flore.
Cet écosystème fonctionne en
circuit fermé et la
transformation de matière
dépend de différents facteurs
(eau, air, lumière, structure,
éléments toxiques, capacités
d’échange) qui suivent des cycles
biogéochimiques. Ces cycles sont
soumis à la notion d’évolution
décrite en écologie. On considère
qu’un écosystème peut se
développer jusqu’à atteindre un
état théorique d’équilibre, appelé
Climax. L’énergie et les
ressources servent alors à
maintenir une végétation stable.
La forêt primaire amazonienne
est un des exemples le plus
connu.
A l’échelle d’un paysage, c’est une
véritable mosaïque de zones
vieillissantes ou en régénération.
En effet, à la suite de
perturbations, qu’elles soient
climatiques ou tectoniques
(incendies, astéroïdes, éruptions volcaniques) les écosystèmes peuvent être
détruits mais de nombreux mécanismes d’adaptation aboutissent à la
reconstruction vers le Climax.
écosystème : ensemble formé de l’association d’êtres vivants et de leur environnement.
humidification et minéralisation : processus de transformation de la matière organique en humus sous l’influence dela microfaune et de la microflore.
cycle biogéochimique : ensemble des échanges au sein d’un écosystème entre différentes formes chimiques.
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Le sol : une richesse insoupçonnée
11
microbiologie, Le sol est une matière vivante d’une grande complexité. De relativement faible
épaisseur (30 cm en moyenne), cet épiderme terrestre résulte de la fusion entre
le monde minéral et le monde organique. Il abrite une quantité insoupçonnée
d’êtres vivants. Ce sont notamment des bactéries, invisibles à l’oeil nu, et pas
toujours considérées à leur juste valeur dans notre société.
Les microorganismes du sol
travaillent en symbiose avec leur
milieu, au fur et à mesure des
besoins de la plante et en
fonction de contraintes
environnementales. Par exemple,
quand le sol est sec ou gelé,
l’activité des bactéries ralentit.
Un sol vivant est plutôt de
consistance spongieuse et peut
comporter jusqu’à quatre
tonnes/hectare de vers de terre.
Ainsi, sans vie animale pour aérer
la terre, le sol devient compact,
les racines pourrissent et la
plante ne se nourrit plus en
profondeur.
En réponse à cette perte de
vitalité, des engrais sont
répandus en surface, comme
pour un patient placé sous perfusion, qui ne s’alimente plus naturellement et dont
les muscles fondent. Cet apport de molécules chimiques fait peu de cas des
interactions naturelles entre minéraux et organismes, car le secteur de la
microbiologie des sols est peu considéré par une majorité d’agronomes :
le sol est considéré comme un simple support de culture.
Il conviendrait de favoriser la vie des bactéries et des animaux que le sol abrite,
plutôt que de l’épuiser précocement par une demande croissante et immédiate de
productivité.
symbiose : association intime et durable entre deux ou plusieurs organismes spécifiques que ce soit par déficit oubénéfice réciproque.
microbiologie : discipline de la biologie basée sur l’étude des micro-organismes.
agronome : spécialiste qui étudie l’ensembles des sciences naturelles, économiques, sociales et techniques destinéesà comprendre l’agriculture.
hectare (ha) : unité de mesure agraire de superficie équivalant à 10 000 m².
une science exclue
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Le sol : une richesse insoupçonnée
l’artificialisation etLe phénomène d’artificialisation prend de l’ampleur dans les années 1960.
Il se caractérise par un changement d’occupation des sols. C’est d’autant plus
problématique que les ressources biologiques (alimentaire, énergétique, écosystème)
sont touchées. Cela se répercute par exemple sur le recyclage de la matière organique,
la filtration de l’eau ou le maintien d’habitats.
Cette question épineuse a été abordée par des organismes officiels, telle que l’INSEE,
croisant les sources d ‘informations à différentes échelles. Tous s’accordent pour
attribuer une origine humaine à l’artificialisation
des sols, considérée comme une altération d’un
milieu dit " naturel ", participant à la notion
d’empreinte écologique (voir carte dernière page).
Ce concept développé dans les années 1990
exprime l’influence de l’activité humaine sur
l’environnement, qui se traduit notamment par
l’extension des villes, une agriculture industrielle,
le développement des infrastructures de
transport, l’aménagement des cours d’eau et des
côtes. Une analyse approfondie montre que le
qualificatif d’artificiel dont l’usage ne fait pas
l’unanimité est plutôt subjectif quand il concerne
les sols.
Parmi les questions soulevées par ces études,
on s’interroge sur l’extension de l’espace dévolu
aux habitations et aux zones commerciales, aux transports, à la production d’énergie,
souvent en contradiction avec la préservation de zones cultivables pour nourrir la
population.
Qui est le mieux placé pour orienter la gestion des sols ? L’agronome ? L’urbaniste ?
Le décideur politique ?
Quelle place donner à la terre dans notre société ? Est-elle simplement le support de
nos activités ou bien un élément essentiel de notre planète et à notre vie dessus ?
INSEE (Institut National de la Statistique et des Études Économiques) : institut chargé de la production, de l’analyseet de la diffusion des statistiques officielles en France.
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Le sol : une richesse insoupçonnée
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ses outils de mesure Mesurer et situer l’évolution de l’artificialisation est un enjeu majeur, pour un aménagement
durable des territoires. Cette évaluation est possible mais les résultats diffèrent selon les :
• acteurs : associations, collectivités, organismes de protection de l’environnement,
de gestion de l’urbanisation,...
• objectifs : mesurer l’emprise de l’urbanisation sur les terres agricoles, mesurer
l’imperméabilisation des sols,...
• territoires d’études : européen, national, régional, commune urbaine ou commune rurale
• sources d’informations : recensement de statistiques urbaines ou agricoles, images
satellites ou photos aériennes.
Corine Land Cover est un
programme européen réalisé en
France par l’IFEN en 1990,
2000 et 2006. Il permet de
décrire l’occupation des sols à
partir d’images satellites.
Les objets pris en compte
(forêts, tissus urbains, milieux
naturels,...) sont décrits à
partir d’une unité élémentaire
de 25 ha. Ainsi la description
est grossière mais les
résultats peuvent être fournis
pour des niveaux géographiques
relativement fins.
Teruti est une méthode statistique du SCEES conçue pour décrire l’occupation des
sols, notamment par l’agriculture. Fondée sur l’analyse de points distants de 6 km et
de relevés de terrain. Les résultats de cette étude réalisée entre 1992 et 2002
sont cependant significatifs pour des territoires départementaux.
Selon les méthodes utilisées, les résultats sont différents mais les tendances
identiques. L’étalement urbain remet en cause notre autonomie alimentaire d’ici
quelques décennies. Il est plus que nécessaire de réagir immédiatement.
CORINE : COoRdination de l’INformation sur l’Environnement
IFEN (Institut Français de l’Environnement) : issu du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durableet de la mer chargé de l’observation et des statistiques en matière d’environnement.
SCEES (Service Central des Enquêtes et Etudes Statistiques) : issu du Ministère de l’Alimentation, de l’Agricultureet de la Pêche.
n et
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Le sol : une richesse insoupçonnée
enjeux politiques
drainage : opération qui consiste à favoriser artificiellement l’évacuation del’eau gravitaire du sol à la suite de précipitations. On utilise généralement des
fossés ou des drains.14
Dans une perspective de développement durable, parfois soutenue sur le plan politique,
la gestion maîtrisée du développement des villes devrait tenir compte de la quantité
de ressources consommée par la population, en particulier l’utilisation d’espaces, de
sols cultivables et de sources d’énergies.
L’activité agricole en zone périurbaine est compromise, puisque les sols les plus riches
sont aussi les espaces aux reliefs peu accentués, facilement constructibles et
accessibles par voie routière ou fluviale.
Les promoteurs immobiliers et les constructeurs sont aux aguets ; leurs intérêts à
court terme rejoignent parfois ceux d’élus locaux et nationaux. Dans le contexte actuel,
les agriculteurs doivent se replier sur des sols moins généreux, qui demandent
davantage d’investissement en drainage, irrigation et mécanisation. A l’inverse de
cette tendance, une urbanisation mieux raisonnée pourrait assurer la protection des
terres, une production agricole durable et préserver la qualité de l’environnement.
Les compétences en matière
d’urbanisme sont reléguées aux
communes. Or, beaucoup d’élus sont
d’ailleurs les premiers à prendre
conscience que l’étalement urbain est
sous la pression du marché et des
promoteurs. Cette consommation se fait
bien souvent de manière anarchique,
standardisée et anti-durable. Ils sont dans
l’incapacité de maîtriser tous ces effets alors
qu’ils en ont toute la responsabilité.
La prise en compte des potentialités agricoles
des sols dans les documents d’urbanisme paraît
primordiale dans un objectif de développement
durable des territoires et ceci, de l’échelle locale à
l’échelle nationale, voire européenne.
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Le sol : une richesse insoupçonnée
15
la directive " Sol " européenne
Directive Cadre : le parlement européen et le conseil proposé par la commission adoptent uncadre de protection qui découle d’un programme d’action.
transaction foncière : acte juridique de conciliation relatif à la propriété d’un terrain, et impliquant généralementdes concessions réciproques.
Une Directive Cadre sur la protection des sols est en train de voir le jour. Elle préconise
une action européenne pour une meilleure gestion locale. L’objectif étant d’unir les
multiples réglementations (agriculture, gestion des déchets, protection des eaux).
Historiquement, la stratégie date de 2002, mais le premier texte a été refusé en
2007 par la commission européenne. En effet, sous la pression de lobbies industriels,
la France et l’Allemagne ont voté contre cette Directive Sol. Une version amendée,
laissant plus de libertés aux Etats et des échéances moins strictes pour la dépollution,
est en cours de rédaction.
D’après une déclaration officielle en Janvier 2010, la France ne s’opposerait plus à
cette Directive qui sera négociée au sommet de Mexico en Décembre 2010. Le concept
de " sol de grande valeur " implique des mesures qui consistent à :
• répertorier les sites pollués : ceux ayant connu des activités affectant les sols,
que ce soient les accidents industriels, anciennes mines ou décharges,...
• lister les zones prioritaires et les classer selon
8 risques : érosion, tassement, salinisation,
perte en matière organique, glissement de
terrain, désertification, perte de biodiversité,
acidification.
• dépolluer les sols : dans un intervalle de
sept ans (à partir de 2010), sachant que
les états gardent une liberté d’initiative.
Ils peuvent donc décider des méthodes de
prévention et de remise en état des sols
pollués, avec obligation de résultats.
• informer les acquéreurs : Au cours de
transactions foncières, une mention
obligatoire indiquera l’historique
des activités menées sur le
site, ainsi que la présence
d’éventuelles concentrations
en substances dangereuses.
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Dopage économique
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" la France est moche "L’urbanisme raconte ce que nous sommes. Aux villes fortifiées, avec des ruelles
commerçantes concentrées autour de la cathédrale, ont succédé de grands boulevards
reliant zones périurbaines et commerces.
A partir des années 60, la généralisation de l’utilisation de la voiture couplée aux
prémices d’une consommation de
masse s’est traduite par un
développement effréné du réseau
routier national : itinéraires de
contournement des villes,
échangeurs, bretelles et rocades le
long desquels se sont installés des
supermarchés puis des zones
commerciales, façonnant des
paysages bitumeux. La loi Pasqua de
1998 indique d’ailleurs que tout
citoyen doit se trouver à moins de 45
minutes d’une entrée ou sortie
d’autoroute. Ce quadrillage de bitume
diffuse les consommateurs vers de
nouveaux opérateurs commerciaux.
Les années 1970 voient le rêve
pavillonnaire prendre de l’ampleur et
se mettre en place. En périphérie des
villes, fleurissent les maisons
individuelles, parfois groupées en
lotissements. L’habitat se banalise, les maisons standardisées des quatre coins de la
France se ressemblent toutes.
Conçue par un promoteur constructeur, la maison est un produit à commander sur
catalogue. Le marché fournit des lotissements aux rues parallèles, des parcelles de
taille identique, des maisons posées au milieu de la parcelle, sans aucun lien,
ni ressemblance avec la ville ancienne. Les grands îlots de commerces cernés par des
mers de bitume, les maisons identiques le long des routes composent une France moche !
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anti-Dopage économique
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un exemple de cité-jardin La ville de Fribourg-en-Brisgau est située au pied de la Forêt noire, au sud-ouest de
l’Allemagne. Détruite en 1945, elle a depuis gagné le statut de " capitale écologique ".
Véritable laboratoire du développement durable stimulé par de nombreux projets,
elle est aujourd’hui réputée pour sa richesse industrielle, commerciale et touristique.
En 1993, tout un quartier est mis en place sur le modèle de " cité-jardin " qui propose
une synthèse entre vie citadine et vie
rurale.
A l’origine, la " cité-jardin " est
imaginée par E. Howard en réaction à
la croissance désordonnée des villes,
engendrée par la révolution
industrielle du XIXème siècle en
Angleterre. Le modèle mis au point en
1989 est limité en taille et en
population : une vraie communauté
peut ainsi se former. Une ceinture
verte regroupe les producteurs
chargés de nourrir la cité, tandis que
son centre réunit les fonctions
administratives et les édifices
publics.
A Fribourg, dans ce " quartier Vauban ",
le sol est dépollué, la municipalité
maîtrise le marché du foncier, et
certaines normes sont mises en
place : mixité sociale, habitats énergétiques d’au plus quatre étages, des places de
parking en nombre limité... Les habitants de toutes origines sociales et culturelles vivent
de manière écologique et conviviale. Les anciennes casernes côtoient les bâtiments
contemporains. Cette diversité architecturale laisse aussi la place aux petites parcelles
non clôturées, aux couloirs de biodiversité et aux arbres centenaires. Des experts
(juristes, biologistes, urbanistes, physiciens, géographes, économistes, techniciens de
l’environnement) restent en relation avec les habitants, et collaborent sur des sujets
tels que l’imperméabilisation des sols.
g. d
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urbanisation galopanteDopage économique
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L’étalement urbain est un phénomène qui a pris son essor dans les années 1960.
Entre 1982 et 2004, les surfaces urbanisées ont progressé de 40% alors que la
population a seulement augmenté de 10%. Les deux tiers des espaces artificialisés
sont dévolus à l'habitat (500 000 ha entre 1992 et 2008) - et plus
particulièrement aux maisons individuelles, et le tiers restant aux zones
commerciales et industrielles, ainsi qu’aux infrastructures de transport.
Comment en sommes nous arrivés là ? Les causes sont multiples :
• l'aspiration à la propriété et à la maison individuelle avec jardin, avec une
consommation d’espace par habitant qui a augmenté en moyenne de 7 m².
• des besoins en
logements dus à la
croissance de la
population et au
desserrement des
ménages (divorces,
jeunes qui quittent
le foyer parental…) .
On constate une
diminution du nombre
de personnes par
logement.
• une société fondée
sur la mobilité
avec une gestion dispendieuse de l'espace ouvrant à l'urbanisation des terrains,
ainsi qu’une forte dépendance à l'automobile.
• l’appât du gain, dans un contexte de forte demande en terres constructibles.
L’accroissement de la valeur du foncier implique que, pour le propriétaire agricole,
il devient nettement plus rémunérateur de vendre ses terrains pour la construction.
Un spécialiste du cabinet d’études Solagro, Philippe Pointereau, s’inquiète même pour
l’autonomie du pays : " Au rythme actuel de perte des terres agricoles, la France
pourrait devenir franchement importatrice de denrées agricoles en 2050, et perdre
son indépendance alimentaire ".
Surface construite
1990 1995 2000949698
100102104106108110
(ann
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0)
Population totale
Rapport entre démographie et artificialisationen Europe
Source : EEA - 2005
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anti-Dopage économique
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comment aménager ?
décentralisation : l’état octroie le statut de personne morale de droit public àdes collectivités territoriales qui disposent alors d’un pouvoir de décision surdes affaires locales.
Depuis les lois de décentralisation, ce sont les communes qui disposent des
compétences en matière d’urbanisme : c’est à travers les Plans Locaux d’Urbanisme
qu’elles autorisent et définissent les terrains à bâtir.
Le PLU détermine le droit du sol et établit un projet de territoire à l’échelle communale.
Il contient :
• Une carte délimitant les zones constructibles (U), les zones agricoles (A) et
naturelles (N). Son incidence est considérable car il peut démultiplier la valeur d’un
terrain en le rendant constructible. Selon la réflexion menée en amont et la
localisation des secteurs (U, A et N), il peut protéger des terres agricoles ou
inversement ouvrir des terres fertiles à l’urbanisation. Il définit notamment les
surfaces à urbaniser.
• un rapport présentant ces enjeux que constituent la démographie et l’évolution
de l’urbanisation.
• un règlement qui définit les règles d’implantation,
la hauteur des constructions pour chaque zone…
• un projet d’aménagement et de développement
durable (PADD) qui reflète la volonté politique
locale. Malheureusement, ce document n’a
pas de valeur contraignante et se retrouve
donc souvent réduit à un " catalogue de
bonnes intentions ".
Selon sa conception et la réflexion menée en
amont, le PLU peut soit être un outil au
service d’un aménagement durable, soit au
contraire, favoriser un aménagement qui gaspille
l’espace et favorise la banalité.
Face aux pressions de toutes natures, les élus locaux, qui
manquent souvent de compétences dans le domaine de
l’urbanisme, ne parviennent pas toujours à mettre en
oeuvre ces outils performants et réalisent parfois trop
tard le pouvoir dont ils disposent.
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usages et mésusages La définition du mot " territoire " employée au XIX ème siècle reste bien d’actualité :
" Etendue limitée considérée comme objet de possession ", et donc de litige. Si nous
ne nions pas que le sol soit indispensable pour se nourrir, se déplacer, se loger, produire
de l’énergie, en extraire des matières premières et y enfouir des déchets, ces divers
usages se valent-il pour autant ?
La concurrence entre ces divers usages se situe aujourd’hui sur le plan économique :
produire des agro-carburants serait ainsi devenu plus avantageux que des céréales
nécessaires à l’alimentation !
La définition de l’usage et du mésusage ne saurait être ni objective ni moraliste et il
revient aux citoyens et à leurs représentants de se prononcer démocratiquement.
Pour juger si un usage est " meilleur " qu’un autre, considéré comme " mésusage ",
il faut tenir compte, d’un côté des rapports de force et des choix politiques, et de
l’autre de l’état de la planète et des ressources naturelles. En intégrant les intérêts
sociaux, un débat politique pourrait mettre en question la légitimité d’un pouvoir
accaparé actuellement par l’économie. La gratuité du bon usage serait associée au
renchérissement du mésusage, avec des tarifs progressifs selon le niveau de
consommation et la nature du mésusage (par exemple un impôt foncier différent pour
une résidence principale et une maison de campagne).
Dans un nouveau système, le principe d’usage/mésusage n’est possible que s’il est
associé à une dotation inconditionnelle d'autonomie, couplée au revenu
maximum autorisé. Et inversement. Serait-ce la condition d’une agriculture
saine et viable pour la population et les
paysans ?
g. de CROP
Dopage économique
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anti-Dopage économique
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circuit de Formule 1 ou
... agriculture biologique ?
Parmi les ouvrages consacrés au sport de compétition, un circuit de course automobile
implique, d’une part, la couverture de larges étendues de terres, et, d’autre part,
des nuisances environnementales.
Dans les Yvelines, un projet de circuit de
Formule 1 auquel s’opposait un collectif
(" Flins sans F1 "), vient d’être abandonné.
Créé en décembre 2008 pour préserver
des terres initialement dédiées à
l’agriculture biologique, ce collectif s’est
battu contre le classement des terrains
en " zone d’aménagement différé ", malgré
le fort soutien financier du Conseil
Général.
Ce " mésusage " de terres agricoles était
incompatible avec de nombreux
documents d’urbanisme, de santé
publique ou de protection des eaux,
puisque la zone concernée se situait sur le
deuxième plus grand captage d’eau
d’île-de-France. Or, d’après la loi Grenelle2 :
" Sur les périmètres de captage d’eau
potable, la priorité sera donnée aux
surfaces d’agricultures biologiques afin
de préserver la ressource en eau et de
réduire ses coûts d’épuration ".
Les 140 ha de terres agricoles initialement acquis par le Conseil Régional dans la
perspective d’un circuit de Formule 1 seront partagés entre trois exploitants bio.
Fruit, légumes et céréales vont remplacer les grosses cylindrées. La région
Île-de-France peut ainsi espérer atteindre son objectif de 20% de productions
biologiques d’ici à 2020.
Zone d’Aménagement Différé (ZAD) : secteur où une collectivité publique titulaire d’une convention d’aménagementdispose pour une durée de 14 ans, d’un droit de préemption sur toutes les ventes et cessions de biens immobiliers ousociaux.
g. d
e C
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silicon valley en île-de-FranceL’Île-de-France est l’une des plus petites régions françaises. C’est également la
plus urbanisée et celle où vit un habitant de l’hexagone sur cinq. Malgré tout, elle
reste majoritairement rurale, avec 23% de forêts et 45% de sa surface
consacrée à l’agriculture. Cependant, l’artificialisation continue année après
année de grignoter la surface agricole avec 1000 km² perdus au
cours des 50 dernières années. Le dossier
d’aménagement du plateau de Saclay illustre bien
ce problème.
Deux projets sont actuellement à l’étude. En
2005, sur demande ministérielle, une
opération d’urbanisme d’intérêt national (OIN)
a été lancée dans le but de créer un genre de
" Silicon Valley " à la française : un pôle
scientifique s’appuyant sur la forte
concentration actuelle de laboratoires,
d’entreprises " High-Tech "
et de grandes écoles
voisinant l’université
d’Orsay, associé sur 30
ans à la construction de
150 000 logements et de
voies de communication.
L’État serait maître
d’œuvre, sans tenir compte
de l’avis des élus locaux, au
moyen d’un Projet d’Intérêt
Général (PIG).
En réponse à ce projet gouvernemental, un collectif s’est créé en 2006,
proposant de développer un " pôle agri-urbain des Pays de Saclay ". Cette
alternative légitimise le maintien de terres fertiles, la sauvegarde d’une des plus
grandes réserves d’oiseaux d’île de France, la remise en état du système
d’alimentation en eau potable, dans la perspective d’une agriculture périurbaine
insuffisamment développée à l’heure actuelle.
PIG : prescription du code de l’urbanisme qualifiant un projet d’utilité publique, permettant d’éviter que des dispositionsprises dans d’autres documents d’urbanisme ne compromettent le projet.
Dopage économique
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anti-Dopage économique
ensemble pour Le lancement de projets alternatifs est susceptible de contrer l’extension des
" sols artificiels ". Se plaçant dans cette dynamique, le mouvement " Terre de Liens "
favorise la réalisation de projets en agriculture biologique.
Comment ?
• Par la collecte d’épargne citoyenne, afin d’acquérir des terres destinées à
l’installation de paysans : c’est la " Foncière ".
• En recevant l’argent, les bâtiments ou terrains agricoles de donateurs souhaitant
préserver la terre : c’est le " Fonds ".
• Par le soutien des porteurs de projet et la sensibilisation des acteurs du territoire
à la problématique du foncier agricole : c’est l’" Association ".
Au niveau national, l'association pilote la cohérence du mouvement et le respect de sa
charte. Localement, elle se consacre aux partenariats, à l’accompagnement de projets
d’installation et à la sensibilisation des élus et du grand public.
" En Ile-de-France, la problématique foncière est très
présente. Pour un grand nombre d'élus, les terres
agricoles ne représentent que des réserves
foncières pour l'urbanisation (logements, zones
d’activités, centres commerciaux...). " Terre de liens "
mène des actions concrètes qui permettent de
sensibiliser les acteurs du territoire et de lutter, à son
niveau, contre la spéculation foncière et une
artificialisation excessive des terres. En proposant des
contre-projets au développement incontrôlé des villes - comme par exemple
l'installation d'un maraîcher bio en AMAP - on cherche à donner un sens au territoire
et à créer des liens entre les citadins, les paysans et les autres acteurs (élus,
associations...)."
épargne citoyenne : prend en compte la rentabilité des placements et la finalité de l’argent épargné. Ce placementéthique respecte les normes internationales concernant le travail, les droits humains et le développement durable.
la parole à...
un accès à la terre
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Dopage économique
quand inondationLes inondations par ruissellement se produisent lors de pluies exceptionnelles, quand
la capacité d’absorption ou d’évacuation des sols est insuffisante. Les sols peuvent
être rendus imperméables par l’étalement urbain. La gestion inadaptée des
infrastructures gêne l’écoulement des eaux et peut même les transformer en
véritables barrages.Les villes se sont développées à proximité des cours d’eau pour
satisfaire leurs besoins, tout en gérant au mieux les risques d’inondations.
Cette tendance a culminé en France au cours des " Trente glorieuses " avec un fort
développement urbain en zone inondable, dans l’illusion d’une maîtrise des risques.
A partir des années 1980, à la suite de plusieurs inondations catastrophiques, une
nouvelle attitude est adoptée, à la fois sur les plans technique et réglementaire.
Il s’agit de s’appuyer sur les fonctions naturelles des cours d’eau pour valoriser les
zones inondables. Les crues transportent des sédiments qui peuvent par exemple
fertiliser les champs. Ces zones humides, exceptionnellement riches par leur faune et
flore aquatiques ont aussi une fonction écologique primordiale. Par ailleurs, si elles
sont bien gérées, ces zones en bordure de villes deviennent des espaces de loisirs.
Au sein de ce contexte d’artificialisation, il ne s’agit pas de
" faire la part de l’eau ", comme on fait la part du feu mais de
reconquérir des espaces délaissés, appauvris, dégradés, au mieux
ignorés. Toute la difficulté consiste à passer d’une opposition entre
l’urbanisation et les inondations à une réconciliation entre la gestion des
territoires et celle des risques. Les évènements graves accélèrent
la modification de la réglementation sur l’utilisation des sols en
zone inondable, accompagnant les changements d’opinion.
et urbanisation
se rejoignent
24 Re
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anti-Dopage économique
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face à la merAu niveau du littoral, des inondations maritimes arrivent dans des circonstances
exceptionnelles de grande marée et de tempête. Les conséquences de ces
événements accidentels dépendent de l’efficacité des barrières naturelles
(dunes) et artificielles (digues), mais aussi des politiques d’urbanisme.
Phénomène influencé par le climat et la présence de l’homme, l’érosion du littoral
concerne les trois-quarts des côtes en Europe. La mobilité des dunes est
naturelle, puisque le déplacement des sédiments dépend des vagues, du vent et
des végétaux présents, mais les aménagements d’origine humaine tendent à
déséquilibrer la relation entre terre et mer.
Différentes stratégies permettent de lutter contre cette érosion des côtes :
soit on tente de combler artificiellement les zones dégradées par des apports
en sédiments, soit on adapte au mieux les structures côtières (quais, digues,...).
La solution la plus évidente consiste à implanter loin du littoral les zones
d’aménagement, et, dans la mesure du possible, à maintenir une lisière de
végétaux. La loi littorale préconise d’ailleurs le respect d’une bande
inconstructible de 100 m depuis le rivage.
Il existe aussi depuis 1995 un Plan de Prévention
du Risque Inondation (PPRI). Ce document vise
à prévenir et limiter les conséquences de
fortes crues. Soumis à enquête publique, il
délimite les zones inondables et fixe les
règles applicables. Mais cette solution
législative connaît ses limites sur le terrain.
Certes, elle réduit le risque pour le préfet d’être
poursuivi en justice après une catastrophe
naturelle, mais elle donne lieu à des projets
insuffisamment étudiés. Certaines mesures,
concernant les barrages par exemple, sont
abandonnées pour des raisons financières.
érosion : processus de dégradation et de transformation du relief causé par des facteurs tels que le climat, la pente,les caractéristiques du sol, la présence de végétaux et l’action de l’homme.
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ELivret AlterTour_Artificialisation_ 2010-29_Livret Alternative 28/06/2010 11:47 Page 25
déchets ultimes : déchets qui ne sont plus valorisables,ni par recyclage, ni par valorisation énergétique.
Dopage économique
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enfouissement des déchetsParmi les différentes techniques de gestion des déchets, l’incinération et
l’enfouissement soulèvent de nombreuses protestations. Bien que les normes aient
beaucoup évolué, ces deux techniques majoritaires demeurent en effet les plus
polluantes. Les centres d’enfouissement, suivant leur classification, accueillent
des déchets plus ou moins dangereux : déchets nucléaires, ultimes ou ménagers.
Le pourtour de ces installations détourne plusieurs hectares de terres de leur
fonction agricole. Cependant, ce périmètre de sécurité est souvent insuffisant pour
mettre les riverains à l’abri de nuisances. Ces sites s’étalent sur plusieurs hectares,
portent atteinte aux terres agricoles environnantes, peuvent polluer les eaux
souterraines et attirer des espèces véhiculant des maladies. L’implantation d’un
tel site nécessite des études géologiques et hydrologiques préalables, visant à
limiter le transfert des produits toxiques dans l’environnement.
Pour ce qui est des déchets radioactifs le confinement doit être respecté de bout
en bout de la chaîne. Actuellement le stockage se fait en surface mais des
recherches de sites souterrains sont en cours. Les stratégies ne sont
pas comparables. En surface ce sont les générations présentes
qui en subissent les conséquences alors qu’en
profondeur ce seront celles du future.
Les déchets artificialisent le sol sur une durée plus
ou moins longue. Plutôt que de développer des
techniques pour recycler certains produits, la
rentabilité économique à court terme reste
prioritaire. Ainsi, l’extraction de matières
premières défigure-t-elle deux fois la terre,
puisque l’extraction proprement dite
aboutit en définitive à l’enfouissement de
ses produits dérivés.
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anti-Dopage économique
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monsieur Poubelle
gadoues : déchets issus des matières fécales et d’ordures dont on se sert comme engrais.
En 1884, le Préfet de Police de Paris, Eugène Poubelle, signe un arrêté obligeant les
Parisiens à sortir leurs ordures ménagères sur la voie publique. Cette initiative marque
le déclin de toute une économie de la récupération de déchets, à laquelle contribuaient
notamment les chiffonniers et les gadoues qui
fertilisaient les champs aux alentours.
Par souci d’hygiène, le citoyen a perdu la
responsabilité du traitement de ses
déchets sans pour autant perdre bonne
conscience, malgré le gaspillage
engendré. C’est ainsi qu’aujourd’hui
chaque habitant d’un pays dit
" économiquement développé " produit
annuellement une moyenne de 7 tonnes
de déchets.
Avec le tri sélectif, couplé à une évolution
des comportements de consommation,
le citoyen redevient un acteur-clé dans la
réduction et le traitement des déchets,
qu’il est possible d’orienter vers de nouvelles
utilisations. Des bourses d’échange voient ainsi le jour
partout sur le territoire ; même un objet ancien peut ainsi
être détourné de sa fonction d’origine pour une nouvelle utilisation. Le classement
dans une déchetterie de matériaux éventuellement recyclables pourrait être complété
par des ateliers de démontage, de réparation et de ré-assemblage, suivant le concept
émergeant de " recyclerie ".
La réduction en quantité et nocivité des déchets nécessite l’implication de tous les
acteurs, y compris dès la conception pendant laquelle la question du recyclage des
produits devrait être abordée.
Moins de produits industriels pour plus de services et d’usages différents :
c’est en réalité un véritable bouleversement des modes de vies qui devrait avoir lieu,
puisque le déchet le plus facile à éliminer reste en définitive celui que l’on n’a pas produit.
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relocaliser l’alimentationDes yaourts dont les différents composants et conditionnements parcourent plusieurs
milliers de kilomètres avant d’arriver sur nos tables, des cargos de soja venus d’Amérique
du sud pour alimenter le bétail européen, du bio qui vient de loin : l’agriculture n’est pas
restée en dehors du phénomène de globalisation des échanges économiques. Mais l’ère
de l’énergie bon marché se termine, et avec elle, les bénéfices des entreprises
multinationales dont les produits sont issus de différents endroits du globe.
Relocaliser l’économie, ce serait d’abord réduire les consommations d’énergie, créer de
l’emploi local, ainsi que valoriser les savoir-faire locaux. On peut alors repenser les
équilibres mondiaux des échanges et mettre en avant le droit des peuples à se nourrir de
manière autonome. La libéralisation des échanges des produits alimentaires ruine les
paysans du sud et paupérise la majorité des agriculteurs du nord.
L’industrie agro-alimentaire justifie par le respect de la sécurité alimentaire une
banalisation de produits hors saisons et conditionnés, qui ont perdu de leurs saveurs et
qualités nutritives.
Les dérives du système alimentaire mondial prennent de l‘ampleur et même l’agriculture
biologique peut être touchée par cette intensification des échanges. Seulement 2% de la
surface agricole française est consacrée à l’agriculture biologique. Un quart de la
production de lait bio est importée et pour ce qui est de l’épicerie, fruits, légumes et
produits de la mer, les taux dépassent 60 %.
A un niveau individuel, la solution semble simple :
manger des produits frais et de saison
issus des circuits courts de
distribution, et
retrouver le plaisir
de cuisiner.
Dopage économique
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anti-Dopage économique
amours de légumesUne AMAP (Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne) est un partenariat
entre un groupe de consommateurs et de producteurs, fondé sur la distribution de
" paniers " de produits fermiers.
C’est un contrat solidaire, reposant, entre autres, sur un engagement financier des
consommateurs, qui règlent à l’avance une part de la production sur une quantité et une
période définies d’un commun accord. Pour le paysan, c’est donc l’assurance d’un revenu,
quel que soit le niveau effectif de sa production.Ce système permet le maintien d’une
activité agricole de proximité, la garantie de prix équitables et le respect des saisons.
La charte des AMAP est inspirée de l’agriculture paysanne et de l’agriculture biologique,
contribuant à la lutte contre les
pollutions et les risques
de l’agriculture industrielle.
En définitive, il s’agit d’une
gestion responsable et
collective du sol, considéré
comme un " bien commun ".
L’AMAP participe ainsi au
maintien d’une agriculture
de proximité qui valorise la
terre dans le temps.
Ce partenariat entre producteur
et consommateur favorise le
dialogue social entre ville et
campagne. Il facilite aussi la
coexistence entre la
production et l’usage
des espaces
agricoles.
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artificialisation agricoleLa révolution agricole des années 1950 visait à nourrir une population appauvrie par six
ans de conflit international. L’industrialisation de la production devait répondre à une
large demande tout en minimisant le prix de revient. Cette stratégie a fonctionné
correctement jusqu’aux premières surproductions des années 70.
Après avoir trouvé un débouché militaire
grâce à la guerre, les grandes entreprises
internationales de la chimie se
reconvertissaient dans l’agriculture.
Des contrats commerciaux remplaçaient
les cultures conventionnelles autonomes
(herbes, légumineuses) destinées à
l’élevage hors-sol de volailles et de porc (en
Bretagne), par du maïs complété avec du
soja importé. Les surfaces sont alors
considérablement étendues pour exploiter
au mieux les grands engins agricoles,
acquis grâce aux crédits par les nouveaux
entrepreneurs. Souvent, ils se regroupent
en coopératives développées dans un
partenariat avec les industriels vendant
engrais, pesticides, aliments et matériels.
Et enfin, c’est la politique agricole
commune qui fixe alors les prix et oriente
la spécialisation des exploitations.
On est véritablement entré après la seconde guerre mondiale dans une double spirale de
dopage économique et agricole. Mais comme pour d’autres formes de dopage, on débouche
à long terme sur un déséquilibre qui provoque la pollution de l’air, du sol et de l’eau, comme
le montre bien le phénomène des algues vertes, particulièrement visible en 2009.
Les agriculteurs bretons produisent beaucoup, mais aux dépens de l’environnement. La
Bretagne est la région de France la plus polluée par les nitrates, mais elle produit 60 %
des porcs français, 40% de la volaille et 20% des bovins. Première région en productivité,
mais dernière en revenu par agriculteur !
légumineuse (trèfle, luzerne) : plante qui contribue à enrichir le sol en azote, tout en fournissant une alimentationcomplète grâce à ses protéines (contrairement au maïs qui demande à être complété par du soja riche en protéines)
élevage hors sol : type d’élevage intensif qui utilise des aliments pour animaux issus de l’industrie agroalimentaire etnon des produits de l’exploitation agricole. Les animaux sont élevés dans des bâtiments où les fonctions sont
généralement automatisées.
Dopage agricole
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anti-Dopage agricole
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la méthode PochonPour faire face à l’appauvrissement des sols dû à la pénurie d’engrais pendant les
années de guerre et d’après guerre, on expérimente un système plus autonome dans
lequel l’élevage nécessite moins de fourrages, donc moins d’engrais et où l’herbe est
consommée sur place. C’est la " méthode Pochon ", appelée aussi : système fourrager
à faible usage d’intrants.
A partir de la fin des années 60, ce modèle à forte valeur ajoutée, qui avait sorti la
Bretagne de sa pauvreté, est balayé par l’arrivée du productivisme. Pourtant, quelques
agriculteurs des côtes d’Armor ne sont pas satisfaits par le nouveau système et
fondent en 1982 le Centre d’Etude pour un Développement Agricole Plus Autonome
(CEDAPA), faisant le pari de produire autant en dépensant moins, sans polluer et en
confortant les petites exploitations. Les vaches sont nourries le plus longtemps
possible au pâturage. Mais ce qui est inédit, c’est d’associer l’herbe aux trèfles plutôt
que de mettre des engrais azotés coûteux et polluants. En effet, le trèfle est une
légumineuse capable de capter l’azote de l’air et de le transformer en éléments
nutritifs pour la prairie. De plus, comme le dit plaisamment André Pochon, " la vache est
une barre de coupe à l’avant et un épandeur à l’arrière ". Elle participe donc toute
seule à l’engraissement du sol !
Le débat est amorcé depuis près de 20 ans et relancé par
différentes crises liées à la sécurité sanitaire, aux atteintes à
l’environnement et au développement des biotechnologies.
Le CEDAPA a notamment permis la reconnaissance en
1992 de la mesure " Système Fourrager Économe en
Intrant " (SFEI). L’agriculteur qui s’engage à respecter
le cahier des charges SFEI pendant cinq ans peut obtenir
une subvention européenne.
fourrage : plante ou mélange de plantescultivées pour leurs feuilles, tiges et racinesutilisées pour l’alimentation des animaux.
barre de coupe : organe mécanique équipantcertaines machines agricoles pour couper lestiges de certains végétaux.
épandeur : machine agricole employée pourrépartir régulièrement les effluents
d’élevages.
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nitrates,
pesticides : insecticides, fongicides, herbicides, parasiticides : ensemble des substances émises dans une culturepour lutter contre des organismes indésirables.
molécule mère : présente dans toutes les cellules vivantes, renferme l’ensemble des informations nécessaires audéveloppement et au fonctionnement d’un organisme.
Dopage agricole
32
En 1909, un chimiste Allemand
(F. Haber) mit au point un procédé
afin de transformer l’azote
atmosphérique en ammoniac
liquide. Cette découverte permit
dans un premier temps à
l’Allemagne de fabriquer des
bombes à partir d’explosifs
puissants comme le TNT et la
nitroglycérine. Dans un second
temps, à la sortie de la 1ère
guerre mondiale, les mêmes
usines servirent à créer des
engrais azotés synthétiques à
partir d’ammoniac.
Bien que la dose d’épandage d’azote préconisée soit de 20 à 30 kg à l’hectare, les
quantités ont progressivement augmenté pour atteindre actuellement 250 kg.
Les nitrates représentent évidemment une part importante de la pollution des sols due
à l’agriculture, mais cette pollution est engendrée également par tous les traitements
à base de pesticides, ainsi que les amendements organiques (de type fumier, lisier,
compost, boue…) sans oublier les rejets d’exploitations minières ou industrielles.
Cela représente un risque pour la chaîne alimentaire, et donc pour la santé humaine.
Cette toxicité varie selon la concentration et la forme des polluants :
• vers les plantes et organismes vivants : c’est la biodisponibilité.
• vers les eaux de surface et souterraines : c’est la mobilité.
Certaines molécules sont stockées pendant un temps, puis libérées dans le milieu,
souvent de manière inattendue. S’il sont dégradés, les polluants peuvent disparaître,
mais dans certains cas, les produits intermédiaires issus de cette dégradation sont
plus toxiques encore que la molécule mère initiale.
ni contaminations
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anti-Dopage agricole
33
objectif qualité des eaux
principe pollueur payeur : issu du code de l’environnement, " Les frais résultant des mesures de préventions, de réductionet de lutte contre la pollution doivent être pris en charge par le pollueur ".
substances actives : éléments chimiques et leurs composés tels qu’ils se présentent à l’état naturel ou tels qu’ilssont produits par l’industrie, incluant les impuretés résultant du procédé de fabrication.
Le
s o l
p e u t
ê t r e
considéré
comme un
réservoir où
l’eau se déplace
c o n t i n u e l l e m e n t .
R u i s s e l l e m e n t s ,
évaporations, infiltrations,
constituent autant de flux
susceptibles de transporter des
produits polluants. Avec l’évolution des
pratiques agricoles, la composition des eaux se
trouve modifiée. L’irrigation artificielle qui pompe
l’eau des nappes phréatiques représente le plus gros
consommateur d’eau avec 70% des prélèvements français.
Viennent ensuite l’industrie (20%) et les besoins domestiques
(10%). La gestion de l’eau est devenue en vingt ans une affaire sociale,
commerciale et institutionnelle. La loi sur l’eau date de 1992, et a
permis d’établir un compromis entre acteurs, usagers et lobbies
industriels. Mais certaines règlementations sont plus ou moins respectées,
telles que le principe " pollueur payeur ". La redevance pour pollution de l’eau
est variable selon l’usage, qu’il soit domestique ou non. On distingue ainsi les
industriels distributeurs d’intrants (taxés selon la quantité de substances
actives contenues dans les produits vendus), les pêcheurs, et enfin les
éleveurs. Pour cette dernière catégorie, la redevance est établie par rapport
à la taille du troupeau. Mis à part cette adaptation des tarifs, des
mesures ont été prises pour améliorer la gouvernance, faire des
économies, utiliser des techniques innovantes, et subventionner plus
largement les systèmes agricoles durables. Au niveau européen,
de nombreux acteurs visent l’objectif d’un " bon état des
masses d’eau " d’ici 2015. Après un premier bilan,
cet objectif a finalement été repoussé
à l’année 2021.
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abandon des terres agricolesChaque recensement agricole évalue en particulier l’évolution de la Surface Agricole
Utile (SAU), qui est sujette aux changements d’usages et à une évolution naturelle
vers des landes et des bois. Ces surfaces sont différentes des friches urbaines qui
peuvent servir de réserves foncières. Dans ces conditions, on estime à 50 000 ha par
an la quantité de terres agricoles abandonnées.
L’artificialisation concerne
l’évolution vers un usage non
agricole et non forestier
des terres agricoles. Cela
totaliserait aux environs de
78000 ha par an (Solagro,
2007). Par ailleurs, bien que la
règlementation protège les
surfaces forestières, une
tendance historique vient de
s’inverser en 2008, avec le recul
des sols boisés.
Pour inverser la tendance
générale, il faudrait par exemple
convertir les friches urbaines
en espaces " productifs " de type
jardins familiaux, pâturages,
apicultures... Rappelons que le
phénomène d’abandon des terres
avait été freiné dans les années
90 par la mise en place d’une politique adaptée : prime à l’herbe, aides compensatoires
pour les handicaps naturels, soutien aux produits AOC. Cependant, l’avenir des
territoires agricoles reste incertain. Au point que certains s’inquiètent même pour
l’autonomie alimentaire du pays.
SAU (Surface Agricole Utile) : concept statistique destiné à évaluer le territoire consacré à la production agricole.
friches urbaines : zone qui n’est ni cultivée ni entretenue ; il s’agit souvent d’anciens quartiers industriels abandonnésaprès une faillite d’usine ou l’exode de populations.
prime à l’herbe ou Prime Herbagère Agro Environnementale (PHAE) : cette mesure Agri Environnementale récompenseles producteurs qui élèvent leurs animaux à l’herbe.
indemnité Compensatoires de Handicaps Naturels (ICHN) : indemnité versée pour les surfaces fourragères situéesen zone défavorisée (montagnes, handicaps spécifiques).
Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) : label officiel qui garantit l’origine de produits alimentaires traditionnelsfrançais.
Dopage agricole
34
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Types de sols affectéspar l’artificialisation en Europe
48,6%Culture
35,9%Pâturage
6%8,7%Forêt
Eau 0,8 % Pelouses naturelles
Source : EEA - 2000 - données Corine Land Cover
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anti-Dopage agricole
35
" Il va falloir nourrir 9 milliards d’Hommes en
2040. Pour faire face à la pénurie alimentaire mais aussi au manque d’eau et à la
demande en biocarburant, les prix vont obligatoirement augmenter. Comme l’a déjà
fait remarquer Edgard Pisani, signataire de la PAC en 1962 : " Le monde pourra-t-il
nourrir le monde ?". Certes l’Europe garantit le revenu des agriculteurs en soutenant
les prix par la protection du marché européen (avec des taxes aux frontières,
appelées " prélèvement ") et, ce qui est très contestable, par des subventions aux
exportations. Depuis 1992, cette politique est progressivement remplacée par
des primes directes versées aux agriculteurs. Ceci permet de compenser la baisse
des prix due à la diminution des protections et des subventions aux exportations.
Mais de plus en plus, la priorité en Europe est d’aider les agriculteurs qui produisent
de la qualité en respectant l’environnement sur de petites surfaces. On passe donc
de primes sans condition, où l’on touche des aides même si on est le roi des pollueurs,
à des subventions ciblées sur l’agriculture durable."
MAE : mesures misent en place dans l’union européenne en contrepartie de versements aux agriculteurs volontaires.Elles permettent de protéger les paysages.
la parole à...
vers une nouvelle PACLa Politique Agricole Commune (PAC) façonne depuis plus de 40 ans l’existence de
millions d’agriculteurs européens au moyen d’incitations économiques. Au fil des années,
le contexte international et les attentes des consommateurs ayant évolué, la vision
productiviste de l’agriculture évolue aujourd’hui vers un usage
moins artificiel des sols.
Actuellement, la PAC s’appuie sur deux piliers :
• les aides directes qui visent à compenser la
baisse des prix du marché agricole, représentant les
trois-quarts du budget dédié à l’agriculture.
• les aides indirectes qui valorisent les
Mesures Agro-environnementales (MAE) et le
développement rural, soit le quart restant.
A l’aube de l’élaboration d’une nouvelle stratégie
européenne, cette répartition bascule à l’avantage
du deuxième pilier.
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Terre agressée
par les pratiques agricoles
adventices : espèces végétales étrangères à la flore indigène d’un territoire dans lesquels elles sont accidentellementintroduites et peuvent s’installer.
intrants : engrais, amendements organiques, produits phytosanitaires, semences... Ensemble des éléments apportésaux terres et aux cultures.
La perte annuelle de sol cultivable est considérable, puisqu’elle s’élève en moyenne à
10 tonnes par hectare. C’est un problème d’autant plus préoccupant que la couche
d’humus est à la source de toutes nos productions agricoles. Un sol fertile est plus
résistant à l’érosion et permet de nourrir les plantes tout en diminuant les risques de
sécheresse. Face aux changements climatiques, notre meilleure arme consiste donc à
préserver la diversité végétale, animale et bactérienne.
Pour autant certaines techniques agricoles font encore défaut :
• Le couvert végétal : contrairement à un sol nu, la présence de plantes couvrantes
favorise la stabilité du sol. Une parcelle couverte, que ce soit par des adventices ou
des cultures, retiendra les nutriments du sol.
• Le travail du sol : un labour trop profond mélange les
différents organismes qui agissent en symbiose pour
transformer les éléments. Si la structure est
désorganisée, alors la circulation de l’eau et des
particules est aussi perturbée. Par analogie, les
sillons des tracteurs dans le sens de la pente
augmentent le ruissellement.
• L’usage excessif d’intrants : La volonté
d’optimiser les rendements d’une culture
ne prend pas toujours en compte les
besoins de la plante et les impacts sur
l’environnement. Une mauvaise gestion
des produits (chimiques ou non)
détruit des populations d’insectes,
d’adventices, de champignons ou de
bactéries.
Parmi les nombreuses pratiques qui
remettent en cause la fertilité de nos sols,
citons le surpâturage, le tassement du sol par
les engins agricoles, la monoculture.
Dopage agricole
36
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anti-Dopage agricole
techniques de fertilisation
compost : mélange de matières carbonées, de matières azotées, d’humidité et d’air, transformé en matière organiqueau cours d’un processus de décomposition.
fumier : excréments d’animaux additionnés de paille.
lisier : mélange de déjections d’animaux d’élevage (urine et excrément) et d’eau dans lequel domine l’élément liquide.
boues de STEP : les eaux usées sont transformées dans les STations d’EPuration pour donner des boues urbaines.Elles peuvent cependant contenir des métaux lourds, des micro-organismes nuisibles ainsi que des résidus de pesticidesou de médicaments.
Le dopage augmente temporairement l’activité, mais provoque dépendance et
dégradations sur le long terme. A l’opposé, la sieste offre une diminution de l’activité
apparente mais favorise les actions futures. Au dopage agricole, on peut ainsi opposer le
repos de la terre, considéré comme une préparation à la fertilité : " Un an sur deux, la moisson
faite, tu laisseras ton champ paisible dormir
et s’endurcir, oisif, à ne rien faire ", Virgile.
Le repos du sol est l’intervalle de temps laissé
entre l’apport de fertilisant et la disponibilité
des nutriments pour les végétaux. Ainsi
l’amélioration constante de la fertilité du sol
passe par de nombreuses techniques :
• Apport azoté organique : pour une bonne
assimilation des végétaux on compte une
part d’azote (N) pour dix parts de carbone
(C). Le rapport C/N varie selon l’origine des
fertilisant organiques. Que ce soit du
compost, du fumier, du lisier ou des boues
de STEP, c’est autant de compositions
différentes qu’il faut utiliser à bon escient.
• Engrais vert : aussi appelé " culture
intermédiaire piège à nitrate ".
Les légumineuses (trèfle, luzerne,...)
possèdent la particularité de fixer l’azote atmosphérique, de le " stocker " sur la parcelle
et d’être disponible pour la culture suivante.
• Bois Raméal Fragmenté (BRF) : rameaux de branches d’arbres qui sont broyés pour une
meilleure dégradation, puis répandus sur le sol pour en favoriser l’humidité et la fertilité.
Cette liste non-exhaustive ne saurait rendre compte de la difficulté à équilibrer apports et
besoins en fertilisants, car chaque sol abrite une microbiologie spécifique. Certaines plantes
interagissent entres elles, suivant des mécanismes encore largement inconnus.
37
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herbes indésirables
chaulage : apport d’un produit fertilisant ou d’un matériaux déstiné à améliorer la qualité des sols (en terme de structureet d’acidité).
messicoles : plantes annuelles à germination préférentiellement hivernale habitant dans les moissons.
produit phytosanitaire : produit utilisé pour soigner ou prévenir les maladies des organismes végétaux.
Dopage agricole
38
L’apparition des herbicides dans les années 1950 et l’intensification des pratiques
culturales correspondent à la chute de la richesse floristique. Au nom du rendement
économique et de la mécanisation, la nature a été depuis cette époque continuellement
façonnée à nos besoins. Certaines herbes ont été " artificiellement " considérées
comme indésirables, selon l’endroit où elles poussaient.
Les plantes cultivées ont été au contraire
particulièrement soignées : au moindre écart
de rendement, l’agriculteur répond par du
drainage, de l’irrigations, du chaulage et autres
amendements. Les espèces caractéristiques
des milieux tendent à disparaître au profit
d’une flore universelle, peu robuste, devenue
dépendante de l’agriculteur et de son arsenal
de produits phytosanitaires.
Actuellement, 20 espèces - 30 tout au plus -
assurent la quasi-totalité de notre
alimentation d’origine végétale, alors que plus
de cinquante espèces messicoles sont en
situation précaire. Ces herbes sauvages dites
" mauvaises herbes " intègrent pourtant une
biodiversité à protéger. Mais leur protection
peut sembler dérisoire dans une société très majoritairement favorable à une nature
dominée et domestiquée. Officiellement, les champs cultivés sont d’ailleurs exclus des
territoires sur lesquels s’applique la législation de protection des espèces.
Avouer la disparition des milieux naturels cautionne des pratiques d’aménagements
mutilantes et excuse notre ignorance de la flore et de la faune. Comme l’a bien fait
remarquer le botaniste Yves Baron : " Avant même de disparaître sur le terrain, la
nature est en train de disparaître des esprits ".
et perte de biodiversité
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anti-Dopage agricole
39
permacultureIntroduit dans les années 1970 par deux universitaires australiens ce terme est alors
une contraction de " agriculture " et " permanente ". Pour ces auteurs, la forêt
représente le système le plus évolué au niveau de la gestion énergétique. Puis le concept
évolue en " culture permanente " et le côté social prend de l’ampleur. On fait alors
référence à un mode de vie qui intègre alimentation, habitat et travail de la terre à
l’écosystème.
En s’inspirant de la forêt, on peut lutter contre les problèmes d’érosion et obtenir une
couche d’humus suffisante. Mais il est aussi possible de
pailler le sol pour attirer les champignons et
autres organismes de dégradation.
La recherche d’harmonie entre
l’homme et la planète passe avant
tout par l’observation. Tout est
dans la nature, il suffit
d’apprivoiser les interactions
naturelles, ainsi les déchets
deviennent des ressources.
" La culture sans labour permet d’éviter
la déstructuration de la terre, de plus,
quand la pluie tombe, moins de minéraux sont
emportés et il y a moins de pollution des nappes
phréatiques. La protection du sol permet de faire vivre la vie du sol pour une meilleure
fertilité. Je fais aussi des semis à la volée donc les graines ne sont pas enterrées et
elles germent plus vite. Un verger-poulailler a été testé. Les poules jouent le rôle
d’insecticide et cela augmente la production de surface puisque je vends des œufs et
des pommes. Pour répondre au challenge économique et écologique, il faut rentabiliser
l’usage de la terre par la diversité de production. Sous les arbres il peut y avoir des
cassis, des artichauts, des fleurs, … Le permaculteur est avant tout un
expérimentateur. "
sité
la parole à...
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artificialisation du vivantL’artificialisation des sols ne se limite pas à recouvrir des terres cultivables de béton
et bitume. La production à grande échelle et en plein champ de plantes OGM
artificiellement modifiées par génie génétique y contribue aussi.
Alors que les grandes entreprises agro-semencières avaient déjà su imposer les
plantes hybrides rendant l’agriculteur dépendant, les plantes OGM constituent
l’aboutissement d’une logique productiviste de l’agriculture. La plupart de ces plantes
artificielles ont été " dopées " pour être insensibles aux herbicides fournis par la même
entreprise. Souvent réalisé par moyen
aérien, l’épandage de cet herbicide
détruit, au gré du vent, bien plus que les
champs visés. En Amérique du sud, la
forêt laisse la place aux plantations de
soja transgénique. En 10 ans, une
surface de l’Amazonie équivalente à celle
de la France a disparu, majoritairement
au profit de ces cultures artificielles qui
nourrissent vaches, moutons, poules ou
cochons d’élevage des pays riches.
Parlons du cochon justement... Le monde
animal n’est pas en reste côté OGM.
Des laboratoires travaillent, par exemple,
sur un porc transgénique rejetant moins
de nitrates dans le but avoué d’intensifier
encore l’élevage hors-sol : l’artifice génétique au service de l’artificialisation des terres.
L’arme juridique du brevet permet aux multinationales d’être les propriétaires exclusifs
d’OGM et exigent le versement de royalties. Au nom du profit, ces multinationales
encouragent toujours plus la production uniforme à grand renfort de pesticides. Cela
réduit d’autant la " biodiversité cultivée ". Point d’orgue de cette dérive : fabriquer des
plantes productrices de molécules chimiques et de carburant, détournant encore plus
la terre de sa fonction première : nourrir.
OGM : Organisme Génétiquement Modifié
plante hybride : première génération d'un croisement entre deux variétés, bénéficiant d’un haut rendement et d’unehomogénéité qui disparaît à la génération suivante. De nouvelles semences hybrides sont donc rachetées chaque année.
royalties : redevances, sommes versées au titulaire d'un brevet en contrepartie de l'exploitation de son invention.
Dopage agricole
40
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anti-Dopage agricole
" Je me suis retrouvé avec du soja
OGM résistant au Round Up dans
mes champs. La société Allemande
qui transformait le soja en Tofu a
eu la visite des fraudes, ne pouvant commercialiser du tofu bio avec des traces d'OGM,
la société a fait faillite. Deux plaintes ont été déposées : une contre X, en France, en
1998 pour connaître l'origine de la contamination, et l'autre en 1999, contre
Monsanto, aux USA. La piste de la contamination des semences étant la seule valide.
Par la suite, j’ai décidé de témoigner en faveur des faucheurs parce qu'ils ont le courage
de porter les choses publiquement par des actions symboliques de désobéissance.
C’est ce qui a permis la prise de conscience et le moratoire qui interdit les OGM en
France depuis janvier 2008. Un autre moyen d’agir consiste à utiliser des semences
paysannes ; elles ne sont pas inscrites au catalogue, donc on n’a pas le droit de les
vendre pour un usage commercial. Mais dans le cadre expérimental et à des fins de
conservation de la biodiversité cultivée, on peut les diffuser et les conserver à la
ferme. C’est une réponse de terrain à la confiscation du vivant, car les grands groupes
semenciers tentent de racheter toutes les semences. Tout est fait pour limiter ces
variétés qui ont le " défaut " de se reproduire seules. Nous travaillons pour conserver
le plus possible de variétés de populations et les remettre en vie dans les champs. La
diversité génétique permet de s’adapter au climat et de garder des sols vivants plutôt
que d’apporter des béquilles chimiques, artificielles et toxiques. "
sélection massale : simple et peu coûteuse, elle consiste à choisir les plantes qui semblent les plus intéressantesdans une population (meilleurs épis, meilleurs fruits, etc...), puis d’utiliser leurs graines comme semence pour la culturesuivante. C'est la plus ancienne méthode.
Round Up : marque déposée d’herbicides produits par la compagnie américaine Monsanto, cet herbicide total à basede glyphosate est utilisé en agriculture depuis les années 1990.
Monsanto : entreprise basée aux Etats-Unis et premier dealer mondial de semences transgéniques.
moratoire : terme de droit, qui désigne une décision d’accorder un délai ou une suspension volontaire d’une action.
la parole à...
41
semences paysannesLes Semences Paysannes se distinguent des graines certifiées produites par des
entreprises semencières et inscrites dans un Catalogue Officiel. Par la
sélection massale, certains paysans remettent en culture des variétés
anciennes et se réapproprient ces semences en principe interdites
à la vente, à l’échange et au don, puisqu’elles ne figurent pas dans le
Catalogue Officiel.
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pourtant, un arbre qui tombe Partant d'une description de cet organe vital - et pourtant peu connu - que constitue
le sol, nous avons présenté certaines atteintes qui lui ont été infligées par l'Homme
durant ces dernières décennies, ainsi que des alternatives destinées à préserver
toutes ses richesses.
Artificialisation des sols ? Une expression
difficile à prononcer pour un constat alarmant
face à l’indifférence générale : parkings,
zones d'habitation, zones technologiques
et industrielles, voies de TGV, autoroutes,
aéroports, …
Dans une société délocalisée, les distances
séparant nos diverses activités demandent
beaucoup de moyens de transport, dont les
supports couvrent le territoire. Dans une
société de consommation où la qualité et le
prix de l'alimentation ont longtemps été
négligés, les terres agricoles industrialisées
sont épuisées à force d'engrais artificiels, de
pesticides et d'engins au poids écrasant.
Dans cette société compétitive, motivée par
les enjeux de la finance, le sol qui nourrit
compte moins que les profits immobiliers, la
production d'agrocarburant ou la construction
d'une technopôle impressionnante. qu’une forêt
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fait plus de bruit
En réponse au dopage économique, nous proposons une relocalisation des activités
humaines, la diminution et le recyclage des déchets, la ré-évaluation du principe des
subventions qui orientent la politique agricole, la remise en question des brevets sur
le vivant, de la taxation du "mésusage" des ressources naturelles et d’une propriété
devenue un droit absolu, exclusif et perpétuel. Et si nous redevenions enfin des Etres
Vivants plutôt que des Avoir Vivants... en voie d’extinction ?
En réponse au dopage agricole, nous proposons le droit au repos du
sol, le respect de ses équilibres internes, la liberté de cultiver des
semences anciennes adaptées à chaque terroir, le retour à l'herbe
et aux légumineuses dans un élevage moins productif, et bien
entendu l'aide à la reconversion en " bio " des cultures.
En cette période particulièrement marquée
par les accidents météorologiques qui
favorisent l'érosion, tels que les inondations
aux effets amplifiés par les couvertures
artificielles ou la suppression de barrières
naturelles, nous réalisons en effet combien la
gestion du sol doit être envisagée de manière
globale, en essayant de placer les enjeux
économiques à court-terme d’une société de
la " croissance illimitée " loin derrière les
enjeux écologiques et humains.
Heureusement, le manque de moyens stimule
l’imagination collective : ces feux de vrais
artifices mettent - à leur insu - en lumière des alternatives qui se développent dans
l’ombre, infailliblement.
qui pousse...
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44
les clés du sol (p.10)PESSON P. La forêt : son climat, son sol, ses arbres, sa faune. " Ecologie forestière ". 1975, n° 465 Disponible surwww.persée.fr
microbiologie, une science exclue (p.11)• BOURGUIGNON Claude et Lydia. Le sol, la terre et les champs. C. Bourguignon, Ed. Sang de la terre. Sang de laTerre, 2008, 222 pages. (Les dossiers de l’écologie)
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l’artificialisation et ses outils de mesure (p. 12 - 13)• LAROCHE B., THORETTE J. et LACASSIN J-Cl. " L’artificialisation des sols : pressions urbaines et inventaires dessols ". Etude et Gestion des sols [en ligne], 2006. Disponible sur : www.inra.fr
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ensemble pour un accès à la terre (p. 23)• TERRE DE LIENS. Une richesse à cultiver. [en ligne]. Disponible sur www.terredeliens.org
quand inondation et urbanisation se rejoignent (p. 24)• A. F. " Quand urbanisation rime avec inondation ", l’Humanité. [en ligne]. 2001. Disponible sur www.humanite.fr
enfouissement des déchets (p. 26)• FARCY P. " L’enfouissement des déchets est aussi nocif que l’incinération ". Univers Nature. [en ligne]. 2007.Disponible sur www.univers-nature.com
monsieur Poubelle (p. 27)• RESEAU DES RESSOURCERIES. Acteur du Réemploi. [en ligne]. Disponible sur www.ressourcerie.fr
relocaliser l’alimentation (p. 28)• MARECHAL Gilles. " Les premiers pas de l’agriculture vers la relocalisation de l’économie ". Dossier Transrural.[en ligne] n° 359, 2008. Disponible sur www.transrural-initiatives.org
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ressourcez-vous...
Livret AlterTour_Artificialisation_ 2010-29_Livret Alternative 28/06/2010 11:49 Page 44
méthode Pochon (p. 31)• CENTRE D’ETUDE POUR UN DEVELOPPEMENT AGRICOLE PLUS AUTONOME. " CEDAPA ". [en ligne]. Disponiblesur www.cedapa.com
• ALARD V., BERANGER C., JOURNET M. " A la recherche d’une agriculture durable. Etude de système herbagerséconomes en Bretagne ". par Inra Editions, 2002. 340 p.
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Etudes artificialisation• " Abandon et artificialisation des terres agricoles " - PONTEREAU P.et COULON F. .
Courrier de l’environnement de l’INRA. Juillet 2009. n° 57, 109 p.
• " Indicateur agro environnemental - Artificialisation des espaces agricoles " - PONTEREAU P. COULON F etGIRARD P. Mars 2008. 7 p
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• " Soixante ans de changement de l’utilisation des sols " - POIRON O. Etudes foncières. Mars/Avril 2008, n° 132.
Ouvrages• " Pratiques Agricoles et Qualité de l’Eau, Dégradation des sols Agricoles" - D. Aran (professeur de pédologie),Université de Metz
• " Urbanisme raisonné en milieu rural, 2008, Prise en compte du patrimoine " sol " - P. Chery, A. LEE et M-F Slack.
• " OGM, tout s’explique" - Christian VELOT. Ed Goutte de sable. 2009 . 240 p.
• Courrier de l’environnement de l’INRA n°57, juillet 2009.
• " Un éléphant dans un jeu de quilles - L’homme dans la biodiversité " - R. Barbault. Ed. Seuil, imprimé en Normandie,jan 2006, 265 p.
• "Gestion durable des sols" - L. Citeau, A. Bispo, M. Bardy, D. King, Ed Savoir Quae. imprimé à Peyrac, 320 p.
• " Les enjeux internationaux du compostage. Nos ressources alimentaires et en eau. " Climat. B. K. Martin. EdL’Harmattan. Imprimé à Bonchamp-lès-laval en 2000. 299 p.
• " L’érosion entre nature et biodiversité ". A. Gamblin et Y. Veyret. Ed. Sedes, imprimé à St-Just-la-Pendue ; Fev1998. 337 p.
Vidéo• "Solutions locales pour un désordre global" - Coline Serreau . (2010). [DVD]. Paris, FRANCE : Memento FilmsDistribution
• "Le Monde selon Monsanto" - Marie-Monique Robin . (2008) . [DVD]. FRANCE : Arte France
• "Le temps des Grâces" - Dominique Marchais . (2009). [DVD]. FRANCE : Capricci Films
• "On revient sur terre" - Suzanne Körösi . (2008) . [DVD]. FRANCE : Les films du réveil
• "L’Age de tous les Dopage " - AlterCampagne . (2010) . [DVD]. FRANCE
s...
pour aller encore plus loin...
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mes notes...
Laura MÉ
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Même si toute reproduction de ce recueil est vivement conseillée,
vous pouvez soutenir l’Altertour en vous le procurant sur www.altertour.net
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une Terre aux abois,
et la caravane passe...Laura MÉVELLEC
Gilbert BELGRANO • Nolwenn BOUILLAUDDominique MÉVELLEC • Marie-Aude CORNU
Michel LEFORESTIERGuillaume de CROP
maquette
Imprimerie 34sur papier recyclé
avec encres végétalesElsa MROZIEWICZ : Couverture • 4-5
Lidwine : 6-7 • 10 • 32 • 37 • 38SAMSON : 35, mise en couleurs dessin p.30
Breizh PASCAL : 30Marcel : 41
Avez-vous déjà assisté à une compétition cycliste ?
Au simple niveau régional, il n’est pas rare de croiser plus de 3 véhiculesmotorisés pour 1 cycliste. Si l’on fait abstraction des moteurs dissimulésdans le cadre des vélos(*) des participants, la caravane est bien souventimpressionnante entre la sécurité, les journalistes, les coachs et lespartenaires. Le bilan carbone d’une telle équipée est effarant.
Si vous croisez la route de l’AlterTour cet été, vous serez en mesured’apprécier la différence. Tout simplement parce que cet Autre Tour deFrance est celui de la coopération. Vous remarquerez rapidement l’absencede podium, de classement, de chronomètres, de sponsors, …
L’AlterTour est un temps pendant lequel la compétition n’existe pas. Pournous, elle incite l’être humain à repousser sans cesse ses limites et cellesde son environnement. Nous avons conscience de la finitude du monde, nousne pouvons donc croire au mythe du record infini. Nous sommes convaincusque la recherche du rendement optimal du corps humain, de la productionagricole, du placement financier, de l’énergie, de la communication, participeà l’artificialisation de notre monde, donc à notre propre déclin.
Le temps des vacances nous avons décidé d’enfourcher nos vélos pour allerà la rencontre des acteurs d’une autre société : faucheurs d’OGM,adhérents d’AMAP, paysans boulangers, maraîchers bio et biodynamistes, éco-constructeurs, semeurs volontaires, entrepreneurs autogestionnaires,militants contre les paradis fiscaux ou la pollution de l’eau, …
Ces acteurs du quotidien détiennent les clés du changement de notresociété, leurs actions doivent être connues et reconnues ! Je remercieégalement tous les bénévoles qui se sont investis (sans dopage) de près oude loin dans l'organisation de l'AlterTour 2010.
Mathieu Fromont(coordinateur AlterTour)
(*) Affaire "Fabian Cancellara" • avril 2010 • http://www.lemonde.fr/sport/video/2010/06/02/cyclisme-y-a-t-il-un-moteur-cache-dans-le-velo_1366445_3242.html
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En cette année 2010, le circuit de l’AlterTour a pris la forme d’un escargot, en éloge à lalenteur et en contradiction avec le dopage généralisé de la société. Se relayant pendantsix semaines sur ce parcours, les " altercyclistes " y rencontrent des alternativesdestinées notamment à préserver nos ressources naturelles.
Alors que l’artificialisation de notre territoire prend des proportionsinquiétantes, certaines de ces alternatives constituent desremèdes éventuels à une urbanisation mal maîtrisée et à uneagriculture polluante.
Ecoutons donc avec les altercyclistes le chant qui nousinvite à " Tout quitterMais tout emporter,Avec sa maison sur le dos, Comme un escargot "…
…et munis de ce petitouvrage qui aborde en termes dedopages économique et agricole laquestion de l’artificialisation dessols, en y proposant quelquesréponses.
Enfin une véritable opération escargotqui ralentira durablement
la circulation.
éloge de la lenteurà bicyclette
Alter ur :T 2 10
2 juillet 2010
15 août 2010
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