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Histoire de la ville dIFRANE

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Page 1: Histoire  de la ville dIFRANE

Histoire de la ville d'Ifrane (1)

Radioscopie d'une relecture de la petite histoire de la ville d'Ifrane Introduction

"Comme nous sommes au Maroc où l’on va vite, je vous le dis, mes frères, en vérité, je vous le dis, il n’y aura de vraie station d’estivage qu’à Ifrane, car M. Labonne [1888-1971] est son prophète". C’est par la conclusion d’un article de J. Carré intitulé "Ifrane, la perle de l’Atlas" et publié dans le N° 14 de la revue Maroc du 15 août 1930 - si nos concitoyens nous le permettent - que nous commencerons cette relecture de la petite histoire de la ville d’Ifrane ; ce lieu de villégiature qui n’a cessé depuis, de s’ébranler et de s’étendre.

Ifrane connaîtra un rapide développement, si rapide que le centre d’estivage a pu recevoir ses premiers vacanciers dès l’été 1929 soit une année après le voyage d’étude d’Erick Labonne, Secrétaire Général du Protectorat, qui sera nommé bien plus tard Résident Général à la fin des années 1940. Conscient des déprédations qui allaient nuire à la contrée, il fit prendre, dès le 19 juin 1929 par Driss Ou Rahou, Caïd des Béni M’tir, un arrêté portant règlement des conditions de séjour des particuliers dans la vallée de l’Oued Tizguit.

Elevé au titre de "Centre" par Arrêté Viziriel le 16 septembre 1929, puis à celui de "Municipalité" le 14 janvier 1947, Ifrane atteindra le rang de "Province" le 18 septembre 1979.

Et l’on se demande aujourd’hui pourquoi à l’instar de Louis Gentil pour El Youssoufia, Petit-Jean pour Sidi Kacem, Port Lyautey pour Kénitra, etc.…"Ifrane" n’a-t-elle pas pris tout bonnement le nom de Labonne ? Ingénument on peut répondre comme me l’a écrit , il y a quelques années, Mireille Musseau, une ancienne du Maroc : "[…] du fait qu’il [Labonne] était diplomate en poste du 16 mars 1946 au 5 juin 1947 et non militaire ; il n’a pas fait acte de "pacification" mais œuvré pour un vrai protectorat avec mise en valeur du Pays et optimisation des échanges culturels, et non pas une colonisation. Je pense qu’il a été vite remercié, assez vite et remplacé par le Général Juin.

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Radioscopie d'une relecture de la petite histoire de la ville d'Ifrane Le contexte historique

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L’aventure coloniale de la France a atteint son paroxysme à la fin des années 20 et au début des années 1930 symbolisée par la fameuse exposition de 1931 qui fut, à en croire au nombre de billets vendus, visitée par plus de 33 millions de visiteurs.

Au Maroc, le point de repère le plus marquant serait plutôt l’infâme Dahir du 16 mai 1930, qui se voulait réglementer le fonctionnement de la justice dans les tribus de "coutumes berbères" mais devenu surtout célèbre par la connotation "Dahir berbère". Et c’est dans cette mouvance que la France voulait absolument cautionner son existence dans le Moyen Atlas alors que le pays des Imazighen, n’était pas entièrement "pacifié".

La "Bataille de Bougafer" en 1933 en est la preuve irréfutable. Pour ce qui est d’Ifrane, René H. Henry écrivait dans Salam n° 145 de mars 2003, (revue trimestrielle de l’Association des Anciens des Lycées et Collèges Français au Maroc) : "A cette époque, les pistes étaient fermées par des barrières du coucher au lever du soleil et il était interdit d’y circuler par crainte des djichs".

Parmi les projets du Protectorat français figure, évidemment et bien sûr, la création, en arrières pays montagneux, de centres d’estivage. Cette idée n’est nullement nouvelle car à l’instar des Anglais aux Indes, des Hollandais à Java et des Américains aux Philippines, la France coloniale projetait ainsi de créer des stations de repos accessibles aussi bien aux petites bourses qu’aux nanties familles françaises installées au Maroc. Il était aussi question de répondre aux besoins de ces petits fonctionnaires empêchés de rentrer en France par le coût élevé du voyage ou par la durée de leur congé administratif annuel réduite par celui-ci.

Ni la bourrasque de la grande crise monétaire de 1929 ni l’insécurité qui prévalait toujours dans le Moyen Atlas n’avaient découragé les promoteurs et en particulier Erik Labonne à s’engager dans la création d’un centre d’estivage tel qu’Ifrane.

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Radioscopie d'une relecture de la petite histoire de la ville d'Ifrane Témoignages

A travers certains documents de l’Office Chérifien du Tourisme qui faisaient référence à la Métropole, on peut lire pêle-mêle :

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Tantôt c’est un rappel des montagnes françaises en général : "…la route d’El Hajeb à Ifrane, au tracé si pittoresque… ; elle parcourt ensuite des sites vraiment imposants et dignes des montagnes de France…" ; tantôt c’est plutôt un coin plus précis qui est mis en exergue : "…on monte une côte assez raide dans un défilé au fond duquel, comme dans les Pyrénées, un gave coule à travers les rochers…".

Ici c’est la forêt de l’Ile de France qui est évoquée, forêt que Yves Richer De Forges qualifie de forêt d’émotions (http://www.onf.fr/fontainebleau) : "…ici un coin de la forêt de Fontainebleau…" ; là c’est un petit pays bucolique aux confins de la Picardie qui est cité "…un jour prochain s’étendra la renommée de cette petite Normandie du Val d’Ifrane..." ; là encore c’est l’émergence des cours d’eaux de l’hexagone, qui sont mis en évidence : "….ce site enchanteur…..n’a rien à envier aux rivières de France."

Et ce Jules Borely qui qualifie le charme d’Ifrane de virgilien écrivait que "La nature s’y montrait encore intacte, hantée des faunes et des aegipans de l’antiquité berbère…" (BORELY (Jules).- Le Maroc au pinceau.- Paris : Les Ed. Denoël, 1950.- p.85.) .

Vingt cinq ans après "la fondation" de la ville, on peut aussi lire dans un rapport du Syndicat d’Initiative et de Tourisme d’Ifrane [c. 1954] : "…ce centre est devenu une petite ville dont il est superflu de rappeler le succès. Ifrane n’a pas, comme certaines stations du Maroc, besoin de publicité tapageuse et sa renommée s’étend hors des frontières du Protectorat."

Au début des années 60 c’est au tour du chanteur Brahim El Alami de perpétuer la splendeur de "la perle de l’Atlas" par : "Qu'il est doux Ifrane et qu'elle est exquise sa beauté" (Mahla Ifrane ou Mahla jamalou).