Histoire National Geographic 2013 09

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Bien réels ou mythifiés, voire imaginés, les vestiges du passé sont souvent le reflet d’une immuable quête de perfection.

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  • certaines espces mais pas de corps humain, car ctait une pratique interdite dans la Grce antique. Les mdecins hippocratiques avaient crit des textes intressants sur lanatomie humaine, mais les travaux dAristote marqurent un tournant dans lanatomie compare. Dans ses tudes sur le corps humain, il commit en revanche des erreurs tonnantes. Il affirmait que le centre des sensations tait le cur et non pas le cerveau (une thorie soutenue aupa-ravant par le mdecin Alcmon de Crotone). Ses conceptions du rle de lhomme et de la femme dans la reproduction humaine taient quant elles influences par certains prjugs sexistes, que le philosophe partageait avec presque tous ses contemporains. Il considrait ainsi que dans la reproduction, le mle, dont part le mouvement, fournit lme, tandis que la femelle, passive, apporte la matire.

    Aristote a abord de nombreux sujets et livr des enseignements trs varis. Nous avons perdu une grande partie de son uvre, mais ce qui nous en reste est impressionnant en termes de perspective, de densit et de prcision intel-

    LCOLE DATHNES

    Au centre de la fresque de Raphal (1510-1512), au Vatican, Platon dirige ses mains vers le ciel (le monde des ides). ses cts, Aristote les dirige vers le sol.

    ARISTOTE FACE PLATON

    et leur pense politique. Platon tait issu dune famille noble dAthnes, tandis que dans la cit, Aristote ntait quun tranger sans droits politiques, originaire du nord de la Grce.

    Platon fut un adver-saire critique de la

    dmocratie ath-nienne et dans sa Rpublique, il formula lutopie dun tat idal, organis en trois

    classes : les phi-losophes au pou-

    voir, les guerriers la dfense et les travailleurs, productifs. Pour sa part, dans la Politique, Aristote considra que la dmocratie modre, avec une vaste classe moyenne, est le moins mauvais des rgimes. Il critique toutes les utopies et affirme ainsi : Dans la dmocratie, le citoyen nest tenu dobir qui que ce soit ; ou sil obit, cest la condition de commander son tour ; et voil comment, dans ce sys-tme, on ajoute encore la libert, qui vient de lgalit.

    Bien quAristote ait beaucoup appris des leons de son matre, il rejetait lidalisme de Platon, pour qui seules les ides existent (les choses de ce monde nen tant quune copie) et lme est immortelle. Pour Aristote, la seule ra-

    lit est celle qui est sensible, celle de lexprience quotidienne. Les deux penseurs se distinguent aussi par leur condition sociale

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    BUSTE DE PLATON (VERS 428-347 AV. J.-C), MARBRE, MUSE DU CAPITOLE, ROME.

    DE LA DMOCRATIE

  • lectuelle. Logique, rhtorique, posie, politique, conomie, mtaphysique, physique, psycho-logie, zoologie, histoire des constitutions Ses ides et ses contributions ont orient les chercheurs pendant des sicles. Il rdigeait des traits, avec une prose succincte, afin doffrir prcision et clart, sans la beaut rhtorique des dialogues crits par Platon.

    Le matre de ceux qui savent Une grande partie des textes qui nous sont arrivs sont des notes, quil utilisait pendant ses cours, et quil aurait peut-tre corriges en vue dune dition. En revanche, ses uvres plus soignes dun point de vue littraire, des-tines un public plus large, ont t perdues. On les appelle les crits esotriques. Un sort chaotique attendait les textes aristotliciens quand ils quittrent le Lyce, lcole quil avait lui-mme fonde Athnes.

    Traduits en latin, ces crits simposrent au Moyen ge et la Renaissance comme luvre dun sage indiscutable ( le matre de ceux qui savent , disait Dante). Mais ce ntait pas un

    penseur dogmatique. Il invitait la rflexion et observait avec sensibilit et prcision. Derrire son style austre se cache un auteur suggestif, vivace, qui navait pas la prtention de simposer et faire autorit, mais plutt dapprofondir ses ides et ses critiques. Quil dcrive des dis-sections ou quil explique comment lorateur doit tudier la psychologie de son auditoire, Aristote fait preuve dun indniable talent scientifique. Cest aussi un grand thoricien, capable dinventer une terminologie trs prcise (dans sa Logique, par exemple) ou de percevoir les effets des tragdies dans lesprit du public. Sa grande curiosit est confirme par les mots qui introduisent sa Mtaphysique : Tous les hommes ont naturellement le dsir de savoir.

    ESSAIAristote. Le philosophe et les savoirs Michel Crubellier et Pierre Pellegrin, coll. Points essais, d. Le Seuil, Paris, 2002.

    TEXTELes Parties des animaux Aristote, Frdric Gain (trad.), LGF, Classi-ques de philosophie/Livre de Poche, 2011.

    Pour en savoir plus

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    ARISTOTE AU MOYEN GETraduits en latin, les crits dAristote se sont imposs au Moyen ge et la Renaissance comme luvre dun grand sage. Ici, Aristote en lgislateur. Dtail dun chapiteau du palais des Doges, Venise, fin xive-dbut xve sicle.

  • 4 LA GRANDE DIVISION ZOOLOGIQUE : VERTBRS ET INVERTBRSOn ne trouve pas chez Aristote de classification dfinitive. Lune des principales observations du philosophe concerne la division des animaux entre vertbrs et invertbrs.

    La distinction dAristote entre animaux au sang rouge (enaima) et non rouge (anaima) correspond peu ou prou la division entre vertbrs et invertbrs : Les animaux se divisent en sanguins, par exemple, lhomme,

    le cheval et tous les animaux qui, une fois arrivs leur plein dveloppement, sont apodes [sans

    pieds], bipdes ou quadrupdes,

    et les non sanguins, comme labeille, la gupe et,

    parmi les animaux marins, la sche, la langouste et tous les animaux dots de plus de quatre pieds (Livre 1, ch. 4, ndlr).

    1 CTACS : MAMMIFRES MARINSAristote dtermina le caractre mammifre des ctacs et runit beaucoup dinformations. Il tablit galement la distinction entre poissons osseux et cartilagineux.

    Au dbut de lHistoire des animaux, Aristote fait la distinction entre les espces vivipares, ovipares et larvipares, une terminologie encore employe. Parmi les vivipares, il voque les ctacs, comme le dauphin et les slaciens . Ce terme, qui dsigne toujours les poissons squelette cartilagineux (comme le requin ou la raie), aurait t fix par Aristote lui-mme, daprs le romain Pline lAncien. Aristote observa que Tous les animaux qui scrtent du lait lont dans les mamelles.

    Les mamelles appartiennent tous les vivipares, [] quils produisent leurs petits en eux-mmes [ou]

    au dehors, et [] tous les vivipares qui ont des poils, comme lhomme et le cheval, ou parmi

    les ctacs, au dauphin, au phoque et la baleine ; car ces derniers animaux ont aussi

    des mamelles et du lait . Les ctacs, explique-t-il, ont immdiatement

    un embryon qui, en se dveloppant, devient lanimal quils produisent,

    comme on le voit chez lhomme et chez tous les quadrupdes vivipares (Livre 1, ch. 4, ndlr) .

    LE PREMIERBIOLOGISTE AU MONDELHistoire des animaux est le plus grand trait de zoologie dAristote qui a consacr de nombreux ouvrages au monde animal. Celui-ci a t crit vers 343 av. J.-C. Il comprend neuf livres rdigs de son vivant, le livre X est considr comme apocryphe. Mais son titre, tir du latin Historia Animalium, prte confusion : le mot grec historia signifie plutt recherche . Or, cest bien ce que contient cette uvre extraordinaire : la premire recherche (dont voici quelques exemples) sur lanatomie, la reproduction et le comportement animal, partir de lectures, dobservations personnelles et dinformations recueillies auprs de pcheurs, de chasseurs, etc.

    DAUPHINS REPRSENTS SUR UNE FRESQUE DU MGARON DE LA REINE. PALAIS DE CNOSSOS. 1500 AV. J.-C.

    ZEUS ET LA VACHE IO. VASE FIGURES ROUGES ATTIQUE. Ve SICLE AV. J.-C. KUNSTHISTORISCHES MUSEUM, VIENNE.

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    HERCULE CHASSANT DES OISEAUX, DTAILS DUN VASE ATTIQUE. MUSE DE BOULOGNE-SUR MER.

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  • 5 LUF DE LA POULE OU LA FORMATION DUN TRE VIVANTCest Aristote que lon doit la premire tude en embryologie, avec la description minutieuse du dveloppement de lembryon de poulet lintrieur de luf.

    Dans les poules, il sufft de trois jours et de trois nuits, dit Aristote, pour que le poulet commence sannoncer. [] Le jaune est dj mont peu peu dans le haut de luf, qui est sa pointe, l o [] luf se brise. Dans le blanc, il y a une espce de point sanguinolent, qui est le cur. Ce point bat et sagite, parce quil est anim. Le premier biologiste de lhistoire explique que le poussin sort [] du blanc ; et sa nourriture vient du jaune, travers lombilic (Livre 6, ch. 2, ndlr).

    2 LE SURPRENANT MODE DE REPRODUCTION DES POULPESDans sa description de la reproduction des cphalopodes, Aristote remarqua une particularit qui ne fut redcouverte que deux mille ans plus tard, au xixe sicle.

    Aprs avoir dcrit quils saccouplaient en se joignant bouche bouche, entrelaant rgulirement tentacules tentacules , Aristote ajoute dans son trait : On prtend mme quelquefois que le mle a une espce de verge dans un de ses bras, et que, dans ce bras, se trouvent les deux plus grandes cavits ; cette verge est, dit-on, assez nerveuse ; elle est attache vers le milieu du bras o elle est ; et le mle la fait entrer tout entire dans la trompe de la femelle (livre 5, ch. 5, ndlr). On a dcouvert que ce membre existe bel et bien : il sagit de lhectocotyle, un tentacule avec lequel les cphalo podes transfrent la femelle les spermatophores, une sorte de capsule contenant les spermatozodes.

    3 UNE MTHODE SINGULIRE POUR OBSERVER LE SYSTME VEINEUXAristote considre le cur comme le point de dpart des vaisseaux et dj il distingue une grande et une petite veine. Il pratiqua des dissections sur les cadavres danimaux.

    Les observations pionnires dAristote sur le systme vasculaire reposent en grande partie sur la technique originale quil utilisa pour tudier les vaisseaux sanguins. Aristote avait remarqu que le principal obstacle pour tudier les vaisseaux sanguins est le fait quils saplatissent quand ils se vident. Cest le cas quand on sacrifie un animal au couteau. Or, il savait que lorigine des veines avait t dtermine sur des corps trs maigres, o les veines taient bien visibles la surface de la peau. Cest pourquoi il faisait maigrir des animaux avant de les trangler (laissant ainsi les veines pleines et trs visibles) pour les observer plus prcisment de lintrieur.

    6 ABEILLES : LORGANISATION SOCIALE DUN INSECTEPour Aristote, les abeilles ne faisaient que rcolter le miel qui tombait de lair, surtout au moment du lever des constellations, et quand larc-en-ciel stend sur la terre .

    Nanmoins le philosophe a livr une excellente tude sur celles-ci. Cette espce occupe une place part dans son uvre. Il en dcrit par exemple le cycle de vie. Quand labeille a dpos la semence dans le gteau de cire, il y a du miel vis--vis. Lembryon pousse des pieds et des ailes pendant quil est enferm ; mais quand il est entirement form, il rompt la membrane, et la quitte en senvolant. Il signale notamment que cet insecte possde un instinct social car il agit en vue dune fin commune, comme lhomme ou la fourmi. Il affirme ainsi que les abeilles chassent hors de leur ruche leurs surs paresseuses ou celles qui nont pas le sentiment de lpargne (Livre 5, ch. 19, ndlr).

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    CRAMIQUE DE CAMARS ORN DUN POULPE. MINOEN MOYEN (2000-1700 A.C.). LE DE CRTE.

    BUSTE DE CHEVAL. KYLIX (COUPE VIN) APULIENNE.

    ASKOS (VASE ASSAISONNEMENT) APULIEN EN FORME DE GALLINAC.

    TTRADRACHME EN ARGENT ORN DUNE ABEILLE AU RECTO, FRAPP PHSE. IVE SICLE AV. J.-C. BRITISH MUSEUM.

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  • Lexcellente organisation de leurs lgions explique la singulire rsistance des Romains , crivait Vgce, auteur dun prcis de technique militaire au ive sicle apr. J.-C. Comme tous les peuples de la zone mditerranenne, les Romains avaient adopt le modle strict de la phalange la naissance de la

    Rpublique. Mais ils le remplacrent vite par la lgion et son systme de manipules, des units tactiques de 200 hommes, qui offraient une flexibilit et une mobilit suprieures. Si la phalange tait pense comme une seule machine, un bloc de soldats qui ne laissait place aucune initiative per-sonnelle, la lgion tait plus souple, plus professionnelle et savait sadapter aux imprvus. Quand les Grecs avaient besoin dune longue prparation et dune plaine pour champ de bataille, les Romains pouvaient ragir vite et fort aux attaques surprises. Cette souplesse a dmontr sa supriorit par rapport la phalange macdonienne lors de la conqute de la Grce par les Romains au milieu du iie sicle av. J.-C. Lhistorien Tacite dcrit

    ARME ROMAINE

    LA LGIONUNE LITE AU PAS

    Fonde au ive sicle av. J.-C., la lgion romaine sest perfectionne jusqu devenir la colonne vertbrale de lEmpire. Un succs d sa discipline et sa mobilit.

    JOS ANTONIO MONGE MARIGORTAPHILOLOGUE

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  • LGIONNAIRES ET BARBARES

    Le bas-relief du sarcophage Ludovisi

    montre des soldats de linfanterie et de

    la cavalerie romaine crasant les guerriers

    barbares. iiie sicle apr. J.-C. Palais Altemps, Rome.

    LEMBLME DU POUVOIRLaigle tait le

    symbole du dieu Jupiter et des lgions.

    Ci-contre, came datant du ier sicle

    apr. J.- C. reprsentant lempereur Claude.

    Cabinet des mdailles, Bibliothque nationale.

  • C H R O N O LO G I E

    Le fer de lance de lEmpire

    ainsi un gnral romain exhortant ses soldats pendant la campagne contre les rebelles de Bretagne, en lan 60 apr. J.-C. Il disait ses soldats [de] seulement se tenir serrs, lancer leurs javelines, puis, frappant de lpe et du bouclier, massacrer sans trve ni relche, et ne pas soccuper du butin : la victoire livrerait tout en leurs mains. Devant lardeur qui clatait chacune de ces paroles, et la manire dont balanaient dj leurs redoutables javelines ces vieux soldats prouvs dans cent batailles, Sutonius, sr de la victoire, donna aussitt le signal du combat. Cette scne est une constante de lhistoire de Rome.

    La rsistance de lEmpire romain travers les sicles sexplique par lnergie avec laquelle les dtachements dfendaient les frontires, envahissaient les territoires ennemis, rpri-maient les rvoltes, dsignaient de nouveaux empereurs Sans larme, limparable expansion de la ville naurait pas t possible. La puissance militaire de Rome ne reposait pas tant sur le nombre de soldats ou leur quipement que sur la discipline. Les membres de lunit dinfan-

    550 av. J.-C.Servius Tullius, roi de Rome, instaure un systme de classes et de centuries, lorigine dune lgion qui exclut les pauvres.

    750 av. J.-C. Selon la tradition, Romulus, premier roi de Rome, cre les premires lgions en choisissant ceux qui taient aptes au combat.

    405 av. J.-C.Marcus Furius Camillus, dictateur de Rome, constitue la lgion manipulaire qui perdure jusquau iie sicle av. J.-C.

    311 av. J.-C.Lors de la bataille des fourches Caudines, la puissante arme romaine est vaincue et humilie par les Samnites.

    199 av. J.-C. Cynoscphales, les lgions menes par Flaminius prouvent leur supriorit sur la phalange macdonienne de Philippe V.

    107 av. J.-C. Caius Marius rforme la lgion : il introduit un systme de cohortes, lenrlement volontaire et larme professionnelle et permanente.

    LA FORTERESSE DE MASSADAEn lan 73 apr. J.-C., une lgion encercle le dernier bastion de rebelles juifs. Une grande rampe rige sur le flanc de la colline ( gauche) permet doccuper la citadelle.

    LEMPIRE CONNUT SA PLUS GRANDE EXTENSION DEPUIS AUGUSTE LPOQUE DE CLAUDE. PICE EN OR LA GLOIRE DE LA CONQUTE DE LA BRETAGNE EN 43 APR. J.-C.

    212 apr. J.-C.Caracalla promulgue un dit qui concde la citoyennet romaine tous les hommes libres de lEmpire, qui deviennent ainsi aptes au service militaire.

    9 apr. J.-C.Dans la fort de Teutobourg, les Germains, guids par Arminius, crasent trois lgions romaines.

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  • terie romaine ntaient pas des mercenaires, la diffrence de la plupart des armes adverses. Les soldats lgionnaires (milites legiona-rii) taient de simples citoyens et la lgion un peuple en armes. Sengager tait lun des droits du citoyen, comme voter ou tre candidat des postes de la fonction publique. Ce droit tait nanmoins rserv aux propritaires, car on considrait que les citoyens dpourvus de biens navaient rien dfendre. Les proltaires ceux qui napportaient ltat que leurs enfants (leur proles) ntaient appels que lors des tumultus, ces leves en masse organises en cas de force majeure.

    La rforme de MariusAu dbut du Ier sicle av. J.-C., la lgion sest mtamorphose sous les ordres de Caius Marius, le consul qui a port le modle de larme romaine sa perfection. Il a commenc par introduire une nouvelle unit oprationnelle : la cohorte. Aprs sa rforme, les 4 800 soldats dinfanterie qui composaient une lgion taient ainsi rpar-

    tis en dix cohortes qui comptaient six cen-turies chacune. Les cohortes se dployaient en trois lignes dans une formation appele triplex acies, crant ainsi un mur pratique-ment infranchissable sur le champ de bataille un mur de fer , selon lcrivain romain Vgce. Les cohortes pouvaient aussi fonctionner comme des entits indpen-dantes, ce qui permettait la lgion de sadapter aux scnarii les plus divers.

    Mais la rforme de Marius a surtout conduit modifier le recrutement de la lgion. Celle-ci tait dsormais ouverte tous les citoyens via lenrlement volon-taire. Larme amateur est aussi devenue professionnelle et permanente. Selon le consul, cette rforme tait indispensable vu la rduction du nombre de citoyens propritaires lie ltat de guerre dans lequel avait vcu Rome pendant presque tout le IIe sicle av. J.-C. Les propritaires ntaient plus assez nombreux pour cou-vrir les effectifs ncessaires au combat contre le roi numide Jugurtha entre 112 et

    MICHAEL MELFORD / NGS

    STLE FUNRAIREUne stle orne dune armure, dun casque et de jambires, appartenant un lgionnaire. Kunsthistorisches Museum, Vienne.

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  • 105 av. J.-C. Le service militaire tait en thorie obligatoire pour tous les citoyens gs de 17 60 ans. Mais dans les faits, se sont mas-sivement enrls ceux qui auparavant nen avaient pas le droit. Ds lors, les armes de pauvres ont donc t considres, raison, comme les vritables btisseurs de lEmpire.

    Jusquau Ve sicle apr. J.-C., et lintgration des mercenaires barbares dans larme au moment du dclin de lempire, le statut de citoyen romain tait une condition sine qua non pour devenir lgionnaire. Avec llargisse-ment de la citoyennet toute lItalie dabord, puis de nombreuses populations des provinces et, finalement, au dbut du IIIe sicle apr. J.-C., tout le territoire imprial, la lgion sem-blait disposer dune rserve dhommes quasi inpuisable. Largument avait dailleurs t utilis comme arme psychologique par Csar, qui jugeait que pour gagner le respect des Gaulois, mme lavenir, il tait essentiel de leur montrer que les ressources dIta-lie taient si grandes quen cas de perte au combat, larme tait en mesure de restaurer

    UN COMMANDEMENT HYPER HIRARCHIS

    UNE ORGANISATION MILITAIRE

    visait le commandement. Une lgion romaine B tait consti-tue de dix cohortes. Elle tait complte par les contingents mercenaires, troupes auxi-liaires composes dinfante-rie lgre et de cavalerie. Ces hommes taient en gnral recruts dans les provinces ou sur le territoire o avait lieu le combat. Toutes ces forces taient sujettes un systme de commandement qui fonc-tionnait avec la minutie dune

    horloge. Sous les ordres du gnral en chef (imperator) se regroupait un petit tat-major form de lgats, ques-teurs et tribuns, des figures politiques dotes dune exp-rience militaire suffisante pour prendre le commandement dune lgion ou dune cohorte en cas de besoin. Il nest donc pas tonnant que la formation de bataille des lgions ait eu elle seule un effet dissuasif sur lennemi.

    Lunit tactique de base de larme romaine tait la cohorte. Chaque cohorte a tait constitue denviron 480 hommes diviss en six centuries, dont chacune tait place sous le commandement dun centurion, issu des

    rangs des lgionnaires aprs plusieurs annes de service. Celui des six centurions de la cohorte avec le plus danciennet super-

    LGIONDix cohortes constituaient une lgion. Au dpart, celle-ci navait pas de commandement unique, jusqu lapparition du lgat.

    COHORTEElle tait forme de six centuries, de 60 100 hommes chacune. Deux centuries formaient un manipule.

    1re COHORTE

    6e COHORTE

    2e COHORTE

    7e COHORTE

    PRFETSCes grands officiers demeuraient au camp avec les units de rserve lors des combats.

    SIGNIFRESChaque manipule tait dot dun porte-drapeau, charg de lenseigne (signum), forme par des mdaillons (philarae).

    CENTURIONS la tte des centuries, ils voluaient en premire ligne et beaucoup mouraient au combat.

    CHEVALIERS Sous la Rpublique, il y avait dans chaque lgion entre 120 et 300 equites. Puis ils furent remplacs par les socii (allis).

    LGAT Autorit maximale de la lgion, le lgat tait nomm par lempereur. Son mandat durait un an.

    Centurie

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  • rapidement ses effectifs, voire de les aug-menter . Mais la rforme de Marius eut aussi des consquences nfastes dun point de vue politique. La loyaut du soldat changea de cible. Le patriotisme, qui avait converti les lgions de la Rpublique en troupes qua-siment invincibles (comme lcrivait au XVIIIe sicle lhistorien Edward Gibbon) fut remplac par une fidlit au gnral (impera-tor) et un attachement presque religieux du soldat lunit dont il avait jur de dfendre les enseignes. On comprend alors pourquoi les affrontements entre gnraux ont affaibli la Rpublique au point den faire la dictature militaire que nous connaissons sous le nom de rgime imprial.

    Un modle latifundiste la fin de la Rpublique, sengager dans la lgion devint un dbouch professionnel pour ceux, comme les paysans sans terre, qui navaient rien dautre que la citoyennet romaine. Aprs des sicles de conflit incessant, la paysan-

    nerie dItalie avait en effet perdu ses propri-ts et le modle latifundiste stait peu peu impos. Comme crivait lhistorien Salluste : La plbe, plonge dans la misre, tait acca-ble par le service militaire ; quant au butin conquis sur lennemi, les gnraux le dilapi-daient avec quelques complices. Et, pendant ce temps, les parents et les petits enfants des soldats, sils habitaient ct dun grand per-sonnage, taient chasss de chez eux. Les jeunes paysans taient dailleurs considrs comme les meilleures recrues et constituaient le plus gros contingent de larme. Vgce

    affirmait ainsi : Je ne crois pas quon ait jamais pu mettre en doute laptitude

    spciale du peuple des campagnes pour les armes. () Lui, lev en plein air, rompu la fatigue, habitu au soleil, peu soucieux de lombre, ne sachant mme pas sil existe des bains, ignorant

    le luxe, simple dans ses gots, se contentant de peu, faonn et endurci de bonne heure

    toute espce de travaux : manier le fer, creuser des fosss, porter des fardeaux, telles

    LEMPEREUR ET SES TROUPES TRAJAN DIRIGE LARME PENDANT LES

    GUERRES ENTRE ROMAINS ET DACES (ROUMANIE ACTUELLE). REPRODUCTION

    DE LA COLONNE TRAJANE. MUSE DHISTOIRE, BUCAREST.

    3e COHORTE

    8e COHORTE

    4e COHORTE

    9e COHORTE

    5e COHORTE

    10e COHORTE

    TRIBUNSUn conseil de six tribuns militaires issus de lordre questre conseillait le lgat de la lgion.

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    BROCHE AVEC ENSEIGNEElle appartenait la Lgion X Fretensis, cantonne en Jude, qui joua un rle cl dans la premire guerre juive, ier sicle apr. J.-C. Muse dIsral, Jrusalem.

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  • TROUPES SUR LE LIMES

    LES FRONTIRES DE LEMPIRE

    faon similaire : des camps fortifis (castra), des forts (cas-tella), des tours de garde (tur-ris), des postes dobservation (statione) et des rsidences pour les chefs militaires (prae-sidia). Le trac du limes conci-dait souvent avec des barrires naturelles comme les fleuves, les montagnes ou les dserts ; ces derniers furent sans doute les plus efficaces, dans les provinces de Syrie et dArabie. Mais les limites administra-tives officielles des provinces priphriques ne correspon-

    daient pas toujours aux fron-tires naturelles. En fait, la frontire militaire de lempire avanait ou reculait en fonction des circonstances. Par ailleurs, les camps romains la pri-phrie de lEmpire se situaient souvent au-del de la frontire proprement dite. En effet, les enclaves militaires avaient avant tout un objectif strat-gique. Elles sorganisaient en lignes ou strates, crant ce que les spcialistes appellent un systme de dfense en profondeur.

    Au iiie sicle apr. J.-C., les garnisons de lgionnaires sont devenues essentielles pour protger les frontires de lEmpire face la menace des Germains et dautres au nord, des Perses en Orient et des tribus africaines

    berbres au sud. Dans chacune des rgions qui formaient ce limes (ou frontire), les troupes romaines sorganisaient de

    sont les habitudes des champs. () [Il est habitu] se contenter dune nourriture fru-gale grossire, porter des fardeaux, ne point craindre le soleil ni la poussire, passer les nuits tantt sous les tentes, tantt dcouvert. On voyait aussi dun bon il les citadins habi-tus des mtiers rudes et trs utiles, comme les forgerons, les menuisiers ou les carriers.

    Les paules garnies de muscles Comme le dit Vgce, on prfrait les lgion-naires qui avaient lil vif, la tte droite, la poitrine large, les paules garnies de muscles, les bras vigoureux, les doigts longs, le ventre peu tendu, la jambe menue, le gras de la jambe et le pied dbarrasss de chairs super-flues, mais resserrs au contraire par la duret des nerfs qui sy entrelacent. Lorsque vous apercevrez ces marques, prfrez-les la haute taille ; car il vaut beaucoup mieux quun soldat soit vigoureux que grand. Et tant pis si les Gaulois se gaussaient de la petitesse de ses lgionnaires, comme le raconte Csar. Une fois slectionnes, les nouvelles recrues

    AUX CONFINS DE LEMPIREJalonn de 14 forts et 80 fortins, le mur dHadrien fut rig en 122 apr. J.-C. pour sparer la Bretagne romaine des peuples pictes qui vivaient en cosse.

  • LA FORCE DE LEMPIRE LGIONNAIRE LUTTANT DANS UN PAYS

    BARBARE, COMME LINDIQUE LA CABANE EN ARRIRE-PLAN. BAS-RELIEF

    DU IIe SICLE APR. J.-C. LOUVRE.

    devaient prter serment (sacramentum) pour accder au statut de simple soldat (gregarius) et recevoir leur uniforme et leur armement. Ctait une crmonie solennelle et collec-tive, prside par laigle dor que Marius avait tabli comme enseigne de la lgion.

    Le jeune lgionnaire senrlait pour une priode de 25 ans. Sil survivait, il se ren-gageait en gnral jusqu lge de la retraite, 60 ans. Il tait alors licenci (emeritus) et recevait une compensation en terres ou en argent. La ville de Mrida, en Espagne, doit dailleurs son nom romain, Emerita Augusta, au fait quAuguste y a tabli les vtrans licencis aprs les Guerres Cantabres. Le lgionnaire compltait sa maigre solde avec la part quil recevait sur les butins et la vente des prisonniers, ou la distribution dargent par les gnraux lors des triomphes sous la Rpublique ou par lempereur locca-sion de victoires ou de ftes impriales. Selon Vgce, la moiti de ces revenus tait garde dans une bourse commune chaque cohorte, surveille par les

    porte-tendards. Entretenus par ltat, ils avaient peu de dpenses et accumulaient ainsi une pargne. Les soldats recevaient aussi des rcompenses pour leurs actes hroques sous forme de bracelets, colliers, mdailles et couronnes (la couronne civique, pour avoir sauv la vie dun camarade ; la couronne murale, pour tre le premier avoir escalad un parapet, par exemple). Ils pouvaient galement tre levs au grade de centurion. En contrepartie, ils taient soumis une discipline trs svre.

    Les soldats recevaient une ration de bl toutes les deux semaines. Ctait la base de leur alimentation, quils devaient transpor-ter avec eux, moudre et cuire sous forme de bouillie ou de galette. Bien sr, ils ne vivaient pas que de pain : ils mangeaient aussi du lard, du fromage, des ufs, de la viande et du poisson, du vin Bien que le mariage lgal leur ait t refus jusqu la fin du IIe sicle apr. J.-C., il tait habituel que lors de longs sjours sur un territoire, on tolre les couples et les familles. Aux

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    TENDARD LGIONNAIRE Le sanglier est lemblme de la Vingtime lgion Valeria Victrix, qui, sous le rgne de Nron, aida touffer la rvolte de la reine Boadice en Bretagne, en 60 apr. J.-C. iie sicle.

    BRITISH MUSEM / SCALA, FIRENZE

  • FORT DE HOUSESTEADSCest lun des forts proximit du mur dHadrien, la frontire entre la Bretagne romaine et les tribus pictes dcosse.

    UNE DISCIPLINE DE FER

    ORDRES SUR LE CAMP

    tait le chtiment pour faute grave comme linsubordina-tion, la dsertion ou la fuite face lennemi. Le mme chtiment tait rserv aux auteurs de dlits qui ntaient pas capitaux dans la vie civile, comme le vol, le viol ou le par-

    jure. Pour tous les actes mettant en

    pril la troupe, comme laban-don de la garde, le fautif tait sou-

    vent condamn tre frapp

    mort par ses compagnons. Pour les fautes graves de lchet ou dindiscipline commises par des units entires, les chefs de la lgion tiraient au sort un dixime de ses membres, qui recevaient le chtiment (do le verbe dcimer, decimare). Les fautes mineures taient punies par le remplacement de la ration de bl par une ration dorge ou lobligation de dor-mir la belle toile en dehors du camp. Il y avait des chti-ments intermdiaires, comme la dgradation ou lexpulsion.

    Lune des cls de la puissance de Rome fut, selon Vgce, la stricte observation de la discipline dans ses camps . Les gnraux taient impitoyables quand il sagissait de la faire respecter. Le gnral romain se dfinissait comme

    imperator parce quil tait investi dun imperium, un pouvoir absolu qui incluait la capacit de condamner mort ses hommes. Tel

    alentours des campements stables se for-maient ainsi de vritables villages, qui ont souvent donn naissance des villes, comme Len, en Espagne, sige de la lgion VII.

    Professionalisme Les soldats avaient une charge de prs de 40 kg , do leur surnom de mulets de Marius . Ils portaient un gros baluchon contenant leur ration bimensuelle de bl, des outils divers (pioche et pelle, faux, hache), un panier et des pieux pour monter le campement, un chau-dron et une casserole. Le contenu du baluchon reflte la varit des travaux qui occupaient les lgionnaires en dehors du combat : dres-ser le camp aprs une journe de marche, selon un plan quadrill, toujours identique, creuser une tranche circulaire (forme dun foss et dune palissade), raliser des chausses et des tunnels, couper les arbres pour se procurer du bois afin de construire des ponts, des embar-cations, des quartiers dhiver ou de grandes armes dassaut ; ramasser du bl pour les sol-dats ou du fourrage pour les chevaux et les

    STLE FUNRAIRE DUN CAVALIER NORIQUE DUNE LGION. Ier SICLE APR. J.-C. MUSE DE LA CIVILISATION ROMAINE, ROME.

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  • mulets qui tiraient les armes et les chariots. Une forme parfaite tait indispensable pour matriser un tel ventail dactivits et assi-miler les tactiques de combat. Les longs sjours dans les quartiers dhiver taient consacrs linstruction, quotidienne en pleine cam-pagne. Grce ce dur entranement, crivait Csar, les lgionnaires exercs (exercitati) par les combats prcdents, pouvaient aussi bien se dicter eux-mmes la conduite suivre que lapprendre dautrui . Ce profession-nalisme explique ce qucrit Gibbon pro-pos des campagnes dHadrien et dAntonin le Pieux en Germanie au IIe sicle apr. J.-C. La terreur des armes romaines ajoutait de la dignit la modration des souverains, et la rendait plus respectable. Ils conservaient la paix en se tenant perptuellement prpars la guerre (), les nations voisines saperce-vaient bien quils taient aussi peu disposs supporter loffense qu offenser eux-mmes.

    Les combats taient trs brefs : ils se rglaient souvent en lespace dune jour-ne. Les lgions progressaient en moyenne

    de 30 kilomtres par jour, mais pouvaient doubler la cadence en cas de marche force . Dans ce cas, Marius avait prvu un allge-ment des charges pour gagner en rapidit. Csar est mme parvenu, un jour, parcourir 75 kilomtres en 24 heures. Mais ces perfor-mances nont rien pu faire contre le dclin de la lgion sur lequel les historiens restent diviss. Certains mettent en cause les inva-sions et les rapports croissants avec les bar-bares. Dautres voquent les rticences de la lgion intgrer les nouvelles techniques de guerre ou lessor du christianisme synonyme de dclin du patriotisme Preuve sil en fal-lait quaucune formation nest infaillible.

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    SOLDATS ROMAINS Ce dtail de la mosaque Barberini, Palestrina, montre un groupe de lgionnaires de garnison en gypte. On peut apprcier la couleur des vtements et larmement.

    ESSAISLarme romaine. VIIIe s. av. J.-C.- ve s. apr. J.-C.Pierre Cosme, Armand Colin, rd. 2012.Lgions romaines en campagne Georges Depeyrot, ditions Errance, 2008.

    TEXTELa Guerre des Gaules Jules Csar, Flammarion, 1993.

    Pour en savoir plus

  • LA STRUCTURE DUN FORT FRONTALIER

    Machine de guerre bien huile, la lgion tait aussi un groupe de travailleurs capables de construire des routes, des ponts, des aqueducs, des digues et des forts. Ces derniers, permanents ou provisoires, taient rigs selon le mme schma, mais avec des matriaux diffrents. Le fort de Vindolanda, ci-contre, est proximit du mur dHadrien. Les forts permanents taient faits de murs et de tours en pierre et en bois, et de toits

    en ardoise. On y trouvait des lavabos et des fentres protges par du verre.

    1 Agglomration civile (vicus)

    Ses habitants vivaient proximit du camp. Les maisons, les boutiques, les tavernes et les thermes taient aligns sur la rue principale.

    2 Ensemble de baraquements

    Longs et troits, ils pouvaient chacun loger une centurie de 80 hommes et ses officiers. Un fort pouvait contenir une soixantaine de blocs de ce type.

    Le fort de Vindolanda fut rig aprs la victoire des Romains sur les tribus caldoniennes en 85 apr. J.-C, dans le nord de lactuelle Angleterre. lorigine en bois, il fut reconstruit en pierre en 122 apr. J.-C. lextrieur se dveloppa une importante agglomration civile (vicus). Les habitants profitaient de la proximit du camp pour leur ngoce. On y trouvait des boutiques, des tavernes et mme des thermes, les mieux conservs des les Britanniques avec de telles caractristiques.

    RECONSTITUTION DU FORT ET DU VICUS TELS QUILS APPARAISSAIENT EN 200 APR. J.-C.

    Tour

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    UN LGIONNAIRE NETTOIE ET RPARE SON ARMURE FACE SON BARAQUEMENT. DESSIN DE PETER CONNOLLY. LA CIVILISATION ROMAINE.

  • 3 Quartier gnral et prtoire

    Les tches administratives se droulaient dans le quartier gnral. Le prtoire accueillait le commandant de la lgion et tait quip de toutes les commodits.

    4 Muraille de 4 m de haut Autour du campement, les soldats creusaient un foss puis rigeaient une muraille, de prs de 4 m de haut, jalonne de plusieurs tours de dfense. ILLU

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    TourBaraquements

    FORT DE VINDOLANDA EN 105 APR. J.-C., PRS DE

    CHESTERHOLM, AU SUD DU MUR DHADRIEN, LA

    FRONTIRE COSSAISE.

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    THERMES DE VINDOLANDA REPRODUCTION DES THERMES DU FORT AU IIIE SICLE APR. J.-C.

    Latrines publiques

    Chauffage

    Vestiaire (apoditerium)

    Salle de vapeur(laconicum)

    Salle froide(frigidarium)

    Piscine chaude

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    IL EST VENU LE TEMPS

    CATHDRALES

    MATHIEU LOURSHISTORIEN, UNIVERSIT DE CERGY

    Les villes mdivales se sont difies autour de grands sanctuaires catholiques. Construites selon un symbolisme

    complexe, les cathdrales taient des lieux de culte, des endroits o sappliquait la justice et mme des centres de divertissement.

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  • HISTORIA NATIONAL GEOGRAPHIC 3

    LE VITRAIL DE LA CRUCIFIXION

    de la cathdrale Saint-Pierre de Poitiers

    a t command par Alinor dAquitaine et

    Henri II Plantagent. Chef duvre de lart

    du vitrail, il a t ralis entre 1160 et 1173

    et orne le chevet de la cathdrale.

    LA NEF DU DME DE MILAN

    ou cathdrale de la Nativit de la Sainte Vierge, est lune des

    plus grandes du monde. Commence au

    xive sicle dans un style gothique tardif, elle comporte cinq nefs (la centrale mesure

    45 m de haut).

  • dune civilisation. Certaines des plus vastes et prestigieuses glises gothiques ntaient pas des cathdrales lors de leur construction : cest le cas de la basilique de Saint-Denis. La cathdrale est lglise qui abrite la cathdre, cest--dire le trne dun vque. la fin de

    lAntiquit, lorsque lEmpire romain se chris-tianise, chaque cit devient sige dun vch. Tout au long du Moyen ge, de nouveaux diocses sont crs, mesure que progresse lvanglisation de lEurope septentrio-

    nale, centrale et orientale. Au XIIIe sicle, lOccident compte prs dun millier de diocses pour autant de cathdrales.

    Au Moyen ge, il ne peut exister de ville sans cathdrale : le terme de civitas est en effet rserv une agglomration qui est le sige dun vch et la cathdrale est lglise

    de l vque. Le temps des cathdrales est lune des plus grandes aventures architecturales et spirituelles de lOccident. Toutes les cath-drales ne sont pas des difices immenses et gothiques, mais toutes les immenses cath-drales gothiques sont, depuis le xiie sicle, lexpression de la rencontre des arts, des techniques, des rapports sociaux, de la foi et du pouvoir. Un sublime rsum

    LA CATHDRALE DE CHARTRES La clture du chur comporte 200 statues qui illustrent des scnes de la vie de Jsus et de Marie, sculptes en partie par Jehan de Beauce au xvie sicle. Elles constituaient un lment essentiel de diffusion de la doctrine chrtienne.

    C H R O N O LO G I E

    VQUES, MATRES DOUVRAGE

    1163

    Lvque Maurice de Sully et le pape Alexandre III posent la premire pierre de la cathdrale Notre-Dame Paris, en prsence du roi Louis VII. Sa construction sachvera deux sicles plus tard, en 1345.

    Un incendie dtruit la cathdrale romane de Chartres. Commence alors ldification de la nouvelle cathdrale, qui ne sera acheve quen 1260. Considre comme un joyau de lart gothique, elle a t ddie la Vierge.

    1194

    OSTENSOIR EN OR, ARGENT ET PIERRES PRCIEUSES. GOTHIQUE FLAMBOYANT, CATHDRALE DE TOLDE.

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  • par le pape Grgoire VII, vise affirmer le rle de lglise. La cathdrale est pense comme un difice dans lequel les lacs, les clercs, lvque et les chanoines doivent tre runis, bien que placs dans des espaces spars. Ces difices dune nouvelle ampleur doivent rivaliser avec ceux entrepris par le clerg rgulier, comme labbatiale de Cluny. La conjoncture est favo-rable lmergence des cathdrales.

    LOccident connat une reprise conomique qui culmine au XIIIe sicle. Les ressources mobilisables pour les chantiers sont donc la hauteur des ambitions. Les construc-tions dimposantes cathdrales romanes sont

    Lorsque commence le vaste mouvement des grandes constructions gothiques, au milieu du XIIe sicle, les cathdrales ont donc un pass dj presque millnaire pour les plus anciennes.

    Elles prsentaient alors un visage bien diff-rent de limage quon sen fait. Il sagissait dun ensemble dglises, dont une tait destine aux grandes clbrations et une autre aux liturgies des clercs formant lentourage de lvque, orga-niss en chapitres de chanoines depuis lpoque carolingienne. Il existait aussi un baptistre. Comment est-on pass de cette situation celle dun unique difice ? Dans la seconde moiti du XIe sicle, la rforme grgorienne , entreprise

    SYLVAIN SONNET / GTRES

    Lvque Don Mauricio dessine les plans de la cathdrale Sainte-Marie de Burgos, lune des premires de style gothique en Espagne. Elle ne sera termine quau xve sicle. Cest la troisime cathdrale dEspagne.

    1221

    Dbut de ldification de la cathdrale de Cologne, inspire de celle dAmiens. Avec ses 157 m de haut, cest la deuxime cathdrale gothique la plus leve du monde aprs celle dUlm.

    1248Dbut du chantier du Dme de Milan, de style gothique tardif, la troisime plus grande glise du monde. Des cathdrales du mme style slvent en Espagne, tandis quau Portugal se dveloppe le style manulin.

    1386

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    STATUE DE UTA, DANS LE CHUR DE LA CATHDRALE DE NAUMBURG, ALLEMAGNE.

  • entreprises. Chartres, lvque Fulbert (v. 960-1028) avait t un prcurseur, commenant les travaux vers 1020. Ce grand intellectuel, auteur de textes fondamentaux sur les rapports entre seigneurs et vassaux, avait saisi toute limportance de la cathdrale pour magnifier le rle de lvque dans la socit fodale, lui qui avait travaill la rconciliation entre le roi de France et ses vassaux. En Allemagne et en Italie, les cathdrales de Mayence, Worms, Modne ou Ancne montrent que larchitec-ture romane permettait de btir des difices parfaitement adapts leur rle. Comment expliquer alors que la cathdrale sidentifie ce point au gothique ? Et ce ds le XIIIe sicle,

    o des cathdrales romanes parfois peine acheves furent jetes bas parfois par des incendies curieusement providentiels et rdifies dans le nouvel art ?

    Amiens, la plus vaste de FranceCest avec la reconstruction, acheve en 1144, du massif occidental et du chur de labbatiale de Saint-Denis que labb Suger (vers 1080-1151) donne les principes de cette nouvelle architecture. Cet homme dglise, qui fut conseiller des rois Louis VI et Louis VII, cherche alors affirmer limportance de ce sanctuaire dynastique ddi au saint patron du diocse de Paris : nouvelle structure avec le rle des croises dogives, des arcs en tiers-point, la part importante faite la lumire, avec une nouvelle signification, Dieu est lumire . Des vques adoptent prcocement ces principes. Sens, entreprise vers 1150, est la premire grande cathdrale gothique. Suivent Noyon, Laon et Paris, en 1163. Ces cathdrales du premier art gothique sont marques par leurs masses puissantes, la prsence de tribunes, leurs votes sexpartites.

    LEFFORT DE TOUTE UNE VILLE

    La construction dune cathdrale impliquait la par-ticipation de la ville et du diocse dont elle tait le sige. Dans le cas de Chartres, par exemple, dont le diocse (qui comptait 911 paroisses) tait lun des

    plus grands et des plus riches de France, les chanoines firent don de tous leurs bnfices pendant trois ans pour aider aux travaux. Mais le financement du chantier, qui occupait trois

    cents personnes en perma-nence, exigeait des apports encore plus importants. Pour les obtenir, on encouragea les dons charitables en exhi-bant des reliques, comme le voile de la Vierge ou le chef de sainte Anne, qui faisait partie du butin recueilli en 1204 par les croiss Constantinople et que le comte de Chartres, Louis, avait achet pour enrichir le trsor de la cathdrale. Les reliques taient envoyes

    ltranger afin de rcolter des fonds. cela venaient sajou-ter les dons des corporations dartisans de la ville (jusqu dix-neuf dentre elles figurent sur les vitraux de la cath-drale), de puissants reprsen-tants de la noblesse fodale, comme le duc de Bretagne, et mme de la monarchie : aux contributions de Philippe Auguste se joignirent celles de la reine Blanche de Castille, la mre de Louis IX, qui finana llvation de la faade nord.

    LDIFICATION DES CATHDRALES

    ABBAYE DE SAINT-DENISLa ville de Saint-Denis connut au Moyen ge une effervescence aprs la construction de son abbaye, de style gothique, acheve en 1260. Miniature, Roman du comte Girart de Roussillon, xiv-xve sicle.

    AKG / ALBUM

    Labb Suger a donn les principes du gothique : croises dogives, arcs en tiers-point, nouveau rle attribu la lumire.

  • Larc-boutant, qui permet un report des forces donc une plus large ouverture des baies, est utilis de faon plus systmatique. Bourges, partir de 1194, une voie trs originale fait de la cathdrale un chef-duvre dquilibre.

    Avec Chartres, commence la mme anne, lart gothique classique apparat : votes quadripartites, disparition des tribunes au profit dun triforium, contrebutement par un savant systme darcs-boutants. Entreprise en 1211, Notre-Dame de Reims montre une mise en uvre ambitieuse et un lan monumental indit : 138 m de long, 38 m sous vote. Amiens, commence en 1220, reste la plus vaste glise de France : une surface couverte de prs de 8 000 m2. Lapparition du gothique rayonnant fait des cathdrales des cages de verre . Entreprise en 1220 galement, Saint-tienne de Metz compte 6 500 m2 de verrires. Llan vertical culmine Beauvais. Les votes du chur slvent 48 mtres. En 1284, une partie des votains seffondre. Limites

    techniques ? Limite conomique, en tout cas, puisque, en cette fin du XIIIe sicle, les ressources cessent daugmenter. Au XIVe sicle, les mal-heurs de la peste et de la guerre ralentissent, voire interrompent, les chantiers.

    Pourtant, laventure des grandes cath-drales est devenue europenne. En Angleterre, des recherches sont menes au XIIe sicle sur logive la cathdrale de Durham. La dynastie des Plantagents fait ensuite parfois appel des matres franais, tel Guillaume de Sens Canterbury vers 1180, mais les cathdrales anglaises gardent une identit profonde avec une trs grande longueur et une hauteur mod-

    re. En Espagne, lart gothique accompagne laffirmation des tats chrtiens lancs dans la Reconquista : la construction de la cathdrale de Len est entreprise en 1205, celle de Burgos en 1221. En Allemagne, lart gothique rayonnant, l opus francige-num, remplace le roman. La cathdrale de Cologne est lance en 1248 avec des dimensions si impressionnantes que

    ldifice ne fut achev quau XIXe sicle.

    LA CHSSE DES ROIS MAGESLe plus grand reliquaire du Moyen ge est conserv dans le chur de la cathdrale de Cologne. Il mesure prs de 2 m de long. Fabriqu entre 1181 et 1230, il tait orn de 222 pierres prcieuses et semi-prcieuses, ou de cames, dont seulement 138 sont encore en place.

    LA CATHDRALE DE WELLS

    Premire cathdrale gothique rige

    en Angleterre, de 1175 1490.

    Elle a comme particularit dtre

    deux fois plus haute que large. Ici, vue

    de la nef et de son singulier arc en

    ciseaux, qui date du xve sicle.

    WOJTEK BUSS / AGE FOTOSTOCK

    BRIDGEMAN / INDEX

  • CHAPELLE HAUTE DE LA SAINTE-CHAPELLESitue au cur du Palais de la Cit Paris, la Sainte-Chapelle a t difie la demande de Saint-Louis, entre 1242 et 1248, afin dabriter des reliques de la Passion du Christ. La chapelle haute constitue un joyau du gothique rayonnant.

  • LItalie demeure longuement fidle ses tra-ditions romanes. Lart gothique y est marqu par limportance des murs destins au dcor peint, par la polychromie des matriaux comme Sienne ou par lusage de mosaques comme Orvieto. Avec lexception de la cathdrale de Milan, commence tardivement, en 1375, mais par des matres-maons sans doute venus dAlle-magne. lextrieur, pourtant, le marbre donne ce gothique germanique des accents italiens.

    Docteur s pierres Ces immenses difices ont profondment boulevers les villes. Nombre de btiments environnants furent rass. Les vques durent convaincre les autorits locales dabattre une partie de lenceinte pour agrandir la cathdrale. Cela fut possible Bourges pour difier le che-vet mais pas Narbonne, o la cathdrale reste jamais sans nef. Le second dfi consistait dgager un parvis. Amiens, les tours sont de plan rectangulaire et non pas carr cause de la difficult acqurir les terrains ncessaires.Un tel lan btisseur a constitu un formidable

    progrs dans les techniques de construction. La cathdrale est le fruit dune collaboration entre un matre douvrage, gnralement lvque, et un matre duvre. Ce dernier, appel matre ou matre-maon est un personnage-cl tel Robert de Luzarches (vers 1160-1222) Amiens, qui limite la quantit de pierres pour acclrer la construction, diminuer le cot et allger ldifice, ou Pierre de Montreuil (vers 1200-1267) Paris, assez clbre lpoque pour recevoir sur sa tombe lpitaphe docteur s pierres . Il coordonne les diffrents corps de mtiers. La rationalisation du chantier sopre ds la carrire, o est dj travaille une partie des pierres. Les maons, les sculpteurs, les charpentiers : tous les corps de mtier doivent travailler de faon concerte. Ainsi, les cath-drales nont pas t construites gratuitement : leurs btisseurs ont toujours t pays, sou-vent cher, et circulaient dun chantier lautre. Ceci ncessitait de la part du matre douvrage une forte mobilisation des ressources. Les vques et les chapitres engagent leurs res-sources propres, issues de leur insertion dans

    1 Le portail ouest Lentre principale est la seule partie de la cathdrale construite vers 1145 avoir subsist, car le reste fut dtruit un demi-sicle plus tard. Elle est orne de scnes de la vie du Christ.

    2 Les arcs-boutants Ces contreforts sur les cts de la cathdrale sont la clef de llvation et de la luminosit du lieu. Cest sur eux (et non sur les murs percs de baies avec des vitraux) que repose le poids de la vote.

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    LE JOYAU DE CHARTRESLa vie entire de la cit de Chartres se concentrait autour de sa cathdrale, lun des joyaux du style gothique, ddie la Vierge et difie de 1194 1260. Les foires annuelles, le march, lactivit judiciaire et les crmonies religieuses se droulaient lintrieur ou aux abords du btiment.

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  • le systme fodal. Les dons reus, de la part des ecclsiastiques ou des lacs, constituent des ressources extraordinaires, mais leur irrgularit ne permet pas un financement prvisionnel. Pour grer ces ressources, une institution est cre dans chaque chantier, gre en France par les chapitres : uvre et fabrique.

    Ces cathdrales possdaient plusieurs fonc-tions-cls dans la ville mdivale. La premire est religieuse. Ce grand difice, destin lvque qui ny officie que lors des grandes ftes, est anim en temps ordinaire par un clerg trs fourni : les chanoines, dont le nombre peut monter jusqu 83 Laon, clbrent sept offices et deux messes par jour. Les chapelains clbrent sur les autels des chapelles. Notre-Dame de Paris, on compte plus de 250 ecclsiastiques et on doit mme limiter cinq le nombre de messes clbres en mme temps. La cathdrale est aussi un difice li au pouvoir. En France, le roi est chanoine dhon-neur dans de nombreuses cathdrales. Ltat a vite compris limportance de tels espaces : en 1302, Philippe le Bel runit les trois ordres de son royaume Notre-Dame de Paris, donnant

    ainsi naissance aux tats gnraux. Ce roi tait dailleurs reprsent sous la forme dune statue questre Notre-Dame. Dautres cathdrales abritent des tombeaux royaux, comme celui de Richard Cur de Lion Rouen.

    En Italie, les communes, souvent en conflit avec lvque qui prtend exercer une autorit temporelle sur la cit, russissent parfois muni-cipaliser luvre, comme Sienne, et le chantier de la cathdrale devient une uvre civique. Le peuple, lui, manifeste sa dvotion par le biais des corporations et confrries qui sigent dans des chapelles dont elles enrichissent le dcor par leurs dons. Le peuple vient aussi vnrer des reliques. Certaines cathdrales sont le but de

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    6 Le labyrinthe lentre de la cathdrale, les plerins parcouraient le labyrinthe dessin au sol, mtaphore de la conversion, puis gagnaient la crypte pour prier devant la relique de la sainte tunique de Marie.

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    5 Le portail sud Il se compose de trois portes ornes de sculptures illustrant le Jugement dernier. En 1224, lvque ordonna que les merciers quittent le portique du midi pour installer leurs ventaires lextrieur. S

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    4 La nef La vaste nef de la cathdrale, claire par les vitraux, abritait les tals des marchands de vin, vitant ainsi de sacquitter des impts quils devaient payer quand ils taient lextrieur.

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    3 Le portail nord Le portique septentrional est sculpt de scnes de lAncien Testament et de la vie de la Vierge Marie. On sait que cest devant ce portail que sinstallaient les marchands de tissus.

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    LA CATHDRALE EN CHIFFRESLONGUEUR Nef : 130 m Transept : 63 m

    HAUTEUR Vote : 37 m Tours : 113 et 105 m

    DCOR 186 vitraux 4 500 statues et bas-reliefs

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    Les cathdrales nont pas t construites gratuitement : leurs btisseurs taient toujours pays, et souvent cher.

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    KBASILIQUE DE SANTA MARIA DEL MARCette basilique de style gothique catalan a t construite dans le quartier de la Ribera Barcelone, entre 1329 et 1383. Les paroissiens de la zone portuaire de la ville ont particip son dification. Ici, les votes du dambulatoire.

  • plerinages, comme celle de Saint-Jacques de Compostelle. Lvque y prononce ses dcisions solennelles en matire de justice ecclsiastique. Outre leurs activits sacres, les cathdrales ont t des lieux de vie, de rencontre, o des affaires profanes peuvent tre voques, des lieux qui peuvent tre traverss pour raccourcir le par-cours entre une partie de la ville et une autre. Tout comme la nef est un prolongement sacr du parvis, le parvis est un prolongement profane de la nef. Les condamns y font amende hono-rable. Toutes ces activits invitent repenser les limites entre sacr et profane. Nanmoins, la cathdrale est dabord un espace liturgique, un difice marqu par le sens du mystre, par des

    seuils et des dvoilements. Malgr limmensit du volume architectural, son espace intrieur est compartiment. Le matre-autel, plac dans le sanctuaire, est dissimul par des courtines. Avant, on trouve le chur des chanoines, isol de la nef par un jub et du dambulatoire par une clture. Ce dambulatoire, ferm de grilles, est ouvert aux fidles pour la vnration des reliques. La nef est lespace des lacs. Les textes dcrivant la signification des cathdrales, comme le Rational de Guillaume Durand, vque de Mende de 1230 1296, donnent des cls de lec-ture. La cathdrale est la fois maison de Dieu et porte du Ciel . Elle prfigure la Jrusalem cleste et constitue un gigantesque memento destination des fidles.

    Des difices signifiantsOn comprend alors labondance de liconographie. La sculpture se concentre sur des points signi-fiants : lintrieur, sur les cltures de chur et sur le jub. lextrieur, sur les portails rehausss de polychromie. Les remarquables ensembles de Chartres et dAmiens, de Bourges ou de Paris,

    PAYER POUR PERSONNALISER

    Artisans et marchands, riches et pauvres, autorits locales, nobles et rois participrent de faon directe la construction des cathdrales, que ce soit en tant que main-duvre ou travers

    le mcnat, en faisant don dobjets de valeur et dargent pour aider leur dification. En gnral, tous voulaient que leur contribution laisse une trace, raison pour laquelle ils

    demandaient tre reprsen-ts sur les vitraux (comme Chartres), les reliefs et les fresques. Les person-nalits les plus minentes se faisaient construire des chapelles funraires dans les murs des lieux sacrs, ornes de gisants, de tapisseries, de tapis, de luxueux objets de culte et de lampes huile. Au dbut du xve sicle, Joost Vijdt, un riche commerant de Gand, commanda lun des frres

    Van Eyck, Hubert, un retable sinspirant de la vision de ladoration de lAgneau mystique, dans lApoca-lypse, pour le placer dans sa chapelle lintrieur de la cathdrale de la ville. Dans le registre infrieur des volets figurent les portraits en pied du donateur Joost Vijdt, qui tait alors rgisseur de la ville et marguillier de lglise Saint-Jean, et de son pouse, encadrant les statues de saints en trompe-lil.

    LE FINANCEMENTXX

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    LE POLYPTIQUE DE GANDLes donateurs, Joos Vijdt et sa femme, sont reprsents sur le revers du polyptique ferm, de part et dautre de saint Jean-Baptiste et saint Jean lvangliste. Huile sur bois de Hubert et Jan van Eyck. 1432. Cathdrale Saint-Bavon, Gand.

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    La lumire prend un nouveau sens : colore et figure par les vitraux, elle est la reprsentation de Dieu.

  • forment de vastes cycles iconographiques savam-ment composs, associant Ancien et Nouveau Testaments, avec une prdilection pour limage du Christ et celle de la Vierge reprsents avec un nouveau souci dhumanisation des images de pierre. La faade toute entire devient par ailleurs un immense frontispice associant aux portails dautres ensembles statuaires comme les galeries des rois prsentes Paris et Reims. Le vitrail prend un nouveau sens : ses couleurs chatoient et sassocient bien avec les enduits souvent ocres qui recouvrent les murs, car la pierre nest jamais laisse apparente. Sils rappellent que Dieu est lumire , les vitraux montrent aussi quil ne sagit pas de la lumire matrielle, mais dune lumire particulire, marque par la couleur et par le sens de ce qui est figur. On trouve ainsi des vitraux narratifs dans les fentres basses, comme Bourges dans labside, des grandes figures de personnages dans les fentres hautes et de grandes compositions riches de sens dans les rosaces qui, comme celle du croisillon sud de Notre-Dame de Paris, peuvent atteindre 13,5 m de diamtre. Centres sur le Christ ou

    la Vierge, elles se prtent des thmes comme lApocalypse ou encore lillustration des grands cycles voquant le temps de ce monde avec le zodiaque ou les saisons comme la cathdrale dAngers ou les activits humaines avec les arts libraux reprsents Laon.

    Les cathdrales sont des difices vivants qui tmoignent de la vitalit de la civilisation mdivale dont elles offrent un des meilleurs tmoignages. Mais elles sont galement des difices dont la force signifiante transcende le temps. Bien aprs le Moyen ge, elles conservent leur fonction religieuse et continuent, telles des uvres dart total, fasciner les artistes et les btisseurs, comme Rodin ou Le Corbusier, ainsi que tous leurs visiteurs.

    ESSAISLes Cathdrales Patrick Demouy, Coll. Que sais-je ? , PUF, 2007.La Cathdrale Alain Erlande-Brandenburg, Fayard, 1989.Dictionnaire des cathdrales Mathieu Lours, Gisserot, 2008.

    Pour en savoir plus

    LA CATHDRALE DAMIENSLes nouvelles technologies permettent de restituer de faon phmre la polychromie qui rehaussait les faades mais aussi lintrieur des cathdrales. Ici,les portails de la cathdrale Notre-Dame dAmiens.

    CHICUREL ARNAUD / CORDON PRESS

  • Une jeune marie cheval, suivie des membres de sa famille, elle attire le regard de deux femmes postes devant une porte et de deux autres un balcon.

    La cathdraleSur le ct gauche de la fresque est reprsente la cathdrale de Sienne, avec son dme et son clocher noir et blanc, tous deux du xiiie sicle.

    Une danse dans la rueNeuf jeunes gens (on les reconnat leurs cheveux courts et leurs chevilles visibles) participent une danse pour fter la paix.

    Les palaisSitus loin des murailles, les palais comportent des lments darchitecture raffins, comme les meneaux colonnes ou les toits en saillie.

    Une aubergeDevant la porte, deux hommes conversent, deux enfants jouent leurs pieds et un groupe, assis sur un banc, sest lanc dans une partie de ds.

    La vie quotidienneLes constructions sont animes de dtails de la vie de tous les jours : une femme en train darroser, un chat, des pichets et des pots de fleurs

    Tailleur et cambisteUn tailleur coud au milieu de la rue, assis sur un banc. Au fond, on devine la boutique dun orfvre et peut-tre lchoppe dun cambiste.

    Les ruesLes tages levs des maisons sont plus vastes que ceux des niveaux infrieurs, ce qui rend les rues la fois plus troites et plus sombres.

    LA VIE QUOTIDIENNE AU TEMPS La fresque dAmbrogio Lorenzetti, Les Effets du bon gouvernement sur la vie de la cit, offre une image

  • Des chaussuresSous larcade dune maison se trouve latelier dun cordonnier, ouvert au public. Un paysan est en train de lui acheter une paire de souliers.

    Des paysansDeux femmes apportent un grand panier et une oie sur le march ; un berger conduit son troupeau de moutons dans les pturages, en dehors de la ville.

    Une coleUn matre dcole enseigne ses lves. Luniversit de Sienne, fonde en 1240, tait lune des plus importantes et des plus anciennes dItalie.

    Un atelier textileUn tisserand et un porteur travaillent en plein air devant latelier pendant quun paysan leur amne deux chevaux chargs de ballots de laine.

    DES CATHDRALES GOTHIQUESexceptionnelle de larchitecture urbaine et de la vie quotidienne Sienne au milieu du xive sicle.Les ouvriersPlusieurs maons travaillent sur un chafaudage en haut dun btiment ; la fin du xive sicle, la cit tait en pleine expansion urbaine.

    Une terrasse Une terrasse couverte, ou belvdre, avec un mur peint de motifs floraux, contraste avec les maisons adjacentes, qui font figure de forteresses.

    Un clocherAu milieu des tours et des crneaux coiffant les palais de la ville, le peintre a reprsent une glise surmonte de son clocher.

    La murailleEn plus de ses fonctions dfensives, la muraille spare lensemble urbain du milieu rural. La porte dentre relie les deux univers.

    SCALA, FIRENZE

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    Linsurrection qui clate Paris en fvrier 1848 marque profondment lhistoire du XIXe sicle. Runis par le mme dsir de rforme dmocratique, tudiants, ouvriers et bourgeois libraux mlent leurs efforts pour abattre un rgime immobile et

    corrompu. La Seconde Rpublique, qui nat sur les dcombres de lancienne monarchie de Juillet, entend inaugurer une nou-velle re. Se voulant gnreuse, fraternelle et sociale, elle sus-cite durant plusieurs mois une intense esprance, mais le rve romantique de rgnration sociale sachve en cauchemar. Au mois de juin, le soulvement des ouvriers parisiens est cras dans le sang. Ailleurs en Europe, les insurrections nationales et librales sont brutalement rprimes. La flambe rvolution-naire sachve dans lamertume et la dsillusion.

    La rvolution de fvrier marque lavnement de la IIe Rpublique, mais la violente rpression qui suivit

    doucha les espoirs de libert qui traversaient lEurope.

    1848PRINTEMPS SANGLANT

    DOMINIQUE KALIFAHISTORIEN, PARIS 1 PANTHON-SORBONNE

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    DU PAIN OU LA MORT !

    Depuis la Rvolution franaise, ce mot

    dordre terrible retentit chaque prise darmes des classes populaires.

    En juin 1848, il est le cri dsespr des

    ouvriers parisiens.

    SOUVENIRS DE GUERRE CIVILES

    Cette toile dErnest Meissonier, qui fut

    garde national durant linsurrection de 1848,

    montre la violence des combats sur les

    barricades de juin.Muse du Louvre.

  • Pourtant fille dune autre rvolution, celle de 1830, la monarchie de Juillet du roi Louis-Philippe est devenue en 1848 un rgime honni. Dans un contexte de dpression conomique et de forte monte du chmage, limmobi-lisme politique quincarne le ministre Guizot suscite une hostilit croissante. Pour contrer linterdiction de runion, lopposition orga-nise des banquets o libraux et rpublicains, parfois rejoints par quelques ouvriers, portent des toasts en faveur de la rforme lectorale (le suffrage est alors troitement censitaire). Cette grande campagne des banquets devait sachever Paris le 22 fvrier, mais le gouver-nement interdit cette ultime runion. Ce jour-

    l nanmoins, de nombreux manifestants, tudiants en tte, dcident de descendre

    dans la rue. Un trange climat deffervescence sinstalle dans la capitale, o les cortges se multiplient et o ont lieu quelques affron-tements. Le lendemain, une fusillade clate boulevard des Capucines, et met le feu aux poudres : les manifestations tournent alors lmeute, puis linsurrection gnralise. Tandis quon exhibe les cadavres sur des char-rettes, la ville se hrisse de barricades et de violents combats font rage, place du Chteau deau (lactuelle place de la Rpublique) ou autour du Palais-Royal. Le roi cherche temporiser, nomme un nouveau ministre, promet des rformes, mais doit rapidement se rsoudre abdiquer. En moins de deux jours, la rue a eu raison du rgime. Lvnement me tomba sur la tte, absolument comme la foudre , crit

    C H R O N O LO G I E

    QUATRE MOIS DE TROUBLES

    22-23 fvrierLinterdiction par Guizot du grand banquet dopposition dclenche une insurrection gnrale : la ville se couvre de barricades.

    24-25 fvrierLouis-Philippe abdique en faveur de son petit-fils, mais le peuple assembl lHtel de ville proclame la Rpublique.

    AVANT LASSAUTCe daguerrotype montre la barricade de la rue Saint-Maur, Paris, le 25 juin 1848, juste avant lattaque par les troupes du gnral Lamoricire.

    LE ROI LOUIS-PHILIPPE Port au pouvoir par la rvolution de 1830, lancien roi-citoyen est devenu en 1848 un monarque autoritaire et conservateur dont le rgime est honni.

    BARRICADE RUE SOUFFLOTEn fvrier 1848, les combats du Panthon expriment la dtermination des insurgs. Huile dHorace Vernet. Deutsches Historisches Museum, Berlin.

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  • 23 avrilLes premires lections au suffrage universel masculin voient le retour en force des notables et des conservateurs.

    21 juinLa dcision de dissoudre les Ateliers nationaux parisiens suscite un nouveau soulvement, limit cette fois aux seuls ouvriers.

    26 juinLes troupes du gnral Cavaignac fusillent ou arrtent les derniers meutiers. Lordre rgne Paris.

  • PROCLAMATION DE LABOLITION DE LESCLAVAGE DANS LES COLONIES FRANCAISES, LE 27 AVRIL 1848. HUILE DE FRANOIS-AUGUSTE BIARD, 1849. MUSE NATIONAL DES CHTEAUX DE VERSAILLES ET DE TRIANON.

    LA COCARDE, TRAIT DUNION

    Sur lestampe reprsente ci-dessous, la cocarde, emblme de 1848, nest autre que la reprise dun symbole de la Rvolution de 1789. Muse Carnavalet, Paris.

    Labolition de lesclavage NULLE TERRE FRANAISE ne peut plus por-ter desclaves , affirme solennellement le gouvernement provisoire, qui institue en mars 1848 une commission pour lmanci-pation des esclaves dans les colonies de la Rpublique. Prside par Victor Schlcher, celle-ci aboutit au dcret du 27 avril 1848.

    CONSIDRANT que lesclavage est un attentat contre la dignit humaine et une violation flagrante du dogme rpu-blicain : Libert, galit, Fraternit , il confre la pleine citoyennet tous les esclaves des possessions franaises. Prs de 250 000 noirs ou mtis des Antilles, de la Runion, de Guyane ou du Sngal acquirent ainsi la libert. En aot, Louisy Mathieu, un ancien esclave, est lu au suf-frage universel en tant que reprsentant de la Guadeloupe lAssemble nationale.

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    lorlaniste Albert de Broglie. Tandis que la foule met sac les Tuileries et brle le trne sur la place de la Bastille, la Rpublique est proclame sur le perron de lHtel de Ville. Le gouvernement provisoire qui se forme alors est le produit dun trange compromis. On y trouve des rpublicains authentiques comme Ledru-Rollin, des modrs comme Arago et mme des socialistes comme Louis Blanc ou louvrier Albert, tous runis par le verbe flam-boyant du pote Lamartine. Mais lessentiel est dans ce mot Rpublique qui cristallise alors toutes les esprances.

    Leuphorie sociale Les premiers temps de la jeune Rpublique sont en effet marqus par un grand enthousiasme. Un esprit en mane, tout impr-gn de romantisme, de religiosit populaire et deuphorie sociale. De la devise rpublicaine, on veut surtout privilgier le troisime terme la Fraternit , que la Grande Rvolution a sacrifi aux deux premiers. Demble, le gou-

    vernement prend de nombreuses mesures, qui entendent tmoigner de lavnement dune re nouvelle. Le suffrage universel, bien que limit aux hommes, est peru comme une immense avance dmocratique. Dans la foule, on abolit la peine de mort en matire politique, comme pour signifier que Rpublique ne rimerait plus jamais avec Terreur. On affirme aussi le droit dassociation et surtout le droit au travail quune commission dirige par Louis Blanc est charge de mettre en uvre. On songe mme un instant un ministre du Progrs, de lOrga-nisation du Travail et de la fin de lexploitation de lHomme par lHomme . Si les dbats sont vifs cet gard, des Ateliers nationaux sont crs pour tenter de rsorber un chmage croissant. Le 27 avril, la Rpublique proclame solennelle-ment labolition de lesclavage dans les les et les colonies, une mesure que la Premire Rpublique avait dj adopte en 1793, mais sur laquelle Napolon tait revenu en 1802 sous la pression des planteurs. Lheure est donc au rformisme, voire au messianisme humani-taire, et lon veut croire la rconciliation de toutes les classes sociales. Ne voit-on pas des prtres bnir les arbres de la libert et redon-

  • COMTE AUGUSTE HILARION DE KRATRY, DPUT ET PAIR DE FRANCE, CARICATURE DHONOR DAUMIER (1818-1878).

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    SATIRES ET CARICATURES

    1) le roi-citoyenImagine par le dessinateur Charles Philippon en 1831, la reprsentation du roi Louis-Philippe en poire constitue la plus clbre caricature du temps. Elle finit par incarner le rgime et toutes ses drives.

    3) MetternichCette toile caricature la fuite du chancelier Metternich, provoque par une rvolte Vienne, le 13 mars 1848. Lempereur autrichien Ferdinand Ier doit alors accepter llection dune assemble constituante.

    2) sus la poire Cest donc la poire, plus qu la personne du roi, que sen prennent les insurgs, signe que la nouvelle rpublique, qui abolit la peine de mort politique, souhaite rompre avec limage de la Terreur.

    4) on brle le trneSuite au sac des Tuileries en fvrier 1848, le trne royal est port en cortge sur la place de la Bastille et solennellement brl. Contrairement 1793, cest symboliquement quon dtruit la royaut.

    La Rvolution de fvrier 1848 fut suivie dune flo-raison extraordinaire de journaux, feuilles , bro-chures, placards, etc. Stimuls par la libert quasi absolue de la presse et par leffervescence politique, plus de 300 nouveaux titres sont crs Paris, et presque autant en

    province. Les journaux satiriques connaissent depuis la Rvolution franaise une fortune particulire,

    grce leur irrvrence et leur capacit contourner la censure. Les gravures de Dau-mier taient de vritables armes politiques et la fameuse poire , qui caricaturait Louis-Philippe, avait largement contribu disqualifier lancien monarque. Omnipr-

    sents au printemps 48, ils contribuent la diffusion de lesprit rvolutionnaire.

    DOCUMENTS : 1. Louis-Philippe, roi-citoyen, caricatur en poire, lithographie dHonor Daumier. 2. La poire transperce dun coup de sabre , par Prodhomme. 3. La fuite de Metternich en mars 1848, par Johann Schoeller. 4. Le peuple brle le trne sur la place de la Bastille, 1848.

  • RMN-GRAND PALAIS / HERV LEWANDOWSKI

    ROGER VIOLLET / CORDON PRESS

    FORMATION DE LA GARDE ROYALECi-dessus ce daguerrotype de Paul Michel Hossard (1787-1862) montre la revue de la Garde devant le palais des Tuileries, en 1844. Muse dOrsay, Paris.

    ner au message christique son sens originel ? Le 20 avril, la Fte de la Fraternit runit un million de personnes sur la place de ltoile.

    Leffervescence politique et sociale est alors son comble. Des journaux, des clubs, des propositions mancipatrices closent chaque jour, dans un climat dextraordinaire libert dexpression. Cest la foire aux pro-jets , ironise un caricaturiste. Les femmes sont particulirement actives. Proches des milieux saint-simoniens ou fouriristes, qui dfendent de longue date lgalit des sexes, de nombreuses militantes fministes profitent du climat de ce printemps fraternel pour faire

    entendre leur diffrence. Dlgations, ptitions et journaux se multiplient,

    linstar de LOpinion des femmes ou encore de La Voix des Femmes, fonde en mars 1848 par Eugnie Niboyet. Les femmes, qui com-prennent la grandeur de leur mission sociale, demandent au nom de la fraternit, que la libert et lgalit soient dsormais une vrit pour elle comme pour leurs frres. Au Club des femmes, des projets passionns sont discuts pour rtablir le divorce, que la Restauration a abrog en 1816, donner aux femmes le droit de vote et leur ouvrir les Ateliers nationaux.

    Innombrables tensions localesLa situation devient de plus en plus tendue. La crise conomique persiste. Elle est mme aggrave par les difficults financires qui sac-cumulent et par la panique boursire qui en rsulte. En province, les mots dordre parisiens peinent simposer et les nouveaux com-missaires de la Rpublique doivent faire face dinnombrables tensions locales. Un nouvel impt, dit des 45 centimes , suscite lin-comprhension. Les lections du mois davril, les premires ralises au suffrage universel, traduisent ces incertitudes : les rpublicains avancs doivent composer avec des mod-rs et des monarchistes, qui reviennent en nombre. Paris, on se dfie des associations et des dlgations ouvrires, dont on dnonce la dictature. Le 15 mai, une manifestation de soutien la Pologne fait irruption au Palais-Bourbon, o sige lAssemble constituante. On en profite pour arrter les principaux chefs de lextrme-gauche : Blanqui, Barbs, Raspail. Un front de lordre se constitue, qui entend barrer la route au communisme .

    Les Ateliers nationaux sont surtout en ligne de mire : chers, peu productifs, ils sont perus comme le vivier de lagitation. On dcide donc de les dissoudre. cette annonce, le 22 juin, Paris se couvre nouveau de barricades mais, contrairement aux vnements de fvrier, seuls les ouvriers prennent alors les armes. Cest une guerre civile , crira Tocqueville, une lutte des classes , prcisera Marx. Et tous les tmoins diront la violence et lhorreur de laffronte-ment. Au total, on relve plus de 4 000 morts. La rpression, mene par le gnral rpubli-cain Cavaignac, laisse les quartiers ouvriers de lEst parisien dans un tat exsangue. Plus de 1 500 insurgs sont fusills sans jugement, 15 000 autres sont arrts et les principaux meneurs dports en Algrie et en Guyane.

    Poudre, fusils, pistolets... la culture des armes

    caractrise les insurgs parisiens.

    PISTOLET DEUX COUPS PRIS SUR UNE BARRICADE EN JUIN 1848.

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    Depuis 1789, journes , insurrections et meutes ont frquemment transform Paris en champ de bataille. Mais la guerre des rues et des maisons , que thorise le marchal Bugeaud,

    atteint son paroxysme en 1848. Le soulvement de fvrier oppose les insurgs plus de 30 000 sol-dats et gardes municipaux. Au Chteau deau, au

    Palais-Royal, aux Tuileries ont lieu de violents affrontements, mais la brutalit des combats est plus grande en juin. Saint-Lazare, au

    Panthon ou dans les quartiers ouvriers du centre de Paris, les troupes diriges par les

    gnraux Cavaignac et Lamoricire enlvent les barricades au canon ou la baonnette.

    1) les campements de larmeAux barricades rpondent les campements de larme. En juin, prs de 25 000 lignards , surtout ruraux, auxquels sajoutent gardes mobiles et gardes rpublicains, sont chargs de rprimer linsurrection.

    2) lincendie du chteau deauLe 24 fvrier, les insurgs semparent du poste du Chteau deau, point stratgique rput imprenable qui commande le quartier du Palais-Royal. Sa chute dcide le roi Louis-Philippe abdiquer.

    DOCUMENTS : 1. Campement des troupes sur le boulevard du Temple pendant les journes de 1848, huile de Josquin, muse Carnavalet, Paris. 2. Incendie du Chteau deau, tableau dEugne Hagnauer, muse Carnavalet, Paris. 3. Le Mot dordre. Huile dAdolphe-Pierre Leleux, muse national des chteaux de Versailles et de Trianon.

    QUAND PARIS SEN VA-T-EN GUERRE

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    MADAME DE LAMARTINE PARMI LES PARISIENS Madame de Lamartine adoptant les enfants des gens tus aux barricades pendant la Rvolution de 1848. Tableau de Franois Claudius Compte-Calix, qui semble avoir invent lanecdote. Il fut sans doute inspir par la gnrosit reconnue de lpouse dAlphonse de Lamartine, personnage cl des vnements de 1848. The Bowes Museum, Barnard Castle, Angleterre.

  • BRIDGEMAN /INDEX

    Le voile de fvrier sest dchir, le rve de rgnration sociale brutalement dissip. La fracture est morale autant que politique et le divorce est dfinitivement consomm entre le monde ouvrier et la Rpublique. Dsormais aux mains du Parti de lOrdre , celle-ci sengage sur la voie dune raction qui profite surtout aux forces antidmocratiques. Deux ans prs son lection en dcembre 1849, le prsident de la Rpublique Louis-Napolon Bonaparte confisque le pouvoir son profit.

    1848 nest pas qu une rvolution en France. partir de mars, toute lEurope sembrase : des insurrections clatent Naples, Rome, Venise, Prague, Budapest et Berlin, boule-versant lquilibre politique du continent. Partout, les nationalits opprimes se soulvent pour rclamer leurs droits, tandis que les lites librales exigent des liberts et des constitutions. Pris de court, les souverains concdent partout des rformes. Francfort se runit un parlement qui entend uvrer lunification de lAllemagne. Lagitation est vive en Italie, o sacclre le Risorgimento. Milan, au terme de cinq jours dinsurrection, les patriotes italiens chassent loccupant

    autrichien et confient leurs destines au royaume du Pimont. Venise et Rome se constituent des rpubliques, qui entendent associer unit nationale et rformisme dmocratique. Un mme climat deuphorie, desprance et de messianisme rvolutionnaire se diffuse dans les grandes villes europennes. Et si le temps tait venu de la Rpublique universelle, voire de ces tats-Unis dEurope que Victor Hugo appelle de ses vux ? Mais cest un autre sc-nario qui prvaut. Aprs un moment de dsarroi et de concessions, les monarchies reprennent la main. Francfort, Prague, Vienne ou Budapest sont bombards et rinvestis par la force. Venise et Rome, les Rpubliques proclames dans la liesse sachvent dans des bains de sang. Tout comme la France, lEurope devra encore attendre lheure de lmancipation.

    UN CLUB FMININ, LITHOGRAPHIE, VERS 1848.

    MUSE CARNAVALET, PARIS. Les clubs fminins

    JAMAIS AVANT 1848 les femmes navaient autant investi lespace public. Aux journaux, tracts ou ptitions sajoute laction des clubs, o sexpriment des femmes avides de libert. La journaliste Eugnie Niboyet, lancienne lingre Jeanne Deroin, la cou-turire Dsire Gay, linstitutrice Pauline Roland, et beaucoup dautres encore, y dfendent leurs droits avec conviction.

    AUX LECTIONS DAVRIL, on songe prsen-ter lcrivain George Sand, figure embl-matique de la femme libre. Cest parce que la femme est lgale de lhomme et quelle ne lui est pas semblable quelle doit prendre part luvre de rforme sociale , crit la fministe Jeanne Deroin. Mais ni gauche ni a droite, les hommes ntaient prt accepter cette Cit mixte que les clubs fminins appelaient de leurs vux.

    EUGNIE NIBOYET

    Fondatrice en mars 1848 du journal La Voix des femmes, cette philanthrope, visiteuse des prisons, secrtaire de la Socit de la morale chrtienne, fut la principale animatrice du Club des femmes.

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    ESSAIS1848 ou lapprentissage de la RpubliqueMaurice Agulhon, d. du Seuil, 1973.1848 : la rvolution oublie Maurizio Gribaudi et Michle Riot-Sarcey, d. La Dcouverte, 2009.Le Crpuscule des rvolutionsQuentin Deluermoz. d. du Seuil, 2012.

    Pour en savoir plus

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    Pote admir, salu pour ses Mditations par toute la gnration romantique, Lamartine entre en politique en 1833 et se rallie progressivement la Rpublique. Devenu en fvrier 1848 membre du gouvernement provisoire, il incarne un temps la Rpublique fraternelle et lyrique. Son grand talent dorateur, reconnu par tous, parvient faire repousser le drapeau rouge, qui na fait que le tour du Champ-de-Mars , au profit du drapeau tricolore, qui a fait le tour du monde avec la Rpublique et lEmpire . Mais ce modr, proche des libraux, peine simposer dans leffervescence politique du printemps 48 et ne recueille que 0,23 % des voix lors de llection prsidentielle de dcembre.

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    CRIRE AU NOM DU PEUPLE

    Le lyrisme dAlphonse de Lamartine

    Lmergence dune vritable civilisation du jour-nal suscite, ds le dbut des annes 1830, la cration des premiers journaux ouvriers : LArtisan, Lcho de la fabrique, puis LAtelier, Le Populaire ou Le Journal du Peuple. Limmense bouffe de libert quinsuffle le printemps 1848 donne ce phnomne toute sa dimension : les feuilles ouvrires, fministes, socialistes ou communistes vivent

    un premier, mais phmre, ge dor. Si la plupart dfendent des rassemblements ou des listes de

    candidatures htroclites, certains comme Le Reprsentant du peuple, dans lequel crit

    Proudhon, parviennent sinscrire dura-blement dans la mmoire socialiste.

    journaux, pamphlets, affichesDs fvrier 1848, la leve de la censure suscita une vritable dbauche de papier : des centaines de titres, phmres pour lessentiel, inondrent tout le pays.

    DOCUMENTS: 1. Journaux et publications parus en 1848. 2. Le Pre scie , caricature dAuguste

    Bouquet. Sous la monarchie de Juillet, le ministre de la Justice tente de dcapiter le

    journaliste et dessinateur Philipon, en juin 1832. Bibliothque nationale, Paris.

    LAMARTINE DEVANT LHTEL DE VILLE DE PARIS, LE 25 FVRIER 1848, DTAIL DU TABLEAU DE HENRI FELIX EMMANUEL PHILIPOTTEAUX, MUSE DES BEAUX-ARTS DE LA VILLE DE PARIS.

  • en autricheLe 13 mars, une rvolte clate Vienne, qui se couvre de barricades. Metternich, lhomme fort de lEurope, senfuit tandis que lempereur Ferdinand accepte une constitution. Cette rvolution branle lEmpire autrichien.

    en hongrieMene par lavocat Lajos Kossuth, qui appelle un rgime parlementaire, lagitation hongroise est lune des plus radicales. Un gouvernement national magyar se forme, qui abolit le servage et sengage sur la voie de lindpendance.

    en bohme Prague, o les ptitions se multiplient, on rclame la reconnaissance des droits historiques de la Bohme et du tchque. Une charte ratifie par Vienne affirme lgalit civile et juridique des Tchques et des Allemands.

    en allemagneLa rvolution de mars touche tous les tats allemands, entranant des rformes librales. Berlin, le roi de Prusse Frdric-Guillaume IV doit concder une constitution dmocratique. Munich, le roi de Bavire abdique.

    Des premiers troubles en Sicile, en janvier, lembrasement de lEurope centrale durant lt, lanne 1848 est celle du printemps des peuples . Partout, les nations obtiennent des liberts et des droits politiques. Mais leuphorie est de courte dure. Ds lautomne, les monarchies reviennent sur la plupart des concessions. Lanne sachve dans la tragdie.

    UN VENT DE RVOLTE EUROPEN

  • veniseMens par lavocat Daniele Manin et lcrivain Niccolo Tommaseo, les patriotes vnitiens qui chassent les Autrichiens le 22 mars, instaurent un rgime original, dit Rpublique de Saint-Marc, qui affirme des convictions dmocratiques.

    francfortLaspiration unitaire renforce le mouvement rvolutionnaire et suscite lenthousiasme des libraux. Un Parlement national se runit pour difier les bases dun futur tat, mais bute sur la dfinition de lAllemagne.

    en polognePartage entre Autriche, Prusse et Russie, la Pologne tait le symbole malheureux des nations domines. Si le joug tsariste empche lessentiel du pays de participer au mouvement, une rvolte a lieu en Posnanie.

    milanTandis quen Toscane, Turin, Rome, Naples, rois et princes italiens dotent leurs tats dinstitutions librales, Milan se soulve et chasse loccupant autrichien. La bourgeoisie librale prend alors le pouvoir.

    BRIDGEMAN / INDEX

    LA RPUBLIQUE UNIVERSELLE DMOCRATIQUE ET SOCIALE,

    1848, LITHOGRAPHIE GOUACHE DE FRDRIC SORRIEU.

    MUSE CARNAVALET, PARIS.

  • L A G R A N D E D C O U V E R T E

    Un jour davril 1819, un groupe dofficiers de la Compagnie anglaise des

    Indes orientales qui effectuait des manuvres dans les mon-tagnes Sahyadr, au centre du sous-continent, dcida daller chasser le tigre prs du village dAjanta. Guid par un garon qui avait promis de les mener l o ces animaux taient nom-breux, ils arrivrent sur un promontoire surplombant une vaste gorge en forme de fer cheval. Lun des soldats, John Smith, sloigna du groupe et carta quelques branches de la main. Il se trouva soudain face une gigantesque statue de Bouddha, taille dans la roche, qui le regardait fixement, la

    main tendue. merveill, il appela ses compagnons. Ils sapprochrent et remarqurent ct du Bouddha une ouver-

    ture sombre dans la mon-tagne. Les soldats venaient de dcouvrir lun des grands trsors artistiques de lInde : les grottes dAjanta, caches depuis plus de mille ans.

    Le sanctuaire bouddhique dAjanta se compose de vingt-neuf grottes qui traversent une profonde falaise en forme de U ; cinq dentre elles sont des chaityas (temples) et les autres des viharas (monas-tres). Toutes furent excaves dans la roche par les moines dans des conditions difficiles. Les temples abritent de splen-dides sculptures tailles dans

    la pierre (Bouddhas couchs, hautes colonnades ornes de frises chamarres, des l-phants immenses encadrant les faades). Lintrieur des monastres est austre, mais leurs murs sont dcors de splendides peintures qui constituent le plus grand trsor dAjanta. Aux couleurs vibrantes presque sur tous les murs, elles illustrent des pi-sodes de la vie de Bouddha et de ses jatakas (rincarnations), bodhisattvas (fidles) bien-veillants ayant atteint lIllu-mination, apsaras (nymphes clestes) Toutes les figures expriment une spiritualit dont lobjectif visait sus-citer la dvotion de ceux qui les contemplaient.

    Lexcavation des grottes dbute au IIe sicle av. J.-C., concidant avec lessor du bouddhisme en Inde, et prend fin au VIIe sicle apr. J.-C., avec le dclin de cette religion.

    Leur magnificence fut son apoge sous le mcnat des empereurs Gupta du Nord (IVe-Ve sicles) et perdura sous la dynastie Vakataka du S