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HYPERTENSION ARTÉRIELLE PULMONAIRE EN ANESTHÉSIE-RÉANIMATION F. Kerbaul, F. Gouin. Département d’Anesthésie-Réanimation - Hôpital Timone adultes - 264 rue Saint-Pierre, 13005 Marseille. 1. DÉFINITION L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est définie classiquement comme une élévation de la pression artérielle pulmonaire moyenne supérieure à 20 mmHg au repos, et 30 mmHg à l’effort [1]. Elle marque un tournant évolutif dans certaines cardiopathies congénitales et dans la plupart des cardiopathies gauches acquises et des insuffisances respiratoires chroniques. Chez le sujet sain, la PAP moyenne est généralement comprise entre 10 et 15 mmHg ; il existe une élévation très discrète de la PAP avec le vieillissement de l’ordre de 1 mmHg par tranche de 10 ans. 2. EPIDÉMIOLOGIE La seule prévalence bien connue est celle de l’hypertension artérielle pulmonaire primitive (HTAPP), elle est estimée à 1 ou 2 cas par million d’habitants. De diagnostic difficile, et de symptomatologie peu spécifique initialement, l’HTAPP est souvent diagnos- tiquée de façon tardive. Cette pathologie de la femme jeune (30 à 50 ans) est idiopathique. Il existe pourtant un certain nombre de facteurs médicamenteux (anorexigènes, cocaïne) ou d’affections (hypertension portale, infection VIH, affection auto-immunes, parasitoses) dont l’incidence augmente en présence d’une HTAP dite «primitive». Certaines formes familiales à transmission autosomique dominante à pénétrance variable ont été décrites, ainsi que des formes infantiles [2]. Concernant les HTAP secondaires, l’atteinte vasculaire pulmonaire est une compli- cation fréquente et grave des BPCO, 50 % des patients BPCO ont des signes d’hyper- trophie ventriculaire droite à l’autopsie, 50 % des patients BPCO âgés de plus de 50 ans vont développer une HTAP. 3. MÉCANISMES La PAP représente la somme de la pression motrice à travers la circulation pulmo- naire et de la pression de «sortie» du système qui est la pression capillaire (PCP). La pression motrice qui représente la différence PAP-PCP est égale par définition au produit

Hypertension Artérielle Pulmonaire en Anesthésie-réanimation

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    HYPERTENSION ARTRIELLE PULMONAIRE EN ANESTHSIE-RANIMATION

    F. Kerbaul, F. Gouin. Dpartement dAnesthsie-Ranimation - Hpital Timone adultes - 264 rue Saint-Pierre, 13005 Marseille.

    1. DFINITION

    Lhypertension artrielle pulmonaire (HTAP) est dfinie classiquement comme une lvation de la pression artrielle pulmonaire moyenne suprieure 20 mmHg au repos, et 30 mmHg leffort [1]. Elle marque un tournant volutif dans certaines cardiopathies congnitales et dans la plupart des cardiopathies gauches acquises et des insuffisances respiratoires chroniques. Chez le sujet sain, la PAP moyenne est gnralement comprise entre 10 et 15 mmHg ; il existe une lvation trs discrte de la PAP avec le vieillissement de lordre de 1 mmHg par tranche de 10 ans.

    2. EPIDMIOLOGIE

    La seule prvalence bien connue est celle de lhypertension artrielle pulmonaire primitive (HTAPP), elle est estime 1 ou 2 cas par million dhabitants. De diagnostic difficile, et de symptomatologie peu spcifique initialement, lHTAPP est souvent diagnos-tique de faon tardive. Cette pathologie de la femme jeune (30 50 ans) est idiopathique. Il existe pourtant un certain nombre de facteurs mdicamenteux (anorexignes, cocane) ou daffections (hypertension portale, infection VIH, affection auto-immunes, parasitoses) dont lincidence augmente en prsence dune HTAP dite primitive. Certaines formes familiales transmission autosomique dominante pntrance variable ont t dcrites, ainsi que des formes infantiles [2].

    Concernant les HTAP secondaires, latteinte vasculaire pulmonaire est une compli-cation frquente et grave des BPCO, 50 % des patients BPCO ont des signes dhyper-trophie ventriculaire droite lautopsie, 50 % des patients BPCO gs de plus de 50 ans vont dvelopper une HTAP.

    3. MCANISMES

    La PAP reprsente la somme de la pression motrice travers la circulation pulmo-naire et de la pression de sortie du systme qui est la pression capillaire (PCP). La pression motrice qui reprsente la diffrence PAP-PCP est gale par dfinition au produit

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    du dbit sanguin pulmonaire (Q) et des rsistances vasculaires pulmonaires (RVP). On peut donc crire :

    PAP = PCP + Q x RVPCette quation permet de montrer clairement que lhypertension artrielle pulmonaire

    peut rsulter de trois causes principales suivantes.

    3.1. HTAP POST-CAPILLAIRE

    Elle rsulte dune lvation de la pression capillaire pulmonaire, elle-mme cons-cutive une lvation de la pression veineuse pulmonaire secondaire une insuffisance cardiaque gauche (ischmique), ou un rtrcissement mitral.

    Ce type dhypertension rsulte dune transmission passive de laugmentation des pressions des veines pulmonaires vers les capillaires et le secteur artriel pulmonaire. A la longue, par exemple dans le rtrcissement mitral, surviennent des modifications anatomiques des vaisseaux pulmonaires (paississement de la mdia, fibrose de lintima). On parle dartriolite oblitrante. Cette artriolite est responsable dune lvation des RVP et du gradient de pression trans-pulmonaire : lHTAP devient alors mixte (pr et post-capillaire). La composante pr-capillaire est lorigine de la non-rversibilit des PAP lors des tests pharmacologiques. On parle alors dHTAP fixe.

    3.2. HTAP PAR LVATION DU DBIT SANGUIN PULMONAIRE

    Cest le cas de certaines cardiopathies congnitales avec shunt de type gauche-droit. Il sagit l de communications interauriculaires et ventriculaires, canal artriel, canal atrio-ventriculaire complet. Llvation du dbit sanguin pulmonaire peut tre considrable allant jusqu 200 300 %. Dans certaines communications interauriculaires, le dbit pulmonaire peut doubler alors que les PAP restent normales par rduction secondaire des RVP. Au cours de lvolution, ces RVP vont slever du fait de modifications structurelles secondaires des artres pulmonaires (paississement de la mdia, fibrose de lintima). La conjonction dun hyper dbit pulmonaire llvation des RVP conscutive une artriolite oblitrante conduit alors une HTAP svre, avec possibilit dinversion du shunt (passage un shunt droit-gauche) ce stade avanc (syndrome d'Eisenmenger).

    3.3. HTAP PR-CAPILLAIRE PAR LVATION DES RSISTANCES VASCULAI-RES PULMONAIRES

    Elle caractrise essentiellement les affections respiratoires chroniques. Les rsistances lcoulement sanguin se localisent au niveau des artres pr-capillaires. Ces vaisseaux rsistifs paroi musculaire sont le sige dun rtrcissement de leur lumire, quil soit d des facteurs anatomiques (maladie thrombo-embolique, bilharziose, fibrose pulmonaire interstitielle), ou des causes plus fonctionnelles (vasoconstriction pulmonaire hypoxi-que). Ce rtrcissement est lorigine dune augmentation des RVP.

    3.3.1. RLE DE LA VASOCONSTRICTION PULMONAIRE HYPOXIQUE (VPH)La finalit couramment admise de la VPH dans le poumon adulte est lajustement de

    la perfusion capillaire pulmonaire la ventilation alvolaire. En cas dhtrognit des rapports ventilation/perfusion (atlectasie, pneumopathie, dme pulmonaire), la VPH permet une rduction de la perfusion des zones mal ventiles, et amliore donc de fait lhmatose pulmonaire. Il semble cependant exister une relation inverse entre ltendue des territoires pulmonaires hypoxiques et lefficacit de la VPH. Le stimulus essentiel de la VPH est la baisse de la PO2 du gaz alvolaire, le seuil semblant se situer autour de 60 mmHg. La diminution de la PvO2 renforce aussi le mcanisme de la VPH (denviron 20 %) lorsque la PO2 du gaz alvolaire est infrieure 60 mmHg [3].

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    La VPH survient moins de 7 secondes aprs le dclenchement de lhypoxie alvolaire. Elle sobserve dans le cas de poumons isols perfuss, en labsence dendothlium, ainsi quau sein des cellules musculaires lisses artrielles pulmonaires. Elle semble dcrotre avec lge. Son intensit est variable selon les espces animales (porc > homme > chien), il existe mme des diffrences fortes inter-individuelles au sein dune mme espce.

    La VPH intresse essentiellement les muscles lisses des artrioles pulmonaires pr-capillaires, mais les petites veines pulmonaires semblent aussi se contracter en rponse lhypoxie. Une veinoconstriction exagre en rponse lhypoxie pourrait expliquer certaines formes ddmes pulmonaires tels que ldme pulmonaire de haute altitude initialement caus par une majoration des pressions capillaires pulmonaires.

    3.1.3.1. Mcanisme cellulaire de la VPHDe nombreuses tudes ont t dvolues la recherche des mcanismes responsables

    de la vasomotricit pulmonaire hypoxique. Une srie de vasoconstricteurs incluant lhistamine, la srotonine, langiotensine, les prostaglandines et les leucotrines ont t exclus, et ne peuvent tre retenus comme mdiateurs potentiels de la vasoconstriction hypoxique.

    Lun des mcanismes principaux de la VPH serait linhibition de lactivation des canaux potassiques causant une dpolarisation membranaire par afflux intra-cellulaire de calcium travers les canaux calciques voltage-dpendants. La modification des potentiels redox de ces canaux potassiques serait lorigine de ce mcanisme.

    4. TIOLOGIES

    4.1. CLASSIFICATION TIOLOGIQUE : (TABLEAU I)

    Depuis 1998, une nouvelle classification a vu le jour. Elle reflte les rcentes avances dans la comprhension des pathologies pulmonaires hypertensives, et la reconnaissance dune similarit entre lhypertension artrielle pulmonaire primitive (HTAPP) (ini-tialement catalogue comme sans tiologie) et lhypertension artrielle pulmonaire secondaire certaines tiologies connues [2].

    5. CONSQUENCES DE LHTAP

    5.1. RETENTISSEMENT DE LHTAP SUR LA PERFORMANCE VDLe ventricule droit (VD) sain est une structure compliante, paroi mince dont la

    dilatation est rapide en prsence dune augmentation de sa post-charge. LHTAP aboutit plus ou moins rapidement lhypertrophie ventriculaire droite, mais le dlai dapparition de linsuffisance cardiaque droite est variable. Mme, si lon ignore en grande partie les mcanismes de constitution de la dfaillance ventriculaire droite, il existe indiscutable-ment une relation entre la svrit de lHTAP et la rapidit dapparition de linsuffisance cardiaque droite.

    A un stade avanc de laffection, la limitation du dbit cardiaque au repos est due une augmentation importante de la post-charge du VD. Cette rduction du dbit cardiaque est majore par une altration du remplissage ventriculaire gauche dont la compliance diastolique est rduite par la dilatation ventriculaire droite et par le bombement paradoxal du septum inter-ventriculaire vers le VG. Cette altration du dbit cardiaque favorise la survenue d une hypotension artrielle systmique lorigine dune rduction de la perfusion coronaire droite et dune dysfonction VD dorigine ischmique sur-ajoute (Figure 1).

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    6. EVALUATION DE LHTAP

    Lvaluation pr-anesthsique doit comporter un examen des antcdents (pousse dinsuffisance ventriculaire droite, syncopes), un examen clinique (hpatomgalie, d-mes des membres infrieurs, reflux hpato-jugulaire), et des investigations cardiologiques permettant de cerner limportance de lHTAP et de son ventuel retentissement sur le cur droit. En cas de cardiopathie congnitale, on devra sattacher la connaissance de son type et de ses rpercussions physiopathologiques. Enfin, une dcision chirurgicale chez de tels patients ne doit tre prise qu la condition dune indication opratoire formelle, dont les consquences ventuelles sont discuter entre chirurgien, cardiologue et anesthsiste-ranimateur.

    Tableau I Classification anatomique et tiologique des HTAP

    LHYPERTENSION ARTRIELLE PULMONAIRE Hypertension artrielle pulmonaire primitive (HTAPP) : formes sporadiques et familiales En relation avec : collagnoses, hypertension portale, drogues (anorexignes), in-

    fection VIH, nouveau-n, autres)LHYPERTENSION VEINEUSE PULMONAIRE Les cardiomyopathies ventriculaires gauches (ischmiques ou autres). La cardio-

    myopathie hypertensive Les valvulopathies aortiques Les valvulopathies mitrales La tumeur ou thrombose de loreillette gauche Compression extrinsque des veines pulmonaires : fibrose mdiastinale, adnopa-

    thies, tumeurs Maladie pulmonaire veino-occlusive AutresLHYPERTENSION PULMONAIRE ASSOCIE DES PATHOLOGIES RESPI-

    RATOIRES ET/OU UNE HYPOXMIE La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) La fibrose pulmonaire avance La fibrose interstitielle diffuse Le syndrome de dtresse respiratoire de ladulte (SDRA) Les apnes du sommeil Lexposition chronique laltitude (>3000 m) AutresLHYPERTENSION PULMONAIRE CONSCUTIVE AUX PATHOLOGIES EM-

    BOLIQUES OU THROMBOEMBOLIQUES CHRONIQUES Obstruction thromboembolique des artres pulmonaires proximales Obstruction des artres pulmonaires distales - Lembolie pulmonaire - Thrombose in situ - DrpanocytoseLHYPERTENSION PULMONAIRE CONSCUTIVE AUX PATHOLOGIES

    INTRESSANT LA VASCULARISATION PULMONAIRE Inflammatoire - Schistosomiase, sarcodose Hmangiomatose capillaire pulmonaire

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    6.1. CRITRES CLINIQUES

    Lvaluation repose cliniquement sur lapprciation de la dyspne. La dyspne deffort constitue la plainte la plus habituelle. Elle est prsente chez la quasi-totalit des patients au moment du diagnostic. Lhpatalgie deffort secondaire une distension de la capsule de Glisson associe des dmes des chevilles voque la dcompensation cardiaque droite associe. Les hmoptysies deffort ou lies une sur-infection broncho-pulmonaire sont rares.

    Lorsque lHTAP devient svre, des syncopes au moindre effort par chute brutale du dbit sanguin crbral associes des prcordialgies typiques vocatrices dangor fonctionnel sont prsentes. Une dysphonie tardive, conscutive une compression du nerf rcurrent gauche par dilatation excessive de lartre pulmonaire reste exceptionnelle (syndrome dOrtner).

    La classification fonctionnelle NYHA de la dyspne est souvent insuffisante. En effet, cette dernire ne semble pas toujours lie la svrit de lHTAP, sauf dans le cas exceptionnel des HTAP primitives ou elle semble inversement corrle la survie mdiane des patients.

    6.2. EVALUATION PARACLINIQUE

    Certains examens paracliniques comme lchographie-Doppler trans-thoracique sont indispensables lvaluation de la gravit de lHTAP, et lanalyse de son retentis-sement ventriculaire droit. Le cathtrisme cardiaque droit garde toute sa place dans le diagnostic initial de lHTAP et de son ventuelle rversibilit, et dans le suivi thrapeu-tique notamment de lHTAPP. Mais il nest pas sans danger. Certains auteurs rapportent des mortalits de 5 10 % notamment au cours de cathtrismes prolongs avec tests pharmacologiques pour essai de mdicaments vasodilatateurs. Dautres examens tels que les tests sanguins (gazomtrie artrielle la recherche dune majoration de lhypoxmie, ou dune hypercapnie, numration formule sanguine la recherche dune polyglo-bulie), ou llectrocardiogramme (hypertrophie auriculaire droite ou gauche, hypertrophie

    Figure 1 : Physiopathologie de linsuffisance ventriculaire droite dans lhypertension artrielle pulmonaire (primitive, ou post-embolique). VD : Ventricule droit ; VTD : Volume tldiastolique ; VG : Ventricule gauche ; VES : Volume djection systolique ; VO2 : Consommation doxygne.

    Impdance vasculaire pulmonaire

    VO2 VD VTD VD VES

    Interaction diastolique

    Interaction systolique

    VTD VG

    Dbit cardiaque

    Tension artrielle

    Perfusion coronaireIschmie VD

    Contractilit VD

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    ventriculaire droite, anomalies de repolarisation, recherche darythmie auriculaire mal tolre cause de la diminution de la compliance diastolique ventriculaire qui rend le remplissage dpendant de la contraction auriculaire) doivent tre raliss afin de dter-miner la gravit de lHTAP.

    6.2.1. CHOCARDIOGRAPHIE DOPPLER Cest actuellement la mthode non-invasive la plus intressante pour faire le diagnostic

    dHTAP, valuer son importance et son retentissement ventriculaire droit. Elle contribue aussi au suivi des patients porteurs dHTAP vitant ainsi aux patients des cathtrismes cardiaques droits itratifs, non dnus de risques.Elle participe la recherche des tiologies cardiaques responsables dhypertension pulmonaire (valvulopathie mitrale, myxome de loreillette gauche, shunt sur cardiopathie congnitale).

    La mesure du Doppler est base sur le calcul dun gradient de pression trans-valvu-laire (tricuspide ou pulmonaire) calcule selon lquation simplifie de Bernouilli. Cette mthode permet dvaluer les PAP systoliques et diastoliques.En cas dHTAP, les pics de vlocit du flux sanguin trans-tricuspidien sont levs. La vlocit maximale trans-pulmonaire nest pas modifie, le pic de vlocit est plus prcoce, il est souvent le sige dune encoche msosystolique (Figures 2 A et 2 B).

    6.2.2. CHOCARDIOGRAPHIE MODE TM ET BIDIMENSIONNEL: (FIGURES 2A ET B)Elle est utile dans les HTAP avec rpercussion ventriculaire droite, en rvlant

    une perte de laspect normal triangulaire du VD, une hypertrophie de la paroi libre du VD (> 6 mm en mesure TM), une augmentation du diamtre tldiastolique du VD (> 25 27 mm en mesure TM), une inversion de la courbure septale avec diminution du diamtre tldiastolique du VG, gnrant une augmentation du rapport VD/VG >1/3.

    6.2.3. CATHTRISME CARDIAQUE DROIT Il est indispensable au diagnostic ainsi quau suivi volutif de lhypertension artrielle

    pulmonaire. Sa ralisation comporte la mise en place dun cathter de Swan-Ganz per-

    Figure 2 B : Echographie Doppler pathologique

    Figure 2 A : Echographie Doppler normal

    Noter la dilatation VD refoulant le septum vers le VG, et la majoration du flux sanguin trans-tricuspidien tmoin de l HTAP. Noter laugmentation du pic de vlocit systolique trans-tricuspidien, et lapparition dune en-coche msosystolique trans-pulmonaire.

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    mettant la mesure des pressions artrielles pulmonaires (PAP), de la pression artrielle pulmonaire occluse (PAPO), de la pression auriculaire droite (POD), du dbit sanguin pulmonaire Q par thermodilution et de lanalyse des gaz du sang veineux ml. Les mesures de PAP, POD, Q et de la saturation veineuse en O2 (SvO2) sont souvent utiles ltablissement dun pronostic. Lestimation de la pression auriculaire gauche par mesure de la PAPO est indispensable lexclusion des causes post-capillaires dHTAP (Figure 3).

    En cas dHTAP pr-capillaire, la PAP moyenne est leve alors que la PAPO est nor-male du fait dun barrage anatomique ou fonctionnel sur la circulation pulmonaire). La mesure du dbit cardiaque Q permet de calculer les rsistances vasculaires pulmonaires (RVP) suivant la formule :

    Les rsistances sont exprimes en dynes/sec/cm5. En liminant la constante 80 les RVP sont estimes en unit Wood (UI). Les RVP sont considres comme normales en de de 150 dynes ou 2 UI, une valeur suprieure 200 dynes/sec/cm5 ou 2,5 UI tant pathologique.

    Cette relation parat primordiale car le pronostic dune PAP moyenne 30 mmHg est nettement diffrent si le dbit cardiaque est normal ou accru, ou si le dbit cardia-que est diminu, ce qui implique alors une augmentation des rsistances vasculaires pulmonaires.

    La morphologie des courbes de pression peut orienter vers une tiologie : la consta-tation dune onde v sur la courbe de PAPO suggre une importante insuffisance mitrale. De grandes variations damplitudes des pressions (PAP et PAPO) traduisent des varia-tions importantes de pressions intra-thoraciques imputables un syndrome obstructif bronchique.

    Le retentissement cardiaque droit de lHTAP peut aussi tre tudi. Ses critres sont les suivants : Majoration des pressions de remplissage ventriculaires droites comprenant llvation

    de la pression tl diastolique souvent suprieure 8 mmHg Courbe suggestive dune insuffisance tricuspidienne avec comblement du creux x,

    puis ventricularisation de la courbe de POD avec majoration de sa valeur moyenne.

    Figure 3 : Cathter de Swan-Ganz permettant dobjectiver une HTAP svre passive (PAPO normale, origine non-cardiognique).

    PAP

    PAPO

    mm

    Hg

    RVP = (PAP moyenne - PAPO) x 80Q

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    Le cathtrisme droit permet par ailleurs de rechercher un shunt intracardiaque gauche/droit laide de prlvements sanguins tags avec mesure de la saturation en O2, de mesurer la saturation de sang veineux ml en O2, dapprcier le transport en O2 aux tissus ainsi que la consommation tissulaire en O2. Une saturation de sang veineux ml en O2 < 50 % est contemporaine dune HTAP trs svre avec dfaillance VD associe.

    6.2.4. TEST DE RVERSIBILITHabituellement ralis au dcours du cathtrisme cardiaque droit laide de

    vasodilatateurs courte dure daction, de slectivit essentiellement pulmonaire. Les vasodilatateurs suivants sont recommands essentiellement en cas dHTAP primi-tive [2] : Epoprostnol : prostacycline de demi-vie courte (3 5 min), administre par voie

    intraveineuse la posologie de 2 ng.kg-1.min-1, augmente par incrments de 2 ng.kg-1.min-1 toutes les 15 min en fonction de la tolrance. Des rsultats similaires, mais apparemment avec une spcificit pulmonaire suprieure ont t rapports avec une prostacycline inhale (iloprost), la posologie de 8 10 g .

    Monoxyde dazote inhal : laction vasculaire pulmonaire slective, il se fixe lhmoglobine aprs diffusion alvolo-capillaire. Sa demi-vie est de 15 30 sec. Leffet vasodilatateur pulmonaire maximal est obtenu aprs 5 10 min la posologie de 10 ppm. Des posologies suprieures ou une administration prolonge nont pas deffet bnfique sur-ajout.Critres de rversibilit : Il existe une variabilit spontane de lhmodynamique

    pulmonaire (pressions et rsistances) de lordre de 20 25 %. Une baisse des rsistances vasculaires pulmonaires dau moins 30 % semble minimale avant de pouvoir vritable-ment confirmer un effet vasodilatateur pulmonaire significatif.

    Une dcroissance de 20 % des pressions artrielles pulmonaires ainsi que des rsistances vasculaires pulmonaires est frquemment prdictive dune bonne rponse un traitement chronique par inhibiteurs calciques. Une rversibilit plus importante ne prdit pas une rponse suprieure, mais une meilleure tolrance du traitement avec une incidence rduite dhypotensions artrielles ou mme darrts cardiaques. Il ny a pas davantage tester plus dun vasodilatateur prcdemment cit.

    En cas dHTAP dorigine broncho-pulmonaire, on peut observer une rduction de lHTAP au cours dune inhalation doxygne. Toutefois labsence de rponse initiale ne prsage pas de son inefficacit au long cours .

    En cas dHTAP chez linsuffisant cardiaque, lindication de transplantation cardia-que tient compte des rsistances vasculaires pulmonaires. Lorsque ces dernires sont suprieures 5 ou 6 units Wood, la greffe est en principe contre-indique. Il convient alors de raliser un test sous nitr, ou sous dobutamine en cas de bas dbit cardiaque. La rgression partielle des RVP (2 3 units Wood), traduction dun barrage fonctionnel permet alors de retenir lindication chirurgicale.

    6.2.5. IRM ET SCANNER HAUTE RSOLUTIONCes techniques non-invasives valuent la morphologie auriculaire et ventriculaire

    droite, la morphologie artrielle pulmonaire, et la fonction ventriculaire droite. Le scan-ner thoracique participe au bilan tiologique (dtection dune maladie veino-occlusive pulmonaire). La valeur de ces techniques dans le suivi des patients ayant une HTAP nest pas encore tablie.

    6.3. MDICATIONS PROPRATOIRES

    En cas de cardiopathie, la suspension du traitement digitalique la veille de linterven-tion avec dtermination de la digoxinmie plasmatique, de la kalimie et de la fonction rnale sont souhaitables. Les traitements visant rduire lintensit de lHTAP seront

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    poursuivis le matin de lintervention, et mme pendant lintervention (cas des patients sous prostacycline intraveineuse). Un relais entre traitement anticoagulant oral (AVK) et hparine sodique ou calcique sera assur en phase propratoire. Les anti-agrgants plaquettaires seront, si possible, interrompus en fonction de leur demi-vie.

    7. PRISE EN CHARGE DE LHTAP EN ANESTHSIE-RANIMATION

    7.1. ACCS VASCULAIRES ET MONITORAGE

    Un ECG 12 drivations, avec analyse du segment ST, un saturomtre de pouls et un monitorage respiratoire (FiO2, FECO2, fraction inspire et expire des agents halogns) seront mis en place systmatiquement. La mise en place dune PA sanglante est forte-ment recommande, surtout en cas dintervention longue, potentiellement hmorragique, ou risque dinstabilit hmodynamique. Tout ce monitorage devra permettre dviter toute acidose, hypercapnie ou hypoxie volontiers gnratrices dHTAP. En cas dHTAP modre (PAPs > 40 mmHg) voire svre, un cathtrisme cardiaque droit de Swan-Ganz avec monitorage de la PAP, PVC, du dbit cardiaque et surtout de la SvO2 sera mis en place. Une baisse rapide de la SvO2 est souvent le premier signe de dcompensation cardiaque droite.

    En cas dintervention lourde, de pertes hmorragiques, ou de problme de posture, on pourra ponctuellement saider en labsence de cathtrisme cardiaque, dune chographie transsophagienne pour juger au mieux de limportance du remplissage ventriculaire droit, en vitant ainsi toute dilatation aigu.

    7.2. LES HTAP DORIGINE HYPOXIQUE

    7.2.1. ANESTHSIQUES ET VPHLes anesthsiques volatils, lhalothane, lenflurane, lisoflurane et le protoxyde dazote

    ont eu la rputation de contribuer lhypoxmie qui accompagne la plupart des anesth-sies gnrales par une inhibition de la VPH. En ralit, leffet vasodilatateur pulmonaire de ces gaz sattnue lorsquon passe des modles de poumon isol lanimal intact. En clinique ou dans des conditions similaires, lhalothane, lenflurance, lisoflurane, le desflurane et le svoflurane nont pas deffet sur la VPH [4, 5], alors que le N,O rduit lgrement la rponse.

    Parmi les agents hypnotiques, le propofol ninhibe pas la VPH, voire mme la renforce [6]. La ktamine conserve le mcanisme de VPH sur le mme modle canin entier [6].

    Les barbituriques semblent inhiber le mcanisme de VPH de faon minime aussi bien sur le poumon isol perfus que chez lanimal entier.

    Les analgsiques et anesthsiques administrs par voie intraveineuse, de mme que les curarisants, nont pas deffet direct sur les vaisseaux pulmonaires.

    Concernant les anesthsiques locaux, la lidocane na pas deffet direct sur la VPH. Par contre, le blocage pidural avec de la lidocane (20 mg.kg-1) semble renforcer la VPH chez lanimal entier [7]. De manire gnrale, lanesthsie locorgionale pri-mdullaire nest pas indique chez ce type de patient, surtout en cas dinsuffisance cardiaque associe. Cependant, il est possible de raliser avec de grandes prcautions des blocs priphriques (canal humral, pribulbaire) vise anesthsique ou analgsique.

    7.2.2. MCANIQUE VENTILATOIRE ET VPHExprimentalement, une rduction du volume courant semble rduire le collapsus

    alvolaire initialement gnr par un dficit en surfactant endogne, et favorise ainsi la rduction du diamtre des vaisseaux annexes, amliorant de fait la VPH [8].

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    Ladjonction dune PEP rduit aussi linstabilit alvolaire, et inhibe la VPH, mme si elle participe lamlioration du rapport ventilation /perfusion [8].

    7.2.3. VPH ET PATHOLOGIES BRONCHO-PULMONAIRES CHRONIQUES DCOMPENSESEn cas de broncho-pneumopathie chronique obstructive, les patients prsentent

    une hypoxmie en rapport avec une plus grande htrognit des rapports ventilation/perfusion avec accroissement de la perfusion au sein dunits pulmonaires possdant un rapport VA/Q normal. Chez les patients atteints dinsuffisance respiratoire obstructive avec HTAP, le NO diminue les rsistances artrielles pulmonaires et le shunt intra-pulmonaire. Ces effets semblent proportionnels aux rsistances artrielles pulmonai-res initiales du patient. Laction vasodilatatrice du NO ne semble pas confirme chez linsuffisant respiratoire obstructif dcompens, sous ventilation artificielle, pour des doses allant jusqu 20 ppm [9].

    7.2.4. VPH ET SDRALhypertension artrielle pulmonaire au cours du SDRA est connue depuis le milieu

    des annes 70. Son incidence est trs leve. Cest ainsi que Leeman [10] rapporte dans une srie de 95 patients atteints de SDRA une PAPm > 25 mmHg chez 50 dentre eux (moyenne 27 6, extrmes 14 et 38 mmHg).

    Une augmentation de la pression docclusion vasculaire amenant cette pression tre suprieure la pression auriculaire gauche est trs frquente. Ceci est li la fois au tonus des vaisseaux mais aussi au fait que ces vaisseaux sont collabables sous leffet de la pression environnante.

    Les mcanismes de dclenchement et dentretien de lhypertension pulmonaire sont en fait multiples et intriqus au cours du SDRA [10]. Il sagit la fois de facteurs fonctionnels et danomalies structurelles. Les lments fonctionnels sont domins par leffet des mdiateurs effets vasoconstricteurs et par la VPH. De trs nombreux facteurs structuraux jouent un rle : obstruction des micro-vaisseaux, fibrose (dont lapparition peut tre trs prcoce), destruction de la circulation pulmonaire lie au SDRA lui-mme, aux lsions induites par la ventilation artificielle (VILI : Ventilation Induced Injury).

    Les thrapeutiques utilises interviennent galement dans cette hypertension et notamment la PEP et lhypercapnie permissive. Lhypertension artrielle pulmonaire gnre par lhypercapnie est le fait, la fois dune augmentation du dbit cardiaque et dune augmentation des rsistances vasculaires pulmonaires.

    Les rsistances vasculaires pulmonaires sont minimales au niveau de la CRF. Les volumes pulmonaires au-dessous de la CRF et linverse la distension pulmonaire augmentent les rsistances vasculaires pulmonaires. Les modalits de ventilation artificielle, indpendamment mme des VILI, ont donc une influence importante sur lhypertension artrielle pulmonaire.

    Le maintien de loxygnation au cours des lsions pulmonaires aigus est tout fait dpendant de la VPH comme le montre bien le travail exprimental de Brimioulle et coll. [11]. Or, plusieurs tudes ont montr une altration de la VPH au cours du SDRA.

    Chez lhomme, Rouby et coll. [12] ont propos dvaluer lefficacit de la VPH partir du ratio des pourcentages de poumon non ventil (mesure par scanner) et du shunt Qs/Qt. Chez plus de 75 % des 71 patients explors une anomalie de la VPH a t constate. Les raisons de cette anomalie sont probablement multiples et intriques.

    Les FiO2 trs leves utilises dans les SDRA trs svres suppriment le stimulus li la baisse de la PAO2 dans les zones encore ventiles ; sous FiO2 = 1 les territoires trs mal ventils sont soumis des atlectasies par absorption. Dans ces conditions le seul stimulus reste la baisse de la PvO2 dans les territoires non ventils [2, 13]. Benzing et coll. [13] ont bien montr que leffet du NO inhal dpend de la VPH des territoires

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    non ventils. Les modifications de forme et de volume des alvoles ont un rle important dans cette suppression de la VPH : linstabilit alvolaire entrane une dilatation des micro-vaisseaux empchant leur rponse constrictrice lhypoxie [8].

    7.2.4.1. Effets du NOLe NO inhal, est utilis maintenant depuis plusieurs annes au cours du

    SDRA [14-16]. Son intrt est dagir exclusivement dans les territoires ventils. En fait cette notion est battue en brche par certains travaux dmontrant que leffet du NO inhal dpend de la PvO2 des territoires non ventils [13]. Lexplication de cet effet paradoxal serait la juxtaposition des zones ventiles et non ventiles, la proximit tant telle que NO diffuse galement dans les territoires non ventils. La rponse au NO ne parat pas prvisible. Elle peut tre amliore par ladjonction dalmitrine, du dcubitus ventral [14] : ceci illustre bien la ncessit dune prise en charge multimodale du SDRA.

    Le monoxyde dazote amliorerait aussi la performance ventriculaire droite [17]. Le caractre potentiellement toxique du NO, du fait de sa transformation en NO2 , et leffi-cacit des doses plus faibles que celles initialement prconises, ont amen rduire les doses. Il ny aurait pas dintrt dpasser 2 ppm pour disposer deffets maximaux sur les rsistances artrielles pulmonaires, le shunt et lhmatose. En cas de choc septique associ au SDRA, les doses ncessaires sont plus importantes, slevant 10 ppm. Lab-sence dtude dmontrant une rduction significative de la mortalit sous NO, un effet rebond dltre larrt aggravant HTAP et hypoxmie, et un taux de non-rpondeurs proche de 30 % sont les principaux inconvnients notables.

    7.2.4.2. Alternatives au NO [16]Ladministration de prostaglandine I2 par voie inhale induit par contre une vasodi-

    latation pulmonaire slective des zones ventiles, combinant une baisse des pressions et des rsistances vasculaires pulmonaires, avec redistribution du flux sanguin pulmonaire des zones non ventiles vers les zones ventiles et diminution du shunt. Les paramtres doxygnation sont ainsi amliors. Ces effets sont comparables ceux obtenus avec le monoxyde dazote [16].

    La rponse vasodilatatrice pulmonaire la prostacycline inhale pourrait diffrer selon ltiologie du SDRA. En effet, lamlioration du rapport PaO2/FiO2 sous traitement serait suprieure 10 % en cas de SDRA de cause extra-pulmonaire (sepsis, traumatisme).

    Ainsi, la prostacycline inhale semble plus efficace dans la rduction de lhyperten-sion pulmonaire, et moins efficace dans lamlioration de lhmatose, en comparaison avec le NO [16]. En revanche, la prostaglandine I2 par voie intraveineuse aurait un effet vasodilatateur non slectif, permettant aussi une amlioration significative du dbit cardiaque par rduction de la post-charge ventriculaire droite, mais gnrant volontiers une hypotension artrielle systmique. Les drivs des prostaglandines ont aussi des effets adverses bien connus, associant troubles digestifs, cphales, hypotension systmique, tachyphylaxie et effet rebond larrt du traitement. Leur tolrance au long cours nest pas bien connue.

    7.3. LES HTAP DORIGINE CARDIOGNIQUE

    7.3.1. CARDIOPATHIES MALFORMATIVESLHTAP est la complication la plus svre qui puisse tre observe au cours de

    lvolution des cardiopathies congnitales, notamment des shunts gauche-droit, car elle aggrave le risque chirurgical et le pronostic ultrieur moyen et long terme.

    Lexistence, quelle que soit la cardiopathie, dune HTAP indique le dveloppement de lsions artriolaires pulmonaires, dont le caractre rversible ou non, conditionne les indications thrapeutiques et le pronostic.

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    Llvation des RAP dans la communication inter-auriculaire est rare (6 %) et le plus souvent tardive (aprs 20 ans), atteignant plus volontiers la femme. Les communications inter-ventriculaires dveloppent loppos une HTAP plus rapidement et plus frquem-ment que les patients atteints dun shunt gauche-droit. Les cardiopathies cyanognes (transposition des gros vaisseaux, tronc artriel commun) sont tout comme les CIV expo-ses au dveloppement prcoce dartriolite pulmonaire obstructive gnratrice dHTAP souvent fixe, et donc non rversible par un quelconque traitement pharmacologique.

    7.3.2. CARDIOPATHIES ACQUISESLes cardiopathies gauches acquises responsables dune HTAP sont les valvulopathies

    fuyantes et stnosantes, les valvulopathies aortiques, et les valvulopathies par augmen-tation des pressions de remplissage ventriculaire gauche (cardiopathies ischmiques). Ces diffrentes pathologies peuvent dterminer une HTAP post-capillaire conscutive laugmentation de la pression auriculaire gauche, avec des lsions histologiques modres et longtemps rversibles.

    7.3.3. RISQUES ANESTHSIQUES INHRENTS CES CARDIOPATHIESLhypertrophie artrielle pulmonaire, secondaire ces cardiopathies expose lors de

    la chirurgie, quand elle est possible en labsence dartriolite obstructive volue, au risque per et postopratoire immdiat de crises dHTAP. Celles-ci sont dfinies habi-tuellement par une lvation brutale de la PAP systolique plus de 75 % de la pression artrielle systmique. Ces crises imprvisibles surviennent prcocement entre la fin de lacte chirurgical et les tous premiers jours postopratoires. Les facteurs dclenchants sont nombreux : rle de la CEC responsable de laltration de lendothlium vasculaire et des cellules de la ligne sanguine dans la libration de substances vasoactives, hypoxie alvolaire sur ajoute, toute cause dlvation des catcholamines endognes circulantes favorisant la vasoconstriction artriolaire. Le traitement a pour but de supprimer les facteurs aggravants (renforcement de la sdation et de lanalgsie, lutte contre lacidose et lhypoxie, maintien de lquilibre ionique), et dagir directement sur la vasoconstriction artriolaire pulmonaire. Les drogues les plus rgulirement efficaces sont loxygne, le NO et la prostacycline.

    En cas daugmentation associe des rsistances vasculaires pulmonaires pr-capillaires (BPCO associe, stnose mitrale serre de lenfant), une dfaillance ventriculaire droite rsultante peut survenir, altrant ainsi le pronostic de ces patients. A la vasoconstriction pulmonaire sassocie le remodelage vasculaire pulmonaire lorigine dune fixation des rsistances vasculaires pulmonaires. Cette notion est importante prendre en compte notamment en cas dindication de transplantation cardiaque, le nouveau greffon ne pouvant faire face une augmentation de la post-charge ventriculaire droite, en phase postopratoire immdiate. La majeure partie de ces vasodilatateurs ont t tests dans lHTAP dorigine cardiognique avec des rsultats variables.

    7.3.3.1. Le NO :Le NO reverse lHTAP des patients en attente de transplantation cardiaque. Ces effets

    bnfiques sont retrouvs chez les patients aprs remplacement valvulaire mitral avec une diminution des PAP et des rsistances artrielles pulmonaires denviron 20 %. En situation de post-transplantation cardiaque, il tend contre-balancer les effets pulmo-naires nfastes de la CEC, et rduit la post-charge ventriculaire droite initialement accrue par les phnomnes dischmie-reperfusion. Cet effet vasodilatateur pulmonaire slectif est utile dans les cardiopathies congnitales type shunt gauche-droit. En effet, lemploi dautres vasodilatateurs pulmonaires non-slectifs peut tre responsable dune hypo-tension systmique par vasodilatation due au passage direct de ce vasodilatateur dans la

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    circulation systmique, cause dun shunt droit-gauche favoris par une pousse dHTAP. Les concentrations de NO utilises chez lenfant restent infrieures 10 ppm. Des doses suprieures 20 ppm sont requises de faon brve lors des pousses hypertensives. De fait, lapparition de NO2 est limite, ainsi que celle de mthmoglobine.

    7.3.3.2. Les drivs des prostaglandinesBien que la prostacycline intraveineuse constitue lun des traitements phares de

    lhypertension artrielle pulmonaire primitive, un certain nombre dtudes ont examin les effets de la prostacycline inhale dans les HTAP cardiogniques. Cette dernire rduirait plus fortement les rsistances vasculaires pulmonaires que le NO et ce ds la dose de 15 ng.kg-1.min-1 Bien que la prostacycline ait des effets vasodilatateurs pulmo-naires bien dcrits, il nest pas clairement tabli quelle puisse majorer la performance du VD notamment aprs chirurgie cardiaque.

    7.3.3.3. Les drivs de la trinitrineLeur seule indication rside dans le fait quils diminuent la prcharge ventriculaire

    gauche et amliorent le dbit cardiaque notamment lors dpisodes de ncrose myocar-dique, et chez les patients porteurs de cardiopathies acquises. Les drivss nitrs ont un effet vasodilatateur systmique, et sont responsables dpisodes hypotensifs limitant leur tolrance.

    Lutilisation de certains vasodilatateurs pulmonaires (inhibiteurs calciques, drivs des prostaglandines, NO) peut saccompagner de la survenue ddme pulmonaire. En effet, la vasodilatation pulmonaire induite accrot la prcharge ventriculaire dun cur gauche dj incomptent, et majore la pression capillaire lorigine de ldme. Une tude rcente en double-aveugle, utilisant la prostacycline chez des patients porteurs dune cardiomyopathie a dmontr une augmentation significative de la mortalit dans le groupe trait par rapport au groupe contrle [18].

    7.4. LA DFAILLANCE VENTRICULAIRE DROITE POST HTAP

    7.4.1. INTRT DES CATCHOLAMINES ET DES INODILATATEURS Si la littrature ne semble pas univoque dans lutilisation des drogues vasoactives,

    quelques analyses dmontrent quune post-charge ventriculaire droite leve gnre une perfusion inadquate de la paroi libre ventriculaire droite lorigine dune ischmie ventriculaire droite [19]. Des exprimentations animales ont clairement tabli quune augmentation de la pression de perfusion coronaire droite conscutive une augmenta-tion de la pression artrielle systmique majorait le dbit sanguin coronaire droit [19]. Il en rsultait une rduction de lischmie ventriculaire droite sur-ajoute et une am-lioration de la performance ventriculaire droite. Hirsch et coll. ont tabli sur un modle canin de dysfonction ventriculaire droite aigu post-embolie pulmonaire la supriorit de la noradrnaline sur ladrnaline [20]. La noradrnaline amliore en effet la fonction ventriculaire droite, en restaurant la pression artrielle moyenne et le dbit sanguin coronaire, et diminue les rsistances vasculaires pulmonaires. Ladrnaline restaure la pression artrielle moyenne en majorant les rsistances vasculaires systmiques, mais ne modifie significativement aucun autre paramtre hmodynamique.

    Peu de travaux ont port sur leffet des inhibiteurs des phosphodiestrases sur la performance du VD dans la dcompensation cardiaque droite post-HTAP malgr leur effet vasodilatateur pulmonaire. La milrinone utilise en post-chirurgie cardiaque amlio-rerait moins la performance du VD que le NO inhal (40 ppm), avec en plus un recours significativement plus important aux agents vasopresseurs [21].

    Concernant la dysfonction ventriculaire droite aigu survenant lors dune HTAP post-capillaire, quelques tudes attirent lattention sur lutilisation intraveineuse de pros-

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    taglandine E1. Cette approche pharmacologique tire avantage des effets vasodilatateurs pulmonaires de la prostaglandine E1 en minimisant la vasodilatation artrielle systmique et lhypotension rsultante par ladjonction de noradrnaline.

    7.4.2. INTERACTION ENTRE ANESTHSIQUES ET FONCTION VENTRICULAIRE DROITETous les anesthsiques volatils semblent dprimer la fonction ventriculaire droite.

    A concentration alvolaire moyenne (CAM) gale, lenflurane serait plus volontiers dpresseur myocardique que lhalothane. Lisoflurane prserverait mieux la fonction ventriculaire droite que le propofol lors danesthsies avec exclusion uni-pulmonaire [22]. Le svoflurane semble produire une dpression de la fonction ventriculaire droite dose-dpendante (au-del dune CAM) chez le mouton. Cependant aucune tude ne sest intresse aux effets des anesthsiques sur le couplage ventriculo-vasculaire droit, alors quil est maintenant bien tabli que les agents halogns les plus rcents (desflu-rane, svoflurane, isoflurane) altrent le couplage ventriculo-vasculaire gauche au-del d1,2 CAM [23]. Il nexiste pas notre connaissance dtude valuant leffet des anes-thsiques sur la performance ventriculaire droite en condition dHTAP chronique. Dans la pratique, lutilisation de concentrations alvolaires moyennes suprieures 1,2 CAM parat dltre pour la performance ventriculaire droite cause deffets dpresseurs myocardiques pouvant tre majors par une rduction du dbit sanguin coronaire droit. Lutilisation de protoxyde dazote doit tre proscrite en raison de ses effets dpresseurs myocardiques et de linhibition de la VPH quil peut occasionner.

    7.4.3. EFFETS DE LA VENTILATION SUR LE CUR DROIT7.4.3.1. Ventilation spontane

    A linspiration, les poumons rduisent lespace occup par le cur et augmentent les pressions juxta-cardiaques. Les rsistances de la circulation pulmonaire varient de faon exponentielle avec le volume pulmonaire. Par son effet sur les rsistances vas-culaires pulmonaires, lhyper-inflation pulmonaire est donc en mesure daugmenter la post-charge et daltrer la compliance ventriculaire, diminuant ainsi la performance du VD. Ceci est notamment retrouv chez le patient BPCO avec pression expiratoire po-sitive intrinsque.

    7.4.3.2. Ventilation en pression positiveLors de la ventilation en pression positive, laugmentation de la pression intra-

    thoracique et du volume pulmonaire peut tre suivie dune altration hmodynamique par trois mcanismes : laugmentation des volumes pulmonaires, celle de la pression alvolaire, celle de la pression pleurale.

    Laugmentation des volumes pulmonaires peut diminuer la prcharge et la compliance ventriculaire en modifiant la gomtrie cavitaire. La PEP peut, elle aussi, modifier de faon inhomogne la forme ventriculaire. Cet effet est galement variable en fonction du cycle cardiaque : les volumes tldiastoliques sont rduits, alors que les volumes tlsystoliques restent inchangs.

    Laugmentation de la pression alvolaire et du volume pulmonaire sont en mesure daccrotre les rsistances vasculaires pulmonaires. Cette majoration de la post-charge du VD est suffisante pour provoquer une dilatation tldiastolique du VD, et altrer le remplissage du VG par un mcanisme dinterdpendance ventriculaire.

    En pratique, une ventilation contrle avec des volumes courants maximaux de 6 7 ml.kg-1 parat optimale. Lusage dune PEP ne se conoit quen prsence dune hypoxmie importante (SDRA et acute lung injury postopratoires), car ses effets sur la performance ventriculaire droite peuvent tre dltres. Loptimisation des paramtres gazomtriques (absence dhypoxmie, dhypercapnie ou dacidose respiratoire) doit tre

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    ralise afin dviter toute majoration de lHTAP. Une dventilation rapide est souhaitable lorsquelle est possible, aprs rchauffement et mise en place dune analgsie prventive efficace visant prvenir toute pousse dHTAP secondaire une activation du systme nerveux ortho-sympathique.

    CONCLUSION

    Les perspectives davenir reposent sur la dcouverte de traitements anti-prolifratifs susceptibles de freiner le remodelage vasculaire pulmonaire responsable en partie de la majoration de la symptomatologie tels que les bloqueurs des rcepteurs aux endothlines et les inhibiteurs des phosphodiestrases de nouvelle gnration.

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