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Feuillets de Radiologie, 2004, 44, n° 1, 57-67 © Masson, Paris 2004 Mise au point Digestif Imagerie de la chirurgie de l’obésité T. CARAMELLA, A. GRIMAUD, P. CHEVALLIER, F. DAUSSE, S. NOVELLAS, J.-N. BRUNETON Summary: Postoperative imaging after bariatric surgery. Obesity is a serious cardiovascular risk factor in western countries. Medical treatment has made progress but remains limited. For patients with morbid obesity, bariatric surgery is an effective alternative. This invasive procedure requires careful follow-up care and specific postoperative imaging. We summarize the most frequent surgical procedures employed (gastric banding, vertical banded gastroplasty, gastric bypass) and present typical normal postoperative imaging as well as one of the main complications of this increasingly popular surgery. Key words Alimentary tract. Metabolism. Résumé L’obésité est un grave facteur de risque cardio-vasculaire dans notre société occidentale. Si les traitements médicaux possibles de cette maladie ont montré leurs limites, la chirurgie dite « bariatrique », appliquée aux cas les plus avancés, représente une alternative efficace. C’est une technique invasive qui va nécessiter un suivi médical régulier où l’imagerie est primordiale. Après un rappel des techniques de montage chirurgical les plus fréquentes (anneau gastrique modulable, gastroplastie verticale calibrée, court circuit gastrique), l’objectif de cet article est de présenter l’imagerie postopératoire normale et celle des principales complications de cette chirurgie dont la fréquence est en constante augmentation. Mots clés Tube digestif. Métabolique. Selon l’OMS, l’obésité se définit comme un excès de masse grasse entraînant des conséquences néfastes pour la santé [1]. Son estimation se fait par le calcul de l’index de masse corporelle IMC (BMI en anglais) : poids en kilo- gramme/taille en mètre au carré. L’obésité correspond à un BMI 30, l’obésité morbide à un BMI 40 [1]. Cette maladie concerne en France une moyenne de 6 à 11 % de la population adulte [2, 3] (> 20 % aux États-Unis). La prévalence de l’obésité morbide est mal connue mais est estimée à 0,2 à 0,3 %, soit 100 000 à 150 000 personnes [3]. Le traitement de première intention repose sur les mesures d’hygiène alimentaire (régime hypocalorique, acti- vité physique) et les thérapies comportementales [3]. Ces méthodes sont grevées d’un nombre important d’échecs pour lesquels la chirurgie peut apporter une solution tempo- raire ou définitive. À la différence de l’Amérique du Nord, il faudra atten- dre les années 90 et l’apparition des anneaux ajustables pour voir cette technique exploser en Europe. BILAN PRÉOPÉRATOIRE La chirurgie bariatrique ne doit s’envisager qu’après échec d’un traitement médical bien conduit pendant au moins 1 an. Ses indications sont la motivation réelle du patient (attestée par une consultation psychiatrique), la majorité civile (bien que des dérogations soient possibles) et un BMI 40 (ou 35 s’il existe des facteurs de co- Service d’Imagerie Médicale, Hôpital de l’Archet 2, 151, route Saint-Antoine-de-Ginestière, BP 3079, 06202 Nice Cedex 3. Correspondance : T. Caramella, à l’adresse ci-dessus.

Imagerie de la chirurgie de l’obésité

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Page 1: Imagerie de la chirurgie de l’obésité

Feuillets de Radiologie, 2004, 44, n° 1, 57-67© Masson, Paris 2004Mise au point

Digestif

Imagerie de la chirurgie de l’obésité

T. CARAMELLA, A. GRIMAUD, P. CHEVALLIER, F. DAUSSE, S. NOVELLAS, J.-N. BRUNETON

Summary: Postoperative imaging after bariatric surgery.

Obesity is a serious cardiovascular risk factor in western countries. Medical treatment has made progress but remainslimited. For patients with morbid obesity, bariatric surgery is an effective alternative. This invasive procedure requirescareful follow-up care and specific postoperative imaging. We summarize the most frequent surgical procedures employed(gastric banding, vertical banded gastroplasty, gastric bypass) and present typical normal postoperative imaging as wellas one of the main complications of this increasingly popular surgery.

Key words

Alimentary tract. Metabolism.

Résumé

L’obésité est un grave facteur de risque cardio-vasculaire dans notre société occidentale. Si les traitements médicauxpossibles de cette maladie ont montré leurs limites, la chirurgie dite « bariatrique », appliquée aux cas les plus avancés,représente une alternative efficace. C’est une technique invasive qui va nécessiter un suivi médical régulier où l’imagerieest primordiale. Après un rappel des techniques de montage chirurgical les plus fréquentes (anneau gastrique modulable,gastroplastie verticale calibrée, court circuit gastrique), l’objectif de cet article est de présenter l’imagerie postopératoirenormale et celle des principales complications de cette chirurgie dont la fréquence est en constante augmentation.

Mots clés

Tube digestif. Métabolique.

Selon l’OMS, l’obésité se définit comme un excès demasse grasse entraînant des conséquences néfastes pour lasanté [1]. Son estimation se fait par le calcul de l’index demasse corporelle IMC (BMI en anglais) : poids en kilo-gramme/taille en mètre au carré.

L’obésité correspond à un BMI 30, l’obésité morbideà un BMI 40 [1].

Cette maladie concerne en France une moyenne de 6 à11 % de la population adulte [2, 3] (> 20 % aux États-Unis).La prévalence de l’obésité morbide est mal connue mais estestimée à 0,2 à 0,3 %, soit 100 000 à 150 000 personnes [3].

Le traitement de première intention repose sur lesmesures d’hygiène alimentaire (régime hypocalorique, acti-

vité physique) et les thérapies comportementales [3]. Cesméthodes sont grevées d’un nombre important d’échecspour lesquels la chirurgie peut apporter une solution tempo-raire ou définitive.

À la différence de l’Amérique du Nord, il faudra atten-dre les années 90 et l’apparition des anneaux ajustables pourvoir cette technique exploser en Europe.

BILAN PRÉOPÉRATOIRE

La chirurgie bariatrique ne doit s’envisager qu’aprèséchec d’un traitement médical bien conduit pendant aumoins 1 an. Ses indications sont la motivation réelle dupatient (attestée par une consultation psychiatrique), lamajorité civile (bien que des dérogations soient possibles)et un BMI 40 (ou 35 s’il existe des facteurs de co-

Service d’Imagerie Médicale, Hôpital de l’Archet 2, 151, route Saint-Antoine-de-Ginestière, BP 3079, 06202 Nice Cedex 3.

Correspondance : T. Caramella, à l’adresse ci-dessus.

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morbidité comme le diabète ou les maladies cardio-vas-culaires). L’obésité doit être stable ou s’aggraver depuisau moins 5 ans. Un bilan endocrinien élimine une causecurable [2, 3].

Les contre-indications chirurgicales sont : les troublespsychiatriques, l’alcoolisme et la toxicomanie, les pathologiesendocriniennes curables, le reflux gastro-œsophagien, ainsi quetoutes les contre-indications de l’anesthésie générale [2, 3].

Le bilan d’imagerie préopératoire comprend, dansnotre hôpital, un transit œso-gastro-duodénal (TOGD) etune échographie abdominale.

Le TOGD recherche une hernie hiatale pouvant modifierl’approche chirurgicale. Le reflux gastro-œsophagien est pourcertaines équipes une contre indication de l’anneau et sessignes indirects devront être recherchés (œsophagite, ulcéra-tions, …). En effet, la pose de l’anneau va aggraver le refluxgastro-œsophagien. Un reflux fera donc préférer une autretechnique en particulier la gastroplastie verticale calibrée.

L’échographie doit rechercher une lithiase vésiculaire etaccessoirement un foyer infectieux profond. La présence delithiase impose pour certains une cholécystectomie premièreen cas de pose d’anneau.

RAPPELS DES DIFFÉRENTES TECHNIQUES CHIRURGICALES

Il existe 3 types d’interventions : restrictives, malabsorp-tives et mixtes.

Opérations restrictives

Ce sont les plus pratiquées en Europe et en particulieren France. 7 000 anneaux de gastroplastie environ ont étéposés en 2000 [3]. Elles consistent en une limitation sévèrede la capacité d’ingestion par confection d’une poche gas-trique de 15 à 20 ml, responsable d’un effet de satiété.

Il existe 2 interventions de ce type couramment prati-quées en France : la gastroplastie par anneau modulable, de

développement récent, et la gastroplastie verticale calibréede type Mason (GVC), plus ancienne [3, 4].

Ces 2 techniques nécessitent une modification ducomportement alimentaire du patient afin d’éviter qu’il necompense la diminution des apports par une augmentationdes aliments liquides [3].

LA GASTROPLASTIE PAR ANNEAU

Pratiquée depuis 1993 [5], elle consiste en un bandagecirculaire de la partie haute de l’estomac par un anneaumodulable délimitant une poche gastrique en amont.L’anneau est placé au niveau de la « pars facida » [6] et estrelié par un cathéter à un boîtier sous cutané permettant demodifier aisément son diamètre par ponction (fig. 1).

Le calibrage se fait à distance de l’intervention (15 joursen moyenne) par injection de quelques millilitres de sérumphysiologique. Le diamètre de l’anneau après calibrage mesure3 à 4 mm. Cette intervention, réalisable sous cœliochirurgie,est la plus « physiologique » puisque qu’elle ne nécessiteaucune résection et qu’aucun montage digestif n’est réalisé ; dece fait elle s’accompagne de la plus faible morbidité.

La perte de poids à 1 an est estimée à 45 % en moyenne[3]. Les échecs sont représentés par les sweet eaters, c’est-à-dire des patients continuant à ingérer de grandes quantitéssous forme liquide pour « traverser » l’anneau (sodas, crè-mes glacées, etc.) [3].

Du fait d’un manque de recul (8 ans environ), l’évalua-tion du bénéfice sur la perte de poids à long terme de la gas-troplastie par anneau est mal évaluée [3]. Les études les plusrécentes ne montrent pas de différence significative entrecette chirurgie et les autres techniques [7-9]. Une conversionen bypass est toujours possible en cas d’échec.

LA TECHNIQUE DE MASON ET SES VARIANTES [3]

La technique initiale consiste en la confection d’unepoche gastrique de 15 à 25 ml par agrafage vertical le longde la petite courbure gastrique communiquant avec le restede l’estomac par un petit chenal calibré par une bande pro-thétique (peu radio opaque) [4] (fig. 2). On lui préfèreactuellement la technique de Mac Lean qui y associe une

Fig. 1. — Anneau de gastroplastie. A : ASP normal montrant l’anneau (1), le cathéter (2) ainsi que le boîtier sous-cutané (3). B : TOGD montrantl’opacification de la poche gastrique en amont de l’anneau (1). C : Passage filiforme à travers l’anneau (2) et remplissage du reste de l’estomacet du bulbe (3).

A B C

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IMAGERIE DE LA CHIRURGIE DE L’OBÉSITÉ 59

transection gastrique afin d’éviter les échecs du désa-grafage.

La perte de poids attendue est d’environ 61 % à 1 an.

Opérations malabsorptives

Ces techniques ne sont plus pratiquées en France dufait des nombreuses complications induites. Elles consistentà priver une partie plus ou moins étendue de l’intestin grêledes sécrétions biliaires et pancréatiques, entraînant unemalabsorption prédominant sur les graisses. Elles permet-tent un amaigrissement sans diminution apparente desapports. L’intervention type était l’intervention de bypassbilio-pancréatique de Scopinaro (anastomose de l’anse affé-rente au niveau des dernières anses iléales) responsable d’unimportant degré de malabsorption (fig. 3).

Opérations mixtes

L’intervention la plus courante est le Gastric Bypass(Court-circuit gastrique) (fig. 4A, 4D). C’est la technique

de référence en Amérique de Nord. En 2000, en France,1000 interventions de ce type ont été réalisées [3].

Du fait de son ancienneté, de nombreuses publicationsont évalué ses résultats à long terme. La perte de poids esti-mée à un an est de 68 % en moyenne, et est stable dans letemps [3]. Elle consiste en la confection d’une poche gas-trique par agrafage vertical. La poche peut être séparée dureste de l’estomac ou pas. Une section jéjunale est prati-quée en moyenne à 30 cm de l’angle de Treitz avec uneanastomose gastro-jéjunale termino-latérale : sont ainsicréées une anse afférente borgne n’excédant pas 3 cm etune anse efférente montée. Le montage de l’anse peut sefaire par voie transmésocolique et rétrogastrique (fig. 4B)ou par voie antécolique et antégastrique (fig. 4C). Enfin,une anastomose jéjuno-jéjunale termino-latérale est réali-sée. Pour moduler le degré de malabsorption, le chirurgienjoue sur le niveau d’anastomose de l’anse afférente (de40 cm en moyenne de l’anastomose gasto-jéjunale, jusqu’à2 m).

Cette intervention est réalisable par cœliochirurgie pardes équipes entraînées ou par laparotomie.

Fig. 2. — Gastroplastie verticale calibrée. A : Technique de Mason sans trans-section gastrique. B : Technique de Mac Lean avec trans-sectiongastrique. C : TOGD normal au temps de remplissage de la poche gastrique. D : TOGD au temps tardif avec remplissage secondaire du reste del’estomac.

ADC

B

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60 T. CARAMELLA ET COLLABORATEURS

IMAGERIE DES COMPLICATIONS

Nous n’aborderons que l’imagerie spécifique descomplications des 3 techniques les plus pratiquées (anneaugastrique, GVC et Gastric Bypass).

Anneau de gastroplastie

COMPLICATIONS POSTOPÉRATOIRES IMMÉDIATES

Elles sont rares et représentées par la perforation gas-trique et le dysfonctionnement de l’anneau ou suppurationdu boîtier. Globalement, la morbidité à 1 mois est de 4,2 %,la mortalité de 0,09 %. L’embolie pulmonaire est la princi-pale cause de ces décès [10].

COMPLICATIONS TARDIVES

Elles sont plus fréquentes et dominées par la dilatationde la poche gastrique et l’érosion gastrique.

Dilatation de la poche gastrique [10, 11]

Retrouvée dans 6,3 % des séries, et nécessitant 93 % dereintervention, elle peut se faire avec ou sans glissement del’anneau [6]. Elle entraîne un risque de volvulus et denécrose gastrique (fig. 5). Elle est principalement causée par

Fig. 3. — Intervention de Scopinaro.

Fig. 4. — Court-circuit gastrique. A : Schéma simplifié d’un gastric bypass montrant les2 anastomoses. En réalité, l’anastomose gastro-jéjunale est termino-latérale délimitant uneanse afférente borgne et une anse efférente comme l’illustrent les deux schémas suivants.B : Montage transmésocolique et rétrogastrique d’après Blachar [5]. C : Montage antéco-lique et antégastrique d’après Blachar [5]. D : TOGD normal montrant la poche gastrique(1), l’anastomose gastro-jéjunale (2), l’anse borgne afférente (3), et l’anse montée effé-rente (4).

A B CD

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IMAGERIE DE LA CHIRURGIE DE L’OBÉSITÉ 61

Fig. 5. — Anneau de gastroplastie. Dilatation de la poche gastrique. A : Schéma explicatif. B : TOGD montrant la dilatation et le passage fili-forme à travers l’anneau. C : Scanogramme d’un volvulus de la poche gastrique. D et E : TDM mettant en évidence le volvulus de la pochegastrique sans anomalie du calibrage de l’anneau (mode chronique). F, G et H : Ascension de l’anneau sans dilatation de la poche gastriqued’amont.

AD

B CE

GF H

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62 T. CARAMELLA ET COLLABORATEURS

un pertuis trop étroit. La poche gastrique ne doit pas dépas-ser 20 ml à l’état normal. La dilatation peut atteindre desdimensions de plus de 10 cm de diamètre.

La dilatation peut survenir sur un mode aigu ou chronique.Les étiologies d’une dilatation aiguë sont soit iatrogè-

nes (sur-remplissage de l’anneau), soit un défaut de l’anneauqui s’excentre.

La dilatation chronique peut survenir même sur unanneau correctement calibré. Il s’agit le plus souvent d’unpatient n’ayant pas modifié ses habitudes alimentaires et quicontinue d’ingérer de grosses quantités de nourriture.

L’anneau peut également se déplacer sans dilatation dela poche (fig. 5F-H).

Érosion gastrique

Au contact de l’anneau, elle est retrouvée dans 1,6 %des cas, nécessitant toujours une reprise chirurgicale urgente(ablation de l’anneau). Au maximum, elle aboutit à unanneau intra gastrique et à une hémorragie aiguë. Elle sur-vient en moyenne 2 ans après la chirurgie. Elle est favoriséepar de petites lésions peropératoires de la séreuse et/ou de lamusculeuse et par l’abus d’anti-inflammatoires non stéroï-diens [11]. Le TOGD montre une image de soustractionintra-gastrique

Les autres complications sont plus rares : infection,fuite du boîtier, bézoards, fuite de l’anneau, œsophagite,carences nutritionnelles [10, 11].

Fig. 6. — Technique de Mason. Dilatation de la poche gastrique. A : Distension de la poche gastrique. B : La bande prothétique est peu radioopaque. La bouche d’anastomose est très sténosée. C : Autre dilatation avec sténose serrée de la bouche anastomotique.

A B C

Fig. 7. — Ulcération anastomotique. A, B : Ulcération de la bouche d’anastomose compliquant une gastroplastie de type Mason. On observe uneimage d’addition associée à un épaississement convergent des plis gastriques périphériques.

A B

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Gastroplastie verticale calibrée (GVC)

COMPLICATIONS POSTOPÉRATOIRES IMMÉDIATES

La mortalité précoce est de 0,36 % pour la GVC, essentiel-lement par embolie pulmonaire. Cette intervention a le plus hautrisque emboligène. Les autres complications sont dominées parles complications pariétales (6,4 %) et les fistules (1,6 %). Lamorbidité globale à un mois est d’environ 22 % [10].

COMPLICATIONS TARDIVES

Dilatation de la poche gastrique

Elle fait suite à une sténose de la bouche. Son incidenceest de 6,5 % en moyenne [10]. Le TOGD met facilement enévidence cette anomalie (fig. 6).

Désunion de la ligne d’agrafes

Sa fréquence est d’environ 12,1 % [10]. Dans l’inter-vention de Mason, sa conséquence est une reprise de poids,les aliments contournant donc la zone rétrécie. Elle est évi-tée par la modification de Mac Lean.

Les autres causes sont plus rares : érosion gastrique auniveau de la bande (fig. 7), éventrations post-laparotomie,bézoards [10] (fig. 8).

Gastric bypass

COMPLICATIONS POSTOPÉRATOIRES IMMÉDIATES

Complications pariétales [10]

Elles surviennent dans 7 % des séries en moyenne.Elles comprennent les hématomes et les abcès de paroi.Elles sont aisément diagnostiquées en échographie ou tomo-densitométrie (fig. 9).

Abcès profonds [10]

Ils sont retrouvés dans 2 % des séries. Leur diagnosticest souvent facile au scanner (fig. 10), montrant une collec-tion liquidienne avec rehaussement des parois et présence degaz. La localisation anastomotique est la plus fréquente. Ilssont souvent accessibles à un drainage percutané après repé-rage scannographique.

Fistules digestives [10]

Retrouvées dans 2 % des séries, elles se compliquentd’abcès le plus souvent (fig. 10).

Mortalité

Le décès survient en moyenne dans 0,35 % des cas, leplus souvent par embolie pulmonaire [10].

COMPLICATIONS TARDIVES

Elles nécessitent une réintervention dans 2 à 20 % descas selon les séries. Les complications tardives les plus fré-quentes sont le lâchage d’agrafes, l’obstruction grêlique,l’ulcère anastomotique, les troubles fonctionnels et lescarences nutritionnelles.

Lâchage d’agrafes

Il survient dans 3,5 % des cas. On observe au TOGDune fuite péritonéale de produit de contraste. Cette fuite peutêtre minime nécessitant une analyse scopique rigoureuse ens’aidant de clichés agrandis. En cas de doute, la tomodensi-tométrie montrera les signes classiques de perforation :pneumopéritoine, épanchement péritonéal, fuite du produitde contraste hydrosoluble [12] (fig. 11).

Obstruction grêlique [12, 13]

Elle a trois étiologies principales : la hernie interne, lesadhérences et la sténose grêlique.

Hernie interne [14] : elle est de diagnostic radiologi-que difficile (fig. 12). Le TOGD retrouve une dilatationde l’anse efférente avec arrêt brutal du produit de con-traste. Trois localisations sont particulièrement à risque :l’ouverture du mésocolon transverse, le site de jéjuno-jéjunostomie et l’espace situé en arrière de l’anse montée(hernie de type Peterson). Dans ce dernier cas, il n’y apas de sac herniaire. Le scanner réalisé avec injectionmontre une dilatation segmentaire des anses digestives enamont de l’obstacle avec un aspect « twisté » des vais-seaux mésentériques. La localisation des anses dilatées sesitue en arrière de la poche gastrique dans les herniestransmésocoliques, en arrière de la paroi antérieure abdo-minale dans les hernies transmésentériques, refoulant

Fig. 8. — Bézoard. Image de soustraction dans la poche gastrique,plus évidente à visualiser lors de la scopie.

Fig. 9. — Hématome de paroi secondairement infecté en postopéra-toire (J3) d’un court-circuit gastrique.

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64 T. CARAMELLA ET COLLABORATEURS

alors le colon transverse en position centrale. La herniede Peterson n’a pas de localisation précise. Les herniestransmésocoliques amènent à préférer un montage anté-colique et antégastrique.

Adhérences : elles représentent la deuxième caused’obstruction et sont prévenues par l’utilisation de la cœlio-chirurgie plutôt que de la laparotomie. Le diagnostic diffé-rentiel entre hernie interne et adhérence est très difficilemême en tomodensitométrie.

Sténose grêlique : elle peut être anastomotique ou pas.Les sténoses de l’anastomose jéjuno-jéjunale sont rares et nepeuvent être diagnostiquées sur le TOGD (l’anse afférentene pouvant être opacifiée). Le TOGD montre une dilatationdes anses grêles situées en amont avec un passage filiformede produit de contraste au niveau de la sténose (fig. 13).

Elles bénéficient le plus souvent d’un traitement par dilata-tion endoscopique [15].

Ulcère anastomotique

Il survient en moyenne dans 3,5 % des séries [10]. Ilfait suite à une érosion de l’anse montée par l’acidité gastri-que. Il est le plus souvent de découverte endoscopique. LeTOGD montre une image d’addition pouvant être associéeà un épaississement des plis. On s’attachera à dépister unefuite de produit de contraste. Le traitement est le plus sou-vent médical.

Troubles fonctionnels

Présents dans 5 à 70 % des cas selon l’intervention, ilssont à type de dumping syndrome, de diarrhée motrice et/oumalabsorptive [10].

Fig. 10. — Abcès. A et B : Fébricule et douleur abdominale dans les suites d’un court-circuit gastrique. La tomodensitométrie avec injectiond’iode et ingestion d’hydrosolubles montre une volumineuse collection abcédée anastomotique en rapport avec une fuite anastomotique (passageminime de produit de contraste).

A B

Fig. 11. — Fuite anastomotique. A : Fuite du bord gauche de l’anas-tomose. Le diagnostic ici est facilité par une bonne visualisation del’anse borgne. B : Autre fuite du bord gauche de l’anastomose.

A B

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IMAGERIE DE LA CHIRURGIE DE L’OBÉSITÉ 65

Carences nutritionnelles [10]

Elles nécessitent une surveillance médicale et une sup-plémentation à vie (vitamines, fer, …).

CONCLUSION

Deux techniques chirurgicales dominent.L’anneau gastrique présente les avantages de la faible

morbidité à court et à long terme, de la réversibilité, et de lamodularité. Ses inconvénients principaux sont une perte depoids mal évaluée à long terme avec une accoutumance pos-sible (sweet-eaters) et une reprise de poids.

Le court-circuit gastrique, technique de référence améri-caine, est une chirurgie très invasive et difficilement réversi-ble. Sa justification principale est l’importance de la perte depoids même à long terme et le recul dont elle dispose. Ellenécessite un suivi constant de ses nombreux effets secondai-res et complications.

L’imagerie joue un rôle majeur dans la prise en charge deces patients à la fois en pré opératoire et surtout en post opéra-toire pour le diagnostic des complications. L’examen de pre-mière intention reste le transit œso-gastro-duodénal. Le scannersera réalisé en deuxième intention en cas d’anomalie de l’ima-gerie conventionnelle ou de discordance radio-clinique.

Fig. 12. — Hernie interne. A : TOGD dans le cadre d’une hernie interne montrant un arrêt brusque du produit opaque avec dilatation de l’anseefférente en amont. B et C : Dilatation segmentaire des anses digestives en arrière de la poche gastrique. On visualise correctement le sac herniaireainsi que les veines mésentériques dilatées.

ACB

Fig. 13. — Sténose non anastomotique de l’anse efférente.

Page 10: Imagerie de la chirurgie de l’obésité

66 T. CARAMELLA ET COLLABORATEURS

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Page 11: Imagerie de la chirurgie de l’obésité

IMAGERIE DE LA CHIRURGIE DE L’OBÉSITÉ 67

TEST DE FORMATION MÉDICALE CONTINUE

Imagerie de la chirurgie de l’obésité

T. CARAMELLA, A. GRIMAUD, P. CHEVALLIER, F. DAUSSE, S. NOVELLAS, J.N. BRUNETON

Qu’avez-vous retenu de cet article ?

Testez si vous avez assimilé les points importants de l’article en répondant à ce questionnaire sous forme de QCM.

1. Quelles sont les indications de la chirurgie baria-trique :

A : Motivation réelle du patient ;B : Une obésite stable ;

C : Une maladie de Cushing ;

D : BMI 30.

Réponse(s) :

2. La gastroplastie par anneau ajustable :

A : Présente une morbidité élevée ;B : Ses résultats à long terme sont encore incertains ;

C : Ses principales complications sont la dilatation dela poche gastrique ou la migration de l’anneau ;

D : Le diamètre après calibrage est d’environ 10 mm.

Réponse(s) :

3. La technique de Mason :

A : Présente des résultats en terme de perte de poidsinférieurs à l’anneau ;

B : Est contre indiquée en cas de reflux gastro œsopha-gien ;

C : Est « transformable » en gastric bypass ;

D : Sa principale complication immédiate est l’emboliepulmonaire.

Réponse(s) :

4. Le gastric bypass :

A : Est la technique la plus employée en France ;B : Présente les meilleurs résultats en terme de perte de

poids ;

C : Ses résultats à long terme sont encore incertains ;

D : La poche gastrique mesure 50 ml environ.

Réponse(s) :

5. Les étiologies d’obstruction compliquant un gas-tric bypass sont :

A : Hernie interne ;B : Adhérences ;

C : Sténose grêlique.

Réponse(s) :

Réponses p. 82