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HUGUET Sarah Promotion 2009/2012 Infirmière en 2012 : l’accompagnement du patient « consomacteur » de soin. Travail de fin d'études / rapport de recherche U.E. 5.6 S6 - Analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et professionnelles. Compétence 7: analyser la qualité des soins et améliorer sa pratique professionnelle. Compétence 8: rechercher et traiter des données professionnelles et scientifiques. Institut de Formation Public Varois des Professions de Santé

Infirmière en 2012 : l’accompagnement du patient « … · patient « consom ’acteur » de soin ... préserver leur autonomie et ils étaient ... dépendance créée par une

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HUGUET Sarah

Promotion 2009/2012

Infirmière en 2012 : l’accompagnement du

patient « consom’acteur » de soin.

Travail de fin d'études / rapport de recherche

U.E. 5.6 S6 - Analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et

professionnelles.

Compétence 7: analyser la qualité des soins et améliorer sa pratique

professionnelle.

Compétence 8: rechercher et traiter des données professionnelles et

scientifiques.

Institut de Formation Public Varois des Professions de Santé

Note aux lecteurs :

"il s'agit d'un travail personnel et il ne peut faire l'objet d'une publication en tout

ou partie sans l'accord de son auteur"

Présentation de remerciements :

Je tiens à remercier les deux cadres pédagogiques responsables de notre groupe de

guidance collective pour avoir réussi à orienter chacun vers une manière de travailler le

sujet de son choix et de m’avoir fait prendre conscience que j’avais pris du plaisir à

réaliser ce travail.

Je voudrais remercier mon conjoint pour sa patience, sa sagesse, son amour et sa

compréhension depuis toujours et en particulier ces trois dernières années…

Je voudrais remercier mes parents pour leur présence et leur souci de toujours essayer de

trouver une solution quand je n’en trouve plus !

Ma sœur pour son franc parlé, sa folie, son caractère et sa fragilité.

Mes grand parents pour leur soutien et leur certitude constante et inébranlable en ma

réussite depuis le concours.

Caroline, une amie avec un grand A et une jeune infirmière fabuleuse (merci d’avoir

sauvé mon pouce, sans toi ce mémoire aurait été plus dur à taper!)

Audrey, une vraie rencontre, un cadeau, plein de fausse nonchalance et de talent que la

formation m’a permis de découvrir et qui aura su me faire sourire et rire de tout .

Enfin je voudrais remercier ma mamie qui a toujours été là pour moi et qui, aujourd’hui,

m’apprend encore des leçons d’une manière différente. Sans toi je ne serais pas celle que

je suis, sans toi je ne serais pas devenue l’infirmière que j’espère être demain et surtout le

rester.

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Table des matières

I. Introduction .............................................................................................................. 1

II. La problématique ..................................................................................................... 2

A. Situations interpellantes vécues en stage: .............................................. 3

B. Constat de départ. ................................................................................. 6

III. Intention de recherche .............................................................................................. 9

IV. Recherche documentaire ........................................................................................ 10

a) Informer n’est pas éduquer…...……………………………………….10

b) Le soignant et l’information……………………………..…...……….11

c) L’information, une compétence infirmière……………….……...……13

d) Communication et information……………………………...…...……14

e) Relation soignant/soigné et information………………………………15

f) Respect du principe d’autonomie : rôle et posture du soignant…….....16

g) De la relation à l’accompagnement………………………………...…17

V. Choix de la méthode de recherche ......................................................................... 18

VI. Hypothèse de recherche. ........................................................................................ 19

VII. Conclusion ............................................................................................................. 20

Bibliographie………………………………………...…………………………………….I

Annexe I…………...……………………………………………………………………. III

1

I. Introduction

Le thème que j’ai choisi est l’accompagnement des patients ayant une particularité, celle

d’être consommateur et acteurs de soins; formelle ou non, l’éducation et l’information

reçues par ces patients au cours de leur vie, de leur histoire avec leur maladie leur a

permis d’acquérir des connaissances et un savoir faire les rendant d’une part, autonomes

dans leurs soins et d’autre part, critiques et demandeurs quant aux nouveaux soins que

nous leur prodiguons.

Ces patients sont à l’image de l’évolution de la demande de santé :

le vieillissement de la population, l’augmentation des pluri pathologies ainsi que des

pathologies chroniques parallèlement à une demande grandissante des patients

d’informations sur leur santé, le tout dans un contexte économique difficile ou le

raccourcissement de la durée moyenne de séjour cohabite avec l’exigence de qualité des

soins, la médiatisation des classements des hôpitaux et cliniques ainsi que celle de la la

judiciarisation des conflits patients/personnel médical.

L’ensemble de ces facteurs ayant peu à peu révolutionner la relation soignant-soigné.

L’intérêt professionnel de cette recherche est tout d’abord son encrage dans l’actualité,

apporter le point de vue du monde infirmier sur un phénomène que certains médecins ont

déjà analysé dans leur pratique, mais surtout l’intérêt majeur est sa transférabilité; il ne

s’agit pas de parler d’un pathologie type dans un type de service bien spécifique mais de

parler d’un genre de patient émergent que l’on retrouvera de plus en plus fréquemment

dans tous les secteurs de la santé, un phénomène en plein extension, une réflexion sur la

pratique actuelle et celle demain.

L’axe que j’ai choisi pour travailler mon sujet est :

Soins infirmiers et accompagnement de l'usager et/ou de son entourage

Les limites de mon travail sont :

le fait de pas avoir eu la possibilité d’intégrer de façon concrète mon dispositif de

recherche et ne pas l’avoir réalisé sur le terrain : il m’est donc difficile de mesurer à la

fin de mon travail si mon hypothèse est vérifiée ou non, et d’établir de façon statistique le

lien de causalité sur lequel repose mon travail,

mais aussi le peu de références et littérature infirmière sur le sujet encore très récent.

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Je vais tout d’abord, au travers de situations interpellantes vécues en stage procéder à

l’identification de la problématique, à l’issue d’un premier constat et d’une recherche

documentaire initiale, je vais présenter le contexte et l’objet de ma recherche à savoir

l’infirmière et le patient « consom’acteur ». Mon intention de recherche étant d’identifier

les enjeux du nouveau rôle infirmier dans l’accompagnement des patients

« consomm’acteurs » de soins, ma recherche documentaire principale va me permettre de

dégager mon hypothèse de recherche : L’évolution du statut des patients vers le statut de

« consom’acteurs » de soins influence l’infirmier dans son rôle d’accompagnement.

Puis j’exposerai la méthode de recherche que j’ai choisie à savoir une méthode

quantitative de type expérimentale. En conclusion, je reprendrai les principales lignes de

mon travail, ses limites et proposerai des perspectives et ouvertures nouvelles.

II. La problématique

Tout au long de mes trois années d’études, j’ai régulièrement été amenée à

prendre en charge des patients, qui avaient un point commun: une pathologie chronique

ou récidivante, un handicap, ou un traitement au long court qu’ils connaissaient très bien

et qu’ils géraient seuls ou presque. Et même au décours d’une hospitalisation pour un

autre problème de santé, une complication ou un changement de contexte de vie, ils

insistaient pour garder le contrôle de leurs soins, préserver leur autonomie et ils étaient

très demandeurs d’informations et de renseignements concernant leur état de santé actuel,

leurs soins… Ils s’agissaient également de patients ayant parfois la particularité d’être

soignants eux-mêmes ou soignants à la retraite; j’ai eu une certain nombre d’infirmières

ou de médecins parmi ces patients. Mais, issus du milieu médical ou non, ils ont marqué

mes souvenirs d’élève infirmière par leur volonté de préserver leurs acquis dans la

dépendance créée par une nouvelle prise en charge. C’est ainsi que j’ai pu prendre en

charge par exemple :

En service de psychiatrie une patiente dépressive, qui effectuait seule ses auto-sondages

urinaires évacuateurs et ses lavements évacuateurs depuis une chute de cheval ayant

entrainé un syndrome de la queue de cheval, un an plus tôt ;

Que j’ai pu intervenir au domicile d’un jeune homme de 21 ans paraplégique suite à un

accident de scooter qui effectuait quasiment seul ses soins d’urostomie ;

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Mais également être formée par une patiente sur sa dialyse péritonéale qu’elle continuait

à effectuer seule (alors qu’elle était en réanimation cardiaque) et ce jusqu’à la veille de

son décès.

C’est ce fil rouge tout au long des rencontres avec ces patients vers lequel j’aimerais

orienter le cheminement de ma recherche.

J’ai décidé de choisir les deux situations suivantes afin de démarrer et construire et mon

questionnement.

A. Situations interpellantes vécues en stage:

1ère situation : au sein d’un service de chirurgie thoracique et vasculaire d’un hôpital de

la région lors de ma première semaine de mon premier stage, de ma première année de

formation en soins infirmiers.

J'étais en salle en soins en train de remplir les dossiers quand une dame dont je

connaissais l’identité est entrée et m'a demandé si j'étais seule et où étaient les

infirmières. Je me suis présentée et je lui ai demandé pourquoi elle était là et si je

pouvais l’aider. Elle s’est présentée : il s’agissait d’une ancienne infirmière du service

tout juste retraitée, elle semblait très algique et soucieuse, elle m’a expliquée qu’elle avait

glissée sur des feuilles mortes pendant un footing une semaine plus tôt et s’était tapée la

cuisse très violemment au sol; selon ses propos, elle avait fait l’erreur d’attendre un peu

trop alors qu’ayant travaillé dans ce service pendant des années elle savait ce qu’elle

risquait… Elle me demanda si je pouvais aller chercher un des médecins du service lui

disant juste son nom et qu’elle pensait avoir un « épanchement séreux de Morel-

Lavallée »; j’ignorais totalement ce dont il s‘agissait. J’ai donc d’abord averti une des

infirmières du service occupée en chambre de la présence de sa collègue, elle m’a

demandé de biper le médecin et d’installer la patiente en salle de consultation. Le

médecin est arrivé très rapidement et m’a demandé de rester, j’ai aidé la patiente à

s’installer et à se dévêtir, le médecin a confirmé le diagnostic, et la nécessité qu’elle soit

opérée dans la journée et m’a dit de faire un nettoyage à la Bétadine et un pansement,

(il ignorait mon niveau de formation et que je n’avais même jamais ouvert un set à

pansement…), la patiente m’a alors demandé mon prénom, en quelle année de formation

j’étais, et le médecin est parti. Je lui ai proposé de retourner voir si une de ses ex-

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collègues s’était libérée afin de lui faire le soin. Elle m’a dit qu’elle allait me dire quoi

faire, comment le faire et m’a aidée pour la réalisation de son pansement.

C’est ainsi qu’elle m’a expliquée ce qu’elle avait, et ce qui allait être fait, les soins qu’elle

aurait et les traitements et les surveillances en lien…Elle fut hospitalisée immédiatement

et opérée dans l’après midi. Elle resta cinq jours durant lesquels elle insista auprès de ses

collègues pour que je fasse ses soins quand cela était possible avec une autre infirmière

car le pansement était assez complexe; pour la plupart des autres soins (la surveillance

des drains, la température, les injections, la toilette), elle était autonome, elle demandait

les résultats de ses bilans et de ses derniers examens et travaillait quasiment en

collaboration avec les autres infirmières (ses ex-collègues); elle connaissait le service et

l’hôpital par cœur, ce fut une expérience vraiment originale et cette patiente différente

m’a beaucoup appris.

Deuxième situation: au sein d’un service de réanimation cardiaque d’un hôpital de la

région, lors de ma troisième année d’études.

un patient est annoncé entrant dans le service, le nom du patient donné par le Service

Mobile d’Urgence et de Réanimation fit réagir l’équipe qui m’informa qu’il était connu

du service. Ce patient âgé d'une soixantaine d'année avait présenté à son domicile une

douleur thoracique typique et avait été admis en coronarographie. L’angioplastie

coronaire transluminale n'avait retrouvé aucune lésion nouvelle des coronaires et la

fermeture de l'artère fémorale droite avait été effectuée par fermeture par ANGIOSEAL

(système qui ne nécessite pas de pansement compressif), ce qui, habituellement, n’est pas

surveillé en post opératoire en unité de soins intensifs cardiologiques. La majeure partie

du temps, ils sont pris en charge en service de cardiologie classique. Or, le médecin ayant

réalisé la coronarographie, a demandé son admission dans le service assez rapidement.

J'ai effectué l'entrée de Mr M., qui m’a demandé si j’étais une nouvelle infirmière. Je me

suis présentée, il s’est alors annoncé comme « un habitué du service », ce que l’infirmière

a confirmé, m’expliquant que Mr M. était un patient coronarien connu du service qui

avait déjà été hospitalisé de nombreuses fois notamment pour trois infarctus et totalisait

sept stents coronariens, et que ce patient (du fait de son expérience personnelle, de ses

antécédents, de son statut de patient cardiaque et diabétique insulino-dépendant

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chronique) avait une connaissance et une maîtrises très avancées de ses pathologies, de

ses traitements et des soins prodigués. En effet Mr M. était un des patients ayant participé

au programme d’éducation thérapeutique des patients coronariens animé par une des

infirmières du service ainsi qu’à l’éducation thérapeutique proposée par la maison du

diabète. Il avait perdu près de vingt kilos depuis son premier infarctus qui a eu lieu douze

ans plus tôt et avait arrêté le tabac au deuxième infarctus; il avoua lui-même qu’il ne

pensait pas pouvoir vivre aussi bien avec de tels antécédents mais qu’il allait être en

retraite cette année et comptait bien en profiter.

Le service étant constitué de box ouverts, tous communicants autour d'un bureau central,

il a la particularité de permettre aux patients de voir et d'entendre tout ce qui est fait et dit

sur les autres patients parfois, mais surtout sur eux même. Architecture qui demandait

une attention encore plus grande qu’ailleurs pour le respect de la dignité, de la pudeur, de

la discrétion et surtout du secret professionnel.

Au cours des soins des deux jours suivants, Mr M était stable et très participatif.

A l’admission, je lui avais expliqué le fonctionnement du service et le déroulement de

l’hospitalisation et il avait remarqué les changements et les évolutions avec étonnement.

J’avais pris l’habitude, comme cela est fait dans le service, de lui expliquer mes gestes et

mes soins mais il anticipait chacun de mes mouvements et me donnait lui-même ses

constantes et son évaluation de la douleur; il était pour autant très agréable et demandeur

d'information sur son état de santé, sur ses traitements, sur les résultats de ses bilans, de

ses examens et utilisait un langage médical clair et précis, ce qui me mit parfois en

difficulté n’ayant pas l’habitude de donner autant d’informations aux patients, mais

l’équipe et le Médecin n’y virent aucune objection. Mr M était également très au fait de

ses droits et avait d’ailleurs lui-même demandé pendant l’intervention (durant laquelle les

patients sont éveillés ) au médecin de faire tout son possible pour pouvoir utiliser une

fermeture par ANGIOSEAL plutôt qu’une fermeture classique (ce type de fermeture

permet également par l’absence de compressif un premier lever précoce). Mr M insistât

pendant toute son hospitalisation pour faire ses soins (toilette, contrôles de sa glycémie,

injections d’anticoagulants et gestion de son insulinothérapie) seul, sous nos yeux, ce qui

lui fut accordé. Notre rôle à ses cotés était différent, la relation avec l’équipe très

particulière.

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B. Constat de départ.

Les points communs de ces deux situations et de toutes celles rencontrées en

stage m’ont amené à m’interroger sur la prise en charge infirmière d'un patient ayant des

connaissances et des compétences avancées sur leur pathologie.

De nos jours les chiffres cumulés des patients chroniques, ceux atteints d’une

affection de longue durée et ceux atteints d’un handicap physique ou psychique

entrainant des soins quotidiens sont en constante augmentation, (mais il m’a été

impossible d’accéder à un nombre exact, la plupart de ces chiffres étant regroupés par

pathologie ou affection). Parmi tous ces patients, de plus en plus sont très avisés, et on

peut reconnaitre leurs compétences sur leur pathologie et que leurs besoins et leurs

attentes sont un peu différentes des autres patients.

Qu’en est-il alors de notre prise en soin ?

Comme pour chacun des patients que nous prenons en charge, la connaissance de «qui est

le patient ?» est l’un des fondements de notre métier pour une prise en charge du patient

dans sa globalité.

« Que sait-il ? », « que sait-il faire ? » sont des questions qu’il semble falloir de plus en

plus souvent se poser pour communiquer et proposer des soins de manière adéquate.

J’ai donc, au travers de mes premières lectures, exploré le rôle de l’infirmière dans

l’information du patient, tout d’abord dans des travaux antérieurs : «le rôle essentiel de

l’infirmière consiste à aider l’individu malade, ou en santé, au maintien ou au

recouvrement de la santé par l’accomplissement de tâches dont il s’acquitterait lui-

même s’il en avait la force, la volonté , ou possédait les connaissances nécessaires, et

d’accomplir ces fonctions de manière à l’aider à reconquérir son indépendance le plus

rapidement possible.» (V.HENDERSON, 1955 citée par C.BRAISSANT, 1990, page 15),

ce qui m’a permis d’affirmer que l’information est un soin à part entière , que préserver

les acquis du patient et en construire de nouveaux font parti de notre rôle quotidien.

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Ensuite j’ai questionné la définition de son rôle actuel, comme le définit le décret des

compétences infirmières, dans l’article R 4311-1 du Code de la santé publique

«L'exercice de la profession d'infirmier ou d'infirmière comporte l'analyse,

l'organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la contribution au

recueil de données cliniques et épidémiologiques et la participation à des actions de

prévention, de dépistage, de formation et d'éducation à la santé.»

Ce qui m’a amené à m’interroger sur la limite entre information et éducation

ainsi que sur la nature des informations communiquées aux patients par les infirmières, ce

que je traiterai dans ma recherche documentaire.

Selon BRAISSANT C.(1990), page 18 "(...)on admet généralement que le patient a le

droit d'être traite avec " humanité et respect", ce qui peut sous-entendre un droit a

l'information sur ce qui arrive à son propre corps et une aide pour retrouver

l'indépendance. Être traité avec respect et humanité signifie aussi que la perte plus ou

moins complète de l'indépendance physique ne met pas fin à l'indépendance morale et au

pouvoir de l'individu en ce qui le concerne. Plus le patient est renseigné sur son état, son

traitement, ses soins par ceux qui le soignent, plus il est apte à donner un avis

raisonnable ", cette idée est une des composantes fondamentales de l’évolution des droits

des patients et l’un des fondements de l’introduction du consentement éclairé.

Voulant mettre un nom sur les patients dont je parle, je me suis donc tournée vers

les références actuelles, selon GUIMELCHAIN-BONNET .M.(2010) , page 9 ,

« Certaines personnes atteintes de maladies chroniques sont devenues de véritables

partenaires avec lesquels le processus de soins est construit. Ce sont les patients

experts. ».En effet, après diverses lectures parlant du patient expert, j’ai du écarter ce

terme pour définir les patients dont je parle. Bien que très proche dans le fond, le terme

est déjà utilisé, surtout pour définir les patients référents formés par des associations de

patients, afin de faire partager leur savoir auprès d’autres patients dans le cadre de

l’éducation thérapeutique. Ce n’est pas le cas de la majorité des patients dont je parle,

bien que beaucoup d’entre eux auraient pu remplir ce rôle.

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Dés 1990, BRAISSANT C. page 16 souligne que " (...)le client demande de plus en plus

d'informations, habitué à l'usage des média; les droits des "patients consommateurs "

s'affirment " , ce qui prouve que le phénomène n’est pas nouveau, mais je ne parle pas de

patients s’étant forgé une culture et un savoir « médical » en regardant des émissions de

télé ou des forums sur internet (bien qu’il s’agissent également de patients nouveaux dont

la prise en soin sera également très particulière).

Pour ma part, aujourd’hui, trouvant les termes « client », « usager » ou encore

« personne hospitalisée » trop éloignés des patients que je décris, j’ai décidé d’emprunter

un terme au marqueting actuel et dont on commence à entendre parler :

le « consom’acteur de santé ou de soins».

Les termes consommateurs et acteurs n’étant pas issus du monde médical ou infirmier, je

me suis permise d’en prendre les définitions suivantes dans LE PETIT LAROUUSE

ILLUSTRE, 2005 :

Page 57« Acteur,trice .nom. Personne qui prend une part déterminante dans une action »

Page 284 « Consommateur, trice.nom. Personne qui achète ou consomme des biens ou

des services » et « Consommer. verbe transitif. (latin consummare). Faire usage de

quelque chose pour sa subsistance »

Ainsi le « consom’acteur » de soins est un genre de patient émergent qu’il semble falloir

désormais prendre en compte dans nos pratiques, en effet, l’apport législatif, le contexte

socio-économique, l’évolution de la demande et de l’offre de soins ont rendu au patient

son statut de citoyen grâce notamment à la loi dite de « démocratie sanitaire ». Les

patients dont je parle ont maintenant à disposition les outils et les moyens d’accéder à une

information claire et sont libres de choisir leur établissement de soins ( exception faite

d’une prise en charge dans le cadre de l’urgence).

Il peut également s’agir de patients autonomisés après avoir bénéficié d’éducation

thérapeutique formelle dans le cadre d’une pathologie chronique, ou de patients

autonomes vivant à domicile et qui ont tissé, avec leur médecin traitant, une relation de

collaboration, qui se sont intéressés, documentés, et qui ont joint des associations de

patients afin de permettre leur émancipation .

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Ce sont des patients qui sont d’une part, (par leur capacité à « s’auto-soigner »), acteur

de leurs soins et de leur santé pour vivre avec leur(s) maladie(s), et d’autre part,

consommateur; l’aspect économique des soins étant devenu une réalité quotidienne pour

les soignants et les patients. Ils font partis d’une politique nouvelle ou leur parcours de

soins, leur histoire de leur(s) maladie(s) les ont amenés à connaitre leurs droits en ce qui

concerne leurs choix, leurs possibilités, leurs soins et d’en prendre toute la mesure.

Cette exploration documentaire initiale m’a permis de m’apercevoir qu’il semble

pertinent et intéressant d’explorer la relation soignant/patient « consom’acteur de soins »,

quelques témoignages parlent de ce nouveau «ménage à trois» en pleine expansion, ou la

connaissance du patient est parfois le troisième protagoniste de cette triade

patient/médecin/information dans laquelle, le patient apporte de l’information, des

questions au médecin, mais encore peu de témoignages sur ce que cela change pour les

infirmières.

J’ai donc trouvé intéressant de l’explorer du point de vue infirmier, et de m’intéresser à

l’évolution de la posture de l’infirmière, de son rôle, parallèlement à l’évolution des

patients, ce que je ferai dans ma recherche documentaire.

Il est temps maintenant de poser l’intention de ma recherche.

III. Intention de recherche

A l'heure de l'internet mobile et de l'accès permanent des patients à des sources

d'informations multiples concernant leur pathologie, les soins, les traitements, les

complications mais également l’évolution de leurs droits et des recommandations en

matière d’information, mon intention de recherche est d'expliquer l'évolution du rôle de

l'infirmière dans la prise en charge spécifique du patient « consom’acteur » de soins.

10

IV. Recherche documentaire

Comme nous venons de le voir, le statut des patients est en constante évolution, ils

sont en demande d’un service de soin, ils formulent des attentes, choisissent de plus en

plus leur praticien, leur établissement de soins, sont impliqués et aidés dans les décisions

de santé les concernant. Ils sont ancrés dans un processus d’autonomisation et je

m’interroge alors sur le rôle de l’infirmière dans la prise en charge de ces patients.

Il est donc temps d’éclairer quelques points conceptuels et théoriques pour

analyser mon questionnement et le poursuivre au travers de la recherche documentaire.

a) Informer n’est pas éduquer.

Ne voulant pas axer mon travail sur le rôle de l’infirmière lors de l’éducation

thérapeutique du patient, qui est un tout autre sujet, mais sur l’information et parfois

l’introduction à l’éducation (formelle et/ou informelle) que nous apportons aux

quotidiens à ces patients, (et qu’ils nous apportent parfois également), il m’a semblé

judicieux de cibler tout d’abord l’objet de ma recherche en définissant l’éducation

thérapeutique et de définir ensuite la nature de l’information dont il est question.

Selon l’OMS1, « l’éducation thérapeutique du patient vise à aider les patients à

acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie

avec une maladie chronique. Elle fait partie intégrante et de façon permanente de la

prise en charge du patient. Elle comprend des activités organisées, y compris un soutien

psychosocial, conçues pour rendre les patients conscients et informés de leur maladie,

des soins, de l’organisation et des procédures hospitalières, et des comportements

liés à la santé et à la maladie. Ceci a pour but de les aider (ainsi que leurs familles) à

comprendre leur maladie et leur traitement, collaborer ensemble et assumer leurs

responsabilités dans leur propre prise en charge dans le but de les aider à maintenir et

améliorer leur qualité de vie. Une information orale ou écrite, un conseil de prévention

peuvent être délivrés par un professionnel de santé à diverses occasions, mais ils

n’équivalent pas à une éducation thérapeutique du patient. »

1 Rapport de l’OMS-Europe, publié en 1996, Therapeutic Patient Education – Continuing Education

Programmes for Health Care Providers in the field of Chronic Disease, traduit en français en 1998.

11

Cette définition encadre et limite ce qu’est l’éducation thérapeutique mais il n’existe pas,

à ma connaissance, de cadre pour ce qui ne relève pas de l’éducation thérapeutique, à

savoir cette information et cette éducation du patient au quotidien. De plus, comme le

souligne GUIMELCHAIN-BONNET .M. (2010) , page 9 et 10, « La loi « Hôpital,

patient, santé et territoires » impose que les programmes d’éducation thérapeutiques

soient rédigés à la fois par les patients et les soignants, dans une démarche de co-

réflexion et de co-rédaction, aussi bien pour la conception des programmes que pour leur

mise en œuvre ». Or, apprendre à un patient comment se mobiliser pour éviter le risque de

luxation après une pose de prothèse totale de hanche comme plein d’autres conseils et

informations transmises, peut être un thème d’un atelier d’éducation thérapeutique. Mais

si l’établissement de santé accueillant ce patient n’en possède pas, cette information

relèvera du rôle propre de l’infirmière et constitue un transfert de savoir informel ou

formel (la distribution de livret d’information au patient ne se fait pas exclusivement lors

des ateliers d’éducation thérapeutique). Relevant tantôt de la prévention ou de l’éducation

pour la santé ou de l’information, ce que nous transmettons quotidiennement n’entre pas

dans le cadre spécifique de l’éducation thérapeutique du patient, et les objectifs sont bien

différents."L'information, les explications, l'enseignement, conduisent à la

communication au sujet du déroulement de la maladie et des soins nécessaires , aident à

faire face de manière réaliste à la situation( …)une information mal faite peut-être aussi

anxiogène que l'absence d'information, une erreur d'enseignement peut être aussi grave

qu'une erreur dans l'application d'un traitement. Il est donc essentiel que l'infirmière

possède des connaissances exactes, précises, actualisées, sur le sujet qu'elle enseigne, et

qu'elle sache transmettre un message de manière adaptée à l'interlocuteur"

(BRAISSANT.C(1990) page 19).

Ainsi, informer, expliquer et communiquer demandent des compétences particulières et

d’autant plus envers le patient « consom’acteur ».

b) Le soignant et l’information.

"Informer, créer une relation de confiance permet au malade de questionner, lui faire

sentir que ses réactions sont acceptées, diminue les craintes et augmente les possibilités

de communiquer au sujet de la maladie et de ses conséquences, des risques pour la santé,

12

les dangers et donc d'apprendre " (ibid, page 43), tels sont les intérêts et les objectifs de

l’information formelle ou informelle que nous pouvons transmettre au patients.

Il serait même plus adéquat de dire que nous nous devons légalement et

déontologiquement, de la transmettre car l’Article L1111-2 du Code de la santé publique

(modifié par la Loi n°2002-303 du 4 mars 2002) précise que « Toute personne a le droit

d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes

investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur

urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement

prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les

conséquences prévisibles en cas de refus. (…). Cette information incombe à tout

professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles

professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer

peuvent l'en dispenser(…). Cette information est délivrée au cours d'un entretien

individuel. La volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou

d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de

transmission.(..)Des recommandations de bonnes pratiques sur la délivrance de

l'information sont établies par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé

et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé. En cas de litige, il appartient

au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a

été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut

être apportée par tout moyen. »

Cet article nous donne la nature des informations que le patient est en droit de recevoir et

comme nous l’avons défini auparavant, dans le cadre de son rôle propre; il est donc

également du champ de compétence de l’infirmière de prendre part à l’information

donnée au patient, il nous informe également que l'Agence Nationale d'Accréditation et

d'Evaluation en santé propose des recommandations.

Or, à ce jour, sauf erreur de ma part, je n’en ai pas trouvé à destination spécifique des

infirmières.

D’après BRAISSANT C.(1990) page 20," les besoins d'informations et d'enseignement

sont immenses dans le domaine de la santé ; aucun corps professionnel n'est seul

concerné par la réponse à ces besoins(.. ) par exemple, il est du domaine du médecin de

13

renseigner le malade sur la maladie et les traitements possibles; il est du domaine de

l'infirmière d'enseigner au patient à appliquer le traitement prescrit, et de l'aider à

trouver les ressources nécessaires pour retrouver l'indépendance dans les activités de la

vie quotidienne", le médecin restant l’interlocuteur de référence concernant les

informations médicales, notamment l’annonce du diagnostic et le choix proposé au

patient d’une direction thérapeutique. Pour autant, l’exemple du rôle infirmier dans le

dispositif d’annonce de la mesure 40 du plan cancer 2003-2007 intitulé « temps

d’accompagnement soignant » traduit une reconnaissance du savoir-faire infirmier

complémentaire à celui du médecin dans l’intérêt du patient. Il est primordial d’être

capable de discerner à tout moment si la nature de l’information que l’on donne relève de

notre compétence ou non.

c) L’information, une compétence infirmière.

L’une des toutes premières missions de l’infirmière préalable à la communication de

manière générale, mais en particulier lors de la communication d’informations, semble

donc reposer sur le recueil et l’évaluation des besoins, des demandes, des connaissances

et des compétences du patient. Cette analyse de « qui est mon patient ? » débute dès

l’entretien d’accueil du patient et s’enrichit à chacun des échanges.

L’évaluation des capacités cognitives, des capacités de communication et de l’état

psycho-affectif est primordial sans omettre que certains patients font parfois le choix de

ne pas connaitre leur pathologie (l’introduction de la personne de confiance est alors

indispensable comme l’a prévu la loi de démocratie sanitaire).

La réforme de la formation infirmière via l’annexe 1 de l’arrêté du 31 juillet 2009 relatif

au diplôme d’état d’infirmier a décliné le savoir faire de l’infirmière au travers de

compétences et d’activités et l’obtention du diplôme est dorénavant conditionné par

l’obtention de l’ensemble de ces compétences. En ce qui concerne l’information des

patients dans le cadre de référence qui concerne mon sujet, il s’inscrit de façon

transversale dans les activités suivantes : « 1. Observation et recueil de données cliniques

2. Soins de confort et de bien-être 3. Information et éducation de la personne, de son

entourage et d’un groupe de personnes 4. Surveillance de l’évolution de l’état de santé

des personnes», et plus particulièrement dans la compétence 5: « initier et mettre en

14

œuvre des soins éducatifs et préventifs », compétence qui valorise les dimensions

préventives et éducatives du soin infirmier dans une culture de santé publique et qui ne

correspond pas uniquement à l’éducation thérapeutique au sens strict du terme car comme

le précise BRAISSANT.(1990) page 22," dans la plupart des situations, le patient et son

entourage peuvent bénéficier d'un enseignement informel, transparaissant dans les

explications données pendant les soins, au moment de la distribution des médicaments,

de la préparation aux examens, etc. L'apprentissage informel est constitué de tout ce que

nous apprenons par le simple fait d'avoir des yeux, des oreilles, et de les ouvrir sur les

gens , les choses et les circonstances que nous rencontrons . L'enseignement est la

plupart du temps bref, il porte sur un seul élément, il est d'autant plus efficace qu'il est

immédiatement applicable et utile à la personne qui le reçoit."

Autrement dit, cet enseignent informel pourra également être produit par l’ensemble des

soignants en collaboration autour du patient, chacun ayant à son niveau de compétences

un savoir spécifique à transmettre, chacun ayant son propre rôle à jouer et sa propre façon

de communiquer.

d) Communication et information.

De la même façon que nous avons précédemment évoqué la nature de l’information, et la

nécessité d’évaluer l’interlocuteur pour communiquer de façon adaptée et adéquate, il

existe parfois un obstacle supplémentaire à la communication. En effet, le

« consom’acteur » peut selon la phase d’acceptation de la maladie,( suite à une évolution,

une aggravation ou une complication, de son état de santé) ne plus souhaiter l’être.

BRAISSANT C.(1990), page 22 souligne que " dans toutes les situations, le client et son

entourage ont besoin d'information. L'information est d'autant plus efficace qu'elle est

courte, exacte, précise, non anxiogène, donnée en termes compréhensibles et au bon

moment ", il est préférable alors d’identifier le « bon moment », le bon langage, le bon

support mais également les filtres émotionnels qui peuvent rendre le « consom’acteur »

incapable à un moment donné de continuer à investir son son rôle pleinement comme le

précise le schéma proposé par CURCHOD,C. (cf. Annexe I).

S’il s’avère, à l’issue de l’analyse des données recueillies par l’équipe, que le

patient semble effectivement être un de ces « consom’acteurs » dont nous parlons, le

15

positionnement de l’infirmière va vers celui d’évaluateur . Elle va prendre le temps de

vérifier si le savoir et les connaissances que le patient possède sont correctes et

actualisées et si la qualité de son savoir-faire en matière d’auto soin vont pouvoir lui

permettre de le laisser faire, « co-construire le soin avec les personnes que nous soignons

implique de vérifier la compréhension de chacun, en refusant de se contenter des signes

extérieurs d’assentiments ou du fait que le vocabulaire nous semble commun »

(CURCHOD.C,(2009),page 55).

D’autant plus qu’en matière de responsabilité juridique, l’infirmière reste responsable des

actes réalisés par le patient et de leurs surveillances. J’ai d’ailleurs eu beaucoup de

difficultés à trouver des informations sur cette responsabilité. Mais la traçabilité de

l’information donnée étant, comme le précise le législateur, une obligation, elle l’est

également en matière de soins et tracer, valider un soin en son nom, alors que c’est le

patient qui le réalise, est le meilleur moyen de se rappeler cela.

Ainsi être compétent en matière d’information au patient, sous entend être compétent en

matière de relation et demande une certaine réflexion sur la perception du soin, celle de

l’infirmière pouvant parfois différer de celle du patient « consom’acteur ». Il faut parfois

accepter de prendre en compte la réalité de ces patients qui n’est pas forcément celle du

soignant, selon BRAISSANT C.(1990) page 37, " certaines études (M.V. Marston , 1970)

suggèrent que la qualités de relations interpersonnelles (patient -médecin, patient -

infirmière) est probablement la principale variable dans la collaboration du patient, et

l'incite à appliquer plus fidèlement les traitements qui lui ont été prescrits . On connaît

d'autre part l'influence de la qualité des relations maître-élevé sur le résultat de

l'apprentissage "

Il faut donc analyser également la nature des relations qui lient le patient

« consom’acteur » au soignant.

e) Relation soignant/soigné et information

L’information par le soignant et la communication du patient sur son vécu de

l’hospitalisation créent un échange, support de la relation. D’après BIOY.A,

BOURGEOIS.F et NEGRE.I, (2003),page 23, « « la relation d’aide », mise en relation

de deux individus dont l’objectif concerne un mieux par le partage de compétences

16

communes », cette définition correspond tout à fait à la relation avec ces patients acteurs

de leurs soins, la relation soignant / soigné qui se crée au travers de l’information relève

autant de la relation de confiance que de la relation d’aide et elles semblent être les

composantes du rapport au « consom’acteurs » de soin et semblent indispensables à

l’infirmière pour sa prise en charge.

« Prendre en charge…. Une expression fréquente dans le monde du soin, qui dépossède

la personne de son autonomie, de ses choix et de ses responsabilités.( …)Le langage est

en lui-même révélateur de ces postures( …)La personne malade (…) doit subir une

intervention… » (CURCHOD C.2009, page 41).Le langage que nous utilisons donc au

quotidien dans la communication avec le patient traduit donc à notre insu une posture

soignante particulière.

f) Respect du principe d’autonomie : rôle et posture du soignant

J’ai donc décidé d’inclure le principe d’autonomie qui est, avec la justice, la

bienfaisance et la non maltraitance, l’un des piliers d’analyse des dilemmes en matière

d’éthique et la base de la réflexion de nos actions et pratiques au quotidien.

Mais cela est avant tout un principe philosophique, introduit par KANT; il s’agit

aujourd’hui de tout autre chose, selon PONTE.C et DE BROCA.A (2010), « la personne

autonome (autonome vient du grec : auto : par soi, en propre et nomos : la loi) est

capable de donner sa propre loi et dire je par lui-même. ( …)Le concept d’autonomie a

été repris pour dire que si la personne rationnelle avait une capacité de se donner une

loi, c’était en vue de choisir sa propre préférence (…)cela élimine ici toute déontologie et

hétéronomie (…) et devrait être traduit par autodétermination »

Ces patients sont en attente du respect de leurs autodéterminations mais notre

travail consiste à réaliser les soins de notre rôle propre et ceux sur prescriptions , il s’agit

donc de les inclure de façon concrète dans nos actes et dans nos soins de manière

participative, alors que nous gardons toute la responsabilité des soins. Il semble donc

essentiel de réfléchir à notre posture de soignant face à ce type de patient particulier où

l’on entre dans un nouveau champ d’expérience . Il faut maintenant savoir faire la

17

différence entre accompagnement et collaboration, pour esquisser le rôle infirmier auprès

de ces « consom’acteurs ».

g) De la relation à l’accompagnement :

" l'infirmière qui introduit un enseignement dans ses soins offre au client un rôle de

partenaire, elle fait preuve de confiance dans les capacités des clients, admet qu'ils sont "

des êtres humains qui ont en eux une capacité naturelle d'apprendre "(C.Rogers, 1972),

admet que leur "investissement par rapport à leur santé est plus grand et plus durable

que le sien, qui ne peut être que temporaire "(F.Storlie,1975), accepte de partager une

partie de ses connaissance, de lever une partie du mystère qui fait parfois son pouvoir, de

déplacer son autorité . C'est un changement de rôle qu'il faut pouvoir assumer et qui

n'est pas toujours facile." (BRAISSANT C.(1990) page 38).

Accompagner le patient « consom’acteur » relève donc autant de l’évaluation, de

l’information, que de la relation et de la communication . Le rôle de l’infirmière apparait

comme différent et il semble donc que l’information soit une partie du « pouvoir » de

l’infirmière et expliquerait donc, peut être, difficulté parfois pour certains soignants de le

partager. Il s’agit d’une évolution des représentations des soignants. Cette disparition du

paternalisme médical revendiqué par les patients année après année, conflits après

conflits, puis loi après loi, a permis de laisser glisser ce pouvoir petit à petit et de rendre à

tous les patients leurs droits fondamentaux. Le patient « consom’acteur » lui, détient

également une partie du savoir mais a, en plus pour lui, le vécu de sa maladie, son

expérience. Nous avançons aujourd’hui vers une complémentarité des savoirs, et la

collaboration association de patients/équipes soignantes semble être un des chemins à

suivre pour forger un savoir commun.

« L’accompagnement : une posture professionnelle spécifique » est un ouvrage

de PAUL .M ,(2004) qui traduit déjà en son titre une première définition de

l’accompagnement et dans lequel après avoir analysé l’accompagnement au travers de

différents secteurs professionnels (et notamment celui de l’accompagnent thérapeutique)

afin d’en retirer des postures communes , l’auteur en arrive à cette nouvelle définition, p

300.: « on pourrait donc définir l’accompagnement par cette dialectique incessante

entre des finalités globales et un fonctionnement procédural et /ou processuel qui se

18

donne pour objet de co-construire un cadre normatif nécessairement provisoire et relatif

puisqu’ancré dans la contingence et le particulier ».

BRAISSANT C.(1990) page 21 souligne que " par l'information, le patient gagne une

certaine compréhension de sa situation, une idée sur la nature de sa maladie et des

traitements qu'on lui propose ; il acquiert les éléments de connaissance nécessaires pour

les accepter (ou non)et pour décider de collaborer à son traitement (ou non). Informer le

patient est en rapport avec le souci de respecter les droits de l'individu de savoir ce qui

lui arrive. Informer peut avoir pour but de diminuer l 'anxiété due à l'inconnu et d'établir

une relation de confiance incarnant à la collaboration ".

Alors la question reste ouverte : collaborer ? accompagner ? quel est le terme adéquat ?

S’agit-il d’une évolution ou d’une révolution de notre pratique quotidienne ?

L’ensemble de ma recherche documentaire n’a pas répondu à l’ensemble de mes

interrogations : comment cerner les divers modes de coopération avec ces patients ?

L’année 2011 avait été intitulée « année des droits du patient », et les changements

apportés par la Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la

qualité du système de santé, sont a priori déjà perceptibles au sein de tous les services.

Qu’en est-il de l’évolution permanente de ces patients « consom’acteur » ayant

progressivement accès à davantages d’information jour après jour ?

A l’issue de ma recherche documentaire, j’ai donc trouvé nécessaire de reformuler mon

intention de recherche qui serait plutôt d’identifier les enjeux du nouveau rôle infirmier

dans l’accompagnement des patients « consomm’acteurs » de soins .

V. Choix de la méthode de recherche

Ayant précédemment constaté une évolution du statut des patient et m’interrogeant sur

l’influence de cette évolution sur le rôle infirmier, en particulier dans l’accompagnement

et l’information aux patients, ma méthode de recherche doit me permettre de quantifier

un phénomène. Il s’agira donc d’une méthode quantitative de type expérimental, mon but

étant d’avantage d’étudier le « comment » du « pourquoi ».

19

Les intérêts de cette méthode sont les suivants:

- obtenir des chiffres en expérimentant une ou plusieurs variables déduites d’une

hypothèse de départ à l’aide d’un questionnaire,

- obtenir des réponses et de confronter les résultats afin d’infirmer ou affirmer

l’hypothèse de départ,

- permettre au chercheur d’être extérieur induisant ainsi une plus grande objectivité

quant aux données recueillies,

- obtenir l’explication des faits observés par la généralisation ou la systémisation .

Les limites de cette méthode sont :

- de ne pas me permettre d’explorer le ressenti au travers du discours des personnes

inclues dans le dispositif

- de risquer de restreindre le nouveau questionnement puisqu’on donne déjà des pistes de

réponses au travers des indicateurs aux personnes interrogées

- de laisser moins de place à la vérité de chaque individu sondé.

VI. Hypothèse de recherche.

L’évolution du statut des patients vers le statut de « consom’acteurs » de soins

influence l’infirmier dans son rôle d’accompagnement.

Cette hypothèse a pour but de vérifier l’influence de deux variables l’une sur l’autre à

savoir :

-la variable indépendante étant l’évolution du statut des patients vers le statut de

« consom’acteur » de soins avec comme indicateurs : demande d’informations,

connaissance de ses droits, auto-soins, autonomie, connaissances médicales avancées .

-la variable dépendante étant l’infirmier dans son rôle d’accompagnement avec comme

indicateurs : recueil de données et évaluation, information, relation d’aide, relation de

confiance, transfert du savoir.

20

VII. Conclusion

L’intention de ma recherche était d’identifier les enjeux du nouveau rôle infirmier dans

l’accompagnement des patients« consomm’acteurs » de soins .

Les principaux apports du travail sur le thème sont d’avoir différencié information et

éducation, d’avoir donné un cadre à l’information qui fait partie des compétences

infirmières, d’avoir établi le lien entre communication, information et relation

soignant/soigné, mais également d’avoir soulevé les rôles et postures du soignant face au

respect du principe d’autonomie dans cette relation d’accompagnement du patient

« consomm’acteurs » de soins et d’avoir encore trouvé de nouvelles pistes de recherches

et des angles à explorer sur le sujet.

L’apport de mon travail pour la profession infirmière est, je pense, qu’il nous fait

réfléchir sur l’information au quotidien, sur l’évolution en cours des patients et sur les

conséquences de cette évolution sur nos rapports avec eux ainsi que sur les enjeux sous

jacents; ce travail nous renvoie à la qualité et à la continuité des soins, à la notion de

travail en partenariat avec les réseaux de soins et aux associations de patients pour que ce

patient « consom’acteur » et nos patients, de manière plus générale, bénéficient d’un

suivi de qualité et d’une prise en soins efficiente peu importe le lieu et le type de structure

que son histoire de vie avec la maladie lui fera parcourir .

Pour ma part, il m’a permis de découvrir ou redécouvrir toutes les notions et éléments à

prendre en compte lors de l’information aux patients, recueillir de façon informelle le

point de vue d’étudiants, de soignants et de mon entourage sur le sujet et de vivre des

débats très enrichissants qui m’ont permis d’étoffer et de construire mon travail mais ce

travail a surtout confirmé mon regard et renforcé ma volonté d’inclure au quotidien

l’information au cœur de mes soins afin de remplir pleinement mon rôle.

Les limites que j’ai pu rencontrer sont celles dont je parle en introduction du travail à

savoir le peu de références et littérature infirmière sur le sujet encore très récent mais

également le regret de ne pas avoir eu la possibilité d’intégrer de façon concrète mon

dispositif de recherche et ne pas l’avoir réalisé sur le terrain, ce qui justifie l’absence de

la réponse à mon hypothèse de recherche au sein de cette conclusion.

21

Pour conclure ce travail, j’aimerai proposer les ouvertures et perspectives suivantes :

L’internet mobile que les patients peuvent consulter à tout moment via leurs téléphones

(ainsi que leurs familles), au sein des services de soins, est également une petite

révolution dans notre pratique à venir qui mérite également réflexion. En ce qui concerne

l’information à proprement parlé, internet étant devenu une source inépuisable, mais pas

toujours fiable, d’informations sur la santé, tant pour les soignants que pour les patients.

Il faut souligner la création à l’initiative d’une organisation non gouvernementale, le

« HONcode » issu de la charte « Health On the Net » qui se propose de labéliser les sites

internet dont l’information est fiable de manière gratuite et basée sur des critères

éthiques, ils travaillent d’ailleurs à ce jour en collaboration avec la Haute Autorité de

Santé. Il y a aussi l’initiative du Conseil International Infirmier (C.I.I.) :« S’appuyant sur

des études montrant que les patients bien informés répondent mieux aux traitements et se

déclarent davantage satisfaits des soins qu’ils reçoivent, le Conseil international des

infirmières (CII) lance aujourd’hui un nouveau programme destiné à renforcer

l’engagement de la profession infirmière dans le domaine de l’éducation et de

l’information des patients. Pour soutenir cette politique, le CII a également annoncé le

lancement d’une campagne d’information intitulée «Patient Talk», campagne qui

consiste en fiches d’information et en un site Internet » .

Aux Etats –Unis, comme souvent, cela va bien plus loin et plus vite que chez nous, (ce

qui n’est pas toujours un mal), avec l’arrivée du site patientslikeme.com, un réseau

social et communautaire, une sorte de « Facebook » des patients, où chacun peut entrer

en contact et échanger avec d’autres patients ayant le même traitement, la même

pathologie ou le même docteur, ce qui (comme au sein de nos associations de patients en

France) permet un formidable moyen de créer un réseau de soutien et de partage au

service des patients; mais ce site donne également, à ses partenaires et sponsors, un accès

aux données des patient, partenaires dont font parties de grandes industries

pharmaceutiques…

D’après GUIMELCHAIN-BONNET .M. (2010) , page 10, « Les systèmes de santé

encouragent les patients à devenir des experts de leur maladie. De ce fait,(…), il permet

à l’Etat d’économiser des sommes importantes : moins de visites chez le médecin et à

l’hôpital, meilleure relation avec le médecin », certaines associations de patients ont

22

formé des « patients experts » afin qu’ils animent eux-mêmes en collaboration avec

l’infirmière et le médecin, les ateliers d’éducations thérapeutiques; certaines universités

ayant déjà ouvert les portes de leurs Diplômes Universitaires d’éducation thérapeutique

aux « patients experts » en exercice. Devant la rapidité de cette évolution et des avancées

en matière de nouvelles techniques de soins et des connaissances, l’infirmière peut alors

être amenée, parfois, à se retrouver face à des patients ayant des connaissance médicales

plus actualisées que les siennes, ainsi dès 2012, va être introduit le programme de

développement professionnel continu (D.P.C.) permettant et obligeant ainsi les

infirmier(e)s (et les aides soignant(e)s) à mettre à jour annuellement leurs connaissances

et ce tout au long de leur carrière. Mais au sein de ce même système de santé, dans le

contexte socio-économique actuel se présentent également aujourd’hui des risques non

négligeables, la santé devient un luxe pour beaucoup de patients qui font d’ors et déjà le

choix pour certains de ne plus se soigner, et pour d’autres de prendre le risque de

l’automédication et de l’auto-soin alors qu’ils n’en ont ni les connaissances ni le savoir

faire.

D’autre part, devant la médiatisation grandissante des procédures judiciaires des patients

à l’encontre des équipes soignantes, va-t-on pouvoir garder ce rapport qui nous lie à nos

patients et continuer à maintenir avec eux cette relation, qui n’est pas encore, je pense,

celle que l’on a avec des simples clients et laisser, le plus d’années possibles, même au

sein des établissement privés, le consumérisme à la porte ?

Les classements des établissements de soins vont-il intégrer une notation de la

satisfaction des patients eux-mêmes à leurs critères de qualités afin de mieux traduire et

reconnaitre le travail des équipes pour leurs patients ?

La fusion de la qualité des pratiques, des recommandations et du cadre législatif va-t-elle

dans les années à venir donner à l’infirmière plus de responsabilité alors que la politique

de santé basée sur une tarification à l’activité ne nous permet pas encore de faire valoir la

quantité de la charge en soin imperceptible et non négligeable que représente le

relationnel avec le patient, qui est, selon moi, l’un des aspects les plus important et

enrichissant de notre travail ?

23

I

Bibliographie

Ouvrages

BIOY, A. ; BOURGEOIS, F. ; et al. Communication soignant-soigné : Repères et

pratiques. France : Réal. 2003.143 pages.(IFSI Formation paramédicales)

BRAISSANT, Claudine. Soigner, c'est aussi informer et enseigner ( Première version

publiée en 1978 sous le titre : l'information et l'enseignement des patients, porte ouverte

à la collaboration). Paris : édition centurion, 1990, 81 pages.(collection "infirmières

d'aujourd'hui" ; n°48).

CURCHOD, Claude . Relation soignants-soignés : Prévenir et dépasser les conflits.

Belgique: Elsevier Masson.2009.212 pages

PAUL, Maela. L'accompagnement , Une posture professionnelle spécifique. France :

L'Harmattan. 2004. 352 pages (savoir et formation)

PONTE, Caréne; DE BROCA, Alain. Législation, éthique et déontologie.France :

Elsevier Masson,2010, 234 pages. (collection « les essentiels en IFSI » volume 4)

Dictionnaires :

Le petit Larousse illustré.100eme édition. France : Larousse,2005.1855 pages.

Revues et articles :

GUIMELCHAIN-BONNET, Michèle. Le patient expert, un partenaire pour le soignant.

L’aide soignante, numéro 115 , Mars 2010, page 9 et 10 ;

Internet :

Site de l’H.A.S., guide méthodologique et recommandations en matière d’éducation

thérapeutique (format pdf), (consulté le 12 Mars 2012)disponibilité et accès :

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/etp_-_definition_finalites_-

_recommandations_juin_2007.pdf

Fondation « la santé sur internet : http://www.hon.ch/home1_f.html consulté le 22/03/12.

Site internet pour l’information des patients crée par le C.I.I. : www.patienttalk.info,

consulté le 22/03/12.

II

Réseau social et communautaire de patients aux Etats-Unis :

http://www.patientslikeme.com/, consulté le 24/03/12.

Texts législatifs et réglementaires.

Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système

de santé. n°54 du Journal Officiel du 5 Mars 2002. Disponible sur :

http://www.legifrance.gouv.fr/

Décret n°2004-802 du 29 juillet 2004 relatif à l’exercice de la profession infirmière.

n°183 du Journal Officiel, 8 août 2004. Disponible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/

Arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’état d’infirmier. n°0181 du Journal Officiel,

7 août 2009. Disponible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/

III

Annexe I

Selon CURCHOD. C (2010) , page 43 « Parfois le choc émotionnel lié à l’annonce d’un

diagnostic peut provoquer une inhibition complète des capacités de mémorisation, quelle

que soit la qualité des explications données (figure 7) et même si les patients manifestent

de singes de compréhension »

Figure 7: Crise, capacité d'écoute et d'adaptation

Capacité d’écoute et

d’adaptation

Evénement déclencheur

Temps

IV

ABSTRACT

Infirmière en 2012 : l’accompagnement du patient « consom’acteur » de soin.

De nos jours, de plus en plus de patients sont très avisés. On peut reconnaitre leurs

compétences sur leur pathologie et leur savoir faire en matière de soins. Leurs besoins et

leurs attentes sont un peu différentes des autres patients. Ce sont les patients

« consom’acteurs ». Mon intention était d’identifier les enjeux du nouveau rôle infirmier

dans leur accompagnement. Différenciant information et éducation, puis explorant

l’information comme compétences infirmière. J’ai établi le lien entre communication,

information et relation soignant/soigné, entre les rôles et les postures du soignant et la

relation d’accompagnement. J’ai posé l’hypothèse que l’évolution du statut des patients

vers le statut de « consom’acteurs » de soins influencerait l’infirmier dans son rôle

d’accompagnement. La méthode qui a été choisie est quantitative de type expérimental.

Mots clefs : Patient «consom’acteur»

Information

Rôle infirmier

Relation

Accompagnement