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Mme Vera SONGWE, Directrice des Opération Banque Mondiale Corniche ouest x Léon Gontran Damas BP 3296 - Dakar Dakar, juin 2012 Des solutions durables face à l’inondation de la banlieue de Dakar Mme la Directrice des Opérations, Les populations inondées de la banlieue de Dakar, le CADDTK, les ONGs urbaMonde, urbaSénégal, Enda 3D et l’Institut Africain de Gestion Urbaine, souhaitent par la présente lettre attirer l’attention de la Banque Mondiale sur les causes de l’inondation progressive de 300'000 personnes dans la banlieue de Dakar au cours des dix dernières années. Cette lettre a pour objectif de mettre en lumière comment l’inexécution de mesures compensatoires préconisées dès 1995 a conduit à l’inondation des populations les plus défavorisées des Villes de Pikine et Guédiawaye, inondations dont l’impact se chiffre en milliards FCFA de dommages 1 et dont les conséquences s’aggravent chaque année. Cette lettre vise, d’une part, une mobilisation immédiate des montants nécessaires à l’exécution de la phase 2 du projet de reprise des forages de Thiaroye 2 à travers une procédure accélérée de passation des marchés. Elle vise, d’autre part, à initier une restructuration urbaine des zones sinistrées de Pikine Irrégulier Nord et Guédiawaye, corrélée à un projet d’assainissement semi- collectif de la zone. L’ensemble de cette démarche 3 a été présenté au Président de la République du Sénégal le 4 août 2010 et approuvé par réunion interministérielle le même jour. 1 Rapport d’évaluation des besoins post catastrophe : inondations urbaines à Dakar 2009, PDNA, Banque Mondiale, Nations Unies, Commission Européenne, 2010 2 « Total Phase 2 : 5’011 mio. FCFA », ‘Mobilisation de ressources en eau alternatives pour l’irrigation dans la région de Dakar’, Etude d’avant-projet détaillé, SONES, Cabinet Merlin, 2008, p.119 3 Programme de Mitigation des Inondations de Thiaroye, Dossier Diagnostic, Urbanistes Sans Frontières International, 2009

Inondations de Dakar : Lettres ouvertes à la Banque Mondiale

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300'000 personnes inondées pour l'inexécution des mesures complémentaires aux projets sectoriels eau potable ! Donner à boire aux habitants c'est bien... éviter que cette eau potable fasse remonter la nappe phréatique de 3m en l'absence de réseau d'assainissement c'est mieux... La solution adoptée : utiliser l'eau en excès pour l'irrigation agricole : vers une écologie industrielle à l'échelle territoriale...

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Page 1: Inondations de Dakar : Lettres ouvertes à la Banque Mondiale

Mme Vera SONGWE,

Directrice des Opération Banque Mondiale

Corniche ouest x Léon Gontran Damas BP 3296 - Dakar

Dakar, juin 2012

Des solutions durables face à l’inondation de la banlieue de Dakar

Mme la Directrice des Opérations,

Les populations inondées de la banlieue de Dakar, le CADDTK, les ONGs urbaMonde, urbaSénégal, Enda 3D et l’Institut Africain de Gestion Urbaine, souhaitent par la présente lettre attirer l’attention de la Banque Mondiale sur les causes de l’inondation progressive de 300'000 personnes dans la banlieue de Dakar au cours des dix dernières années.

Cette lettre a pour objectif de mettre en lumière comment l’inexécution de mesures compensatoires préconisées dès 1995 a conduit à l’inondation des populations les plus défavorisées des Villes de Pikine et Guédiawaye, inondations dont l’impact se chiffre en milliards FCFA de dommages1 et dont les conséquences s’aggravent chaque année.

Cette lettre vise, d’une part, une mobilisation immédiate des montants nécessaires à l’exécution de la phase 2 du projet de reprise des forages de Thiaroye2 à travers une procédure accélérée de passation des marchés. Elle vise, d’autre part, à initier une restructuration urbaine des zones sinistrées de Pikine Irrégulier Nord et Guédiawaye, corrélée à un projet d’assainissement semi-collectif de la zone. L’ensemble de cette démarche3 a été présenté au Président de la République du Sénégal le 4 août 2010 et approuvé par réunion interministérielle le même jour.

1 Rapport d’évaluation des besoins post catastrophe : inondations urbaines à Dakar 2009, PDNA, Banque Mondiale, Nations Unies, Commission Européenne, 2010

2 « Total Phase 2 : 5’011 mio. FCFA », ‘Mobilisation de ressources en eau alternatives pour l’irrigation dans la région de Dakar’, Etude d’avant-projet détaillé, SONES, Cabinet Merlin, 2008, p.119

3 Programme de Mitigation des Inondations de Thiaroye, Dossier Diagnostic, Urbanistes Sans Frontières International, 2009

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La remontée de la nappe Thiaroye

Depuis 1995, la stratégie du secteur eau (PSE4 – PELT5 – PEPAM6) a visé une amélioration de la qualité et de la disponibilité des ressources en eau. C’est pourquoi les études d’impact environnemental7 ont identifié que la nappe phréatique de Thiaroye, utilisée pour la distribution d’eau potable, deviendrait progressivement inutilisable en l’absence de réseaux d’assainissement urbain.

Comme stratégie provisoire, les documents de la Banque Mondiale8 recommandent une dilution de l’eau de la nappe de Thiaroye avant distribution pour respecter les seuils de potabilité. Cette stratégie, encore en vigueur aujourd’hui, connaît le dilemme suivant : ‘continuer à utiliser cette eau, c’est réduire la qualité de l’eau potable distribuée, arrêter d’utiliser cette eau c’est inonder 300'000 personnes’.

La lettre de politique sectorielle de 1995 mentionne, en effet, qu’il est « indispensable de continuer à déprimer la nappe de Thiaroye au profit des maraîchers, pour maintenir sa surface phréatique à un niveau inférieur aux cotes les plus basses du terrain naturel »9 car un arrêt des pompages conduirait à une remontée de la nappe inondant progressivement les populations installées dans ces zones asséchées depuis 1960.

Face à la pollution causée par l’absence d’assainissement urbain, le Projet Eau à Long Terme5 a remplacé l’eau de Thiaroye par des ressources acheminées depuis le lac de Guiers situé à 250km de Dakar. Ainsi, en l’absence d’assainissement collectif, l’ensemble des ressources en eau mobilisées recharge directement la nappe de Thiaroye qui reçoit l’ensemble des rejets de la zone.

Malgré l’étude d’impact10 conduite dans le cadre du PELT qui démontrait que l’arrêt des pompages n’était pas envisageable sans mesure compensatoire, les forages de Thiaroye ont été progressivement déconnectés passant de 10'000 m3/j en 1987 à 4’725 m3/j en 200911. Cette déconnexion était préconisée dans la lettre de politique sectorielle de 200112. Les conséquences ont été fidèles à la modélisation effectuée13 : l’eau est remontée de près de 2.5m dans les quartiers les plus bas et plusieurs centaines de milliers de personnes, soit ont perdu leurs maisons, soit se retrouvent chaque année dans des situations dramatiques lors des pluies.

4 Water Sector Project, World Bank, 1995 5 Long Term Water Sector Project, World Bank, 2001 6 Water And Sanitation Millennium Project, World Bank, 2010 7 Third Water Project, Environmental Impact Study, SETUDE, 1995, p.34 8 Water Sector Project, Staff Apraisal Report, Environmental Assessment and Mitigation Plan, 1995, Annex 7-2 9 "L'arrivée à la région de Dakar de l'eau de la 'solution à long terme' entraînera certainement la suppression des pompages de Thiaroye. Cependant, si les pompages sont arrêtés, on assistera à une remontée de la nappe qui pourrait attendre un niveau ruinant les nombreuses maisons construites dans les zones de bas-fonds. Il est donc indispensable de continuer à déprimer la nappe de Thiaroye au profit des maraîchers, pour maintenir sa surface phréatique à un niveau inférieur aux cotes les plus basses du terrain naturel." Water Sector Project, Staff Apraisal Report, 1995, Annex 8 page 11 10 « Au regard de ces résultats, l’arrêt des forages de Thiaroye ne paraît pas envisageable sans mesure compensatoire, en raison des dommages importants occasionnés à des quartiers entiers » Long Term Water Project, Etude d'impact de l'arrêt des forages de Thiaroye, SONES, ANTEA, 2004, pp.19-20 11 Mobilisation de Ressources en Eau Alternatives pour l’Irrigation dans la Région de Dakar, Etude d'Impact Environnemental, Annexe 4 : Descriptif des zones de captage, SONES, Cabinet Merlin, p.64 12 « le Gouvemement appliquera la politique suivante: Déconnexion progressive des forages de Dakar dont essentiellement les forages de Thiaroye, dès que la nouvelle eau sera disponible et sous réserve des conclusions d'une étude technico-economique à mener et qui devra également vérifier l'impact de l'arrêt de ces forages sur la remontée de la nappe dans la zone de Pikine; », Water Sector Project, Staff Apraisal Report, 1995, Annex 11 ‘Lettre de politique sectorielle de l’Hydraulique Urbaine et de l’Assainissement’, p.77 13 « L’impact cumulé de l’arrêt des pompages et de l’augmentation des rejets aura pour conséquence de surélever le niveau piézométrique de 0.5 m à 2.5 m en fonction de la zone considérée », Long Term Water Project, Etude d'impact de l'arrêt des forages de Thiaroye, SONES, ANTEA, 2004, pp.19-20

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La réponse des populations

Depuis plus d’une décennie, les populations reconstruisent chaque année leurs maisons. Pour faire face à la remontée de la nappe de 15 cm en moyenne par année, les habitants ont remblayé des quartiers entiers en déversant sur plusieurs centaines d’hectares des camions de sable, de gravats et de déchets. Il est fréquent que les populations les plus démunies aient acheté des ordures ménagères pour les déverser dans leurs maisons. Puis, par un remblai progressif, qu’elles aient finalement enterré tout un étage (3 mètres) pour ensuite reconstruire au dessus.

En période de pluie, l’eau ne s’infiltrer plus dans le sol qui est saturé. Le niveau d’eau remonte et l’ensemble des systèmes d’assainissement déborde pour inonder les rues d’eaux polluées durant plusieurs mois. Au delà des événements fortement médiatisés de 2005 et 2009 qui ne démontrent pas de pluviométrie excessive14, c’est, pour les 300'000 personnes touchées, la dégradation silencieuse du cadre de vie et son impact tant sanitaire qu’économique qui est en question.

Seule une visite de terrain dans les zones sinistrées permet de comprendre la réalité de la résilience des populations face à la remontée de la nappe.

La reprise des forages de Thiaroye

La mesure compensatoire proposée dès 1995 et étudiée en avant-projet sommaire en 2004 propose la réutilisation de l’eau de la nappe chargée en nitrates pour l’irrigation agricole péri-urbaine. Ce projet, étudié en détail en 2008 (APD Cabinet Merlin), a démontré la pertinence d’une synergie urbaine-agricole pour les différents secteurs :

- urbain : réduction de la vulnérabilité des populations et des impacts sociaux des inondations (reconstruction, sanitaire, programmes de relogement)

- hydraulique : économie de la subvention de 300FCFA/m3 attribuée aux agriculteurs pour utiliser l’eau potable du lac de Guiers. Amélioration de la qualité (par déconnection de Thiaroye) et augmentation de la quantité (par déconnection agricole) d’eau potable distribuée.

- agricole : augmentation des ressources en eau disponibles et économie d’engrais.

Pour être durable, ce projet dépend :

- d’une gestion de la pollution de la nappe de Thiaroye à long terme (par un assainissement urbain)

- du maintien des exploitations maraîchères (par protection foncière et pédologique) - d’une restructuration urbaine des zones sinistrées (mitigation du risque résiduel) - d’un monitoring de la nappe phréatique en fonction des différents projets (drainage,

pompage, assainissement) face au risque de surexploitation.

Ce projet crée une adéquation de l’offre (eaux urbaines) et de la demande (irrigation). Cette synergie urbaine-agricole doit être pensée en tant que telle (écologie industrielle). Sa pertinence ne peut aucunement être analysée sous le seul angle de la volonté de payer des agriculteurs mais doit être intégrée dans une stratégie multisectorielle à l’échelle territoriale.

14 663 mm sur l’épisode de 2005 (ANAMS, Station Dakar Yoff) pour une moyenne de 574 mm avant 1968 (Dasylva, CNRS, 2002)

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Le blocage institutionnel

La stratégie de réutilisation des forages de Thiaroye pour l’agriculture a été préconisée dans le cadre du PSE4 en 1995. Les études d’avant-projet sommaire ont été conduites dans le cadre du PELT5 en 2001. Le PELT5 clôturé, ce projet a été transféré à la SONES qui en a assumé les études d’avant-projet détaillé sur fond propre en 2008. La gestion de l’exploitation du projet a été transférée au PDMAS15 qui en a délégué la réalisation à la SONES. Actuellement, le projet est sous la double responsabilité du Ministre de l’agriculture et du Ministre de l’urbanisme.

L’implémentation de la phase1 a débuté en 2011 par un financement de l’ACDI dans le cadre du PDMAS qui prend en charge le volet agricole. Cependant, le raccord urbain (phase 2 : estimée à cinq milliards FCFA) est actuellement en attente de financement. Son inexécution compromet toute résolution du problème des inondations à court terme.

Malgré le travail de lobbying des ONG et des populations qui ont présenté la problématique au Chef de l’Etat16, et malgré le Conseil des Ministres du 11 mai 201117 au cours duquel le Président Abdoulaye Wade a instruit les Ministres en charge de l’Agriculture et de l’Hydraulique, aucun financement n’a été mobilisé pour la réalisation de la deuxième phase du projet de reprise des forages de Thiaroye (5mia. FCFA). Actuellement les maraîchers reçoivent donc toujours de l’eau potable à des coûts prohibitifs et les habitants de la banlieue boivent toujours une eau chargée en nitrates diluée. La nappe continue à remonter et a communauté internationale mobilise en vain des sommes importantes dans le cadre de stratégies d’urgence.

Au vu des impacts majeurs énumérés sur les secteurs urbains, hydrauliques et agricoles et en regard des importants moyens investis face aux inondations, tant par les populations, la société civile, les municipalités que par l’Etat, il paraît aujourd’hui invraisemblable que le montant en question soit difficile à mobiliser.

Au vu des économies de près de 2 milliards FCFA/an de subventions agricoles que la réalisation du projet représenterait pour la SONES18, il semble qu’un prêt puisse être considéré. Finalement le coût du recasement des 300'000 habitants inondées en périphérie de la ville est vraisemblablement supérieur à celui du projet19. Il semble donc clair que la rentabilité du projet doit être évaluée par d’autres paramètres que la seule volonté de payer des agriculteurs.

15 Agricultural Markets and Agribusiness Development Project, The World Bank, 2006 16 Audience du 4 août 2011 accordée à urbaMonde (anciennement Urbanistes Sans Frontières international) 17 « Le Chef de l’Etat a instruit les Ministres en charge de l’Agriculture et de l’Hydraulique de réactiver les forages de Thiaroye, dont le redémarrage va, d’une part, contribuer considérablement à la réduction de la facture d’eau utilisée par les maraîchers et, d’autre part, permettre de stabiliser la nappe phréatique. » République du Sénégal, Procès-verbal du Conseil des Ministres du 11 mai 2011 18 L’irrigation agricole se base aujourd’hui sur une utilisation de l’eau potable largement subventionnée 300FCA/m3. Mobilisation de Ressources en Eau Alternatives pour l’irrigation dans la Region de Dakar, Avant Projet Détaillé, Schéma Institutionnel, SONES, Cabinet Merlin, 2008, p.27

19 Pour mémoire le budget initial du projet ‘Plan Jaxaay’ était annoncé à 52 milliards FCFA

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Des projets interdépendants

Le séminaire conduit au Conseil Régional de Dakar du 16 au 18 novembre 201120, réunissant l’ensemble des acteurs concernés, a permis d’identifier l’interdépendance des projets suivants :

- Les projets sectoriels eau (PSE4 - PELT5 - PEPAM6) sont à la source de la problématique par leur impact sur la recharge de la nappe de Thiaroye.

- Le plan directeur d’assainissement21 (ONAS) doit être exécuté parallèlement à la reprise des forages de Thiaroye car cette stratégie, pour être durable, dépend d’une maîtrise à long terme de la pollution de la nappe.

- La restructuration urbaine de Pikine Irrégulier Sud liée au projet autoroutier qui prévoit une mise hors eau de la banlieue Sud ne pourra être réalisée sans un rabattement de la nappe22 par la reprise des forages de Thiaroye.

- Le plan directeur de drainage visant à écrêter le niveau de la nappe phréatique par une stratégie de drainage est directement lié à la reprise des forages de Thiaroye, projet qualifié de ‘vital’ par les documents de la Banque Mondiale23.

- Le projet de développement des marchés agricoles sénégalais (PDMAS) est bénéficiaire des infrastructures d’irrigation et est chargé de la mise en œuvre du programme de reprise des forages de Thiaroye.24

- Le projet de restructuration urbaine de la banlieue Nord de Pikine et Guédiawaye, dépend nécessairement d’une maitrise à long terme du niveau de la nappe pour permettre l’aménagement urbain.

Tous ces projets dépendent ou sont nécessairement liés à la reprise des forages de Thiaroye dont l’inexécution constitue un point de blocage majeur.

20 ‘Quelles Synergies face aux Inondations dans la Région de Dakar ?’, 16-18 novembre 2011

21 Plan Directeur D’Assainissement Liquide de Dakar 2025, ONAS, Banque Européenne d’Investissement

22 Dakar Diamniadio Toll Highway Project, Elaboration d’un Plan de Restructuration des Quartiers de Pikine-Sud Traverses par L’autoroute Dakar-Diamniadio, Assainissement Des Eaux Pluviales et des Eaux Usées, H20 – Urbaplan, 2006, p.104 23 PROGEP, Mission d’identification et de préparation, Composante B, World Bank, 2010, p.9

24 Mobilisation de Ressources en Eau Alternatives pour l’irrigation dans la Region de Dakar, Avant Projet Détaillé, Schéma Institutionnel, SONES, Cabinet Merlin, 2008

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Conclusion

En conclusion, les populations inondées de la banlieue de Dakar, le CADDTK, les ONGs urbaMonde, urbaSenegal, Enda 3D et l’IAGU, formulent les demandes suivantes :

- la mobilisation immédiate des montants nécessaires25 à l’exécution de la phase 2 du projet de reprise des forages de Thiaroye ainsi qu’une procédure accélérée de passation des marchés permettant l’exécution rapide des travaux de cette composante.

- La restructuration urbaine des zones sinistrées de Pikine Irrégulier Nord et Guédiawaye.

- La réalisation d’un projet d’assainissement semi-collectif dans la zone de captage de la nappe de Thiaroye lié à la restructuration urbaine.

- L’élaboration d’une stratégie de gestion intégrée de la nappe phréatique permettant le monitoring de son niveau à long terme lié aux impacts des différents projets (PROGEP26, PDA, PDMAS, PELT).

- La protection des zones agricoles péri-urbaines sensibles tant sur l’aspect hydraulique que foncier.

Nous invitons la Banque Mondiale à prioriser les approches à long terme plutôt que les stratégies d’urgence qui depuis plus d’une décennie sont appliquées dans la banlieue de Dakar sans succès. Nous invitons la Banque Mondiale a élaborer un projet multisectoriel autour de la synergie urbaine-agricole développée, comprenant les composantes susmentionnées : (A1) gestion de la nappe de Thiaroye à long terme ; (A2) irrigation agricole et protection foncière ; (B1) restructuration urbaine des zones inondées ; (B2) assainissement liquide et solide urbain (la composante eaux pluviales étant déjà intégrées au PROGEP). Ceci afin d’apporter une réponse globale à la problématique. En cela nous invitons la Banque Mondiale à se baser sur les projets déjà élaborés par les acteurs de la société civile.

Nous invitons finalement la Banque Mondiale à abandonner l’approche sectorielle dont les conséquences désastreuses peuvent être mesurées aujourd’hui (impact de l’assainissement sur le secteur eau, impact du secteur eau sur l’urbain, impact du secteur urbain sur l’agriculture), et à développer une approche territoriale dans laquelle les impacts entre les différents secteurs seront positifs et contribueront à aménager durablement les territoires pour les populations les plus vulnérables.

En espérant que cette lettre sera suivie d’une réponse rapide de la part des responsables concernés, nous invitons la Banque Mondiale à prendre contact avec le comité signataire.

Veuillez agréer, Madame la Directrice des Opérations, l’expression de notre plus haute considération.

25 « Total Phase 2 : 5’011 mio. FCFA », ‘Mobilisation de ressources en eau alternatives pour l’irrigation dans la région de Dakar’, Etude d’avant-projet détaillé, SONES, Cabinet Merlin, 2008, p.119

26 Stormwater and Climate Change Adaptation Project, The World Bank, 2012

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Signataires :

Papa Ameth KEITA urbaSenegal Président

Cyril ROYEZ urbaMonde Président

Oumar CISSE Institut Africain de Gestion Urbaine Directeur

Moundiaye CISSE Enda 3D Secrétaire Exécutif

Djibril DIALLO Collectif des Associations pour le Développement de Djiddah Thiaroye Kao (CADDTK) Président

Destinataires :

- Mme Makhtar Diop, Banque mondiale, Vice-Président, Région Afrique - Mme Rachel Kyte, Banque mondiale, Vice-Présidente, Développement durable - M. Vera Songwe, Directeur des opérations de la Banque mondiale pour le Sénégal - Mme Abha Joshi-Ghani, Sector Manager, Urban Development and Local Government Unit,

Sustainable Development - M. Francis Ghesquiere, GFDRR manager - M. Peter Lallas, Panel d’inspection de la Banque mondiale, Secrétaire exécutif

Copie :

- Bintou DJIBO, Représentante Résidente du PNUD, Sénégal - Ivan Roberts, Directeur Programme ACDI Sénégal - Christophe Lucet, Banque Européenne d’Investissement, Dakar - Denis Castaing, Directeur AFD, Dakar - Leila Mokadem, Banque Africaine de Développement, Dakar - Hisatoshi Okubo, Représentant Résident JICA, Dakar - Andreas Fikre-Mariam, KfW , Dakar

Pour traiter : M. Papa Ameth Keita urbaSenegal 00221/77.505.19.93 [email protected]

Page 8: Inondations de Dakar : Lettres ouvertes à la Banque Mondiale

.,--. .

~~

ANQUE MONDIALEBureau régional (Sénégal, Cap-Vert, Gambie, Guinée-Bissau, Mauritanie)

le 26 juillet 2012

MessieursLes signataires de la lettre du 7 juin 2012Dakar, Sénégal

Objel " Réponse il voIre [cllre du 7juin 2012 intitulée « Des solutions durables face à['inondation de la banlieue de Dakar» adressée à la Banque mondiale

Messieurs,

Nous avons l'honneur d'accuser réception de votre correspondance en date du 7juin 2012, et vous en remercions. Dans ce cadre, nous voudrions vous informer que leGouvernement du Sénégal est en phase, avec l'appui de la Banque mondiale, de mettre enœuvre un Projet de Gestion des Eaux Pluviales (PROGEP) dont les objectifs sontl'amélioration du drainage des eaux pluviales et la prévention des inondations dans leszones péri urbaines de Dakar (Pikine et Guédiawaye) au profit des populations locales.

Nous souhaiterions également porter à votre connaissance que le PROGEP aprévu, en plus des questions de drainage et d'intégration de la dimension risqueinondation dans l'urbanisation, une étude complémentaire sur l'exploitation de la nappede Thiaroye. Comme vous l'avez souligné dans votre correspondance, la Banquemondiale avait accompagné en son temps le Gouvernement dans l'étude de cette nappcde Thiaroye. Cependant, les experts du secteur de l'eau et de l'agriculture consultés, ycompris les experts nationaux, avaient recommandé que ces études soient approfondiesnotamment dans lems aspects techniques et économiques.

Les résultats des études complémentaires nous éclaireront plus sur lesopportunités d'exploitation de cette nappe et des possibilités de financement par lesbailleurs de fonds, y compris la Banque mondiale. Il reviendrait donc au Gouvernementdu Sénégal de décider de la suite à réserver à la reprise des forages de Thiaroye et deréunir les bailleurs autour de cette questïon.

Nous vous prions de croire, Messieurs, à l'assurance

" -\i ''''''.......''' ,.." .....C-J

Vera Son~"'e

Directeur des OpérationSénégal, Cap-Vert, Gambie, Guinée-BisS\lIbtft1rrtt~

Région Afrique

Corniche Ouest X David Diop -Dakar, Sén6gal - Tél. : (221) 33 85941 00 - Fax' (221) 33 8594283E-mail: worldgaIlk-scncgall71i\vorJdbank,org - Site web: http://\V'MVworldbank.org/sn

Page 9: Inondations de Dakar : Lettres ouvertes à la Banque Mondiale

....! • 4

- 2 - le 26 juillet 2012

Ampliations:

Madame Bintou Djibo, Représentante Résidente du PNUD, SénégalMonsieur Ivan Roberts, Directeur Programme ACDI SénégalMonsieur Christophe Lucet, Banque Européenne d' Investissement, Sénégal

Monsieur Denis Castaing, Directeur AFD, SénégalMadame Leila Mokadem, Banque Africaine de Développement, SénégalMonsieur Hisatoshi ükubo, Représentant Résident JICA, SénégalMonsieur Andreas Fikre-Mariam, KiVI, Sénégal

Page 10: Inondations de Dakar : Lettres ouvertes à la Banque Mondiale

Mme Vera SONGWE, Directrice des Opération

Banque Mondiale Corniche ouest x Léon Gontran Damas

BP 3296 - Dakar

Dakar, le 20 décembre 2012

Objet : Réponse à votre lettre du 26 juillet 2012 relative aux inondations de la banlieue de Dakar.

Madame la Directrice des Opérations,

Nous vous remercions pour votre réponse du 26 juillet 2012. Nous vous félicitons pour l’approbation du PROGEP en date du 10 mai. Ce projet apportera une contribution essentielle au problème du drainage de l’ensemble de la Région de Dakar et contribuera également à rabattre la nappe de Thiaroye.

Nous sommes conscients que la gestion des inondations de la zone de Thiaroye est effectivement de la responsabilité du Gouvernement Sénégalais. A ce titre, les déclarations du Ministre de l’Assainissement laissent présager une évolution positive :

« M. Guèye a par ailleurs annoncé que le gouvernement veut ‘’mobiliser’’ 10 milliards de francs CFA destinés à la réparation de quelques forages en panne (…) ‘Et six milliards serviront à la rénovation des forages de Thiaroye (banlieue de Dakar) et à l’alimentation en eau de la zone des Niayes’. » APS juin 2012. Nous vous serions reconnaissants de nous transmettre l’étude complémentaire sur l’exploitation de la nappe de Thiaroye mentionnée dans votre lettre du 26 juillet. Cette étude viendra judicieusement compléter les travaux déjà réalisées à ce sujet par la Banque Mondiale et la SONES dont notamment :

- Etude d’impact de l’arrêt des forages de Thiaroye sur les zones basses, Modélisation des scénarii d’arrêt - Evaluation des impacts hydrogéologiques - Avant Projet Sommaire, ANTEA, janvier 2004.

- Mobilisation de ressources en eau alternatives pour l’irrigation dans la Region de Dakar, Avant Projet Détaillé, Cabinet Merlin, février 2008.

- Mobilisation de ressources en eau alternatives pour l’irrigation dans la Region de Dakar, Etude d’impact Environnemental, Cabinet Merlin, février 2008.

- Mobilisation de ressources en eau alternatives pour l’irrigation dans la Region de Dakar, Schéma Institutionnel, Cabinet Merlin, février 2008.

Cependant, à l’heure actuelle, nous nous excusons de ne pouvoir considérer votre réponse du 26 juillet 2012 comme suffisante. Ceci pour les raisons suivantes :

- Les projets sectoriels eaux (PSE – PELT – PEPAM) ont été financés et sont toujours financés par la Banque Mondiale.

- Ces projets, malgré des indicateurs sectoriels excellents ont eu pour conséquence indirecte l’inondation de centaines de milliers d’habitants de la zone de Thiaroye.

- La perte de l’habitat pour ces familles est avérée : perte des maisons, perte des biens, perte des sources de revenus, déplacement, etc. Ceci est probablement en contradiction avec la Politique Opérationelle 4.12 de la Banque Mondiale.

- Le PROGEP n’est pas conçu comme une réponse à la perte de l’habitat sus-mentionné.

Page 11: Inondations de Dakar : Lettres ouvertes à la Banque Mondiale

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Si la cause des inondations devait être uniquement d’origine ‘naturelle’ et non anthropique, s’il est démontré que les projets sectoriels eaux sont indépendants de l’inondation de la zone de Thiaroye, nous vous prierions de nous excuser pour le désagrément causé par cette démarche. Cependant, nous soulignons encore une fois les extraits des documents de la Banque Mondiale à ce sujet qui tendent à montrer le contraire :

« le Gouvemement appliquera la politique suivante: Déconnexion progressive des forages de Dakar dont essentiellement les forages de Thiaroye, dès que la nouvelle eau sera disponible et sous réserve des conclusions d'une étude technico-economique à mener et qui devra également vérifier l'impact de l'arrêt de ces forages sur la remontée de la nappe dans la zone de Pikine; », Water Sector Project, Staff Apraisal Report, 1995, Annex 11 ‘Lettre de politique sectorielle de l’Hydraulique Urbaine et de l’Assainissement’, p.77 « L'arrivée à la région de Dakar de l'eau de la 'solution à long terme' entraînera certainement la suppression des pompages de Thiaroye. Cependant, si les pompages sont arrêtés, on assistera à une remontée de la nappe qui pourrait attendre un niveau ruinant les nombreuses maisons construites dans les zones de bas-fonds. Il est donc indispensable de continuer à déprimer la nappe de Thiaroye au profit des maraîchers, pour maintenir sa surface phréatique à un niveau inférieur aux cotes les plus basses du terrain naturel. » Water Sector Project, Staff Apraisal Report, 1995, Annex 8 page 11

« L’impact cumulé de l’arrêt des pompages et de l’augmentation des rejets aura pour conséquence de surélever le niveau piézométrique de 0.5 m à 2.5 m en fonction de la zone considérée (…) Au regard de ces résultats, l’arrêt des forages de Thiaroye ne paraît pas envisageable sans mesure compensatoire, en raison des dommages importants occasionnés à des quartiers entiers » Long Term Water Project, Etude d'impact de l'arrêt des forages de Thiaroye, SONES, ANTEA, 2004, pp.19-20

Nous sommes conscients de la qualité du travail effectué par la Banque Mondiale à Dakar, sa volonté d’améliorer son impact social et d’évaluer ses projets sur le long terme. C’est pourquoi nous vous demandons de mandater une évaluation indépendante de l’impact des Projets Sectoriels Eau sur les populations de la zone de Thiaroye et de restituer ces conclusions en présence de l’ensemble des acteurs concernés.

Nous remercions la Banque pour les efforts qu’elle entreprend pour soulager les populations inondées, notamment à travers le PROGEP. Cependant, nous soulignons que si le drainage de la zone est une condition nécessaire, cette mesure n’est en rien suffisante face à la dégradation du bâti de la zone de Pikine Irrégulier Nord et Guédiawaye qui devrait être restructurée et régularisée.

Nous souhaiterions donc, d’une part clarifier le problème de la Nappe de Thiaroye et d’autre part, présenter à la Banque Mondiale les stratégies d’aménagement développées par les populations touchées dans la zone de Thiaroye.

A cette fin nous souhaiterions vous rencontrer avant le 20 janvier 2013, dans la mesure de vos disponibilités.

Nous vous prions de croire, Madame, à l’assurance de notre haute considération.

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Signataires :

Papa Ameth KEITA urbaSenegal Président

Cyril ROYEZ urbaMonde Président

Djibril DIALLO Collectif des Associations pour le Développement de Djiddah Thiaroye Kao (CADDTK) Président

Mactar DIENG GIE pour la Restructuration et Régularisation Foncière de DTK, zone A Président

Abdoulaye DIALLO GIE pour la Restructuration et Régularisation Foncière de DTK, zone B Président

Ndame NDIAYE GIE pour la Restructuration et Régularisation Foncière de DTK, zone C Président

Contact :

M. Papa Ameth Keita urbaSenegal Villa 14B, rue C, PointE (face Police PointE) 00221/77.505.19.93 [email protected]

Copie:

- Mme Makhtar Diop, Banque mondiale, Vice-Président, Région Afrique - Mme Rachel Kyte, Banque mondiale, Vice-Présidente, Développement durable - M. Vera Songwe, Directeur des opérations de la Banque mondiale pour le Sénégal - Mme Abha Joshi-Ghani, Sector Manager, Urban Development and Local

Government Unit, Sustainable Development - M. Francis Ghesquiere, GFDRR manager - M. Peter Lallas, Panel d’inspection de la Banque mondiale, Secrétaire exécutif - Bintou DJIBO, Représentante Résidente du PNUD, Sénégal - Ivan Roberts, Directeur Programme ACDI Sénégal - Christophe Lucet, Banque Européenne d’Investissement, Dakar - Denis Castaing, Directeur AFD, Dakar - Leila Mokadem, Banque Africaine de Développement, Dakar - Hisatoshi Okubo, Représentant Résident JICA, Dakar - Andreas Fikre-Mariam, KfW, Dakar

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